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Ukiyo-E
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Ukiyo-E

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L’Ukiyo-e (« images du monde flottant ») est un courant artistique japonais qui naquit pendant la période prospère de l’Edo (1615-1868). Caractéristiques de cette période, les estampes sont l’œuvre collective d’un artiste, d’un graveur et d’un imprimeur. Développées en raison de leur faible coût grâce à l’évolution de la technique, elles représentent la vie quotidienne, les femmes, les acteurs du théâtre kabuki ou encore les lutteurs de sumo. Le paysage s’imposera ensuite comme l’un des sujets favoris. Moronobu, le fondateur, Shunsho, Utamaro, Hokusai ou encore Hiroshige sont les artistes les plus réputés de ce mouvement. En 1868, le Japon s’ouvre à l’Occident. La maîtrise de la technique, la finesse des œuvres et la précision graphique séduisent immédiatement l’Occident et influencent les plus grands tels les impressionnistes, Van Gogh ou Klimt. C’est la période dite du « Japonisme ». A travers une analyse thématique, Woldemar von Seidlitz et Dora Amsden soulignent en filigrane l’influence immense qu’eut ce mouvement sur toute la scène artistique occidentale. Ces magnifiques estampes représentant l’évolution de l’idéal féminin, la place des dieux, ou l’importance accordée au paysage, sont aussi le précieux témoignage d’une société aujourd’hui révolue.
LanguageFrançais
Release dateMar 9, 2016
ISBN9781785259371
Ukiyo-E

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    Ukiyo-E - Woldemar von Seidlitz

    INDEX

    Utagawa Kunisada, Portrait de Hiroshige, 1858.

    Gravure sur bois en couleurs, 35,5 x 23,4 cm. Leeds Art Gallery, Leeds.

    LA NAISSANCE DE L’UKIYO-E

    L’art de l’Ukiyo-e est « une approche spirituelle de la réalité et du naturel de la vie quotidienne, de la communication avec la nature et de l’esprit d’un peuple vif et ouvert, animé d’un appétit passionné pour l’art ». Cette définition de James Jarves résume avec vigueur les motivations des maîtres de l’Ukiyo-e, cette école artistique populaire japonaise si poétiquement surnommée « Le Monde flottant ».

    Pour le pèlerin passionné, admirateur de la nature et de l’art, qui a visité l’Orient, il n’est pas nécessaire de préparer la voie vers une compréhension correcte de l’Ukiyo-e. Cet allègre idéaliste se fie bien moins aux dogmes qu’à ses impressions. « Je ne connais rien à l’art, mais je sais ce que j’aime », est le langage de la sincérité, une sincérité qui ne s’appuie pas sur la foi ou la tradition, pas plus que sur des idées toutes faites ou des conventions. Il est vrai que « seuls ceux qui sont résolument déterminés à étudier un art étranger du point de vue d’un autochtone, peuvent aspirer à sonder la profondeur des sentiments et la beauté de cet art ».

    Pour celui qui assimile les idées nouvelles de façon instinctive, ou grâce à la capacité d’évaluation de son subconscient, la chose est aisée mais, pour celui dont l’intuition est moins développée, une période d’apprentissage sera nécessaire afin d’apprécier « un élément aussi récalcitrant que l’art japonais, exigeant tout à la fois une certaine attention et le questionnement de toutes les théories préétablies ». Ces esquisses de propos ne sont pas le fruit d’une expression individuelle, mais le résultat d’un effort pour présenter, sous une forme condensée, les opinions de ceux que des études et des recherches ont rendus aptes à parler avec autorité de cette forme d’art japonais, qui dans sa réalisation la plus concrète, l’estampe Ukiyo-e, sollicite l’attention du monde de l’art.

    Cependant, l’évolution de l’estampe en couleurs n’est qu’un attribut objectif de l’Ukiyo-e, car, comme l’indiqua le professeur Ernest Fenollosa, « La véritable histoire de l’Ukiyo-e, bien que l’estampe en fût l’une de ses manifestations les plus fascinantes, n’est pas l’histoire de la technique de l’art de l’estampe, mais bien l’histoire esthétique d’une forme d’expression particulière. »

    Afin de conclure ces remarques préliminaires, nous ne résistons pas à la tentation de recourir à une ultime citation, car ici Walter Pater affiche sa vision de l’art comme une ambition légitime, quelle que soit sa forme, et pourtant inconciliable avec toute idée préconçue ou tradition : « Le fondement de ce procès légitime n’est pas d’opposer une époque ou une école d’art à une autre, mais bien de confronter toutes les écoles qui se succédèrent, à la stupidité imperméable à la substance, et à la vulgarité hermétique à la forme. »

    Ecole Tosa, Vue sur le mont Fuji (Fujimizu), époque de Muromachi, XVIe siècle.

    Paravent à six volets (byōbu), 88,4 x 269,2 cm. Collection privée, en dépôt au Musée national de Tokyo, Tokyo.

    Ecole Kanō, Poursuite de chiens (Inuoumono), époque d’Edo, vers 1640-1650.

