Professional Documents
Culture Documents
L’article 66 quant à lui précise que « nul ne peut être arbitrairement détenu … L’autorité
judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les
condition prévues par la loi ».
L’article 72 évoque les libertés locales : « les collectivités locales s’administrent librement ».
Libertés publiques, droits de l’Homme, les deux expressions sont proches. Cependant elles ne
se confondent pas.
La notion de « droits de l'homme », relève de la conception du Droit naturel selon laquelle
l'homme, parce qu'il est homme, possède un ensemble de droits, inhérents à sa nature. La
notion transcende donc sa reconnaissance par les textes. C’est la raison pour laquelle c’est le
Préambule de la Constitution et singulièrement la Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen qui renvoie à cette notion.
De la notion de droits naturels, liés à la personne humaine, indépendamment des pouvoirs
publics, on passe à celle de libertés publiques, qui sont des droits humains reconnus et
protégés par la Constitution, par les lois mais aussi et par des conventions internationales.
Cette reconnaissance s’est faite par étape. C’est d’abord la loi qui a garanti les libertés
publiques, notamment sous la IIIe République. C’est la raison pour laquelle le préambule de
1946 renvoie aux Principes fondamentaux reconnus par les lois de la République.
Aujourd’hui, les libertés publiques ont vu leur statut renforcé puisque leur garantie est
constitutionnelle. C’est ce qui explique que parfois l’on préfère parler de libertés
fondamentales.
Les libertés publiques se sont diversifiées avec le temps et en raison notamment de la
jurisprudence du Conseil constitutionnel. Il sera donc nécessaire d’étudier le régime juridique
des différentes libertés publiques, mais avant il nous paraît utile de préciser les garanties, les
conditions, le cadre dans lesquelles les libertés s’exercent c’est à dire la théorie générale des
libertés publiques.
Les libertés publiques ont été progressivement reconnues juridiquement. Et c’est parce
qu’elles étaient reconnues qu’elles ont pu alors s’exercer.
Les textes sont anciens pour beaucoup d’entre eux. Mais bien sûr ce sont les textes actuels qui
sont les plus nombreux.
Le Souverain anglais Jean Sans-Terre, a dû faire face à la révolte de ses barons après la
défaite de Bouvines (1214). Ces derniers, émigrés en France, rédigent à l'abbaye cistercienne
de Pontigny (dans l'Yonne) la Magna Carta
Par ce long texte en latin de soixante trois articles le Roi s'engageait ainsi que ses « héritiers,
pour toujours » d'accorder « à tous les hommes libres de notre Royaume » les droits et libertés
énoncées.
En particulier, la Charte énumère les privilèges accordés à l'Eglise d'Angleterre, à la Cité de
Londres, aux marchands, aux dignitaires féodaux du régime et les garanties précises
concernant la liberté individuelle des sujets: « Aucun homme libre ne sera arrêté ou
emprisonné si ce n'est en vertu du jugement légal de ses pairs ou en vertu de la loi du pays ».
Elle pose également le principe du consentement de l’impôt par le Parlement ou plutôt
l’ancêtre de celui-ci. « Aucun impôt ou aide ne sera imposé, dans Notre Royaume, sans le
consentement du Conseil Commun de Notre Royaume »
La Grande Charte est le premier texte établi contre l'arbitraire de la Couronne et prévoyant
des mesures de protection précises des libertés individuelles. Il sera repris et élargi par la
suite, entre autres le 5 novembre 1297 sous le règne d'Edouard Ier.
Charles Ier d'Angleterre, en lutte contre la France et l'Espagne, doit convoquer le Parlement
pour lui réclamer des subsides. Avant de les voter, les membres du Parlement (Chambre des
Lords et Chambre des Communes) lui imposent la Pétition des droits (rédigée en anglais). Ses
onze articles garantissent à la fois des principes de liberté politique (respect des droits du
Parlement) et de libertés individuelles (sécurité du peuple).
Parmi ceux-ci on peut citer, l’interdiction de lever l'impôt sans l'accord du Parlement,
l’interdiction des arrestations arbitraires et des tribunaux d'exception, le droit pour l'accusé à
une procédure régulière, le respect des droits et libertés selon les lois et les statuts du royaume
Acceptée par le roi, la pétition fut appliquée deux ans: la paix conclue, n'ayant plus besoin du
Parlement, Charles Ier régna en souverain absolu jusqu'à sa mort en 1649.
La procédure d'habeas corpus garantit la liberté individuelle contre les risques d'arrestations et
de répressions arbitraires. L'Acte de 1679 fut rédigé sous le règne de Charles II par les
membres du Parlement pour se protéger contre des pratiques alors courantes. Il dénonce les
abus et énumère des règles précises concernant le respect des droits des accusés et des
prisonniers.
« En vue d'éviter cet état de choses et de hâter le plus possible la libération de
toutes les personnes emprisonnées pour ces affaires criminelles ou supposées
criminelles ; qu’il soit décidé par sa Majesté le Roi, sur l’avis et le consentement
des lords spirituels et temporels et des Communes assemblées dans le présent
Parlement, et par leur autorité, que chaque fois qu'une ou des personnes, quelles
qu'elles soient, apporteront un Habeas Corpus, adressé à un sheriff (... ) geôlier,
ministre ou toute autre personne quelle qu'elle soit, en faveur de toute personne
confiée à sa, ou à leur garde, et que ledit writ sera remis audit officier, ou laissé à
la geôle ou prison entre les mains d'officiers subalternes, de gardiens ou de
représentants de ces officiers, ledit officier devra dans les trois jours après la
remise du writ (...) remettre ou faire remettre le prisonnier ou détenu en personne
au Lord-chancelier ou au Lord gardien du grand sceau d'Angleterre (...) et devra
alors également faire connaître exactement les causes véritables de la détention
ou emprisonnement (... )
Les exactions des Stuart en matière financière et leur méconnaissance des droits du Parlement
sont à l’origine des deux Révolutions d'Angleterre : celle de 1640 et celle de 1688. La
première conduisit à l’exécution de Charles 1er et à l’instauration de la République par
Cromwell, mais ses excès provoquèrent le rétablissement de la monarchie. La seconde
Révolution, devait marquer le triomphe définitif du Parlement. Jacques II est chassé du trône ;
pour l'y remplacer, le Parlement fait appel à sa fille Marie et à son gendre Guillaume
d'Orange.
Mais pour y accéder, ils doivent, accepter le Bill of Rights (Déclaration des droits) que les
Chambres ont voté et qui limite considérablement les pouvoirs du Roi.
Il s'agit donc pour la première fois, d'un véritable contrat établi entre les souverains et le
peuple, lui-même souverain, contrat qui met un terme au concept de monarchie de droit divin.
La Déclaration des droits énumère les droits reconnus au peuple depuis 1215. L'article
premier énonce un principe essentiel: l'autorité royale n'a pas force de loi; la loi est au-dessus
du roi. Les autres articles développent ce principe. Le peuple a le droit de pétition, le droit de
voter librement, des garanties judiciaires et la protection de ses libertés individuelles. Peu de
temps après, la liberté de culte sera accordée aux protestants.
Dans les colonies anglaises d'Amérique, seront reconnus un certain nombre de droits
individuels dès le milieu du XVII siècle. Le Body of Liberties élaboré dans la colonie
puritaine du Massachusetts en 1641 énonçait quelques libertés, à l'exclusion de celle de
conscience, incompatible avec le régime théocratique mis en place par les puritains. La liberté
6
de conscience est par contre reconnue, dès 1649, dans le Maryland, , et en 1663 dans le Rhode
Island. Dans le New Jersey, la Pennsylvanie et le Delaware, la liberté de conscience est
assurée à la fin du XVII siècle. En revanche, les colonies du Sud demeurent fermées à tout ce
qui peut annoncer la tolérance.
La Virginia Bill of Rights fut la première à être rédigée pour accompagner la Constitution de
l'Etat de Virginie. Adoptée le 12 juin 1776, elle fut utilisée par Jefferson pour rédiger la
première partie de la Déclaration d'indépendance et servit de base aux dix premiers
amendements de la Constitution. Ce texte, traduit en Français, eut lors de la Révolution
française une grande influence sur le comité chargé du travail sur la Constitution et de
l'élaboration de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
L'article 1er de la Déclaration de Virginie affirme que les hommes « ont des droits certains,
essentiels et naturels, dont ils ne peuvent, par aucun contrat, priver ni dépouiller leur
postérité ». Les dix sept autres articles énumèrent des droits proches de la notion moderne de
droits de l'homme : égalité de tous les hommes, séparation des pouvoirs législatif et exécutif,
pouvoir au peuple et à ses représentants, liberté de la presse, pouvoir militaire subordonné au
pouvoir civil, droit à la justice, liberté de culte. Les droits de la personne humaine sont
considérés comme des droits naturels, qu'aucun régime ne peut réduire. Certains droits sont
inaliénables. Le même mois fut élaboré la Déclaration des droits des habitants de
Pennsylvanie.
A la suite de cette déclaration, la plupart des anciennes colonies réviseront leurs constitutions
Huit d'entre elles y incluront des déclarations de droits entre 1776 et 1783. On peut citer
notamment la déclaration du Delaware adoptée en septembre 1776, celle du Maryland rédigée
7
c) Le Bill of rights
La Constitution de 1787 fut complétée par dix amendements, formulés par James Madison,
qui entrèrent en vigueur le 15 décembre 1791. Ils sont connus sous le nom de Bill of Rights.
Aucun de ces dix premiers amendements, ne mentionne de ce que l'on désignera plus tard, par
les termes de « droits économiques et sociaux », comme le droit à l'éducation, au travail, à la
Sécurité sociale. Aucun des dix sept autres amendements adoptés ultérieurement ne les
énonceront.
C’est seulement dans les années soixante-dix et quatre-vingt du XXe siècle que les juges
américains ont entrepris de réformer la société américaine dans les domaines des relations
raciales, de l'éducation et du bien-être social : de nouveaux droits sociaux sont donc apparus
très récemment aux États-Unis d'Amérique, grâce à l'« activisme » de l'institution judiciaire.
Le premier des textes est bien sûr la Déclaration des droits de l’homme de 1789, mais, elle a
été suivie d’autres déclarations des droits qui n’ont pas eu le même sort.
a) L’élaboration du texte
1. L’élaboration matérielle
Après six semaines de réunion des Etats Généraux à Versailles sans grands résultats, le Tiers-
état réagit le 17 juin 1789, en constatant qu’il représente 98 % de la population il se proclame
Assemblée Nationale avec l’appui d’une faible majorité du clergé et de quelques nobles.
Le 20 juin 1789, les membres de la nouvelle Assemblée Nationale se rendent en vain dans la
salle qui abrite ordinairement les Etats Généraux, mais la porte est close. Les députés,
présidés par Bailly, se rendent alors au Jeu de paume. C’est dans cette salle que les membres
de l’Assemblée Nationale prêtent le serment de ne jamais se séparer jusqu’à ce que la
Constitution soit parachevée.
Après la prise de la Bastille (14 juillet 1789), l'Assemblée constituante, vote dans la nuit du 4
août l'abolition de tous les privilèges et en préambule à la future Constitution du 3 septembre
1791, elle rédigera la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Le projet de Sieyès
s’intitulera d’ailleurs « préliminaire de la Constitution », celui de Mounier « projet des
premiers articles de la constitution ». La discussion commencera le 20 août et se terminera le
26 par l’adoption des dix sept articles.
2. L’élaboration intellectuelle
Les rédacteurs de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen se sont inspirés en
partie des principes énoncés par les déclarations américaines. Mais la source originale de la
Déclaration est contestée. A la fin du XVIIIème siècle, certains auteurs se sont affrontés sur le
point de savoir si la France avait été ou non la patrie des droits de l’homme. Pour Emile
Boutmy, le créateur de l’Ecole libre des sciences politique, la Déclaration est purement
française : elle serait issue de l’humanisme et du siècle des lumières, Voltaire, Rousseau ou
9
encore les physiocrates. Les Américains se seraient inspirés de ces mêmes œuvres pour
rédiger leur déclaration. G. Jellinek conteste cette origine et voit dans la Réforme, le
luthéranisme allemand, le puritanisme anglo-hollandais le point de départ de la Déclaration
d’indépendance américaine qui aurait alors influencé plus tard la rédaction de la Déclaration
des Droits de l’Homme et du Citoyen.
A vrai dire, la Déclaration se situe au confluent de divers courants intellectuels Elle appartient
à ce que Julien Benda appelle l’histoire démocratique des idées.
b) Contenu
Après un préambule, la Déclaration énonce les droits de l’homme et du citoyen ainsi que les
principes d’organisation politique inhérents à ces droits.
1. Le préambule
Le préambule emploie d’emblée un ton universel et abstrait en constatant l’existence des
droits naturels, inaliénables et sacrés de l’homme. Ces droits sont issus de la nature humaine,
il faut donc les reconnaître et les protéger. Il rappelle également le but de la Déclaration, c’est
à dire, limiter les pouvoirs, en instaurant des normes supérieures :
« afin que les actes du pouvoir législatif et ceux du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque
instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés ;
afin que les réclamations des citoyens, fondées désormais sur des principes simples et
incontestables, tournent toujours au maintien de la Constitution et au bonheur de tous »
Plus restrictive que les deux précédentes, cette Déclaration les remplace à la tête de la
nouvelle Constitution après la chute de Robespierre. Son but, après les excès de la Terreur, est
de rétablir l'équilibre entre droits et devoirs. Elle supprime entre autres tous les nouveaux
droits de la Déclaration de 1793.
Après la révolution de février 1848, le gouvernement provisoire fait rédiger une nouvelle
Constitution par une Assemblée élue. Elle établit le suffrage universel.
Son préambule rappelle l’esprit de la révolution en insistant sur les droits certes mais en
soulignant l’existence de devoirs « Les citoyens doivent aimer la Patrie, servir la République,
la défendre au prix de leur vie, participer aux charges de l'État en proportion de leur fortune
; ils doivent s'assurer, par le travail, des moyens d'existence, et, par la prévoyance, des
ressources pour l'avenir ; ils doivent concourir au bien-être commun en s'entraidant
fraternellement les uns les autres, et à l'ordre général en observant les lois morales et les lois
écrites qui régissent la société, la famille et l'individu. » Mais, ces devoirs sont réciproques
« La République doit protéger le citoyen dans sa personne, sa famille, sa religion, sa
propriété, son travail, et mettre à la portée de chacun l'instruction indispensable à tous les
hommes ; elle doit, par une assistance fraternelle, assurer l'existence des citoyens
nécessiteux, soit en leur procurant du travail dans les limites de ses ressources, soit en
donnant, à défaut de la famille, des secours à ceux qui sont hors d'état de travailler ».
L’aspect social, et l’apparition de droit-créances sont développés par la Constitution elle-
même.
Le chapitre 2 de la Constitution énonce des droits des citoyens reconnus par la République
comme étant supérieurs et antérieurs aux lois positives. Les libertés de 1789 sont réaffirmées
et prolongées. Il garantit la liberté d'enseignement, la liberté du travail, donne le droit
d'association et de pétition et abolit l'esclavage sur tout le territoire français (y compris les
colonies), abolit la peine de mort en matière politique, réduit les heures de travail, prend des
mesures sociales
11
L’Etat est obligé à des interventions positives envers les citoyens (obligation de protection,
d'instruction, d'assistance, de procurer du travail), c’est l’apparition des droits de créances de
l'homme sur la société. L'individualisme est atténué et on reconnaît des droits à la famille,
ainsi que des libertés collectives aux individus.
Le caractère abstrait et l'universalisme des déclarations précédentes s'atténue : on prend en
considération l’infirme, le vieillard … L'énoncé des droits est souvent accompagné de
l'indication des moyens nécessaires pour les exercer pleinement : la liberté des cultes est
assurée par le versement d'un salaire au ministre des cultes ; le développement du travail est
assuré par l'enseignement gratuit, l'éducation professionnelle.
Les lois constitutionnelles de la IIIème République ne font aucune place aux droits et libertés,
mais la loi en consacrera beaucoup, notamment les libertés de réunion et de la presse (1881),
la liberté syndicale (1885), la loi sur les associations (1901). Le Conseil d’Etat favorisera
aussi leur essor en augmentant les pouvoirs du juge, en restreignant le domaine des actes de
gouvernement, et en élargissant l'accueil des recours pour excès de pouvoir. Des zones
d'ombre persistent : la liberté religieuse n'est pas reconnue.
d) Le préambule de 1946
Le préambule de la Constitution de 1946 réaffirme les droits de 1789 mais il tient compte des
apports de la IIIe République en ce domaine en faisant allusion aux « principes fondamentaux
reconnus par les lois de la République » (PFRLR) sans énoncer explicitement ceux-ci. Mais
surtout ce préambule «proclame,(…)comme particulièrement nécessaires à notre temps, les
principes politiques, économiques et sociaux » comme le droit de se syndiquer, de faire grève,
le droit au travail, etc…bref, des droits qui ne s’exercent que collectivement et dans le cadre
des rapports économiques et/ou sociaux. On peut donc considérer ce préambule comme le
volet économique et social des droits qui complète ainsi le volet civil et politique des droits
que constitue la Déclaration des droits de l’homme de 1789. C’est pourquoi le préambule
actuel de la Constitution renvoie à ces deux textes.
La Constitution ainsi que les lois et règlements reconnaissent les principales libertés
publiques.
§ 1 - LA CONSTITUTION
Pour que la Constitution devienne véritablement la « Charte des libertés » il fallait que son
préambule se vit reconnaître une valeur juridique. La doctrine et la jurisprudence eurent sur
cette question des positions différentes.
Constitution. Léon Duguit, qui pourtant partageait rarement les positions du Doyen de
Toulouse, allait dans le même sens. Pour lui en effet, la Déclaration avait une valeur
fondamentale. Elle est à la base même de notre système politique. Plus près de nous, Georges
Vedel était de ceux qui estimaient qu’il fallait se prononcer au cas par cas sur cette question.
Certaines dispositions des préambules étant suffisamment précises pour être considérées
comme des règles de droit. Le préambule avait donc une valeur relative.
D’abord parce que la notion n’est pas très claire, ensuite et surtout parce que cette catégorie
de principes ne fait pas l’objet d’une énumération comme les « principes particulièrement
nécessaires à notre temps ». En conséquence le juge lorsqu’il «découvre » l’un de ces
principes est soupçonné de l’écrire. C'est donc le spectre du «Gouvernement des Juges » qui
est ainsi agité.
La jurisprudence ultérieure du Conseil ne fera que renforcer cette position. Ce faisant, la liste
des normes constitutionnelles relatives aux libertés s’allongera.
– L’article premier précise que « La France est une république indivisible, laïque,
démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction
d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est
décentralisée. »
– L’article 2 en énonçant « La devise de la République est « Liberté, Egalité, Fraternité »,.
Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple » développe ces
principes.
– L’article 3 précise les conditions de mise en œuvre du principe démocratique énoncé plus
haut en posant que « Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par
la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret
Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français
majeurs, des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques
La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions
électives ».
