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Entre II Mondes: Livre 2 : Le Passage
Entre II Mondes: Livre 2 : Le Passage
Entre II Mondes: Livre 2 : Le Passage
Ebook471 pages13 hours

Entre II Mondes: Livre 2 : Le Passage

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About this ebook

Alastar, entre la vie et la mort, est retrouvé par Gabriel, Ahawk et Moumbator, ses fidèles compagnons et frères de l’Ordre Sacré. Transportés en sécurité loin du temple, les uns et les autres guetteront un hypothétique réveil dans l’espoir de découvrir la vérité.
De son côté, Moïra continue de mener un semblant de vie normale aux côtés de ses proches et de Tristan à Hidden Hills où seule Nel, sa meilleure amie, manque à l’appel. Heureuse avec le jeune homme, elle se laisse emporter par des sentiments nouveaux et intenses qui les rapprochent encore un peu plus l’un de l’autre, jusqu’à les lier profondément. Seulement, Moïra sait en son for intérieur que sa situation dans le monde des Hommes est précaire. Le besoin de renouer avec ses véritables racines et de rencontrer ses parents biologiques se fait plus fort à chaque instant.
Inconsciente du véritable danger qui la menace, la jeune femme envisage de passer de l’autre côté pour obtenir des réponses.
Tandis que les sirènes de l’autre monde se font de plus en plus pressantes, les Ténèbres grondent en secret. Mais Samain approche à grands pas, ouvrant le passage...

« Le Passage » est le second volume de la trilogie « Entre II Mondes », dont le livre 3 est à paraître à l’automne 2014.

LanguageFrançais
Release dateDec 7, 2013
ISBN9782370110695
Entre II Mondes: Livre 2 : Le Passage

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    ENTRE II MONDES

    Livre 2 : Le passage

    D.LYGG

    Published by Éditions Hélène Jacob at Smashwords

    Copyright 2013 Éditions Hélène Jacob

    Smashwords Edition, License Notes

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    © Éditions Hélène Jacob, 2013. Collection Fantastique. Tous droits réservés.

    ISBN : 978-2-37011-069-5

    À la nouvelle génération, Adam, Éléanore et Romann…

    Je tiens également à remercier mon mari pour avoir géré le quotidien pendant mes longues séances d’écriture, ainsi que pour avoir ri et retenu son souffle lorsqu’il le fallait.

    Mes proches, pour les menaces reçues concernant l’avenir de tel ou tel personnage dans ce tome !

    Et enfin, les Éditions Hélène Jacob pour avoir permis aux deux premiers tomes de la saga Entre II Mondes de voir le jour…

    « La vérité à demi ne vaut rien, il la faut toujours entière. »

    Stefan Zweig

    Résumé du livre précédent

    Moïra est une adolescente de dix-huit ans, vivant avec ses grands-parents à Hidden Hills, petite ville de la province d’Alberta dans les Rocheuses canadiennes. À l’instar de tous les adolescents de son âge, elle est scolarisée au lycée de la ville, sort avec ses amis et connaît les problèmes liés au difficile apprentissage du passage à l’âge adulte, à ceci près qu’elle n’est pas comme les autres.

    Moïra découvre que sous les aspects d’une vie tranquille et ordinaire peuvent se cacher bien des secrets. C’est au travers de ses rêves et de sa relation naissante avec un jeune homme nommé Tristan qu’elle se sent troublée. Elle prend véritablement conscience de sa différence, lors de l’apparition d’étranges phénomènes liés à ses nouvelles capacités, qu’elle doit apprendre à maîtriser rapidement. Un challenge terrifiant pour quelqu’un de non préparé.

    Mais ses dons l’éloignent malgré elle de ceux qu’elle aime, ses grands-parents Rosy et Jo et sa meilleure amie Eleanor. Ils font également d’elle la proie d’êtres mal intentionnés, des darkanns, démons de l’enfer, ainsi que des elfes noirs, créatures venues d’un monde ancien oublié par les Hommes, et œuvrant pour le compte de leur puissant maître resté dans l’ombre.

    Heureusement, la providence place sur son chemin, en la personne d’Alastar, un allié redoutable et courageux appartenant à l’Ordre Sacré des Gardiens du Temple. Envoyé sur terre par Goren, son supérieur, il a pour mission de retrouver la trace d’une activité anormale dans le monde humain, ce qui le mène sur la trace de Moïra. Ce n’est qu’après l’attaque des darkanns au domicile de la jeune fille, qu’il découvre sa véritable identité.

    Alastar apprend alors la vérité à Moïra sur ses origines, à savoir qu’elle est le fruit d’un amour entre Breda, une fée supérieure de l’autre monde, et d’Aoden, un mortel appartenant au monde des Hommes. Un amour interdit par les nouvelles lois du monde féerique, depuis le conflit qui a fait trembler les deux mondes. Pour cette relation, ses parents ont été sévèrement punis par les Autorités Supérieures, les Dieux régissant les mondes. Toutefois Breda, sa mère, consciente du danger pour son enfant à naître, avait pris soin de dissimuler sa naissance, l’envoyant par la suite dans le monde des Hommes.

