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DICTIONNAIRE

HISTORIQUE ET CRITIQUE

DE PIERRE BAYLE
NOUVELLE EDITION,
AUGMENTÉE DE NOTES EXTRAITES DE CH VUFEPlÉ JOLY, LX niONNOIE
,
,

LEUUCHAT, L.-J. LECiERC PROSPER MARCHAND, ETC., ETC.


,

TOME PREMIER.

PARIS,
DESOER, LIBRAIRE, RUE CHRISTINE.
1820.
AVANT-PROPOS.
««^'X^^ %%«'««/« Và«<«%4 1%/^'%

V>iE n'est qu'avec le dernier volume que je pourrai livrer un Dis-

cours préliminaire , ciui n'a pas été prorais par le Prospectus , mais
que je ne dois pas moins ,
puisqu'il est nécessaire. Tout le inonde
sait qu'un discours préliminaire ne peut être fait qu'après le tra-
vail entièrement achevé. Je suis aussi obligé d'attendre jusqu'à la

fin de l'entreprise pour pouvoir mentionner toutes les personnes


^ qui m'auront aidé dans mes travaux , et qui consentiront à être
\ik nommées.
^ Mais, s'il m'est impossible de leur donner dès à présent un té-
moignage authentique de ma reconnaissance , il est nécessaire de
donner quelques explications sur mon travail,

o Je dois beaucoup de remercîmens aux journalistes qui ont an-

^ nonce mon Prospectus : leur bienveillance pour moi a été extrême ;

2 mais à l'un d'eux il a échappé une petite inexactitude. Il donne à

entendre que je reproduirai toutes les variantes. Je ne les ai pas

î^ promises , et je n'en relèverai que quelques-unes.


Le Prospectus annonce que cette réimpression de Bayle sera en-
J2
hi richie de notes extraites de Chaufepié, Joly, la Monnoie, L.-J. Le-
clerc, Leduchat, Prosper Marchand, etc. Ces auteurs sont tres-

connus. Je crois cependant devoir indiquer précisément quels sont


ceux de leurs ouvrages que j'ai mis à contribution : ce sera facili-

ter à mes lecteurs le moyen de remonter aux sources. Ces rensei—

gnemens sont superflus pour le plus grand nombre ,


je le sais ;

mais c'est pour tous que je travaille; et, quelque petit que soit le

nombre de ceux qui en auront besoin , ces indications n'auront pas

été tout-à-fait inutiles. Je suivrai ici l'ordre alphabétique, qui est

celui dans lequel j'ai énuméré les auteurs ou les ouvrages.

BIBLIOTHÈQUE FRANÇAISE. Il ne s'agit point ici de l'ou-


i] AVANT-PROPOS.
vrage de l'abbé Goujet Paris 1 740-1 7 56
, , , dix-huit volumes in-12 ;

mais du journal publié à Amsterdam sous le titre de Bibliothèque


française , ou Histoire littéraire de la France , lyaS-i 746 qua- ?

rante-deux volumes in- 12. Un anonyme a fait imprimer dans le


tome XXIX ,
pages i85-202 , et dans le tome XXX , pages i-25 des ,

Observations critiques sur le Dictionnaire historique et critique de


M. Bajle. Un partisan du philosophe de Rotterdam prit sa défense

par un article inséré dans le tome XXXIII ,


pages 32'^-35i , etc.

J'avais cru, pendant un temps que l'auteur des Observations


,
était

l'abbé Joly. Je fondais ma conjecture sur la ressemblance que je


trouvais entre des jîhrases de ces Observations et quelques-unes
des Remarques de l'abbé Joly sur les mêmes articles. Je présumais

( J^. ma note dans la. Biographie universelle tome XXI ,


,
page 6o5,
colonne 2 ) que l'auteur seul d'un article pouvait le copier sans le

citer. J'étais dans l'erreur. Joly ne fait pas tant de façons : au


moyen d'une mention faite dans sa préface^ il s'est cru permis de
passer sous silence , le plus souvent , les auteurs véritables des ob-
servations qu'il reproduit dans ses deux volumes. Or , comme son
livre n'est guère lu de suite , mais seulement consulté , il est d'au-
tant plus naturel de faire honneur à Joly de tout ce qu'il n'indique
pas comme étant d'autrui, que quelquefois il lui arrive de citer la

Bibliothèque française ^ et les autres critiques ses devanciers.

CHAUFEPIE. Cet auteur est surtout connu par son Nouveau.


Dictionnaire historique et critique pour servir de supplément ou de
continuation au Dictionnaire historique de Pierre Bajle , 1750-
1^56,' quatre volumes in-folio. C'est une traduction (avec correc-
tions et additions) d'articles ajoutés par les traducteurs anglais du
Dictionnaire de Bayle.

GUIB (Jean-Fréd.) , docteur en droit à Orange, au commence-


ment du XVIIF. siècle, a fait insérer dans le Mercure de no-
vembre 1IJ22 , tome II ,
page 23-29, ^^^ Remarques critiques sur
quelques articles de Bayle. Il est évident que Joly n'a pas eu con-
naissance de cet auteur ; car il ne l'a ni cité , ni dépouillé.

JOLY fit imprimer, en 1748, des Remarques critiques sur le


Dictionnaire de Bajle, en deux parties, formant un volume in-
AVANT-PROPOS. iij

folio. En lête de l'ouvrage il y a quelques pages consacrées à des

corrections et additions. Joly n'a guère fait que copier ses devan-

ciers , et il ne l'a pas toujours dit. Il a fallu un travail comme celui


dont je me suis chargé pour faire cette découverte. On ne doit
donc pas être étonné de voir Joly cité rarement. J'ai eu l'atten-
tion ,
presque toujours , d'indiquer l'auteur primitif de chaque

remai-que. Si j'ai un reproche à me faire, c'est peut-être d'avoir

laissé le nom de Joly à quelques notes qui , originairement , ne


sont pas de lui. Ces observations , au reste , ne diminuent en rien
le mérite du volume publié par Joly ; mais ce n'est pas à Joly qu'en

est le mérite.

JOURNAL DE TRÉVOUX. On distingue ordinairement sous ce

titre les Mémoires pour servir à V Histoire des Sciences et des

Beaux-Arts rédigés par .,


des jésuites, et imprimés d'abord à Tré-

voux ,
puis continués à Paris. Le père Merlin y a fait insérer quel-

ques articles sur Bayle en décembre 1735, juillet lySô, avril,


mai août, et novembre 17 38.

JUGEMENS SUR QUELQUES OUVRAGES NOUVEAUX, par

l'abbé Desfontaines , de Mirault , Fréron et Destrées. Cet ouvrage


a onze volumes qui ont paru en 174^ et 1746.

LA MONNOIE. Les Remarques de cet auteur sur Bayle se trou-


vent dans trois ouvrages : \°. le Menagiana, 17 15, quatre volumes
in-i2, et ses réimpressions; 2°. les Jugemens des Savans ,
par
Baillet, édition de 1722, huit volumes in-4'' , ou 1725, dix sept
parties in-i2; 3°. la réimpression donnée en 1772 par Rigoley des
Juvigny, des BiJbliolhéques françaises de la Croix du Maine et

Duverdier. J'indique dans lequel de ces trois ouvrages se trouvent


les observations de la Monnoie que je citerai.

LECLERC (Laurent-Josse) n'est pas l'auteur de la Bibliothèque


universelle , de la Bibliothèque choisie , de la Bibliothèque an-
cienne et moderne. Ce dernier s'appelait Jean. 11 était contem-
porain de Bayle, et l'a plusieurs fois attaqué dans ses Bibliothèques.
Jean Leclerc sera cité quelquefois ; mais l'attention que j'aurai de
faire toujours précéder son nom de l'initiale de son prénom pré-
viendra toute confusion.
,

iv AVANT-PROPOS.
Laurent-Josse Leclerc ,
que le plus souvent je n'appellerai que
Leclerc donna en 1782 une Lettre critique sur le Dictionnaire de
,

^<y/e, un volume in-i2. Ses observations sont lourdes diffuses ,

présentées sans aucun ordre, et ne portent que sur un très-petit


nombre d'articles. Mais il a, depuis, revu, corrigé , augmenté
son travail; il a rangé ses notes par ordre alphabétique; et elles
ont ainsi été réimprimées à la suite de chacun des cinq volumes de
l'édition faite en 1734, à Trévoux (sous le titre d'Amsterdam), du
Dictionnaire de Bajle. L'auteur s'y montre ultramontain ; ce qui
ne fait pas grand'chose ici. La nouvelle forme qu'il a donnée à
ses notes en a fait un ouvrage curieux et instructif. Aussi est-ce

Leclerc qui a fourni à Joly la plus grande partie de ce qui compose


ses Remarques.

LEDUCHAT. Ses Remarques sur le Dictionnaire de Bayle


sont aux pages 145-217 du tome \" du Ducatiana
. , 1738, deux
volumes in-12.

MARCHAND (Prosper) a consigné vm très-petit nombre de criti-

ques de Bayle dans son Dictionnaire historique ,


qui fut publié en
1 758 par Allamand deux , parties in-folio. Il paraît d'abord singulier

de voir l'ouvrage d'un homme aussi savant que Prosper Marchand


fournir si peu d'observations sur Bayle. La surprise cesse quand
on se rappelle que Prosper Marchand, éditeur du Bayle de 1720,
consigna à la fin du quatrième volume des Remarques critiques
dont quelques-unes peuvent lui avoir été communiquées , mai?^

dont la majeure partie doit lui appartenir.

REM. CRIT. Les notes à la fin desquelles on trouvera ces abrévia-

tions sont celles que Prosper Marchand avait , comme je viens de le

dire , ajoutées à l'édition de 1720, et que les éditeurs subséquens mes


prédécesseurs ont avec raison reportées auprès des passages qu'elles
concernent. J'ai à l'occasion de ces remarques une observation à
faire. Ce sont les éditeurs de 1780 qui, les premiers, les ont
transposées et mises à la place que je leur ai conservée; mais, je
ne sais comment , ils ont oublié de rapporter la remarque critique
qui concerne J. Adam; et, ne s'étant pas aperçus de cette faute, ils

ne l'ont pas corrigée ; de sorte que cette remarque critique est to-
AVANT-PROPOS. v

taleraent omise dans leur édition. Il en est de même de la Remar-


que (C) de l'article de M. Bérault, etc. ; faute d'autant plus grave ,

que ce morceau est de Bayle. Pour quelques autres remarques


critiques qu'ils avaient oubliées , ils ont eu la ressource de les met-
tre par forme d'errata à la fin du second volume. Les éditeurs de

1 'j4<^ ont fait les mêmes fautes et omissions , avec V erratum, à la fin
du second volume , d'oii l'on peut conclure, ce me semble que cette
,

édition de 1740 est une réimpression faite au jour le jour , et sans

aucun travail préliminaire , ou du moins sans révision et confron-

tation avec les édition^ntérieures.

Les notes que j'ai ajoutées seront faciles à distinguer. J'ai laissé
les lettrines pour les notes du texte , les cbiffres arabes pour les

notes des remarques; les notes qui , dans les éditions antérieures

avaient des étoiles , des croix ou autres signes aujourd'hui inusités,


ont des étoiles entre parenthèses ., avec des chiffres supérieurs lors-
qu'il y en a plusieurs dans la même colonne.

C'est par des étoiles sans parenthèses ^ et avec chiffres arabes


supérieurs lorsqu'il y en a plusieurs dans la même colonne, que j'ai
indiqué les notes nouvelles ; lorsqvie les notes à ajouter portent sur

des notes, elles sont tout simplement ajoutées à la suite , entre


deux crochets. Je n'ai pas, je ne saurais trop le dire, la prétention
de corriger Bayle , ni de le suppléer ;
je me suis borné à extraire des
différens auteurs les remarques qui en valaient la peine. Il n'y
a guère de moi que la rédaction de ces notes ,
que j'ai faites les

plus courtes qu'il m'a été possible.


J'ai respecté l'ordre et l'orthographe adoptés par Bayle pour les

noms propres de ses articles : ainsi Ajax précède Aiguillon , et

\vRAULT vient avant Aitzema; Amyot , Amyraut et Amyrutzes sont


mis à la place qu'ils ne devraient occuper qu'étant écrits par un l.

J'insiste sur les mots qui ont un y, parce qu'on pourrait ne pas
apercevoir au premier coup d'œil cette disposition inusitée.
Le Prospectus promet la réimpression de toutes les pièces préli-
minaires , et cependant le premier volume distribué aujourd'hui ne
les contient pas. Deux raisons en sont cause : 1°. l'impatience des
souscripteurs; 2°. l'impossibilité expliquée plus haut de donner dès
à présent le Discours prélitninaire après lequel les pièces promises
, ,

vj AVANT-PROPOS.
doivent être immédiatement placées. Ne connaissant pas l'étendue
qu'aura le Discours préliminaire , il est impossible de garder le

nombre de pages qu'il remplira , et il serait ridicule de voir dans le

même volume deux numérotages en chiffres romains. Peu importe


d'avoir un peu plus tôt ou un peu plus tard ces pièces préliminaires,
dont aucune n'a besoin d'être lue avant le Dictionnaire. Les acqué-

reurs ne doivent avoir aucune inquiétude à cet égard. L'engage-


ment a été pris de ne pas leur faire payer les volumes au delà de
seize, si l'on dépassait ce nombre; et cet engagement sera tenu.

Mais je donnerai au moins aujourd'hui , sauf à les reproduire en

temps et lieu, les dix-neuf vers ,


peu connus , de Limiers , sur le

système de Law.
BEUCHOT.

VERS
GRAVES AU BAS DU PORTRAIT DU DUC D'ORLÉANS , RÉGENT,

DANS QUELQUES EXEMPLAIRES DE l'ÉDITION DE I72O.

Cesse de t'affliger, ô France!


Assez et trop long-temps ont duré tes malheurs;
Tes trésors épuisés, tes peuples sans finance,
Assez et trop long-temps ont fait couler tes pleurs;
Ouvre ton cœur à l'espérance
Par un rare bienfait ton destin va changer :

Philippe voit tes maux, cesse de t'affliger.

Ce prince généreux, sensible à tes alarmes.


Va tarir pour jamais la source de tes larmes.
Vois comme ,
par ses soins , en métal transformé ,

Le papier enrichit le Français alarmé;


Vois ce pays lointain d'où renaît l'abondance;
Vois renaître à la fois la douce confiance;

Vois ce riche palais où , , sur un fonds certain


Tout ce peuple, à l'envi, court assurer son gain ;

Vois les arts en honneur; vois partout la Sagesse


Animer du Régent la vigilante adresse :

Tels sont , sous son pouvoir, les essais inouïs


Du nouveau règne de Louis.

H. -p. DE limiers.
DISCOURS PRÉLIMINAIRE
DE LA ONZIÈME ÉDITION
DU

DICTIONNAIRE DE BAYLE

Ijwle, décrié par un certain nombre .d'écrivains plus ou


moins obscurs , a obtenu aussi quelques suffrages illustres.
Le roi de Prusse disait que le Dictionnaire liistoiique et cri-
tique « est le Bréviaire du bon sens , et que c'est la lecture
la plus utile que les personnes de tout rang et de tout état
puissent faire. »
Voltaire , qui lui a donné place dans son Catalogue des écri-
vains du siècle de Louis A//^, lui rend hommage dans plu-
sieurs de ses éci^its, soit en vers, soit en prose. Dans ses
Lettres à S. A. monseigneur le prince dé^^ (Brunswick) , il
le proclame c le premier des dialecticiens et des philoso-
)) plies sceptiques. » « Ses plus grands ennemis, ajoute- t-il,
» sont forcés d'avouer qu'il n'y a pas une seule ligne dans
» ses ouvrages qui soit un blasphème évident contre la re-
)) ligiou chrétienne ; mais ses plus grands défenseurs avouent
» que, dans les articles de controverse, il n'y a pas une
» seule page qui ne conduise le lecteur au doute et souvent
)) à l'incrédulité. »

Ailleurs Voltaire s'écrie :

Qu'a servi contre iJayle une inf;hne cabale?


Par le fougueux Jurieu Bajle persécute'
,

Sera des bons esprits à jamais respecté.

Le Dictionnaire compose de deux


historique et critique se
parties : remarques. Ce sont ces remarques
le texte et les
qui ont valu à l'auteur des éloges môme de ses antago-
nistes.
« Les titres de son Dictionnaire, sont, dit Crousaz , un
,

j- DISCOURS PRÉLIMINAIRE
» tissu alphabétique de crochets , où il suspend ce qu if
» trouve à propos.»
« Il avait , dans ses digressions ou remarques l'art de ,

» rappeler, dit Jean Leclerc, ce c[u'il voulait et qui valait


» souvent mieux ou qui était plus curieux ou plus singulier
» que la matière principale. »
Malgré le mérite reconnu du philosophe de Rotterdam
aucune couronne académique n'a cependant, jusqu'à pré-
sent été décernée à un Eloge de Bajle. Mais , il faut le
,

dire, lorsqu'en 1772, l'académie de Toulouse proposa


pour sujet de prix de 1773 l'éloge de Bayle une lettre de ,

cachet fit défense de le traiter, et l'académie substitua au


iioni cl un proscrit pour cause de religion , le nom d'un ca-
nonisé saint Exupère évêque de Toulouse au IV. siècle.
, ,

Les Toulousains n'avaient, au reste pas attendu jusques-là ,

pour honorer « un des plus grands hommes que la France


)) ait produits. Le parlement de Toulouse , dit encore Vol-
)) taire (i) , lui avait fait un honneur unique , en fesant va-
» loir son testament c[ui devait être annulé comme celui
« d'un réfugié , selon la rigueur de la loi , et qu'il déclara
» validecomme le testament d'un homme qui avait éclairé
» le monde et honoré sa patrie. L'arrêt fut rendu sur le
,

n rapport de M. de Seneaux conseiller. » A ceux qui ,

arguaient de la mort civile prononcée contre tous les réfu-


giés , Seneaux répliquait C'est pendant In cours menu de
:

cette mort civile que son nom a obtenu le plus grand éclat
dans toute VEurope.
Bayle était mort le 28 septembre 1706. Un siècle après ,
il fut question de lui élever un monument. On ne recevait

pas de souscription à moins de dix francs (2). Le moment


n'était pas favorable, et le projet n'eut pas de suite. Le
gouvernement d'alors n'eut pas besoin d'arrêter un zèle qui
n'existait pas Bayle, trop peu lu , ne pouvait exciter l'intérêt
5

que d'un très-petit nombre de personnes.


Il paraît qu'Antoine Bret, connu par son édition de Mo-
lière, avait eu vers 1760 le pi^ojet de donner une nouvelle
édition du Dictionnaire de Bayle (3) mais Bret est moit en ^

1792 , sans avoir donné suite à ce projet.


Feu M. Desoer, qui en 18 17 donna un grand élan à la
librairie française par la publication de sou prospectus des

1,1) Notes du troisième Discours sur l'homme.


{1) Voyez Journal de Paris du 19 février 1806.
(3) Lettre de Voltaire à IJret du 10 octobre 1761,
DE LA ONZIEME EDITION. iij

OEuures de Foliaire eut presqu'eu même temps l'idée


,

de réimprimer Bayle. Lorsqu'il m'en parla, je venais de


m'engager à donner des soins à une édition des OEuvres de
f oit aire (4) et nous ajournâmes le Bayle à trois ou quatre
5

ans. Le prospectus n'en fut donc publié qu'en août 1820*


et le premier volume parut en octobre de la même année.
C'était la onzième édition du Dictioruiaire de Bayle.
Mais, avant de parler des travaux que j'ai faits pour cette
édition, j'ai à jeter un coup d'oeil sur celles qui l'ont pré-
cédée.
Je n'ai toutefois fait entrer en ligne de compte ni le Pro- ,

jet etfiai^vwiits d'un Diclionnaiie critique, Rotterdam, chez


Reinier Leers, 1692, in-8°. (5) ni V Extrait du dictionnaire
,

historique et critique, l'^G'j ou 1^80. 2 volumes in-8, avec


un Avant-propos qu'on sait être du roi de Prusse.

l6()'j. Première édition.

La première édition est celle de Rotterdam , 169^, deux


volumes en quatre parties in-folio. Chaque volume a sa pa-
gination. L'impression n'en était pas achevée que le libraire
en avait vendu tous exemplaires. Il augmenta le tirage
les
des feuilles qui n'étaient pas encore imprimées et réimpri- ,

ma tout ce qui précédait c'est-à-dire , depuis la lettre A


,

(4) Je n'ai point fini cette édition entreprise par madame Perroneau et
compagnie ; premiers volumes avaient e'té très-bien accueillis
les et l'oo ,

augurait si bien de cette édition, que .M. Brunet la recommande dans l.i
troisième édition de son HJaniiel du libraire , tom. 111 pag. 576. Je n'avais
,

encore publié que vingt-neuf volumes sur cinquante qu'elle devait avoir,
et je n'en ai en tout donné que trente et un ( savoir les tomes 1 à XXill , et
XXV à XXXII ). Les entrepreneurs ayant, sans raison plausible, rompu
notre traité, et chargé un autre homme de lettres de finir l'édition furent ,

condamnés à me payer des dommages - intérêts. Je ne puis dire si le con-


tinuateur choisi par madame Perroneau a fait mieux ou pire que je n'au-
rais fait : mais je puis assurer que j'aurais fait autrement que lui. Je
n'aurais pas supprimé le conte du Crocheteuv borgne qui est dans rédition
de Kehl j'aurais rétabli plus de "vingt pages dans le volume des Elémens
\

de la philosophie de IVe^vion; je n'aurais pas oublié de donner dans les


derniers volumes les pièces promises par des notes des premiers , etc. etc. ,

J'aurais eu Pattention de mettre les diflérens morceaux dans les Aolumes


où j'avais promis de les donner. Sans doute j'aurais commis quelques
fautes mais il m'eClt été impossible je le reconnais, d'y être aussi plai-
; ,

sant que mon continuateur, qui , page 97 de son ^o". volume, cite des
l'ers de f^oltaire ( mort comme chacun sait en 1778) sur la mort de niade-
moiselle Clairon qui n'est morte que vingt-cinq ans après le poète. Je ne
,

sais si j'aurais mérité les éloges, en partie anticipés, que fait de mon tra-
vail le iManuel du libraire; mais ces éloges mêmes me fesaient un devoir
de donner l'explication qu'on vient de lire.
(5) Voyez ce qui est dit de ce Projet dans la P^ie de Bayle par Desmui-
zeaux. que j'ai placée dans le tome XVI-
^, DISCOURS PRÉLIMINAIRE
jusqu'à environ la lettre P (t>). Cette seconde composition 7
faite lapidement et sans que l'auteur en revît les épreuves,
fourmille de fautes, Bayle la désavoua et signala quelques-
unes des erreurs grossières qui la déparent (7). Il nest donc
point indifférent pour ceux qui recherchent l'édition de 1697
d'examiner de quel tirage sont les feuilles des exemplaires.
Mais comme on n'a ni de signe de reconnaissance pour
chaque feuille, ni la certitude que l'assembleur ou bro-
cheur n'ait pas mêlé les feuilles des deux tirages, on ne
peut guère s'en rapporter à cette édition pour le i*^'. vo-
lume et la i'*. partie du second. Cependant quelques per-
sonnes tiennent encore à cette première édition que re- ,

commande en effet un journal qui s'imprimait en Hollande.


« Quelques simples curieux plus satisfaits de quelques,

» plaisanteries un peu vives que de quelque bonne et judi-


» cieuse remarque de littérature et de critique, la recherchent

» avec grand soin, parce que ces plaisanteries ne se trouvent


)) plus dans les articles Diocj^we, Hipparchia, Laïs Mal- ,

)) HERBE, Mariana ct Le Païs dcs éditions suivantes. » Voilà


ce qu'on lit dans la Bigarrure tome XIX , page 84. ,

Reste à savoir jusqu'à quel point ces remaïques sont


exactes c'est ce que je vais examiner.
;

1°. L'article Diogè;ne ne m'a présenté aucune différence^

et il suffit de lire la remarque L telle qu'on la voit dans ,

toutes les éditions pour se convaincre qu'on n'a fait dans


,

cet article aucun retranchement.


2°. Sur l'article HippAucHiA il y a quelques observations
,

à faire: i". dans la remarque A on lisait, en 1697 ^"féf^f^ '•

de ce quil dit ; depuis , l'auteur a mis inférer de ses paroles. :

2°. Dans la même remarque A on lisait, en 1(^97 ce :

(6) OEuvrcs diverses de IV. 752. On y lit


P. Ba^le , « Avertissement au :

» LECTEUR. Puisqu'il me uu peu de papier, je me sers de cette occasion


reste
» pour avertir le public que les feuilles de mon Dictionnaire depuis la ,

» lettre A jusques environ la lettre P ayant ete re'imprime'es sans que


, ,

)) j'en aie vu les épreuves il y est demeure' beaucoup de fautes dont quel-
,

» ((ues-unes me font dire des absurdités. Par exemple, à la page 84(J du


» 1"^^. volume ligne 10 de la remarque G, on a mis Ch.vri.f.s VU, au lieu
,

)) de Cn.iRLES VI ce qui rend la suite un galimatias ridicule. A la page


,

)» i38 du îl*. volume, ligne i""'. de la première colonne on a mis curieux ,

» au lieu de sérieux. Cela renverse le raisonnement et me jette dans la


» fausseté^ car il s'agit là d'un livre qui n'a rien que de commun. Cette
» faute et plusieurs autres, ne se trouvent qu'aux exemplaires réimpri-
,

» mes. »
Les deux fautes signale'es dans cet ai^erùssemenl ont e'té corrige'es dans les
e'ditions de 170'j, etc. Voyez dans l'édition in-S". tome V, pag. 1^3, co- ,

lonne 2 ligne 9 ^ et tome VIII page 278 ligne 37 de la remarque G.


, , ,

(7) Voyez lome XVI pages 20


,
et 191.
DE LA O^ZIÈME ÉDITION. v
poème a pour litre ; depuis
rautcur a mis
, ce poëme est :

inliiulé. Jusqu'ici, je n'ai aperçu aucune plaisanterie un peu


vive. 3'\ Dans la reniai que D on ne trouvait pas, en 1697.
la phrase sur les Mosyniens. Les éditions postérieures sont
donc augmentées et non diminuées. Cependant, dans cette
même remarque D, après ce qui est dit de la pratique des Ly-
diens (voyez VIII, i44)? ^^ lisait les phrases que voici , et
les citations indiquées par des lettrines qui s'y rapportent.
« Ces misérables destinaient une heure en plein jour à
» cette mollesse (a). Je ne sais point si c'était à la cynique
» devant tout le monde, comme le prétend Orasius Tuhero,
» c'est-à-dire La Mothe-le-Vayer dans la page i44 ^^ Ban-
» quet sceptique. En ce cas-hà ils ont mérité une infâme ,

» distinction-, autrement, si on les eût distingués, on aurait


» donné à connaître que les anciens peuples n'étaient pas
» si généralement corrompus que l'ont été les siècles sui-
» vans, où toutes heures ont été bonnes pour cette bru-
)) lalité et où presque aucune nation n'a eu rien à re-
,

)) procher aux autres. Toute chair a corrompu sa voie ;

)) c'est le pis aller (6) continuel des jeunes gens. Les


» confesseurs en sauraient que dire,- voyez la 'j^ satire .

)) de Ju vénal (c). Le ministre Pierre Cayet {(i) fut déposé


» parce qu'on le crut auteur d'un livre où l'on exhortait les
)) magistrats à tolérer les bordels afin d'éviter le péché de ,

» mollesse qui régnait partout, et qui était, selon lui,


)) le péché que Dieu défend dans le Décalogue; au
» reste, etc. » (8).

(a) Erasme explique le proverbe AucTàc h fj.i7YiuQa.if. Lrdus in nteriUe in


Jiomineni insnliatœ aiit etiam iiitempestiyœ libidinis. Et il ajoute Narrant :

Lydos adeô libidine perditos fuisse, ut non tanti'im uoctu vaearent vohip-
tafi venereœ veriim etiam ipso meridie lascivireot, manibus fcedum opus
,

peragentes. Chil.-a, ceutur. 6, n°. 94.


{h)L'âne ne poiwaii pas se subi'^nir à soi-même , comme font beaucoup. ..
(te personnes lesquelles dans ces fâcheuses contraintes ont recours aux
,

armes naturelles ,

et quod restât in rébus e£;enis


Sœpè manu liquide distendant neclare collas.
Orasius Tubeko, Dialog.sur les ânes, page 299.
(c) Non est levé tôt puerorum
Observare manus oculosque in fine trementes.
.Tdven. Sat. 7, V. 240.

(d) Voyez son article , remarque P>.

(8) Bayle , non-seulement n'a pas distingiie pour l'ordre alphabétique de


ses articles, les V
des U, il a considère TY comme un I, et les articles
appartenans aux lettres I, J , Y , sont ranges comme s'ils s'écrivaient par
un 1. Ainsi l'article Yse se trouve au tome VllI page !^ii et précciu;
,
.
,

^- DISCOURS PRÉLIMIJN AIRE


Laïs contient, dans les dernières éditions , plu-
3", L'article
sieurs additions, et entre autres trois remarques entières
(D. iM. O), qui ne sont pas dans 1697. Dans le texte,
Bayle avait mis d'abord quelque cliarmante quelle fût;
:

depuis corrigé, et ou
il a aujourd'hui de quelque lit :

charme quelle fût pourvue. Bayle avait, en 1697, im-


primé trois fois dans cet article Laïs , un niot grossier
,

que Pourceaugnac emploie quand il veut qualifier les


mères des petits enfans qui le poursuivent en l'appelant
papa; un mot que Ver-vert apprit des bateliers de Loire,
et qu'il répéta à la soeur Saint-Augustin, lorsque
Le très-cher frère indocile et mutin
, ,

Vous la rima très-richer.icnt en tain.


A ce mot Bayle a substitué non une périphrase , mais un
synonyme.
Au reste , ce mot que Bayle a supprimé ici , il l'a con-
servé ailleurs dans l'article Cardan , IV, i^[ig, (remarque B),
et dans l'article Poitiers 198, (remarque Q). On , Xn ,

peut voir ce que Bayle lui-même dit de ce mot dans son


Eclaircissement sur les obscénités tome XV, p. 34^- .,

Dans l'article Malherbe remarque B Bayle a rem-


4°. , ,

placé une citation par une autre ce n'est pas un retranche- 5

ment, mais une substitution. Pour ne rien laissera regretter


aux curieux je rapporterai encore ici ce qu'on lisait dans
,

la première édition.
« Une sentait que trop sa faiblesse et il s'en plaignait bien
» tristement. Du côté des bergeries , disait-il (a) en parlant
,

» de lui , son cas va le mieux du monde ; pour ce qui est


» des bergères., il ne saurait aller pis. Cette affaire veut
)) une sorte de soin dont sa nonchalance n'est pas capable.
» S'il attaque une place il y va d'une façon qui fait
,

)) croire que s'il V avait prise, il en serait bien empêché ;


» et s il la prend.) il la garde si peu quil faut croire
» quune femme a été bien surprise quand elle a rompu
)) son jûne pour un si misérable morceau. Joignez à ce pas-
)) sage celui qui est rapporté dans la Suite delà (b) Critique
TsLEBiENsj Ayrault vient avant Aitzema ; Amyot , Amvrault, Amyrutzes ,
Cayet , etc., sont placés comme s'ils e'taient e'crits Amiot , Amirault ,
Amirutze , Catet. Bayle lui-même avertit brièvement les lecteurs de cette
disposition. Voyez à la fin de son Ai'crlisseinent de la première édition
tome XVI ,
page 17.
(a) i\lallierbe , lettre à Balzac.
Nouvelles lettres de l'auteur de la Critique de Maimbourg, lettre 21 ,
(Jb)
n». 8 page 665. [ Ce passage , auquel il renvoyait alors, est précisément
,

i;elui qu'on lit à présent sous les numéros 8 et 9 dans la remarque B,


]
DE LA ONZIEME ÉDITION. vij

>> générale, et considérez cette réplique : Malherbe dit un


w jour à M. de Bellegarde , etc. »
5". à Mapuana j'ai aperçu beaucoup d'additions
Quant , ,

pas moindre suppression et une seule correction. Dans


la ,

une phrase de la remarque H, Bayle nomme Henri IF^, le


monarque qu'en 1697 il appelait Hem i-le- Grand. Ce chan-
gement n'a peut-être été fait que pour éviter le contraste
que cette expression pourrait avoir l'air de faire avec l'épi-
thète de prince fort impudique que l'auteur donne au même
monarque dans la remarque C à l'occasion du P. Coton
,

son confesseur. Il ne faut pas conclure de ce changement


que Bayle ait refusé de rendre justice à Henri IV. Dans le
long article qu'il lui a consacré, il n'hésite pas à le pro-
clamer Vun des plus grands princes dont ïhisloire des der-
niers siècles fasse mention.
6°. Enfin, l'article Le Païs avait en 1697, à la fin de

la remarque D une petite phrase et une citation de plus


,

qu'il n'a dans les éditions subséquentes l'une et l'autre


-,

sont relatives aux Hollandaises. Serait-ce par égard pour


les habitans du pays où il avait obtenu un asile que Bayle
a supprimé la citation ? Cela peut être mais je croirais
;

plutôt que c'est parce qu'il a trouvé lui-même ridicule


la phrase qui amenait la citation. Pour que le lecteur
puisse prononcer, les deux versions sont conservées tome XI,
page 332. Si je n'ai pas pris le même parti pour les articles
Laïs et Malherbe, c'est qu'il m'était impossible de disposer
clairement ces deux morceaux à cause des notes qu'ils ont.

1702. Seconde édition.

La seconde , donnée
édition à Amsterdam est en trois ,

volumes en une seule pagination. Quelques pas-


in-folio
sages de la première avaient attiré à l'auteur des désa-
grémens dont Desmaizeaux parle avec détail dans sa f^ie de
Bayle. L'auteur promit de faire quelques suppressions. On
a vu en quoi ces suppressions consistaient pour les articles
Laïs, Malherbe et Le Païs. De plus importantes eurent
lieu dans l'article David. De la manière dont j'ai impinmé
cet article ( tome V , pages 4oo et 4o8 ) on aperçoit d'un
,

coup d'oeil quels étaient les passages qui avaient blessé le


consistoire de Rotterdam,
Une autre suppression fut faite par Bayle sans qu'il y eût
aucune plainte, et sur la seule représentation de quelques
amis qui trouvèrent déplacé l'éloge qne Bayle faisait
^,-j DISCOURS PRÉLIMINAIRE
Je Ch. Di'elincourt dans un préambule de l'article Achille.
Bayle supprima ce préambule; mais tout en le supprimant
ily renvoie (Voyez XI, ii ). De pareils oublis n arrivent
que trop souvent à ceux qui coriigent un ouvrage ils oient ,•

certaines choses en un lieu et laissent ailleurs la citation de


ces mêmes choses , dit quelque part Bayle (9) lui-même. Mais
ce qui est plus étonnant, c'est qu'aucun autre que l'éditeur
allemand de 1802 n'ait songé à rectifier, ou tout au moins
à signaler cette faute.
Dans l'édition de 1702, les additions dans le texte sont
précédées d'un gland, signe typographique inusité aujour-
d'hui; et les remarques , après leur lettre de renvoi, por-
taient un delta.
1
7 1 5. Troisième édition.

Entre la première et la seconde éditions, il ne s'était écoulé


que cinq ans. Bayle était mort en 1706, laissant des aug-
mentations pour une nouvelle édition. En attendant qu'elle
parût, des libraires de Genève en publièrent une qu'ils in-
titulèrent Troisième édition à laquelle on a ajouté la vie de
,

T auteur et mis les additions et corrections à leur place. Cette


édition de 1715 est en trois volumes in-folio, dont chacun
a sa pagination. A la suite des préfaces des éditions de 1697
et 1702, on y a ajouté en treize pages une Histoire de
M. Bayle et de ses ouvrages.
Deux articles ont été ajoutés dans le corps du Diction-
naire Lefort , compatriote des éditeurs, etViLLA.us. Ce
,

dernier n'avait encore été réimprimé que dans l'édition de


1734. Je l'ai conservé dans l'édition in-8''. Quoique n'ayant
pu trouver les motifs qui ont engagé les éditeurs de 1784 à
ne pas comprendre l'article Lefort , dans leur réimpres-
sion, j'ai fait comme eux 5 et peut-être ai-je eu tort. Du
moins je donnerai ici ce morceau avec ses notes qui seront
,

désignées par des lettrines.


LEFORT (François) («) , clinatioii pour
armes, qu'à
les
général et amiral sous Pierre quatorze ans porta en
il les
Alexiowitz, czar et grand-duc de France , dans les Suisses. Peu de
Moscovie jetait de Genève, d'une temps après, il passa en Hol-
famille patricienne. Il naquit le lande et se trouva (b) aux sièges
2 janvier i656 , et fit paraître de Grave et d'Oudenarde sous le
dès son bas âge une si forte in- prince de Courlande, qui perdit
tout son régiment
° à ces deux
(a) Mémoire manuscrit communiqué au
lil.raire à celle iroisième e'(Jilioa[l7l5j. (i) En 1674 et 1675.

(9) Remarque A de Farticle Taboue, XIV, 2


DE LA ONZIÈME ÉDITION. ix

sièges. Lefort, embarrassé de sa habileté dans l'art militaire, que


personne après cette déroute et sa majesté czarienne dès lors
la perte de son équipage, accep- l'estima beaucoup , le choisit
ta sans beaucoup hésiter
,
une , pour son favori, lui remit la di-
lieutenance dans le régiment de rection des affaires les plus im-
Werstein, au service de sa ma- portantes , et l'éleva enfin à un
jesté czarienne et s'embarqua
, si haut faîte de grandeur et de
(cjpour Archangel d'où il alla , donna le com-
gloire, qu'il lui
ensuile à Moscou. Comme il était mandement général de toutes ses
bien fait de sa personne , qu'il troupes tant sur mer que sur
,

avait la physionomie heureuse , terre , l'honora de la vice-royau-


qu'il était hardi et entreprenant , té de NoAvogorod, et le fit son
généreux et désintéressé, par- premier ministre d'état avec la ,

lant d'ailleurs assez bien quatre qualité d'ambassadeur et pléni-


ou cinq langues différentes, il ne potentiaire dans toutes les cours
fut pas long-temps dans cette ca- étrangères (g). Jamais fortune
pitale sans s'y faire connaître à n'a été plus rapide que celle de
plusieurs officiers et autres per- ce général. Il a joui de tous ses
sonnes de distinction. 11 gagna titres et honneurs jusqu'à sa
en particulier l'aff^ection de M. mort qui arriva à Moscou le i?.
,

Horn, résident de Danemarck et ,


de mars 1699 Le czar, pénétré
celle de divers princes et boyars. de la perte de ce fidèle et zélé
Peu après (<i) obtint une com-
il ministre , donna une preuvebien
pagnie d'infanterie,
pag...v,v. et, songeant
....^.^..^.^V. , ^..,o^^x^ qu'il en
estime qi
tique de l'estime
authentique 1

à se fixer en ce pays-là , il se ma- faisait en ordonnant lui-même


ria en 1678 , avec la fille du co- ses obsèques et les honorant de ,

lonel Souhay. En i683 , il fut sa présence. Elles se célébrèrent


fait major, ensuite lieutenant le 21 du même mois, avec tous
colonel. Sa majesté czarienne re les honneurs imaginables ( h ).
connaissant en Lefort plusieurs Henri Lefort son fils capitaine ,

belles qualités , et surtout un jg la première compagnie des


parfait attachement à son ser- gardes du czar, aurait sans dou-
vice, lui confia en i685 le com-
tg marché glorieusement sur les
mandement des troupes et de traces de son père si la mort ne ,

l'artillerie pour une expédition


(e) considérable. En 1696, il eut Il y avait à la tête de cette célèbre am-
(fi-)

dans les principales


la conduite du siège d'Azoph(/'); bassade de Moscovie ,

cours de l'Europe, en 1697 et 1698, trois


et dans cette occasion il donna ambassadeurs. Le général Lefort était le
des preuves si éclatantes de son premier Théodore Alexiovvltz Golowin ; ,

commissaire général des guerres et vice-roi


de Sibérie, allait après; et le troisième était
(c) Le 25 juillet 1675.
Procope Bogdonowitz Wotznicin, chancelier
{d) Au commencement de 1677. vice-roi de Bolchou. Ils par-
(e Pour s'opposer aux irruptions que les
du conseil privé ,

tirent de Moscou avec une suite de près de


Tartares faisaient dans le pays.
trois cents personnes au mois de mars 1697 '
(y) Le sie'ge commença le 2 juin ot finit le
et furent de retour à Moscou vers la mi-
20 juillet de la même année, que la place se
septembre 1698.
rendit après une défense des plus vigoureu-
ses. Le czar Pierre Alesiovvitz se trouva en (A) On en voit une relation très-curieuse
personne à ce siège , cl y donna des marques dans le Mercure historique du mois de mai
d'une intrépidité tout Uéroique. 1699-
,
.

X DISCOURS PKÉLIMIISAIKE
l'eût enlevé fort jeune ( /} peu , lespremières charges de la répu-
après la prise de JNottbourg, blique de Genève, est actuelle-
Pierre Lefort, neveu du général , ment (A) au service du czar, qui
et fils d'Ami Lefort , qui possède l'a fait brigadier de ses armées.
Il a épousé en 171 3 la fille du
II mourut à Moscou après s'être trou-
(
rrAr,Ara\ W^iVIa
g^^erai VVeiUe.
vé au siège de Noltbourg en i7o3, âgé ,

dV'uviron vingt ans. (A) On écrit ceci en I7l4.

Les éditeurs de Genève crurent sans doute que ces deux


articles surLefort et sur Villars donneraient un grand prix
à leur édition. Les augmentations qu'ils peuvent avoir
faites dans le courant de l'ouvrage n'étant pas du chef de
Bayle j'ai dû les laisser de côté. Je n'en ai pas au reste
, ,
,

aperçu beaucoup. Comme mon intention était de les passer


entièrement sous silence je n'en ai pas piis note je ne, ;

m'en rappelle même qu'une seule qu'on trouve à la fin de la


remarque F de l'article Bldé (10). Après le mot excedere
on lit dans i^i5 :

« JeanSleidan, contemporain de Guillaume Budé con- ,

firme comme il fut un des principaux restaurateurs des


belles-lettres et le Mécénas de la France : nous dit en
et il

même temps l'année de sa mort, et sa modestie au sujet de


ses funérailles ^Ju mois d'août, à Paris, fan i5/^o, dit-
:

il (a) mourut Guillaume: Budé maître des requêtes, homme


, ,

de grande érudition et digne d'être loué au temps à venir.


, .

Il fut cause que le roi François fit un acte singulier c est •

quil ordonna honnêtes gages à Paris pour les professeurs des


sciences et arts. On ne saurait croire les grosses rivières qui
sont issues de cette fontaine , et se sont répandues tant par
la France que par les autres pays. Budé voulut être inhumé
sans pompe. »
Une note marginale apprend que cette addition vient d'un
Mémoire manuscrit de M. de Lange , donné à celte 3". édition.
Dans la liste alphabétique des articles qui est à la suite de
V Histoire M. de Bayle en i y 1 5 , on a marqué d'une étoile
ceux qui ont été ajoutés à cette nouvelle édition ; et les ar-
ticles marqués d'une étoile sont très-nombreux c'est que •

l'on a conservé ce signe aux articles qui l'avaient dans la


liste de l'édition de 1^02. On l'a mise aux articles Lefort et
Vdlars, les seuls qui avaient été ajoutés en 1716, et qui ainsi

La remarque F dans les éditions de 1697 1702 , i^iS est devenue


(10) , , ,

la remarque H par les additions posthumes, en 1720, de ce qui forme au-


iourd'hui les remarques B et F.
(rt) Les œuvres de Jean Sleidan livre i3 pag. 2o4- ,
,
,

DE LA OiNZIEME ÉDlllON. xj

ne se trouvent en rien distingués des articles qui existaient


depuis 1702. Je dois remarquer que Fédition de lyiône
contient qu'une version de Tarticle David mais du moins ,

c'est la complète la première celle de 1697.


, ,

Les mêmes libraires de Genève publièrent plus tard un


Supplément dont je ne parlerai qu'après l'édition de 1720.
1720. Quatrième édition.
Bayle avait légué les articles qu'il avait composés pour
le Supplément de son dictionnaire , au libraire Leers qui ,

avait publié les deux premières éditions de ce livre. Leers


ayant vendu son fonds à jM^L Fritscli et Bohm ils pu- ,

blièrent, en 17 14? un prospectus d'une nouvelle édition-, ce


prospectus était intitulé Projet de la nouvelle édition du
:

dictionnaire historique et critique de M. Bayle (n). A


peine ce projet fut-il connu c|ue les éditeurs de Genève
,

cherchèrent à discréditer l'entreprise (12). Les libraires de


(11) Ce Projet était in-folio. Je n'ai pu m'en procurer un exemplaire. 11
est à regretter que les amateurs de livres ne conservent pas en tête de leurs
livres les prospectus. Au reste, les regrets ici doivent se re'duire à bien peu
de chose. Le Projet de la noiwelle édition, etc. a été re'imprimé avec ,

quelques additions dans le Journal littéraire , juillet et aoi\t T714 tom. IV, ,

seconde partie , page 364-386.


(12) Voyez V Histoire critique de la République des lettres , VI 25 r. Ce ,

morceau est daté du 20 avril 1714- Un article très-étendu sous le titre de ,

yii^'is important au public sur l'édition Jausse et tronquée du Dictionnaire de


M. Bayle qui se fait h Rotterdam fut imprimé, pag. 225-276 du tom. X
, ,

de V Histoire critique de la République des lettres. ( Il a été reproduit dans


l'Histoire de M. Bayle et de ses ouui-ages pages 536-076 où il est intitulé:
, ,

Factum des amis de M. Bayle ou ^^ds important etc. ) Prosper Mar-


, ,

chand y répondit par la Dejéme de la nouvelle édition du Dictionnaire de


M. Bayle, qui se fait à Rotterdam. Cette Défense est imprimée dans le
Journal littéraire, tome VIII, pages 90-1 15. La réimpression, qui parut peu
après de V Histoire de .1/. Bayle et de ses ombrages par M. de la Monnaie
, ,

( lisez par l'abbé du Revest ) décida P. Marchand à écrire une nouvelle


,

Lettre aux auteurs de ce journal suivie d'une Déclaration authentique


,

touchant les manuscrits laissés parfeu AI. Bayle. Le Liwre et la Déclara-


tion sont dans le 7oz<rnfl//i«férfl£re, tome VIII , pages i34-i53. Jean Leclerc ,

à propos de cette Déclaration authentique , dit dans sa Bibliothèque an-


cienne et moderne tome VI page 233 qu'on a attaqué Prosper Marchand
, , ,

avec trop de passion. Bernard dans ses JVouwelles de la Republique des


,

lettres, septembre et octobre 17 16, page 63 1 parle de la. fausseté de


,

l'accusation qu'on aidait formée contre lui. Les adversaires de Marchand


écrivirent alors une Jjettre a messieurs Leclerc et Bernard contenant des
éclaircissemens sur quelques endroits de leurs derniers journaux où il est ,

parlé du Factum des amis de M. Bayle contre la nom-'elle édition de son


,

Dictionnaire , qui s'imprime à Rotterdam. Cette lettre a été imprimée dans


les Jlémoires de littérature par M. de S'^** ( Sallengre }, tome II
,
seconde ,

partie ,
pages 233-293. J'ai indic[ué les principales pièces de cette polé-
mique. Je crains qu'une nomenclature plus étendue ne soit fastidieuse.
Malgré les déclamations acharnées des éditeurs de Genève contre l'édition
de 1720, c'est elle qui a servi de base ou de copie pour celle de 1730 sur ,

laquelle ont en=!uite été faites les autres réimpressions.