Ainsi est reconnu la liberté-participation ou « liberté des anciens » selon Benjamin Constant
– L’article 4 précise la place des partis politiques dans la démocratie « Les partis et
groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur
activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la
démocratie. Ils contribuent à la mise en œuvre du principe de l'égal accès des femmes et des
hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ».
– L’article 34 précise le domaine de la loi, il donne en particulier compétence au législateur
pour fixer les règles concernant : « les droits civiques et les garanties fondamentales
accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques »
– L’article 66 pose le principe de la sûreté : « Nul ne peut être arbitrairement détenu » et fait
du juge judiciaire le garant du principe de la liberté individuelle qu’il énonce
également : « L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de
ce principe dans les conditions prévues par la loi »
– L’article 64 complète l’article précédent en garantissant l’indépendance de l'autorité
judiciaire : Le Président de la République est garant de l'indépendance de l'autorité
judiciaire.
Il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature.
Une loi organique porte statut des magistrats. Les magistrats du siège sont inamovibles. »
– Le droit de propriété (article 17) (CC, 81-139 DC, 11 fév. 1982, Nationalisations II, DECC
164),
– La liberté de communication (article 11) (CC, 84-181 DC, 10 oct. 1984, Entreprises de
presse, DECC 221),
– Le principe d'égalité des citoyens (article 1) (CC, 73-51 DC, 27 déc. 1973, Taxation
d'office, DECC 73 ; CC, 82-146 DC, 18 nov. 1982, Code électoral et code des communes,
DECC 190),
– L'interdiction de la détention arbitraire (article 9) (CC, 93-326 DC, 11 août 1993, Réforme
du code de procédure pénale, DECC 628),
– Le principe de proportionnalité des peines (article 8) (CC, 93-321 DC, 20 juill. 1993, Code
de la nationalité, DECC 606).
– La liberté d'association (CC, 71-44 DC, 16 juill. 1991, Liberté d'association, DECC 63),
– La liberté de l'enseignement (CC, 77-87 DC, 23 nov. 1977,
– Le respect des droits de la défense (CC, 76-70 DC, 2 déc. 1976, Prévention des accidents du
travail 11, DECC 84),
– L’indépendance de la justice administrative (CC, 80119 DC, 22 juill. 1980, Validation
d'actes administratifs 1, DECC 137),
– La liberté de l'enseignement supérieur et de la recherche (CC, 83-165 DC, 20 jan. 1984,
Libertés universitaires, DECC 213),
– La compétence exclusive de la juridiction administrative pour l'annulation des actes de la
puissance publique (CC, 86-224 DC, 23 jan. 1987, Conseil de la concurrence, DECC 340),
– L’autorité judiciaire gardienne de la propriété immobilière privée (CC, 89-256 DC, 25 juill.
1989, Urbanisme et agglomérations
– Le droit de grève (CC, 79- 105 DC, 25 juill. 1979, Grève à la radio et à la télévision, DECC
127),
– La liberté syndicale (CC, 83-162 DC, 19 juill. 1983, Démocratisation du secteur public,
DECC 195),
– Le principe du non-recours à la force contre la liberté d'un peuple (CC, 75-59 DC, 30 déc.
1975, Autodétermination des Comores, DECC 82),
– L’organisation de l'enseignement public, gratuit et laïque (CC, 77-87 DC, 23 nov. 1977,
– La liberté d'enseignement et de conscience, DECC 106).
§ 2 - LA LOI ET LE REGLEMENT
A - La loi
Au moment de la Révolution, la Déclaration des droits de l’homme précise la compétence du
pouvoir législatif en matière de libertés publiques. Plus exactement, elle confie à la loi le soin
de fixer les bornes à l'exercice des libertés publiques. Dans ce cadre, le pouvoir législatif n'est
compétent que pour limiter les libertés publiques, et non pas pour les garantir.
Par la suite, sous la IIIème République, le pouvoir législatif sera reconnu compétent pour
limiter et garantir les libertés publiques. Par son avis du 6 février 1953, le Conseil d’Etat a
estimé que la pratique des décrets-loi ne pouvait pas s'appliquer aux libertés publiques, le
législateur ne pouvant se dessaisir au profit de l'exécutif en cette matière.
Sous la Vème, l'article 34 de la Constitution, place au premier rang des matières dont la loi fixe
les règles, les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés
publiques. Pour le reste, le pouvoir réglementaire est compétent.
Le législateur peut également fixer le statut d'une liberté publique déjà consacrée : selon la
constitution de 1946, le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglemente. La
marge de la loi est limitée.
B - Le règlement
Par son arrêt Labonne (CE, 8 août 1919), le Conseil d’Etat a reconnu au chef de l'Etat, le
pouvoir de réglementer les libertés publiques. Plus précisément, il a déclaré légal un décret en
dépit de la limitation à la liberté de circulation qu'il impliquait.
Sous la IVème République, ce pouvoir de police est passé au Président du Conseil, et sous la
Vème , il est exercé par le Premier Ministre et le Président de la République (art. 34 et 37).
Au niveau local les autorités de police (préfet, maire…) peuvent aggraver les mesures de
police prises au niveau national.
La compétence réglementaire est subordonnée à la loi ou à défaut, aux conventions
internationales, aux règles constitutionnelles, aux principes fondamentaux reconnus par les
lois de la République et principes généraux du droit. La compétence réglementaire est
également contrôlée : le juge administratif vérifie la légalité des actes qui portent atteinte aux
libertés publiques. Les mesures de police doivent être proportionnées à l'importance du
désordre qu'elles veulent prévenir. Le juge sanctionne toute interdiction générale et absolue
des libertés publiques.
Longtemps, la cause des individus a été totalement étrangère au droit international. Le droit
humanitaire est le premier à rompre avec la logique classique des rapports interétatiques. Le
22 août 1864, une convention pour l'amélioration du sort des militaires blessés dans les
armées en campagne sera signée à Genève, grâce aux efforts déployés par Henri Dunant. Elle
sera suivie des quatre Conventions du 12 août 1949 et de leurs Protocoles formant ce que l'on
appelle parfois « le droit de Genève ».
Le traité de Versailles imposera à la Pologne et à la Tchécoslovaquie de respecter « les
intérêts des habitants qui diffèrent de la majorité de la population par la race, la langue ou la
religion ». La Société des Nations (SDN) devait alors s’intéresser aux minorités sans pour
autant réussir. Il fallu attendre la création de l’ONU pour voir consacré les droits de l’homme
à travers la Déclaration universelle des droits de l’homme, les deux Pactes ainsi que les
différents textes particuliers qui suivirent.
A - Son élaboration
La Charte de l’ONU signée à San Francisco le 26 juin 1945 précise que parmi les buts de
l'Organisation, figure la réalisation de la coopération internationale « en développant et en
encourageant le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous sans
distinction de race, de sexe, de langue ou de religion », de plus selon l’article 55,
l’Organisation, doit avec le concours des États membres, « favoriser » le respect universel et
effectif des droits de l’homme. Sept autres articles de la Charte (13, 56, 62, 68, 76, 83, 87)
évoquent les droits de l’homme sans pourtant poser des règles suffisamment précises.
Il fallait aller au-delà de ces dispositions. Le principe d'un texte international sur les droits de
l'homme fut adopté.
Le choix entre une simple Déclaration qui n'impliquait pas d'obligations juridiques précises et
une convention fut tranché en faveur de la première solution : c'était, en effet, celle retenue
par les États-Unis et l'URSS. Cette solution a d'ailleurs permis une élaboration assez rapide
(l8 mois). Le 10 décembre 1948, l'Assemblée générale réunie à Paris (Palais de Chaillot)
adoptait la Déclaration universelle des droits de l'homme. Huit États sur les 56 participants
devaient voter en sa faveur. Aucun État ne vota contre ; les seules abstentions émanaient de
l'URSS et de cinq Etats du bloc soviétique, plus l'Arabie saoudite et l’Afrique du Sud.
B - Son contenu
C'est un texte assez bref comprenant trente articles précédés d'un préambule. Celui-ci résume
l'esprit du texte : il manifeste la foi de ses rédacteurs dans la dignité de l'homme, le progrès
social, la paix, et affirme que les Droits de l’homme doivent être protégés par un régime de
droit.
Après les deux premiers articles qui posent les principes fondamentaux sur lesquels reposent
tous les droits de l'homme, la Déclaration comprend deux parties.
18
De l'article premier à l'article 21 inclus, elle énonce l'ensemble des libertés traditionnelles,
individuelles et collectives, civiles et politiques.
Les droits civils tout d’abord (art. 3 à 14 : droit à la vie, à la sûreté, à la vie privée, liberté
d'aller et venir librement, droit à un procès équitable, droit d'asile), les droits civils ensuite
(art. 15 à 17 : droit à une nationalité, de fonder une famille, droit de propriété) les libertés
publiques intellectuelles et politiques (art. 18 à 21 : liberté d'expression, de réunion,
d'association, de participer à la direction des affaires publiques).
Les articles 22 à 27 inclus sont relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels. Proche
sur de nombreux points de la Déclaration de 1789, elle est cependant plus précise et plus
complète. Les limites aux droits reconnus ne sont pas ignorés. Mais elles ne peuvent être
prévues que par la loi et seulement « en vue d'assurer la reconnaissance et le respect des
droits et libertés d'autrui et afin de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l'ordre
public et du bien-être général dans une société démocratique.
La Déclaration n'ayant pas de valeur juridique obligatoire, son contenu fut repris sous une
forme conventionnelle dans deux pactes adoptés à l'unanimité par l'Assemblée générale de
l'ONU, le 16 décembre 1966.
Il garantit le droit à la vie (article 6), à la liberté et à la sécurité (art. 9-1) et au respect de la vie
privée (art. 17). Il interdit la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 7).
En outre, il reconnaît les libertés de pensée, de conscience et de religion (art. 18), de réunion
pacifique (art. 21), d'association, y compris le droit de constituer des syndicats (art. 22), et de
circulation. Enfin, il proclame les droits culturels des minorités (art. 27).
Le Pacte prévoit en outre des mesures spécifiques de mise en oeuvre : la création d'un Comité
des droits de l'homme (art. 28), composé de dix-huit experts indépendants [ressortissants des
Etats parties au pacte], qui a compétence à être saisi des communications émanant, d'une part
d'un Etat partie [contre un autre Etat partie]; d'autre part de particuliers prétendant être
19
victimes d'une violation des droits énoncés dans le pacte de la part d'un Etat partie(art. 41 et
Protocole facultatif).
Il contraint les Etats qui le ratifient à favoriser le bien-être général de leurs habitants (article
4) et précise le droit de toute personne au travail et à la formation (art. 6), à participer à une
activité syndicale (art. 8), à la sécurité sociale (art. 9), à la santé (art. 12) et à l'éducation (art.
13).
c) Le protocole facultatif
Ce premier Protocole se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
a été adopté le même jour [16 décembre 1966], est entré en vigueur le 23 mars 1976. Il
prévoit un mécanisme international pour donner suite aux plaintes de particuliers qui
prétendent être victimes d'une violation des droits énoncés dans le Pacte relatif aux droits
civils et politiques. Quatre vingt quinze Etats ont, à ce jour, adhéré à ce protocole.
Il a été adopté par l'Assemblée générale le 15 décembre 1989, est entré en vigueur le 11 juillet
1991. Trente six Etats ont, à ce jour, adhéré à ce protocole qui vise « à abolir la peine de
mort ».
répression du crime de génocide (9 décembre 1948) ainsi que celle sur l'imprescriptibilité des
crimes de guerre et contre l'humanité (26 novembre 1968). Plus tard viendront, la Convention
contre la torture et autres peines, traitements inhumains ou dégradants (10 décembre 1984),
les conventions sur les droits politiques de la femme (1952), sur la nationalité de la femme
mariée (1957) et sur l'élimination des formes de discrimination à l'égard des femmes (1965 et
1980) ; la déclaration universelle sur le génome humain (11 décembre 1997).
C’est dans le cadre du Conseil de l’Europe d’abord que des textes importants ont été adoptés
en vue de la protection des libertés publiques. Le relais a été pris ensuite par l’Union
européenne.
Deux textes d’importance ont été élaborés dans le cadre : la Convention européenne des droits
de l’homme et la Charte sociale.
a) La Convention elle-même
b) Les Protocoles
Depuis l’entrée en vigueur de la Convention, douze Protocoles additionnels ont été adoptés.
Les Protocoles nos 1, 4, 6, 7 et 12 ont ajouté des droits et libertés à ceux consacrés par la
Convention. Ainsi, le Protocole n° 1 garantit le droit de propriété (art.1), le droit à
l’instruction (art. 2), le droit à des élections libres (art.3). Le Protocole n° 4 interdit
21
A - L’élaboration de la Charte
La Charte européenne des droits fondamentaux, a été signée le 7 décembre 2000 au Sommet
des chefs d'Etat et de gouvernement des 15 Etats membres réunis à Nice pour signer le traité
qui adaptera les institutions européennes pour l'élargissement de l'Union à 25 membres.
23
Elle n’a pas de valeur contraignante, mais elle pourra être ultérieurement intégrée dans les
traités ou dans la future Constitution européenne.
La décision d'élaborer une cette Charte a été prise en juin 1999 par le sommet européen de
Cologne, sur proposition du chancelier allemand Gerhard Schröder et de son ministre des
affaires étrangères, Joschka Fischer.
La rédaction du projet de Charte a été confiée à une « convention », composée de 62
membres, et présidée par l'ancien président allemand Roman Herzog: 15 représentants des
chefs d'Etat et de gouvernements, 30 représentants des Parlements nationaux (2 par Etat
membre), 16 représentants du Parlement européen et un représentant du président de la
Commission européenne. De plus, 2 représentants de la Cour de justice et du Conseil de
l'Europe ont suivi les travaux en tant qu'observateurs.
B - Le contenu de la Charte
La Charte, après un Préambule subdivisé en sept alinéas, comprend 54 articles répartis en 7
chapitres consacrés à la dignité, aux libertés, à l'égalité, à la solidarité, à la citoyenneté, à la
justice et aux dispositions générales de nature technique.
Le préambule affirme les valeurs partagées par les pays de l'Union : la dignité humaine,
l'égalité et la solidarité qui s’appuient sur deux piliers, la démocratie et l'Etat de droit.
Six grands chapitres : Dignité, Libertés, Egalité, Solidarité, Citoyenneté, Justice, détaillent les
droits et libertés qui doivent être « garantis à chacun ».
– Au chapitre « Dignité », la Charte pose le principe de l'inviolabilité de la dignité humaine,
et affirme le droit à la vie et à l'intégrité de la personne.
– Au chapitre « Libertés », elle réaffirme la « liberté de pensée, de conscience et de religion »,
la liberté de réunion et d'association et énumère d'autres droits comme le droit à l'éducation, le
droit d'asile.
– Au chapitre « Egalité », est rappelé le respect de « l'égalité (de tous) en droit », la non-
discrimination, de la diversité culturelle, religieuse et linguistique, de l'égalité entre homme et
femme, des droits de l'enfant et des personnes âgées.
– Au chapitre « Citoyenneté », est énoncé le « droit à une bonne administration » ainsi qu'un
« droit d'accès » aux documents du parlement européen.
– Au chapitre « Justice », la Charte réaffirme la « présomption d'innocence » et le « droit à ne
pas être jugé ou puni pénalement deux fois pour une même infraction ».
– Au chapitre « Solidarité », est garanti le droit à la consultation et à l'action collective des
travailleurs (y compris la grève), le droit à des « conditions de travail justes et équitables »
ainsi qu'à une « protection contre tout licenciement injustifié »; le droit « à une limitation de
la durée maximale du travail, à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu'à
une période annuelle de congés payés ».
Le droit « aux prestations de sécurité sociale (...), à une aide sociale et à une aide au
logement destinées à assurer une existence digne » est également reconnu ainsi que le droit à
une « protection et à la conservation d'un cadre de vie de qualité », de même qu’ « un niveau
élevé de protection de la santé, de la sécurité et des intérêts des consommateurs »
Les libertés publiques s’exercent dans certaines conditions. Afin d’éviter de trop grandes
restrictions, il est important que leur exercice soit garanti.
Les libertés peuvent être simplement encadrées, plus rarement elles sont limitées.
§ 1 - LE REGIME REPRESSIF
A - Identification
C'est le régime le plus favorable aux libertés puisque l'individu use à son gré de la liberté qui
lui est reconnue, mais il s'expose éventuellement à des sanctions en cas d'abus dans l'exercice
de cette liberté. Les sanctions étant en principe infligées par le juge pénal.
Il faut chercher le fondement de ce régime dans la Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen et plus précisément dans ses articles 4 et 5 :
Art. 4. - La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi,
l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui
assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces
bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi.
Art. 5. - La Loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout
ce qui n'est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être
contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.
B - Evaluation
L’efficacité du système dépend de l’existence de sanctions ainsi que de leur application par le
juge.
a) L’existence de sanctions
C’est l’existence de sanctions qui vient dans cette hypothèse limiter les libertés. C’est la
raison pour laquelle la Déclaration des droits de l’homme pose dans ses articles 7 et 8 le
principe de la légalité des peines :
25
« Art. 7. - Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas
déterminés par la Loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent,
expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ;
mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi doit obéir à l'instant : il se
rend coupable par la résistance.
Art. 8. - La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment
nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une Loi établie et promulguée
antérieurement au délit, et légalement appliquée. »
Il est capital que la sanction soit appliquée par un juge qui par définition est indépendant.
Quand la sanction n’est pas infligée par un juge, il importe que des garanties d’indépendance
existent, c’est le cas des autorités administratives indépendantes. Quand il s’agit de sanctions
administratives, d’autres garanties peuvent exister, comme l’accès au dossier, le caractère
contradictoire etc…
Un risque d'atteinte aux libertés publiques subsiste si l'infraction est formulée en termes
vagues par la loi ou le règlement, car le juge a alors un large pouvoir d'interprétation, et le
justiciable ne sait plus si l'acte qu'il envisage de faire est ou non autorisé. Le système répressif
est donc d'autant plus libéral qu'il limite la part de subjectivité de celui qui inflige la sanction
(juge, autorité administrative…)
§ 2 - LE REGIME PREVENTIF
Ce régime est le contraire du précédent puisque n'est permis que ce qui est autorisé ou n'est
pas interdit : il s'agit donc de contrôler a priori l'exercice des libertés.
26
A - L’autorisation préalable
L’exercice de la liberté est conditionné par l’obtention d’une autorisation. C’est le cas de la
liberté cinématographique. Un visa délivré par le ministre de la Culture conditionne
l'exploitation commerciale d'un film. C’est le cas également en matière de construction où
l’obtention d’un permis est nécessaire pour édifier un immeuble. De multiples autres
exemples pourraient être donnés tant le procédé est courant. Ils révèlent tous l’existence de
différents types de décision, de plus, ils montrent que la mise en place d’un tel système doit
respecter certaines conditions.
B - L’interdiction préalable
a) Le système
Le citoyen qui désire exercer une liberté n'a pas à solliciter l'autorisation de l'administration,
la liberté reste donc le principe, mais l'administration peut intervenir préventivement pour
empêcher l'exercice de cette liberté, si elle pense qu'il y a risque d'atteinte à l'ordre public.
