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Rapport mondial sur les salaires 2012 / 13
Salaires et croissance quitable

Rapport mondial sur les salaires 2012/13
LOrganisation internationale du Travail
LOrganisation internationale du Travail (OIT) a t cre en 1919 pour faire
progresser la cause de la justice sociale et contribuer ainsi une paix universelle
durable. LOIT est linstitution charge au niveau mondial dlaborer et de super-
viser les normes internationales du travail. Cest la seule agence des Nations Unies
dote dune structure tripartite qui rassemble des reprsentants des gouvernements,
des employeurs et des travailleurs, pour laborer ensemble des politiques et des pro-
grammes et promouvoir le travail dcent pour tous. Cette spcifcit confre lÒIT
un avantage pour intgrer les connaissances du terrain sur le travail et lemploi.
Rapport mondial
sur les salaires 2012 /13
Bureau international du Travail Genve
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Copyright Organisation internationale du Travail 2013
Premire dition 2013
Rapport mondial sur les salaires 2012/13: salaires et croissance quitable
Genve, Bureau international du Travail, 2013
salaire / salaire minimum / emploi / chmage / revenu des mnages / productivit du travail / rcession conomique / pays
dvelopps / pays en dveloppement
13.07
ISBN 978-92-2-226236-6 (imprim)
ISBN 978-92-2-226237-3 (PDF)
Egalement disponible en version PDF en anglais: ISBN 978-92-2-126237-4; arabe: ISBN 978-92-2-526237-0;
chinois: ISBN 978-92-2-626237-9; espagnol: ISBN 978-92-2-326237-2; portugais: ISBN 978-92-2-826237-7
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Prface
La crise mondiale a eu des rpercussions ngatives importantes sur les marchs du
travail dans de nombreuses rgions du monde, et la reprise sàvre l`heure actuelle
incertaine et fuctuante. Au niveau mondial, les salaires moyens ont augment, mais
des rythmes plus lents quavant la crise. Le prsent Rapport mondial sur les salaires
2012/13 montre toutefois que limpact de la crise sur les salaires est loin davoir t
uniforme.
Dans les conomies dveloppes, la crise a entran une baisse double creux
des salaires. Les salaires moyens ont ainsi baiss en 2008, puis de nouveau en 2011;
et les perspectives actuelles semblent indiquer que, dans bon nombre de ces pays, les
salaires nenregistrent en 2012 quune hausse marginale, voire pas de hausse du tout.
Dans les rgions mergentes, la croissance des salaires a gnralement mieux
rsist. Forte en Asie, cette croissance a montr des tendances plus modestes mais
nanmoins positives en Afrique, en Amrique latine et aux Carabes.
En Europe orientale et en Asie centrale, aprs la chute des salaires provoque par
la crise en 2009, on enregistre depuis un retour une croissance des salaires positive
mais relativement plus faible.
Sur une perspective plus longue, le rapport estime que les salaires moyens men-
suels rels ont, entre 2000 et 2011, presque doubl en Asie et augment de 18 pour cent
en Afrique, de 15 pour cent en Amrique latine et aux Carabes, et de 5 pour cent dans
les conomies dveloppes. En Europe orientale et en Asie centrale, les salaires ont
presque tripl, mais en partant de trs bas suite lèffondrement conomique quònt
connu ces rgions dans les annes 1990. Au Moyen-Orient, on ne dispose que de don-
nes limites sur les salaires. Le peu dinformations disponibles indique que les salaires
ont continu de stagner au cours des dix dernires annes, du fait de la faiblesse de la
productivit et de la fragilit des institutions.
Cette dition du Rapport mondial sur les salaires prsente des donnes sur les
tendances salariales de par le monde et les compare avec les tendances de la produc-
tivit du travail, analysant leurs effets complexes sur lconomie mondiale pour aider
mieux comprendre les dbats actuels sur la rpartition, la comptitivit et les cots
de main-duvre. Lorsque les salaires augmentent au diapason avec les hausses de
productivit, ces hausses peuvent sinscrire dans la dure et engendrer une relance
pour une nouvelle croissance conomique, grce laugmentation du pouvoir dachat
des mnages. Toutefois, une dizaine dannes ou plus avant la crise, on a assist dans
de nombreux pays une rupture du lien entre salaires et productivit du travail, ce
qui a contribu lclosion de dsquilibres conomiques au niveau mondial. Le rap-
port montre que, depuis les annes 1980, une majorit de pays a connu une tendance
la baisse de la part du travail dans le revenu, ce qui signife quùne part moins impor-
tante du revenu national est alle la rmunration du travail et une part plus im portante
aux revenus du capital. Si cette situation est survenue plus frquemment l o les
salaires ont enregistr une stagnation, elle sèst aussi produite dans certains pays o
vi Rapport mondial sur les salaires 2012/13
les salaires rels ont fortement augment. Aux niveaux social et politique, cette ten-
dance risque de donner le sentiment que les travailleurs et leurs familles ne reoivent
pas leur juste part de la richesse quìls crent. Au niveau conomique, cela pourrait
menacer le rythme et la viabilit dune future croissance conomique en limitant la
consommation des mnages fonde sur les salaires. Il en va tout particulirement ainsi
l o l`poque de la consommation fonde sur lèndettement se solde aujourd`hui par
une priode prolonge au cours de laquelle les mnages doivent rembourser leurs
dettes antrieures.
Au niveau mondial, alors que certains pays peuvent trouver une porte de sortie
de la rcession grce lexcdent de leur balance commerciale ou de leurs exporta-
tions, cela a ncessairement pour corollaires des dfcits dans les pays importateurs et
la dlocalisation demplois. Pour viter une concurrence du chacun pour soi, la voie
vers une croissance conomique durable et quilibre doit sappuyer sur une hausse
de la consommation intrieure dans les pays excdentaires, sur la base de salaires qui
augmentent au mme rythme que la productivit. Une coordination internationale peut
contribuer obtenir des rsultats quitables qui proftent tous les pays.
Partout dans le monde, de nombreux pays tentent actuellement de relever ces
dfs, souvent par la mise en ouvre des politiques innovantes. Jèspre que ce Rapport
mondial sur les salaires les aidera et favorisera lmergence dides originales sur des
questions qui sont aujourdhui au cur du processus dcisionnel au niveau international.
Guy Ryder
Directeur gnral du BIT
Table des matires
Prface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . v
Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xi
Rsum analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xiii
Partie I Grandes tendances des salaires
1 Le contexte conomique mondial: crise, rcession et emploi . . . . . . . . . . . . . . . 1
1.1 Les taux de croissance conomique diffrent fortement dùne rgion làutre 1
1.2 Le taux du chmage global reste lev. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
2 Salaires moyens rels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
2.1 Ralentissement de la croissance dans des circonstances complexes . . . . . . . . 2
2.2 Lcart de rmunration li au sexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
3 Estimations rgionales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
3.1 La croissance globale cache un tableau complexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
3.2 conomies dveloppes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
3.3 Europe orientale et Asie centrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
3.4 LÀsie et le Pacifque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
3.5 Amrique latine et Carabes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
3.6 Le Moyen-Orient . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
3.7 Afrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
4 Salaires minima et travailleurs pauvres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
4.1 conomies dveloppes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
4.2 conomies en dveloppement et conomies mergentes. . . . . . . . . . . . . . . . . 39
Partie II Baisse de la part du travail et croissance quitable
5 Baisse de la part du travail dans le revenu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
5.1 Tendances des parts du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
5.2 cart entre les salaires et la productivit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
5.3 Rle des marchs fnanciers et dàutres facteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
6 Effets de la part du travail sur la croissance conomique . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
6.1 Baisse de la part du travail et demande globale: effets ambigus . . . . . . . . . . . 57
6.2 la recherche de la part du travail optimale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
6.3 La Grande Rcession et lòccasion de mettre en place
une croissance plus quilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
viii Rapport mondial sur les salaires 2012/13
Partie III Consquences pour une croissance quitable
7 Dsquilibres internes et externes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
7.1 La distribution fonctionnelle et personnelle du revenu . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
7.2 Une baisse de la consommation fonde sur les salaires et son impact
sur la reprise . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
8 Reconnecter les salaires et la productivit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
8.1 Une action coordonne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
8.2 Renforcer les institutions existantes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
8.3 Au-del du march du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
8.4 Spcifcits des pays en dveloppement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
Appendices
Appendice I. Tendances mondiales des salaires: questions mthodologiques . . . . 71
Appendice II. Comment une divergence entre la productivit du travail
et les salaires infue sur les cots unitaires de main-dòuvre et sur la part
du travail dans le revenu. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
Appendice III. Dterminants des parts du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
Appendice IV. Effet de la part du travail sur la demande globale . . . . . . . . . . . . . . 95
Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109
Tableaux
1. Croissance cumulative des salaires rels par rgion depuis 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . 8
2. Orientation des effets dune baisse de 1 pour cent de la part du travail
dans le revenu sur la consommation de marchandises et de services des mnages,
lìnvestissement et les exportations nettes dans 16 conomies . . . . . . . . . . . . . . . . 58
A1 Groupements rgionaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
A2 Couverture de la base de donnes mondiale sur les salaires, 2010 . . . . . . . . . . . . . . 73
A3 Couverture de la base de donnes mondiale sur les salaires, 2006-2011 . . . . . . . . 74
A4 Facteurs qui infuent sur les parts du travail ajustes dans le revenu. . . . . . . . . . . . 90
A5 Incidence des facteurs externes sur les parts du travail ajustes dans le revenu . . . 91
A6 Description des pays inclus dans lèstimation des tableaux A1 et A2
et de lèncadr A1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91
ix Table des matires
Figures
1. Croissance conomique moyenne annuelle, 1995-2012. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
2. Taux du chmage total dans le monde et dans les conomies dveloppes, 2005-2011 2
3. Croissance annuelle moyenne des salaires rels au niveau mondial, 2006-2011. . . 3
4. cart de rmunration li au sexe (GPG), 1999-2007 et 2008-2011 . . . . . . . . . . . . 6
5. cart de rmunration li au sexe en Estonie, 1993-2009 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
6. cart de rmunration li au sexe en Norvge selon la situation
dans lèmploi, 2008-2011 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
7. Croissance annuelle moyenne des salaires rels par rgion, 2006-2011 . . . . . . . . . 9
8. Comparaison de la rmunration directe horaire du temps travaill
dans le secteur manufacturier au niveau international, 2010 . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
9. Tendances de la croissance des salaires nominaux et de lìnfation
dans les conomies avances, 2006-2011. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
10. Croissance de la production et de lemploi dans les conomies dveloppes,
1999-2007 et 2008-2011. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
11. Croissance des salaires rels et de la productivit du travail
dans les conomies dveloppes, 1999-2007 et 2008-2011 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
12. Croissance de la production et de lemploi en Europe orientale
et en Asie centrale, 1999-2007 et 2008-2011 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
13. Croissance des salaires rels et de la productivit du travail en Europe orientale
et en Asie centrale, 1999-2007 et 2008-2011 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
14. Indice des salaires rels dans la Fdration de Russie depuis 1990 . . . . . . . . . . . . . 20
15. Croissance annuelle moyenne des salaires rels en Asie, 2006-2011. . . . . . . . . . . . 21
16. Croissance de la production et de lèmploi en Asie, 1997-2007 et 2008-2011 . . . . 22
17. Croissance de la production et du nombre des salaris rmunrs en Asie,
1997-2007 et 2008-2011. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
18. Croissance des salaires et de la productivit du travail en Asie, 1997-2007
et 2008-2011 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
19. Croissance de la production et de lèmploi en Amrique latine
et dans les Carabes, 1997-2007 et 2008-2011 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
20. Croissance conomique et chmage en Amrique latine et dans les Carabes,
2004-2011. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
21. Croissance annuelle moyenne des salaires rels au Brsil, 2006-2011 . . . . . . . . . . 28
22. Croissance des salaires et de la productivit du travail dans certains pays
dÀmrique latine et des Carabes, 2004-2011. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
23. Croissance de la production et de lèmploi au Moyen-Orient, 1999-2007
et 2008-2011 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
24. Croissance des salaires et de la productivit du travail au Moyen-Orient, 1999-2011 32
25. Croissance de la production et de lèmploi en Afrique, 1999-2007 et 2008-2011 . 34
26. Croissance de la production et du nombre des salaris rmunrs en Afrique,
1999-2007 et 2008-2011. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
27. Croissance des salaires et de la productivit du travail dans certains
pays africains, 1999-2011. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
x Rapport mondial sur les salaires 2012/13
Base de donnes mondiale du BIT sur les salaires
http://www.ilo.org/ salaires12

Scannez le QR code avec votre smartphone pour accder la base de
donnes mondiale sur les salaires.
28. Niveaux des salaires minima dans certaines conomies dveloppes,
en dollars PPA et en part du salaire mdian des salaris plein temps, 2010 . . . . . 38
29. Croissance des salaires minima dans les conomies dveloppes, 2006-2011 . . . . 38
30. Travailleurs pauvres salaris (gagnant moins de 1,25 dollar EU
et de 2 dollars EU par jour), en pourcentage du total des salaris . . . . . . . . . . . . . . 41
31. Parts du travail ajustes dans le revenu au sein des conomies dveloppes,
en Allemagne, aux tats-Unis et au Japon, 1970-2010 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
32. Parts du travail ajustes dans le revenu dans les conomies en dveloppement
et les conomies mergentes, 1970-2007 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
33. Part du travail non ajuste dans le revenu en Chine, 1992-2008 . . . . . . . . . . . . . . . 46
34. Productivit et rmunration horaires aux tats-Unis, T1 1947-T1 2012 . . . . . . . . 49
35. Tendances de la productivit du travail et des salaires en Allemagne, 1991-2011. . 50
36. Tendances de la croissance des salaires moyens et de la productivit du travail
dans les conomies dveloppes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
37. Facteurs infuant sur la part du travail dans le revenu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
38. Dcomposition de lvolution de la part du travail ajuste moyenne
dans le revenu entre 1990-1994 et 2000-2004 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
39. Effets macroconomiques des parts du revenu fonctionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
40. Cots unitaires de main-duvre dans certains pays de la zone euro, 2000-2010. . 61
41. volution de la balance des paiements courants et de lendettement
des mnages (certains pays), 2003-2010 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
A1 Effet dune diminution de 1% de la part du travail dans le revenu sur
la consommation prive de produits et de services nationaux, linvestissement
et les exportations nettes: a) consommation prive de produits et de services;
b) investissement; c) exportations nettes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100
Encadrs
1. Pauvret chez les travailleurs horaires et salaris . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
A1 Procdure de slection et destimation des donnes:
une mthodologie conomtrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
A2 Donnes, estimation et simulations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95
Remerciements
Principaux contributeurs
Le prsent rapport a t tabli par les fonctionnaires du Service des conditions de
travail et dèmploi (TRAVAIL) du BIT avec des contributions de collgues dàutres
dpartements du BIT bass Genve et dans les bureaux extrieurs, sous la responsa-
bilit de Philippe Marcadent, directeur de TRAVAIL. Ce rapport a t labor sous la
direction de Patrick Belser et est le rsultat dun travail dquipe entre Patrick Belser,
Malte Luebker, Sangheon Lee, Andrs Marinakis, Kristen Sobeck, Daniel Vaughan-
Whitehead, Jacobo Velasco et Rosala Vzquez lvarez. Dèxcellents travaux de
recherche ont t fournis en appui par Rengin Gunaydin et Mila Daskalova. Kristen
Sobeck sèst occupe de la gestion de la base de donnes mondiale sur les salaires et a
labor les fgures de la partie I. Malte Luebker a pass en revue les estimations mon-
diales et rgionales. Rosala Vzquez lvarez a fourni des informations sur les poli-
tiques salariales au Moyen-Orient et a pass en revue la partie II du rapport. Charlotte
Beauchamp a coordonn la mise au point du rapport et sa publication. Christian Olsen
a conu la page de couverture.
Contributions particulires
La partie II du rapport sinspire dun projet de recherche sur Lanalyse macrocono-
mique des salaires coordonn par Sangheon Lee (BIT, TRAVAIL). Ce projet a bn-
fci des contributions de zlem Onaran (Universit de Westminster), Giorgos Galanis
(Universit de Westminster et Universit de Warwick), Marc Lavoie (Universit dÒt-
tawa), Engelbert Stockhammer (Kingston University), Eckhard Hein (cole dènseigne-
ment suprieur de droit et d`conomie de Berlin), Matthias Mund (cole dènseignement
suprieur de droit et d`conomie de Berlin), Servaas Storm (Universit de technologie
de Delft), C.W.M. Naastepad (Universit de technologie de Delft), Till Van Treeck
(Institut de politique macroconomique de Dsseldorf) et Simon Sturn (Universit du
Massachusetts Amherst). Le projet a aussi bnfci de contributions de Massimiliano
La Marca (BIT, Dpartement de lìntgration des politiques).
Remerciements particuliers
Nous remercions en particulier toute l`quipe du SIALC/OIT (Systme dìnformation
et dànalyse du march du travail) de Panama, en particulier Bolvar Pino, qui nous a
fourni des donnes sur les salaires pour lÀmrique latine et les Carabes, de mme que
Steven Kapsos, qui a fourni lànalyse sur la pauvret parmi les travailleurs horaires et
salaris.
xii Rapport mondial sur les salaires 2012/13
Nous voudrions aussi remercier les personnes ci-aprs pour leurs prcieuses contri-
butions ou observations: Janine Berg, Fabio Bertranou, Evangelia Bourmpoula, Monica
Castillo, Juan Chacaltana, Matthieu Charpe, Miguel del Cid, Maria Crisetti, Mauricio
Dierckxsens, Chris Edgar, Philippe Egger, Lawrence Egulu, Ekkehard Ernst, Vernica
Escudero, Regina Galhardi, Werner Garate, Najati Ghosheh, David Glejberman,
Sameer Khatiwada, David Kucera, Stefan Khn, Bob Kyloh, Chang-Hee Lee, Elva
Lpez Mourelo, Moazam Mahmood, Anne Posthuma, Stephen Pursey, Uma Rani, John
Ritchotte, Catherine Saget, Reynold Simons, Vincenzo Spiezia, Steven Tobin, Manuela
Tomei, Geir Tonstol, Raymond Torres, Zafris Tzannatos, Mara Elena Valenzuela, Sher
Verick, et quatre spcialistes anonymes qui ont rvis le rapport.
Rsum analytique
Grandes tendances des salaires
La crise continue de peser sur les salaires
La croissance des salaires moyens rels est demeure bien infrieure aux niveaux davant
la crise; elle sèst enfonce dans le rouge dans les conomies dveloppes, cependant,
elle est reste importante dans les conomies mergentes. Les salaires moyens mensuels
ajusts pour tenir compte de lìnfation - ce quòn appelle les salaires moyens rels - ont
augment globalement de 1,2 pour cent en 2011, alors quils avaient cru de 2,1 pour
cent en 2010 et de 3 pour cent en 2007. En raison de sa taille et de sa forte performance
conomique, la Chine a un poids considrable dans ce calcul du chiffre mondial. Si lòn
omet la Chine, les salaires moyens rels nont augment que de 0,2 pour cent au niveau
mondial en 2011, en baisse par rapport 2010 (1,3 pour cent) et 2007 (2,3 pour cent)
(voir la fgure 3).
Diffrences rgionales dans la croissance des salaires
Il existe dimportantes variations gographiques dans les tendances de la croissance des
salaires moyens rels (voir la fgure 7). Les salaires ont enregistr un double creux dans
les conomies dveloppes, mais leur croissance est demeure positive tout au long de
la crise en Amrique latine et dans les Carabes, et encore plus en Asie. Cèst en Europe
orientale et en Asie centrale que les fuctuations ont t les plus fortes, en raison du solide
redressement des salaires aprs la transition et avant la crise conomique mondiale, et de
la svre contraction des salaires rels en 2009. Au Moyen-Orient, les salaires moyens
rels ont apparemment baiss depuis 2008, mais certaines des estimations demeurent
approximatives, de mme que pour lÀfrique.
Croissance cumulative des salaires par rgion
Les diffrences entre les rgions sont particulirement marques si lòn examine la crois-
sance cumulative des salaires de 2000 2011. Au niveau mondial, les salaires moyens
mensuels rels ont enregistr une croissance d` peine un quart; en Asie ils ont presque
doubl, tandis que dans les conomies dveloppes ils ont augment dènviron 5 pour
cent. En Europe orientale et en Asie centrale, les salaires rels ont presque tripl, mais
cette augmentation sìnscrit pour lèssentiel dans le contexte du redressement aprs la
transition vers des conomies de march. En Russie, par exemple, la valeur relle des
salaires sèst effondre dans les annes 1990 moins de 40 pour cent de la valeur quìls
avaient et il a fallu une autre dcennie pour quils retrouvent leur niveau initial.
xiv Rapport mondial sur les salaires 2012/13
Diffrences rgionales dans les niveaux des salaires
Les salaires ont affch une croissance importante dans les conomies mergentes, mais
les diffrences dans les niveaux des salaires demeurent considrables. Aux Philippines,
un travailleur du secteur manufacturier rapportait chez lui autours de 1,40 dollar EU
pour chaque heure travaille. Au Brsil, la rmunration directe horaire dans ce secteur
tait de 5,40 dollars EU, en Grce elle tait de 13,00, aux tats-Unis de 23,30 et au
Danemark de 34,80 (taux de change de 2010, chiffres arrondis).
Baisse de la part du travail et croissance quitable
Une plus petite part du gteau pour les travailleurs
dans le monde entier
Entre 1999 et 2011, laugmentation de la productivit du travail moyenne dans les co-
nomies dveloppes a t plus de deux fois suprieure celle des salaires moyens (voir
la fgure 36). Aux tats-Unis, la productivit du travail relle horaire dans le secteur des
entreprises non agricoles a augment de 85 pour cent depuis 1980, tandis que la rmu-
nration horaire relle nà augment que de 35 pour cent. En Allemagne, la productivit
du travail a augment de presque un quart sur les deux dcennies coules tandis que les
salaires mensuels rels nont pas boug.
La tendance mondiale a entran un changement dans la distribution du revenu
national, la part des travailleurs baissant tandis que les parts du capital dans le revenu
augmentent dans une majorit de pays. Mme en Chine, pays o les salaires ont approxi-
mativement tripl durant la dcennie coule, le PIB a augment plus rapidement que la
masse salariale totale - et la part du travail a donc baiss.
La baisse de la part du travail est due au progrs technologique, la mondialisation
des changes commerciaux, lèxpansion des marchs fnanciers et la baisse du taux
de syndicalisation, autant de facteurs qui ont min le pouvoir de ngociation des travail-
leurs. La mondialisation fnancire, en particulier, a peut-tre jou un rle plus important
quon ne le pensait auparavant.
Effets de la baisse de la part du travail
Une baisse de la part du travail a une incidence non seulement sur ce que les gens consi-
drent comme quitable - en particulier compte tenu des proccupations croissantes
suscites par les rmunrations excessives de certains des dirigeants dentreprise ainsi
que dans le secteur fnancier -, elle touche aussi la consommation des mnages et peut
donc crer des dfcits de la demande globale. Ces dfcits dans certains pays ont t
compenss par un accroissement de leurs exportations nettes, mais les pays ne peuvent
pas affcher tous en mme temps un excdent des comptes courants. Partant, une stra-
tgie fonde sur la rduction des cots unitaires de main-duvre, une recommandation
frquente pour les pays en crise qui enregistrent des dfcits des comptes courants, peut
comporter le risque de dprimer la consommation intrieure plus quelle naccrotra les
exportations. Si un grand nombre de pays procdent simultanment des rductions
des salaires des fns de comptitivit, cela peut provoquer une course vers le bas au
niveau des parts du travail, et rduire la demande globale.
xv Rsum analytique
Consquences pour une croissance quitable
Distribution du revenu et niveaux des salaires
Le Rapport mondial sur les salaires apporte sa contribution une vaste littrature trai-
tant des volutions de la distribution et des niveaux des salaires lintrieur des pays et
dun pays lautre, ainsi que des consquences conomiques et sociales de ces tendances.
Lune des constatations essentielles de ces publications est laccentuation de lingalit
de revenu, au plan de la distribution fonctionnelle et personnelle du revenu.
Sàgissant de la distribution fonctionnelle du revenu, qui concerne la manire dont
le revenu national a t distribu entre le travail et le capital, il y a une tendance sur le
long terme la baisse de la part des salaires et la hausse de la part des profts dans
beaucoup de pays. La distribution personnelle des salaires est aussi devenue plus ingale,
le foss se creusant entre les salaris constituant les 10 pour cent du haut de lchelle et
ceux qui constituent les 10 pour cent du bas de lchelle. Ces dsquilibres internes ont
eu tendance crer ou exacerber les dsquilibres externes, mme avant la Grande
Rcession, les pays sefforant de compenser les effets ngatifs de la baisse de la part
des salaires sur la demande de consommation en recourant au crdit bon march ou en
dveloppant des excdents lexportation.
Renforcer le lien entre la productivit et les salaires
Que faudrait-il faire? Notre analyse suggre que les pouvoirs publics devraient prendre
des mesures visant un rquilibrage tant au niveau national quau niveau mondial.
En essayant de corriger les dsquilibres externes, les responsables politiques devraient
se garder dadopter un point de vue simpliste voulant que les pays puissent sortir de
la rcession par des rductions diverses. Ils devraient mettre en uvre des politiques
qui facilitent une relation troite entre la croissance de la productivit du travail et la
croissance de la rmunration des travailleurs. Lexistence dimportants excdents des
comptes courants dans certains pays donne penser quil est possible de mieux relier
les hausses de productivit aux salaires comme moyen de stimuler la demande int-
rieure. Les responsables politiques devraient prendre garde de ne pas encourager une
course vers le bas dans les pays o les parts du travail sont dfcitaires ou encore dans
lensemble de la zone euro. Les mesures daustrit qui sont imposes de lextrieur et
qui court-circuitent les partenaires sociaux nuisent aux bonnes relations du travail.
Renforcement des institutions
Le rquilibrage interne peut commencer par un renforcement des institutions ser-
vant fxer les salaires. Comme il est diffcile dòrganiser les travailleurs, en particulier
dans le contexte dune segmentation croissante du march du travail et dune volution
rapide des technologies, il faut crer des environnements plus favorables et propices
la ngociation collective. Les travailleurs faiblement rmunrs ont aussi besoin dune
plus forte protection au plan de la fxation des salaires. Les salaires minima, sìls sont
correctement conus, se sont avrs constituer un instrument de politique effcace qui
peut fournir un socle salarial dcent et assurer ainsi un niveau de vie minimal ces tra-
vailleurs et leurs familles.
xvi Rapport mondial sur les salaires 2012/13
Rformes en dehors du champ du march du travail
Il est irraliste dessayer de raliser une distribution du revenu uniquement par des
politiques relatives au march du travail. La redistribution ncessitera aussi un certain
nombre de changements en dehors des marchs du travail, y compris une rforme et une
remise en tat des marchs fnanciers pour rtablir leur rle dans lòrientation des res-
sources vers les investissements productifs et durables. Il y a dàutres aspects trs impor-
tants du rquilibrage qui mritent une analyse plus dtaille, y compris lquilibre
entre la taxation des revenus du capital et la taxation des revenus du travail.
Un examen qui ne se limite pas aux salaris
Dans les conomies en dveloppement, les mcanismes de garantie de lemploi par les-
quels des salaires minima sont verss constituent aussi un moyen dinciter les entreprises
prives se conformer au salaire minimum. Mais comme dans ces conomies et dans
les conomies mergentes environ la moiti seulement des travailleurs sont des salaris,
il faut des mesures complmentaires pour crer plus demplois salaris et relever la pro-
ductivit et les gains des travailleurs indpendants.
Le relvement de la productivit moyenne du travail reste une entreprise diff-
cile et essentielle qui doit mobiliser des efforts pour relever le niveau dducation et les
capacits ncessaires la transformation productive et au dveloppement conomique.
Llaboration de rgimes de protection sociale bien conus permettrait aux travailleurs
et leurs familles de rduire les montants de lpargne de prcaution, dinvestir dans
lducation de leurs enfants et de contribuer renforcer la demande de consommation
intrieure et relever le niveau de vie.
PARTIE I
Grandes tendances
des salaires
1 Le contexte conomique mondial: crise, rcession et emploi
1.1 Les taux de croissance conomique diffrent fortement dune rgion lautre
Aprs une priode de croissance conomique robuste dans les premires annes du
vingt et unime sicle, l`conomie mondiale sèst contracte en 2009 en raison de la crise
fnancire et conomique plantaire (voir la fgure 1). Lìmpact de la crise a t ressenti
trs diversement dans le monde. Dans le groupe des pays plus avancs, 2009 a t consi-
dre comme lànne de la Grande Rcession, le plus grave fchissement conomique
depuis la Grande Dpression des annes 1930. Si la reprise en 2010 a t initialement
plus forte que prvu, la crise de la dette souveraine et les diverses mesures daustrit qui
lont accompagne ont entran une forte dclration de la croissance par la suite, en
particulier en Europe. Le groupe des pays mergents et des pays en dveloppement, en
revanche, a vit une rcession gnralise et a russi maintenir des taux de croissance
plus levs que les pays avancs depuis lanne 2000.
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5
conomies mergentes et en dveloppement Grandes conomies avances ( G7) M onde
C
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s
s
a
n
c
e