    Paravent à volets (byōbu), encre et couleur sur feuilles d’or, 121 x 280 cm. Collection privée.

    Utagawa Toyokuni, Vue d’un théâtre kabuki, vers 1800.

    Gravure sur bois en couleurs, 37,7 x 74,7 cm. The British Museum, Londres.

    Puisque l’école populaire de l’Ukiyo-e fut l’aboutissement d’une évolution de plus d’un millénaire, il est nécessaire de remonter les siècles afin de comprendre et de suivre les étapes de son développement.

    Bien que les origines de la peinture japonaise soient obscures, et occultées par la tradition, nul doute que la Chine et la Corée furent les sources directes où le Japon puisa son art ; tout en étant, bien sûr, influencé de façon moins évidente par la Perse et l’Inde, fontaine sacrée de l’art oriental et de la religion, qui progressèrent toujours de concert.

    En Chine, la dynastie Ming donna naissance à un style original, qui domina pendant des siècles l’art du Japon. L’ample calligraphie d’Hokusai révèle une influence héréditaire, et ses graveurs sur bois, entraînés à suivre les lignes gracieuses et fluides de son œuvre si authentiquement japonaise, furent déconcertés par ses soudaines échappées vers un réalisme plus anguleux.

    Les écoles chinoises et bouddhistes dataient du VIe siècle, aussi l’empereur du Japon, Heizei, fonda la première académie impériale en 808. Cette académie avec l’école de Yamato-e, établie par Fujiwara Motomitsu au XIe siècle, aboutirent à l’illustre école de Tosa qui, avec celle de Kanō, son auguste et aristocratique rivale, conservèrent une suprématie incontestée pendant des siècles, jusqu’à ce que ne vienne les défier la plébéienne école d’Ukiyo-e, inspirée du peuple du Japon.

    Anonyme, Cavaliers acrobates coréens, 1683.

    Gravure sur bois, 25,3 x 37,2 cm. Victoria & Albert Museum, Londres.

    Katsushika Hokusai, Théâtre kabuki à Edo vu d’une perspective originale, vers 1788-1789.

    Gravure sur bois en couleurs, 26,3 x 39,3 cm. The British Museum, Londres.

    Katsukawa Shunkō, Les Acteurs kabuki Ichikawa Monnosuke II et Sakata Hangoro III, vers 1785.

    Gravure sur bois en couleurs, 34 x 22,5 cm. Victoria & Albert Museum, Londres.

    Tōshūsai Sharaku, Les Acteurs Ichikawa Komazo dans le rôle de Chubei et Nakayama Tomisaburo dans le rôle d’Umegawa, 1794.

    Gravure sur bois en couleurs, 38 x 25,5 cm. Musée national de Tokyo, Tokyo.

    On a décrit l’école de Tosa comme la « manifestation d’une foi ardente, à travers la pureté d’un style éthéré ». Celle-ci incarne en fait le goût de la cour de Kyoto, et fut reléguée au service de l’aristocratie. Elle était le reflet du mystère ésotérique du shintoïsme et de l’entourage sacré de l’empereur. Le cérémonial de la cour, ses fêtes et ses solennités religieuses, les danses auxquelles participaient les daimios (seigneurs féodaux), vêtus de costumes d’apparat tombant en plis harmonieux et lourds, étaient dépeints avec une élégance consommée et une délicatesse de touche, trahissant une familiarité certaine avec les méthodes occultes de la miniature persane. Les artistes de l’école de Tosa se servaient de pinceaux très fins et pointus, et faisaient ressortir la brillance de leurs couleurs sur des fonds resplendissants dorés à la feuille. C’est également à cette école que nous devons les motifs intriqués, aux détails microscopiques, que l’on peut voir sur les plus beaux spécimens d’objets en laque dorée, et sur les paravents, dont la richesse n’a jamais été surpassée.

    L’art japonais fut toujours dominé par la hiérarchie ecclésiastique et par des souverains temporels, et l’école de Tosa en constitue un exemple notoire, car celle-ci vit le jour sur l’impulsion du prince-peintre Tsunetaka, qui occupait également la position de vice-gouverneur de la province de Tosa. Dès son avènement, l’école de Tosa dut son prestige à l’empereur et à sa noble suite, car, plus tard, l’école de Kanō devint l’école officielle des shoguns usurpateurs. Ainsi l’histoire religieuse, politique et artistique du Japon fut toujours étroitement liée. Le style de l’école de Tosa fut battu en brèche par l’influence chinoise grandissante, culminant au XIVe siècle, grâce à l’école rivale de Kanō. Cette dernière puisait ses origines en Chine. A la fin du XIVe siècle, le prêtre bouddhiste chinois, Josetsu, quitta son propre pays pour le Japon. Emportant avec lui la tradition chinoise, il fonda une nouvelle dynastie dont les descendants représentent toujours le courant de peinture le plus illustre du Japon. A ce jour, l’école de Kanō constitue encore un bastion du classicisme, ce qui, au Japon, signifie avant tout l’adhésion aux modèles chinois et à une technique traditionnelle, en évitant les sujets inspirés de la vie quotidienne. La calligraphie chinoise est la base de la technique de l’école de Kanō, et le pinceau japonais devait son aisance fondamentalement à l’art de l’écriture. Certes, il faut de la dextérité pour produire ces lignes audacieuses et incisives, et il suffit d’un geste à peine plus ample pour donner aux signes de l’alphabet un effet de drapé, ou, tout aussi facilement, pour les décomposer en leurs constituants les plus abstraits.