L'interdiction peut être discrétionnaire ou assortie de conditions.
C - La déclaration préalable
L'exercice de la liberté est parfois subordonné à une déclaration auprès de l'autorité publique.
Dans ce cas l'administration n'a qu'un rôle passif : elle ne fait qu’enregistrer la déclaration de
celui qui doit l'avertir pour pouvoir exercer la liberté. Le but de ce régime est d'informer
l'administration et les tiers. Il est donc plus libéral que celui de l'autorisation préalable.
28
a) Le destinataire de la déclaration
Le plus souvent le destinataire de la déclaration est une autorité administrative. C'est ainsi
qu'avant toute manifestation sur la voie publique, il faut la déclarer auprès du Préfet, la
création d'association doit être déclarée auprès du préfet, quant à la grève dans les services
publics une déclaration auprès du directeur de l'établissement public est requise.
Dans d’autres hypothèses, la déclaration sera faite auprès d’une Autorité administrative
indépendante. C’est le cas de la création de fichiers informatisés où une déclaration auprès de
la Commission nationale Informatique et Liberté ( CNIL ) est nécessaire.
Mais la déclaration peut également être faite auprès de l’autorité judiciaire. C'est le cas de la
déclaration d'un périodique qui doit être faite devant le procureur de la République. La
publication du périodique, sans déclaration judiciaire préalable, expose son auteur à des
poursuites pénales.
b) Le contenu de la déclaration
Le contenu de la déclaration est fixé par la loi : pour une manifestation, le nom et le domicile
de l'organisateur sont nécessaires, le but du rassemblement, le lieu, la date, l'heure et
l'itinéraire projeté doivent également y figurer.
Un délai peut être imposé entre le moment du dépôt et celui de l'exercice de la liberté ainsi la
grève dans les services publics est ainsi soumise à un préavis de 5 jours.
c) La sanction de la déclaration
Si la formalité n'est pas respectée, l'auteur de la déclaration peut être sanctionné sur le plan
administratif, voire pénal. La publication du périodique, sans déclaration judiciaire préalable,
expose son auteur à des poursuites pénales. Dans certains cas, la déclaration préalable ne
conditionne pas la légalité de la liberté assujettie : une association non déclarée est légale,
mais elle n'a pas la personnalité morale.
Bien sûr, l’administration peut réagir au vu de la déclaration. Dans le cas d’une manifestation
qui troublerait l'ordre public, le préfet peut l’interdire.
Dans plusieurs hypothèses exceptionnelles les libertés publiques peuvent être limitées Soit
c’est la Constitution qui pose les limites, soit c’est la loi, soit enfin, c’est la jurisprudence.
L'idée qui est à la base de l’article 16 est la suivante : à période de crise, pouvoirs de crise. En
d'autres termes le Président de la République doit pour sauver le régime pouvoir exercer une
véritable dictature légale.
29
Deux conditions cumulatives sont nécessaires. Il s’agit d’abord d’une menace grave et
immédiate sur les institutions de la République ou sur l’indépendance de la Nation ou sur
l’intégrité du territoire ou enfin sur l’exécution des engagements internationaux.
On le voit, c’est l’Etat, dans son existence même qui est en cause. Mais cette menace ne
suffit pas. Encore faut-il qu’elle provoque « l’interruption du fonctionnement régulier des
pouvoirs publics constitutionnels ».
La situation est grave c’est le moins que l’on puisse dire, mais tout est question
d’appréciation. Or c’est le Président de la République qui seul apprécie.
Le chef de l’Etat doit dans une telle situation et préalablement à sa décision procéder à une
triple consultation officielle : celles du Premier ministre, des Présidents des assemblées, du
Conseil Constitutionnel. L’avis du Conseil étant motivé et publié, ce qui lui donne une
autorité de fait qui ne doit pas être négligée. Enfin le Président de la République doit
s’adresser à la Nation.
Ces pouvoirs sont relativement étendus ce qui pose la question du contrôle exercé sur eux.
Elle apparaît à travers la description du domaine des pouvoirs ainsi que de leurs limites.
1. Le domaine
L'article 16 précise que le Président de la République peut prendre « les mesures exigées par
ces circonstances »
Il dispose donc des pouvoirs de l'exécutif et des pouvoirs du Parlement. Les actes juridiques
qui expriment ces pouvoirs sont des « décisions ».
2. Les limites
2.1. Limites quant à la finalité des pouvoirs
Les mesures prises "doivent être inspirées par la volonté d'assurer aux pouvoirs publics
constitutionnels … les moyens d'accomplir leurs missions"
2.2. Limites quant à l’objet des pouvoirs
30
1. Le contrôle du Parlement
Rien de précis n’est prévu par la Constitution si ce n'est que "Le Parlement se réunit de plein
droit". Quant à la pratique elle est diverse:
- le Président de la République dans une lettre au Premier ministre dénie à l'Assemblée
nationale le droit de discuter des problèmes étrangers à ce qui a provoqué le recours à l'article
16
- le président de l’Assemblée nationale distingue deux périodes:
- pendant la « réunion de plein droit »: pas de mise en jeu de la responsabilité du
Gouvernement car il n'y a pas de dissolution possible
- pendant la session ordinaire: le Parlement recouvre ses attributions à condition qu'elles
n'interfèrent pas avec celles du Président de la République
Dans l’arrêt Rubin de Servens du 2 mars 1962, le Conseil d’Etat précise les conditions dans
lesquelles il peut exercer son contrôle juridictionnel :
- la décision de recourir à l'article 16 échappe au contrôle du haut Conseil car c'est un « acte
de Gouvernement »
- les décisions de mise en œuvre de l'article 16:
- celles qui en période normale relève du domaine de la loi ne peuvent être contrôlées
- celles qui en période normale relève de l'exécutif peuvent être contrôlées et donc
éventuellement annulées.
31
A - L’état de siège
Prévu par l'article 36 de la Constitution du 4 octobre 1958, l’état de siège ne peut être décidé
que par décret en Conseil des ministres et pour une durée maximum de 12 jours. Passé ce
délai, son prolongement doit être décidé par le Parlement.
Institué pour faire face à «un péril imminent résultant d'une guerre étrangère ou d'une
insurrection à main armée », l’état de siège débouche sur un transfert des pouvoirs de police à
l’autorité militaire. Cette substitution de l’autorité militaire à l’autorité civile ne vaut que pour
la police générale, et non pour les polices spéciales. Elle n'est pas non plus automatique : elle
ne se produit que dans la mesure où les responsables militaires l’estime nécessaire ; ceux-ci
peuvent en outre autoriser, par voie de délégation, les autorités civiles à agir.
Elle se traduit aussi par des restrictions aux libertés publiques allant au-delà de ce qu’autorise
le droit commun. Il en est ainsi du droit de perquisition de jour et de nuit, du droit d'éloigner
les repris de justice et les personnes non domiciliées dans le ressort du territoire mis en Etat
de siège, du droit de réquisition des armes et munitions, et du droit d'interdire les réunions de
nature à entraîner des risques de désordre.
B - L’état d’urgence
L’état d'urgence, organisé par une loi du 3 avril 1955 et par un décret du 15 avril 1960 ne peut
être décidé que par les mêmes autorités et pour les mêmes durées que l'état de siège. Des
pouvoirs de police accrus sont, dans ce cadre, confiés au gouvernement et au préfet, pour faire
face à un « péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public » ou « d'événements
présentant par leur nature et leur gravité le caractère de calamités publiques »
a) Début et fin
La loi de 1955 prévoyait que l'état d'urgence devait être décidé par une loi qui en fixait la
durée. L'ordonnance du 15 avril 1960 dispose, au contraire, qu'il est décrété en Conseil des
ministres, mais que sa prorogation au-delà de douze jours implique l'autorisation du
Parlement.
L’état d'urgence peut être proclamé sur tout ou partie du territoire français.
b) Pouvoirs
Certaines conséquences sont automatiques, d'autres facultatives peuvent être ajoutées aux
précédentes par le texte institutif.
Ainsi, le préfet peut-il interdire la circulation des personnes et des véhicules et instituer des
zones de protection où le séjour des personnes est réglementé.
32
D’autres limitations aux libertés sont possibles : fermeture provisoire des salles de spectacle,
débits de boissons ou lieux de réunion de toute nature, – interdiction des réunions dangereuses
pour la sécurité publique, – remise des armes et munitions.
Le ministre de l'intérieur ou le haut-commissaire sont compétent pour assigner à résidence
tout suspect.
D'autres mesures, peuvent être prises : des perquisitions de jour et de nuit, le contrôle de la
presse, des délégations de compétences aux autorités militaires. Cette extension facultative
doit être mentionnée dans le texte qui proclame l'État d'urgence.
Dans certaines hypothèses qui sont tout à fait exceptionnelles, comme une grève ou la guerre,
l’administration est tout de même obligée d'agir, mais le juge tolère que dans ces
circonstances, l’administration se dispense du respect de certaines règles. Il s’agit d’un
assouplissement de la légalité qui ne la fait pas disparaître pour autant.
Trois arrêts importants ont consacré cette théorie : CE, 28 juin 1918, Heyriès ; CE, 28
février 1919, Dames Dol et Laurent et enfin TC, 27 mars 1952, Dame de la Murette.
A - La notion
Dans certaines situations l’administration peut prendre certaines mesures.
a) Les situations
Trois conditions doivent être réunies pour qu’il y ait circonstances exceptionnelles.
0 D’abord une situation de fait extrêmement grave sur tout ou partie du territoire de la
république.
0 En second lieu, cette situation doit rendre impossible l’observation stricte de la légalité
ordinaire.
0 Enfin, ces circonstances doivent être largement indépendantes de la volonté des pouvoirs
publics.
b) Les mesures
0 Les mesures prises doivent être strictement limitées à ce qui est nécessaire à la sauvegarde
de l’ordre public et de l’intérêt national.
0 D’autre part, elles doivent être limitées dans le temps à la période durant laquelle les
circonstances les justifient.
B - Les conséquences
0 Des décisions de police restreignant les libertés individuelles au-delà des limitations que
peut ordinairement édicter la police administrative sont légales (CE, 6 août 1915, Delmotte et
Senmartin ;, CE, 28 février 1919, Dol et Laurent)
– Les atteintes qualifiées habituellement de «voies de fait» et soumises à ce titre à un régime
juridique spécial deviennent des actes administratifs ordinaires soumis au contrôle de légalité
normal (TC, 27 mars 1952, Dame de la Murette)
0 Des décisions administratives refusant d’exécuter un jugement en raison des risques de
désordres graves que pourrait entraîner cette exécution sont légales (CE, 30 novembre 1923,
Couitéas)
Ces garanties sont prévues par des dispositions de droit interne. Elles sont renforcées par des
garanties internationales.
A - Le juge constitutionnel
Le Conseil constitutionnel est chargé par la Constitution de contrôler la constitutionnalité des
lois. Ce faisant, il garantit les libertés puisqu’il sanctionne leur non-respect des libertés par le
législateur. Le contrôle de constitutionnalité débouche aujourd’hui sur ce que l’on peut
appeler à l’instar du contentieux administratif, le contrôle de la constitutionnalité « externe »
et le contrôle de la constitutionnalité « interne ».
34
Les règles de forme qu’il s’agisse des règles de procédure ou de compétence sont en elles-
même des garanties pour les libertés publiques. Leur respect peut être sanctionné par le
Conseil constitutionnel.
1. Le vice de procédure
Le Conseil ne contrôle dans la procédure législative que ce qui relève des règles de procédure
fixées par la Constitution et elle seule et non celles qui figurent dans les règlements des
assemblées. Cependant, il faut souligner le caractère nouveau de ce contrôle des actes
parlementaires par une autorité extérieure. C’est sans doute ce qui explique que le Conseil
exerce là un contrôle souple, sanctionnant le Parlement seulement lorsque la violation de la
procédure est « substantielle ».
2. L’incompétence
2.1. L’incompétence positive
Il s'agit des cas où le législateur ordinaire intervient dans le domaine du législateur organique.
Par contre les cas dans lesquels le législateur est allé au-delà de la compétence qui lui est
donnée par l’article 34 de la Constitution ne sont pas des inconstitutionnalités depuis que la
décision n° 82-143 DC du 30 juillet 1982. En d’autres termes, le législateur peut élargir le
domaine de la loi vers le domaine réglementaire sans pour cela violer la Constitution
« Considérant que, si les articles 4, 16 et 30 de loi ont pour objet de fixer, dans le
cas particulier qu'ils visent, les règles selon lesquelles peuvent intervenir certains
transferts, leurs dispositions attribuent aux seuls organes des sociétés nationales
un pouvoir discrétionnaire d'appréciation et de décision soustrait à tout contrôle
et d'une telle étendue que les dispositions critiquées ne sauraient être regardées
comme satisfaisant aux exigences de l'article 34 de la Constitution »
C’est bien sûr par ce contrôle que les libertés sont les mieux garanties.
1. Le détournement de pouvoir ou le contrôle du but poursuivi
En l’état actuel de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, on ne peut pas dire qu’il
contrôle le but poursuivi par le législateur lorsqu'il vote une loi. Le Conseil a pris d’ailleurs la
précaution de rappeler « qu'il ne lui appartient pas de se prononcer sur l'opportunité de
dispositions législatives » (CC, décision n° 89-261 DC, 28 juillet 1989). Mais certains
raisonnements suivis par le Conseil peuvent être assimilés au contrôle du détournement de
pouvoir. Le juge constitutionnel impose en effet un « effet de cliquet » au législateur en lui
interdisant, s'agissant de situation existante intéressant une liberté publique, de les remettre en
cause que dans deux hypothèses : celle où ces situations auraient été illégalement acquises ;
celle où leur remise en cause serait réellement nécessaire pour assurer la réalisation de
l'objectif constitutionnel poursuivi (Décision. n° 84-181 DC des 10 et 11 octobre 1984, et
Décision n° 86-210 DC du 29 juill. 1986). Surtout, si elle peut modifier un régime existant,
s'agissant d'une liberté fondamentale, la loi ne peut en réglementer l'exercice qu'en vue de le
rendre plus effectif.
Quant au détournement de procédure, bien qu’il n’ait jamais été sanctionné par le juge
constitutionnel a été évoqué. Ainsi, lorsque le Conseil contrôle l'utilisation faite par le
Gouvernement de la procédure de l'article 38 de la Constitution afin de légiférer par
ordonnances (CC, décision n° 86-208 DC, 1er et 2 juillet 1986), il conclut à l'absence du
détournement de procédure.
a) Le contrôle de conventionnalité
« Mais attendu que le traité du 25 mars 1957, qui, en vertu de l'article susvisé
de la constitution, a une autorité supérieure a celle des lois, institue un ordre
juridique propre intégré à celui des états membres ; qu'en raison de cette
spécificité, l'ordre juridique qu'il a crée est directement applicable aux
ressortissants de ces états et s'impose a leurs juridictions; que, des lors, c'est à
bon droit, et sans excéder ses pouvoirs, que la cour d'appel a décide que
l'article 95 du traite devait être applique en l’espèce, a l'exclusion de l'article
265 du code des douanes, bien que ce dernier texte fut postérieur; »
L’exécutif et son administration sont traditionnellement ceux que l’on soupçonne de porter
atteintes aux libertés publiques. La loi des 16 et 24 août 1790, interdisait aux juges « à peine
de forfaiture,(de) troubler d’une quelconque manière que ce soit les opérations des corps
administratifs ». Dans ces conditions, le Conseil d’Etat est progressivement devenu le censeur
de l’administration. Si aujourd’hui, le juge administratif est en principe compétent pour
37
contrôler l’administration, le juge judiciaire est cependant compétent lorsque sont en jeu, la
liberté ou le droit de propriété.
L’existence de l’emprise entraîne la compétence du juge judiciaire. Mais cette compétence est
limitée.
■ La compétence du juge judiciaire
Le juge judiciaire est compétent pour se prononcer sur la réparation des dommages. Il fixe
une indemnité de dépossession, mais il se prononce aussi sur les dommages accessoires
■ Ses limites
Est exclu de la compétence du juge judiciaire :
- toute conclusion visant à prononcer l’expulsion des occupants (TC, 17 juin 1948,
Manufacture de velours et peluches Velvetia) et (TC, 17 mars 1949, Société Rivoli –
Sébastopol)
- l’appréciation du caractère irrégulier de l’emprise. Le juge judiciaire doit renvoyer la
question au juge administratif (TC, 14 novembre 1938, Baudéan)
En dehors des cas précédant, c’est le juge administratif qui est compétent pour contrôler
l’administration. Selon que l’administration dispose d’une compétence liée ou d’un pouvoir
discrétionnaire le contrôle qu’exercera le juge sera normal ou restreint.
A - Le médiateur
Inspirée par l'Ombudsman suédois, institué dès 1809, et par le mode de fonctionnement des
Ombudsmän apparus en Europe au milieu du XXe siècle, comme le « Commissaire
parlementaire pour l'administration » créé au Royaume-Uni en 1967, le médiateur a été créé
par la loi du 3 janvier 1973. L'institution s'est trouvée renforcée par les lois de 1976, donnant
au médiateur davantage de pouvoirs, et notamment un pouvoir d'injonction qui lui avait été
refusé en 1973. Le mouvement a été poursuivi par la loi du 3 janvier 1989, puis par la loi
d'orientation du 6 février 1992 qui a élargi la saisine du médiateur et enfin par la loi du 12
avril 2000 relative aux Droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations
(DCRA) qui renforce l'autorité du Médiateur de la République
a) L’institution
1. Le médiateur
Nommé par décret en Conseil des ministres pour une durée de six ans non renouvelable, le
médiateur de la République est une personnalité indépendante et irrévocable. Au surplus, le
mandat est unique, non renouvelable.
L’indépendance du médiateur est également assurée par son inéligibilité sur le plan national,
dans toutes les circonscriptions et sur le plan local.
De plus le médiateur bénéficie d'une immunité. Il ne peut être poursuivi, recherché, arrêté,
détenu ou jugé à l'occasion des opinions qu'il émet ou des actes qu'il accomplit dans l'exercice
de ses fonctions. Enfin il ne reçoit d'instruction d'aucune autorité.
Cette fonction est, depuis avril 1998, exercée par Bernard Stasi, ancien ministre, qui a succédé
à Jacques Pelletier.
2. Ses collaborateurs
b) Ses missions
1. Domaine
Le médiateur traite des différends qui opposent l'administration aux administrés. Les litiges
entre particuliers sont donc exclus.
Par administration il faut entendre les services de l'État, mais aussi les collectivités publiques
territoriales, les établissements publics, « et tout autre organisme investi d'une mission de
service public ». De ce fait, le médiateur est compétent pour examiner les réclamations
relatives aux entreprises nationales comme la SNCF ou EDF, comme celles qui concernent les
organismes de sécurité sociale, les caisses d'épargne, etc. Peu importe que l'organisme soit
une personne publique ou privée dès lors qu'il exerce une mission de service public.
Mais le médiateur ne peut pas accepter une réclamation relative à un différend entre une
administration ou un organisme investi d'une mission de service public et un de leurs agents.
