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Pollock
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Pollock

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Jackson Pollock
(Cody, Wyoming, 1912 – New York, 1956) Pollock fut le représentant le plus important et le plus influent de l’expressionnisme abstrait. Il avait étudié auprès du régionaliste Thomas Hart Benton, et était également marié au peintre abstrait Lee Krasner (étudiante de Hans Hofmann). Il comptait parmi ses collègues Aschile Gorky, Willem de Kooning, Franz Kline, Robert Motherwell, et d’autres issus de l’école dite de New York. En 1947, il développa l’action painting ou, en termes moins précis, le dripping. Il s’intéressait à un processus de création et d’expression du moment, impliquant le moins de références possibles à la réalité visuelle. Abandonnant les pinceaux, le chevalet et la palette, il contrôlait lui-même les quantités de peinture qu’il faisait couler ou projetait sur une toile généralement très grande qu’il avait l’habitude d’étaler sur le sol. Bien que son obsession première fût l’expression de sa propre vie intérieure (subconscient) à travers son art, sa vie émotionnelle était sans conteste très instable, son approche du processus créatif et la plupart de ses oeuvres bouleversèrent de façon définitive l’évolution de l’art en Amérique.
LanguageFrançais
Release dateSep 15, 2015
ISBN9781783108381
Pollock

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    Book preview

    Pollock - Donald Wigal

    Préface

    Chacune des quatre parties de cet ouvrage traite une période d’au moins dix ans. Chaque sous-partie, couvrant généralement un an, débute par une énumération d’événements historiques liés plus ou moins directement à Pollock ou offrant un arrière-plan significatif à sa vie. Les faits mentionnés au cours de l’année en question ne suivent pas forcément un ordre chronologique, ce livre ne cherchant pas à proposer une chronologie rigoureuse et détaillée.

    Bien que plus d’une vingtaine de biographies de Pollock aient servi de référence à l’élaboration de cet ouvrage, lorsque les biographes de Pollock sont mentionnés sans citer de nom particulier, il s’agira du travail approfondi de Naifeh et Smith. De même, les biographes de De Kooning seront toujours Stevens et Swan. La biographe de Peggy Guggenheim est systématiquement Mary V. Dearborn.

    Untitled (Self-portrait) (Sans titre (Autoportrait), 1931-1935.

    Huile sur gesso sur toile, montée sur panneau de fibres,

    18,4 x 13,3 cm. The Pollock-Krasner Foundation, New York.

    Introduction

    Il y a cinquante ans disparaissait l’artiste Jackson Pollock, mais il vit toujours grâce à ses biographies, et surtout à travers son œuvre. Pourtant, son génie s’exprimait essentiellement par sa manière de dissimuler le visible et de révéler l’invisible.

    Une étude des faits marquants de la vie de Pollock pourrait contribuer à lever le voile sur son âme troublée et son travail saisissant, et éclairerait ses périodes de turbulences. Néanmoins, cet apercu ne prétend pas proposer une explication définitive du comportement de Pollock ou de son génie. Il entend nous offrir une opportunité de contempler un homme et son œuvre, de se laisser étonner par ses aspects négatifs, d’en admirer les facettes positives et de prendre conscience de ses ambiguïtés. Et on pourra alors peut-être comprendre qu’avec sa manière tellement unique de dissimuler sa personne et son art, Pollock révéla paradoxalement beaucoup de choses de sa vie intérieure, rendant ainsi visible et plus compréhensible un peu de sa quête spirituelle – sinon celle, universelle, de l’humanité.

    De nombreux événements de la vie de Pollock et la majeure partie de son art radicalement nouveau se révélèrent mystiques et profanes à la fois, laids et pourtant impressionnants. Par moment, l’artiste, comme son art, semblaient innocents, gracieux et sensibles. De même, sa vie comme son travail pouvaient paraître triviaux, machos et corrosifs.

    La biographe Andrea Gabor le voyait « intelligent et naïf, doux et agressif, vulnérable et destructeur » à la fois. Elle constate que « peu d’artistes... personnifiaient aussi parfaitement les excès masculins de l’époque que Jackson Pollock, qui incarna l’archétype d’une vitalité artistique débridée ». (427)

    Les cycles de la vie et de l’œuvre de Pollock coïncident parfois, le révélant occasionnellement sous les traits ambivalents d’un enfant / homme, d’un ange / bête ou d’un créateur / destructeur. Comme tout le monde, on peut être à la fois rebutés par la laideur et attirés par la beauté qui émanent de la forte présence de l’artiste et de ses splendides réalisations. En même temps, l’ironie du sort veut que ce soient ses tendances intimes à l’autodestruction et son isolement qui l’ont mené – ou il les mena – à sa fin extrêmement médiatique, il y a cinquante ans.

