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Conversations avec l'au-delà
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Conversations avec l'au-delà
Ebook219 pages4 hours

Conversations avec l'au-delà

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About this ebook

Que se passerait-il si vous rencontriez le personnage de roman de vos rêves; si vous pouviez dialoguer avec l'auteur, disparu depuis des siècles, qui a transformé votre vie; si vous pouviez savoir ce qu'aurait été votre vie si vous aviez fait d'autres choix ? Tout le monde connait le mythe de la caverne. Notre réalité recèle de multiples niveaux. Nos idées y prennent vie et peuplent notre existence, tout comme les âmes des disparus. Conversations avec l'au-delà est un roman de Science-Fiction métaphysique qui prend appui sur les dernières découvertes en astrophysique pour développer une représentation des univers multiples dans lesquels chacun de nous évolue.

LanguageFrançais
PublisherLe signe bleu
Release dateAug 22, 2011
ISBN9781465852960
Conversations avec l'au-delà
Author

Vera Ouchakov

Vera Ouchakov est née quelque part en Crimée quelques temps avant la chute du mur. Elle vit à Paris où elle écrit la plupart du temps.

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    Conversations avec l'au-delà - Vera Ouchakov

    Chapitre 1

    Tout avait commencé ce soir-là… Il avait fait du vent toute la journée, des bourrasques endiablées sur la mer enragée. Le ciel grondait les nuages et le soleil déclinait. Bien calé dans l’anfractuosité d’une fenêtre étroite, Christophe aspirait des bouffées d’air salé dans l’ombre fraîche de la citadelle. Il venait de refermer Les Liaisons dangereuses, un roman inégalé de son auteur, un certain Laclos. Il en avait retrouvé un exemplaire dans un meuble ancien. Le bouquin sentait une odeur de vieux, de renfermé, de moisissure. Christophe ferma les yeux.

    Quand il les ouvrit, elle était là. Il cligna des paupières mais elle était toujours là, présente, devant lui.

    Ce soir-là, la marquise de Merteuil est sortie des Liaisons dangereuses. Elle ressemblait tout à fait à l’idée qu’il se faisait d’elle surtout depuis qu’il avait vu le film de Stephen Frears : blonde, grande, un visage impassible et ironique qui respire l’intelligence. Christophe se frotta les paupières pour chasser de son champ de vision cette apparition. Sans doute une visiteuse attardée s’était-elle perdue…

    Pas du tout. La marquise était toujours là, à le considérer d’un air plus que narquois. Comme le cerveau humain est fort bien fait et fort plastique, Christophe décida de croire qu’il s’était embarqué dans un rêve : il dort et il songe qu’il rêve. Il a l’habitude de ces rêves au deuxième degré : tout en gardant la conscience de rêver, il cauchemarde des visions fantasmatiques sur l’écran de son imagination personnelle. Il va se réveiller et ce mirage s’évanouira.

    La marquise sourit ; se moquerait-elle de lui par hasard ? Que dire ? Christophe demeura interdit ; il avait toujours eu de l’esprit dans l’escalier, quand il en avait eu. En un éclair, il se jugea inférieur à la situation ; alors, il joua le jeu et ne trouva rien de mieux que de s’exclamer:

    - Incroyable ! c’est vous ? Je croyais que vous aviez été défigurée par la variole ? Ruinée par la perte de vos procès?»

    L’hallucination se contenta de sourire, mais d’un air absolument engageant. Puis elle entama ce qui devint leur première conversation.

    - Défigurée, moi ? Pourquoi grand Dieu ? Moi, ruinée ? Par qui ? Et pourquoi ?

    - Mais, pour vous punir, en expiation de vos crimes ? Vous ne vous rappelez pas ? La jeune Cécile violée et enceinte ? Votre ami Valmont tué par son rival Danceny ? Et sa maîtresse, Mme de Tourvel, morte désespérée ?

    - Et vous pensez vraiment que je suis responsable de ces malheurs ? Croyez-moi, ces gens-là n’ont pas eu besoin de moi pour se détruire. Vous retardez, mon cher, à vouloir en rester à l’image que, depuis trois siècles, on a voulu donner de moi ! Rumeurs ! Désinformation pure et simple !

