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2
3
TABLE
DE
MATIERES
Auteur
Titre
Page
Mohamed
Introduction
7
HADDAR
Mohamed
Comment
créer
davantage
de
richesses
et
HADDAR
d’emplois
?
11
Fadhel
Quel
marché
financier
pour
l’économie
de
ABDELKEFI
demain
?
31
Fayçal
DERBEL
Quel
système
fiscal
au
service
du
développement
?
37
Néji
Quel
système
fiscal
au
lendemain
de
la
BACCOUCHE
révolution
?
49
Roland
Gouvernance,
transition,
émergence
LANTNER
61
Julien
VERCUEIL
La
relation
universités-‐entreprises
et
l’émergence
économique
85
Wei
ZHAO
Systèmes
nationaux
d'innovation
dans
les
pays
émergents
:
le
cas
de
la
Chine
103
4
5
LES
CONTRIBUTEURS
Mohamed
Université
Tunis
El
Manar,
Directeur
du
PS2D
et
HADDAR
Président
de
l’ASECTU
Fadhel
Président
de
Tunisie
valeurs
ABDELKEFI
Fayçal
DERBEL
ISG
de
Tunis
Néji
BACCOUCHE
Professeur,
Faculté
de
droit
de
Sfax
Roland
LANTNER
Professeur
à
Paris
1,
Centre
d’Economie
de
la
Sorbonne
Julien
VERCUEIL
INALCO,
Centre
de
Recherches
Europe-‐Eurasie
EA
4573
Wei
ZHAO
ESC
Saint-‐Etienne
Business
School,
Saint-‐
Etienne
6
INTRODUTION
Mohamed
HADDAR1
Le
nombre
de
chômeurs,
en
Tunisie,
a
été
estimé
fin
2010
à
500
mille,
dont
157
mille
diplômés
du
supérieur.
Ce
nombre
est
passé
en
septembre
2011
à
700
milles
dont
220
mille
diplômés.
Il
est
appelé
à
croitre
si
les
grèves
sauvages
et
sit-‐in
ne
s’arrêtent
pas.
Les
demandes
additionnelles
d’emploi
resteront
pressantes
durant
la
période
2012-‐2016
autour
de
80
mille
par
an.
Les
universités
qui
délivraient
4
mille
diplômés
en
1987
délivrent
aujourd’hui
et
dans
les
années
à
venir
autour
de
76
mille
diplômés
en
moyenne
par
an.
L’insertion
de
ces
diplômés
du
supérieur
constituera
le
défi
majeur
de
la
prochaine
étape.
Avec
une
croissance
au
taux
annuel
moyen
de
5%,
l’économie
tunisienne,
n’a
pas
généré
suffisamment
d’emplois.
En
moyenne
annuelle,
elle
a
créé
70
mille
durant
les
années
2000
dont
25
mille
pour
les
diplômés
du
supérieur.
Certes,
la
bonne
gouvernance
génèrera
plus
de
croissance
et,
par
conséquent
plus
d’emplois.
Cependant
il
faut
noter
qu’il
n’est
pas
question
de
créer
seulement
des
emplois
mais
de
créer
surtout
des
emplois
qualifiés.
Le
modèle
de
développement
suivi,
même
avec
la
bonne
gouvernance,
ne
peut
pas
résoudre
ce
problème.
Si
la
situation
ne
se
détériore
pas
davantage,
l’économie
doit
créer
environ
140
mille
emplois
par
an
dans
la
décennie
à
venir
dont
environ
80
à
90
mille
emplois
pour
les
diplômés.
Le
modèle
suivi,
jusque
là,
ne
peut
pas
garantir
ces
résultats.
Devant
ce
constat,
il
devient
nécessaire
et
urgent
de
passer
à
un
autre
modèle
de
développement
économique
et
social.
1
Université
Tunis
El
Manar,
Directeur
du
PS2D,
Président
de
l’ASECTU.
7
Pour
cela,
et
dans
le
contexte
difficile,
que
traverse
notre
pays,
deux
types
d'action
sont
à
mener.
Une
première
dans
le
court
terme,
et
une
seconde
dans
le
long
terme.
Dans
le
court
terme,
le
gouvernement
issu
de
la
Constituante
doit
instaurer
l’ordre,
la
confiance
et
la
bonne
gouvernance.
Il
doit
mettre
fin
rapidement
aux
grèves
sauvages
et
aux
sit-‐in
pour
éviter
que
la
situation
économique
ne
se
détériore
davantage.
A
moyen
et
long
terme,
il
faut
un
autre
modèle
où
la
technologie,
l’innovation
et
la
créativité
assureront
un
nouveau
dynamisme.
Notre
pays
a
besoin
de
restructurer
profondément
son
système
productif
afin
de
réussir
une
autre
intégration
dans
le
système
économique
mondial,
basée
sur
des
avantages
construits
où
la
composante
technologique
est
importante
en
créant
une
croissance
plus
élevée
que
celle
réalisée
pendant
les
années
passées
;
à
forte
valeur
ajoutée
et
créatrice
d’emplois
qualifiés
et
durables.
La
prospérité
future
du
pays
repose,
en
grande
partie,
sur
le
doublement
de
l’investissement
des
entreprises
et
un
secteur
privé
dynamique
et
innovant,
capable
de
relancer
les
défis,
pour
qu’il
puisse
répondre
à
cet
enjeu
de
création
d’entreprises,
de
richesses
et
d’emplois.
En
25-‐30
ans
(Tunisie
2040),
notre
pays
peut
accéder
au
stade
de
pays
développés.
Ce
rêve
est
possible.
Certains
pays,
comme
la
Malaisie
ou
Singapour
l’ont
réalisé.
La
Tunisie,
par
l’intelligence
de
son
peuple,
principalement
sa
jeunesse
éduquée
et
ambitieuse
peut
le
faire.
Il
faut
y
croire.
Une
volonté
politique
ferme
et
une
équipe
dirigeante
visionnaire
doit
accompagner
ce
rêve.
Pour
cela,
il
faut
mettre
en
place
une
vision
stratégique
ambitieuse
;
des
institutions
et
des
réformes
structurelles
adéquates
qui
permettent
d’accroitre
substantiellement
le
revenu
par
habitant
;
de
maitriser
le
chômage
;
de
réduire
les
inégalités,
la
pauvreté
et
la
marginalisation,
grâce
à
une
croissance
soutenue
à
forte
valeur
ajoutée,
résultat
d’une
hausse
substantielle
et
de
la
dynamisation
de
l’investissement
privé
national
;
l’accroissement
de
l’investissement
direct
étranger
(IDE)
avec
des
transferts
de
capitaux,
de
technologies,
de
connaissances
et
de
savoir-‐faire
permettent
l’acquisition
d’avantages
construits
à
forte
dose
technologique.
8
Pour
cela,
l’Etat
doit
restructurer
profondément
les
secteurs
de
la
justice,
de
la
finance
de
l’enseignement,
la
formation
et
l’innovation.
Le
rôle
de
l'Etat
est
fondamental
pour
développer
l'économie
du
savoir
et
le
capital
humain.
L’Etat
a
le
devoir
de
mettre
en
place
un
cadre
institutionnel
assurant
le
fonctionnement
des
affaires
sans
entraves.
Il
importe
aussi
de
réformer
profondément
le
système
fiscal
tunisien.
Une
fiscalité
moderne
doit
être,
au
contraire,
simple
et
juste,
et
permettre
de
financer
le
bon
fonctionnement
des
institutions
ainsi
que
les
investissements
d’innovation.
Il
importe
aussi
de
transformer
profondément
le
système
financier,
d’instaurer
un
système
de
lutte
contre
la
corruption,
de
réformer
la
justice,
…
L’objectif
de
cet
ouvrage
est
d’engager
le
débat
sur
ces
questions.
9
10
COMMENT
CREER
DAVANTAGE
DE
RICHESSES
ET
D’EMPLOIS
?1
Mohamed
HADDAR
Cette
image
d’une
Tunisie
sur
la
voie
du
progrès
cachait
une
autre
réalité.
Je
me
contente
d’avancer
cinq
éléments
:
la
croissance
est
relativement
faible
par
rapport
aux
besoins
sociaux
et
par
rapport
à
d’autres
pays
;
l’économie
demeure
fragile
;
de
profondes
inégalités
et
disparités
régionales
qui
nourrissent
un
sentiment
d'injustice
et
d'humiliation
;et
l’emploi,
particulièrement
des
jeunes
diplômés
est
inquiétant.
Au-‐delà
de
ces
facteurs,
il
faut
ajouter
le
sentiment
d’étouffement
et
de
frustration
qu'éprouve
une
bonne
partie
de
la
population,
particulièrement
la
jeunesse.
Je
traiterai,
dans
ce
qui
suit,
la
question
de
l’emploi,
dans
la
mesure
où
le
chômage
est
l’un
des
plus
grands
défis
pour
la
Tunisie
d’aujourd’hui
et
de
demain.
D’environ
500
mille
en
2010,
dont
157
mille
diplômés
du
supérieur,
le
nombre
de
chômeurs
est
passé
en
2011
à
700
mille
dont
220
mille
diplômés.
Les
demandes
additionnelles
d’emploi
resteront
pressantes
durant
la
période
2012-‐2016
autour
de
80
mille
par
an.
Les
sortants
de
l’Enseignement
supérieur
qui
sont
passés
de
4
mille
diplômés
en
1987
à21
mille
en
1999-‐2000
seront
au
nombre
de
76
mille
diplômés
en
moyenne
par
an.
L’insertion
de
ces
diplômés
du
supérieur
constituera
le
défi
majeur
de
la
prochaine
étape.
1
Ce papier a été rédigé début novembre 2011.
11
Par
contre,
avec
une
croissance
au
taux
annuel
moyen
de
5%,
l’économie
tunisienne,
n’a
pas
généré
suffisamment
d’emplois.
En
moyenne
annuelle,
elle
a
créé
70
mille
durant
les
années
2000
dont
25
mille
pour
les
diplômés
du
supérieur.
L’Administration
tunisienne
a
créé,
en
moyenne,
9
à
12
mille
postes
d’emploi
sur
la
période
1987-‐
2010,
soit
environ
17%
de
l’ensemble
des
créations
d’emploi.
12
productivité,
s’est
soldée
par
un
programme
d’ajustement
structurel
(PAS)
en
1986
avec
un
coût
social
élevé.
Cette
relation
entre
la
croissance
et
l’emploi
peut
être
saisie
par
le
rapport
entre
le
taux
de
croissance
de
l'emploi
et
celui
du
PIB
en
volume,
appelé
élasticité.
Cet
indicateur
mesure
la
«
réactivité
»
de
l'emploi
à
la
croissance
économique.
Sur
la
période
1982-‐2010,
le
contenu
en
emploi
de
la
croissance
a
baissé
passant
de
0,84
au
cours
de
la
période
1982-‐91
à
0,71
sur
la
période
1992-‐96
et
à
0,53
au
cours
de
la
période
1997-‐2010.
13
choix,
irréversible,
exige
une
amélioration
continue
de
la
compétitivité
et
par
la
suite
de
la
productivité.
14
question
de
la
rigidité
du
marché
du
travail
a
eu
des
conséquences
sociales
très
discutables.
Les
politiques
actives
d’emploi
ont
été
couteuses
et
n’ont
pas
donné
les
effets
escomptés.
Toutes
ces
mesures
ne
font
que
prolonger
le
schéma
de
développement
ancien
et
s’inscrivent
dans
le
cadre
du
modèle
de
développement
suivi,
qui
ne
peut
ni
absorber
la
main-‐d’œuvre
qualifiée
ni
contribuer
au
développement
régional.
15
Pour
avoir
des
solutions
durables,
il
faut
rompre
avec
les
réflexions
et
les
schémas
de
développement
passés
qui
ont
engendré
le
chômage,
la
pauvreté,
la
marginalisation
et
l’exclusion.
Il
faut
un
autre
modèle
où
la
technologie,
l’innovation
et
la
créativité
assureront
un
nouveau
dynamisme.
Notre
pays
a
besoin
de
restructurer
profondément
son
système
productif
afin
de
réussir
une
autre
intégration
dans
le
système
économique
mondial,
basée
sur
des
avantages
non
banalisés
mais
construits
où
la
composante
technologique
est
importante.
La
Tunisie
a,
pratiquement,
perdu
ses
avantages
comparatifs
et
devra
trouver
de
nouveaux
arguments
de
compétitivité
pour
maintenir
et
améliorer
sa
part
de
marché.
16
Ainsi,
le
futur
Gouvernement
a
le
devoir
et
la
responsabilité
de
faire
face
aux
urgences
et
de
lancer
en
même
temps
les
grands
chantiers
et
mettre
en
œuvre
des
réformes
structurelles
profondes.
Que
proposer
?
Sur
le
plan
économique,
la
tâche
du
futur
Gouvernement
est
délicate.
L’urgence
est
de
faire
redémarrer
une
machine
économique
en
panne
;
de
répondre
à
des
besoins
sociaux
urgents
mais
aussi
de
mettre
en
place
un
programme
ambitieux
qui
assure
au
peuple
tunisien
de
demain,
à
la
fois,
la
prospérité
et
la
solidarité.
Le
futur
Gouvernement,
qui
durera
théoriquement
une
année,
doit
adopter
des
réformes
structurelles
profondes.
Autrement,
il
risque
d’être
bloqué,
à
l’instar
de
celui
de
Béji
Caid
Essebsi
qui
n’a
cessé
de
nous
rappeler,
à
maintes
occasions,
que
son
objectif
est
de
"créer
un
impact
immédiat
sans
toutefois
hypothéquer
l’avenir".
Cette
position
n’est
pas
défendable.
D’ailleurs,
les
dépenses
d’assistance,
y
compris
le
projet
AMEL,
décidées
par
ce
‘’GP’’
aggravent
l’endettement
public.
Dans
ce
sens,
elles
seront
payées
par
les
générations
futures.
Pire,
ces
décisions
contribuent
à
développer
une
culture
d’assistance
alors
que
la
Tunisie
actuelle
a
besoin
de
sacrifices
et
de
multiplier
les
efforts
pour
créer
plus
de
richesse
et
non
la
détruire.
Procéder
à
une
distribution
de
ressources
au
lieu
de
procurer
des
emplois,
et
encourager
l’investissement
afin
d'augmenter
la
productivité
du
travail
est
un
pur
gaspillage.
En
effet,
plusieurs
mesures
décidées
sont
vaines,
et
pourraient
même
se
révéler
nocives.
Le
Programme
économique
et
social
(PES)
du
gouvernement
lancé
le
1er
avril
2011
ne
fait
que
reprendre
les
schémas
et
discours
classiques
de
ces
dernières
années.
Travaillant
sous
les
urgences
et
avec
une
équipe
de
l’ancien
régime,
le
gouvernement
n’a
même
pas
eu
le
temps
de
concevoir
un
programme
cohérent
avec
une
nouvelle
réflexion
qui
sort
du
schéma
et
du
discours
classiques
de
ces
dernières
années.
Les
dix
sept
mesures
avancées,
résumées
en
cinq
priorités,
constituent
un
catalogue
de
projets
et
de
thérapies
expérimentées
en
d’autres
circonstances
et
qui
n’ont
pas
donné
les
résultats
escomptés.
Il
ne
s’agit
pas
d’un
programme
mais
plutôt
d’un
ensemble
de
"mesures"
collectées
et
juxtaposés
avec
des
schémas
qui
tendent
à
se
reproduire
et,
pour
cette
17
raison,
à
s'éterniser.
Dans
la
mesure
où
aucun
parti
ne
dispose
d’un
programme
clair
et
opérationnel
pour
gouverner,
le
futur
gouvernement
issu
de
la
Constituante,
risque
de
reprendre
ces
mêmes
thérapies
et
d’agir
dans
la
même
direction.
18
demain,
à
la
fois
la
prospérité
et
la
solidarité,
avec
une
redéfinition
d’un
véritable
partenariat
entre
le
secteur
privé
et
le
secteur
public.
La
tâche
incombe
aussi
bien
au
Gouvernement
qu’aux
partis
politiques
et
à
toutes
les
forces
vives
du
pays,
surtout
que
la
situation
économique
en
2012
sera
difficile.
Les
raisons
sont
multiples
:
la
reprise
de
l’investissement,
en
raison
du
manque
de
visibilité,
ne
serait
pas
au
rendez-‐vous
;
les
attentes,
en
priorité
l’emploi,
sont
multiples
et
les
moyens
sont
faibles
;
l’impatience
des
citoyens
;
l’environnement
international,
caractérisé
par
la
crise
de
l’endettement,
est
difficile.
Le
futur
gouvernement
doit
faire
face
rapidement
à
quatre
priorités
:
l’ordre,
la
sécurité
et
la
stabilité
;
la
relance
de
l’économie
;
l’emploi
et
la
lutte
contre
l’exclusion
et
la
marginalisation.
Cela
implique
la
confiance
entre
les
dirigeants
et
les
citoyens
;
le
sacrifice
et
des
programmes
clairs
et
opérationnels
de
relance.
19
sens,
l’Etat
doit
prendre
en
charge
les
démunis
et
lutter
contre
l’exclusion
et
les
inégalités
sociales.
Le
budget
de
l'Etat,
malgré
la
faiblesse
de
la
marge
de
manœuvre,
est
un
instrument
pour
la
réalisation
de
certains
objectifs,
particulièrement
sociaux.
Pour
cela,
un
réexamen
minutieux
de
la
loi
des
finances
2012
est
une
priorité.
La
question
posée
est
de
trouver
le
financement
du
déficit
budgétaire
qui
en
découlera.
Etant
donné
la
notation
de
notre
économie
par
les
agences
internationales,
le
recours
au
marché
financier
international
est
une
opération
assez
risqué
car
le
coût
est
trop
élevé
et
risque
d’être
exorbitant.
Une
piste
à
creuser
est
de
réduire
les
dépenses
de
l’Administration.
Une
seconde
piste
à
étudier,
en
attendant
la
réforme
du
système
fiscal,
est
de
revoir
comment
collecter
plus
de
recettes.
Des
niches
fiscales
existent.
Cependant,
il
faut
souligner,
avec
force,
que
sans
croissance,
l’on
assiste
à
une
hausse
du
chômage
;
un
développement
de
la
pauvreté
ainsi
qu’à
une
détérioration
des
services
publics
tels
que
la
santé,
l’éducation
et
les
infrastructures
de
base.
Plusieurs
mesures
décidées
par
le
gouvernement
sortant
sont
vaines,
et
pourraient
même
se
révéler
nocives.
Les
dépenses
d’assistance
telles
que
celles
relatives
au
projet
AMEL
aggravent
l’endettement
public
sans
créer
de
richesse.
Dans
ce
sens,
elles
seront
payées
par
les
générations
futures.
Développer
la
culture
de
bonne
gouvernance
Plusieurs
économistes
soutiennent
que
dans
la
mesure
où
la
corruption
a
induit
un
déficit
d'investissement
et
un
secteur
privé
peu
dynamique
et
innovant,
la
bonne
gouvernance
génèrera
plus
de
croissance
au
taux
de
6
à
7%
et,
par
conséquent
plus
d’emplois.
Je
dirai
que
cette
proposition
est
nécessaire
mais
non
suffisante.
Suivant
le
même
sentier
de
croissance
et
avec
7%,
l’économie
créera
environ
110
milles
emplois
par
an.