,

xij DISCOURS PRÉLIMINAIRE


Rottcrtlam confièrent à Prosper Marchand le soin de di-
riger leur nouvelle édition qui , commencée en juillet 1 7
, 1 4 ?
ne fut achevée qu'en 1720. C'est de cette dernière année
qu'elle porte la date ; elle est en quatre volumes , dont la
pagniation est continuée de i à 3i32, non compris les ti-
tres, préliminaires et tables (i3). Les deux versions de l'ar-
ticle David sont à la suite l'une de l'autre.
On trouve à la fin du quatrième volume I , des Articles
ohmis pendant le cours de cette troisième édition ; II , des y4r-
ticlescommuniqués à V auteur, (ces articles sont au nombre
de huit) III, des Remarques critiques sur quelques endroits de
;

ce dictionnaire conwiuniquées par diverses personnes.


Cette disposition n'est pas sans inconvénient. Pour s'assu-
rer de l'existence d'un article et de ce qui le concerne , il faut
consulter l'ouvrage en quatre endroits.
Les articles obmis se composent en général , , d'articles dans
lesquels les citations ne sont pas remplies. Bayle , en com-
posant ses articles , ne s'amusait pas à transcrire le texte des
auteurs qu'il citait ; il se contentait d'en copier les premiers
mots qu'il faisait suivre de points et de cette phrase à Tim- ,

primé jusquà ( tel mot) inclusivement (ou exclusivement \


Lors de l'impression il fesait remplir les lacunes en com-
,

muniquant les livres de sa bibliothèque ou en fournissant ,

copie des passages (i4) mais la bibliothèque de Bayle


5

u existait plus lorsqvie Prosper Marchand s'occupa de la


réimpression du Dictionnaire. Il eut beau faire il ne put se ,

procurer tous les ouvrages cités par Bayle. Dans l'espoir de


les avoir avec le temps il prit le parti de garder
, pour la ,

fin de l'ouvrage, les articles qu'il se trouvait hors d'état de


compléter. Malgré ses soins il ne parvint à se procurer ,

qu'un très-petit nombre des volumes C£ui lui étaient néces-


saires c'est ce qui explique pourquoi, dans l'édition de 1720,
;

quelques-uns seulement des articles obmis sont sans lacune ,

et pourquoi tous les autres en ont.

(i3) Micliel Bohni, dont le nom seul se voit soit sur les ft-ontispices, soit au
bas de i'epître de'dicatoire, ne comptant pour rien la réimpression de
Genève ,intitula la sienne, troisième édition.
(i4j Voici un accident qui est resuite de cette disposition. Bayle , dans
la remarque E de son article Gombacld, ayant dit que Despréaux ne fait
aucun cas des sonnets de ce poète, cite les vers de V^rt potli(pie mais :

depuis i683 ÏArtpoétirjue porte


A peine dans Gombauld Maynard et Malleville ,

En peut-on /idinirer dews. ou trois entre mille.


IJolleau avait d'abord mis e// peut-on supporter, etc^ et c'est ce texte
:

comme je l'ai remarque (tome VII, page 120), que Bayle dut avoir l)ré;
sent à la pensée quand il écrivait son article Go.MiiAULp.
DE LA ONZIÈME ÉDITION. xiij

C'est sur des auteurs qu'il rapporte, que Bavle


le texte
appuie SCS raisonneniens, ses argumens. On sent toute lim-
portauce du rétablissement des passages qu'il indique aussi ;

les éditeurs de 1780 ont-ils fait, ainsi que ceux de i''4o,


quelques recherches pour remplir ces lacunes. Je n'ai pu ,à
mon grand regret, faire tout ce qu'ils m'avaient laissé à faire.
Il est à croire que quelques-unes des remarques critiques .

ajoutées en 1720, sont de Prosper Marchand^ mais il est


certain qu'une partie est de Leduchat. Dans une des remar-
ques critiques imprimées en 1720, on projDOsait, à l'article
GouRKAY ( Voyez tome VII, page 186) on proposait de
,

lire;;/7'è/e au lieu de briève. Mais dans le Ducahana parmi


^

les nouvelles Remarques sur le Dicliojinaire de Bajle (tome I,


pages 1 45-217 ), on lit, page 212 Au lieu àe prière que
:

j AVAIS substitué à briève lisez brigue. L'expression n'est pas


,

équivoque. D'après ce qu on lit dans le Ducatiana ,-pi\^es 21 1.


2i5 et 217 on peut encore regarder Leduchat comme l'au-
,

teur des Remarques critiques sur les articles Dri sus VI , .

3i, LoLis XI ("Soyez ma note, IX, 4^5), et Tirésias XIV, ,

221. J'irai plus loin comme Leduchat a beaucoup travaillé


:

sur Rabelais je lui attribue toutes celles des Remarques cri-


,

iiques où le curé de Meudon est cité j et il l'est souv ent.


L'édition de 1720 du Dictionnaire de Bayle fut dédiée au
duc d'Orléans régent. Le portrait de ce prince devait être
,

mis en tète de la dédicace; mais on imagina de graver sur le


même cuivre , au bas du portrait, dix-neuf vers de Limiers.
Les louanges n'étaient pas ménagées au prince tout-puis-
sant ; on le louait surtout de ses opérations financiè-
res etc. 11 parait que le tirage du portrait n'était qu'à peine
,

commencé lorsque intervint ledit du 21 mai 1720 portant,

réduction de la valeur des actions de la compagnie des Indes


et des billets de banque. Les éloges donnés quelques jours
auparavant au système de Law se trouvaient être devenus
une ironie cela arrive quelquefois. Il fallut en faire le sa-
;

crifice on rogna de la planche de cuivre la portion qui


:

contenait les vers et l'on reprit et continua le tirage. Les


,

vers ne se trouvent ainsi que dans un très-petit nombre


d exemplaires et ce sont les exemplaires où ils se trouvent
-,

qui doivent être recherchés à cause de cette particularité.


Ces vers, que mes prédécesseurs avaient omis, nie sem-
blent appartenir à l'histoire littéraire , et je n'ai pas manqué
de les reproduire (i5).
(i5) Tomt; XVi ,
pag. aj.
,

^Iv DISCOURS PRÉL]MI^fAIRE


Les Rotterdam se proposaient d'abord d'im-
libraires de
primer séparément les additions afin que les possesseurs de ,

l'édition de l'y 02 pussent ainsi compléter leurs exemplaires,


c'était l'intention formelle de l'auteur (i(i) mais l'incident ;

arrivé à Genève ( c'est ainsi qu'il appelle l'édition faite en


cette ville ) décida Bolim à en user autrement-, il craignait,
s'il eût donné un supplément, qu'on ne le l'éimprimàt (17).

Malgré cette précaution les libraires de Genève publièrent,


,

en 1722 un Supplément au Dictionnaire historique de


,

AI. Bajle pour les éditions de fj 01 et de 1716 un volume


, ,

in-folio. On voit par l'intitulé même de ce supplément


,

qu'il ne s'adapte pas à l'édition de 1697 en l'y réunissant 5

on se trouve pi-ivé des additions faites en 1702. Les éditeurs


de Genève prétendaient que ce que les éditeurs de Rotter-
dam annonçaient, en 17 14 et 17 16, pour des éditions de
Bayle n'était point de ce grand homme et voici comme
, ,

ils ont distribué leur supplément. I. ylrticles nouveaux ou

communiqués ; IL yÉdditions aux articles j IlL Remarques


critiques. Disposition incommode , pu^isqu'elle met le lecteur
dans de consulter quatre alphabets. Enfin à la
la nécessité ,

tête du volume de 1722 est reproduite Vhistoire de M. Bayle


et de ses ouvrages déjà, mise en tète du premier volume
(^

de 1715), revue, corrigée et augmentée sur de nouveaux


mémoires , et formant ainsi quarante-sept pages in-folio.
1730. Cinquième édition.

Cette édition en quatre volumes in-folio , dont chacun a


sa pagination , est intitulée quatrième , par la même raison
qui avait fait appeler troisième celle de 1720 (18). On y a
mis à leur ordre alphabétique les articles obmis , les articles
communiqués , et même les remarques critiques. On ne s'est
pas contenté de mettre en tête du premier volume une vie
très-étendue de M. Bayle par Desmaizeaux , on a rempli
une grande partie des lacunes qu'on avait laissées en 1720(19).
(i6) Voyez tome XVI, pag. 18 et 19.
(17) Voyez tome XVI pag. 27. ,

(i8) Voyez ci-dessus la note i3.


(19) Les articles dans lesquels les lacunes sont remplies sont ceux de
BoucHiN, Braunbom (dans les additions et corre 'lions qui sont à la suite
de la Lettre de Destiiaizeaux h Lanwtle apiès V Avertissement tome le^ ),
, ,

GuiGNARD Lasicius, MuTiiJs, Pacard Parts (des; Sanuf.rus J. Savonarole,


, , , ,

ScHOTTiNGius ScHurzE Stifelius; sur vingt-cinq articles qui présentaient


, ,

des lacunes Pe'diteur de irSo en a donc complète douze je fais ici sa part,
, ;

à cause de la teme'rile que j'ai eue de dire dans la Bibliographie de la France,


i8a:;«, pag. 209 qu'à cet égard j'avais pu faire « plus que tous mes de-
,

» vanciers réunis )>. Cela est faux , comme on le verra.


DE LA OISZIEME ÉDITION. xv
On a vu que de i;o2 et 1720 n'avaient qu'une
les éditions
seule pagination pour tous leurs volumes. Le volume le plus
gros de i^So ne dépasse pas 916 pages et cependant dans la ;

table au mot Z?or///i on renvoie à la page 1903-, au mol


, ,

Cotin on renvoie à la page 1771. On a oublié dans ces deux


endroits de cbanger les chifi'res chose très - désagréable ,

pour le lecteur , mais très-pardonnable dans un travail aussi


fastidieux, et dont je ne parlerais pas si ces deux fautes ne
se trouvaient dans lédilion de 1740 où elles sont inexcu- 5

sables.
1734. Sixième édition.

Ce fut à Trévoux (alors principauté de Bombes) que se


fit, pour le compte de libraires de Paris, une édition en
cinq volumes in-folio. C est une réimpression de 1780. Cette
édition de 17^4 est très-décriée de ce qu'elle a été faite à :

Trévoux où s'imprimait le Journal des Jésuites (20) on a


, ,

conclu que les révérends pères y avaient mis la main et ,

qu'ils avaient mutilé l'ouvrage; cependant je n'y ai aperçu


aucun retranchement. L'article David y est double et saus
aucune suppression c'est dans le corps de l'ouvrage qu on
;

a mis la première version; l'inverse avait été fait en 1702 et


1780. Les éditeurs de 1784 ont admis dans leur édition
l'article YiLLARS ajouté en 1710 (21).
Dans la table ils ont aperçu les deux fautes que j'ai signa-
lées dans 1730, et ils ne les ont ni conservées ni corrigées ^ ils
ont (qu'on me pardonne l'expression; je viens de parler des
jésuites) ils ont escobardé et se sont permis de mettre des
, ,

chiffres au nombre de trois, mais à tout hasard et qui se ,

trouvent de faux renvois.


Du reste les éditeurs de 1734 n'ont rempli aucune des la-
cunes qui existaient avant eux.
C'est à tort toutefois ce me semble que leur édition est
, ,

tombée dans le discrédit. Imprimée en plus gros caractères


que les autres, elle fatigue moins la vue c'est déjà quelque :

chose. Mais un avantage très-grand de cette édition ce sont


les remarques critiques (de Fabbé L.-J. Leclerc) sur di^^ers
articles placées à la fin de chaque volume. Ces remarques
,

sentent trop souvent la robe que portait leur auteur; mais


elles ne sont point à dédaigner , et suffisent, selon moi, pour

(ao) Ce journal, cite communément sous le titre de Journal de Tréuoux ,


était intitulé : Mémoires pour servir a l'histoire des scienct-s et des beaux-
arts.
(21) Voyez ci-dessus, page viij.
xvj DISCOURS PRÉLIMINAIRE
faire préférer cette édition de 1734 à toutes les autres du
même format.
1738. Septième édition.

C'est à Bàle que parut cette édition en 4 volumes in-folio ;

elle porte du moins le nom de cette ville et ne m'a fourni


le sujet d'aucune remarque particulière.

174*'- Huitième édition.

Cette édition faite à Rotterdam , en 4 volumes in-folio ,


est intitulée cinquième
parce qu'on n'a pas fait entrer en
,

ligne de compte les éditions exécutées hors de la Hollande.


Elle est très-vantée et peut-être l'est-elle trop car ce n'est
, ;

qu'une copie de l'édition de 1^30, sur laquelle elle a été


faite le plus souvent jour par jour et sans aucun travail
préparatoire c'est du nroins ce que semble indiquer la répé-
;

tition des mêmes fautes ainsi dans l'édition de 1^30 on


:

trouvait aux pages 914 et 91 5 des remarques critiques sur


divers articles qu'on avait oublié de mettre à leur place ces -,

omissions sont, dans 174^5 réparées de la même manière et


au même endroit. Les deux fautes de la table dont j'ai
parlé (22) y existent et sont très-graves. Les éditeurs n'ont
consulté ni l'édition de 1716 ni celle de 1734. ,

Mais en jugeant sévèrement le travail de ces éditeurs, je


dois ajouter qu'ils ont rempli quelques-unes des lacunes
laissées en 1720 (23) ^ je ne compte pas pour une faute la
suppression totale qu'ils tirent de la remarque F de la vie dé
Bayle par Desmaizeaux , ils donnaient pour raison que la
pièce contenue en cette remarque était écrite en flamand
( V. tome XVI, p. 761). Je crois les justifier en transcrivant
ici cette remarque.

[ (F) Les états de Frise le nommèrent pour être professeur en


philosophie dans Vacadémie de Franeker. ] Voici les termes de
leur résolution.

Extract uit een register der resolutie van de Edele ino-


gendeheeren Gede put eerden staten van Friesland.
Donainus Baylius geeligeert tôt professor philosophiae tôt
Franeker op een tractement van seven honderd wyfrig Caroli

(2a) Voyez page xv.


ci -dessus ,

dans lesquels les lacunes ont e'te' remplies en 1^40 sont


(^3) Les articles :

Carbon, Chalvet, Hardenberg , J. Horstius, Rataller Torelli ; celle de


,

l'article Loyer n'est remplie qu'en partie.


DE LA OiNZIÈME ÉDITION. xvij

Guldenà buyten hondert Avyfrig Caroli Guldens v/eyens im-


inuniteyt. Resolutie 29 maart 1684.

AccordeerL met hot voorrz regisler gemaakl en berustende


onder wj' ondergeschrei'e.
C. DE Hertogue. »

Les éditeurs de i74oïi''itiront peut-être supprime; cette re-


marque insignifiante, que parce qu'ils avaient à ajouter un peu
plus loin une remarque qui porte le signe F ( Voyez t. XVI ,
p. 83 ) , trouvant dans cette suppression le moyen de faire
l'addition sans changer les lettres des remarques suivantes.

ï']/{i. Neuvième édition.

Cette édition, qui porte l'adresse de Basic , est en 4 volumes


in-folio. Elle estmal exécutée.

1801. Dixième édition.

Cette édition se publiait à Leipzig, chez P. Pliil. Wolf,


dans le format in-B".; il n'en a paru que huit parties, de
1801 à 1804. La huitième finit avec l'article Hoorinbeck.
Les éditeurs ont fiiit un très-grand travail ils ont relevé ,

minutieusement les moindres variantes ils ont indiqué les ;

additions successives; ils ont eu (les premiers, je crois,)


l'idée dont j'ai profité et le soin de noter les faux renvois
,

de Bayle c'est-à-dire les articles auxquels il renvoyait et


, ,

qu'il n'a pas donnés. Cette dernière partie de leur travail


était très-difficile et laisse quelque chose à désirer
, ils ont ;

ajouté de temps à autre quelques notes dont on peut con-


tester la justesse; ainsi dans leur tome IV, page i55, sur
ce que Bayle avait dit septante mille ils ont mis en note
, :

Il faut soixante-dix. Il y avait dans les OEuvres diverses


de Bayle (24), le premier chapitre et le commencement
du second d'un Discours historique sur la vie de Gustave-
(24) Puisque j'ai occasion de parler des OEuures di\^erses de Bayle, j'en
profiterai pour remarquer que l'édition de 1727 est prefe're'e à la réim-
pression de 1737 je ne sais si cette pre'ft-rence est bien raisonne'e je n'ai
\
:

point lu cette dernière, et il peut se faire qu'elle soit moins correcte que la
première mais cela n'est que douteux jusqu'à vérification \ ce qui est cer-

tain c'est qu'elle contient , déplus que 1727, cent cinquante lettres. 11
,

parait que ces cent cinquante lettres nouvelles n'ont été découvertes qu'a-
près l'impression ; car, au lieu d'être placées chacune à sa place , elles
,

forment un cahier de cent douze pages in-folio, destiné à grossir le pre-


mier volume. L'édition de 1787 a dû être faite en France ( à Trévoux ). La
préface de ces cent cinquante lettres est d'un catholique j aussi quelques
mots ont été changés dans la réimpression qui en fut faite en Hollande par
des protestans, 1739, 2 vol. in-12.

TOME I. b
^,.,ij DISCOURS PRELIMINAIRE
Adolphe, de Suède. Les éditeurs de Leipsig ont inia-
roi
<^mé de mettre dans leur édition, au mot Adolphe, ce
fragment , qui ne vient que jusqu'en 1620. Il remplit plus
de r,o pages et fait disparate avec les autres articles, non-
seulement à cause de son étendue , mais à cause de sa
forme il est dépourvu de remarques et de citations. Or on
;

sait que dans la remarque B de son article CAraojN Bayle


, ,

dit que ne pas citer les auteurs d'où l'on a tiré les choses
est un défaut capital dans un ouvrage de cette nature et dans
presque tous les livres.

Du reste cette édition de Leipzig était mal exécutée


, le \

papier est très -vilain, l'impression n'est rien moins qu'é-


légante et , dans les volumes publiés, P. Pliil. Wolf, an-
5

cien jésuite, qui paraît avoir été en même temps le libraire


et l'éditeur, a laissé même d'après son plan, quelque chose
,

à faire. Ainsi il n'avait point signalé comme faux les renvois


qui sont aux articles Aiguillon , Allatils , Amphiaraus ,

Antoijse Apelles , Bedell.


,

A Ferri, remarque G, note 19, en renvoyant à


l'article
l'articleAkcillon il a laissé « page 220 » indication qui
, ,

est dans 1780 mais qui est fausse pour i8oi.


,

A l'article P. V. Cayet la rema/'^Me c/iYù/we est entière-


ment oubliée.
L'éditeur de Leipzig a fait aux articles Fernel etHEKralV
des additions que je n'ai pu me décider à admettre , mais
dont j'ai fait mention à leur place, tome VI, p. 4^9, et
tome VIII, p. 55.
Je reconnais avec plaisir que je lui dois l'addition à l'ar-
ticle Abrabanel tome I, page 83; et l'idée de celle à l'ar-
,

ticle Arnauld tome II page 398.


, ,

Y)&.n%\! Avertissement entête du i^'. volume, W^olfpr^omet-


tait , après l'impression de tout l'ouvrage , un Discours préli-
minaire qui eût contenu les recherches et les réflexions des
éditeurs. Je regrette beaucoup , pour mon compte que ,

cette édition n'ait pas été achevée 5 il n'est pas à croire qu'a-
près vingt ans d'interruption elle soit reprise (25).

(a5) Telles sont toutes les éditions que je connais du Dictionnaire de


Bayle; et je pourrais "ITresque assurer qu'il n'en existe pas d'autres.
Cependant un professeur au collège de France, membre de l'Institut, et
qui a été le premier président du conseil des Cinq Cents, homme non
moins recommandable par son caractère que par sou savoir, m'a donné
note d'une édition de 1748, en cinq volumes in-folio. Je n'ai pu me la
procurer malgré toutes mes recherches; mais une indication de !M. Daunou
est à mes yeux d'un tel poids que je n'ose affirmer que cette édition de
,
DE LA OINZIÉME ÉDITION. xix

i8?.o. Onzième édition.

Le Dictionnairehistorique et critique de Bayle avait eu ,

comme on vu, neuf éditions en quarante-quatre ans (de


a
169^ à 1741 )• Entre la neuvième et la dixième il y a eu \ux
intervalle de 60 ans mais cette dixième édition n'ayant pas
; ,

été finie peut rigoureusement ne pas être comptée et dès


, ;

lors c'est à une distance de près de 80 ans de la précédente


qu'aura paru léditioii de 1820,
C'est la première édition faite en France, car en 1784 ,

lorsqu'on imprima cet ouvrage à Trévoux, cette ville fesait


Dombes, qui étaitune enclave (26).
partie de la principauté de
Une digue de remarque c'est que l'auteur ayant été
cliose ,
,

à cause même de son livre, honoré par un parlement (27) ,

son ouvrage ait éprouvé si long-temps une espèce de pro-


scription (28).
Le Dictionnaire formé de deux
historique et critique est
parties. « J'ai ,composition en deux
dit Bayle , divisé ma
» parties l'une est purement historique , un narré succinct
:

)) des faits l'autre est un grand commentaire un mélange


5 ,

» de preuves et de discussions, où je fais entrer la censure

1748 n'existe pas; et l'on pardonnera à un e'diteur du grand sceptique de


rester ici dans le doute.
Chaufepié, dans son Dictionnaire , tome III page 108 de la lettre L , et ,

ailleurs cite à la marge une e'dition de Paris , 1733. Ce qu'il rapporte fait
,

partie d'une remarque de L. J. Leclcrc. Or, comme l'édition de 1734 est la


seule qui contienne ces remarques il me paraît évident que c'est cette
,

édition qu'il a voulu citer. S'il lui donne la date de Paris, c'est parce que
ce furent, comme je l'ai dit, des liliraires de Paris qui la firent faire à
Trévoux. D'ailleurs Chaufepié habitant la Hollande où les premières
, , ,

éditions avaient été faites, a mis ici Paris pour la France, quoique Tré-
voux n'en fiU alors qu'une enclave.
Enfin dans la Bihiiolheca latina de Fabriciiis édition in-4°. tome II
, , ,
,

pag. 201 à l'occa?ion do C. Sulpitius Apollinaire on lit « De hocBœlius


, , :

in Lexico T. 5. » L'édition de la Bihl. latina in-4°. est de 1728 et à cette


, ,

époque il n'existait pas d'édition de Bajle en plus de quatre volumes.


D'ailleurs, c'est à la lettre A que Bayle a mis l'article de C. Sulpitius
Apollinaire. Quelle pourrait au reste être l'édition de Bayle dont la lettre
A se prolongerait jusque dans le cinquième volume? il est donc tout na-
turel de penser que ce n'est ([u'une faute d'impression et qu'au lieu de ,

'< T. 5. » ( tome 5 ) il faut lire « T. I. » ( tome î"^'. ). Les gens de lettres ne


,

moulent pas toujours leurs chiflres, et leur mauvaise écriture est souvent
la cause des fautes d'impression.

Scimus et hanc t'eniam petimus.


(26) Cette principauté n'a été réunie à la France qu'en 1762.
(27) Voyez dessus pag. ij.
ci-
^28) On ne permettait pas (Voyez tom. XVI,» 182, i83 ) de le réim
jirimer en France; mais on l'y laissait circuler. Au lieu de l'acheter de^
étrangers , il était bien simple et bien facile de le leur vendre.
xK DISCOURS PRÉLIMINAIRE
» de plusieurs fautes et quelquefois même une tirade de
,

» réflexions philosophiques en un mot assez de variété pour


-,

)) pouvoir croire que , par un endroit ou par un autre , cha-


» que espèce de lecteurs trouvera ce qui l'accommode. »

Cette division indique la manière dont Bayle doit être lu


pour l'être avec fruit il faut d'abord lire tout le texte d'un
j

article puis après l'avoir achevé passer aux remarques qui


,

le concernent.
D'après les divisions ou distinctions établies par l'auteur
lui-même, il était donc naturel d'imprimer d'abord tout le
^exfe d'un article, puis toutes ses retnaïques en mettant ,

toutefois au bas des pages de l'un ou des autres les notes


qui s'y rapportent. C'est ce qui a été fait.
Par ce que j'ai dit des dix premières éditions, on a pu
juger que je les avais examinées avec quelque attention.
C'était le seul moyen d'éviter leurs fautes et de profiter de
leurs améliorations. J'ai signalé les unes et les autres. En re-
levant les fautes , j'ai voulu prouver les peines que j'ai prises,
et non faire des reproches à mes devanciers (29). Si jetais
sans indulgence pour eux , on aurait raison de me refuser
celle dont j'ai besoin.
A l'occasion des premières éditions j'ai déjà dit quelques
,

mots de mon travail j'ai encore beaucoup de choses à en dire.


;

I. Les éditions de 1720 1730, 1734, etc., contiennent


,

en tête du i". volume la Dédicace au duc d'Oi'léans. J'ai


déplacé cette pièce. Bayle ayant refusé de dédier son Dic-
tiomiaire (3o), on devait èti'e choqué de voir une dédicace à
l'ouvrage. C'est seulement l'édition de 1720 qui a été dédiée
au duc d'Orléans, régent. Dès lors cette dédicace, ouvrage
de Lamotte qui la rédigea pour le libraire Bohm ne de-
,
,

vait être placée qu'à son ordre chronologique pai^mi les


préliminaires.
Ces préliminaires très - amples , puisqu'ils comprennent
non-seulement les préfaces des éditions précédentes , mais
encore la vie de Bayle par Desmaizeaux , ont été rejetés dans

(29) Dans un ^ffl/2£-propos (provisoire) distribue avec le P'. volume j'ai


,

accuse' les éditeurs de lySo d'avoir omis quelques morceaux de l'e'ditiou de


xrio. Cependant ils avaient reparé ces omissions par un second erralum à
la lin de la Lettre de M. Desmaizeaux a M. de Lamotte , qu'ils ont im-
primé au tome I^' , après leur ^i'erlisseinent sur cette quatrième édition.
.

Cet Ai'ant-propos (provisoire) devant être enlevé j'en ai conservé ou répété


,

les choses essentielles dans mon Discours préliminaire qui doit le remj)la-
ccr. Je me suis bien gafdé de reproduire un reproche injuste et dont je
,

1^6 parle ici que pour taire réparation.


(3o) Voyez tome XVI, pag. 177.
DE LA ONZIÈME ÉDITION. xxj

le XVr volumn où ils occupent trois cents pages. Leur ad-


.

mission ou conservation dans le premier volume aurait re-


tardé Tentreprise et aurait dérangé la coupure des volumes
,

qui est telle que trois volumes entiers (les IX et XIII ) , X


sont composés chacun d'une seule lettre.
II. Les quatre volumes de l'édition donnée par Prosper
Marcliand, quoique l'édition eût été commencée en 1714?
sont datés de 17^.0, année où l'impression fut achevée. L'in-
verse a été fait pour l'édition centenaire^ tous les volumes
portent la date de 1820. Cette uniformité peut être critiquée.
A la page 'igi du tome XI (daté de 1820), il est fait men-
tion de l'édition projetée en 1821 , et abandonnée depuis des ,

OEuvres chirurgicales (f Ainbroise Paré. Dans le tome XII


(publié avec la date de 1820) j'ai cité la Dissertation de
M. Bclïara, qui est de 1821. Je conviens que ce sont là des
inconvéiiiens, mais ils ne m'ont pas paru très-grands,- et, en
définitive, il a mieux valu, ce me semble, sacrifier la ré-
gularité à l'uniformité ,
que l'uniformité à la régularité (3i).
C'était, au reste, quelquefois l'usage de M. Desoer qui a ,

daté de 1817 ses douze volumes des OEuures de P^oltaire,


quoique les derniers n'aient été imprimés qu'en 18 18.
III. J'ai rempli quelques-unes des lacuues qui existaient
encore dans l'édition de 1740 (^2); mais, malgré toutes mes
recherches, il est trois articles où il m'a fallu laisser k faire
à mes successeurs (33).
IV. Les doctrines de Bayle ont été souvent et très-longue-
ment attaquées. Comme il entrait dans mon plan de ne don-
ner que des éclaircissemens ou rectifications historiques ou

{3i)Le premier volume de Bayle a paru en octobre 1820 le II", en jan- ,

vier i8ii le 11^'. en mars


, le iV*=. en juin
, le V". en juillet
, le VI^. en ,

septcral)re le Vll«. en décembre 1821 le Vlll'^. en février 1822, le IX". en


, ,

mai le X''. en juillet, le XF. en septembre le XII"^. en novembre le


, , ,

XIII". en décembre 1822, le XIV". en mars 1823 le XVe. en juin 1823


, le ,

XVI". sera distribué dans le mois de mai iSa^-


(32) Les articles que j'ai remplis sont ceux de Francus IV, 587 G. , ^

HoRSTius, VIII, 2I0-2H ÀViNDECR XIV, S^Q. J'ai complété une citation de
; ,

l'article Loyer que les éditeurs de i74'3 n'avaient point achevée.


(33) J'ai laissé en blanc des citations dans les articles Hérault III 829 ; , ,

J.des Caubres, IV, 606; et Saint-Cyran XIII, ^i faute d'avoir pu me


, 5

procurer 1°. Bric^e et claire défense de la l'ocation des ministres de


:

L' Etjangile contre la réplique de niessire Jacques Dai>y, éféque d' Ki^reux
,

faite article par article sur la même réplique, Montauban iSgS, in-8°., de ,

498 pages 2". OEuures morales et diversifiées de Jean des Caurres


; ,

Paris, G. Cliaudière iS^S, in-8'\ l'édition de i584 contient une autre


, ;

dédicace que celle dont il fallait rapporter un passage; 3". Le Port Royal
et Gencive d intelliqence contre le très-Saint Sacrement de l'autel , par le
père Meynier.
,
.

xxij DISCOURS PRÉLIMINAIRE


littéraires , et non une réfutation ,
j'ai écarté toutes les criti-
([ues quine portaient que sur les doctrines. J'avais à présen-
ter le résumé des observations contenues dans les écrits de
Chaufepié, Guib, Joly, Lamonnoye, J. Leclerc, L. J. Le-
clerc Leducliat, dans la Bibliothèque française etc.
, ,

La BIBLIOTHÈQUE FRANÇAISE, dont il s'agit ici,


n'est point l'ouvrage de l'abbé Goujet, Paris, i'^l\o-i'']^G ^
dix-huit volumes in-12; mais le journal publié à Amster-
dam sous le titre de Bibliothèque française , ou histoire litté-
raire de France^ ï'ji\-ï'-j^Q ,
quarante-deux volumes in- 12.
Un anonyme fît imprimer dans le tome XXIX, page i85-
20a, et dans le tome XXX ,
pages i-25, des Obsen>aiions
critiques sur le Dictionnaire historique et critique de M. Bajîe.
Un partisan du philosophe de Rotterdam prit sa défense
par un article inséré dans le tome XXXIII pages 32^-35
1
,

Une réponse de l'auteur des Observations est insérée au


tome XXXVIII, pages 196-214, sous le titre de Lettre de
Monsieur *'^. J'avais cru pendant un temps que l'auteur des
Observations était l'abbé Joly, de qui je reparlerai bientôt. Je
fondais ma conjecture sur la ressemblance que je trouvais
entre des phrases de ces Observations et quelques-unes
des Remarques de l'abbé Joly. Je présumais (34) que l'au-
teur seul d'un article pouvait le copier sans le citer j'étais 5

dans l'erreur. Joly ne fait pas tant de façons au moyen d'une -,

mention faite dans sa Préface il s'est cru permis de passer


,

sous silence le plus souvent


, les auteurs véritables des
,

observations qu'il reproduit dans ses deux volumes. Or


comme son livre n'est guère lu de suite mais seulement ,

consulté, il est d'autant plus naturel de faire honneur à


Joly de tout ce qu'il n'indique pas comme étant d'autrui
que quelquefois il lui arrive de citer la Bibliothèque fran-
çaise et les autres critiques ses devanciers.
CHAUFEPIÉ. Cet auteur est surtout connu par son
Nouveau Dictionnaire historique et critique pour servir de
supplément ou de continuation au Dictionnaire historique
de P. Baylc , i'j5o-56, c|uati'e volumes in-folio. C'est une
traduction (avec confections et additions) d'articles ajoutés

(34)Voyez ma note dans la Biographie uiiii^erseUe tome XXI, pag. 6o5. ,

Il évident que Joly n'est pas l'auteur des Obscn/ations insérées dans la
est
Bibliothèque française. Dans la Bihliolhérjue française , à l'occasion de
Bachovius, ou lit qu'il flottait entre le protestantisme et le papisrite. Joly,
trouvant sans doute ce dernier mot irrévérencieux a mis à la place les mots ,

de religion catholique. On trouve d'autres cliaugemens d'expression dans


Itïs articles Claode, Guise, Macédoinf. Pergame Suétone. Joly va même
, ,

dans l'article Tillet jusqu'à réliiter l'écrivain de la 'Bibliothèque française.


DE LA ONZIÈME ÉDITION. xxiii

par les liaducteurs anglais du Dictionnaire de Bayle. Sur


près de quatorze cents articles que contient l'ouvrage d<^;
Chaufcpié, cinq cents environ sont entièrement de lui.
Chaufcpié ministre et prédicateur calviniste respecte les
, ,

caractères dont il est revêtu , chose très-louable sans con-


tredit; mais n'ayant pas l'indépendance de Bayle son style ,

nen a pas le piquant. La seule édition qui ail été faite du


Dictionnaire de Chaufepié n'est pas encore épuisée. Ce se-
rait une témérité que de le réimprimer. C'eût été une grande
maladresse que de i^efondrc son ouvrage dans celui de Bayle.
Rédigés dans la même forme , les deux livres diffèrent tout-
à-fait dans le fonds et très-souvent sont compléteinenl
,

disparates.
GUIB ( Jean-Frédéric ) , docteur en droit à Orange , au
commencement du XVIII". siècle, a fait insérer dans les
JYouuelles littéraires du 29 mai 1717, tome V, pages 34^-35 1 ,

des Remarques critiques sur quelques endroits du Dictionnaire


de Bayle (elles portent sur les articles, Ant. Arkaxld .

AuBERi BioN, Espagne, Mariaka). C'est sur d'autres ar-


,

ticles (Apollinaris, Mestrezat, Le Païs et Thorius) que


portent les remarques du même Guib imprimées dans le ,

Mercure de novembre 17512 tome II pages 23-0.9. Joly n a


, ,

probablement pas eu connaissance de cet auteur car il no 5

l'a ni cité, ni dépouillé.


JOLY (Philippe-Louis), chanoine à Dijon, et dont il a déjà
été question , fit impi-imer, en 1748 des Remarques critiques
,

sur le Dictionnaire de Bayle en deux parties formant un vo-


,

lume in-folio. En tète de l'ouvrage il y a quelques pages con-


sacrées à des corrections et additions. Joly n'a guère fait que
copier ses devanciers et il ne l'a pas toujours dit. Il a fallu un
,

travail comme celui dont je me suis chargé, pour faire cette


découverte. J'ai noté sur mon exemplaire de Joly tout ce
qui est pris à Leclerc, Leduchat et autres, et les marges
sont toutes noires. Je n'hésite pas à regarder Joly comme l'iin
des plus grands et des plus eflrontés plagiaires. Ce qui m'au-
torise à le traiter si sévèrement, c'est le soin qu'il a eu tan-
tôtde transposer des phrases de ses devanciers, tantôt de les re-
tourner ou d'y faire tel autre changement pour dénaturer le
travail d'autrui. Ainsi dans l'article Fl. de Remond, Leclerc
disait il j a mille endroits
: etc. Joly a mis (tome II page
, ; ,

675) :il j a deux cents endroits, etc. Leclerc, dans une


remarque sur Nestorius ayant écrit comme personne nen
, :

doute , Joly a mis comme aucun chrétien iien doute. Sur la


:
xxiv DISCOURS PRELIMINAIRE
remarque H de l'article Politien , Leclerc s'exprime ainsi :

J'ai sous les yeux lesLettres de Politien avec les commentaires


de Sylvius et de Badius , imprimées in-^° par le même Ba- .

dins, en iSio. Joly se contente de dire Badius imprima :

Van 1020, in-^. , les Lettres de Politieji avec ses commen-


taires et ceux de Sjlvius.
On ne doit donc pas être étonné de voir Joly cité rare-
ment; j'ai presque toujours indiqué l'auteur primitif de la
critique. Si j'ai un reproche à me faire, c'est peut-être
d'avoir, par ignorance ou inadvertance, laissé le nom de
Joly à quelques notes qui ne sont pas de lui.
JOURNAL DE TRÉVOUX. On désigne ordinairement
sous ce titre les Mémoires pour servir à Thisloire des sciences
et des beaux-arts, rédigés par des jésuites, et impiûmés d'a-
bord à Trévoux, puis continués à Paris. Ils contiennent
c[uelques articles sur Bayle, et entre autres ceux du P. Mer-
décembre i735,
lin, en juillet 1736, avril, mai, août et
novembre 1788.
JUGEMENS SUR QUELQUES OUVRAGES NOU-
VEAUX, par l'abbé Desfontaines, de Mirault, Fréron et
autres. Cet ouvrage a onze volumes qui ont paru en 1745
et 1746.
LAMONNOIE. Les remarques de cet auteur sur Bayle se
trouvent dans trois ouvrages 1°. le Menagiana, 17 15,
:

4 volumes in-12, et ses réimpressions 20 les Jugemens des


;

Savans par Baillet édition de 1722 8 volumes in-4''. ou


, , , ,

1725, dix-sept parties in-t2; 3°. la réimpression donnée


en 1772, par Rigoley de Juvigny, àe?, Bibliothèques fran-
çaises de Lacroix du Maine et Duverdier. J'ai indiqué
chaque fois dans lequel de ces trois ouvrages se tiouvent
les observations de Lamonnoie que j'ai citées.
LECLERC (Laurent-Josse) n'est pas l'auteur de la Bi-
bliothèque universelle de la Bibliothèque choisie, de la Bi-
,

bliothèque ancienne et moderne. Ce dernier s'appelait Jean ;


il était contemporain de Bayle , à qui il a survécu, et l'a

plusieurs fois attaqué dans ses Bibliothèques. Jean Leclerc est


cité quelquefois mais l'attention que j'ai eue de faire toujours
5

précéder son nom de l'initiative de son prénom préviendra


toute confusion.
Laurent- Josse Leclerc, que le plus souvent je n'ai appelé
que Leclerc, donna en 1782 une Lettre critique sur le Dic-
tionnaire d(i Ray le un volume in-12. Ses observations sont
,

lourdes, ditiuses, présentées sans aucun o^^dre et ne por- ,


,-

DE LA ONZIÈME ÉDITION. xxv


tent que sur uu
très-petit nombre d'articles mais il a -,
,

depuis revu ,corrigé augmenté son travail il a rangé


, , 5

ses notes par ordre alphabétique et elles ont ainsi été réim- ,

primées comme je l'ai dit, à la suite de chacun des cinq


,

volumes de l'édition faite en 1734, à Trévoux (sous le titre


d'Amsterdam) du Dictionnaire de Bajle. L'auteur s'y
,

montre ultramontain ce qui ne fait pas grand'chose ici


,
5

la nouvelle forme qu il a donnée à ses notes en a fait un ou-


vrage curieux et instructif. Aussi est-ce Leclerc qui a fourni
au plagiaire Joly la plus grande partie de ses Remarques.
L. J. Leclerc renvoie quelquefois à la Bibliothèque de
Richelet. Cette Bibliothèque ^ etc. , ou liste des auteurs cités
dans le Dictionnaire de la langue française de Richelet se ,

trouve dans le premier volume de l'édition de ce livre faite


à Lyon en 1727 en trois volumes in-folio (35).
,

LEDUCHAT. Ses Remarques sur le Dictionnaire de Bayle


sont aux pages 145-217 du tome i^r. du Ducatiana 1738 ,
,

2 volumes in- 12. Leduchat est , comme je voir (36) ,


l'ai fait
l'auteur d'une partie des Remarques critiques ajoutées en
1720.
MARCHAND (Prosper), qui n'a consigné qu'un très-
petit nombre de
critiques de Bayle dans son Dictionnaire
historique qui fut publié en 1758, par Allamand
^
deux ,

parties in-folio formant un volume assez mince aura pro-


, ,

bablement fourni quelques-unes des Remarques critiques de


1720; mais rien ne m'a indiqué celles qui peuvent lui appar-
tenir.
REM. CRIT. Les notes à la fin desquelles on trouvera ces
abréviations sont celles qui furent ajoutées dans l'édition
de 1720.
V. Comme dans les dernières éditions les lettrines ont ,

été employées pour les notes du texte , les chiffres arabes


pour les notes des remarques. Les notes qui, dans les édi-
tions antérieures avaient des étoiles , des croix ou autres
,

signes aujourd hui inusités , ont des étoiles entre parenthèses,


avec des chiffres supérieurs lorsqu'il y en a plusieurs dans
la mêmecolonne.
par des étoiles sans parenthèses et avec des chiffres
C'est
supérieurs ^ au besoin, que j'ai indiqué les notes nouvelles.
Lorsque les notes ajoutées portent elles-mêmes sur des notes
(35) La Bibliotheijue de Richelet , par Leclerc a ete' le sujet d'une vio,

lente critique de dom Lecerf, qui fît insérer, en i73i , dans la Bibliolfii-i/ne
française, tome XV"! , pages 86-107, sa LeUre d un rciisicux hcnédictin , etc.
(36) Pai,'. xiij.
,

xxvj DISCOURS PRÉLIMINAIRE


elles sont tout simplement ajoutées au milieu ou à la suite ,

mais entre deux crochets.


Mes notes ne sont guère que le dépouillement des criti-
ques dont j'ai fait Fénumération. Je me suis borné le plus
souvent à de courtes indications.
Quelquefois j'ai trouvé les critiques amers de Bayle en
défaut. C'était une bonne fortune dont je n'ai pas manqué de
profiter.
Tout pénétré que j'étais de l'obligation de faire mes notes
très-courtes, j'ai cédé à la tentation d'en étendre quelques-
unes 5 je signalerai seulement celles des articles François I^''.,
Launoi, Longus, Louis XII, Ménage, Poquelin (Molière),
et les deux du tome XV page 439 et 446- J'avoue n'avoir
,

mis ces deux dernières que comme remplissage, et pour


que la dernière page du volume ne fût pas blanche.
Dans ma note ajoutée à l'article François I'^''. (tome VI,
p. 56i ) j'ai rapporté de ce monarque une lettre citée par
M. Dulaure (3^) d'après la Chronique manuscrite de Nicaise
Ladani et les res^istres manuscrits du Parlement.
Cette lettre est une des deux que donne M. Delort dans
Mes voyages aux environs de Paris (38). Son texte, un peu
différent de celui qu'on lit dans l'ouvrage de M. Dulaure
mérite d'être rapporté le voici -, :

« Pour vous faire asscavoir Madame come se porte la reste


» de mon infortune de toutes choses non mest demuré que
» Ihonn et la vie qui est sajne et pour ce que an vostre ad-
)) versité ceste novelle vous sera quelqs peu de reconfort
)) ay prie que Ion me leyssast vous escripre ceste ïetre ce que
)) Ion ma aisément acorde vous supliaiit ne vouloir prendre
» lestremite de vous mesmes en usant de vostre acostumée
,

» prudance. Car je ay espérance que a la fin Dieu no me


» abadonera point, vous recomandant vostres petits enfans
» et les miens. An vous supliant feres donner leur passage
)) pour aller et revenir an Espagne au presant porteur , car
)) il va devers lanpereur pour scavoir comad il voudra que

» je sois traitté. Et sur ce me voys recomder humblement à

» vostre bone grâce.


» Vostre très humble et très
"
» obeisant fylz
» François. »

(37) Htiloiie physù/ne cirile et morale de Paris, Guillaume, I'*, édition,


,

tome 111 p^g'^s 4 et 5; seconde édition tome 1\', pages 8(> et 87.
,
,

(38) 1831, deux volumes in-8". tome H p;igcs 177,^ 17g.


, ,
DE LA ONZIÈME ÉDITION. xxvij

D'après le texte de cette lettre , j'ai rangé dans les mots bien
trouvés , mais qui ne sont pas vrais, le fameux Tout est per-
du fors t honneur , qu'on attribue à ce pudibond monarque.
Un critique (Sg) croit qu'rt moins d'être un docteur bien subtil
tout homme de bonne foi ne trouvera aucune dijjdrence essen-
tielle entre la phrase devenue proverbiale et les expressions de
la lettre. Le critique pense que , pour le sens et le noble sen-
timent quils expriment^ les mots des deux versions présen-
tent à t esprit la même chose. Cela peut être tout au plus
pour le sens , mais non pour le sentiment , ou pour le carac-
tère.
VI. Ce n'est pas seulement le préambule de rarlicle
Achille que j'ai rétabli (4o) j'ai rétabli aussi le commen-
;

cement d'une remarque de l'article Spikosa ( tome XIII ,

page 432 ).
Les nombreux lecteurs de Voltaire auront sans doute re-
marqué le passage de sa lettre à Cideville (en tète du Tem-
ple du goût) , où il liiit dire à un M. de*** « qu'en cherchant
» (dans Bayle) l'article César ^ il n'avait rencontré que celui
» de Césaiius, professeur à Cologne. » La manière dont
Bayle a écrit ces deux noms les lui a fait placer à quelque
distance l'un de l'autre c'est ce que n'a pas aperçu Voltai-
•,

re. Cœsarius est le premier article de la lettre C; César est


le soixante-douzième et le Napoléon romain a un article
;

assez étendu puisqu'il remplit 82 pages in-8°. La remarque


,

de Voltaire m'a donné l'idée de mettre avant l'article C.tsA-


nius, un renvoi ainsi conçu C.esar voyez César. J'ai aussi,
: ,

dans le tome XV, ajouté le renvoi Zéa voyez ZiA. :

Plus scrupuleux que le président Chasseneux , Bayle n*a-


vait, dans la remarque B de son article Hélè>e, cité que
les sept premiers vers sur les trente beautés d'une femme.
Je sais très-bien que le lecteur français veut être respecté ;
mais comme les vers sont en latin, je n'ai vu nul inconvé-
nient k allonger la citation que faisait Bavle
; et je ne me
suis pas permis cela deux fois.
VU. C'est à regret que j'ai laissé employer, dans les im-
parfaits et iiutres mots, les a au lieu des o; non que je
blâme l'orthographe aujourd'hui généralement reçue, grâce
à Voltaire 5 mais parce que Bayle loue avec raison (40
et conséquenunent recommande l'exactitude à suivre ponc-

(89) GazeUc (te France àw 16 décembre i^iZ.


f Voyez ci-dessus pages vij et viij.
|o)
(40 Dans les articles Espagnet et Ossai.
xxvii) DISCOURS PRELIMINAIRE
tuellement toute Torthographe des auteurs qu'on repro-
duit.
La composition du premier volume était très-avancée
quand on m'apporta les premières épreuves. Afin d'éviter les
embarras , les frais , les retards , il me fallut consentir à ce
qui était fait.
Pour une justification qui n'est pas la mienne , j'ajouterai
qu'en fait d'orthographe les plus rigoristes ne se confoi-ment
pas toujours, pour les auteurs du XVIP. siècle, à celle
cju'ils devraient suivre d'après leur principe. Ainsi dans les
éditions de Corneille et Racine on n'imprime plus niqy, loy, ,

roy, luy, icy, etc. tels qu'ils ont écrit et imprimé , mais moi ,
,

loi , roi , lui , ici, etc.


