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Séries numériques

1 Définitions et premières propriétés

1.1 Définitions

Définition (Série numérique) Soit (un )n∈N une suite complexe.


Xn
Pour tout n ∈ N on pose : Un = uk (nème somme partielle). La suite (Un )n∈N est alors appelée la série de terme général
X k=0
un et notée un .

   Explication
X
• Avec cette définition, une série n’est jamais qu’une suite. Du coup, avec les notations précédentes, dire que la série un
converge (resp. diverge)
X revient simplement à dire que la suite des sommes partielles (U )
n n∈N converge (resp. diverge), et
la nature de la série un est sa convergence ou divergence.
• Seulement voilà, si les séries ne sont que des suites, pourquoi faire une théorie des séries ? La théorie des suites n’est-elle
pas suffisante ? La réponse est non. La grande question de la théorie des suites est : à quelle condition la suite (un )n∈N
est-elle convergente
X ? La grande question de la théorie des séries est quant à elle : à quelle condition sur la suite (un )n∈N
la série un est-elle convergente ? Cette question appelle des résultats spécifiques qui sont l’objet du chapitre.

X ∞
X
Définition (Somme d’une série) Soit (un )n∈N une suite complexe. Si la série un converge, sa limite est notée un et
n=0
appelée la somme de la série.

Remarque Comme dans le cas des suites, les premiers termes d’une série n’ont pas d’influence sur sa nature (convergence
ou divergence). Ils affectent en revanche la valeur de sa somme lorsqu’elle est convergente.

X
Théorème (Série géométrique) Soit q ∈ C. La série q n , dite série géométrique de raison q, est convergente si et
X∞
1
seulement si |q| < 1. Dans ce cas : qn = .
n=0
1 − q


n
X  1 − q n+1
k si q 6= 1 ;
Démonstration Pour tout n ∈ N : q = 1−q Le résultat découle de nos connais-

k=0 n+1 si q = 1.
sances sur les limites des suites géométriques. 

X 1
Exemple Soit α ∈ R. La série , qu’on appelle une série de Riemann, est convergente si α > 2 et divergente si α 6 0.

Mais que se passe-t-il si α ∈ ]0, 2[ ? Un peu de patience. . .
n
X 1
En effet Pour tout n ∈ N× , posons Un = .

k=1
1
• Supposons α > 2. La suite (Un )n∈N× est croissante car Un+1 − Un = > 0 pour tout n ∈ N× . Pour
(n + 1)α
X 1
montrer qu’elle converge, i.e. que converge, il nous reste à montrer que (Un )n∈N× est majorée. Or pour

X n Xn X n Xn    
1 α>2 1 1 1 1 1
tout n > 2 : Un = 1+ 6 1+ 6 1+ = 1+ − = 1+ 1 − 6 2.
kα k2 k(k − 1) k−1 k n
k=2 k=2 k=2 k=2
n
X
α60
• Supposons α 6 0. Pour tout n ∈ N× : Un > 1=n et par ailleurs lim n = ∞. Le théorème de
n→∞
k=1
X 1
minoration montre alors que lim Un = ∞. Comme voulu, diverge.
n→∞ nα

1
1.2 Divergence grossière

Théorème
X (Condition nécessaire de convergence d’une série) Soit (un )n∈N une suite complexe.
Si un converge, alors lim un = 0.
n→∞

n
X X
Démonstration Pour tout n ∈ N, posons Un = uk et faisons l’hypothèse que un converge. Alors si S
k=0
désigne la somme de cette série : un = Un − Un−1 −→ S − S = 0. 
n→∞

Définition (Divergence grossière) Soit (un )n∈N une suite complexe.


X
• On dit que la série un diverge grossièrement si lim un 6= 0.
n→∞
X X
• Si un diverge grossièrement, alors un diverge (tout court).

X
   En pratique Quand on vous demande de déterminer la nature d’une série un , commencez tout de suite par
X
vous demander si oui ou non lim un = 0. Si la réponse est non, c’est terminé : un diverge (grossièrement). Si la réponse est
n→∞
oui, vous ne pouvez rien en déduire.
X
$ $ $ Attention ! La réciproque de l’implication « un converge =⇒ lim un = 0 » est fausse en général : il ne suffit
X n→∞
pas de montrer que lim un = 0 pour montrer que un converge. Croire le contraire, c’est avouer qu’on n’a absolument rien
n→∞
compris à la théorie des séries, car la théorie des séries n’a de pertinence qu’à partir du moment où l’on ne peut se contenter de
la seule théorie des suites. En résumé : une somme infinie de quantités qui tendent vers 0 peut ne pas converger.

