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Littérature

Notes sur une interprétation autonymique de la littérarité : le mode


du "comme je dis"
Josette Rey-Debove

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Rey-Debove Josette. Notes sur une interprétation autonymique de la littérarité : le mode du "comme je dis". In: Littérature, n°4,
1971. Littérature. Décembre 1971. pp. 90-95;

doi : 10.3406/litt.1971.2530

http://www.persee.fr/doc/litt_0047-4800_1971_num_4_4_2530

Document généré le 01/06/2016


Josette Rey-Debove, Paris III.

NOTES SUR UNE INTERPRÉTATION AUTONYMIQUE


DE LA LITTÉRARITÉ :
LE MODE DU « GOMME JE DIS »

Parmi toutes les hypothèses avancées pour rendre compte du fait


littéraire, celle qui fait le mieux l'unanimité, et qui est aussi la plus ancienne,
et la plus triviale (accessible au profane), consiste à poser que la littérature
est avant tout une forme : « L'indice organisateur de la poésie est l'intention
dirigée sur l'expression verbale » (Jakobson, Change 3, p. 39).
Que la littérature soit avant tout une forme, ou que l'accent soit mis
sur la forme, ou que le signifiant y joue un rôle primordial constituent
des manières de parler extérieures au texte (métatextuelles). Plutôt que
d'envisager ce qu'EST la littérature, nous nous attacherons à déceler ce
que SI GNIFIE le texte littéraire en général, considéré de ce point de vue,
puisque l'être d'un texte est de signifier.

L'autonymie.

Le modèle sémiotique qui rend compte du fait qu'un signe est employé
en « mettant l'accent » sur sa forme est l'autonymie, puisqu'un signe auto-
nyme se signifie lui-même, signifiant et signifié. Soit la phrase :

Hugo emploie faucille d'or pour désigner la lune.

Dans cet exemple, faucille d'or signifie non pas « faucille d'or » mais
« le terme faucille d'or dont le signifiant est [faucille d'or] et le signifié
* faucille d'or ' ». Faucille d'or n'a pas la formule sémiotique ordinaire
E(C) — expression liée à un contenu — mais E(EG), où le contenu est (EC),
c'est-à-dire le signe lui-même 1. C'est le nom métalinguistique de l'occurrence
/faucille d'or/. Le nom métalinguistique est homonyme de l'occurrence.
Le fait que le signifié de ce nom inclue le signifiant (C = (EC)) entraîne
plusieurs conséquences :
1. Un signe autonyme n'a pas de synonyme, et toute substitution
est impossible.
2. Un mot autonyme a des caractères communs avec l'onomatopée;
en effet l'onomatopée, au sens strict, n'a d'autre contenu que son expression :
(C) = E, c'est un bruit rapporté.

1. Le plan du contenu (signifié) sera toujours entre parenthèses. La substance


de l'expression est différente. La tradition littéraire insiste sur la substance phonique.

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onomatopée E(E) le miaou du chat ... où C = E
signe antonyme E(EC). j le aleajacta est de César . où G = zéro *
le faucille d'or de Hugo, où C = «faucille d'or»
signe ordinaire E(C). . la queue du chat
le sort en est jeté
le talent de Hugo

L'autonymie est un système sémiotique qui fonctionne pour toutes


les séquences du langage qu'il nominalise, unités de la première et de la
seconde articulation (la syllabe ro, la rime -amment, le suffixe -ard, le mot
lune, l'expression faucille d'or, la phrase i7 va venir, la fable Un loup se
désaltérait...) et même « figures » bloom fleldiennes (les mots sans savoir
que). La séquence autonyme se signifie tantôt comme séquence du message
(ses peut-être m'exaspèrent), tantôt comme unité du code (environnement
est à la mode) 3.
Le discours rapporté en style direct est autonyme :
II m'a dit : < Je viens. »

En effet, il est impossible de substituer un synonyme à « Je viens »,


à la différence du discours rapporté en style indirect :