    Plusieurs aspects secondaires de la vie de Pollock n’ont pas été développés ici, comme sa relation avec les familles de ses frères, son amour des chiens, sa fascination pour les vieilles voitures ou la vitesse, etc. L’un des objectifs de cet aperçu concis de sa vie et de cette sélection de reproductions est plutôt de contribuer à replacer ses œuvres dans un contexte historique. Cependant, ce que Pollock déclara au sujet de son She-Wolf : « toute tentative de ma part de dire quelque chose à son sujet, d’oser une explication de l’inexplicable, ne ferait que le détruire », est sûrement vrai pour son travail en général. Et pourtant, certains spectateurs ont probablement besoin d’aide pour atteindre ce point où l’art est vécu simplement comme de l’art, si possible aussi avec quelque connaissance en la matière.

    En outre, certains fans de l’art de Pollock pourraient préférer ne rien savoir de la vie turbulente de l’artiste. L’ébauche biographique qui suit est destinée en particulier à ceux dont la vision est enrichie par une telle connaissance. Certains amateurs d’art trouveront une analyse scientifique de l’art utile, d’autres non. Les premiers pourraient bien être fascinés par Richard Taylor, professeur de physique à l’Université de l’Oregon, dont les recherches étonnantes et cruciales se sont portées sur l’ « expressionnisme fractal » et les processus dits « chaotiques » dans l’œuvre de Pollock. (107).

    Reproductions

    Aux yeux de certains lecteurs, les reproductions, quelle que soit leur qualité, sont au mieux des cartes postales évoquant l’œuvre elle-même, qui ne connaît, il est vrai, aucun substitut parfait. On a suggéré de présenter les deux premières reproductions dans leurs formats originaux, car elles sont de petites tailles. Il faut cependant souligner que les reproductions ne sont souvent pas aux dimensions des œuvres d’origine ; petites ou grandes, elles paraîtront de la même taille sur les pages du livre. Dans une biographie de Pollock, par exemple, une reproduction de Guernica, reproduite sur le revers, fait un tiers de la hauteur de Birth de Pollock. Mais la hauteur réelle de l’œuvre de Picasso est trois fois supérieure à celle de Birth de Pollock.

    La chronologie des principaux événements présentés ici est généralement la même que celle de douzaines de biographies publiées, bien que d’autres faits et, en particulier, l’ordre dans lequel Pollock réalisa réellement ses œuvres puissent différer. La chronologie historique est ici souvent sacrifiée au profit du développement thématique.

    Les titres des peintures

    Interrogée sur les numéros que portaient les tableaux de Pollock, Lee Krasner déclara que Pollock désirait avant tout intéresser le public à la « pure peinture » plutôt que le distraire par des titres. En août 1950, dans une interview au New Yorker, Pollock expliqua : « J’ai décidé de cesser d’ajouter à la confusion », suscitée par les titres. Mais les œuvres qui suivent furent parfois numérotées, parfois nommées, parfois les deux.

    La même œuvre peut apparaître dans des expositions différentes sous des titres différents. La liste alphabétique en fin d’ouvrage s’attache plus aux titres attribués dans les expositions plutôt qu’aux peintures elles-mêmes, bien qu’un rapprochement ait été tenté. Pour des informations plus complètes, il est possible de se référer au Catalogue raisonné des peintures, dessins et autres œuvres, édité par Francis V. O’Connor et Eugene V. Thaw, publié aux Presses de l’Université de Yale (1978), auquel est venu s’ajouter un supplément publié par la Fondation Pollock-Krasner en 1995.