Il
faudra
environ
25
ans
pour
résorber
les
700
milles
chômeurs.
De
plus,
il
n’est
pas
question
de
créer
seulement
des
emplois
mais
de
créer
surtout
des
emplois
qualifiés.
Le
modèle
de
développement
suivi,
même
avec
la
bonne
gouvernance,
ne
peut
pas
résoudre
ce
problème.
La
stabilité
politique
et
la
démocratie
en
Tunisie
ne
peuvent
être
assurées
que
si
le
pays
crée
environ
140
milles
emplois
par
an
20
dans
la
décennie
à
venir
dont
environ
80
à
90
milles
emplois
pour
les
diplômés
;
si
la
situation
ne
se
détériorera
pas
et
si
le
modèle
économique
est
vu
comme
juste
et
profitant
à
tous.
La
dignité
implique,
un
emploi
durable
et
un
revenu
consistant
pour
les
tunisiens.
Cela
implique
une
économie
d’innovation
et
de
créativité
donnant
une
croissance
plus
élevée
que
celle
réalisée
pendant
les
années
passées
;
à
forte
valeur
ajoutée
et
créatrice
d’emplois
qualifiés
et
durables.
La
prospérité
future
du
pays
repose,
en
grande
partie,
sur
le
doublement
de
l’investissement
des
entreprises
et
un
secteur
privé
dynamique
et
innovant,
capable
de
relancer
les
défis,
pour
qu’il
puisse
répondre
à
cet
enjeu
de
création
d’entreprises,
de
richesses
et
d’emplois.
Pour
cela,
il
nous
faut
une
vision
claire
et
ambitieuse
du
futur
de
la
Tunisie
qui
dépasse
largement
les
programmes
de
moyen
terme
d’un
mandat
électoral.
Il
s’agit
de
croire
et
d’agir
pour
que
notre
pays
ait
l'ambition
de
rejoindre
le
groupe
des
pays
développés
à
l'échéance
de
2040,
projetant
d’accroitre
substantiellement
le
revenu
par
habitant
;
de
maitriser
le
chômage
;
de
réduire
les
inégalités,
la
pauvreté
et
la
marginalisation,
grâce
à
une
croissance
soutenue
à
forte
valeur
ajoutée,
le
doublement
et
la
dynamisation
de
l’investissement
privé
national,
l'attraction
des
capitaux
étrangers
et
l'amélioration
de
la
productivité.
Le
préalable
est
de
rompre
avec
les
anciens
schémas
de
développement.
L'un
des
aspects
les
plus
importants
de
cette
vision
tient
à
la
redéfinition
d’un
partenariat
public
–
privé
pour
que
la
Tunisie
soit
à
la
fois
prospère
et
solidaire.
L’expérience
internationale
indique
que
la
Malaisie
est
passée,
en
vingt-‐cinq
ans
seulement,
du
stade
d’un
pays
en
développement
à
celui
d’un
pays
émergeant
en
21
mettant
en
place
une
vision
stratégique
(vision
2020)
ambitieuse
et
une
politique
d’investissement
adéquate
par
lesquels
il
aura
en
2020
le
statut
d’un
pays
pleinement
développé.
Cette
expérience
indique
aussi
que
la
réussite
d’un
nouveau
modèle
économique
résulterait,
principalement,
du
génie,
du
savoir-‐faire
et
de
la
réactivité
de
son
capital
humain
;
de
la
visibilité
de
ses
investisseurs
et
du
choix
opportun
de
l’Etat
quant
à
la
réorganisation,
la
dissolution
ou
la
création
des
structures
et
des
institutions
qui
relèvent
de
sa
tutelle.
Ce
choix
doit
refléter
un
large
consensus
entre
le
futur
Gouvernement,
les
partis
politiques
et
les
intellectuels
pour
qu’il
soit
respecté
par
les
différents
gouvernements
successifs.
Il
est
logique
que
les
partis
politiques
aient
des
programmes
divergents
sur
le
court
et
le
moyen
terme
mais
la
Tunisie
appartient
à
nous
tous
avec
nos
différences.
L’appartenance
à
la
Nation
nous
réunit
pour
concevoir
la
vision
du
futur
de
nos
enfants
sur
le
long
terme.
Cette
vision
doit
être
la
référence
pour
tous
les
programmes
à
moyen
terme
des
gouvernements
à
venir.
Chacun
s’engage
à
la
respecter
et
la
mettre
en
œuvre
en
rapprochement
le
plus
rapidement
du
but
final.
La
réalisation
de
ce
projet
exige
la
clarté
de
la
vision
et
la
volonté
politique
pour
le
réaliser.
Pour
s’y
positionner
il
faut
avant
tout
une
vision
stratégique
et
prospective,
claire
et
ambitieuse
du
futur
de
la
Tunisie
sur
le
long
terme.
"Voir
large
et
voir
loin"
22
futur
incertain
qui
serait
laissé
au
gré
des
événements
ou
à
un
futur
composé
de
la
simple
extrapolation
du
présent.
C’est
la
première
étape
dans
l’expression
du
changement
souhaité
en
donnant
une
direction
au
développement
économique
et
social.
23
l’investissement
direct
étranger
(IDE)
avec
des
transferts
de
capitaux,
de
technologies,
de
connaissances
et
de
savoir-‐faire
permettent
l’acquisition
d’avantages
construits
à
forte
dose
technologique
et
l'amélioration
de
la
productivité.
Dans
ce
contexte,
la
redéfinition
d’un
partenariat
public
–
privé
est
un
facteur
déterminant
de
réussite.
Quel
rôle
doit
jouer
le
secteur
privé
?
24
de
valeur
ajoutée.
Cependant,
par
opposition
à
d’autres
expériences
internationales,
les
PME
tunisiennes
n’ont
pas
innové.
Cette
situation
n’a
pas
favorisé
l’emploi
des
dizaines
de
milliers
de
diplômés.
Dans
ce
sens,
le
secteur
privé
n’a
pas
rempli
correctement
son
rôle.
Deux
arguments
peuvent
être
avancés.
Le
chômage
est
un
gaspillage
de
ressources
humaines.
Dans
ce
sens,
la
secteur
privé
n’a
pas
réussi,
par
sa
faiblesse
et
le
manque
de
son
dynamisme
à
absorber
les
500
mille
chômeurs
en
2010
dont
157
mille
diplômés.
De
même,
les
exonérations
fiscales,
les
subventions
et
les
autres
avantages
accordés
à
ce
secteur
constituent
des
ressources
payées
par
la
collectivité
alors
que
notre
économie
demeure
fragile
basée
principalement
sur
l’exploitation
des
ressources
naturelles
;
la
compression
des
salaires
et
une
dépréciation
continue
de
la
monnaie
nationale.
Le
tissu
productif
est
composé
à
90%
de
petites
et
moyennes
entreprises
(PME).
Pour
expliquer
cette
situation,
plusieurs
avancent
que
la
corruption
a
étouffé
l’activité
économique
du
pays
et
réduit
la
création
de
richesses.
Plus
de
corruption,
c’est
moins
d'investissement
et
par
conséquent,
c'est
moins
de
croissance
et
moins
d'emplois.
Il
en
a
résulté
de
ce
fait,
un
déficit
l’investissement
et
un
secteur
privé
peu
dynamique.
Sur
la
base
d’une
telle
argumentation,
certains
économistes
comme
le
‘’GP’’
déduisent
qu’il
suffit
d’instaurer
la
bonne
gouvernance
pour
assurer
une
croissance
de
7
à
10%,
de
créer
100
mille
emplois
et
de
réduire
en
conséquence
le
chômage.
Cette
proposition
est
valide
dans
le
court
terme
et
devient
insuffisante
à
moyen
et
long
terme.
La
prospérité
future
du
pays
repose,
en
grande
partie,
sur
le
doublement
de
l’investissement
des
entreprises
et
un
secteur
privé
dynamique
et
innovant,
capable
de
relancer
les
défis,
pour
qu’il
puisse
répondre
à
cet
enjeu
de
création
d’entreprises,
de
richesses
et
d’emplois.
Face
à
la
concurrence
internationale
sur
de
nombreux
produits,
même
sur
les
produits
basiques,
l’entreprise
tunisienne
a
peu
de
chance
d'être
compétitive.
L’économie
a,
pratiquement,
perdu
l’essentiel
de
ses
avantages
et
devra
trouver
de
nouveaux
arguments
de
compétitivité
pour
maintenir
sa
part
25
de
marché.
Cependant,
des
marchés
potentiels
existent.
C’est
aux
entrepreneurs
tunisiens
:
i)
d’identifier
des
niches
possibles
et
de
développer
des
partenariats
avec
le
capital
étranger
et
de
faire
appel
à
l’IDE
avec
des
transferts
de
capitaux,
de
technologies,
de
connaissances
et
de
savoir-‐faire
permettent
l’acquisition
d’avantages
construits
;
ii)
de
mettre
à
jour
leurs
parcs
d’équipement
par
l’acquisition
de
technologies
performantes.
L’expérience
internationale
indique
que
la
mondialisation
exige
le
développement
accéléré
de
nouvelles
stratégies
de
valeur
ajoutée.
Les
pays
émergents
opèrent
continuellement
de
grands
changements
pour
s’affranchir
d’un
rôle
de
sous-‐traitant,
intenable
à
terme
face
à
la
concurrence,
et
s’orienter
résolument
vers
le
produit
fini
et
les
marques.
Cette
stratégie
permet
d’améliorer
substantiellement
la
productivité,
la
richesse,
l’emploi
et
les
salaires.
Le
plus
délicat
et
lent
à
réaliser,
consiste
à
modifier
la
mentalité
des
acteurs
économiques
et
à
les
convaincre
de
l’opportunité
d’adopter
un
nouvel
état
d’esprit
conquérant
et
innovateur.
Quel
rôle
doit
jouer
le
secteur
public
?
26
Si
nous
adhérons
à
cette
deuxième
conception,
nous
soutenons
que
pour
une
Tunisie
prospère
et
solidaire,
l’Etat
doit
jouer,
en
plus,
deux
principaux
rôles.
Il
doit
jouer
un
rôle
stratégique
de
premier
plan.
Il
a,
par
ailleurs
l’obligation
de
hisser
le
climat
des
affaires
à
un
niveau
international.
Il
va
de
soit
que
l’Etat
joue
son
rôle
d'Etat-‐gendarme
en
assurant
la
sécurité,
la
justice
de
telle
sorte
que
la
sécurité
des
personnes
soit
effective,
que
le
droit
et
l'ordre
soient
respectés
et
en
particulier
que
l'économie
puisse
fonctionner.
Le
rôle
stratégique
Le
secteur
privé
ne
peut
jouer
seul
son
rôle.
L’Etat
doit
avoir
un
rôle
stratégique.
Il
doit
accompagner
le
privé
dans
sa
démarche
pour
définir
les
secteurs
stratégiques
présents
et
futurs.
Dans
ce
sens,
il
faut
subventionner
massivement
l'innovation
et
la
diffusion
de
technologies.
Il
est
urgent
de
mettre
en
œuvre
une
politique
industrielle
où
l’Etat
mise
sur
des
secteurs
d’avenir.
A
titre
indicatif,
le
gouvernement
actuel
de
la
France
a
contracté
un
emprunt
de
35
milliards
d’euros.
Pour
plusieurs,
une
telle
décision
aggrave
la
dette
publique.
L’argument
avancé
par
le
gouvernement,
qui
risque
de
partir
dans
moins
d’un
an,
est
d’améliorer
la
position
de
la
France
de
demain
dans
le
système
mondial.
En
effet,
cet
emprunt
a
été
destiné,
principalement,
à
restructurer
l’enseignement
supérieur
et
à
la
formation
(11
milliards
dont
8
pour
la
création
de
8
campus
d’excellence
mettant
l’accent
sur
la
santé,
les
biotechnologies
et
sur
la
capitalisation
des
Start
up)
;
à
accompagner
les
PME
des
filières
aéronautiques,
spatiales,
automobiles,
ferroviaires
et
navales
(6,5
milliards)
;
à
consolider
le
secteur
numérique
afin
de
généraliser
internet
à
très
haut
débit
(4,5
milliards).
La
responsabilité
d’instaurer
un
climat
des
affaires
favorable
à
l’initiative
privé.
27
peuvent
pas
être
productifs
ou
inventifs.
L'hôpital
et
l’école
doivent
être
conçus
comme
faisant
partie
d'un
dispositif
d'ensemble
destiné
à
maximiser
le
potentiel
de
croissance
du
pays
tout
entier.
28
La
responsabilité
d’assurer
la
paix
sociale.
29
climat
assurant
le
fonctionnement
des
affaires
sans
entraves
afin
d’encourager
l’investissement
;
augmenter
la
productivité
du
travail
;
créer
des
emplois
durables
et
hausser
les
salaires.
Tous
les
obstacles
à
la
liberté
d’entreprendre
pour
tous
les
citoyens
doivent
être
éliminés.
Les
pays
qui
ont
engagé
des
réformes
en
vue
d’améliorer
le
climat
de
l’investissement
tels
que
la
Chine,
Singapour,
la
Malaisie
ou
l’Inde
ont
enregistré
un
accroissement
substantiel
du
taux
d’investissement
privé.
Pour
cela,
l’Etat
doit
entamer
les
réformes
structurelles
pour
instaurer
un
système
de
lutte
contre
la
corruption
et
restructurer
profondément
les
secteurs
de
la
justice
;
de
la
finance
;
de
l’enseignement,
la
formation
et
l’innovation
…
Son
rôle
est
déterminant
pour
développer
l'économie
du
savoir
et
le
capital
humain.
La
santé
est
un
autre
aspect
essentiel
de
ce
capital
humain.
Des
individus
en
mauvaise
santé
ne
peuvent
pas
être
productifs
ou
inventifs.
L'hôpital
et
l’école
doivent
être
conçus
comme
faisant
partie
d'un
dispositif
d'ensemble
destiné
à
maximiser
le
potentiel
de
croissance
du
pays
tout
entier.
Il
importe
aussi
de
remettre
à
plat
la
fiscalité.
Le
système
fiscal
tunisien
est
d'une
complexité
et
d'une
opacité
excessives.
Une
fiscalité
moderne
doit
être,
au
contraire,
simple
et
juste,
et
permettre
de
financer
le
bon
fonctionnement
des
institutions
ainsi
que
les
investissements
d’innovation.
Les
pays
scandinaves,
en
particulier
la
Suède,
alignent
de
très
bonnes
performances
en
matière
de
croissance
et
d'innovation,
pourtant
ils
maintiennent
un
impôt
élevé
et/ou
fortement
progressif
sur
le
revenu.
Pourquoi
ne
pas
faire
de
même
?
30
QUEL
MARCHE
FINANCIER
POUR
L’ECONOMIE
DE
DEMAIN
?
Fadhel
ABDELKEFI1
31
les
groupes
tunisiens,
un
manque
de
transparence
comptable
et
surtout
un
enchevêtrement
entre
les
biens
personnels
de
l’entrepreneur
et
ceux
de
son
entreprise.
Il
va
sans
dire
que
ce
poids
des
habitudes
est
un
frein
au
développement
du
marché
financier
et
empêche
de
brillantes
entreprises
de
financer
leur
expansion
par
la
bourse.
A
ce
problème
‘culturel’,
nous
voyons
quelques
pistes
de
réflexion
envisageables
:
Obliger
les
entreprises
qui
dépassent
un
certain
niveau
d’endettement
à
faire
appel
au
marché
boursier
pour
renforcer
leurs
fonds
propres.
Sensibiliser
les
chefs
d’entreprises
aux
vertus
de
la
bourse
:
amélioration
de
la
notoriété,
valorisation
du
patrimoine,
résolution
de
la
problématique
de
la
transmission,
levée
de
fonds
propres…
32
l’année
2008
sur
une
performance
positive.
Les
autorités
tunisiennes
ont
considéré
cette
situation
comme
une
bénédiction
les
amenant
à
temporiser
toute
décision
de
libéralisation
des
investissements
étrangers
en
bourse.
33
Pour
le
reste,
l’investisseur
se
heurte
à
des
handicaps
aussi
nombreux
que
diversifiés
:
des
difficultés
financières,
un
flottant
réduit,
une
faible
liquidité,
des
résultats
volatiles,
un
manque
de
transparence,
un
manque
de
visibilité
sur
les
perspectives
d’avenir…
Faute
de
pouvoir
radier
certaines
valeurs
du
marché,
nous
voyons
deux
gisements
importants
pour
niveler
vers
le
haut
l’offre
sur
le
marché
tunisien
:
Dans
un
premier
temps,
il
serait
opportun
de
mettre
sur
le
marché
toutes
les
entreprises
liées
à
l’ex-‐président
et
qui
sont
placées
aujourd’hui
sous
contrôle
judicaire.
Plusieurs
de
ces
compagnies
affichent
une
situation
économique
et
financière
solide
et
sont
parfaitement
éligibles
au
marché
boursier;
34
davantage
sur
le
moyen
terme.
Faut-‐il
rappeler
que
même
dans
ses
années
‘glorieuses’
de
2009
et
2010,
le
marché
boursier
contribuait
à
environ
6%
dans
le
financement
de
l’investissement
privé
?
35
36
QUEL
SYSTEME
FISCAL
AU
SERVICE
DU
DEVELOPPEMENT
?
Fayçal
DERBEL1
Introduction
Thomas
Piketty
et
les
co-‐auteurs
de
l’ouvrage
«
pour
une
révolution
fiscale
»2
publié
en
janvier
2011
ont
préconisé
une
réforme
en
profondeur
du
système
d’impôts
directs
sur
le
revenu
en
France.
Ils
ont
recommandé
à
ce
titre
l’institution
d’un
impôt
unique
sur
le
revenu
en
supprimant
la
contribution
sociale
généralisée
(CSG),
le
renforcement
du
système
de
prélèvement
à
la
source
et
du
système
de
l’imposition
progressive.
Ils
ont
également
préconisé
l’individualisation
de
l’impôt
sur
le
revenu
en
mettant
fin
au
quotient
conjugal.
Les
propositions
de
Piketty
dans
«
sa
révolution
fiscale
»
cadrent,
dans
l’ensemble,
avec
plusieurs
caractéristiques
du
système
fiscal
tunisien
notamment
en
ce
qui
concerne
l’impôt
sur
le
revenu,
qui
est
axé
sur
le
barème
progressif,
le
système
de
retenue
à
la
source,
l’individualisation
de
l’imposition...
Pouvons-‐nous
alors
nous
enorgueillir
d’un
système
fiscal
moderne
et
révolutionnaire
sans
qu’il
y
ait
de
«
révolution
fiscale
tunisienne
»
?
La
réponse
est
sans
doute
négative.
Les
«
points
forts
»
que
l’on
peut
relever,
ne
doivent
en
aucun
cas
cacher
les
nombreuses
failles
du
système
fiscal,
qui
justifient
la
nécessité
d’engager
une
refonte
profonde
du
système
en
rapport
avec
les
objectifs,
les
mobiles
et
les
fondements
de
la
révolution
du
14
janvier
2011.