    Alastar, loyal envers Breda la blanche fée, fait le serment de protéger Moïra de ses dangereux ennemis au péril de sa propre vie. Pour cela, il affronte Rohr, l’elfe noir, et ses démons après que ces derniers ont attaqué Moïra et Tristan à leur sortie du restaurant l’Eden. Dans la confusion de l’attaque, la jeune fille se voit dotée d’un nouveau don, celui de pouvoir changer les ombres du mal en glace. Elle apporte ainsi une aide précieuse à Alastar lors du combat, dont ils sortent vainqueurs. Tristan, blessé en ayant voulu protéger Moïra, est conduit par leurs soins chez Nel, dont le père Samuel est médecin.

    Après avoir laissé la jeune fille entre de bonnes mains, Alastar se rend au temple afin de lever ses doutes, car avant de mourir sous le coup de son sabre, Rohr lui a révélé la trahison d’un gardien envers l’Ordre, qui s’est allié à son propre maître. Mais en pénétrant dans le bureau de Goren, Alastar tombe dans un piège, car celui-ci l’attend avec une arme empoisonnée par du venin d’aspic.

    Pendant ce temps, Moïra – ignorant le sort de son protecteur – reprend un semblant de vie normale auprès de Tristan. Seule Eleanor, dont la véritable identité n’est peut-être pas celle que l’on croit, se doute de quelque chose. Mais la saison sombre approche et avec elle la fête de Samain, ouvrant le passage entre les deux mondes…

    Prologue

    Un calme absolu régnait dans la forêt, où les premiers rayons de soleil d’une belle matinée de printemps réchauffaient l’atmosphère, faisant s’évaporer la fraîche rosée du matin sur les feuilles des arbres. Une biche et son faon étaient en train de se nourrir, paisibles et ignorants d’un danger imminent, car, caché dans les feuillages, se tenait un homme. Il était grand et beau, ses cheveux reflétaient à eux seuls toutes les nuances de châtain. L’homme s’apprêtait à tirer une de ses flèches sur la mère ou l’enfant. Il inclina la tête de côté afin de disposer du meilleur angle de tir pour ne pas manquer sa cible. Il prit quelques instants pour se concentrer, puis inspira et expira le plus silencieusement possible afin de ne pas éveiller les soupçons de la mère. Il savait qu’il fallait agir vite et bien, car il ne disposerait que de quelques millièmes de seconde pour tirer, une fois que la biche aurait perçu le son d’un arc que l’on est en train de bander. Sûr de lui, il décida que le moment de tirer était venu, mais un événement aussi inattendu qu’inexplicable lui fit rater sa cible. La biche et son faon venaient d’échapper, par la circonstance d’un heureux hasard, à une mort certaine.

    L’homme, qui avait tout l’air d’être un chevalier à en juger par sa tenue, portait une armure aux multiples entailles, fruits de nombreuses batailles, ainsi qu’une épée rangée dans le fourreau qu’il avait accroché à sa ceinture. L’homme prit le temps de caler son arc dans son dos, avant de se protéger les yeux du dos de la main. Une lumière aveuglante l’empêchait de voir correctement et lui avait, par conséquent, fait rater le gibier qu’il convoitait pour nourrir ses hommes. Il tenta de se rapprocher de la lumière dorée, mais une force inconnue le cloua littéralement au sol.

    — Qu’est-ce que ceci ? Si vous en avez le courage, montrez-vous au lieu de vous cacher sous pareil artifice, s’écria-t-il, irrité.

    Pour toute réponse, la lumière commença à s’estomper, laissant apparaître sur les côtés les courbes d’une femme, une très belle femme à en juger par la silhouette qui se précisait de plus en plus. La lumière fut soudain entièrement absorbée par la jeune inconnue et l’homme, qui avait laissé retomber sa main le long du corps, put la détailler à loisir. Ses longs cheveux bouclés étaient d’une magnifique couleur cuivrée et lui descendaient jusque sous la poitrine, contrastant avec sa robe immaculée qui la recouvrait jusqu’aux pieds. Des arabesques dorées, comme la lumière qu’elle avait aspirée, couraient le long des bras fins à la peau diaphane. Mais plus que le reste, ce fut la beauté des traits de son visage, régulier et d’une finesse sans pareille, qui le fascinèrent, tout comme les yeux couleur d’ambre qui le fixaient avec intensité.

    — Qui êtes-vous ? demanda-t-il, fasciné.

    — Mon nom est Breda, répondit une voix mélodieuse et dédoublée.

    — Quelle est cette étrange apparition ? Appartenez-vous au peuple des fées ?

    — Deux questions ! Vous ne pouvez escompter que je consente à répondre à une seule, alors que vous, Chevalier, ne m’avez même pas donné votre nom, déclara Breda, la blanche fée.

    L’homme fit une élégante révérence sous le regard amusé de la grande fée.