II m'a dit qu'il venait,

qui peut être remplacé par /II m'a dit qu'il viendrait/, /II m'a dit qu'il
allait venir/, /II m'a annoncé sa venue, son intention de venir/, etc. 4. On
perçoit mieux encore la différence de statut entre style direct et indirect
lorsque l'énoncé rapporté est extérieur au système : /II m'a dit : « I'm
coming »/, énoncé qui doit être traduit, en style indirect : /II m'a dit qu'il
venait/.
Est-ce à dire que la littérature, en tant que signifiant son propre
signe (donc son signifiant) soit une séquence autonyme? Non, car la séquence
autonyme ne peut se manifester que dans un contexte métalinguistique
qui l'enferme et lui confère ce signifié. L'œuvre littéraire n'a pas la forme
/Je (l'auteur) dis : « Cette faucille d'or dans le champ des étoiles »/, non
plus que la forme /les mots cette faucille d'or dans le champ des étoiles/.
La littérature n'est pas un texte métalinguistique qui nous parle des
signes (tels les textes des linguistes et des critiques littéraires).

La connotation autonymique.

Il existe un modèle sémiotique plus complexe, résultante d'un


télescopage de l'emploi ordinaire des signes et de leur emploi autonymique, par

2. Le signe autonyme en langue étrangère a, dans le système, la formule E(EC)


où G = zéro, puisque le signifié est par définition inconnu. Cet exemple montre le
passage de l'onomatopée au mot autonyme du système; aléa jacta est joue en français
le rôle d'un bruit rapporté (un « signifiant » qui, faute de signifié, deviendrait bruit).
3. Pour Jakobson, l'emploi autonymique est un message qui renvoie au code
(Essais de Linguistique générale, 1963, p. 178). Cette interprétation est trop
particulière.
4. En cela encore, nous nous écartons de l'interprétation de Jakobson, qui
amalgame les deux types de discours rapporté (direct et indirect) et ne considère pas que
le discours rapporté en style direct est autonyme.

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lequel l'encodeur emploie pour parler du monde (et non des signes) une
séquence rapportée, de telle sorte qu'il emploie et qu'il cite tout à la fois.
Le langage-objet est réintégré (et non enchâssé) dans le langage-instrument :
c'est le cumul de E(EG) et de E(C). Soit la phrase :

Par le temps qu'il fait, nous n'aurons guère cette nuit de « faucille
d'or dans le champ des étoiles! »

Le signifié est alors la somme de « (nous n'aurons guère cette nuit


de) lune dans un ciel étoile » et de « Hugo a dit : ' faucille d'or dans le
champ des étoiles ' », autrement dit « nous (n'aurons guère cette nuit de)
faucille d'or dans le champ des étoiles, comme dit Hugo ».
Nous appelons ce modèle sémiotique « connotation autonymique »,
car la séquence ne se signifie pas elle-même, mais se connote par un effet
de sens (c'est un sens de la séquence ordinaire, et non son homonyme
substantive). On peut lui attribuer la formule E (C(EC)) qui se lit / la lune
dans le ciel étoile que Hugo appelle faucille d'or / — où faucille d'or autonyme
est représenté par (EC). On remarquera le lien entre la formule générale de
la connotation EC(C) — le signifiant est un signe — et la formule E (C(EC)).
La première serait plus justement notée £02(02)- Dans la seconde, les E
et les C ont constamment la même valeur qui tient à la réflexivité du
phénomène autonymique. La connotation autonymique est une connotation
EC1(C2) où C2 = EC. C'est le type de connotation formelle par excellence,
qui échappe au caractère vague qu'on attache d'ordinaire à cette notion
controversée.
Or ce procédé recouvre trois modes du dire, selon l'énoncé rapporté.
Ou bien l'énoncé rapporté est celui d'une personne (non-je) sur le mode
du « comme il dit », et l'on a affaire, notamment, à l'intertextualité (dialogue
avec d'autres textes), comme dans l'exemple ci-dessus. Ou bien c'est celui
du code linguistique idéologique que le « je » n'assume pas complètement,
sur le mode du « comme on dit »;le discours devient alors un enchaînement
de lieux communs à forme commune (fréquente) :
Elle se pose en « femme incomprise * ».