A
préciser
tout
d’abord
que
les
semblants
d’atouts
que
l’on
peut
relever
à
travers
une
revue
des
différentes
réglementations,
résultent
de
l’existence
d’une
infrastructure
légale
et
réglementaire
très
au
point
avec
les
standards
internationaux,
mais
qui
dans
l’application
et
la
mise
en
œuvre
souffre
de
1
Expert-‐comptable,
ISG
2
T.
Piketty,
C.
Landais
et
E.
Saez
:
Pour
une
révolution
fiscale
–
éd
Seuil
janvier
2011
37
défaillances
notoires.
Dans
le
domaine
fiscal,
cette
situation
nous
conduit
vers
deux
principaux
constats
:
38
précision
sur
le
poids
de
l’imposition
individuelle,
ni
sur
le
type
d’impôts
entrant
dans
sa
composition.
Sur
un
plan
purement
fiscal,
l’analyse
du
taux
global
de
la
pression
laisse
apparaître
des
distorsions
importantes
et
une
pression
relativement
élevée
sur
une
catégorie
bien
précise
de
contribuables.
Dans
une
étude
préparée
en
2007,
présentée
au
colloque
de
l’IACE1
et
publiée
à
la
Revue
Comptable
et
Financière
(RCF)
n°
76,
nous
avons
pu
relever
au
titre
de
l’année
2005
les
constatations
suivantes
(l’année
de
référence
est
relativement
ancienne,
mais
les
choses
n’ont
pas
beaucoup
changé
depuis).
1 Workshop IACE – CJE & CIPE -‐ 28 mars 2007 : Communication Regards sur la
39
15MD
soit
un
impôt
moyen
de
45
D
1
par
contribuable
bénéficiant
du
régime
forfaitaire
d’imposition.
l’exposé
des
motifs
de
la
loi
de
finances
pour
l’année
2011
estimant
le
nombre
de
forfaitaires
à
360.000.
2Négi
BACCOUCHE
:
conférence
:
fiscalité
et
développement
juillet
2010.
40
d’information
ou
de
statistiques
fiables
relatives
aux
dépenses
fiscales,
la
situation
n’a
pas
beaucoup
évolué.
Culture fiscale et mission de conseil : cas de la profession comptable.
41
II
-‐
Quelle
Fiscalité
Pour
L’après
Révolution
Sans
aller
jusqu’à
la
reprise
des
propos
de
Thomas
Piketty
précisant
que
«
Notre
système
fiscal
est
totalement
à
l’agonie
»
il
m’est
permis
d’affirmer
que
pour
éviter
le
risque
de
«
révoltes
fiscales
»
dans
la
période
à
venir,
une
profonde
réforme
du
système
fiscal
s’impose
selon
une
architecture,
des
fondements
et
des
mécanismes
qui
cadrent
parfaitement
avec
les
fondements
de
la
révolution
et
qui
s’articulent
autour
des
axes
suivants
:
42
pratiques
est
à
la
fois
une
pratique
de
veille
concurrentielle,
dans
la
mesure
où
l’on
s’intéressera
forcément
aux
pays
concurrents
qu’
«une
pêche
aux
bonnes
idées
»
puisqu’elle
oriente
vers
les
meilleures
pratiques.
Dans
le
cadre
de
cette
mise
en
œuvre,
il
convient,
à
mon
avis,
de
planifier
les
actions
par
ordre
de
priorité,
nous
pouvons
à
cet
effet
distinguer
les
actions
à
court
terme
ou
encore
qualifiées
d’urgentes
et
des
actions
à
moyen
terme
(2
à
5
ans
à
venir),
ayant
trait
à
des
mesures
plus
profondes
telle
que
l’institution
de
la
TVA
sociale.
Nous
nous
intéressons
dans
ce
qui
suit
aux
actions
dites
urgentes
devant
être
prises
durant
2011
et
2012
et
visant
essentiellement
de
parer
aux
insuffisances
notoires
développées
dans
la
première
partie
de
cette
communication.
L’objectif
de
ces
mesures
urgentes
étant
:
43
textes
devenus
très
nombreux,
puisque
l’on
recense
une
dizaine
de
codes
qu’avec
leur
mise
à
jour
forment
un
corpus
difficilement
maîtrisable.
Cette
action
consisterait
à
élaborer
un
CODE
GENERAL
DES
IPMOTS
évitant
les
redondances
et
la
lourdeur
et
regroupement
de
tous
les
impôts
et
taxes
en
vigueur.
Parallèlement,
les
mesures
suivantes
devraient
être
prises
dans
le
cadre
des
actions
à
court
terme
ci-‐avant
mentionnées.
1. Allègement
de
la
charge
fiscale
44
A
Refonte
du
régime
forfaitaire
d’imposition
Le
régime
forfaitaire
qui
est
censé
être
un
régime
d’exception
couvre
environ
80%
des
contribuables
relevant
des
BIC.
Une
mesure
urgente
(et
courageuse)
devrait
être
prise
pour
remplacer
ce
régime
forfaitaire
par
un
nouveau
régime
appelé
«
Régime
fiscal
de
la
micro-‐entreprise
».
Ce
régime
doit
:
1er
Axe
:
Amendement
intégral
du
CII,
de
tous
les
textes
qui
l’ont
complété
et
modifié
ainsi
que
de
toutes
les
dispositions
régissant
les
avantages
fiscaux
et
prévus
dans
d’autres
textes
et
promulgation
de
nouvelles
dispositions
qui
seront
insérées
dans
le
Code
Général
des
Impôts.
2ème
Axe
:
Les
nouvelles
dispositions
doivent
accorder
une
attention
particulière
à
travers
des
mesures
de
faveur
substantielle
au
profit
:
• Du développement régional
45
• Des
investissements
orientés
vers
la
haute
technologie
et
la
haute
valeur
ajoutée.
Pour
les
secteurs
traditionnels,
il
est
impératif
d’éviter
de
miser
exclusivement
sur
le
marché
international
tout
en
négligeant
le
marché
intérieur.
3ème
Axe
:
supprimer
les
régimes
spécifiques,
les
allégements,
les
régimes
sectoriels
d’exception
et
les
nombreuses
exonérations
qui
ont
donné
lieu
à
un
enchevêtrement
des
dérogations
et
parfois
à
des
redondances
et
des
contradictions,
qui
ont
rendu
la
compréhension
et
l’application
des
textes
d’avantages
fiscaux
particulièrement
difficiles.
4ème
Axe
:
Accompagner
l’amenuisement
des
avantages
consentis
par
une
réduction
substantielle
des
taux
d’imposition
du
droit
commun,
pour
que
le
régime
d’incitation
ne
soit
pas
considéré
comme
un
palliatif
aux
limites
et
imperfections
du
régime
du
droit
commun.
3. Atténuer
les
attitudes
antagonistes
Comme
première
action
prioritaire
pour
atténuer
les
attitudes
antagonistes
des
contribuables
et
de
l’administration,
il
y
a
lieu
d’envisager
un
amendement
du
Code
des
Droits
et
des
procédures
fiscaux
en
vue
de
renforcer
les
prérogatives
de
l’administration
dans
la
lutte
contre
la
fraude
fiscale
et
de
consolider
les
garanties
du
contribuable.
La
Tunisie
est
l’un
des
rares
pays
qui
protègent
encore
le
secret
bancaire
envers
l’administration
fiscale.
Cette
situation
peut
expliquer
la
prédominance
et
le
faible
rendement
du
régime
forfaitaire
d’imposition.
L’extension
du
droit
de
communication
reconnaissant
à
l’administration
l’accès
aux
données
bancaires
(et
postales)
du
contribuable
contrôlé
permettra
au
fisc
de
mieux
lutter
contre
la
fraude
fiscale
et
la
concurrence
déloyale.
46
A
La
consolidation
des
garanties
du
contribuable
Une
reformulation
de
l’article
38
du
CDPF
limitant
le
recours
aux
éléments
extra-‐comptables
aux
seuls
cas
d’absence
ou
de
rejet
de
comptabilité
ainsi
que
l’énumération
limitative
et
précise
des
irrégularités
pouvant
entraîner
le
rejet
de
la
comptabilité,
sont
de
nature
à
sécuriser
le
contribuable
et
à
consolider
ses
droits.
Conclusion
Lutte
contre
l’impunité
et
l’immunité
fiscales,
l’obligation
de
transparence,
et
l’équité
sont
aujourd’hui
les
maîtres
mots
du
modèle
de
développement
pour
la
Tunisie
libre
et
démocratique.
Le
système
fiscal
doit
faire
l’objet
d’une
réforme
radicale
pour
qu’il
puisse
cadrer
avec
les
impératifs
de
ce
modèle.
Il
s’agit
d’une
action
de
longue
haleine,
qui
peut
être
réalisée
en
deux
étapes.
Une
première
étape
pouvant
s’étendre
jusqu’à
la
fin
de
l’année
2012,
verra
la
promulgation
d’un
CODE
GENERAL
DES
IMPOTS,
avec
des
dispositions
permettant
une
meilleure
répartition
de
la
pression
fiscale,
une
rationalisation
des
avantages
fiscaux
et
une
véritable
réconciliation
entre
l’administration
et
le
contribuable.
La
deuxième
étape,
comportera
des
actions
à
engager
sur
la
base
de
réflexions
sur
des
aspects
plus
évolués
liés
à
la
mise
en
place
de
la
TVA
sociale,
le
bouclier
fiscal….
47
48
QUEL
SYSTEME
FISCAL
AU
LENDEMAIN
DE
LA
REVOLUTION
?
Néji
BACCOUCHE1
49
confirmer
cette
idée
largement
partagée
même
si
les
chiffres
avancés
ici
et
là
sur
les
montants
dérobés
paraissent
exagérés.
Dans
ces
conditions,
la
contribution
aux
charges
publiques
à
travers
le
payement
des
impôts
devient,
pour
le
nouveau
pouvoir,
problématique
alors
que
l’Etat
a,
plus
que
jamais,
besoin
des
contributions
pour
redistribuer
les
richesses
et
répondre
ainsi,
moyennant
une
politique
de
développement
global,
à
une
impatience,
parfois
incontrôlée,
des
populations.
3-‐
Je
n’ai
pas
la
prétention
de
proposer
des
recettes
de
réformes
qui
seraient
valides
pour
le
contexte
postrévolutionnaire.
En
matière
de
politique
économique
et
sociale,
il
faut
se
méfier
des
recettes
car,
leur
transposition
se
solde
souvent
par
un
échec
cuisant.
Ma
contribution
est
beaucoup
plus
modeste.
En
effet,
à
partir
du
diagnostic
du
système
actuel
(que
je
résume
dans
la
complexité,
l’injustice
et
le
manque
de
compétitivité),
j’évoquerai
les
orientations
qui
s’offrent
au
gouvernement
qui
a
la
charge
des
affaires
publiques
dans
ce
contexte
particulièrement
difficile
pour
ajuster
le
système
d’imposition
en
tant
qu’instrument
incontournable
pour
satisfaire
les
demandes
sociales.
Ne
perdons
pas
de
vue
que
l’impôt
finance
à
concurrence
de
85%
les
ressources
propres
du
budget
de
l’Etat
et
qu’environ
la
moitié
du
budget
couvre
les
rémunérations
publiques
d’un
demi-‐million
d’agents
publics
pour
une
population
ne
dépassant
pas
10,5
millions
d’habitants.
Les
ressources
propres
non
fiscales
sont
très
faibles.
Le
fonctionnement
des
services
publics,
à
la
fois
utiles
et
très
nombreux
en
Tunisie,
est
assuré
grâce
aux
impôts
qui
jouent
un
rôle
vital
pour
l’économie
et
la
société
toute
entière.
Mais
il
n’empêche
que
les
dysfonctionnements
du
système
fiscal,
régulièrement
dénoncés
par
la
doctrine
depuis
une
décennie
au
moins,
sont
loin
d’être
négligeables.
Ils
causent
des
tors
incalculables
à
l’économie
et
à
l’image
du
politique.
4-‐
Quelles
sont
alors
les
pistes
de
réformes
que
la
jeune
démocratie
doit
pouvoir
emprunter
pour
corriger
les
injustices,
pacifier
la
société
et
consolider
les
acquis
économiques
et
sociaux
non
négligeables
déjà
réalisés
par
l’Etat
indépendant
?
Conformément
aux
souhaits
des
organisateurs
de
cet
important
colloque,
je
me
limite
ici
à
la
question
fiscale
qui
est,
de
toute
évidence,
la
plus
complexe
en
raison
de
ses
enjeux
et
de
ses
50
prolongements.
Ne
perdons
pas
de
vue
que
l’enjeu
des
conflits
sociopolitiques
est
souvent
la
redistribution
des
richesses
par
les
prélèvements
obligatoires.
La
réhabilitation
de
l’impôt
dans
l’imaginaire
collectif
et
le
réajustement
des
techniques
d’imposition
supposent
une
prise
de
conscience
de
la
part
des
gouvernants
et
des
gouvernés
de
l’importance
capitale
de
la
question
fiscale
qui
conditionne
la
réussite
de
la
transition
démocratique
et
la
pacification
de
la
société.
Or,
il
est
facile
de
constater
l’absence
de
l’impôt
du
débat
politique
actuel
qui
se
focalise
sur
l’identité
et
la
religion
alors
que
l’histoire
de
la
Tunisie
et
l’homogénéité
culturelle
de
sa
population
devraient
dispenser
le
pays
de
ce
type
de
débat
stérile
et
de
perversion
qui,
souvent,
mènent
à
la
discorde.
5-‐
Ciment
de
la
société,
l’impôt
constitue
l’expression
moderne
de
la
solidarité
des
membres
de
la
communauté.
Comment
le
réhabiliter
pour
faire
accepter
les
politiques
publiques
?
Les
principales
actions
visant
à
mettre
en
phase
le
système
fiscal
avec
la
transition
démocratique
me
paraissent
être
les
suivantes
:
51
l’image
du
fisc,
d’expliquer
à
la
population
la
nécessité
de
payer
les
impôts
pour
accomplir
les
objectifs
de
la
révolution.
Pour
autant,
il
n’y
a
pas
d’autres
alternatives
que
celle
de
réhabiliter
l’impôt
et
crédibiliser
l’action
publique.
A
cet
effet,
contenir
la
démagogie
et
le
populisme
est
un
impératif
majeur
pour
éviter
au
pays
un
véritable
désastre.
Eviter
d’être
négatif
vis-‐à-‐vis
de
l’ancien
système
d’imposition
et
avoir
beaucoup
de
lucidité
pour
réhabiliter
d’innombrables
mesures
fiscales
utiles
déjà
adoptées
par
l’ancien
gouvernement
est
une
voie
indiquée
que
les
élites
doivent
prôner.
Le
nouveau
gouvernement
se
doit
de
capitaliser
la
fiscalisation
non
négligeable
du
système
économique
déjà
opérée
pour
construire
un
système
fiscal
à
la
fois
juste
et
efficace
pour
la
croissance,
la
compétitivité,
la
redistribution
et
le
développement
équilibré
et
durable.
A
cet
effet,
l’impôt
doit
devenir
l’objet
d’un
véritable
débat
de
société
et
les
parlementaires
doivent
saisir
la
portée
des
prélèvements
qui
constituent
le
moyen
incontournable
de
réaliser
les
«
promesses
»
politiques
dans
un
contexte
de
globalisation
de
l’économie
et
de
compétition
féroce.
Le
civisme
fiscal
7-‐
Le
devoir
fiscal
doit
être
«
sacralisé
»
et
tout
manquement
à
ce
devoir
doit
être
dénoncé
et
réprimé
avec
une
fermeté
sans
faille.
A
l’école,
l’obligation
fiscale
doit
figurer
dans
les
programmes
éducatifs
et
les
hommes
de
culture
doivent
contribuer
à
cet
effort
de
lutte
contre
la
tricherie
et
la
fraude.
Le
rôle
des
éducateurs
et
des
intellectuels
est
déterminant
pour
asseoir
une
nouvelle
culture
fiscale
qui,
à
la
fois,
exprime
la
solidarité
des
membres
de
la
collectivité
et
donne
à
l’Etat
les
moyens
indispensables
pour
provoquer
le
développement
solidaire
de
toutes
les
catégories
et
toutes
les
régions
du
pays.
Lorsque
le
pouvoir
politique
privilégie
une
région
au
détriment
d’autres
ou
une
caste,
il
ne
tardera
pas
à
en
faire
les
frais
et
ce
en
dépit
d’une
judicieuse
politique
de
transferts
sociaux
dans
sa
conception
et
qui,
par
ailleurs,
avait
permis
au
régime
de
BEN
ALI
de
tenir
pendant
23
ans.
Son
essoufflement
naturel,
conjugué
avec
la
crise
économique
subie
en
plein
fouet
depuis
2008
ainsi
que
les
abus
de
plus
en
plus
insupportables
ont,
fort
heureusement,
accéléré
la
chute
brutale
du
régime.
52
8-‐
Le
débat
politique
ne
doit
pas
perdre
de
vue
que
les
réformes
promises
par
les
partis
politiques
doivent
être
financées
et
que
le
financement
doit
être
assuré,
à
titre
principal,
par
l’impôt
car
l’endettement
peut
être
fatal
pour
l’indépendance
de
l’Etat.
Chacun
le
sait,
la
dette
doit
impérativement
être
contenue
dans
des
limites
raisonnables.
L’histoire
de
la
Tunisie
est,
à
cet
égard,
riche
d’enseignements.
La
mauvaise
politique
fiscale
a
coûté
au
pays
sa
souveraineté
fiscale
en
1870
et
sa
souveraineté
politique
en
1881.
IBN
KHALDOUN,
natif
de
Tunis
et
célèbre
historien
dans
le
monde
entier,
nous
avait
dicté
de
tirer
les
leçons
de
l’histoire.
Les
tunisiens
seront-‐ils
capables
de
tirer
les
leçons
de
leur
propre
histoire
?
L’exemple
actuel
de
la
Grèce
est
fort
significatif.
Il
mérite
d’être
médité.
9-‐
Quoi
qu’il
en
soit,
la
compétition
politique
réelle
devra
s’articuler
autour
du
payement
de
l’impôt
dont
l’accomplissement
doit
devenir,
dans
un
système
juste
et
démocratique,
une
condition
de
l’exercice
des
fonctions
publiques
et
de
l’accès
aux
prestations
fournies
par
les
administrations
et
entreprises
à
participations
publiques.
L’exemplarité
des
dirigeants
est
déterminante
pour
ancrer
le
devoir
fiscal.
La
ferme
sanction
de
la
méconnaissance
de
ce
devoir
et
la
publicité
faites
aux
fraudes
caractérisées,
par
décision
du
juge,
sont
de
nature
à
dissuader
les
fraudeurs.
En
même
temps,
la
mise
en
place
d’un
label
«
entreprise
citoyenne
»
octroyée
par
un
Conseil
des
Prélèvements
obligatoires
composé
d’experts
aux
entreprises
qui
accomplissent
scrupuleusement
leur
devoir
fiscal
est
de
nature
à
ancrer
le
civisme
fiscal.
Les
droits
économiques
et
sociaux
des
personnes
ne
peuvent
devenir
effectifs
que
moyennant
l’observation
par
tout
le
monde
du
devoir
fiscal.
Sans
cette
condition,
l’Etat
ne
sera
pas
en
mesure
de
satisfaire
les
besoins
collectifs
légitimes.
La
légitimité
de
ces
besoins
collectifs
ne
peut
provenir
que
de
l’accomplissement
du
devoir
fiscal
selon
leurs
facultés
contributives.