d
u

P
I
B

(
%
)
Figure 1 Croissance conomique moyenne annuelle, 1995-2012 (PIB en prix constants)
Note: les groupes de pays sont ceux qui sont utiliss par le FMI et dcrits dans lappendice de FMI, 2012b. Les grandes conomies avances
comprennent lAllemagne, le Canada, les tats-Unis, la France, lItalie, le Japon et le Royaume-Uni. Les conomies mergentes et les conomies
en dveloppement englobent un groupe de 151 conomies qui ne sont pas classes parmi les conomies avances. Les chiffres pour 2012 sont
des projections.
Source: Base de donnes FMI, Perspectives de lconomie mondiale.
2 Rapport mondial sur les salaires 2012/13
1.2 Le taux du chmage global reste lev
Lìmpact de la crise fnancire et conomique sur les marchs du travail a souvent t
analys par le biais du taux de chmage, en particulier dans les conomies dveloppes,
o le chmage est pass de moins de 6 pour cent plus de 8 pour cent de la main-
dòuvre, avec des taux deux chiffres en Espagne, en Grce, en Irlande et au Portugal,
par exemple
1
. Dans les pays en dveloppement, les taux de chmage ont moins fuctu.
Mme ainsi, le chmage mondial a augment de 27 millions depuis le dbut de la crise,
portant le nombre total de chmeurs environ 200 millions dìndividus, soit 6 pour
cent de la main-dòuvre mondiale (fgure 2). Cèst le chmage des jeunes, qui a atteint
des proportions alarmantes, qui est peut-tre le sujet de proccupation le plus grave. Le
BIT estime quèn 2011 le chmage a touch 75 millions de jeunes gs de 15 24 ans
dans le monde entier, ce qui reprsente plus de 12 pour cent de lensemble des jeunes. Ils
sont bien plus nombreux ne pas fgurer dans les statistiques du chmage, car ils sont
devenus si dcourags quils ont cess de chercher du travail.
2 Salaires moyens rels
2.1 Ralentissement de la croissance dans des circonstances complexes
Estimations de la croissance annuelle des salaires moyens rels au niveau mondial
Les chiffres de lemploi et du chmage ne permettent pas dapprhender totalement lim-
pact de la crise sur les marchs du travail. Le prsent rapport examine les salaires des
salaris rmunrs
2
. La principale unit de mesure utilise pour les salaires est le salaire
moyen mensuel, plutt que le salaire horaire ou journalier, exprim en termes rels
2011 2010 2009 2008 2007 2006 2005
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conomies dveloppes Monde
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%
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6,1
6,0
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6,3
5,8
6,1
8,3
8,8
8,5
Figure 2 Taux du chmage total dans le monde et dans les conomies dveloppes, 2005-2011
(en pourcentage de la main-duvre)
Note: les chiffres pour 2011 sont des estimations provisoires. Concernant la dnition des conomies dveloppes, voir lappendice I.
Source: BIT, 2012a.
3
(cèst--dire ajust pour tenir compte de lìnfation), qui a t retenu comme indicateur
du travail dcent de lOIT
3
. Les tendances du salaire mensuel moyen rel reftent
lvolution du revenu du travail moyen (avant impt et transferts) et permettent donc de
comprendre lvaluation du pouvoir dachat des salaris. Comme on lanalysera dans les
sections suivantes du rapport, les tendances des salaires moyens rels varient selon les
rgions et les pays. Cependant, limpact de la crise apparat nettement au niveau global.
La fgure 3 montre que, durant les quatre dernires annes successives (de 2008 2011),
la croissance des salaires moyens mensuels rels est demeure positive, mais est des-
cendue bien au-dessous des taux davant la crise. Cela est vrai, que nous incluions ou
non les statistiques salariales offcielles communiques par la Chine, encore que le fait
dexclure la Chine de lanalyse abaisse considrablement la croissance salariale mon-
diale, tant donn limportance de ce pays (en termes de nombre de salaris) et son taux
de croissance conomique exceptionnellement lev
4
.
Comparabilit des statistiques nationales et dure du travail
Il faut interprter avec prudence ces estimations mondiales (et les estimations rgio-
nales suivantes). Premirement, il y a des diffrences entre les pays dans la faon dont
les salaires sont estims par les offces de statistique nationaux. Tandis que les pays les
plus avancs procdent rgulirement des enqutes auprs des tablissements et des
enqutes spcifques sur la structure des rmunrations, dàutres pays recueillent des
PARTIE I Salaires moyens rels
4
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2
1
0
2011 2010 2009 2008 2007 2006
Sans la Chine Avec la Chine
2,1
1,2*
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1,0
3,0
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0,3
0,2
1,3
0,3
2,3
2,0
Figure 3 Croissance annuelle moyenne des salaires rels au niveau mondial, 2006-2011
* Taux de croissance publis en tant questimations provisoires (sur la base dune couverture denviron 75%).
Note: la croissance des salaires mondiaux est la moyenne pondre de la croissance des salaires mensuels moyens rels dune anne sur lautre
dans 124 pays, couvrant 95,3pour cent de lensemble des salaris dans le monde (pour une description de la mthodologie, voir lappendice I).
Source: http://www.ilo.org/salaires2012.
donnes sur les salaires au moyen dènqutes sur la population active, et les dfnitions
de ce qui est compt comme un salaire diffrent parfois. La couverture peut aussi varier
dun pays lautre. Le BIT cherche gnralement obtenir des donnes concernant tous
les salaris rmunrs, mais dans la pratique la couverture est parfois limite certaines
zones gographiques (par exemple, les zones mtropolitaines) ou certains sous-groupes
de salaris (par exemple, les salaris non agricoles). Comme pour de nombreuses autres
variables conomiques, ces diffrences rendent diffciles les comparaisons de niveaux
dùn pays làutre. Il demeure toutefois possible de tirer des conclusions signifcatives au
sujet de lvolution des salaires dans le temps.
Deuximement, l`volution des salaires moyens mensuels est la synthse dìnnom-
brables changements intervenus au niveau des entreprises et au niveau sectoriel, y com-
pris non seulement lvolution du taux du salaire horaire mais aussi les changements dans
le nombre dheures travailles. Dans beaucoup de pays, la crise conomique mondiale a
entran une diminution de la dure du travail, car le nombre dheures supplmentaires
a t rduit, le sous-emploi li la dure du travail a augment et/ou la proportion des
salaris temps partiel par rapport aux salaris plein temps a augment, autant de fac-
teurs qui ont une incidence ngative sur les salaires mensuels. Divers pays ont aussi mis
en uvre des programmes de partage du travail: des rductions de la dure du travail
afn d`viter des licenciements
5
. Trs souvent, une semaine de travail de trois ou quatre
jours a remplac la semaine de travail de cinq jours plus habituelle. Dans dautres cas, les
heures de travail quotidiennes ont t rduites ou bien des usines ont t temporairement
fermes durant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Une rduction de la dure du
travail entrane habituellement des rductions proportionnelles des salaires mensuels
mais, dans le contexte des programmes de partage du travail, les gouvernements ont
souvent octroy des complments de salaire sous la forme dune rmunration du ch-
mage partiel
6
.
Effet de composition
Lutilisation de donnes agrges sur les salaires, par opposition la mthode consis-
tant tudier un panel dindividus, peut aussi donner lieu ce quon appelle un effet de
composition: un changement du niveau du salaire moyen qui rsulte dun changement
dans la composition du segment de la main-duvre form par les salaris et non pas
de changements des rmunrations de ceux qui demeurent employs sans interrup-
tion. Cela peut introduire un biais. Comme on la soulign dans ldition prcdente du
Rapport mondial sur les salaires (BIT, 2010a), ce biais peut tre contracyclique, ce
qui signife que lùtilisation de donnes agrges peut conduire sous-estimer la baisse
de la croissance des salaires rels des individus qui conservent leur emploi durant les
rcessions et, ultrieurement, sous-estimer la tendance haussire de leurs salaires
dans les priodes de redressement. Par exemple, les travailleurs peu qualifs viss
par des contrats de travail temporaires pourraient tre les premiers tre licencis
par les entreprises en priode de rcession. Puisque la main-duvre restante est alors
compose de travailleurs relativement mieux pays, cela peut fausser les tendances des
salaires moyens vers le haut. Leffet inverse peut tre observ en priode de redresse-
ment, si les travailleurs faiblement rmunrs sont les premiers tre rembauchs
(voir aussi BIT, 2012b).
5 PARTIE I Salaires moyens rels
2.2 Lcart de rmunration li au sexe
Lcart diminue mais les conditions des femmes
ne se sont pas forcment amliores
La fgure 4 prsente les changements de l`cart de rmunration moyen li au sexe entre
1999-2007 et 2008-2011, en illustrant l`volution de cet cart dans tous les pays pour les-
quels des donnes de ce type sont disponibles. Comme le montrent les donnes, lcart
de rmunration li au sexe sest rduit durant les annes de crise dans la plupart des
pays. Cependant, linterprtation de ce resserrement est rendue complique par leffet
de composition, car il ne signife pas ncessairement que la situation des femmes sèst
amliore. Le cas de lEstonie montre comment une rduction de lcart de rmunration
li au sexe peut tre obtenue non par des amliorations de la situation des femmes, mais
par une dgradation des conditions du march du travail pour les hommes par rapport
aux femmes. La fgure 5 illustre la tendance de l`cart de rmunration li au sexe en
Estonie voluer dùne manire procyclique, s`largissant en priode de croissance et
se resserrant durant les rcessions. La baisse du march en 2009, durant la crise la plus
rcente, sest produite parce que les hommes taient plus concentrs dans les secteurs
qui ont t les plus touchs par la crise et quils ont connu une diminution de leurs heures
de travail. En consquence, en 2009 lcart de rmunration li au sexe sest resserr en
raison dune baisse des salaires des hommes due la diminution du nombre dheures
travailles par ces derniers (voir Anspal, Kraut et Rm, 2010).
La fgure 4 est axe sur lòrientation de l`volution entre les deux priodes, plutt
que sur les diffrences entre les pays. En effet, les diffrences dans les sources des
donnes utilises et/ou la population de salaris tudie par les diffrents pays ont
une incidence sur les estimations de lcart de rmunration li au sexe. Le cas de la
Norvge, illustr par la fgure 6, montre comment l`cart de rmunration li au sexe
varie selon que lon choisit dtudier tous les salaris, les salaris plein temps, ou les
salaris temps partiel. Lcart de rmunration li au sexe pour les salaris temps
partiel est faible, ce qui indique que les hommes et les femmes qui travaillent temps
partiel ont une rmunration similaire. En revanche, lcart de rmunration li au sexe
pour les salaris plein temps est plus lev, car les hommes dans ce cas sont consi-
drablement mieux pays que les femmes galement employes plein temps. Enfn,
lcart de rmunration li au sexe pour lensemble des salaris est encore plus grand
que pour les salaris plein temps, parce que les femmes sont surreprsentes parmi les
travailleurs temps partiel, pour lesquels les taux de rmunration horaire ntaient que
dènviron 80 pour cent des taux des salaires horaires des travailleurs plein temps en
2011. Lvolution dans le temps est moins dpendante de la population de salaris tu-
die. Nanmoins, linterprtation de lvolution dans le temps de lcart de rmunration
li au sexe devrait prendre en compte en mme temps dautres indicateurs du march du
travail qui reftent l`volution des conditions de travail et dèmploi des femmes.
Cambodge
Blarus
Botswana
Oman
Colombie
Mongolie
Paraguay
Viet Nam
Sri Lanka
Australie
Jordanie
Venezuela, Rp. boliv. du
Lettonie
Suisse
Croatie
Brsil
France
Rp. tchque
Norvge
Uruguay
Pays-Bas
Pologne
Bulgarie
Qatar
Singapour
Autriche
Finlande
Rive occid. et Gaza
Sude
Turquie
Estonie
Mexique
Allemagne
Pakistan
Npal
Japon
Hong-kong (Chine)
Slovnie
Slovaquie
Portugal
Kazakhstan
Nouvelle-Zlande
Tawan (Chine)
Luxembourg
Isral
El Salvador
Belgique
Chypre
Canada
Costa Rica
Lituanie
Thalande
Royaume-Uni
Malte
Espagne
Gorgie
Ukraine
quateur
Panama
Roumanie
Honduras
Islande
Armnie
Azerbadjan
Prou
Changement du GPG
8,0 6,0 4,0 2,0 0,0 2,0 4,0 6,0 8,0 10,0 12,0
Figure 4 cart de rmunration li au sexe (GPG), 1999-2007 et 2008-2011
Note: le GPG est dni comme suit: GPG = ((Em Ew)/ Em) * 100, Em reprsentant le salaire moyen des hommes et Ew le salaire moyen des
femmes (voir BIT, 2012b). Le changement du GPG est dni comme la moyenne du GPG entre 2008 et 2011 moins la moyenne du GPG entre
1997 et 2007. Les donnes ne sont pas disponibles pour toutes les annes dans tous les pays; les moyennes pour les deux priodes sont calcules
avec les donnes disponibles pour chaque pays pendant les deux priodes.
7 PARTIE I Salaires moyens rels
15
17
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2008 2009 2010 2011
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(
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Ensemble des salaris Salaris plein temps Salaris temps partiel
Figure 5 cart de rmunration li au sexe en Estonie, 1993-2009
Figure 6 cart de rmunration li au sexe en Norvge selon la situation dans lemploi, 2008-2011
Note: lcart de rmunration li au sexe (GPG) est dni comme suit: GPG = ((Em Ew) / Em)*100, Em reprsentant le salaire moyen des hommes
et Ew le salaire moyen des femmes (voir BIT, 2012b).
Source: graphique reproduit partir de Anspal, Kraut et Rm, 2010.
Note: lcart de rmunration li au sexe (GPG) est dni comme suit: GPG = ((Em Ew) / Em)*100, Em reprsentant le salaire moyen des hommes
et Ew le salaire moyen des femmes (voir BIT, 2012b).
Sources: calculs du BIT fonds sur les donnes de Statistiques Norvge.
3 Estimations rgionales
3.1 La croissance globale cache un tableaucomplexe
Comme on la fait observer plus haut, il existe des diffrences importantes dans les
taux de croissance des salaires moyens rels selon les rgions et les pays, les salaires
croissant gnralement plus vite dans les zones de croissance conomique plus forte. La
fgure 7 prsente nos estimations de la croissance des salaires moyens mensuels rels
par rgion partir de 2006, y compris les annes de la crise. De mme que pour notre
estimation mondiale, les estimations rgionales sont des estimations pondres (comme
cela est expliqu dans notre appendice I) et sont donc fortement infuences par les
tendances salariales au sein des grandes conomies, par exemple la Chine en Asie, les
tats-Unis dans les conomies dveloppes, la Fdration de Russie et lÙkraine en
Europe orientale et en Asie centrale, le Brsil ou le Mexique en Amrique latine et aux
Carabes, ou lÀfrique du Sud dans le continent africain. Nous voyons que dans les co-
nomies dveloppes la croissance des salaires rels a fuctu dans une fourchette troite
dènviron plus et moins 1 pour cent. Dans dàutres rgions, les fuctuations taient gn-
ralement plus importantes.
Le tableau 1 procde dùne vue plus long terme et montre làugmentation cumu-
lative des salaires moyens rels depuis 2000. Nous voyons quentre 2000 et 2011 les
salaires moyens mensuels rels ont augment au niveau mondial de prs dùn quart,
mais les diffrences entre les rgions sont nettes. En Asie, les salaires moyens rels ont
peu prs doubl; en Amrique latine et dans les Carabes, de mme quèn Afrique,
ils ont augment dun peu moins que la moyenne mondiale, tandis que dans les co-
nomies dveloppes ils ont augment dènviron 5 pour cent. En Europe centrale et
en Asie centrale, les salaires moyens ont presque tripl: comme on le montrera par
la suite, il sagissait en partie dune rcupration du terrain qui avait t perdu dans
la phase initiale de transition vers les conomies de march dans les annes 1990.
Au Moyen-Orient, nos estimations approximatives donnent penser que les salaires
ont baiss.
Tableau 1 Croissance cumulative des salaires rels par rgion depuis 2000 (indice: 2000 = 100)
Groupe rgional 2000 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Afrique 100,0 103,9 105,3 108,1** 108,6** 115,4** 117,8**
Asie 100,0 149,0 158,8 165,1 174,6 185,6 (194,9)
Europe orientale
et Asie centrale
100,0 204,4 233,9 253,4 244,4 257,9 271,3
conomies dveloppes 100,0 103,3 104,5 104,1 104,9 105,5 105,0
Amrique latine et Carabes 100,0 105,4 108,5 109,3 111,0 112,6 115,1
Moyen-Orient 100,0 98,3 100,1 97,2 95,8** (94,6) (94,4)
Monde 100,0 112,8 116,1 117,3 118,8 121,3 122,7*
* Taux de croissance publis en tant questimations provisoires (sur la base dune couverture denviron 75pour cent).
** Taux de croissance publis en tant questimations approximatives (sur la base dune couverture denviron 40 74pour cent).
() Taux de croissance publis mais susceptibles de changer (sur la base dune couverture de moins de 40 pour cent).
Note: pour la couverture et la mthodologie, voir lappendice I.
9 PARTIE I Estimations rgionales
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0,5**
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2,1**
2006 2007 2008 2009 2010 2011
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6,6
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2006 2007 2008 2009 2010 2011
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0,3
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0,6
0,5
2006 2007 2008 2009 2010 2011
15
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0
5
11,7
14,4
8,3
3,5
5,5
5,2
a Afrique b Asie
c conomies dveloppes d Europe orientale et Asie centrale
Figure 7 Croissance annuelle moyenne des salaires rels par rgion, 2006-2011
e Amrique latine et Carabes f Moyen-Orient
2006 2007 2008 2009 2010 2011
15
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3,5
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1,6
1,4
2,2
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5
2006 2007 2008 2009 2010 2011
1,2
1,9
2,9
1,5**
(1,2)
(0,2)
En dpit de la croissance plus rapide des salaires moyens rels dans les rgions
mergentes durant la dernire dcennie, les diffrences en chiffres absolus dans les
niveaux des salaires dun pays et dune rgion lautre demeurent considrables. La
fgure 8 prsente les estimations comparatives du Bureau of Labor Statistics des tats-
Unis concernant la rmunration horaire directe du temps travaill dans le secteur manu-
facturier en 2010. Le taux de rmunration horaire tait trs variable, allant de presque
35 dollars EU au Danemark, un peu plus de 23 aux tats-Unis, jusqu` 13 en Grce,
entre 5 et 6 au Brsil, et moins de 1,50 aux Philippines. En appliquant une mthode
diffrente et non comparable, le cot total de la rmunration horaire dans le secteur
manufacturier a t estim 1,36 dollar EU en Chine pour 2008 et 1,17 dollar EU en
Inde pour 2007 (United States Department of Labor, Bureau of Labor Statistics, 2011).
Bien que ces diffrences soient mesures en dollars EU courants et donc dpendantes
des fuctuations des taux de change, elles indiquent quìl existe encore de trs larges
carts dans les salaires et la productivit du travail dans le monde.
* Taux de croissance publis en tant questimations provisoires (sur la base dune couverture denviron 75pour cent).
** Taux de croissance publis en tant questimations approximatives (sur la base dune couverture denviron 40 74pour cent).
() Taux de croissance publis mais susceptibles de changer (sur la base dune couvertuwre de moins de 40 pour cent).
Figure 7 Croissance annuelle moyenne des salaires rels par rgion, 2006-2011 (suite)
Italie
0 10 20 30 40
Philippines
Hongrie
Pologne
Slovaquie
Estonie
Rp. tchque
Portugal
Argentine
Singapour
Grce
Espagne
Nouvelle-Zlande
Japon
France
Royaume-Uni
Autriche
tats-Unis
Pays-Bas
Belgique
Canada
Sude
Finlande
Allemagne
Irlande
Australie
Suisse
Danemark
Isral
Brsil
1,41
4,74
4,86
5,41
6,03
6,10
6,81
7,16
8,68
12,68
13,01
14,53
15,28
17,29
18,32
18,96
21,06
21,16
21,67
23,32
23,49
24,01
24,23
24,78
25,05
25,80
26,29
28,55
34,29
34,78
Dollars EU, 2010
Figure 8 Comparaison de la rmunration directe horaire du temps travaill
dans le secteur manufacturier au niveau international, 2010 (dollars EU)
Note: la rmunration directe du temps travaill est constitue des salaires et traitements pour le temps effectivement travaill.
Source: United States Department of Labor, Bureau of Labor Statistics (BLS), 2011.
2006 2007 2008 2009 2010 2011
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Croissance des salaires nominaux
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Ination
Note: la gurevise exclusivement les pays classs parmi les conomies avances dans le rapport Perspectives de lconomie mondiale du FMI et
exclut donc certains pays classs parmi les conomies dveloppes dans le prsent rapport (pour une liste de ces pays, voir lappendice I). Les
chiffres de la croissance des salaires nominaux et de lination ne sont pas strictement comparables dun pays lautre en raison des diffrences dans
la faon dont chaque pays est pondr dans lestimation rgionale. La gureillustre nanmoins largumentation dveloppe dans le corps du rapport.
Sources: http://www.ilo.org/salaires12; base de donnes FMI, Perspectives de lconomie mondiale.
Figure 9 Tendances de la croissance des salaires nominaux et de lination
dans les conomies avances, 2006-2011 (en pourcentage, par anne)
3.2 conomies dveloppes
Salaires et ination
Dans les conomies dveloppes, les salaires moyens ont enregistr un double creux,
avec une baisse en 2008 et de nouveau en 2011 (voir la fgure 7)
7
. La fgure 9, qui met
en vidence les tendances des salaires moyens nominaux et de lìnfation des prix dans
les conomies avances, montre quèn 2008 lìnfation exceptionnellement leve a t
suprieure aux hausses des salaires nominaux, et a donc entran une baisse des salaires
rels
8
. En 2009, lanne de la rcession conomique mondiale, les salaires nominaux et
les prix la consommation ont t plus ou moins gels. Depuis, la reprise de la croissance
des salaires nominaux a tran en 2011, mais la hausse des prix la consommation a
retrouv les taux davant la crise, ce qui explique la baisse des salaires rels cette anne-l.
Salaires et productivit
La fgure 10 prsente la moyenne annelle du taux de croissance conomique et du
nombre de salaris employs dans les pays dvelopps pour les annes prcdant la
crise (1999-2007) et aprs le dbut de la crise (2008-2011). La fgure 11 prsente la
moyenne du taux daccroissement des salaires moyens rels et de la productivit du
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Croissance de lemploi
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a 1999-2007
b 2008-2011
Figure 10 Croissance de la production et de lemploi dans les conomies dveloppes,
1999-2007 et 2008-2011 (en pourcentage, par anne)
Note: pour les abrviations des pays, voir lappendice I.
Sources: BIT, Modle conomtrique des tendances, mars 2012; base de donnes FMI, Perspectives de lconomie mondiale.
Figure 11 Croissance des salaires rels et de la productivit du travail dans les conomies
dveloppes, 1999-2007 et 2008-2011 (en pourcentage, par anne)
a 1999-2007
b 2008-2011
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Croissance de la productivit
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Note: les paires a, b et c, d des graphiques se rapportent aux pays de la rgion des conomies dveloppes. Ils ont t spars uniquement pour
une meilleure lisibilit. Si les donnes pour 1999, 2007, 2008 ou 2011 ntaient pas disponibles, cest le point de donnes de la priode suivante
la plus proche qui a t utilis pour estimer la tendance. Pour les abrviations des pays, voir lappendice I.
Sources: http://www.ilo.org/salaires2012; BIT, Modle conomtrique des tendances, mars 2012; FMI, base de donnes Perspectives de lco-
nomie mondiale.
c 1999-2007
d 2008-2011
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POL
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travail mesure par le produit intrieur brut (PIB) par personne pourvue dun emploi
9
.
Prises ensemble, ces deux fgures offrent une vue dènsemble de la manire dont la crois-
sance conomique a affect la main-duvre et de celle dont la Grande Rcession a
affect les marchs du travail. Si lòn examine la priode qui a prcd la crise, on voit
que lemploi a augment dun montant gal ou infrieur au PIB dans presque tous les
pays (comme le montre le fait que seuls lItalie et lEspagne se trouvent la droite de
la ligne 45 degrs qui partage la fgure 10 a en deux). Comme le PIB a augment plus
vite que lèmploi, la productivit du travail (PIB par personne salarie) a par dfnition
augment. Cest ce qui ressort du fait que tous les pays hormis lItalie et lEspagne se
trouvent la droite de làxe vertical dans la fgure 11 a.
La hausse de la productivit du travail sest-elle traduite par une hausse des salaires
rels? La fgure 11 montre que la plupart des pays ont effectivement connu une priode
de croissance tant des salaires rels que de la productivit (indique par le groupe de
pays fgurant dans le coin suprieur droit de la fgure 11 a). Dans un certain nombre de
pays, comme le Danemark, la Finlande, la France, la Rpublique tchque, la Roumanie
et le Royaume-Uni, la croissance des salaires et celle de la productivit taient troi-
tement lies (comme le montre la fgure 11). Mais il y a aussi des pays dans lesquels
les deux variables taient moins nettement synchronises. La fgure 11 a montre quèn
Grce et en Islande la hausse des salaires moyens a t suprieure celle de la producti-
vit du travail, tandis quen Espagne et en Italie la productivit du travail a baiss, mais
les salaires nont enregistr quune baisse marginale (dans le cas de lEspagne) ou nont
pas baiss du tout (dans le cas de lItalie). Dans certaines des plus grandes conomies
de la rgion, en revanche, la hausse des salaires a t moins rapide que celle de la pro-
ductivit: cèst ce qui sèst produit aux tats-Unis, au Japon et surtout en Allemagne,
o les salaires moyens ont baiss en dpit dùne croissance positive de la productivit
du travail moyenne durant les annes 1999-2007 (voir aussi la fgure 35 pour plus de
dtails concernant lÀllemagne).
Croissance conomique et croissance de lemploi
Que sèst-il pass dans les annes qui ont suivi le dbut de la Grande Rcession?
Il ressort clairement de la fgure 10 b que tous les pays o le PIB sèst contract en
moyenne sur la priode 2008-2011 ont aussi connu une baisse, ou, dans le meilleur des
cas, une stagnation de lèmploi ( lèxception du Luxembourg, o lèmploi a augment).
Inversement, la plupart des conomies qui ont affch une croissance positive du PIB
durant la crise ont aussi russi dvelopper lèmploi. Mais il est intressant de noter
que, durant les annes de la crise, lemploi a plus souffert que la production dans plu-
sieurs pays, notamment lÈspagne, lÌrlande, le Portugal et la Bulgarie. Aux tats-Unis,
lemploi a rgress malgr une croissance conomique lente mais positive.
Par consquent, il ressort clairement de la fgure 11 b et d que la plupart des
pays ont enregistr une croissance positive de la productivit du travail au cours de la
priode 2008-2011 en dpit de la crise (comme lìndique le fait que la plupart des pays
fgurent la droite de làxe vertical dans ces sections de la fgure). Nombre de ces pays
ont aussi enregistr des hausses des salaires rels, y compris lÀllemagne, qui semble
avoir chang de cap, en admettant une croissance des salaires suprieure celle de la
productivit du travail aprs des annes de modration salariale. Le Royaume-Uni fait
17
partie des exceptions: malgr des gains de productivit, les salaires moyens rels ont
fortement baiss sous làction dùne infation relativement leve. làutre extrmit,
les salaires au Portugal ont augment sur la priode 2008-2011 bien que la productivit
soit reste stagnante. Dans certains pays, les salaires ont nettement plus baiss que la
productivit du travail: il sàgit de la Grce et de certains nouveaux membres de lÙE.
En Grce, o la hausse des salaires dpassait celle de la productivit avant la crise,
les salaires moyens ont t ramens la baisse par les programmes daustrit et ont
affch une baisse cumulative proche de 15 pour cent sur les seules annes 2010 et
2011. Globalement, une comparaison des fgures 10 et 11 ne fournit gure d`lments de
preuve dune simple corrlation ngative entre la modration salariale et la croissance
de lemploi durant la crise.
3.3 Europe orientale et Asie centrale
Du redressement la crise
Dans le groupe des pays dÈurope orientale (hors UE) et dÀsie centrale, le taux de
croissance rgional des salaires moyens rels a fortement fuctu, passant de taux
deux chiffres avant la crise au brutal atterrissage de 2009. Les salaires ont retrouv
une croissance positive en 2010 et 2011, mais les taux atteints taient nettement moins
levs que ceux dàvant la crise. Prises ensemble, les fgures 12 et 13 montrent quàvant
la crise le PIB a augment plus vite que lèmploi (fgure 12), avec pour rsultat que la
productivit du travail a augment dans tous les pays (fgure 13). Ce qui est frappant,
cest que les gains de productivit avant la crise sont alls de pair avec des hausses
encore plus fortes des salaires rels, de plus de 10 pour cent par an, en moyenne, dans la
majorit des pays. Dans bien des cas, cela sexplique par le processus de redressement
aprs la transition vers des conomies de march. La fgure 14 montre que les salaires
rels en Russie ont dabord baiss moins de la moiti de la valeur quils avaient en
1990, avant de se redresser progressivement et de tripler au cours des annes post-
rieures 2000. LUkraine a suivi une tendance similaire, les salaires rels baissant
fortement entre 1992 et 1999 avant de plus que tripler en chiffres rels jusquen 2009
10
.
Coup darrt port aux salaires
Plus rcemment, entre 2008 et 2011, la productivit a augment plus lentement mais est
demeure largement positive, et la croissance des salaires rels sest plus troitement
aligne sur celle de la productivit. Il y avait des exceptions: en Serbie et en Albanie,
les salaires rels ont baiss malgr une croissance positive de la productivit du travail,
ce qui est mettre au compte dun gel des salaires nominaux dans la fonction publique.
En Serbie, en vertu dùn accord sign en avril 2009 avec le FMI, le gouvernement serbe
a pris lengagement de geler les salaires et les pensions de retraite du secteur public
en chiffres nominaux en 2009 et en 2010 - la suite de quoi les salaires rels dans la
fonction publique ont baiss (Arandarenko et Avlijas, 2011). Cette mesure sèst accom-
pagne dune interdiction dembaucher dans la fonction publique. Pareillement, sur les
conseils du FMI, des restrictions budgtaires visant la croissance des salaires dans le
secteur public ont t mises en place en Albanie.
PARTIE I Estimations rgionales
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Figure 12 Croissance de la production et de lemploi en Europe orientale et en Asie centrale,
a 1999-2007
b 2008-2011
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Figure 13 Croissance des salaires rels et de la productivit du travail en Europe orientale
eten Asie centrale, 1999-2007 et 2008-2011 (en pourcentage, par anne)
Note: si les donnes concernant 1999, 2007, 2008 ou 2011 ntaient pas disponibles, cest le point de donnes de la priode suivante la plus
proche qui a t utilis pour estimer la tendance. Pour les abrviations des pays, voir lappendice I.
Sources: http://www.ilo.org/salaires2012; BIT, Modle conomtrique des tendances, mars 2012.
Mais la situation rgionale dcrite la fgure 7 est surtout infuence par les
tendances qui se dessinent dans les deux conomies les plus importantes, savoir la
Fdration de Russie et lÙkraine. Dans ces deux pays, la croissance des salaires sèst
ralentie en 2008 et est devenue ngative en 2009, avant de rebondir environ la moiti
des taux davant la crise les annes suivantes. Une analyse de limpact de la crise sur le
march du travail ukrainien rvle que la baisse des salaires mensuels tait en grande
partie mettre au compte dune augmentation du sous-emploi involontaire en 2009,
quand un employ sur cinq en Ukraine travaillait moins dheures que ce quil aurait
souhait. Un grand nombre de salaris ont d prendre des congs sans solde, surtout
dans le secteur industriel (BIT, 2011d)
11
, tandis que dautres ont vu leur salaire de base
gel et leurs primes rduites (Kulikov et Blyzniuk, 2010).
3.4 LAsie et le Pacique
Croissance leve, domine par la Chine
Les tendances en Asie, et particulirement en Asie de lÈst, sont en net contraste avec
celles des autres rgions. Dans un contexte de solide performance conomique de la
rgion durant les annes de la crise, les salaires en Asie ont continu de crotre des taux
levs (comme le montre la fgure 7). Cela refte en particulier lìnfuence de la Chine,
o les salaires dans les units urbaines ont augment en moyenne des taux annuels
deux chiffres durant toute la dcennie, selon lAnnuaire statistique de la Chine. Si lòn
utilise ces chiffres offciels dùn taux de croissance annuel de 12 pour cent, les salaires
1990 1995 2000 2005 2010
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(
%
)
Figure 14 Indice des salaires rels dans la Fdration de Russie depuis 1990 (1990 = 100)
Source: calculs du BIT sur la base des donnes provenant du Service statistique de ltat fdral de la Fdration de Russie, 2011.
21
moyens rels en Chine ont plus que tripl sur la dcennie de 2000 2010, ce qui suscite
des questions concernant l`ventuelle fn de la main-dòuvre bon march en Chine.
la fgure 15, nous voyons que sans la Chine, o la croissance du PIB et des salaires a
t exceptionnellement leve ces dernires annes, le tableau change considrablement
et refte l`volution moins positive des salaires dans des pays comme la Rpublique de
Core ou lÌnde ces quatre dernires annes.
Si nous examinons les fgures 16 et 17, nous voyons que la plupart des pays de la
rgion ont affch des taux de croissance conomique qui taient en moyenne de 5 pour
cent ou plus sur la priode 1999-2007, tandis que paralllement, sur la sous-priode
allant de 2002 2007, la croissance annuelle moyenne de lemploi tait de 1,2 pour cent
en Asie de lÈst, de 1,8 pour cent en Asie du Sud-Est et dans le Pacifque, et de 2,2 pour
cent en Asie du Sud (BIT, 2012a). Il faut cependant souligner ce stade que la croissance
de lèmploi total dans les pays en dveloppement - o la plupart des gens ne peuvent
pas se permettre d`tre au chmage - est troitement lie l`volution dmographique.
Cèst pourquoi, la fgure 17, nous prsentons aussi la croissance du PIB paralllement
la croissance du nombre des salaris rmunrs, ce qui laisse de ct les travailleurs
indpendants ou ceux qui contribuent lèntreprise familiale. Mme dans ce cas, nous
voyons que la croissance de la production tait suprieure celle de lemploi rmunr
dans la plupart des pays.
PARTIE I Estimations rgionales
2006 2007 2008 2009 2010 2011
4
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8
Avec la Chine Sans la Chine
6,7
6,6
3,9
5,7
6,3
(5,0)
2,1
1,2
2,0
0,9
2,7
0,9
Figure 15 Croissance annuelle moyenne des salaires rels en Asie, 2006-2011
() Taux de croissance publis mais susceptibles de changer (sur la base dune couverture infrieure 40 pour cent).
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Figure 16 Croissance de la production et de lemploi en Asie, 1997-2007 et 2008-2011
(en pourcentage, par anne)
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Croissance des salaris
Croissance des salaris
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Figure 17 Croissance de la production et du nombre des salaris rmunrs en Asie,
Mise en garde concernant la productivit du travail: rle de lemploi rmunr
Quel a t lìmpact des salaires sur ces taux de croissance? Sàgissant des pays en dve-
loppement, il faut tre prudent dans linterprtation de la juxtaposition des donnes
concernant la croissance des salaires moyens et la productivit du travail, comme dans
la fgure 18. En effet, les salaires moyens correspondent la rmunration des salaris
(qui reprsentent moins de 50 pour cent des travailleurs dans certains pays dÀsie),
tandis que la productivit du travail mesure le PIB de tous les individus ayant un emploi
(y compris les salaris et les travailleurs indpendants). Il serait prfrable de comparer
les salaires moyens et la productivit des salaris, mais on ne dispose gnralement pas
de donnes sur celle-ci. Par principe, on souponne que la croissance de la production
de lensemble des travailleurs sous-estime la croissance de la productivit du travail
des salaris rmunrs, qui sont nombreux travailler dans les secteurs industriels plus
productifs et dynamiques. Par ailleurs, lorsquon compare la croissance des salaires et
celle de la productivit en Chine, il ne faut pas oublier que la premire ne couvre que
les entreprises dtat, les units en proprit collective et les autres types de socits
lies l`tat (voir la note 4). La baisse de la part du travail en Chine mise en vidence
dans la partie II du prsent rapport donne penser que la croissance des salaires tait
en fait infrieure celle de la productivit dans ce pays.
Le pouvoir dachat menac
Nonobstant ces mises en garde, la fgure 18 montre clairement quèn rgle gnrale
les gains de productivit comme ceux qui concernent les salaires rels ont t positifs,
et trs substantiels, aussi bien avant que pendant les annes de la crise. Nanmoins,
dans certains pays, la croissance des salaires mesure par les statistiques offcielles a
t dcevante sur la priode 1999-2007. Parmi les pays dÀsie de lÈst, une croissance
des salaires relativement basse a t enregistre, par exemple, en Thalande. En Asie
du Sud galement, les chiffres mesurant les salaires moyens rels ont stagn durant
la dcennie qui a prcd la crise. En Inde, les tendances des salaires ne sont pas trs
claires. Les sources des donnes concernant la croissance des salaires qui font autorit
en Inde sont lÈnqute annuelle sur les industries ralise par lÒffce central de sta-
tistique et lindice des salaires rels publi par le Bureau du travail. Ces deux sources
de donnes indiquent que les salaires rels ont baiss durant la plupart des dernires
annes, ce qui a entran une rduction du pouvoir dachat des salaris. Cela explique-
rait les nombreuses proccupations exprimes par les travailleurs en Inde au sujet de
la fambe des prix, en particulier ceux des denres alimentaires. Cette tendance est
toutefois surprenante compte tenu de la croissance conomique rapide du pays durant la
dcennie coule. Elle contredit aussi notre analyse tire de lenqute sur lemploi et le
chmage, ralise tous les cinq ans par lÌnstitut national de sondage (NSSO) en mme
temps que lEnqute sur les dpenses de consommation, dans laquelle les travailleurs
salaris et les travailleurs occasionnels dclarent une augmentation de 150 pour cent de
leur rmunration - bien plus que làugmentation de 52 pour cent de lìndice des prix
la consommation - sur les cinq annes entre 2004/05 et 2009/10.
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Figure 18 Croissance des salaires et de la productivit du travail en Asie, 1997-2007
et 2008-2011 (en pourcentage, par anne)
Note: si les donnes concernant 1999, 2007, 2008 ou 2011 ntaient pas disponibles, cest le point de donnes de la priode suivante la plus
proche qui a t utilis pour estimer la tendance. Pour les abrviations des pays, voir lappendice I.
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Figure 19 Croissance de la production et de lemploi en Amrique latine et dans les Carabes,
3.5 Amrique latine et Carabes
Une performance robuste a permis de rsister la crise
En Amrique latine et dans les Carabes, la crise fnancire a interrompu un cycle cono-
mique robuste. La fgure 19 a montre que, durant les annes 1999-2007, qui ont prcd
la crise, la croissance annuelle moyenne du PIB et de lemploi tait positive et robuste
dans une majorit de pays, tandis que la fgure 19 b refte la dure relativement courte
de la crise mondiale dans cette rgion. Nous voyons que, sur la priode 2008-2011, le
PIB comme lemploi ont augment des taux assez solides dans une majorit de pays, en
dpit de la contraction conomique qui sest produite dans certaines grandes conomies
en 2009. Il convient toutefois de noter quèn Amrique centrale et dans les Carabes, o
les conomies sont fortement lies au march nord-amricain, la reprise a t plus lente
quèn Amrique du Sud.
La fgure 20 couvre la priode qui s`tend entre 2004, anne qui a marqu le dbut
du cycle conomique robuste du continent, et 2011 - une priode durant laquelle le PIB
a augment en moyenne de 4,4 pour cent. Nous voyons que lÀmrique latine a t sv-
rement touche par la crise conomique mondiale en 2009, mais quelle a rapidement
rebondi en 2010, soutenue par le redressement des prix des produits de base ainsi que
par la mise en uvre de politiques montaires et budgtaires contracycliques, laquelle a
t possible parce que la rgion jouissait dune situation budgtaire saine et avait ramen
la dette extrieure des niveaux grables durant les annes dexpansion. Ce qui est
frappant, ce nest pas seulement que la rcession a t de courte dure, mais aussi que
le redressement a donn lieu la cration de nouveaux emplois et a entran une nette
rduction du taux de chmage, qui est pass de 10,3 pour cent en 2004 6,8 pour cent
en 2011 (comme lìllustre la fgure 20).
Figure 20 Croissance conomique et chmage en Amrique latine et dans les Carabes,
2004-2011 (en pourcentage)
2005 2006 2007 2008
2009
2010 2011 2004
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2
4
Croissance du PIB Chmage
10,3
9,0
8,6
7,9
7,3
8,1
7,3
6,8
6,0
4,7
5,7 5,8
4,2
1,6
4,5
6,2
Sources: Base de donnes FMI, Perspectives de lconomie mondiale; BIT, 2011e.
Les chiffres positifs sexpliquent par les donnes provenant du Brsil
Ces tendances conomiques sont aussi perceptibles dans les donnes relatives aux
salaires. Les estimations rgionales ( la fgure 7) montrent quèn Amrique latine et
dans les Carabes les salaires rels moyens ont augment sur toutes les annes entre
2006 et 2011, malgr la crise de 2009. Comme en Asie, cèst en 2008 que cette rgion a
affch la croissance des salaires rels la plus faible en raison dùne pousse de lìnfa-
tion, correspondant des hausses des cours internationaux des denres alimentaires et
du ptrole. Au contraire, en 2009 ces cours ont nettement baiss du fait du ralentisse-
ment international, rduisant de moiti en moyenne lìnfation dans la rgion. Cette forte
baisse de lìnfation a entran une lgre amlioration du pouvoir dàchat des salaires,
malgr la contraction conomique.
Globalement, ces tendances rgionales des salaires en Amrique latine et dans les
Carabes sont fortement infuences par les grands pays comme le Brsil, o la crois-
sance des salaires est demeure positive tout au long de la priode (fgure 21)
12
. Si nous
examinons la performance dùn groupe de 14 pays pour lesquels nous disposons de toutes
les informations sur la priode 2005-2010, nous observons que beaucoup dàutres pays
ont connu une certaine dgradation des salaires rels en 2008 et de nouveau en 2010. Les
salaires rels se sont contracts dans 10 pays sur 14 en 2008, tandis quèn 2010 le phno-
mne sèst produit dans 6 pays. Sur les deux annes, la majorit des pays o les salaires
rels ont baiss se trouvaient en Amrique centrale et dans les Carabes, car leurs cono-
mies sont plus dpendantes de la situation conomique aux tats-Unis.
Figure 21 Croissance annuelle moyenne des salaires rels au Brsil, 2006-2011
0
0,5
1,0
1,5
2,0
2,5
3,0
3,5
4,5
4,0
4,0
3,2
3,4
3,2
3,8
2,7
2006 2007 2008 2009 2010 2011
La productivit, lemploi et les salaires augmentent mais pas partout
La fgure 22 contient des donnes sur la croissance annuelle des salaires mensuels
rels moyens sur la priode 2004-2011, qui couvre les annes de forte croissance co-
nomique et pour laquelle des donnes cohrentes sur les salaires sont disponibles pour
un nombre relativement grand de pays. Nous voyons que, globalement, les pays qui ont
affch une forte productivit du travail ont aussi connu une augmentation substantielle
des salaires rels. Ainsi, par exemple, les salaires rels moyens ont augment raison
de plus de 3 pour cent par an au Brsil, au Prou et en Uruguay, et de plus de 2 pour
cent par an au Chili et au Costa Rica. Dans la trs grande majorit de ces pays, le taux
de chmage a baiss, ce qui signife que les indicateurs du march du travail se sont
gnralement amliors. Inversement, les pays o le PIB par tte nà que lentement aug-
ment sur cette priode nònt aussi affch que de modestes amliorations (comme au
Honduras et au Mexique) ou mme des baisses (comme au Nicaragua et en El Salvador)
des salaires rels. Les trois pays o la bonne performance conomique nà pas t
refte dans la croissance des salaires rels moyens sont la Colombie, la Rpublique
dominicaine et le Panama.
Figure 22 Croissance des salaires et de la productivit du travail dans certains pays
dAmrique latine et des Carabes, 2004-2011 (en pourcentage, par anne)
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Productivit du travail
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Note: si les donnes concernant 2004 ou 2011 ntaient pas disponibles, cest le point de donnes de la priode suivante la plus proche qui a t
utilis pour estimer la tendance. Pour les abrviations des pays, voir lappendice I.
Sources: http://www.ilo.org/salaires2012/; BIT, Modle conomtrique des tendances, mars 2012.
3.6 Le Moyen-Orient
La baisse des changes commerciaux rode
la demande de travailleurs migrants
La crise conomique mondiale a eu pour effet de ralentir dentre de jeu la croissance
conomique dans la plupart des pays du Moyen-Orient (fgure 23). Le principal impact
de la crise dans cette rgion sest traduit par la rduction des changes internationaux.
Une chute brutale de la demande dèxportations des conomies du Moyen-Orient moins
dveloppes sest produite, suivie en 2009 dune baisse temporaire de la valeur des
exportations pour les producteurs de ptrole dans les pays du Conseil de coopration
du Golfe (CCG)
13
; aprs quoi, on a enregistr une hausse la fois des prix du ptrole et
des dpenses publiques. Dans les pays du CCG, o le nombre de travailleurs expatris
dpasse de trs loin celui des travailleurs autochtones, le ralentissement de la cration
demplois na peut-tre t que temporaire (bien que lon manque dinformations statis-
