ESPRITS MALINS. 33°
deffuz pluificurseftoit. Eten cefte facon ilz
formoient ftatues de pluifieurs matieres en:
tremeflées , mais d’vn mefme ordre, par ou
: chofe gueres difficile ne leurs eftoit d’indvire
demons folaires , fi de chofes folaires fuffent
formées.Semblabiement & demons lunaires,
faturnins,iouiaulx,& d’autres planettes es fta
tues de matieres lunaires,1ouialles,& d’autres ;
plancttes compofées.Decefte forte on peule _ststwes de
croire auoir efté les ftatues des Telchynois,p. Telchinoys,
duifantes pluies,ventz_orages, grefles, tonne-
res,& autres merucilleux effedz.Coéme & auf
Gi de Dedalus,Promotheus, & 1a colombe de
boys d’Archita Tarentin , laquelle voloit par —
Lair. De cefte forte auffy debuoit eftre le che-
* galet du petit Pacolet, fiafon Autheur lon
peulc adioutter foy: comme ainfi foit toutef-
! fois que felon Part,cela fe pouoit bien faire.
(DES FORCES DE LA MA-
TTT TT
jt me fouuient , que moy eftantieune cfco-
: lier,’’ay par plusficurs foys ouy racompter a
’— difcret & bien fcauanthomme d’eglife mon-
' fieur lea Cappeau,en fon viudt Cure d’Houp-
plines fur la Liz, que luy eftat ieune garfon &
“paigea
I sté, LES IMPOSTVRES DES
téen la Bourgongne, ainfi que fondié feig=
neur vn iour entre les autres accompagné de
pluificurs autres genulhdines fe feoit au foup-
per,& entre iceulzen y auoit vn, qui en Pare
magique auoit le bruit d’eftre excellent & ad~
Excellent ct mirables apres pluifieurs propoz lefquelz en-
adrirable tre eulx farent tenuz quant au fait de la guer-
magi re, mutations &. deferdres,quicommunemée
delle enfuiuent, & par lefquelz la Bourgon-
gne, &toutle pays en general, par pluifieurs
ans eftoiét tombez en grofles perplexitez, di-
uers accidentz, & grictz meonuenientz. Or
fus amys,dit le feigneur.plus il n’eft temps de
raifonner de facheries, laiffons a part ces me=
lancholieux propoz, puis qu’ainii eft, que
maintenant il plaift au feigneur Dieu nous re=
garder de fen oeil de piti¢-& mifericorde: car
ce iourdbur ray efté bien aduerty,qu'vire ref
bonne & ferme paix entre Chieftiens eft ac-
cordée,pour faquelle moienner le noble & 11-
nian Inftre feigneur Conte de Naifou, par I Empe-
baffadcur et FEUE Maximilian Cefar toufiours augufte, a-
medzateur woit efté commiz & deputé vers le bon Roy
delapaix. de France. Or Je tout eft trop mieulx fuc-
i eedé qu’a fouhayt. Parquoy autre men ne
| nouns refte qu’a remercier Diev,, & prendre
} & vfer du bon temps qu’il nous enuoye, 8
cercher tous les moyens queJ’on pourra =
1c,
eres eminem 22-2}/BSPRIPSMALINS, * 34
bienuenir 8 ‘sieiailalianig lequel (com:
me il refcrit) eftde retour, & doit apres de.
Riain,cout au plus tard, venir foy rafrcfchir.8e
xecréer icy. aupresde moy. Doncques cha-
eun de vous rende payne, & fe metteen deb-
uoir a retrouuer q e inuentio
tain & obtine filence,& par ce qu’vn chacun
ieQoit fa veue fur le dit Magicien, le feigneur
cogneut facillemenr,qu’autre que luy n’eftoit
our miceulx furnir a fon entente. Toutef=
oys le Negromant luy demada induces d’yn
jour entier tant feullement , puis le rerme ac-
comply feit telle refponfe. Soies ( di&t il)feig-
neur dehait, dénes bon ordre, &mettes pro-
uifion a tout le refte,8 quant ac’eft affaire , a
moy feul laiffés en le foing & cure. Le feigs"
neur cognoiflant que ttop plus quil n’auoit
dir il en feroit , attendita fes autres negoces.