53
tentation
de
la
fraude
est
quasiment
automatique.
Cette
règle
d’or
a
été
posée
par
notre
grand
historien
et
sociologue
IBN
KHALDOUN
à
la
fin
du
XIVème
siècle
et
elle
a
été
reprise
par
l’économiste
américain
LAFFER
(conseiller
de
REGAN)
qui
a
élaboré,
vers
la
fin
du
XXème
siècle,
une
courbe
qui
porte
son
nom.
C’est
pourquoi
il
convient
de
manier
les
taux
avec
une
extrême
prudence.
La
solution
pour
les
nouveaux
gouvernants
ne
réside
pas
dans
l’augmentation
des
taux
des
impôts
grevant
les
revenus
ou
dans
la
création
de
nouveaux
prélèvements
sur
les
richesses
(revenu
ou
capital).
L’inefficacité
totale
de
telles
mesures
et
leurs
effets
pervers
sur
l’investissement
conduit
à
les
éviter
d’autant
plus
que
la
compétition
internationale
pour
attirer
le
capital
est,
aujourd’hui,
l’une
des
plus
féroces.
11-‐
La
Tunisie
dispose
d’un
gisement
fiscal
non
encore
exploité
et
qui
peut
procurer
à
l’Etat
et
aux
collectivités
territoriales
des
ressources
considérables
pour
financer
l’activité
publique.
Il
s’agit
de
la
masse
des
forfaitaires
qui,
pour
l’essentiel,
arrivent
à
se
soustraire
de
leur
«
contribution
juste
»
et
ce
en
se
logeant
dans
cette
catégorie
magique.
Cette
dernière
attire,
selon
les
chiffres
officiels,
370000
personnes
exerçant
des
activités
industrielles
et
commerciales
et
dont
la
contribution
moyenne
de
chacune
est
inférieure
à
100DT,
c’est-‐à-‐dire
comparable
à
celle
d’un
salarié
au
SMIG.
La
contribution
moyenne
du
salarié
à
l’effort
fiscal
national
serait
proche
de
1000DT
sans
compter
ses
cotisations
sociales
alors
que
les
forfaitaires
sont
souvent
en
fraude
vis-‐à-‐vis
de
la
sécurité
sociale.
Cette
situation
affecte
gravement
le
secteur
économique
organisé
qui
souffre
ainsi
de
la
concurrence
déloyale
pratiquée
par
le
secteur
informel
dont
l’ampleur
était
devenue
inquiétant.
Dès
lors,
la
soumission
de
toutes
les
activités
économiques
à
l’impôt
permet
non
seulement
la
modernisation
de
la
gestion
de
l’économie
mais
aussi
et
surtout
de
procurer
à
la
puissance
publique
des
moyens
financiers
dont
elle
a
besoin
dans
ce
contexte
postrévolutionnaire
difficile.
En
même
temps,
cette
extension
de
l’assiette
de
l’imposition
permet
à
l’économie
de
consolider
sa
compétitivité
au
niveau
international
d’autant
plus
que
le
pays
avait
judicieusement
opté
depuis
1994/1995
pour
l’ouverture
sur
l’extérieur
après
avoir
choisi,
déjà
depuis
trois
54
décennies,
l’économie
de
marché
et
ce
à
l’instar
de
la
quasi-‐totalité
des
Etats
du
monde,
la
Chine
comprise.
55
Favoriser
la
viabilité
de
l’entreprise
14-‐
L’entreprise
est
la
cellule
de
base
de
l’économie.
Son
développement
et
sa
pérennité
dépendent
en
partie
du
système
fiscal
en
raison
de
l’importance
croissante
du
coût
fiscal
dans
le
prix
des
biens
et
services
produits
dans
les
sociétés
fiscalisées.
On
en
a
pour
preuve
l’engouement
des
investisseurs
à
la
défiscalisation
directe
ou
indirecte
pratiquée
par
un
très
grand
nombre
de
pays.
Les
Etats
recourent
aux
incitations
fiscales
pour
attirer
les
investissements
sur
leur
territoire
et
ce,
en
procédant
soit
à
l’exonération
ou
à
la
réduction
des
prélèvements
obligatoires
soit
à
la
subvention
à
partir
des
impôts.
L’importance
que
joue
l’entreprise
structurée
dans
l’économie
d’aujourd’hui
a
conduit
les
différents
gouvernements
à
élaborer
une
politique
fiscale
de
l’entreprise
car
cette
dernière
est
créatrice
des
richesses
et
des
emplois
et
de
ce
fait,
elle
génère,
par
son
activité,
les
recettes
fiscales
et
sociales
les
plus
variées.
56
16-‐
Les
taux
de
l’impôt
doivent
être
ajustés
en
fonction
du
type
des
activités
en
question.
Il
est
difficile
de
comprendre
comment
on
impose
encore
au
même
taux
les
bénéfices
des
sociétés
industrielles
et
les
bénéfices
des
sociétés
commerciales
alors
que
le
pays
a
besoin
d’encourager
son
industrie.
Avant
les
réformes
fiscales
de
1989,
il
existait
un
taux
préférentiel
au
profit
des
sociétés
industrielles
qui
bénéficiaient
d’une
réduction
de
dix
points
par
rapport
aux
sociétés
commerciales.
De
même,
l’assiette
de
l’impôt
a
besoin
d’être
ajustée
pour
tenir
compte,
non
seulement
de
la
nécessité
d’encourager
l’emploi
et
l’innovation,
mais
aussi
des
systèmes
comparés
pour
permettre
à
l’entreprise
opérant
en
Tunisie
de
rester
compétitive.
Les
modalités
de
recouvrement
de
l’impôt
font
partie
des
critères
de
la
compétitivité
d’un
système
fiscal.
Le
payement
anticipé
gène
considérablement
la
trésorerie
de
l’entreprise
tout
comme
les
modalités
de
restitution
des
crédits
d’impôts
qui,
en
Tunisie,
restent
en
deçà
de
celles
en
vigueur
dans
les
pays
partenaires.
Il
ne
faut
jamais
perdre
de
vue
que
la
compétition
est
engagée
avec
les
économies
des
pays
de
l’Union
Européenne
et
qu’en
conséquence,
le
rapprochement
de
notre
fiscalité
des
entreprises
de
celle
des
pays
partenaires
devient
un
impératif
économique
dont
la
méconnaissance
relève
de
l’absurde.
57
Certains
pays
inscrivent
dans
leur
constitution
le
principe
de
l’équilibre
budgétaire
pour
maitriser
l’endettement.
58
in
totalement
irresponsables.
La
situation
sociale
provoque
des
baisses
consécutives
de
la
notation
du
pays
par
les
agences
spécialisées
et
la
baisse
de
la
note
conférée
se
traduit
par
un
surcoût
de
l’endettement
auquel
il
est
difficile
pour
la
Tunisie
d’y
échapper.
Les
exemples
de
la
Grèce,
de
l’Irlande
et
du
Portugal
sont
édifiants
alors
même
que
ces
pays
peuvent
compter
sur
l’appui
massif
de
l’Union
Européenne.
La
Tunisie
ne
peut
compter
que
sur
ses
propres
moyens
et
en
particulier
sur
l’intelligence
de
son
élite
de
managers
à
laquelle
le
peuple
doit
faire
confiance
tout
en
instituant
des
mécanismes
de
contrôle
que
suppose
toute
démocratie.
20-‐
Dans
toutes
les
situations
de
crise,
l’impatience
n’arrange
ni
les
impatients
ni
les
autres.
Au
contraire,
elle
peut
être
fatale
et
peut
rouvrir
la
voie
de
nouveau
à
la
dictature
d’autant
plus
que
la
culture
sociale
s’y
prête.
La
désobéissance
a
son
contexte.
La
démocratie
qui
se
construit
a
besoin
du
règne
de
l’ordre,
du
respect
du
droit
et
du
payement
équitable
par
tous
les
contribuables
de
leurs
impôts
pour
apporter
les
solutions
appropriées
aux
multiples
problèmes
socioéconomiques
qui
se
posent
au
pays.
La
solution
de
ces
problèmes
passe
inévitablement
par
la
promotion
de
l’économie
sur
laquelle
on
opère,
par
l’impôt,
une
ponction
au
profit
de
l’Etat.
Dépositaire
de
l’intérêt
général,
l’Etat
n’est
pas
notre
ennemi,
il
est
notre
bien
commun.
Pour
éviter
les
dérapages
et
détournements
de
fonds
qui
ont
sillonné
notre
histoire
politique,
l’Etat
a
besoin
à
la
fois
de
notre
confiance
et
de
notre
surveillance.
La
réalisation
du
bien-‐
être
collectif,
objectif
naturel
de
toute
révolution
populaire,
passe
par
le
compromis
entre
ces
deux
impératifs.
59
60
GOUVERNANCE,
TRANSITION,
EMERGENCE
Roland
LANTNER1,
61
pas
encore,
mais
à
l’Institut
des
Hautes
Etudes
de
Tunis,
de
janvier
1955
à
septembre
1959.
Ses
élèves
tunisiens
ont
eu
la
chance
d’avoir
un
grand
professeur,
qui,
au
cours
des
presque
cinq
années
passées
ici,
a
su
observer,
s’imprégner
des
problèmes,
s’impliquer
dans
leur
solution.
C’est
ici
qu’il
a
acquis
sa
sensibilité
et
développé
ses
analyses
sur
la
question
agraire
et
les
problèmes
de
l’agriculture
dans
les
pays
ayant
acquis
leur
indépendance
politique.
Dans
l’hommage
que
lui
a
rendu
notre
collègue
Claude
Berthomieu
dans
la
revue
Economie
Appliquée
(4),
il
a
insisté
avec
pertinence
sur
cette
phase
tunisienne
d’apprentissage
de
Gérard
de
Bernis
–
«
Bernis
»
comme
il
aimait
que
ses
proches
l’appellent
en
respectant
ainsi
son
éducation
catholique
à
la
simplicité
-‐.
62
«
La
promotion
d’une
«
économie
de
tout
l’homme
et
de
tous
les
hommes
»
lui
constitue
[à
l’économiste]
des
devoirs
particuliers
à
l’égard
des
peuples
des
pays
sous-‐développés
».
C’était
en
1958
:
nous
dirions
aujourd’hui
«
pays
en
développement
»
mais
surtout,
c’était
en
pleine
guerre
d’Algérie
et
une
telle
vision
exigeait
un
certain
courage
intellectuel.
Les
anciens
étudiants
tunisiens
qui
ont
aujourd’hui
soixante-‐dix
ou
soixante-‐quinze
ans
ont
eu
un
grand
professeur,
un
grand
serviteur
de
la
science
économique,
habité
tout
entier
du
sens
de
sa
mission
commencée
ici
:
mettre
cette
science
économique
au
service
des
hommes,
ne
jamais
ruser
avec
les
impératifs
de
l’humanisme.
Relisons
de
Bernis.
I
–
La
gouvernance
La
Tunisie
est
à
la
croisée
des
chemins.
En
schématisant,
on
peut
représenter
les
choix
possibles
par
une
arborescence
qui
a
l’inconvénient
de
résulter
d’un
regard
extérieur
mais
comme
on
m’a
dit
qu’il
y
avait
de
très
nombreux
partis
en
compétition
pour
l’élection
de
la
Constituante,
il
est
impossible
d’entrer
dans
tous
les
détails.
63
A
gauche,
la
Tunisie
opte
pour
la
démocratie
et
doit
à
nouveau
opter
en
«
b
»
entre
démocratie
libérale
de
type
turc
et
démocratie
progressiste.
Elle
peut
donc
aller
à
droite
dans
une
voie
politiquement
libérale
et
du
point
de
vue
religieux,
de
type
turc
(la
laïcité
y
ayant
été
adoptée
dans
le
passé
et
laissant
quelques
empreintes
durables).
(b) Régime
Démocratie Régime autoritaire,
Démocratie
Laïque Islamiste dictatorial
Libérale
progressiste intégriste laïc (récemment
de type turc (e)
(c) (d) prié de dégager)
64
les
responsables
de
ces
mouvements
peuvent
envisager,
sous
certaines
conditions,
de
s’allier
avec
les
partisans
de
l’état
2.
65
NC
fait
donc
baisser
la
variété
des
résultats.
Ainsi
il
faut
disposer
de
suffisamment
de
commandes
pour
obtenir
une
certaine
classe
de
résultats
voire
le
résultat
souhaité.
Par
exemple,
si
nous
voulions
aller
à
l’état
2
et
que
nous
disposions
de
3
«
commandes
»
a,
d
et
e,
nous
n’y
parviendrions
pas.
VR
=
Log21
=
0
Comme
le
nombre
total
d’états
NE
et
donc
de
résultats
possibles
est,
dans
notre
modèle
simplifié,
de
8,
cela
signifie
que
NE
=
8,
donc
VE
=
Log28
=
3.
On
objectera
sans
doute
que
ce
nombre
est
trop
faible
pour
être
réaliste
compte-‐tenu
du
nombre
élevé
de
partis
déclarés.
Objection
pertinente
mais
qu’il
convient
cependant
de
pondérer.
D’une
part
dans
les
grandes
démocraties
occidentales,
il
n’y
a
guère
plus
de
2
à
3
grandes
options
possibles.
Le
modèle
à
2
options
est
d’autant
plus
séduisant
que
c’est
le
seul
à
ne
pas
engendrer
d’indécidabilité
par
circularité
des
préférences
comme
l’a
démontré
J.
K.
Arrow
dans
son
célèbre
théorème
(1).
D’autre
part,
nous
y
reviendrons,
ci-‐dessous,
il
paraît
raisonnable
d’anticiper
des
coalitions
(explicites
et
annoncées
préalablement
au
vote
ou
plus
discrètes
voire
secrètes)
réduisant
sensiblement
le
nombre
de
choix
alternatifs
réels.
66
second
tour.
Il
ne
s’agit
donc
plus
d’atteindre
au
premier
que
l’un
de
ces
deux
résultats
:
en
dynamique
des
systèmes,
cela
augmente
NR
et
son
logarithme
VR
qui
prennent
respectivement
les
valeurs
2
et
1.
67
VR
=1
<
Log28-‐
Log22
=
3-‐1
=
2
Pour
les
motifs
déjà
indiqués,
le
nombre
d’états
réellement
possibles
est
souvent
assez
petit.
Par
ailleurs,
les
résultats
peuvent
être
restreints
par
des
contraintes
internes
et
externes
parfois
aléatoires
:
bonne
récolte,
tourisme,
évolution
de
la
situation
en
Libye,
appui
des
pays
du
G8,…
Par
souci
d’intégrité,
notons
aussi
que
les
commandes
réelles
ne
sont
pas
binaires
:
pour
manipuler
un
hélicoptère
télécommandé
d’enfant,
il
ne
suffit
pas
de
disposer
des
commandes
«
avant-‐
arrière
»,
«
droite-‐gauche
»
et
«
haut-‐bas
».
Il
faut
au
moins
pouvoir
indiquer
à
chaque
fois
:
plus
ou
moins
vite,
avec
une
commande
continue
de
l’arrêt
jusqu’à
la
vitesse
maximale
dans
chacune
des
six
directions.
De
la
loi
de
la
variété
requise,
on
peut
retenir
le
principe
essentiel
:
mieux
placées
sont
les
commandes,
moins
nombreuses
sont
celles
qui
sont
requises
pour
obtenir
un
résultat
donné.
1ère
remarque
:
le
totalitarisme
Il
consiste
à
imposer
un
résultat
unique,
prédéterminé,
pour
tout
type
de
décision
à
prendre.
Cela
suppose
que
le
nombre
de
contrôles
NC
et
leur
variété
VC
soient
suffisants
pour
réduire
le
nombre
des
résultats
NR
à
1
et
la
variété
des
résultats
VR
à
zéro.
Vous
avez,
hélas,
expérimenté
le
totalitarisme
et
avez
su,
par
une
expérience
historique
remarquable,
en
mesurer
les
limites
qu’indique
le
raisonnement
théorique
:
en
fait,
quand
on
veut
absolument
tout
contrôler,
le
nombre
de
commandes
à
activer
est
si
élevé
qu’on
bloque
le
système.
Il
faut
déléguer
des
décisions
à
des
pouvoirs
régionaux,
locaux,
sectoriels
ou
spécialisés.
Et
déléguer
comporte
toujours
un
risque
(Khrouchtchev
était
dans
l’appareil
stalinien
et
Gorbatchev
dans
le
système
brejnévien).
Lorsque
l’information
se
complexifie,
le
totalitarisme
devient
68
impraticable
et,
à
long
terme,
sauf
dans
une
société
totalement
autarcique
du
point
de
vue
informationnel,
il
apparaît
condamné.
Pour
plusieurs
pays
du
Maghreb,
y
compris
la
Libye,
y
compris
peut-‐
être
la
Syrie
qui
ne
dispose
plus
que
de
ses
appuis
internationaux
et
de
sa
position
géographique
et
géopolitique
pour
pérenniser
son
système
autocratique,
y
compris
sans
doute
certains
pays
d’Asie
où
les
évolutions
sont
rapides
sous
l’impact
d’une
très
forte
croissance
économique,
nous
sommes
déjà
ou
nous
approchons
de
ce
point
critique.
69
économiques,
religieux,
politiques,
les
élites
intellectuelles,
etc.)
décident
de
former
une
seule
coalition
contre
vous.
Sans
entrer
dans
des
débats
idéologiques,
je
m’exprimerai
sur
un
seul
théorème
de
la
théorie
néo-‐classique,
celui
de
Milleron
repris
et
amplifié
par
un
autre
auteur
néo-‐classique,
Lionel
Stoleru
(L’équilibre
et
la
croissance
économique
(13)).
Ce
théorème
suppose
que
le
marché
résout
de
manière
optimale
l’allocation
des
ressources,
ce
qui
peut
naturellement
être
contesté.
Stoléru
écrit
:
«
Le
marché
résout
les
problèmes
de
production
mais
pas
les
problèmes
de
répartition.
»
70
Alors,
démontre
Milleron
en
substance,
sous
hypothèses
légères
(essentiellement
l’homogénéité
des
fonctions
d’utilité
des
consommateurs
par
rapport
aux
consommations
:
par
exemple
si
la
consommation
d’un
consommateur
est
multipliée
par
deux,
son
utilité
est
multipliée
par
1,9
selon
le
degré
de
«
complétude
de
ses
désirs
»),
le
marché
aboutit
pour
la
répartition
à
un
choix
équivalent
à
celui
d’un
vote
où
chacun
disposerait
d’un
nombre
de
voix
proportionnel
à
ses
revenus
du
capital.
Les
décisions
du
marché
équivaudraient
donc
à
celles
d’un
vote
censitaire.
En
schématisant,
mais
à
peine,
ce
théorème,
la
démocratie
du
marché
dans
la
répartition,
c’est
dix
fois
plus
de
richesses
donnant
dix
fois
plus
de
voix.
71
Plus
généralement
le
libre-‐échange
enferme
le
pays
le
moins
développé
dans
des
secteurs
où
les
gains
attendus
du
progrès
technique
sont
les
moins
élevés.
Un
second
argument,
annexe
est
celui
de
l’aggravation
du
chômage
:
par
exemple
dans
le
textile,
les
Chinois
prennent
les
emplois
des
Tunisiens
qui
prennent
les
emplois
des
Anglais,
etc.