tiques), lèxception de l`mirat de Douba o le ralentissement conomique semble
stre traduit par une rduction de la demande de travailleurs migrants, en particulier
dans la construction. Les questions relatives aux migrations jouent galement un rle
important dans dàutres pays du Moyen-Orient, de nombreux Syriens travaillant dans
le secteur du btiment au Liban, ou encore une majorit des travailleurs du secteur de
l`habillement de la Jordanie venant de lÀsie du Sud.
Difcults au niveau des statistiques
Les effets de la crise mondiale sur les salaires dans cette rgion sont diffciles valuer,
pour au moins deux raisons. Tout dàbord, peu de pays publient rgulirement des statis-
tiques sur les salaires. Le seul pays du Moyen-Orient qui produise des enqutes trimes-
trielles sur les salaires est le Royaume de Bahren, dont lÀutorit de rglementation du
march du travail publie les salaires de base moyens estims de tous les salaris, compils
làide dènqutes sur les mnages et de donnes administratives. En revanche, lÀrabie
saoudite publie des donnes annuelles tires de son Enqute conomique annuelle sur les
tablissements avec un dcalage de deux ans, ce qui signife que les statistiques les plus
rcentes disponibles au moment de la rdaction du prsent rapport portaient sur lanne
2009. Par ailleurs, les statistiques sur les salaires dans la rgion sont parfois dune qualit
douteuse, mme si certaines amliorations ont t apportes cet gard: la Tunisie, par
exemple, a procd sa premire enqute sur les salaires avec làide du BIT en 2011.
Nanmoins, ces donnes telles quelles se prsentent donnent penser que, dans une
majorit de pays du Moyen-Orient, les salaires nònt pas beaucoup augment, ou ont peut-
tre mme diminu au cours des dernires annes (fgure 24).
Une autre diffcult se prsente sàgissant de lìnterprtation des donnes relatives
aux salaires, parce que les salaires moyens peuvent masquer dnormes diffrences entre
ceux des travailleurs autochtones et ceux des travailleurs migrants, dont les salaires
respectifs sont les produits de systmes de fxation des salaires trs diffrents. Dans
les conomies du CCG, les carts trs marqus entre les salaires des expatris et ceux
des travailleurs autochtones sont le rsultat la fois des processus darabisation, qui
visent augmenter la proportion des travailleurs locaux dans le secteur priv, du sys-
tme de parrainage, qui restreint la libert de mouvement des travailleurs migrants
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Figure 23 Croissance de la production et de lemploi au Moyen-Orient, 1999-2007
et 2008-2011 (en pourcentage, par anne)
dun emploi lautre, et des politiques applicables aux emplois publics, qui crent
des emplois qui sont exclusivement destins aux locaux et offrent des salaires qui sont
bien souvent plus levs que ceux pratiqus dans le secteur priv. En fait, la conju-
gaison du faible taux de participation des femmes sur le march du travail et de la
proportion leve de femmes qui occupent des emplois du secteur public se traduit
parfois par un cart de rmunration li au sexe ngatif (une situation dans laquelle
les femmes gagnent plus que les hommes). C`tait le cas, par exemple, en Syrie, o
en 2010 environ 13 pour cent seulement des femmes taient conomiquement actives,
mais o environ 74 pour cent des femmes salaries travaillaient dans le secteur public,
o les salaires taient environ 1,5 fois plus levs que ceux pratiqus dans le sec-
teur priv (voir Rpublique arabe syrienne, Bureau central de statistique, 2011a et b).
Le Printemps arabe: travailleurs locaux et envois de fonds des migrants
Les constatations issues des enqutes montrent quune rmunration quitable et le
cot lev de la vie constituent des priorits essentielles chez les jeunes de la rgion
arabe (ASDAÀ, 2012), et le Printemps arabe a apparemment incit plusieurs pays
augmenter les salaires des autochtones travaillant dans le secteur public. Concernant
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Figure 24 Croissance des salaires et de la productivit du travail au Moyen-Orient, 1999-2011
toutefois le secteur priv, les salaires minima et la ngociation collective sont insuffsam-
ment dvelopps dans la rgion arabe. Ce phnomne entrane plusieurs consquences
imprvues, notamment un pouvoir de ngociation asymtrique entre les travailleurs et
les employeurs et la possibilit de troubles sociaux et dìnstabilit politique. Mme si les
envois de fonds en provenance des pays du Conseil de coopration du Golfe semblent
avoir mieux rsist que prvu, dautres pays de destination pourraient avoir fait payer le
cot de la crise aux travailleurs migrants. Dans les pays qui sont exportateurs nets de
migrants, la diminution des envois de fonds a une lourde incidence sur les revenus des
mnages, avec des rpercussions sous la forme dune baisse de la consommation et de
l`pargne totales, une hausse des taux de chmage et fnalement une baisse des salaires
dans le pays dorigine (Banque mondiale, 2011).
3.7 Afrique
Transition et turbulences
Dans les annes qui ont prcd la crise, lÀfrique est passe par une priode de crois-
sance conomique relativement rapide, avec des taux de croissance annuelle denviron
6,5 pour cent sur la priode 2004-2008. Durant les annes 2008-2011, la conjoncture
conomique sèst dgrade et les pays dÀfrique du Nord en particulier se sont retrouvs
confronts des diffcults extrieures et intrieures. Les diffcults extrieures sont
apparues en raison des liens conomiques troits avec les conomies dprimes dEu-
rope, tandis que les diffcults intrieures provenaient des changements radicaux et
des processus de transition politique vers des rgimes plus dmocratiques en gypte,
en Tunisie et en Libye. Dans limmdiat, cette priode de transition est alle de pair
avec une rduction des fux dìnvestissement tranger et des courants d`changes, ainsi
quàvec une baisse du tourisme. La fgure 25, qui prsente la croissance de la production
et de lemploi, montre quel point lconomie de la Libye a t touche durant la priode
2008-2011.
Le chmage: un luxe que la plupart des gens
ne peuvent pas se permettre
La fgure 25a montre dans quelle mesure, sur la priode 1999-2007, la croissance de
la production a t suprieure celle de lemploi dans un grand nombre de pays, ce
qui a parfois permis dobtenir des gains substantiels de productivit du travail. Une
tude antrieure a estim le taux de croissance annuelle de la productivit du travail en
Afrique subsaharienne 1,9 pour cent sur la priode 2000-2009 (BIT, 2012b). Mais l
encore, comme on là soulign dans la section prcdente concernant lÀsie, dans les
pays en dveloppement pauvres, la croissance de lemploi suit souvent la croissance de
la population en ge de travailler, car les indemnits de chmage sont tout fait insuf-
fsantes et la plupart des gens ne peuvent tout simplement pas se permettre de rester au
chmage. Cèst pourquoi nous montrons aussi ( la fgure 26) le lien entre la croissance
du PIB et la croissance de lèmploi rmunr en Afrique. Nous voyons ici que la crois-
sance conomique est alle de pair avec des augmentations relativement importantes du
nombre des salaris rmunrs.
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Figure 25 Croissance de la production et de lemploi en Afrique, 1999-2007 et 2008-2011
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Croissance du nombre des salaris
Croissance du nombre des salaris
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Figure 26 Croissance de la production et du nombre des salaris rmunrs en Afrique,
Les donnes limites font apparatre des augmentations modres des salaires
Comment ces faits nouveaux ont-ils affect les salaires? Les donnes concernant l`vo-
lution des salaires moyens en Afrique sont relativement limites. Seuls quelques pays
dÀfrique, comme lÀfrique du Sud, le Botswana, l`gypte, le Lesotho, Maurice et
lÒuganda, procdent des enqutes trimestrielles ou annuelles sur les tablissements
du mme type que celles que ralisent les pays dvelopps afn de mesurer l`volution
des rmunrations. Le Maroc publie un indice des salaires moyens nominaux, calcul
sur la base des rmunrations notifes la Caisse nationale de scurit sociale. Dans
la majorit des autres pays, dans le meilleur des cas, les donnes sur les salaires sont
recueillies laide denqutes sur la population active qui sont ralises des intervalles
irrguliers et ne sont pas toujours comparables dune anne sur lautre. Notre estimation
rgionale provisoire prsente la fgure 7 montre que la croissance des salaires depuis
2006 a t gnralement modre, lèxception de 2010 quand les salaires moyens rgio-
naux ont considrablement augment, principalement en raison du poids important de
lÀfrique du Sud dans cette estimation. La fgure 27 montre la croissance des salaires
rels et celle de la productivit du travail entre 1999 et 2011 pour certains pays. En 2010,
selon les chiffres offciels, les salaires moyens rels ont augment de prs de 10 pour
cent en Afrique du Sud, o la croissance des salaires demeure nanmoins ingalement
distribue.
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Figure 27 Croissance des salaires et de la productivit du travail dans certains pays africains,
1999-2011 (en pourcentage, par anne)
37 PARTIE I Salaires minima et travailleurs pauvres
4 Salaires minima et travailleurs pauvres
Dans les conditions conomiques actuelles, les salaires minima restent un sujet de dbat
parmi les proccupations des pouvoirs publics et dans le domaine public tant dans les
pays dvelopps que dans les pays en dveloppement. Dans le cadre de son Agenda du
travail dcent, lÒIT encourage les tats Membres adopter un salaire minimum pour
rduire la pauvret au travail et offrir une protection sociale aux salaris vulnrables
14
.
Les normes de lÒIT recommandent par ailleurs que les salaires minima soient fxs
par les autorits en consultation avec les partenaires sociaux, et quune approche quili-
bre soit suivie, qui tienne compte des besoins des travailleurs et de leurs familles ainsi
que des facteurs dordre conomique, y compris les niveaux de productivit, les exi-
gences du dveloppement conomique et la ncessit de maintenir un haut niveau dem-
ploi
15
. Dans le mme ordre dides, la Commission europenne a rcemment indiqu
quelle estimait que les tats membres devraient tablir des rmunrations dcentes
et viables et que la fxation de salaires minimaux adapts peut aider prvenir une
augmentation du nombre de travailleurs pauvres et est importante pour garantir la qua-
lit demplois dcents (voir Commission europenne 2012a, pp. 10-11). Les dbats se
poursuivent concernant le niveau auquel les salaires minima devraient tre fxs.
4.1 conomies dveloppes
Diffrents mcanismes, diffrentes conceptions
Dans les conomies dveloppes, les salaires minima variant beaucoup en propor-
tion des rmunrations mdianes des individus salaris plein temps, allant denviron
60 pour cent en Nouvelle-Zlande et en France moins de 40 pour cent au Japon, en
Espagne et aux tats-Unis (fgure 28). Les diffrences dans les niveaux des salaires
minima entre les pays correspondent aux diffrents mcanismes institutionnels au
moyen desquels les niveaux sont fxs (Lee, 2012). Elles correspondent aussi des per-
ceptions diffrentes des risques que les salaires minima prsentent en ce qui concerne
lviction des travailleurs faiblement rmunrs ou le nombre demplois disponibles
sur le march du travail. Ces facteurs, ainsi que les variations des salaires moyens,
expliquent aussi en partie pourquoi le niveau absolu du salaire minimum varie autant
entre les conomies dveloppes (fgure 28).
Tout comme les points de vue divergent au sujet du niveau optimal du salaire
minimum, ils varient aussi au sujet du rle de cet instrument dans les priodes de crise
conomique. Si lòn ne prend que les conomies dveloppes, il apparat que les respon-
sables politiques ont eu rsolument recours au salaire minimum comme outil de protec-
tion sociale pour les travailleurs les plus vulnrables au dbut de la crise jusquen 2009
(voir la fgure 29). Cependant, ultrieurement, le salaire minimum a t dans la plupart
des cas ajust uniquement dans le but de compenser lìnfation; cèst ce qui ressort de la
fgure 29 o, dans les annes qui ont suivi 2008, les salaires minima rels ont nettement
moins augment (ou ont mme baiss) dans les pays dvelopps.
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Australie
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Pays-Bas
Canada
tats-Unis
Grce
Japon
Espagne
Figure 28 Niveaux des salaires minima dans certaines conomies dveloppes, en dollars PPA
et en part du salaire mdian des salaris plein temps, 2010
Notes: si lon inclut le supplment de 8pour cent correspondant aux congs pays, le ratio salaire minimum/salaire mdian slve 47,1pour
cent aux Pays-Bas. Si lon inclut le salaire dun 13
e
et dun 14
e
mois, le ratio salaire minimum/salaire mdian slve 56pour cent au Portugal
et 43,8pour cent en Espagne.
Sources: http://www.ilo.org/salaires2012; Low Pay Commission, 2012.
Figure 29 Croissance des salaires minima dans les conomies dveloppes, 2006-2011
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2006 2007 2008 2009 2010 2011
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Croissance relle Croissance nominale
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0,6
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Note: sur la base dune moyenne simple non pondre des taux de croissance estims des salaires minima rels et nominaux couvrant 26 cono-
mies dveloppes.
Les mesures prises pour faire face la crise entranent des rductions forces
En Grce, le salaire minimum a t fortement rduit, perdant 22 pour cent de sa valeur
antrieure
16
(la valeur donne dans la fgure 28 se rapporte au salaire minimum avant
cet ajustement). Ce changement a t effectu la demande de la Banque centrale
europenne, de la Commission europenne et du FMI, comme condition pour octroyer
au gouvernement grec làccs aux fonds de renfouement du Fonds europen de sta-
bilit fnancire (FESF). Selon le FMI (FMI, 2012c), il tait ncessaire de rduire les
salaires pour que le pays retrouve sa comptitivit et la croissance, des objectifs qui ne
pouvaient tre atteints par des dvaluations de la monnaie nationale ou des ajustements
des taux dìntrt. Le FMI considrait aussi que le salaire minimum en Grve tait net-
tement plus lev que dans les autres conomies dveloppes, mme si les statistiques
prsentes la fgure 28 donnent penser quìl n`tait pas hors norme. Au Portugal,
làccs au FESF a t octroy condition que le salaire minimum soit gel.
4.2 conomies en dveloppement et conomies mergentes
Les salaires minima sont aussi largement utiliss dans les conomies en dveloppement
et les conomies mergentes, mais l, il est plus diffcile dòbtenir des informations sur
les niveaux auxquels ils sont fxs par rapport aux salaires mdians ou aux salaires
moyens (tant donn que les informations sur les salaires moyens sont souvent fondes
sur un sous-ensemble troit de salaris rmunrs dans lconomie formelle ou dans
les zones urbaines). Toutefois, une tude rcente a montr que, tout comme dans les
conomies dveloppes, lampleur des ajustements apports aux salaires minima pen-
dant la crise a vari dans les pays faible revenu et les pays revenu intermdiaire.
Lìnventaire des mesures prises pour faire face la crise fnancire et conomique
men conjointement par lOIT et la Banque mondiale a permis de constater que, sur
55 pays faible revenu et pays revenu intermdiaire viss par lènqute, 22 ont indiqu
quils avaient apport des changements au salaire minimum sur la priode allant de la
fn du premier semestre de 2008 la fn de 2010
17
.
Travail salari et privilges dans les pays en dveloppement
Une rserve est frquemment formule au sujet des salaires minima dans les pays en
dveloppement, savoir que tous les salaris font partie dune lite qui jouit dun niveau
de vie lev et de privilges inaccessibles pour les autres, par exemple les travailleurs
indpendants ou les travailleurs familiaux qui contribuent lèntreprise familiale. Sìl
est vrai que lemploi salari est habituellement li des activit plus forte productivit,
de meilleures conditions demploi et plus de droits au travail que pour les travailleurs
indpendants et ceux qui contribuent lentreprise familiale, beaucoup de travailleurs
horaires et salaris dans les pays en dveloppemenvt vivent en fait avec leurs familles
dans la pauvret, comme cela est analys dans lèncadr 1. La fgure 30 prsente des
estimations de la part des travailleurs horaires et salaris vivant au-dessous des seuils de
pauvret internationaux de 1,25 dollar EU et 2 dollars EU en ce qui concerne 32 pays en
dveloppement. Ces estimations signifent que, sur un nombre total dènviron 209 mil-
lions de salaris qui travaillaient dans ces pays en dveloppement diffrents moments
de 1997 2006, environ 23 millions gagnaient moins de 1,25 dollar EU par jour et
Encadr 1 Pauvret chez les travailleurs horaires et salaris
Les travailleurs pauvres sont dnis comme des personnes pourvues dun emploi qui font partie dun
mnage vivant au-dessous dun seuil de pauvret dni (voir Kapsos et Horne, 2011). des ns de
comparaisons au plan international, les seuils de pauvret de 1,25dollar EU ou 2dollars EU par jour,
ajusts pour tenir compte de la parit de pouvoir dachat (PPA), sont habituellement utiliss pour
dterminer lextrme pauvret et la pauvret modre, respectivement; les mnages pour lesquels
la consommation journalire par tte est infrieure ces seuils sont classs parmi les pauvres
18
.
Lextrme pauvret chez les travailleurs des pays en dveloppement est souvent lie des activits de
subsistance par exemple, les travailleurs indpendants ou les travailleurs familiaux contribuant
lentreprise familiale qui effectuent de petits travaux agricoles. Il existe effectivement des lments
de preuve qui tayent lassociation entre les travailleurs pauvres et lagriculture de subsistance: une
rcente tude du BIT a permis de constater que dans 53 pays pour lesquels on disposait de donnes
tires denqutes nationales sur les mnages, sur cinq travailleurs vivant dans lextrme pauvret (au-
dessous du seuil de 1,25 dollar EU), quatre vivaient dans des zones rurales, et que 68pour cent des
travailleurs pauvres taient employs dans le secteur de lagriculture (voir Kapsos et Horne, 2011).
Or, les donnes tires dun grand nombre de ces mmes enqutes indiquent que, en ne prenant en
compte que la pauvret chez les travailleurs indpendants et les travailleurs familiaux contribuant
lentreprise familiale, on sous-estimerait fortement lampleur de la pauvret au travail dans les
pays en dveloppement. La gure30 montre qu Madagascar, par exemple, plus de 80pour cent
des travailleurs horaires et salaris taient pauvres en 2005, plus de la moiti dentre eux vivant
dans lextrme pauvret. Au Mozambique, au Burundi et au Tadjikistan, plus de 60pour cent des
salaris vivaient dans la pauvret, et au Cambodge, au Congo et au Pakistan, plus de 50pour cent
des salaris taient pauvres, selon les donnes tires des enqutes les plus rcentes.
Que donne la comparaison de ces chiffres avec lincidence de la pauvret parmi les travailleurs
indpendants et les travailleurs familiaux contribuant lentreprise familiale? Parmi les 32pays,
la part des travailleurs indpendants et des travailleurs familiaux pauvres contribuant lentreprise
familiale est suprieure celle des salaris pauvres dans tous les pays sauf deux (Pakistan et
Tadjikistan). Dans beaucoup de pays, par consquent, le fait davoir un emploi salari est li une
plus faible probabilit dtre pauvre que dans le cas des travailleurs indpendants ou des travail-
leurs familiaux contribuant lentreprise familiale. Cependant, dans certains pays, le fait dtre
dans lemploi salari ne confre pas de grands avantages par rapport aux autres catgories dem-
plois pour ce qui est de la probabilit dtre pauvre. Par exemple, au Cambodge 56,5pour cent des
salaris vivaient au-dessous du seuil de pauvret de 2dollars EU en 2004, contre 65,8pour cent
des travailleurs indpendants et des travailleurs familiaux non rmunrs.
En outre, les travailleurs horaires et salaris pauvres constituent souvent une large part du total
des travailleurs pauvres dans les pays en dveloppement. En Indonsie, en 2002, le nombre de
salaris vivant au-dessous du seuil de pauvret de 2 dollars EU tait estim 15,5 millions,
contre 29,4 millions de travailleurs indpendants et de travailleurs familiaux pauvres contribuant
lentreprise familiale ce qui reprsentait plus de cinq travailleurs horaires et salaris pauvres
pour dix travailleurs indpendants et travailleurs familiaux non rmunrs. Au Pakistan en 2005, il
y avait huit salaris vivant dans lextrme pauvret pour dix travailleurs indpendants et travailleurs
familiaux non rmunrs. Ainsi, les travailleurs pauvres dans les pays en dveloppement exercent
effectivement dans une grande proportion des activits agricoles dans les zones rurales, mais les
politiques visant amliorer la productivit et augmenter les gains et le bien-tre des pauvres
doivent aussi tenir compte des nombreux travailleurs horaires et salaris vivant avec leurs familles
dans la pauvret.
Encadr 1 Pauvret chez les travailleurs horaires et salaris (suite)
Figure 30 Travailleurs pauvres salaris (gagnant moins de 1,25 dollar EU
et de 2dollarsEU par jour), en pourcentage du total des salaris
Source: Calculs du BIT sur la base des donnes tires denqutes nationales sur les mnages.
Source: Steven Kapsos, conomiste du travail, BIT.
Gabon, 2005
Panama, 1997
Guatemala, 2000
Cte dIvoire, 2002
Nicaragua, 2005
Niger, 2005
Burkina Faso, 2003
Philippines, 2003
Togo, 2006
Mali, 2006
Congo, 2005
Cambodge, 2004
Pakistan, 2005
Mozambique, 2003
Burundi, 1998
Tajikistan, 2003
Madagascar, 2005
Ouganda, 2005
Indonsie, 2002
Sngal, 2001
Bnin, 2003
Inde, 2005
Armnie, 2003
Colombie, 2003
Maroc, 1998
Bhoutan, 2003
Cameroun, 2001
Prou, 2006
Jordanie, 2002
Thalande, 2002
Turquie, 2002
Mexique, 2004
Salaris vivant au-dessous du seuil de pauvret de 1,25 dollar EU par jour
Salaris vivant au-dessous du seuil de pauvret de 2 dollars EU par jour
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
64 millions gagnaient moins de 2 dollars EU par jour. Cela indique que les salaires
minima, en dpit de leurs limites, demeurent un outil pertinent pour rduire la pauvret.
Le Brsil est un pays dÀmrique latine o le salaire minimum a eu un impact
important. La stratgie de rvaluation du salaire minimum est applique depuis une
vingtaine dànnes, mais elle a t intensife depuis 2005, quand, dans le cadre dùne
stratgie visant encourager la consommation intrieure, des ajustements rguliers ont
t systmatiquement relis lìnfation et la croissance du PIB. Cette stratgie a t
suivie mme durant les annes de la crise fnancire quand la politique salariale faisait
partie dùne stratgie contracyclique. En revanche, au Mexique, le salaire minimum nà
augment que trs lgrement en termes rels entre 2005 et 2011, car la politique en la
matire a t fortement dtermine par les efforts dploys pour parvenir l`quilibre
budgtaire (tant donn que les salaires minima dterminent un grand nombre de pres-
tations de scurit sociale) et accrotre la comptitivit lexportation. De ce fait, les
salaires minima sont infrieurs aux niveaux du march, mme pour les travailleurs non
qualifs. Ces deux cas illustrent les approches diffrentes des salaires minima.
LÀsie a connu plusieurs volutions dans le domaine de la croissance des salaires
minima et de la fxation de ces salaires. Dans lènsemble de la rgion, la croissance des
salaires minima a t positive dans presque tous les pays depuis 2005. Cette croissance
est alle de pair avec une croissance conomique positive et une croissance robuste des
salaires moyens rels sur la mme priode (voir la fgure 15). En mme temps, tous ces
facteurs sont intervenus paralllement la croissance de la part des salaris dans lèmploi
total et donc de la proportion des travailleurs qui peuvent tre directement concerns par
un salaire minimum. Par exemple, en Chine des progrs ont t accomplis pour ce qui
est dàmliorer làpplication et la coordination entre les provinces au plan de la fxation
des salaires minima. On peut citer comme autres exemples la Mongolie, qui a amlior
son mcanisme de fxation des salaires minima en incluant les partenaires sociaux; la
Malaisie, qui a annonc pour la premire fois l`tablissement dùn salaire minimum en
2012; et les Philippines, qui ont simplif leur systme complexe en la matire. En Inde,
les salaires minima verss au moyen du Dispositif national pour la cration demplois
ruraux (NREGS) ont apparemment rduit le non-respect des salaires minima dans le
secteur priv (Rani et Belser, 2012).
Au Moyen-Orient, les salaires minima ont baiss entre 2005 et 2011 et, dùne
manire gnrale, ils constituent un outil de politique gnrale limit dans cette rgion.
Les salaris reprsentaient environ 66 pour cent de lèmploi total en 2011, mais la cou-
verture lgale des salaires minima est souvent plus restreinte, si tant est quil existe un
salaire minimum. Par exemple, dans certains pays le salaire minimum est rserv
la population locale ou est discriminatoire pour les travailleurs migrants qui se voient
appliquer des taux infrieurs. Dans dautres cas, le salaire minimum est rserv au sec-
teur public, comme au Bahren.
PARTIE II
Baisse de la part du travail
et croissance quitable
Les rcentes tendances de la croissance des salaires et de la productivit dterminent
ce quon appelle la distribution fonctionnelle du revenu national - cèst--dire la rpar-
tition du revenu national entre le travail et le capital. Lorsque le PIB crot plus vite
que la rmunration totale du travail, la part du travail (galement appele part des
salaires) diminue par rapport la part du capital dans le revenu. En revanche, lorsque
la croissance de la rmunration totale du travail est suprieure la croissance du PIB,
la part du travail dans le revenu augmente et celle du capital diminue. Dans la prsente
partie du rapport, nous analysons les tendances de la part du travail dans le revenu et
les causes de ces tendances, contribuant ainsi aux publications rcemment de plus en
plus nombreuses sur ce sujet
19
.
Nous nous demandons ensuite comment lvolution de la part du travail dans le
revenu a affect des agrgats macroconomiques tels que la consommation, linvestis-
sement et les exportations nettes. Dans la conjoncture conomique mondiale actuelle,
il est capital de comprendre la relation de causalit entre la rmunration du travail et
la demande globale. Les effets macroconomiques de lvolution des parts du travail
ont jusquici reu une attention moins soutenue dans la littrature empirique, alors que
les salaires sont largement considrs comme ayant une incidence majeure sur lco-
nomie. Notre analyse empirique contribue la littrature existante en prsentant un
cadre causal statistique et en couvrant aussi bien les pays dvelopps que les pays en
dveloppement.
5 Baisse de la part du travail dans le revenu
5.1 Tendances des parts du travail
Le mythe de la stabilit a t balay
Durant une bonne partie du sicle dernier, il tait communment admis que la stabilit
de la part du travail dans le revenu tait un corollaire naturel ou un fait stylis de la
croissance conomique. mesure que les pays industrialiss sont devenus plus pros-
pres, les revenus totaux des travailleurs et des propritaires de capitaux ont augment
presque au mme rythme, et la division du revenu national entre le travail et le capital
est donc demeure constante sur de longues priodes, nènregistrant que de lgres
fuctuations
20
. Ctait apparemment comme si quelque loi non crite de la thorie co-
nomique faisait en sorte que le travail et le capital bnfcient galit du progrs mat-
riel, et la question de la distribution fonctionnelle du revenu a quasiment disparu des
proccupations des chercheurs universitaires. Mais, ces dernires annes, cette vieille
ide reue a t remise en question. Tout un ensemble dtudes ont fourni de nouvelles
preuves empiriques cohrentes indiquant que, durant les dernires dcennies, il y a eu
une tendance baissire de la part du travail dans une majorit de pays pour lesquels on
dispose de donnes.
LOCDE a observ, par exemple, que, sur la priode allant de 1990 2009, la part
de la rmunration du travail dans le revenu national avait baiss dans 26 des 30 pays
avancs pour lesquels des donnes taient disponibles, et a calcul que la part mdiane
du travail dans le revenu national dans lensemble de ces pays avait considrablement
diminu, passant de 66,1 pour cent 61,7 pour cent (OCDE, 2012b). Ces constatations
font cho aux lments prsents dans le Rapport mondial sur les salaires 2010/11
du BIT, qui dcrivait une baisse des parts des salaires dans une grande majorit des
pays de lÒCDE depuis 1980 (BIT, 2010a; voir aussi BIT, 2008a). Antrieurement,
des tendances similaires avaient t observes dans dautres rapports publis par des
organisations internationales (FMI, 2007; Commission europenne, 2007; Banque
des rglements internationaux (BRI), 2006; BIT, 2008a, 2010a; OCDE, 2011, 2012a).
Examinant la situation au-del des conomies avances, le Rapport sur le travail dans
Figure 31 Parts du travail ajustes dans le revenu au sein des conomies dveloppes,
enAllemagne, aux tats-Unis et au Japon, 1970-2010
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ADV Japon tats-Unis Allemagne
Note: ADV = moyenne non pondre de 16 pays de lOCDE revenu lev (Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne,
tats-Unis, Finlande, France, Irlande, Italie, Japon, Pays-Bas, Royaume-Uni et Sude. La Rpublique de Core est exclue).
Source: Stockhammer, paratre, partir de la base de donnes AMECO.
45
le monde 2011 du BIT a constat que la baisse de la part du travail dans le revenu tait
encore plus nette dans beaucoup de pays mergents et pays en dveloppement, avec
des baisses considrables en Asie et en Afrique du Nord et une plus grande stabilit
mais tout de mme une baisse des parts des salaires en Amrique latine (IIES, 2011).
Dàutres tudes soulignent aussi le caractre apparemment mondial de cette tendance,
en laissant entendre que la proportion du revenu consacre la rmunration du travail
est en baisse dans le monde entier (voir BIT, 2008a; Stockhammer, paratre; Husson,
2010; Artus, 2009).
lments empiriques sur la baisse des parts du travail
Les fgures 31 et 32 illustrent les tendances de ce quòn appelle les parts ajustes du
travail dans le revenu pour la priode allant de 1970 2007 ou 2010 concernant cer-
tains pays dvelopps pris individuellement ou regroups et trois groupes dconomies
en dveloppement et conomies mergentes
21
. la fgure 31, nous observons que la
moyenne simple des parts du travail dans 16 pays dvelopps pour lesquels des donnes
sont disponibles concernant cette longue priode a baiss, passant dènviron 75 pour cent
PARTIE II Baisse de la part du travail dans le revenu
Figure 32 Parts du travail ajustes dans le revenu dans les conomies en dveloppement
et les conomies mergentes, 1970-2007
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DVP3 DVP5 DVP16
Note: DVP3 = moyenne non pondre du Mexique, de la Rpublique de Core et de la Turquie; DVP5 = moyenne non pondre de la Chine, du
Kenya, du Mexique, de la Rpublique de Core et de la Turquie; DVP16 = moyenne non pondre de lAfrique du Sud, de lArgentine, du Brsil, du
Chili, de la Chine, du Costa Rica, du Kenya, du Mexique, de la Namibie, d0man, du Panama, du Prou, de la Rpublique de Core, de la Fdration
de Russie, de la Thalande et de la Turquie.
Sources: http://www.ilo.org/salaires2012; Stockhammer, paratre.
du revenu national au milieu des annes 1970 environ 65 pour cent dans les annes pr-
cdant immdiatement la crise conomique et fnancire mondiale. La fgure 32 montre
comment la moyenne des parts du travail a aussi baiss dans un groupe de 16 conomies
en dveloppement et conomies mergentes, passant dènviron 62 pour cent du PIB au
dbut des annes 1990 58 pour cent juste avant la crise. Mme en Chine, pays o les
salaires ont quasiment tripl durant la dernire dcennie (voir la partie I), le PIB a aug-
ment un rythme plus rapide que la masse salariale totale - et la part du travail dans
le revenu a donc baiss (fgure 33). Les donnes disponibles pour la Chine, le Kenya, le
Mexique, la Rpublique de Core et la Turquie (fgure 32) donnent penser que la baisse
dans ce groupe de pays a peut-tre dj commenc dans les annes 1980.
La crise conomique mondiale semble nàvoir que brivement invers la tendance
baissire. Dans les pays avancs, la part des salaires a initialement rebondi aprs le
dbut de la crise, mais a recommenc baisser partir de 2009. Cela refte le caractre
contracyclique de la part des salaires, d au fait que les salaires sont gnralement
moins volatiles que les bnfces durant les fchissements conomiques. LÒCDE, par
exemple, a fait observer ceci: En priode de rcession conomique, cette baisse [de
la part des salaires] a habituellement fait une pause, mais elle a ensuite repris avec le
redressement. La crise conomique et fnancire rcente et le redressement anmique
qui a suivi ne se sont pas carts de ce modle gnral (OCDE, 2012b).
Figure 33 Part du travail non ajuste dans le revenu en Chine, 1992-2008
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Note: la part des salaires non ajuste est calcule comme suit: rmunration totale du travail des salaris divise par la valeur ajoute. Le brusque
changement entre 2003 et 2004 correspond probablement un ajustement des donnes; nanmoins, il ne modie pas lorientation de la tendance.
Source: calculs du BIT sur la base des donnes provenant de lAnnuaire statistique de la Chine, http://www.stats.gov.cn/english/statisticaldata/
yearlydata [consult le 17 sept. 2012].
47 PARTIE II Baisse de la part du travail dans le revenu
Diffrents niveaux de comptences, diffrents effets
Ces tendances nont pas t uniformes pour tous les travailleurs, dont les niveaux
de formation et de comptences diffrent. Les tudes portant sur les pays avancs
qui ont dsagrg la rmunration totale du travail par catgories de travailleurs ont
constat que les tendances rcentes taient dictes par la baisse des parts des salaires
des travailleurs faiblement ou moyennement qualifs. LÌnstitut international d`tudes
sociales (IIES) a calcul, par exemple, que dans les dix pays avancs pour lesquels des
donnes taient disponibles la part des salaires avait baiss de 12 points de pourcen-
tage pour les travailleurs peu qualifs entre le dbut des annes 1980 et 2005, tandis
quèlle avait augment de 7 points de pourcentage pour les travailleurs trs qualifs.
De mme, le FMI a constat quèntre 1980 et 2005 la part des salaires des travailleurs
non qualifs avait baiss aux tats-Unis, au Japon et en Europe (respectivement de
15 pour cent, 15 pour cent et 10 pour cent), mais quèlle avait augment pour les travail-
leurs qualifs ayant suivi des tudes jusqu` la fn du cycle secondaire et au-del (res-
pectivement de 7 pour cent, 2 pour cent et 8 pour cent) (FMI, 2007). Plus rcemment,
lOCDE a constat que dans les 13 pays pour lesquels des donnes taient disponibles,
la part moyenne des salaires de ceux dont les niveaux de formation taient peu levs
avait baiss (OCDE, 2012b). Cela stait produit dans le contexte de la polarisation
des emplois observe, les nombres dèmplois peu qualifs et trs qualifs tant en
augmentation, tandis quìl y avait moins dèmplois semi-qualifs. Alors quòn pouvait
sàttendre ce quùne augmentation des emplois peu qualifs entrane en principe une
hausse des salaires des travailleurs peu qualifs, il apparat que ces travailleurs ont t
de plus en plus vincs par des travailleurs surqualifs dont les niveaux d`ducation
taient intermdiaires.
Exclusion des travailleurs les mieux rmunrs
Les parts du travail, telles quèlles sont mesures dans le Systme de comptabilit natio-
nale des Nations Unies, sous-estiment donc la baisse de la proportion de la rmunration
du travail qui va aux travailleurs dont la rmunration est infrieure au salaire mdian.
Si la rmunration du travail de ceux dont le revenu est le plus lev - 1 pour cent de
lènsemble des travailleurs - tait exclue du calcul, la baisse de la part du travail sem-
blerait encore plus grande (voir par ex. IIES, 2011; OCDE, 2012b). Cela refte la forte
augmentation, surtout dans les pays anglophones, des salaires et traitements (y compris
les primes et les options sur actions exerces) des cadres suprieurs, qui se retrouvent
prsent aux cts des propritaires de capitaux au sommet de la hirarchie des revenus
(voir Atkinson, Piketty et Saez, 2011; Piketty et Saez, 2003; OCDE, 2008; Wolff et
Zacharias, 2009)
22
. La proportion des salaires fgurant dans les segments suprieurs du
revenu des mnages a aussi augment, divers degrs, dans dautres pays, notamment
au Canada, en Espagne, en Italie, au Japon, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni - mais pas
en Sude, en Finlande ni en Australie (Atkinson, Piketty et Saez, 2011).
Lautre volet de la question: laugmentation de la part du capital
Le pendant de la baisse de la part du travail est laugmentation de la part du capital
dans le revenu (souvent appele la part des profts), qui est mesure la plupart du temps
par la part de lexcdent dexploitation brut des entreprises exprime en pourcentage
du PIB. Selon les constatations du BIT et de lÌIES, quand la part totale du capital est
dsagrge par type dentreprises, la croissance de la part du capital a t plus rapide
dans le secteur fnancier que dans celui des entreprises autres que fnancires. Par ail-
leurs, dans les conomies avances, les bnfces des entreprises autres que fnancires
ont t de plus en plus consacrs la rmunration des dividendes, qui reprsentaient
35 pour cent des bnfces en 2007 (IIES, 2011), ce qui a accru les pressions sur les
entreprises pour quelles rduisent la part de la valeur ajoute allant la rmunration
du travail.
Examinant un groupe de quatre conomies dveloppes (Allemagne, tats-Unis,
France et Royaume-Uni), Husson a constat que, sur la priode 1987-2008, une large
part de laugmentation de lexcdent des entreprises avait t utilise pour augmenter les
dividendes verss aux actionnaires (Husson, 2010). Il a calcul quèn France le total des
dividendes tait pass de 4 pour cent de la masse salariale totale au dbut des annes
1980 13 pour cent en 2008. Il est intressant de noter quàu Royaume-Uni la part des
dividendes verss et celle de la rmunration du travail ont toutes deux augment, de
sorte que la hausse des dividendes est alle de pair avec une baisse des bnfces non
distribus
23
. Aux tats-Unis, les trois quarts de làugmentation de lèxcdent dèxploi-
tation brut ont t consacrs au paiement des dividendes. tant donn que le revenu
du capital est plus concentr que le revenu du travail, la forte hausse des dividendes a
souvent contribu accentuer lìngalit de revenu globale des mnages (OCDE, 2011;
voir aussi Roine et Waldenstrm, 2012).
5.2 cart entre les salaires et la productivit
Les effets sur la part du travail
La contraction de la part du travail est presque toujours lie une autre rgularit
empirique, savoir le dcalage croissant entre les taux de croissance respectifs des
salaires moyens et de la productivit du travail (pour un expos dtaill de la rela-
tion entre les salaires, la productivit, les cots unitaires de main-duvre et les parts
du travail, voir làppendice II). Une publication du Bureau of Labour Statistics des
tats-Unis, par exemple, montre que lcart entre la croissance de la productivit du
travail horaire et celle de la rmunration horaire a entran une baisse de la part du
travail aux tats-Unis (Fleck, Glaser et Sprague, 2011). Depuis 1980, la productivit
du travail horaire relle dans le secteur des entreprises non agricoles avait augment
de 85 pour cent, tandis que la rmunration horaire relle avait augment de 35 pour
cent (fgure 34).
On peut donner comme autre exemple lÀllemagne, o la productivit du travail
(dfnie comme la valeur ajoute par personne employe) a fortement augment, de
presque un quart (22,6 pour cent), sur les deux dernires dcennies, tandis que les
salaires mensuels rels ont stagn sur la mme priode - de fait, entre 2003 et 2011,
ils sont descendus au-dessous du niveau quils avaient atteint au milieu des annes
1990 (voir la fgure 35a). La baisse des salaires mensuels est en partie imputable
la forte rduction de la dure du travail mensuelle, passe de 122,7 heures en 1991
110,7 heures en 2011
24
, le nombre de travailleurs temps partiel et dans des formes
dèmploi atypiques telles que les minijobs ayant fortement augment (voir lÒffce
fdral des statistiques, 2009, p. 8). Cela tant dit, le dcalage apparat galement entre
la productivit du travail horaire et les salaires horaires (voir la fgure 35b). En 2011,
les salaires horaires n`taient que lgrement (0,4 pour cent) suprieurs au niveau
quils avaient en 2000, tandis que la productivit du travail horaire avait augment de
12,8 pour cent sur la mme priode.
La productivit augmente plus vite que les rmunrations
dans les conomies dveloppes
Comme dans nombre de grandes conomies, y compris lÀllemagne, les tats-Unis
et le Japon, la croissance des salaires est reste la trane par rapport celle de la
productivit, nous estimons dans notre rapport que, dans les conomies dveloppes
prises dans leur ensemble, la productivit du travail moyenne a augment plus vite que
la croissance des salaires moyens rels. Sur la base des donnes relatives aux salaires
dans 36 pays, nous estimons que depuis 1999 làugmentation de la productivit du tra-
vail moyenne a t plus de deux fois suprieure celle des salaires moyens dans les
conomies dveloppes (fgure 36).
Figure 34 Productivit et rmunration horaires aux tats-Unis, T1 1947-T1 2012
l
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i
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Note: les zones ombrages reprsentent des rcessions.
Source: chiffres extraits de Fleck, Glaser and Sprague (2011) utilisant les donnes actualises au 26 juin 2012 publies par la Division of Major
Sector Productivity du Bureau des statistiques du travail.
a Tendances de la productivit du travail et des salaires en Allemagne (par mois)
b Tendances de la productivit du travail et des salaires en Allemagne (par heure)
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Rmunration mensuelle brute moyenne, ensemble des salaris (Indice, 2000 = 100)
Productivit du travail, par personne salarie (Indice, 2000 = 100)
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Rmunration horaire brute moyenne, ensemble des salaris (Indice, 2000 = 100)
Productivit du travail, par heure ouvre (Indice, 2000 = 100)
Figure 35 Tendances de la productivit du travail et des salaires en Allemagne,
1991-2011: a) par mois; b) par heure
Note: les salaires moyens mensuels et horaires nominaux publis par lOfce fdral des statistiques ont t dats en utilisant lIPC provenant
de la mme source.
Source: Ofce fdral des statistiques, Comptabilit nationale: produit intrieur, rsultats trimestriels, Fachserie 18, srie 1.2 (mai 2012),
tableau1.12; Ofce fdral des statistiques, 2012.
51
5.3 Rle des marchs nanciers et dautres facteurs
La recherche dexplications
La plupart des tudes qui ont recueilli des donnes sur la baisse de la part du travail dans
le revenu depuis les annes 1980 ont aussi essay dèn comprendre les causes (voir par
exemple FMI, 2007; Commission europenne, 2007; OCDE, 2012a; BIT, 2008a, 2010a;
IIES, 2012).
Lanalyse entreprise dans le prcdent Rapport mondial sur les salaires a exa-
min la possibilit que les tendances de la part du travail soient dtermines par un
glissement de la composition de lemploi au dtriment des secteurs forte intensit
de main-dòuvre et en faveur des secteurs forte intensit de capital, o les parts du
travail sont plus faibles. Lanalyse montrait que le glissement de la composition secto-
rielle tait effectivement un facteur contributif, mais que lessentiel de la baisse de la
part du travail rsultait dune baisse des parts dans les industries mmes (BIT, 2010a).
Une rcente tude de lÒCDE a confrm cette conclusion, soulignant que les baisses
de la part du travail lìntrieur des branches de production expliquent une trs large
proportion de sa diminution globale entre 1990 et 2007 (OCDE, 2012b). De fortes
baisses ont t observes dans lìntermdiation fnancire, ainsi que dans la fabrication
haute et moyenne technologie, tandis que la baisse a t moins marque dans dautres
secteurs des services, la construction et la fabrication faible technologie.
Figure 36 Tendances de la croissance des salaires moyens et de la productivit du travail
dans les conomies dveloppes (indice: 1999 = 100)
100
102
104
106
108
110
112
114
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Indice de la productivit du travail Indice des salaires rels
cart entre rmunration
et productivit du travail
Note: comme les indices dsignent une moyenne pondre, les volutions dans les trois plus grandes conomies (tats-Unis, Japon et Allemagne)
ont une incidence particulire sur ce rsultat. La productivit du travail est mesure par la production par travailleur (voir la note 9).
Nouveaux lments empiriques: rexamen des suspects habituels
Le prsent rapport va plus loin et prsente un nouvel ensemble dlments empiriques.
La fgure 37 illustre les suspects habituels: l`volution technologique, la mondialisa-
tion, les marchs fnanciers, les institutions du march du travail et la baisse du pouvoir
de ngociation des travailleurs. Dans notre illustration, les cercles concernant lvo-
lution technologique, la mondialisation et les marchs fnanciers se chevauchent, ce
qui montre les diffcults rencontres pour distinguer ces phnomnes aux niveaux
conceptuel et empirique. La structure du diagramme indique aussi que le pouvoir de
ngociation des travailleurs dcoule directement des institutions du march du travail
(en particulier lèxistence et la force des syndicats) mais quìl est aussi infuenc par
la mondialisation et les marchs fnanciers, qui donnent aux entreprises plus de pos-
sibilits dìnvestir dans des actifs fnanciers et immobiliers, tant dans leur pays qu`
l`tranger (Rodrik, 1997; Onaran, 2011). En fait, si un grand nombre dèxplications
Figure 37 Facteurs inuant sur la part du travail dans le revenu
Distribution
fonctionnelle
du revenu
Institutions du
march du travail
et poids de ltat
Financiarisation
volution
technologique
Mondialisation
P
o
u
v
o
i
r