De même, il ne peut s'immiscer dans une procédure engagée devant une juridiction, ni
remettre en cause le bien-fondé d'une décision juridictionnelle.
2. Pouvoirs
Le médiateur est saisi par une personne physique ou morale, par l'intermédiaire d'un
parlementaire, après que des démarches ont été effectuées par le réclamant auprès des
administrations concernées. Il pourra alors user d’un certain nombre de pouvoirs.
2.1. Des pouvoirs d’investigation
Le médiateur dispose de deux grands pouvoirs d’investigation. Il peut entendre les agents de
toutes les administrations. A cette fin, les ministres ou les autorités publiques « sont tenus
d'autoriser les agents placés sous leur autorité à répondre aux questions et éventuellement
aux convocations du Médiateur de la République ».
Le Médiateur peut également demander « communication de tout document ou dossier
concernant l'affaire à propos de laquelle il fait son enquête ».
Le caractère secret ou confidentiel des documents ne peut lui être opposé, à la seule exception
de secrets concernant la défense nationale, la sûreté de l'État ou la politique extérieure.
Le médiateur peut également disposer de certains moyens plus précis, puisque les ministres
sont « tenus d'autoriser(...) les corps de contrôle à accomplir, dans le cadre de leur
compétence, les vérifications et enquêtes demandées par le Médiateur de la République ».
Par ailleurs, « Le vice-président du Conseil d'État et le premier président de la Cour des
comptes font, sur la demande du Médiateur de la République, procéder à toutes études ».
2.2. Des pouvoirs d’action
Le médiateur peut agir par la contrainte. Un pouvoir de substitution est effet reconnu au
Médiateur si l'autorité compétente se refuse à sanctionner un agent fautif, il peut, « au lieu et
place de celle-ci, engager contre tout agent responsable une procédure disciplinaire ou, le
cas échéant, saisir d'une plainte la juridiction répressive ».
Le Médiateur dispose également d'un pouvoir d'injonction puisqu’il il peut « en cas
d'inexécution d'une décision de justice passée en force de chose jugée, enjoindre à
l'organisme mis en cause de s'y conformer dans un délai qu'il fixe. Si cette injonction n'est pas
suivie d'effet, l'inexécution de la décision de justice fait l'objet d'un rapport spécial (...) publié
au Journal officiel ». L’injonction débouche alors sur le recours à l’opinion publique. C’est le
43
On peut préciser la notion d’autorité administrative indépendante en partant des trois termes
qui servent à la dénommer.
1. Des autorités
Le rôle d’une autorité administrative indépendante (AAI) est d'assurer la régulation, c’est-à-
dire le fonctionnement harmonieux, d’un secteur précis dans lequel le gouvernement ne veut
pas intervenir trop directement, ce qui implique une autorité morale reconnue, une certaine
souplesse dans les formes de décision ainsi qu’un appui sur l’opinion.
§ 1 - AU NIVEAU MONDIAL
Il faut attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale et la création de l’ONU pour parler
d’une universalisation des droits de l'homme.
La première tentative de précision du domaine des droits de l'homme fut la Déclaration
universelle des droits de l'homme en 1948 votée par l’Assemblée générale des Nations Unies.
Elle ne revêt donc aucun caractère obligatoire. Il faut attendre 1966 pour que l’Assemblée
46
générale adopte le Pacte international des droits civils et politiques ainsi que le Pacte
international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Ces deux Pactes constituent, la « Charte internationale des droits de l'homme » par laquelle
l'Assemblée générale a codifié la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948.
Plusieurs organes permettent de veiller à l’application de ces textes.
a) La procédure de l’article 40
En premier lieu, aux termes de l’article 40, les États parties s’engagent à présenter des
rapports sur les mesures qu’ils auront arrêtées pour donner effet aux droits reconnus. Ces
rapports sont examinés de manière contradictoire par le Comité. Les représentants de l’État
concerné, siégeant et pouvant répondre aux questions qui leur sont posées. Le Comité adresse
ensuite aux Etats parties ses propres rapports ainsi que toutes les observations générales qu’il
juge appropriées.
La deuxième procédure a été instituée par le premier Protocole facultatif. Il habilite le Comité
à recevoir et à examiner des « communications » émanant de particuliers qui estiment être
victimes d'une violation, par un Etat partie, d'un des droits énoncés dans le Pacte. Il est
nécessaire que tous les recours internes disponibles aient été épuisés.
47
Il a été créé par le Conseil économique et social des Nations unies, en 1985 pour surveiller
l'application, par les Etats parties, des dispositions du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels. Il est composé de dix-huit experts siégeant à titre
individuel, élus par le Conseil économique et social sur une liste de candidats proposés par les
Etats parties.
Le Comité est chargé d'examiner les rapports des Etats parties au Pacte rendant compte des
mesures qu'ils ont prises et des progrès qu'ils ont accomplis en vue de la réalisation des droits
reconnus dans le Pacte. Les délégations des gouvernements dont le rapport est examiné au
cours d’une session répondent aux demandes de renseignements complémentaires des experts
du Comité. Des « observations finales » sur l'examen des rapports des Etats parties et sur
l'application du Pacte par ces Etats sont adoptées au cours de séances privées par le Comité
avant d'être rendues publiques à la fin de la session.
§ 2 - AU NIVEAU EUROPEEN
sur le fond des requêtes, en général par des décisions distinctes mais le cas échéant par des
décisions uniques.
Les chambres peuvent à tout moment se dessaisir en faveur de la Grande Chambre lorsqu’une
affaire soulève une question grave relative à l’interprétation de la Convention ou lorsque la
solution d’une question peut conduire à une contradiction avec un arrêt rendu ultérieurement
par la Cour, à moins que l’une des parties ne s’y oppose dans le délai d’un mois à compter de
la notification de l’intention de la chambre de se dessaisir.
2.3. Le jugement
Les chambres statuent à la majorité. Tout juge ayant pris part à l’examen de l’affaire a le droit
de joindre à l’arrêt soit l’exposé de son opinion séparée - concordante ou dissidente - soit une
simple déclaration de dissentiment.
Dans le délai de trois mois à compter de la date du prononcé de l’arrêt rendu par une chambre,
toute partie peut demander que l’affaire soit renvoyée à la Grande Chambre si elle soulève
une question grave relative à l’interprétation ou à l’application de la Convention ou de ses
Protocoles, ou une question grave de caractère général.
Ces demandes sont examinées par un collège de cinq juges de la Grande Chambre,. Si le
collège accueille la demande, la Grande Chambre statue sur l’affaire à la majorité, par la voie
d’un arrêt qui est définitif.
Un jugement de chambre devient définitif à l’expiration d’un délai de trois mois, ou avant si
les parties déclarent ne pas avoir l’intention de demander le renvoi à la Grande Chambre ou si
le collège de cinq juges a rejeté la demande de renvoi.
Tous les arrêts définitifs de la Cour sont contraignants pour les Etats défendeurs concernés.
Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe vérifie si les Etats qui ont été jugés avoir
violé la Convention ont pris les mesures nécessaires pour s’acquitter des obligations
spécifiques ou générales résultant des arrêts de la Cour.
Le respect des engagements énoncés dans la Charte est soumis au contrôle du Comité
européen des Droits sociaux. Le Comité comprend douze membres indépendants et
impartiaux, élus par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe pour un mandat de six
ans, renouvelable une fois. Il statue en droit sur la conformité ou non à la Charte des
situations nationales des Etats parties.
Dans son article 6 § 2 le traité de Maastricht de 1992 précise que : « L'Union respecte les
droits fondamentaux, tels qu'ils sont garantis par la Convention européenne de sauvegarde
des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, et
tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres, en tant
que principes généraux du droit communautaire ».
C'est la Cour de justice des communautés (CJCE), qui détermine, par sa jurisprudence, quels
sont ces principes généraux. On peut en distinguer deux catégories : les principes généraux
communs aux droits des Etats membres proprement dits et les principes généraux spécifiques
à l'Union.
On oppose traditionnellement les libertés individuelles qui sont mises en œuvre par les
individus aux libertés collectives qui elles ne peuvent être mises en œuvre que collectivement.
52
Il faut distinguer la liberté d’aller et venir pour les citoyens français de la liberté d’aller et
venir pour les étrangers, les régimes étant différents.
1. Son affirmation
« La liberté d'aller et venir est un principe de valeur constitutionnelle », affirme le Conseil
constitutionnel dans sa décision du 12 juillet 1979 dite « Ponts à péage ». Il n’y a donc pas de
références explicites à cette liberté dans les textes constitutionnels. Les textes internationaux
sont eux plus explicites. Ainsi l’article 2 du Protocole n° 4 à la Convention de sauvegarde des
Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales précise-t-il :
« Quiconque se trouve régulièrement sur le territoire d'un Etat a le droit d'y circuler
librement et d'y choisir librement sa résidence »
2. Son interprétation
Par la suite cette liberté a été interprétée comme faisant partie de la liberté individuelle, celle-
ci comprenant en outre ce que classiquement on appelle la sûreté et que l’on étudiera un peu
plus loin.
b) Ses limites
Les « personnes exerçant une activité ambulante » c’est à dire les marchands ambulants, les
forains), les « caravaniers » et des « nomades » sont soumises en vertu de la loi du 3 janvier
1969 à un régime particulier. Selon les catégories on exigera d’eux une déclaration
renouvelable ou un carnet de circulation.
c) Ses atténuations
2. La vérification d’identité
Si une personne refuse ou est dans l'impossibilité de justifier de son identité, elle peut être
retenue sur place ou dans le local de police en vue de la vérification de son identité. Elle est
présentée immédiatement à un officier de police judiciaire qui l’informe de son droit de faire
aviser le procureur de la République de la vérification dont il fait l'objet et de prévenir sa
famille ou toute personne de son choix.
Lorsqu'il s'agit d'un mineur de dix-huit ans, le procureur de la République doit être informé
dès le début de la rétention. Sauf impossibilité, le mineur doit être assisté de son représentant
légal.
La rétention ne peut excéder quatre heures. Si la personne interpellée maintient son refus de
justifier de son identité ou fournit des éléments d'identité manifestement inexacts, les
opérations de vérification peuvent donner lieu, après autorisation du procureur de la
République ou du juge d'instruction, à la prise d'empreintes digitales ou de photographies
lorsque celle-ci constitue l'unique moyen d'établir l'identité de l'intéressé.
Il fut un temps où certains français étaient bannis du territoire national. L’article 373 de la
Constitution de l’an III disposait en effet : « La Nation française déclare qu'en aucun cas elle
ne souffrira le retour des Français qui, ayant abandonné leur patrie depuis le 15 juillet 1789,
ne sont pas compris dans les exceptions portées aux lois rendues contre les émigrés »
Aujourd’hui, cette question ne pose plus aucun problème. Le Protocole n° 4 à la Convention
de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales précise d’ailleurs dans
son article 2 que « Nul ne peut être privé du droit d'entrer sur le territoire de l'Etat dont il est
le ressortissant », le Pacte de New York relatifs aux droits civils et politiques reprenant
quasiment les mêmes termes : « Nul ne peut être arbitrairement privé du droit d'entrer dans
son propre pays ».
Le droit de quitter le territoire national a longtemps été une simple tolérance, avant d'être
reconnu par le pacte de New York et l’article 2 § 2 du protocole n°4 de la Convention
européenne des droits de l’homme dans des termes identiques : « Toute personne est libre de
quitter n'importe quel pays, y compris le sien »
55
Aussi le refus de renouveler un passeport a-t-il été considéré comme une voie de fait par le
Conseil d’Etat (CE, 4 mai 1988, Jacques Plante). Le Conseil constitutionnel a quant à lui
précisé un peu plus tard (22 avril 1997 DC) que la liberté d’aller et de venir « n’est pas limitée
au territoire national mais comporte également le droit de le quitter ».
Pourtant si ce droit a une valeur constitutionnelle il peut faire l’objet de certaines exceptions.
En premier lieu, le juge peut prononcer l'interdiction de quitter le territoire de la République,
pour une durée de cinq ans au plus à titre de peine complémentaire. C'est le cas en matière de
proxénétisme (art. 225-20, Nouveau code pénal ) ou d'infractions liées au trafic de stupéfiants
(art. 222-47, Nouveau code pénal).
En second lieu, le juge d'instruction peut ordonner dans le cadre du contrôle judiciaire, la
remise par l'intéressé de tous documents justificatifs de l'identité et notamment du passeport
(art. 138, 7°, Code de procédure pénale).
Pour les ressortissants des pays membres de l’Union européenne, les conditions d’entée sur le
territoire national sont allégées, il suffit en effet d’une carte d’identité ou d’un passeport en
cours de validité. Pour les autres, les conditions sont plus restrictives.
1. Le passeport et le visa
Un passeport régulier et un visa d’entrée sont exigés. Le visa est accordé discrétionnairement
par les autorités administratives et diplomatiques, son refus n’a pas à être motivé. Seule
l’erreur manifeste peut être invoquée. (CE, 28 février 1986, Ngako Jeuga). Cependant, la loi
Chevènement du 12 mai 1998 exige que ce refus soit motivé pour un étudiant venant suivre
des études supérieures en France ou pour un étranger venant en France au nom du
regroupement familial.
b) Les sanctions
Cette carte est valable un an. Elle est délivrée par le préfet à l'étranger entré régulièrement en
France et qui dispose de moyens d'existence et d'un logement. En cas de refus d’attribution ou
de renouvellement, la « commission du titre de séjour », instituée dans chaque département
(loi du 11 mai 1998), est saisie. Un pourvoi en cassation peut être présenté au Conseil d’Etat.
L’étranger concerné reçoit une « autorisation provisoire de séjour » jusqu'à ce que le préfet ait
statué.
La loi du 24 août 1993 prévoit que, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre
public, la carte de séjour temporaire est délivrée de plein droit à l'étranger mineur ou dans
l'année qui suit son dix-huitième anniversaire si l’un de ses parents au moins est titulaire de la
carte de séjour temporaire ou s'il a été autorisé à séjourner en France au titre du regroupement
familial et qui justifie par tous moyens avoir sa résidence habituelle en France depuis qu'il a
atteint au plus l'âge de six ans.
La carte est également délivrée de plein droit à l'étranger ayant obtenu l'asile territorial.
- L’apatride justifiant de trois années de résidence régulière en France ainsi que son conjoint
et ses enfants mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ;
- L’étranger qui est en situation régulière depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute
cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" ;
2.2. 1. Les étrangers obtenant la carte de séjour à certaines conditions
Tous les autres étrangers obtiennent la carte de séjour s’ils font la preuve d’une résidence non
interrompue d’au moins trois ans en France. L’attribution reste discrétionnaire.
1. L’asile
La loi Chevènement (1998), distingue entre l’asile politique et l’asile territorial
1.1. L'asile politique
Il est reconnu par le préambule de 1946. Les personnes admises à ce titre sur le territoire
français demandent à bénéficier du statut de réfugié qui leur donne droit à une carte de
résident. C’est l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (OFPRA) qui
accorde ou refuse ce statut. La décision peut être contestée devant la Commission de recours,
et en dernier lieu devant le Conseil d’Etat par la voie de la cassation.
L’Office vérifie que la personne est effectivement persécutée en raison de son action en
faveur des libertés.
Depuis la révision constitutionnelle de 1993, le droit de demander l'asile politique en France
connaît une limite : si un étranger s'est vu refuser le droit d'asile politique sur le territoire d'un
Etat lié par les accords de Schengen, il ne peut pas renouveler sa demande auprès de la
France.
1.2. L'asile territorial
C’est le ministre de l'intérieur qui accorde ou refuse l’asile territorial aux étrangers qui dans
leur pays, sont menacés dans leur vie ou leur liberté ou qui y sont menacés de traitements
inhumains ou dégradants. Une simple menace suffit, elle peut porter sur un domaine plus
large, et peut venir des pouvoirs publics ou de tout autre particulier.
L'asile territorial n'ouvre pas le droit au statut de réfugié mais permet de bénéficier de plein
droit d'une carte de séjour mention « vie privée et familiale ».
a) La reconduite à la frontière
2. La procédure
L'arrêté ne peut être exécuté avant l'expiration d'un délai de quarante huit heures. Le préfet
dispose d'un pouvoir discrétionnaire lui permettant de renvoyer l'étranger dans n'importe quel
pays pourvu que sa vie et sa liberté n'y soient pas menacées.
Un recours en annulation devant le tribunal administratif peut être formé, dans les quarante
huit heures suivant. Le tribunal rend sa décision dans les quarante huit heures en audience
publique. Un appel peut être interjeté devant le Conseil d'Etat.
3. L’exécution de la mesure
S'il n'y a ni contestation ni annulation de la mesure, elle peut être exécutée par la force.
Si l'étranger ne peut quitter immédiatement le territoire, l'administration peut le maintenir en
rétention pour une durée maximale de 12 jours. Si l'étranger se soustrait à un arrêté de
reconduite ou s'il communique des renseignements inexacts sur son identité, il peut être
condamné à une peine de trois ans de prison.
b) L’expulsion
60
1. La mesure
C'est le préfet qui prononce un arrêté d'expulsion à l'encontre d'un étranger dont la présence
constitue une menace grave à l'ordre public. En cas d'urgence absolue ou si la présence de
l'étranger constitue une menace pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, c'est le
ministre de l'Intérieur qui prononce la décision d'expulsion.
L'étranger est avisé de la mise en oeuvre de la procédure d'expulsion quinze jours au moins
avant la date de la réunion de la commission départementale d'expulsion. L'avis de la
commission est consultatif.
Ne peuvent pas être expulsés, les mineurs de 18 ans et les étrangers mariés depuis plus d'un an
avec un conjoint français sans que la communauté de vie ai cessé.
En cas de nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, l'expulsion peut
être prononcée sans consultation de la commission d'expulsion et l'étranger n'a pas à être avisé
préalablement qu'une décision d'expulsion est envisagée à son encontre.
2. Sa contestation
L’étranger peut demander l’abrogation de la mesure. En cas de silence de l'administration au-
delà de quatre mois, la demande d'abrogation de l'arrêté d'expulsion est considérée comme
rejeté. Si la demande d'abrogation est présentée après un délai de cinq ans, elle ne peut être
rejetée qu'après avis de la commission d'expulsion.
Un recours peut être intenté contre l’arrêté devant le juge administratif. Le contrôle du juge
est restreint : il vérifie qu'il n'y a pas d'erreur manifeste d'appréciation, et veille au respect de
l'article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (respect de la vie familiale).
c) L’extradition
C’est le mécanisme juridique par lequel un Etat remet aux autorités de l’Etat dont il est
ressortissant, l'étranger présumé être auteur d'un crime ou délit commis sur son territoire, pour
qu'il y soit poursuivi et jugé.
L’extradition est régie par la loi du 10 mars 1927. La décision est prise par le Premier
Ministre après avis favorable de la chambre d'accusation de la Cour d’appel compétente.
L'avis de la chambre d'accusation peut être déféré à la Cour de cassation.
Le décret du Premier ministre peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant le
Conseil d’Etat.