    — Aoden, pour vous servir, Madame.

    Ce fut dans ces circonstances que le coup de foudre entre la grande fée supérieure Breda et le chevalier répondant au nom d’Aoden eut lieu.

    Plus tard, alors que les jours, les semaines, les mois, les années se transformaient en siècle, Breda et Aoden vivaient toujours sereinement et dans le bonheur le plus total. Jusqu’au jour où Aoden s’aventura avec son arc et ses flèches à l’extérieur des limites de la terre des fées et des fés, sous le contrôle de sa femme.

    — Que fais-tu si loin de chez nous ? lui demanda une voix qu’Aoden reconnut immédiatement.

    Il se retourna, et comme à chaque fois qu’il posait les yeux sur elle, il ne put se retenir de contempler son épouse, d’une extrême beauté.

    — J’ai voulu chasser. Aller au-delà de nos frontières pour une seule fois, répondit-il, en baissant les yeux.

    Breda savait qu’arriverait le jour où l’ancienne vie de son mari viendrait à lui manquer. Elle avait depuis toujours conscience qu’elle avait épousé un guerrier et non un homme de cour.

    — Regrettes-tu tes choix ? fit-elle, avec sa franchise habituelle.

    — Non, mais je ne peux nier que ma vie d’avant me manque parfois. Comprends-moi bien, je ne reviendrais sur aucun de mes choix nous concernant. Je te ferais cadeau de ma vie une nouvelle fois, s’il le fallait, Breda. Mais le manque est pourtant là…

    La grande fée s’approcha de lui et prit sa main dans la sienne. Cependant, alors qu’elle s’apprêtait à lui faire une révélation, le craquement d’une branche sous un pied retentit à leurs oreilles. Ils firent volte-face comme une seule personne, mais ne virent absolument rien. Après avoir pris la décision de regagner leurs terres, Breda entraîna Aoden jusqu’à la fontaine au centre d’une grande bâtisse. Là, elle posa la main de son époux sur son ventre avant de lui faire une émouvante confession. Malheureusement, ce moment de bonheur fut réduit à néant par un grondement sourd venant du ciel.

    Les moments de paix et de joie étaient désormais révolus…

    Chapitre I – J-7

    Gabriel marchait d’un pas rapide et nerveux, il tenait fermement dans l’une de ses mains le parchemin que lui avait laissé Alastar quelque temps plus tôt. Si le jeune homme paraissait aussi tendu, c’est qu’il venait de prendre connaissance de son contenu. Alastar lui avait demandé de ne l’ouvrir que s’il venait à disparaître sans laisser de traces. C’était dans ces sombres circonstances que Gabriel se hâtait de rejoindre la salle du conseil où l’attendaient patiemment deux autres gardiens, pour leur faire part de la bien étrange confession de leur ami.

    Le premier, Ahawk, appuyé sur une vieille table en bois brut abîmée, avait deux têtes de moins que le second, debout à ses côtés et dont l’apparence pouvait s’apparenter à celle des géants de légende. Ahawk n’avait de cheveux que sur le sommet du crâne et encore, ces derniers étaient coupés à ras. Son véritable nom n’était connu de personne, seul son surnom, trouvé à cause des armes que lui seul savait manier avec force et habileté, servait à le nommer. Il possédait un visage pouvant être qualifié d’atypique et qui trahissait des origines indiennes. Les deux fentes qu’il avait à la place des yeux, et d’où perçaient deux billes noires brillantes, s’étiraient au-dessus de pommettes saillantes. Son regard perçant et examinateur pouvait vous étudier en une fraction de seconde, qualité essentielle chez un gardien de sa trempe. Sa musculature, imposante comparée à sa taille, lui donnait une corpulence trapue. Le second gardien, à ses côtés, avait au contraire des muscles longs, qui reluisaient sous sa peau couleur ébène. Son crâne était entièrement rasé et il arborait sur le visage des scarifications dont la vue vous glaçait le sang dans les veines. Ils portaient tous les deux la même tenue, une longue tunique sans manches et un pantalon d’un vert émeraude sombre et satiné. Gabriel s’avança vers eux, l’air grave.

    — Ahawk, Moumbator, fit-il pour commencer. L’un d’entre vous sait où se trouve Alastar ?

    Les deux gardiens échangèrent un regard équivoque avant de lui faire face.

    — C’est pour nous demander cela que tu nous as fait venir dans la salle du conseil ? demanda l’Indien.

    — L’heure est grave, mes frères. Je vous demande cela, parce que de la réponse découleront bon nombre de choses.

    — Ne sois pas si énigmatique, mon ami, dis-nous ce qui t’occupe l’esprit.

    Celui qui se nommait Moumbator gardait le silence tout en fixant Gabriel d’un regard luisant d’une curiosité difficilement contenue. Il fit quelques pas en avant et décroisa soudain les bras. Les quelques mots qu’il prononça le furent avec une voix si grave et si forte, qu’elle aurait pu faire trembler les murs si ces derniers n’avaient pas été plus solides.