On aboutit au « dictionnaire des idées reçues », qui entérine l'oppression


de l'idéologie et de ses formes linguistiques. Enfin, le discours rapporté
peut consister en citations de soi-même : la conjonction de / j'invente le
mot misandre / et de / je ne suis pas hostile aux hommes / donne :
Je ne suis pas « misandre »,

qui doit être lu / je ne suis pas misandre, comme je dis (ou, si vous me
passez l'expression) /. Le « comme je dis » s'oppose au « comme on dit »
dans la mesure où il violente le code des unités linguistiques en même temps
que l'idéologie (qui n'envisage pas de parallélisme entre l'attitude misogyne
et l'attitude misandre).

5. Les locutions et les proverbes connotent naturellement leur signe sur le mode
du « comme on dit », et ne prennent jamais de marques spéciales (guillemets, etc.).
Ceci vient du fait que ce sont des unités du code, alors qu'en tant que groupes de mots
et que phrases, ils devraient être des productions du code (seuls le mot et le morphème
étant des unités codées parmi les unités signifiantes). L'apprentissage des unités du
code, les mots essentiellement, se fait sur le mode du « comme on dit ».

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Le mode du « comme je dis ».

On avancera l'hypothèse que la littérature, à la différence du discours


ordinaire, s'énonce constamment sur le mode du « comme je dis » 6. Cette
hypothèse rend compte de plusieurs autres hypothèses éparses bien connues,
qu'elle rassemble.
1. La littérature met l'accent sur le signifiant. Le signifiant est présent
dans le signifié du texte E (C(EC)), bien que le texte parle du monde et
non de la langue. Ainsi bohème et poème ont une partie de leur signifié
en commun, qui est oème [03m]. Or le discours, pour être sémantique,
dans les langues naturelles, doit manifester une certaine redondance du
contenu; il faut donc envisager, si l'expression devient contenu, que la
redondance de la forme est nécessaire à la sémanticité du texte. Tout comme
dans le discours ordinaire, la répétition du signifié (G) ou des règles sélectives
des mots (engendrement d'un champ sémantique) permet la compréhension
de l'énoncé, dans le discours de la connotation autonymique, l'apparition
des allitérations, des échos, des rimes, des paragrammes, etc., joue le
même rôle proprement sémantique : bohème aide à comprendre poème.
D'où l'on peut concevoir que la poétique est « une hésitation entre le
son et le sens » (Valéry), puisque ce sont deux signifiés, et « un écart entre
le signe et le signifié » (Genette), l'écart fondamental étant celui que creuse
le signifié autonymique.
Le fait qu'une séquence à connotation autonymique ne puisse avoir
de synonyme (à cause du signifiant inséré dans le signifié) rend caduque
toute analyse du texte qui le paraphraserait, et pose le problème de la
traduction en langue étrangère. La traduction doit retrouver une
équivalence non de (C) mais de (C(EC)), et oblige donc à la création d'un nouveau
texte. C'est pourquoi Michaël Riffaterre a pu dire : « La linguistique peut
analyser n'importe quel type de message, mais (...) la stylistique ne s'occupe
que des structures qui n'admettent aucune substitution » (The Stylistic
Function », 1964, p. 317). Cette impossibilité de substitution — synonyme,
paraphrase ou traduction — n'est pas sans évoquer le cas du nom propre,
qui a vraisemblablement (et naturellement en tout discours) la formule
sémiotique de la connotation autonymique : Hugo signifie « celui qui
s'appelle Hugo, Hugo comme on l'appelle ».
2. La littérature est toujours connotative (Johansen, in W. Busse, « La
sémiologie littéraire : la glossématique et la stylistique », Bulletin des
Jeunes Romanistes, n° 10, p. 37). Tout le monde s'entend là-dessus. On peut
dire que parmi toutes les connotations possibles, les unes sont «. mondaines »
(connotations de la substance du contenu) et les autres sont langagières
(connotations de la forme du contenu, et de l'expression). Les premières
ne sont pas propres à la littérature. La connotation autonymique rend
compte des secondes, les seules qui caractérisent la littérature (comme
constantes) et qui soient propres au système linguistique, opposé aux autres
systèmes signifiants où la « self reference » joue le rôle de l'autonymie.
3. La littérature use abondamment de métaphores, c'est « une métaphore