J'ai du reste respecté ce que Bayle appelle l'orthographe
d'érudition (42).
VIII. L'impression du premier volvime faite (aux a près)
aussi fidèlement que possible sur l'édition de i'^4oj adon-
né lieu à quelques observations. Des savans se sont plaints de
l'incorrection des passages grecs cités par Bayle. Pour être
à l'avenir à l'abri de semblables reproches, je ne pouvais
guère mieux m'adresser qu'au moderne traducteur d'Ho-
mère (43). Le plus âgé de nous deux n'a pas dix lustres, et
notre amitié date de huit. C'est par pure amitié que M. Du-
gas-Montbel a non-seulement vérifié les citations mais en- ,

core suppléé aux indications des citations qui étaient anony-


mes ou vagues. C'est de lui que sont entièrement les notes
nouvelles qu'on lit aux pages 279, il'] 335 du tome II et , ,

autres de la même famille qui sont répandues dans les volu-


mes suivans.
Malheureusement cet ami ne reste pas toujours à Paris.
Pendant son absence on l'a remplacé comme on a pu. Dans
les cas difficilesj'ai eu recours au membre de l'Institut que la
,

France peut opposer à ce que l'Allemagne et l'Angleterre pos-


sèdent de plus profond dans la littérature grecque. Mais la
crainte d'être indiscret m'a empêché d'employer habiluelle-
ment les lumières de de mon
M= Boissonade , comme celles
ami Dugas. Si c'est à de la cor-
eux que l'on est redevable
rection des citations grecques quand on en rencontrera ,

de fautives, on doit hardiment conclure qu'elles n'ont point


passé sous leurs yeux.
(42) Voyev, tome XVI page i-j , , et ci-dessus page v.
(43) L'//(rtfZe d'Homère, iSiS, tleu\ volumes in-8°. VOdysscc, suivie
:

An Bdtiachoiii.yomachie
la , îles IJ y tunes , «le Durera poèmes et jragmens
attribues h Homère 1818 , , deux volumes in-8°.
,

DE LA ONZIÈME ÉDITION. xxix

IX. Quoique j'aie eu jusqu


présent l'usage d'acquérir,
à
àmes frais les
, livres nécessaires pour les travaux qui me
sont confiés , je n'ai pas été sans profiter fréquemment de la
complaisance de M. VanPraet, l'un des conservateurs de la
Bibliothèque du roi. Ce. ll'est pas seulement aux instans où
les lecteurs sont admis dans ce bel établissement que j'ai eu
recours à M. Van Praet: hors des heures auxquelles la Bi-
bliothèque est ouverte et même pendant le temps des va-
cances , je l'ai toujours trouvé disposé à m'être utile.
X. M. Desoer revoyait lui-même les épreuves avec
beaucoup de soin. 11 vérifiait les renvois et a corrigé plus
d'une erreur. Ce libraire qu'on a surnommé l'Elzevier fran-
,

çais quoiqu'il ne fût pas imprimeur, s'était chargé spéciale-


,

ment delà table de l'édition. M. Desoer est mort le 16 avril


1823 à la fleur de son âge (44)? et c'est une perte pour la li-
brairie fiançaise. Il est impossible de pousser plus loin que
lui l'amour de son état. Aussi les amateurs ont-ils bien ac-
cueilli plusieurs de ses éditions. Son travail sur la table était
à peine commencé quand il so sentit frappé de la maladie qui
l'a enlevé. Peu de temps avant sa mort il prit le parti de la con-

fier à un homme de lettres qui après en avoir fait le quart


,

y a renoncé. C'est à partir delà lettre D inclusivement, que


M. Champagnac a pris une tâche dont il s'est très-bien ac-
quitté. Mais par la mort de M. Desoer et par cela même que
le travail n'était pas de la môme main, c'est sur moi qu'est
retombé le fardeau de revoir le tout et de faire les addi-
tions.
La alphabétique des articles, imprimée séparément
liste
dans précédentes , a été refondue dans la table
les éditions
des matières. Les mots qui sont le sujet d'articles dans le
Dictionnaire sont imprimés en petites capitales. L'astérisque
indique ceux qui contiennent des notes nouvelles.
Il ne faut pas croire que le travail de la table se soit borné
à changer les chitlres indicatifs des volumes et des pages , et
à faire quelques additions. Très-souvent les renvois étaient
faux et ce n'est pas sans peine qu'on les a redressés. Les plus
difliciles étaient mon lot. Aux deux exemples que j'ai ci-
tés (45) ,
je puis en ajouter un. Dans les éditions de i-Bo,
1^38 et 1740 , on lisait dans la table « Saurin (Eliel. Il est
:

mort le jour de Pâques, 8 d'avril. I. ^03. » Ce qui renvoie


au tome i^'. page 703. Les éditeurs de 1734, ici encore
,

(44) Jean-Théodore-Auguste Desoer était ne à Liège en 1788 ou 1789.


(45) Page XV.
sxx DISCOURS PRÉLIMIN. DE LA ONZIEME ÉDIT. etc.
ont escobardé ils ont supprimé les mots // est mort etc.
^

Je croyais faire mieux qu'eux en mettant, de mon chef, ( au


lieu de I. 708) i^oS année de la mort de Saurin. Je ne fe-
,

saîs que rétablir le texte de 1720 , où la phrase dont il s'a-


git se trouve pour la première foi:*
Deux phrases cependant ont résilté à toutes mes recher-
ches dans les articles Ouvrages et Pandectes. Au lieu de les
,

supprimer j'ai préféré laisser en blanc un peu d'espace que


,

rempliront les lecteurs qui trouveront ces articles.


Au mot Bibliothèque universelle, l'auteur de la table,
après avoir indiqué un seul endroit du Diclionnaire où le ,

journal de J. Leclerc est cité , avait ajouté et passim alibi.


J'ai supprimé ces trois mots latins qui ne servent à rien
puisqu'ils ne donnent aucune indication. Mais, repentant de
cette suppression j'ai laissé ces mêmes mots dans les autres
,

endroits où je les ai trouvés.


XI. Mon -intention était d'avoir des collaborateurs je :

croyais ne pouvoir soutenir seul le fardeau. C'est donc uni -


quement par méfiance de moi-même et non pas pour tromper ,

les souscripteurs que j'ai dans le prospectus parlé d'une


,
,
,

société de gens de lettres. J'avais besoin de donner cette expli-


cation.
XII. Un ouvrage d'aussi longue haleine ne pouvait s'im-
primer sans faute.
Optimus ille est
Qui rainiiuis urgelur.

Quelques personnes croient bien agir en taisant les


leurs mais un éditeur de Bayle doit se rappeler les éloges
\

que son auteur donne à la bonne foi de Sébastien Gryphius


pour ses errata. Cet habile imprimeur les mettait àlaplus
belle place où on ne manque jamais de jeter les yeux. C'est
donc immédiatement après mou Discours préliminaire
que je dois placer Y errata dans lequel je comprends toutes
les fautes que j'ai aperçues jusqu'à ce jour , sans prétendre
avoir relevé toutes celles qui existent.

A Paris, ce 1". mai 1824, anniversaire du jour où, en 1682, Pu} le


commença sa Critique générale de t'IIiatoire Jucali'inisme-

BEUCHOT.
ERRATA,

Tome I.

Page 55. Foller, //.«-e:; Feller.


93. Supprimez les crochets de la note 3.
210. Mettez l'étoile entre deux parenthèses; et entre deux
crochets, ce qui est après les mots Rem. Crit.
235. Supprimez les parenthèses de la note étoilée de la seconde
colonne.
208. Au lieu de deux crochets, mettez les parenthèses.
492. Idem.
Tome II.

93. Mettez l'étoile entre parenthèses.


162. Au lieu de la parenthèse à la fin de la note a , mettez deux
crochets.
5 16. Supprimez, dans la note, les mots: c'est à la remarque (B)
qu'il est question d'Auhigné.

Tome III.

i44- Supprimez les crochets de la note étoilée.


161. Dans la note étoilée, avec parenthèses , remplacez les cro-
chets par une parenthèse.
248. Note I , mettez un crochet à la fin.

Tome IV.

23. Note étoilée, Benardy, Usez Bonavàj.


III. Note 26. Au lieu de [cet article n'existe pas], lisez tome
:

XIII.
20g. Note étoilée. Portèrent, lisez portaient.
606. Ligne de la remarque (C), prendre, lisez prétendez pren-
dre.
Tome VI.

47. 1^^.
colonne, ligne 9, (C), lisez (R).
443. Note étoilée, Salpiati, lisez Salviati.

Tome VII.
96. Colonne 2 , ligne 17 , au , lisez ou.
Id. id. ligne dernière, angoises , lisez angoisses.
529. Colonne i"^., dans le 12e. des vers cités, Superciila, lise/.

Supercilia.
Tome VIII.

/i2i . Note étoilée , Avant-Propos, lisez Discours pîéliminaire.

Tome X.

400. Colonne 2*^., ligne 9*^. delà note, François Bernier,/àe2


Jean Bernier.
/|0i. Colonne 1**^., ligne liçf. de la note, A. A. Barbier, lisez
Adry (*).

Tome XII.

7g. Colonne i"^*^. , ligne 34, que le roi, /«ez que le peuple
créa roi.
412. Colonne 2*^., supprimez l'étoile qui est dans le texte.
611. Colonne 2*^., ligne 27 , cela me fait, lisez: (K) cela me fait.

Tome XIII.

525. Colonne 2*^. , ligne i5 , de roi, lisez du roi.

Tome XIV.
545. Au titre courant, Wesselius , //^rz Wesselus.
604. Colonne 2*^. , au bas des quatre vers grecs, F. 146, lisez
F. 196.
6i5. Colonne 2^., lignes 9 et 8 en remontant, Démocrate, lisez
Démocrite.

(*) Cette erreur paraissant inconcevable, voici une explication. Les ar-
ticles du Magasin encfclopvdique ([ue je cite en ce passage étant signés A
A. B. j'ai tout naturellement cru que ces trois lettres désignaient M. An-
,

toine Alexandre Barbier. .Te .«savais pourtant, mais je ne me rappelai pas


dans le moment, qu'elles voulaient dire: Adry, Ancien Bibliothécaire.
DICTIONNAIRE
HISTORIQUE ET CRITIQUE

DE PIERRE BAYLE.
A.
A.ARON, grand-prêtre des Juifs ta quelque temps après, je veux
et frèrede Moïse. Son histoire est dire un chérubin et que, contre ,

trop facile à trouver dans le Pen- son intention , les Israélites ado-
tateuque , dans le Dictionnaire de rèrent cette figure. Un docteur
Moréri dans celui de M. Simon
,
,
de Sorbonne chanoine d'Amiens
,

pour ne me dispenser pas d'en fai- (c), réfuta solidement ces suppo-
re ici un article. Je dirai seule- sitions l'an 160g. Il y en a qui
ment que la faiblesse qu'il eut de disent que la crainte d'être as-
condescendre aux désirs supersti- sommé fit qu' Aaron eut cette cri-

tieux des Israélites dans l'affaire minelle complaisance et qu'il es- ,

du veau d'or a donné lieu à bien


, pérait qu'en proposant aux fem-
des mensonges (A). Un certain mes de fournir leurs pendans d'o-
Monceau , ou Moncaeius * pu- ,
reilles, il éluderait la demande de
blia, vers le commencement du ce peuple , comme si elles eussent
dix-septième siècle , une apologie dû aimer mieux n'avoir point de
d'Aaron [à] , qui fut condamnée divinité visible que se priver de
à Rome par l'inquisition , comme leurs ornemens mais qu'il éprou- ;

le jésuite Cornélius à Laynde l'a- va que rien ne coûte à des esprits


vait prédit à l'auteur [b). On sup- enivrés de superstition et d'idolâ-
pose , dans cette apologie , qu'Aa- trie (d). L'Écriture Sainte ne fa-
ron eut dessein de représenter le vorise nullement ceux qui pré-
même objet que Moïse représen- tendent que le veau d'or n'était
* Joly du qu'il s'appelait Monceaux ou des
que de bois doré (B).
Monceaux. Je ne crois point que l'on doi-
(a) Elle a pour litre Aaron Purgaf us. On
: ve dire que Dieu suspendit en
la reimprima à Francfort l'an 1675, inS- ,
faveur d'Aaron l'action du feu,
L'édition de Leipsick, 1689, in- 12, dont il
est fait mention au WII
tome de la BiLlio- tout comme en faveur des trois
tlie'que Universelle ne diffère de celle de
,
Hébreux qui furent jetés dans la
Francfort qu'en ce que les libraires ont im-
prime un nouveau titre. (c) // 5e nomme Visorius. Son livre a pour
(i)Cornel. à Lapide, Commentar. iuEsod. titre : Destructio pseudo-Cherulù Moncaei.
Cap. XXXII, w. /j, pag;. 6o5. {d) Idem Cornai, à Lapide, ii/id.

TOUIE I.
, ,

2 AARON.
fournaise cle Babylone. C'est néan- ajouté que pure vérité comme elle est
moins l'opinion de quelques au- en la Bible latine et que rien li'en a ,

été laissé sinon choses qui ne se doi-


,

teurs (C). vent point Iranslaltr. Ainsi l'on doit


prendre ponr un fait certain ce qui
(A) Donné
lieu a bien des menson- regarde les barbes dorées, et une au-
ges.'] Le rabbin Salomon a cru (i)
I.
tre chose de semblable aloi qui a ,

que le veau que les Israélites adorè- été insérée au même chapitre xxxii :
rent était vivant et animé , et qu'Aa- c'est que les e/ijans d' Israël crachè-
ron, le voyant marcher et manger à re/it si J'en contre Hur, qui refusait de
la manière des autres veaux, lui faire des dieux au Us l' étouffèrent, he
,

dressa un autel. Il y a quelque chose livre (4) d'où j'emprunte ceci a été fait
de semblable dans l'Alcoran (2). II. par un ministre wallon , qui ne man-
Plusieurs rabbins pour disculper , que pas de se récrier sur la hardiesse
Aaron, disent que ce ne fut point lui que l'on a eue d'ajouter certaines cho-
qui fît le veau d'or qu'il n'y contri- j ses d'un côté, pendant (|ue de l'autre
bua qu'en jetant l'or dans le t'en pour , on faisait des suppressions. Double
se délivrer de l'importunité du peu- attentat version obreptice et subrep-
:

ple mais que certains magiciens, qui


:
tice^ traditions puériles insérées et :

s'étaient mêlés avec les Israélites à la néanmoins , on ne promet dans la pré-


sortie d'Egypte, donnèrent la figure face que pure vérité, et on déclare
de veau à cet or. Comme l'Écriture que cette translation a été faite non ,

déclare que ce fut un ouvrage de fonte pas pour les clercs mais pour les laïcs ,

à quoi l'on employa le burin nous , et simples religieux et ermites qui ,


pouvons supposer deux choses ou :
ne sont pas lettrés comme ils doivent.
que l'on fit un moule semblable à un Cela même rend plus blâmable l'infi-
veau, dans lequel on jeta l'or fondu, délité du traducteur les habiles gens :

ou qu'après avoir fait une masse d'or, peuvent garantir du piège les igno-
se ;
on la convertit en veau par le moyen rans ne le peuvent pas. Au reste la ,

de la sculpture. III. Plusieurs ont cru barbe d'or n'est pas l'unique chimère
qu'Aaron ne fit point un veau tout en- que les rabbins aient forgée. Ils ont dit
tier, mais seulement une tête. IV. On que l'eau que Moïse fit avaler im- ,
conte (3) que la poudre du t^eau d'or prégnée des corpuscules du veau d'or,
que MoïseJit hrdlcr et mêler dedans de lit le même eliét à peu près que les ,
,
l'eau dont les Israélites burent, s'arrê- eaux de jalousie.
Elle causa des enflu-
ta sur les barbes de ceux qui l'avaient res et des ulcères à ceux qui étaient
adoré et eurent les barbes dorées qui coupables et ne fit nul mal aux in-
,
, ,

fut une marque spéciale pour reconnaî- nocens (5).


tre ceux qui avaient adoré le veau. Ce (B) Que le veau d'or n'était que de
conte a été inséré au chapitre xxxu de bois doré.] L'Ecriture dit expressé-
l'Exode dans une Bible française im- ment
(6) que ce fut un veau de fonte
, •

primée à Paris, Pan i538, par An- et si elle dit ensuite


(7) que Moïse le brû-
toine Bonnemère, qui dit en sa pré- la et le réduisit en poudre, cela ne
doit
face Cette Bible en français a été la pas nécessairement s'entendre
:
comme
première fois imprimée h la requête si cette idole avait été faite d'une
ma-
du très-chrétien roi de France Char- tière combustible cela peut signi- :

les f^IIl de ce nom , assavoir en l'an fier


''
que Moïse refondit cet or, et qu'il
1495 et depuis a été corrigée et im-
,
le divisa en parties très-menues qui
primée. La même préface fait savoir étant jetées dans
,

l'eau, y devinrent
que le traducteur français na rien imperceptibles comme celles qu'oa ,

(i) Àpud Cornel. à Lapide in Exod. p. Go5 dit que le Tage et


le Pactole charrient.

(2) Ascemeli taurum fudil corpoieum , ,


Ainsi François Junius pourrai t bien s'ê-
cmitienlem miigilum. Aiora Lalini Codt- XXX
cis , XX Arabici apud Seldeoum de Diis Syris.
. (4) // a pour titre la Divine Mélodie du
Sjnl. I cap. IV, pag. 54.
,
saint Psalmiste, et fut imprimé à Middel/iourg,
(3) Voyez Jérémie de Pours, à la page 82g Van 1644 1 '"-4- L'auteur se nomme Jérémie de
de sa Divine Mélodie. Pours.
* Leclerc conteste cette date de i495. C'est (5) Vurez Salian , tome II , p. i65. Bocharli
pourtant celle qui a été adoptée a peu près. Hieroioic. part. /, lib. II , cap. XXXIV.
,

Voyez le Manuel du Libraire , par M. Brunet (6) Exode, chap. XXXU, vs. 4.
au, mol CoMLsTOK. (7) Lit, même , vt. 10.
,

AARSENS.
tre trompe qtiand il a dit (8) : Quam- autres exemples , celui de Sydrach ,
i'is non tant exiitimari possit l'ilulus Misach et Abdénago
qui sortirent ,

totus ex auro Jouisse conflatus ,


iste sains et saufs de la fournaise de Baby-
quam auri laniinis tantuntmodà ob- lone. Prenez bien garde qu'il ne cite
ductus cœtera ligneus ut quern S.
, , point rÉcriture mais Josephe, pour ,

Lillerœ tradunt combustum alque in , ce qui concerne Aaron et que l'Ecri- ^

cineres i'ersuni. Il a eu plus de sujet de ture (i3) ne^ dit


point si la plaie
mettre Aaron à la tête de son catalo- qu'Aaron arrêta, et qui fit périr 14,700
gue des anciens sculpteurs architec- , personnes , était un feu extraordinai-
tes ,
peintres , statuaires , etc. Aaron re, ou quelque autre chose. L'histo-
me'riterait cette place par le droit d'an- rien des Juifs a supprimé entièrement
tiquité, quand même Tordre alphabé- ce miracle ; il ne fait mention que du
tique ne la lui donnerait pas. Cela feu qui consuma les deux cent cin-
me souvenir de ceux qui disent
fait quante hommes qui offraient le par-
qu'il fallait que Moïse sût en perfec- fum. L'Ecriture en parle aussi (i4),
tion la chimie, puisqu'il savait faire mais comme d'un fait antérieur au
de la poudre d'or ou réduire Tor en , ravage qu'Aaron arrêta. Notez que
poudre. Plusieurs croient qu'Aaron ne Josephe se contente d'observer que le
lit qu'ordonner à des orfèvres la fonte feu extraordinaire qui consuma Coré
du Tcau d'or, et qu'il n'y mit point avec les 25o hommes qui offraient le
la main lui-même et que Moïse n'or- : parfum ne fit aucun mal à Aaron. Il
,

donna point aux Israélites de boire la ne touche point les circonstances pour
poudre d'or^ mais que, l'ayant jetée lesquelles le cordelier Nodin le prend
dans le torrent, qui était le seul en- à témoin. Rapportons ses termes : 'A<^
droit d'où ils pouvaient boire , l'on a CÙ Trâ'/TiÇ , Ù Tê (fiO-^tÔiTIOI XstJ Gl TriVTn-
eu raison de dire qu'il leur avait fait zovTtt Kctt Kof «C *i:stVT«ç iTT hÙtouç, i<3/^a.~

avaler l'idole c[u'ils avaient adorée (9). pna-xv eéç x.acï ra. Tcef/.ttTct eÙTOcv aL^oLvn
(C) C'eit néanmoins l'opinion de yiyovîvxi. Ylipi^céî^iTO.i es /t/.ôvoç 'Aafav
quelques auteurs.'\ Un cordelier, doc- /A>lSiv ÙtTO ToS TTUpOÇ yS>ittCê(Ç , TU) TOV QiOV
teur en théologie de la faculté de Pa- sTvai TOV (.Ùç'iSil XSt/êlV oLmç'XXX.liTX (i5).

ris prétend que le miracle par le-


, Cujus (ignis) t't ac impetu ducenti illi
quel le buisson d'Horeb fut conservé quinquaginta una cum Core, ifa et ,

au milieu des flammes (10), se renou- sunt absumpti ut ne cadaferum qui- ,

vela quelque temps après lorsque le dem reliquice comparèrent soins Aa-
,
:

feu ôta la vie à deux fils d'Aaron sans ron superfuit illœsus ut manifestum , ,

que leurs chemises reçussent aucun esset dii'tnitiis coortum hoc iiicendiunt.
dommage et lorsque Aaron fit cesser Il reconnaît là avec raison le doigt de
,

la plaie qui faisait mourir un grand Dieu mais sans spécifier si le feu, ,

nombre d'Israélites (i i). Siculijactum toucha immédiatement le corps d'Aa-


est quatidb egressus ignis a Domino,
, ron, ou si seulement Dieu l'empêcha
JVadab et Abiud ignem alienum et pro- de s'en approcher. Il ne fallait donc
phanum. coram Domino nfferentes de- pas que le père Nodin descendît du
l'orat^it, id est interfecit i'estibus et genre à l'espèce, ni qu'il citât pour
,

tunicis eoruni tineis inlactis remanen- cela l'historien juif. La plupart des
tibus. Idem judicium est de Aai'one fautes de cette nature qui sont in- ,

summo sacerdote qui citissimè prn- nombrables dans les livres, viennent
,

fectus est ad populum quem ignis ou de ce que l'on ne consulte pas les
,

egressus a facie Domini interjîciebat : originaux , ou de ce que l'on se donne


stetitque illœsus inter mortuos ac fi- la hardiesse de les altérer par des pa- ,

l'entes, licet esset in medio flamniœ raphrases pour les faire mieux servir ,

fulgentissimœ etjlagrantissimce se- à ses hypothèses.


, ,

cundùm Josephum libro If^ Atiliq. (i3) Nombres, chap. XVI


,
vs. 46, et suiv. ,

cap. III (12). 11 ajoute à cela, entre chap. XV! vs. 35. Nombres,
(i4) ,

(8) In Calalogo ArtiCcum, pag. i. (i5) Joseph. Antiq. Lib. IF, cap. III , p.
(9) ^orez Rivet, sur le chap. XXXII de 07. G.
l'Exode, bper. Tom. I , pag. 1184.
(10) Exode, chap. III , vs. 2.
(il) Lévitique, chap. X, vs. 1 et S. « AARSENS (François) , sei-
(la) Joannis Nodin Commentar. in cap. III. de
gneur de Sommelsdyck
'

i
et
Exod. ,
pag. 142 , col. 2.
,,

AARS ENS.
Spyck, etc., était un des plus » bassadeur de ce qu'il devait né-
grands ministres quelesProvin- » gocier. Et de fait , il a fait
ces-Unies aient eus pour la né- » honneur à l'état en toutes ses
gociation (A). Son père, qui » ambassades, aussi-bien qu'au
était un autre habile homme ,
» caractère dont ses souverains
était dans un poste ou il lui » l'ont revêtu; quoique lui ni sa
était facile de faire donner de » postérité ne doivent point (F)
l'emploi à son fils (B). Jean d'Ol- » regretter le temps qu'il a em-
den-Barnevelt qui avait alors
,
« ployé au service de la patrie
la principale direction des affai- » (a). » Il est mort fort âgé ,

res deHollande et de toutes les laissant un fils (G) qui a passé


Provinces-Unies, le fit envoyer pour le plus riche de Hollande,
en France en qualité d'agent. Ce et qui a été fort connu sous le
fut là où il apprit à négocier nom de monsieur de Sommer-
avec ces grands maîtres Hen- dyck (b). ,

ri IV , Villeroi , Rosny , Silleri


(a) Tiré de VVicquefort Traite de l'am- ,

Jeannin, etc.; et il j
réussit, bassadeur, tom. II, pag. ,f|35 el /j36'.
en sorte qu'ils approuvèrent sa (b) C'est ainsi qu'on prononce ,
quoique le
nom soit Sommelsdyck.
conduite. Il eut ensuite le ca-
ractère d'ambassadeur, et fut (A) Etait un des plus grands minis-
le premier qui fut considéré en pour la négociation.'} Ses enne-
tres...
mis ne lui disputent point cette qua-
cette qualité dans cette cour-là
lité ; car, quand ils disent qu'il (r)
et du temps duquel le roi Hen- était le plus dangereux esprit que les
ri IV déclara que l'ambassadeur provinces conjédérées aient jamais
des Provinces-Unies prendrait porté , et d'autant plus h craindre ,
qu'il cachait toute la malice et toute
rang immédiatement après ce-
la fourbe des cours étrangères sous la
lui de Venise. Il fut après cela fausse et trompeuse apparence de la
employé auprès de cette ré- franchise etde la simplicité hollan-
publique (C) , et auprès de plu- daise; qu'il était ardent et persuasif;
qu'il trouvait des raisons pour appuyer
sieurs princes d'Allemagne et
les plus mauvaises causes ; que (2)
d'Italie, à l'occasion des mou- c'était un esprit intrigant , qui auait
vemens de Bohème Il a (D). eu des liaisons et des intelligences
outre cela plusieurs ambas-
fait avec des grands de France , dont les
actions étaient non-seulement suspec-
sades extraordinaires en France
tes, mais odieuses au roi; et qu'ayant
et en Angleterre (E), dont il a
gagné le secrétaire de l'ambassadeur
faitdes recueils fort' exacts et de France à la Haye il savait (3) les ,

très-judicieux. On y peut re- plus particulières intentions de cette


couronne quand dis-je ils lui don-
marquer que toutes les in- ; , ,

nent ces qualités, ils en font l'homme


structions que l'état lui a don- du monde le plus capable des ambas-
> nées et toutes les lettres de
, sades les plus importantes et des né-
> créance qu'il a emportées en ses gociations les plus délicates. Au reste,
M. du Maurier qui se déchaîne cruel-
dernières ambassades , sont tou- ,

lement contre François Aarsens, four-


tes de sa façon : tellement qu'il nit lui-même aux lecteurs le moyen de
faut croire qu'il était l'homme ne se laisser pas préoccuper par ses
de tout le pays qui savait le invectives; car il nous apprend que

> mieux, non -seulement négo- (i) Du Maurier, Mémoires, pag. 376.
(2) Là même, pag. 3^8.
cier, mais aussi instruire l'am- (3) Là méme„page 384-
AARSENS. 5
son père et cet ambassadeur hollan- qner ce que le cardinal Pallavicin a
àdh fuient toujours (4) ennemis ; qu'il reproche au père Paul. Il (8) dit qu'il
y avait M/ze incompatibilité inswmon- a une lettre du sieur de Zuilichem
table entre leurs naturels, et que la secrétaire du prince d'Orange où il ,

jurande ai'crsinn qui s'était élevée en- raconte que s' étant rencontré a P^enise
,

tre eux. s'augmentait de jour en jour dans une entrevue fortuite du sieur
)i II lieu de diminuer. Il nous apprend de Sonwierdych, ambassadeur de Hol-
luème que son père harangua le i6 ,
lande et de Fra Paolo ce père ai'ait
, ,

novembre i6i3 devant les états gé-


, dit h ce ministre, qu'il ressentait une
néraux contre François Aarsens (5) , extrême joie de uoir le représentant
(t\.\vn reprocha d'ai^oir osé parler irré- d'une république qui tenaille pape
l'cremment de leurs majestés et de pour le urai Antéchrist. L'auteur du
messieurs de leur conseil, qui étaient livre intitulé, Cancellnria sécréta fin-
ies plus fermes soutiens de la liberté hallina rapporte quelques fragmens
des provinces confédérées et l'accusa ,
de lettre, par où il paraît que Fran-
d'audace , de légèreté en ses langages cois Aarsens en allant à Venise ,

ordinaires , et d'ingratitude payant ,


avait des lettres de créance pour né-
d' insolence tant de bienfaits dont la gocier avec les cantons protestans , et
France l'ai'ait comble. ÏSous voilà suf- qu'il eu reçut de grands honneurs. Ce
fisamraent munis d'antidote. Qui ne fut un an après la députation des mi-
sait qu'il faut bien rabattre de la si- nistres suisses au synode de Dordrecht.
gniflcation des termes quand un en- Gratias se imprimis egisse quàd civi-
nerai parle de son ennemi ? taies et oppida non catholica prœdi-
(1)) Son père. ..était dans un poste... cantes suos anno pb.£tef.iapso ad syno-
a donner de l emploi à son fis. ] Il dum Dordracenseni dimiserint (g),
s'appelait (6) Corneille Aarsens, et (Y)) A
l'occasion des moui^emens de
élait greffier des états il avait connu
: Bohème. ] Ce fut en l'an iôio; et il
JI. du Plessis-Mornai auprès de Guil- est à remarquer « que le roi de France
laume , prince d'Orange, et il le pria » (lo) défendit à ses trois ambassa-
de prendre son fils à sa suite. Cela fut » deurs le duc d'Angoulême
, le ,

fait et dura quelques années. Ce fils , vicomte de Béthune , et l'abbé des


entendant la langue française et les w Préaux de recevoir les visites de
,

affaires du royaume, succéda, l'an "M. d'Aarsens qui allait de la part ,

iSgS, Levin Calûard, qui étaitmort


à » des états des Provinces-Unies négo-
résident auprès du roi Henri IV pour )) cier avec quelques princes d'AUe-
les Provinces-Unies et ne fut que ré
,
» magne et d'Italie touchant les raè- ,

sident des états jusqu'en i6og. Mais » mesaflaires de Bohème qui faisaient
comme on couclut alors une trêve de » le sujet de l'ambassade de France.
douze ans dans laquelle l'Espagne » L'ordre qu'on leur envoya portait
,

avait traité avec les Provinces-Unies » que ce n était pas à cause des états ,

comme avec des peuples libres, il fut » avec lesquels le roi voulait conti-
reconnu par Henri IV pour ambassa- » nuer de vivre en bonne intelligence,
deur(7). P
endant son séjour en France, » mais à cause de M. d'Aarsens en par-
qui fut de quinze ans, il reçut de ticulier pour en avoir mal usé tou-
))
,

grunds bienfaits du roi et même des » chant le service et la dignité de sa


,

honneurs; car il fut anobli et fait «majesté. Ceux qui ont quelque con-
che.ualier et baron, ce qui fut cause naissance des afl'aires de ce temps-là
;>

qu'ensuite il fut reçu en Hollande en- » ne peuvent pas ignorer que ce fut
tre les nobles de la province. Il devint m parce qu'Aarsens s'était mis à la
ensuite si odieux à cette cour qu'elle » tête de ceux qui s'opposèrent
,
en ,

souhaita qu'on le rappelât à ce que l'an 1619


,
à l'alVaire que le roi fit
)) ,

dit SI. du Maurier. Voyez ci-dessous a négocier à la Haye, avec beaucoup


la remarque (D). « d'empressement par Boissise et du ,

(C) Auprès de cette république. ] » Maurier , ambassadeurs, x Ajoutons


C'est à ce temps-là qu'il faut appli- à ces paroles de M. Wiequefort un

(4) La même pag.


, 388. (B) Vorei la pre'fnce de rHistoiie da Concile
(5) L'a nume pag.
, 38i. ie Trente , traduite par Âmelot de La Houssaye.
(6) L'a même, pag. 377, i'/S. (q) C.ancell Anbalt. paj;. i5i.
(7) Là même (jo) Wicq lel". Dî TAmbass. Tcme I , p- C5S.
-

6 ABARIS.
passage de M. du Maurier qui ,
les folis occasinncm prœbuit simstra ipsi
éclaircit. L'an 1618 (il) dit-il, , M. ominandi {i/{).
de Boissise eut commandement du roi (F) Regretter le temps. ] Du Maurier
de Jaire plainte en son nom aux états dit que François Aarsens mourut riche
généraux d'un libelle diffamatoire de cent mille livres de rente (i5).
écrit, signé et publié par JFrancois (G) Laissant un fils qui a passé pour
uiarsens , au grand scandale et dés- le plus riche de Hollande. ] Il était
honneur de messieurs du conseil de gouverneur de Nimègue et colonel ,

sa majesté , dont alors il ne put tirer d'un régiment de cavalerie. 11 laissa


aucune raison. Il y a de l'apparence deux fils, dont l'aîné, nommé Fran-
que la plainte était fondée sur ce qu'on çois, seigneur de la Plaate, se noya ,
avait accusé le conseil de France de passant d'Angleterre en Hollande, l'an
trahir le roi, en favorisant ceux qui i65g, après un voyage de huit ans en
machinaient en Hollande le retour de divers endroits de l'Europe. L'autre ,
cette république sous le joug du roi nommé Corneille, a porté le nom de
d'Espagne ; car , s'il en faut croire du Sommerdyck: il a été colonel dans les
Maurier , le grand lieu commun de armées de Hollande puis gouverneur ,

M. Aarsens et le texte continuel de


, de Surinam, où il fut tué par la gar-
tous ses livres et des placards attachés nison mutinée , l'an 1688. 11 avait
aux coins des rues, était que la faction épousé la fille aînée de M. le marquis
de Barnevelt s'entendait avec l'Espa- de Saint- André-Mombrun dont il a ,

gne pour abolir la religion réformée eu plusieurs enfans et qui est morte,

et la liberté tout à la fois dans les à la Haie l'an 1695, ou environ. De


Provinces-Unies. C'est ici que l'on sept sœurs qu'il avait il y en a trois ,

peut dire , se non è uero , è ben tro- qui ont été mariées à des personnes de
i>ato : rien ne confirmerait mieux que qualité; les quatre autres se sont jetées
cette invention la profonde habileté dans une dévotion superstitieuse avec
de M. Aarsens. un tel emportement, qu'elles ont suivi
(E) Ambassades extraordinaires en le sieur Labbadie , ministre schisma-
France et en Angleterre. ] Il eut cet tique , comme si c'eût été un apôtre
emploi en Angleterre Tan 1620 et l'an (16).
1641 (12). La première fois, il était
(i4) Barheus, Epist. LXXVI pag. 217.
le premier des trois ambassadeurs ex-
,

(i5) Du Maurier ,
pag-. 377.
traordinaires 5 et il fut le second la Mémoires de du Maurier,
(16) y^oj'ez les
dernière fois. Dans cette ambassade pag. 387 , 390.
ci , il eut pour collègues le seigneur de
Bréderode , qui le précédait , et Heems- ABARIS, Scythe de nation (A),
vliet, qui le suivait. Le sujet de l'am-
et de Seuthus. On en débitait
fils
hassade était le mariage du prince
Guillaume fils du prince d'Orange.
,
tant de choses fabuleuses qu'il ,

L'ambassade extraordinaire de France semble qu'Hérodote même se fit


est de l'an 1624 (i3). Comme M. le un scrupule de les rapjDorter, et
cardinal de Richelieu gouvernait nou-
vellement le royaume , et qu^il igno-
de s'en bien informer. II se con-
rait le mécontentement que les précé- tenta de dire (a) qu'on disait que
dent avaient eu de cet ambassadeur, ce barbare avait porté une flèche
il enjil état , et le connaissant éclai-
par tout le monde et ne man- ,

ré..,, il s'en aida pour parvenir à ses


geait rien. C'est n'avoir pas su la
fins. Aarsens fut envoyé l'an 1628 ou
en France ou en Angleterre; ne pou- chose par son merveilleux; car
vant s'embarquer, à cause des glaces , ceux qui l'ont sue de ce côté-là
il revint à la Haie. On prit à mauvais
ont prétendu qu'Abaris était por-
augure que des chiens l'eussent ren-
versé. Aarsenius a canibus forte oc-
té sur sa flèche au travers de l'air
cursanlibus in terrant dejectus male- (B), comme sur un cheval Pégase ;

et qu'ainsi les rivières, les mers


(11) Du Maurier, pa?. 362.
(12) Wicquef. de l'Ambassad. T'orne /, pag.
et les lieux inaccessibles aux au-
65o et 'So.
(i3) Du Maurier ,
pa^. 386. (a) Herodot. , lib. IV, cap. XXXFI.
ABARIS.
très hommes ne nul lui causaient et des habitans de l'Ile de Délos
retardement. Cette flèche avait {f). mêlait de prédire l'ave-
Il se

appartenu à Apollon; et c'était nir et comme il semait ses pro-


;

apparemment avec celle-là qu'il phéties partout oii sa vie vaga-


avait tué les Cyclopes fabrica- , bonde le conduisait on aurait ,

teurs de la foudre dont Jupiter pu l'appeler un oracle ambula-


s'était servi contre le pauvre Es- toire (E). Quelques-uns disent
culape (^). Apollon, après cette que ce fut lui qui fabriqua le
tuerie ayant caché son dard sous
, Palladium (F) ce gage fatal de ,

une montagne au pays des Hy- ,


laconservation des villes qui le
perboréens le recouvra d'une fa-
, possédaient et qu'il , le vendit aux
çon toute merveilleuse; car Troyens. Il le fît des os d'un hom- les
vents le lui reportèrent dès que me {g) , matière dont je ne pense
Jupiter se fut apaisé envers lui pas que les faiseurs de talismans
(c). Ce n'est pas une petite affairese servent jamais. On prétend
que de savoir en quel temps Aba- qu'il pouvait prédire les tremble-
ris vivait (C) il y a là-dessus une
:mens de terre chasser la peste ,
,

grande variété de sentimens qui a et apaiser les tempêtes (G); et


fait broncher quelques modernes qu'il fît des sacrifices dans Lacé-
(D). II semble qu'il y ait moins de démone qui eurent tant d'effi-
discorde sur l'occasion qui l'enga- cace que ce jîays-là fort exposé , ,

gea à sortir de sa patrie, afin de à la peste n'en fut depuis jamais ,

voyager par le monde. Une gran- affligé (II). Il composa beaucoup


de peste, dit -on (d) ravageant de livres [i] l'Arrivée d'Apollon
, ;

toute la terre on n'eut point au paj's des Hjperboréens j les


,

d'autre réponse d'Apollon si ce ISoces du jleuve Hébrus ; une ,

n'est que les Athéniens feraient Théogonie oii il expliquait la gé-


des vœux pour toutes les autres nération des dieux un Recueil ;

nations. Cela fît que divers peu- d'Oracles et un autre de Con- .,

ples envoyèrent des ambassadeurs juj'ations ou d'exorcismes ou , , ,

à Athènes et que l'Hyperboréen si l'on aime mieux (A) de prières


, ,

Abaris fut un de ces ambassa- expiatoires. Tous ces ouvrages


deurs. Il était déjà assez vieux; étaient en prose, excepté le pre-
et , comme il s'en retourna en mier. Ceux qui auraient toute la
son pays afin de consacrer à harangue du sophiste Himérius ,
Apollon l'Hyperboréen dont il de laquelle Photius nous a con- ,

était prêtre, l'or qu'il avait ra- servé un morceau (/), connaî-
massé (e) on pourrait prétendre traient mieux qu'on ne le peut
,

qu'une collecte pieuse fut l'un faire par ce fragment-là, si les


des motifs de son voyage de Grè-
(/) Diodor. Skid. lib. II, cap. XLVIl. ,
ce. Il renouvela, pendant ce voya- pag.
136.
ge , l'alliance des Hyperboréens [g') Savoir, de Pélops.

{h] Jamblicli. iibi siiprà , cap. XIX, pag.


(6) Hvgin. Astr. Poët., lib. II, cap. XV, 93 et cap. XXyiII. pag. i3i. Apollonius,
;

pas;. 386. eliam ubi suprà.


(c) Id ib. (i) Suïdas, au moi' ACa.çiç.
(d) Harpocralion , (J7< /no<' Aoitpiç. (k) Le mot grec dans Suidas est Ka.Bitç-
(e) Janibliclii Vita Pytliag. , cap. XIX, fJ.WZ-
Spanheimii iSotae in CaUimacU. pag. ^go. , il) Piiolii BibUotheca ,
pag. Ii36.
s ABA RIS.
aussi un voyage c'était celle des
grands éloges que ce sophiste don- il fît ;

Hyperboréens. On j^ourrait d'ailleurs


ne à quelqu'un s'adressent à Aba- eu conclure qu'il ne se servit du vol de
ris. Du moins est-il indubitable sa flèche que dans son second voyage,
qu'il le loued'avoirparlébon grec et par conséquent que ce fut en Grèce
qu'Apollon la lui donna. Toutes ces
(m). D'autres assurent que ses ma-
conséquences seraient justes si l'on
nières aisées et simples , et sa pro-
avait affaire à un écrivain exact, ou
bité rendirent recommanda- si l'on était assuré qu'il a dit les cho-
, le
ble à toute la Grèce (n). Je n'ai ses telles qu'on les voit aujourd'hui
point trouvé que Callimaque et dans
ses ouvi'ages et alors il faudrait ;

dire que Suïdas a suivi une opinion


Lucien parlent de lui quoiqu'un très-particulière car presque tous les
,
;

grand critique l'assure (o). Si sa auteurs qui nous parlent d Abaris as-
Sèche avait eu le don qu'on at- surent qu'il était Hyperboréen (3) , et
que, lorsqu'il fit le voyage de Grèce,
tribue à la baguette de Jacques
il étaitparti du pays des Hyperbo-
Aymar (H) , il aurait pu faire de réens j et s'ils parlent de sa flèche vo-
grands biens au monde , et ne pas lante, ils ne manquent pas de dire
craindre le reproche d'inutilité qu'il l'avait avant que d'aller en Grèce.
(B) Etait porté utr s<i flèche au tra-
qu'Origène lui a fait(p). Mais on
vers de l'air.'] Les paroles de Jambli-
vient (q) d'apprendre (I) que le que expriment cela fort nettement.
règne de cette baguette a été fort 'O'içà) Toj/ îv 'TTrêpCopsoïc "ATréxxaivoç «Tapii-

court , et qu'il a enfin trouvé son flêVTI SLÙTOi êTrO^^^^Oi/y.eVOÇ, TT OT a.f/.OUÇ Ti X-Ctl

TiKÔ-yy) Koù tÙ. a.Qa.Tc». SiîCcttviv aiipoCa.-


heure fatale à l'hôtel de Condé , à
Tœv TfÔTTov Tiv* (4). Cùin jlpolllni, ejus
Paris. qui ab Hyperboreis colebatur, jaculo
(in) Voyez la remarqua (C) , vers lajtn. sibi donalo inequitaret , Jîui'ios et ma-
{n) SlraJïO, Ub. Vil png. 208. ,
rin, ac Inca inaccessa per aèrent quo-
(o) Casaaboni Nota; in Strabon. , Ub. VII, dammodo incedens penneabat. RI. Pe-
pag. 1137. tit,en rapportant ce qui concerne cette
Origenes contra Celsutn, Ub. III, pag.
(p) flèche s'est souvenu de ce qu'on dé-
,
129.
Van ïGgS. bite ordinairement, que les sorcières
(ç) On écrit ceci
vont au sabbat à cheval sur un bâton
(A) Scythe de nation.^ C'est Suidas (5). L'un des journalistes, en faisant
qui lui donne cette qualité , et qui re- l'extrait du livre de M. Petit, n'ou-
marque fort distinctement qu'il vint blia pas les vers de Villon , où un sor-
de Scythie en Grèce et qu'avec la , cier est appelé un chevaucheur d'es-
flèche dont Apollon lui fit présent , il couvettes (6). Je rapporterai tout le
vola de Grèce jusques au pays des Scy- passage parce qu'il donne lieu à une
,

thes hypevboréens. ToÎTot/ ô /AuBako- petite observation, fli. Petit nous al-
•yoC/Mvoç ôiVoç TOI/ TTiTo/uivov ajrro anç E\- lègue les rai'issemens d'Klie le trans- ,

port d' Habacuc celui de Pythagoras, ,

dard qu'Apollon V Hyperboréen


'Eifiâ» Si ctùrâi TrecpÀ toj> 'A7rixxa»ioç (l). et le
Hiijus illa fabutis celebrala sagitla aidait donné h Abaris. C'était un dard
uolantis ex Grœciâ ( et non pas ex nieri'eilleux et fort semblable a ce man-
,

Scylhld, comme on lit dans la traduc- che de balai qui sert de chei'al aux sor-
tion ordinaire) usque ad hyperboreos cières, à ce qu'on dit pour s'en aller ,

Scyilias. Eusèbe le fait aussi venir


de Scythie en Grèce (1). Si l'article (3) Ilerodot. lib. IV, cap. XXXVI; Diod.
Sicul. Ub. III, crtp. XI; Apollonii Admir.
d'Abaris n'était pas en désordre dans Hislor.,
,

si'Ct. IV; Jambliclii Vila Pytbagorœ ,


Suidas, on en pourrait légitimement cap. XXVIII , pag. 137 el seq,; Uavpocra-
conclure que l'auteur y a désigné trois tion, au mot Aka,ptç. Sclioliastcs Aristopban.

sortes de régions la Scythie où Aba-


: , in F.qiilt.; Eusebius, n. i5G8, etc.

ris était né; la Grèce, où il alla faire (4) Jainblich. Vita Pylb.igoiîe , pag. 12S.
lin voyage ; et une autre Scythie , où (5) Pclitus , de SibjUà , lib. II , cap. VII ,

pag. 200.
(i) Siridas, au mot' A^OLfiÇ. (6) Non est , le deust-on vif hrutler,
Cçmine un chevauchevr d'escoweUes,
{2) Eusebii Chrouic. n. i434'
, ,

ABARIS.
entre deux airs à l'assemblée sabba- point la force de les faire voler, il dc-
tique (7). Avant que la petite obser- couvri; d'ailleurs, non-seulement les
vation paraisse, il fant que je rap- trésors, les métaux, les bornes des
porte ce passage d\in autre journal. champs , les larrons et les homicides;
M. Petit raconte , après Jambliclnis , mais aussi lesadultères de l'un et de
l'histoire ou la fable d' Abaris Hyper- Tautre sexe. Un grand philosophe
horéen à qui Apollon avait donné le consulté sur une partie de ces faits
,

poui'oir de t'oler dans tes airs porté en 1G89, répondit que rien de cela ne
,

par une flèche comme nos sorcières se pouvait faire sans le secours de l'ac-
.

l'ont au sabbat a califourchon sur un tion d'une cause intelligente et que ,

halai (8). Ces paroles s(mt lexplica- celte cause ne pouvait être autre que
tion de ce texte de M. Petit Auctor le démon (i3). En écrivant ceci, j'ap-
:

est JambUchus in J^itâ Pythagnrœ


, prends que le principal de ces devins
,

cap. XXf^III, id niunus Abaridi Hy- à la baguette (i4) a3'ant fait l'été i

perboreo ab Apolline concessurn fuis- dernier (i.5) à Lyon des épreuves sur-
se ut per aërem quocunquè t'ellct cur- prenantes de son art a été mandé à
,
,

suni viagico im^ectus jaculo tendere Paris et que sur ce grand théâtre il
, , ,

posset (9). Chacun voit que repithcte a fait tant de découvertes (ju'il a ,

Hyperboreo se peut rapporter pu au obligé bien des gens à dire que nous
mot Abaridi qui pn'cède, ou au mot voilà pins en état qii'on n'y fut jamais,
Apolline qui suit. La langue latine de décider, par des phénomènes in-
est toute pleine de ces équivoques contestables, que les démons produi-
j

mais il est sûr, par les paroles de Jaiu- sent cent choses, pourvu qu'on les y
hlique (10), qui sont citées là même détermine par le jeu de quelqu'^s cau-
(i i) que cV>t seulement Apollon qui
,
ses occasionelles, comme est l'appli-
est traite d'Hyperbore'en. Ce serait cation d'un certain bâton (16). Cela
une chicane tout-à-fait vaine que de pourrait être d'une efficace rétroac-
critiquer sur cela le journaliste puis- tive en faveur du dard d'Abaris car
;
;

au'outre qu'Abaris a pu être charge' pourquoi n'y aurait-il pas eu ancien-


e cette épithète comme on l'a vu
, nement une flèche comme celle-là
dans première remarque, on sait
la s'il trouve aujourd'hui un bâton
se
bien que les auteurs des journaus sont qui fasse ce que l'on conte de l'homme
dispenses de la servitude rigoureuse de Dauphiné? Ce serait une matière à
d'une traduction. Je ne dois pas ou- recherches métaphysiques que cette
blier que la flèche d'Abaris était d'or, affectation du bâton; car l'ancien pro-
et qu'elle lui e'tait si nécessaire pour verbe, i'irgula divina, notre phrase
se conduire, qu'il fut obligé d'avouer commune, le tour du bâton et ce que ,

que sans elle il ne pouvait pas discer- les joueurs de gobelets disent à tous
ner les chemins qu'il devait tenir (12). coups par la vertu de ma petite ba-
,

Pythagore lui arracha cet aveu en lui guette , semblent tirer leur origine de
faisant une petite malice; il lui dé- l'usage fréquent que la tradition com-
roba cette flèche, et il fallut alors mune donne au bâton dans les sorti-
qu'Abaris étonné comme un aveugle
, lèges. Quelles vertus n'attribuait-on
qui a perdu son bâton, confessât ses point anciennement à la verge de Mer-
nécessités. Cela me fait souvenir de cure ? Les ailes d'or qu'il mettait à ses
certaines gens qui se vantent de trou- talons n'étaient point tellement le
ver avec leur baguette les chemins principe de son vol , que sa verge n'y
perdus. Si tout ce que l'on en dit concourût aussi avec une vertu très-
était véritable, je ne crois point que, puissante , et il semble même qu'elle
toutes compensations faites leur bâ- , lui ait servi de cheval :

ton fût moins merveilleux que la flè-


che d'Abaris car, si d'un coté il n'a
j
El prim'um pedibus talaria neciit
Aurea ijuœ sublimem. alis , sive œquora
,

supra ,
(r) Nouvel, de la Répub.des Leu. octob. 1686,
ri. I.
Le P. Maletranclie dans\e Mercure
(i3) ,

(8) Bibliot Univers. , tome II pag. iSz.