    Souvent, les mots utilisés dans les titres de Pollock ont peu, pour ne pas dire rien à voir avec la peinture. La galeriste Betty Parsons, ajouta la lettre A à certains titres, indiquant qu’ils furent certainement exposés, mais non vendus, en 1948. Cependant, il se pourrait qu’ils n’aient pas été non plus peints au cours de l’année indiquée dans le titre. Les titres ultérieurs comportent des chiffres, des mots ou des combinaisons des deux, certains incluant ou non une date. En outre, ni les chiffres ni les dates n’indiquent d’ordre chronologique. Néanmoins, l’annexe offre une liste des reproductions présentées dans ce livre. Les titres sont listés dans un ordre chronologique en fonction de l’année de leur création, si elle est connue, ou bien de l’année mentionnée dans le titre.

    Parmi les titres présentés ici, on compte les deux recueils de séries, Sounds in the Grass et Accabonac Creek. Certains ouvrages de référence n’indiquent pas le chiffre. Plus d’une cinquantaine d’œuvres de Pollock sont dépourvues de titres, mais certaines comportent déjà une année dans leur titre, tandis que d’autres s’en sont (aussi) vu attribuer une.

    Biographies

    Contrairement à des biographies formelles, le présent ouvrage recourt parfois à des œuvres fictionnelles ou poétiques pour parler de la vie réelle de Pollock. Il faut cependant admettre que ces récits fictifs sont moins fiables que ne le seraient des biographies autorisées et, en certains endroits, ils sont, certes, excessifs. Pourtant, les plus fantaisistes, tel le poème Ode on causality de Frank O’Hara ou le film PollockSquared (2005) de Bill Rabinovitch, parviennent parfois à un degré de vérité rarement atteint par les simples faits.

    Ces fictions peuvent aussi contribuer à établir des liens entre des faits connus. Pour chaque information communiquée, ce livre tente de distinguer les faits établis de la fiction, tout en reconnaissant que, quelquefois, cette dernière est plus fidèle à la vérité que les faits eux-mêmes. Tous les ouvrages biographiques ayant servi de référence sont réunis dans le premier groupe de notes.

    Le sol de l’atelier de Jackson Pollock. The spring, East Hampton, Long Island. 1998.

    The She-Wolf (La Louve), 1943.

    Huile, gouache et plâtre sur toile, 106,4 x 170,2 cm.

    The Museum of Modern Art, New York.

    Birth (Naissance), 1938-1941.

    Huile sur toile, 116,4 x 55,1 cm. The Tate Gallery, Londres

    Untitled, (Scent) (Sans titre (Parfum)), 1953-1955.

    Huile sur toile, 99 x 146 cm.

    Collection David Greffen, Los Angeles.

    Contexte historique

    Certaines déclarations de contemporains de Pollock agrémentant cette rétrospective de sa vie et de son art peuvent ne pas sembler remarquables ou même dignes d’intérêt aujourd’hui ; il ne faut pas oublier qu’elles ont été faites des années avant que l’héritage de Pollock ne soit complètement reconnu. Certains propos furent même prophétiques, et prédisaient le succès de l’artiste à une époque où seuls quelques proches parents et un petit cercle d’amis l’encourageaient.

    Certains de ses contemporains ne se contentaient pas de voir le potentiel de l’artiste et nombre d’entre eux risquaient leur réputation en le soutenant. Ceci était particulièremement vrai pour ses frères artistes, pour Thomas Hart Benton, Lee Krasner, Howard Putzel, Peggy Guggenheim, Clement Greenberg et James Johnson Sweeney. Les pages suivantes esquissent un bref profil de chacune de ces influentes personnalités qui offrirent leur appui à Pollock.

    L’évolution de la vision politique de Pollock

    Cet aperçu, comme les biographies précédentes, films, pièces de théâtre et autres études sur Pollock, tombera probablement dans le même travers que le politologue David Walsh décèle dans le scénario du film d’Ed Harris, Jackson Pollock ; il remarque que le film est « un assemblage de détails biographiques, dont on ne recherche pas la signification profonde ». (297) Pourtant le film, comme cette biographie et beaucoup d’autres, laisse une entière liberté de jugement aux lecteurs et aux spectateurs.

    Il est évident que la plupart des personnes qui se penchent sur Pollock cherchent à trouver les origines psychologiques de sa vie torturée. Cet aperçu en aborde les aspects les plus typiques comme l’alcoolisme. Il mentionne aussi les découvertes des psychiatres et présente les résultats d’études comme celles de Francis V. O’Connor, l’un des premiers chercheurs à s’intéresser à Pollock. On prend également acte du commentaire de Walsh : « Un besoin désespéré d’approbation force généralement la personne à faire des choses identifiables... » Le besoin d’approbation de Pollock « frisait la névrose ».