Selon
un
principe
de
transparence
justement
défendu
par
Raymond
Aron,
plus
«
l’équation
personnelle
»
d’un
professeur
est
connue,
moins
grand
est
le
risque
qu’il
influence
ses
auditeurs.
En
l’occurrence,
tous
les
points
de
vue
précédents
sont
à
prendre
en
considération
mais
comme
je
crois
au
progrès
et
au
bien-‐être,
il
me
semble
que,
sauf
exception
(et
il
en
existe
qui
sont
temporairement
justifiées
pour
des
secteurs
émergents
par
exemple)
et
sauf
distorsion
manifeste
de
concurrence
(distorsion
économique
par
le
dumping,
la
sous-‐évaluation
de
la
monnaie,
par
la
non
réciprocité
et
le
refus
des
importations
provenant
de
certains
pays
partenaires,
etc.,
distorsion
sociale
:
travail
des
enfants,
discriminations
de
tous
ordres,
distorsion
écologique
:
utilisation
délibérée
de
procédés
plus
polluants,
etc.),
le
libre-‐échange
permet
au
monde,
et
finalement
à
tous
les
pays,
d’aller
plus
vite
vers
le
bien-‐être
collectif.
Certes,
par
des
voies
que
d’aucuns
jugeront
parfois
sinueuses,
souvent
à
juste
titre.
Par
exemple,
il
faut
réguler
l’échange
pour
qu’il
soit
équitable,
réciproque
et
sans
distorsion
(or
elles
demeurent
nombreuses).
Néanmoins,
que
de
chemin
parcouru
en
cinquante
ans
:
l’Afrique
engagée
dans
la
transition
démographique,
l’Afrique
où,
presque
partout,
on
accède
au
téléphone
mobile,
l’Afrique
à
5%
de
croissance
annuelle,
ce
sont
aussi
des
résultats
de
la
mondialisation.
Pour
vivre
heureux,
vivons
cachés
affirme
le
dicton.
En
l’occurrence,
je
ne
le
crois
pas
extensible
à
la
macroéconomie.
L’autarcie
est
nuisible
à
l’émulation
que
suscite
le
commerce
international.
Et
l’émulation
est
un
moteur
économique
puissant
auquel
nous
devons
toute
une
part
du
développement
de
ces
dernières
décennies.
Ce
qui
n’interdit
pas
les
exceptions
citées
ci-‐
dessus
à
la
règle
du
libre-‐échange.
72
Donc,
là
encore
pas
le
«
tout
marché
»,
mais
oui
au
marché,
régulé
et
encadré
par
les
instances
internationales
existantes
ou
à
créer
d’urgence.
ü Une
troisième
fausse
piste
:
l’intégration
régionale
intra-‐
maghrébine
Je
m’appuie
sur
les
travaux
du
LIEI
(Laboratoire
d’
Intégration
Economique
Internationale)
de
Tunis,
où
travaillait
mon
ami
Tahar
Ben
Marzouka,
sur
un
thème
qui
le
passionnait
:
l’intégration
économique
nord-‐africaine(10).
Il
y
est
démontré
de
manière
convaincante
que
le
gain
potentiel
en
5
ans
d’une
intégration
régionale
totale
(supposant
la
signature
d’une
multitude
extraordinaire
d’accords
bilatéraux
et
multilatéraux)
serait
de
3
à
5
%
au
total.
Bref,
beaucoup
de
bruit
pour
peu
de
chose
car
ces
accords
ne
seront
d’évidence
pas
ou
pas
tous
signés.
Cette
évaluation
est
bien
corroborée
par
celle
de
Didier
Lebert
(9)
montrant
que
la
densité
des
échanges
entre
pays
nord-‐africains
était
beaucoup
plus
faible
que
la
densité
des
échanges
de
chacun
des
pays
du
MENA
avec
l’Europe.
2. Les
recettes
Ensuite
pourrions-‐nous
dire
un
mot
des
recettes
qui
ont
marché
en
Orient,
pour
la
Corée
du
Sud
et
pour
divers
pays
émergents,
par
exemple
:
73
ü un
état
soutenant
rigoureusement
le
développement
tout
en
stimulant
l’initiative
privée
administrativement,
physiquement
et
financièrement.
ü une
monnaie
de
facto
sous-‐évaluée
(ce
que
vous
pratiquiez
fort
bien
sans
en
faire
beaucoup
état)
:
les
amis
de
la
Tunisie
ont
encore
des
dinars
qu’ils
ont
acheté
75
centimes
d’euro
et
qui
en
valent
sensiblement
moins
aujourd’hui..
ü un
taux
d’épargne
et
d’investissement
fort
reflétant
la
confiance
en
soi
de
même
qu’un
appel
massif
aux
investissements
directs
étrangers
(IDE)
et
aux
transferts
de
technologies.
ü le
développement
de
secteurs
de
qualité,
d’innovation
et
d’excellence.
ü une
ouverture
internationale
progressive
et
contrôlée.
74
naturelle
à
l’innovation
(aéronautique,
informatique,
automobile,
…)
et
sur
une
joie
de
vivre
que
l’on
pourrait
peut-‐être
considérer
comme
un
facteur
de
gains
de
productivité.
Il
convient
encore
d’analyser
les
exemples
sud-‐africain
et
indonésien
et,
peut-‐être,
de
considérer
que
la
Tunisie,
avec
un
taux
de
croissance
pérenne
exemplaire,
est
capable
de
trouver
sa
propre
voie
non
seulement
vers
l’émergence
(déjà
en
cours)
et,
problème
plus
difficile
à
résoudre
pour
tous
les
PVD,
vers
la
transformation
de
l’émergence
économique
en
développement
humain
(dont
le
pouvoir
précédent
avait
quelque
peu
surestimé
l’indice
IDH
en
considérant
par
exemple
la
gouvernance
et
le
respect
des
libertés
fondamentales
comme
exemplaires)
75
aux
aéroports,
aux
hôtels
de
luxe,
etc.
Rien
n’interdit
d’envisager
que
l’on
recoure
dans
quelques
années
à
des
«
textiles
intelligents
»
(par
exemple,
égalisant
la
température
sur
les
diverses
parties
du
corps,
s’adaptant
en
fonction
de
la
sudation,
resserrant
leurs
fibres
aux
points
de
fragilité,
etc.).
Certes,
c’est
de
la
prospective.
Mais
la
Tunisie
ne
pourrait-‐elle
pas
se
placer
à
l’avant-‐garde
d’une
association
qui
devrait
un
jour
devenir
bénéfique
:
celle
de
l’informatique
et,
plus
généralement,
des
TIC
et
des
textiles
?
Même
l’avenir
immédiat
conduit
à
privilégier
des
textiles
à
haute
qualité
technique.
Est-‐ce
que
le
génie
mécanique
de
la
Tunisie
où
on
sait
faire
marcher
une
Peugeot
qui
a
600
000
km
au
compteur
et
le
génie
du
design
et
des
matériaux
pour
les
tapis,
etc.,
ne
peuvent
pas
se
conjuguer
pour
vous
mettre
sur
les
marchés
porteurs
des
textiles
industriels
sans
abandonner
pour
autant
l’attention
que
vous
portez
à
la
lingerie
?
3) Votre
troisième
poste
d’exportation
est
l’agroalimentaire.
L’avenir
à
moyen
terme
dans
ce
domaine
risque
de
dépendre
massivement
des
économies
d’eau.
Je
ne
sais
où
en
est
la
recherche
sur
ce
point
mais
la
Tunisie
pourrait
offrir
un
modèle
d’agriculture
peu
consommatrice
en
eau,
ce
qui,
au
21è
siècle
constituera
un
argument
majeur
de
vente.
J’en
profite
pour
dire
que
le
mondialiste
convaincu
que
j’ai
déjà
avoué
être
comprendrais
parfaitement
qu’un
pays,
comme
la
Tunisie,
s’oppose
à
des
délocalisations
exclusivement
fondées
sur
le
dumping
environnemental
ou
social.
4) Dans
le
cadre
de
la
société
dite
«
de
l’information
»
(dénomination
pertinente
mais
incomplète
:
on
oublie
les
moteurs
de
la
croissance
et
du
développement,
le
capital
et
la
connaissance,
qui
ont
supplanté
l’information
pour
déterminer
cette
clé
qu’est
l’innovation
:
Bill
Gates
et
Steeve
Job
ont
contribué
fortement
à
la
croissance
américaine
sur
fond
de
délocalisations
industrielles),
la
Tunisie
est
bien
placée
pour
l’informatique
,
la
production
76
de
services
informationnels
et
le
haut
de
gamme
des
«
call
centers
»
francophones
Pour
les
amis
de
la
Tunisie,
il
existe
objectivement
des
pistes
où,
en
principe,
elle
devrait
se
situer
à
un
bon
niveau
d’innovation
:
77
fibre
optique
à
haut
débit
(10
à
100
Mbits/s)
et
pour
éviter
la
fracture
numérique.
Or
la
Tunisie
possède
nettement
moins
de
20
000
kilomètres
de
fibre
optique.
A
titre
de
repère,
si
on
met
bout
à
bout
toute
la
fibre
optique
installée
dans
le
monde,
on
arrive
à
1,5
milliard
de
kilomètres
(soit
la
distance
de
la
Terre
à
Saturne,
avec,
en
perspective,
le
doublement
de
cette
longueur
en
10
ans
au
rythme
de
5
kilomètres
installés
chaque
seconde).
La
Tunisie
n’a
sans
doute
pas
d’avantage
comparatif
particulier
pour
produire
la
fibre
optique.
Mais
elle
peut
reprendre
l’avantage
de
la
productivité
que
confère
l’économie
de
la
connaissance
et
de
l’information
en
fibrant
à
haut
débit
le
littoral
puis
des
pôles
à
l’intérieur.
C’est
un
enjeu
décisif
de
développement
pour
attirer
les
investisseurs,
de
la
très
petite
entreprise
(TPE)
de
service
informationnel
à
la
petite
et
moyenne
entreprise
(PME)
secondaire
ou
tertiaire
et
évidemment
à
la
grande
entreprise
ou
à
une
de
ses
filiales
ou
succursales.
L’information
est
devenue
un
facteur
de
production
incontournable.
Votre
ministre
des
Finances
disait
que
le
développement
s’arrête
au
bout
de
la
route.
Ce
n’est
pas
réfutable.
Mais
on
peut
ajouter
que
dans
l’économie
de
la
connaissance
et
de
l’information,
le
développement,
celui
de
la
production
des
biens
et
des
services
aux
particuliers
et
aux
entreprises,
le
développement
des
idées
et
des
coopérations
s’arrête
surtout
lorsque
l’information
ne
passe
plus.
Les
images
vont
au
bout
de
la
paire
de
cuivre
électrique
et
avec
les
nouveaux
standards,
elles
n’iront
plus
qu’au
bout
de
la
fibre.
Votre
réseau
Internet,
Facebook
et
peut
être
Twitter,
ont
été
une
révélation
de
la
Révolution
de
Jasmin
du
14
janvier.
Conservez
et
creusez
très
vite
votre
avantage
(éventuel)
en
économie
informationnelle
!
C’est
là
que
se
joue
une
bonne
part
de
l’avenir.
Une
petite
région
française
peu
peuplée
et
en
décroissance
telle
que
le
Limousin
organise
sa
desserte
à
haut
débit
en
créant,
en
plus
de
tout
le
réseau
de
France
Telecom
déjà
existant
qui
relie
toutes
les
agglomérations,
grandes
et
plus
petites,
sa
propre
boucle
de
fibre
optique
de
près
de
1000
78
kilomètres
en
vue
d’attirer
les
investisseurs,
les
cadres,
les
personnes
âgées
intéressées
par
la
télévision
haute
définition,
d’introduire
le
téléenseignement
et
la
télémédecine
dans
les
villages.
En
France,
l’essentiel
de
l’équipement
a
été
installé
par
France
Telecom
mais
des
dizaines
de
régions,
départements,
communautés
de
communes,
collectivités
territoriales
de
tout
niveau,
ont
financé
l’implantation
de
réseaux
d’initiative
publique
(RIP),
c’est-‐à-‐dire
de
réseaux
supplémentaires
de
fibre
optique
cofinancés
en
partenariat
public-‐privé
destinés
à
rendre
un
service
public
de
diffusion
de
l’information
descendante
et
de
transmission
de
l’information
montante.
L’objectif
était
aussi
de
concurrencer
France
Telecom
afin
de
la
contraindre
à
abaisser
ses
prix.
Cela
permet
à
ces
diverses
collectivités
de
se
désenclaver
et
de
mieux
s’intégrer
à
l’économie
mondiale
car,
qu’on
l’apprécie
ou
qu’on
la
voue
aux
gémonies,
il
faudra
bien,
coûte
que
coûte,
s’y
intégrer
pour
survivre
et
se
développer.
4. Les
fondamentaux
de
l’émergence
Ils
peuvent
être
résumés
en
3
points
:
79
Finances,
vous
manquez
d’ingénieurs,
vous
manquez
de
financiers.
N’abaissez
pas
le
niveau
mais
sensibilisez
vos
étudiants
à
l’intérêt
de
ces
professions.
Pour
avoir
monté
avec
un
collègue
un
programme
permettant
à
une
vingtaine
d’élèves
ingénieurs
de
l’ENIT
de
finir
leur
cursus
en
France
pendant
18
mois
pour
obtenir
un
diplôme
d’ingénieur
français
de
haut
niveau
(celui
de
l’Ecole
Nationale
Supérieure
de
Techniques
Avancées
dite
ENSTA),
je
crois
que
nous
sommes
sur
la
bonne
voie.
80
les
transferts
de
technologie.
La
course
à
l’innovation
fait
que
l’on
transfère
souvent
du
pays
développé
le
produit
de
la
génération
(n-‐1)
mais
qu’il
demeure
de
grande
qualité.
Exiger
des
transferts
de
technologie
(comme
le
fait
la
Chine
par
exemple)
et
la
coproduction
est
de
l’intérêt
de
la
Tunisie.
Certes
les
rapports
de
forces
ne
sont
pas
les
mêmes.
Et
demander
des
crédits
à
long
terme
et
des
facilités
de
paiement
fait
partie
de
la
négociation.
Pourrions-‐nous
jouer
gagnant-‐gagnant,
nos
entreprises
de
l’Europe
du
Nord,
agissant
pour
le
compte
de
nos
pays,
déjà
fort
endettés,
mais
aussi
fort
conscients
de
l’enjeu
exceptionnel
que
représente
l’émergence
et
le
développement
démocratiques
de
la
Tunisie
à
la
proue
du
monde
arabe,
acceptant
de
vous
prêter
à
long
terme
une
fraction
de
pourcent
de
ce
qui
a
été
garanti
aux
banques
pendant
la
crise
de
2008-‐2009,
et
vous,
acceptant
de
jouer
le
jeu
de
la
démocratie
libre
échangiste,
ouverte
aux
IDE,
et
reprenant
la
voie
du
développement?
Rien
n’a
encore
été
avancé
sur
la
transition.
Sans
doute
parce
qu’elle
sera
plus
longue
et
plus
difficile
que
prévu.
Si
bien
intentionnés
soient-‐ils,
les
révolutionnaires
du
14
janvier
n’ont
aucune
machine
à
créer
des
emplois
ou
à
augmenter
les
revenus.
81
Références
1-‐Kenneth
J.
Arrow,
(1963),
Social
Choice
and
Individual
Values,
Wiley,
New
York
,
(2nd
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82
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(2011),
The
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paradox:
democracy
and
the
future
of
the
world
economy,
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York
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London:
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L’équilibre
et
la
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Dunod,
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13-‐Vercueil
J.
(2010),
Les
pays
émergents,
Bréal,
Paris
14-‐White
G.
(2001),
A
comparative
political
economy
of
Tunisia
and
Morocco:
on
the
outside
of
Europe
looking
in,
New
York:
State
University
of
New
York
Press.
83
84
LA
RELATION
UNIVERSITES-‐ENTREPRISES
ET
L’EMERGENCE
ECONOMIQUE
Julien
VERCUEIL1
85
Mexique
montre
qu’une
économie
en
développement
peut
s’engager
dans
un
processus
d’intégration
économique
et
enregistrer
un
accroissement
de
ses
échanges
sans
pour
autant
bénéficier
d’une
montée
en
gamme
de
ses
exportations
et
d’une
diffusion
de
ses
effets
à
l’économie
nationale.
Cet
exemple
de
ce
qu’on
pourrait
appeler
le
«
syndrome
mexicain
»,
par
opposition
à
des
trajectoires
de
montée
en
gamme
qu’ont
connu
dans
leur
temps
le
Japon,
Taïwan
ou
la
Corée
du
Sud,
peut
servir
d’introduction
à
notre
approche
du
rôle
de
la
relation
université
entreprises
en
Tunisie.
En
effet,
le
risque
existe
que
la
relation
étroite
existant
entre
l’économie
de
l’Union
Européenne
et
celle
de
la
Tunisie
reproduise
les
processus
que
l’on
a
vu
se
développer
dans
la
relation
entre
l’économie
américaine
et
l’économie
mexicaine,
confinant
cette
dernière
au
rôle
de
sous-‐
traitant
industriel
(ou
de
services)
pour
des
productions
à
faible
valeur
ajoutée
et
à
contenu
technologique
limité.
Il
n’est
pas
possible
dans
ce
texte,
de
traiter
cette
problématique
dans
sa
globalité.
Nous
nous
bornerons
à
discuter
le
rôle
joué
par
la
relation
université-‐entreprise
dans
les
possibilités
d’enrichissement
du
contenu
en
valeur
ajoutée
de
la
production
nationale.
Dans
une
première
partie
nous
caractériserons
les
principales
étapes
théoriques
–
et
les
indicateurs
qui
y
sont
associés
-‐
de
l’enrichissement
du
contenu
en
innovation
de
la
croissance
économique.
La
deuxième
partie
sera
consacrée
à
un
tour
d’horizon
de
la
situation
de
la
Tunisie
au
regard
d’autres
pays
émergents,
du
point
de
vue
des
indicateurs
présentés
en
première
partie.
La
troisième
partie
présentera
quelques
exemples
concrets
des
formes
organisationnelles
que
peut
prendre
la
relation
université
entreprise,
et
des
difficultés
potentielles
qui
y
sont
associées.
La
quatrième
partie
conclura
sur
la
manière
dont
ces
exemples
peuvent
être
utilisés
pour
inspirer
des
politiques
d’articulation
formation
supérieure
–
entreprise
dans
le
contexte
particulier
de
la
Tunisie.
86
1) Le
Système
National
d’Innovation
et
la
trajectoire
schumpetérienne
de
croissance
Si
l’on
s’en
tient
à
la
définition
proposée
par
Lundvall
et
reprise
par
l’OCDE,
le
système
national
d’innovation
(SNI)
est
constitué
du
système
formé
des
institutions
et
des
acteurs
qui
concourent
à
la
production
de
l’innovation
dans
un
pays
:
«
toutes
les
parties
et
aspects
de
la
structure
économique
et
de
l’ordre
institutionnel
qui
affectent
l’apprentissage
ainsi
que
la
recherche
et
l’exploration
»
(Lundvall,
2010,
p.
13).