    - Mais alors ? »

    - Cet auteur, comment l’appelez-vous déjà ? Pierre-Ambroise Choderlos de Laclos ! Honnêtement, est-ce vraiment ce qu’on appelle un nom ? Un pseudonyme plutôt ! un masque ! Une couverture pour un adepte pitoyable du « moralement correct ». Oubliez l’ennuyeux et insipide dénouement des Liaisons dangereuses ! Des fictions pour qui veut croire au châtiment des méchants ! Mais qu’est-ce qu’on appelle une personne méchante ? Moi, je n’ai fait que révéler le mauvais fond de tout le monde ! Je suis une femme authentique mais personne n’aime la vérité. Vous, un scientifique, un spécialiste en informatique, vous en restez à la légende noire qui prétend assombrir l’image des femmes libres de ma trempe ! Me ravaler au niveau d’une libertine ! Imaginez-vous vraiment que je ne songe qu’à l’amour ?»

    Christophe ne le croyait pas ; il jugeait son rêve éveillé charmant ; il n’avait pas envie de contrarier la belle dame. Elle continuait.

    - Pensez par vous-même! Faites preuve d’intelligence, que diable, et n’ajoutez plus foi au piètre dénouement que, par faiblesse, Laclos donna à mon histoire. Tenez, je lui pardonne, il était de petite noblesse et il avait besoin d’argent… Mais vous ! Ici-bas, ma vie entière fut un roman exceptionnel et de médiocres critiques l’ont réduite aux dimensions microscopiques de combinaisons machiavéliques. (Soupir) Trop facile de faire taire une femme qui a raison ! Avouez-le, la morale vulgaire n’est pas parvenue à salir ma mémoire… Mon image brille de l’éclat de l’inaccessible : le prestige de la liberté éblouit encore ceux qui n’ont pas le courage de la prendre ! Mais vous ! Ne sombrez pas dans le moralisme ordinaire ! cette dégoulinante hypocrisie ! Montrez-vous à la hauteur de l’idée que je me fais de vous ! »

    Christophe était un grand lecteur : il s’immergeait dans l’imaginaire comme dans une réalité libre où il pouvait tout faire et tout vivre, sans entrave ; il n’aurait pas eu besoin du virtuel pour se trouver des avatars multiples. Il aimait l’odeur des pages blanches des cahiers inentamés, des madeleines grignotées, des couronnes des rois et des vieux livres trop aimés. Mais c’est une autre histoire encore. Il n’avait pas envie de chasser une vision aussi fascinante ; elle aurait pu s’évanouir. Il voulut continuer son rêve éveillé.

    - En rêvant de mon élimination, la société s’évitait toute autocritique. En vérité, je sortis victorieuse de mon duel, plus intellectuel que sentimental, avec Valmont. Le pauvre ! il a sacrifié son amante à son personnage : il voulait vivre en don Juan, en homme supérieur ! Passe encore ! Mais chercher à m’en imposer ! à moi ! Mâle impuissant à reconnaître ma victoire ! Je l’ai proprement exécuté, humilié ! J’étais alors une femme dans toute la force de notre nature ! Que pouvaient contre moi ces hommes dont j’étais le bernard-l'hermite ? J’ai vécu comme je l’ai voulu ! et assouvi mes désirs en toute impunité ! Voilà ce qu’on ne me pardonne pas ! On raconte que j’ai été punie de mes crimes ! Que l’on songe à corriger les autres ! La société se venge en imposant les médiocres ! On m’accuse de manipulation ! Mais j’étais une artiste de la mise en scène ; je méprisais les mystifications médiatiques ! Je n’étais pas une simple technicienne de la dissimulation ! J’avais le génie de la stratégie ! Ma victoire sur Valmont, un dom Juan machiste, fut mon chef d’œuvre! On ne pardonne pas à une femme d’avoir raison ! Je ne regrette rien et mes idées, à présent, triomphent. »

    Christophe n’avait pas envie d’entamer une discussion avec une féministe. Merci bien ! Le militantisme n’était pas son fort. Il se souvint que son amoureuse devait l’attendre pour dîner et, surtout, qu’elle était d’une jalousie féroce : une véritable louve ! Il se leva, comme pour mettre un terme à l’entretien. Ce mouvement lui inspira une révélation soudaine : « Allons, madame, réveillez-vous ! Nous sommes au XXIe siècle ! Pas au XVIIIe siècle ! »

    - Je ne suis d’aucun siècle mais de tous les temps ; je n’ai pas d’âge ; je suis comme la lumière qui éclaire les âmes et se joue des esprits.

