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Alfred de Musset
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Alfred de Musset

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LanguageFrançais
Release dateNov 27, 2013
Alfred de Musset
Author

Arvède Barine

Arvède Barine, née à Paris2 le 17 novembre 1840 et morte à Paris 17e le 14 novembre 19083, est une historienne et critique littéraire française. Elle publie des ouvrages historiques et des biographies littéraires, dont certains font date et sont traduits en anglais, notamment ses études sur la Grande Mademoiselle et sur Alfred de Musset et George Sand. Elle écrit des articles d'histoire et de critique littéraire, contribue à de nombreuses revues, dont la Revue bleue, la Revue des deux Mondes, la Revue politique et littéraire, la Nouvelle Revue, le Journal des débats, le Figaro et la Revue de Paris. Elle fait partie du premier jury du prix Femina en 1905. Proche pendant longtemps de la pédagogue Marie Souvestre, leur amitié ne résiste pas à l'affaire Dreyfus, Arvède Barine étant du parti des anti-dreyfusards et en opposition totale avec les convictions de Marie. Publications L'oeuvre De Jésus-Ouvrier. Les Cercles catholiques, origines, organisation, action (1879) Portraits de femmes. Madame Carlyle. George Eliot. Un couvent de femmes en Italie en xvie siècle. Psychologie d'une sainte. Sophie Kovalewski (1887) Essais et Fantaisies (1888) Princesses et grandes dames. Marie Mancini. La Reine Christine. Une princesse arabe. La duchesse du Maine. La margrave de Bayreuth (1890) Texte en ligne [archive] Alfred de Musset (1891) Texte en ligne [archive] Bernardin de Saint-Pierre (1891) Bourgeois et gens de peu. Un juif polonais (Salomon Maimon). Bourgeois d'autrefois (la famille Goethe). Une âme simple (mémoires d'un illettré). Un évadé de la civilisation (John Nelson). Les Gueux d'Espagne (Lazarillo de Tormes) (1894) Texte en ligne [archive] Névrosés : Hoffman, Quincey, Edgar Poe, G. de Nerval (1898) Texte en ligne [archive] Saint François d'Assise et la légende des trois compagnons (1901) La Jeunesse de la Grande Mademoiselle (1627-1652) (1901) Texte en ligne [archive] Louis XIV et la Grande Mademoiselle (1652-1693) (1905) Madame, mère du Régent, 1652-1722, ouvrage posthume complété par Louis Batiffol (1909)

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    Alfred de Musset - Arvède Barine

    The Project Gutenberg EBook of Alfred de Musset, by Arvède Barine

    This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with

    almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or

    re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included

    with this eBook or online at www.gutenberg.net

    Title: Alfred de Musset

    Author: Arvède Barine

    Release Date: February 27, 2009 [EBook #28210]

    Language: French

    *** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK ALFRED DE MUSSET ***

    Produced by Pierre Lacaze and the Online Distributed

    Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This file was

    produced from images generously made available by the

    Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at

    http://gallica.bnf.fr)

    ALFRED DE MUSSET

    LES GRANDS ÉCRIVAINS FRANÇAIS


    EN VENTE:

    VICTOR COUSIN, par M. Jules Simon, de l'Académie française.

    MADAME DE SÉVIGNÉ, par M. Gaston Boissier, de l'Académie française.

    MONTESQUIEU, par M. Albert Sorel, de l'Institut.

    GEORGE SAND, par M. E. Caro, de l'Académie française.

    TURGOT, par M. Léon Say, député, de l'Académie française.

    THIERS, par M. P. de Rémusat, sénateur, de l'Institut.

    D'ALEMBERT, par M. Joseph Bertrand, de l'Académie française, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences.

    VAUVENARGUES, par M. Maurice Paléologue.

    MADAME DE STAEL, par M. Albert Sorel, de l'Institut.

    THÉOPHILE GAUTIER, par M. Maxime Du Camp, de l'Académie française.

    BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, par M. Arvède Barine.

    MADAME DE LA FAYETTE, par le comte d'Haussonville, de l'Académie française.

    MIRABEAU, par M. Edmond Rousse, de l'Académie française.

    RUTEBEUF, par M. Clédat, professeur de Faculté.

    STENDHAL, par M. Édouard Rod.

    ALFRED DE VIGNY, par M. Maurice Paléologue.

    BOILEAU, par M. G. Lanson.

    CHATEAUBRIAND, par M. de Lescure.

    FÉNELON, par M. Paul Janet, de l'Institut.