Oren fin,le tour cant defiré venu, lefcigneur
Conte arriua al’ hoftel dudit gentulhomme,
&futreceu a grad ioye &licile entre feigneurs,
cheualiers,dames,&damoifelles, qui a Penuiz
tacheoient alay faire la plus grands fefte: +
Mais ce pendant ne croyes pas , que dor-
mift le Negromant.Car encor n’eftoit le foup.
per du tout acheud , quand il feir figne.ay
ae Ia feigneur"LES IMPOSTVRES DES
{cigneur de la main, qui fans plus d’atreft, 8
& luy & le Céte leuez de table,comme & auf
fitousles autres alsiftens facheminerent cel-
le part. Alhors le negromant:Seigneurs dit it,
que voies vous en l’air?Et icéulx appuiez a v=
ne feneltre bien grande & ample,qui defcou-
uroit les montz voifins,& au bas d’'iceulx vane
large champaigne tendat vers la plaine de la
duchée,attermerent ne veor rié, fors vne c6-
tnuellefeccnitéde temps. Adoncreplicale
negtomant:Dreffes feigneurs voz veues dere
chef vers le ciel & confiderez diligemment,f .
vous ne vous aperceués de chofe aucune:non
refpédit le céte,fors d’vne certaine nué, mais
Nudeertai- {eulle & bien eftrange , & qui me femble cou-
nement efird ric trop plus vifte que le vét,combien que Pair
&. touteffois par tout & alenuiron d’elle foit bié
ferain & calme.le ne {cat que cela veult preré
dre? A vous donner(refpond le negromant).
Gi vous voules graciculx paffaremps &
. ioit beaucop plus vray qu'il
ne penfoit. Sus doncauant, refpond le Cote,
qu'on fe deliure. Le negromant Phors entre
fes dentz , 8 a par foy murmurant, ie ne {Gay
quelz menuz fuffrag es,&tenant en fes mains |
Ovn moment contradic celle nue. q
raffre-ESPRITS MALINS, 3
raffrener & allencir fon cours tant royde &
vilte: & de la en auant apres longues & conti-
nues roues, cercles, & girauoltes ,.peua peua
f abbaiffer,&. en fin Parrefter fur le verger du
1, dit lieu. Mais ce pendar que noftre negromat -
attendoit bien fongneufement: mais né pour.
., Sant affez cautement: a fa befongne , par : ‘
: at tout foudain dyn negro
t fos &elongues cores, qui le teniont en grand #7.
: anger captif,ne pouant retirer fa tefte de la
feneltre, puis le chateau ou ilz eftoint,eftoit af
fiz fur vne viue roche,treshaulte, droitte, &
precipitée a merueilles , fouz laquelle & au
pl? bas courroit vne vifte,impetueule, & bruy»
ante riuiere , qui rendoit l’eminent danger,
tant plus efpoucntable. Et eftoiccertainemét
Yaduenture bien nouuelle & admirable:&po-
uoit on (a bon droit) Ceftonner & efbahir de
veoir en peu dc temps, fi foudaine metamor- .