X 1 1
Exemple La série de Riemann , dite série harmonique, diverge. Et pourtant lim = 0.
n n→∞ n
X 1
En effet (Preuve n˚1) Raisonnons par l’absurde en supposant la série convergente de somme S.
n
2n
X 2n
X Xn
1 1 1
Alors : = − −→ S − S = 0.
k k k n→∞
k=n+1 k=1 k=1
X2n X2n
1 1 (2n) − (n + 1) + 1 1
Pourtant pour tout n ∈ N× : > = = . Contradiction !
k=n+1
k k=n+1
2n 2n 2

En effet (Preuve n˚2) La fonction x 7−→ ln(1 + x) étant concave sur ] − 1, ∞[, son graphe est situé sous sa
tangente en 0 d’équation y = x. Il en découle que pour tout x ∈ ] − 1, ∞[ : ln(1 + x) 6 x. Du coup, pour tout
Xn Xn   X n  
1 1
n ∈ N× : > ln 1 + = ln(k + 1) − ln k = ln(n + 1). Or lim ln(n + 1) = ∞. Le théorème
k=1
k k=1
k k=1
n→∞

Xn X
1 1
de minoration montre alors que lim = ∞, donc comme voulu que diverge.
n→∞
k=1
k n

1.3 Lien suite-série

Théorème (Lien suite-série) Soit (an )n∈N une suite complexe. Alors la suite (an )n∈N converge si et seulement si la série
X
(an+1 − an ) converge.

n−1
X
Démonstration Pour tout n ∈ N× , par simplification télescopique : (ak+1 − ak ) = an − a0 . Il en découle
k=0
que le terme de gauche possède une limite finie lorsque n tend vers ∞ si et seulement si le terme de droite fait de
même. 

   Explication Grâce à ce théorème, on peut étudier une suite en se servant des techniques spécifiques de la théorie
des séries, ou au contraire étudier une série au moyen des techniques de la théorie des suites.

2
X  
1
Exemple La série ln 1 + diverge.
n
X 
En effet La suite (ln n)n∈N× diverge, donc la série ln(n + 1) − ln n également.

1.4 Opérations sur les séries

Théorème (Opérations sur les séries) Soient (un )n∈N et (vn )n∈N deux suites complexes.
X X
• Pour tout λ ∈ C× , un converge si et seulement si (λun ) converge.
X X X
• Si un et vn convergent, alors (un + vn ) converge.
X X X
• Si un converge mais vn diverge, alors (un + vn ) diverge.

Démonstration Rien à prouver : nous connaissons ce résultat pour les suites et justement les séries sont des
suites. 

$ $ $ Attention !
X X X X1
• Si un et vn divergent toutes les deux, on ne peut rien dire en général de (un + vn ). Par exemple diverge
X 1 X 1 X2 X 1 X 1 n
et + = diverge aussi, mais − = 0 converge.
n n n n n
X X X X (−1)n
• Si un et vn convergent, on ne peut rien dire en général de un vn . Nous verrons plus tard que √ converge,
  n
X (−1)n (−1)n X 1
mais √ × √ = diverge.
n n n

2 Séries numériques à termes positifs


On étudie à présent les séries dont le terme général est positif — sous-entendu : ou nul. Ce qui est vrai de ces séries serait
en fait vrai des séries dont le terme général est négatif (ou nul). L’essentiel est donc, dans cette section, que le signe du terme
général soit constant.

$ $ $ Attention ! Quand vous utilisez l’un des théorèmes de cette section, n’oubliez surtout pas de vérifier et mentionner
la positivité des suites étudiées. Hypothèse importante !

2.1 Théorème fondamental

n
X
Théorème (Théorème fondamental) Soit (un )n∈N une suite réelle positive. On pose, pour tout n ∈ N : Un = uk .
k=0

• La suite (Un )n∈N est croissante et possède donc une limite.


X
• La série un converge si et seulement si la suite (Un )n∈N est majorée.

Démonstration La suite (Un )n∈N est croissante car Un+1 − Un = un+1 > 0 pour tout n ∈ N. Le reste n’est
qu’une réécriture du théorème de la limite monotone dans le cas croissant. 