    SAINT-SIMON, par M. Gaston Boissier, de l'Académie française.

    RABELAIS, par M. René Millet.

    J.-J. ROUSSEAU, par M. Arthur Chuquet.

    LESAGE, par M. Eugène Lintilhac.

    DESCARTES, par M. Alfred Fouillée.

    Chaque volume, avec un portrait en héliogravure... 2 fr.


    LES GRANDS ÉCRIVAINS FRANÇAIS


    ALFRED DE MUSSET

    PAR

    ARVÈDE BARINE

    PARIS

    LIBRAIRIE HACHETTE ET Cie

    79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79

    1893

    Droits de traduction et de reproduction réservés.


    INTRODUCTION

    J'adresse ici mes remercîments à toutes les personnes qui ont bien voulu m'ouvrir leurs archives ou leurs collections, m'aider de leurs souvenirs ou de leurs conseils, et me donner ainsi la possibilité d'écrire ce petit livre. M. Alexandre Dumas a pris la peine de me fournir des indications qui m'ont été infiniment précieuses. Madame Maurice Sand m'a communiqué, avec une confiance dont je lui suis profondément reconnaissant, un grand nombre de lettres inédites tirées des archives de Nohant. M. le Vicomte de Spœlberch de Lovenjoul, dont l'obligeance et la bonne grâce sont connues de tous les chercheurs, m'a admis à profiter des trésors de sa collection; je lui dois d'avoir pu consulter le Journal manuscrit de Sainte-Beuve et de nombreuses correspondances inédites. M. Maurice Clouard, qui sait tout ce qu'on peut savoir sur Musset, m'a prêté libéralement le concours de son inépuisable érudition et de sa riche bibliothèque. M. Taigny a mis gracieusement à ma disposition des lettres autographes et en grande partie inédites de Musset. D'autres m'ont fourni des renseignements qui ne sont point dans les livres ni dans les manuscrits. J'acquitte ici envers tous ma dette de gratitude.

    A. B.


    CHAPITRE I

    LES ORIGINES—L'ENFANCE

    Chaque génération chante pour elle-même et dans son langage. Elle a ses poètes, qui traduisent ses sentiments et ses aspirations. Puis viennent d'autres hommes, avec d'autres idées et d'autres passions, toutes contraires, le plus souvent, à celles de leurs aînés. Ces nouveaux venus demeurent insensibles à ce qui paraissait la veille si émouvant. Leurs préoccupations ne sont plus les mêmes, ni leurs yeux, ni leurs oreilles, ni leurs âmes. S'ils goûtent d'aventure les poètes de la génération précédente, c'est à la réflexion, après une étude, comme s'il s'agissait d'écrivains d'un temps lointain. Encore est-ce à condition de n'avoir plus rien à redouter de leur influence; sinon ils les prennent en aversion, parce qu'il y a chez les jeunes gens un besoin inné, et peut-être salutaire, de penser et de sentir autrement qu'on ne l'avait fait avant eux; ce n'est qu'à cette condition qu'ils prennent conscience d'eux-mêmes.

    Musset commence à être un de ces poètes de la veille, que les têtes grisonnantes restent seules à comprendre sans effort. Aucun autre, dans notre siècle, n'avait été aussi aimé. Aucun n'avait éveillé dans les cœurs autant de ces longs échos qui ne naissent que d'un accord intime avec le lecteur, et qu'un simple plaisir d'art est impuissant à produire. Il n'en a pas moins subi la loi commune. Nos enfants ont déjà besoin qu'on leur explique pourquoi nous ne pouvons entendre un vers de lui, fût-ce le plus insignifiant, sans ressentir une émotion, triste ou joyeuse; pourquoi chacun de nos bonheurs, chacune de nos souffrances, fait remonter à notre mémoire une page de lui, une ligne, un mot qui nous console ou nous rit. Leur dire ces choses, c'est trahir le secret de nos rêves et de nos passions, c'est avouer combien nous étions romanesques et sentimentaux, et nous couvrir de ridicule aux yeux de nos fils, qui le sont si peu. Tel sera pourtant l'objet de ce petit livre, et tous les historiens à venir de Musset seront contraints d'en faire autant, quoi qu'il puisse leur en coûter. L'âme du poète des Nuits est reliée par des fils, si nombreux et si forts à l'âme des générations qui eurent vingt ans entre 1850 et 1870, qu'il serait vain d'essayer de les séparer. Qu'on en fasse un reproche à Musset, ou qu'on y voie au contraire son principal titre de gloire, il n'importe: parler de lui, c'est parler des multitudes qu'il avait subjuguées, pour leur bien ou pour leur mal.