    — Il n’y a pas qu’Alastar qui a disparu du Temple. Certaines choses ont échappé à notre vigilance.

    — C’est justement de cela qu’il est question, Moumbator. Goren non plus ne s’est pas montré depuis un moment. Il faut que vous lisiez ceci, fit Gabriel en leur tendant la longue lettre d’Alastar. Je crois que nous sommes face à un grave problème…

    */*

    Le corps inerte d’Alastar se trouvait toujours dans le bureau de Goren. Ce dernier avait pris la fuite avant que la découverte de sa honteuse trahison ne fasse trembler les murs du Temple, en laissant Alastar pour mort dans cette grande pièce froide. Le gardien était étendu à même le sol sur le dos, les bras le long du corps. Ses yeux sans expression étaient voilés, sa bouche entrouverte semblait ne laisser passer aucun souffle de vie, jusqu’à ce qu’une sorte de hoquet nerveux secoue le corps du jeune homme, avant d’être suivi par un second. Alastar n’était pas mort, il vivait encore ! Pour combien de temps, même les dieux des mondes n’auraient pu le dire. La porte du bureau s’ouvrit avec fracas, laissant pénétrer trois gardiens aussi furieux que soulagés de retrouver leur frère d’armes. Gabriel fut le premier à s’approcher d’Alastar.

    — Bràthair{1}, réponds-moi ! fit-il inquiet.

    — Il est gravement blessé, mais au moins il respire encore, fit remarquer Moumbator.

    Gabriel arracha les vêtements qui l’empêchaient d’atteindre la blessure d’Alastar. Ce qu’il vit le laissa sans voix. Alastar avait été empoisonné par un puissant venin. La plaie laissée par la dague de Goren était devenue noire. Les vaisseaux sanguins qui l’entouraient étaient violacés, montrant que le venin s’était étendu au plus profond de son organisme.

    — Un venin puissant ! Où est ce traître de Goren, je lui ferai regretter d’être venu au monde, fils de chien ! s’exclama Ahawk en faisant glisser la lame de son tomahawk sur sa joue.

    — Ahawk, Moumbator, chargez-vous de retrouver la trace de ce traître, même si je le soupçonne d’être déjà loin à cette heure.

    — Que vas-tu faire pour lui ? Il est très mal, observa le guerrier à la peau d’ébène.

    — Il m’a parlé de cette fille, elle peut l’aider. Il a l’air de lui faire confiance, c’est donc jusqu’à elle que je vais le conduire afin de le mettre en sécurité. Tant que nous ne connaîtrons pas l’ampleur de cette trahison, cet endroit n’est pas sûr, on ne sait si d’autres traîtres se cachent dans nos rangs. Agissez discrètement, c’est compris ! Ne rendez compte qu’à moi et à moi seul, mes frères.

    — Tu peux compter sur nous ! Moumbator et moi allons faire un peu de ménage !

    — Allez, mes frères, nous nous retrouverons ici ou bien en enfer, si cela tourne mal !

    */*

    Comme la vie peut être étrange !

    Il y avait quelques mois, j’observais cette chambre grâce au télescope de Nel depuis sa chambre, et à présent je me trouvais dans cette même pièce en compagnie de son séduisant occupant. Tristan et moi étions allongés sur son lit en train de nous embrasser fougueusement, sa langue cherchant avidement à prendre possession de ma bouche, tandis que ses mains se baladaient avec douceur dans le but de couvrir une large partie de mon anatomie, rendue difficilement accessible par les nombreuses couches de vêtements que je portais, mois d’octobre en Alberta oblige ! Tout en répondant avec assiduité à ses caresses, je me demandais quand le moment de passer à la vitesse supérieure serait le plus opportun. Épineuse question à laquelle je me devais, et ne pouvais cesser de réfléchir. Cela faisait très exactement trois mois que nous avions entamé une relation sérieuse, Tristan et moi, et trois mois que mon pauvre petit ami essayait tant bien que mal de tenir la promesse faite à mon grand-père avant ce fameux week-end au lac Saint-Clair, qui avait vu démarrer notre histoire. Trois mois aussi que mes ennuis avaient commencé, ne pus-je également m’empêcher de penser, comme si tout était lié.

    Comme le temps passe vite ! pensai-je.

    — Moïra ? T’es avec moi ? me demanda soudain Tristan, le souffle irrégulier.

    — Oui bien sûr, continue, fis-je, en battant des cils comme pour m’aider à revenir à la réalité.

    Je passai mes bras autour de son cou afin de l’attirer de nouveau à moi, mais rencontrai une résistance. Tristan, les coudes plantés au niveau de mes épaules et les mains me caressant doucement les cheveux, me fixait intensément. Je le fixai en retour et ne pus retenir un soupir appréciateur. J’aimais tout de lui, ses petits yeux noirs ; ses sourcils tout aussi foncés et bien dessinés ; son nez qui, de profil, était légèrement aquilin, ses fossettes… ah, ses fossettes !