, Galant du mois de janv. i6g3.
(9) Petit, uhi suprù ,
pag. Ig8. (i4) Jacques Aymar, paysan de Saint- te-
(10) Voyez-les ci-desius citation (4)-
, ran en Dauphiné'.
(11) yé lapage igg de M. Petit. (i5) En 1692.
(12) JamblicLus, ubi mpra ,pag. i3i. (16) f ujez ci-après la remarque (C)
.

ABARIS.
Seu terrain , rnpido pariter cumjlamine por-
(C) JEn quel tenips Abaris t'ifait.']
tant.
Tutn virgain capit : hdc animas itle evocal Son ambassade d'Athènes est placée
Orco par quelques-uns sous la 2 1*. olym-
Patlente.t, alias sub tristia Tarlara inillit, piade; par Hippostrate sous la 3''. , et
Dat sonmos , adiinit</ue , et lumina morte
résignât. par Pindare au temps du roi Crésus
Illu FRETus , ai^it veiUos , et turbida tranal (25). Eusèhe s'était rangé à ce dernier
Nubda. (17;. sentiment , puisqu'il avait situé le
voyage d'Abaris et le commencement
SI nous avions le Traite sur la verge
du règne de Crésus sous la seconde
de Mercure que Parlhius avait pro-
,
année de la 54^- olympiade; mais il
mis (18) on y verrait assurément
,
donna peu après dans une honteuse
une compilation bien curieuse, et peut- variation ; car il fit fleui-ir ce devin
être plus instructive que le Traite du
la dernière année de la 82*. olym-
cynique Antisthènes sur le bâton de piade. Abaris hypcrboranus hariolus
Minerve. Cette déesse avait aussi son agiioscitur (2G). M. de Valois semble
bâton avec quoi elle faisait paraître
,
préférer à tout autre sentiment celui
les gens ou jeunes ou vieux, selon
de Porphyre et do Jamblique (27), se-
l'exigence des cas ('9)- La sorcière
lon lequel Abaris aura vécu l'an 2 de
Circé faisait bien plus que tout cela olympiade, contemporain de la 54".
avec le sien ('20), puisque, d'un seul Pythagore. On infère cela de ce que
petit coup de sa baguette elle trans- ,
Porphyre et Jamblique rapportent que
formait les hommes en bétes et les
Pythagore montra sa cuisse d'or à ,

bêtes en hommes. Erasme, qui joint à


Abaris, prêtre d'Apollon l'Hyperbo-
tous ces exemples la verge avec la- réen. Si les lettres qui courent sous
quelle Moïse fit tant de choses mira-
le nom de Phalaris n'étaient pas un
culeuses (21), devait remarquer que
ouvrage fait à plaisir, on devrait être
le de'mon le singe des œuvres de
assuré qu' Abaris a vécu en même
,

Dieu, a pris son modèle là-dessus pour


temps que ce tyran mais il n'y a nulle ;
ériger le biUon en l'une de ses princi-
apparence qu'ils se soient jamais écrit
pales causes occasionelles. M. Huet
les lettres qu'on trouve dans ce re-
prétend que ce que les poètes ont cueil. Cependant c'est une raison à
chanté de la verge de Mercure etc. alléguer pour montrer qu'Abaris et , ,

a son origine dans la verge de Moïse Phalaris ont été contemporains car ;

(22). Notez que le diable fut bien il y a quelque sorte de présomption


prompt à imiter car les magiciens de ;
que celui qui a supposé ces lettres à
Pharaon firent par le moyen de leurs Phalaris a observé la chronologie, afin
verges quelques miracles qui ressem- que ses fictions eussent plus de vrai-
blaient à ceux du vraiDieu (23). N'ou- semblance. Suidas met la tyrannie de
blions point les brachraanes, qui por- Phalaris sous la 62=. olympiade. Le
taient toujours un anneau et un bâton, sentiment d'Hippostrate pourrait être
auxquels ils attribuaient de grandes fortifié par la raison que voici. Suidas
vertus (24). J'en dirai peut-être da- observe qu'en la 5*^. olympiade les
vantage sous le mot Rabdomanùe* Athéniens firent pour tous les Grecs
les sacrifices qu'on nommait Tlpoinfoa-ta.t
(17) Virgile, Énéid. Uv. IV, v. 289. Voyez ,

aussi Homère Iliad. et Odyss. , lif. dern. ; (28). Ils se faisaient avant que l'on la-
,

Ovide, Mctain. lii'. I \. '!>, au sujet d'Ar- bourât la terre et dans la vue d'ob-
, ,

gus Horace, ode X, v. 18, et XXIV, v. tenir la bénédiction divine sur la j)ro-
;

j6 du /iV. /; Stace, Tliebaid. ZjV. /.


(18) De Virga; Mercurialis potestale et poten-
chaine moisson. Or, le Scoliaste d'A-
tid peculiarem Iractalionem satis mysterioden ristophane rapporte que, quand les
dainus in Superslitionum magno Cunimentario. Athéniens firent pour tout le monde
Bartliius in Stat. Toiii. II pag. 291.
Homer. Odyss. N.
,

et TI.
le sacrifice nommé npo«fo«n'*, il y avait
(19)
eu une famine ou même aussi une
,

,
(20) Ibid. K.
(21) Sur le proverbe virgula divina. Chil. i, peste par toute la terre , qui avait
centur. i, n. 97. obligé les peuples à recourir à l'ora-
(22) Huelii Demonstr. Evang. Propos. IV,
pag. 258. (25) /tpud Harpocrationem.
(23) Vojei les chapitres VII et VIII de (2G) Eiisebii Chron. n. 1668.
Exode. Maiissaci in
(27) Henr. Valesii Nolœ in notas
l'

(24) Pl.ilostrat. Vila Apoll. I.ib. III. Harpoi-rat. pag. S'i.


* Bajle n'a jamais donne' d'article Rabdo-
(28) .'tu mut npOJ1/i05-|*l.
mantie.
,

ABARIS. II

cle, et que l'oracle avait répondu que, ran. réfute par cette h)'pothèse
Il

si les Athéniens ofl'raient un tel sacri- ceux qui disent qu'Abaris a été dis-
fice, le mal cesserait (29). Ce fut donc ciple de Pythagore ; car il observe
alors (|ue tant d'ambassades furent que Pythagore fleurit l'an i'"^. de la
envoyées à Athènes et qii'Abaris y ,
6o«. olympiade, et mourut vers la fin
fut envoyé de la part du peuple hy- de la 70^. 11 remarque qu'un disciple
perboréen. Hipposti'ate ne se serait de Pythagore n'a pu écrire des lettres
donc guère èioifçné de la vérité en à Phalaiis. Entln il assure (jue tous
mettant ce voyage d'Abaris sons la les anciens ont fait Abaris antérieur
3". olympiade. Si les conjectures de non-seulement à Pythagore, mais aussi
Scaliger sur un passage de Firmicus à Solon. Antiqui omnes de Abari lo-
Maternus concernant le Poltadiurn
,
quunlur, ut non Pylhagora modo sed ,

sont bonnes, il y a eu des auteurs qui Solone etiam anliquiori (33). 11 n'y a
ont fait remonter prodigieusement le guère de solidité dans ces remai'ijues
temps d'Abaris il faudrait selon; , de Vossius; car le même Eusèbe,qui en
cela qu'il eût vécu long-temps avant
,
est le fondement, a situé, en un autre
la prise de Troie. Nous verrons bien- lieu Piialaris sous l'an 3 de la 53«.
,

tôt ce que c'est. D'autres Font fait re- olympiade et le voyage d'Abaris sous
,

descendre jusques au siècle d'Alesan- l'an 2 de la 54*- Vossius devait prendre


dre-le-Grand ; il est vrai que ce n'est garde à cela, et se souvenir que le pas-
que par un enthousiasme d'orateur ,
sage d'Eusèbe qu'il ne cite pas a été
, ,

à quoi si nous voulions prendre garde, préféré par Scaliger (34) à celui qu'il
nous nous taillerions trop de besogne. cite. Scaliger se fonde sur ce que le
La description que le sophiste Himé- commencement de la tyrannie dePha-
rius nous a laissée (3o) de l'équipage laris a été placé par Suidas sous Fo-
avec lequel Abaris se présenta aux Ivinpiade Sa, outre qu'Orose remar-
Athéniens , convient merveilleuse- que que Cvrus et ce tyran ont été
ment à un barbare; mais il n'était contemporains (35). Il est donc visible
Scythe, dit-il que dans son habit sa,
; que les conséquences que Vossius a
langue était grecque et dès qu'il la , tirées de ce qu'Abaris et Phalaris ont
remuait on croyait entendre un dis-
, vécu en même temps ne sont guère
cours sorti du milieu de l académie ou bonnes car Abaris aurait pu écrire
;

du lycée. Quelle absurdité! Platon et à Phalaris après l'olympiade Sa , et


Aristote avaient-ils déjà fondé des voir Pythagore après l'olympiade 60
écoles au temps d'Abaris? Quelqu'un (36). Quoi qu'il en soit, on n'a pas dû
(Si) a voulu concilier ces difficultés dire que suivant tous les anciens
, ,

en supposant ([u'il y a eu deux Aba- Solon a vécu après Abaris; car nous
ris mais sa supposition est insuffi-
: savons qu'il donna ses lois aux Athé-
sante il en faudrait cinq ou six pour
i
niens en la 46'- olympiade {37) et ,

bien réussir; deux n'otent pas les di- qu'Eusèbe met Abaris sous la 82^ (38).
visions ce n'est pas la peine.
: M. Mûiéri s'est mal servi des obser-
(D) f^ariélé de sentimens qui a fait vations de Vossius. Il trouve de l'op-
broncher quelques modernes. ] V'ossius position en ceux qui disent qu'Abaris
préfère à tout autre sentiment l'opi- vivait avant Solon et ceux qui disent
,

nion de ceux qui font fleurir Abaris que c'était du temps de Tullus Hosti-
entre la 3o*. et la SS"". olympiade. Ce lius ou d'Ancus Martius roi des
, ,

temps-ia , dit-il (32), est, selon Eu- Romains. Ce ne sont pas deux senti-
sèbe, celui de la tyrannie de Phala- mens différeus il n'y a point de chro-
;

ris ; Phalnris tyrannideni exercuit ab nologue qui voulût se fiùre un scru-


olympiadis ( il XXX
fallait dire pule d'assurer que ces deux rois ont
XXXi } (in. II , usque ad olynipiadis précédé Solon. Ce passage de Vossius,
XXXf^III an. II, teste Eusebio: ov
Abaris a été contemporain de ce ty- (33) Id. ibid.
(34) Scaligeri Ânimadv. in Eusebium , R.
1452 ,
pag. 84.
(2g) Scboliast. Aristopban. in Equit. (35) Id. ib. n. i3go, pag. 94.
{3o) Jpud Pliotium, pag. ii36. (36) Notez qu Abaris , selon Jatnblitjue ,
(3j) Edward. Simsonius, apud Konig. Bibl. e'iait vieux, quand il fut instruit par Pythagore,
Vet. et Nov. pi^g. I.
537) Scaliger ubi supra , n. 1422, pa^-
.
86.
(32) Vossius , de Poëtis GrKcis , cap. III , p. 3S) Voyez la remarque prc'cc'denie , cuw
iG. tion (26).
AlURIS.
guérit tgilur ( Plialarls ) tenipnrihus exiant. Le Scoliaste d'Aristophane
TulLi HoslUdet Anci Marlii (Sg) et ,
(47) dit aussi qu'on les avait de son
le précèdent, ont trompé M. Movéri. temps. Abaris n'était pas le seul de
Disons en passant qu'il s'est laissé abu- son métier <(ui errât ainsi par le
ser par ces paroles de Cœlins Rhodi- monde, et qui semiit de toutes paris
ginus liujus (Abaridis) el Gre/^orins
: ses prédictions à tour de bras c'était :

theologus cninmeminit in epiliiphio ad le propre des devins; et c'est pour-


magnum BasiUunt {!^o). Il a cru que quoi Artémidore prétend que lors- ,

saint Grégoire parle d'Abaris dans une (ju'on songe qu'on devient propiiète,
épitfiphe qu'il adresse à saint Basile- c'est le plus souvent une marque qu'on
le-Grand (4')- ^^ ^'''^ ""'^n trouvé voyagera et qu'on se tracassera; car,
,

touchant Abaris dans les vers de saint ajoute-t-il , les devins ont accoutumé
Grégoire de Nazianze sur la mort de de mener une uie t'agabonde. $êfêi Ji
saint Basile. J'espérais d'y rencontiTr x.a.1 «t^ctTu^/siç 7ro'/.?.a.Kiç kcii tnvAo-ui tço

les cinq ou six lignes que le Giraldi ((ToVTl TOV ÔvêlfOV. cTlO. TO TCt/ç ^CtVTêlÇ TTi-
rapporte comme tirées ex Alonodiâ fivjç-iiy Portendit sœpè ctiamperegri-
:

in dii'um Basilium (42). Le mot de natlones et motus hoc somnium ei


monodia est une adresse vers une qui i>idit, propterea quhd t'aies fi-
pièce de poésie; mais ici c'est une tam ermbundam agunt (48) Usa vaieiit .

adresse trompeuse. Je me suis tourné cela de commun


avec les joueurs de
vers la prose de ce grand théologien, gobelets et avec toutes sortes de
,

c'est-à-dire, vers son oraison funèbre charlatans. Abaris faisait plus que des
de saint Basile, et je n'y ai pas trouvé pi-édictions on prétend qu'il bâtis- :

le quart de la citation du Giraldi. Il sait des temples celui de Proserpine ;

y a une erreur particulière en ce que


, du Salut, Kôpç IceTÛpaç, dans Lacé-
M. Moréri s'est exprimé comme si démone, fut son ouvrage (49)- Platon
cette épitaphe n'eût point été faite en fait un vrai charlatan ou plutôt ,

pour saint Basile. un enchanteur qui se mêlait de gué-


(E) Un oracle ambulatoire. ] Clé- rir les maladies avec des paroles (5o).
ment d'Alexandrie met Abaris entre (F) Qui fabriqua le Palladium.]
ceux qui se mêlaient de prédire l'ave- On doit cette découverte au grand
nir. Tlf'jyviéa-ii es koli TlLi^cfy'of!tç f/.îya.ç Scaliger. 11 a corrigé en deux endroits
at'arns par Abaris (5i) dans un pas- ,

(^Z). Prœscientiœ autem Pjlliagnras sage de JuliusFirmicusMaternus (62).


quoque magnus seniper menteni adhi Voici ce passage ainsi corrigé Pal- :

huit , et Abaris Hyberboreus. Nous ladii eliam quid sit numen nudité. Si-
avons déjà rapporté ( 44 ) Pépithète mulacruiu est ex ossibus Pelopisfac-
d'hariolus, dont on le régale dans la tum. Hoc Abaris Scythajecisse per-
Chronique d'Eusèbe. Un commenta- hibetur jam quale sit considerate
;

teur de saint Grégoire de Nazianze a quod Scytha barbarus consecravit.


rapporté qu'Abaris parcourut toute Estne aliquid apud Scythas humanâ
la Grèce, et y rendit des oracles (45) ratione composiium et illa effera ,

Apollonius assure le même fait et il gens et crudeli atque inhumand sem-


;

ait de plus que ces oracles subsis- per alrocitate grassata in constituen- ,

taient encore. 'EypiL^t Js xaî ^pa-^o^/c dis religionibus rectum aliquid potuit
Teth '/â'fu.ii TrifupX-^pmaç, 'li n^i /^îXf^ vn>enire ? Simulacrum hoc Trojatùs
Toû vt/v ÔTrâ.çiX-^i'Tiç (46). Scripsil autem Abaris vendidit stultis hominibus ,

et oracula regionibus quas observons l'ana promitlens. Scaliger a corrigé


lustrabat, qi-ice ad hoc usque tempus deux fautes presque semblables dans
un passage du Scoliaste d'Aristopha-
(3g) Vossius , ubi supra. ne (53). Au lieu de /2*fiv , il fait lire
(4o) Cœlii Rhodig. Antiq. Lect. Lib- ,
XVI
cap. XXII, pag. 881. In Equit.
(47)
(4i) CeUe faute n'est point dans les éditions
de Hollande. (48) -Artemidor. Lib. III , cap. XXI.
(4f)) Pausanias. Lib. III , pag. 94- J' <^'t
(42) Giraldus de Poïlis, Dialogo III, circa
inii. p. 119.
aussi que d'autres en attribuaient la construc-
tion il Orphée.
(43) Slromat. Lib. /, pag^ 334-
;5o) Plato in Charm. pag. 465.
(44) Ci-dessus , Citation (26).
('}!) Scaligeri \ot.i; in Eusrb. n. i454«
(45) Nicetas in Oral. XX.
Ciegor. Naiianz.
1-12) Oi- Krrore Piolan. Reljg.

(40)' Apollon. Adinir. Hist. Sect. IV. (53) In Equil. •


,

ABA RIS. i3
ACstpiv ; et , au lieu de yJst:i<r«tc, il f;iil re les oracles d'Abaris. C'est avoir co-
lire A^'âcitToç ] ce c|ui fait un sens beau- pié sans
jugement et sans considérer ,

coup plus intellif;ible.'OTe <r« ;tst(' Afst- que depuis le temps qu'on pouvait
piV ^CLTI TOV 'TcTêfCÔfêlOV ê/SôvTat -3-«Û)pOV parler ainsi ces oracles ont été per-
iiç T>iv 'Exxcttf* 'A^rÔKÀœvi -S-JiTsI/s-sti , x*/ dus. Nous ferons ailleurs (60) une ré-
Ot/Tû) C-t/"),'),fi4*' '^''''5 /tfi""/"'^"? ''^^^
^"'•' flexion générale sur les bévues qui
Le sens est,
Trf'^Txy'^fi-j'j/y.i-y^uç'ACifiSo;. naissent de ce principe.
qu'Abaris étant allé dans la Grèce
, , ( G ) Prédire les Lreniblemens de
jiour consultei" Apollon ou pour lui , terre , etc. ] Porphyre attribue cette
faire des offrandes, s'arrêta à son ser- vertu à Pytbagore comme aussi celle ,

lice, et écrivit les oracles qui por aien t I de chasser la peste, et d'arrêter la
encore le nom d'Abaris. i\I. de Valois grêle , de calmer les orages et de ,

corrige (54) de son côté un endroit de faire cesser les tempêtes sur la mer et
Proclus '55), où Pytbagore est cité sur les fleuves , pour procurer à ses
êv Tç? TTflç 'aSciçov K^yoù -^
il croit qu'il amis un heureux trajet (61). U ajoute
faut lire ACstciv. Ainsi
'
il v aurait eu qu'Empédocle Epiraénide et Abaris ,

un ouvrage de Pytbagore (56) adressé ayant appris cela de Pytbagore le ,

à notre Abaris. Ce qu'il y a de cer- pratiquèrent en plusieurs rencontres ,


tain , c'est que Pytbagore si Ton en
TT'jKKAX*' ÎTrtTiTihiKiV 0.1 TOlslt/Tct. Uu aU-
,

croit Jamblique (5r)


expliqua son teur moderne (62)
, ayant rapporté ,

Traité de la Nature et son Livre des que Phérécyde précepteur de Pyilia-


, ,

Dieux à cet Hyperboréen. Plutarque gore '63) , et qu'Anaximandre et Aba-


fait mention d'un livre intitulé aba- ris (64) , prédisaient les tremblemens
ris et
, composé par Héraclide (58) de terre , fait cette demande assez
où l'on voyait, je pense, toutes les plaisamment N'esl-ce point dit-il, : ,

aventures vraies ou romanesques de qu'a considérer la terre comme un


ce fameux Hyperboréen. Au reste je ,
grand animal , ils aidaient l'art de lui
m'étonne que Scaliger , qui était en tdler le pouls et de reconnaître par-là
si bonne bumcur de nous découvrir les compulsions qui lui déliaient arri-
des fautes renvoyés au Gi-
, nous ait ver ? Or soit que la flèche d'Abaris
,

raldi, comme à une source de docte fi\t linstrument avec lequel il exploi-
instruction touchant Abaris car :
, tait tantde merveilles soit qu'elle n'y ,

quelque savant que soit le Giraldi il , contribuât pas il est -siNr que les ,

n'a pas été fort exact sur cet article voyages de cet bommc-là pouvaient
(Sg). 11 dit que Valérius llarpocration être d'une grande utilité au genre
a parlé des merveilles de la flèche ^ humain. Voyez la remarque suivante.
et qu'au rapport d'Uérodote , elle fit (H) Qu'on attribue a in baguette de
voler Abaris jusque sur les terres des Jacques Aymar {QS).'\ Jamais chose
Hyperboréens. Mais il est sûr qu'Har- ne fit plus de bruit et ne donna occa-
pocration ne parle point de la flèche , sion à tant de livres. Je viens d'ap-
el qu'Hérodote ne parle point du vol prendre que ceux qui s'en promet-
d'Abaris, ni ne désigne aucun lieu par- taient tant d'avantages et tant de
ticulier où cet homme fftt allé. Cliar- victoires sur lesmécrcans se trouvent ,

lesEtienne et Moréri ont commis cette bien loin de leur compte. La seule
dernière faute Legatus ^4thenas t'e-
: histoire de tout ceci mériterait un
niens nd suos Hypeihoreos reJiit ni- article et peut-être en toucherons-
5

hil coinedens , dit Charles Etienne ; nous quelque chose sous le mot de
retournant de Grèce en Scythie U fit , Rabdonianiie * ou en quelque autre ,

ce long l'oyage sans manger dit Mo- , occasion. Mais quoi qu'il en soit je , ,

réri ; et elle est plus digne d'excuse


que la précipitation qui a poussé le (60) Dans la remarque sur l'article Balecs
(Jean) à la fin.
premier à dire que nous avons enco-
,

(61) /n Vitâ Pvlliagor.


(54) Valesii iVote in notas Mauss. in Harpo- (62) La Mothe le Vaver, tome ,
pag. \2';- XI
cralion-, p^- 8 j. (6S) Il cite Diog. Lacrt. in Pherecyd. Cice-
(55) In Timajum PUtonU , pag. i4i- ron. P. de Divin.
rS'i) Corifer quœ Jamblicb. ubi supra, cap. (64) Touchant Abaris , il cite Apollonius ,
XIX, pag. 92. surnommé Dyscole, cap. V. C'est le même que
(5;) Jambl. ibid. fat cite ci'dessus.
(58) Plut. Quomodô audiendi Poët. inilio. (65) Voyez, ci-dessus la remarque (B).
{59) Vojez la remarque (D) vers la fin. * Voj'et 1(1 note ' ,
pag. 10.
,

t4 ABARIS.
ne me dédirai pas de ce que j'avance articlede ce Dictionnaire. M. le prin-
concernant Tutilite de cette baguette. ce de Condé, dont les lumières ne
Entre les mains d'un aussi grand voya- peuvent être que fatales aux impos-
geur qu'Abaris elle eût porte' la re-
, teurs et aux crédules vu l'éducation
,

formation des mœurs par tout le mon- d'où il les a prises a renversé tous
,

de beaucoup plus efficacement que


,
les trophées des partisans de Jacques
ne l'ont pu faire tout ce qu'il y a ja- Aymar. Ce pauvre homme a échoué
mais eu de missionnaires et de pré- d'une manière si pitoyable dans les
dicateurs. Car, si un tel homme reve- essais qu'on a voulu faire de ses forces
nait au monde la jalousie
, ce fléau , à l'hôtel de Condé qu'il y a perdu
,

de tant de maris, en serait bientôt toute sa réputation (68j. Le public a


chassée. Les Italiens et les peuples su comment leschoses s'y étaient pas-
orientaux n'auraient que faire de sées : il n'y a plus de lieu à chicaner
donner des geôliers à leurs femmes , sur l'incertitude'^ puisque c'est par
ou d'être eux - mêmes leurs propres l'ordre de ce grand prince que le
Argus. Chacun s'en fierait à leur bon- monde a été informé de ce détail.
ne foi : on n'aurait qu'à les recom- Aussi ne se retranche -t- on point
mander à la baguette, Et non seule- dans cet asile ; on tâche seulement
ment les hommes se délivreraient d'un de donner quelque raison de ces in-
soin pénible (66) et qui ne sert quel- fortunes de la baguette , comme je le
quefois qu'à hâter leur infortune ; dirai ci-dessous. Ceux qui ont dit que
mais ils se verraient eux-mêmes dans les fauteurs de ces devins avaient mal
la nécessité de garder la foi conjuga- choisi leur temps , et que ce n'est pas
le , lorsqu'ils auraient besoin de cette dans un siècle aussi philosophe que
réputation. La tenue des grands jours celui-ci qu'il faut produire ces gens-
jetterait moins de terreur dans l'.lme là , ont eu , à certains égards , quelque
des criminels que l'arrivée d'un Aba- sorte de raison ^ mais, tout bien comp-
ris. Le plus grand nombre des crimes, té , ils ne raisonnaient pas juste. 11 y
les péchés les plus dangereux, savoir, a plus de particuliers présentement
ceux qui se commettent dans l'espé- qu'autrefois qui sont capables de ré-
rance que le public n'en saura rien , sister au torrent et de combattre les
cesseraient entièrement au souvenir illusions, je l'avoue^ mais, à cela
de la baguette ; et ce serait alors que près , je vous réponds que notre siècle
l'on pourrait dire : est aussi dupe que les autres et , :

api'ès ce que nous avons vu au sujet


Tuliis bos etenim prata perambulal,
d'une explication de l'Apocalypse ,
Nutrit rura Ceres , alinaque FauslUas.
qu'on ne nous vienne plus dire , le
Culpari mcluil Fides , monde n'est plus grue. 11 l'est autant
Nullis polluilur casta domus slupris. que jamais toutes les impostures
j

Laudanlur simili proie puerperœ.


qui flattent ses passions lui plaisent;
Cu'pain pana preinil cornes. (67). il n'a point de honte d'être convaincu

qu'on l'avait tromjié; il n'en respecte


J'avoue qu'il est difficile de com- pas moins le trompeur ; il n'en crie
prendre que ledémon l'ennemi juré , pas moins contre la foi de ceux qui
du genre humain ait choisi de telles
, n'ont pas été trompés. Voici ce qu'un
loisd'engagement avec l'homme ; et de nos nouvellistes (69) vient de nous
c'est à quoi ne prennent pas assez apprendre en confirmation de cela :
garde ceux qui ne sauraient soufll'rir « Les témoignages d'un grand prince

ni qu'on révoque en doute les vertus » et la lettre d'un des premiers ma-
de la baguette, ni qu'on les explique » gistrats du Châtelet sont de si for-
mécaniquement. » tes preuves contre Jacques Aymar,
(I) Le règne de cette baguette a été » qu'aucun de ceux qui ajoutent foi
fort court. ] A peine a-t-il duré dans 3) aux effets prétendus de la baguette
Paris autant de temps qu'il en a fallu 3> n'a osé les contredire. Mais ce qui
pour composer et pour imprimer un 3) fait voir le ridicule des esprits cré-

in calibe vitd, (68) yorft Lettres Historiques et le Mer-


(66; Panœque graves ,

El gravior caulis ctatodia vana mantis. cure Politique du mois de mai ib^i.
Âusonii idyll. XY. (69) Mercure Historique du mois de mai lôgSj
(67) Horatii Od. V. ,
M. IK pag.' 565.
ABARIS. i5
» dnles ,cVst qu'il n^y en a presque te il reconnut que c'était le
, père de
» aucun (jui se soit rendu. M.Valle- l'enfant exposé. Le juge du lieu, ou
» mont qui vient de publier un de son propre mouvement
,
ou a la ,
» traite de ta pliyiic/ue occulte de la solUcittition des personnes
intéressées,
5) bai^uelle di^'inatoire prétend ex- pria Jacques y/jniar et ceux qui
,
le
» pliquer comment le paysan deDau- faisaient agir de ne plus faire de
,
« phiué a pu se tromper dans les recherche , et qu'il
fernit reprendre
» épreuves que lui a fait faire M. le l'enfant ; ce qui a ttr
exécuté. Je fais
)) prince, quoiqu'il ait véritablement trois observations sur ce récit.
La
» la vertu et les talens dont il se van- première, quil n'est pas
certain que
J) te. Ces sortes de philosophes de ce ne soit pas une fable car combien
,
;
» même que les explicateurs de pro-
y a-t-il de gens qui se divertissent
» phéties car ce sont des gens assez à forger des contes
,
qu'ils font insé- ,

» d'une même trempe sont des ma- rer dans les nouvelles publiques
,
ils î

» nières de visionnaires qui ne veu- les envoient à un auteur


sans se ,

» lent jamais avoir tort et qui ,en- nommer; ils choisissent une scène un
,

» core que convaincus de la fausseté peu éloignée; et, après tout ils
sa- ,

;> des choses qu'ils ont avancées, trai- vent que peu de gens feront des in-
» tent d'esprits forts les gens de bon formations. Ma seconde
observation
» sens qui ne donnent pas dans leurs est que quand même tout ce
qu'on,
M chimères. » rapporte dans le Mercure Historique
Depuis l'impression de ce que je serait véritable, on ne pourrait pas
viens de dire, trois ou quatre années faire taire les incrédules. Jacques
s'écoulèrent sans que j'entendisse par- Aymar , diraient-ils , savait la route
ier de Jacques Aymar. Nos nouvellis- qu'il fallait j)rendre : un faux-frère ,
tes l'avaient perdu de vue et l'avaient , parmi ceux qui connaissaient l'intri-
abandonné dans sa retraite mais en- : gue de r accouchement fut ravi de ,

iin ils le remirent sur leur théâtre , donner l'alarme , et d'ouvrir un beau
au mois d'avril 1G97 j *^' *^^1* poiu" champ de causerie. En tout cas, il se-
lui faire jouer un rùle bien divertis- rait un homme à excepter de la règle,
sant, et qui d'ailleurs pourrait être I\ul prophète en sou pays : la honte
d'une merveilleuse utilité, si le conte qu'il essuya dans la capitale du royau-
qu'ils rapportent était véritable. Il y me ; cette suite , dis-je , de mauvais
a quelque temps disent-ils (70) que
, ,
succès dont M. Buissière (71) a pu-
le prieur des chartreux de f^iLleneuve- blié une relation exacte ne l'eût ,

lès-Ai^ignon passa par Orani^e a^/ec pas décrédité dans sa province. Je re-
Jacques Aymar, par le moyen duquel marque en troisième lieu que cette
, ,

il prétendait découvrir quelques bor- propriété de la baguette aurait de


nes perdues. Mais par occasion on
, , très-bons usages dans le monde. Elle
l'employa h un autre usage. On aidait déchargerait le public des fondatious
exposé depuis trois jours un enfant a la qu'il a fallu faire pour lentretien des
porte ducoui>entdes capucins; lerecleur enfans trouvés ; car elle ferait con-
de l hôpital requit Jacques ylymar d'en naître ceux qui les ont mis au monde,
découvrir l'auteur. Celui-ci y consen- et on les obligerait à les nourrir. De
tit ; se transporta h la porte des capu- plus , elle augmenterait la crainte des
cins , oii ion aidait rapporté i enfant; suites , qui est un frein de l'inconti-
et, a la uue d'une foule de peuple il , nence , sans lequel les désordres de
suii'it le chemin que le mou^'emenl de l'impureté seraient beaucoup plus fré-
sa baguette lui indiquait ; et alla tout quens et plus scandaleux. Le sexe fé-
droit dans un village du Comtat Pre- minin, plus souvent bridé par cette
nais sin , nommé Camaret ; et de là crainte que l'autre et quelquefois
,

dans une métairie qu'il assura cire


,
moins , garderait mieux le dépôt.
le lieu où, l'enfant était né. J'oubliais Choisir à l'écart une petite maison ,
de dire qu'en chemin Jaisant il ren- pour y accoucher ; y faire venir une
contra un homme à chei'al ; et que ,

par le mou^'ement de sa même baguet- (y) M. Buissière, apothicaire de M. le


prince de Conde , est iaut/'ur du livre qui a
pour litre , Lettre à M. l'abbé D. L. sur les vé-
(70) Mercare Historique et Politique , mois ritables effets de la baguette de Jacques Aymar,
d'avril 1697, p^S- 44° i 44'- par P. B. à Paris , chet Louis Lucas, 16^.
,

i6 ABARIS.
sage-femme les yeux bandes et par , la baguette ; qu'il y joindra la rela-
une route détournée; faire porter tion de la recherche (^4) que fit Jac-
l'enfant au milieu des rues, pendant ques Aymar des meurtriers ((ui avaient
les ténèbres de la nuit; cela, et le assassine un archer du guet dans la
reste des précautions, serait inutile , rue Saint-Denis; et qu'afin que les
en cas que la baguette eût la vertu partisans de la baguette soient enliè-
dont on parle. Elle marquerait le che- rement de'sabuse's, i! y joindra encore
min jusqu'à la chambre de l'accou- la confession faite à i\l. le prince de
cheraent, mieux qu'un chien ne suit Condé par Jacques Aymar, qu'il ne
la piste d'un lièvre jusqu'au gîte. Elle sauait rien de tout ce qu'on lui m'ait
mettrait fin à tant de parjures (72) qui attribué , et que ce qu'il ai>ait failjus-
se commettent par ceux qui ne veu- qu'ici n'avait été que pour gagner sa
lent pas se charger de la nourriture ide. Cet aveu sincère lui attira un pre-
d'un bâtard comme , la mère les y sent de trente louis d'or, c/uc S. A. S.
voudrait obliger en , se pre'sentant luijit donner afin qu'il se retirât le
,

pour cela sans aucune honte devant plus promptement qu'il pourrait dans
les juges. son t'illage, parce que n'étant pfus ,

Comme rien n'est aussi capable de sous sa protection, les personnes qu'il
détromper les crédules que de faire avait accusées h faux l'eussent fait
voir que Jacques Aymar est tombé arrêter. M- Robert m'a dit , c'est M.
d'accord lui-même de sa fourberie , Buissière qui parle que si on l'avait
,
,

je veux mettre ici ce fait -là dans la mis entre ses mains pour en faire ,

"dernière évidence. J'ai là-dessus une justice, il l'aurait fait condamner aux
preuve plus positive que le témoigna- galères la preuve étant sans réplique.,

ïje de IVI. Robert procureur du roi au La même lettre m'apprend qu'un


,

Châtelet de Paris. La lettre (73) qu'il garçon de quatorze ans qu'on avait ,

e'crivit au père Chevigni assistant du ,instruit avait déjà abusé beaucoup de ,

père général de l'Oratoire, contient personnes; mais, comme cela était


seulement quelques-uns des mauvais trop près des faits de Jacques Aymar,
succès de la baguette, et puis ces pa- il trouva les esprits en garde. Le petit
rôles « J'ai oui dire que depuis en garçon échoua , à la confusion du
: ,

j) plusieurs autres expériences faites gentilhomme qui l'avait produit.


5) à Versailles et à Chantilly , sa ba- M. Buissière fut chargé de l'examiner j
» guette n'avait pas été plus heu- il le trouva assez rusé pour son âge :

5> reuse
;
que même il avait été con- on le tint enfermé quelques jours , sans
V vaincu de supposition , et l'avait aucune communication au gentilhom-
i> avoué mais je ne le sais que par le me ; un peu d'argent, quelques pro-
:

V bruit commun, n'ayant pas cru de- messes de l'établir, et quelques mena-
is voir prendre aucun soin d'une pa- ces , firent qu'il avoua tout. Cette
1) reille fadaise , qui marque combien lettre de M. Buissière est datée de
3) les hommes sont faciles à donner Paris, le aS de juillet 1698. Joignons
3) croyance aux choses nouvelles , et à cela l'extrait d'une lettre de M. Leib-
3) qui leur paraissent si extraordinai- nilz, que l'auteur voulut bien que l'on
3) res. « Voici plus de précision, publiât dans le journal de M. Tenzé-
M. Buissière m'a fait l'honneur de jius l'an 1694, avec celle (^5) de ,

m'écrire que MM. Dodard et San- M. Robert. Il assure qu'il a ouï dire
veur , membres de l'académie des à madame la duchesse d'Hanovre
sciences , l'ont sollicité à donner une belle-sœur de le prince de Condé , M
seconde édition de sa lettre , et à s'y qu'elle avait reconnu dans son hôtel,
nommer ; qu'il la fera donc réimpri- à Paris les impostures de Jacques ,

mer et qu'il y mettra son nom puis- Aymar, etqu'elle opina conformément
,

que monseigneur le prince de Condé à ce prince , cpi'il valait mieux faire


t'eut bien qu'il le fasse par son or- connaître au public la fausseté de ces
,

dre, pour désabuser les partisans de choses que de la laisser inconnue,

(72) Le conle porte que Jacques Aymar re- (74) M. Robert en a parlé dans sa
lettre.

connut qu'un cavalier qui passait était le père (75) M. Pasch à tapage 778 de l'ouvrage^
,

de cet enfant expose'. cité ci-dessus, nomme f.lieulgni le père , a qui


ceUe lettre fut écrite. C'est apparemment une
(73) Elle est imprimée avec celle de M. Buis-
sière , citée ci-desius. faute d'impression pour Clie vijni.
,
ABARIS. ï7
30US prétexte que la persuasion de la de I yon , qui firent prendre le
trats
baguette avait fait peur à quantité meurtrier que lacqnes Aymar a^ait
de srelp'rats et procuré la restitution découveit à Beancaire, eussent mo-
de quelques vols. Elle de'claia que nace' de faire briMer tout vif romme ,

Jactjues Aymar
avait enfin avoué la un maltieureux magicien, Tauteurde
fraude , et qu'il en avait demandé par- la découverte, et qu'ils lui eussent
don, et qu'il avait dit pour ses excu- présenté le bourreau avec tous les
ses , que sa liardi sse avait moins instrumens de la question ils lui eus- .

contribué à la conduite qu'il avait te- sent fait avouer comment il avait ap-
nue que la créilnlilé d'autrui. (-6) pris tout le secret de l'assassinat , et
Is ( princeps Condseus ) ^vriiarum qu'il trouserait à Beaucaire en tel ,

Lugduno accersh'erat inda^inis cau- et tel lifu, i'un des assassiis. Il est
sa excussum multis nindii honiuncirt-
: très-apparent que des persoi r.es qui
nem et depreliensuni tandem ad con- voulaient le mettre en réputation ,
fesiionem fraudis adegit ; quant sihi afin de partager avec lui le profit de
ignosci petiit supplex et grai'iara me- ,
la baguette lui firent jouer ce lole.
,

tuens causatus nnn tant proprid aii-


, M. Buissière reuiaïque dar,s son im-
dacid , quant aliei'd credu/it^tc homi- primé (';8) que cet homme avait une
numfalli uolentium , et velut ohtru- caL/a'e de gens qui le prônaietit par-
dcnlium sibi , quœ alioqui ne jactare tout à Parii tt quijirent mettre dans
,

ausus fiusset , sese in /lœc iwpulsum le HJeicure Galant du mois de Jt trier


eh tandem peri^enisse,^ undè prdem i6g3 qu'il avait trouvé ceci et cela;
commode non pntuerit refene. Facile et il n'y eut jamais rien de plusjnux.
condonafil hnmini magnanimus pria- La prévention était telle, qu'il auiait
ceps; sed erant qui suaderenl dis- ,
gagné des sonira-s immenses s'il avait
simulari coniperta et conseruari fa- ,
pu se maintenir. Jugez si ses partisans
mam kominis uel artis utili dolo ,
,
n'avaient pas de fortes l'aisons de le
quàd constaret, furibus aliisque ma- seconder. « 11 n'y eut jamais d irapos-
/(5 hominihus magnum vietum fuisse " ture plus accréditée que celle-là
mjectum, et ob famam ad^entanlis » (79) on était si prévenu en faveur
:

alicubi rerum furtivarum pretia fuisse » de ce personnage, qu'on lui faisait


relata sed ducissœ pariler nostrœ ac
: " faire des choses à quoi il n'avait ja-
principis egregii sententia fuit po- ,
)) mais pensé, et qu'on lui chercliait
tinreni hal/endam lationem reritatis. » des raisons pour l'excuser (juand
M. Leibnitz a joint à cela une réflexion » il ne réussissait pas. Il imposait par
très-digne de lui, qu'il vaudrait bien » un air simple et grossier en appa-
mieux examiner de quelle manière » rence et en ne parlant que le pa-
,

tant de personnes de mérite avaient » tois de son pays ; mais au fond il , ,

pu être trompées à Lyon que de re- ,


» n'était rien moins que ce qu'il pa-
chercher les causes physiques de la ') raissait. Le mouvement de sa ba-
prétendue vertu de la baguette. (77) » guette faisait illusion on voyait ;

Et scripsi nuper Parisios , utilius et ,


» tourner entre ses mains un morceau
examine dignius mihi uideri proble- ,
» de bois fourclîé si adroitement ,
m.a morale vel logicum quontodo lot ,
» qu'on ne s'apercevait point du mou-
uiri insignes Lu^duniinfraudem duc- i> yement insensible de son poignet ,
ti fuerint ,
quant illiid pseudo-physi- " qui le déterminait à tourner avec
cum ,
quod tractai'it P^allemonlius , )) vitesse et avec force par le ressort ,

meliori materid dignus quontodo vir- ,


)> qu'il faisait faire à sa baguette. Ou-
ga corylacea miracula operetur ? tôt » tre sa naïveté apparente , il affec-
Nam moralis illa quœstio excussa ,
» tait fort d'être dévot , d'aller sou-
pro dignitate multonim errorum po- ,
))vent à confesse tous les jours à la,

pularium origines sœpè speciosas ape- » messe, et autres marques extérieu-


riret. Je m'imagine que si les magis- , » res d'une grande catholicité et de ;

j)dire qu'il avait soigneusement gar-


f76)Lelbnizius apud Tenzelii Colloq. meustr.
anni 1694- ./^ rapporte ceci comme je le » dé son pucelage ians lequel di- , ,

trouve dans V ouvrage de M. Pasch docte pro- ,

fesspur en philosophie à Kiel de Inventis no- . (78) Leltres .sur les véritables EffeU, de la Ba-
Tantiquis , pag. 779, e'dit. 1700. guette , pages i3 et i^.
(77) 'i-.e.'ihnWivi apud TeDzelii Colloq. menstr. (79) M. Bui-sière , dans ta lettre qu'il me
anni 1694 ,
page 779. Jfi l honneur de ni'e'crire te i5 de juillet 1698,

TOME 1.
i8 ABBEVILLE.
» sail-il , d
ne pourrait réussir a^ec latuas qui n'ont pas besoin d'ëmissai-
» In bap^nelte. 11 ne voulait poiatailer res; laciétiulite'du public leur prépare
» pendant le jour dans les rues, cruln- suffisamment les voies de Timposture.
)> t<s disait-il d'être assommé par les
, , II n'y a pas long-lemps qu'il a couru
M uoleurs et les filous. Mais tout cela par les villes de Hollande je ne sais
3) n'était qu'afin que la nuit lui servît quels Allemands qui se vantaient de
M de voile pour mieux cachfr toutes guérir toutes soites de malades sans
>>
ses ruses. Quelque ridicules que fus- leur donner aucun remède. Ilnejaut,
» sent toutes ses manières, elles ne disaient-ils, (yue /io«5 ertp'oyer f/e /ei/r
)) laissaient pas de trouver des appro- urine. On ne parlait que de leurs suc-
» bateurs , et par conséquent des ces chacun en contait des circon- :

» prône':rs. Que si on n'avait pas eu stances merveilleuses ; leur logis était


» le soin de Fempècher de sortir de comme le lavoir de Betbesda ])!ein ,

)) l'hofel de Condé, parce que mon- et entouré d'intlrmes. Je ne pense pas


» seigneur le prince , qui l'avait faitque ceux qui prônaient le plus la dro-
i> venir à Paris pour satisfaire sa eu-
,
gue de ces geas-là fussent de l'iotel- ,

» riosité , voulait lui faire faire les ligence pour partager le profit. Les
» éiireuves qu'il avait méditées, avant uns se plaisaient recommander la ;":

» que le publie, l'eût mis en pratique, chose , parce qu'elle tenait du prodi-
» il aurait été accablé par la multitu- ge les autres y pouvaient trouver ;

» de qui courait en foule pour l'aller quelque agrément , à cause que l'inu-
» consulter. L'un lui demandait si tilité des remèdes ordinaires les met-
» on ne pourrait pas découi'rir tes l'o- tait de mauvaise humeur à l'égard des
» leurs qui avaient fait un tel \^ol , médecins. L'illusion ne fut point lon-
» en un tel temps en tel lieu , etc. gue un mois ou deux en tirent rai-
, :

» Un autre lui venait demander, si son. On réfuta cette chimère (80) :


» un tel saint n'était pas le uérilable , et il y eut tant de gens (|ui s'y trou-
V plutrjt que celui de cette paroisse vèrent trompés , qu'ils passèrent de
» qui se l'antnit de le posséder aussi, l'approbation au dernier mépris.
» D'autres lui apportaient des reli- Notons que ^I. Leibnitz observa ,
» qiies pour savoir si elles étaient les avec beaucoup de raison que, si l'on ,

» vraies d'un tel saint. J'ai vu un n'avait pas pu opposer aux esprits cré-
3) jeune acrordé ouvrier en soie, dules ce qui se passa chez î\l. le prince
,

» assez idiot lui donner deux écus


, de Condé il aurait fallu encore tirer ,

M pour savoir si sou accoi'dée avait au bâton avec ces gens-!à. .Mais il est
» son pucelage. Ceux qui avaient part à craindre que l'on n'oublie bientôt
» au gâteau avaient soin défaite venir la déroute de Jacques A^mar, et que
3) l'eau au moulin, et de faire jiayer l'on ne soit trop disposé à recevoir la
3) la consulte par avance, si on en même scène , si de semblables motifs
3> voulait avoir une bonne issue. » la font revenir dans sept ou huit ans.
Un tel homme aurait été dans Paris Nisi princeps Condceus cognos< endre
im fonds assuré de gain et une mine rei tantiim studii imo et nuruptiis im-
inépuisable pour ceux qui auraient pendisset , laborarevius adhuc et con-'
eu part au profit. Les personnes soup- Jlictareniur ciim quibusdnm int^eniis ,
connantes et les personnes soupçon- quibus gralius est per miraj'alli, quant
nées l'auraient payé à qui mieux t'udœ ueritalis sirnplicilaii acquiescere
mieux^ il eût tiré de l'argent et des (SiJ- ,

maris c^t des femmes et des galans et ^f^^, L„f„^„


,
„„ uis-habile médecin de Poi- ^

deS maîtresses la baguette n'aurait


: terdam. publia un petU traite' lh-des.<us en ,

pas tourné ou aurait tourné, selon f'fmand et en français ,puur muntrer la vani-
Ti At J y^ ^ l^ elle ridicule de cette pratique, /'^orps l'His-
qu il eût ,
plus reçu des uns que des au- ^„.^^ ^^^ Ouvrage» des SaVa„s, m«.- iGy7
I

p. 408 ,

très. Je crois que , si l on pouvait de- et .suivantes et le Journal des Savans du i3 de ,

couvrir tout le mystère de ces sortes janvier 1698 p. 3o e'du. de Tfullande. , ,

de prétendus prodiges on V trouve- (81) Leibnizius, «pHiiTemelii Colloq. menstr.


