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NOTE DE PROGRAMME

« Ce n'est que si tu comprends bien la forme que tu comprendras l'esprit » disait Schumann dans ses Règles du
Musiciens et ce n'est certainement pas Brahms qui le contredirait ! Ainsi pour le concert de ce soir, trois jeunes
et talentueux interprètes : Adam Laloum ( Piano ), Raphaël Sévère ( Clarinette ) et Victor Julien-Laferrière
( Violoncelle ) nous proposent les Trois Fantasiestücke pour clarinette et piano opus 73 de Robert Schumann
suivient du Trio pour clarinette, violoncelle et piano opus 114 de Johannes Brahms. Un programme à la fois
marqué par une profonde amitié et filiation entre les deux compositeurs, une certaine évolution du romantisme
allemand, ainsi qu'une volonté commune d'écrire pour la clarinette, un instrument qui bénéficiera d'inombrables
innovations techniques tout au long du XIXème siècle.

C'est en 1849 que Schumann compose les Fantasiestücke. Cette « année féconde » comme dirait Rémy Stricker
voit la santé du compositeur rechuter, sans que son inspiration soit affectée : « c'est mon année la plus fertile.
Je puis m'estimer heureux d'avoir eu tant de forces et d'ardeur au travail en ces temps difficiles » ecrira-t-il le 10
Avril 1849 à son ami Hiller. En effet Schumann perd son frère Karl et subit l'insurrection de Dresde lors de
cette même année, cependant il compose vingt nouvelles œuvres dont Manfred et Requiem pour Mignon. Il est
alors agé de 39 ans.

Les trois Fantasiestücke ( qui auraient été écrites en deux jours ) sont très courtes et de caractères très changeants
presque schizophréniques. La première, Zart und mit Ausdruck ( délicat et expressif ) en 4/4 commence en un la
mineur à la fois très emprunté, mélancolique, parfois rêveur. La pièce se termine tout de même sur une pointe
d'espoir, en la majeur. La clarinette se fond parfaitement dans les harmonies du piano, assurant à la fois un legato
permanent ainsi qu'une expression sans relâche. La seconde, Lebhaft, leicht ( vivant et léger ) reprend la tonalité de
la majeur cette fois, pour exprimer un caractère jovial, naïf voir presque populaire. La mesure demeure encore à 4/4
mais l'accompagnement du piano est beaucoup plus enjoué et chromatique qu'auparavant. Les deux instruments
dialoguent également davantage. Enfin, la troisième Rasch und mit feuer ( rapide et avec feu ) toujours en la majeur
et en 4/4 diffère par une énérgie passionnée et triomphale. Les interprètes y sont mis à rude épreuve comme en
témoigne la partie virtuose et orchestrale du piano assurèment écrite pour Clara Wieck. La pièce termine en la
mineur par effet de miroir avec la première.

Les Fantasiestücke furent créées en janvier 1850 à Leipzig. Schumann précisera dans ses écrits que la clarinette peut
être remplacée par un violon ou un violoncelle.
« Je pensais qu'il apparaîtrait et devait apparaître un jour, quelqu'un qui serait appelé, lui, à rendre d'une façon idéale
la plus haute expression de l'époque, quelqu'un qui nous apporterait la perfection magistrale. Et il est arrivé, il a pour
nom Johannes Brahms ; il est venu de Hambourg. » voilà tout le bien que pensait Schumann de Brahms après leur
première rencontre. Jusqu'à la mort de Robert pour qui il avait un immense respect, Brahms resta proche de la
famille Schumann.

Brahms composa ses deux premières œuvres de musique de chambre faisant intervenir la clarinette en 1891, il s 'agit
du Trio opus 114 et du Quintette opus 115. En effet, c'est lors d'un voyage à Meiningen que le compositeur rencontre
Richard von Mühlfield illustre clarinettiste de l'orchestre ducal. Brahms impressionné, demande alors à son nouvel
ami de lui montrer toutes les possibilités de l'instrument et fera la création de ses deux nouvelles œuvres au piano
accompagné de Mülhlfield, Hausmann au violoncelle et deux membres de l'orchestre de Meiningen.

Le trio est en quatre mouvements et voyage entre un caractère élégiaque et passionné. Le premier mouvement, en la
mineur est un Allegro en forme sonate à 2/4. Dans cette forme sonate, le développement est très bref contrairement
aux habitudes de Brahms, on y ressent également une nette volonté de contrapuntisme de la part du compositeur. Le
second mouvement est un Adagio en ré majeur à 3/4 d'un caractère rêveur faisant dialoguer la clarinette et le
violoncelle. Le troisième, Andantino grazioso est lui un Menuet/trio en la et ré majeur . Enfin le Finale, Allegro en la
mineur à 2/4 et 6/8 est construit sur le schèma d'une forme sonate, mais la répartition des thèmes y est peu commune.
Pour reprendre les mots de Mandyczewski « c'est comme si les instruments étaient amoureux les uns des autres ».
BIBLIOGRAPHIE

1. Sources primaires

• Robert Schumann, Fantasiestücke fur klavier und klarinette ( partiton, Urtext, Editeur : Ernst Herttrich,
Doigtés : Hans-Martin Theopold. )

• Johannes Brahms, Trio en la mineur opus 114 pour piano, clarinette ( ou alto ) et violoncelle ( partition,
Urtext, Editeur : Monica Steegman, Doigtés : Hans-Martin Theopold. )

• Journal Intime de Clara et Robert Schumann ( réédité en Avril 2009 avec Brigitte François-Sappey,
Buchet-Chastel, 296 pages )

• Ecrits divers sur la musique par Robert Schumann ( traduits et choisis par J-G Prod'homme, Archives
Karéline parut chez J et R Wittman, Paris, 1946, 64 pages )

• Sur les musiciens de Robert Schumann ( traduit par Henry de Curzon, préface de Rémi Jacobs, Stock
Musique, Evreux, 1979, 325 pages )

2. Sources secondaires

• Schumann Chamber Music ( CD, Australian Eloquence, Septembre 2013, Franklin Cohen et Vladimir
Ashkenazy )

• Trios pour clarinette ( CD, Saphir Productions, Septembre 2009, Florent Pujuila et Romain
Descharmes )

• Brahms, sa vie et son œuvre ( par Karl Geiringer, traduit par Marie-Anne Boehm-Trémeau, Buchet-
Chastel, Paris, Avril 1982, 317 pages )

• Brahms ( par Claude Rostand, Fayard, Paris, 1978, 725 pages )

• Schumann ( par Sylvie Oussenko, Eyrolles, Paris, Novembre 2009, 181 pages )

• Robert Schumann,, le musicien et la folie ( par Rémy Stricker, Gallimard, Paris, Janvier 1996, 252
pages )

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