    On ne saurait imaginer pour un enfant de génie un berceau plus heureux que celui d'Alfred de Musset. Il naquit à Paris, le 11 décembre 1810, dans une vieille famille où l'amour des lettres était de tradition et où tout le monde, de père en fils, avait de l'esprit. Sans remonter jusqu'à Colin de Musset, ménestrel de profession au XIIIe siècle, qui ne s'appelait peut-être que Colin Muset, un grand oncle du poète, le marquis de Musset, avait eu un vif succès, en 1778, avec un roman par lettres, «dicté par l'amour de la vertu», disait la préface, et portant ce titre assorti à la préface: Correspondance d'un jeune militaire, ou Mémoires de Luzigny et d'Hortense de Saint-Just. Ce vieux marquis, qui ne mourut qu'en 1839, représentait pour ses petits-neveux l'ancien régime, y compris les temps féodaux. Son château avait des parties moyen âge, aux embrasures profondes, aux planchers doubles, dissimulant trappe et cachette. Lui-même marchait le jarret tendu et les pointes en dehors, en homme qui avait porté la culotte courte. Il méprisait profondément les journaux, ne manquait jamais de se découvrir lorsqu'il rencontrait dans une «gazette» le nom d'un membre de la famille royale, et n'avait cependant pas complètement échappé à l'influence de Rousseau. Il lui arrivait d'écrire des phrases à la Jean-Jacques: «On n'est heureux qu'à la campagne, on n'est bien qu'à l'ombre de son figuier». D'une dévotion extrême, il avait fait sur ses vieux jours, en 1827, une satire contre les Jésuites, signée Thomas Simplicien. Les jeunes gens de la famille se trouvaient chez lui en pays de Cocagne, mais il ne comprenait rien au romantisme.

    Le père d'Alfred de Musset, M. de Musset-Pathay, beaucoup plus jeune que le marquis, n'en voulait pas comme lui à la Révolution, qui lui avait rendu le service de lui ôter son petit collet et lui avait donné son empereur. Il avait entremêlé dans son existence la guerre, la littérature et les fonctions publiques. La même diversité se retrouve dans ses écrits, où il y a un peu de tout: roman, histoire, récits de voyages, travaux d'érudition. Sa biographie de Rousseau, où il prend sa défense contre la coterie Grimm, est une œuvre patiente et sérieuse, et il avait d'autre part le goût et le talent des vers plaisants. Gai, spirituel, prompt à la riposte et mordant à l'occasion, c'était au demeurant le meilleur des hommes. Il fut un père aimable, trop indulgent, très XVIIIe siècle d'esprit. Ce dernier point est à retenir.—Pas plus que son oncle le marquis, M. de Musset-Pathay ne comprenait rien au romantisme.

    Il avait une sœur chanoinesse, ancienne pensionnaire de Saint-Cyr et confite en dévotion. Elle habitait à Vendôme, dans un faubourg, une petite maison moisie, où elle avait tourné tout doucement à l'aigre entre des chiens hargneux et des exercices de piété. Quelques lignes d'un de ses neveux[1] donnent à penser qu'elle n'était pas dépourvue, elle non plus, du don de repartie, et qu'elle était de taille à tenir tête à son frère.—Elle faisait peu de cas de la littérature; toutefois elle admettait une distinction entre la prose et les vers: la prose était besogne basse, à laisser aux manants; les vers étaient la dernière des hontes, une de ces humiliations dont les familles ne se relèvent pas.

    [1] De Paul de Musset, dans la Biographie d'Alfred de Musset. Ce volume est précieux par les renseignements qu'il contient sur la famille de Musset et sur la jeunesse du poète. On ne doit toutefois le consulter qu'avec une certaine défiance. Il s'y trouve partout des inexactitudes et des inadvertances, et, à partir d'un moment que nous indiquerons, ces inexactitudes sont volontaires, et calculées en vue de dérouter le lecteur.