d
e

n
g
o
c
i
a
t
i
o
n
d
e
s

t
r
a
v
a
i
l
l
e
u
r
s
Source: Stockhammer, paratre.
53
taient axes sur le rle de la mondialisation et en particulier de la technologie, beau-
coup d`tudes ont nglig les effets potentiels des marchs fnanciers ainsi que l`tablis-
sement des institutions du travail et des institutions sociales.
Lvolution technologique est souvent prsente comme le principal coupable, en
laissant entendre quelle a augment le facteur capital au lieu daugmenter le facteur
travail, en provoquant une plus forte demande de capitaux et de main-dòuvre trs
qualife complmentaire et une diminution de la demande de travailleurs peu qua-
lifs (voir FMI, 2007; Commission europenne, 2007; OCDE, 2012b; IIES, 2012)
25
.
L`hypothse la plus courante est que la diffusion des technologies de lìnformation et de
la communication (TIC) a permis dautomatiser la production, stimulant la productivit
et vinant les travailleurs peu qualifs. L`tude de lÒCDE la plus rcente a estim
quèn moyenne 80 pour cent du changement de la part du travail intrasectorielle dans
les conomies avances sur la priode 1990-2007 tait mettre au compte de lvolu-
tion technique et laccumulation de capital (OCDE, 2012b).
Les tudes constatent aussi habituellement des effets ngatifs, quoique moins mar-
qus, de la mondialisation sur la part du travail. Une explication possible cela est que
lìntensifcation de la concurrence et lèntre dans l`conomie mondiale de pays o la
main-duvre est abondante peuvent avoir constitu un facteur de modration salariale
(BIT, 2008a). Des lments empiriques plus rcents recueillis au niveau des entreprises
produits dans une publication conjointe du BIT et de lÒMC (Bacchetta et Jansen, 2011)
montrent que lìntensifcation de la concurrence due la libralisation des changes a
souvent incit les entreprises tant dans les pays dvelopps que dans les pays en dve-
loppement devenir plus productives par un processus de rationalisation sectorielle
conduisant liminer les entreprises les moins productives et licencier des travail-
leurs dans les entreprises restantes. Il est galement possible que la redistribution en
faveur du capital au dtriment du travail se soit produite en raison des dlocalisations
ltranger ou de ce quon appelle les effets de menace qui peuvent intervenir mme
sans changements rels dans les sites de production (Epstein et Burke, 2001; voir aussi
Messenger et Ghosheh, 2010, sur les dlocalisations et lèxternalisation dans les sec-
teurs des services).
Une attention nouvelle accorde la nanciarisation
La mondialisation des marchs fnanciers et la fnanciarisation - dfnie comme
le rle accru des motivations fnancires, des acteurs fnanciers et des tablissements
fnanciers dans le fonctionnement des conomies nationales et internationales (Epstein,
2005) - nònt t mises en cause que plus rcemment. Un rapport de lÌIES a constat
que lìntgration internationale des marchs fnanciers avait t un lment moteur
essentiel de la baisse des parts du travail, au moins dans les conomies avances (IIES,
2011). Le passage dans les annes 1980 aux systmes de gouvernance dèntreprise
fonds sur la maximisation de la valeur actionnariale et lascension dtablissements
la politique offensive axe sur le rendement, notamment les fonds de placement
privs, les fonds spculatifs et les investisseurs institutionnels, pousse les entreprises
accrotre les bnfces, surtout court terme (Rossman, 2009; Lazonick et O`Sullivan,
2000; Stockhammer, 2004; voir aussi IIES, 2008; Hein et Schoder, 2011; Argitis et
Pitelis, 2001). En outre, comme on là soulign plus haut, la mondialisation fnancire a
probablement affaibli la position de ngociation des travailleurs (Rodrik, 1997; Onaran,
2011). Certains groupes de travailleurs, en particulier les cadres suprieurs dirigeants,
peuvent avoir bnfci de ce processus de fnanciarisation en recevant un salaire
diffr sous forme de fonds de pension et dàutres types de gains en capital. Mais,
pour le travailleur moyen, les lments dinformation indiquent que ces gains sont peu
rpandus et beaucoup moins importants.
Institutions du march du travail: baisse du pouvoir collectif?
Les institutions du march du travail et làmpleur du systme de protection sociale font
aussi partie des variables qui ont fait lobjet de dbats dans la littrature existante. Ces
indicateurs institutionnels comprennent des facteurs comme le taux de syndicalisation,
la lgislation relative aux salaires minima, les indemnits de chmage et la couverture
du chmage, les indemnits de licenciement, ou la consommation publique. La baisse
du taux de syndicalisation - le nombre de syndiqus en pourcentage du total des sala-
ris ou en pourcentage de lèmploi total - dans beaucoup d`conomies dveloppes a
souvent t relie laffaiblissement du pouvoir de ngociation des travailleurs, ce qui
a des effets ngatifs sur leur capacit de ngocier une plus grosse part du gteau pour
la rmunration du travail. Le niveau du salaire minimum et des autres institutions
intermdiaires, y compris la lgislation en matire de protection de lèmploi, la gn-
rosit des indemnits de chmage et des autres prestations et contributions (la charge
fscale) font partie des variables institutionnelles qui ont t largement incluses dans
les tudes empiriques (FMI, 2007; Commission europenne, 2007; OCDE, 2012b). Le
niveau des indemnits de chmage peut avoir une incidence sur la part du travail en
infuant sur le salaire dàcceptation, savoir le niveau de rmunration que les tra-
vailleurs accepteraient comme minimum.
Approfondissement de lanalyse
Les estimations fgurant dans le prsent rapport fournissent de nouveaux lments dìn-
formation pour complter et actualiser les tudes existantes. Notre analyse couvre un
plus large ventail de pays et une plus longue priode, en puisant dans la Base de donnes
mondiale du BIT sur les salaires qui a t rcemment actualise et dans dautres sources
de donnes complmentaires
26
. Elle inclut des donnes annuelles provenant de 71 pays
(31 conomies revenu lev et 40 conomies en dveloppement, y compris les cono-
mies mergentes) pour la priode 1970-2007. Bien que des donnes aient t disponibles
pour les annes 2007-2009, la priode de crise a t exclue pour viter leffet des ruptures
structurelles sur la tendance historique profonde et parce que nous nous intressons prin-
cipalement aux tendances long terme jusqu la crise. Les estimations reposent sur un
modle qui prend en compte les facteurs rpertoris la fgure 37. Làppendice III expose
point par point la mthode utilise pour les estimations et rcapitule les principaux rsul-
tats produits par la rgression. Les pays inclus sont aussi indiqus dans lappendice.
La fgure 38 montre les rsultats que nous avons obtenus en dcomposant les effets
des diffrents facteurs qui font partie du modle pour expliquer l`volution temporelle
des parts du travail dans le revenu. Cette dcomposition a t calcule en pondrant
les changements mesurables entre deux priodes choisies (1990-1994 et 2000-2004)
a Tendances de la productivit du travail et des salaires en Allemagne (par mois)
b Tendances de la productivit du travail et des salaires en Allemagne (par heure)
0
1,0
1,5
2,0
2,5
3,0
3,5
GLOB FIN TECH WFST
0,5
1,0
1,5
0,5
1,0
0
GLOB FIN
TECH
WFST
0,5
Figure 38 Dcomposition de lvolution de la part du travail ajuste moyenne
dans le revenu entre 1990-1994 et 2000-2004
Note: la dcomposition expose la gure38 est fonde sur les estimations gurant dans le tableauA4. FIN signie nanciarisation; GLOB
signie mondialisation; TECH signie technologie; WFST signie systme de protection sociale et institutions du march du travail. Voir
lappendice III pour une explication dtaille des tapes qui permettent darriver la dcomposition.
Source: estimations du BIT (Stockhammer, paratre).
pour chacun des facteurs lorsque les poids sont les coeffcients estims dans le modle
slectionn (indiqus dans le tableau A4 de làppendice III). Les dcompositions sont
estimes sparment pour les conomies dveloppes et pour les conomies en dve-
loppement. La fgure 38 a montre que, dans le cas des conomies avances, tous les
facteurs ont contribu la baisse de la part du travail dans le temps, la fnanciarisation
mondiale tant le facteur qui a jou le plus grand rle. Ces estimations signifent que,
en termes de contribution relative, la fnanciarisation mondiale contribue pour 46 pour
cent de la baisse des parts du travail dans le revenu, contre des contributions de 19 pour
cent pour la mondialisation, 10 pour cent pour la technologie et 25 pour cent pour les
changements qui affectent deux grandes variables institutionnelles: la consommation
publique et le taux de syndicalisation. Ces rsultats permettent de penser que limpact
de la fnance a peut-tre t sous-estim dans un grand nombre d`tudes prcdentes et
suggrent que le fait de ngliger le rle des marchs fnanciers peut avoir de srieuses
consquences pour notre comprhension des causes des tendances des parts du travail.
La contribution ngative des facteurs institutionnels la part du travail dans le
revenu peut sexpliquer par la diminution, en moyenne, de la consommation publique
en part du PIB et du taux de syndicalisation dans les conomies avances. Autrement
dit, bien que les coeffcients positifs et signifcatifs de ces variables (voir le tableau A4)
impliquent que les hausses de la consommation publique et du taux de syndicalisation
ont une incidence positive sur les parts du travail dans le revenu, la baisse effective de
la consommation publique comme du taux de syndicalisation a contribu une baisse
de la part du travail. Dàutre part, la fnanciarisation, la mondialisation et le progrs
technologique ont tous pris de lampleur dans le temps, contribuant ainsi ngativement
lvolution des parts du travail dans le revenu entre les deux priodes.
Dans le cas des conomies en dveloppement, la fgure 38 b illustre notre consta-
tation de lexistence dun impact positif de la technologie sur la part du travail, qui
pourrait ventuellement sexpliquer par un effet de rattrapage de la croissance cono-
mique, avec un resserrement des marchs du travail et llimination de loffre de main-
duvre excdentaire. Cet effet de la technologie compense partiellement les effets
dfavorables de la fnanciarisation, de la mondialisation et de la contraction du systme
de protection sociale. Nanmoins, comme pour la dcomposition concernant les co-
nomies avances, la fnanciarisation constitue le facteur le plus dfavorable expliquant
la baisse des parts du travail dans le revenu dans les conomies en dveloppement qui
sont incluses dans notre chantillon.
Outre ces variables, les hausses du chmage ont aussi des effets trs ngatifs sur
la part du travail, ce qui ne devrait pas surprendre compte tenu des pressions la baisse
sur les salaires et de laffaiblissement de la position de ngociation des travailleurs
lorsque les taux de chmage augmentent (voir lappendice III).
57 PARTIE II Effets de la part du travail sur la croissance conomique
6 Effets de la part du travail sur la croissance conomique
6.1 Baisse de la part du travail et demande globale: effets ambigus
Equit et conomie: que se passe-t-il quand la part du travail baisse?
Comme les parts des facteurs (la part du capital et la part du travail) relient le revenu
lactivit productive, elles sont souvent considres comme un indicateur de lquit
de la distribution du revenu. Par ailleurs, comme là soulign Atkinson, les parts des
facteurs constituent une question capitale dans la ngociation collective, cest--dire
que lon peut considrer quune division quitable du revenu est une division selon
laquelle laccroissement de la productivit du travail se traduit par une hausse de la
rmunration du travail (Atkinson, 2009). Certains commentateurs estiment aussi que
la diminution des parts du travail peut avoir des consquences politiques
27
.
Analyse des effets sur la demande globale
Il sagit certes de considrations importantes, mais cette section de notre rapport est
axe sur les consquences conomiques de la baisse des parts du travail. En particu-
lier, nous soulignons le fait que lvolution de la part du travail a des effets diffrents
sur les divers lments cls de la demande agrge (ou globale) de marchandises et de
services produits dans une conomie. La demande agrge est la somme de la consom-
mation des mnages, de linvestissement du secteur priv, des exportations nettes et de
la consommation publique. Le mcanisme conomique illustr la fgure 39 indique
quùne modifcation du rapport entre les deux lments constitutifs de la distribution
fonctionnelle du revenu (la part du travail et celle du capital) a une incidence sur les
principaux lments de la demande globale et, au bout du compte, ces changements ont
une incidence sur la croissance du revenu national dans un processus dynamique.
Mais comment exactement une baisse de la part du travail infue-t-elle sur la
demande globale? Cette question a reu relativement moins dàttention et nàppelle pas
Figure 39 Effets macroconomiques des parts du revenu fonctionnel
Demande globale Part du revenu fonctionnel
Croissance
du revenu
Investissement
Exportations
nettes
Consommation
Part du travail
dans le revenu
Part du capital
dans le revenu
1%
Source: BIT.
une rponse simple. Nous avons entrepris dtudier empiriquement le lien entre lvolu-
tion observe des parts du travail dans le revenu au cours des quatre dcennies coules
(des annes 1960 aux annes 2000) et chacun des principaux lments constitutifs de la
demande globale, savoir la consommation, linvestissement et les exportations nettes
28
.
Nous avons limit notre analyse 15 pays qui sont membres du G20 et pour lesquels des
donnes suffsantes sont disponibles, et nous avons aussi considr les 12 pays membres
de la zone euro comme un seul groupe. La mthodologie pour estimer leffet des parts
des salaires sur la demande globale et les rsultats dtaills sont prsents dans lappen-
dice IV, et la principale orientation des rsultats est prsente dans le tableau 2
29
.
Consommation en baisse, exportations en hausse, investissement incertain
Le tableau 2 illustre la constatation selon laquelle une baisse de 1 pour cent de la part
du travail est toujours alle de pair avec une baisse de la part de la consommation des
mnages par rapport au PIB dans tous les 15 pays, ainsi que dans la zone euro prise
dans son ensemble. Inversement, une baisse de 1 pour cent de la part du travail allait de
pair avec une augmentation de la part des exportations nettes dans tous les pays, en par-
ticulier en Chine (comme lìndiquent les deux fches orientes vers le haut) qui a mis
en ouvre une stratgie trs nette de croissance tire par les exportations. Le lien entre
les parts du travail et linvestissement est moins clair. Une baisse de 1 pour cent de la
part du travail allait de pair avec une hausse des taux dinvestissement dans le PIB dans
neuf pays ainsi que dans le groupe de la zone euro, mais navait pas deffet perceptible
sur linvestissement dans cinq conomies mergentes et aux tats-Unis.
Tableau 2 Orientation des effets dune baisse de 1pour cent de la part du travail
dans le revenu sur la consommation de marchandises et de services des mnages,
linvestissement et les exportations nettes dans 16 conomies
Consommation des mnages Investissement Exportations nettes
Zone euro 12