Depuis 1993, en effet il accepte d'exercer un contrôle sur tout décret d'extradition. Il estime
que l'extradition est impossible quand elle est demandée à destination d'un pays dont le droit
pénal n'est pas conforme aux valeurs fondamentales du droit français. « l'application de la
peine de mort à une personne ayant fait l'objet d'une extradition accordée par le
gouvernement français serait contraire à l'ordre public français » (CE, Sect, 27 févr. 1987,
Fidan)
L’extradition est également impossible lorsqu'elle est contraire au « principe fondamental
reconnu par les lois de la République selon lequel l’Etat doit refuse l’extradition d’un
étranger lorsqu’elle est demandée dans un but politique » demandée dans un but politique
(CE Ass, 3 juillet 1996, Koné)
SECTION 2 - LA SURETE
61
Elle est garantie par certains principes. Cependant des mesures privatives de liberté peuvent
être prises. Il importe dans ces conditions de les encadrer le plus possible.
a) Un juge indépendant
indépendance. Il faut souligner que sur le plan disciplinaire et de l’avancement il n’existe pas
s’agissant du Conseil d’Etat, l’équivalent du conseil supérieur de la magistrature. C’est le
Président de la République qui après avis d’une commission consultative, peut prendre des
mesures disciplinaires à l’encontre des membres du Conseil. Enfin, leur avancement, se fait
exclusivement à l’ancienneté par coutume sans qu’un tableau d’avancement ne soit établi.
Quant aux membres des Tribunaux administratifs et Cours administratives d’appel, la loi du
11 janvier 1984 précise qu’ils disposent de l'indépendance, la loi du 6 janvier 1986 ajoutera
l'inamovibilité par la périphrase suivante : « Lorsqu’ils exercent leurs fonctions de magistrat
dans les juridictions administratives, ils ne peuvent recevoir, sans leur consentement, une
affectation nouvelle, même en avancement ». Enfin, le terme de magistrat est substitué à celui
de conseiller. Cette évolution s’explique par la consécration de l’indépendance de la
juridiction administrative par le Conseil constitutionnel, dans une décision du 22 juillet 1980
(CC 80-119, 22 juillet1980, Validation d’actes administratifs).
Enfin, le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel
(CSTAC) est chargé de veiller à l'indépendance des membres de ces juridictions. Ce conseil
est compétent pour les questions relatives à la carrière des membres des tribunaux
administratifs et des cours administratives d'appel. Il ne dispose, en matière disciplinaire, que
d'un pouvoir de proposition, mais ses avis sont, en pratique, suivis.
b) Un juge équitable
1. L’impartialité du juge
Ce principe est assuré par le secret des délibérations. L'impartialité est présumée jusqu'à
preuve contraire. La France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme
en 1996 à la suite de propos racistes tenus à la veille d'un procès, par un des jurés devant
statuer sur une affaire impliquant un français d'origine algérienne.
Saïdi pour manquement à cette obligation. De plus le droit à l’information implique le droit
d'accès aux dossiers d'instruction. C’est ce qui découle de l'article 6 de la Convention
européenne des droits de l’homme : « tout accusé a le droit de disposer du temps et des
facilités nécessaires à la préparation de sa défense ». La Cour de cassation, par un arrêt du 30
juin 1995 a estimé que l'avocat d'une personne mise en examen pouvait accéder à ce dossier,
mais ne pouvait pas le communiquer à son client. La loi du 30 décembre 1996 permet
désormais à un avocat de se faire délivrer une copie de tout ou partie du dossier, et de la
transmettre à son client.
Ce principe est souvent considéré comme la clé de voûte du droit pénal. Il est exprimé sous la
forme d’un adage : « Nullum crimen, nulla poena sine lege ». La Révolution a consacré le
principe de la légalité des délits et des peines que l’on fait volontiers remonter au XVIIIe
siècle. L’article 7 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 dispose en
effet que : « nul homme ne peut être arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi et
dans les formes qu’elle a prescrites » et l’article 8 ajoute que : « la loi ne peut établir que des
peines strictement et évidemment nécessaires et que nul ne peut être puni qu’en vertu d’une
loi établie et promulguée antérieurement au délit et légalement appliquée. » Ce principe a
donc une valeur constitutionnelle.
La Convention européenne des droits de l’homme affirme, elle aussi le principe de la légalité
dans son article 7-7. Aujourd’hui, il est notamment inscrit dans le Code pénal. Ce principe
entraîne trois conséquences.
1. La loi est la principale source du droit pénal
Pendant longtemps, on a pensé que seule la loi pouvait constituer la source du droit pénal. On
pensait qu’il s’agissait là d’une importante garantie contre l’arbitraire. Mais progressivement,
le processus législatif étant trop lourd, une place de plus en plus importante a été laissée au
pouvoir réglementaire, qui est devenu une autre source du droit pénal. Il intervient en
particulier en matière de contravention et de procédure pénale.
La loi reste toutefois la source exclusive en matière de crimes et de délits. Ainsi, l’article
111-2 du Code pénal précise: « La loi détermine les crimes et les délits (…) le règlement
détermine les contraventions. »
ensuite en créant une nouvelle infraction qui ne pourra entraîner la condamnation que des
comportements postérieurs à son entrée en vigueur.
Ce principe, consacré par l'article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, par
l'article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, et par l'article 11 de la
Déclaration universelle des droits de l’homme, a été repris par le Code pénal, et de façon plus
générale par le Code civil (art. 2).
Cette règle est essentielle car il n'y a pas de liberté quand un acte, licite au moment où il a été
accompli, peut exposer son auteur à une sanction quelque temps plus tard.
Le Conseil constitutionnel reconnaît au législateur le droit de prendre des dispositions
rétroactives dans certains domaines, mais l'exclut en matière pénale sauf pour les lois plus
douces et en matière de procédure.
Il est consacré par les articles 6 § 2 de la Convention européenne des droits de l’homme, et 11
de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Mais historiquement, c’est la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui l’a
énoncé le premier dans son article 9 qui dispose « tout homme est présumé innocent jusqu’à
ce qu’il ait été déclaré coupable... ».
Le Code civil énonce également le principe dans son article 9-1 modifié lors de la réforme du
4 janvier 1993, et plus récemment par la loi du 15 juin 2000. Aujourd'hui, l’article 9-1 du
Code civil dispose : « Chacun a droit au respect de la présomption d'innocence »
Ce principe emporte deux conséquences :
- l'accusation doit prouver la culpabilité de l'intéressé. Le doute doit profiter au suspect.
- tant qu'un jugement de condamnation n'est pas intervenu, l'inculpé doit être considéré
comme innocent, même s'il existe contre lui des indices graves et concordants de culpabilité.
L’atteinte à la présomption d'innocence visée à l’article 9-1 du Code civil consiste à présenter
publiquement comme coupable, avant condamnation, une personne poursuivie pénalement
(Civ.1ère, 6 mars 1996, Bull. civ. I n° 123). Elle est sanctionnée dans les conditions prévue par
ce même article : « le juge peut même en référé, sans préjudice de la réparation du dommage
subi, prescrire toutes mesures, telles que l`insertion dune rectification ou de la diffusion d’un
65
communiqué, aux fins de faire ce cesser l'atteinte à la présomption d’innocence et ce aux frais
de la personne, physique ou morale, responsable de cette atteinte».
Seule une condamnation pénale devenue irrévocable fait disparaître, relativement aux faits
sanctionnés, la présomption d'innocence dont l’article 9-1 assure le respect (Civ. 1re, 12 nov.
1998, Bull. civ. I n° 313).
Ce principe est pourtant parfois méconnu. D’une part, certains textes conduisent l'inculpé à
apporter la preuve de son innocence (code des douanes, code général des impôts,
harcèlement…). D’autre part, le secret de l'instruction n'est pas toujours bien respecté : le
public est informé des soupçons du magistrat instructeur, de l'évolution de l'instruction…
A - La garde à vue
La garde à vue est la mesure par laquelle « l'officier de police judiciaire peut, pour les
nécessités de l'enquête, garder à sa disposition (une) personne » dans le cadre de l’enquête.
(Article 77 du Code de procédure pénale).
La garde à vue était dépourvue de base légale jusqu’en 1958, date à laquelle elle a été
régularisée par le Code de procédure pénale. Son régime a été modifié à plusieurs reprises en
1960, en 1993 et en 1994. Plus récemment, la loi du 15 juin 2000 est venue apporter de
nouvelles modifications qui à leur tour ont été revues par la loi du 4 mars 2002 et par la loi nº
2003-239 du 18 mars 2003.
La garde à vue est limitée par son champ d’application et par sa durée.
En cas de terrorisme ou de trafic de stupéfiants, la garde à vue d'une personne majeure peut
faire l'objet d'une prolongation supplémentaire de quarante-huit heures. Cette prolongation est
autorisée soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la
détention. Si la prolongation est décidée, un examen médical est de droit. (Articles 706-23 et
706-29 du Code de procédure pénale.
Un mineur de 13 ans ne peut pas être gardé à vue (sauf crime passible de sept ans de prison)
Sur instructions du procureur de la République saisi des faits, les personnes à l'encontre
desquelles les éléments recueillis sont de nature à motiver l'exercice de poursuites sont, à
l'issue de la garde à vue, soit remises en liberté, soit déférées devant ce magistrat.
pratiquement au régime précédent. Toutes ces dispositions figurent à l’article 63-4 du Code de
procédure pénale.
4.1. Le moment de l’entretien avec un avocat
L’entretien peut intervenir dès le début de la garde à vue ainsi qu'à l'issue de la vingtième
heure. Lorsque la garde à vue fait l'objet d'une prolongation, la personne peut également
demander à s'entretenir avec un avocat à l'issue de la douzième heure de cette prolongation.
Quand l'enquête a pour objet la participation à une association de malfaiteurs ou les
infractions de proxénétisme ou d'extorsion de fonds aggravés ou encore une infraction
commise en bande organisée, l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue d'un
délai de trente-six heures.
Enfin, l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de soixante-douze
heures lorsque la garde à vue est soumise à des règles particulières de prolongation c’est à
dire en cas de terrorisme ou de trafic de drogue.
4.2. Les conditions de l’entretien avec un avocat
L’avocat choisi par le gardé à vue ou commis d'office par le bâtonnier peut communiquer
avec lui pendant une durée maximum de trente minutes, dans des conditions qui garantissent
la confidentialité de l'entretien. Il est informé par l'officier de police judiciaire de la nature et
de la date présumée de l'infraction sur laquelle porte l'enquête.
L'avocat présente, éventuellement, des observations écrites qui sont jointes à la procédure.
Enfin, pendant la durée de la garde à vue, il ne peut faire état de cet entretien auprès de
quiconque.
B - La détention provisoire
La détention provisoire, était appelé détention préventive jusqu’à la loi du 17 juillet 1970. Elle
est décidée depuis de la loi du 15 juin 2000 par un magistrat du siège, le juge des libertés et de
la détention, distinct du juge d'instruction.
L’ensemble des dispositions régissant la détention provisoire est réuni dans les articles 143-1
à 148-8 du Code de procédure pénale.
a) Les conditions
Après avoir rappelé qu’une personne mise en examen, est présumée innocente et donc qu’elle
reste libre, le Code de procédure pénale précise dans son article 137 que le placement en
détention provisoire ne pouvait être décidé à titre exceptionnel qu’en en raison des nécessités
de l'instruction ou à titre de mesure de sûreté.
Les articles suivants apportent des précisions quant aux conditions qui doivent alors être
respectées.
La détention provisoire ne peut en effet être ordonnée ou prolongée que dans la mesure où la
personne mise en examen encourt une peine criminelle ou une peine correctionnelle d'une
durée égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement.
Encore faut-il qu’elle constitue l'unique moyen :
- de conserver les preuves ou les indices matériels ou d'empêcher une pression sur les
témoins ou les victimes ou une concertation frauduleuse entre personnes mises en examen et
complices
- de protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à la disposition de
la justice, de mettre fin à l'infraction ou de prévenir son renouvellement
68
b) La procédure
Le juge des libertés et de la détention fait comparaître la personne mise en examen devant lui,
assistée de son avocat. Il lui fait connaître s'il envisage de la placer en détention provisoire.
S'il envisage d'ordonner la détention provisoire de la personne, il l'informe que sa décision ne
pourra intervenir qu'à l'issue d'un débat contradictoire et qu'elle a le droit de demander un
délai pour préparer sa défense.
Le juge des libertés et de la détention statue en audience de cabinet, après un débat
contradictoire au cours duquel il entend le ministère public puis les observations de la
personne mise en examen et, le cas échéant, celles de son avocat. S'il n'ordonne pas le
placement de la personne en détention provisoire, celle-ci est mise en liberté d'office.
c) La durée
La loi du 30 décembre 1996 a posé le principe selon lequel « La détention provisoire ne peut
excéder une durée raisonnable, au regard de la gravité des faits reprochés à la personne mise
en examen et de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité ».
Des dispositions plus précises concernant la durée de la détention provisoire sont énoncées
dans le Code de procédure pénale.
1. En matière correctionnelle
- En principe, c’est à dire si la personne mise en examen n'a pas déjà été condamnée à
une peine d'emprisonnement sans sursis d'une durée supérieure à un an et lorsqu'elle encourt
une peine inférieure ou égale à cinq ans, la détention provisoire ne peut excéder quatre mois.
- Dans les autres cas, à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut
décider de prolonger la détention provisoire pour une durée qui ne peut excéder quatre mois
par une ordonnance motivée rendue après un débat contradictoire. Cette décision peut être
renouvelée selon la même procédure, mais la durée totale de la détention ne peut dépasser un
an.
- Quand la personne est poursuivie pour trafic de stupéfiants, terrorisme, association
de malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour une infraction commise en bande
organisée et qu'elle encourt une peine égale à dix ans d'emprisonnement, la durée maximum
de la détention est portée à deux ans.
2. En matière criminelle
En ce domaine, la personne mise en examen ne peut être maintenue en détention au-delà d'un
an. Mais, le juge des libertés et de la détention peut, au terme de cette année, prolonger la
détention de six mois. Cette décision peut être renouvelée.
En tout état de cause, la personne mise en examen ne peut être maintenue en détention
provisoire au-delà de deux ans lorsque la peine encourue est inférieure à vingt ans de
réclusion ou de détention criminelles et au-delà de trois ans dans les autres cas.
69
Les délais sont portés quatre ans lorsque la personne est poursuivie pour trafic de stupéfiants,
terrorisme, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour un crime commis en bande organisée.
A tout moment, la personne placée en détention provisoire ou son avocat peut demander sa
mise en liberté. Ce magistrat statue dans un délai de trois jours ouvrables. En cas de non
respect de ce délai, la personne peut saisir directement de sa demande la chambre de
l'instruction qui, se prononce dans les vingt jours de sa saisine faute de quoi la personne est
mise d'office en liberté.
A - La liberté du domicile
a) La liberté de choix du domicile
Toute personne peut en toute liberté, choisir son domicile, en changer ou ne pas en avoir.
Toutefois, certains fonctionnaires sont tenus à une obligation de résidence, et certaines
personnes peuvent être interdites de domicile à certains endroits par la justice ou au contraire
être assignés à résidence.
Chacun fait de son domicile l'usage qu'il souhaite. Encore faut-il qu'il n'y ait pas de
répercussions pour les tiers en termes d’hygiène, de sécurité ou de tranquillité). Un
propriétaire peut ainsi donner congé à son locataire s'il n'exploite pas l'habitation selon les
règles normales.
B - L’inviolabilité du domicile
a) L’affirmation du principe
La Constitution de l'an VIII affirmait déjà, dans son article 76 le principe en ces termes : « La
maison de toute personne habitant le territoire français est un asile inviolable. »
Plus près de nous, le Conseil constitutionnel, a indiqué, dans sa décision du 29 décembre 1983
relative à la loi de Finances pour 1984 que l'article 66 de la Constitution « confie à l'autorité
70
judiciaire la sauvegarde de la liberté individuelle sous tous ses aspects et notamment celui de
l'inviolabilité du domicile ».
Le principe est également consacré à l'article 8 de la Convention européenne des droits de
l’homme et à l'article 17 du Pacte relatif aux droits civils et politiques.
Ainsi, selon ce principe, est-il interdit à quiconque de pénétrer dans un domicile sans le
consentement de celui qui l'occupe.
A - L’image
a) Le droit à l’image
Toute personne a un droit exclusif sur son image qui lui permet de s'opposer à sa captation ou
à sa reproduction sans son autorisation, quel que soit le mode de diffusion: photographie,
dessin, cinéma, télévision...
La réalisation et la diffusion de l’image d’une personne, connue ou inconnue, se trouvant dans
un lieu privé sont subordonnées à son consentement. L’atteinte est également réalisée lorsque
la photographie, bien que prise dans un lieu public, fait apparaître la personne isolément grâce
au cadrage réalisé par le photographe.
L’autorisation doit être certaine, même si elle peut être tacite. C’est notamment le cas
lorsqu'une personne connue se trouve dans un lieu public ou lorsque la photo est effectuée
sans son opposition. Son consentement est présumé mais une manifestation préalable de
volonté contraire est toujours possible.
L’autorisation est toujours spéciale. C'est à celui qui reproduit l’image qu'il appartient de
prouver l’autorisation. L’agence de photographie qui ne s’est pas assurée du consentement de
la personne photographiée à la publication du cliché commet une faute en vendant ce cliché et
doit être tenue de garantir l’entreprise de presse des condamnations prononcées contre elle
(Civ. 1ère, 15 déc. 1981, J.C.P. 1983-11-20023, note P. Jourdain).
b) Ses limites
1. Le droit d’informer
Le droit à limage trouve ses limites dans le droit à l’information du public. C’est le cas quand
il s'agit de rendre compte de débats judiciaires. Ainsi, la publication d'une photographie
représentant une victime d’un attentat ne porte pas atteinte au droit à l’image dans la mesure
où elle est dépourvue de toute recherche de sensationnel et que, dès tors, elle ne portait pas
atteinte à la dignité de la personne représentée. (Cass. Civ. Ille, 20 février 200I)
2. La vidéo-surveillance
La loi du 21 janvier 1995 a légalisé la vidéo-surveillance en posant quelques limites.
2.1. Les lieux concernés
L’installation de systèmes de vidéo-surveillance n'est possible que dans des lieux situés sur la
voie publique, celle-ci étant définie assez largement. Entrent ainsi, dans cette catégorie, des
bâtiments et installations publiques et à leurs abords, des bâtiments utiles à la défense
nationale, la voirie routière, des lieux particulièrement exposés à des risques d'agression et de
vol.
2.2. Le régime juridique
L’installation de systèmes de vidéo-surveillance est soumise à autorisation du préfet du
département, donnée après avis consultatif d'une commission présidée par un magistrat. Le
public doit être informé de façon claire et permanente de la présence de ce système.
Les enregistrements doivent être détruits au bout d'un mois : sauf pour des motifs de sécurité.
Toute personne peut prendre connaissance des enregistrements qui la concerne, et vérifier leur
destruction.
72
B - L’intimité
a) En général
Par ce terme on désigne des éléments constituant la sphère secrète de l'individu : sa santé, ses
mœurs, sa vie amoureuse, sentimentale, ses origines raciales, etc. La jurisprudence a même
décidé que l’identité et l’adresse d’une personne relevait de sa vie privée sauf si l’intéressé
poursuit le but illégitime d’échapper à ses créanciers (Cass. Civ. 1ere, 19 mars 1991).