6. Ce caractère constitue une base constante qui est tantôt interrompue par de
véritables discours autonymes (ceux des personnages que l'auteur fait parler — et
qui relèvent d'ailleurs du type / Mon personnage dit X, comme je dis/), tantôt par des
connotations autonymiques sur le mode du « comme il dit » et du « comme on dit »,
et même un cumul du « comme je dis » sur le « comme je dis », lorsque l'auteur
présente une séquence avec des marques. L'important, c'est que l'autonymie s'y
manifeste continûment sous une forme ou sous une autre.

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continue » (Johansen, art. cité). Si la métaphore est un signe du type EC(C),
la métaphore que l'on peut qualifier de constante est bien celle où (C)
prend la valeur (EC), c'est-à-dire celle de la connotation autonymique
E (C(EG)). On emploie misandre, mais on signifie « misandre, comme je
dis » ou « la personne hostile aux hommes que j'appelle misandre ».
4. La littérature présente une relation code/message qui n'est pas celle
du langage ordinaire. Elle est caractérisée tantôt comme un message sans
code, tantôt comme un code sans message (Genette), c'est-à-dire que le
message s'identifie au code. C'est que le seul code qui soit connu (quoique
insuffisamment) est celui du discours E (C) qui met en relation les signifiants
et le monde (valeurs de vérité pour une culture donnée dans une langue
donnée). Les autres codes sont à construire : celui du discours E(EC), méta-
linguistique, mettant en relation les signifiants et le système linguistique,
qui permettrait de générer des énoncés métalinguistiques véritablement
grammaticaux et sémantiques (donc les théories linguistiques et leur
épistémologie), et celui du discours E (C(EC)) des énoncés littéraires, mettant
en relation le signifiant et le « monde modelé par le signe », qui permettait
de générer un énoncé littéraire sur un modèle de « compétence poétique »
(Bierwisch).
On peut envisager le code au sens strict (linguistique-dénotatif), et
la lecture littéraire nécessite alors la construction d'un « surcode » (Granger).
Ou bien l'envisager au sens large, et considérer que la littérature réalise
toutes les productions possibles du code (Kristeva), dans la mesure où
tous les éléments qui concourent au langage littéraire appartiennent au
système signifiant linguistique et non à d'autres (par exemple, graphismes
colorés, redondance sémiotique du mot rouge écrit à l'encre rouge). Dans
une optique purement linguistique, le message littéraire présenterait des
productions du code régies par des règles en partie originales, et les
unités du code auraient une formule sémiotique différente. Néanmoins,
ce qui fait difficulté, c'est l'acceptabilité : comment un texte pourrait-il
être jugé comme « plus ou moins poétique » (plus ou moins bien formé
poétiquement), alors que la notion de compétence poétique idéale (la
compétence est déjà le point faible de la grammaire generative) s'oppose
radicalement au mode du « comme je dis » (performance)?
5. Le discours littéraire projette l'axe paradigmatique sur l'axe syntagma-
tique. « La fonction poétique projette l'axe de la sélection sur l'axe de la
combinaison » (Jakobson, Essais de Linguistique générale, 1963, p. 220).
Il faut entendre par là une sélection théorique (non psychologique) de
l'encodeur à tous les niveaux linguistiques : non seulement celui du mot
(équivalence, similarité, dissimilarité, synonymie, antonymie), mais celui
du morphème (mis-andre) et du phonème (poème j bohème). Or, dire que l'axe
de la sélection est projeté sur l'axe de la combinaison, c'est admettre que
les paradigmes de toutes les unités choisies se répandent sur l'axe syntag-
matique du signifié et du signifiant selon le principe évoqué plus haut
des conditions sémantiques d'une lecture de E (C(EC)) '. La littérature,
en connotant le signe, reverse le discours sur le signe dans le discours sur
le monde : c'est le paradigme métalinguistique, avec ses définitions différen-

7. Un des exemples les plus connus de ce phénomène est la prédication défini-


tionnelle / Un X est un Y qui... /, où la définition appartient à la fois à l'axe
paradigmatique (synonyme) et syntagmatique, et qui produit sur ce dernier axe une
tautologie. La définition devrait donc illustrer l'aspect sémantique « équivalence » de la
littérature (définition d'un mot, d'un thème). La métaphore, d'ailleurs, peut être
considérée comme une définition transposée, et la métonymie comme une définition
partielle.