Afrique du Sud

Allemagne

Argentine

Australie

Canada

Chine

Core, Rpublique de

tats-Unis

France

Inde

Italie

Japon

Mexique

Royaume-Uni

Turquie

Source: Onaran et Galanis, paratre.
59
Leffet positif de la baisse de la part du travail sur les exportations nest peut-
tre pas surprenant, tant donn la relation troite entre le concept de part du travail
et celui de cots unitaires de main-duvre (les cots de main-duvre par unit de
production; pour plus de dtails sur cette relation, voir làppendice II). Une baisse des
cots unitaires de main-duvre est souvent considre comme une amlioration de la
comptitivit extrieure par les cots, en particulier dans la zone euro, o les diffrents
tats membres ne peuvent pas dvaluer leur monnaie ou ajuster les taux dìntrt, et o
labaissement des cots unitaires de main-duvre est souvent prconis comme moyen
de restaurer la croissance conomique et de favoriser lemploi. Tel tait, par exemple, le
principe justifant la dcision prise en Grce de rduire le salaire minimum de 22 pour
cent, avec une rduction supplmentaire de 10 pour cent pour les jeunes travailleurs,
paralllement une rduction des cots autres que salariaux (cotisations de scurit
sociale) de 5 points de pourcentage (voir la partie I du prsent rapport). Des mesures
similaires, encore que moins radicales, faisaient aussi partie des programmes du FMI
au Portugal, en Serbie et en Lettonie
30
.
Consommation des mnages et part du travail/capital
Cependant, si lon se proccupait uniquement dabaisser les cots unitaires de main-
duvre, on omettrait de tenir compte de lincidence gnralement ngative de labais-
sement des salaires sur la consommation des mnages, et donc de leffet incertain sur
la demande globale. Leffet positif sur la consommation de la redistribution du revenu
en faveur de la part du travail au dtriment de celle du capital se produit trs probable-
ment parce que la propension consommer sur la rmunration du travail est plus forte
que la propension consommer sur le revenu du capital, celui-ci tant principalement
redistribu par la voie de dividendes verss des individus aiss qui pargnent une
proportion plus leve de leur revenu total. Nanmoins, il importe de raliser quune
part substantielle des profts revient aux entreprises, qui nèn transmettent quùne partie
sous forme de dividendes, et dont les bnfces non distribus contribuent gnrer
les revenus futurs du travail. Par ailleurs, une fraction non ngligeable des dividendes
revient aux fonds de pension, qui pourront reverser plus tard les pensions qui seront
dpenses pour consommer. De plus, l`tat prlve des impts sur le revenu du capital
et verse des allocations qui peuvent tre un dterminant important de la consommation.
Nanmoins, malgr ces facteurs de complexit, nous constatons que la rmunration du
travail et la consommation des mnages demeurent positivement corrles.
Investissement: ressources pour lconomie relle
La relation entre la part du travail et linvestissement est moins claire. En principe, on
pourrait sattendre ce que laugmentation des revenus du capital se traduise par une
hausse de linvestissement productif, et cela semble effectivement avoir t le cas dans
une majorit de pays. Mais certains craignent aussi que la fnanciarisation nàit dtourn
des moyens fnanciers internes des entreprises qui auraient pu servir des investisse-
ments rels, par des augmentations des dividendes verss afn de faire monter le cours
des actions et donc la valeur actionnariale, ou par des placements fnanciers risqus
visant gnrer des bnfces maximaux court terme. Ces deux types dàctivits ont pu
PARTIE II Effets de la part du travail sur la croissance conomique
avoir des effets ngatifs sur linvestissement en capital dans lconomie relle
31
. Dans
les conomies mergentes, une explication possible de labsence de corrlation entre les
bnfces des entreprises et lìnvestissement global tient peut-tre au fait que les politiques
industrielles publiques et linvestissement public sont souvent les principaux moteurs
du dveloppement des infrastructures et de lìndustrie (Akyz, Chang et Kozul-Wright,
1998). Cette hypothse appelle nanmoins des travaux de recherche supplmentaires.
Part du travail et demande globale: un quilibre dlicat
Globalement, nos constatations mettent en vidence les effets ambigus que lvolution
de la part du travail dans le revenu peut avoir sur la croissance de la demande globale
et du revenu. Dans certains pays et dans certaines circonstances, une faible croissance
des salaires par rapport celle de la productivit pourrait se traduire par des augmenta-
tions des exportations nettes, de linvestissement en capital intrieur et de la croissance
du revenu
32
. Dans dautres pays et dans dautres circonstances, une faible croissance
des salaires et une baisse de la part du travail pourraient dprimer la consommation
intrieure tel point que les ventuels gains en termes dexportations nettes et/ou din-
vestissement ne pourraient pas compenser une baisse gnrale de la croissance de la
demande globale et du revenu. Le fait que ces deux rsultats soient possibles indique
que lvolution de la distribution fonctionnelle du revenu national entre le travail et
le capital a effectivement une incidence imprvisible sur la performance conomique
gnrale dun pays. Cette observation montre quil est impratif que les responsables
politiques surveillent en permanence lvolution des salaires par rapport la producti-
vit et tudient les effets sur le revenu national. Mais il serait malavis de prsumer que
la modration salariale est toujours bnfque pour làctivit conomique.
6.2 la recherche de la part du travail optimale
Stratgies nationales et mondiales
Cette incertitude au sujet des effets des parts du revenu fonctionnel sur la croissance
conomique soulve la question de savoir ce quèst lèffet net dùn changement dans
la part du travail dun pays. Cet effet net varie assurment dun pays lautre et est
aussi susceptible de varier dans le temps, en fonction des circonstances intrieures et
extrieures. Dans certains pays et certaines priodes, une redistribution du revenu en
faveur du travail au dtriment du capital stimulera le revenu national, tandis que dans
dautres pays et dautres moments elle aura leffet oppos. Leffet net dun changement
de la part du travail dans le revenu dans nimporte quel pays dpendra ncessairement
de lenvironnement international et des stratgies qui sont mises en uvre dans tous les
autres pays ce moment-l.
Croissance tire par les exportations
Ces dernires annes, beaucoup de pays ont mis en ouvre des stratgies de croissance
tire par les exportations sur la base de cots unitaires de main-duvre bas. Des types
trs nets de croissance tire par les exportations ont t observs en Chine et en
61
Allemagne, mais aussi dans une plus ou moins grande mesure en Argentine, au Canada,
en Rpublique de Core, au Japon, en Indonsie et en Russie. Sur les annes 2000 -2008,
tous ces pays ont maintenu des excdents de la balance commerciale. En Chine, limpor-
tant excdent des exportations garantissait lui seul un taux de croissance conomique
moyen de plus de 2,5 pour cent par an, et contribuait pour environ un quart de la crois-
sance conomique gnrale (ce qui reftait les taux dèxpansion extraordinaires de la
consommation des mnages et, en particulier, de lìnvestissement). Dans le cas de lÀlle-
magne, o les taux de croissance annuels taient bien plus bas, la consommation des
particuliers a peine augment, et la contribution de lexcdent des exportations se situait
entre un tiers et la moiti de lexpansion conomique. La croissance des exportations de
la Chine reposait sur un taux de change particulirement comptitif. En Allemagne -
membre de la zone euro ne pouvant pas dvaluer sa monnaie unilatralement -, les exc-
dents des exportations taient aliments par une faible infation et une baisse des cots
unitaires de main-dòuvre rels par rapport aux autres pays de la zone euro (fgure 40).
Croissance fonde sur lendettement
Comme lèxcdent dùn pays correspond le dfcit dùn autre pays, les pays ne peuvent
pas tous suivre la voie de la Chine et de lÀllemagne. La croissance tire par les exporta-
tions exige dimportants excdents des comptes courants dans certains pays et donc des
dfcits dans dàutres. Dans certains des principaux moteurs de la demande dans le
monde, les phases dèxpansion de la consommation depuis le dbut du sicle reposaient
Figure 40 Cots unitaires de main-duvre dans certains pays de la zone euro,
2000-2010 (indice: 2000 = 100)
80
85
90
95
100
105
110
I
n
d
e
x
Allemagne
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010
Espagne Portugal Grce
Source: calculs sur la base dEurostat. Le cot unitaire de main-duvre rel est dni comme la rmunration par employ en prix courants
divise par le PIB en prix courants par personne salarie.
sur une envole de la dette des mnages plus que sur une hausse des salaires. Aux tats-
Unis en particulier, une forte croissance de la consommation dans un contexte de sta-
gnation du salaire mdian a t rendue possible uniquement parce que la consommation
tait fonde sur la richesse et fnance par la dette. Les envoles des cours des actions
et des prix de limmobilier ont accru la richesse (thorique) et donc le nantissement du
crdit la consommation et la consommation fnance par des prts hypothcaires
33
.
En outre, du fait de l`volution des normes fnancires, de làpparition de nouveaux ins-
truments fnanciers (endettement par carte de crdit, prts sur la valeur hypothcaire
nette des logements) et de la dgradation des normes en matire de capacit de rem-
boursement, provoque par la titrisation de lendettement hypothcaire, des montants de
crdit toujours plus importants ont t mis la disposition des mnages faible revenu
et faible richesse, en particulier. La dette des mnages est donc devenue un facteur qui a
remplac les hausses des salaires comme source de la demande et de la consommation.
Cette croissance fonde sur lendettement a soutenu la croissance conomique
mondiale dans les annes qui ont prcd la crise. Si la baisse des parts du travail des
99 pour cent aux tats-Unis (par rapport au 1 pour cent les mieux pays) navait pas
t compense par la consommation fonde sur lendettement, il est probable que la
croissance conomique mondiale aurait ralenti ou se serait arrte bien plus tt. Des
phases dexpansion de la consommation fondes sur lendettement peuvent tre obser-
ves non seulement aux tats-Unis, mais aussi dans une plus ou moins grande mesure
au Royaume-Uni, en Australie et dans ce quòn appelle les conomies en cours de sau-
vetage de la zone euro (Espagne, Grce, Irlande et Portugal). La fgure 41 montre que
les dfcits des comptes courants vont de pair avec un accroissement de lèndettement
des mnages pour certaines conomies avances qui ont pour point commun un accs
facile aux marchs de crdit, ce qui indique comment la fnanciarisation a contribu
aux dsquilibres externes en acheminant des ressources pour alimenter lendettement
des mnages et la demande de consommation.
Croissance tire par la demande
Dàutres pays suivent des modles plus quilibrs de croissance tire par la demande,
fonds non pas sur lendettement des mnages, mais sur une croissance des salaires ali-
gne sur celle de la productivit. En France (comme aux tats-Unis et au Royaume-Uni),
la croissance tait tire par la demande intrieure. Les ratios richesse nette-revenu et les
prix des immeubles usage d`habitation ont aussi augment. Or en France, contraire-
ment au cas des tats-Unis et du Royaume-Uni, la demande tait base sur des salaires
qui ont augment un taux similaire celui de la productivit, plutt que sur lendette-
ment. Le ratio de lèndettement brut des mnages par rapport au revenu nà que lgre-
ment augment et l`quilibre fnancier du secteur des mnages est demeur positif, de
mme que l`quilibre fnancier du secteur priv dans son ensemble. Parmi les cono-
mies mergentes, le Brsil sort peut-tre du lot, avec des augmentations tant de la part
du travail que de la contribution de la demande intrieure la croissance du PIB rel.
Or, mme au Brsil, il y a des signes de consommation fonde sur lendettement,
en plus de la consommation fonde sur les salaires (Bruno, 2011). En effet, au Brsil,
le salari moyen a une trs forte propension consommer: des tudes ont constat que
la plupart des salaris dpensaient 100 pour cent de leur salaire, lpargne prive ne
63
provenant que des profts engrangs par les percentiles suprieurs de la distribution du
revenu des mnages. Paralllement, en raison de lìncidence de la fnanciarisation, le
Brsil a connu une expansion des prts et a rduit la propension moyenne pargner
du mnage moyen. Cette tendance a t particulirement alimente par la baisse du
niveau des taux dintrt maintenu par les autorits pour encourager linvestissement.
Un tel environnement est certes bnfque pour ceux qui encouragent lìnvestissement
en capital, mais il conduit aussi une accumulation de lendettement qui alimente la
croissance conomique par la consommation.
6.3 La Grande Rcession et loccasion de mettre en place
une croissance plus quilibre
Les diffrents modles de croissance exposs ci-dessus peuvent fonctionner pour cer-
tains pays durant un certain temps, mais lexprience rcente a montr que la consom-
mation fonde sur lendettement ntait pas viable, que ce soit au niveau national ou
au niveau mondial. La croissance fonde sur lendettement va de pair avec une hausse
Figure 41 volution de la balance des paiements courants et de lendettement
des mnages (certains pays), 2003-2010
20
10
0
10
20
30
40
50
60
70
15 10 5 0 5 10 15
Niveau moyen annuel de la balance des comptes courants (% du PIB)
A
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B
)
Endettement Prdiction linaire
Suisse
Fd. de Russie
Pays-Bas
Allemagne
Japon
Autriche
Rp. de Core
Grce
Portugal
Espagne
tats-Unis
Irlande
Royaume-Uni
Italie
Australie
Chine
Notes: les balances des paiements courants donnes sont des moyennes pour la priode 2003-2010. Les augmentations de lendettement des
mnages donnes sont des moyennes entre 2000 et 2008. LIrlande commence en 2001; la Suisse commence en 1999 et nit en 2007.
La ligne du diagramme de dispersion est fonde sur 16 observations seulement, ce qui peut tre insufsant pour produire une estimation statis-
tiquement able.
Source: cr daprs Lavoie et Stockhammer, 2012, tableau13.
des niveaux dendettement des mnages ainsi quavec des rmunrations et une prise
de risque excessives dans le secteur fnancier. La crise et le douloureux processus de
dsendettement qui a suivi ont rvl les limites de ce modle de croissance, qui non
seulement reposait sur des dsquilibres internes, mais contribuait aussi aux dsqui-
libres mondiaux, car les excdents de la balance des paiements courants levs (ou en
hausse) dans certains pays supposaient lèxistence de dfcits dans dàutres.
Gestion de la concurrence dans une conomie mondiale ferme
Quelle est la voie suivre? Dans bien des cas, les conseils donns aux pouvoirs publics
des conomies qui avaient des dfcits de la balance des paiements courants et un endet-
tement des mnages levs avant la crise taient de conjuguer des mesures daustrit et
la modration salariale (ou des rductions des salaires) pour accrotre les exportations
nettes. Ces conseils partent du principe quun ajustement unilatral la baisse des cots
de main-dòuvre peut restaurer la comptitivit des diffrents pays. Le succs de ces
mesures est incertain, car la comptitivit dpend non seulement des cots du travail,
mais aussi dune srie dautres facteurs, y compris la capacit des pays de produire une
large gamme de produits divers et complexes (Felipe et Kumar, 2011). Il y a aussi un
problme dàction collective: sìl est vrai que chaque pays pris individuellement peut
en principe augmenter la demande globale pour marchandises et services quil pro-
duit en exportant davantage, les pays ne peuvent pas tous agir ainsi en mme temps.
L`conomie mondiale prise dans son ensemble est une conomie ferme. Si un grand
nombre de pays mettent en uvre simultanment des politiques de rductions salariales
ou de modration salariale pour rtablir leur comptitivit, les gains de comptitivit
sannuleront et leffet rgressif des rductions salariales globales sur la consommation
pourrait entraner une dpression mondiale de la demande globale. Des mesures pour
stimuler la demande intrieure dans les pays avec des excdents sont necessaires.
De plus, si lon prconise de rduire les cots unitaires de main-duvre, cest
apparemment parce quòn sàccorde penser que les conomies qui affchent des exc-
dents sont celles qui ont suivi des stratgies effcaces de croissance tire par les expor-
tations, tandis que les conomies dont la croissance tait fonde sur lendettement ont
perdu leur comptitivit sur leurs marchs dexportation et se sont donc appuyes sur
la consommation alimente par lendettement. Il est effectivement vrai que des pays
comme la Grce et lÈspagne ont enregistr une hausse des dfcits de la balance des
paiements courants. Mais ce qui est frappant, cèst que cela sèst produit en dpit de
hausses de la valeur relle de leurs exportations. Ce qui a provoqu la dgradation de
la balance courante de ces pays, cest la croissance importante des importations entre
2003 et 2008 et lìmpact de ce quòn appelle le facteur revenu de la balance des paie-
ments courants, cest--dire le service des prts accords par les investisseurs trangers
et des crdits qui leur ont t consentis. Des rductions supplmentaires des cots uni-
taires de main-dòuvre ne sont pas susceptibles de rsorber cette partie du dfcit de la
balance courante.
PARTIE III
Consquences pour
unecroissance quitable
7 Dsquilibres internes et externes
Le Rapport mondial sur les salaires est une contribution aux publications plus gn-
rales sur lvolution de la distribution et des niveaux des salaires lintrieur des pays
et dun pays lautre, ainsi que sur les consquences conomiques et sociales de ces
tendances. Certains faits styliss mergent de cette littrature. Lune des constatations
cls est la tendance baissire de la part du travail et làugmentation de lìngalit de la
distribution personnelle du revenu.
7.1 La distribution fonctionnelle et personnelle du revenu
Une part rduite pour les travailleurs
Au plan de la distribution fonctionnelle du revenu, qui concerne la manire dont le
revenu national a t distribu entre le travail et le capital, le prsent rapport a montr
quil existait une tendance sur le long terme la baisse de la part des salaires et la
hausse de la part des profts dans beaucoup de pays. Cela confrme les constatations
du Rapport mondial sur les salaires 2010/11 (BIT, 2010a), qui a identif une tendance
baissire de la part du travail dans 17 pays avancs sur 24 depuis les annes 1980, et
des Perspectives de lemploi de lOCDE 2012 (OCDE, 2012b) qui a dcrit une tendance
similaire dans 26 pays sur 30 depuis 1990. Cela indique quìl y a eu des dcalages entre
la croissance des salaires et celle de la productivit du travail dans un grand nombre
de pays.
Un cart croissant entre petits et gros salaires
La distribution personnelle des salaires est aussi devenue plus ingale. Lcart entre les
10 pour cent du haut de lchelle et les 10 pour cent du bas de lchelle des salaires a
augment dans 23 pays sur 31 depuis la priode 1995-1997 (BIT, 2008a), et la propor-
tion des salaris faiblement rmunrs (dfnis comme ceux qui touchent moins que les
deux tiers du salaire mdian) a aussi augment dans 25 pays sur 37 (BIT, 2010a). Ces
tendances laccentuation de lingalit demeurent fortes quand les autres sources de
revenu, la fscalit et les transferts de revenu sont pris en compte.
7.2 Une baisse de la consommation fonde sur les salaires
et son impact sur la reprise
Ces dsquilibres internes ont eu tendance crer ou exacerber les dsquilibres
externes. La distribution asymtrique en faveur du revenu du capital a eu tendance
juguler la demande de consommation. Dans certains pays, la consommation a continu
crotre principalement en raison dune hausse phnomnale de lendettement des
mnages. Dautres pays ont cherch des solutions lextrieur, avec des excdents des
exportations compensant la faiblesse de la demande intrieure. Mais, en dfnitive, le
recours au crdit facile sest avr impossible maintenir sur la dure et, souvent,
les stratgies de croissance tire par les exportations fondes sur des excdents de la
balance commerciale nont t possibles que conjugues la consommation fonde sur
lèndettement dans les pays dfcitaires.
Ces dsquilibres sont tous apparus avant la Grande Rcession. Limpact total
de la crise sur ces dsquilibres internes et externes nest pas encore clair, mais il y a
peu de raisons de faire preuve dun optimisme excessif. Les salaires moyens ont baiss
dans les conomies dveloppes en 2008 et en 2011. Les rductions des cots de main-
dòuvre dans les pays touchs par la crise affchant un dfcit des comptes courants
comportent des risques conomiques: moins que les pays qui enregistrent des exc-
dents ne permettent une consommation des produits nationaux et des produits imports
davantage fonde sur les salaires, le rsultat pourrait tre une priode prolonge de
stagnation conomique, voire de rcession.
Les risques de laustrit et la rcession
Quant aux dsquilibres internes, les politiques dàustrit et une priode prolonge
de fchissement conomique sont peu susceptibles dìnverser les tendances de la dis-
tribution personnelle des salaires et des revenus. Bien que la part du travail ait brive-
ment connu un rebond au dbut de la crise, elle a recommenc baisser aprs 2009.
Paralllement, il y a des lments qui indiquent que la crise a peut-tre encore accru
lìngalit. Aux tats-Unis, la hausse de lìngalit de revenu entre 2010 et 2011 a t
la plus importante enregistre depuis 1993, et le nombre de travailleurs pauvres a
dsormais atteint 7,2 pour cent de lensemble des travailleurs en 2011, alors quil repr-
sentait 5,7 pour cent en 2007 (US Census Bureau, diverses annes). En Europe, plus de
8 pour cent des individus occupant un emploi sont menacs de pauvret et peuvent tre
considrs comme des travailleurs pauvres selon la publication de la Commission
europenne volution de lemploi et de la situation sociale en Europe 2011 (2012c).
Ces faits nouveaux non seulement ont des consquences sur la stabilit et la crois-
sance de lconomie, mais ils remettent en question la notion de justice sociale et sapent
la cohsion sociale. La distribution et la concentration ingales des revenus entre les
mains de ceux qui touchent les plus gros salaires et celles des propritaires du capital
ont provoqu le mcontentement du public dans le monde entier, augmentant le risque de
troubles sociaux et dinstabilit sociale. Dans les conomies dveloppes, lacceptation
des mesures daustrit et de consolidation budgtaire sen est trouve diminue. Dans
les pays en dveloppement, ces phnomnes ont dclench une multitude de grves et
de manifestations, en particulier quand les hausses des prix des produits alimentaires et
de lenergie ont simultanment rod le pouvoir dachat des salaris du bas de lchelle.
67 PARTIE III Reconnecter les salaires et la productivit
8 Reconnecter les salaires et la productivit
8.1 Une action coordonne
Que faudrait-il faire? Dans notre analyse, nous suggrons que les pouvoirs publics
devraient prendre des mesures de rquilibrage au niveau national et au niveau mon-
dial. Mais, dans cette entreprise, il faut viter dàdopter un point de vue simpliste vou-
lant que les pays puissent sortir de la rcession uniquement par des restrictions et il
convient dinsister davantage sur les politiques qui favorisent un lien plus troit entre
la croissance de la productivit du travail et celle de la rmunration des travailleurs.
Lexistence dimportants surplus des comptes courants dans certains pays indique quil
est possible de stimuler la demande intrieure, notamment travers le renforcement
du lien entre les hausses des salaires et celles de la productivit. Il convient de prendre
grand soin de ne pas encourager une course vers le bas de la part du travail dans
les pays affchant des dfcits ou dans lènsemble de la zone euro. La recherche tout
prix dun avantage fond sur les cots de main-duvre pour devenir conomiquement
comptitif a toutes les chances de dcourager linnovation et la modernisation cono-
miques qui ont constitu des lments cls de la dynamique de lconomie de march.
Les mesures daustrit imposes de lextrieur, en court-circuitant les partenaires
sociaux, porteront aussi atteinte au bon fonctionnement des relations de travail. Ainsi,
la coordination des politiques au niveau mondial susceptible de faire obstacle loption
du nivellement par le bas est fortement recommande pour crer des environnements
favorables un rquilibrage interne.
8.2 Renforcer les institutions existantes
Le rquilibrage interne peut commencer par un renforcement des institutions ser-
vant la fxation des salaires. Le prsent rapport souligne que làffaiblissement de
ces institutions et donc de la position de ngociation des travailleurs a contribu la
dgradation de la distribution fonctionnelle et de la distribution personnelle du revenu.
Il faut donc des politiques pour rquilibrer le pouvoir de ngociation des fns
dèffcience conomique et de stabilit sociale. Comme il est diffcile dòrganiser les
travailleurs, en particulier dans le contexte dune segmentation croissante du march du
travail et dune volution rapide des technologies, il faut crer des environnements plus
favorables la ngociation collective et permettre ainsi aux travailleurs de revendiquer
une part quitable de la production conomique. En mme temps, il convient de noter
que ces travailleurs, en particulier ceux qui sont faiblement rmunrs, ont davantage
fait les frais de laccentuation de lingalit et quils ont besoin de protection, sagis-
sant de la fxation des salaires. Les salaires minima, sìls sont correctement conus,
se sont avrs constituer un instrument de politique effcace qui peut fournir un socle
salarial dcent et assurer ainsi un niveau de vie minimal ces travailleurs et leurs
familles. Comme la montr le dernier Rapport sur le dveloppement dans le monde
2013: Emplois (Banque mondiale, 2012), les potentiels effets ngatifs de la ngociation
collective et des salaires minima sur lemploi et les autres rsultats du march du travail
ont t plutt exagrs dans le pass, mais il faut nanmoins se montrer relativement
prudent lorsquòn les conoit pour amliorer leur effcacit.
8.3 Au-del du march du travail
Rglementation des marchs nanciers
Les constatations de notre rapport montrent clairement quìl ne suffra pas de rqui-
librer la redistribution du revenu uniquement par des politiques du march du travail.
Comme dàutres lònt indiqu (OCDE, 2011 et 2012a; IIES, 2011 et 2012), les politiques
qui ont men la mondialisation fnancire incontrle constituent un important
facteur contribuant làccentuation de lìngalit. La fnanciarisation a cr des inci-
tations qui poussent les entreprises dtourner des moyens de fnancement internes
des investissements rels pour les consacrer des placements fnanciers spculatifs
et risqus visant gnrer des profts maximaux court terme. La drglementation
des marchs fnanciers a non seulement fortement accentu lìngalit, mais a aussi eu
tendance produire des rsultats conomiques qui laissent dsirer et sont instables.
Par consquent, le rquilibrage ncessite une meilleure rglementation du secteur
fnancier et le rtablissement de son rle dans la canalisation des ressources vers les
investissements productifs et durables.
Taxation et scurit sociale
Il y a dàutres aspects trs importants du rquilibrage qui mritent une analyse plus
dtaille. La fscalit, qui fait lòbjet de vifs dbats, en fait partie. Dans divers pays,
le rgime dimposition actuel est en gnral relativement gnreux pour les revenus
du capital par rapport aux revenus du travail, ce qui accrot les pressions la fois sur
les cots de main-duvre pour les employeurs et sur la rmunration que touchent
les travailleurs. Un autre domaine quil convient de souligner est celui des politiques
en matire de scurit sociale et de revenu. Notre analyse de la part du travail dans
le revenu indique que les changements apports au rgime de scurit sociale ont des
consquences non pas seulement sur la redistribution du revenu, mais aussi sur la dis-
tribution du revenu primaire, comme la part du travail. Celles-ci peuvent prendre diff-
rentes voies, y compris un affaiblissement de la position de ngociation des travailleurs
en rduisant leur position de repli (par ex., les indemnits de chmage) ou ce que les
conomistes appellent les salaires dacceptation. Par consquent, des prestations de
scurit sociale adquates peuvent contribuer crer des environnements institution-
nels plus favorables une ngociation salariale effective et garantir un revenu de base
aux travailleurs dans le besoin. En mme temps, il est essentiel de trouver un quilibre
entre les cots et les avantages des rgimes de scurit sociale pour la socit et les
diffrents groupes de fnanceurs et de bnfciaires.
8.4 Spcicits des pays en dveloppement
Les politiques susmentionnes sappliquent aux pays dvelopps comme aux pays en
dveloppement. Cependant, ce dernier groupe de pays est confront certaines diff-
cults spcifques.
69 PARTIE III Reconnecter les salaires et la productivit
Atteindre les autres travailleurs
Tout dabord, il faut reconnatre que la moiti seulement des travailleurs dans les pays
en dveloppement et les pays mergents sont salaris - la plupart des autres sont tablis
leur propre compte ou contribuent lentreprise familiale. Cela ne veut pas dire que
les salaires minima et la ngociation collective soient dnus de pertinence. Nous avons
montr dans le prsent rapport que, dans un chantillon de 32 pays en dveloppement
pris diffrents moment dans le temps sur la priode 1997-2006, pas moins de 64 mil-
lions de salaris gagnaient moins de 2 dollars EU PPA par jour. Les salaires minima et
la ngociation collective peuvent tre un moyen pour ces travailleurs et leurs familles
de parvenir un niveau de vie plus lev. Mais il faut des mesures complmentaires
pour crer plus demplois salaris et relever la productivit et les gains des travailleurs
indpendants. Les mcanismes de garantie de lemploi par lesquels des salaires minima
sont verss constituent aussi un moyen dinciter les entreprises prives se conformer
au salaire minimum afn de ne pas perdre leur main-dòuvre.
Augmenter la productivit du travail
De plus, les salaires sont gnralement bien infrieurs dans les pays en dveloppement
et les pays mergents, les salaires moyens - mme sìls augmentent plus vite que dans
les conomies dveloppes - se situant habituellement dans une fourchette de 150 dol-
lars EU PPA 1000 dollars EU PPA par mois. Dans ce contexte, le relvement de la
productivit moyenne du travail reste une entreprise diffcile et essentielle qui doit
mobiliser des efforts pour relever le niveau dducation et les capacits ncessaires la
transformation productive et au dveloppement conomique, conjugus un environne-
ment de politiques favorables la croissance et la cration demplois.
Mettre en uvre la protection sociale
Enfn, l`laboration de rgimes de protection sociale bien conus reprsente un df
essentiel pour les conomies en dveloppement et les conomies mergentes. Ces
rgimes permettront aux travailleurs et leurs familles dinvestir dans lducation de
leurs enfants, de rduire les montants de lpargne de prcaution et de dvelopper des
modles de consommation de la classe moyenne. Le BIT a montr que l`tablissement
de socles de protection sociale effcaces n`tait pas trop onreux au regard des ressources
de ces pays, quel que soit leur niveau de dveloppement conomique (BIT, 2010e).
AppendiceI
Tendances mondiales des salaires: questions mthodologiques
La mthodologie utilise pour estimer les tendances mondiales et rgionales des salaires
a t labore par le Programme des conditions de travail et dèmploi du BIT (TRAVAIL)
pour le Rapport mondial sur les salaires 2010/11 (BIT, 2010a) prcdent, en collabo-
ration avec le Dpartement de statistique, la suite de propositions formules par un
consultant du BIT et de trois examens collgiaux raliss par quatre experts indpen-
dants
34
. Le prsent appendice dcrit la mthodologie adopte lissue de ce processus.
Concepts et dnitions
Selon la Classifcation internationale dàprs la situation dans la profession (CISP-93),
les salaris sont des travailleurs qui occupent un emploi rmunr, cest--dire un
emploi dans lequel la rmunration de base ne dpend pas directement du revenu de
lemployeur. Les salaris comprennent les salaris rguliers, les travailleurs court
terme, les travailleurs occasionnels, les travailleurs externes, les travailleurs saison-
niers et dautres catgories de travailleurs qui occupent un emploi rmunr
35
.
Le terme salaire dsigne la rmunration brute totale, y compris les primes
rgulires, reue par les salaris durant une priode de temps spcife pour le temps
travaill ainsi que le temps non travaill, comme les congs annuels pays et les congs
de maladie pays. Pour lessentiel, il correspond la notion de rmunration totale en
espces, qui est l`lment principal du revenu li lèmploi rmunr
36
. Il exclut les
cotisations de scurit sociale la charge des employeurs.
Dans le prsent contexte, les salaires dsignent les salaires mensuels moyens rels
des salaris. Chaque fois que cela tait possible, nous avons compil les donnes qui
se rapportent lensemble des salaris (et non pas un sous-ensemble, comme les
salaris du secteur manufacturier ou les salaris temps plein)
37
. Pour tenir compte de
lìnfuence de l`volution des prix sur diffrentes priodes de temps, les salaires sont
mesurs en termes rels, cest--dire que les donnes relatives aux salaires nominaux
sont ajustes pour tenir compte de lìnfation des prix la consommation dans le pays
considr
38
. La croissance des salaires rels sentend de lvolution dune anne sur
lautre des salaires mensuels moyens rels de lensemble des salaris.
Approche par recensement
La mthodologie utilise pour les estimations aux niveaux mondial et rgional est
une mthode par recensement avec non-rponse. Dans cette approche, lobjectif est de
trouver des donnes sur les salaires pour tous les pays et dlaborer un traitement expli-
cite en cas de non-rponse totale (voir Traitement de la non-rponse totale, ci-aprs).
Nous avons essay de recueillir des donnes sur les salaires pour un total de 177 pays
et territoires regroups en six rgions distinctes
39
.
Tableau A1 Groupements rgionaux
Rgions Pays et territoires (abrviations entre parenthses)
conomies
dveloppes
Allemagne(DEU), Australie(AUS), Autriche(AUT), Belgique(BEL), Bulgarie(BUL), Canada(CAN),
Chypre(CYP), Danemark(DNK), Espagne(ESP), Estonie(EST), tats-Unis(USA), Finlande(FIN),
France(FRA), Grce(GRE), Hongrie(HUN), Irlande(IRE), Islande(ICE), Isral(ISR), Italie(ITA),
Japon(JAP), Lettonie(LAT), Lituanie(LIT), Luxembourg(LUX), Malte(MTA), Norvge(NOR), Nouvelle-
Zlande(NZ), Pays-Bas(NET), Pologne(POL), Portugal(POR), Roumanie(ROM), Royaume-Uni(UK),
Slovaquie(SVK), Slovnie(SVE), Sude(SWE), Suisse(CH), Rpublique tchque(CZR)
Europe orientale
etAsie centrale
Albanie(ALB), Armnie(ARM), Azerbadjan(AZB), Blarus(BLS), Bosnie-Herzgovine(BOS),
Croatie(CRO), Ex-Rpublique yougoslave de Macdoine(FYR), Gorgie(GEO), Kazakhstan(KAZ),
Kirghizistan(KYR), Rpublique de Moldova(MOL), Ouzbkistan(UZB), Fdration de Russie(RUS),
Serbie(SBA), Tadjikistan(TAJ), Turkmnistan(TUR), Turquie(TKY), Ukraine(UKR)
Asie Afghanistan(AFG), Bangladesh(BAN), Bhoutan(BHU), Brunei(BRU), Cambodge(CDA),
Chine(CHI), Core(Nord)(NK), Rpublique de Core(KOR), Fidji(FIJ), Hong-kong(Chine)(HK),
les Salomon(SOL), Inde(IND), Indonsie(ISA), Rpublique islamique dIran(IRA), Rpublique
dmocratique populaire lao(LAO), Macao(Chine)(MAC), Malaisie(MYA), Rpublique des
Maldives(MDS), Mongolie(MON), Myanmar(MYN), Npal(NEP), Pakistan(PAK), Papouasie-
Nouvelle-Guine(PAP), Philippines(PHL), Singapour(SNG), Sri Lanka(SRI), Thalande(THA),
Timor-Leste(TL), Viet Nam(VN)
Amrique latine
et Carabes
Antilles nerlandaises(NAN), Argentine(ARG), les Bahamas(BAH), Barbade(BBO), Belize(BZE),
Brsil(BRA), Chili(CHE), Colombie(COL), Costa Rica(COS), Cuba(CUB), Rpublique
dominicaine(DOM), El Salvador(ELS), quateur(ECU), tat plurinational de Bolivie(BOL),
Guadeloupe(GDP), Guatemala(GUA), Guyana(GUY), Hati(HAI), Honduras(HON), Jamaque(JAM),
Martinique(MAR), Mexique(MEX), Nicaragua(NIC), Panama(PAN), Paraguay(PAR), Prou(PER),
Porto Rico(PR), Suriname(SUR), Trinit-et-Tobago(TT), Uruguay(URU), Rpublique bolivarienne du
Venezuela(VZA)
Moyen-Orient Arabie saoudite(SAU), Bahren(BAR), mirats arabes unis(UAE), Iraq(IRQ), Jordanie(JOR),
Kowet(KUW), Liban(LEB), Oman(OMA), Qatar(QAT), Rive occidentale et bande de Gaza(WBG),
Ymen(YEM), Rpublique arabe syrienne(SYR)
Afrique Afrique du Sud(SA), Algrie(ALG), Angola(ANG), Bnin(BEN), Botswana(BOT), Burkina
Faso(BKF), Burundi(BUR), Cameroun(CAM), Cap-Vert(CAV), Rpublique centrafricaine(CAR),
Comores(COM), Congo(CON), Cte dIvoire(COI), gypte(EGY), rythre(ERI), thiopie(ETH),
Gabon(GAB), Gambie(GAM), Ghana(GHA), Guine(GUI), Guine-Bissau(GUB), Guine
quatoriale(EQG), Kenya(KEN), Lesotho(LES), Libria(LIB), Libye(LBY), Madagascar(MAD),
Malawi(MAW), Mali(MAL), Maroc(MOR), Maurice(MUS), Mauritanie(MAI), Mozambique(MOZ),
Namibie(NAM), Niger(NIG), Nigria(NIR), Ouganda(UGA), Rpublique dmocratique du
Congo(DRC), Runion(REU), Rwanda(RWA), Sngal(SEN), Sierra Leone(SL), Somalie(SOM)
Soudan(SUD), Swaziland(SWA), Rpublique unie de Tanzanie(TAN), Tchad(CHA), Togo(TOG),
Tunisie(TUN), Zambie(ZAM), Zimbabwe(ZIM)