Longtemps, le patrimoine en faisait partie. Mais, dans un arrêt du 20 novembre 1990, la Cour
de cassation estime que la divulgation par voie de presse d’informations concernant te
patrimoine individuel n'est pas en elle-même de nature à porter atteinte à l’intimité de la vie
privée (Cass. Civ. 1ère, 20 novembre 1990).
Toutefois, la Cour estime que la demande de renseignement d'une caisse de retraite portant
sur la situation patrimoniale et professionnelle d'un adhérent est une atteinte à la vie privée.
(Cass. civ. 1ere 19 décembre 1995 )
En revanche, ne relève pas de la vie privée les renseignements d'ordre purement patrimonial.
Ainsi la divulgation par voie de presse d’informations concernant le patrimoine individuel
n'est en elle-même de nature à porter atteinte à l’intimité de la vie privée (Cass. civ. 1ère, 20
novembre 1990).
Son rôle est multiple. Elle recense les différents fichiers, en enregistrant les demandes d'avis
du secteur public et les déclarations du secteur privé et tenant à jour et en mettant à la
disposition du public le « fichier des fichiers ». Toutes ces informations peuvent être
vérifiées sur place.
Elle exerce, pour le compte des citoyens qui le souhaitent, l'accès aux fichiers intéressant la
sûreté de l'Etat, la défense et la sécurité publique, notamment ceux des Renseignements
généraux. La CNIL reçoit et instruit les plaintes, réclamations et pétitions dont peut la saisir,
par simple lettre, tout citoyen (art. 21, 6°). Elle apprécie la suite à leur réserver : classement,
avertissement, saisine du Parquet. Bien sûr elle informe les personnes de leurs droits et
obligations.
A - La correspondance
a) Le principe du secret de la correspondance
Le Code de procédure pénale autorise les officiers de police judiciaire en cas d'enquête de
flagrance (art. 56 et 57) et le juge d'instruction (art. 81 et 97) à procéder à la saisie et à la prise
de connaissance de tous documents, sous la réserve du respect du secret professionnel et des
droits de la défense.
D’autre part, un contrôle de la correspondance des détenus est possible, l'article D. 415 du
Code de procédure pénale précise en effet que « les lettres adressées aux détenus ou envoyées
par eux doivent être écrites en clair et ne comporter aucun signe ou caractère conventionnel
», l'article D. 416 du même code prévoit même que « les lettres de tous les détenus, tant à
l'arrivée qu'au départ, peuvent être lues aux fins de contrôle », à l'exception de la
correspondance avec leur défenseur, l'aumônier de l'établissement et certaines autorités
administratives et judiciaires françaises. Les correspondances sont retenues lorsqu'elles
contiennent des menaces précises contre la sécurité des personnes ou celle des établissements
pénitentiaires.
La loi de 1991 a institué cette Commission et l’a chargée de veiller au respect des principes
posés par la loi. Il s’agit d’une Autorité administrative indépendante qui comprend trois
membres : un député, un sénateur, et son président, qui est nommé par le Président de la
République sur proposition du vice-président du Conseil d’Etat et du premier président de la
Cour de cassation. Il est informé dans les 48 heures de la décision du Premier ministre
d'autoriser la mise sur écoutes. S'il a des doutes, il réunit sa Commission qui statue sur la
légalité de l'écoute : si elle l'estime illégale, elle peut recommander au Premier ministre d'y
mettre fin. Toute personne qui aura un intérêt direct et personnel peut saisir cette commission.
L’individu est un être physique, si les libertés de l’individu ont été d’abord des libertés de la
personne comme nous venons de le voir, elles sont aussi et de plus en plus des libertés du
corps humain. Ces libertés peuvent être regroupées en deux grandes catégories. Il y a d’abord
les libertés qui concernent ce qui est à l’origine et qui met fin au corps : la vie et la mort. Il y a
aussi les droits qui garantissent le respect de la dignité humaine.
§ 1 - LA VIE
Ce sont les textes internationaux qui garantissent le droit de vivre. La Déclaration universelle
des droits de l’homme précise dans son article 3 : « Tout individu a droit à la vie ». Quelques
années plus tard, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, proclamera à son
tour : « Le droit à la vie est inhérent à la personne humaine ». Enfin, au niveau régional, la
Convention européenne des droits de l’homme affirme dans son article 2 : « Le droit de toute
personne à la vie est protégé par la loi ». Mais si le droit de vivre est ainsi établi, c’est aussi
76
le droit de donner la vie et celui de refuser de donner la vie qui est consacré dans le droit
interne.
La loi du 29 juillet de 1994 relative au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps
humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal définit la procréation
médicalement assistée comme l'ensemble des pratiques permettant la conception in vitro, le
transfert d'embryon et l'insémination artificielle.
a) L’insémination artificielle
Elle est pratiquée, hors de l'utérus, par transfert d'embryons. La loi du 29 juillet 1994, précise
qu'un embryon ne peut être conçu in vitro que dans le cadre et selon les finalités d'une
assistance médicale à la procréation. Cela signifie qu'un embryon humain ne peut être conçu
ni utilisé à des fins commerciales ou industrielles. Ainsi, la conception in vitro d'embryons
humains à des fins d'étude, de recherche ou d'expérimentation est interdite. Toutefois, le
décret du 1er juin 1997 autorise des études sur l'embryon à titre exceptionnel lorsqu'elles
présentent un avantage direct pour l'embryon ou si elles contribuent à l'amélioration des
techniques de la procréation médicalement assistée. Enfin, l’embryon en question ne peut être
conçu avec des gamètes ne provenant pas d'un au moins des deux membres du couple.
L'IVG est autorisée par la loi du 17 janvier 1975 dite « loi Veil ». Ses dispositions sont
devenues définitives avec la loi du 31 décembre 1979. La loi du 31 décembre 1982 prévoit le
remboursement de l’IVG par la Sécurité sociale. La loi du 27 janvier 1993 (loi Neiertz) crée
quant à elle le délit d'entrave à l'IVG. Enfin, la loi du 4 juillet 2001 est venue élargir les
conditions de l’IVG.
Le Conseil constitutionnel, saisi de la loi de 1975, a déclaré que celle-ci « respecte la liberté
des personnes appelées à recourir ou à participer à une interruption volontaire de
grossesse » et que, dès lors, « elle ne porte pas atteinte au principe de liberté posé à l'article 2
de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ».
Le Conseil d’Etat, dans un arrêt d’Assemblée du 21 décembre 1990, Confédération
Nationale des associations familiales catholiques a considéré que le décret mettant en vente
la pilule du lendemain (RU 90) n'était pas contraire à l'article 2 de la Convention européenne
des droits de l’homme selon lequel le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi.
Dans une décision plus récente, le Conseil constitutionnel se réfère à « l'équilibre que la
Constitution impose entre, d'une part, la sauvegarde de la dignité de la personne humaine
contre toute forme de dégradation et, d'autre part, la liberté de la femme qui découle de
l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ». (CC, 27 juin 2001 -
Décision n° 2001-446 DC, Loi relative à l'interruption volontaire de grossesse et à la
contraception) Ainsi est reconnu à l’embryon non pas un droit à la vie, mais un droit au
respect de la dignité humaine, ce qui peut paraître pour le moins énigmatique.
Saisi d'une action en réparation intentée par une femme dont l'interruption volontaire de
grossesse avait échoué, le Conseil d'État a jugé que la naissance d'un enfant, même dans cette
circonstance, « n'est pas génératrice d'un préjudice de nature à ouvrir à la mère un droit à
réparation » (CE Ass. 2 juillet 1982, Mlle R....)
La question s’est posé de savoir si à la suite d’une erreur médicale privant une patiente de son
droit à l’IVG la responsabilité de l’Etablissement hospitalier était engagée.
Dans un arrêt de Section du 14 février 1997, Centre hospitalier régional de Nice, le Conseil
d'État a admis l’indemnisation des parents à raison des préjudices que leur cause la naissance
d'un enfant atteint d'une grave infirmité, mais refuse à l’enfant toute indemnisation, au motif
que la cause directe de son handicap se trouve dans son patrimoine génétique et non dans
l'information erronée donnée par l'hôpital public.
Par son arrêt Perruche (Ass. plén. 17 novembre 2000 ), la Cour de cassation a, accepté, dans
des circonstances proches, d'indemniser l'enfant. Cette solution a soulevé une vive
controverse à laquelle, la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du
système de santé, a mis fin. L'article 1er de cette loi précise en effet : « Nul ne peut se
prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance. La personne née avec un handicap dû à
une faute médicale peut obtenir la réparation de son préjudice lorsque l'acte fautif a
provoqué directement le handicap ou l'a aggravé, ou n'a pas permis de prendre les mesures
susceptibles de l'atténuer ».
§ 2 - LA MORT
A - Le suicide
Ce n'est pas une infraction punissable. La tentative de suicide n’est donc pas punissable. Mais,
les personnes susceptibles de l'empêcher et qui ne l'ont pas fait peuvent être poursuivies pour
non-assistance à personne en danger (art. 63-2 du code pénal). Par ailleurs, la loi du
31décembre 1987 punit ceux qui auront fait de la propagande ou de la publicité en faveur de
produits, objets ou méthodes préconisés comme moyens de donner la mort.
B - L’euthanasie
L'euthanasie passive consiste à refuser l'acharnement thérapeutique et à écourter la vie des
malades. L'euthanasie active consiste à donner délibérément la mort à quelqu'un qui y a
consenti. Cet acte est juridiquement considéré comme un homicide, mais il est peu sanctionné
par les tribunaux.
Dans sa décision relative aux lois bioéthique, le Conseil constitutionnel a reconnu en ces
termes le principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine :
« Considérant que lesdites lois énoncent un ensemble de principes au nombre desquels
figurent la primauté de la personne humaine, le respect de l'être humain dès le
commencement de sa vie, l'inviolabilité, l'intégrité et l'absence de caractère patrimonial du
corps humain ainsi que l'intégrité de l'espèce humaine ; que les principes ainsi affirmés
tendent à assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la
personne humaine » (CC, décision n° 94-343-344 DC du 27 juillet 1994, Loi relative au
respect du corps humain et loi relative au don et à l'utilisation des éléments et produits du
corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal).
Ce principe permet d’assurer la protection du corps humain, mais dans certain cas, il est
possible de prendre quelques libertés avec lui.
Selon l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme : « Nul ne peut être
soumis à la torture». Des conventions internationales spécifiques ont été conclues pour
interdire la torture. Ainsi, la convention adoptée par l'ONU le 3 décembre 1984, la convention
du Conseil de l'Europe du 26 novembre 1987. Ces deux textes ayant été ratifiés par la France.
C’est pourquoi le nouveau code pénal punit de quinze ans de réclusion criminelle le fait de «
soumettre une personne à des tortures ou à des actes de barbarie », la réclusion pouvant être
portée à vingt ou trente ans lorsque l'infraction est commise, par exemple, sur une personne
vulnérable.
La France (seule dans ce cas avec la Turquie) a été condamnée par la Cour européenne des
droits de l’homme pour torture à raison de sévices subis par un trafiquant de drogue pendant
sa garde à vue (CEDH, 28 juillet 1999, Ahmed Seimouni c/ France).
b) L’esclavage
La Convention européenne des droits de l’homme interdit l’esclavage dans son article 4 en
ces termes : « Nul ne peut être tenu en esclavage ni en servitude. Nul ne peut être astreint à
accomplir un travail forcé ou obligatoire ».
De nombreuses conventions ont été conclues en vue de proscrire l’esclavage : la Convention
relative à l'esclavage de la Société des Nations signée le 25 septembre 1926, le Protocole
amendant la Convention relative à l'esclavage signé le cadre de l’ONU en 1953, la
Convention supplémentaire relative à l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des
institutions et pratiques analogues à l'esclavage (Nations unies, 1956), la Convention sur le
travail forcé dans le cadre de l’Organisation Internationale du Travail (1930), la Convention
sur l'abolition du travail forcé dans le cadre de l’Organisation Internationale du Travail (1957)
Enfin, la Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la
prostitution d'autrui dans le cadre des Nations unies (1949).
80
Selon l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme : « Nul ne peut être
soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ».
Ce sont des traitements qui provoquent des souffrances graves sans atteindre un degré tel que
l'on puisse parler de torture. La Cour européenne des droits de l'homme a condamné à
plusieurs reprises le Royaume Uni pour traitement inhumain résultant des interrogatoires et
mauvais traitements infligés aux prisonniers comme la privation de nourriture ou de sommeil,
l’isolement cellulaire total.
Ce sont des agissements qui « humilient l'individu grossièrement devant autrui ou le pousse à
agir contre sa volonté ou sa conscience » (CEDH, 25 avril 1978, Tyrer c/ Royaume-Uni). Le
Conseil d'État a quant à lui déclaré légales les interdictions de l'attraction dite du « lancer de
nains », prononcées par des maires, au motif que « le respect de la dignité de la personne
humaine est une des composantes de l'ordre public ». Il appartient donc aux maires dans le
cadre de leur pouvoir de police de veiller à ce qu’il ne soit pas porté atteinte à l’ordre public
et plus particulièrement à cette composante de l’ordre public. (CE, 27 octobre 1995,
Commune de Morsang-sur-Orge).
81
Selon la loi du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain et modifiant le code civil :
« Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l'objet d'un droit patrimonial
» (art. 16-1 du Code civil). C’est pourquoi, « Les conventions ayant pour effet de conférer une
valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments ou à ses produits sont nulles » (art. 16-5
du Code civil). C’est également la raison pour laquelle « Toute convention portant sur la
procréation ou la gestation pour le compte d'autrui est nulle » (art. 16-7 du même Code qui
interdit ce que l’on appelle couramment les « mères porteuses »).
L’indisponibilité du corps humain présente pourtant quelques limites, sous la forme des dons
d’organes. La loi du 29 juillet 1994 est venue réglementer de manière générale ces dons.
Toutes ces dispositions sont rassemblées dans le Code de la santé publique qui distingue dans
ses articles L. 1231-1 à L. 1232-6, les prélèvements sur une personne vivante et ceux sur une
personne décédée.
§ 1 - L’AFFIRMATION DE CE DROIT
La Déclaration des droits de l'homme énonce dans sont article 2 les différents droits de
l’homme. Ainsi, aux côtés de la liberté, de la sûreté, et de la résistance à l'oppression est citée
en second lieu la propriété. Ce droit ne fait pas l’objet d’autres précisions dans la déclaration
si ce n’est dans l’article 17 où il est qualifié d’« inaliénable et sacré».
B - Dans la jurisprudence
a) La constitutionnalisation du droit de propriété
Dans sa décision du 16 janvier 1982 (n° 81-132 DC) « Lois de nationalisation », le Conseil
constitutionnel estime que « si postérieurement à 1789 et jusqu'à nos jours, les finalités et les
conditions d'exercice du droit de propriété ont subi une évolution caractérisée à la fois par
une notable extension de son champ d'application à des domaines individuels nouveaux et par
des limitations exigées par l'intérêt général, les principes mêmes énoncés par la Déclaration
des droits de l'homme ont pleine valeur constitutionnelle tant en ce qui concerne le caractère
fondamental du droit de propriété dont la conservation constitue l'un des buts de la société
politique et qui est mis au même rang que la liberté, la sûreté et la résistance à l'oppression,
qu'en ce qui concerne les garanties données aux titulaires de ce droit et les prérogatives de la
puissance publique ».
Ainsi, le caractère constitutionnel du droit de propriété est-il devenu indéniable.
b) La confirmation de ce droit
83
Dans une décision plus récente, celle du 30 décembre 1982 (Décision n° 82-150 DC),
« Transports intérieurs », le Conseil constitutionnel a, une nouvelle fois, fait référence au
droit de propriété tel qu'il figure dans la Déclaration des droits de 1789. De même, dans une
décision du 27 décembre 1990, (Décision n° 90-281 DC) « Postes et Télécommunications ».
Il résulte cependant d'une décision du Conseil constitutionnel du 17 juillet 1985, que si le
droit de propriété constitue bien un principe de valeur constitutionnelle, le droit de propriété
n'est pas une liberté individuelle, au sens de l'article 66 de la Constitution qui réserve au juge
judiciaire, gardien de la liberté individuelle, le soin d'assurer le respect de celle-ci : la liberté
individuelle et la propriété sont donc distincts.
Plus tard, par sa décision du 25 juillet 1989 (Décision n° 85-189 DC), « mise en oeuvre de
principes d'aménagement », le Conseil constitutionnel a posé le principe de l'autorité
judiciaire gardienne de la propriété privée immobilière, en vertu d'un principe fondamental
reconnu par les lois de la République.
§ 2 - LA RELATIVISATION DE CE DROIT
a) L’expropriation
L'expropriation est une opération administrative par laquelle l'État impose à un particulier,
suivant une procédure spéciale prévue par la loi, de céder un immeuble à l'administration,
dans un but d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité.
En raison des atteintes qu'elle emporte au droit de propriété, l’expropriation relève, tant pour
le transfert de propriété que pour la fixation des indemnités, du juge judiciaire, gardien de la
propriété (CC, 25 juillet 1989, Décision n° 85-189 DC, « mise en oeuvre de principes
d'aménagement »)
b) les nationalisations
La nationalisation est une forme d'expropriation au profit de la nation. Elle présente toutefois
des particularités. D’abord elle porte principalement sur des biens meubles (les actions),
ensuite elle est décidée par l'autorité politique et non par l'autorité administrative.
L'article 34 de la Constitution prévoit que la loi fixe les règles concernant « les
nationalisations d'entreprises et les transfert de propriété du secteur public au secteur
privé ».
L'indemnisation doit être préalable et juste selon l’article 17 de la Déclaration. C'est la raison
pour laquelle en 1982, après les nouvelles nationalisations, il a fallu accorder aux actionnaires
dépossédés une indemnisation plus forte que celle initialement prévue (CC, 16 janvier 1982
Décision n° 81-132 DC Loi de nationalisation ; et CC, 11 février 1982, Décision n° 82-139
DC, Loi de nationalisation.
85
§ 1 - SA RECONNAISSANCE
A - Valeur
Dans sa décision précité du 16 janvier 1982 (Nationalisations), le Conseil constitutionnel
déclare «que la liberté qui, aux termes de l'article 4 de la Déclaration, consiste à pouvoir
faite tout ce qui ne nuit pas à autrui, ne saurait elle-même être préservée si des restrictions
arbitraires ou abusives étaient apportées à la liberté d'entreprendre ».
La liberté d’entreprendre est ainsi associée au droit de propriété. La décision du Conseil
constitutionnel du 20 janvier 1993, (Décision n° 92-316 DC « Prévention de la
corruption »), traite à nouveau du droit de propriété et de la liberté d'entreprendre en les
associant.
B - Contenu
Si la liberté d’entreprendre est liée au droit de propriété, elle se confond parfois avec une autre
liberté, celle du commerce et de l’industrie.