    — T’es encore partie, ma jolie, je le vois dans tes yeux ! ricana-t-il.

    — Non, je suis là… je suis là ! fis-je en battant de nouveau des cils.

    Tristan poussa un soupir d’où ressortit un dépit à peine dissimulé, avant de rouler sur le côté et de m’attirer à lui. Je posai la tête sur son torse et écoutai les battements de son cœur, celui d’un lion à en juger par le son qui résonnait à mes oreilles.

    — Allez, maintenant, dis-moi ce qui va pas !

    — Rien… j’t’assure tout va bien, mentis-je en resserrant mon étreinte.

    Ses doigts qui se baladaient nonchalamment sur ma hanche droite me firent frissonner. Je fermais les yeux quand le son de sa voix qui se répercuta dans toute sa poitrine puis dans mes oreilles me fit sursauter.

    — C’est à propos de Nel… ? commença-t-il, prudemment.

    — C’est fou, comment s’est-il débrouillé pour peindre tout ça sur le plafond ? dis-je, afin de changer de sujet.

    Je me redressai sur un coude tout en me tordant le cou pour regarder. J’étais en pleine contemplation des étoiles, non celles illuminant l’écran noir du ciel durant la nuit, mais celles qu’un père avait peintes pour son fils lors de leur emménagement cinq ans plus tôt dans la maison. Tristan, pas dupe concernant ma petite tentative pour éviter d’aborder les sujets sensibles, se plaça sur le dos pour mieux admirer à son tour son plafond, l’objet de notre toute nouvelle attention.

    — J’ai toujours adoré camper à la belle étoile. Je pense qu’il a fait ça pour me faire plaisir, soupira-t-il.

    — Jamais, depuis la chambre de Nel, je ne me serais doutée que tu fixais ça. Je pensais que tu avais une passion étrange pour ton plafond, dis-je en riant.

    Tristan roula sur moi et se redressa en prenant appui sur ses coudes. Il plongea son regard sombre dans le mien, puis rabattit une de mes mèches rebelles derrière mon oreille. Je tendis alors le cou pour lui voler un tendre baiser. Une fois notre petit moment câlin passé, il se redressa pour regarder à travers la fenêtre.

    — Pour Nel et toi, j’étais un peu comme de la télé-réalité ? fit-il en souriant.

    — Non, pas vraiment. Mais comme tu ne m’avais jamais adressé la parole au lycée, il fallait bien que je trouve un moyen de me renseigner sur toi !

    — Je ne suis jamais allé vers toi, parce que…

    Il n’eut pas le temps de poursuivre ses révélations, car quelqu’un était venu frapper à sa porte. Je vis Tristan se raidir et en conclus qu’il n’attendait pas de visite ce soir.

    — Qu’est-ce que c’est que ça ?! fit-il en se levant. Il n’y a personne d’autre que nous, normalement. Ne bouge pas, je vais voir…

    La porte s’ouvrit sur la mère de Tristan. Bien que je n’eusse rien fait de mal, je tentai de me cacher derrière lui, telle une enfant coupable craignant d’être découverte. Tristan, de son côté, eut l’air très contrarié en découvrant sa mère derrière la porte. Dans l’absolu, j’aurais préféré m’être préparée à cette rencontre, mais depuis un certain temps je m’étais habituée à ce que rien ne se passe comme prévu.

    — Tristan ! Tu n’es pas seul, à ce que je vois. Je sais que notre arrivée n’était pas prévue, mais comme ton père et moi ne savions pas que tu avais de la compagnie, nous avons pensé que cela te ferait plaisir de passer une soirée tous ensemble… en famille, fit sa mère en penchant la tête pour me voir.

    Je décidai qu’il était temps pour moi de sortir de ma piteuse cachette.

    — Bonjour, Madame Ross, fis-je, embarrassée.

    — Bonjour, Moïra !

    Je ne pus cacher ma surprise en l’entendant prononcer mon nom. Je ne savais pas si elle se souvenait de moi, ou si son fils lui avait parlé de sa nouvelle petite amie. Quoi qu’il en fût, en la voyant entrer dans la pièce, je me retins de l’observer comme une bête curieuse. Je me souvenais que la mère de Tristan était une belle femme, mais la voir de si près venait confirmer ce fait. Nous faisions à peu près la même taille, elle et moi. Depuis cette fois où je l’avais observée – pour ne pas dire espionnée – depuis chez Nel, elle avait coupé ses cheveux. Il fallait reconnaître que la coupe garçonne avait été créée pour son visage. Tristan avait hérité de son regard noir et profond, vous donnant l’impression qu’elle pouvait lire en vous comme dans un livre ouvert. L’espace d’un instant, je l’imaginai jeune, ses longs cheveux noirs au vent telle une Pocahontas des temps modernes. Bien sûr, je m’égarai complètement et mon imagination fit encore des siennes.

    — Donc papa est aussi à la maison, ce soir ?