Son
développement
permet
d’enrichir
le
contenu
en
valeur
ajoutée
du
PIB
au
travers
d’une
séquence
qui
peut
être
schématisée
comme
suit
(figure
11)
:
La
dynamique
cumulative
positive
susceptible
de
s’enclencher
lorsque
les
dispositifs
institutionnels
et
les
stratégies
des
acteurs
du
SNI
acquièrent
une
cohérence
suffisante
peut
être
lue
en
partant
de
l’effort
d’investissement
en
éducation-‐formation-‐
recherche-‐développement,
que
quantifie
souvent
par
la
part
du
PIB
consacrée
aux
dépenses
intérieures
orientées
vers
ces
activités.
Si
les
structures
d’enseignement
et
de
recherche
jouent
leur
rôle
d’amélioration
des
connaissances
et
compétences
des
étudiants,
enseignants
et
chercheurs,
elles
contribuent
à
élever
le
niveau
de
formation
et
de
qualification
de
la
population
active,
tout
en
produisant
un
savoir
scientifique
dont
la
qualité
peut
être
reconnue
à
l’échelle
internationale.
Les
qualifications
et
la
production
scientifiques
peuvent
en
retour
nourrir
une
production
de
technologies
nouvelles,
matérialisées
par
des
brevets
mais
aussi
(surtout
?)
par
l’introduction
d’innovations
dans
les
processus
et
les
produits
du
système
productif.
C’est
à
ce
niveau
que
la
qualité
de
l’articulation
entre
le
système
d’enseignement
et
de
recherche
et
le
tissu
des
entreprises
est
cruciale.
Lorsque
cette
articulation
fonctionne,
le
contenu
en
valeur
ajoutée
de
la
production
s’élève,
comme
en
témoignent
les
indicateurs
de
productivité
du
travail
ou
l’enrichissement
du
contenu
technologique
de
la
production
nationale,
voire
des
exportations,
à
condition
que
les
entreprises
disposent
d’une
efficacité
commerciale
et
stratégique
suffisante
pour
rendre
leur
production
compétitive
à
l’échelle
internationale,
dans
le
contexte
87
d’ouverture
que
nous
avons
évoqué
en
introduction.
Enfin,
le
surplus
issu
de
la
vente
sur
le
marché
intérieur
et/ou
des
exportations
de
ces
productions
plus
intensives
en
technologies
peut
être
réinvesti
dans
la
formation
et
la
recherche,
si
les
politiques
et
les
dispositifs
de
répartition
et
de
redistribution
de
la
valeur
ajoutée
sont
adéquats.
Le
résultat
possible
de
ce
processus
peut
être
appelé
«trajectoire
schumpetérienne
de
croissance
»,
dans
laquelle
la
croissance
économique
s’accompagne
d’une
intensification
du
contenu
en
innovation
et
en
technologie
de
la
production.
Mais
pour
que
cette
possibilité
soit
actualisée,
il
faut
une
coordination
fine
entre
les
institutions
et
entre
les
acteurs
du
SNI.
Pour
aborder
le
sujet,
nous
nous
proposons
de
partir
de
l’observation
d’indicateurs
disponibles
sur
l’état
du
SNI
de
certains
pays
émergents
pour
caractériser
de
manière
comparative
la
situation
de
la
Tunisie.
88
scientifiques
à
rayonnement
international.
Ces
éléments
sont
quantifiés
et
rapportés
aux
dimensions
nationales
en
calculant
respectivement
la
part
de
la
population
étudiante
dans
la
population
active
(Figure
4)
et
le
nombre
de
publications
scientifiques
à
rayonnement
international
pour
1
million
d’habitants
(Figure
5).
Le
potentiel
de
qualification
de
la
population
tunisienne
mesuré
par
le
nombre
relatif
d’étudiants
est
élevé
:
la
part
des
étudiants
dans
la
population
active
dépasse
non
seulement
celle
des
autres
pays
émergents
considérés,
mais
également
celle
de
la
France.
Cette
remarque
peut
toutefois
être
doublement
tempérée
:
89
capacité
à
s’articuler
aux
caractéristiques
de
l’économie
nationale
d’une
part,
et
à
accéder
aux
réseaux
internationaux
de
valorisation
de
la
production
scientifique
d’autre
part.
Les
indicateurs
précédents
sont
complétés
par
un
troisième
groupe,
qui
concerne
la
valorisation
économique
de
l’effort
de
formation
et
de
recherche-‐développement
consenti
par
le
pays.
Les
figures
6
et
7
reprennent
des
indicateurs
classiques
en
la
matière
en
compilant
les
brevets
américains
et
européens
déposés
par
les
pays
émergents,
puis
en
les
rapportant
au
nombre
de
chercheurs
équivalent
temps
plein.
Ces
indicateurs
confirment
la
rupture
observée
précédemment
entre
les
pays
émergents
et
les
pays
industrialisés
:
il
faut
1,5
chercheur
en
ETP
en
France
pour
déboucher
sur
un
brevet
international
(européen
ou
américain)
par
an
;
il
en
faut
45
en
Chine,
environ
400
en
Inde
et
au
Brésil,
mais
plusieurs
dizaines
de
milliers
en
Tunisie.
La
capacité
du
système
productif
tunisien
à
transformer
ses
technologies
en
produits
et
procédés
susceptibles
d’être
valorisés
à
l’étranger
reste
encore
faible
au
regard
de
l’effort
consenti.
Pourtant,
ces
écarts
ne
se
traduisent
pas
par
un
différentiel
d’efficacité
à
l’export
du
même
ordre
:
si
l’économie
tunisienne
n’est
pas
très
innovante,
elle
réussit
pourtant
à
améliorer
la
valeur
ajoutée
contenue
dans
ses
exportations.
Les
figures
8
et
9
reprennent
la
situation
des
économies
émergentes
du
point
de
vue
des
exportations
de
haute
technologie
et
de
l’efficacité
à
l’export
de
marchandises
et
de
services.
A
priori,
par
comparaison
avec
les
autres
pays
émergents,
le
tissu
productif
de
la
Tunisie
semble
correctement
positionné
en
termes
de
compétitivité
hors
prix
:
si
la
part
des
produits
de
haute
technologie
n’y
atteint
pas
les
chiffres
affichés
par
la
Chine
(5,2
%
contre
30,5
%),
elle
reste
tout
de
même
comparable
aux
proportions
de
l’Inde
et
du
Brésil.
L’efficacité
à
l’export,
mesurée
aussi
bien
sur
les
marchandises
que
sur
les
services
par
la
valeur
des
exportations
rapportées
aux
effectifs
employées
dans
le
secteur,
rapproche
la
Tunisie
de
la
situation
du
Mexique
et
se
situe
loin
devant
les
valeurs
des
BRICS.
90
En
première
analyse,
on
peut
s’étonner
du
paradoxe
apparent
qui
associe
une
productivité
à
l’export
relativement
élevée
et
une
faible
capacité
à
transformer
les
investissements
consentis
à
la
formation-‐recherche-‐développement
en
innovations
valorisées
sur
le
marché
international.
L’hypothèse
que
l’on
peut
formuler
ici
(mais
qui
nécessiterait
un
travail
complémentaire
pour
être
qualifiée)
est
que
ce
paradoxe
pourrait
être
résolu
par
la
place
et
la
nature
des
IDE
en
provenance
de
l’Union
Européenne
en
Tunisie,
qui
augmentent
la
productivité
apparente
du
travail
dans
les
secteurs
exportateurs
(services
et
produits
manufacturés)
tout
en
maintenant
une
spécialisation
dans
les
secteurs
à
faible
contenu
technologique
qui
sont
développés
pour
le
marché
européen.
Si
cette
hypothèse
était
corroborée,
elle
signalerait
une
tendance
de
la
Tunisie
à
s’écarter
de
la
trajectoire
de
croissance
schumpetérienne
évoquée
plus
haut
pour
se
rapprocher
du
«
syndrome
mexicain
».
Dans
la
liste
des
mesures
nécessaires
pour
éviter
la
réalisation
d’un
tel
scénario,
la
transformation
de
la
relation
université-‐entreprise
nous
paraît
devoir
figurer
en
bonne
place.
91
initier
les
changements
nécessaires
au
plus
près
des
besoins,
tout
en
restant
contrebalancées
par
les
mécanismes
de
coordination
et
d’évaluation
que
le
centre
a
conservés.
Ce
principe
peut
s’appliquer
au
cadre
universitaire
par
le
biais
de
l’extension
des
marges
de
manœuvre
des
universités
et
de
leur
capacité
d’innovation,
dans
la
mesure
où
cette
dévolution
de
compétences
ne
débouche
pas
sur
une
privatisation
de
leurs
fonds.
92
L’innovation
de
cursus
(1)
:
l’exemple
des
licences
professionnelles
en
France
93
L’innovation
de
cursus
(2)
:
l’introduction
de
formation
à
l’entrepreneuriat
dans
une
université
publique
russe.
94
Le
financement
et
l’évaluation
des
relations
université-‐
entreprise
Conclusion
Le
point
critique
du
Système
National
d’Innovation
de
la
Tunisie
nous
paraît
être
la
capacité
de
son
sous-‐système
d’enseignement
et
de
recherche
à
transformer
les
efforts
d’investissements
95
réalisés
pour
massifier
l’enseignement
supérieur
en
capacités
technologiques
concrètes,
mesurables
et
valorisables
à
l’échelle
internationale.
Ceci
est
d’autant
plus
problématique
que
la
Tunisie
est
encore
largement
tributaire,
pour
l’équilibre
de
ses
comptes
extérieurs,
d’une
relation
à
l’Union
européenne
asymétrique
dans
laquelle
elle
reste
cantonnée
au
rôle
de
fournisseur
de
biens
et
services
à
valeur
ajoutée
limitée.
96
Références
1-‐
Brunelli
M.,
Serrate
B.,
Vercueil
J.
(2005)
:
«
Une
interface
université-‐entreprises
pour
la
région
d’Irkoutsk
»
Rapport
final
de
projet
-‐
Programme
Tempus
22241-‐2001
(mimeo).
2-‐
GITR
(2011)
:
«
Global
Innovation
and
Technology
Report
».
Geneva,
World
Economic
Forum.
3-‐
Haddar
M.
(2010)
:
“Croissance
et
emploi
en
Tunisie
:
les
raisons
d’un
échec
et
les
moyens
d’y
faire
face”,
in
Haddar
M.
(dir.),
Quelles
stratégies
de
développement
pour
les
pays
maghrébins
?,
Tunis
:
ASECTU-‐Université
Tunis
Al
Manar,
pp.
125-‐
159.
4-‐
Lundvall,
B.-‐A.
(dir.)
(2010)
:
”National
Systems
of
Innovation.
Toward
a
Theory
of
Innovation
and
Interactive
Learning”.
London
:
Anthem
Press.
97
ANNEXES
Figure
1.
Système
national
d’Innovation
et
trajectoire
Schumpetérienne
de
croissance
98
99
100
101
102
SYSTEMES
NATIONAUX
D'INNOVATION
DANS
LES
PAYS
EMERGENTS
:
LE
CAS
DE
LA
CHINE
Wei
ZHAO1
Résumé
Ce
papier
est
une
étude
préliminaire
sur
le
système
d’innovation
de
la
Chine.
Appuyé
par
des
sources
documentaires,
des
statistiques
et
des
entrevues,
l’auteur
montre
que
le
défit
pour
les
économies
émergentes
est
à
créer
un
système
d’innovation
dynamique
basé
sur
leurs
propres
systèmes
de
production,
un
concept
formé
par
l’économiste
Bengt-‐
ÅkeLundvall
au
milieu
des
années
1980.
En
revue
de
la
situation
en
Chine,
on
trouve
deux
points
intéressants.
Premièrement,
il
existe
en
Chine
quasiment
toutes
les
composantes
d’un
système
d’innovation
national
(SIN)
:
les
laboratoires
des
entreprises
publiques,
des
agences
gouvernementales,
des
universités
de
recherche,
des
aides
financières
des
institutions
bancaires
et
des
sociétés
d’investissement,
et
des
programmes
de
subvention
et
des
mesures
fiscales
du
gouvernement.
Mais
toutes
les
entreprises
ne
bénéficient
pas
de
cette
structure.
Deuxièmement,
les
entreprises
comptent
surtout
sur
leurs
propres
efforts
d’apprentissage
technologique
pour
produire
et
commercialiser
de
nouveaux
produits
et
procédés
aux
besoins
des
clients
ou
consommateurs.
Cela
montre
que
le
cadre
et
la
forme
du
SIN
qui
conviennent
les
économies
industrialisées
ne
peut
pas
appliquer
aux
économies
émergentes.
En
effet,
la
Chine
n’a
pas
dépendu
de
la
recherche
et
du
développement
(R&D)
pour
assurer
sa
croissance
économique
au
cours
des
dernières
années.
Introduction
Pour
les
économies
émergentes,
la
construction
d'un
système
national
d'innovation
approprié
est
devenue
un
thème
central
de
leurs
stratégies
de
développement
(Chen,
FC
et
Sewell,
1996;
Shin,
JS,
1996,
Kim,
1997;
Lall,
1998;
Shin,
D,
1998).
Porter
(1990)
a
1ESC Saint-‐Etienne Business School, 51-‐53, Tel: + 33 4 77 49 24 34, Fax: + 33 4
103
identifié
trois
stades
de
développement
économique:
tiré
par
les
facteurs,
tiré
par
l'investissement,
et
axé
sur
l'innovation,
et
a
soutenu
que
le
plus
dur
est
de
sauter
de
l'étape
des
investissements
au
stade
de
l'innovation.
Le
point
de
transition
est
difficile
à
gérer
à
la
fois
d’une
perspective
macroéconomique
et
microéconomique.
L'approche
du
système
national
d'innovation
(SNI)
donne
quelques
indices
au
niveau
macro.
Mais
en
comparaison
avec
les
SNI
"avancés"
(par
exemple,
la
modèle
triple
hélice
de
l'université-‐gouvernement-‐industrie,
par
Etzkowitz
&
Leydesdorff,
2000),
les
SNI
de
pays
en
développement
est
souvent
en
cours
de
construction
et
non
pas
"complété".
Les
petites
économies
manquent
souvent
d’une
base
scientifique
solide.
Pour
les
pays
en
développement,
leurs
entreprises
sont
souvent
dans
une
position
de
rattrapage
et
leurs
principales
activités
sont
l'apprentissage
et
l'utilisation
de
nouvelles
technologies
plutôt
que
de
créer
des
innovations.
C’est
pour
cette
raison
que
certains
auteurs
ont
même
proposé
de
parler
d'un
système
national
d'apprentissage
techno-‐économique
plutôt
que
d'innovation
(Viotti
sur
le
Brésil,
2002
;
Matthews
sur
l’Asie
orientale,
1999).
En
fait,
l'apprentissage
a
déjà
été
proposé
comme
une
explication
de
la
création
institutionnelle
en
Corée
(Kim,
1997).
Parmi
les
pays
émergents,
la
Chine
est
un
cas
un
peu
particulier.
D’un
point-‐vue
standard
de
SNI,
la
Chine
a
déjà
tous
les
éléments
institutionnels
nécessaires
et
a
réalisé
une
performance
impressionnante.
Au
niveau
national,
les
institutions
liées
aux
activités
d'innovation
en
Chine
sont
presque
complètes:
les
parcs
scientifiques,
universités,
laboratoires
nationales
en
R
&
D,
organisations
intermédiaires,
marchés
de
capital-‐risque,
et
centres
de
formation,
etc.
La
Chine
a
aussi
une
politique
nationale
d'innovation
forte
et
claire.
Le
président
chinois
Hu
Jintao
a
souligné
que
l'innovation
indépendante
est
le
«cœur
de
notre
stratégie
de
développement
national».
En
fait,
l’effort
déployé
par
la
Chine
pour
accomplir
un
rattrapage
technologique
est
considérable.
Les
dépenses
de
R&D
en
valeur
on
progressé
au
rythme
de
19%
par
an
en
moyenne
entre
1999
et
2005.
Elles
atteignent
en
2007
le
6ème
rang
mondial.
Ce
développement
scientifique
et
technologique
s’observe
aussi
bien
dans
le
domaine
104
académique
qu’industriel.
Ainsi
en
2004,
la
Chine
occupe
le
5ème
rang
mondial
pour
la
publication
scientifique
(derrière
les
Etats-‐
Unis,
le
Japon,
le
Royaume
Uni
et
l’Allemagne)
avec
6,5
%
des
publications
internationales,
même
si
le
taux
de
citations
par
article
chinois
reste
encore
assez
faible.
La
Chine
contribue
encore
peu
à
la
production
internationale
de
brevets
(2,7
%
du
total,
ce
qui
la
classe
au
8ème
rang
mondial)
mais
sa
progression
est
forte
:
les
brevets
internationaux
déposés
auprès
de
l’Organisation
Mondiale
de
la
Propriété
Intellectuelle
ont
augmenté
de
57
%
en
20069.
Surtout,
l’intensification
des
dépenses
consacrées
à
la
R&D
et
l’émergence
d’un
environnement
légal
en
matière
de
propriété
intellectuelle
expliquent
largement
l’explosion
du
nombre
de
brevets
en
Chine
depuis
2000.
Hu
et
Jefferson
(2005)
ont
montré
que
le
dépôt
de
brevets
des
firmes
chinoises
étaient
d’autant
plus
intense
qu’elles
relevaient
de
secteurs
dans
lesquels
les
flux
d’investissements
extérieurs
étaient
élevés
la
Chine
est
aujourd’hui
le
premier
exportateur
mondial
de
produits
des
technologies
de
l’information
et
de
la
communication.
Le
nombre
de
dépôts
de
brevets
de
la
Chine
a
augmenté
de
26%
par
an
entre
2003
et
2009.
Reuters
conclut
que
la
Chine
deviendra
le
plus
grand
éditeur
mondial
de
brevets
en
2011.
La
formation
et
le
capital
humain
sont
également
en
nette
progression.
Le
nombre
de
chercheurs
chinois
est
depuis
2000
le
2ème
plus
important
au
niveau
mondial,
juste
derrière
les
Etat-‐Unis.
Si
la
part
de
la
population
âgée
de
25
à
64
ans
ayant
un
niveau
d’éducation
supérieure
n’est
que
de
5
%,
cela
représente
tout
de
même
31
millions
de
personnes,
soit
un
nombre
équivalent
à
celui
des
Etats-‐Unis
ou
de
l’Europe,
sans
parler
du
flux
croissant
des
étudiants
qui
partent
suivre
leurs
études
à
l’étranger
(117
300
en
2003).
Près
d’un
million
de
diplômés
en
science
et
ingénierie
sortent
des
universités
chinoises
chaque
année,
même
si
les
capacités
scientifiques
et
de
créativité
restent
souvent
faibles
et
si
les
firmes
doivent
compléter
leur
formation
pour
qu’ils
soient
opérationnels.
Sur
le
plan
de
la
recherche,
la
Chine
a
dépassé
en
2004
l’Europe
et
le
Japon
avec
1,15
millions
de
chercheurs.
Son
nombre
de
chercheurs
devrait
croître
rapidement
:
si
le
taux
chinois
de
chercheurs
pour
1000
salariés
était
celui
de
l’Irlande,
on
y
dénombrerait
6
millions
de
chercheurs.