    - Jolie énigme ! Vous êtes comédienne ? Vous jouez au théâtre le rôle de la marquise de Merteuil ? Belle interprétation ! Et vous vous produisez sur quelle scène ? »

    - Homme de peu de foi ! Vous ne voulez pas admettre que je suis bien la marquise !

    - J’ai très peu de religion ! Comment cela se pourrait-il ? Vous n’êtes même pas une personne ! Vous êtes un personnage ! Comment pourriez-vous hanter ces lieux ? vous n’êtes de nulle part puisqu’un cerveau humain seul vous enfanta ! S’il vous plaît, madame, cessez cette comédie et ôtez votre déguisement !

    - Est-ce là tout ce que vous inspire ma venue ? Ces commentaires, formalistes et pointilleux, sur mon inexistence charnelle ? Quel petit esprit vous faites ! Mon cher, vous me décevez, je vous imagine autrement… Honnêtement, vous vous déconsidérez plus que vous ne m’humiliez. Je vous croyais plus perspicace… plus fort, plus intelligent.  Vous ne méritez pas ma venue. Je vais partir, si vous voulez !

    Mais elle n’en faisait rien ; elle restait ! Christophe détourna le regard vers la baie et plissa les paupières. Il avait décidé de s’isoler pour se décontracter l’esprit ; ces hallucinations étaient le fruit de sa fatigue. Elles allaient se dissiper. Il serait bientôt libéré de cette folle illusion ! Dommage, d’ailleurs, car elle n’était pas si mal que cela… un peu prétentieuse peut-être mais assez séduisante ! Il risqua un coup d’œil en coin ; elle insistait : elle n’était pas partie ! Alors que, il y avait une seconde, il regrettait déjà son départ, il en eut tout d’un coup assez qu’elle insiste. Décidé à quitter le lieu, il prit son cartable. Pour en avoir le cœur net, il s’avança pour effleurer l’apparition. Mais sa main ne rencontra rien, que le vide: l’autre n’avait aucune consistance ; c’était comme une projection mentale dans l’espace, une créature magnétique en trois dimensions !

    - Eh oui ! Je suis là et je n’y suis pas ! Je m’y prends comment, devin ? Spécialiste des illusions ? ou illusionniste sans spécialité ? »

    - Mais oui ! Je comprends maintenant : vous êtes une projection vidéo ? où est la machine? »

    - Vous cherchez quoi exactement ? L’appareil de projection ? Allez-y, cherchez ! »

    Son petit air ironique devenait particulièrement irritant. Il inspecta les parois de la vieille citadelle, des murailles d’un bon mètre d’épaisseur bâties pour défier les pirates et mener de belles batailles. Il avait derrière lui des années d’études en mathématiques, géométrie dans l’espace, informatique, etc. C’était un as, un surdoué qui avait décroché son bac avant tout le monde et résolvait toutes les énigmes, mêmes les plus retorses, en un temps record. Mais il ne trouva rien de rien… même Kevin Costner, James Cameron et Spielberg auraient séché, avec toute leur expérience. Christophe, lui, n’avait que vingt-cinq ans. Alors, il commença à douter.

    - Mais comment ! Vous êtes… vous êtes vraiment la marquise ? »  Il ne savait pas au juste ce qu’il éprouvait. Mettant à profit cette perplexité, la marquise continua.

    - Je confirme, je ne suis pas une actrice déguisée ; je suis celle dont la mémoire humaine a retenu le nom de scène : Mme de Merteuil, la Merteuil en personne, celle qui mit à mal la domination masculine en un siècle où elle s’octroyait la toute-puissance en matière d’intelligence et de sexe… le monstre d’intelligence, la psychologue diabolique, la séductrice démoniaque ! C’est bien moi ! Je vous fais peur ?