Cette liberté a été érigée en principe général du droit par le Conseil d’Etat dans son arrêt du
28 octobre 1960, Martial de Laboulaye.
Toutefois cette liberté peut être comprise de deux manières différentes. D’un côté elle recoupe
la liberté d’entreprendre, c’est le principe de la libre entreprise. Sa valeur est constitutionnelle.
D’un autre côté, elle correspond au principe de la libre concurrence. Sous ce deuxième
aspect, sa valeur n’est que législative. C’est ce que le Conseil d’Etat reconnaissait dans son
arrêt précité.
Aujourd'hui, le Code général des collectivités territoriales, qui a repris sur ce point les
dispositions de la loi du 2 mars 1982, précise que les communes (art. L.2251-1), les
départements (art. L.3231-1), les régions (art. L.4253-1) peuvent intervenir en matière
économique et sociale à condition de respecter, notamment la liberté du commerce et de
l'industrie.
§ 2 - SES LIMITES
Ces libertés concernent la sphère politique de la société, on parlera de libertés civiques. Elles
s’appliquent également au domaine culturel ainsi qu’au monde de l’économie.
§ 1 - LA LIBERTE DE REUNION
A - Sources
a) Les premiers textes
Cette liberté n’est pas énoncée par la Déclaration des droits de l’homme de 1789, mais étant
la moins incompatible avec l'individualisme, elle fut reconnue par la Constitution du 3
septembre 1791, dans son Titre premier qui rappelle les droits garantis : « La liberté aux
citoyens de s'assembler paisiblement et sans armes, en satisfaisant aux lois de police ».
C’est la loi du 30 juin 1881 qui va proclamer avec une certaine précision cette liberté: « Les
réunions publiques sont libres. Elles peuvent avoir lieu sans autorisation préalable, sous les
conditions prescrites par les articles suivants. » L'article 1er de la loi du 28 mars 1907 relative
aux réunions publiques ajoute: « Les réunions publiques, quel qu'en soit l'objet, pourront être
tenues sans déclaration préalable »
b) La jurisprudence
Le Conseil constitutionnel en a consacré le statut constitutionnel en s’appuyant non pas sur les
principes fondamentaux reconnus par les lois de la République mais sur la Déclaration des
droits de l’homme. Son article 11 proclame que « La libre communication des pensées et des
opinions est un des droits les plus précieux de l'homme ». Dans sa décision n° 94-352 DC
du 18 janvier 1995, Loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité le droit
d'expression collective des idées et des opinions, le Conseil constitutionnel évoque « le droit
d'expression collective des idées et des opinions » comme le corollaire de cette liberté
d’expression.
87
La liberté de réunion est affirmée par l'art. 21 du Pacte de New York en ces termes :
« Le droit de réunion pacifique est reconnu. L'exercice de ce droit ne peut faire l'objet que
des seules restrictions imposées conformément à la loi et qui sont nécessaires dans une
société démocratique, dans l'intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté publique, de l'ordre
public ou pour protéger la santé ou la moralité publiques, ou les droits et les libertés
d'autrui ».
Elle est également consacrée à l'article 11 de la Convention européenne des droits de
l’homme :
« 1. Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, y
compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats pour la
défense de ses intérêts.
2. L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par
la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité
nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la
protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui.
Le présent article n'interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l'exercice de
ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l'administration de l'Etat. »
B - Régime
Les réunions privées se différencient des réunions publiques par le fait qu'elles ne concernent
que des personnes nominativement invitées. Elles bénéficient d'un régime de complète liberté.
Les réunions publiques, c'est-à-dire celles qui sont accessibles à des personnes non
nominativement désignées à l'avance, sont à un régime légèrement plus restrictif. On
distinguera le régime général et les régimes particuliers.
a) Le régime général
La loi de 1881 ne soumet le droit de réunion à aucune condition. : « Les réunions publiques
sont libres. Elles peuvent avoir lieu sans autorisation préalable. » (art 1er). De plus, l'article
1er de la loi du 28 mars 1907 précise qu’aucune déclaration n’est nécessaire : « Les réunions
publiques, quel qu'en soit l'objet, pourront être tenues sans déclaration préalable. »
Seules quelques règles encadrant ce droit sont prévues. Mais, exceptionnellement des limites
peuvent être imposées.
1. L’encadrement
Les réunions publiques sont soumises à quelques formalités : un bureau de la réunion doit être
désigné, composé au moins de trois personnes, ce bureau étant responsable du maintien de
l'ordre et de l'objet de la réunion. Il faut, de plus, accepter la présence d'un fonctionnaire
délégué (un policier) qui a le droit de dissoudre la réunion en cas de violences physiques.
Mais ces dispositions sont rarement mises en œuvre aujourd’hui, elles restent bien formelles.
88
De plus, il est interdit de prolonger la réunion après 11 heures du soir, sauf dans les localités
où la fermeture des établissements recevant le public a lieu plus tard, cette limite étant alors
reportée à l'heure fixée pour la fermeture de ces établissements
2. Les limites
Les premières limites sont prévues par des textes, les autres ont été développées par la
jurisprudence.
Les législations sur l'état d’urgence et sur l'état de siège donnent aux autorités civiles (état
d'urgence) ou aux autorités militaires (état de siège) le droit d'interdire les réunions qui
portent atteinte à l'ordre public.
En dehors de ces circonstances, le Conseil d’Etat a eu l’occasion de préciser les atteintes
possibles à la liberté de réunion.
Dans son arrêt Benjamin du 19 mai 1933, le Conseil d'État a admis l'interdiction d'une
réunion, par un maire, à condition que cette mesure soit indispensable au maintien de l'ordre
public. Encore faut-il, que l'éventualité des troubles allégués par le maire revête « un degré de
gravité tel qu'il n'ait pu, sans interdire la conférence, maintenir l'ordre en édictant les
mesures de police qu'il lui appartenait de prendre ».
D’autre part, le refus de mettre une salle municipale à la disposition d'une association, d'un
syndicat ou d'un parti politique ne peut être motivé que par les nécessités du maintien de
l'ordre public ou encore celles liées à l'administration des propriétés communales, à
l'exclusion de la nature de la formation politique en cause (CE, 15 mars 1996, Cavin,).
2. Les « raves-parties »
La loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne a soumis à des dispositions
spéciales les « rave parties ». L'article 53 de cette loi les définit comme des « rassemblements
exclusivement festifs à caractère musical, organisés par des personnes privées, dans des lieux
qui ne sont pas au préalable aménagés à cette fin et répondant à certaines caractéristiques
fixées par décret en Conseil d'État tenant à leur importance, à leur mode d'organisation ainsi
qu'aux risques susceptibles d'être encourus par les participants »
Les organisateurs du rassemblement doivent faire une déclaration au préfet du département
concerné. Ils doivent également indiquer les mesures envisagées pour garantir la sécurité, la
salubrité, l'hygiène et la tranquillité publiques.
Des mesures nécessaires au bon déroulement de la manifestation peuvent être demandées,
voire imposées par le préfet, il peut même interdire le rassemblement s’il est de nature à
troubler gravement l'ordre public ou si les mesures nécessaires pour assurer son bon
déroulement sont insuffisantes, en dépit d'une mise en demeure.
Le défaut de déclaration préalable ou la méconnaissance d'une mesure d'interdiction est
sanctionnée par la saisie du matériel utilisé ainsi que par des sanctions pénales.
89
§ 2 - LA LIBERTE DE MANIFESTATION
Les réunions sur la voie publique sont interdites par la loi du 30 juin 1881 mais pas les
manifestations. L’exercice de cette liberté est réglementé par le décret-loi du 23 octobre 1935
portant réglementation des mesures relatives au renforcement du maintien de l'ordre public.
Des sanctions sont prévues par d’autres textes.
A - Exercice
La manifestation est soumise à déclaration. Elle peut être interdite.
a) La déclaration
« tous cortèges, défilés et rassemblements de personnes, et, d'une façon générale, toutes
manifestations sur la voie publique », à l'exception des « sorties sur la voie publique
conformes aux usages locaux » doit faire l’objet d’une déclaration.
1. Destinataires et délai
La déclaration doit se faire à la mairie de la commune ou des différentes communes sur le
territoire desquelles la manifestation doit avoir lieu. A Paris et pour les communes des
départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, la déclaration
est faite à la préfecture de police. Elle est faite au préfet ou au sous-préfet en ce qui concerne
les villes où est instituée la police d'État.
Elle doit être déposée trois jours francs au moins et quinze jours francs au plus, avant la date
de la manifestation. L'autorité qui reçoit la déclaration délivre immédiatement un récépissé.
2. Contenu
Elle doit indiquer les noms, prénoms et domiciles des organisateurs, le but de la
manifestation, le lieu, la date et l'heure du rassemblement et l'itinéraire projeté. Elle doit être
signée par trois organisateurs. Le maire transmet, dans les vingt-quatre heures, la déclaration
au préfet
b) L’interdiction
1. Conditions
L'autorité investie de pouvoirs de police peut interdire la manifestation si elle estime qu’elle
est de nature à troubler l’ordre public. L’arrêté d’interdiction est notifié immédiatement aux
signataires de la déclaration.
2. Contrôle
Le Conseil d’Etat veille à ce que l’interdiction soit bien motivée par une atteinte réelle à
l’ordre public. Il écarte ainsi l’interdiction prononcée parce que la manifestation pourrait
«porter atteinte aux relations internationales de la République ». CE, 12 novembre 1997,
Ministre de l'Intérieur c/ Association « Communauté tibétaine en France et ses amis ». Il
aligne ainsi sa jurisprudence en matière de manifestation sur celle de qu’il a développé en
matière de réunion. Dans le même arrêt il précise que l’interdiction d’une manifestation ne
90
peut être prononcée pour « un motif, qui ne fait pas référence à des risques de troubles à
l'ordre public ».
La Cour européenne des droits de l’homme est allée encore plus loin puisque dans un arrêt
Plattform « Ârztefür das Leben » du 21 juin 1988, elle a jugé que les États avaient
l'obligation de prendre des mesures positives pour permettre que puisse s'exercer « une liberté
réelle et effective de réunion pacifique ». En l'espèce, deux manifestations de médecins
hostiles à l'avortement se tinrent à Stadl-Paura et sur la place de la cathédrale à Salzbourg.
Leur annonce avait suscité l'organisation de contre-manifestations et des incidents se
produisirent, en dépit de la présence de forces de police. La Cour affirme qu'« il incombe aux
États contractants d'adopter des mesures raisonnables et appropriées afin d'assurer le
déroulement pacifique des manifestations licites », mais indique qu'il s'agit d'une simple obli-
gation de moyens, de sorte qu'aucune violation de la Convention ne pouvait être constatée en
l'espèce.
B - Sanctions
a) Pénales
b) Civiles
91
L'indemnisation des préjudices causés par les attroupements fait l'objet, depuis la loi du 10
vendémiaire an IV d'un régime particulier. Les communes étaient en effet responsables en cas
d’émeutes.
L'article 92 de la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les
communes, les départements, les régions et l'Etat, a prévu que l’Etat est responsable sans
faute des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par
violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre des
personnes, soit contre les biens. Il peut exercer une action récursoire contre la commune
lorsque la responsabilité de celle-ci se trouve engagée.
La loi du 9 janvier 1986 a reconnu la compétence des juridictions administratives alors que,
jusque-là, le contentieux de la responsabilité du fait des attroupements relevait des juridictions
judiciaires.
La liberté d'association est une conquête. Proclamé de façon éphémère par la loi du 21 août
1790, « le droit de s'assembler paisiblement et de former des sociétés libres » a attendu la loi
du 1er juillet 1901 pour recevoir une consécration qui ne deviendra définitive qu’avec la
décision du Conseil constitutionnel n° 71-44 DC du 16 juillet 1971. Cette décision donnant
rang constitutionnel à cette liberté.
Il est essentiellement formé par des dispositions relatives à la constitution des associations
ainsi qu’à leur capacité.
Afin d’éviter à l’avenir ce genre de difficulté, un projet de loi fut déposé. Il fut délibéré par
l'Assemblée nationale et le Sénat qui le rejeta par deux fois. L'Assemblée nationale, ayant le
dernier mot, l'adopta. Cette loi complétait les dispositions des articles 5 et 7 de la loi du 1er
juillet 1901 relative au contrat d'association.
Le Conseil constitutionnel fut saisi du texte par le président du Sénat, Alain Poher,
conformément aux dispositions de l'article 61 de la Constitution. Selon lui, cette loi avait pour
but d'instituer une procédure, d'après laquelle, l'acquisition de la capacité juridique des
associations déclarées serait subordonnée à un contrôle préalable de leur conformité à la loi,
par l'autorité judiciaire, ce qui était contraire à la Constitution.
2. Le régime de la constitution
Sont visés par ce texte les associations racistes, c’est à dire des groupes qui soit
provoqueraient à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un
groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur non-appartenance à une ethnie, une
nation, une race ou une religion déterminée, soit propageraient des idées ou théories tendant à
justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette violence.
1.1.3. La loi du 9 septembre 1986
Cette loi a prévu la dissolution des groupements qui se livrent ou provoquent à des actes de
terrorisme.
La loi du 1er juillet 1901 a prévu par son article 1er que « toute association fondée sur une
cause ou en vue d'un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes mœurs, ou qui aurait pour
but de porter atteinte à l'intégrité du territoire national et à la forme républicaine du
gouvernement, est nulle et de nul effet ».
Ce sont les juridictions judiciaires qui prononcent l'annulation, en l'espèce les tribunaux de
grande instance. Celui-ci peut être saisi à la requête de tout intéressé ou à la diligence du
ministère public, qui peut assigner à jour fixe.
Cette dissolution entraîne la nullité de l'association, et peut entraîner le prononcé de peines
correctionnelles à l'encontre des fondateurs.
Les décisions en la matière sont rares. On peut cependant citer une décision récente prise à
l'encontre de l'association «Alma Mater », qui se proposait de mettre en contact des couples
stériles avec des mères porteuses : l'objet de l'association était de « favoriser la conclusion de
conventions contraires au principe d'ordre public de l'indisponibilité de l'état des personnes
en ce qu'elles ont pour but de faire venir au monde un enfant dont l'état ne correspondra pas
à sa filiation réelle au moyen d'une renonciation et d'une cession également prohibées des
droits reconnus par la loi à la future mère » (Civ. 1, 13 déc. 1989, D. 1990, p. 273, rap.
Massip)
En vertu de la loi du ler juin 1924, les articles 21 à 79 du Code civil local et la loi d'Empire du
19 avril 1908 s’appliquent aux associations dans les trois départements d’Alsace-Moselle. Le
droit local distingue les associations non déclarées, au régime comparable à celui de la loi de
1901, et les associations inscrites, dont la capacité juridique est très étendue, puisqu'elles
peuvent recevoir des dons et legs et acquérir des immeubles sans aucune restriction.
La procédure d'inscription comporte une demande adressée au tribunal d'instance, qui vérifie
la régularité des statuts et la licéité du but de l'association et, s'il admet la demande, la
transmet au préfet qui dispose d'un droit d'opposition qu'il doit exercer dans un délai de six
semaines.
L'autorité préfectorale peut faire opposition à l'inscription d'une association dans les cas
énumérés à l'article 61 du Code civil local: « Lorsque l'association, d'après le droit public en
matière d'association, est illicite ou se trouve dans les conditions prévues pour pouvoir être
interdite ou lorsqu'elle poursuit un but politique, social-politique ou religieux. »
En l'absence d'une telle opposition, l'association est inscrite sur un registre tenu par le tribunal
d'instance.
94
Ces associations sont dépourvues de capacité juridique : elles ne peuvent rien posséder, rien
réclamer et ne peuvent pas ester en justice. Elles ont quand même une existence légale dont il
faut tenir compte : elles peuvent recevoir des cotisations, ouvrir à cet effet un compte
bancaire, agir dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir pour défendre les intérêts
collectifs de leurs membres, (CE, 31 août 1969, Syndicat de défense des canaux de la
Durance)
C’est par décret en Conseil d’Etat que la reconnaissance d'utilité publique est établie. Les
pouvoirs publics ayant en ce domaine, un pouvoir discrétionnaire. L'association doit présenter
un intérêt pour la collectivité et avoir au moins trois ans d'existence.
La loi du 23 juillet 1987 a allégé sous certaines conditions, les formalités de la reconnaissance
d'utilité publique des associations déclarées ; ainsi, la période probatoire de fonctionnement
de trois ans minimum n'est pas exigée si les ressources prévisibles pendant un délai de trois
ans sont de nature à assurer son équilibre financier.
Les associations reconnues d'utilité publique ont une personnalité juridique pleine et entière.
Elles peuvent acquérir à titre onéreux ou gratuit des terrains et valeurs mobilières, et peuvent
recevoir des dons et legs étant entendu qu'une autorisation préalable est nécessaire. Les
immeubles nécessaires à leurs actions ne peuvent être acquis qu'à titre onéreux.
Ces associations bénéficient de diverses exonérations fiscales : leurs membres peuvent
déduire de leur revenu une partie des sommes qu'ils ont versées. En contre-partie, l'Etat exerce
un contrôle plus étendu
95
Les partis et groupements politiques bénéficiaires ne sont pas soumis au contrôle de la Cour
des comptes. Les dispositions du décret du 30 octobre 1935 relatif au contrôle des
associations, oeuvres et entreprises privées subventionnées ne leur sont pas applicables.
Dans sa décision précitée du 11 octobre 1984, le Conseil constitutionnel devait insister sur le
caractère particulier de cette liberté :
« S'agissant d'une liberté fondamentale, d'autant plus précieuse que son exercice est l'une des
garanties essentielles du respect des autres droits et libertés et de la souveraineté nationale,
97
la loi ne peut en réglementer l'exercice qu'en vue de le rendre plus effectif et de le concilier
avec celui d'autres règles et principes de valeur constitutionnelle »
Ce qui veut dire que cette liberté bénéficie d’un statut constitutionnel privilégié. Il se traduit
par le fait que la liberté de la presse peut imposer certaines limites aux autres libertés ou droits
fondamentaux.
D’autre part, le législateur ne peut intervenir que pour rendre plus effectif l'exercice de la
liberté de la presse, ce qui lui interdit d'abroger le régime de garantie d'une liberté
fondamentale sauf à le remplacer par un dispositif au moins aussi protecteur.
Enfin, le régime de l'autorisation préalable - ou tout régime jugé équivalent - est par principe
prohibé.
b) Contenu
Dans ses deux décisions précitées le Conseil constitutionnel affirme que le pluralisme de la
presse « est en lui-même un objectif de valeur constitutionnelle », ce qui implique, non plus
l'abstention mais l'intervention du législateur pour garantir ce pluralisme.