   Explication Quand on étudie une série à termes positifs, ce théorème ramène tout problème de convergence à un
problème de majoration. La question n’est pas dans ce cas : « La limite existe-t-elle ? » mais : « Est-elle finie ? ».

3
2.2 Critère de condensation

X X
Théorème (Critère de condensation) Soit (un )n∈N une suite réelle positive décroissante. Alors un et 2n u2n ont
même nature.

Démonstration Pour tout n ∈ N× :

n 1 terme 2 termes 4 termes 8 termes 2n−1 termes k


2X −1 z}|{ z }| { z }| { z }| { z }| { n−1
X 2X −1
uk = (u1 ) + (u2 + u3 ) + (u4 + u5 + u6 + u7 ) + (u8 + . . . + u15 ) + . . . + (u2n−1 + . . . + u2n −1 ) = u2k +i .
k=1 k=0 i=0

Or (un )n∈N est décroissante donc u2k +2k 6 u2k +i 6 u2k pour tous k ∈ N et i ∈ J0, 2k − 1K.
k k k
X 2X
n−1 −1 X 2X
n−1 −1 X 2X
n−1 −1
Du coup u2k +2k 6 u2k +i 6 u2k pour tout n ∈ N× , et donc :
k=0 i=0 k=0 i=0 k=0 i=0

k n k
n
1X k
n−1
X k n−1
X k X 2X
n−1 −1 2X
−1 X 2X
n−1 −1 n−1
X k
2 u2k = 2 u2k+1 = 2 u2k +2k = u2k +i 6 uk 6 u2k = 2 u2k .
2 i=0 i=0
k=1 k=0 k=0 k=0 k=1 k=0 k=0

X X
Les séries un et 2n u2n sont à termes positifs, donc en vertu du théorème fondamental, elles convergent si
et seulement si elles sont majorées.
n
X Xn 2X−1
• Si la série un est majorée, disons par M , alors 2k u2k 6 2 uk 6 2M pour tout n ∈ N× ,
X n k=1 k=1
donc 2 un est majorée.
n
X n
X 2X −1 n−1
X
2n −1>n
n
• Si la série 2 un est majorée, disons par M , alors 0
uk 6 uk 6 2k u2k pour tout
X k=1 k=1 k=0
n ∈ N× , donc un est majorée.
X X n
Les séries un et 2 u2n sont finalement bien de même nature. 

   Explication La preuve précédente repose sur l’idée que pour sommer tous les un , n décrivant N× , on peut les sommer
de manière condensée par paquets de tailles 1, 2, 4, 8 . . . Il se trouve alors, grâce à l’hypothèse de décroissance, que le paquet
« u2n + u2n−1 +1 + u2n +2 + . . . + u2n+1 −1 » de 2n termes compte autant que la quantité « 2n u2n ».

X 1
Théorème (Série de Riemann) Soit α ∈ R. La série , qu’on appelle une série de Riemann, converge si et seulement

si α > 1.

 
1
Démonstration Nous avons déjà traité le cas α 6 0. Supposons donc α > 0. La suite est alors
nα n∈N×
X 1 X 2n X 1−α n
positive et décroissante. En vertu du critère de condensation, les séries α
et = 2 ont
X 1−α n n (2 n )α
1−α
donc même nature. Or la série 2 est géométrique et converge si et seulement si 2 < 1, i.e. α > 1.
C’est le résultat voulu. 

2.3 Comparaison au moyen d’inégalités

Théorème (Comparaison au moyen d’inégalités) Soient (un )n∈N et (vn )n∈N deux suites réelles positives. On suppose
un 6 vn à partir d’un certain rang.
X X
(i) Si vn converge, alors un converge aussi.
X X
(ii) Si un diverge, alors vn diverge aussi.

4
n
X n
X
Démonstration Notons N un rang à partir duquel un 6 vn et posons : Un = uk et Vn = vk pour
k=0 k=0
n
X n
X
tout n ∈ N. Alors pour tout n > N : Un − UN = uk 6 vk = Vn − VN (inégalité F).
k=N+1 k=N+1
X
(i) On suppose vn convergente. Alors (Vn )n∈N est majorée donc (Un )n∈N aussi en vertu d’F. Comme voulu
X
un converge.
X
(ii) On suppose un divergente. Alors lim Un = ∞ donc lim Vn = ∞ en vertu d’F et du théorème de
X n→∞ n→∞
minoration. Comme voulu vn diverge. 

