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ACTES DE LA 7ème ASSEMBLÉE EUROPÉENNE DES FRATERNITÉS LAÏQUES DOMINICAINES

ANNEXE Vb

HOMÉLIE DU FR. EUGENIO BOLEO

FÊTE DE LA VISITATION

Nous venons d’écouter le récit de la visite de Marie à Elisabeth.


Pour bien discerner la valeur de cette visite pour notre foi, il convient de nous rappeler
l’autre visite que Marie avait reçue quelque temps avant : la visite de l´Esprit de Dieu.

Dans la tradition biblique, on parle des visites de Dieu comme étant des moments
privilégiés de la révélation de Dieu et de son amour concret pour son peuple, et aussi pour
des personnes à qui il veut confier une mission.

Dans ces visites, Dieu se donne à connaître et il donne aussi à connaître ses desseins et
ses volontés. Ainsi, les visites de Dieu sont de vraies rencontres personnalisées. Dieu
veut rencontrer des personnes et il leur demande d’accueillir ses visites pour qu’il y ait de
vraies rencontres.

Dans la visite de l’Annonciation, l’Esprit n’est pas seulement un communicateur et une


force d’engendrement, il est aussi un éveilleur. Marie est éveillée dans toutes ses
capacités humaines afin de pouvoir répondre avec toute sa liberté et son amour personnel
à ce qui lui est proposé.

A son tour, dans la visite de Marie à Elisabeth, celle-ci est aussi éveillée par l’Esprit (et
l’enfant qui est en elle, aussi). Quand quelqu’un reçoit des visites comme celles-ci, il
devient éveillé et plein de joie, même si cette joie est mélangée à de la surprise et une
certaine crainte.

C’est la joie de croire. C’est la joie de se découvrir aimé personnellement par Dieu, qui
nous visite et qui veut compter sur nous pour une mission. La joie de croire que des
promesses de Dieu vont se réaliser ou qu’elles sont en train de se réaliser.

Or, dans le mystère de la prédication (je dis bien, mystère), il arrive quelque chose de
semblable. Celui ou celle qui prêche, qui dans les plus diverses occasions, formelles et
liturgiques ou informelles, veut partager sa foi, le fait d’abord parce qu’il a reçu une visite
ou des visites de Dieu ou de son Fils qui l’ont rempli de joie. Une joie qui est le fruit de
l’amour reçu et aussi de l’espérance éveillée.

En deuxième lieu, il veut le partager avec d’autres, le communiquer à d’autres. Mais pour
que l’autre puisse aussi se réjouir, il faut qu’il soit éveillé par l’Esprit. Le prédicateur
devient un intermédiaire, un collaborateur de l’Esprit. C’est une tâche modeste, mais
devenue essentielle et indispensable depuis que Jésus a choisi cette méthode en
envoyant des apôtres. C’est le mystère de la prédication.
Quelqu’un m’a dit un jour : je prie toujours pour le prêtre qui est en train de prêcher à la
messe, pour qu’il nous communique quelque chose de signifiant. Et je prie aussi pour moi-
même – a-t-il ajouté – et pour les personnes de l’assemblée pour qu’elles puissent
recevoir quelque chose de valable pour leur vie. Depuis lors, j’essaie toujours de le faire.

Celui qui prêche doit être conscient de ce mystère : par le don de l’Esprit, on a la joie de
croire et c’est aussi l’Esprit qui va éveiller les autres par mon intermédiaire.

La foi d’Elisabeth saisit l’essentiel de la visite de Marie : l’accomplissement des promesses


de Dieu. Quelle joie !

Quand nous prêchons, en n’importe quelles circonstances, nous le faisons car nous
sommes conscients que nous avons reçu une grande richesse : le don de croire dans la
réalisation des promesses de Dieu.

C’est l’amour de Marie pour sa cousine qui la pousse à aller la soutenir dans sa grossesse
avancée. Et nous nous mettons en chemin pour aller partager avec d’autres que nous
aimons, ce que nous avons eu la joie d’avoir reçu.

Elisabeth, éveillée par l’Esprit, dit : « Comment se fait-il que vienne à moi la mère de mon
Seigneur », et aussi : « Bénie es-tu entre les femmes et le fruit de ton sein est béni ». Elle
vient de faire une découverte essentielle pour notre foi : Marie et Jésus forment une unité
inséparable.

Paul VI, dans une Exhortation apostolique en 1974, disait : « Dans la liturgie du mariage,
nous rappelons le projet de Dieu pour le couple humain : que l’homme ne sépare pas ce
que Dieu a uni ».

Marie et Jésus, ne les séparons pas, car leur union est l’union intime entre l’humain et le
divin. Marie sans Jésus perd son humilité et Jésus sans Marie perd son humanité. Jésus
reçoit de Marie sa carte d’identité humaine. Marie, de son coté, appartient toute à son fils.

Cette unité a un rôle central dans la prédication. Quand j’ai commencé à accompagner
dans la prédication quelques-uns des grands prédicateurs itinérants du Portugal, j’ai été
frappé par le souci qu’ils avaient de connaître les personnes à qui ils allaient prêcher : les
habitudes, le rythme de vie, les traditions, le milieu culturel et social, le style de vie familial,
même des expressions de la sagesse populaire.

Et pourquoi ? Pour aimer les personnes, il faut les connaître dans leurs circonstances
concrètes. La Parole divine veut s’incarner dans l’humain.

Si, par exemple, nous voulons nous adresser à des personnes très sécularisées et assez
peu éveillées aux questions religieuses, il nous faut les rencontrer dans leur milieu de vie,
de travail, de famille, les connaître à fond pour les aimer dans leur éloignement de la foi.
Mais en même temps, nous devons être conscients que nous avons quelque chose qui
leur manque : une grande richesse et une grande source d’espérance pour le monde.

C’est le mystère de la prédication à notre époque sécularisée.


L’Esprit est à l’œuvre et sûrement nous voulons l’être aussi.

Amen.

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