,

rait un complot de gi-ns qui cherchent v-t^rë ,

à s'enrichir les uns se vantent d'un


:
AEARIS,villed'Égypte. Vojez
talent extraordinaire; les autres tra- j' i- 1 p
vaillent sous main à établir la persua- * * 15it^ 7"*^^' .
,

sion. Mais je crois qu'il y a des char- ABBEVILLE, en latin AbbatlS


ABBEVILLE 19
fi7/a , capitale du comté de Pon-" de qui j'emprunte ces paroles,
thieu en Picardie, sur la rivière faisait état , en l'année i(i'i6 ,
de Somme, à cinq lieues de la qu'e//e conlenait 35 on /\0 mille
tuer, au diocèse d'Amiens, n'é- personnes. C'était sa patrie; et
tait autrefois, comme son nom le il est remarquable qn'eu fort peu
témoigne, qu'une maison de cam- de temps elle donna trois bons
pagne qui appartenait;! un abbé, géographes, lui, Pierre Duval
On croit que cet abbé était saint- (/; et le père Philippe Briet , jé- ,

Riquier , ou quelqu'un de ses suc- suite. La rivière de Somme se


cesseurs qui trouvant cette situa-
, partage là en divers bras qni pas- ,

tion agréable et bien commode, sent au dedans et au dehors de


à deux lieues de son abbaye de la ville. On n'est point demeuré
Centule y fit bâtir première-
,
d'accord de ce que le même San-
nient une maison (a) et puis un , son assure {g) qu'Abbeville a été ,

château, oii il y eut un prieuré de tout temps la capitale duPon-


dépendant de l'abbaye (ù'^. Hu- thieu (A), et que les autres villes
gués Capet, en voulant faire une du Ponthieu n'ont rien d'ancien,
place forte pour arrêter les cour- en comparaison de celle-là (B).
ses des nations barbares l'ôta aux Encore moins lui a-t-on laissé
moines (c); et, l'ayant fortifiée, passer la jirétention, que cette
la donna à Hugues son gendre Bn'tan- , ville s'appelait autre fois
qui prenait le titre d'avoué , à nia (C) et qu'elle était l'une des ,

cause que le roi son beau-père lui plus florissantes de toute la Gaule,
avait commis la protection de l'é- long-temps avant Jésus-Christ,
glise de Saint-Riquier. Son fils Nous dirons en son lieu les suites
Angelram se contenta de ce titre de la querelle que le père Labbe ,

jusqu'à ce qu'il eut tué eu bataille 'lui fit là-dessus (D^. Abbevilleade
le comte de Boulogne, et qu'il beaux privilèges; et comme elle ,

se fût marié avec la veuve de n'a jamais été prise, on la nomme


ce comte; car alors il se qualifia lapucelle du paysf/?); etellesedit
comte de Ponthieu nom qui est en sa devise semper fidelis tou-
, ,

demeuré à ses descendans {d). jours fidèle. Qui voudra voir am-
Abbeville est devenue très-consi- plement tout ce qui concerne cet-
dérable dans la suite des temps, te ville, les privilèges de ses ma-
Elle est si grande qu à peine se jeurs les hommes illustres qui y
,
,

trouvera-t-il dans toute la France sont nés ou qui y sont morts etc. ,

dix ou douze villes qui la sur- (/), doit consulter V Histoire gé-
passent ou qui seulement Véga- néalogique des Comtes de Pon-
,

lent en son circuit {e). Sanson thieu, imprimée à Paris, chez ,

Le P. Labbe, Tableaux mélhod. de la


(a'i
fy) Fils d'une sœur de Sanson.
Ge'ograph. royale, pag. 322, éUU. in-ii.
(^) Sanson, Antiquité' d'AbbeviUe, p. 5g,
ib) Sirmond. jN'otœ in £pist. XXXVI , 6o.
Alexandri III. . (A) Duval , </an5 ion Traité de la France,
Hariulfus, Centulensis Monaclius
(c; in . pog . no-
Cbronico Monasterii sui , lib. IV, cap. XII , r,j c'm< avec raison que j'ai mis un et «»-
apud Hadr. Valesium Notit. Gall. ,pag. I.
,
tg^j . £.„,. ^^ n^^e est tout plein de matières

{d) Valesii Notitia Gall., pag. l. étrangères on j- trouve le chet'abcrBayard


.-

Sanson Recherche de l'Antiquité' d'Ab-


(e) ,
et d'autres personnes qui n'ont aucune rela-

beville,pa^. 2. ''oi au Ponthieu.


. ,

ABBEVILLE.
François Clousier, l'an iGS^, in- de Marseille estans^efant Scipion, in •
terrngés par lui de ce qu'ils scavoicnt
folio. L'auteur n'a marqué son de Dntannia Narbo et Corhilo pas
,

nom que par ces lettres, F. I. D. un d'entre eux n'en scut rien dire de mé-
,

J. M. CD.; mais on sait qu'elles rite, encore que ce J'uss'/it les meil-
signifient frère Ignace de Jésus leures villes de toute la Gaule. 11 sup-
pose que ce fut l'an 532 de Rome
Maria carme déchaussé. T^ojez
,
que les députés de Marseille firent
l'article Sanson (Jacques). voir cette ignorance. Sa raison est que
celui qui leur faisait ces questions
(A) A élé de tout
temps la capitale était le même Scipion qui
perdit la
du Ponihieu. ] Le père Labbe le réfute première bataille qu'Annibal gagna
ainsi sur ce point f^oiis n'ai'iez pas
:
sur les Romains. Il suppose que ce Sci-
lu, M. Sanson, hs titres et mémoires pion voulant savoir des nouvelles
de ,

de l'abbaye de Saint- /tirjuier, qui di- la marche d'Annibal, navigua jusqu'à


sent que sous Louis-le-Débonnaire, l'embouchure du Rhône; et que ce fut
,

l'an 81 5 il y await dans l'enceinte d»is là que les députés de


,
Marseille qui le
murailles de Centule deux mille cinq vinrent com|ilimenter
ne surent ré- ,
cents maisons plusieurs artisans
,
pondre à ses questions. Ci^ci sera exa-
,

quantité de rues, etc.; qu Ahbei>illeest miné dans l'article de P)théas. Voyons


mise au rang des bourgs et villages les autres hypothèses de Sanson. Il
qui en dépendaient ( i ). S'il en faut remarque: i°. Que la ville de Narbon-
croire le vers tant chanté daus le pays ne a été l'une des plus anciennes et
Turribus à cenlwn Ceniulu nomen habet, des plus florissantes villes de la Gaule,
et que (6), néanmoins elle n'est nom- ,
les cent tours qui flanquaient les mu- mée qu'après celle de Britannia par- ,
railles de Centule lui donnèrent son
mi les trois dont Scipion voulut sa-
nom (2). voir des nouvelles. 2°. Que le Belgium
(B) IV ont rien d'ancien, en compa-
des Commentaires de Jules César était
raison de celle-là. ] « Cela est faux, » une région entre les Belges (7) qui ,
disent ceux de Saint-Riquier (3) ; « et com'prenait le Beauvoisis, l'Amiénois,
» qu'avez- vous dans Abbeville qui
l'Artois et peut-être encore les Ver-
)) marque quelque ancienneté puis-
,
mandois ei les Senlisiens. 3". Que les
» que votre église collégiale de Saint-
habitans des côtes de Grande-Breta- la
n Wulfran reconnaît pour fondateur
gne étaient sortis du Belgiuni (8), et
» Guillaume de Taluas , et Jcau son
qu'ils avaient retenu le nom des cités
» fils, après l'an onze cent de salut j
desquelles ils étaient sortis c'est César :

» et que le prieuré de Saint-Pierre, or-


qui nous l'apprend. 4"- Que selon ,
» dre de saint Benoit, ne fut fondé que
le dénombrement de Pline (9) il faut ,

M quelques années auparavant car , :


que les peuples qu'il nomme Britanni
5) pour la paroisse de Notre-Dame du
aient habité dans le Ponthieu (10).
î) Châtel , cela ne ressent encore que 5°. Que de tous les endroits du 5e/-
,
» le village?)) Quant à Frédégaire, que
gium d'où il est passé des peuples en
Sanson avait cité comme un témoin Angleterre il n'y en a point qui doive
,

de l'existence d'Abbeville au temps venir en ligne de compte autant que


du maire Ebroin, on lui répond (4) celui qui est situé sur la mer c'est-à- ,

qu'il faut lire au chapitre xcvi non ,


dire autant que le pays de Ponthieu.
pas atque Abacivo l'illd et^adens aufu- 11 infère de tout cela que les Bri-
git ; mais atque a Baciuo uillâ ewa-
tanni de Pline sont les principaux du
dens aujugit. Belgium qui aient passé en Angleterre
(C) Que cette ville s'appelait au-
(11) que d'abord ils y ont gardé leur
;
trefois Britannia. ] Il fonda ce senti- ancien nom, et qu'ensuite ils l'ont ren-
ment sur un passage de Strabon où ,
du général à tout le pays et qu'ils ne
il crut trouver (5) que les députés
(C) Page 8.
(i) Labbe, Tableaux Méthodiques, page 32o. (:) Page St).
(2) Là même, page iiG et Siy. (8) Pages 17 et tfO.
(3) La même, page 320. (9) Libro , IV
cap. XVII.
(4) /.« même , page 32 1 (10) Sanson, Recherche d'Abbeville , p. 40*
(5) SansoQ , Recherche de l'Antiquité d'Abbe- (il) Cluvier , German. Anl lib. 11. cap.
ville ,
page 4- XXVII aime mieux lire Briauni ijue Britanni.
^
,

ABBEVÏLLE. 21
s'appelaient pas B)itanni sans que les paroles de rancieti géographe à ,

leur capilali; eût le nom de Brit/i/mia. quoi apparemment cette traduction


11 l'aut donc que du Pon- la capitale latine ne contribua pas peu. Cnjus
thiuti soit ancienne Biitannia
cette (Corbilonis) mentinnemj'aciens Poly-
dont Scipion voulut savoir des nou- bius, siniul Pjtheœ lejeit comnien-
vt'lles.Or, Abbeville est la capitale du lutn Massilienstum snficet qui Sci-
,

Ponihieu; elle était donc, sou" le nom pinneni conuenerunt nullum quicquam
de Britannia, la plus florissante ville habuisse dlgnuni memomtu quod di
des Gaules dès avant la seconde
,
ceret interro^atus de Bnlannid ileni- ,

guerre punique. que Narhonensiuvi et Corhilnncmium,


Sans doute il y a de TeVudilion et cîim hœ très iirbes Gallice omnium es-
de Tesprit dans cette longue gradation sent oplimœ. On peut aisément croire ,
d'hypothèses et de conséquences de , lorsqu'on n^est pas assez attentif, que
la manière que l'auteur l'a soutenue : ces trois meilleures villes de Gaule ,
mais il n'en saurait résulter qu'un pur dont le traducteur fait mention, s ap-
roman et que des chimères puisque ,
pellent Britannia IVarbo et Corhito. ,

le fondement de tout est uu passage Mais si l'on est attentif, on voit que
,

mal entendu. Voici le fait. Strabon BfiTTaLViK» se prend là pour 1 île Bri-
rapporte (12) que Polybe a mis entre tnnnia ; c'est ain-;; que Strabon a
les contes fabuleux de Py théas qu'au- ,
coutume de s'exprimer sans l'addition
cun des habitans de Marseille qui du mot v>l3-oç, insula (i4)-
avaient eu commerce avec Scipion (D) La querelle que le père Labbe
n'etit pu lui rien dire de considérable lui Jit la-dessus. ] 11 Gt sa déclaration
lorsqu'il les que.stionna sur la Breta- de guerre et son premier acte d hos-
gne non plus qu'aucun liabitant de
;
tilitépar ces paroles Britanniain^b- :

Karbonne ni aucun liabitant de Cor- ba.'illœus chalcngraphus interpretatur


biloa les meilleures villes du pays
, : Abbeville , lepidissimo commenta ,

c'est là levrai sens du texte grec ,


q iod non îam ex Pyiheœ mendaciis ,
comme on le peut recueillir non-seu- qu'am ex ignoralinne linguœ grœcœ
lement par les règles de la grammaire, editum inulignam in /ucem demonstra-
mais au.ssi par l'humeur du pèlerin bii'ius allas, ciim primwn singiilarein
dont il est ici question. Hip mç îîpiiKi illutn de Briiannid traclatum nancisci
IloXc/Cioc , //Vi)5ul«(ç Tùèv ùrro Tlubiov y-u- et légèredatuni fuerit. C'est ainsi
qu'il s'exprima dans son Phariis Gal-
5-:/^iU i^otvT a) V SxMTi'ajvi ot/Jj^ç sî;^« xîyitv liœ antiquœ , imprimé à Moulins en
Ol/tT.îV //tVS/ZMÇ i^lOV jpOJTllSêlç Ùtto toi> 2x)t- i6|f. 11 n'avait pas lu encore le livre
^icoVOÇ ÙTTif TilÇ BfêTTaVlK))Ç , oJtTs TOIV iX. que Sanson avait publié sur ce sujet à
NstcfâvCÇ, OÙSi Tùèl iX. KofCtl^^âvOÇ, OLlTTip Paris l'an i6J6. Il avait seulement
viTxv cipiça.1 TTokiiç rcèv rctûrv (i3j. Je vu le nouveau phénomène de Britan-
parle de Pythéas cet homme , pour :nia , non pas dans la grande carte de
mieux faire valoir ses i.âblerieset ses l'ancienne Gaule, publiée par Sanson
fanfaronneries, atiéctait de se vanter l'an 1627 mais dans la petite carte ,

qu'il apprenait à ses lecteurs mille qui vint après celle-là. Ayant enfin lu
choses qui axaient été ignorées jus- ce livre il en réfuta les fondemens , ,

qu'à ce teraps-là. 11 ne faut donc pas en l'année 1646, dans ses Tableaux
douter qu'il n'avançât hardiment ({ue méthodiques de la Géographie royale;
sa relation de la Bretagne donnait les et n'oublia point de remarc[uer que ,
premières connaissances que l'on eût selon le sens que le sieur Sanson don-
eues de cette île et que, pour le prou- nait au texte de Strabon , il faudrait
;

ver , il ne se servît de cet argument dire que les habitans de Marseille


c'est que Scipion n'en avait pu rien étaient dans une profonde ignorance
apprendre d'aucun des habitans de par rapport à la ville de Karbonne ,
\larseille , ni des ha'&itans de ÎSarbon- l'an 532 de Rome , quoi(ju'il y eût
ne ni des habitans de Corbilon sur la quatre cents ans à peu près que Mar-
,

Loire , quoique ce fussent les plus seille était bâtie, et quoique Narbonne
florissantes ^illesde la Gaule. Chacun fût une ville très-florissante, Sanson
voit combien Sanson a pris de travers n'avait pas manqué de sentir la difli-

(13) Strabo , lib. IK, j>n^e 190, (i4) Voyet , entre autres endroits , liyre /,
(iH) Idem , ili.l. page ',1-
ABBOT.
culte ; et il la para le moins mal qu'il de bien prêcher, contribuèrent
lui fut possible (i5). Mais à qui per-
suaderait-on <{u'a cause que les Mar-
moins à ces grands sauts de sa
seillais avaient souvent guerre avec fortune que la faveur du comte
leurs voisins , ils n'avaient pas eu le deDunbar dont il avait été cha- ,

temp3 desavoir ce que c'était que Kar- pelain. Sa conduite ne plut pas à
bonne r Le passage de Justin (16) que 1 .1 j r\ . •

Sanson rapport» ne nous apprend-il


tout le monde. On trouvait etran-
.

pas qu'avant l'an 362 de Rome ils ,


g^ ^l" il eût plus de considéra-
leni souvent
avaient souveni vaincu les Cartlia^i-
uartna^i- tion cuez mi
lion, chez lui,, pour son secré-
, secre-
'' ;_„ir.:i 11-
5, et qa'ils a valent fait alliance avec
nois,r' taire que pour ses chapelains et :
peuples d Jsspaener Le perc Labbe
les pe 'ic^ '^«''^ j ^- i ,

se trouva pas trop bien de son


'' ^''^ ^^ ^a maison, plus
^H
d'honneur aux gens du monde
triomphe 5 car Sanson fit des sorties
sar lui, à son tour qui renversèrent, qu'aux gens d'église. On crut que
presque tout le Ph«rus Galliœ anii- n'avant iamais passé par les bé-
quœ INntcz qu a 1 eeard de son
.
'c w 1 n» • 1

hypothèse touchant BrUannia, ilecri- "^hces subalternes a charge d a-


vil une réplique (17) qui n'a pas ëte i^i^* je veux dire que
) n'ayant ,

imprimée. jamais essuyé les difficultés qui se


(i5) Sansoii. Recherche d l'Antiquité d'Ab- trouvent dans la direction d'une
paroisse il était par-là devenu
(16) Justinu's, lib. XLIII
cap. et VI. , V ,

* moins propre à user d'indulgence


Dans une longue noie sur cette remarque,
Joly tôclic de justifier le P. Labbe du reproche
euA-ers les ministres. La sévérité
de plagiat que lui faisait Sanson.
(i^) Vojrez la remarque (A) de l'ardcle Pr-
qu'il avait pour eux, et sa conni-
THÉAS, à Lajin.
vence sur la propagation des non-
ABBOT (a) (Georges) archevê- conforaiistes étaient deux choses
, ,

que de Cautorbéri et auteur de ({i" faisaient parler contre lui. La


,

plusieurs livres (A) était fils d'un dernière a été cause qu'un auteur
,

tondeur de draps et naquit à moderne a dit que si Laud avait


, ,

Guildford dans le comté de Sur- succédé à Brancroft, et que le pro-


,

rey l'an 552. Il fit ses études à jet de conformité n'eût pas souf-
, 1

Oxford, ety devint, en 1597, prin- fei't l'interruption qu'il souffrit


cipal du collège de l'université, sous Abbot il n'y apoint dedou- ,

Deux ans après , on lui donna le te qu'on n'eût fait cesser le schis-
doyenné de Winchester, qu'il gar- me dans l'Angleterre (<). Abbot
da jusqu'en l'an i6og. Il succéda devint désagréable au roi Jacques
à Thomas Morton au doyenné de pour avoir été contraire au des-
Glocester. Jusque-là son éleva- sein que ce prince avait formé de
,

tion n'avait été ni fort éclatante marier le prince de Galles avec


ni fort prompte mais dans la l'infante d'Espagne. Les ennemis
:

suite elle fit de très-grands pro- de l'archevêque, s'étant aperçus


grès en fort peu de temps. Il ob- décela crurent avoir trouvé une ,

tint l'évêché de Lichtfield le 3 occasion favorable de le perdre;


de décembre 1609, l'évêché de pai"cequ'ilses2;jérèrentde3urpren-
Londres au mois de février 1 6 o dre la religion du roi Jacques en
1 , ,

et l'archevêché de Cantorbéri au alléguant la sainteté des anciens


mois de mars suivant {b). Son canons. Pour mieux entendre ce-
érudition, et le talent qu'il avait ci, il faut savoir qu'Abi)ot avait

(fl) Il y en a qui disent K\,ha\.. (c) Ex FuUeri libro, cui tilulus, VVoi-
(Zi) J?a- Atlicnis Oxoni'.'nsilitis, l'o/. /. tliies of England.
,

ABBOT. 23
tué parmëgarde leconcierge du prélats, et entre autres parGuil-
parc de Bramzel ,
qui appartenait laume Laud qui depuis fut son ,

à milord Zouch. L'évéquedeLin- successeur (e). Abbot se retira


coin qui était garde des sceaux
,
dans de sa naissance et
le lieu ,

fit entendre à milord Bucking- puis au château de (Iroyden, où


ham, que l'archevêque de Can- il mourut le 4 d'aovit i633. On

torbéri était déchu ipso fado de voit son tombeau avec divers or-
sa dignité par le meurtre qu'il
,
neraens , et avec diverses iriscrip-
avait commis.
Il allégua les lois tions, dans l'église de Guildford.
d'Angleterre, et la sévérité de II fonda un hôpital bien rente dans

l'ancienne discipline. Il fit crain- cette ville. Ily a un autre Geor-


dre que les papistes ne tirassent ges Abbot (B), qui a publié en an-
avantage de ce qu'on laisserait g\ais une Paraphrase sur Joh; de
exercer les fonctions d'archevè- courtes Notes sur les Psaumes ;
que et de primat du royaume à Vindiciœ Sabbati {/). Il vivait
un homme qui avait les mains en 1640 *.
teintes de sang. En un mot, il fit
^^^ y,,.^- ^^^ Hislorical ColleCions de Jean

si bien qu'on expédia une com-


,
Rushworlli tom. I où l'on voit un long mé-
, ,

moire de Georges ALLot sur les procédures


mission à quelques évêques et à de sa suspension.
quelques autres seigneurs pour , {f) A-tlienîe Oxonienses, toni. I.
* Chauffepié a fait dans son Diction-
examiner le fait. L'issue n'en fut ,

naire quelques additions à cet article.


,

point agréable aux ennemis de


Georges Abbot; car on jugea qu'il (A) Et auteur de plusieurs libres. ]
n'était point devenu irrégulier Les principaux sont Qucestiones sex :

t'ieolngicœ totidem prœleclionihus dis-


par ce meurtre involontaire. Ceci jiutatœ, imprimées à Oxford, en i.'îgS.
se passa en 1621 *. Six ans après, Doctor HiU's Reasons for Papistry ,
il s'éleva contre lui une nouvelle unmasked ; c'est-à-dire, les Raisonsdu
docteur Hill (i) pour les Papistes de-
tempête qui le renversa. 11 ne ,

masquées , à Oxford en 1604. Des


,
s'en faut pas étonner le favori :
i'eniions sur le prophète Jonas. L'His-
{d) lui voulait du mal , et ne pou- toire du massacre de la f^nlleline. Une
vait digérer que de certaines per- Géographie dont la neuvième édi-
,

sonnes qui lui étaient odieuses tion, qui n'a pas été la dernière, est de
l'an 1607. Ces trois derniers ouvrages
fussent trop souvent à la table de sont en anglais^ comme aussi le traité
l'archevêque , 1 unedes meilleures j^ de la l'raie
/« f^isihilité perptUielle
dece temps— là. Le prétexte dont église, imprime à Londres en 1624,

on se servit fut que ce prélat re- auquel il n'a point mis son nom.
«""•'^ Georges Abbot .] C'est à
fusa son approbation à un sermon ^^)
^l"
, - ^1 c-i il 1' 1 '• cfuoi na pas pris earde le sieur Hen-
du docteur Sibthorp sur 1 obéis- ^-^^^^ ^y-jf^ ^^^^ ,^^ Dianum bio-
sance apostolique, encore que le grnphicum, où il donne à l'archevé-
roi lui eût commandé de l'approu- que de Cantorberi les ouvrages de cet
Georges ]es Paraphrases su,
ver. AlorsonlesuS|>enditdetou- %^Y^ :

tes les
rT 11 •• J^" et sur tes 1 saurnes et les yindi.-

fonctions de la pnmatie, ^,^ Sabhati. Il lui donne aussi un


,

et on les fit exercer par quelques Traité contre les Ei^êques et un autre ,

contre les Brownistc.s. Ce sorait une


* Jolj, d'après Niceron, remarque que
chose bien rare que le primat d'An-
les lettres de pardon données le ix novembre
l^ferre eût écrit Contre les evèques.
1021 sont antérieures cl non postérieures a la " '

prote.'itation qui at de ibao.


, (i) C était un hoii ne qui ai>aU embrassé la
(d) Le duc dcBucîdngham. religion romain&.
3,

ABBOT.
ABBOT (Robert) frère aîné 161 5, il mourut de la pierre le
du précédent naquit comme lui
, 2 de mars 1618 (b). Il n'y avait
à Guildford (a) , et fibcorame lui pas encore deux ans qu'il avait
ses études à Oxford, dans le col- convolé en secondes noces ce qui ;

lège de Bai'leul. L'un de ses pre- avait fort déplu à l'archevêque de


miers emplois fut la charge de Cantorbéri son frère (c). On s'est
lecteur à Worchester, d'oii il étonné qu'ayant fait paraître son
passa à celle de ministre de l'é- savoir et son mérite tant de vive ,

glise de Tous les Saints au même voix que par écrit réussissaiit à ;

lieu et peu après à celle de mi- tout à prêcher à faire des livres
;
, ,

nistre de la paroisse deBingham et des leçons , à disputer, à sou-


,

danslaprovincedeNorthampton. tenir une thèse , à présider , et dé-


Tout cela se fit entre l'an i58i veloppant à merveilles les ques-
et l'an i588. Il fut reçu docteur tions les plus difficiles, il soitmon-
en théologie à Oxford l'an i Sgy ,
té tard à la prélature. On en a
si

et devint chapelain ordinaire


il donné trois raisons : première-
du roi Jacques dès les premiè- ment , il n'était pas ambitieux se-
, ;

res années de son règne. Il fut condement, on le soupçonnait d'ê-


fait en 1609 principal du collège tre puritain troisièmement, en- ;

de Bailleul. Trois ans après, il fin ses parens avaient de la peine ,

fut élevé à la charge de professeur a consentir que l'Eglise fut ornée


royal en théologie dans l'univer- des dépouilles de l'académie, et
sité d'Oxford. Il choisit pour ses de profes-
qu'il quittât la qualité

leçons une matière si agréable au seur pour prendre celle d'évêque


roi Jacques , et il la traita si pro- (d). Cette dernière raison me sem-
fondément etsi doctement qu'on ,
ble très-fausse. Quoi en soit,
qu'il
a cru que ce fut la seule cause de ceux qui ont comparé lesdeux frè-
sa promotion à l'évêché de Sal ishu- res l'un avec l'autre donnent l'a-
ry. La matière qu'il choisit fut vantage à Georges en fait de prê- ,

l'autorité des rois, laquelle il mitacher éloquemment; et à Robert,


couvert de toutes les subtiles atta- en fait de prêcher savamment. Ils
ques de Bellarmin et de Suarez. disent que Georges était plus pro-
C'est ce qu'on peut voir dans le li- pre aux affaires , et que Robert
vre de Suprejnâ Poteslate Régi a étaitplus profond théologien. Ils
imprimé à Londres en 1619. Il ajoutent que la gravité de Georges
avait publié lui-même en 161 était accompagnée d'un air sévè-

un livre latin qui ne fut pas re, et que cellede Robert avait l'air
moins agréable que ses leçons riant (e). Celui-ci passe pour un
:

ce fut une Réponse à l'Apologie calviniste mitigé car il expli- ;

que le jésuite Euda-mon-Joannes quait selon l'hypothèse des infra-


avait publiée pour son confrère lapsaires le dogme de la prédes-
Henri Garnet. Il ne jouit pas
(b) le sieur WiUe met celte mort au on-
Jong-temps de sa prélature; car, zième mars 1617 Ccqui l'a trompé, est i/iie
ayant été sacré le 3 de décembre les Anglais ne commencent pas l'année com
me les autres nations.
(c Allien. Oxoniens.
*Joly se contente de renvoyer an tome
XFI des Mémoires de Kiceron (rf) Fuller, Worlhies of England.
[n) Eti i56o. (c) Là même.
,

ABDAS. 25
tination. Je donne de ses les titres tiens. Ils jouissaient
dans la Perse
ouvrages (A). 11 y a eu depuis lui d'une pleine liberté de conscien-
im Robert Abbot, natif de Cam- ce, lorsque cet ëvéque s'émancipa
bridge qui a publié divers livres
,
de renverser un des temples oii
en anglais. 11 a été ministre à Lon- l'on adoraitle feu. Les mages s'en
dres après l'avoir été au pays de
,
plaignirent d'abord au roi (A),
Kent et ailleurs {f). Le Catalogue qui fit venir Abdas et après l'a- ; ,

de la Bibliothèque d'Oxford a cou- voir censuré fort doucement , lui


pé cet auteur en trois on y parle : ordonna de faire rebâtir ce tem-
de trois Robert Abbot, auxquels pie.Abdas n'en voulut rien faire,
on partage les livres qui n'ont été quoique le prince lui eût décla-
composés que par une seule et i"é qu'en cas de désobéissance ,

même personne. il ferait démo ir toutes les églises


,^, ... ^ des chrétiens. Il exécuta cette
(/) Atben. Oxomens. / n j />
menace [a) ,
..
et
l
abandonna i
les n-
(A) Je donne les titres de ses ou- dèles à la merci de son clergé (B)
11?"*'"'' fui parlé, n'ayant vu qu'avec douleur
TrVf-
Il fit te
?^"l
IfJiroir des ?°r'
oubli'iles ^ranisli-
j
> ,
, i

ques, Londres, en 1694^ Sermons


à
qu 011 leur avait ac- la tolérance
sur le Psaume centdix au mèmeWen, cordée, se déchaîna contre eux
,

en i6ni la Défense du Catholique avec beaucoup de furie. Abdas fut


;

reformé de Gud/aume Perk.ns con-


j^ premier martyr qui périt en,

"-i ^
tre te docteur tlisnop; et une lieplinue ^
V • 1

« lu R. ponse du même docteur, à Lon- cette rencontre il fut , dis-je , le :

dres, en 161 1: ces quatre ouvrages premier martyr , si l'on peut ain-
sont en anglais, et j'en ai abrégé les si nommer un homme qui , par sa
titres^ ^ntichr^sti Demnn.tratio c-nn^
tra Pontificios , a Londres, en lood
(i) Excrcitationes de Gmfdct Per-
,
çf^^ témérité (C) , exposa l'Église à
^ ' , 1
t^"* "^ malheurs. Les chrétiens ,
seuerantid Sanctorum à Londres en qui avaient déjà oublié l'une des
ht ' •

, ,

1618. Son Commentaire latin sur l K- principales parties de la patience


pîire de saint Paul aux Romains iut
évangélique , recoururent à un
trouve dans son cabinet: il contient p, ^ ^ , . ,

quatre volumes, et il a été donné à la remède qui causa un autre de-


bibliothéque d'Oxford par le docteur luge de
,
sang. Ils implorèrent l'as-
Édouard Corbet, mari de Marguerite sistance de ïhéodose ce qui allu- ;

Brent, fille de Marthe Abbot; laquelle


^^^^ ^^^ ^^ gj.^.^ ^^^.^ j^^
fliarthe tut la tille unique et hent tre ^ S / % ti .

de notre Robert, évèque de Salis- -Romains et les Perses ^c> Il est


1

bury iot). L'Énître aux Romains ne vrai que ceux-ci eurent le désavan-
foumit point de sujet de controverse tage mais était-on assuré qu'ils ;

sur lequel ce docte prélat n'étende le


^e battraient pas les Romains et
grand talent qu il avait pour la pôle- ,
que par le moyen de leurs vic-
,1 ,
;

^i„ue^ ,

toires, la persécution particuliè-


, >
( 1)
e 1- I
ScaliKer touf
tana, pa^es
r
/or« c«
x ei 2.
.
(ii're drtn.f
, , c ,
«e Scalige- j i
re des chictiens de Perse ne de-
' •
in
(2) Voyez lej auteurs anglais que j'm cUes
viendrait pas générale
daiii le coi-ps de cet article. 1 D sur les au-

ABDAS évêque dans la Perse (a> Ex Theodoreti Hist. Eccl. , lib. r,


, ,
cap. xxxrx.
au temps de Théodose le Jeune , {b) Vedelius, théologien prolestant, blâ-
fut cause par son zèle inconsi- me cet éi'éqiie. Voyez Voetii
,
Disputât. , tom
pa-^. 3 10.
déré, d'une très— horrible persé- ///,
(f Socratis Hist. Eccles. !
, lib. VII ,
cap.
cution qui s'éleva contre les chré- xriii.
,,

26 ABD AS.
très parties de l'Eglise? Voilà ce Trigintajam elapsis annis permansit
nihilomirdis tempestas à ntagis , tan-
que le zèle indiscret d'un simple ,

quant quibusdani ventis ac turbini-


particulier peut faire naître. A biis , suscitata (4). Ce fut leur fonc-
peine trente ans suffirent à la vio- tion dans la tempête qui agita si vio-
lence des persécuteurs {d). Ceux lemment l'e'glise de Perse pendant
trente ans. Socrate rapporte qu'ils se
qui ont supprimé cette raison du
servirent de diverses impostures pour
déchaînement des Perses ne sont arrêter les progrès delà religion chre'-
pas excusables (e). On peut leur in- tienne lorsqu ils virent que l'amitié
,

tenter , dans la république des let- qu'Isdegerdes avait conçue pour le


saint èvêque Maruthas leur donnait
tres , laméjne action que l'on in-
lieud'appréhender qu'il n'abandonnât
tente dans le barreau à certaines leur religion (5). Ils furent assez har-
réticences des vendeurs {/); et il dis pour cacher un homme sous terre,
serait à souhaiter que le public fût dans le temple où le roi allait adorer
le feu auquel homme ils donnèrent
plus sévère qu'il ne l'est contre les ,

ordre de crier quand le roi serait ,


historiens qui suppriment certai- pre'sent, qu'il fallait chasser ce prince,
nes choses. Il y en a si peu qui ne puisqu'il avait eu l'impiete de croire
le fassent , qu'il serait désormais qu'un prêtre chrétien fût ami de Dieu.
temps d'y remédier , si on le pou- Si ce que les
impies débitent très-
faussement était véritable, savoir,
vait. que la religion n'est qu'une invention
Ce?) Tlieodoreli Hist. Eccles. , lib. V, cap.
humaine , que les souverains ont éta-
XXXIX. blie afin de tenir les peuples sous le
(c) yoyez la remarrjue (C). joug de l'obéissance ne faudrait-il ,

fy) Ciim ex cJiiodecim labulis saiis esset j)as avouer que les princes auraient
ea prœstari qiiœ essent tingiiâ nunaipata été pris tous les premiers dans le piège
,

qnœ qui inficiatus esset diipli pœnam subi- qu'ils auraient tendu ? car, bien loin
rel, à jureconsuUis etùim rclicenlice pana est
que la religion les rende maîtres de
constituta. Qtndqiiid eniin esset in prœdia t'i-
leurs sujets, qu'au contraire elle les
tii, id statiierunt si i'endttorscirct
, nisi no- ,

minatim diclitm esset, prœstari opnrtere. Ci- soumet à leurs peuples, en ce sens
cero, de Offic. lib. III cap. XVI. Voyez qu'ils sont obligés d'être non pas de
, ,
,

aussi Grolius de Jure Belli lib. II. cap. la religion qui leur parait la meilleure
, ,

VIII, num. 7 et Puffendorf de Jure Kat.


; mais de celle de leur peuple et s'ils ; ,

lib. V, cap. m.
en veulent avoir une qui soit diffé-
rente de celle-là leur couronne ne ,

(A) Au mi. ] C'était Isdegerdes si tient plus qu'à un fdet. Voyez com-,

l'on s'en rapporte à The'odoret (i);


ment les mages de Perse menaçaient
mais selon Socrate (2) la persécu- leur prince
, ,
quoi(ju'il n'eût encore ,
tion ne commença que sous Varara- que caressé un évêque. N'a-t-on pas
ncs , fils et successeur d'Isdegerdes.
dit que le dernier roi de Siam avait
Baronius (3) n'ose de'cider lequel des été renversé du tronc pour avoir été
deux a raison. trop favo'able aux missionnaires chré-
(B) A
la merci de son cierge'.'] J'ap-
tiens (6>? Le même Socrate qui nous ,
pelle ainsi les mages , qui avaient
apprend les artifices que les mages
entre autres choses , le soin de la re- emplojèrent pour traverser la propa-
ligion. C'e'taient eux qui prenaient nous apprend
gation de l'Evangile ,

garde que l'on n'innoviU rien sur ce aussi qu'après la mort d'Isdegerdes, ils
point-là. Tlieodoret les compare à des
inspirèrent à son fils un tel esprit de
tourbillons de vent qui soulèvent les persécution cpi'on vit exercer contre
,

flots de la mer. Tfiâ.KovTx S'ukumBôtuv les chrétiens une cruauté afl'reuse. Ils
iTCl'V Ç«tXM y.if/.îvDKlV Ôtto tÔùv [AcLycev
il ,
avaient tâché en vain d'inspirer le
x*9i,T5p ^TToTivecv KdLra.iyiS'cei fiTn'^oiw.ivvi.

Theodereli Hist. Eccl. lib. V, cap-


(i) Theodereli Hist. Eccl. , lib. VII, cap. C4) ,

XXXIX. XXXIX.
il) Socralis tlist. Eccl., hb. VU, cap. (^. Sorratls Hist. Eccl., lib. VII, cap.
xyni. VIII.
(3) Bai'onlus , ad ann. l^^o. (G) On ecril ceci en i6g3.
,

ABDAS. 27
même esprit A son père ;,car peu s'en au'on aurait volée à quelqu'un que ,
fallut qu'il n'embrassât l'Evangile. So- de dire que ce quelqu'un est un'hom-
cratele témoigne: il a tort de n'avoir me qui emploie son argent à la dé-
point avoue de bonne foi que l'incar- bauche ? Laissez-le faire vous n'avez :

tadc de l'évéqtie Abdas fournit aux pas à répondre à Dieu de l'abus qu'il
mages un prétexte très-plausible. Coo- fera de son argent^ laissez-lui son bien :

ferez ceci avec la remarque (B) de quel droit y avez-voiis ? Oulie cela
l'article JcNios(/^fa/içot4) j professeur quelle comparaison y avait-il entre la
à Leyde. construction d'un temple sans lequel
(C) Un homme qui, par sa témérité. '\
les Perses n'auraient pas laissé d'être
Tous les historiens ecclésiastiques aussi idolâtres qu'auparavant et la ,

n'ont pas eu la mauvaise foi que je destruction de plusieurs églises cbré-


vicns de reprocher à Socratej car tiennes ? 11 fallait donc jjrévenir ce
Théodoret a confessé ingénument que dernier mal par le premier puisque ,

l'évéque qui démolit un temple don- le prince mettait cela au choix de lé-
na lieu à la terrible persécution que véque. Enfm qu'y a-t-il de plus ca-
les chrétiens eurent à souffrir en Per- pable de rendre la religion chrétienne
se (7). 11ne nie point que le zèle de odieuse à tous les peuples du monde
cet évéque ne fût à contre-temps; que de voir qu'après que l'on s'est insi-
mais il soutient que le refus de rebâ- ïiué sur le pied de gens qui ne deman-
tir uu temple est digne d'admiration dent que la liberté de proposer leur
et de
la couronne; car, ajoute-t-il doctrine, on a la hardiesse de démolir
c'est une aussi grande impiété ce me ,
les temples de la religion du pays et ,

semble, de bâtir un temple au feu de refuser de les rebâtir quand le sou-


que de l'adorer. Nicéphore a copié verain l'ordonne ? N'est-ce pas donner
tout cela de Théodoret (8j. Pour moi lieu aux intîdèles de dire Ces gens :

je trouve qu'il n'y a point de particu- «e demandent d'abord que la simple


liers, fussent-ils métropolitains ou pa- tolérance ; mais, dans peu de temps,
triarches, qui se puissent jamais dis- Us l'oudront partager ai^ec nous les
penser de cette loi de la religion na- charges et les emplois et puis devenir
,

turelle Il faut réparer, par restitution


: nos maîtres. Us s'estiment d'abord très-
ou autrement le dommage qu'on a
, heureux si on ne les brdle pas en- ,

J'iità son prochain. Or est-il qu'Ab- suite très-malheureux s'ils ont moins
das simple particulier et sujet du roi
, '^'^ privilèges que les autres, et puis cn-

de Perse, avait ruiné le bien d'autrui, co/e très-malheureux s'ils ne sont pas
et un bien d'autant plus privilégié l^^ seuls qui dominent. Pendant un
qu'il appartenait à la religion domi- certain temps ils ressemblent à César
nante. il était donc indispensable- qui ne uouluit point de maître ; et puis
ment obligé d'obéir à l'ordre de son H^ ressemblent à Pompée qui ne i^ou-
souverain touchant la restitution ou l^^i point de compagnon.
le rétablissement du bien qu'il avait jVec quem>,uam jam ferre poteM Cœsarv.
ruine et c était une mauvaise excuse
, priorem,
que de dire que le temple qu'il aurait Pompe\usve parem (9).

fait rebâtir aurait servi à l'idolâtrie ; Les persécuteurs de ceux de la re-


car ce n'eût pas été lui qui l'aurait em- ligion avaient inspiré malignement
ployé à cet usage, et il n'aurait pas cette penséeà Charles IX, qui, dit-on,
été responsable de l'abus qu'en au- se servit un jour de ces paroles eu
raient pu faire ceux à qui il apparte- parlant à l'amiral de Cojigny Per :

naît. Serait-ce une raison valable, innanzi , vi conlenlavale dun poco di


pour s'empêcher de rendre une bourse Ucenza hora , la i^olete del pan ; Jra
:

^, , , „. „ poco , i^orrtte esser soli, e cacciar noi


(') Tlieodoreti Hist. Eccl. lib. K, cav. „/,„ f ^ 1 \i \^
XXXIX.
,
altrijuon del1 regno [io).\oila
i \
les in-
\

(S) Lihr. XIV,


cap. XIX. Je trompe dans convénieus inévitables à quoi s'expo-
Saldeui Oila Tlifol. page 6ig que Sacrale
, ,
sent ccux qui Soutiennent si chaude-
vocal exertim rcra nou oppoitunam ce que fil , Qjent qu'il faut employer la force du
Veveqiie. On cUe Uist. tr;[)ai-t. Ub. X, cap. * ' -

XXX'; mai< U rsl sur qm- ce c/tapilre est em- (g) Lucanus lih. /, v. 120. yide eliain Flo-
,

priiiUr de The'odorel. Vot-lins, Di^piit. Tbeol. ruiu , lihr. IV, cap. II.
loin. III page iio , cite L^usèbe , qui n^ en a
,
^10) Dnvila , Isioria delle Guerre civili di
pti parler. Fiancia , Ub. IF, page i5S l'ipra l'uniio l566.
,
,,

28 ABDÉRAME.
bras séculier à l'établissement de l'or- belle femme. Dès qu'il eut calmé
thodoxie. C'étaient les principes d'Ab-
cette sédition , il s'appliqua avec
das ^ car que n'eût-il point fait à main
armée contre les idolâtres, sous un em- tant de soin à l'armement formi-
pereur chiétien, puisque, sous un prin- dable qui lui était nécessaire pour
ce païen qui tolérait l'Evangile , il dé- s'emparer de la France qu'il
molit un tf mple que les païens véné-
, y
raient très - particulièrement ? Con-
mena, l'annéed'après(ô),unedes
férez avec ceci ce que vous trouve- plus grandesarmées qu'on eût vues
rez dans la remarque (B) de l'article depuis long-temps. Elle se répan-
Braun (Georges). dit au long et au large et porta ,

ABDÉRAME, gouverneur partout la désolation et l'effroi. La


d'Espagne pour Iscam calife des mémoire n'en est pas encore pé-
,

Sarrasins au 8". siècle, tâcha rie, non pas naêmeparmi le petit


d'étendre sur la France leur do- peuple , dans les pays qui souffri-
mination, peu après qu'ils eu- rent ces cruels ravages. On ne sait
rent conquis toute l'Espagne. Ils point si les Gascons dont le duc ,

avaient lieu d'être contens (A) de était ami de celui des Aquitaines
ce qu'ils avaient déjà subjugué résistèrent (C) ou s'ils se soumi-
;
,

et néanmoins il était fort natu- rent aux Sarrasins on sait seule- :

rel de n'en demeurer pas en si ment qu' Abdérame s'étant avan- ,

beau chemin. Si nous avions une cé jusqu'à Bordeaux prit la ville ,

histoire particulière d'Abdéra- et en fit brûler toutes les églises ;

me , composée par un homine de après quoi il gagna une sanglante


son parti on y verrait sans dou- bataille sur Eudes (D) un peu au
, ,

te qu'il était fort propre à satis- delà (c) de la Dordogne (E). Il tra-
faire l'ambition excessive de son versa le Poitou il pilla l'église de ,

maître et que c'était un des plus Saint-Iiilaire dePoitiers , etprit le


,

grands capitaines de l'univers. Ce chemin de Tours pour en faire au-


ne seraient que grandes actions tant au trésor de l'église de Saint-
,

et que triomphes. Je sais que des Martin. Ce fut alors que Charles
auteurs chrétiens en parlent avan- Martel secondé du duc d'Aqui- ,

tageusement; et dans le fond ce taine, arrêta ce fier torrent. La


n'est pas un petit éloge que d'a- grande armée d'Abdérarae le ,

voir pénétré comme usqu'au nombre des villes qu'il pilla et ce-
il fit j
,

cœur de la France mais enfin lui des églises qu'il brûla en pas-
:

il n'est rien tel qu'une plume de sant dans le Périgord et dans la


son parti. Abdérame leva prorap- Saintonge, rendirent sa marche si
tement l'obstacle qu'Evides , duc lente, qu'Eudes eut le temps de re-
d'Aquitaine , lui avait suscité faire unearniéeconsidérableavan t
,

puisqu'en peu de temps il rédui- que de se joindre à Charles Mar-


sit à la nécessité de se tuer le gou- tel. Après la jonction ils allèrent ,

verneur de Cerdaigne(<i!) qui s'é- jusqu'au delà [d] de Tours à la


,

tait soulevé à la sollicitation de ce rencontre d'Abdérame. Les deux


duc. Il en usa fort honnêtement armées en présence passèrent près
envers sa veuve (B) qui était fille de sept jours à s'escarmoucher;
,

du duc Eudes et parfaitement


,
(6) En 732.

la) Il s'appelait Muuuza. Voyez son ar- [c\ C'est par rapport aiir- Pyre'ne'es.
ticle. d) C'est par rapport à Paris.
,,

ABDÉRAME.
mais enfin le septième jour qui ,
là une médisance qui n'épargnejamais
ceux qui font de f;randes actions.
fut un samedi du mois d'octobre
Quand on ne peut point nier qu'ils
de l'année 782 (F), la bataille se les aient faites on se retranche a dire
,

donna avec une très-grande per-


, que c'est peu de chose en comparai-
te pour les Sarrasins. Il ne faut son de ce qu'un autre aurait fait
dans un cas semblable on se dédora-
pas croire néanmoins que le nom- ;

mage par-là de l'aveu que l'on est con-


bre de leurs morts ait été tel (G) traint de faire. Les païens auraient
que plusieurs historiens hyperbo- appelé cela une critique de la Fortune,
liques l'ont débité. Abdérame res- sur le mauvais choix de ceux à qui
elle présente les occasions.
ta sur la place : les débris de son
(Bj Entiers sa veui'e. ] Nous dirons
armée se retirèrent plus aisément ailleurs {1) que la fille d'Eudes ma- ,

(e) qu'ils n^avaient lieu de l'espérer riée à ce gouverneur de Cerdaigne


(H). Le duc d'Aquitaine, que l'on était la plus belle princesse de son
temps et qu'ayant été amenée à Ab-
a faussement accusé d'avoir attiré ,

dérame après la mort de son mari


cette irruption (I), contribua ex- elle fut envoyée au calife. C'est un en-
trêmement au gain de cette ba- droit sur lequel un historien sarrasin,
étonnant qu'une
taille (K). Il est ne passerait pas aussi légèrement que
nous faisons nous autres auteurs chré-
journée de cette importance n'ait
tiens. 11 mettrait cela au-dessus de
pas été bien décrite par les écri- tout ce que les Grecs et les Romains
vains de ce temps-là, et que néan- ont publié , les uns à la gloire d'A-
moins les modernes aient osé en lexandre, les autres à la gloire de Sci-
pion, Alexandre se comporta chaste-
débiter tant de choses particuliè-
ment envers la femme
et envers les
res (L). filles de Dariu?
qui étaient devenues
,

ses prisonnières (3). Scipion se con-


(e) Voyez /'Histoire de France de Corde-
tint à l'égard d'une jeune fille très-
moi , tom. I ,
pag. 4u3 et suiv.
belle qu'il avait en sa puissance, et la
(A) D'être contens. ] Jamais peut- renvoya à l'homme de qualité auquel
être on n'a vu d'exemple d'une aussi elle était fiancée {^). Un histoiùen pa-
longue suite de victoires et de gran- négyriste trouverait dans les circon-
des conquêtes que celle que l'on re- stances de la conduite d'Abdérame de
marque dans l'histoire des Sarrasins. quoi lui donner la place d'honneur.
L'idée (i^qu'un poète ronsainse faisait Il ne tenait qu'à lui de garder la veuve

d'une vaste domination ne comprend d'un chef rebelle c'était une beauté:

qu'une partie de leur empire. La raison extraordinaire ; cependant il n'y tou-


voulait qu'ils s'arrêtassent et qu'ils ne cha pas.
s'arrêtassent pas. Cela parait contra- (C) Si les Gascons. résistèrent. ]
dictoire, et ne laisse pas d'être vrai. Les historiens les plus exacts (5) re-
S'ils se fussent arrêtés, on aurait pu marquent qu'Abdérarae entra en Fran-
les en louer pour bien des raisons ;
ce par le pays qui est entre la Ga-
mais on eût aussi trouvé beaucoup de ronne et l'Océan, et que ce pavs était
raisons de les en blâmer; car on les alors sous la domination du duc des
eût accusés de faiblesse et d impru- Gascons et non pas sous celle du duc
,

dence on eût dit qu'ils n'avaient osé


;
d'Aquitaine. Ils ne parlent point du
ni su profiter des occasions que la siège d'Arles , que M. Jloréri fait faire
Providence leur mettait en main, et au général des San-asins avant que de
qu'avec un peu plus de hardiesse et de l'envoyer à leur secours dans l'Aqui-
grandeur d';ime ils auraient été en
,
taine , et avant que de le rendre maî-
état de conquérir tout le monde. Voi- tre du Languedoc, du Querci, etc. Ce

(2) Dans l'article Mcncia.