phofer car fubit quela nué fuft approchée & yriftoire eft
defcendue,tout auffy toft elle defparut, & en ge,
. lieu d’elle , on veit celuy qui auoit feital’aul-
tre naiftre les.cornes.C’eftoit vn beau,difpoft,
& encor affez ieune gentilhomme , lequel af-
belles Saquelle a fes nobles
slaquelle a fes nobles
13° parentzLES IMPOSTVRES DES
parentz il auoit chuollée,& 'emmenoit a fon
plaifir.La pauure dame cant eftoit héteule,cd
ule & miacrie,q dire’plus on ne {gauroit.Mais
Ie hardy {cheualiet (a rebours) par force rete~
nu,grinfloirdes détz contre fon ennemy, qui
fe rctrouuoit en aufli grand danger, ou plus q
la celuv.ducheual dela sonnclle are
quoy,voyant que fon falut en ce depédoit feul
Jement,que de laiffer en hberté((ans plus Vir-
riter)fa cétrouerfe partie, laquelle au feigneur
Conte , pour chofe que elle fult-interroguée,
cébien qu’affez couttoifement,ne refpondoit
touteffois que du rout feintemér , céme celuy
qui de fa dame nide foy vouloit defcouurir au
roit au(si abfoulc de fes grides & vilaines cors
nes:ce qluy accorda le Conte né fans grad cd
tentemét de I’'vne &de l'autre partic. Parquoy
foudain,apres licence prinfe,lecheualier re~
; metas ri
- _ fonESPRITSMALINS,. .- 36
non fans grand plaifir &paffecéps du feizncur
Conte & esbahiffement.des autres. Polemon
racompte, qu’en l’ifle de Chios, !a ftarue des
Bacch? eftoit lyée,a ce que de fa place elle. ne
peutt bouger.Comme & aufly latefte d’erain
du grand Alberr,laquelle (fel6 la perfuafid de
pluificurs)parloit,& aux demandes rédoit re-
{ponces.De cefte forte peut on eftimer , anoir
efié Ja ftatac du noir Mennon faiéte de pierre
ethicpique,laquelle faluoit la doulce Aurere,
& fa plaifante venuc,{a vorx demonftrant fig-
ne d’alegreffe , par la fouefue venue d’icclle:
mais puis quad le foleil partoit,touta rebouis,
elle mandoit triftes vorx &lugubres,monftrat
douleur par (adepartie. Ereftoit celte ftatue,
entel leu fituée, que de tous fens, Echo les
voix, & les fons redoubloit. Elle auoit efté pat
le roy Cambifes d’Egipte firuée&mife en The:
bes; mais en tel eftat, que trachée & femipar-
tie de Ja tefte iufques ala ceinture, le rema-
nant eftoitaffiz,De cefte icy fait mention Iu-"
uenalis en fa.1s. Satyredifanc: La ou refon= tugenalis:
nent les magiques cordes du tré6que Menn6. o
Oultres a ceftes cy,ily auoit vne autre certai> vine autre
ne art, laquelle auec aucunes vaneurs au feu artmagiz
eer influxids Peftoililes & 74.
planettes auec images des dieux.feblables fi
aux dieux, en formes & forces. Et rout cecy il
meg
Polemon,
Statue de
cchuse
La fate de
Mennon,"LES IMPOSTVRES DES
me fouuient avoir trouué & leu aupres des
Autheurs dignes de foy, touchant les images
& ftatues.THEOPH. Les allegations par vous
recitées (touchant les: ftatues ) combien que
au commencement elles fembloint deuoir e-
fire facheufes,roureffois fi nous ont elles éfté
autant gracicufes & fibien venues, qu’elles
fous ont apporté vn nouveau & fingulier de=
fir d’entendre & ouir ce que des demons vous
viendra a memonre:la raifon eft pour autat F
i’en puis cognoiftre} que par ce q deflus vous
aues allegu¢ en traiftat d’autre matiete,le rai-
fonner d’iceulx a prefent ne pourta find nous
amener & produire auec finguliere do@rine
vn treffauoureux fruic & delectable. HERM.
Le nature Ul m’eft aduis,que cela fort neceffaire d’ eftre
des Demons mis en effeét,a fin que entendue la nature des
doit fire cof demons, plus aifement I’on pourra de ce que
Piast des ftatues nous auons a croire,en fin iuger &
p ire acterminer.PHttos.Puis qu’ainfi eft,qu’al’vn
leurs rafts Ae vous la chofe eft agreable, & que !’opinion
erfinneffis, de Yaurre le iuge eftre neceflaire,ie veulx déc
"bien vous faciffairea mon petit pouoir, & a
s vozbons & vertucux defirs.
QDE LA NATVRE DES DE-
mons. Chap. VI.
Donc—