    — Oui, comme je te l’ai dit, nous avions décidé de t’en faire la surprise. Nous voulions passer un peu plus de temps avec toi à la maison, en famille, répéta sa mère, embarrassée.

    Je fus soudain mal à l’aise de me trouver là. Je savais que les rapports de Tristan avec ses parents n’étaient pas au beau fixe, mais connaissant Tristan, je ne me serais jamais doutée qu’ils étaient tendus à ce point. Aussi ne tardai-je pas à manifester mon intention de rentrer chez moi.

    — Euh… je suis ravie de vous avoir vue, Madame Ross, fis-je avant de me tourner vers Tristan. Je crois que je vais y aller, toi et tes parents, vous avez sans doute beaucoup de choses à vous raconter.

    — Non, pourquoi tu veux t’en aller ? On était bien tout à l’heure, mes parents ne t’ont pas demandé de partir, dit-il tout en regardant sa mère d’un air insistant.

    — Oui, bien sûr Moïra, notre présence ne change rien. Nous pourrions tous dîner ensemble, cela nous permettrait de faire connaissance. Je vais descendre à la cuisine préparer un dîner pour quatre.

    La mère de Tristan sortit sans attendre de réponse. Il referma doucement la porte derrière elle.

    — Je suis gênée, fis-je. En plus, je suis certaine que ta mère n’avait pas prévu de faire à dîner pour quatre.

    — Trois ou quatre, qu’est-ce que ça change ? Je n’allais pas changer mes projets pour eux, et mes parents le savent bien.

    — Peut-être bien, mais tu ne peux pas nier qu’ils font des efforts pour passer du temps avec toi. Ta mère a répété le mot « famille » une dizaine de fois au moins !

    Alors que je lui donnais mon avis sur sa situation familiale, le visage de Tristan s’était durci et sa mâchoire crispée. Je découvrais petit à petit une autre facette de la personnalité de mon cher et tendre.

    — J’sais pas. Avec mes parents, on a du mal à communiquer. Ils ont déjà du mal à communiquer entre eux. Alors…

    Je me tenais debout, collée au rebord du lit de Tristan, ne sachant comment lui redonner le sourire aux lèvres, lorsque mon regard fut attiré par une lumière à l’extérieur. Celle-ci provenait de cette autre chambre, où j’avais dormi de si nombreuses fois. Tristan s’en aperçut.

    — Ça va durer combien de temps, ce petit jeu entre vous ? Vous êtes réellement fâchées ?

    — On n’est pas fâchées… il y a juste un petit froid entre nous. C’est depuis cet incident, tu sais… après notre soirée à l’Eden.

    À cette évocation, le visage de Tristan s’assombrit de nouveau. Il resta silencieux un moment.

    — Tristan ? Ça va ?

    — Oui, t’inquiète pas… juste un moment d’absence. Allons-y, je t’emmène ailleurs !

    Tristan, pour me changer les idées, m’emmena faire le tour du propriétaire. De l’extérieur, déjà, sa maison avait l’air d’une énorme bâtisse, mais de l’intérieur, elle paraissait encore plus grande. Elle ne comptait pas moins de quatre chambres à coucher, dont une suite parentale, avec chacune une salle de bains attenante, sans compter les autres pièces.

    Alors que mon guide venait de répondre à l’appel de sa mère depuis la cuisine, je me retrouvai seule dans le long couloir qui menait au salon. Je pris la décision de continuer ma petite visite, et m’engageai d’un pas hésitant dans le couloir jeté dans l’ombre par la tombée de la nuit. Je tâtonnai le long du mur afin de trouver l’interrupteur, pour me permettre de me diriger en ce territoire inconnu.

    — Que la lumière soit et la lumière fut, dis-je, une fois ma quête accomplie.

    Tout allait pour le mieux jusqu’à ce qu’une porte entrouverte attire ma curiosité. Je la poussai un peu afin de découvrir quel trésor elle pouvait bien renfermer. Un trésor si important que Tristan n’avait pas inclus cette pièce dans sa visite guidée de la maison. Je tendis le cou au point de risquer de me le rompre, dans le seul but de satisfaire mon insatiable curiosité. Mais rien d’extraordinaire ne se cachait dans cette petite pièce à l’odeur de renfermé. Il s’agissait, à en juger par un premier coup d’œil inquisiteur, d’un simple atelier de peinture, sûrement celui de la mère de Tristan. Les volets de la pièce étant fermés, je n’osai pas cette fois-ci allumer pour y voir plus clair. Toutefois, une petite voix dans ma tête essayait de me convaincre de chercher l’interrupteur, lorsqu’une main dans mon dos me fit sursauter.

    — Ce n’est que moi ! Allume, si tu veux, c’est juste la pièce où ma mère garde les peintures qu’elle ne veut pas exposer, et ses autres trucs.

    — Je ne voulais pas me montrer indiscrète, mais j’ai…

    — Tu n’as rien fait de mal et personne ne va te manger, Moïra. En tout cas, pas sans ton consentement ! fit-il, en ajoutant un clin d’œil coquin à sa petite remarque.