« Ainsi, en exigeant que soient connus du public les dirigeants réels des entreprises de presse,
les conditions de financement des journaux, les transactions financières dont ceux-ci peuvent
être l'objet, les intérêts de tous ordres qui peuvent s'y trouver engagés, le législateur met les
lecteurs à même d'exercer leur choix de façon vraiment libre et l'opinion à même de porter un
jugement éclairé sur les moyens d'information qui lui sont offerts par la presse écrite »
(Décision n' 84-181 DC du 11 octobre 1984 Loi sur les entreprises de presse)
Ou encore :
Considérant que le pluralisme des quotidiens d'information politique et générale est en lui-
même un objectif de valeur constitutionnelle ; qu'en effet, la libre communication des pensées
et des opinions, garantie par l'article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du
Citoyen de 1789, ne serait pas effective si le public auquel s'adressent ces quotidiens n'était
pas à même de disposer d'un nombre suffisant de publications de tendances et de caractères
différents ; que l'objectif à réaliser est que les lecteurs qui sont au nombre des destinataires
essentiels de la liberté proclamée par l'article 11 de la Déclaration de 1789 soient à même
d'exercer leur libre choix sans que ni les intérêts privés ni les pouvoirs publics puissent y
substituer leurs propres décisions ni qu'on puisse en faire les objets d'un marché
(Décision n° 86-210 DC Régime juridique de la presse)
Ces limites s’appliquent aussi bien à la liberté d’informer qu’à la liberté de publier.
1. La diffamation et l’injure
La diffamation est définie par la loi de 1881 comme « toute allégation ou imputation d'un fait
qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait
est imputé ».
La diffamation doit être distinguée de l'injure, celle-ci consiste en « toute expression
outrageante, termes de mépris ou invective quine renferme l'imputation d'aucun fait ».
98
3. La saisie administrative
En cas de menace à l'ordre public, les autorités de police administrative peuvent, procéder à
une saisie. Mais le juge contrôle la légalité des conditions d'intervention comme les finalités
du pouvoir de police (proportionnalité des mesures aux menaces, donc illégalité des
interdictions à caractère général et absolu ; cela exclut la saisie de tous les exemplaires d'un
périodique). Le juge sanctionne le détournement de procédure : CE, 24 juin 1960 Société
Frampar ; TC, 8 avril 1935, Action Française (voie de fait).
99
§ 2 - LA LIBERTE DE L’AUDIOVISUEL
a) Organisation
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel est composé d'un Collège de neuf membres nommés
par décret du président de la République. Trois sont désignés par le président de la
République, trois par le président du Sénat et trois par le président de l'Assemblée nationale.
Le président du CSA est nommé par le président de la République. Le mandat des conseillers,
est de six ans, il est non-renouvelable. Le Conseil se renouvelle par tiers tous les deux ans.
b) Pouvoirs
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel dispose d’un pouvoir de décision puisqu’il nomme les
présidents des télévisions et des radios publiques et qu’il délivre des autorisations aux stations
de radio MF et MA, aux télévisions locales et nationales, aux chaînes de télévision diffusées
par câble et par satellite.
Il s'assure du respect par tous les diffuseurs des lois et de la réglementation en vigueur, en
conséquence, il peut infliger des sanctions (mise en demeure publique, suspension de
l'autorisation pour un mois ou plus, réduction de la durée de l'autorisation, sanctions
pécuniaires, ordre d'insertion d'un communiqué dans les programmes, retrait de l'autorisation)
Enfin, il rend des avis au gouvernement sur les projets de loi et de décrets qui concernent
l'audiovisuel.
a) Le secteur privé
1. Les radios
Il existe cinq catégories de radios privées : les radios non commerciales; les radios
commerciales locales indépendantes; les radios commerciales locales rattachées à un réseau;
les radios nationales thématiques; les radios nationales généralistes.
2. La télévision
Les chaînes de télévision privées sont essentiellement nationales. TF1 a été privatisée en
1987. Canal Plus est une société cryptée à péage bénéficiaire d'une concession devenue
autorisation. M6, est une chaîne généraliste sous autorisation.
b) Le secteur public
Le secteur public de la télévision est représenté par une société holding, France télévision
coiffant France 2, France 3, La Cinquième et Arte qui sont des sociétés de programme. Il
comprend également une société de production la SFP. C’est une Société d’économie mixte
chargée de produire des œuvres audiovisuelles destinées en priorité aux chaînes publiques.
Télévision Diffusion de France est une Société anonyme à capital majoritairement public,
chargée de la diffusion des programmes. Enfin, l’Institut National de l'Audiovisuel est un
EPIC chargé de conserver et exploiter les archives des sociétés nationales de programme.
La liberté d'enseignement a été consacrée par le Conseil constitutionnel en tant que principe
fondamental reconnu par les lois de la République dans la décision du 23 novembre 1977
(décision no 77-87 DC, Liberté d’enseignement et de conscience), puis réaffirmée dans la
décision du 13 janvier 1994, (no 93-329 DC, Révision de la loi Falloux ) et encore plus
récemment dans la décision no 99-414 DC du 8 juillet 1999, Loi d'orientation agricole.
Cette liberté est consacrée par des textes internationaux : le protocole n° 1 de la Convention
européenne des droits de l’homme : « Nul ne peut se voir refuser le droit à l'instruction.
L'Etat, dans l'exercice des fonctions qu'il assumera dans le domaine de l'éducation et de
l'enseignement, respectera le droit des parents d'assurer cette éducation et cet enseignement
conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques. » (art. 2), ainsi que la
101
§ 1 - L’ENSEIGNEMENT PRIVE
Ils ont été prévus par les lois Debré (1959) et Chevènement (1985). L'établissement
d'enseignement privé a le choix entre deux possibilités.
1. L’autonomie totale
Dans ce cas, l’établissement n’a aucun lien avec l’Etat, il ne reçoit par conséquent aucune
aide. C'est le cas de certaines écoles spécialisées comme certaines écoles de commerce
privées, et de certains établissements réservés, du fait du montant des frais occasionnés, à une
classe de population ayant des revenus très élevés.
b) Le contrôle de l'État
Les lois de décentralisation des 22 juillet 1983 et 25 janvier 1985 ont transféré aux
collectivités territoriales les compétences en matière de construction et d'entretien des
établissements d'enseignement.
103
Les dépenses de fonctionnement des écoles sous contrat d'association sont donc à la charge de
la collectivité qui supporte les dépenses correspondantes dans l'enseignement public.
Après bien des litiges et de nombreux arrêts, il est établi que ces dépenses présentent, pour la
collectivité, un caractère obligatoire.
La conséquence de ce caractère obligatoire est la mise enjeu de la procédure de contrôle
budgétaire en cas de non-inscription de la dépense au budget.
La loi Falloux interdit aux départements et aux communes de financer les dépenses
d'investissement des établissements d'enseignement privés au-delà de 10 % du total de leurs
dépenses. Le Conseil d'État a étendu cette interdiction aux régions (CE, 10 novembre 1993,
Préfet de la région Ile-de-France). L’article L. 151-4 du Code de l’éducation a d’ailleurs
repris cette disposition en ajoutant que « Le conseil académique de l'éducation nationale
donne son avis préalable sur l'opportunité de ces subventions ».
§ 2 - L’ENSEIGNEMENT PUBLIC
Le préambule de 1946 énonce que « l'organisation de l'enseignement public, gratuit et laïc est
un devoir de l'Etat ». Dans le cadre de ces principes d’organisation de l’enseignement, la
liberté des enseignants et des enseignés est assurée.
a) Un enseignement obligatoire
L'instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes, français et étrangers, entre six
ans et seize ans. En conséquence les personnes responsables d'un enfant doivent le faire
inscrire dans un établissement d'enseignement public ou privé, ou bien déclarer au maire et à
l'inspecteur d'académie, qu'elles lui feront donner l'instruction dans la famille.
Cette obligation est sanctionnée pénalement puisque, le fait, par les parents d'un enfant de ne
pas l'inscrire dans un établissement d'enseignement, sans excuse valable, est puni de six mois
d'emprisonnement et de 7500 euros d'amende.
b) Un enseignement gratuit
La gratuité est le corollaire du caractère obligatoire. Elle est rappelée par le code de
l’éducation en ces termes : « L'enseignement est gratuit pour les élèves des lycées et collèges
publics qui donnent l'enseignement du second degré, ainsi que pour les élèves des classes
préparatoires aux grandes écoles et à l'enseignement supérieur des établissements
d'enseignement public du second degré »
c) Un enseignement laïc
104
1. La liberté d’accès
L'obligation d'admettre dans les établissements publics d'enseignement, de quelque degré que
ce soit, tous ceux qui remplissent les conditions de diplôme requises découle de l’article L.
111-1 du Code de l’éducation selon lequel, « Le droit à l'éducation est garanti à chacun ».
Les exceptions à ce principe aménagées par les textes doivent s'entendre strictement, toute
procédure officieuse de sélection étant illicite (CE, 27 juill. 1990, Université Paris-
Dauphine).
2. La liberté de participation
Le décret du 30 août 1985 sur les établissements publics locaux d'enseignement (collèges et
lycées) prévoit une participation des parents d'élèves au sein du conseil d'administration de
chacun de ces établissements. Le Code de l’éducation précise dans son article L.421-2 que ces
conseils comprennent « Pour un tiers, des représentants élus des parents d'élèves et élèves. »
3. La liberté d’expression
105
La liberté religieuse est consacrée par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen
(art.10 Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur
manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi.), le préambule de 1946 , la
Constitution de 1958 (art.1 La France est une République indivisible, laïque, démocratique et
sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de
race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée. ),
la Déclaration universelle des droits de l’homme (art.18 : Toute personne a droit à la liberté
de pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la liberté de changer de religion ou
de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en
commun, tant en public qu'en privé, par l'enseignement, les pratiques, le culte et
l'accomplissement des rites.) et la Convention européenne des droits de l’homme (art.9 : 1.
Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique
la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa
religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le
culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites.
2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres
restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une
société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la
morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.). Le Pacte de New York
(art. 18)
Ces différents textes soulignent les deux dimensions de la liberté religieuse. Elle inclut la
liberté de conscience, et la liberté de pratiquer individuellement ou collectivement sa religion.
C’est la dimension individuelle. Mais la liberté religieuse, c’est aussi la séparation des Eglises
et de l’Etat, c’est la dimension publique.
Selon l’article 1er de la Constitution, « La France est une République… laïque Elle respecte
toutes les croyances » En conséquence, les Eglises et l’Etat sont séparés. Ce principe a été
posé par la loi du 9 décembre 1905.
106
Les prêtres, les rabbins, les pasteurs ne sont plus agents publics. Ils ne sont plus rémunérés
par l'Etat, mais par les fidèles. Les crédits publics affectés aux cultes disparaissent du budget
de l'Etat ; il n'y a plus d'organisation publique des cultes.
La loi du 2 janvier 1907 distingue le régime des édifices construits avant ou après 1905.
Les collectivités publiques peuvent subventionner les activités d'intérêt général, même si
elles s'exercent dans un cadre religieux. Ainsi, la loi de 1905 prévoit qu’elles peuvent prendre
en charge certains services religieux tels que les aumôneries dans les prisons ou les hôpitaux.
De plus, depuis 1988, les dons en faveur des religions peuvent être déduits de l'impôt sur le
revenu.
Dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, le Concordat de 1901est
resté en vigueur. Il n’y a donc pas de séparation ni pour les biens ni pour les ministres des
cultes.
107
§ 2 - CITOYEN ET RELIGION
a) Manifestation
La liberté est la plus grande à l’intérieur des édifices du culte. Elle connaît des limites à
l’extérieur.
b) Sanction
En second lieu l'article 32 de cette même loi sanctionne « ceux qui auront empêché, retardé
ou interrompu les exercices d'un culte par des troubles ou désordres causés dans le local
servant à ces exercices ».
a) Le foulard islamique
La rentrée scolaire de 1989 fut agitée par l’ « affaire des foulards islamiques ». La controverse
portait sur la possibilité pour certaines jeunes filles de confession islamique de porter le
foulard. Fallait-il l’interdire au nom du principe de laïcité c’est à dire de neutralité ?
Appelé par le ministre à rendre un avis, le Conseil d'État, statuant en Assemblée générale,
trancha (avis du 27 novembre 1989).
Le port, par les élèves, dans les établissements scolaires, de signes par lesquels ils entendent
manifester leur appartenance à une religion « n'est pas par lui-même incompatible avec le
principe de laïcité, dans la mesure où il constitue l'exercice de la liberté d'expression et de
manifestation de croyances religieuses ».
Mais l'avis s'attache à définir les limites de cette liberté :
Elle doit s'exercer « dans le respect du pluralisme et de la liberté d'autrui, et sans qu'il soit
porté atteinte aux activités d'enseignement, au contenu des programmes et à l'obligation
d'assiduité ».
De plus cette tolérance « ne saurait permettre aux élèves d'arborer des signes d'appartenance
religieuse qui, par leur nature, par les conditions dans lesquelles ils seraient portés
individuellement ou collectivement ou par leur caractère ostentatoire ou revendicatif,
constitueraient un acte de pression, de provocation, de prosélytisme ou de propagande »
Il revenait donc aux établissements de fixer, dans leur règlement intérieur, les modalités
d'application de ces principes et limites.
Le Conseil d’Etat intervint alors au contentieux pour trancher les nombreux litiges nés de
l’application de certains règlements. Ainsi, il a annulé, parce que « générale et absolue », la
disposition du règlement intérieur d'un établissement scolaire interdisant le « port de tout
signe distinctif, vestimentaire ou autre, d'ordre religieux, politique ou philosophique » (CE,
12 novembre 1992, Kherouaa ; CE, 14 mars 1994, Mlle Yilmaz), mais a admis les
restrictions apportées par le règlement intérieur d'un autre établissement, dès lors que ces
restrictions n'avaient ni pour objet ni pour effet d'énoncer une interdiction générale et absolue
(CE, 10 mars 1995, M. et Mme Aoukili). Aujourd’hui il est question de légiférer en la
matière.
Un certain nombre d’élèves ont mis en avant le respect de fêtes religieuses pour s’absenter.
Des refus ont été ici et là opposés. Dans ces conditions la question est venue devant le Conseil
d’Etat. Il a estimé que l'obligation d'assiduité ne peut avoir pour objet et pour effet d'interdire
aux élèves qui en font la demande de bénéficier individuellement des autorisations d'absence
nécessaires à l'exercice d'un culte ou à la célébration d'une fête religieuse, à condition que ces
109
absences soient compatibles avec l'accomplissement des tâches inhérentes à leurs études et
avec le respect de l'ordre public dans l'établissement (CE, ass., 14 avril 1995, Consistoire
central des Israélites de France et autres ; CE, Ass., 14 avril 1995, M. Koen)
Deux libertés sont ici essentiellement en cause, la liberté syndicale et le droit de grève.
La liberté syndicale est dans le Préambule de la Constitution de 1946 : « Tout homme petit
défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son
choix»...
Le Conseil constitutionnel a fait référence à plusieurs reprises à cette liberté (décisions 81-
127 DC des 19 et 20 janvier 1981, Sécurité et Liberté ; 82-144 DC du 22 octobre 1982,
Irresponsabilité pour faits de grève). Il n’a cependant affirmé sa valeur constitutionnelle
que par sa décision 89-257 DC du 25 juillet 1989, Prévention des licenciements
économiques. Cette liberté présente en réalité deux facettes.
Elle consiste dans la liberté des syndicats de se créer, de s'organiser et d'agir. Il s’agit de ce
que l’on appelle le « droit syndical ». Selon l’article 34 de la Constitution c’est le législateur
qui fixe « les principes fondamentaux du droit syndical ».
L'exercice du droit syndical est reconnu « dans le respect des droits et libertés garantis par la
Constitution de la République, en particulier de la liberté individuelle du travail » (art. L 412-
1 du Code du travail), ce qui conduit le Conseil constitutionnel à concilier la liberté syndicale
avec d'autres principes à valeur constitutionnelle.
Dans sa décision précitée du 25 juillet 1979, le Conseil constitutionnel, affirme que le droit de
grève « a des limites », le législateur étant habilité à fixer celles-ci « en opérant la
conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels dont la grève est un moyen
111
et la sauvegarde de l'intérêt général auquel la grève peut être de nature à porter atteinte »,
c'est-à-dire la continuité des services publics.
Plusieurs catégories de personnels ont vu leur droit de grève limité par des lois. C’est le cas
des personnels de police (loi du 28 septembre 1948), des ceux des services extérieurs de
l'administration pénitentiaire (ordonnance du 6 août 1948), de ceux des services de
transmission du ministère de l'intérieur (loi du 31 juillet 1968), les militaires (loi du 13 juillet
1972), des magistrats (mais seulement si la grève est « de nature à arrêter ou entraver le
fonctionnement des juridictions », (ordonnance du 22 décembre 1948).
C’est le cas à l'égard des agents « participant à l'action gouvernementale » (emplois supérieurs
de l'administration : CE, 16 décembre 1966, Syndicat national des fonctionnaires des
préfectures) ou « assumant des fonctions d'autorité » (CE, 13 novembre 1992, Syndicat
national des ingénieurs de l'aviation civile) ou encore les « agents de sécurité » (préservant
la sécurité des personnes et des biens, par exemple certains agents dans les services
hospitaliers).
Les « grèves surprises », les « grèves tournantes », les grèves du zèle, sont interdites par la loi
du 31 juillet 1963 (art. L. 521-2 et s. du code du travail). De plus, le dépôt d'un préavis de
cinq jours francs avant tout déclenchement d'une grève est obligatoire.
Comme cette exigence peut facilement être tournée par des préavis à répétition, la loi du 30
septembre 1980 a interdit aux organisations syndicales de déposer un nouveau préavis avant
l'expiration du délai du précédent préavis.
L’exigence d'un « service minimum » s'applique à certains services publics : le service de
sécurité de la navigation aérienne (loi du 31 décembre 1984 rétablissant le droit de grève qui
avait été interdit aux contrôleurs - devenus ingénieurs - de la navigation aérienne par la loi du
2 juillet 1964) ; le service public de la radiodiffusion et de la télévision (loi du 30 septembre
1986).
Le juge considère certaines formes de grève comme des abus du droit de grève, par exemple,
les « arrêts de travail répétés et de courte durée » perturbant gravement le fonctionnement
d'une entreprise (Cass. soc., 7 janvier 1988, Fleuret et autres).
Raymond FERRETTI
Maître de conférences à l’Université de Metz
Mai 2003
BIBLIOGRAPHIE
Section 2 - La sûreté____________________________________________________ 60
§ 1 - Les principes garantissant la sureté___________________________________ 61
A - Le principe du droit au juge _______________________________________ 61
a) Un juge indépendant ____________________________________________ 61
b) Un juge équitable ______________________________________________ 62
B - Les principes du droit pénal _______________________________________ 63
a) Le principe de la légalité des délits et des peines ______________________ 63
b) Le principe de la non rétroactivité des lois pénales ____________________ 64
c) Le principe de la présomption d'innocence___________________________ 64
§ 2 - L’encadrement des mesures privatives de liberté _______________________ 65
A - La garde à vue __________________________________________________ 65
a) Les limites de la garde à vue ______________________________________ 65
b) Les garanties du gardé à vue______________________________________ 66
117
A - Exercice_______________________________________________________ 89
a) La déclaration _________________________________________________ 89
b) L’interdiction _________________________________________________ 89
B - Sanctions ______________________________________________________ 90
a) Pénales_______________________________________________________ 90
b) Civiles _______________________________________________________ 90