X 1
Exemple La série est convergente.
n2 (2 + sin n)
1 1 X 1
En effet Pour tout n ∈ N× :
06 2 6 2 . En particulier est une série à termes
n (2 + sin n) n n2 (2 + sin n)
X 1
positifs et comme nous savons que converge, il en est de même de cette série.
n2

2.4 Comparaison au moyen de grands O

Théorème (Comparaison au moyen de grands O) Soient (un )n∈N et (vn )n∈N deux suites réelles positives. On suppose
un = O(vn ) — c’est vrai en particulier si un = o(vn ).
n→∞ n→∞
X X
(i) Si vn converge, alors un converge aussi.
X X
(ii) Si un diverge, alors vn diverge aussi.

Démonstration Puisque un = O(vn ), il existe un rang N et un un réel K > 0 tels que pour tout n > N :
n→∞
|un | 6 K|vn |, i.e. ici un 6 Kvn . La conclusion découle alors aussitôt du théorème de comparaison au moyen
d’inégalités. 
√ 
X n
Exemple La série 3
converge.
n −n
√  ! √   
n n 1
En effet Pour commencer la suite est positive et par ailleurs = O . Comme la
n3 − n n3 − n n→∞ n2
n∈N× √ 
X 1 X n
série de Riemann 2
converge (2 > 1), cela montre bien que 3
converge aussi.
n n −n

X 1
Théorème (Série de Bertrand) Soient α, β ∈ R. La série , qu’on appelle une série de Bertrand, converge si
nα (ln n)β
et seulement si : • soit α > 1 ; • soit α = 1 et β > 1.

Démonstration
α+1 nγ 1 α−1
• Si α > 1, posons γ = > 1. Alors α = α−1 −→ 0 car > 0. Ainsi
2 n (ln n)β n 2 (ln n)β n→∞ 2
  X 1 X
1 1 1
= O . Or la série de Riemann converge car γ > 1. Par ailleurs la série
α β
n (ln n) n→∞ n γ n γ nα (ln n)β
est à termes positifs. Cette série est donc convergente par comparaison.
α+1 nα (ln n)β α−1 α−1
• Si α < 1, posons γ = < 1. Alors = n 2 (ln n)β −→ 0 car < 0. Ainsi
  2 nγ n→∞ 2
1 1 X 1 X 1
= O . Or la série de Riemann diverge car γ < 1. Par ailleurs la série
nγ n→∞ nα (ln n)β nγ nα (ln n)β
est à termes positifs. Cette série est donc divergente par comparaison.
  X1
n(ln n)β 1 1
• Si α = 1 et β < 0, lim = 0 donc = O . Or la série harmonique diverge et
n→∞ n n n→∞ n(ln n)β n
X 1
est à termes positifs, donc cette série diverge.
n(ln n)β

5
 
1
• Supposons enfin que α = 1 et β > 0. Dans ces conditions la suite est positive et décroissante.
n(ln n)β n>2
X 1 X 2n
Le critère de condensation nous permet d’en déduire que les séries et β ont
n(ln n)β 2n ln(2n )
1 X X 1
même nature. En d’autres termes, les séries et ont même nature. Nous savons qu’elles
n(ln n)β nβ
convergent si et seulement si β > 1. C’est justement le résultat souhaité.

2.5 Comparaison au moyen d’équivalents

Théorème (Comparaison
X Xau moyen d’équivalents) Soient (un )n∈N et (vn )n∈N deux suites réelles positives. On suppose
un ∼ vn . Alors un et vn ont même nature.
n→∞

Démonstration Puisque un ∼ vn , on a aussi un = O(vn ) et vn = O(un ). Utiliser alors le théorème de


n→∞ n→∞ n→∞
comparaison au moyen de grands O. 

X 1
Exemple La série √  converge.
n2 n + n
1 1 X 1
En effet Cette série est à termes positifs et √  ∼ 3
. Comme la série de Riemann converge
n2 n+ n n→∞ n n3
X 1
(3 > 1), c’est aussi le cas de 2
√ .
n n+ n

Xn
1
Exemple Il existe un réel γ, appelé la constante d’Euler, tel que : = ln n + γ + o(1).
k=1
k n→∞