    - D’un autre côté, je ne comprends pas ce que vous faites ici… vous étiez tellement parisienne ! La province vous intéresse maintenant ! Ce n’est pas logique…

    - A l’époque, cette malheureuse histoire m’avait fait une mauvaise publicité. Je quittai la France pour trouver à l’étranger un théâtre plus digne de mes exploits. Je gagnais l’Italie où je poursuivis ma carrière avec splendeur jusqu’à ce que la vieillesse, et elle seulement, me privât de mes charmes. J’atteignis un âge rivalisant avec celui où la célèbre quitta le monde. Je me retirais alors ici, dans une antique tour génoise, non loin de cette citadelle… j’y contemplais le spectacle que me donnaient mes contemporains. Ils sont tellement peu réels, les pauvres ! Croyez-moi, la vérité est bien éloignée de vos pauvres représentations !»

    - Et qu’est-ce que la réalité ?

    - Ne raisonnez plus en termes humains; j’ai abandonné mon enveloppe charnelle : je peux vous révéler les vrais secrets. Non plus les stupides énigmes de l’amour éternel ou la recette d’un philtre pour garder votre fiancée ! J’ai la clef du mystère des mystères: je connais le secret de la mort. Je sais où nous allons quand nous quittons notre dépouille. La preuve : je suis là et j’ai cessé d’exister en termes charnels ! »

    Incroyable ! Christophe ne voulait pas encore se convaincre de la réalité de sa présence. Il lui semblait toujours être dans un de ces songes durant lesquels le dormeur sait qu’il est en train de rêver et parvient à minimiser ses angoisses. Il ne savait plus que penser et dire… et d’ailleurs la marquise songeait-elle à nouer une conversation ? Mille questions se pressaient dans le cerveau en ébullition du jeune homme. Que lui voulait cette femme ? D’où venait cette visiteuse exactement ? Le jeune homme commençait à se demander s’il n’avait pas eu tort de rester sur Facebook : cette femme s’était renseignée sur lui… Il songea à sa petite amie ; elle l’attendait sans doute avec impatience ; il devait se marier bientôt.

    - Alors, jeune homme, vous voulez vous marier ? N’est-ce pas bien banal comme projet ? se lier à une femme ? »

    Comment avait-elle su ce qu’il était en train de penser ? Il était sûr de n’en avoir parlé à personne encore… donc, elle n’avait pas pu avoir l’information sur le net. C’était une drôle de bonne femme. Réclamait-elle vengeance ? Voulait-elle qu’il rétablisse la vérité sur sa vie et sa réputation ? Christophe avait sa petite existence de scientifique et il ne s’imaginait guère en super-héros moderne. Elle éclata de rire.

    - Moi ? Et pourquoi faire mon Dieu ? J’ai suffisamment d’admirateurs… je suis même de plus en plus à la mode… les hommes préfèrent leurs illusions à la vérité. Une raison puissante me guide. Il n’est pas encore temps de vous la révéler. Sachez, pour l’instant, que j’appartiens depuis toujours à la Grande Psyché, que j’en suis une émanation, comme vous. Je suis de partout et je viens de nulle part… de plus loin que vos songes, que vos illusions et vos délires les plus fantastiques. »

    - La Grande Psyché ? Qu’est-ce que c’est ?

    - Le « cosmos conceptuel » ! Le Créateur de toutes choses… Celui que les chrétiens appellent Dieu… à qui les Juifs et les Musulmans n’osent pas même donner un nom… c’est le grand concepteur du cosmos et du vivant… l’Intelligence suprême, la Bonté absolue… Tout ce qui sort de la psyché universelle alimente l’information cosmique et crée des êtres : toute créature exprime une idée…»

    - Le « cosmos conceptuel » ? De mieux en mieux ! Ah ! quel puissant délire ! ou du delirium tremens… vous n’auriez pas forcé sur l’alcool par hasard ? ou sur autre chose ? » La dame négligea ces remarques.