Pour faciliter la comparaison avec les tendances rgionales de lemploi, nos groupe-
ments rgionaux sont dsormais compatibles avec ceux qui sont utiliss dans le modle
des Tendances mondiales de lèmploi du BIT (GET) (voir le tableau A1). Toutefois, nous
avons fusionn plusieurs rgions GET en une seule rgion pour lÀsie et le Pacifque
(qui inclut les rgions GET suivantes: Asie de lÈst, Asie du Sud-Est et Pacifque, et
Asie du Sud) et aussi pour lÀfrique (qui comprend lÀfrique du Nord et lÀfrique
subsaharienne). Il convient de noter que la Rpublique de Core et Singapour sont
dsormais regroups avec lÀsie (et non plus avec les pays avancs) et que les 27 pays
73 Appendice I Questions mthodologiques
membres de lUE sont tous inclus dans la catgorie conomies dveloppes. Par
ailleurs, la division entre Europe centrale et orientale et Europe orientale et Asie
centrale nest plus conserve, tous les anciens pays en transition (hormis ceux qui
sont membres de lUE) et la Turquie tant inclus dans un seul groupement, Europe
orientale et Asie centrale. Sàgissant de ces rgions, le regroupement signife que les
tendances rgionales des salaires publies dans le prsent Rapport mondial sur les
salaires ne peuvent pas tre directement compares aux chiffres fgurant dans l`dition
prcdente. Aucun changement nà t apport aux rgions de lÀmrique latine et des
Carabes, ni au Moyen-Orient. Cependant, les offces nationaux de statistique ayant
procd certaines rvisions des donnes, les tendances rgionales des salaires ont t
actualises depuis la publication de la dernire dition.
Globalement, nous avons russi trouver des donnes sur les salaires en pro-
venance de 124 pays et territoires, la couverture rgionale tant indique dans le
tableau A2. Nous avons des donnes provenant de toutes les conomies dveloppes et
de tous les pays dÈurope orientale et dÀsie centrale. Dans dàutres rgions, bien que
nous ayons tent plusieurs reprises dòbtenir des chiffres sur les salaires auprs des
offces nationaux de statistique et/ou de dpositaires internationaux, dans certains cas
les donnes ntaient pas disponibles. La couverture pour les rgions restantes va de
41,2 pour cent (Afrique) 75 pour cent (Moyen-Orient). Cependant, comme la base de
donnes comprend des donnes sur les salaires concernant les pays les plus importants
et les plus prospres, la couverture pour ce qui est des salaris et de la masse salariale
totale est suprieure ce quùn simple comptage des pays donnerait penser. Au total,
notre base de donnes contient des informations pour 94,3 pour cent des salaris du
monde, qui ensemble reprsentent approximativement 97,7 pour cent de la masse sala-
riale mondiale.
Tableau A2 Couverture de la base de donnes mondiale sur les salaires,
2010 (en pourcentage)
Groupe rgional Pays viss Salaris viss
Couverture approximative
de la masse salariale
Afrique 41,2 59,5 79,3
Asie 69,0 98,3 99,3
Europe orientale et Asie centrale 100,0 100,0 100,0
conomies dveloppes 100,0 100,0 100,0
Amrique latine et Carabes 64,5 85,3 83,9
Moyen-Orient 75,0 76,4 91,3
Monde 70,1 94,3 97,7
Note: les pays viss sentendent du nombre de pays pour lesquels nous avons trouv des donnes sur les salaires en pourcentage de la totalit
des pays de la rgion, tandis que les salaris viss sentendent du nombre de salaris dans les pays pour lesquels des donnes sont disponibles
en pourcentage de la totalit des salaris de la rgion (en 2010). La couverture approximative des salaires totaux est estime en partant de
lhypothse que les niveaux de salaires varient dun pays lautre en suivant la productivit du travail (cest--dire le PIB par personne employe,
en 2010), exprime en dollars PPA de 2005.
Rapport mondial sur les salaires 2012/13 74
Traitement de la non-rponse litem
Dans certains pays pour lesquels nous avons trouv des donnes, les sries statistiques
taient incompltes, savoir que, pour certaines annes, il n`y avait pas de donnes. Le
tableau A3 contient des informations sur la couverture pour chaque anne, de 2006
2011. Comme prvu, la couverture de la base de donnes diminue pour les annes les
plus rcentes tant donn que certains offces de statistique sont encore en train de traiter
les donnes (et notamment la Chine, o les donnes concernant les salaires pour 2011
ne sont pas encore disponibles). En consquence, pour 2011 nous avons des observations
relles uniquement en ce qui concerne environ 74,5 pour cent des salaires totaux dans le
monde, contre 94,3 pour cent en 2010.
Si la couverture pour lànne la plus rcente est bonne dans les conomies dve-
loppes ainsi quèn Europe orientale et Asie centrale, en revanche nous avons trop peu
dòbservations relles pour le Moyen-Orient en 2010 et 2011 pour faire une estima-
tion fable, et cèst pourquoi les tendances des salaires les plus rcentes pour le Moyen-
Orient risquent de changer. Nous qualifons aussi les taux de croissance rgionaux
dèstimations provisoires lorsquìls sont fonds sur une couverture dènviron 75 pour
cent et destimations approximatives lorsque la couverture correspondante de notre
base de donnes se situe entre 40 et 74 pour cent pour attirer làttention sur le fait quìls
pourraient tre rviss une fois que nous disposerons de donnes supplmentaires.
Pour neutraliser ce type de non-rponse litem (cest--dire les lacunes dans
les donnes concernant les pays viss), nous avons utilis un modle pour prdire les
valeurs manquantes
40
. Cette dmarche est ncessaire pour maintenir lensemble de pays
rpondants constant dans le temps et viter ainsi les effets inopportuns qui vont de pair
avec un chantillon instable. En fonction de la nature des points de donnes manquants,
nous avons utilis plusieurs approches complmentaires qui sont dcrites en dtail dans
lappendice technique I de ldition 2010/11 du Rapport mondial sur les salaires.
Tableau A3 Couverture de la base de donnes mondiale sur les salaires,
2006-2011 (en pourcentage)
Groupe rgional 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Afrique 79,6 78,1 65,2** 64,8** 64,9** 43,2**
Asie 95,8 96,0 96,2 96,4 96,5 (38,1)
Europe centrale et du Sud-Est 98,4 99,0 98,9 98,7 98,6 97,2
conomies dveloppes 100,0 99,2 100,0 99,2 99,4 86,7
Amrique latine et Carabes 84,9 84,7 84,4 84,0 82,6 79,0
Moyen-Orient 91,7 91,9 91,7 68,0** (22,4) (12,0)
Monde 97,4 96,8 96,9 95,6 94,3 74,5*
* Taux de croissance rgionaux publis titre dEstimations provisoires (sur la base dune couverture denviron 75pour cent).
** Taux de croissance rgionaux publis titre dEstimations approximatives (sur la base dune couverture denviron 40 74pour cent).
() Taux de croissance rgionaux publis mais susceptibles de changer (sur la base dune couverture infrieure 40pour cent).
Voir le corps du texte pour lestimation de la couverture. Un pays est considr comme couvert seulement quand une observation relle est dispo-
nible, soit tire de la srie de prdilection, soit tire dune srie secondaire.
Traitement de la non-rponse totale
Pondration de la rponse
Afn de neutraliser les effets de la non-rponse totale (quand on ne dispose pas de don-
nes sur les salaires par sries temporelles pour un pays donn), nous avons adopt une
approche dans laquelle la non-rponse a t considre comme un problme ayant trait
lchantillonnage. Comme les pays qui nont pas rpondu peuvent prsenter des carac-
tristiques salariales qui diffrent de celles des pays rpondants, la non-rponse peut
introduire un biais dans les estimations fnales. Une approche classique pour corriger
leffet ngatif de la non-rponse consiste calculer la propension rpondre des diff-
rents pays, puis pondrer les donnes provenant des pays qui ont rpondu de linverse
de leur propension rpondre
41
. Cela implique quaucune imputation nest faite pour les
pays qui nont pas rpondu.
Dans ce cadre, chaque pays rpond avec une probabilit
j
et lon suppose que
les pays rpondent indpendamment les uns des autres (chantillonnage de Poisson).
Avec les probabilits de rponse
j
, il est alors possible destimer le total Y de toute
variable y
j
:
(1)
par lestimateur:
(2)
o U est la population et R est lensemble des parties interroges. Cet estimateur est
dnu de biais si les hypothses sont vrifes (voir Till, 2001). Dans notre cas, U est
lùnivers de tous les pays et territoires rpertoris au tableau A1 et R reprsente les pays
rpondants pour lesquels nous avons pu trouver des donnes sur les salaires en sries
temporelles.
Toutefois, ce qui fait diffcult, cèst que la propension rpondre du pays j,
j
,
est gnralement inconnue et doit elle-mme tre estime. On trouve beaucoup de
mthodes destimation de la propension rpondre dans les publications (voir par ex.
Till, 2001). Dans notre cas, la propension rpondre a t estime en reliant la rponse
ou la non-rponse dun pays donn son nombre de salaris et sa productivit du tra-
vail (soit le PIB par salari en dollars EU PPA de 2005). Nous nous sommes fonds sur
lobservation selon laquelle les statistiques des salaires sont plus aisment accessibles
dans le cas des grands pays riches que dans celui des petits pays pauvres. Nous avons
choisi le nombre de salaris plutt que la population et la productivit du travail plutt
que le PIB par tte, car ces variables sont aussi utilises pour le calibrage et la pond-
ration en fonction de la taille (voir plus loin)
42
.
cette fn, nous avons estim une rgression logistique comportant des effets
fxes, comme suit:
prob(rponse) = .(o
h
+
1
x
j2010
+
2
n
j2010
)
dans laquelle x
j2010
est ln (PIB par salari en dollars EU PPA de 2005) du pays j dans
lanne 2010, n
j2010
est ln (nombre de salaris) en 2010, et A dnote la fonction de distri-
bution cumulative logistique (FDC)
43
. Les effets fxes o
h
sont des variables muettes pour
(3)
chacune des rgions pour lesquelles les donnes sont incompltes (Asie et Pacifque,
Amrique latine et Carabes, Moyen-Orient, Afrique), tandis que les deux rgions res-
tantes pour lesquelles les donnes sont compltes forment la catgorie de rfrence
omise. La rgression logistique avait un univers de N = 177 cas et a produit un pseudo
R = 0,380. Les paramtres estims ont t ensuite utiliss pour calculer la propension
rpondre du pays j,
j
.
Le pondrant de la rponse pour le pays j, o
j
, est ensuite donn par linverse de la
propension rpondre du pays:
Facteurs de calibrage
Le processus dàjustement fnal, gnralement dnomm calibrage (voir Srndal et
Deville, 1992) sert garantir la cohrence de lestimation par rapport aux agrgats
connus. Cette procdure garantit une reprsentation adquate des diffrentes rgions
dans lèstimation globale fnale. Dans le prsent contexte, une variable unique nombre
de salaris n dans une anne donne t a t prise en considration pour le calibrage.
Dans ce cas simple, les facteurs de calibrage ,
jt
sont donns par
(5)
o h reprsente la rgion dont le pays j fait partie, n
ht
est le nombre connu de salaris
dans la rgion dans lanne t, et n
^

ht
est le nombre total estim de salaris dans la rgion
et dans la mme anne qui a t obtenu en additionnant les pondrants non calibrs
et les donnes sur lemploi provenant des pays rpondants dans chaque rgion
44
. Les
facteurs de calibrage obtenus pour lànne 2010 taient 1,00 (conomies dveloppes;
Europe orientale et Asie centrale), 0,975 (Asie et Pacifque), 1,045 (Amrique latine et
Carabes), 1,042 (Afrique) et 1,086 (Moyen-Orient). Comme tous les facteurs de cali-
brage sont soit gaux 1 soit trs proches de 1, ces rsultats montrent que les estima-
tions n
^

ht
taient dj trs proches du nombre connu de salaris n
ht
dans chaque rgion.
Il convient de noter que le processus de calibrage a t rpt pour chaque anne de
faon que le poids de chaque rgion dans lestimation mondiale change dans le temps
en fonction de sa part approximative dans la masse salariale mondiale.
Pondrants de la rponse calibre
Les pondrants de la rponse calibre, '
jt
, sont ensuite obtenus en multipliant le pon-
drant de la rponse initiale par le facteur de calibrage:
'
jt
=