    Cependant, Walsh souligne que le problème de Pollock et, plus généralement, celui de l’expressionnisme abstrait et de la peinture américaine de l’après-guerre, étaient en grande partie liés au contexte politique dramatique et difficile du milieu du XXe siècle. Il désigne de façon spécifique le développement du stalinisme en Union soviétique et des Partis communistes à travers le monde, la nature de l’opposition de Trotsky à Staline et le destin tragique de la révolution socialiste, ainsi que le caractère conservateur de la société américaine d’après-guerre. (296)

    Portraits

    De brefs profils des figures-clefs de la vie de Pollock contribuent à animer l’arrière-plan de la vie de l’artiste en la replaçant dans un contexte historique. Des miniatures des personnages-clefs nommés ci-dessus viennent émailler ce livre, ainsi que des notes sur Willem De Kooning, Matta, Ruth Kligman et Frank O’Hara.

    Cycles

    Les périodes stylistiques de Pollock se chevauchent parfois. Comme les premières œuvres de beaucoup d’esprits créatifs – dans le cas de Pollock, son travail avant 1947 env.–, elles suscitent l’admiration au moment de leur création. Ensuite, les critiques ont pour habitude de les dévaloriser, principalement parce que les travaux postérieurs sont bien meilleurs. De même, les œuvres produites après l’apogée – pour Pollock après 1950 env.– sont considérées comme de moindre valeur. Cependant, il ne serait pas difficile de prouver que même la moins cotée des œuvres de Pollock lui aurait valu une place permanente dans l’histoire de l’art.

    Pepe Karmel observe que « ce qui apparaissait aux observateurs des années 40 et 50 comme une évolution plutôt imperceptible – de Pollock en tant qu’artiste – s’articulait maintenant en trois phases distinctes : les premières œuvres, les « classiques » peintures au dripping et ses œuvres ultimes ». (Le terme ‘dripping’ est utilisé ici uniquement pour citer les autres, car ce n’était pas un terme qu’affectionnait Pollock ou Krasner.) Tout en respectant les trois cycles de Karmel, ce livre envisage la vie de Pollock en quatre sections :

    Le mythe de l’artiste cow-boy

    La lutte des premières années : rendre l’énergie visible

    Les années de gloire : l’art comme clef de soi-même

    Le génie de son geste : impliquer l’art et les autres dans son autodestruction

    Reflection on the Big Dipper (Reflet sur la Grande Ourse), 1947.

    Huile sur toile, 111 x 92 cm. Stedelijk Museum, Amsterdam.

    Le mythe de l’artiste cow-boy

    Naissance

    L’année de la naissance de Jackson Pollock fut celle où le démocrate Woodrow Wilson (1856-1924) devint président des USA, mais c’est la politique du président démocrate suivant, Franklin Delano Roosevelt (1882-1945), qui influença de façon plus immédiate Jackson et le monde de l’art. Comme par hasard, lors de l’année de la naissance et celle de la mort de Pollock, le monde connut des catastrophes maritimes : la première, le naufrage du Titanic en 1912, pendant son voyage d’inauguration vers le port de New York, la seconde, celui de l’Andrea Doria en 1956. La principale nouvelle de l’année 1912 fut sans conteste la fin du Titanic durant sa croisière inaugurale. C’est aussi cette année-là que l’Arizona et le Nouveau-Mexique entrèrent dans la confédération. Mais les événements de l’année qui marquèrent profondément Pollock, furent la publication de la Théorie de la Psychanalyse de C.G. Jung et le succès que connut l’œuvre de Picasso, Violon et feuille de musique.