(i) Lali'us règnes avidiim domnndo
Spiritum^ qu'ani si T.iln remotis am (3) Voyez la remarque {O) de Varticle Ma-
Gadibus jungas et iilerijue Panus ciooi.NE.
,

Servial uni. (4) Valer. M.->xim. , lib. IV, cap. TIl.


Hor.nt. Od. n,lib. II. (5) Mézerai , Cordcinoi.
Bo ABBÉRAME.
sont des hrouilleries d'autant plus ainsi ses troupes jusqu'à l'arrivée de
grandes qu'il est sûr que les Sarra-
,
Charles, il rendait la défaite entière
sins étaient maîtres du Languedoc des Sarrasins plus probable, en (]uel-
avant qu'Abdérame eût passé les Py- que province qu'on les rencontrât. Il
rénées. Le chemin qu'il tint me ser- serait peut-être difiicile de décider si
vira ci-dessous à la justitication du l'ardeur qui empêcha Eudes de fuir la
duc d'Aquitaine. Les brouilleriesd'Au- bataille est plus digne de censure que
gustin Curion (6) sont encore plus le flegme et que la grave lenteur avec
confuses; il veut qu'Abdérame soit en- quoi Charles marcha vers la Loire.
tré en France avant la mort de Mu- C'étaient deux hommes qui jouaient
nuza; qu'il y ait gagné une bataille au plus fin. Eudes souhaitait de vain-
contre Eudes ; qu'y étant retourné cre sans Charles Martel, et celui-ci
après la mort de Munuza, il ait passé n'était pas fiiché que les Sarrasins dé-
le Rhône et fait un carnage horri- solassent l'Aquitaine et battissent les
,

ble à Arles ; qu'après cela il ait mis troupes d'Eudes. Cela le (iélivrait des
le siège devant Toulouse sans la pren- obstacles qu'il craignait de ce côté-là
dre , puis devant Bordeaux avec tout pour son grand dessein de se faire roi,
le succès qu'il aurait pu souhaiter, et et la gloire d'avoir délivré la France
qu'enfin il ait pillé et brûlé à Tours devait croître à proportion que ce ri-
l église Saint-iMartin. val y aurait eu une moindre part. 11
(D) Une sanglante bataille sur Eu- y a des écrivains espagnols qui disent
des. ] La perte des chrétiens fut telle, qu'Eudes fut battu entre la Garonne
sinous en croyons Isidore, évêque de et la Dordogne (12). M. de Mézerai
Badaioz (7) que Dieu seul sait le
, a eu de meilleurs mémoires quand il
nombre des Français qui y moururent. a écrit (i3) qu'Eudes n'avait osé at-
Selon Mézerai, le duc Eudes se battit tendre les Sarrasins au de/à des rii^iè-

aussi courageusement qu'il se pouvait ; res , mais s'était retiré en-deçà de la


mais à la fin il succomba a^'ec une Dordogne ; et là , s' étant réconcilié
perle inestimable de ses gens (8). ai'ec lilartel, il assemblait ses troupes,
(E) Un peu au delà de la Dordo- attendant qu'il le i^int joindre avec
gne. ] Je ne comprends point ce que celles des Français. Abdérame ne lui
veut dire M. de Cordemoi, que si Eu- en donna pas te temps ; et, poussant
des eût attendu Charles Martel , com- toujours en avant passa la rivière
,

me devait attendre , les Sarrasins


il le pour l'attaquer dans son camp. Le duc
n'auraient jamais passé la Dordogne l'attendit de pied ferme, et se battit
(9). Ne l'avaient-ils point passée avant aussi courageusement qu'il se pouvait.
que la bataille se donnât (10), et avant Ceci montre que ce n'est pas tant de
que Charles Martel edt pasié la Loire son impatience qu'il se faut plaindre
(ti).'* a quoi pouvait donc servir de que de la patience de Charles Martel,
l'attendre pour empêcher le passage (P) De l'année 782.] N'est-il pas
de la Dordogne ?11 fallait dire que si , bien étrange qu'une victoire comme
Eudes eût attendu Charles Martel il ,
celle-ci n'ait pu échapper aux variétés
eût empêché les Sarrasins de se ré- chronologiques ?Catel la met sous l'an
pandre dans la Saintonge et dans 725, dans la page Sag de ses Mémoires
le Poitou ^
parce qu'en ce cas -là il
(i4); mais, dans la page 53i (l'inter-
n'aurait point perdu la bataille qu'il valle n'est pas bien grand) il la pose ,

perdit, tt qu'ayant toutes ses troupes, sous Van 727. L'année après, dit-il
il aurait pu tenir l'armée ennemie en ^uj j^t l'an sept cens vingt-huit ,

respect à la faveur des postes avanta- Eud) duc d' Âquitanie


,
mourut. ,

geux qu'il aurait choisis. Conservant Calvisius en citant les Annales de


,

la pose sous l'an 726. Le


(6) Ilistor. Sarracen. , lib. II ,
pages m et
Fuide ,

père Petau la pose sous l'an 725 (i5j.


112.
(n) Isidorus Pacensis , CVironic.
Mézerai, Abrégé Chronologique. Tom. I, (12) Dans Calel , Mémoires de l'Hisloire du
(8)
Languedoc, pages 5'iô et Sîg.
page 192.
ordtmoi, Histoire de France, page 404. (i3) Mézerai, Abrégé Chronologique. Tom. 1,
(
(9) pa^e 192.
(10) Eudes ne reçut a paint , quand il sut
(i4) Pour l'Histoire du Languedoc.
/ju' -Ihde'rame m-ail patsè la Dordogne : il le

combaUil. Cordemoi là même- (i5) Petavii Kationar. Temp. pan. I


, , lib.

(11) La même.
,

nu.
ABDERAME. 3i
C'était autrefois la foule des écrivains cl»oisir, je conseillerais, à tout hasard»
qui prenaient ou Tan 726, ou 1 an de se fier plutôt au.x premières qu'aux
•j-jti;mais depuis quelque temps on se dernières.
ranime à Tan 782. C'est là que le père (H) Se retirèrent plus aisément qu'ils
Labbe, Mézerai, Cordemoi, etc. s'en , n m'aient lieu de l'espérer. ] Pour rec-
tiennent avec les Annales de Metz , tifier les idées qu'on se forme populai-
et les plus anciennes chroniques. rement de cette grande victoire, il est
(G) Le nombre de leurs morts ait été bon de considérer ce que les historiens
tel- ] On le fait monter communément le-; plus exacts en ont dit « Les Sarra- :

à 3-0 ou 3-5 mille , et celui des Fran- )) sins eurent beau lancer des traits
çais à quinze cents. C'est la supputa- » les écus des Français , passés les uns
tion d'Anastase le bibliothécaire (16) ; )) sur les autres, les eu garantirent ; et
c'est celle de Paul Diacre, et de plu- » quand les Sarrasins vinrent l'épée à
sieurs autres historiens; maison ne s'y )) la main , tout lein- effort ne pou\ ant ,

tle plus.Mézerai dit nettement qu'il » ébranler un si grand corps et si bien


n'y avait en toute l'armée des Sarra- » uni ne servit qu'à les rompre eux-
,

sins que quatre-vingt ou cent mille )) mêmes. Charles, qui savait prendre
hommes. Il faut bien se souvenir qu'ils )> ses avantages, ne manqua pas en cet
se battirent jusqu'à la uuit , sans lâ- >) l'tat de les faire charger il en fut tué :

cher le pied (17) , et que le lendemain » un prodigieux nombre par les F'ran-
on ne poursuivit pas quand on eut
les » çais ,
qui combattirent toujours fort
su qu'ils avaient marché foute la nuit. )) serrés. Abdérame même demeura
Or il serait presque impossible de faire » sur la place mais la nuit survenant
;

un si prodigieux carnage sur des gens )) mit fin au combat sans que Charles ,

qui tiennent bon; une tuerie de tant » connût tous ses avantages. Il ne
de milliers de soldats ne se fait qu'à » voulut pas qu'où suivît les restes de
la iioursuite des fuyards , lorsqu'on ne "l'armée des Sarrasins, pour éviter
donne nul quartier. Puis donc que )> les embûches qui sont toujours à
ce fut la nuit qui sépara les combat- » craindre quand les ennemis sont en
tans, il faut regarder comme un conte )) grand nombre. II fit même retirer
romanesque ce qu'on lit dans du Hail- » ses soldats eu ordre, et l'épée haute,
lau qu3 le roi Abdérame, et presque
,
» dans leur camp où ils passèrent la ,

tous les principaux des siens , Jurent » nuit; et dès le point du jour il les
trouvés entre les (grands monceaux des » remit en bataille à la vue du camp
morts, seulement esteints de la presse }) des ennemis. On y voyait tant do
qui recula sur eux. S'il y avait eu )> pavillons, que bien (jue le champ
,

alors des nouvellistes heb(Iomadaires, » où l'on avait combattu le jour pré-


on eût couru moins de risque de se » cèdent fût tout couvert de corps de
tromper en jugeant du nombre des » Sarrasins Charles avait sujet do
,

Sarrasins selon les gazettes qui au- )> croire qu'ils avaient encore un grand
raient précédé la bataille , qu'en pre- » nombre de soldats sous leurs ten-
nant pour règle les relations du com- ); tes et pensait qu'ils allaient sortir
,
;

bat. Pendant la marche de ces barba- » mais enfin , après avoir long-temps
res les nouvellistes autorisés, ou mê-
, » attendu, on s'aperçut qu'ils avaient
me gagés du public , auraient repré- )i abandonné leur camp , et des es-
senté leur armé;j comme peu nombreu- » pions vinrent donner avis qu'ils
se, et ils l'auraient afl'aiblie de jour en j> avaient marché toute la nuit vers la
jour par les désertions et par les ma- » Septimanie. .Mais il regarda cette
ladies qu'ils y auraient fait régner. » fuite d'une armée qu il croyait en- ,

Après la victoire , ils se seraient ra- » core plus nombreuse (juc la sienne ,

visés ; ils auraient appris de bonne -»


comme une ruse pour l'attirer dans
main que cette armée était innom- j) quelque embuscade et se contenta ,

brable. On pourrait donc être trompé » de se saisir du camp des Sarrasins,


et par les gazettes antérieures et jiar )) où il trouva tout leur équipage avec
les postérieures ; mais s'il y avait à ))le butin qu'ils avaient fait (18). ;

Voilà ce qui porte à dire que Char-


(16) // la lire de la relation écrite par Eudes les n'usa pas trop bien de ce gra.n-!
au pape Grégoire II. Vojei ci-dessous la re-
Hiarque \K). (18) Cordemoi. Histoire de TVarce. ton. I,
fi7) Voyez la remarque suifnnle. page 4i>5
,

32 ABDÉRAME.
avantage (19). Je veux croire qu'il qu'une suite de ce que ses prédéces-
«tait, comme
tant d'autres ('io) , plus seurs avaient si bien commencé ; il
habile à vaincre qu'à profiter de la voulut continuer leurs conquêtes au
victoire 5 mais qui sait s'il ne trouva delà (aa) des monts, et, afin de don-
pas à propos de laisser retirer tran- ner du relief à ses entreprises il ne ,

quillement les Sarrasins , afin qu'ils voulut point suivre une route déjà
fussent plus capables de ruiner le duc tracée. Il alla prendre le passage des
d'Aquitaine, qu'il regardait comme Pyrénées du côté de la Bi^caie c'était :

un dangereux ennemi ? Quelle peine le moyen de conquérir dès le premier


lui et son fils Pépin n'eurent-ils pas à pas; mais s'il avait pris la route du
,

subjuger cette famille ! Elle fut la Roussillon comme autrefois Annibal,


,

dernière qui fle'chit le genou devant il serait entré d'abord dans une pro-
ces usurpateurs. Au reste le mauvais , vince déjà conquise. Et pour ce qui
succès d'Abde'rame n'empêcha pas ses est de ce grand nombre d'annalistes
successeurs de revenir quelques années qui ont diffamé là-dessus le duc d'A-
après , et de faire bien du mal. quitaine il ne saurait balancer des
,

(I) Que l'on a faussement accusé raisons qui le justifient; car ce sont
d'avoir attiré celte irruption. Jamais '\
des gens dont les derniers ne font
accusation n'a été plus contraire aux presque que copier les premiers et ,

apparences que celle - ci. Première- ceux-ci avaient puisé dans une tradi-
ment Eudes (21) avait marie' sa fille
, tion qui devait son oi'igine aux arti-
avec le gouverneur de Cerdaigne, afin fice^; de la cabale de Charles Martel.

de l'engager à une guerre civile qui Cette cabale pour bien des raisons
,

empêchât les Sarrasins de passer les devait imputer au parti contraire une
monts; son beau-fils avait përi mal- intelligence avec les ennemis de la
heureusement dans cette entreprise ,
religion et de l'état. Voua ne verrez
et sa fille, tombe'e au pouvoir d'Ab- point qu'un Isidore de Badajoz, un Sé-
dèrarae avait été' envoyée au calife
,
bastien de Salamanque, un Roderic de
des Sarrasins. En second lieu on ne ,
Tolède et tels autres historiens espa-
,

voit point qu'Eudes ait fait aucune gnols, dégagés des impressions de cet-
démarche pour faciliter l'entrée de ces te cabale, accusent Eudes d'avoir at-
gens-là il ne leur donna
: point de tiré les Sarrasins. Or voyez ce que,

passage sur ses terres ; ce fut par le c'est que de naître heureux. Je crois
pays du duc des Gascons qu'ils entrè- que Charles Martel n'avait pas attiré
rent dans les Gaules, et qu'ils s'avan- néanmoins les soupçons
ces infidèles;
cèrent jusqu'à Bordeaux. De plus on eu devaient tomber sur lui plutôt que
ne voit point que les Sarrasins aient sur Eudes, puisque c'était Eudes qui
eu aucune sorte de ménagement pour devait être le premier accablé, et que
les terres du duc d'Aquitaine ils le Charles avait lieu de croire que pen-
; ,

traitèrent en ennemi depuis le com- dant que les Sarrasins le délivreraie"ht


mencement jusqu'à la fin, bien loin d'un si redoutable ennemi il se pré- ,

de lui restituer quelque chose de ce parerait à les repousser et que le ,

qu'ils lui avaient ôté dans leurs pré- bonheur de les vaincre lui abrégerait
cédentes expéditions comme il se- beaucoup le chemin du trône. Voilà
,

rait arrivé sans doute s'il avait négo- de grandes prises pour les malins in-
cié avec eux pour l'entreprise d'Ab- terprètes de la conduite des grands et ;

dérame. Enfin quelle nécessité y néanmoins Charles n'a point été soup-
avait-il que quelqu'un sollicitât ce gé- çonné d'intelligence avec Abdérame.
néral à venir en France ? Les Sarra- (K) Contribua extrêmement au gain
sins n'y étaient- ils pas déjà entrés? de celle bataille. ] Il y a quelques his-
N'avaient - ils point déjà pris Nar- toriens qui ne disent pas qu'il com-
bonne, Carcassonne, et ne s'étaient- battit ce jour-là avec Martel; mais
ils point déjà étendus jusqu'au Rhô- d'autres le disent expressément. Voici
ne ? L'expédition d'Abdérame ne fut les paroles de Paul Diacre Deindè :

post deceni annos cum u.mribus et ,

(19) Mézeral , Abrégé Chronologique, tom. I, parvuUs uenientes, (il parle des Sarra-
page 192.
sins) , Aquitaniam Galliœ provinciam
(20) Voye% la remarque (A) de l'article Ci-
SAR.
(21) Voyez son article. (22) C'est par ra)>porl à l'Espagne.
ABDÈRE. 33
quasi hahitaturi Caro-
ini^ressi siint. tant de bonheur, qu'aucun de ceux
qui
lus :.'ufni(h;iit ruin J'iudone, Atjultaniœ eu mangèrent ne fut ni tué ni bles>é.
principe, tiinc dlscordiatn habebat ; qui Pour entendre -.et usage de la tulle,
tamen in unum se conjungenlcs contra souvenez-vous de ces paroles de Mar-
eosdem Sarraccnos, paiicnnsilin dimi- tial :

cdrunl ; nam super


irruentes i'^ranci
'^'""'' '"S'ndis spongia mensi,
eos, trecenla septuaginta quinque mil- "ûdiTl^Gy^
lia Sarracenoruin interenievunt ex ,

Francorum fera parte mille et quin- Les modernes aient osé en débi-
(L)
Jiudn ter tant de choses particulièrt-s.']
genli ceciderunt
tanlii'u ibi , Je me
quoque cuni suis super e')S irruens, pa- servirai de la judicieuse réflexion
de
ri modo niuftos iittcrjîciens omnia de- l'historien qui m'a servi de
principal
uastafil (^3). Kcginon a parlé aussi guide dans cet article. L'on ne
peut
de la reconciliation de Charles et trop remarquer, dit-il(27), celte
journée
d'Eiules il a dit qu'elle fut faite avant et l'on ne peut assez blâmer les
: an-
la bataille et qu'après cela ils atta- ciens annalistes de n'avoir rapporté
,

cjuèrent de concert les Sarrasins. Si- aucune circonstance d'une action si


i^ebort partage de telle sorte la gloire mémorable. A/nis d'un autre coté, ,

«le cotte journée enlre ces deux chefs, quand on aime un peu lauérité, on
qu'il semble ne vouloir donner à Eu- a peine 'a excuser ce que des auteurs
des que l'avantage d'avoir forcci le modernes (u8,) dont le mcrite est grand
,

camp dej Sarrasins, et d'avoir abîmé d'ailleurs ont écrit de cette bataille.
,

les débris de leur arraée ; Eudo quô- Ils en parlent comme s^ils avaient été
f/iie reconciliatus castra Sarraceno- présens à tous les conseils et comme ,

ruin irrupil, et reliquias eoruni con- s'ils avaient vu tous les mouveniens

tri.'il. Rotleric , archevêque de Tolède, des deux armées; ils décrivent, non-
nous fournira une bonne preuve 5 car seulement les armes des Français et
ii dit (2.}) que les plus grandes foi'ces des Sarrasins mais la manière dont
,

de Charles Martel étaient composées Charles et Abdérame rangèrent leurs


d'allemands, de Goths et de Français, troupes, ils 1 apportent de longues ha-
qui étaient restas à Eudes après la ba- rangues remplies de choses qui ne sont
taille que les Sarrasins gagnèrent près ni vraies , ni convenables ; ils disent
de la Dordogne. N'oublions pas la let- de que/le-i ruses se servit Abdérame
tre qu'Eudes écrivit au pape Grégoi- l'adresse dont Charles en évita f effet
re Il , où il lui fit un narré de la ba- et achèvent par lu description des pos-

taille. Marianus Scotus et Othon de tures différentes où. on trouva les corps
Frisingen parlent de cette lettre. Ana- de ceux qui demeurèrent sur le champ
stase le bibliothécaire en parle aussi de bataille sans oublier la plainte des ,

(aSj ; et ce cpi'il y a de bien singulier, mourans et les louanges que les chefs ,

c'est qu'il donne toute la gloire de l'ac- de l'armée de France, c'est a-dire, Char-
tion au duc d'Aquitaine, sans dire quoi les et Eudes, se donnèrent l'un à l'autre.
que ce soit de Charles .Martel jet, pour (26) Martial. Epig. CXLIf, lib. XI V.
{i') Cordemoi
ce qui est du nombre des morts Histoire de France p. 4o6.
,
,
,

(28) // eue en marge Paul Emile el Faucbèt.


370,000 du côté des Sarrasins, et i,5oo
du côté des Français. Il en donne pour
son garant cette lettre d'Eudes d'où , mignon d'Hercule.
,
ABDÈRE
il tire une particularité assez burles- Voyez la remarque (D) de l'ai-—
que c'est que le jour de la bataille , ticle suivant.
:

Eudes fit haciier en petits morceaux ABDÈRE


, ville maritime d»
trois éponges bénites, ([ue le pape lui
avait envoyées de celles qui servaient
,
Thrace , proche l'embouchure du
a l'usage de la table, et en donna à Nestus {a). Il y en a {h) qui veu-
manger à ses soldats, ce qui leur porta lent que la sœur de Diomède l'ait

(23) Hislor. Longob. , lib. VI, cap. XLVI.


bâtie (A) ,et qu'elle lui ait donné
«^u<i Calel, Mémoires du Languedoc , p. 53o. son nom; mais qu'en la 3 1 '. olym-
(24) Roderic, Histor. Arabum, dans Us ^é-
moires de Catel, page 329. {cC, Herodol. lib'. VU. cap. CIX, CXXVl.
,

(23) Mémoires de Cal«l


Dans les <tc l'Histoire (il Solin, chap. X. Voyez aussi Mêla,
du Languedoc, page 53i. lib. //, cap. II.

TOME I.
34 ABDÈRE
piade , ceux de Clazomène dont les cata-
la re- et plusieurs autres
bâtirent , logues des hommes illustres fai-
et lui firent porter le
leur. Si l'on en croit Hérodote saient iBention (/?). Rien n'est plus
,

ils ne firent qu'en jeter les fon- étrange que la maladie qui régna
demens sous la conduite de Ti— pendant quelques mois dans Ab-
,

mésius (c) : on les chassa (B) on dère (H), du temps de Lysimachus


,

rendit nulle leur entreprise; et (i). C'était une fièvre chaude qui
ce sont les Téiens <pii à pro- se dissipait au septième jour par
,

prement parler, bâtirent Abdère, quelque crise; mais elle causait


lorsque se voyant près de tom- un tel trouble dans l'imagination
,

ber entre les mains d'Harpagus, des malades qu'elle les conver- ,

lieutenant de Cyrus , ils aimèrent tissait en comédiens. Ils ne fai-


mieux abandonner leur patrieque saient que réciter des morceaux
de se voir sous la domination des de tragédie et surtout de l'An- ,

barbares. Ils s'embarquèrent donc dromède d'Euripide comme s'ils ,

tous , et allèrent achever ce que eussent été sur le théâtre de sorte :

Timésius n'avait fait que com- qu'on voyait dans toutes les rues
mencer {d). Il en courut un pro- je ne sais combien de ces acteurs
verbe (e) qu'Erasme n'a pas trop pâles et maigres qui faisaient des
bien entendu (C). Je ne parle pas exclamations tragiques. Cela dura
de l'opinion qui attribue à Hercu- jusqu'à l'hiver suivant qui fut ,

le la fondation de cette ville (D) fort froid , et par-là plus propre à


:

il vaut mieux se souvenir de quel- faire cesser cette rêverie. M. Mo-


ques singularités qu'on a débitées réri rapporte très-mal ce fait (I).
touchant Abdère. Les pâturages M- Béger (k) , qui a publié ses
des environs avaient une telle conjectures sur une médaille des
force, qu'ils donnaient la rage Abdérites (K) , qu'il croyait avoir
aux chevaux {f). Il y eut une si été frappée pour être un monu-
grande multitude de grenouilles ment de cette fâcheuse maladie,
et de rats dans cette ville (g) au a changé de sentiment lorsqu'il
,

temps de Cassander roi de Ma- a vu la belle dissertation qui lui


,

cédoine, que les habitans furent a été écrite sur ce sujet (/) où ,

contraints de se retirer ailleurs l'on trouve bien des choses concer-


(E) inais il faut croire qu'ils y re- nant la ville d'Abdère. J'en rap-
;

tournèrent bientôt (F) ou que porte quelques-unes dans la der-


,

d'autres allèrent occuper leur pla- nière remarque. Il se faisait à cer-


ce. Les Abdéritesont été fort dé- tains jours , dans cette ville, une
criés du côté de l'esprit et du juge- espèce de cérémonie qu'on pour-
ment (G) et néanmoins il est sor-
;

tibeaucoup de grands hommes de (h) Tlhûç-oi iS"' 'Ad'tipÎTa.i Ctto tÔiv ttiv*-
iioyf.a.<^aiv stva.'jpot.^'OVTsti. Pluriini aiitem
leur ville un Protagoras un Dé-
: ,
Jbderitœ de quibus doclorum vi-
exslite're ,

mocrite un Anaxarque l'histo-


, , rorum indices commémorant. Slephauus By-
rien Hécatée le poète Nicsenétus,
zant. , vcrbo' A^S^Dpa..
{i) Lucian. Quomodô Hisfor. sit conscri-
(c) Voyez son article. Lenda , initia.

(c/)Herodut., lih. /, cap. CLXrilI. (À) Laurent ius Begerus. Son livre a été im-
(e~i Strabo, lih XIV. paf>. 443. primé à Berlin, in-^., l'an 1691.
r/)Pliniiis, lib. XXV, cap. mi. (/) Par M. Ézéchiel Spanheiin Elle est im- .

\g) Justin, lib. XV, cap. II. pritnée avec de M. Bëger.


le traité
ABDERE. 35
rait appeler en quelque manière Diomède. Il fallait dire que, selon So-
auto du fé: car c'était sans doute ^"\ ' .'" ^'^"'; "^^ Dioméde ra%ait b^ltie
- --
un acte de religion.
~
On -
dévouait
- donné son nom, d'où .M. de
et lui avait
Saumaise a eu grand droit de conclure
une personne et puis on l'assom- , que cette sœur s'appelait Abd.ra (i).
mait à coups de pierres. Je crois 11 y a dans Goltzius une médaille où

l'on voit une tête de femme avec


qu'il n'y a qu'Ovide qui en par- ,

cette inscription ABAHPA2 KOPA2


le il miet cela entre les malédic-
;
Nos plus savans médaillistes la
(2).
tions qu'il souhaite à son enne- rapportent à la sœur de Diomédê"
fondatrioe dAbdère (3).
Aut te dei>oveal certis Abdera diebus
(B) On les chassa. ] Hérodote le dit
,

Saxaffuc devotitm grandine pliira pe- expressément ùrro QpxiKcÙv èfêxa^iiç à


lant {ni). Thracibus expiilsus (4j. Nous verrons
dans la remarc[ue suivante une mé- ,

Les commentateurs sont muets prise de Pinedo sur ce sujet. Toutes


les apparences veulent que les impri-
sur ce passage. Il faut qu'on ne
meurs soient la seule cause de cette
trouve pas l'origine ni les circon- autre méprise Thracibus ejectis <[ai
, ,

stances de cette cérémonie. Je di- se voit dans la docte lettre de !\I. de


rai ailleurs (n) qu'il y avait dans Spanheimà M. Béger. Ils ont mis ejec-
Abdère un temple de Jason que '",p' ^^f"
^^T'"* '/r
^'^
Erasme n'a pas
Parménion fit détruire.
LnVntenduS
^^^„ bien
trop entendu.^ Voici le proverbe :
(m) Ovid. iu Ibim , vers. 494- "A^i'ifa. Kst>.î) T/tiMV stToixi'ît. j Abdère
(n) Dans l'article Jason. la belle colonie des Teiens. .Cela veut
dire , selon Erasme Si i^ous me cha- :

(A) La sœttr de Diomède fait bdlie.'] grinez trop ,je sais bien où je me reti-
Il n'y a point d'horanie qui puisse rerai. Hoc œnigmate proi^erbiali signi-
ajouter foi à M. Moréri sans être per- ficamus, non déesse quo conj'ugiamus.
suadé qu'Abdère, bitie parles Téien.s, si quis prœler niodum pergat esse mo'
a porté le nom de Diomède , qui en lestus [5). Le Portugais Pinedo con- ,

était roi , et que c'est Hérodote qui traint d'abandonner sa patrie , alin
nous l'apprend. Or , ce n'est qu'un tas de se garantir des avanies de l'inqui-
de mensonges car, en premier lieu , sition adopte ce proverbe en ce sens-
: ,

ce qui regarde Diomède est un fait du là j mais il ajoute qu'il n'en prend pas
temps poétique mais l'abandon de toujours bien de faire ces sortes de re-
;

Téos par ses habitans , et leur retraite traites, et qu'il en parle par expé-
dans la Thrace, où ils bâtirent Ab- rience. Çao(proverbio) signijicabaliir
dère, est un fait du temps historique 7ion deesse quo conj'ugiamus , si nobis
et qui se rapporte à la Sg". olyrapia contumelice inferantur , ntjecére Teii :
de. C'est donc une étrange bévue que sed hoc non semper féliciter snlet ei^e
de joindre ces deux choses de telle nire et dodus et expertus loquor(6). :

manière qu'on met le temps de la S'il n'avait pas eu plus de rai?on de se


,

fable après celui de la vérité. Si vous plaindre que de dire , comme il fait
voulez suivre Hérodote touchant la dans la même page que les Téiens ,

construction d'Abdère par les Téiens, avaient chassé le Clazoménien Timé-


ne nous allez plus parler de Diomède, sius qui commençait à bâtir Abdère, ,

qui, en cas qu'il ait jamais été, était SCS plaintes seraient les plus mal fon-
mort depuis plusieurs siècles ; ou , si dées du monde. Mais revenons à Eras-
TOUS voulez parler de cet ancien roi me. «Ce que j'ai à lui critiquer n'est
de Thrace avertissez-nous que vous
,
(i) Salmasii Exercital. Plinianae, page 160.
rapportez une opinion différente de
(îj Abderce virginis nufa,; doricè pro
celle qui concerne les Téiens. En se-
; ,

xôciiç.
cond lieu Hérodote, quand il parle
,

^3) Spanbemii Epist. adLaarent Begerum.


de la construction de cette ville ne ,

(4) Herodot. Ub. I cap. CLXVIII.


fait pas plus de mention de Diomède
, ,

(5) Erasmm , Adag. , chiliade II, cent. If^,


que du grand-turc. Enfiu il n'est pas nain. 53.
vrai qu'Abdère ait porté le nom de (6) Pipedo in Sleplian. de Urbib. , p 5.
36 ABD ÈRE.
pas tant l'explication du proverbe (jiie coni'enire proferhium uhi quis Jorlu-
ce qu'il ajoute que peut-être Cice'ron nam tenuem
,
sed cujn liberlatc con- ,

a fait allusion à cela dans ses epîtres à junctant, anteponil amplis opihus, sed
Atticus. 11 en cite deux endroits (7), ohnnxiis serwituli. C'i'jus ienteiiliœ
dans lesquels il est visible que Ciceron non rejragor; nani damnai us est Ab-
ne parle d'Abdèrc que pour la repré- derilarutn aër et item pnscua. Voyez ,

senter comme un lieu où les afl'aires se Isaac Vossius sur Pomponius Méia (8).
traitaient sottement et sans rime ni
, (D) Qui attribue à Hercule la fon-
raison. Mais si Erasme qui s'est servi dation de cette iHlle.'] M. de Saiiinai-
,

d'un peut-être ne laisse pas de méri- se fg) n'a prouvé (|ue par le témoi-
, ,

ter quelque censure, que dirons-nous gnage de Tzelzès (pie la fondation ,

de ce ton afiîrmatif de More'ri Cice- d'Abdère ait été attribuée à Hercule


, :

rnnfait sans doute eiUusion ? Oii^ea il pouvait en donner un meilleur ga-


dirons-nous, lorsque nous saurons à rant car nous apprenons d'Apollo- ;

quoi l'on rapporte ci.tte allusion ? Ce dore (10) qu'Hercule, ayant enlevé les
n'est pas au fait qu'Érasme a conjec- cavales de Diomède fut averti que les ,

turé; la faute serait plus légère c'est Bistons avaient pris les armes que
; ;

à un certain éclat qxiil est siir que là-dessus il donna ces caiales à gar-
ceux de Clazomène chassés de L'Aiie, der à un jeune homme qu'il aimait
, ,

donnèrent à la ville d'Abdère qui la nommé Abdère et marcha contre les


, ,

rendit si célèbre et qui donna l'occa- Bistons; qu'il en tua une partie; qu'il
,

sion à ce prouerhe des Grecs Aiîdère mit les autres en fuite qu'il tua aussi
,
;

LA BELLE. Je le répète encore, il est vi- Diomède mais qu'à son retour il ;

sible que Ciceron ne parle d'Abdère trouva que les cavales avaient mis
que pour en tourner en ridicule le Abdère en pièces qu'il bâtit une ville ;

gouvernement. C'est donc une grande auprès du tombeau de ce jeune hom-


faute que d'avoir dit qu'il jail sans me, et qu'il livra ces cavales à Eu-
doute allusion à l'éclat à la gloire et rysthée. Etienne de Byzance dit seu-
,

à la beauté de cette ville. Mais de lement que la ville d'Abdère fut ainsi
,

plus il n'est pas vrai que les Clazo- nommée à cause d'Abdère, mîgnon
,

méniens soient la cause de ce préten- d'Hercule (11) il ne dit point si ce ;

du grand éclat qui fit naître le pro- fut Hercule qui la bâtit ou si ce fut ,

verbe. J'avoue que, Selon Solin, ils le jeune mignon. Ce dernier .senti-
rebâtirent Abdère que le temps avait ment est rapporté par Marcien d'Hé-
fait tomber en ruine, et qu'ils la fi- raclée (12). Le septième livre de Stia-
rent plus grande qu'elle n'était mais bon si on l'avait tout entier, décide-
; ,

voilà tout ce que nous lisons d'eux rait peut-être la chose


;
les extraits :

et si l'on consulte Hérodote, on trou- que l'on en a marquent seulement que


vera que les Thraces ne leur donnè- le nom de la ville d'Abdère est celui
rent pas même le temps de la bâtir. d'un bomrae qui fut mangé par les
Après tout n'est-il pas certain que chevaux de Diomède.
, Remarquez
Strabon rapporte expressément le pro- qu'Hygin semble dire fort clairement
verbe aux Téiens, qui, pour n'être pas qu'Abdère était un des domestiques
exposés à l'insolence des Perses, se ré- de Diomède et qu'il fut tué par Her- ,

fugièrent à Abdère ? Le nom des Téiens


(8) Page i35.
n'est- il pas contenu dans le prover-
(9) Salmasii Exercitat. Plinian., page i6"o.
be ? Outre cela, que Moréri nous
(10; Apollodori Biblioth., lib. II.
dise un peu 011 il a trouvé que, quand
les Clazoméniens vinrent bâtir cette
(ii)'AtO 'AotTHflTO!/ TOI/ t/IO!/ 'Kpiy.o!*
èpa!//tivc.w. S.numaise a fort bien
ville dans la Thrace, on les avait chas- 'Hf.ciiiKÎiUç
lieud'ASSnpÎTau il faut lire'Aa^n-
sés de l'Asie. Hérodote ni Solin n'en dit qu'au
qui est le nom qu' 4pollodore (il dit
disent pas un seul mot. Enfin je ne vois pou ,

Apollonius) a donné au mignon J^Hercule. Pi-


personne qui n'entende le proverbe nedo el Reilelius disent qu'il faut coiriger
plutôt au désavantage qu'à l'avantage aind; mais il< n'averlissent pa< que Saiimaise
d'Abdère. Érasme même n'a point reje- Va^'aU remarqué a^'ant eux. Le premier^ cite
Apollonius et n'a pas pris garde que c'était
té l'explication de Vadianns quoique
,

une faute d'tmpressian ou de mémoire dans


,
, ,

peu glorieuse à cette ville. Exislimat Saumaisc pour ApoUodore. On pom-ail citer
(7) Epis». Xyi,libr. IV, el Epist. VU, lib. Philoslrate.

VII. (la) Apitd Salmasii Exercit. Pljnian. p. 60.


ABDÈRE. 37
culc ; Dinincdem regeni Thraciœ, , et des grenouilles ne s'emparassent mal-
equfis (jutKuor ejus, qui cnine huriiand gré lui de tout un pays ? M. .Vloréri
,
yescebantur ^ ciini Ahdcr^t Jiimulo in- (jui apparemment n avait
jamais su
terj'nctt (i3}, .M. de Saiimaise dit là- qu'oQ eût demandé raison de cette
dpssas ne faut point chcrclier
({•'il peur a l'iustoi-ien Justin a fait tout ,

runiformite dans les fables il a rai- : ce qn il fallait pour lui épargner


cette
son on trouve le blanc et le noir sur
;
censure; car il déclar.' que Cassander
les naê.nes choses dans les ëcri. ains lecut les Abdéritains dans la
Macé-
du temps fabuleux j mais peut-être doine ai'ec beaucoup de honte.
Ceux
qu'on pourrait dire qu'Hygin a voulu qui s'en lieront à son dictionnaire
ne
signifier qu'Hercule, seconde d'Ab- songeront pas à critiquer cet ancien
dère tua ce cruel roi de Thrace qui
, historien. On ajoute que cette bonté
nourrissait de ciiair humaine ses che- de Cassand.r se déploya Van 3G5o du
Taus. Je ne garantis point ce sens. Vi- mn/i le, s. Ion la chronologie d'Jluscbe.
ge'nère avait remarque l'opposi-
dt-j;' Qui croirait , en lisant cela , qu'Eu-
tion qui se trouve entre Hygin et Phi- sebe n'a p;is dit un seul mot de celte
lostrate (i4 • On pouvait encore dire action de Cassander, et qu'il necompte
que ce d."rnier esf très-ditïërent d'A- point les temps selon les années du
poUodore car il veut (i5; que Dio-
: monde ? Venant au fond, je disque,
luède ait abandonne Ab 1ère à ses ca- selon Justin les Abdériies furent })!a-
,

vales; qu'Hercule . allant délivrer son cés par Cassander sur les frontières du
favori, l'ait trouvé à demi mange; pays avant qu'il tuât les fils d'Alexan-
et que , pour punii- Dioméde, il l'ait dre or , selon Calvisius {20) il ache-
:
,

fait servir de nourriture à ses cava- va de s'en défaire l'an du mofide 364i;
les (i6;. Pliilostrate ne veut point, ainsi la chronologie de notre homme
roinnie ApoUodore ,
qu'Hercule ait est aussi fausse que la bonté de Cas-
fait b.ltir une ville au|)rès du sépul- sander est contraire au seul historien
cre de son atni. Mais d'ailleurs Apol- qu'il a pu suivre.
lod'ire ne dit point, comme Philostra- (F) Qu'ils y retournèrent bientôt,
te, ((u'Hercule ait ordonné des jeux ou etcl Ce q^ue Lucien rapporte de la
d.s exercices en l'honneur d'Abdère. maladie des Abdérites arriva sous le
Je crois qu'il n'y a qu'un seul auteur règne de Lysimachus et, par consé- ,

(17J qui ait dit que Patrocle fut frère quent est postérieur à l'aventure des
,

de cet Abdère. On prétend pouvoir grenouilles; car, selon Justin (21) ,


prouver par les médailles que les Ab- elle précéda le temps auquel Lysima-
dérites aimaient mieux rapporter le chus et Cassander prirent la qualité'
nom de leur ville à Abdéra sœur de ,
de roi. Ajoutez à cela qu'au temps du
Diomède qu'au mignon d'Hercule
,
dernier roi de Macédoine, la ville
(.8). d'Abdère était assez florissante. Le
(E) De se retirer ailleurs. ] Justin préteur Lucius Hortensius la pilla
;

dit que Cassander ayant peur qu'ils ,


mais sa conduite fut désapprouvée par
n'envahissent la Macédoine, entra en le sénat romain et la liberté fut ren-
,

traité avec eux , et les plaça sur les due aux Abdérites (22).
frontières. Ou s'est un peu moqué de (G) Les Abdérites ont été fort dé-
cette peur de Cassander (19) lui qui criés du côté deiespritet dujugernent.^
;

faisait trembler toute la Grèce pou- ,


On a déjà vu comment Cicéron les ac-
vait-il craindre que les habitans d'une commode dans ses lettres à Atticus. Il
seule ville qui fuyaient des rats et n'est pas plus obligeant dans un autre
livre (23) où , après avoir rapporté
(i3) Hygini Fab. XXX. une opinion qu'il ci-oit ridicule il ,

(i4 Vigéoère, Annotât, sur le Sépulcre d'Ab- ajoute, <7ua? quideni ontnia siint pa-
dère, dePbilostrate.
trid Democnti quant Democrito di-
(i5) Pliilostr. iu Iconib.
gniora. Juvénal, ne pouvant nier que
(16) Vigénère dil Jaussement que Tatien ,

fians Ton Disconrs contre les Gentjb, ditqu Her- Démocrite n'eiU beaucoup d'esprit et
cule trouva Abdère a demi mange.
(i-) Ptolem. Hepbxât. o/7ud Photium ,
page (20) Moréri suit ordinairemenl la chronologie
484.' de Catvisius.
(18) Spanhemii Epistola at Laur. Beger. (21) Jnstin. , lib. cap. II.XK
(19) Vorez Gl.ireanu* , dam le Jusliu Vacio- (221 Livlus, lib. XLIII, c. 4 ext.
rum de M. Grarviiis ,
page 333. (23) Cicejro de Natur. Deor.,/t6. /, e. 4*-

-•-
(^ rs >^f' *-»
38 ABDÈHE.
(le sagesse, pre'tend que
une preu-
c'est diens dans les rues. Une folie comme
ve que les grands hommes peuvent celle-là
, dit-il ne tombe point sur
,

naître sovis un air grossier et dans le des gens grossiers et flegmatiques :


pays des sots : Tamelegam insania non cadU in crus-
Cujus prudenlia monutral SOS et pituitosos, nediiin in l'éft^ecea ca-
SummO! passe viros cl magna exempta
, pita. Cet auteur aurait dû se souvenir
dtUuros
Vervecuin in palrid , crassoijue sub aère de la maxime d'Aristote qu'une hi-
,

nasci (24)' ronuelle ne fait pas le printemps. Pour-


quoi tourne-t-il en coutume et en ha-
Martial n'a guère juge plus avanta- bitude une suite de fièvre qui n'arriva
geusement des Abderites, quand il a qu'une fois ? Ce qu'il cite de Lucien
dit: est un fait unique qui ne foude point
Si paliens , forlisque tibi , durusque videiur, de tels proverbes. Je dirai en passant
Abderilanœ pectora plebis habes (25). qu'Erasme n'a pas bien pris la pensée
de Cicéron (3i) j car on doit inférer
Vigcnère s'abuse grossièrement sur ce
des paroles de ce Romain non pas ,
passage ; il le croit adressé au crimi-
queleshabifans d'Abdère fussent stu-
nel qui repre'senta sur le théâtre l'ac-
pides mais que, par un grand égare-
,
tion de JMutius Sce'vola en mettant la
ment d'imagination, ils donnaient
main dans le feu (36) ^ mais il s'adresse
dans des paradoxes incroyables et in-
à ceux qui seraient si dupes , qu'ils
soutenables. Abderilanis naturd pecu-
prendraient cela pour un acte de con-
liarem fuisse mentis stuporem indicat
stance, vu que ce criminel ne l'avait
fait que pour s'exempter d'être brûlé
M. Tull. inlibrisdelYaturdDeorum,
c'est ce que dit Érasme (82). De fort
vif.
habiles gens (33) citent cela comme
JVam dicalur lunicâ prœsenie molesta
c'iiin le propre texte de Cicéron , tant il est
Vre manum, plus est dicere, noiijacio (2^).
vrai que les recueils de nous autres
Isaac Vossius, qui était quelquefois as- gens de lettres tiennent du naturel de
sez singulier dans ses pense'es , a fait la renommée ; ils acquièrent de nou-
pour les Abdérites une apologie d'un veaux traits en changeant de place
tour nouveau. Il avoue que plusieurs (34). Ceux qui prétendent que le,
d'entre eux naissaient ou devenaient terme (ÏASjiipoKÔyrjç , qui se trouve
fousj mais il prétend que ce n'était proverbialement dans le discours de
pas une marque de stupidité, vu que Tatien contre les Grecs , signifie un
la folie ne s'attaque pas à des lour- conteur de sornettes , un donneur de
dauds et à des stupides qui n'ont rien billevesées, ne confirment point l'ac-
à perdre, et qu'elle s'empare très-sou- cusation de stupidité que l'on inten-
vent des plus grands esprits (aSj. Et tait aux Abdérites un niais, un sot, :

quant à ce quHippocrate a fait men- un butor , n'en donnent pas à garder


tion de plusieurs Abdéritains dont la aux gens. Outre que Tatien applique
fièvre avait été accompagnée de dé- son mot aux doctrines de Démocrite ,
lire (29) , M. Vossius prétend que ce qui sans doute n'étaient pas les rêve-
n'est point de là qu'est né le proverbe ries d'un gros animal.
qui décriait celte ville; mais plutôt de (H; La maladie qui régna pendant
la passion agréable qui succédait à quelques mois dans Abdère.'\ Lucien,
leur fièvre. Ilx affecta jucunclissimo , qui en a décrit les symptômes , a pré-
ijui ipsoruni Jebribus succedtre sole- tendu en trouver la cause dans ce que
bat , ut lestatur Lucinnus scripto de je m'en vais dire. Archélaiis, bon co-
Conscribendâ Historid (3o) ils deve- médien, avait joué FAndromède d'Eu-
,

naient passionnés pour les vers et pour ripide devant les Abdéritains, au mi-
la musique, et ils faisaient les comé- lieu d'un été fort chaud; plusieurs sor-