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tielles du signe, qui organise le texte, et qui permet de dégager des structures
formelles. De ce point de vue, une étude linguistique du texte est non
seulement souhaitable, mais obligatoire.
Et si l'on caractérise aussi la littérature par sa « finition structurale »,
par la « clôture du texte », c'est parce que la plupart des paradigmes sont
fermés (on peut énumérer leurs éléments) : les univers du discours littéraire
(champs sémantiques ouverts) se trouvent structurés par des champs
linguistiques fermés.
6. La littérature est le lieu privilégié de la « subversion du signifié par
le signifiant et du sujet par le langage » (Lacan). Le signifié attaché au code
linguistique est codé dans le système sémio-culturel; un état de langue
est doublement codé : a) dans ses relations entre signifiant et signifié
(non o arbitraires »); b) dans ses relations entre signifié et référence. Ce
double codage fonctionne à plein dans les proverbes et les lieux communs;
« comme on dit » implique « comme on pense dans telle forme ». Dans la
mesure où la littérature relève du « comme je dis », c'est ce double code,
en tant que réalité sociale, qui peut se trouver mis à mal, c'est-à-dire
l'idéologie. Le signifié se trouve subverti par les connotations personnelles
du signe (forme et substance).
Mais en retour le sujet, le « je » qui s'oppose au « non-je » (et
spécialement à l'oppression de la communauté des « non-je ») est lui-même double :
le moi intégré à la communauté, et l'autre « je » inconscient qui s'exprime
par des voies détournées. Les relations de similarité, d'équivalence, d'anto-
nymie, etc., ne sont pas seulement celles que décrit la linguistique (code
commun) et celles qui sont choisies ou produites par le sujet, elles se forment
aussi à partir du réseau associatif personnel inconscient par lequel le sujet
signifie ce qu'il n'avait pas l'intention de signifier : l'auteur cite à son insu
cet « autre » qui parle par sa bouche. La littérature dépasse à la fois la
société et le sujet.
7. La littérature est un discours de l'homme sur l'homme. Cette définition
traditionnelle est à rapprocher du mot d'Alain : « Qui saurait
parfaitement sa langue saurait tout sur l'homme. » Si la littérature connote
son signe, elle signifie notamment le langage, c'est-à-dire l'homme (qu'il
parle de lui-même ou non). Sa tâche est donc de dire tout le dicible pour
construire une image de l'homme, en faisant produire au code tout ce
qu'il peut produire.

Nous pensons donc qu'une première approche de la littérarité doit


obligatoirement tenir compte de la conjonction de l'emploi autonyme et
de l'emploi connotatif dans ce que nous avons appelé la connotation auto-
nymique. La littérature participe à la fois du métalangage et de la
connotation, les deux systèmes sémiotiques mis en valeur par HjelmslevetBarthes.
Mais l'autonymie est elle-même une modalité très particulière du métalangage ;
c'est un métalangage réflexif : dans / Hugo emploie faucille d'or pour désigner
la lune /, faucille d'or est un nom métalinguistique homonyme de l'occurrence
(réflexivité), alors que dans / Hugo emploie une expression métaphorique
pour désigner la lune /, expression métaphorique est un nom métalinguistique
non réflexif d'une classe d'occurrences d'expressions métaphoriques diverses.
C'est la modalité reflexive qui rend compte d'un des aspects de la littérarité,
et non l'autre.
D'autre part, la situation particulière de la connotation autonymique
sur le mode du « comme je dis » introduit le sujet de renonciation. Ce sujet
(conscient ou inconscient) fait de chaque texte un message qui recule
toujours un peu plus les limites du dicible, donc du signifié.

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