    La lignée maternelle d'Alfred de Musset n'était pas moins savoureuse. Son aïeul Guyot-Desherbiers, qui avait été jadis de robe, et avait fréquenté les idéologues, avait l'imagination poétique, l'esprit jaillissant et gai. Il était sorti de ce mélange un Fantasio XVIIIe siècle, plus mousseux encore que celui que nous connaissons, et ne lui cédant en rien pour le pittoresque du langage, mais sans la note mélancolique et attendrie du héros de Musset. M. Guyot-Desherbiers ne songeait guère à s'apitoyer sur les peines des princesses de féerie; en revanche, il avait sauvé des têtes, et non toujours sans péril, pendant les convulsions qui suivirent le 9 Thermidor. Ses petits-fils purent jouir de sa verve intarissable; Fantasio devenu grand-père était resté Fantasio. Il mourut chargé de jours en 1828.—M. Guyot-Desherbiers faisait des vers à ses moments perdus.

    Son grand ouvrage fut un poème en plusieurs chants sur les Chats. Il faisait du chat un humanitaire, ami des pauvres et de leur maigre cuisine:

    C'est pour eux que son dos se gonfle,

    Pour eux, dans sa poitrine, ronfle

    La patenôtre du plaisir.

    Il se plaisait aux difficultés techniques, comme d'écrire sur trois rimes—et sans chevilles!—tout un chant de son poème, ou d'inventer des rythmes compliqués. Il avait deviné Théodore de Banville plutôt que Victor Hugo. Son influence manqua à son petit-fils quand celui-ci eut à défendre contre les siens, nourris dans le classique, les enjambements et les épithètes imprévues des Contes d'Espagne et d'Italie. Les Fantasio comprennent tant de choses.

    La grand'mère Guyot-Desherbiers était un échantillon remarquable de la bourgeoise française du siècle dernier. Elle avait infiniment de bon sens, et cela ne l'empêchait point d'être une fille spirituelle de Rousseau, passionnée comme Julie et Saint-Preux, et comme eux éloquente dans les heures d'émotion. Non point l'éloquence qui fait dire d'une femme qu'elle parle comme un livre, mais l'éloquence pathétique qui remue. Elle produisait alors une impression profonde sur les siens, habitués à la voir tranquille et grave. Mme de Musset-Pathay, sa fille aînée, tenait beaucoup d'elle.

    On voit que les origines intellectuelles de Musset sont faciles à démêler pour qui s'intéresse aux mystères de l'hérédité. Nous venons de trouver parmi ses ascendants plusieurs hommes d'esprit, pleins d'une verve joyeuse et plus ou moins poètes, et deux femmes d'une sensibilité vive, d'une éloquence naturelle et chaude. C'est à ces dernières que se rattachent les Nuits et toute la partie brûlante et passionnée de l'œuvre de Musset. Quant à sa tante la chanoinesse, elle a rempli le rôle de la fée Carabosse, qui ne pouvait manquer au baptême d'un Prince Charmant. Lorsque Musset s'accuse dans ses lettres d'être grognon, lorsqu'il écrit: «J'ai grogné tout mon saoul», ou bien: «Je commence même à m'ennuyer de grogner», c'est la chanoinesse qui fait des siennes; elle s'est vengée d'avoir un neveu poète en lui insufflant un peu—très peu—de sa mauvaise humeur.

    L'enfant en qui allait s'épanouir la race était un joli blondin caressant. Il existe un portrait de lui à trois ans, dans le goût troubadour, qui était de mode au temps de la reine Hortense. Le bambin est assis en chemise dans un site poétique, les pieds dans un ruisseau. Ses longues papillotes lui donnent un air de petite fille bien sage. Auprès de lui est une grande épée, qu'il avait demandée «pour se défendre contre les grenouilles». Un autre portrait le représente plus âgé de quelques années, mais gardant encore ses belles boucles blondes. Il a aussi conservé son expression placide et ingénue. Ce n'était pourtant pas faute de prendre au tragique les peines de l'existence, ou de jouir avec ardeur de ses joies. Il était déjà, au suprême degré, impressionnable, excitable, et même éloquent, s'il faut en croire son frère Paul. Celui-ci raconte qu'à peine hors des langes, le petit poète en herbe avait des «mouvements oratoires et des expressions pittoresques» pour peindre ses malheurs ou ses plaisirs d'enfant. Déjà aussi, il avait l'«impatience de jouir» et la «disposition à dévorer le temps» qui ne le quittèrent jamais. Un jour qu'on lui avait apporté des souliers rouges et que sa mère ne l'habillait pas assez vite à son gré, il s'écria en trépignant: «Dépêchez-vous donc, maman; mes souliers neufs seront vieux». Enfin, il avait déjà des palpitations de cœur et des suffocations.

    Il faut des mains intelligentes et légères pour manier ces organisations

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