j

jt
Lestimation du nombre de salaris au niveau rgional fonde sur les pondrants de la
rponse calibre est gale au nombre total de salaris connu de cette rgion dans une
anne donne. Les pondrants de la rponse calibre permettent donc de faire un ajus-
tement pour tenir compte des diffrences entre les rgions en termes de non-rponse.
Les pondrants de la rponse calibre sont gaux 1 dans les rgions o des donnes
(4)
(6)
sur les salaires taient disponibles pour tous les pays (conomies dveloppes, Europe
orientale et Asie centrale). Ils sont suprieurs 1 pour les petits pays et les pays o
la productivit du travail est plus faible, car ceux-ci sont sous-reprsents parmi les
pays rpondants.
Estimation des tendances mondiales et rgionales
Une manire intuitive de concevoir une tendance mondiale (ou rgionale) des salaires
est de considrer lvolution du salaire moyen du monde (ou dune rgion). Cela serait
conforme au concept utilis pour dautres estimations bien connues, comme la crois-
sance du PIB rgional par tte (publie par la Banque mondiale) ou lvolution de la
productivit du travail (ou PIB par salari).
Le salaire moyen mondial y au moment t peut tre obtenu en divisant la somme
des masses salariales nationales par le nombre de salaris dans le monde:
(7)
o n
jt
est le nombre de salaris du pays j et y
jt
est le salaire moyen correspondant des
salaris du pays j, dans les deux cas au moment t. La mme opration peut tre rpte
pour la priode prcdente t+1 pour obtenir y*
t+1
, en utilisant les salaires dfats y*
t+1
et
le nombre de salaris n
t+1
, o * se rfre aux salaires rels. Il est alors facile de calculer
le taux de croissance du salaire moyen mondial r.
Toutefois, il sàgit certes dùne manire dèstimer les tendances mondiales des
salaires attrayante dùn point de vue thorique, mais elle comporte certaines diffcults
quil nous est actuellement impossible de surmonter. En particulier, pour agrger les
salaires nationaux, comme dans lquation 7, il faut les convertir dans une monnaie
commune, comme le dollar EU PPA, ce qui rend les estimations sensibles aux rvisions
des facteurs de conversion PPA. Il faudrait aussi que les statistiques nationales sur
les salaires soient harmonises de manire avoir un seul et mme concept pour les
salaires afn que le niveau soit strictement comparable
45
.
Point plus important, l`volution du salaire moyen mondial serait aussi infuence
par les effets de composition qui se produisent quand la part des salaris change selon
les pays. Par exemple, si le nombre des salaris baissait dans un grand pays hauts
salaires, mais augmentait (ou demeurait constant) dans un grand pays bas salaires, il
en rsulterait une baisse du salaire moyen mondial (quand bien mme les niveaux des
salaires demeureraient constants dans tous les pays). cause de cet effet, il est diffcile
dinterprter les changements du salaire moyen mondial, car il faudrait diffrencier
la portion mettre au compte de lvolution des salaires moyens nationaux de celle
mettre au compte des effets de composition.
Nous avons donc accord la prfrence une autre spcifcation possible pour
calculer les tendances mondiales des salaires, qui prserve lattrait du concept prsent
ci-dessus d son aspect intuitif, mais qui vite les diffcults quìl comporte dans la
pratique. Pour faciliter linterprtation, nous voulons aussi exclure les effets qui sont dus
lvolution de la composition de la population salarie mondiale. Nous vitons donc
le danger de produire un artefact statistique, savoir une baisse des salaires moyens
mondiaux qui pourrait tre cause par un dplacement de lemploi vers les pays bas
salaires (mme lorsque les salaires dans les pays croissent effectivement).
Quand le nombre de salaris dans chaque pays demeure constant, le taux de crois-
sance des salaires au niveau mondial peut tre exprim comme la moyenne pondre
des taux de croissance des salaires des diffrents pays:
r
t
=
lj
w
jt
r
jt
o r
jt
est le taux de croissance dans le pays j au moment t, et le pondrant pour le pays
w
jt
est la part de la masse salariale mondiale reprsente par le pays j donne par la
formule suivante:
w
jt
= n
jt
y
jt
/ l
j
n
jt
y
jt
Si nous avons des donnes concernant le nombre de salaris n
jt
de tous les pays et tous
les moments dans le temps pertinents tires du Modle des tendances mondiales de
lemploi du BIT
46
, nous ne pouvons pas estimer directement lquation 9 car nos don-
nes sur les salaires ne sont pas exprimes dans une monnaie commune. Cependant,
nous pouvons l encore faire appel la thorie conomique classique qui suggre que
les salaires moyens suivent plus ou moins les mmes variations que la productivit du
travail dun pays lautre
47
. Nous pouvons donc estimer y
jt
comme proportion fxe de
la productivit du travail LP:
^
y
jt
= o LP
jt
o est le ratio moyen des salaires par rapport la productivit du travail. Nous pou-
vons donc estimer le pondrant comme suit:
^
w
jt
= n
jt
o LP
jt
/ l
j
n
jt
o LP
jt
qui est gal
^
w
jt
= n
jt
LP
jt
/ l
j
n
jt
LP
jt
Si nous remplaons
^
w
jt
par w
jt
et que nous introduisons le pondrant de rponse calibre
'
j
dans l`quation 8 nous obtenons l`quation fnale utilise pour estimer la croissance
des salaires au niveau mondial:
(13)
et pour la croissance des salaires au niveau rgional:
(13')
(8)
(9)
(10)
(11)
(12)
o h est la rgion dont fait partie le pays j. Comme il ressort des quations 13 et 13',
les taux de croissance des salaires aux niveaux mondial et rgional sont les moyennes
pondres des tendances des salaires au niveau national, o '
j
corrige pour tenir
compte des diffrences entre les pays en ce qui concerne la propension rpondre.
Appendice II
Comment une divergence entre la productivit du travail
et les salaires inue sur les cots unitaires de main-duvre
et sur la part du travail dans le revenu
Lcart grandissant entre les gains de productivit et les hausses des salaires rels
dans beaucoup de pays avancs a t mis en vidence par le Rapport mondial sur les
salaires 2010/11. La productivit du travail tablit la relation entre un processus de
production par rapport aux moyens utiliss pour lòbtenir - en lòccurrence, làpport
de main-duvre. Elle est habituellement mesure par la valeur ajoute par personne
employe ou bien par heure ouvre. La mesure horaire a lavantage de ne pas subir
lìnfuence des changements dans la production qui sont dus aux variations de la dure
du travail. Cependant, on ne dispose pas toujours dìnformations fables sur les heures
travailles, et cest pourquoi la valeur ajoute par personne employe est souvent la
mesure de prdilection (comme cest le cas, par exemple, avec lindicateur produc-
tivit du travail des objectifs du Millnaire pour le dveloppement; voir Luebker,
2011). Partant, les organisations comme lOCDE publient les deux indicateurs (voir
McKenzie et Brackfeld, 2008). La productivit du travail est toujours mesure en
termes rels; la mesure de la valeur ajoute doit donc tre exprime en prix en mon-
naie constante (cèst--dire ajuste pour tenir compte de lìnfation, en utilisant la
mthode de la double dfation dans laquelle les moyens de production et les rsul-
tats sont valus en prix constants). Cependant, comme le dfateur implicite du PIB
pourrait s`carter de lìndice des prix la consommation (qui est utilis pour dfater
les salaires), il peut parfois tre utile de comparer la valeur ajoute nominale et les
salaires nominaux.
Les deux concepts salaire et rmunration des salaris sont troitement
lis. Le terme salaire, tel quil est utilis dans le Rapport mondial sur les salaires,
dsigne la rmunration brute totale, y compris les primes rgulires, reue par les
salaris durant une priode spcife pour le temps travaill ainsi que le temps non
travaill, comme les congs annuels pays et les congs de maladie pays. Pour les-
sentiel, il correspond la notion de rmunration totale en espces, qui est l`lment
principal du revenu li lemploi rmunr. Il exclut les cotisations de scurit sociale
la charge des employeurs. Cest l la grande diffrence par rapport la rmu-
nration des salaris telle quèlle fgure dans le Systme de comptabilit nationale
(2008). Celle-ci est compose de deux lments, savoir les salaires et traitements
(ce qui correspond au concept de salaires dans le Rapport mondial sur les salaires)
et les cotisations sociales la charge des employeurs verses aux caisses de retraite
et autres rgimes de scurit sociale. La part du travail dans le revenu (LS) relie la
rmunration des salaris (CoE) la valeur ajoute totale (PIB). La mesure non ajuste
est obtenue en divisant la rmunration totale par la valeur ajoute totale, au niveau
national ou sectoriel:
(1)
Sinon, il est possible de calculer la part du travail dans le revenu en divisant la rmun-
ration par travailleur par la valeur ajoute par travailleur:
(1')
Le lecteur reconnatra que le dnominateur le PIB par travailleur correspond
la productivit du travail telle quèlle a t dfnie plus haut. Cependant, le num-
rateur ne correspond pas totalement au concept de salaire moyen tel quil est utilis
dans le Rapport mondial sur les salaires. Premierement, la rmunration des salaris,
CoE ( la diIIrence des salaires), inclut aussi les cotisations sociales la charge des
employeurs. Deuxiemement, le salaire moyen ne vise que les salaris (et non pas
lensemble des travailleurs, un terme qui inclut aussi les personnes tablies leur
propre compte). Lquation 1' ci-dessus peut tre rcrite de faon ce quelle relie
directement le salaire moyen la productivit du travail:
(1'')
o reprsente la CoE / les salaires et les travailleurs / les salaris. Une procdure
habituelle (galement utilise dans la partie II du Rapport mondial sur les salaires)
consiste ajuster la part du travail pour tenir compte de la part des salaris dans lem-
ploi total. La part du travail ajuste (LS') peut alors scrire comme suit:
(1''')
Heureusement pour les analystes, le coeffcient est remarquablement stable dans le
temps. Cela vaut mme pour un pays comme lÀllemagne, qui a connu des change-
ments structurels substantiels sur les trente-cinq dernires annes, une runifcation
et des rformes destines rduire les cotisations sociales la charge des employeurs.
Nanmoins, le coeffcient de CoE sur les salaires et traitements est demeur dans une
fourchette troite, entre 1,21 et 1,24 de 1976 2011 (voir Offce fdral des statistiques,
2012, tableau 1.8.) Cela signife que l`volution de la part du travail peut tre impute
presque entirement l`volution de la relation entre les salaires moyens et la produc-
tivit du travail. La part du travail est donc une statistique commode pour reprer la
dconnection entre ces deux variables qui sest produite dans beaucoup de pays au
cours de la dcennie coule.
La part du travail est troitement lie aux cots unitaires de main-duvre (ULC).
Ceux-ci sont couramment dfnis comme le cot moyen du travail par unit de pro-
duction. Bien quils soient frquemment utiliss comme indicateur de la comptitivit
dune conomie, lOCDE formule la mise en garde suivante: les ULC ne devraient
83 Appendice II Une divergence entre la productivit du travail et les salaires
pas tre interprts comme une mesure globale de la comptitivit, mais comme une
rfexion de la comptitivit par les cots
48
.
Les cots unitaires de main-duvre sont habituellement exprims en termes
nominaux en reliant les cots de main-duvre nominaux la valeur ajoute relle:
(2)
o n et r dnotent la valeur nominale et la valeur relle, respectivement. Le PIB rel est
obtenu en dfatant le PIB nominal par un indice des prix P. Une autre faon de calculer
les cots unitaires de main-duvre nominaux est donc dutiliser lindice des prix P en
mme temps que les valeurs nominales pour CoE et PIB:
(2')
Comme il ressort de ces deux quations, les cots unitaires de main-duvre nominaux
peuvent augmenter parce que la rmunration nominale des salaris crot plus vite que
le PIB nominal, ou parce que les prix augmentent. Les pays o lìnfation est leve
affcheront donc gnralement une croissance plus rapide des cots unitaires de main-
dòuvre nominaux que ceux o lìnfation est faible. Cela rend diffcile la comparaison
des cots unitaires de main-duvre nominaux entre des pays qui utilisent des mon-
naies diffrentes.
Lautre solution possible est de calculer les cots unitaires de main-duvre rels,
ce qui permet dobtenir le cot du travail rel (cest--dire ajust pour tenir compte de
lìnfation) par rapport la production relle. Autrement dit, il faut dfater CoE et PIB
avec un indice des prix P:
(3)
Comme les indices des prix sannulent mutuellement, les cots unitaires de main-
duvre rels sont habituellement calculs sur la base des valeurs nominales (OCDE,
2008). Cela permet aussi d`viter les rsultats fallacieux qui peuvent tre produits quand
lìndice des prix la consommation (IPC) est utilis pour dfater le cot de la main-
duvre, mais que cest lindice des prix la production (IPP) qui est utilis pour le PIB
(voir Fleck, Glaser et Sprague, 2011). des fns de prsentation, les cots unitaires de
main-duvre sont souvent exprims sous la forme dun indice qui prend la valeur de
100 sur lànne de rfrence (par ex. 2005).
Il se trouve que lquation 3 concernant les cots unitaires de main-duvre rels
est exactement la mme que lquation 1 concernant la part du travail dans le revenu.
Il ne sàgit pas dùne concidence, et en fait les expressions part du travail dans le
revenu et cots unitaires de main-duvre rels sont souvent utilises comme syno-
nymes (voir McKenzie et Brackfeld, 2008). Ce que cela implique, cèst que les poli-
tiques visant abaisser les cots unitaires de main-duvre rels auront pour effet de
dsolidariser les salaires de la productivit et de rduire la part du travail dans le revenu
(augmentant ainsi la part du capital dans le revenu).
Bien entendu, les cots unitaires de main-duvre nominaux peuvent aussi dimi-
nuer en raison dune baisse de lindice des prix P. Cependant, peu de responsables
politiques viseront obtenir une dfation complte - un phnomne qui a fortement
aggrav la Grande Dpression des annes 1930 et qui augmente la valeur relle des
dettes existantes. Lorsque les prix continuent de monter, il faudra, pour abaisser les
cots unitaires de main-duvre nominaux, une baisse encore plus marque de la part
des salaires quun simple abaissement des cots unitaires de main-duvre rels.
Un abaissement des cots de main-duvre est apparemment une mesure appr-
cie de certains commentateurs conomiques, mais il est beaucoup moins certain que
les consquences pour la distribution fonctionnelle du revenu aient fait lobjet dune
rfexion approfondie - et lòn ne voit toujours pas bien pourquoi le fait dàccrotre les
profts au dtriment des salaires devrait tre une bonne politique conomique (la ques-
tion traite dans la partie II du Rapport mondial sur les salaires).
Appendice III
Dterminants des parts du travail
Encadr A1 Procdure de slection et destimation des donnes:
une mthodologie conomtrique
La mthodologie employe dans la procdure destimation pour dterminer les effets de diffrentes
variables sur les parts du travail repose sur un cadre causal qui comporte quatre tapes fonda-
mentales. La variable dpendante (la part du travail dans le revenu) et les variables indpendantes
(les facteurs internes et externes) sont construites par lutilisation conjugue densembles de don-
nes (tape 1), en prtant une attention particulire aux problmes de communication de donnes
errones et dendognit (tape 2). Les dterminants des parts du travail dans le revenu sont
regroups en fonction des facteurs rpertoris la gure37 (tape 3) et la combinaison des dter-
minants (tape 4) souligne les spcications, ce qui permet dobtenir les estimations prsentes
dans les tableaux A4 et A5.
tape 1: Les sources dinformations suivantes ont t conjugues pour construire la variable dpen-
dante et lensemble des variables indpendantes:
Variable dpendante: base de donnes BIT/IIES pour la construction du principal indicateur
des parts des salaires comme indicateur indirect des parts du travail dans le revenu.
Facteurs dterministes: base de donnes AMECO, base de donnes de lOCDE, comptes natio-
naux de la Chine, indice industriel de lONUDI, Indicateurs du dveloppement dans le monde
de la Banque mondiale (WB-WDI), tableaux mondiaux de PENN, base de donnes EU-KLEMS.
Des donnes complmentaires ont aussi t tires directement des tudes ralises par
Aleksynska et Schindler (2011), Bassanini et Duval (2006) ainsi que Lane et Milesi-Ferretti
(2007).
Traitement et nature des donnes: la variable dpendante et les dterminants sont estims sur une
base annuelle pour la priode 1970-2007 pour 71 conomies.
tape 2: La variable dpendante est la part des salaires totale, qui est gale la masse salariale
totale divise par le revenu national. Elle est construite en tenant compte de deux ajustements:
Ajustement 1 (neutralisant la communication de donnes errones): les donnes relatives au
revenu provenant des individus tablis leur propre compte incluent les traitements et les
bnces. Pour viter de surestimer la contribution des individus tablis leur propre compte
(en excluant les bnces), la masse salariale totale est estime comme la somme des salaires
des employs salaris augmente dun lment correspondant la part des individus tablis
leur propre compte dans la main-duvre. Ainsi, les salaris servent de contrefactuels ce
qui aurait t les traitements des individus tablis leur propre compte sils avaient t des
travailleurs salaris (Gollin, 2002).
Ajustement 2 (neutralisant lendognit): la masse salariale totale inclut les salaires du secteur
public troitement lis la mesure de la consommation publique (GC). La variable GC est incluse
la droite de la relation de causalit pour rendre compte de leffet sur lvolution de la part
des salaires totale. Ainsi, il faut encore ajuster la mesure ajuste de la part des salaires totale
en soustrayant GC de la masse salariale totale: ce second ajustement rend GC (gurant droite)
exogne par rapport la part des salaires totale (gurant gauche).
Application de lajustement 1 et de lajustement 2: la variable dpendante nale est la masse
salariale totale du secteur priv, ajuste pour tenir compte des travailleurs indpendants, en
pourcentage du revenu national.
tape 3: suivant la procdure destimation, cinq sries de facteurs indpendants sont prises en
compte comme dterminants cls de la part du travail dans le revenu:
La croissance du PIB rel est incluse pour tenir compte des changements structurels et cycliques
qui pourraient avoir des effets sur la tendance sculaire de la part du revenu fonctionnel. La
croissance du PIB rel rend compte dans un pays de lhtrognit qui varie de faon dtermi-
niste dans le temps.
Progrs technologique: part de lindustrie dans le PIB, part du secteur de lagriculture et de la
pche dans le PIB, productivit du travail moyenne et pour les conomies dveloppes ratios
capital-travail et TIC-capital. En ce qui concerne le ratio capital-travail, la mesure nest utilise
que pour les conomies avances o lutilisation de la productivit du travail moyenne naide
pas rendre compte du progrs technologique parce quelle est homogne dune conomie
lautre et dans le temps. Ainsi, dans les estimations, le ratio capital-travail (pour les conomies
avances uniquement) est mesur par la valeur du total des services en capital en proportion du
nombre total des salaris dans ce secteur: cest donc une mesure de la productivit du travail
moyenne exclusivement par rapport au capital.
Financiarisation (nanciarisation mondiale): construite comme lactif externe total plus le passif
externe total dune conomie en part du PIB. Cest la mthode standard suivie dans les publica-
tions pour mesurer limportance du secteur nancier pour une conomie (voir CE, 2007; Rodrick,
1997; Stockhammer, paratre).
Mondialisation: ouverture des changes commerciaux (exportations et importations totales en
part du PIB) et termes de lchange (valeur unitaire des exportations par rapport la valeur uni-
taire des importations).
La consommation publique en part du PIB (comme approximation du changement au systme de
protection sociale).
Institutions du march du travail: taux de syndicalisation, indice des salaires minima, indica-
teurs des indemnits de chmage (taux de remplacement et couverture), dlai pour le pravis
de licenciement, indemnits de licenciement et prise en compte des effets du ct de loffre
(main-duvre et population).
tape 4: le modle suppose une relation causale statique entre les variables. Les estimations sont
construites en rassemblant les donnes disponibles tires dun panel dsquilibr (71 pays, avec
au maximum 37 annes dobservations provenant de chaque pays) tout en tenant compte des effets
xes individuels. Le modle peut donc tre exprim comme suit:
WSAPit = F[FINit, GLOBit, TECHit, WFSTit, LMIit; eit]
Encadr A1 Procdure de slection et destimation des donnes (suite)
87 Appendice III Dterminants des parts du travail
i: pays parmi n pays
t: priode couverte par les observations
e: chocs stochastiques
Le fait dinclure ou dexclure des sries particulires de variables permet dobtenir deux ensembles
distincts de spcications:
Spcication initiale: elle ne tient pas compte des variables institutionnelles du march du
travail (LMI) pour permettre de mieux comprendre les effets conjoints de la mondialisation et
du pouvoir de ngociation des salaris (tableauA4).
Spcication initiale augmente: elle autorise lintroduction dans la spcication initiale de
chacune des cinq variables identies comme indicateurs du march du travail ltape 3,
ce qui produit une nouvelle srie destimations (tableauA5).
Rsultats et interprtation
Le tableau A4 contient les estimations sur la base de la spcifcation initiale pour trois
groupes de pays: toutes les conomies (71 conomies), les conomies industrialises
(28 conomies de lÒCDE) et les conomies en dveloppement (9 conomies). Cette
distinction est importante du point de vue conceptuel et du point de vue pratique. Les
conomies de lOCDE revenu lev ont des marchs du travail et des structures indus-
trielles plus homognes et ont des donnes de meilleure qualit couvrant des priodes
plus longues. Ces conditions nous permettent de travailler sur un modle tendu avec
tous les facteurs potentiels sans grand risque derreurs statistiques ou de manque de
fabilit (par ex. le bruit statistique). Ainsi, une spcifcation de modle complte est
utilise pour les conomies industrialises. Limpact de la mondialisation est pris en
compte par les variables ouverture des changes et termes de l`change, la premire
mesurant lèxposition au march mondial, et la deuxime, la comptitivit relative dùn
pays dans le commerce international. Lìncidence de la mondialisation fnancire est
prise en compte par la somme de lactif externe et du passif externe dans le PIB (tir de
Lane et Milesi-Ferretti, 2007). La consommation publique et le taux de syndicalisation
sont aussi inclus.
Cependant, une telle approche nest pas applicable aux conomies en dveloppe-
ment, principalement en raison du caractre limit des donnes disponibles, en parti-
culier concernant le taux de syndicalisation. Une spcifcation de modle diffrente est
donc utilise, comprenant certaines variables nouvelles - la part du secteur industriel, la
part du secteur de làgroforesterie et la productivit du travail - pour rendre compte des
effets du progrs technologique et de l`volution structurelle. Lorsque les 71 pays sont
pris ensemble dans la rgression, les variations entre conomies dveloppes et cono-
mies en dveloppement sont telles que la part de lindustrie, la part de lagroforesterie et
la productivit du travail sont juges suffsantes pour rendre compte de lìncidence de la
technologie et de lvolution structurelle sur la part du travail dans le revenu. Cependant,
dans le cas des conomies dveloppes, ces trois variables sont trop homognes et ne per-
mettent pas de dterminer lhtrognit dans les diffrences de niveau technologique
entre les pays de ce groupe. Au lieu de cela, les variables ratio capital-travail et ratio
capital-services sont utilises pour tenir compte de ces diffrences de niveau lorsquon
estime la spcifcation initiale pour les 28 pays de lÒCDE revenu lev. Enfn, la crois-
sance conomique relle est incluse pour exprimer lajustement sur le cycle conjoncturel
court concernant le comportement en matire de fxation des salaires; le signe ngatif
est cohrent par rapport la conclusion selon laquelle les salaires sont contracycliques.
Toutes les estimations prsentes dans le tableau A4 peuvent tre considres du
point de vue de lìmportance de lìncidence (la valeur des coeffcients) et de lòrientation
de lìncidence (le signe). Elles confrment le rle de la technologie et de la mondialisa-
tion dans les changes internationaux et sur les marchs fnanciers sàgissant de la rduc-
tion de la part du travail dans le revenu dans les conomies dveloppes comme dans
les conomies en dveloppement. Il est intressant de noter que lincidence est dune
importance similaire quelle que soit la manire de regrouper les pays. Une volution
positive de la consommation publique augmente la part du travail dans le revenu tant
dans les conomies dveloppes que dans les conomies en dveloppement. Cependant,
lincidence est plus faible quand les estimations couvrent lensemble des 71 conomies,
ce qui est susceptible dindiquer une variabilit relative de la consommation publique
entre les pays dvelopps et les pays en dveloppement comme dterminant des parts du
travail dans le revenu
49
. De mme, le coeffcient pour le taux de syndicalisation (pour les
conomies de lOCDE) indique leffet positif du pouvoir de ngociation sur les parts du
travail dans le revenu
50
.
Si lòn utilise les estimations fondes sur les 71 pays pris ensemble, on voit que
laugmentation des niveaux dindustrialisation et les augmentations du ratio capital-
travail (deux mesures de làugmentation du capital par le progrs technologique) ont
un effet dfavorable sur les parts du travail dans le revenu, comme prvu et en confor-
mit avec les conclusions d`tudes antrieures sur la question (FMI, 2007; Kumhof et
Rancire, 2011; FMI, 2010; OCDE, 2012b)
51
. Nanmoins, dans le cas des conomies
en dveloppement, les coeffcients de lìndustrialisation et de la productivit du travail
supposent quìl existe une relation positive entre le progrs technologique et les parts du
travail dans le revenu. Cela pourrait tre un indicateur de leffet de rattrapage que cer-
taines de ces conomies ont connu - au moins jusquèn 2007 - comme cela est expliqu
dans le rapport du FMI sur la mondialisation du travail (FMI, 2007). Au cours de la
priode de rattrapage, quand les conomies auparavant dominante agricole se ro-
rientent vers lindustrie, le resserrement du march du travail qui en rsulte peut provo-
quer une hausse des salaires, mesure que la productivit du travail augmente et que la
technologie est modernise. Des conclusions similaires ont t rcemment confrmes
par dautres tudes (par ex., OCDE, 2012b).
La spcifcation initiale peut tre encore augmente pour inclure les indicateurs
des institutions du march du travail (LMI), cèst--dire les variables qui (outre le taux
de syndicalisation) indiquent directement la force du processus de ngociation pour
dterminer la part du revenu qui revient au travail. Le tableau A5 montre le rsultat
de làpplication de diverses spcifcations quand chaque indicateur LMI a t ajout
comme facteur additionnel la spcifcation initiale explique et prsente dans le
tableau A4. La raison pour laquelle on ajoute chacun des indicateurs LMI sparment
est double. Premirement, compte tenu de lìncidence positive du taux de syndicalisa-
tion sur les parts des salaires, le fait dajouter des indicateurs indpendants qui sont
susceptibles dtre lorigine de la syndicalisation permet de mieux comprendre les
mcanismes de transition possibles entre la syndicalisation (le pouvoir de ngociation)
et la part du travail dans le revenu. Deuximement, il est probable que les indicateurs
LMI seront fortement corrls, de sorte que le fait de les ajouter chacun sparment
permet d`viter les problmes de multicolinarit dans lìdentifcation des paramtres
estims.
Les estimations sont fondes sur lensemble des 71 conomies qui composent
lchantillon. Dans la pratique, elles montrent que pas une variable ne cause elle
seule de changement de la part du travail dans le revenu: cest--dire que, en raison de
la variabilit de chaque variable entre les pays, nous ne pouvons pas dceler de signi-
fcation concernant lùn quelconque des indicateurs LMI. Il faut souligner que, mme
quand les dispositions lgales de fond demeurent inchanges (par ex. le niveau des
salaires minima et des indemnits de chmage), il se peut malgr tout que leur effca-
cit soit rduite, car un plus grand nombre de travailleurs sont exclus de leur champ
dapplication. Une drglementation de facto sest produite dans beaucoup de pays avec
une augmentation du nombre de travailleurs atypiques et une plus grande segmentation
du march du travail; cela pourrait expliquer la constatation dàbsence de signifcation
pour les variables LMI dans le tableau A5. Il importe de souligner que les variables
LMI employes dans la prsente analyse ne sont pas nouvelles et ont t souvent utili-
ses dans des tudes empiriques (FMI, 2007; Commission europenne, 2007; OCDE,
2012b)
52
; comme dans le prsent rapport, les estimations produites dans des tudes
similaires ne sont pas statistiquement signifcatives.
Dans le tableau A4, le taux de syndicalisation a eu une incidence positive sur la part
du travail dans le revenu; làbsence de syndicalisation dans les conomies en dvelop-
pement signife que nous ne pouvons pas identifer cette variable dans les spcifcations
proposes dans le tableau A5. Pour dterminer si les rsultats du tableau A5 sont dus
la qualit mdiocre des donnes dans les conomies en dveloppement, une autre sp-
cifcation a t applique uniquement sur la base des 28 conomies de lÒCDE revenu
lev, en utilisant les sept variables LMI simultanment et en ajoutant la variable taux
de syndicalisation. Le coeffcient obtenu nà pas modif làrgument: les cinq variables
qui rendent compte de la force des LMI n`taient pas signifcatives et seul le taux de
syndicalisation avait un effet positif et signifcatif sur la dtermination de la part du
travail dans le revenu. Par consquent, il est clair que cèst la syndicalisation - et non les
rsultats produits par la syndicalisation - qui amortit la baisse des parts du travail dans
le revenu dans le contexte de la mondialisation et de la fnanciarisation.
Enfn, dàutres spcifcations ont t essayes en ajoutant des variables qui rendent
compte dventuels changements structurels comme le taux de chmage, la volatilit des
taux de change et les rformes fnancires
53
. Il a t constat que les augmentations du
chmage avaient de puissants effets ngatifs sur la part du travail, ce qui ne devrait pas
tre surprenant compte tenu des pressions la baisse sur les salaires et de laffaiblisse-
ment de la position de ngociation des travailleurs dans un contexte de hausse des taux
de chmage. De mme, une intensifcation du risque dans le commerce international
(exprim par la volatilit des taux de change) peut provoquer une baisse de la part du
travail: cette constatation est dans le droit fl de certaines tudes antrieures (par ex.,
Jayadev, 2007; IIES, 2011). Enfn, la libralisation des marchs fnanciers a pour effet de
faire pencher la distribution fonctionnelle du revenu en faveur du capital au dtriment
du travail. Quand lìndice du contrle du crdit labor par Abiad et coll. - qui mesure
la libralisation de la politique du crdit - est inclus dans le modle, cela a pour effet de
rduire la part du travail (Abiad, Detragiache et Tressel, 2008), une constatation qui est
cohrente par rapport aux prvisions dObstfeld et Rogoff (Obstfeld et Rogoff, 2009).
Des effets similaires (encore que dùne signifcation variable) sont constats quand la
spcifcation initiale inclut dàutres indices de rforme fnancire comme la politique du
crdit, la rgulation des taux dìntrt, les obstacles lèntre, les privatisations, les fux
internationaux de capitaux et les marchs boursiers.
Tableau A4 Facteurs qui inuent sur les parts du travail ajustes dans le revenu
Variable dpendante: parts du travail ajustes dans le revenu
Facteurs
Toutes les conomies
(28 OCDE, 3 non-OCDE
revenu lev,
27 mergentes,
13 en dveloppement)
conomies
industrialises
(28 OCDE)
conomies en
dveloppement (9)
Croissance du PIB rel 11,2** (2,97) 16,4** (3,2) 26,6** (13,0)
Mondialisation nancire
1
3,1** (0,59) 2,4** (0,7) 5,0 (3,6)
Ouverture des changes 6,2** (1,40) 5,9** (1,8) 5,9** (6,8)
Termes de lchange 4,2** (1,30) 4,5** (1,8)
Consommation publique (% du PIB) 0,4** (0,19) 0,9** (0,2) 0,8** (0,4)
Secteur industriel (% du PIB) 0,3** (0,07) 0,6** (0,2)
Secteur agroforestier (% du PIB) 0,1 (0,10) 0,07 (0,2)
Productivit du travail moyenne
1
2,4 (2,08) 23,7** (9,4)
Taux de syndicalisation 0,1* (0,06)
Ratio capital-travail
1
7,0* (3,7)
Services en capital (% du PIB)
1
1,4 (0,9)
Diagnostique
Nombre dobservations 1450 470 101
R-carr ajust 0,98 0,94 0,99
Statistique-D de Durbin-Watson 1,72 1,81 2,04
Note: tous les modles emploient une procdure destimation des effets xes sur les donnes recueillies partir du panel. La mondialisation
nancire mesure la somme de lactif externe et du passif externe divise par le PIB; louverture des changes mesure la somme des exportations
et des importations divise par le PIB; les termes de lchange mesurent la valeur unitaire des exportations par rapport la valeur unitaire des
importations; la productivit du travail moyenne mesure le PIB par travailleur converti en PPA prix constants; la consommation publique est
exprime en pourcentage du PIB; le secteur industriel mesure les valeurs ajoutes de tous les secteurs industriels en pourcentage du PIB; le secteur
agroforestier en pourcentage du PIB inclut la valeur ajoute par la foresterie, la chasse, la pche, les cultures et la production de btail; le taux de
syndicalisation mesure la proportion de la population active syndique; le ratio capital-travail mesure les services en capital totaux diviss par le
nombre de travailleurs; les services en capital mesurent linvestissement dans les technologies de linformation et de la communication divis par
la valeur ajoute brute. Les nombres entre parenthses sont des erreurs-types.
1
Ces variables sont introduites sous forme logarithmique. ** indique une signication au niveau de 5%; * indique une signication au niveau de 10%.
Source: Estimations du BIT (Stockhammer, paratre).
Tableau A5 Incidence des facteurs externes sur les parts du travail ajustes dans le revenu
Variable dpendante: parts du travail ajustes dans le revenu
Spcication initiale
augmente par chacun
des indicateurs du march
du travail (IMT) suivants
Toutes les conomies
(28 OCDE, 3non-OCDE
revenu lev,
27 mergentes,
13en dveloppement)
Nombre
dobservations
Nombre
de variables
R-carr
ajust
Statistique-D
de Durbin-Watson
Indice du salaire minimum 0,5 (1,7) 718 8 0,97 1,7
Indemnits de chmage,
taux de remplacement
2,5 (1,9) 1007 8 0,98 1,7
Indemnits de chmage,
couverture
0,5 (0,8) 878 8 0,98 1,7
Priode de pravis au bout
de 4 ans de service
1,2 (0,8) 1026 8 0,98 1,7
Indemnits de licenciement
au bout de 4 ans de service
0,1 (0,4) 1026 8 0,98 1,7
Taille de la main-duvre
1
5,0 (3,7) 1242 8 0,98 1,7
Taille de la population
1
9,7 (6,5) 1450 8 0,98 1,7
Note: tous les modles emploient une procdure destimation des effets xes sur les donnes recueillies partir du panel dsquilibr avec des
informations portant sur la priode allant de 1970 2007. Lindice du salaire minimum mesure le ratio entre le salaire minimum et le salaire
moyen (indice de Kaitz). Les nombres entre parenthses sont des erreurs-types.
1
Ces variables sont introduites sous forme logarithmique. ** indique une signication au niveau de 5%; * indique une signication au niveau de
10%.
Source: Estimations du BIT (Stockhammer, paratre).
Tableau A6 Description des pays inclus dans lestimation des tableaux A1 et A2 et de lencadr A1
Groupes Pays
Membres de lOCDE
revenu lev (28 pays)
Critre: revenu par tte de 12 276 dollars EU ou plus et membres de lOCDE
Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, Estonie, tats-Unis,
Finlande, France, Grce, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Japon, Luxembourg, Norvge,
Nouvelle-Zlande, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Royaume-Uni, Slovaquie, Sude, Suisse,
Rpublique tchque
Non-OCDE revenu lev
(31 pays)
Critre: revenu par tte de 12 276 dollars EU ou plus
Membres de lOCDE revenu lev rpertoris ci-dessus (28) et Hong-kong, Kowet et Oman
Revenu intermdiaire
suprieur (27 pays)
Critre: revenu par tte de 3 976-12 275 dollars EU
Afrique du Sud, Algrie, Argentine, Azerbadjan, Blarus, Botswana, Brsil, Bulgarie, Chili,
Chine, Colombie, Core du Sud, Costa Rica, Iran, Jordanie, Lettonie, Lituanie, Maurice, Mexique,
Namibie, Panama, Prou, Fdration de Russie, Thalande, Tunisie, Turquie, Venezuela
Revenu intermdiaire
infrieur (9 pays)
Critre: revenu par tte de 1 006-3 975 dollars EU
Armnie, Cte dIvoire, gypte, Inde, Rpublique de Moldova, Mongolie, Nigria, Philippines,
SriLanka
Faible revenu (4 pays) Critre: revenu par tte de 1 005 dollars EU ou moins
Kenya, Kirghizistan, Niger, Tanzanie
Source: estimations du BIT (Stockhammer, paratre).
Explication de la dcomposition des parts du travail dans le revenu la gure38
1. On suppose une spcifcation particulire qui relie un ensemble de covariables
la part des salaires WS observe pour 71 conomies i pour les annes 1970
2007. Ces variables sont la croissance du PIB R, la technologie TH, la mondiali-
sation G, la fnanciarisation F et les variables relatives consommation publique
GC et du taux de syndicalisation U:
ws
it
=
1
R
it
+
2
G
it
+ 3F
it
+
4
TH
it
+
5
GC
it
+
6
U
it
+ rsidu
it
+ f
i
o
i : pays, t : temps, f
i
: effets fxes
2. Le modle est excut pour obtenir les coeffcients de lèxpression 1. Ce fai-
sant, toutes les observations sont prises en compte comme si nous avions une
coupe transversale. Une fois que le modle est estim, nous pouvons interprter
lexpression 1 comme suit dans lexpression 2:
Suivant le tableau A1:
conomies dveloppes:
ws
it
= 16,4 R
it
(5,9 OPEN
it
+ 4,5 TOT) 2,4 F
it
7,0 TH
it
+ 0,9 GC
it
+ 0,1 U
it
+ e
it
o
OPEN: ouverture du commerce, TOT: termes de lchange
conomies en dveloppement:
ws
it
= 26,6 R
it
5,9 TOT 5,0 F
it
+ (0,6 IND
it
+ 23,7 LP
it
0,7 AG
it
) + 0,8 GC
it
+ e
it
O
IND: secteur industriel, LP: productivit du travail,
AG: production agricole
3. La dcomposition prsente la fgure 38 est fonde sur les spcifcations et les
coeffcients de lèxpression 2. Prenons par exemple les conomies dveloppes:
a) Choisissons deux priodes dans le temps: 1990-1994 et 2000-2004.
b) Pour chaque priode nous estimons la moyenne de chaque variable (G,
F, TH, GC et U) comme si la moyenne entre les pays mulait un pays
hypothtique quelconque. La variable croissance du PIB rel na pas
chang sur les deux priodes retenues de sorte que sa contribution la
dcomposition fnale est ngligeable (peut tre ignore).
(1)
(2)
c) Chacune des moyennes est pondre par le coeffcient correspondant
(estim) donn dans lexpression 2. Par exemple, F est mesur par le
logarithme de la somme de lactif externe et du passif externe: disons
que la moyenne de F pour toutes les conomies et pour la priode 1990-
1994 donne un total de 0,04 tandis que, pour la priode 2000-2004, la
moyenne est de 1,5. Ensuite, chacun de ces nombres est pondr par la
mme valeur de coeffcient de -2,4.
d) Si lòn prend les diffrences entre les deux valeurs pondres - cèst--
dire (1,5) (-2,4)(0,06) (-2,4) = -3,3 -, cela montre la contribution de la
variable fnanciarisation (ou fnanciarisation mondiale) la fgure 38.
e) Si lòn procde de la mme faon pour chacune des variables et quòn
ajoute le total, on obtient la diffrence prdite entre les priodes pour
la part des salaires. Elle est gale (approximativement) -7,1, ce qui
signife quèntre les priodes 1990-1994 et 2000-2004 la part des salaires
a diminu de 7,1 pour cent. Il en va de mme pour les conomies en
dveloppement dans le second ensemble de colonnes pour la fgure 38:
dans ce cas, lvolution moyenne de la part des salaires pour lconomie
hypothtique dans le monde en dveloppement est de -2 pour cent.
Appendice IV
Effet de la part du travail sur la demande globale
Encadr A2 Donnes, estimation et simulations
Nos simulations des effets de labaissement des parts du travail sur les lments constitutifs de
la demande globale sont fondes sur des estimations de llasticit qui supposent des quations
uniques pour expliquer (indpendamment) chaque item qui entre dans la composition de la demande
globale, savoir GC (consommation publique), C (consommation globale de marchandises et de ser-
vices des particuliers), I (investissement priv global) et NX (exportations nettes globales, cest--dire
la valeur des exportations diminue des importations). On part du principe que les parts du revenu
fonctionnel ont une incidence sur chaque lment constitutif dans lidentit qui explique le revenu
national Y ( savoir Y = GC + C + I + NX), mais les effets de rtroaction entre les lments constitutifs
ne sont pas pris en compte lorsquon expose les effets simuls naux. Cette simplication diminue
le problme de lutilisation dhypothses impossibles vrier dans un systme dquations; le fait
dviter de telles hypothses permet de donner une interprtation des rsultats claire. Le processus
destimation se dcompose en trois tapes:
tape 1: slection des pays, de la priode vise et des bases de donnes
16 conomies: zone euro (un noyau de 12 conomies revenu lev), Afrique du Sud,
Allemagne, Argentine, Australie, Canada, Chine, Rpublique de Core, tats-Unis, France,
Inde, Italie, Japon, Mexique, Royaume-Uni, Turquie.
Sries chronologiques: 1960-2007 pour les conomies dveloppes; 1970-2007 pour les
conomies en dveloppement; 1978-2007 pour la Chine. La priode de la crise est omise.
Variables dpendantes: consommation des mnages, investissement, exportations nettes.
Variables indpendantes (causales): indicateurs des parts du travail dans le revenu et des
parts des prots dans le revenu. La part du travail dans le revenu (ou part des salaires du
travail LWS) a t ajuste sous la mme forme que celle qui est dcrite ltape 2 de lap-
pendiceIII. Les parts du capital (ou des prots) dans le revenu dcoulent par construction
de LWS: CIS = 1 LWS. Les autres indicateurs comprennent la part de lindustrie IND, la
part de lagriculture AGR, les termes de lchange TOT, le PIB mondial wGDP, les prix des
importations P, les prix des exportations XP, les prix intrieurs P, le cot unitaire de main-
duvre ULC.
Bases de donnes et sources: BIT/IIES, WDI de la Banque mondiale, ONUDI; pour lArgen-
tine et lAfrique du Sud, Lindenboim, Kennedy et Graa (2011), et comptes nationaux des
Nations Unies; pour la Chine, Zhou, Xiao et Yao, (2010).
tape 2: spcication de la relation long terme entre les parts du travail dans le revenu et les
parts du capital dans le revenu et les variables dpendantes (C, I, NX):
Les spcications ci-aprs sont appliques chaque conomie sparment:
CONSOMMATION: C
t
= F [LWS
t
, CIS
t
, IND
t
, AGR
t
; e
t
]
INVESTISSEMENT: I
t
= F [CIS
t
, IND
t
, AGR
t
; e
t
]
EXPORTATIONS: M
t
= F [TOT
t
, wGDP
t
, MP
t
, P
t
, ULC
t
; e
t
]
IMPORTATIONS: X
t
= F [TOT
t
, wGDP
t
, XP
t
, P
t
, ULC
t
; e
t
]
Hypothses:
Approche fonde sur une quation unique
Relation long terme dans laquelle la LWS et la CIS sont exognes par rapport llment
constitutif de la demande globale.
tape 3: simulations
Effet dune diminution de 1pour cent de la LWS (augmentation de 1pour cent de la CIS) sur
C, I, NX:
Estimation de chacune des relations causales de ltape 2, laide dune transformation logarith-
mique pour toutes les variables, an de trouver les lasticits (coefcients) de chaque variable
incluse dans la spcication.
Application des lasticits aux identits qui expliquent chacun des items de la demande glo-
bale (C, I, NX) sous la forme de changements marginaux en ce qui concerne le revenu national.
On prend la moyenne de lvolution de la consommation, du revenu et des exportations nettes
comme moyenne de lvolution observe sur la priode (en termes rels).
Diminution simultane de 1pour cent de la LWS (augmentation de 1pour cent de la CIS) sur la
demande globale des mnages de chaque pays:
On suppose des conomies n o lconomie i est un partenaire commercial de toutes les autres
conomies j dans n. Leffet simultan dun changement de la LWS dans toutes les conomies n
pour une conomie i sur la demande globale AD dans un pays est exprim comme la somme des
4 lments constitutifs suivants:
Rsultats et interprtation
Notre stratgie destimation consiste utiliser un cadre dynamique sur les donnes
relatives aux sries chronologiques sur la priode 1960-2007 pour estimer les lasti-
cits des parts du travail dans le revenu pour 16 units conomiques, individuellement,
pour chaque conomie et pour chacun des trois items de la demande globale. Les las-
ticits mesurent la sensibilit de chacun des lments constitutifs de la demande glo-
bale aux changements de la part du travail dans le revenu. Linterprtation du revenu
Encadr A2 Donnes, estimation et simulations (suite)
97 Appendice IV Effet de la part du travail sur la demande globale
national du ct de la demande suppose lexistence dun quilibre stable sur le long
terme entre la demande globale et la part du travail dans le revenu. Dautre part, la
stratgie de modlisation suppose labsence deffets de rtroaction entre les diffrents
lments constitutifs de la demande globale (consommation, investissement et expor-
tations nettes) et un changement des parts du travail dans le revenu. Cette simplifca-
tion a un prix, savoir dventuelles imprcisions dans lestimation des lasticits. En
revanche, le fait destimer des quations uniques pour chaque conomie offre lavan-
tage d`viter dàvoir concevoir des hypothses dìdentifcation invrifables qui com-
pliquent encore lìnterprtation des rsultats des fns de formulation de conseils sur
les politiques mener
54
. Il importe de souligner la dualit de la procdure destimation:
une lasticit qui mesure lincidence dun changement affectant tel ou tel item donn
(disons, linvestissement) pour une diminution (augmentation) de 1 pour cent de la part
du travail dans le revenu est quivalente la mesure du changement affectant ce mme
item pour une diminution (augmentation) de 1 pour cent de la part du capital (cest--
dire des profts) dans le revenu. On a fait abstraction de la consommation publique car,
par dfnition, elle quivaut la part de lèmploi public dans le revenu. cet gard, les
parts des salaires dans les estimations empiriques qui suivent ont t ajustes comme
indiqu plus haut.
Les lasticits estimes sont utilises dans lanalyse empirique sous deux formes
diffrentes. Premirement, elles sont utilises pour simuler l`volution de la consom-
mation, de linvestissement et des exportations nettes (par rapport au PIB) cause par
une baisse de 1 pour cent de la part du travail dans le revenu; cela est fait tout simple-
ment en multipliant les lasticits estimes par la valeur moyenne observe des items
correspondants dans la demande globale pondrs par le facteur prix. Deuximement,
les lasticits estimes sont utilises dans un cadre plus gnral pour simuler lvolu-
tion de la demande globale pour telle ou telle conomie donne (parmi les 16 units
conomiques) si les 15 autres units conomiques ont toutes enregistr une baisse
simultane de 1 pour cent de la part du travail dans le revenu: leffet de rtroaction est
simul en supposant que la baisse de la part du travail dans le revenu dans chaque pays
a un impact mesurable sur ses exportations nettes.
La fgure A1 montre les rsultats de la simulation de lìncidence dùne baisse de
1 pour cent des parts du travail dans le revenu sur chacun des lments constitutifs de la
demande globale. Compare linvestissement et aux exportations nettes, la rponse de
la consommation prive de produits nationaux est ngative et substantielle dans toutes
les units conomiques: dans ce cas, il est impossible dtablir une distinction entre les
conomies dveloppes et les conomies en dveloppement car elles semblent toutes
subir des pertes dàmpleur similaire. lèxception de lÀfrique du Sud, de lÀrgentine
et de lÀustralie, tous les pays et la zone euro prise dans son ensemble enregistreraient
une baisse de la consommation de 0,3 pour cent ou plus. Dans le cas des conomies
dont la population est importante et qui, par consquent, ont un vaste march intrieur
(zone euro, Allemagne, Chine, tats-Unis, Mexique, Turquie), la baisse de la consom-
mation est plus forte, se situant dans une fourchette de 0,4 0,5 pour cent.
Tandis que la consommation baisse, linvestissement est affect positivement par
une diminution de la part du travail dans le revenu dans toutes les units conomiques
sauf six, et dans ces dernires lèffet, sans tre gal zro, est ngligeable: il sàgit de
lÀrgentine, de la Chine, des tats-Unis, de lÌnde, de la Rpublique de Core et de la
Turquie. Lune des raisons possibles pour lesquelles linvestissement nest pas sensible
une diminution de la part du travail dans le revenu (cest--dire une augmentation
des parts des profts dans le revenu) dans les conomies mergentes est làbsence de
corrlation entre les bnfces des entreprises et lìnvestissement global, parce que,
dans ces pays, les politiques industrielles publiques et linvestissement public sont
les moteurs du dveloppement des infrastructures et de lìndustrie. Ainsi, pour la plu-
part des conomies mergentes, les taux dinvestissement levs sinscrivent dans
le cadre des initiatives prises par les autorits pour crer un environnement optimal
pour les entreprises - en vue de rattraper leur retard sur le march mondial - tandis
que les parts des profts des entreprises prives sur le court terme nònt que des effets
peu importants sur les taux dìnvestissement (Akyz, Chang et Kozul-Wright, 1998).
Les tats-Unis sont la seule conomie avance o une augmentation de la part des
profts fait apparatre une incidence nulle sur lìnvestissement: dans une tude ant-
rieure dÒnaran, Stockhammer et Graf (2011), il a t constat que lìnclusion des
versements dìntrts et de dividendes dans la dfnition de lìnvestissement pour les
tats-Unis avait des effets de confusion qui rendaient impossible de dceler la signi-
fcation dùne augmentation de la part du capital dans le revenu (une diminution de
la part du travail dans le revenu) pour linvestissement. Il se pourrait que le mme
phnomne se produise dans la prsente srie dèstimations
55
. Pour toutes les autres
conomies dveloppes, lincidence dune baisse de 1 pour cent de la part du travail
dans le revenu (cest--dire une augmentation de 1 pour cent de la part du capital dans
le revenu) est daccrotre linvestissement de 0,1 pour cent ou plus. Cest dans la zone
euro (0,3 pour cent), en Allemagne (0,38 pour cent) et au Japon (0,29 pour cent) que
leffet est le plus marqu.
Dans le cas des exportations nettes, la fgure A1 c) montre quùne diminution de
1 pour cent de la part du travail dans le revenu induit une augmentation des exporta-
tions nettes dans tous les pays. Il importe de noter que, dans le cas des exportations
nettes, lampleur est estime laide dun composite dlasticits qui dpend des prix
relatifs des exportations et des importations, du degr douverture de lconomie et de
llasticit-prix sur le march intrieur
56
. Les effets sont plus importants pour les pays
en dveloppement comme lÀfrique du Sud et le Mexique et, comme on pouvait s`y
attendre, sont extraordinairement levs en Chine, car il sagit de lconomie tire par
les exportations la plus agressive sur le march mondial. Il est instructif de souligner
que lestimation dune augmentation de 2 pour cent des exportations nettes sagissant
de la Chine (sur la base dune diminution de 1 pour cent de la part du travail dans le
revenu) se dcompose en une augmentation de 1,1 pour cent de la part des exportations
(dans le PIB) et une baisse de 0,9 pour cent de la part des importations (dans le PIB).
Ces effets marqus sont lis plusieurs facteurs qui caractrisent le march du travail
chinois. Premirement, l`lasticit des prix par rapport aux cots unitaires de main-
dòuvre est la plus leve au monde, ce qui indique une structure dèxportation trs
forte intensit de main-dòuvre avec de fortes marges bnfciaires. Deuximement,
llasticit des exportations par rapport aux prix relatifs est l encore la plus leve
au monde, ce qui refte le caractre trs lastique de la demande par rapport aux
prix sagissant des exportations chinoises, qui sappuient fortement sur des biens de
consommation comme les textiles. Enfn, l`lasticit des importations par rapport aux
prix relatifs est la deuxime au monde par ordre dìmportance aprs lÀfrique du Sud.
99 Appendice IV Effet de la part du travail sur la demande globale
Ce dernier point pourrait expliquer aussi pourquoi lÀfrique du Sud est le deuxime
pays par ordre dìmportance parmi les 16 units conomiques pour ce qui est de lìnci-
dence dune diminution de 1 pour cent de la part du travail dans le revenu sur les expor-
tations nettes (fgure A1 sous c).
On pourrait tre tent dadditionner tous les effets indpendants pour chacune des
units conomiques pour illustrer lincidence globale dune diminution de 1 pour cent
des parts du travail dans le revenu sur la demande globale des mnages. Ce serait
trompeur, car la fgure A1 et les estimations sur lesquelles elle repose ne tiennent pas
compte des effets de rtroaction qui existent entre la consommation, linvestissement
et les exportations nettes. Nanmoins, les estimations prsentes dans la fgure A1 sont
instructives: pour la plupart des conomies considres, il est probable que labaisse-
ment de la part du travail dans le revenu - disons, en abaissant les salaires au-dessous
de la productivit moyenne pour gagner de la comptitivit - aura un effet ngatif sur
la consommation intrieure (les marchandises et les services faisant lobjet dchanges
sur le march intrieur) tel quil faudrait une rponse massive sous la forme dinves-
tissements intrieurs et dexportations nettes pour compenser limpact ngatif sur la
demande globale. Ces conclusions sont conformes celles de Felipe et Kumar, qui
constatent que la rduction des cots unitaires de main-duvre (la diminution de
la part du travail dans le revenu) est prjudiciable pour les conomies qui nont pas
de niche pour leur panier dexportations sur le march mondial: il ny a aucun avan-
tage retirer dune rduction des cots unitaires de main-duvre lorsquon est en
concurrence avec la Chine pour placer un panier dexportations similaire dans lco-
nomie mondiale, car cette rduction des cots unitaires de main-duvre aggravera
tout simplement la rcession qui frappe le pays du fait de leffet dfavorable sur la
consommation (rduisant la demande effective) et linvestissement (aggravant le retard
technologique) (Felipe et Kumar, 2011).
Figure A1 Effet dune diminution de 1% de la part du travail dans le revenu
surlaconsommationprive de produits et de services nationaux,
linvestissement et les exportations nettes: a)consommation prive
de produits et de services; b)investissement; c)exportations nettes
Consommation des mnages Investissement Exportations nettes
Zone euro-12