(24) Juvenal. SatJr. X, vers. 49- (3i) Celle qui est au I". livre de Naturâ Deo-
rura.
(25) Martial. Epigr. XXV, lib. X.
(261 Visénère , Annot. sur le Sépulcre d'Ab-
(32) Adagior. chil. IV, centur. VI num. 27. ,

dère de PViiloslrate.
,
(33) Cicero, de Naturd Deorum, Abilerilanos
sliipori mentis obnoxios scribtt, I.aur. Begcru.s
(27) Maniai. Epigr. XXV, lib. X. OIj.-cvv. in ^'umism. quaed. pni:. iC. Vorei aussi
,

(28) Isaac. Vossius in Pompon. Mclam. p. i35. Lloyd et Hoffmann, au mot Abdera.
(29) Mipporr. lib. III., àv Morb. vulgar. {i^).Wobililate viget viresque acquiriteundo.
,

(3oJ Is. Vossius , in Poicp. Melam, p. i35. Virgil.,.«:n. ,W. IV, vers 175.
ABDÈRE. 39
talent du théâtre avec la fièvre , et ,
roics aicxerunt poelœ frequens cntm
) ;

comme ils avaient l'imagination tout consessus ihtntri in <juo sunl mulier- ,

imprimée de la tragédie, les rêveries culœ et pueii , moveliir audtens tant


que la fièvre leur causa ne faisaient grande cariuen :

que leur représeuter Andromède, Per- Adsum nique advenio Acheninle vix via alla
sée Méduse et ce qui s'ensuit et ré-
, , atque ardua ,

Teillaient de telle sorte les idées de Pe-r .'peluncas taxis struclas asperit pen-
,
denlibus
ces objets et du plaisir de la représen- Maximii, ubi rigida
,

constat cras sa caligo


tation ,
qu'ils pouvaient s'empt—
ne mfenitn (38).
cher de réciter d'actionner à l'imi-
et
tation d'Archélaiis. Je pense que les (I; M. Moréri rapporte très-mal ce

premiers qui donnèrent cette comédie fait (Sg).] Jl n'est pas vrai que les
dans les rues , après que leur fièvre Abdérites mourussent sur les théâtres
continue fut passée, gâtèrent plu- ni que la maladie qu'ils curent alors
sieurs autres convalescens. Les dispo- ait donné lieu au pio verbe, ai(/e/âica
sitions étaient favorables alors aux mens. On mettrait bien en peine les
progrès de cette contagion. L'e<prit gens si on les obligeait de prouver ,

est sujet ans maladies épidémiques qu il y a eu autrefois un tel proverbe :

tout comme le corps ; il n'y a qu à com- il ne sudirait pas de soutenir que les
mencer sous de favorables auspices Abdérites passaient communément
et lorsque la matière est bien prépa- pour des sots il faudrait montrer :

rée. Qu'il s'élève alors un hérésiarque qu'on se servait des propres termes ,
ou un fanatique dont 1 imagination abderilica mens , pour signifier cette
contagieuse et les passions véhémentes opinion générale ; or il est sftr qu'E-
sachent bien se faire valoir, ils infa- rasms n'a cité personne qui ait em-
tueront en peu de temps tout un pays, ployé ces termes. Mais laissons cet in-
ou, pour le moins, un grand nombre cident ; abandonnons même comme
de personnes. En d'autres lieux ou en fausse la réfiexion que voici c'est :

d'autres temps ils ne sauraient ga-


,
qu'une chose aussi passagère que le
gner trois disciples. Voyez - moi ces fut cette maladie des Abdérites, de
de Milet qui furent pendant quel-
tilles laquelle Lucien est le seul qui ait
que temps si dégoûtées du monde ,
parlé et encore ne l'a-t-il fait que
,

qu'on ne put les guérir de la fantaisie pour en former l'exorde d'une disser-
de se tuer qu'en menaçant d'exposer tation c'est, dis-je, qu'un fait com-
;

nues aux yeux du public celles qui me celui-là ne semble pas pouvoir
se tueraient (35). Le remède seul té- donner lieu à un proverbe qui difJame
moigne que leur passion n'était c[u'une éternellement tout un peuple car si ;

maladie d'esprit où le raisonnement


,
l'on me dit par exemple cpie le sera
,
,

n'avait nulle part. On vit à Lyon quel- sapiunt Phryges pouvait n'avoir été
que chose de semblable, vers la fin du fondé que sur une seule faute des
quinzième siècle (36). La diflérence Phrygiens je donnerai d'abord une
,

qu'il y a entre ces maladies et la peste bonne différence ,


puis qu'il est cer-
ou la petite vérole c'est que celles-
,
tain que, dès que la chose eut été tour-
ci sont incomparablement plus fré- née en proverbe, on ne l'appliquait
quentes. Je croirais volontiers que le pas aux Phrygiens plus qu'à une au-
ravage que le comédien Archélaiis et tre nation, au lieu que les reproches
]e soleil tirent dans l'esprit des Abdé- t[u'on faisait aux Abdérites les regar-
rites (3-) est moins une marque de daient littéralement et coutinuelle-
stupidité que de vivacité; mais c'était raent, et de la manière que ceux qu'on
toujours une marque de faiblesse ; et faitaux Normands et aux Gascons re-
je m'en rapporte à ceux qui ont obser- gardent ceux à qui on les fait (4<^)'
vé quelles gens étaient les plus ébran- Mais, encore un coup, ti'aitons cela de
lés de la représentation d'une pièce fausse chicane et contentons-nous de ,

de théâtre. Quos (^iermres ou er- (38) Cicero , Tuscul, lib. 1. cap , XVI.
(3f)) // a commis bien d'autres fautes. Voyei
(35) PluUrcli. de Fortibas fact. malierqm. les remarques (A), (C) et (E).
(36) Brodœiis, Miscell., lib. V., cap. XXriI. (4o) // est sur que les proverbes qui attaquent
{'i"]) La maxime ordinaire des plidosophes , la Normandie et la Gascogne sonlfoniles sur
^ol et homo générant homtnGm, était, ici véfita- der défauts permanens et d'habitude qui pas- ^

ble d'une façon fpe'ciale. sent de génération en génération.


, ,

4o ABDÈRE.
ce coup à bont-porfant. Le proverbe d'Hercule , on Tisaraénes le Clazomé-
de M. More'ri, ahdtritica mens, ne nien ré\ cré comme un héros par les
,

scr\ait qu'à imputer aux Abilerites Téiens domiciliés à Abdère (43). Isaac
beaucoup de bêtise; or, la maladie Vossius entend par l'inscription de
dont paile Lucien n"etait point bêti- cette médaille , Jupiter frumentarius ;
se , ce nVtait qu'une iinat^ination dé- comme si C,iùç Kxi^ç était la même
réglée et une sorte de folie qui atta-
, chose que Çsi/ç êTrixapcriof (44) et il -,

que plutôt les gens de beaucoup d'es- fonde son explication sur ce que la
prit qu'un sot et un bébéte' donc M. : ville d'Abdère était environnée d'un
Moréria eu tort de dire que son i)ro- bon terroir propre partout ou aux
,

verbe eut pour fondement la fureur moissons ou aux pâturages d'où vient ,

que Lucien a rapportée. Si je nomme que les Tiiballes, dans leur extrême
Lucien ce n'est pas que je ne sache
, disette , se jettent là, selon Diodore
que M. Morëri n'a cité ~que Cœlius de Sicile , comme sur la plus fertile
Pdiodiginus, comme on le lui a déjà campagne que l'on pût trouver (45).
reproché (4 1)- ^'fst Charles Etienne M. de Spanheira ne lui nie pokrt cela,
qui lui a fourni cei'e citation. Lui et et il rapporte un autre passage de Dio-
une infiuité d'autres gens ont rempli dore de Sicile où Abdère est comptée
et remplissent tous les jours les espé- pour l'une des plus puissantes villes
rances que cet auteur italien conçut qui fussent alors dans la Thrace (46) .

en se résolvant de ne point citer. 11 11 en rapporte aussi un d'ime lettre


espéra qu'on le citerait lui-même , ce attribuée à Hippocrate, où l'on se con-
que l'on n'aurait point fait s'il avait tente dédire qu'Abdère n'est pas une
mis à la marge de son livre le nom ville obscure, /J.ia. vùXioiv oÔk as-n^/oç:
des auciens qu'il copiait. mais il pas de réfuter Vos-
ne laisse
(K) Sur une médaille des Abdérites.'] sius sur le sens de la médaille. Je ne
D'un côté , elle représente un grifibn , finirai point sans remarquer qu'on
et de l'autre une tête d'homme sans aurait grand tort do prendre pour
barbe, couronnée de laurier, avec une preuve de peu d'o~prit ce qui se
ces mots: Eni AI02 AAIOT. M. Bé- passa entre ceux d'Abdère et Hippo-
ger conjecturait que cette médaille , crate au sujet de Démocrite (47)- Le
consacrée à Apollon sous le titre de grand intérêt qu'ils prirent à la santé
Jupiter malfaisant sub Joi'e sinistro, de ce fameux philosophe , leur conci-
la même chose qu'à Rome, sub f^e- toyen , fait honneur à leur jugement.
joi'e avait été destinée à signifier les
. 11 est vrai ({u'ilippocrate ne confirma
trop chaudes influences du soleil qui point l'opinion qu'ils avaient conçue
étaient cause des imperfections pour touchant Démocrite ils le croyaient :

lesquelles on difiamait les Abdérites , fou , et il parut plus sage qu'eux à


et qui cependant les rendaient de Hippocrate. Cela n'y fait rien ; je suis
bons disciples d'Apollon. j\l. de Span- sûr que dans toutes les villes de la
heim entend par cette inscription le Grèce on aurait jugé de Démocrite
préteur ou le gouverneur d'Abdère comme ses compatriotes en jugèrent.
(42) , que, le griffon ayant
et il dit On en ferait aujourd'hui autant d'un
été symbole de Téos comme il
le , philosophe qui se moquerait de tout
paraît par plusieurs médailles , il ne qui dirait que l'air est rempli d'ima-
se faut pas étonner que les habitans ges , qui étudierait le chant des oi-
d'Abdère, colonie des Téiens aient , seaux qui s'enfermerait dans les sé-
,

marqué le même symbole dans leurs pulcres, etc. . et il n'y aurait que les
monumens publics. C'est ainsi que les esprits du premier ortire et qui volent
colonies en usaient à l'égard de leur au-dessus des préjugés qui fussent ca-
ville mère l'exemple de Syracuse et
: pables de juger sainement de lui or, :

de Corfou, qui avaient pour armes un ces gens-là sont très-rares en tout
Pégase , à l'imitation de Corintbe, en
(43) C^est ainsi que M. de Spanlieim nomme
est une preuve. Pour ce qui est de
celui d^Héroàoie, appelé TiiAh<rttç.
la tête couronnée de laurier, elle re-
(44) Is. Vossius in Pomp. Meiam ,
pag. i3S.
présente ou Abdérus le mignon ,
XV, p. 354.
(45, Diod. Sicul., lib.

Dans l'édition de Hollande de son dic~ (4G) Idem, lib. XIII ,png. 194.
(41)
tioniiaire, (4:) Vorei les lettres écrites
de part et d'au-
(4^) Epidius, Lait filius. treàce suiet parmi celles d'Hippocrate.
, ,

ABDIAS. 4»
temps et en tous lieux. Ils sont aussi autres vies de saints. Elle a été
rares et peut-vtre plus que les fjens
depuis imprimée plusieurs fois
de bien qui au dire de Juvénal, tira-
.

ient à peine le nombre des embouclui-


en divers lieux (A). M. Fabrice
res du Mil (48). remarque que ceux qui ont dit
qu'elle a été insérée dans la Bi-
(48) Pari quippè boni numerus vix est loli- ;

dein quoi , bliothèque des Pères se trompent


Thebarwn purits vel divitis oslia J\tU. y

Juvénal, sat, XIII, v. 2b". {d). Laurent de La Barre l'inséra


dans son Histoire des Pères à Pa- ,
ABDIAS de Babylone auteur ris en 583 (e). Ce n'est point ,
I
,
qui mérite d'être placé panni les
le pape Gélase , comme ]NL jNTo—
plus hardis légendaires. C'est un
réril'avance mais lepape Paul IV ,

imposteur qui se vante d'avoir


qui a rejeté comvie opocrj phe
vu JSotre-Seigneur Jésus-Christ l'ouvrage de notre Abdiasfy^. Plu-
d'avoir été l'un des soixante-dou-
sieurs écrivains, tant parmi les
ze disciples , d'avoir assisté aux
catholiques que panni les protes-
actions et à la mort de plusieurs
tans , ont reconnu l'imposture.
apôtres , d'avoir suivi eu Perse
Ceux-ci prétendent avoir dessillé
saint Simon et saint Jude et d'a- ,
on ne
les veux aux autres (B) ;

voir été établi par eux le premier La


leur accorde point cela (C).
évèque de Babylone. L'ouvrage gloire serait au fond très-peti-
qui court sous son nom est divisé
te car ce fourbe a usé de si peu ;

en dix livres, et a pour titre d'adresse , qu'il a cité l'Hégésippe,


:

Historia cerlaminis apostolici. *


qui a fleuri cent trente ans ou en-
Wolfgang Lazius {ù) en trouva le
viron après l'ascension de Notre-
manuscrit dans une caverne de
Seigueur [g). Il a parlé aussi d'un
Carinthie; et quoiqu'il fût habile
disciple des apôtres nomiué Cra-
homme il se laissa tellement thon qui^zf, dit-il ii/ie histoire
,
,
,
tromper par cet écrivain fabu-
en dix livres de tout ce que saint
leux qu'il se prépara à le donner
,
Simon et saint Jude avaient fait
au public comme une pièce im-
et souffert dans la Perse pendant
portante. Il ajouta foi à l'inscrip-
treize ans ; laquelle histoire ,
tion de ce manuscrit, qui portait
poursuit-il Africain l'historio- ,
qu'Abdias évèque de Babylone
graphe a mise en latin (h). Ou
, ,

établi par les apôtres mêmes, avait


trouverait-on cet Africain , qu'en
composé en hébreu cette histoire la personne de Julius Africanus
de leurs actions, et qu'Eutropius mort environ l'an 23o (i) ?
l'avait traduite en grec {b) , et
(c) chez Oporin in-fol.
Africanus en latin. 11 la publia à ,

d Jo. Alb. Faliricius in Codice Apocry-


Bâle (c) , l'an 55i avec quelques pho Novi Test. pag. 4oi.
1 ,
,

{é) Et non pas en i58i, comme {'eut Mo-


* Cliauffepié , au mot Abdias ,
promet des
réri.
rem ar /lies sur l'auteur Je celte histoire, t/ui
eccles., tomel , p. 3.
n'est ni d'Abdias ou Adee ni de Cra-
dit-il , ,
(f) LaLbe de Script,
,
{£) Voyez Vossius deHi:,t. Graicis, p. 200.
thon mais
etc.
; il n'en nomme pas l'auteur,
,
{h) Abdiœ Hist.certam. Apost. /. Vf, p. 63.
qu'il croit ai-oirt>écu dans le septième siècle,
(«') Cave Hisior. litter. p. 72.
, ,
et peut-être plus tard.
(fl"' Médecin à l'ienne en Autriche et fiis- ,

fiographe de l'empereur Ferdinand I. Voyez (A) Imprimée plusieurs J'ois en <h-


l'épitre dédicatoirc de son édition. fcrs lieur.'\ M. du Pin, qui a marque-
(b) La préface de Juliiis Africanus dit les éditions de i5j7, de lôGo el iIp
qu'Eutropius était disciple (/'ALdias. 1571 , et , outre cela , une édition de
, ,

42 ABD ISSI.
Lille de i532 (i) une de Paris de, et Baronius, Possefinus Salmero Mi' , ,

i583 a oublie la première qui élait


, rœus , aliique ut sileam f^ossium.
,

la plus digne d'être marquée. Comme Cocuin Rii'ctuni similesque hetero-


, ,

je n'ai point sa Bibliothèque ecclé- doxos criticos in alienis ab ecclesiâ


,

siastique de l'édition de Paris je n'o- ,


catholicâ castris militantes atque ex ,

serais mettre sur son pré- compte la catholicoruni duntaxat scriptis et ob-
tendue édition de Bâle de i532. Or, seri^ationibus sujj'arcinatos. Mentitur
à cause qu'il ne marque qu'une édi- enini pro more Andréas Rii^etus ,
qui
tion de Paris, qui est celle de i583, libri I cap. f^I , cffutire ausus est,
,

ses lecteurs ont lieu de croire que les oculatiores pontificios ex suorum hoc ,

autres , qu'il a marquées ne sont est, hœreticoruni hominum animudi^er-


point de Paris cependant il est cer-
: sionibus edoctos nuiras et mendacia,

tain que cet ouvrage y fut publié l'an illius operis deprehendisse, ita ut eos
i56o , in-8°. , avec la préface d'un tant pulidi comiitenli pudeat. Sed,
docteur de Sorbonne nommé Jean aniabo , quis Cali^ini catulus hoc corn-
Faber. L'abréviateur de Gesner et M. inentum subodoratus est ante Uesse-
Cave en marquent une de Paris, en lium Molanum Sixtum ipsumque
, , ,

i5^i in-8°. Dans V Eponymologiuni


, adeo Paulum If^, ronianum pontiji-
de Magirus, on avance faussement que cem ,
qui inter scripla a se damnata
cet ouvrage fut imprimé la première rejicit? Je crois que condamna en-
l'on
fois à Paris, en i55i. core ce livre à Rome depuis la mort
(B) Ai'oir dessillé les yeux aux au- de Paul IV car je ne pense pas que
:

tres.'] Consultez Rivet, au chapitre VI Claude d'Espense veuille parler de la


du i". livre de son Criticus Sacer condamnation faite sous ce pape lors- ,

où après avoir observé la prévention


, qu'il dit: Qualiscumque autor sit .Ab-
de Lazius et l'autorité qu'Hardingus
, dias superiore certè quant hœc scribe-
,

et Bellarmin ont donnée à notre Ab- remus anno , a romanis inquisitoribus


dias, il ajoute: cjus nugas eLmendacia proscriplus est. Ces paroles sunt dans
non est qubd operosiùs persequamur ,
le chapitre V du livre V de la Con-
quia jant oculatinribus ponlijiciis ita tinence. Le continuateur de Magirus a
patent, ex nostrorum asimadversioni- tort d'en conclure (4) que Tannée
BUS , ut eos tant putidi coinmenti pu- dont il s'agit là est )568. Cet ouvrage
deat (2). Il cite Baronius , Molanus , delà Continence ne fut-il pas imprimé
Possevin , et même Bellarmin devenu en i565 (5) ? Pierre-Paul Verger, au-
plus sage il les cite , dis-je comme des
; , teur protestant , mort en i565 avait ,

auteurs qui convenaient de la bâtardise crié contre l'imposture de cet Abdias


de cette histoire des apôtres. dans son Idoluni Lauretanum , com-
(C) On ne leur accorde point cela."] posé en italien, traduit en latin et
Le père Labbe s'emporte d'une étrange imprimé en i554, in-4°'
manière contre Rivet à cause du pas- ,
(4) F.ponymol. Critic. pag. i. ,

sage que l'on vient de voir. 11 peut (5; Vyez Launoii Hist. CoUeg. Navarr.,pa5-.
avoir raison de soutenir que les catho- 710.
liques ont reconnu l'imposture, avant
que les protestans leur fournissent là- ABDISSI (A) patriarche de ,

dessus aucune lumière mais on ne : Muzal dans l'Assyrie au delà


, ,

saurait l'excuser de son aigreur inju- de l'Euphrate, vint à Rome l'an


rieuse ; car voici comme il parle (3)
1662 et, ayant rendu ses hom-
:

Hasce quisquilias ab otioso Jabulalo- ;

re , qui mérita jure pseudo-Abdias di- mages à Pie IV, reçut de lui le
citur, confictas interpolatasi-'e , nullius palLiiim. Comme le concile de
Jidei atque auctoritalis esse apud eru- Trente était alors assemblé, le
ditos docuerunt janipridem calholici
cardinal de Mula protecteur des
tructaloriis , Sixtus Senensis Jnannes ,
,

Hesselius , Joannes Molanus., Cardin,


chrétiens orientaux, ne manqua
pas d'écrire sur ce sujet à cette
(i) C'est ainsi rju'il y a dans l'e'dilion d^ Am-
sterdam , loin./, pag. 18. assemblée. Ses lettres furent lues
(2) Riveti Operumlom. II, pcig. 1076. dans la vingt-deuxième session.
(3,1 Pliil. L.ibbc, Uissert. Je Script. Eccles.
lom. I pttg, 3.
,
Elles apprenaient que les peuples
,
ABDISSI. 43
sujets à ce patriarche avaient été Fra Paolo conte le fait {b) nous :

instruits à la loi par les apôtres examinerons ceci ea un autre


saint Thomas et saint Thadée et lieu (c). ,

par un de leurs disciples noramé {b) Hist. du Concile de Trente, liv. VI.
Marc que leur créance était tout-
; (c) Dans l'article Hebed Jesu.

à-fait semblable à la romaine ;

(A) ABDISSI. ] Onufre Panvini le


qu'ils avaient les mêmes sacre- nomme Abdysu ce qui dit-il si- , , ,

mens et les mêmes cérémonies gnifie seruus Jesu (i). Surins et M. de


;

qu'ils en gardaient des livres Spoade lui donnent le même nom ;


écrits dès le temps des apôtres M. de Thon le nomme Abisius, et ;

que ce patriarchat s'étend jusque ajoute qu'il était fils de Jean de domo ,

de la ville de Gezire sur le


jyiarciâ ,

dans le cœur des Indes , et com- Tigre (2). J'avoue que je n'entends
prend beaucoup de peuples, les pas assez ce que c'est que ce donius
uns sujets du Turc, les autres du Marciâ pour me contenter de la tra-
duction française que j'en pourrais
sophi de Perse, les autres du roi
faire. Je n'acquiesce donc pas à cette
de Portugal. L'ambassadeur de ce maison de Marc qu'il a plu à M. ?.Io-
dernier protesta tout aussitôt que réri d'employer. Aubert Le Mire nom-
lesévêques orientaux qui étaient me Abdiesu le patriarche en ques-
de
sujets du roi son maître , ne re- tion et dit qu'il était religieuxqu'il ,

Tordre de saint Pacùme (3) 5


connaissaient aucun patriarche. avait succédé au patriarche Simon Su-
On lut ensuite la confession de lacha (4), moine du même ordre qui ,

foi d'Abdissi, datée du 7 de mars était venu se soumettre au pape Ju-


les III; qu'il était d'une érudition ad-
i562 (fl), oii il promettait d'a-
mirable; qu'il entendait beaucoup de
voir et d'enseigner à ses inférieurs langues et qu'il savait extrêmement
,

une parfaite et perpétuelle con- bien les saintes lettres. Les mémoires
formité desentimeiîs avec l'église de M. de Thou portaient que cet hora-
romaine. Enfin on lut les PC Ipt-
let
™e entendait le chaldéen l'ara arabe et ,

le syriaque et qu'il répondait perti


,

très qu'il écrivait au concile pour nemment aux questions très-difliciles


s'excuser de ce qu'il n'y allait qu'on lui faisait. Panvini Surius et ,

pas (B) , et pour supplier les pè- ÎM. de Sponde assurent la même chose
avec plus de circonstances. Dans la
res de lui envoyer leurs décrets,
profession de foi qu'ils rapportent il ,

qu'il promettait de faire obser- dit qu'il avait été moine de St. -Antoine
ver ponctuellement. Toutes ces dans le monastère des saints Rochas
choses avaient été déjà lues dans et Jean, frères. Il avait fait faire beau-
coup de progrès à la foi romaine si
une congrégation sans exciter ,
nous en croj'ons Aubert Le Mire; mais
,

autrement les réflexions de per- ses successeurs laissèrent fout dépérir;


sonne mais la protestation de de sorte que Léonard Abel évêque de
; ,

l'ambassadeur de Portugal fit Sidon nonce apostolique en ces pays- ,

l'année i583 trouva que le pa-


prendre garde aux absurdités de là en , ,

triarche Donha Simon qui était le


ce récit. On commençait à mur- second depuis Abdiesu , s'était retiré
,

murer; évêques portugais al-


les vers les confins de la Perse. Les allai-
laient prendre la parole, quand res du pape n'étaient pas en meilleur

le promoteur, au noiu des légats, (i) Panvin. in Vhâ Pi'i IV.


détourna le coup. Voilà comment (2) Thuan. Hi5lor., lib. XXXIT.
(3) Anbertus Miraîus, Politia; Eccles. lib. II,
cap. V, pag. II- .

[a] Elh' est dans Onufre, in Yitâ Pii IV; M. de


(4) M. de Thou le nomme SalaVa .

dons Surius , Commentar. ,


pa^^. ^5:^ et Spoude , Sulaca. Votez la remarque (A) de l'ar-
dans Sponde , Goatin. Auual. , ad ann. i562. ticle Hebed-Jesu.
.

44 ABEL.
état lorsque Pierre Strozza, secrétaire prend {a). Mais , si l'on voulait
de Paul V publia à Rome et à Colo-
, s'étendi-e sur tout ce que la curio-
gne, en 1617 sa dispute de Chaldœo-
,
humain a enfanté
sité de l'esprit
runi doi^mntibus (5).
(E) Pour s'excuser de ce qu'il ny là-dessus on aurait une infinité
,

allait pas ] Cela montre que M. RIo- de choses à dire. Nous n'avons
rérl s'est fort trompe lorsqu'il a dit garde de nous embarquer dans
qu^^bdissi se troui^a au concile de
une telle déduction , ni de hasar-
Trente et qu'il y présenta su proj'es-
,

iion de foi en lu session


, II. Au- XX der des conjectures sur l'âge qu'a-
bert Le Mire a commis la même faute, vait Abel lorsqu'il fut tué. Il est
qui et Tridentino concilia inteijnit impossible d'avoir queltjue certi-
dit il (6), en parlant de son y^ùditsu.
tude sur cette matière tant par- ,
Ce qu'il y a de plus surprenant est
que Moréri a cite MM. de Thou et de ce que l'on ne sait pas combien a
Sponde dont le premier ne dit pas un
,
duré l'état d'innocence (A) qu'à
mot de ce prétendu voyage du pa- cause que l'on ne sait pas de com-
triarche au concile et le dernier dit ,
bien Abel était plus jeune que
expressément, qu'on lut les lettres où
Abdysu faisait ses excuses de ce qu'il Gain (B), ni en quelle année du
n'allait pas à Trente. Je remarquerai monde il fut tué par son frère
par occasion une faute qui s'est assu- (G). Je ne hasarderai point non
rément glissée dans M. de Thou; il
plus mes conjectures sur la ques-
dit (7) que ce patriarche était venu
ad upostulorum limina pnntijicem sa- tion s'il mourut vierge (D) , ou
iutaturus , ut ab eo cr.njirmatus par- sur la querelle que Gain lui fit.
tent de corpnre sancti Pétri acciperel. Les uns veulent que leur diffé-
Qui ne s'imaginerait là-dessus qu'il
rent ait été une dispute de reli-
était venu pour demander le bras , ou
gion (E) les autres qu'ils se
quelque autre morceau du corps de ;

saint Pierre ? car c'est faire sa cour à soient brouillés pour une femme
Pionie que de déclarer qu'on y est venu (F). On ne parle pas moins diver-
pour en remporier de tels présens. Mais
sement de la manière dont se
_jo suis persuadé qu'au lieu de parlem
il faut lire pallium, comme il y a dans
fit cet abominable fratricide (G).

31. de Sponde qui à cela près, se


, , Quant à la manière dont ils con-
.sert des mêmes expressions cjue M. de nurent la préférence que Dieu
Thou. C'est ce qu'on peut voir dans
donna à l'oblation d'Abel il n'y ,
sa Continuation des Annales de Baro-
nius , à l'année i562. a pas tant cle disputes. On croit

II, assez communément qu'il tomba


(5) Aubertus Mirœus, Politise Eccles. lih.
cap. f^, ptg. 219. un feu céleste sur la victime d'A-
(6) I lient, ibidem, pag. 21".
(7) Thuaiii HIst. ,
que rien de semblable
lib. XXXII, pag. 640, bel (H), et
col. 2. Edil. Franco f., anni
ne parutsur les offrandes deGaïn.
i(i25.

ABEL , second fils d'Adam el Mais comme on n'a que trop de ,

d'Eve, fut berger. Il offrit à penchant à entasser suppositions


Dieu des premiers-nés de sa ber- sur suppositions afin de faire ,

gerie, dans le même temps que trouver du merveilleux en toutes


son frère Gain offrit des fruits de choses , il s'est trouvé des gens
la terre. Dieu eut pour agréable qui ont dit (b) qu'il parut une fi-
l'oblation d'Abel mais non pas ,
gure de lion au milieu des flam-
celle de Gain; ce qui chagrina de mes qui tombèrent sur le sacri-
dernier qu'/7 s'cle-
telle sorte ce ,
ia) Genèse , chap. If,
[b] Apud Salianum, iom. I, pag. 190, et
va contre Vautre el le tua. C'est ,
apiid Inselium Ruinai", illustr. , décade I ,

tout ce que Moïse nous en ap- pag. 221 , 273


, ,

ABEL 45
fice d'Abel , ce qui , selon eux et pour remplir la terre? La plus so-
lide raison qu'on puisse alléguer pour-
avait relation au îioa de la tribu
quoi cette consomma lion ne se lit qu'a-
, dont la venue avait
de Juda dé- près la chute, c'est que la femme fut
jà été promise. J'ai rassemblé tentée et séduite aussitôt presque que
dans les remarques un assez grand formée. Voilà comment saint Augus-
tin satisfait à cette dilliculté : A/ox
nombre de ditlérens seatnnens
creaid muliere, antequarn coni'e/iirent.
sur les choses qui concernent Abel. J'ai ta est illa transgressin fS). L'autre
C'est avoir rassemblé bien des raison qu'il allègue savoirqu'il lallait
,

mensonges et bien des fautes. attendre l'ordre de Dieu (4) , est tout-
;";-fait nulle car, comme je l'ai déjà
Or comme c'est le but et l'es-
,
:

dit, cet ordre avait été nofitié authea-


.
T , Il •

pnt de ce dictionnaire, le lecteur tiquement. Si l'on pouvait une fois


ne doit point donner son juge- prouver que l'innocence du premier
ment sur ce ramas sans se souve- homme dura plusieurs jours ou ren- ,

drait presque indubitable l'opinion de


nir de ce but. Et cela soit dit une
ceux qui disent que, sans le fruit dé-
fois pour toutes. fendu, Adam et Eve auraient éternel-
lement gardé leur virginité, et que ce
{A) Combien a duré l'état iVinno- ne fut que sur la prévision de leur
cence.'] Les auteurs sont fort partagés chute que Dieu produisit la diversité
sur ce point. Quelques-uns veulent des sexes. Quoi qu'il en soit, nous ne
qu'Adam ait péché le jour même de sa saurions dire certainement à quel âge
création, et qu'il n'ait demeuré dans ils commencèrent d'engendrer. Nous
le Paradis que six, ou sept, ou dis réfuterons ailleurs ;5) les rêveries de
heures (i). D'autres allongent le ter- ceux qui ont dit ejue Caïn ne fut conçu
me jusqu'à sis, à huit, ou à dix jours; quelong-temps après le péché d'Adam,
d autres, jusqu'à trente - quatre ans. soit que son père se lïlt voulu sevrer
Ils -^e fondent presque tous sur des rap- des plaisirs du mariage plusieurs an-
ports qu ils imaginent entre Adam et nées par pénitence, soit qu'il se fût
Jésus-Christ car, par exemple, ceux
:
attaché à une autre femme qu à Eve.
qui disent ou qu'Adam demeura qua- {B) De conibien Abel était plus jeu-
rante jours dans le Paradis terrestre, ne que Càin.'\ La narration de Moïse
ou qu'il y demeura trente-quatre ans, semble prouver clairement que Caïn
en donnent pour raison ou que Jésus- Abel n'étaient point frères jumeaux:
et
Christ fut quarante jours sans manger,
néanmoins l'un des plus judicieux
ou qu'il vécut sur la terre trente-qua- interprètes * de lEcriture a cru avec
tre ans yi). 11 serait superflu d'avertir
quelques rabbins qu'ils l'étaient. Rab-
les gens d'esprit que cette sorte de rai-
bini, et ex eis Culi'inus putant ex ,
son ne prouve rien. On peut faire cndem conceptu iLi'atn pepertsse
se-
d'assez bonnes objections à ceux qui
mellos Caïn et Abel (6j. Quand on
ne font durer que quelques heures l'é- lui accorderait cela toute l'incerti-
,
tat d'innocence mais on en peut faire
;
tude ne serait pas évanouie, vu qu'on
de beaucoup plus fortes à ceux qui le ne sait pas avec précision l'année
de
font durer des semaines ou des années.
la naissance de Caïn. Mais, encore un
Car, n'en déplaise à quelques rabbins,
coup, il n'y a nulle apparence qu'A-
c'est un fait certain par le texte de
belait été son frère jumeau; et il n'y
Moïse qu'Adam ne connut sa femme
a nulle certitude qu'il soit né un an
qu'après la sortie du Paradis. Or
pourquoi aurait-il tant difléré la con- (î) Augast., lib. IX, de Genesi ad lit., cap. IV.
sommation de son mariage? N'avait- (^) fotest eliatn dtci quia nonduin Deus jus^
il pas reçu la bénédiction nuptiale de serai ut convertirent cur enirn non ad hanc :

rem divina expectaretur auctoriias ubi nidlti ,


la bouche de son créateur? N'avail-il concupifcentid tanqucim stimulis inobedientia ,

pas ses ordres diiment expédiés et si- carnts urgebal ? Id. Ib.
gnifiés }^QMrJoisonnei\ pour multiplier (5) Pans la remarque (B) de l'article (i'EvE.
* Joly reproche à Bayle de donner ces epithè'
(i) Pererias, in Genesim, lib. VI, Quœsl. I. tesà Calvin.
(2) Coruel. à Lapide in Gènes., cap. III, (6) Coruel. à Lapide, ia Geaesiia, cap. IV,
V. ï'i.
, ,

46 ABEL.
après Gain. Reconnaissons pointant bable que ce meurtre fut commis la
qu'il est très-probable q^ue Gain naquit même anne'e que Seth vint au monde
l'an premier du monde, et qu'Abel c'est-à-dire, îa i3o«. d'Adam on le :

naquit Tannée d'après. La révélation trouve, dis-je , probable, quand on


de Méthodius est une pièce apocry- songe qu'Eve donnant le nom de
,

phe et une cbimère. On a dit (7) qu il Seth à un fils dont elle était accou-
lui fut révélé d'en-haut pentlant sa , chée se sert de cette raison cnr Dieu
, ,

prison pour la foi, qu'Adam et Eve ni' a donné une autre lignée au lieu d' A-
sortirent vierges du Paradis j qu'ils bel que Cdin a lue (10). Mais il faut
demeurèrent en cet état quinze années tomber d'accord que cela est beau-
consécutives , entièrement occupés à coup plus propre à prouver que Seth
pleurer leur chute ; qu'au bout de ce fut le premier fils qu'Eve mit au mon-
terme ils engendrèrent un lils et une de depuis la mort d'Al)el qu'à prou-
filletout à la fois savoir Gain et Gal- , ver que cette mort ait été bientôt sui-
mana^ qu'ensuite ils se remirent dans vie de la naissance de Seth. Saint Au-
la continence pendant quinze autres gustin ne veut pas même accorder à
années, après quoi ils engendrèrent Seth le droit d'aînesse sur tous les en-
un fils une fille comme la première
et , fans qu'Adam et Eve ont engendrés
fois , savoir Abel et Delbora et qu'en 3 depuis le meurtre d'Abel. Il explique
l'an i3o d'Adam arriva le meurtre les paroles d'Eve non pas d'un rem-
,

d'Abel par Gain ce qui jeta Adam et , placement de fils, mais d'un rempla-
Ève dans un deuil qui dura cent ans, cernent de vertu c'est-à-dire
, que ,

après quoi ils engendrèrent Seth. Les Seth fut considéré comme celui qui
habitans de l'île de Geylan prétendent succéderait à la piété et à la sainteté
3ue le lac salé qui est sur la montagne d'Abel. Potuit Adam dii'iniliis admo-
e Golombo est l'amas des larmes nitus dicere postea quant Seth naius
quJEi'c répandit cent ans entiers sur est, suscitavit enim milii Deus semea
la mort d'Abel (8). Les rabbins veu aliud pro Abel (11); quando talis erat
lent qu'Adam ait pleuré celte même J'uturus qui impleret ejus sanctitatem
mort cent ans durant dans la vallée (12). Il est sûr que tout ceci n'est que
des Larmes auprès d'Hébron sans au- , matière à conjectures , et que , si les
cun commerce charnel avec sa fem- paroles d'Eve, rapportées ci-dessus
me (9), ce qui aurait peut-être duré laissaient à nos réflexions toute leur
plus long-temps, si un ange ne l'eût liberté naturelle, nous ferions remon-
averti de la part de Dieu qu'il eût à ter bien haut le meurtre d'Abel j car
s'approcher d'Eve puisque le Messie , VOICI a quoi la lumière naturelle nous
ne voulait pas descendre de Gain. Pu- conduit. Gain et Abel firent leurs of-
res chimères le monde n'avait pas
; frandes à Dieu dès que la récolte de
alors besoin d'un tel deuil il deman- : l'un et la bergerie de l'autre leur en
dait au contraire, qu'on se consolât
, fournirent les moyens; ils s'aperçurent
bientôt par la réparation de la brèche; dès la première fois (i 3) que Dieu met-
de sorte qu'il est très-probable qu'A- tait de la difiérence entre leurs pré-
dam et Eve adoucirent promptement sens ; le dépit de Gain le précipita peu
leur ennui par la consolation récipro- après dans le dessein de tuer son frère.
que de se donner un nouveau fils à la 11 le tua donc avant l'âge de soixante

place de celui que Gain leur avait tué. ans, car ce fut l'an 5o du monde, à
Gependant on ne saurait croire com- ce que dit Eusèbe , qu'Adam assigna à
bien cette fable de la longue sépara- ses deux fils le genre de vie qu'ils au-
tion d'Adam et d'Eve quant au lit, a ,
raient à suivre. Ge n'était pas s'en
été prônée. Nous en parlerons dans aviser tard, dit on, puisqu'en ce teraps-
l'article de Lamech.
{C) Jin quelle année du monde il (10) Gènes. , chap. IV, v. i5.
(11) Saint Augustin aUribue a Adam ce qui
fut tué par son frère.'] Un trouve pro- ne fui dil, selon l'Écriture, que par Eve.
(-) Auctor. Historiie Scbolast. in Hist. Libri (12) August. de Civil. Dei lib.XV, cap. XV.
,

Gene.s. cap. XXJ^, apiid Pererium, in Gènes.,


, (i3} L'Écriture ne parle que d^tne oblaUon
cap. IV, V. I. de ces deux frères ; ainsi la supposition du
(8) Voyez Clievreau, Histoire du monde, P. Salian, loine I, page i85, que Cain ne re-
tome jV,pag. 255, édilion de Hollande , en connut quà la longue el après plusieurs ojfron-
1687. des re'ite're'es sa rejeclion et la faveur de son
(9) j4pud SaliaD , tom. 1, pa^. 190. frère auprès de Dieu , est nulle.
ABEL. 47
là Tenfance durait à proportion au- ceux qui croient qu'Abel a vécu cent
taut que la vie. A la bonne heure je ,
vingt-neuf ans qu il soit mort j:;arçon.
ue contesterai rien là-dessus; que Gain II était alors trop nécessaire de peu-

et Abel n'aient donc pas été en état pler le monde pour se piquer de con-
avant l'âge de cinquante ans l'un de ,
tinence. Le père Salian ne fait pas dif-
labourer la terre, Tautre de garder ficulté de reconnaître que le cé.ibat
des brebis au moins en auront-ils été
,
d'Abel n'est nullement vraisemblable;
capables à cet âge-là. Or, cela posé, ni de montrer que saint Jérôme et
qu'y a-tilde plus naturel que de croire saint Augustin n ont point doute de
qu'ils firent leurs oblations au bout son mariage (19), et que saint Irénée
de deux ou trois ans, pour le plus n'a point dit ce que Gérébrard lui a
tard; et que, dans un semblable in- fait dire (20) savoir qu'Abel a été
; ,

tervalle pour le plus tard, l'envieux vierge, prêtre et martyr trois qua- :

et le jaloux Gain se défît d'Abel ? Qu'y lités qui ont été cause que l'on a dit
a-t-ii de plus éloigné de l'apparence que l'Église avait commencé en lui.
que dédire, comme l'on fait ordinai- C'est un autre auteur qui lui attribue
rement que les deux frères commen-
,
ces trois belles qualités (21). .Mais s'il
cèrent l'exercice de leur vacation l'an fallait que la tradition d'Eutyrhius ,
5o du monde qu ils firent leurs of-
;
qui sera rapportée ci-dessous iùt vé- .

frandes l'an 100 et que Gain tua Abel


,
ritable, il ne faudrait plus révoquer
l'an i3o ? La raison ni l'Ecriture ne en doute la virginité d'Abel; car sa
nous conduisent point à supposer un mort, selon cette tradition, précéda
ressentiment caché si long-temps dans le mariage des deux frères.
le cœur de Gain (i4j- Un auteur fort (E) yéit été une dispute de religion.']
judicieux (i5) a mis la naissance de Le Targum de Jérusalem débite que ,
Seth environ cent ans avant la mort lorsqueCainet Abelfurentauxc.bamps,
d'Abel. Quelques auteurs (16) ont mis celui-là soutint qu'il n'y avait ni juge-
cette mort à l'an du monde iu-2 mais : ment, ni juge, ni vie éternelle , ni
la foule est pour l'an i3o t|ue l'on ,
récompense pour les justes, ni peine
croit être le même que le 129 d'Abel. pour les impies et que le monde n'a-
;

Je pourrais citer , pour ce sentiment, vait pas été créé par la miséricorde de
Cajétan Torniel , Pérérius Gome- , , Dieu , ni n'était point gouverné par sa
lius à Lapide , Salian et plusieurs au- ,
miséricorde : , attendu
dit - il à son
tres commentateurs dont les ouvra- ,
frère ,
que mon
nbtation n'n pas été
fies peuvent être comparés aux enfans acceptée , et que la vôtre l'a été. Abel
d'une même famille lui répondit selon les mêmes paroles
;

Faciès non ontnibut.una,


dont Gain s'était servi, si ce n'est qu'il
Nec diversa tainen , cjualein decel esse so- mit le ouioù l'autre avait mis le non :
ruruin (17J. et quant au principal grief, sa ré-
ponse fut de dire que , parce que ses
Tous les partis, tous les corps, toutes œuvres avaient été meilleures que
les communautés ont ainsi plusieurs celles de Gain , son oblation avait plu,
auteurs qui se moulent les uns sur les et non pas celle de Gain. La dispute
autres.
s'étant échauflëe , Gain se jeta sur
(D) S'il mourut vierge. '\
Quelques Abel et le tua (22). Ce fut un mau-
pères de l'Eglise ont soutenu raflii-ma- vais commencement des disputes de
tive ( 18), et les hérétiques, dont je
religion et un fâcheux présage de.s
,

parlerai ci-dessous, qui prenaient leur désordres épouvantables qu'elles de-


nom d'Abel , la soutenaient aussi ce- :
vaient causer dans le monde. Voilà
pendant il ne paraît guère probable à de plus un exemple de la sotte vanité
(«4) Voyfz. ce qui sera rapporte ci-dessous,
remarque F) du Targum de Jérusalem, et des (ici) Salianns , Annalium tom. I,pag. iS4-
Annales d'EulTchius. (20) Ctronol., lib. I.
(i5) r.nnœuide Kep. Febr., lib. /, cap. III. (21) AacIormirab.SacntScript. apud Angnst.,
(i6j Saint Romuaid Abrégé chronol. , tom. III, lib. I cap. III, citante Saliano,
,

(17) Ovidius, Melam., Ub. II, >. 1 3. Annalium tom. I, pag. i84-
(i8) Saint Jérôme, saint Basile, saint Am- {12) Paraphr. Hierosolym. apud Vapntn, ci'
broise (ia;ij Cornel. à Lapide, in Gènes., cap.
, Inn(^ Saliano, loin. I, pag. 188. J'',jeî sur ce
ly, V. 2-, mais le P. Salian, Annalium tom. sujet divers jeux de rhétorique de Jean Bîsse-
I pag. 184 montre que saint Jérôme n'a pas
, . lius je'sui'-a allemand, llbislr. Kninarum Z*e-
,

i-te de ce sentiment. cad. I, pag. a2S et seq.