Certains
prétendent
105
à
dire
que
la
Chine
a
sauté
dans
l'étape
axée
sur
l'innovation
définis
par
Porter.
106
dotations
de
facteurs
données.
Le
concept
du
système
national
d’innovation,
introduit
dans
les
années
1980
par
les
économistes
comme
Lundvall
(1992),
Freeman
(1987),
et
Nelson
(1993),
se
base
sur
la
spécificité
des
procédures
et
des
institutions
qui
est
utilisé
dans
différents
pays
pour
créer
et
pour
adopter
des
technologies.
Comme
l'innovation
doit
être
enraciné
dans
la
structure
économique,
Lundvall
(1992)
a
suggéré
que
l’approche
de
SNI
soit
un
dispositif
de
focalisation
avec
des
entreprises
ou
un
système
de
production
comme
sa
structure
de
base:
la
production
et
des
structures
de
liaison,
système
d'entreprise,
l'organisation
interne
des
entreprises,
et
relations
entre-‐firmes
(fournisseur-‐
producteur,
client-‐producteur),
constituent
le
principal
système
de
production
(y
compris
de
nouvelles
dynamiques
de
création
d'entreprise,
l'entrepreneuriat,
des
incubateurs
d'entreprises
nouvelles,
etc.).
Par
conséquent,
un
système
national
d'innovation
est
toujours
ancré
dans
le
système
de
production
qui
prévaut
d'une
économie.
Les
entreprises
sont
les
unités
qui
jouent
le
rôle
le
plus
important
dans
le
système
d'innovation
et
l'innovation
influe
par
son
tour
les
performances
économiques
des
entreprises.
Garder
la
firme
comme
point
central
dans
orientation
le
système
national
d'innovation
est
essentielle
pour
comprendre
ce
qui
fonctionne
et
ce
qui
ne
fonctionne
pas
réellement.
Alors,
la
première
étape
serait
d'analyser
ce
qui
se
passe
au
sein
des
entreprises
en
termes
d'innovation
et
de
renforcement
des
compétences.
La
dynamique
des
systèmes
de
production
est
la
pièce
centrale
du
SNI.
Un
système
de
production
est
composé
des
entreprises
plus
ou
moins
liés
entre
eux,
en
ce
qui
concerne
la
réalisation
d'idées
novatrices
et
des
projets
innovants.
107
noyau
du
système
d'innovation
est
intégrée
dans
l'ensemble
d'institutions
et
de
conventions
plus
larges.
Nous
pouvons
y
penser
sur
les
institutions
juridiques
(la
règle
de
droit,
droits
de
propriété),
les
institutions
politiques
(stabilité
de
la
prise
de
décision
politique),
les
institutions
économiques
(régulation,
les
droits
de
douane
et
des
procédures),
les
normes
sociales
(qui
va
déterminer
la
manière
dont
des
problèmes
comme
l'inégalité
des
revenus
soient
résolus,
ce
qui
aura
une
incidence
sur
les
taux
d'imposition),
les
politiques
publiques
(politique
industrielle,
politique
commerciale,
les
grandes
politiques
économiques),
et
la
culture
(esprit
d'entreprise,
les
comportements
à
risque,
les
attitudes
au
travail).
En
bref,
l'environnement
pour
les
entreprises
est
primordial.
Ainsi,
pour
les
pays
en
développement,
le
système
national
d'innovation
est
en
fait
son
système
de
production
caractérisé
par
les
structures
spécifiques,
les
liens
et
la
dynamique
des
entreprises,
encastré
dans
les
cadre
institutionnels
de
la
société,
et
influençant
sur
sa
capacité
potentielle
ou
réalisés
à
innover.
(Voir
la
figure
ci-‐dessous).
108
Plus
important
encore,
l'approche
SNI
ne
se
concentre
pas
seulement
sur
les
acteurs
institutionnels
eux-‐mêmes,
mais
plutôt
sur
leurs
modes
conventionnels
d'interactions
et
de
liens
avec
des
firmes.
L'innovation,
par
nature,
implique
l'incertitude
et
la
rationalité
ainsi
délimité
et
différenciées.
L'apprentissage
intervient
au
gré
des
interactions
entre
les
différentes
fonctions
d'une
entreprise
(science,
technique,
production,
commercialisation...),
mais
également
des
interactions
entre
les
entreprises
et
leur
environnement
institutionnel.
En
outre,
ce
qui
importe
est
de
déterminer
le
mode
de
coordination
de
ces
interactions
et
qui
donne
une
diversité
des
mondes
d'innovation.
Ce
monde
est
un
endroit
où
chacun
interagit
de
manière
coordonnée.
Si
dans
la
sphère
économique
ce
que
les
entreprises
font
est
essentiellement
de
prendre
des
décisions
sur
la
base
des
signaux
de
prix,
la
convention
de
comportement
importante
est
le
calcul
et
la
maximisation
de
profits.
Les
individus
dans
ce
cas-‐là
pourraient
attraper
la
plupart
des
aspects
de
leur
comportement
rationnel
instrumental.
Mais
pour
l'innovation,
les
entreprises
doivent
être
impliquées
plus
ou
moins
permanente
dans
les
processus
d'interactions
avec
les
différentes
organisations.
L’innovation
demande
la
coopération
et
implique
parfois
la
création
collective
de
nouvelles
connaissances
complexes,
et
cela
peut
déclencher
ou
renforcer
d'autres
normes
de
comportement
ou
conventions
d’interaction.
Les
acteurs
individuels
ou
organisationnels
moins
régis
par
la
rationalité
instrumentale
agissent
souvent
selon
d'autres
normes
et
conventions
sociales.
Par
exemple,
la
simple
curiosité,
le
respect
mutuel,
et
la
confiance
seront
plus
efficaces
en
matière
d'innovation
que
celles
purement
calculatoire.
Ici,
nous
voyons
l'importance
des
conventions
dans
le
monde
de
l'innovation.
En
employant
les
conventions,
les
acteurs
construisent
un
cadre
commun
d'action,
et
un
monde
dans
lequel
ils
peuvent
être
connus
par
d'autres
acteurs
(ce
qui
en
fait
un
monde
commun).
La
convention
est
la
forme
de
l'évaluation
que
les
acteurs
utilisent
pour
coordonner
leurs
actions,
dont
les
intérêts
sont
souvent
contradictoires
et
les
logiques
sont
opposées.
Traditionnellement,
la
convention
représente
la
stabilité
et
le
consensus
dans
les
groupes
clairement
identifiés
et
interconnectés
par
un
ensemble
de
normes
communes.
Dans
le
monde
de
l'innovation,
la
convention
est
une
procédure
de
tous
109
les
acteurs
concernés
à
faire
face
à
l'incertitude
des
investissements
d'innovation.
Grâce
à
la
convention,
l'incertitude
inhérente
à
la
singularité
de
la
situation
nouvelle
peut
être
surmontée,
les
acteurs
commencent
à
trouver
leurs
repères.
Il
existe
plusieurs
grandes
conventions
de
coordination
des
interactions
pour
les
activités
innovantes:
organisation
hiérarchique;
transaction
sur
le
marché;
coopération
en
réseau;
et
la
mobilisation
idéologique
/
politique.
En
résumant,
l’analyse
du
SIN
destiné
aux
économies
émergentes
doit
se
baser
sur
l’observation
du
système
de
production.
Si
l’on
accepte
l’argument
de
Lundvall
en
prenant
le
SIN
comme
un
instrument
de
focus
(Focusing
Device),
il
faut
mettre
au
cœur
et
comme
point
de
départ
les
entreprises
et
les
secteurs
de
production,
souvent
industriels
dans
les
économies
en
développement.
A
partir
de
l’analyse
sur
les
liens
et
les
structures
de
système
de
production
d’un
pays,
on
pourrait
identifier
dans
la
société
des
institutions
concernées
qui
influencent
la
dynamique
du
système
de
production.
Ces
institutions
ou
acteurs
institutionnels
constituent
des
champs
ou
mondes
autour
des
entreprises.
La
nature
des
liens
et
les
interactions
conventionnelles
entre
entreprises
et
ces
champs
d’institution
est
primordiale
pour
la
capacité
d’innovation
du
système
de
production
d’un
pays.
110
un
laboratoire
qui
peut
le
faire.
Cette
histoire
d’accumulation
de
technologie
est
devenue
en
suite
un
atout
pour
l’industrialisation
en
Chine,
un
excellent
exercice
d’activer
progressivement
son
ancien
système
complet
de
développement
technologique
avec
une
base
industrielle
complète,
à
travers
l'économie
de
marché.
La
création
du
système
de
production
:
apprentissage
et
entrepreneuriat
Basé
sur
ses
réserves
technologiques
et
combinés
avec
les
investissements
étrangers,
la
Chine
a
créé
une
structure
très
dynamique
de
la
production
depuis
les
30
dernières
années.
Mais
le
chemin
de
l'industrialisation
chinoise
est
fondamentalement
différente
du
Japon
et
de
la
Corée
du
Sud,
voire
d'autres
économies
asiatiques.
Dès
le
début,
l’industrie
en
Chine
est
appelée
«l’atelier
du
monde
».
La
montée
du
Japon
et
de
la
Corée
du
Sud
dépend
beaucoup
des
orientations
du
gouvernement
et
de
la
politique
industrielle
du
gouvernement.
Ils
se
concentrent
essentiellement
dans
quelques
industries,
comme
l'électronique
grand
public
et
les
voitures.
Le
développement
des
entreprises
a
été
concentré
dans
les
grands
groupes,
tels
que
Samsung
et
LG
en
Corée
du
Sud.
Cependant,
le
développement
industriel
chinois
se
déroule
dans
presque
tous
les
secteurs
caractérisés
par
des
processus
de
fabrication
à
grande
échelle.
Ces
secteurs
industriels
chinois
varient
de
la
simple
production
de
chaussures,
des
chaussettes,
des
briquets,
au
le
plus
haut
de
gamme
des
puces
et
des
avions.
En
principe,
tous
les
secteurs
de
la
fabrication
(pas
de
pôles
de
croissance)
ont
été
progressivement
et
entièrement
déplacés
vers
la
Chine.
Le
résultat
a
été
l'expansion
continue
des
capacités
de
production
chinoises.
Ces
secteurs
industriels
ont
les
caractéristiques
suivantes:
difficulté
technique
modérée,
relativement
forte
intensité
technologique,
avec
la
recherche
appliquée
et
le
développement,
au
milieu
de
main-‐d'œuvre
(généralement
qualifiés)
intensives,
les
exigences
de
capital
modérée.
Les
entreprises
chinoises
ont
toujours
tendances
de
commencer
par
les
activités
en
aval
dans
la
chaîne
de
valeur
mondiale
(Voir
la
figure
ci-‐dessous).
111
Quand
les
entreprises
chinoises
s’occupent
de
plus
en
plus
d’activités
avec
les
valeurs
de
plus
en
plus
élevées,
elles
ont
également
réussi
à
accumuler
et
apprendre
rapidement
leur
capacité
de
production
et
de
technologie.
Le
développement
de
l’industrie
électronique
est
un
cas
typique
pour
montrer
les
processus
de
création
industrielle.
L’industrie
électronique
chinoise
d’avant
1980
était
autosuffisante,
le
marché
était
très
protégé,
isolé
du
commerce
et
de
la
concurrence
internationale.
Seules
des
entreprises
d’Etat
occupaient
le
secteur.
La
réforme
économique
a
changé
radicalement
l’industrie
électronique
en
Chine.
Elle
l’a
sortie
de
la
planification
centralisée
nationalement
et
ouverte
à
la
concurrence
et
au
commerce
international.
Depuis,
l’industrie
électronique
en
Chine
a
connu
une
expansion
rapide
et
continue.
Le
secteur
de
l’électroménager
a
engagé
ce
mouvement,
puis
suivent
les
ordinateurs
personnels,
équipements
de
télécom,
composants
et
semi-‐conducteurs.
Les
capacités
d’innovation
industrielle
et
de
concurrence
internationale
se
sont
renforcées
et
améliorées.
De
1981
à
1999,
la
croissance
annuelle
de
l’industrie
électronique
est
de
27%
soit
1,7
fois
celle
de
l’industrie
et
2,7
fois
celle
du
PNB.
112
La
montée
en
puissance
de
l’industrie
électronique
chinoise
est
en
effet
grâce
à
un
mélange
de
transferts
de
technologie
étrangère
et
des
efforts
faits
par
les
entreprises.
Pour
les
fabrications
de
matériaux
et
de
composants,
comme
par
exemple
les
tubes
de
téléviseurs
et
l’organisme
de
base
industrie
de
semi-‐conducteur.
Les
entreprises
concernées
sont
celles
d’Etat,
ou
«projets
importants
d’Etat».
Elles
adoptent
massivement
le
processus
de
développement
suivant:
introduction
d’abord
des
équipements
de
pays
développés,
et
puis
investissements
à
R&D
pour
rétro
ingénierie,
pour
établir
la
capacité
R&D
indépendante.
Vu
les
défauts
intrinsèques
de
système
de
création
planifiée,
le
chaînage
est
souvent
mal
réalisé
:
entre
les
organismes
de
R&D,
conception
et
la
production
d’entreprises
d’Etat,
les
activités
sont
presque
isolées.
Ainsi,
les
entreprises
n’ont
pas
appris
les
nouvelles
routines,
ni
celles
qui
font
s’adapter
aux
circonstances.
Puisqu’il
manque
de
fortes
relations
avec
l’extérieur,
ces
entreprises
ne
peuvent
pas
s’adapter
aux
normes
de
concurrence
mondiales,
ne
peuvent
pas
abandonner
la
stratégie
de
bas
coût.
Cependant,
bien
que
les
voies
d’apprentissage
ne
soient
pas
performantes,
elles
n’en
restent
pas
moins
profitables
pour
l’industrie
électronique
de
Chine.
En
même
temps,
puisque
la
Chine
a
pratiqué,
pendant
une
longue
durée,
une
politique
de
limitation
des
investissements
directs
étrangers,
échangeant
«marché
contre
technologie»,
les
investissements
étrangers
sont
apparus
comme
«capitaux
mixtes».
Dans
ces
entreprises,
les
capacités
ingénierie
de
conception
et
de
test
se
développent
progressivement.
Les
entreprises
mixtes
grimpent
doucement
sur
l’échelle
de
la
capacité
technologique.
Ainsi,
avec
l’annulation
des
règlements
d’industrie,
des
firmes
étrangères
achètent
des
actions
chinoises,
transforment
des
entreprises
mixtes
en
entreprises
à
capitaux
exclusivement
étrangers,
afin
de
transférer
plus
radicalement
la
technologie.
Mais
la
structure
principale
de
l’industrie
électronique
chinoise
se
formule
par
les
entreprises
non-‐
publiques
locales,
qui
se
trouvent
dans
les
fabrications
d’électroménagers,
des
ordinateurs,
et
des
produits
de
télécoms.
Stimulées
par
la
rapide
augmentation
de
la
demande
domestique
ou
internationale,
ces
entreprises
ont
créé
assez
vite
leur
capacité
commerciale,
observant
et
analysant
la
demande
des
clients.
Elles
ont
appris
les
demandes
spécifiques
des
clients
locaux,
et
su
113
comment
bien
vendre
les
produits.
Presque
en
même
temps,
elles
ont
construit
massivement
des
chaînes
de
production
en
partant
du
simple
assemblage.
Elles
accumulent
des
fonds
par
leurs
réseaux
de
vente
et
élargissent
la
production.
Grâce
à
la
simplicité
de
l’assemblage,
avec
des
petites
modifications
ou
améliorations,
elles
s’adaptent
rapidement
au
marché
chinois.
Avec
la
concurrence
de
plus
en
plus
acharnée,
ces
entreprises
ont
accru
leurs
capacités
de
conception
de
produits,
d’équipement,
même
de
technologie.
Au
début,
ces
capacités
sont
pour
la
plupart
tirées
des
ressources
des
institutions
du
système
planifié.
Mais
ensuite,
avec
le
renforcement
de
leurs
puissances,
ces
entreprises
ont
fondé
leurs
propres
centres
ou
institutions
de
recherches
et
de
conception.
Ces
capacités
sont
toujours
liées
à
la
grande
production
et
à
l’assemblage.
C’est
dans
ce
mode
que
les
entreprises
établissent
le
plus
de
relations
cognitives
avec
le
plus
de
partenaires.
Ces
entreprises
ont
donc
la
plus
forte
capacité
technique
et
la
plus
durable
capacité
d’évolution.
C’est
pourquoi,
ces
entreprises
sont
pour
la
plupart
des
«championnes»
d’électroménagers,
d’IT
et
de
télécoms
dans
l’industrie
électronique
de
Chine.
114
marché
des
produits
de
haute
gamme
au
coude
à
coude
avec
les
firmes
étrangères.
Mais
la
pénétration
des
entreprises
OEM
a
interrompu
les
relations
de
chaîne
de
l’industrie
électronique,
comme
pour
l’industrie
de
semi-‐conducteur
de
Chine.
Dans
OEM,
les
équipements,
la
conception
et
la
vente
de
produits
relèvent
d’un
seul
acteur,
les
relations
entre
les
entreprises
locales
et
les
firmes
étrangères
sont
principales,
et
celles
entre
les
entreprises
OEM
et
les
firmes
locales
sont
en
principe
très
limitées.
Dans
ce
sens,
OEM
est
utile
aux
entreprises
pour
élever
leur
capacité
de
production,
mais
sa
contribution
à
l’augmentation
de
compétitivité
technologique
globale
n’est
pas
garantie.
Derrière
à
ce
développement
industriel
massif
est
une
véritable
dynamique
de
création
d’entreprises
en
Chine.
Non
seulement
les
entreprises
d’Etat
et
les
anciens
organismes
publics
de
recherches
sont
sauvés
et
développés
avec
le
soutien
du
gouvernement,
aussi
les
entreprises
joint
venture
et
entreprises
à
capitaux
étrangers
sont
encouragées
à
investir
en
Chine,
et
les
entreprises
non-‐
publiques
chinoises,
d’abord
sous
les
catégories
des
entreprises
collectives
ou
entreprises
rurales,
puis
sous
les
catégories
des
entreprises
jeune
pousse
ou
privées,
sont
massivement
créées.
Prenons
encore
l’industrie
électronique,
avec
des
dizaines
d’années
de
développement,
la
situation
où
les
entreprises
d’Etat
dominaient
tout
a
beaucoup
changé.
En
1980,
les
entreprises
d’Etat
et
les
entreprises
collectives
occupaient
3/4
et
1/4
de
production.
Mais
depuis
les
années
90,
le
rapport
de
valeur
de
production
pour
les
investissements
étrangers
augmente
de
jour
en
jour.
En
1997,
cela
a
dépassé
20%,
et
réalise
74%
des
exportations.
En
parallèle,
les
entreprises
d’Etat
ne
représentent
plus
que
37%
des
entreprises
de
la
branche,
et
les
entreprises
collectives
10%.
115
des
localités,
cela
signifie
“qu'on
fait
plus
qu'on
ne
dit”
;
troisièmement,
on
adopte
“un
système
de
double
régime”
:
la
portion
planifiée
et
le
régime
du
marché
existent
ensemble,
mais
le
système
planifié
s'affaiblit
graduellement
et
le
système
du
marché
s’agrandit
peu
à
peu.