    Dans sa précieuse étude, Ligne et Forme, Walter Crane établit la sagesse de cette méthode comme approche préliminaire du pinceau, mais les idéogrammes chinois et japonais confèrent une portée beaucoup plus vaste au coup de pinceau initial.

    Okumura Masanobu, Vol du bijou dans le palais du dragon, 1745-1750.

    Gravure sur bois, colorée à la main, 29,4 x 43,7 cm. Collection William Sturgis Bilegow, Museum of Fine Arts, Boston.

    Okumura Masanobu, Image en perspective d’une scène de théâtre, 1743.

    Beni-e, 32,5 x 46,1 cm. Ostasiatische Kunstsammlung, Museum für Asiatische Kunst, Staatliche Museen zu Berlin, Berlin.

    Katsukawa Shunshō, L’Acteur Ichikawa Danjūrō V dans le rôle de Kintoki, 1781.

    Gravure sur bois en couleurs, 32 x 14,9 cm. The Art Institute of Chicago, Chicago.

    Torii Kiyohiro, L’Acteur Nakamura Tomijōrō dans le rôle de Musume Yokobue (Musume Yokobue Nakamura Tomijōrō), 1753.

    Benizuri-e, 43,5 x 29,3 cm. Musée d’Art de la ville de Chiba, Chiba.

    Tōshūsai Sharaku, Les Acteurs Ichikawa Omezō dans le rôle de Tomita Heitarō et Ōtani Oniji III dans le rôle de Kawashima Jubugorō, 1794.

    Gravure sur bois en couleurs, 38,8 x 25,8 cm. Honolulu Academy of Arts, Honolulu.

    Tōshūsai Sharaku, Les Acteurs Matsumoto Kōshirō IV et Nakayama Tomisaburō, 1794.

    Gravure sur bois en couleurs, 36,2 x 24,7 cm. Collection Baur, Genève.

    Les premiers artistes de Kanō réduisirent la peinture à un art académique, et détruisirent le naturalisme, jusqu’à ce que le génie de Kanō Masanobu, qui donna son nom à l’école, et même celui de son fils, Kanō Motonobu le véritable « Kanō », ne vînt ajouter aux modèles chinois et à leur monotonie monochrome, la chaleur des couleurs et l’harmonie du dessin, régénérant et revivifiant ainsi tout le système. L’école de Kanō succomba à l’influence chinoise, l’école de Tosa la combattit, tendant vers un art exclusivement national, l’Ukiyo-e combla le fossé, et devint le représentant des deux écoles, provoquant une expansion de cet art qui n’aurait jamais été réalisée par ses rivaux aristocratiques. La vigueur et la force des shoguns conquérants guidèrent l’école de Kanō, alors que le lustre de l’école de Tosa était une émanation de l’empereur sanctifié et mystérieux.

    Les sujets favoris des peintres de l’école de Kanō étaient principalement les saints et les philosophes chinois, les héros mythologiques et légendaires, représentés dans diverses attitudes sur des fonds tout à fait conventionnels, constitués de nuages et de brume alternant avec des éléments emblématiques. Nombre des saints et héros de l’école de Kanō manifestent une ressemblance frappante avec des thèmes médiévaux, car ils sont souvent représentés flottant au-dessus de masses nuageuses tourmentées, arborant des draperies aériennes et la tête cerclée d’un halo.

    Sous le pinceau de Kanō Motonobu, le classicisme formel commença à s’estomper. Avec ce nouveau mouvement, déclare Kakuzo Okakura, « l’art quitta l’homme pour la nature, et dans la pureté des paysages dessinés à l’encre, dans les gracieuses nuées de bambous et de pins, il chercha et trouva son refuge ».

    L’espace imparti ne permet pas de se pencher sur les artisans des nombreuses écoles d’art japonaises. Il faudrait un long catalogue pour énumérer les maîtres qui inaugurèrent ces écoles, car, chaque fois qu’un artiste développait un talent exceptionnel au Japon, il fondait immédiatement sa propre académie, et il incombait alors aux générations suivantes d’adhérer rigoureusement aux principes qu’il avait établis, faisant d’eux les esclaves des méthodes traditionnelles.

    Durant la période d’anarchie du XIVe siècle, l’art stagna au Japon, mais un renouveau correspondant à la Renaissance occidentale s’ensuivit. Au Japon, comme en Europe, le XVe siècle fut fondamentalement un âge du renouveau. W. Anderson illustre en une phrase significative cette force active : « Toutes les époques de saine prospérité humaine sont plus ou moins des renouveaux. Une rapide étude montrerait probablement que l’ère ptolémaïque en Egypte fut une renaissance de l’âge d’or de Thèbes,

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