Xn
1
En effet Posons, pour tout n ∈ N× : an = Nous souhaitons prouver que la suite (an )n∈N×
− ln n.
k=1
k
X
converge. En vertu du lien suite-série, il nous suffit pour cela de montrer que la série (an+1 − an ) converge.
C’est ce que nous allons faire. Pour tout n ∈ N× :
n+1
! n
!    
X 1 X 1 1 1 1
an+1 − an = − ln(n + 1) − − ln n = − ln(n + 1) + ln n = ln 1 − − −
k=1
k k=1
k n+1 n+1 n+1
1 1
∼ − ∼ − .
n→∞ 2(n + 1)2 n→∞ 2n2
X
Ceci prouve pour commencer que la série (an+1 − an ) est à termes négatifs à partir d’un certain rang — en fait
X 1 X
dès le rang 1. Mais par ailleurs la série de Riemann converge (2 > 1) donc par comparaison (an+1 − an )
n2
aussi. Comme voulu (an )n∈N× converge, et si nous notons γ sa limite c’est terminé.

2.6 Règle de d’Alembert

Théorème (Règle de d’Alembert) Soit (un )n∈N une suite réelle strictement positive.
un+1 X
(i) Si lim < 1, la série un converge.
n→∞ un

un+1 X
(ii) Si lim > 1, la série un diverge.
n→∞ un

un+1
$ $ $ Attention ! Rien ne garantit en général que la limite lim existe. Par ailleurs la règle de d’Alembert ne nous
n→∞ un
un+1
dit rien si lim = 1. Ce cas limite est appelé souvent le cas douteux de la règle de d’Alembert.
n→∞ un

6
un+1
Démonstration Supposant que lim existe, notons ` cette limite. La preuve qui suit consiste à comparer
n→∞ un
X
la série un à une série géométrique — dont nous maîtrisons parfaitement la nature.

1−`
(i) Supposons d’abord ` < 1 et posons ε = . Alors ε > 0 et 0 6 ` + ε < 1. Par définition de `, il existe
2
un+1 un+1
donc un rang N à partir duquel − ` < ε. En particulier, à partir de ce rang, 0 6 < ` + ε.
un un
n−1
Y uk+1
un
Dans ces conditions, pour tout n > N + 1 : = 6 (` + ε)n−N , donc 0 6 un 6 K(` + ε)n où
uN k=N
uk
UN  
K= N
ne dépend pas de n. Conclusion : un = O (` + ε)n .
(` + ε) X
n→∞
X
Comme 0 6 ` + ε < 1, la série géométrique (` + ε)n converge, et donc la série à termes positifs un
aussi par comparaison.

`−1
(ii) Supposons maintenant ` > 1 et posons ε = . Alors ε > 0 et ` − ε > 1. Par définition de `, il existe
2
un+1 un+1
donc un rang N à partir duquel − ` < ε. En particulier, à partir de ce rang, > ` − ε.
un un
n−1
Y uk+1
un
Dans ces conditions, pour tout n > N + 1 : = > (` − ε)n−N , donc un 6 K(` − ε)n où
uN uk
k=N
UN
K= ne dépend pas de n. Conclusion : (` − ε)n = O(un ).
(` − ε)N X
n→∞
X
Comme ` − ε > 1, la série géométrique (` − ε)n diverge, et donc la série à termes positifs un aussi par
comparaison. 

un+1
   En pratique Le calcul de lim est plus facile à faire si la suite (un )n∈N est définie à l’aide de produits et de
un
n→∞
quotients. On peut notamment espérer des simplifications au numérateur et au dénominateur dans ce cas.

X n4
Exemple La série converge.
3n
(n + 1)4  4
3n+1 1 1 1 1
En effet Cette série est à termes positifs et par ailleurs : = 1+ −→ où < 1.
n4 3 n n→∞ 3 3
3n

3 Convergence absolue et séries alternées

3.1 Convergence absolue


X
Définition (Convergence absolue) Soit (un )n∈N une suite complexe. On dit que la série un est absolument convergente
X
ou qu’elle converge absolument si la série |un | converge.

X (−1)n X 1
Exemple La série 2
est absolument convergente car la série de Riemann converge (2 > 1).
n n2

Bien sûr, tout le monde s’interroge : une série absolument convergente est-elle convergente ? La réponse est oui. Pour le
prouver, introduisons quelques notations.

Définition (Parties positive et négative d’un réel) Soit x ∈ R.


n o n o
• On pose x+ = max x, 0 et x− = max − x, 0 . Le réel x+ est appelé la partie positive de x et x− est appelé sa
partie négative.
• |x| = x+ + x− et x = x+ − x− .