    - Nous sommes tous de l’information… de l’information de plus ou moins bonne qualité, toutefois ! des créatures ou plutôt des concepts habillés de chair et d’os… Nos pensées traversent l’espace-temps au gré de nos désirs et par la force, l’énergie de notre volonté… n’êtes-vous jamais revenu en imagination sur des lieux connus? avez-vous déjà rêvé d’une personne perdue et très aimée ? elle habite votre mémoire tout comme elle hante le cosmos conceptuel…»

    Christophe se mit à rire. Il avait déjà lu tout cela dans les œuvres des penseurs antiques et dans les écrits sur la réincarnation. Les Mésopotamiens y croyaient déjà : ils avaient un dieu potier qui façonnait des créatures et elles prenaient vie… Les Egyptiens l’appelaient Ptah ! Et, dans la plus ancienne version de la Bible, Dieu crée Adam avec de la terre : « tu es poussière et tu retourneras à la poussière ! » C’est le principe même de l’avatar ! En suivant cette logique, la marquise, personne historique ou personnage imaginaire, était une idée devenue vivante. »

    - Ah, ah, ah ! Et c’est pour cela que vous venez me voir, moi, pour me faire de telles révélations ? Vous voulez faire de moi le nouveau prophète d’une religion informatique ? Vous avez vu paraître l’étoile dans le ciel pur et vous cherchez un apôtre d’un genre nouveau ? »

    Il venait de se rappeler qu’il avait dans son cartable un appareil interférométrique ; il s’en servait dans ses recherches pour détecter des interférences et éviter toute intrusion sur son site. La machine envoyait des fréquences allant de 50 à 100 hertz ; sur l’écran, l’image se brouillait si elle était artificielle, donc malveillante. Il en serait de même pour l’hallucination qui le tentait à ce moment-là en lui promettant des révélations fallacieuses.

    - Allez-y, mettez en marche votre appareil ! J’ai envie de rire ; il faut bien s’amuser de temps en temps ! Votre société est devenue bien plate ! »

    Christophe eut le temps de remarquer que, pour la deuxième fois, elle avait intercepté ses pensées… avait-elle le don de la divination ou des qualités de medium ? Ou bien, précisément, émanait-elle de son propre imaginaire, à lui ? Il n’épilogua pas davantage. Il ne lui fallut que quelques minutes pour mettre en marche l’interféromètre et l’orienter vers ce qu’il prenait pour une image en 3 D. Il la fixa, triomphant, alors qu’elle le considérait toujours avec la même ironie.

    Elle ne bougeait pas ! Il dut se rendre à l’évidence : non seulement il ne dormait pas, mais l’image mouvante était réelle ! Incroyable mais authentique ! Alors une autre idée lui vint en tête : pourquoi lui ? qu’est-ce qui lui valait les honneurs de cette apparition ? La marquise, puisqu’il fallait admettre, sa réalité, le devança aussitôt :

    - Je schématise pour mieux expliquer l’inexplicable, l’impensé de l’humanité… certains êtres, dont vous êtes, sont dotés d’une sensibilité nerveuse aux ondes psychiques, que votre science, inculte, ne parvient pas encore à identifier et que, donc, elle ignore… Les autres, les individus vulgaires, subissent un tel conditionnement qu’ils ne peuvent percevoir les créatures réincarnées dont je suis… vous, vous avez de bonnes aptitudes. Bref, je me résume : vous faites un excellent médium. »

    - Peut-être bien ! Mais je suis encore plus curieux d’apprendre comment vous êtes parvenue jusqu’ici… Permettez-moi de vous approcher davantage.

    - Mais comment donc ! Venez et tâtez mon corps astral ! Si vous l’osez. »

    Christophe se sentait partagé entre la curiosité, l’inquiétude et le dépit anticipé d’avoir été joué par une simulatrice. Elle s’approcha sans trop hésiter de cette forme humaine si réelle et tellement incroyable. Elle portait une robe d’un jaune éblouissant, qui lui faisait penser au déguisement de Peau d’âne dans le conte pour enfants. Elle lui tendait une main avec un sourire engageant et moqueur. Il n’allait tout de même pas avoir peur d’une femme, et d’une ombre qui plus est. Bravement, il la saisit. Il ne fut pas attiré aux enfers par la poigne de fer d’un commandeur vengeur. Au contraire, la sensation, au toucher, était très douce : le contact d’une peau d’opaline lui rappelait une substance comparable à de l’ouate, une étoffe luxueuse, douce et moelleuse. La marquise la regardait, avec amusement, caresser ses poignets d’une finesse extrême, à la

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