Ainsi,
le
système
national
d'innovation
en
Chine
a
été
divisé
en
deux
systèmes
tout
à
fait
différents,
coexistant
dans
l'économie.
L’un
a
pour
noyau
les
entreprises
d'Etat
et
les
institutions
nationales
de
recherche
scientifique,
en
prenant
pour
l'essentiel
les
modes
de
répartition
des
ressources
de
l'époque
de
l'économie
planifiée.
L'autre
a
pour
noyau
les
entreprises
non-‐étatiques,
les
entreprises
privées,
les
entreprises
à
technologies
de
pointe,
les
entreprises
rurales
et
faubouriennes
et
les
entreprises
à
capitaux
étrangers.
Dans
ce
système,
la
répartition
des
ressources
dépend
du
marché,
les
entreprises
produisent
spontanément
des
demandes
d’aide
à
l'innovation
technique
et
à
la
connaissance
du
marché.
Le
système
national
d’innovation
pour
le
secteur
d’Etat
est
composé
principalement
par
les
acteurs
institutionnels
étatiques.
Dans
ce
système,
les
liens
et
les
interactions
conventionnelles
sont
faites
soit
par
la
mobilisation
politique
(innovation
autonome;
aéronefs;
satellites,
etc.,
Liu,
2005),
soit
par
la
transition
de
l'organisation
hiérarchique
à
la
transaction
sur
le
marché
(Gu,
1999).
Au
niveau
national,
le
gouvernement
central
compte
perfectionner
et
intensifier
le
système
de
recherche
scientifique
et
d’éducation.
Néanmoins,
le
problème
est
du
fait
que
le
gouvernement
central
n’a
pas
établi
un
système
d’innovation
correspondant
aux
secteurs
non
étatiques.
Toutefois,
de
nombreux
aspects
du
système
étatique
freinent
le
développement
des
entreprises
non-‐étatiques.
Par
exemple
en
1998,
les
entreprises
privées
en
Chine
ne
jouissent
pas
du
droit
d’exporter
directement,
elles
doivent
passer
par
l’intermédiaire
des
corporations
du
commerce
extérieur.
A
partir
de
1998,
le
gouvernement
a
commencé
de
délivrer
les
licences
d’exportation
directe
aux
entreprises
privées
d’une
façon
sélective.
Il
ne
délivre
ces
autorisation
que
si
l’entreprise
a
enregistré
des
fonds
et
un
actif
de
plus
de
8,50
millions
de
RMB,
et
avoir
un
chiffre
d’affaires
supérieur
à
50
millions
de
RMB,
dont
au
moins
un
million
de
RMB
d’exportations
sur
chacune
des
deux
dernières
années
etc.
116
Bien
que
le
gouvernement
central
n’ait
pas
de
projets
aboutis
en
vue
de
la
construction
du
système
pour
les
entreprises
non-‐
étatiques,
beaucoup
de
gouvernements
locaux
chinois
soutiennent
le
fonctionnement
de
ces
entreprises
en
adoptant
les
politiques
adaptées,
compte
tenu
du
développement
de
l’économie
locale.
Dans
le
système
d'innovation
basé
sur
les
secteurs
non-‐étatiques,
les
acteurs
institutionnels
peuvent
être
publiques,
mais
les
entreprises
sont
principalement
privées
ou
à
capitaux
étrangers.
Les
liens
traditionnels
et
les
interactions
entre
les
entreprises
sont
la
concurrence
et
des
transactions
sur
le
marché.
L’interaction
entre
les
fabricants
et
la
clientèle
constitue
la
source
la
plus
importante
pour
l’innovation,
et
la
création
de
l’interaction
et
des
liaisons
fréquentes
directes
avec
la
clientèle
du
marché
international
constitue
le
facteur
le
plus
critique
pour
élever
la
capacité
technologique
des
entreprises
chinoises.
Les
liens
et
les
interactions
conventionnelles
entre
entreprises
et
acteurs
institutionnels
sont
des
transactions
sur
le
marché
et
des
coopérations
en
réseau.
Les
entreprises
privées
commencent
à
établir
des
liaisons
avec
les
institutions
de
recherche
scientifique,
les
organes
d’éducation,
les
instances
financières
et
le
système
de
contrôle
de
la
main-‐d’œuvre.
Leur
intervention
stimule
ces
organes
et
les
pousse
à
évoluer.
Les
informations,
les
technologies,
les
ressources
et
expériences
peuvent
s’échanger
librement
:
l’innovation
des
technologies
et
des
systèmes
voit
le
jour.
Dans
ce
système,
la
production
constitue
le
nœud
stratégique.
Toutes
les
activités
se
tournent
autour
de
la
production
des
entreprises.
Cela
ne
signifie
pas
que
ce
système
n’a
pas
d’innovation
technique
ni
de
R&D.
117
entreprises
d'Etat
dans
l'industrie
électronique
et
la
pénétration
des
entreprises
à
capitaux
étrangers,
des
entreprises
rurales
et
faubouriennes
et
des
entreprises
scientifiques
et
techniques
nouvelles,
un
système
d’innovation
non-‐étatique
a
supplanté
le
système
étatique.
Souvent,
ces
entreprises
rurales
et
faubouriennes
créent
des
liens
avec
les
établissements
bancaires,
des
entreprises
privées
obtiennent
du
personnel
technique
des
universités
etc.
Elles
ont
utilisé
les
moyens
de
production
propres
aux
entreprises
d'Etat
pour
affronter
la
concurrence
aiguë
des
entreprises
à
capitaux
étrangers
sur
le
marché.
Mais
tout
cela
n'est
pas
exempt
de
conflits.
Par
exemple
lorsque
entreprises
à
technologies
de
pointe
sont
petites,
la
question
du
droit
de
propriété
ne
pose
pas
de
problème,
mais
lorsque
les
actifs
des
entreprises
s'avèrent
importants,
les
directeurs
des
instituts
de
recherche
et
des
entreprises
étatiques
verront
des
tensions
apparaître
du
fait
de
l’actionnariat.
De
plus,
les
entreprises
d'Etat
et
les
entreprises
non-‐étatiques
se
concurrencent
sur
le
même
marché,
et
le
jeu
du
gouvernement
est
très
délicat.
Le
gouvernement
central
cherche
à
contrôler
les
applications
de
sa
politique
par
les
gouvernements
locaux.
Ce
système
national
d'innovation
de
la
Chine
de
type
mixte
peut
se
présenter
par
la
figure
ci-‐dessous.
118
Institutions de
recherche
Gouvernement scientifique et
Central Système de
université
production
Ministère Institut nouveau
des Entreprise Entreprises
ions à capitaux rurales et
Sciences et
Fournisseur
des écono étrangers faubourienn
Clients
Techniques es
mique
Entrepri Entrepris
s et
se des es
comm technolo privées
erciale gies
nouvelle
s
s
Concurrents (y
Institutio
Institu Entre Program
compris les
ns
tions prise mes
entreprises d’'Etat)
intermé Pr Réactions sur
de d'Etat d'introdu es la politique
diaires
sio
recher ction
et n
che techniqu
program Gouvernements
scienti e
mes locaux
fique étrangèr
d'Etat
d'Etat e
l Gouvernement
l Entreprises à capitaux
mixtes dans les entreprises
d'Etat
l Marché concurrentiel
l Coopération entre le
système national complet
d'innovation et le système
de production nouveau
Point de liaison
critique
119
La
configuration
unique
du
système
national
d'innovation
de
la
Chine
est
un
peu
par
hasard
que
par
dessein.
La
Chine
a
un
patrimoine
d'un
système
scientifique
complet
construit
dans
le
régime
socialiste.
Puis,
après
sa
réforme
et
politique
d'ouverture,
elle
a
formé
un
système
compliqué
de
multiples
niveaux
des
institutions
et
des
multiples
dimensions
de
la
coordination.
Son
système
de
production
est
la
principale
source
dynamique.
Mais
il
rencontre
des
problèmes
d'inadéquation
et
le
chaos
dans
les
interactions
de
deux
«systèmes».
C'est
aussi
à
cause
de
ce
problème
synergique
que
la
croissance
en
Chine
a
été
poussée
non
pas
par
l'invention
de
nouveaux
produits
et
de
nouvelles
méthodes
de
gestion,
mais
plutôt
par
l'apprentissage
et
l’imitation
de
ce
que
les
économies
avancées
ont
déjà
inventé.
L'histoire
montre
que
les
taux
de
croissance
de
la
Chine
ne
sont
pas
extraordinaires
-‐
le
monde
a
déjà
observé
la
montée
du
Japon,
de
Corée,
de
Singapour
et
d'autres
économies
asiatiques.
La
Chine
est
tout
à
fait
semblable
aux
autres
pays
dans
sa
trajectoire
de
rattrapage.
Ce
qui
est
différent
avec
la
Chine
n'est
pas
la
source
de
la
croissance,
mais
la
taille
de
l'économie.
Le
système
national
d'innovation
de
la
Chine
a
ses
caractéristiques,
mais
ne
peut
pas
constituer
un
modèle.
120
influencent
la
direction
des
efforts
d'innovation,
et
elles
produisent
des
connaissances
et
des
idées
formant
intrants
cruciaux
pour
le
processus
d'innovation
(Gu
et
Lundvall,
2006).
L’expérience
de
la
Chine
montre
également
que
les
économies
émergentes
doivent
avoir
une
approche
de
«
bottom-‐up
»
à
leur
système
d’innovation,
plutôt
que
d'une
perspective
de
«
top-‐
down
».
Un
système
de
soutien
dans
ces
économies
ne
devrait
pas
se
concentrer
sur
le
développement
des
domaines
institutionnels
sophistiqué
et
complets
(science,
éducation,
marché
du
travail,
etc.),
mais
encourager
les
gens
à
créer
leurs
entreprises
et
projets
entrepreneuriaux.
L’investissement
public
dans
l'infrastructure
urbaine
est
le
meilleur
soutien
à
l'apprentissage
et
l'innovation.
Et
une
sorte
de
politiques
du
gouvernement
favorables
au
développement
de
marché
serait
également
préférée
dans
le
domaine
de
l'innovation,
comme
suggérée
par
la
Banque
mondiale
(2002).
À
un
stade
plus
avancé
de
développement,
l'innovation
dépendra
de
l’effet
de
grappe,
tant
au
niveau
local
et
à
l'intégration
dans
la
chaîne
de
valeur
mondiale.
Ainsi,
les
économies
émergentes
devraient
se
concentrer
davantage
sur
leurs
systèmes
régionaux
/
locaux
d'innovation
et
leurs
relations
avec
les
systèmes
mondiaux
d'innovation.
Certes,
nous
pouvons
encore
apprendre
beaucoup
de
la
Chine,
mais
son
économie
reste
une
exception.
Beaucoup
de
pays
émergents
n’ont
pas
la
taille
équivalente
de
la
Chine.
Le
rattrapage
réussit
de
nombreuses
autres
économies
plus
petites
en
Asie
prouve
que
les
différents
systèmes
d’innovation
peuvent
produire
de
croissance
économique
similaire.
Une
petite
économie
peut
être
très
forte
et
compétitive
dans
le
marché
international.
Par
exemple,
les
économies
de
Hongkong,
Singapour,
et
Taiwan
sont
de
taille
petite,
mais
elles
ont
toutes
enregistré
une
croissance
exponentielle
de
leurs
exportations
et
ont
progressivement
amélioré
la
qualité
des
biens.
La
croissance
de
ces
petites
économies
asiatiques
peut
être
expliquée
par
l'accumulation
des
facteurs
de
production
(capital
humain
et
physique,
principalement),
et
des
gains
d'efficience
par
l'adoption
de
nouvelles
technologies.
Elles
créent
toutes
une
dynamique
de
la
structure
de
production
d’abord,
ainsi
ouvrent
la
possibilité
des
activités
innovantes
pour
les
entreprises
en
promouvant
les
interactions
et
liens
avec
d’autres
institutions
spécifiques.
Leur
121
systèmes
de
production
sont
principalement
composés
soit
des
entrepreneurs
innovants
(Hongkong),
soit
des
PME
dynamiques
(Taiwan),
soit
des
filiales
des
MNC
de
haute
technologie
(Singapour).
En
suite,
elles
ont
toutes
fait
évoluer
un
système
d’innovation
bien
adapté
aux
besoins
et
aux
situations
de
leurs
entreprises.
Rodrik
(1997),
dans
une
analyse
novatrice
sur
les
Tigres
de
l'Asie,
où
il
a
examiné
les
différences
dans
les
performances
entre
les
pays,
a
constaté
que
la
clé
pour
expliquer
la
diversité
de
la
performance
a
été
associée
à
ce
qu'il
appelle
«la
qualité
institutionnelle
»:
la
qualité
de
la
bureaucratie;
la
primauté
du
droit;
le
risque
d'expropriation,
et
la
répudiation
des
contrats
par
le
gouvernement.
En
effet,
la
politique
industrielle
des
Tigres
de
l’Asie
a
orienté
leur
structure
industrielle
vers
les
industries
de
l'électronique
et
de
l'informatique,
au
moment
où
les
effets
d'entraînement
du
marché
international
devenaient
importants.
Le
système
éducatif
mis
en
place
dans
ces
économies
a
favorisé
le
développement
des
compétences
d'ingénierie,
plus
facilement
exploitables
dans
la
production
industrielle.
Ce
type
de
compétence
est
plus
à
même
de
rendre
effectifs
les
transferts
technologiques,
en
permettant
une
adaptation
et
une
appropriation
des
technologies
importées.
Ainsi,
elles
ont
largement
développé
l'importation
de
biens
de
capital,
l'acquisition
de
licences
et
de
brevets
ou
la
filialisation
afin
de
combiner
les
compétences
transférées
aux
compétences
locales.
En
revanche,
des
investissements
en
recherche-‐et
développement
sont
peu
nécessaires
lorsqu'il
s'agit
seulement
d'acquérir
des
technologies
génériques
relativement
standardisées.
Dans
ces
économies
la
politique
technologique
a
favorisé
le
développement
d'une
recherche
industrielle.
La
bonne
circulation
entre
les
systèmes
de
production
et
les
champs
d’institutions
de
ces
Petit
Dragons
asiatiques
révèle
bien
l’importance
de
la
dimension
internationale
du
système
d’innovation,
mais
aussi
l’importance
des
effets
de
cluster
d’entreprises
Porterien.
A
une
petite
échelle,
peut-‐être
il
vaudrait
mieux
parler
de
système
d’innovation
spatialisé
en
fonction
des
secteurs
de
production
économique.
Ce
papier
est
consacré
à
l’analyse
du
SIN
en
Chine.
En
utilisant
les
cas
dans
le
secteur
électronique,
on
illustre
les
positionnements
et
les
liens
des
entreprises
chinoises
tout
au
long
de
la
chaîne
de
valeur.
Au
niveau
de
la
dynamique
d’entreprises,
la
Chine
a
bien
122
suivi
le
modèle
de
développement
et
accumulation
des
capacités
technologique
en
Asie
orientale.
Mais
la
spécificité
de
la
Chine
réside
dans
son
contexte
institutionnel
très
complexe.
Notre
étude
révèle
qu’il
existe
au
mois
deux
catégories
de
système
d’innovation
en
Chine,
selon
les
fonctionnements
des
entreprises
et
leurs
modes
d’interaction
et
de
lien
avec
les
acteurs
institutionnels
dans
les
champs
différents
d’institution.
D’un
côté,
l’Etat
a
consolidé
des
champs
d’institution
pour
promouvoir
la
capacité
d’innovation
des
entreprises
d’Etat,
en
mobilisant
d’une
façon
politique
toutes
les
ressources
pour
tisser
les
liens
entre
les
institutions
de
science
et
technologies
avec
les
entreprises
ciblées.
Les
interactions
et
les
liens
conventionnels
dans
ces
champs
sont
entrain
de
changer
du
mode
d’organisation
hiérarchique
au
mode
de
transaction
marchandise.
De
l’autre
côté,
les
entreprises
non-‐
étatiques
en
Chine
aussi
créent
progressivement
leurs
propres
champs
d’institutions
à
travers
des
interactions
et
des
liens
du
type
de
coordination
par
réseau
et
relations
sociales,
et
de
la
façon
de
transaction
du
marché,
mais
d’une
degré
moins
importante.
Quand
à
la
question
«
y-‐a-‐t-‐il
un
modèle
chinois
du
SNI
?
»,
c’est
vrai
qu’il
y
a
une
dynamique
très
forte
du
système
de
production,
et
les
systèmes
locaux
d’innovation
en
Chine
sont
en
train
d’émerger.
Mais
la
performance
systémique
de
l’ensemble
de
l’économie
chinoise
en
terme
de
l’innovation
(pas
en
terme
de
l’apprentissage)
est
plutôt
médiocre,
à
cause
des
systèmes
d’innovation
internes
de
multi-‐niveau
et
multi-‐façade
qui
a
du
mal
à
créer
une
synchronisation
et
une
synergie
entre
les
efforts
d’Etat
et
les
actions
des
entreprises
privées.
Enfin,
après
beaucoup
d’études
complètes
sur
les
SIN
dans
les
pays
industrialisés
avancés,
il
est
temps
de
questionner
l’universalité
de
la
théorie
SIN
et
reconcevoir
l’approche
SIN
dans
son
ensemble.
Si
les
économistes
privilégient
l’argument
qu’il
faille
analyser
la
trajectoire
historique
d’un
système
d’innovation
pour
en
relever
les
caractéristiques
actuelles
(cf.
l’analyse
du
SNI
de
la
Chine
par
Liu,
X.
and
S.
White,
2001),
il
y
a
encore
beaucoup
à
faire
pour
prendre
en
compte
les
systèmes
d’innovation
des
économies
plus
petites,
dans
un
environnement
plus
internationalisé,
et
avec
un
but
de
croissance
économique
plus
intelligente.
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126
En
25-‐30
ans
(Tunisie
2040),
notre
pays
peut
accéder
au
stade
de
pays
développés.
Ce
rêve
est
possible.
Certains
pays,
comme
la
Malaisie
ou
Singapour
l’ont
réalisé.
La
Tunisie,
par
l’intelligence
de
son
peuple,
principalement
sa
jeunesse
éduquée
et
ambitieuse
peut
le
faire.
Il
faut
y
croire.
Une
volonté
politique
ferme
et
une
équipe
dirigeante
visionnaire
doit
accompagner
ce
rêve.
Au
secteur
privé
de
créer
le
maximum
de
richesses
possibles
;
de
générer
des
emplois
durables
et
de
distribuer
des
revenus
consistants
dans
le
respect
des
textes
en
vigueur.
En
contre
partie,
il
récolte
le
maximum
de
profit
qui
permet
de
couvrir
les
risques
encourus
;
la
créativité
et
l’innovation.
A
l’Etat
de
l’accompagner
dans
sa
démarche
pour
définir
les
secteurs
stratégiques
présents
et
futurs.
Pour
cela,
il
doit
mettre
en
place
une
vision
stratégique
ambitieuse
;
restructurer
profondément
les
secteurs
de
la
justice
;
de
la
finance
;
de
l’enseignement,
la
formation
et
l’innovation
;
réformer
profondément
le
système
fiscal
tunisien
et
instaurer
un
système
de
lutte
contre
la
corruption.
L’objectif
de
cet
ouvrage
est
d’engager
le
débat
sur
ces
questions.
127