    — Très drôle ! répondis-je, les joues en feu.

    En effet, il s’agissait plus là d’une pièce où était entreposé tout un tas d’objets que de l’atelier d’un peintre. Mon attention fut attirée par un objet particulier. Son manche était décoré de perles, de clochettes en laiton et de sabots de chevreuils, avec deux longs pendants couverts encore de perles.

    — Tristan, qu’est-ce que c’est ?

    — Ça appartenait à mon grand-père, il lui venait de son père et ainsi de suite. Il a quelque chose comme deux cents ans, je crois.

    — Je peux ? fis-je en le touchant du bout des doigts.

    — Oui, vas-y. Mais je me demande ce qu’il fait dans cette pièce ?

    Ce fut avec une infinie précaution que je décrochai du mur cet objet inestimable et ancien.

    — C’est un authentique hochet de danse Blackfoot, fit une voix de femme derrière moi.

    Je me retournai rapidement, et vis la mère de Tristan se tenant dans l’encadrement de la porte dans une posture nonchalante.

    — Je suis désolée, je vais le reposer, dis-je, confuse.

    — Non, Moïra je t’en prie, Tristan t’a permis de le prendre. Il appartient à ma famille depuis des générations. Voir cet objet fait remonter en moi toute une foule de souvenirs, fit la mère de Tristan en s’avançant, visiblement émue. Il était utilisé lors de danses importantes, au cours desquelles les jeunes hommes courtisaient les jeunes filles à marier de leur tribu. Oh, mon Dieu, soupira-t-elle, ça remonte à il y a très longtemps, tout ça.

    Je fis glisser délicatement et très lentement mes doigts le long du hochet de danse, tandis qu’une foule d’images me traversait l’esprit. L’espace d’un instant, je m’imaginai à la place d’une des jeunes filles courtisées, avec Tristan dansant pour moi.

    — Bien, le dîner est bientôt prêt. Ton père termine sa visioconférence et il nous rejoint.

    Tout en remettant soigneusement le hochet de danse à sa place, je me rendis compte que sur la plupart des tableaux était peint le visage de Tristan, à différents âges. Cela me fit penser aux photos accrochées le long du mur de mon escalier.

    — Tu as vu ? C’est toi sur tous ces tableaux, Tristan.

    — Je n’y avais jamais fait attention avant, remarque je ne rentre jamais dans cette pièce non plus. Sur celui-ci, je suis avec ma grand-mère et mon grand-père maternels, mais c’est impossible.

    — Pourquoi ?

    — C’est à cause de mon âge sur le tableau.

    — Ah oui et alors ?

    — Bah, ma grand-mère est morte quand je n’étais encore qu’un enfant. Alors que sur le tableau, je suis comme tu me vois aujourd’hui. C’est ma mère qui l’a reproduit comme ça. Elle doit avoir ses raisons, répondit Tristan, en haussant les épaules.

    — Tu as l’air étonné que ta mère ait fait ça.

    — Bien sûr que je le suis, elle ne parle jamais de la famille. Je crois que ce qui s’est passé lorsqu’elle et mon père ont voulu se marier l’a beaucoup affectée.

    — Qu’est-ce qu’il s’est passé… pardon je suis décidément trop curieuse !

    — Non, c’est normal que tu le sois, après tout. Mais la famille de mon père ne lui a jamais pardonné d’avoir voulu épouser une Indienne au lieu « d’un bon parti », selon eux. Quant à ma mère, sa famille l’avait déjà destinée à un homme jugé convenable au sein de sa communauté. Tu vois le genre d’histoire.

    — Oui, un classique dans le genre !

    — Du coup, pour vivre heureux, ils ont coupé les ponts avec leurs familles respectives. Enfin, jusqu’à ma naissance… parce qu’après, ma mère a renoué quelques liens avec sa famille, surtout après la mort de ma grand-mère.

    — Et la famille de ton père ?

    — Plus aucune nouvelle. Mais c’est sans importance.

    — Waouh, toi aussi c’est compliqué dans ta famille, fis-je, un peu soulagée.

    Tristan et moi fûmes rappelés à l’ordre par sa mère, au sujet du repas qui commençait à refroidir.

    Ce dîner fut pour moi l’occasion de faire la connaissance de son père. Il était aussi grand que son fils, mais sa silhouette était plus fine. Je fus très impressionnée par sa prestance et le magnétisme de son beau regard bleu nuit. Sur le plan physique, Tristan et son père se ressemblaient quelque peu, ils possédaient tous les deux cette solide mâchoire très masculine et ces fossettes que j’aimais tant.

    Nous entamions à peine l’entrée de ce qui s’annonçait être un excellent repas, quand je remarquai que l’ambiance qui régnait à cette table devenait lourde et chargée d’un je-ne-sais-quoi qui n’allait pas tarder à nous exploser à la figure. Ce fut Tristan qui engagea les hostilités sans même s’en rendre compte.