    Cody

    Le 28 janvier 1912, Jackson naquit au ranch Watkins à Cody, Wyoming. La ville est située dans le nord-ouest de l’Etat, à environ quatre-vingt kilomètres du Parc national de Yellowstone. Celui-ci est universellement connu comme « l’Etat des cow-boys » et fait partie du légendaire far-west. Lorsque les parents de Jackson s’y installèrent, la ville comptait probablement environ 500 âmes. (334) Les premières expériences de Pollock furent imprégnées de l’atmosphère des mythes et des romances du Vieil Ouest. La ville où Jackson vit le jour, fut fondée, à peine six ans avant que la famille Pollock ne vienne s’y installer, par le colonel William ‘Buffalo Bill’ Cody (1846-1917). Il était, et est probablement toujours, le personnage historique le plus célèbre de l’Etat. Des dizaines de lieux de la région portent son nom. C’était un chasseur de bisons et un « artiste » de réputation internationale, le promoteur – et même le créateur – de certaines icônes légendaires de la culture du far-west américain. Cody massacra inutilement 6 570 bisons, car, en ce temps-là, on n’était pas très sensible aux droits des animaux ni même aux conceptions écologiques de l’environnement. Au moment de la naissance de Jackson, la fin de Buffalo Bill était proche. D’une façon unique, Pollock sut perpétuer l’esprit de certaines images de Cody sous son jour le plus novateur, rebelle et sauvage, ainsi que des mythes qui entouraient les légendaires cow-boys américains. Bien que Pollock n’ait passé que les premiers mois de son enfance à Cody, il ne détrompait pas les gens persuadés qu’il avait vécu dans cette authentique ville de l’Ouest jusqu’à son arrivée à New York. Dans le roman d’Updike Seek my Face (2002) (Non traduit, NdT), inspiré du peintre, le personnage de Pollock « disait toujours aux gens qu’il avait été un cow-boy, et c’était un mensonge, mais son corps en avait bien l’apparence ». (429) Les biographes de Willem De Kooning déclarent que « l’autodestruction de Pollock avait une sorte de grandeur que respectaient beaucoup de membres du monde artistique. Pollock apparaissait comme un personnage typiquement américain, un authentique visionnaire, un cow-boy et un anticonformiste ». (189)

    Fiction

    Le titre choisi par Updike fait référence à un vers du psaume 27 : « Mon cœur dit de ta part : Cherchez ma face ! Je cherche ta face, ô Eternel ! » Le psalmiste et le romancier, de même que le biographe, cherchent à dévoiler l’image de leur sujet, tout en sachant que cette image demeurera malgré tout un mystère. Toutefois, Updike masque, lui aussi, son sujet – Jackson Pollock –, mais de façon très subtile. Par exemple, certains noms dans le roman d’Updike sont des allusions plus qu’évidentes, comme Onna de Genoog incarnant Willem De Kooning, ou Hackmann désignant Hofmann. Seamus O’Rourke est pratiquement une anagramme de Mark Rothko. Le personnage principal d’Updike se nomme Zack McCoy dans le roman. Ce nom attribué à l’artiste est une double allusion à son prénom familier (Jack) et au véritable nom de famille de son père (McCoy).

    The Real McCoy

    Apparemment, seule sa famille l’appelait Jack. (146) Il signa au moins une lettre « Jacks ». (384) En 1930, Pollock abandonna son second prénom Paul. Des années plus tard, sa femme Lee Krasner parlera de lui, même en sa présence, en l’appelant « Pollock ».

    McCoy était le nom de naissance du père de Jackson. A la mort de ses parents, en 1897, LeRoy McCoy fut pris en charge par une famille du nom de Pollock. Dix jours avant son vingt et unième anniversaire, LeRoy fut adopté par les Pollock et prit leur nom. Plus tard, il s’adressa à un avocat pour reprendre son patronyme d’origine, McCoy, mais la démarche était trop coûteuse. (383)

    Composition with pouring II (Composition avec coulées II), 1943.

    Huile sur toile, 64,7 x 56,2 cm. Smithsonian Institution, Washington, DC.

    Male et Female (Mâle et Femelle), 1942.

    Huile sur toile, 184,4 x 124,5 cm. Musée d’art de Philadelphie.

    Plus étrange que la fiction

    Il est vrai que les biographies se servent rarement d’éléments fictionnels, mais certains romans, pièces de théâtre ou films sur Pollock contribuent, avec la réserve de rigueur en pareil cas, à combler certaines lacunes. Le critique du Time Magazine trouva le roman d’Updike « agréable et intelligent ». (63) En réalité, le portrait très imaginatif de Pollock dressé par Updike révèle non seulement certains détails de façon bien plus claire que certaines biographies sérieuses, mais confronte les faits aux rumeurs colportées par les tabloïds sur la présumée homosexualité, les liaisons et les enfants illégitimes de l’artiste. Nombreux sont les fans de Pollock à penser que

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