7
   Explication Les graphes suivants illustrent avantageusement cette définition. Notez bien que la partie négative d’un
réel est. . . positive !

y = |x| y=x
y = x+ y = x−
= x+ + x− = x+ − x−

X
Théorème (La convergence absolue implique la convergence) Soit (un )n∈N une suite complexe. Si un converge
absolument, elle converge (tout court).

   En pratique Pourquoi ce théorème est-il intéressant ? Il ramène dans de nombreux cas l’étude de la nature d’une
série quelconque à l’étude de la nature d’une série à termes positifs — pour laquelle nous avons tout un tas de théorèmes
de comparaison. Quand vous étudiez la nature d’une série quelconque, commencez donc par vous demander si elle converge
absolument.

Démonstration Nous allons d’abord traiter le cas des suites réelles ; le cas des suites complexes en général en
découlera.
X
• Supposons d’abord que (un )n∈N est une suite réelle et que |un | converge. Comme 0 6 u+n 6 |un | et
X +

0 6 un 6 |un | pour tout n ∈ N, le théorème de comparaison au moyen d’inégalités montre que un et
X − X X + −
un convergent toutes les deux. Par différence, un = (un − un ) converge comme voulu.

X
• Cas général : (un )n∈N est à présent une suite complexe et |un | converge. Comme 0 6 Re(un ) 6 |un |

et 0 6 Im(un ) 6 |un | pour tout n ∈ N, le théorème de comparaison au moyen d’inégalités montre que
X X X
Re(un ) et Im(un ) convergent toutes les deux. A fortiori, en vertu du premier point, Re(un )
X X X 
et Im(un ) convergent également. Par somme enfin, un = Re(un ) + i Im(un ) converge comme
voulu. 

X zn
Exemple La série converge (absolument) pour tout z ∈ C. On définit généralement la fonction exponentielle comme
n!
X∞
zn
la somme de cette série, de sorte que pour tout z ∈ C : ez = . Nous comprendrons mieux la raison de cela à la fin du
n=0
n!
chapitre.
Remarquez bien que nous sommes ici en train de parler d’une définition de l’exponentielle sur C — définition unique ! Quand nous
avons défini l’exponentielle complexe en début d’année,notre définition supposait  connues l’exponentielle réelle et les fonctions
sinus et cosinus, via la formule : ∀z ∈ C, ez = eRe(z) cos Im(z) + i sin Im(z) . Au contraire, quand on définit l’exponentielle
complexe comme la somme d’une série, ce sont l’exponentielle réelle et les fonctions sinus et cosinus qui s’en déduisent.
X zn X |z|n
En effet Soit z ∈ C. Si z = 0, la convergence de est évidente. Supposons donc z 6= 0. La série
n! n!
|z|n+1
(n + 1)! z
est alors à termes strictement positifs et par ailleurs : = −→ 0. La règle de d’Alembert
|z|n n + 1 n→∞
n!
X |z|n X zn
montre donc que converge. A fortiori converge absolument, donc converge (tout court).
n! n!


X (−1)b nc
Exemple La série converge.
n2 + 1

X (−1)b nc
En effet Pour obtenir cette convergence, il nous suffit d’établir la convergence absolue de , i.e.
n2 + 1
X 1 1 1
la convergence (tout court) de . Or cette série à termes positifs est convergente car 2 6 2 pour
n2 + 1 n +1 n
X 1
×
tout n ∈ N et car la série de Riemann converge (2 > 1).
n2

8
$ $ $ Attention ! La réciproque du théorème précédent est fausse ! Une série peut converger sans être absolument
convergente. Nous verrons des exemples de telles séries dans le paragraphe suivant. En attendant, nous pouvons au moins donner
une définition.

X
Définition (Semi-convergence) Soit (un )n∈N une suite complexe. On dit que la série un est semi-convergente si elle est
convergente mais pas absolument convergente.

3.2 Séries alternées


X
Définition (Séries alternées) On appelle série alternée toute série (−1)n an où (an )n∈N est une suite réelle positive.

X (−1)n X (−1)n e−n X (−1)n n2


Exemple Les séries , 2
et √ sont alternées.
n n +1 1 + n2 n

Théorème (ThéorèmeX des séries alternées) Soit (an )n∈N une suite réelle positive décroissante de limite nulle. Alors
la série alternée (−1)n an converge.