(0,439)

(0,299)

(0,057)
Afrique du Sud

(0,145)

(0,129)

(0,506)
Allemagne

(0,501)

(0,376)

(0,096)
Argentine

(0,153)

(0,015)

(0,192)
Australie

(0,256)

(0,174)

(0,272)
Canada

(0,326)

(0,182)

(0,266)
Chine

(0,412)

(0,000)

(1,986)
Core, Rp. de

(0,422)

(0,000)

(0,359)
E.U.

(0,426)

(0,000)

(0,037)
France

(0,305)

(0,088)

(0,198)
Inde

(0,291)

(0,000)

(0,310)
Italie

(0,356)

(0,130)

(0,126)
Japon

(0,353)

(0,284)

(0,055)
Mexique

(0,438)

(0,153)

(0,381)
R.-U.

(0,303)

(0,120)

(0,037)
Turquie

(0,491)

(0,000)

(0,283)
Note: les valeurs entre parenthse montrent le pourcentage de changement pour les lments suivants: pourcentage de changement de la demande
de consommation prive de biens et services; pourcentage de changement dans les biens dinvestissement; pourcentage de changement de la
valeur des exportations moins la valeur des importations (exportations nettes).
Source: Onaran et Galanis, paratre.
Notes
Partie I Grandes tendances des salaires
1 Pour les taux de chmage des diffrents pays, voir BIT, 2011c.
2 Les salaris rmunrs excluent les travailleurs indpendants, les travailleurs
familiaux collaborant lentreprise familiale, les membres des coopratives de tra-
vailleurs et les travailleurs inclassables dàprs leur situation dans lèmploi. Les
salaires sont dfnis dans làppendice I.
3 Voir BIT, 2012b. Une autre mesure des salaires possible aurait t le salaire horaire,
mais les donnes ne sont disponibles que pour un nombre limit de pays dont les
systmes statistiques sont plus avancs.
4 Les estimations qui incluent la Chine peuvent gonfer quelque peu la croissance
salariale mondiale, tant donn que la seule srie salariale qui couvre toute la
priode allant de 2006 2012 ne se rapporte quàux units urbaines, qui dans
la pratique couvrent principalement les entreprises dtat, les units en proprit
collective et les autres types de socits lies ltat. Une nouvelle srie publie
dans lÀnnuaire statistique de la Chine fournit aujourd`hui des estimations spa-
res des salaires annuels verss aux salaris des units prives urbaines, mais
cette srie ne commence quen 2009 et il ny a aucune srie couvrant lensemble
des salaris.
5 Les programmes de partage du travail sont aussi appels travail de courte dure
ou encore chmage partiel ou technique (voir Messenger, 2009).
6 Des programmes de partage du travail ont t mis en uvre dans les pays suivants:
Afrique du Sud, Allemagne, Argentine, Autriche, Belgique, Bulgarie, Canada,
Chili, Croatie, France, Hongrie, Mexique, Pays-Bas, Pologne, Roumanie, Serbie
(au niveau des entreprises uniquement), Slovaquie, Slovnie, Suisse, Rpublique
tchque, Turquie et Uruguay; des petits programmes ont t mis en ouvre dans
un certain nombre dtats aux tats-Unis (voir BIT, 2011a). Pour de plus amples
renseignements concernant les mesures de partage du travail dans les pays revenu
intermdiaire, voir aussi Messenger et Rodrguez, 2010).
7 Les estimations prliminaires, bases sur les donnes trimestrielles prliminaires
de 30 conomies dveloppes slectionnes pour lesquelles les donnes sont dis-
ponibles, suggrent que le salaire moyen rel augmentera probablement dènviron
0 pour cent dans les conomies dveloppes en 2012.
8 La fgure 9 confrme aussi que la hausse de lìnfation en 2008 n`tait pas provoque
par les revendications de hausse des salaires nominaux, car ceux-ci ont continu
crotre au mme rythme quèn 2007 (voire un peu plus lentement). Au contraire:
les hausses des prix ont t rpercutes sur les travailleurs, qui de ce fait ont reu
des salaires rels infrieurs. La fgure donne aussi penser que la croissance des
salaires positive en 2009 a empch une dfation des prix plus complte en 2009.
9 Il existe plusieurs manires diffrentes de mesurer la productivit du travail, mais
elles dfnissent toutes la production conomique par rapport au facteur travail (voir
OCDE, 2001). Conformment aux objectifs du Millnaire pour le dveloppement
des Nations Unies, nous utilisons dans le prsent rapport le PIB par personne sala-
rie comme mesure simple de la productivit du travail. Certaines mthodes plus
fnes qui tiennent compte des heures travailles sont souvent utiles pour les tudes
portant sur un seul pays (voir par exemple les chiffres de la productivit du travail
publis par le Bureau of Labor Statistics des tats-Unis en suivant le lien http://
www.bls.gov/lpc/ [consult le 17 sept. 2012]), mais notre mesure simple convient
mieux aux tudes telles que le Rapport mondial sur les salaires qui couvrent un
grand nombre de pays, parmi lesquels nombreux sont ceux qui nont pas de donnes
fables sur les heures travailles.
10 Pour les tendances en Ukraine entre 1992 et 2002, voir Ganguli et Terrell, 2006;
pour les tendances plus rcentes, voir BIT, 2011d.
11 La proportion des individus disponibles pour travailler plein temps mais tra-
vaillant moins d`heures a fortement augment, passant de 4,4 pour cent en 2007
10,6 pour cent en 2008 et 19,4 pour cent en 2009, avant de baisser de nouveau
12,3 pour cent au premier semestre de 2010.
12 LÀrgentine a identif des incohrences dans ses donnes sur les salaires qui nònt
pu tre rsolues avant la publication de ce rapport, raison pour laquelle la dcision
a t prise de ne pas les publier dans le cadre du prsent rapport.
13 Les membres du CCG sont lÀrabie saoudite, le Bahren, les mirats arabes unis,
le Kowet, Oman et le Qatar.
14 La Dclaration de lOIT sur la justice sociale pour une mondialisation quitable
(2008) met en vidence, dans le cadre de son Agenda du travail dcent, la promo-
tion de la possibilit pour tous dùne participation quitable aux fruits du progrs
en matire de salaires et de gains, de dure du travail et autres conditions de tra-
vail, et un salaire minimum vital pour tous ceux qui ont un emploi et ont besoin
dùne telle protection (BIT, 2008b, p. 10). Le Pacte mondial pour lèmploi de 2009
encourageait aussi les gouvernements envisager des options, telles quun salaire
minimum, qui puissent rduire la pauvret et les ingalits, accrotre la demande et
contribuer la stabilit politique (BIT, 2009, p. 12).
15 Voir la convention (n
o
131) sur la fxation des salaires minima, 1970.
16 De 877 euros par mois (soit 751 euros payables sur quatorze mois) 684 euros par
mois.
17 Au dbut de 2010, lÒIT et la Banque mondiale ont procd une enqute conjointe
sur les mesures prises pour faire face la crise dans 77 pays sur une priode de deux
ans (de la moiti de 2008 la fn de 2010). La base de donnes et le rapport conjoint
produits peuvent tre consults http://www.BIT.org/crisis-inventory [consults le
17 sept. 2012]. Le salaire minimum tait lùn des 62 outils de politique viss par
103 Notes
lenqute. Plusieurs explications ont t avances au sujet de cette variation entre les
pays, y compris le cadre institutionnel du salaire minimum qui facilite - et parfois
rend obligatoire - làjustement de son niveau (Bonnet, Saget et Weber, 2012).
18 Le seuil de pauvret international de 1,25 dollar EU correspond au seuil de pau-
vret national moyen de 15 pays parmi les moins avancs (PMA), tandis que le seuil
de pauvret international de 2 dollars EU correspond au seuil de pauvret mdian
de 75 conomies en dveloppement. Les seuils de pauvret nationaux sont fonds
sur le cot estim dun panier de produits de consommation de base, qui sont habi-
tuellement dfnis au regard dèxigences minimales en matire de nutrition. Voir
Ravallion, Chen et Sangraula, 2008.
Partie II Baisse de la part du travail et croissance quitable
19 En font partie les deux ditions antrieures du Rapport mondial sur les salaires
(BIT, 2008a, 2010a); et Commission europenne, 2007; FMI, 2007; Banque mon-
diale, 2011; OCDE, 2012a; CNUCED, 2011 et 2012; et IIES, 2011, 2012, pour nèn
mentionner que quelques-unes. Dans les tudes de cas qui portent sur leffet de la
part des salaires sur les composantes macroconomiques globales, les tudes comme
celles de la CNUCED (2011) montrent quune grande partie des travaux de recherche
sur ce sujet jusquici ont pris la forme de corrlations descriptives par opposition aux
estimations du cadre causal empirique que nous prsentons dans le rapport.
20 Ces constatations empiriques remontent au dbut du vingtime sicle, quand Arthur
Bowley a t le premier observer cette rgularit en se fondant sur des donnes
britanniques tires des dix-neuvime et vingtime sicles et a formul la loi de
Bowley. Paul Douglas a fait une constatation similaire concernant la part du tra-
vail aux tats-Unis, et a labor, avec le mathmaticien Charles Cobb, la fameuse
fonction de production Cobb-Douglas, qui simplife la modlisation conomique
en partant du principe que la distribution fonctionnelle du revenu entre le travail et
le capital demeure toujours constante (voir Mankiw, 2003). Keynes a qualif cette
constance empirique de quelque peu miraculeuse (Keynes, 1939) et, plus tard,
Solow a contest la fabilit de cette preuve empirique (Solow, 1958) (voir La Marca
et Lee, paratre).
21 Schmatiquement, la part du travail (non ajuste) dans le revenu est gale la rmu-
nration totale des salaris divise par le PIB, tandis que la part du travail ajuste
dans le revenu est fonde sur l`hypothse selon laquelle les travailleurs indpen-
dants ont une rmunration semblable celle des salaris et ajoute cet lment
la rmunration totale du travail. Lutilisation de cette mthode dajustement stan-
dard prsente des avantages et des inconvnients. Dune part, la ralit du travail
indpendant est diffrente dans les deux types dconomies: dans les conomies
avances, les travailleurs indpendants sont plus susceptibles dtre dans le secteur
formel et leurs rmunrations seront probablement suprieures celles des salaris
dans le mme cas, et cest pourquoi la part du travail ajuste sous-estime proba-
blement la vritable part du travail. lòppos, dans les conomies moins dve-
loppes, les travailleurs indpendants sont plus susceptibles dtre des travailleurs
vulnrables dont les rmunrations sont infrieures celles de leurs homologues
du secteur formel. Mais, en mme temps, si lòn nàjuste pas la part du travail pour
tenir compte des travailleurs indpendants, on sous-estime beaucoup la part relle
du PIB qui va aux travailleurs sous la forme dun revenu li lemploi. De plus,
les tendances (lòbjet principal de notre analyse) ne changent pas signifcativement
quand des ajustements diffrents sont appliqus (voir BIT, 2010a). Lutilisation de
la part du travail ajuste permet aussi dàvoir un point de repre cohrent avec la
plupart des autres tudes.
22 La base de donnes sur les trs hauts revenus dans le monde peut tre consulte
en ligne sur le site de lcole dconomie de Paris http://g-mond.parisschoolof
economics.eu/topincomes/.
23 Les bnfces non distribus sont dfnis ici comme tant lèxcdent dèxploitation
brut moins les dividendes verss.
24 Offce fdral des statistiques, Comptabilit nationale: produit intrieur, rsultats
trimestriels, Fachserie 18, srie 1.2, tableau 1.11.
25 Un rapport de la Commission europenne a conclu que, pour la priode pour
laquelle les donnes sont disponibles (cèst--dire du milieu des annes 1980 au
dbut des annes 2000), les rsultats de lestimation indiquent clairement que le
progrs technologique a t le facteur qui a le plus fortement contribu la baisse de
la part globale du travail dans le revenu (Commission europenne, 2007, p. 260).
Cependant, les lments dinformation sont assez limits en ce qui concerne les
pays en dveloppement.
26 Pour une description des sources des donnes, voir Stockhammer, paratre.
27 Dans un entretien accord au Financial Times en 2007, Alan Greenspan, ancien
prsident de la Federal Reserve Bank, a apparemment considr que la baisse de la
part du travail et lcart entre la croissance des salaires et celle de la productivit
aux tats-Unis pourraient roder le soutien politique en faveur de la libert des
marchs: voir Guha, 2007.
28 La demande globale, comme on la relev plus haut, est la somme de la consom-
mation, de linvestissement, des exportations nettes et des dpenses publiques. La
consommation publique a t exclue de lànalyse parce que, par dfnition, elle est
identique la part de lemploi public dans le revenu.
29 Tous les rsultats conomtriques spcifques qui sous-tendent le tableau fgurent
dans Onaran et Galanis, paratre.
30 Voir, par ex., FMI, 2012c. Il convient de noter que le concept de cots unitaires de
main-duvre comme mesure de la comptitivit par les cots nest pas sans sus-
citer des critiques. Felipe et Kumar considrent que, par exemple, lorsque les cots
unitaires de main-dòuvre augmentent, par dfnition les cots unitaires du capital
doivent baisser, et cest pourquoi lincidence sur la comptitivit extrieure nest pas
claire (Felipe et Kumar, 2011).
31 Parmi les conomies avances, il ny a quaux tats-Unis que lincidence dune
augmentation de la part des bnfces sur lìnvestissement est nulle. Dans une tude
antrieure ralise par Onaran, Stockhammer et Graf (2011), il a t constat que
105 Notes
lìnclusion des versements dìntrts et de dividendes dans la dfnition de lìnves-
tissement sagissant des tats-Unis avait des effets aggravants qui empchaient de
dterminer limportance dune augmentation de la part du capital dans le revenu
(dune baisse de la part du travail dans le revenu) pour linvestissement. Il se peut
que le mme phnomne se produise dans la prsente srie dèstimations. Voir aussi
Hein et Vogel, 2008, qui ne constatent pas dèffets du revenu du capital sur lìnves-
tissement aux tats-Unis, ce qui va dans le sens des constatations fgurant dans le
prsent rapport.
32 Une question qui se poserait dans un tel cas de fgure serait de savoir comment la
croissance conomique progressive qui pourrait rsulter dune baisse de la part du
travail dans le revenu serait distribue parmi la population. Mais cette question
dborde du cadre du prsent rapport. En ce qui concerne limportance dintroduire
dans le dbat lìncidence microconomique de la modifcation de la distribution
fonctionnelle du revenu, voir Atkinson, 2009.
33 Plusieurs tudes de cas ont examin ce phnomne, notamment en ce qui concerne
les tats-Unis. Voir en particulier Barba et Pivetti, 2009; Cynamon et Fazzari, 2008;
Guttmann et Plihon, 2010; van Treeck, Hein et Dnhaupt, 2007; et van Treeck,
2009. Des tudes conomtriques ont montr que la richesse (fnancire et immo-
bilire) tait un dterminant statistiquement signifcatif de la consommation, et pas
seulement aux tats-Unis. Voir Ludvigson et Steindel, 1999; Mehra, 2001; Onaran,
Stockhammer et Graf, 2011; Boone et Girouard, 2002; Dreger et Slacalek, 2007.
Appendice I
34 Le BIT a command un rapport tabli par Farhad Mehran, Estimation of global
wage trends: Methodological issues, Bureau international du Travail, poly-
copi; examens collgiaux faits par le professeur Yves Till, Expertise report on
the Estimation of global wage trends: Methodological issues, Institut de sta-
tistique, Universit de Neuchtel, polycopi; le professeur Yujin Jeong et le pro-
fesseur Joseph L. Gastwirth, Comments on the draft BIT report Estimation of
global wage trends: Methodological issues, HEC Montral et George Washington
University, Washington, DC, polycopi; M. Joyup Ahn, Responses to draft BIT
report Estimation of global wage trends: Methodological issues, Korea Labor
Institute, polycopi.
35 Rsolution de lÒIT concernant la Classifcation internationale dàprs la situation
dans la profession (CISP), adopte par la quinzime Confrence internationale des
statisticiens du travail (Genve, janvier 1993).
36 Rsolution de lOIT concernant la mesure du revenu li lemploi, adopte par la
seizime Confrence internationale des statisticiens du travail (Genve, octobre 1998).
http://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---dgreports/---stat/documents/normative
instrument/wcms_087491.pdf.
37 Viser la couverture la plus large possible est conforme lide que le travail dcent
et donc la rmunration adquate constituent une proccupation de tous les travail-
leurs, et que les indicateurs statistiques devraient couvrir tous ceux pour lesquels un
indicateur est pertinent. Voir BIT, 2008c.
38 Nous procdons ainsi sur la base de lindice des prix la consommation (IPC) du
FMI pour le pays considr. Dans le cas du Brsil et des tats-Unis, o nos homo-
logues de ces pays ont recommand dutiliser un autre IPC, nous nous sommes
appuys sur les sources nationales de lÌnstituto Brasiliero de Geografa e Estatistica
(IBGE) et du Bureau of Labor Statistics (BLS), respectivement. Nous utilisons aussi
lÌPC national ou les valeurs des salaires rels dans les cas o lòffce national de
statistique dun pays nous communique directement les donnes.
39 Notre univers inclut tous les pays et territoires pour lesquels des donnes sur lem-
ploi sont disponibles partir des Tendances mondiales de lèmploi du BIT (Modle
GET) et exclut donc certains petits pays et territoires (par exemple, les les anglo-
normandes ou le Saint-Sige) qui nònt pas dìncidence perceptible sur les tendances
mondiales ou rgionales.
40 Cela est conforme la mthodologie classique pour les enqutes, dans laquelle un
cadre fond sur le modle est gnralement utilis pour la non-rponse lìtem, tandis
quun cadre fond sur lobjectif est utilis pour la non-rponse au questionnaire.
41 Pour une discussion du problme des donnes manquantes, voir aussi: BIT, 2010c,
p. 8.
42 Une autre spcifcation avec le PIB par tte et la taille de la population a produit des
rsultats trs similaires.
43 Les donnes relatives au nombre de personnes employes et au nombre de salaris
sont tires des ICMT, et les donnes sur le PIB en dollars EU PPA de 2005 sont
tires des Indicateurs du dveloppement dans le monde de la Banque mondiale.
44 Lestimation ` n
h
du nombre de salaris dans la rgion h est obtenue en multipliant le
nombre de salaris des pays de la rgion pour lesquels nous avons des donnes sur
les salaires par les pondrants non calibrs, puis en additionnant les chiffres pour
lensemble de la rgion.
45 Voir, par exemple, les travaux raliss principalement en ce qui concerne les pays
industrialiss par le programme International Labor Comparisons du Bureau of
Labor Statistics des tats-Unis (2009) (http://www.bls.gov/fs/). Comme nous ne
comparons pas des niveaux, mais que nous nous proccupons de lvolution dans le
temps des pays pris individuellement, les besoins en termes de donnes sont moins
exigeants dans notre contexte.
46 Nous estimons le nombre de salaris en 2009 (donne qui ne fgure pas encore dans
les ICMT) en calculant le ratio des salaris par rapport lèmploi en 2008, puis en
multipliant lemploi total en 2009 par ce ratio. La principale source de donnes pour
les ICMT est Laborsta.
47 Voir aussi BIT (2008a, p. 15) en ce qui concerne làssociation entre les niveaux des
salaires et le PIB par tte. Nonobstant ces considrations, lvolution des salaires
peut diverger par rapport aux tendances de la productivit du travail sur le court et
le moyen terme.
107 Notes
Appendice II
48 Glossaire des termes statistiques de lOCDE, http://www.oecd.org/statistics/stats.
OCDE.org/glossary/ [consult le 17 sept. 2012].
Appendice III
49 Lìndicateur consommation publique en tant quìndicateur du systme de protection
sociale donne penser que le dveloppement dans le temps est en forme de bosse:
les dpenses publiques en part du PIB ont connu leur apoge au dbut des annes
1980 et sont en baisse depuis. Le rle des dpenses publiques et la gnrosit des
dpenses de protection sociale ont dj t souligns dans la littrature, laccent
tant mis sur les effets de ces dernires sur le salaire dàcceptation de la population
en ge de travailler; voir Pierson, 1994; Korpi et Palme, 2003. Soit dit en passant,
une diminution du niveau des dpenses de protection sociale sest produite depuis
les annes 1980, soit prcisment le moment o a commenc la tendance baissire
de la part des salaires. Pour des tudes qui incluent la consommation publique en
part du PIB pour expliquer la baisse de la part des salaires, voir Harrison, 2002;
Jayadev, 2007.
50 Les rapports Commission europenne, 2007, et FMI, 2007, constatent des effets
tonnamment faibles, si tant est quìl y en ait, du taux de syndicalisation. Le FMI
inclut le taux de syndicalisation et la charge fscale aprs avoir constat làbsence
dèffet des autres variables LMI.
51 Lvolution technologique a aussi t estime approximativement par les ratios
capital-travail et TIC-capital ou par des combinaisons de ces ratios dans Bentolila
et Saint-Paul, 2003, et Commission europenne, 2007. Lùtilisation du ratio TIC-
capital (ou TIC-services) est un indicateur indirect de lvolution technologique
moins ambigu, car il refte l`volution technologique mise en ouvre indpendam-
ment des motifs de sa mise en uvre.
52 En particulier, ces tudes montrent le caractre signifcatif des dpenses publiques
et du systme de protection sociale pour dterminer le salaire dàcceptation des par-
ticipants, cest--dire le niveau auquel les individus sont disposs pntrer sur le
march du travail. Une augmentation de la gnrosit des prestations (le systme de
protection sociale) fait monter le salaire dacceptation (effet sur le revenu au moyen
de mesures dissuasives sur le march du travail) et fait donc pencher la distribution
des salaires vers la droite, provoquant une hausse des salaires pour tous: cela pro-
voque, tous les autres lments tant maintenus constants, une augmentation de la
part du travail dans le revenu.
53 Le chmage est exprim par le taux de chmage dans lconomie, et la volatilit des
taux de change est une fonction de la variance du taux de change rel. Les rformes
fnancires sont fondes sur une variable qui mesure les obstacles lèntre, les
fux internationaux de capitaux, la rgulation des taux dìntrt, les privatisations,
le dveloppement des marchs boursiers et un indice des rformes fnancires. Pour
plus de dtails sur toute une srie de spcifcations lies la spcifcation initiale,
voir Stockhammer, paratre.
Appendice IV
54 Des quations uniques dans un cadre similaire concernant la demande globale
ont t trs souvent utilises dans la littrature: voir par ex. Onaran, 2011; Hein
et Vogel, 2008; Naastepad et Storm, 2007. Une autre approche que celle fonde
sur des quations uniques consiste estimer les lasticits par un systme dàuto-
rgression vectorielle (VAR) o les limitations de lìdentifcation correspondantes
sont souvent des hypothses arbitraires concernant la relation entre la consomma-
tion, lìnvestissement et les exportations nettes. Lùtilisation dùn systme VAR a
un avantage: elle permet de prendre en compte lendognit de la part du travail
dans le revenu. Dans le systme fond sur des quations uniques, l`hypothse dùne
relation de longue dure aide surmonter le problme de lèndognit; cèst--dire
que le modle suppose une relation d`quilibre long terme dans un cadre causal.
55 Voir aussi Hein et Vogel, 2008: ils ne constatent pas dèffets des parts des profts sur
linvestissement aux tats-Unis, ce qui est cohrent par rapport aux constatations
fgurant dans le prsent rapport.
56 Pour plus de dtails, voir Onaran et Galanis, paratre 2012.
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O
Le Rapport mondial sur les salaires arrive un moment trs opportun. La vague dagitation qui
a balay les pays industrialiss et qui a atteint son paroxysme dans les pays du Printemps arabe
est enracine dans la baisse des salaires et laugmentation de lingalit. Les politiques salariales
visant stimuler la croissance et augmenter la productivit sont bnques aussi bien au travail
quau capital. Le BIT est particulirement bien plac pour formuler des propositions innovatrices
en matire de politiques conomiques et sociales.
Samir Radwan, ancien ministre des Finances, Egypte
Jai lu le Rapport mondial sur les salaires avec grand intrt et avec beaucoup dadmiration. Le
BIT semble lavoir parfaitement russi, notamment en ce qui concerne la longueur et lquilibre
entre le contenu technique et non technique. Lanalyse des tendances est particulirement
intressante en raison de leffort concluant de couvrir un grand nombre de rgions et de pays.
Adrian Wood, professeur de Dveloppement international, Universit dOxford
Le Rapport mondial sur les salaires analyse les salaires rels moyens dans le monde, et donne une
image unique des tendances salariales et du pouvoir dachat relatif dans le monde et par rgion.
Ldition 2012/13 examine les effets macroconomiques des salaires, et notamment le lien entre
les tendances actuelles et une croissance quitable. Lcart entre la croissance des salaires et
celle de la productivit du travail se creuse, les diffrences entre ceux qui gagnent le plus et ceux
qui gagnent le moins augmentent, et la part des revenus du travail dcline. Ces modications
proccupantes ont une incidence sur des lments cls de la demande globale la consommation,
linvestissement et les exportations nettes notamment ncessaires la reprise et la croissance.
Le rapport analyse les raisons sous-jacentes ces tendances, qui vont du renforcement de la
mondialisation nancire et commerciale aux avances technologiques et au dclin du taux de
syndicalisation.

Ce rapport appelle un rquilibrage interne et externe, pour aboutir des rsultats socialement
et conomiquement plus durables au sein des pays, et dun pays lautre, en proposant des
actions qui dpassent les marchs du travail et les frontires nationales.

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Rapport mondial sur les salaires 2012 / 13

Salaires et croissance quitable

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