    — Euh… maman, tu sais que Moïra aussi est une artiste !

    — Quoi ! Euh… non, ça n’a rien à voir avec ce que vous faites, Madame Ross, fis-je, un peu gênée par cette soudaine mise en avant. Je gribouille un peu, voilà tout.

    — Ah oui, fit ma supposée future belle-mère. Dans quel domaine artistique t’illustres-tu, Moïra ?

    — Ben à vrai dire… je ne suis pas à proprement parler une artiste. N’est-ce pas Tristan ? fis-je en lui donnant un léger coup de pied sous la table.

    — Moïra dessine ! annonça-t-il fièrement. Je n’ai pas encore eu la chance de voir ce qu’elle fait, mais ça devrait plus tarder.

    — C’est vrai ce que dit Tristan ? Et que dessines-tu ? Des portraits, de la nature morte ?

    — Un peu de tout, mais la plupart du temps tout ce que je mets sur papier, ce sont des choses que j’ai vécues dans une journée, une semaine, un mois. J’utilise le dessin comme une sorte de journal intime, vous voyez.

    — C’est une bonne chose, selon moi. À vrai dire, j’ai également commencé par le dessin avant de m’orienter vers la peinture. J’ai débuté avec de l’aquarelle.

    — C’est un passe-temps ou comptes-tu t’orienter vers une voie artistique après ton diplôme ? demanda le père de Tristan.

    — Je… je ne sais pas encore ce que je vais faire après le diplôme, en réalité.

    C’était la stricte vérité ; après tout ce qu’il m’était arrivé, je n’avais pas encore pris le temps de penser à mon avenir, pas plus qu’à une éventuelle carrière dans un domaine précis. Mais pour être honnête, les études avaient quelque chose de moins palpitant que la découverte d’un autre monde auquel vous êtes supposé appartenir.

    Une subite montée de voix autour de moi me fit sortir de ma rêverie existentielle. Tristan et ses parents venaient d’amorcer une discussion autour de l’avenir de mon supposé futur époux.

    — Ce n’est pas la peine de vous disputer encore une fois à cause de ça ! fit Tristan, agacé.

    — Non je suis désolée, mon chéri, mais c’est bien qu’on en reparle. Je te rappelle que tout ton avenir va se jouer dans les mois à venir, et j’aimerais que toi et ton père preniez en compte certaines choses ! s’emporta sa mère.

    — Et pour toi, je suppose qu’espérer que notre fils puisse faire une carrière pro dans le hockey n’est pas envisageable ! Nom de Dieu, Abigail, qu’est-ce que tu as avec le sport ?

    — Ce n’est pas un vrai métier, pour moi, voilà !

    — Tu es artiste peintre, et je ne t’ai jamais dit que ta profession n’en était pas une, comparée à la mienne !

    — Non en effet, ta famille s’en est chargée à ta place !

    — Et voilà, on en revient constamment aux mêmes choses ! s’écria le père de Tristan.

    — Non, le véritable problème c’est que Tristan est capable. C’est un garçon brillant, il est doué pour beaucoup de choses et le voir s’enfermer dans ce sport, que je trouve violent en outre, me contrarie et me désole. Mais tu sais ce qui m’énerve au plus haut point, c’est que tu l’encourages dans une voie que je désapprouve !

    — Alors, laissons-le décider ! Mais je crains que tu ne sois déçue par la décision de ton fils, ma chérie.

    Face à une situation qui promettait de s’envenimer, je décidai de reporter toute mon attention sur le consommé qui, par ailleurs, était délicieux. Je faisais preuve d’une extrême concentration, quoiqu’un peu exagérée, en portant ma cuillère à la bouche.

    — Arrêtez, s’il vous plaît ! J’ai honte ! s’écria Tristan.

    Je l’observais du coin de l’œil, essayant de se maîtriser un maximum, mais l’indifférence de ses parents à son égard le mettait hors de lui. Ces derniers continuaient leur conversation comme si nous n’étions plus là.

    — Il est beaucoup trop jeune pour s’en rendre compte, mais moi je sais ce qui est bon pour assurer son avenir. Je veux qu’on le respecte, que son avenir soit brillant, poursuivit sa mère.

    — Tu veux que je te dise, ton problème est que tu as quelque chose à prouver. Mais laisse notre fils en dehors de tout cela !

    — De quel problème parles-tu ?

    — Tu veux prouver à tout le monde que, même issue d’une famille modeste, on peut réussir. C’est ce que tu as tenté de prouver toute ta vie à travers ton art, en ouvrant ta galerie et que sais-je encore !

    Tristan, pressentant que la situation n’allait guère en s’améliorant, décida d’intervenir de manière plus musclée. Il se leva brusquement, faisant tomber sa chaise sur le sol, et tapa du poing sur la table. Je manquai faire tomber ma cuillère dans mon assiette, sous le coup de la surprise.

    — Ça suffit maintenant, vous vous donnez en spectacle devant Moïra !

    Son intervention eut le mérite

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