$ $ $ Attention ! L’hypothèse de décroissance n’est pas là pour décorer !

n
X
Démonstration Posons, pour tout n ∈ N : Sn = (−1)k ak . Nous allons montrer que les suites (S2n )n∈N
k=0
et (S2n+1 )n∈N sont adjacentes. Cela montrera qu’elles sont convergentes de même limite en vertu du théorème des
suites extraites, et donc que la X
suite (Sn )n∈N converge d’après le théorème des suites extraites. Comme voulu on
aura prouvé la convergence de (−1)n an .
Par hypothèse : S2n+1 − S2n = (−1)2n+1 a2n+1 = −a2n+1 −→ 0. Ensuite la suite (S2n )n∈N est décroissante
n→∞
2n+1 2n+2
car pour tout n ∈ N : S2(n+1) − S2n = (−1) a2n+1 + (−1) a2n+2 = a2n+2 − a2n+1 6 0, la suite (an )n∈N
étant décroissante. Pour une raison analogue la suite (S2n+1 )n∈N est croissante. 

X (−1)n
Théorème (Série de Riemann alternée) Soit α ∈ R. La série , qu’on appelle une série de Riemann alternée,

converge si et seulement si α > 0.

X (−1)n
   Explication Pour α ∈ ]0, 1], la série est semi-convergente : elle converge, mais pas absolument.

X (−1)n
Démonstration Si α 6 0, la série diverge (grossièrement). Si au contraire α > 0, la suite positive
  nα
1 X (−1)n
α
est décroissante de limite nulle, donc converge d’après le théorème des séries alternées. 
n n∈N× nα

   En pratique Il ne faut pas toujours vouloir à tout prix appliquer le théorème des séries alternées directement. Un
mélange de techniques est souvent préférable. Etudiez attentivement l’exemple qui suit.

X (−1)n
Exemple La série 3 1 √  converge.
n + n 4 sin n 2
4
!
1
En effet La monotonie de la suite positive 3 1 √  ne semble pas simple à étudier. Le
n 4 + n 4 sin n 2 n∈N×
théorème des séries alternées ne nous sera donc pas utile directement. Commençons par effectuer un développement
1
limité — on rappelle que = 1 − u + o(u) = 1 + O(u).
1 + u u→0 u→0
n n
    
(−1) (−1) 1 (−1)n 1 (−1)n 1
3 1 √  = 3 × √  = 3 1 + O 1 = 3 + O 5 .
n 4 + n 4 sin n 2 n4 sin n 2 n→∞ n 4 n2 n→∞ n4 n4
1+ 1
n2

9
Intérêt de cette méthode à base de développement limité : le problème initial compliqué est décomposé en sous-
X (−1)n 3
problèmes élémentaires. La série de Riemann alternée 3 converge ( > 0) et la série de Riemann
n 4 4
X 1 5
5 aussi ( > 1), donc par somme, grâce au théorème de comparaison au moyen de grands O, la série
n4 4
X (−1) n
3 1 √  converge.
n + n 4 sin n 2
4

4 Récapitulatif des preuves de convergence


   En pratique lim un 6= 0
n→∞
(divergence un a un Techniques
Le schéma ci-dessous rassemble et ordonne les
résultats de convergence établis dans ce cha- grossière) signe de
pitre. Comme souvent en mathématiques, les constant comparaison
méthodes qui en sont issues ne permettent
pas de conclure dans tous les cas. Il n’en
demeure pas moins que ce schéma mérite un sé-
rieux coup d’œil. lim un = 0 X
n→∞
un

converge
un n’a pas absolument
un signe
constant
X
un est
alternée
(théorème
des séries
alternées)

5 Produit de Cauchy

Définition (Produit de Cauchy) Soient (un )n∈N et (vn )n∈N deux suites complexes. On appelle produit de Cauchy des séries
X X X Xn
un et vn la série de terme général up vq = uk vn−k .
06p,q6n k=0
p+q=n

Théorème (Convergence absolue d’un produit de Cauchy) Soient (un )n∈N et (vn )n∈N deux suites complexes. On pose,
n
X
pour tout n ∈ N : pn = uk vn−k .
k=0
X X X ∞
X ∞
X ∞
X
Si un et vn convergent absolument, alors pn également et de plus : pn = un × vn .
n=0 n=0 n=0


X ∞
X ∞
X ∞
X
Démonstration Posons U = un , V = b=
vn , U |un | et Vb = |vn |.
n=0 n=0 n=0 n=0
X X
• Commençons par prouver la convergence absolue de pn . La série |pn | étant à termes positifs, il nous
suffit de montrer qu’elle est majorée, ce qui résulte du calcul suivant. Pour tout n ∈ N :
k
n X

Xn X Inégalité X n X k n n
Interversion X X
|pk | = ui vk−i 6 |ui | |vk−i | = |ui | |vk−i |
triangulaire des sommes
k=0 k=0 i=0 k=0 i=0 i=0 k=i
n n
! n n−i
! n
X X j=k−i
X X X
= |ui | |vk−i | = |ui | |vj | 6 |ui |Vb 6 U
b Vb .
i=0 k=i i=0 j=0 i=0

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n
X n
X
Si nous posons pbn = |uk | |vn−k | pour tout n ∈ N, nous venons d’établir au passage que b Vb
pbk 6 U
k=0 k=0
X ∞
X
pour tout n ∈ N, donc que la série à termes positifs pbn converge. Posant Pb = pbn , on a : Pb 6 U
b Vb .
n=0

• Prouvons à présent qu’en fait Pb = U


b Vb . Pour tout n ∈ N :

n
X n
X X X 2n X
X k 2n
X
|ui | × |vj | = |ui | |vj | 6 |ui | |vj | = |ui | |vk−i | = pbk .
i=0 j=0 06i,j6n 06k62n k=0 i=0 k=0
06i,j62n
i+j=k

Pour la majoration centrale, remarquez simplement qu’on somme des réels positifs et que la somme de droite
b Vb 6 Pb ,
contient tous les termes de la somme de gauche. Faisant tendre n vers ∞, nous obtenons l’inégalité U
et donc l’égalité souhaitée.

X
• Calculons enfin la somme P = pn . Nous voulons montrer que P = U V . Pour tout n ∈ N :
n=0


n
X Xn Xn X X X

ui × vj − pk = ui vj − ui vj = ui vj
06i,j6n
i=0 j=0 k=0
06i,j6n 06k6n
06i,j6n
n+16i+j62n
i+j=k

X X X n
X n
X n
X
6 |ui | |vj | = |ui | |vj | − |ui | |vj | = |ui | × |vj | − pbk .
06i,j6n 06i,j6n 06k6n i=0 j=0 k=0
n+16i+j62n 06i,j6n
i+j=k

b Vb − Pb = 0 lorsque n tend vers ∞, le théorème des gendarmes


Comme le terme extrême à droite tend vers U
montre que le terme extrême à gauche tend lui aussi vers 0. Mais il tend aussi vers U V − P . Comme voulu
P = UV . 

$ $ $ Attention ! Malheur à vous si vous oubliez l’hypothèse de convergence absolue ! On peut montrer que le résultat
(−1)n
est faux en général sans cette hypothèse. Posons par exemple un = √ pour tout n ∈ N× . Comme nous l’avons vu, la série
X n
un est semi-convergente. Que dire alors de son produit de Cauchy par elle-même ? Pour tout n > 2 :
n−1 n−1 n−1
X X n−1
(−1)k (−1)n−k X 1 k(n−k)6n2 X 1 n−1
uk un−k = √ × √ = p > = −→ 1.
k n − k k(n − k) n n n→∞
k=1 k=1 k=1 k=1
X
Ce calcul montre que le produit de Cauchy de un par elle-même diverge (grossièrement).

X∞ X∞ X∞
(z + z 0 )n zn z 0n
Exemple Pour tous z, z 0 ∈ C : = × . Ce résultat justifie qu’on définisse l’exponentielle au
n=0
n! n=0
n! n=0
n!
X∞
zn 0 0
moyen de la formule « ez = », car il s’écrit dans ces conditions : ez+z = ez ez .
n=0
n!
n
X zk z 0n−k
En effet Soient z, z 0 ∈ C. Posons, pour tout n ∈ N : pn = × . Nous avons déjà vu que
k! (n − k)!
k=0
X zn X z 0n X
les séries et convergent absolument. Le théorème précédent montre dans ces conditions que pn
n! n!
X∞ Xz∞ n ∞
Xz 0n
converge et que pn = × . Mais que vaut pn ? Pour tout n ∈ N :
n=0 n=0
n! n=0
n!

n n n
!
X zk z 0n−k 1 X n! 1 X n k 0n−k (z + z 0 )n
pn = × = z k z 0n−k = z z = .
k! (n − k)! n! k!(n − k)! n! k n!
k=0 k=0 k=0

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