,

48 ABEL.
tîe rhommc : iln'est jamais tant porte un poè'te latin , touchant l'anllquilé
à douter de la Providence que lors- des guerres suscitées pour des femmes:
que les choses n'arrivent pas selon ses Nam fuit ante Helenam cunnus leierrima belli
souhaits. Quand elles lui sont favo- Causa (26;.
rables , il dissipe ses doutes c'est :

qu'il s'imagine tenir un rang assez re- Les archontiques (37) et les cabalisfes
levé dans l'univers pour ne pouvoir (28) s'accordent avec cette tradition
étreméprisé parun dispensateur équi- d Eutychius. J'ai lu dans le Commen-
table et judicieux desbiens et des maux. taire du pèreMci'senne sur la Genèse, à
JEslis ïo superi, ait Statius, cùm coni'a- la page i/jiS età la i43i, qu'il y a quel-
luisset à periculoso morbo uir eximiœ ques rabbins qui disent qu'Abel eut
probitatis RutUiiu GalUcus. Al con- deux sœurs jumelles et que Caïn sou- ,

tra , ubi quid conligerat contra quant haita de les épouser. Ce fut , disent-
tequuni esse censerent deos aut nul- , ils , la Cause de la dispute. Le désir de

los esse , aut crudeles , aut injustns la polygamie serait donc bien vieux.
esse dicebant Itaque in morte Ti- Au reste
paraît, et par le récit du , il

bulli Ot'idius ,
Targum
par celui de ce patriarche , et
d'Alexandrie que la mort d'Abel sui- ,
Ciim rapiant malafata bonos, ignoscilefasso,
Sollicilor nullos esse pulare deos. vit de près le sacrifice où Dieu se dé-
clara poiu' lui. Cette chronologie est
C'est ainsi que parle l'un des meilleurs raille fois plus probable que la vul-
orateurs du 16*= siècle (23). gaire qui met un espace de trente ,

(F) Se soient brouillés pour une fem- ans entre l'oblation des deux frères
me. ] Eutychius, patriarche d'Alexan- et le fratricide de Caïn.
drie dit , dans ses Annales ( 24 )
, (G) De la manière dont se Jit cet
qu'Eve enfanta, avec Caïn, une fille abominable fratricide. ] Nous venons
nommée Azrun et avec Ahel; une de voir que ce fut avec un coup de
fille nommée Owain et que le temps j pierre selon quelques-uns. D'autres ,

de marier les deux fils étant venu disent que Caïn déchira son frère à
,

Adam destina Owain à Caïn, et Azrun belles dents. Uebrœoruni nonnulli tra-
à Abel ; et maltraita Caïn parce qu'il dunt eum fuisse mnrsibus à Caïn dila-
,

voulait sa soeur jumelle, qui était plus ceratum faq). D'autres qu'il l'assom- ,

belle. Eutychius ajoute que, pendant ma avec une mâchoire d ane les :

que les deux frères allaient présenter peintres se règlent sur cette supposi-
leurs oblationssur une montagne, par tion. D'autres veulent qu'il se soit
ordre d'Adam , qui voulut qu ils tis- servi d'une fourche. Saint Chrysos-
sent cet acte de religion avant que tùrae lui met en main une épée; saint
d'épouser leurs femmes, et que le suc- Iréntie lui donne une faux Prudence 5

cès de leur sacrifice décidât de leur lui donne une manière de serpe :

diflérent, Satan inspira secrètement Fritter probatce sanclilalis œmulus


à Caïn de se défaire d'Abel pour l'a- Germana cwvo coLlo frangit sarculo (3o).
,

mour d'Azrun ce qui empêchant : ,

que sou oflïande ne fftt agréable à Voyez Salian et Bissélius celui-là à : ,

Dieu augsnenta le dépit de Caïn con- la page 189 du i*^"". volume de ses An-
,

tre son frère de sorte qu'ils ne furent nales ; celui-ci à la page 234
;
et à la ,

pas plus tôt descendus de la montagne, 257 du premier tome des Illustrium
qu'il lui donna un coup de pierre sur Ruinarum. En tout cas, dit-on (3i),
la tête, et le tua. La belle Azrun que Abel ne fut ni noyé ni
étranglé ; car ,
,

Caïn épousa après ce coup {1^), et qu'il r Ecriture témoigne qu'il périt ai^ec ef-
emmena avec lui dans son exil, fut fusion de sang. Quelques-uns sup-
donc la cause du crime de Caïn. Il est (26) Horat., satira II J, lit. I, v. 107.
vrai (pi'elle en fut la cause innocente; (27) Hére'liijues dont saint Epiphane pflr/e,
mais c'est toujours vérifier ce qu'a dit hœiesi XL.
28) Hcideggevi Historia Orient., pag. 191.
(23) Muretus, Orat. III, vol. II. Voyez aussi Seldenus de Jure Nat. et Gent.,
,

\-il\) l'utycliii Annales. Je me sers de la tra-


lih'III, cap. Il, qui cite Kabbi Eliezer m
duction de Pocockius. L'imprimeur de i'Hisloria Pirke, cap. XXI.
Patiiarcli. Hcideggeri , lom. I , pag. 192, a mis (29) Pererius, in Genesini, lib. VII, ad
Procopiiis. I'. 8 et(), cap. IV.

(2Î) liiilychius. Vide Hottinger. Historiam (3o)l'rudent. in Hamarlig. prsef. i5.


Orient., pag. 27. l'ii) Pereiius, in Uenesim , cap. IV, i". 8,9.
,

ABÉLARD. 49
posent qu'il se défendit courapeuse- Lfs païens se sont vantés de cette
ment, et qu aDora lout
d'abord
il eut U
qu'il avan-
tout ii'avan- sorte de marques extraordinaires de
tage il jeta Gain par terre et lui fit
: , l'approbation du ciel eu quelques
un bon quartier mais Gain se releva,
, lieux, comme nous le montrerons
et le tua. Le père Mersenne rapporte dans l'article Egsatia. On sait assez
cette vision dans la page i43i de son que le diable est le singe du vrai Dieu,
commentaire sur la Genèse.
(11) Qu'il tomba un feu céleste. ]
ABÉLARD ( Pierre ) , en latin

Saint Jérôme a rapporté cette tradition Abœlardus a été un des plus ,

(Sa), et l'a confirmée par Théodotion, fameux docteurs du douzième siè-


qui l'avait suivie dans sa version de cle. Ilnaquit au village de Palais
rÉcriture. JVi^i illa inlerpretalio vera
csset , qiiam Théodotion posait Et :
(A), a quatre lieues de Nantes en
in/lammafit Dominas super Abel et Bretagne ; et comme il avait l'es-
supersacri/iciumejus ; supra Caïnuero pj-it fort Subtil, il n'y eut rien
et sacrificium ejus non inflnmma^k
^^^^ ^^^ éiuàes a quoi il s'appli-
(33). hlle est communément approu- .
^ i s. . '

vée par les pères de Téglise. Ce qui la


q"at avec autant de succès qu a
rend vraisemblable, est qu'en plusieurs la logique. Il voyagea en divers
occasions un feu descendu du ciel a lieux par la seule envie de s'a-
,

fait connaître que Dieu agréait le sa-


o ç^rir dans cette
science dis- ,
critice. A la consécration d Aaron on . ^ , ^ j ^ , i

eut ce signe de l'approbation de Dieu putant partout, lançant de tou-


(34). Gédéon David Salomonfquel-
, , tes parts ses syllogismes , et cher-
ques-uns y ajoutent Nébémie), ontété chant avec ardeur les occasions
aussi honorés de cette faveur spéciale
^^ ^^ signaler contre une thèse,
dans ((uelqties-uns de leurs sacnuces t •
i- ^ i i

(35). Gornélius à Lapide dit que Gai-


Jamais chevalier errant ne cher-
vin et Luther se sont moqués , comme cha avec plus d'avidité les occa-
d'une fable judaïque, de cette des- sions de rompre une lance en
cente du feu céleste sur la victime d' A-
phonneur des dames. Abélard ter-
bel; Jo) mais.>L Heidegger lui cite un
;

m^a
. •

r» >
-i

passage de Luther qui témoigne visi- courses a Pans ou il «^s ,

h\ement\e conivsiire. Etsi Moses illud trouva un célèbre professeur en


signum, quo Deus ostendit sibi Abel philosophie, nommé Guillaume
mimera grataesse non ostendit ta- ^^^ Champeaux (n). Il fut d'a-
, ,

men uerisimile est fuisse lifneni cœlo . '. \ . , : . ,

demissum, quo oblatio haustn et cnn- bord SOn dlSCiple bien-aime; mais
sumpta in oculis omnium (37). Les cela ne dura pas long-temps, le
théologiens prolestans ont donné en professeur avait trop de peine à
foule dans cette hypothèse ^38) et
répondre aux subtiles objections
,

(luelques-unsd euxl ontconiirmeepar i^ t '


• 1

les paroles d'un psaume (Sg) que Clé- ^e ce disciple pour ne concevoir
ment ALirot a traduites de cette façon pas du chagrin et de la haine
De les oJpTte! et services contre lui. Les factions naqui-
Se veuille souvenir.
Et faire tous les sacrifices rent bientôt les écoliers avancés ;

En cendre devenir.
en âge transportés d'envie con-
,

(33) Hieron. Tradiiion. hebraïc. tre Abélard , secondèrent la pas-,


f33) Hieron. Quaest. bebraic.
(34) Levit., cnp. IX.
siondu maître. Cela ne fit qu'aug-
(35) Consultez le livre des Juges, chap. VI\ menter la présomption de ce jeu-
le 1". livre des Rois , chap. XVIII; le I".
des Chrnniq. , chap. VU;
le 11^. des Chrotiiij. ne homme; il se crut désormais
chap. VII des Machabées chap. I.
le 11'=.
trop habile pour ne s'ériger pas
; ,

(36) Cornel- à Lapide , in Gènes., cap. ,


V
vs. 4, pag. 97. en docteur. Il choisit pour cela
(37J Lulheras, ad Gènes., cap.
IV, vs. 3.
apud Heidegger, Hist. Patriarcb., lom. /, pag. un grand théâtre car il s'en alla ;

184. était ar-


Guillelmus Carapellensis. //
fn'
(38) Voyez Saldeni Olia Theol., pag. 337.
Cèsl le XX. chidiacre dr Pari.''.
(39)

4
5o ABÉLARD.
lever une école à Melun (B) plus en plus aux traits de l'envie,
,

où la cour de France demeurait Le chanoine régulier fit eu sor-


en ce temps -là. Champeaux fit te que, sous prétexte de quelques
tout ce qu'il put pour empêcher actions très-sales on cassât celui ,

l'érection de cette école mais ;


qui avait cédé sa place à Pierre
,

comme il avait des ennemis qui Abélard et qu'on lui donnât ,

avaient un grand pouvoir son pour successeur un ennemi de


,

opposition fut la principale eau- ce dernier. Alors Abélard sortit


se qui fit réussir le dessein de son de Paris et s'en alla à Melun
rival (i). La réputation de ce nou- pour y enseigner la dialectique
veau maître de dialectique fit de comme la première fois. Il n'y de-
merveilleux progrès, et éclipsa meura pas long-temps car, dès ;

celle de Champeaux. Ces succès qu'il eut su que Champeaux s'é-


enflèrent de telle sorte Abélard tait retiré dans un village avec
,

qu'il transporta son école à Cor- toute sa communauté , il se vint


beil afin de serrer de près son poster sur le mont Sainte-Gene-
,

ennemi par de fréquentes dispu- viève et y dressa son école com- ,

tes ;mais l'application avec la- me ime espèce de batterie (D) ,


quelle il étudiait lui causa une contre celui qui enseignait à Pa-
maladie qui le contraignit d'aï- ris. Champeaux, voyant sa créa-
ler prendre l'air natal. Il de- ture ainsi assiégée dans son éco-
meura quelques années en Breta- le , ramena les chanoines régu-
gne, et puis il retourna à Paris liers à leur couvent; mais, au lieu
,

cil il trouva que Champeaux, qui de dégager son ami il fut cause ,

avait résigné sa chaire à un au- que ses écoliers l'abandonnèrent,


treet embrassé la religion des cha- abandon qui fut suivi quelque
noines réguliers, ne laissait pas temps après de l'entrée de ce
d'enseigner chez eux. Il disputa pauvre philosophe dans un cou-
contre lui avec tant de force ton- vent. Alors le débat ne fut qu'en-
chant la nature des universaux , tre Abélard et Champeaux ce :

qu'il l'obligea de renoncer à son furent eux seuls qui disputèrent


sentiment, qui était dans le fond le terrain et ce ne fut pas le ,

un spinosisme non développé (C). plus vieux qui eut l'avantage.


Celafittellementméprisercemoi- Pendant que ce choc subsistait
ne, et tellement estimer son an- encore, Abélard fut obligé d'aller
tagoniste, qu'on n'allait plus aux voir sa mère qui à l'exemple , ,

leçons de dialectique de Cham- de son mari voulait entrer en ,

peaux, et que le professeur mê- religion. Etant retourné à Paris,


me que Champeaux avait sub- il trouva que sou émule était de-
stitué à sa place, voulut devenir venu évèque de Châlons. Ainsi ,
l'écolier de Pierre Abélard. Celui- pouvant renoncer à son école
ci ne fut pas plus tôt installé sur sans qu'on pût le soupçonner d'a-
cette chaire qu'il se vit exposé de voir quitté le champ de bataille,
n^r, / ,A, , 77
{b) Qiwntam de potenlibus terne nonnjiltos
ibidem hahebat anmios ,fretus eonim anxi- logie et
.ou
il ne songea qu'à étudier en théo-

,
^
,
.,

pOUr Cet efiet il SC ,

//o, t'Oti mei compos ex/iti, et phirimorum


transporta à LaOU (E) , oll l'écO-
mihi assensiim ipsius inviaia manijesta con- J^
/• • •
i i
/yii'.wViz. ALstlaidiEfist. ï,pa^. 5. latre Anselme taisait des leçons
ABÉLARD. 5i
en cette science avec beaucoup de te , si elle ne faisait pas son de-
réputation. Il ne fut pas fort con- voir. Ce prétendu ])récepteur ré-
tent de la capacité de cet homme pondit fort mal ù l'attente de
(F), et, au lieu d'assister à ses Fulbert: il parla bientôt d'amour
leçons , il s'avisa d'en faire à ses à son écolière et il s'amusait ,

condisciples. Il leur expliqua les beaucoup plus à la tâtonner et à


prophéties d'Ezéchiel d'une ma- la baiser (H) qu'à lui expliquer
nière qui leur fut si agréable , un auteur. Ils s'abandonnèrent
qu il y eut bientôt foule dans ce d'autant plus à ces sortes de plai-
nouvel auditoire. Lajalousie d'An- sirs qu'ils n'en avaient point
,

selmenelepermitpaslong-temps: goûté auparavant. Il ne faisait


il défendit à ce nouveau maître plus que par manière d'acquit ses
de continuer ses leçons. Abélard fonctions publiques , et n'inven-
s'en retourna à Paris y expli([ua tait plus rien que des vers d'amour
,

publiquement Ezéchiel , et s'ac- (I). Les écoliers ne tardèrent pas


quit bientôt en théologie la mè- à sentir que ses leçons étaient
me réputation qu'en philosophie fort déchues et ils en devinèrent
;
,

et , outre cela il gagnait beau-


, bientôt la cause. Le dernier qui
coup d'argent. Pour avoir toutes ouït parler des amours de Pierre
les aises de la vie , il crut qu'il Abélard fut le bon homme Ful-
lui fallaitune maîtresse et il jeta bert chez qui se jouait la farce,
, ,

lesyeux sur Héloïse nièce d'un II n'en crut rien pendant quel-
,

chanoine, préférablement à cent que temps mais il ouvrit enfin ;

autres filles ou femmes dont il se les yeux, et fit sortir de chez lui
trouvait très-capable de se faire son pensionnaire. La nièce se sen-
aimer (G). Ce chanoine, nommé tit grosse quelque temps après ,
Fulbert, aimait l'argent, et sou- et l'écrivit à son galant, qui
haitait avec passion qu'Héloïse trouva bon qu'elle sortît de chez
fût savante. Abélard lui tendit son oncle. Il l'envoya en Rreta-
des pièges par ces deux endroits, gne chez sa sœur ou elle ac- ,

Prenez-moi en pension chez vous coucha d'un fils {cl) et, pour
^ \

lui dit-il , \e vous fais maître du apaiser le chanoine il lui offrit ,

prix. Le bon homme, s'imaginant d'épouser secrètementHéloïse. Il


qu'il donnerait à sa nièce un ha- fit goûter beaucoup plus facile-
bile précepteur , qui , bien loin ment cette proposition à l'oncle
de lui coûter de l'argent, lui qu'à la nièce car un excès de pas- ;

paierait une fort grosse pension, sion fort singulier faisait qu'Hé-
donna tête baissée dans le piège loise aimait mieux être la maî-
(f) : il pria maître Abélard de tresse que la femme d'Abé'ard ,
bien instruire la jeune fille, tant comme nous le dirons ailleurs
de jour que de nuit et lui don- {e). Enfin elle consentit à ce ma-
,

na permission d'user de contrain- riage secret mais elle protestait ;

avec serment dans l'occasion , ,

'",""" ^'•«' <^ommu.


J/ ^r
tens ,
"«/.':'"^«.f
ut qitoties inihi a scholis reverso vaca-
i-
.giig j^.^tgit
.
^
-^t mariée. Fui-
. . . ,

rel. tain in die quàm in nocte ei docendœ bert , qui avait mieUX aime COU-
operam darem et eam, si negligentem senti-
.

rem vehementer conslringerein. Abij-lardi


, {d) On le nomma \stro]Ahi\is.
Epist. pag. II. (e) Dans l'article HÉLOiSE.
,,

52 ABÉLARD.
vrir la honte de sa famille en à Laon deux ennemis redoutables
divulguant ce mariage que tenir (^),qui n'eurent pas plus tôt aper-
la parole qu'il avait donnée à eu le préjudice que leurs écoles
Abélard de n'en point parler , de Reiras recevaient de sa grande
maltraita souvent sa nièce quand réputation, qu'ils cherchèreatles
il vit son obstination à nier qu'elle occasions de le perdre. Il les trou-
fût feiume d'Abéiard. Là-dessus vèrent dans un livre qu'il dicta
elle fut envoyée dans le monas- sur le mystère de la Trinité (M) :
tère d'Argenteuil par son mari , ils prétendirent y avoir décou-
qui lui fit prendre l'iiabit de re- vert une hérésie effroyable et ils ,

ligieuse au voile près. Les pa- obtinrent, par le moyen de leur


,

rens d'Héloïse s'imaginèrent qu'il archevêque la convocation d'un ,

leur jouait là un second tour de concile à Soissons environ l'an ,

perfidie, et furent si transportés i 121 (N). Ce concile sans avoir ,

de colère qu'ils envoyèrent chez donné lieu à Abélard de se défen-


,

lui des gens qui entrèrent de nuit dre , le condamna à jeter lui-
dans sa chambre et lui coupé- même son livre au feu, et à s'en-
,

rent ces mêmes parties viriles fermer dans le cloître de Saint-


avec lesquelles il avait déshonoré Médard. On lui ordonna peu
la famille du chanoine. Il en fut après de retourner au couvent de
si honteux, qu'il s'alla cacher dans Saint-Denis , où la liberté qu'il
les ténèbres de la vie monastique. s'était donnée de censurer les
Ce fut la honte et non la dévo- mœurs corrompues de l'abbé et
tion qui le poussa à prendre l'ha- des religieux l'avait exposé à la
])it de moine dans l'abbaye de haine de tant de gens. Il lui
Saint-Denis {f). Les désordres de échappa de dire qu'il ne croyait
cette abbaye oii les impuretés de
, pas que leur saint Denis fût Denis
l'abbé étaient autant supérieures î'aréopagite dont il est parlé dans
à celles des simples moines qvie sa l'Écriture. Cela fut relevé tout
dignité l'élevait au-dessus d'eux , aussitôt et rapporté à l'abbé , qui
chassèrent bientôt Abélard il : en eut beaucoup de joie , parce
voulut devenir censeur et il se , qvi'il se voyait en main un pré-

rendit par-là si fâcheux que l'on , texte de mêler aux accusations de


fut ravi de s'en défaire. Il se choi- fausse doctrine les accusations de
sit un lieu de retx'aite sur les ter- crime d'état (0) , chose qvie ces
res du comte de Champagne (K) messieurs ne inanquent jamais de
et Y dressa une école où il attira pratiquer pour satisfaire sûre-
un si grand nombre d'auditeurs nient leur vengeance. L'abbé as-
(L) que l'envie des autres mai-
,
sembla son chapitre sans per-
tres qui se voyaient abandonnes
,
(Jj-e de temps , et déclara qu'il
à cause de lui par leurs écoliers, allait livrer à la justice du roi
commença à lui susciter de uou-r celui qui avait l'audace de ren-
veîles persécutions. Il s'était fait verser la gloire et la couronne du
royaume. Abélard , ne jugeant
{f In tant misera me contrilione posi/iim
1

confusio fateor, pudoris potiiis qiiinn dei'o-


,

tio corurersionis , ad moiiaslicorum latibula f^) AlljericusPîeinensis, et I.otulpbusLoni-


clauslrorum compuUt. Abselardi Epistolse baidus Ce dernier est nommé Leutaldus No«
pag. 18. varieiisis par Olhoii de Frisingen.
,

A BEL ARD. 53
point que de pareilles menaces lui un asile; mais il éprouva qu'il
fussent peu de chose se sauva de , n avait fait que changer de mal.
nuit en Champagne et obtint , , Les mœurs incorrigibles des moi-
après la mort de l'abbé la per- , nes et la violence d'un seigneur
,

mission de vivre monastiquement qui leur ôlait la meilleure partie


cil il voudrait. Les raisons poli- de leurs revenus, de sorte qu'ils
tiques qui concoururent à cela étaient contraints de nourrir de
sont assez curieuses (P). Ensuite leur propre bourse leurs concu-
de cette permission , il se choisit bines et leurs enfans (/) l'expo- ,

une solitude dans le diocèse de sèrent à mille chagrins, et même


Troyes et y bâtit un oratoire qu'il
, aux plus grands dangers fS). Sur
nomma le Paraclet(/?). Une gran- ces entrefaites l'abbé de Saint-,

de mu! tituded'écoliers l'y allèrent Denis chassa les religieuses d'Ar—


joindre ce qui réveilla l'envie
, genteuil. Abélard , mù de pitié
qui l'avait tant de fois persécuté. pour Héloise , leur prieure , lui
Mais à ce coup il tomba dans les fitprésent de l'oratoire du Para-
plus dangereuses mains du mon- clet oli elle s'établit avec quel-
,

de je veux dire qu'il fut en butte


; ques-unes de ses compagnes. De-
à deux soi-disans restaurateurs puis ce temps-là il fit souvent des
de l'ancienne discipline, et grands voyages de Bretagne en Cham-
zélateurs qui comme de nou-
, paguepour les intérêts d'Iléloïse,
veaux apôtres (Q) , s'étaient ac- et pour se délasser un peu des
quis la faveur des peuples. Ils embarras de son abbaye. On en
répandirent tant de médisances causa, nonobstant la mutilation
contre sa personne qu'ils lui , (T) que ce pauvre homme avait
débauchèrent les principaux de autrefois soufferte. Voilà jus-
ses amis, et qu'ils contraignirent qu'où il a conduit l'histoire de
ceux qui l'aimaient encore à n'o- ses malheurs dans une lettre
,

ser le lui témoigner. Ils lui ren- qui subsiste encore. Le reste de
dirent la vie tellement amère sa vie doit être cherché dans d'au-
qu'il fut sur le point d'abandon- tres écrits, et consiste principa-
ner le pays de chrétienté (/) ; lement en ce qu'il eut un nou-
mais son étoile ne lui permit pas veau procès d'hérésie devant l'ar-
de se procurer ce repos et l'at- , chevêque de Sens. Il demanda
tacha tout de nouveau à des chré- qu'il lui fût permis de justifier
tiens et à des moines pires que sa doctrine dans une assemblée
des Turcs {k). Les moines de l'ab- publique cela lui fut accordé.
:

baye de Ruis , au diocèse de \ au- On convoqua un concile à Sens ,

nes, l'élurent pour leur supérieur auquel le roi Louis ^ II voulut


(R). Il espéra que ce serait pour assister en personne. Ce fut l'an

(A) Nous dirons dans Varlicle Para-


1 140. Saint Bernard y fut man-
CLïT pourquoi il donna ce nom à son ora- dé pour y soutenir le personnage
toire et nous rapporterons les chicanes qu'on
,

lui^t à ce sujet.
d'accusateur. On lut d'abord à
(i) Voyez la remarque (E) de l'article de l'assemblée les propositions qui
Alcut Jean-Paul).
(A) Incidi in christianos atque monackos ,
Vnusqnisque de propriis olim niarsu-
[l)

genlibiis longe sœviores atque pcjores. Abse- piis se etconcubinas suas cuni filiis et JiUa-
lardi Epist., pag. 32. hus sul/stentaret. Abalardi Epist., pai^. M.
^ ,

54 ABÉLARD.
avaient été extraites des livres de enterrer au Paraclet {q). Nous
Pierre Abélard, et cette lecture parlons de ses écrits dans l'article
fit tant de peur à l'accusé qu'il ,
de François d'AMBOiSE; et pour
interjeta appel au pape. Le con- ce qui est de ses erreurs et de ses
cile ne laissa pas de condamner persécutions synodales nous en ,

les propositions {m) mais il n'or- ; toucherons quelque chose dans


donna rien contre la personne de Bérenger de Poitiers, l'article
accusée et rendit compte de
, remarquable qu'il ne se fit II est

tout au pape Innocent II, en le nul scrupule de son mariage ,


priant de confirmer la condam- quoiqu'il fût dans la cléricature
nation. Le pape n'y manqua pas et possesseur d'un canonicat (r).
(il) il ordonna <{ue les livres J'ai été surpris de voir qu'il ne
:

d'Ahélard fussent brûlés, etqu'on fait aucune mention de son maî-


l'enfermat et lui défendit de tre (ç) Roscelin (Z)
, qui passait ,

plus enseigner. Il s'apaisa quel— en ce temps-là pour un subtil lo-


que temps après à la solHcita- gicien et que l'on regarde corn—
, ,

tion de Pierre le Vénérable , qui me le fondateur de la secte des


avait reçu fort humainement cet nominaux. Il a eu de l'attache-
hérétique dans son abbaye de ment lui aussi pour cette secte
Clunj^ et qui l'avait même ré- qu'il trouva très-propre à la vi-
,

concilié avec saint Bernard (o), i'acité de son esprit pénétrant, ai-
le promoteur de l'oppression (V) gu et inventif il) Il effrayait les
que l'innocence avait soufferte s^cns par le moyen de cette scien-
dans ce concile. La retraite de ce et les foudroyait et terrassait ,

Cluny fut la dernière dont Abé- par tant de sortes d'ergoteries et


lard eut besoin. Il y trouva ton- de syllogismes quil ne les ren-
te sorte de charité; il y fit des dait pas moins étonnés que con-
leçons aux moines il y fut éga- fus. Je ne crois pas qu'il se soit
;

lement humble et laborieux. En- jamais mêlé de l'explication du


fin, étant devenu infirme, per- droit civil (AA), comme quel-
sécuté de la gale (^) et de plu- ques-uns le prétendent. On ver-
sieurs autres incommodités on ra dans la dernière remarque le ,

l'envoya dans le prieuré de Saint- catalogue des erreurs de M. Mo-


Marcel lieu très— agréable sur réri (BB). Vous trouverez dans
, ,

la Saône auprès de Châlons. II un ouvrage du père Jacob (w) une


,

y mourut le 21 d'avril 1 142 (X), longue liste d'auteurs qui ont


à l'âge de 63 ans. Son corps fut parlé d' Abélard *.
.
eaVOyé à HéloiSe (Y) , qui le fit r^^ royes la leltre de Pierre le Vénérable

,
{m)
. „
Voyeztr- 1
la Vie de saiot Bernard par
• !>
à/?i-7oJ.«e, c/«n5/c5 0Euvresd'Abélard,p.337.
, (,.; Quid te ctericum atnue canonicumfa.
Cxeofi.oi, moine de Clmri>anjr li^re III , cer<?o«orte/. ALœlardi Episl. I, ime. 16.
chap. > et la lettre Ct^XXXIX de saint
,
(s) Otho Frising. de Gest. Frid libr. I. ,
UernuxA Elle est insérée dans les OEuvres cap. XT.VIl. Aveniini Annal. Boior., lih. VI.
d Abélard, p«5- 272. WNaude,add à 1 Hist. deLouisXI. n. 160.
^^^ 7'^^" ^'"l-fu^f^^ '^^ ^"'o"' ^"- ^«^ «/"' I>« ^l''"^ Scriptoribus ca-
C"^*'
iiard et les OEuvres d Abélard, ;,«§. 3oi. Lilonensibus pag. ilç..
,

(o) Voyez la lettre de cet abbé à Inno- * Depuis la


mort de Bayle D. Gervaise ,

cent II, dans fc OEuvres d'Abélard ;j. 335. , a publie la Vie de Pierre Abëlard et celle
(p) Plus solitù scabie et quibusdam cor. d He'ioïse son e'pouse 1720, 2 i>ol. in 12.
, ,

poris incommodilatibus gravabatur. khx- 3<Ay,surlafoidesJournalislesdeTrei>oii3c,


lardi Oper. pag.V^i. dittjuc cen'esl quunpanégyrique perpétuel.
,.

ABÉLARD. 55
(A) Il naquit au village de Palais*.'] d'Abélard avec l'abrégé que Pasquier
Son père avait un peu étudié avant en donne, qu'elle ait été abrégée fort
que de porter les armes et il eut grand , exactement. Voici l'ordre de ses aven-
soin de faire instruire tous ses enfans, tures , selon l'abrégé. Abélard se v'int
et surtout l'aîné. On ne saurait bien camper à CorbeU , la première fois
dire si Abélard était cet aîné car il ;
qu'd quitta Paris. Il revint à Paris
parle sur cela d'une manière qui a lorsque Champeaux se fut fait moine.
donné lieu à deux opinions différen- Il fut contraint d'en sortir
pour la se-
:
tes. "
'
r.
Voici ses paroles : Primogenitum
' 1
- conde fqis ,
et alors il s'ea alla à Me-
suuT/i quanta charioreni habebat , tan- lun. Il retourna à Paris , ayant su que
to diligentliis erudiri curai'it. Ego Champeaux était allé résider à son
l'ero, quanta ampliiis in studio lilte- éyêchéde Châlons. Champeaux, aver-
rarum profeci, tantb ardentitis in eis ti de ce retour, revint à Paris
pour
inhœsi , et in tanlo earuni aniore il- traverser Abélard. Celui-ci fut enfin
lectus surn , ut militaris gloriœ pom- contraint de quitter la partie, et se fit
pant cum hœreditaie et prœmgati^a écolier d'Anselme , lecteur eu théolo-
primo genitorum meorum frntribus de gie à Paris il devint ensuite lui-même
:

relinquens Martis curiœ penilùs


, lecteur en théologie, et fut prié par
abdicarem ut Minen'ce gremio edu- un chanoine de l'ouloir donner tous
carer. Pasquier en vertu de ces ex- les jours une heure de leçon à sa nièce.
,

pressions, ne balance point à le pren- Il accepta le parti volontiers et, après ;

dre pour le Gis aîné (j) mais d'autres auoir quelque temps continué ce mé
;

disent positivement qu'il était cadet. lier 5


^mour se
mit de la partie entra
C'est le sentiment du Père Alexandre. eux. Il y a plusieurs fautes dans ce
Militaris gloriœ pompant cum hœre- narre, i". Aliélard ne se campa à
ditalc primogenitis fratribus derelin- Corboil qu'après avoir été à Melun.
quens, dit-il (q), en parlant d'Abélard. 2°. Quand il sortit de Melun pour la
Il y en a même qui le font le plus jeu- seconde fois Champeaux s'était réti-
,

ne de la famille (3). Si j'avais à choi- ré dans un village auprès de Paris, et


sir , je ne préférerais pas la dernière non pas à son évêché de Châlons :

explication à la première. Il ne faut cette prélature ne lui avait pas en-


pas douter que le surnom Palatinus core été donnée il n'était que cha- ;

qu'il portait n'eût pour fondement le noine régulier et je m'étonne que :

mot latinPalalium qui était le nom ,


Pasquier n'ait pas senti l'absurdité des
de sa patrie. Il était si connu sous le démarches qu'il faisait tenir à un évê-
nom de Peripateticus Palatinus que ciu^ en le tirant de son siège épiscopal ,

Jean de Sarisbéri ne le q-ialifie jamais {iÇttr le faire disputer à Paris contre


autrement (4). Il y en a qui soupçon- un régent de philosophie. 3°. Abélard
nent que la raison de celte épithète n'eut point du dessous en cette ren-
venait de quelque palais magnifique contre il ne sortit de Paris que pour j

où il faisait ses leçons (5) ce n'est aller voir sa mère qui voulait se fairej

point cela religieuse. 4*"- Anselme enseiguait la


(B) Une école à Melun. ] Je n'ai théologie à Laon et non à Paris. ,

pas trouvé en comparant la relation 5°. Le chanoine ne demanda point des


,

leçons pour sa nièce; ce fut Abélard


* Leclerc prétend iju'il fallait écrire an Palets, qui fit prier le chanoine de le prendre
et que c'est ainsi qu'on e'crit et qu'on parle dans dans sa maison. 6°. Abélard avait dé-
le lieu même. Niceron avait écrit comme Bar le,
siré la jouissance d'Héloise avant que
tt ainsi ont fait les éditeurs du More'ri de I75(j
Ladvocat,' Chaudon, FoUor, Wathins {ou du de lui avoir fait aucune leçon. Dans ^
moins son traducteur français) , la Biograpliie quelle défiance ne doit-on pas être à
universel! *"^'
l'égard d'une infinité de livres , puis-
(i) Pasquier, Reclierches de la France , liv
VI. chap. XVII.
que Pasquier bronche tant de fois en
(i) Natal. Alexander, sœc. XI et XII ,
part. si lîcau chemin .'

III pag.
,
7. (C) Un spinosisme non développé.]
(3: Du Pin, BlbllotVi., tom. IX, pag. io8. J'en fais juges fous ceux qui enten-
(4) Vorez son Polycratlcus , pag-. in, et son dront ces paroles crat in ed senlen- :
Metalogicus , pag. "45, 802, 814, etc. e'dit. de
tid de communitnte unii'ersalium
,

lerde,en 1639, in-8. ut ,

(5) Jacques Thomasius in Vilâ Ab^Iartli. ,


ennidem essenlialiler rem lolam simid
Voyez ci-dessous citation (i3)- , singults suis inesse astruerst indud-
, 1 ^

56 ABÉLARD.
iluis ,
quorum quiJem nulln esset in monasterium , quasi militem suuiit
essenlid diversilus , sed sold multitu- qiiem deseruerat ah ohsidione nnstrd
dine accidentiimi t'arietas (6). Les sco- liberaturus (8). La vie d'Abélard, que
tistes , avec leur uni^'ersale formnle h M. Thomasius (9) a publiée en Alle-
parle rei , ou leur unilas Jormalls a magne , m'apprend une chose qu'An-
parte rei ne s'éloignent point tic ce
, dré Du Chesne , François d'Amboise ,
sentiment. Or je dis que le spinosisme et peut-être tous ceux qui avaient
n'est qu'une extension de ce dogme ; parlé d'Abélard , ont ignorée ; c'est
car , selon les disciples de Scot les , qu'au milieu de ses ennuis et de ses
natures univeiselles sont indivisible- persécutions, et depuis qu'il eut placé
ment les mêmes dans chacun de leurs HéloÏ5e dans le Paraclet , il retourna
individus la nature
: humaine de sur le mont Sainte-Geneviève, pour y
Pierre est indivisibleraent la même faire des leçons publiques. C'est de
que la nature humaine de Paul. Sur quoi Jean de Sarisbéri, qui y fut soa
quel fondement disent-ils cela ? C'est écolier, ne nous permet pas d'être en
que le même attribut d'homme qui doute. Ciim primiim, dit-il (10), ado-
convient à Pierre convient aussi à lescens admodiim studiorum causa
,

Paul. Voiià justement l'illusion des migrâssem in Gallias anno altero post-
spinosistes. L'attribut , Aisen\.-\\s, ne quàm illuslris re.x jlnglorum Henri~
diffère point de la substance a laquelle eus, leo justitiœ , rébus excessit hu-
il comnent : donc partout oie est le tnanis contuli me ad peripateticum
,

même attribut , là aussi se trouue la Palatinum (11), qui tune in monte


même substance ; et , par conséquent Sanctœ Genouefce clarus doctor et
-

puisque le même attribut se trompe dans admirabilis omnibus prœsidebat. Ibi


toutes les substances elles ne sont
, ad pedes ejus prima artis hujus rudi-
qu'une substance. 11 n'y a donc qu'une menta accepi, et, pro modulo ingenioli
substance dans l'univers 5 et toutes les mei, quicquid excidebat ab ore ejus
diversités que nous voyons dans le totd mentis at'iditate excipiebam. Dcin-
monde ne sont que diflerentes modifi- de post discessum ejus, qui mihi prœ-
cations d'une seule et même substan- properus i^isus est , adhœsi magistro
ce. L'adversaire d'Abélard n'eût eu yilberico, qui inter cœteros opinatis-
rien de bon à dire contre cela ; et je simiis dialei-ticus enitebat , et erat re-
ne vois point ce que le cordelier Fras- t^erà nominalis seclœ acerrimus im-
sen (^) , qui n'a rien change' à la doc- pugnator. Voilà manifestement l'an-
trine de Scot , au milieu des lumières née 1 36. Il faut donc que Pierre Abé-
philosophiques qui ont éclairé ce siè- lard soit retourné à Paris long-temps
cle, pourrait répondre à Spinosa. MJis après le concile de Soissons, et qu'il
les autres scolastiques n'auraient be- en soit sorti peu d'années avant le
soin , pour renverser totalement ce concile de Sens.
mauvais système , que de distinguer (E) // se transporta h Laon. ] Olhon
entre idem numéro , et idem specie , de Frisingen a mal arrangé les choses,
ou similitudine. Pierre et Paul n'ont quand il a dit qu'Abélard étudia d'a-
point la même nature ni le même at- bord sous Pioscelin , et puis sous An-
tribut si, par même, vous entendez selme de Laon, et sous Guillaume des
autre chose que semblable. .
Champeaux, évêque de Châlons (12).
(D) Comme une espèce de batterie.'] L'ordre des temps n'est point là gar-
11 faut l'entendre lui-même. Quia lo- dé ; et d'ailleurs ce Guillaume ne fut
cum nostrum ab cemulo noslro J'eceral
occupari , extra ciuitatem in monte (8) Abœlardi Epist., pag. 6.
Sanctœ-Genouefœ scholarum nostra- (g) Il est fils de Jacques Thomasius, pro-
rum castra posui , quasi eum ohsessu- fesseur à Leipsic auleur de celle Vie d'Abé-
,

lard iinprime'e à Hall en iS^i. Voyez ci-dessous


rus qui locum occupaverat nostrum.
ciutlion (i3).
Quo audito , magister noster statïm (10) Jo. Sarisber. Mclalog., lib. II , cap. X,
ad urbem impudenter rediens, scholas pag. 802.
quas tune habere paierai, et conuenti- (11) C'esl-à-dire Abélard comme l'auUur
, ,

culum fralrum ad pristinum reduxit l'explique lui-même, pag. ill^. In liâc opicione,
dit-d, deprehensus est peripaleticus Palatinus
Abelardus nosler.
pag. 5.
(6) Aliaelartli Epist. 1,
il) ^oyez le capucin Ca>imlr de Toulonse, (12) Oiho Frising.de Gestis Frider. I, lib. I,

ùi Atom. Peripatet., loin, V, pns- '^"• cap. XLVII.


,,

ABÉLARD. ^7
point ëvéque pendant qu'Abëlard fut que cUm accessissem , utjructum indè
son disciple. Je viens de jeter les yeux colligerem deprehendi illam esse Ji-
,

sur un livre (i3) où l'on conjecture , culneani cul maledixit Dnniinus seic ,

qu'Abëlard succéda l'an à ce mg illam ueterem quercum cui Pompejum


Guillaume en la charge de professeur Lucanus comparât dicens :

en thëologie. Mais premièrement il .... Stat magni nominis uinbra ,


ne paraît point que ce prëtendu pré- Qualis frugifero quercus sublimis in agro,
décesseur ait enseigne cette science.
De plus il est très-certain qu'Abëlard Ce passage méritait d'être copie ; il
fitdesleçonsen thëologie à Paris avant montre le tour d'esprit d'Abëlard ,
l'année 1119; car il n'est pas possible et ce que sont un grand nombre de
que tout ce qui lui arriva depuis ses personnes.
premières leçons jusqu'au concile de (G) Très-capable de se faire aimer. "l
Soissons se soit passé dans deux ans C'était le propre de notre homme que:

or, l'onadebonnesjireuvesque cecon- la vanité; et d'ailleurs, étant beau


cile fut convoqué l'an 1 121. Joignez garçon , et à la fleur de son âge sa- ,

à cela que Guillaume des Champeaux chant faire des vers , ayant une répu-
devint ëvéque de Châlous l'an iii3 tation extraordinaire, et ne manquant
(i4) et que, comme cette promotion
; point d'argent , il faut trouver moins
l'éloigna des écoles de Paris, Abë- étrange qu'il ait espéré qu'onluiouvri-
lard s'en alla à Laon pour y étu- rait la porte , en quelque lieu qu il
dier en théologie- Je ne sais pourquoi s'adressât. Tanti quippè tune nominis
d'autres disent que ce fut à Châlons eram et juvenlutis et forniœ gralid ,

u'il s'en alla pour y faire cette étu- prœeminebam ut quamcumque J'emi-
,

a: ( 1 5). narum nostro dignarer amnre nullam ,

(F)Content de la capacité de cet uererer repulsam (i6j. Pour un philo-


imme. ] C'était un vieillard qui n'a-
homr, sophe qui avait vécu dans la conti-
vait jamais eu beaucoup de génie de ; nence (17), il ne raisonna pas en mal-
sorte qu'on le mettait aisément à bout habile homme sur ces matières , lors-
dès qu on le tirait de sa routine. Il ne qu'il espéra que la conquête d'Héloïse
payait que de verbiage ceux qui le serait plus aisée que celle d'une autref
poussaient l'épée aux reins comme
, qu'il l'espéra , dis-je , par la raison
faisait le pointilleux et le subtil Abë- que le savoir d'Héloïse donnerait lieu
lard, dont on connaîtra mieux le ca- à un commerce réglé de lettres où l'on
ractère si on lit ce que je m'en vais oserait mieux déclarer les choses que
copier, ^ccessi ad hune sentm , cui dans la conversation. Tanto J'aciliits
magis longcei^us usas quam ingenium hanc niihi puellam consensurani cre-
fel niemoria nomen coniparai'erat ad didi quanta ampUiis eani litterarum
:
,

quem si quis de aliqud quœstione pul- scientiam et habere et diligere not'e-


sandum accederet incert.us , redibat ram nosque etiam absentes scriptis ,

incerlior. Mirabilis quidem erat in inlernuntlis inp'icem liceret prœsen-


oculis auscultantium , sed nullus in tare , et pleraque audaciiis scribere
conspectu quœstionantium. f^erborum quam colloqui (181. Les billets doux
usum habebat mirabilem , sed sensu et les vers tendres ne sont pas de fai-
cnnteniptibilem et raiione uacuum. bles machines; et surtout lorsqu'on
Cùm ignem accendcret domum suam , sait chanter soi-même les chansons
Jïwio implebat non luce illuslrabat.
, passionnées que l'on compose. Abé-
j^rbor ejus tota injoliis aspicienlibus lard toucha de telle manière le cœur
a longe conspicua i^idebalur sed pro- , d'Héloïse et lui mit le feu au corps si
,

pinquantibus etdiligentiiis intuentibus furieusement par sa belle plume et


infrucluosa reperiebatur. hanc ila- Ad par sa belle voix que la pauvre fem-
,

me n'en put guérir de sa vie. Duo


(iS) Historia sapientise et stiiltitise , collecta à
lui dit-elle (19) ,fateor, tibi speciali-
Cbristiano Thomasio , tom. /, ffiJg- 8i. On y
trouve la Vie d^Âbélard dont on aparté ci'des-
,
liter inerant ,
quibus Jeminarum qua-
sus , c'est-à-dire , celle que Jacques Tlioxnasius
a compose'e. (16) Abaelardi Opéra, pag, lo.
(1^) forez les Notes de Du Chesne sur la re- (17) Frena libidini cœpi laxare qui antea ,

lation (i'Aliélard ,
pag. ii47- vixeramcontinenlissimè Aba;lardiOpera,pn^.g.
.

(i5) Du Pin ,
Bibliolh , tom, IX, pag, log ,
(18) Abasiaidi Oper., pag. ly.
l'dii. de HoLl. (19^ Ibidem ,
pag. 46.
,

ÔS ABÉLAED.
rumlibet animos staùin allicere paie- Perditus, et liquidis immisi fonlihui npros fa i).

ras , dictandi uidelicet et cantandi


(I) Que
de vers d'amour l'\ Depuis
gratin. Voyez la remarque (F) de son
goûté les plaisirs de la jouis-
qu'il eut
article où ce passage, rapporté un peu
sance il ne se plaisait point à faire
,
plus au long, apprendra combien ces
leçon et il demeurait à son auditoire
,
choses ont de force sur le sexe.
le moins qu'il pouvait. La nuit était
(H) ^
la tâtonner et h la baiser. ]
un temps tout-à-fait perdu pour ses
Pour mieux cacher le jeu à l'oncle , il études (22). vaquait à d'autres cho-
Il
faisait semblant de se servir quelque- ses ; il aurait donc voulu avoir à lui
fois de la permission qu'on lui avait tout le jour pour étudier. Voilà pour-
accordée de châtier Héloïse. Il dit que quoi son école lui était fort ennuyeuse.
l'amour et non pas la colère précep-
,
Aussi ne faisait - il que répéter ses
torale , le portait à donner le fouet à vieilles leçons et s'il lui venait quel-
5

son écoliére de temps en temps , et que pensée elle ne roulait pas sur,

que c'étaient des coups les plus doux quelque difficulté philosophique, mais
du monde. Voici le plan qu'il nous sur des chansons amoureuses qui fu- ,

donne des leçons qu'il faisait à la rent chantées long-temps en plusieurs


jeune fille. Sub occasione disciplinœ provinces. lia negligentem et tepidunt
amori penitiis uacabamus et secretos ,
lectio tune habebat, utjam nihil ex in-
recessus quos amor optabat stiidiuni
, ,
génia sed ex usu cuncta projerrem,
,

le<tinnis offerebat. Aperlis itaque li- nec jam. nisi recitator pristinorum es-
bris pliira de aninre quam de lectione sem inuentorum et si qua im^enire :

verba se ingerebant , plura erant oscu- licerel carmina essent amatoria non
, ,

la quant sententiœ. Scepiiis ad sinus philosophiœ sécréta. Quorum etiam,


quant ad libros reducebantur manus , carminum. pleraque adhuc in mullis ,
crebniis oculos amor in se rejlectebal, sicut et ipse nosti frequenlantur et ,
quam lectio in scripturam dirigebat. decantantur regionihus ab his maxi- ,

Quoque miniis suspicionis haberemus, me quos i^ita similis oblectat (23).


l'erbera quandnquè dabat amor non Voilà donc un fait constant, qu'il sa-
Jurnr gratia non ira quœ omnium
, , vait faire des vers; mais je ne saurais
unguentorum suat^itatem transcendè- croire qu'il soit l'auteur du fameux
rent (20), Mais il y eut des occasions roman de la Rose et qu'il y
, ait fait le
où tout de bon il voi'lut recourir an portrait de son Héloïse sous le nom
fouet: c'était lorsqu'elle ne se trouvait de Beauté. C'est pourtant ce que j'ai
point d'humeur, ou que le respect de lu dans un livret réimprimé en Hol-
quelque fêle solennelle lui inspirait lande (24) Celui (ïS) qui se donna tant

quelque scrupule. Voyez la remarque de peine pour ramasser et pour confé-


(E) de l'article d'HÉLoisE. N'oublions rer les manuscrits d'Abélard me pa- ,

pas la réflexion d'Abélard sur la sim- raît plus digne de foi que ce livret Or,
plicité du chanoine. Quanta ejus il dit positivement le roman de que
sinipdcitas esset i'ehemenler admira- la Rose de Guillaume de
est l'ouvrage
tus , non minus apud me obslupui Loris si l'on en excepte la fin qui fut
,

quam si agnam teneramfamelico lupo faite par Jean de Meun *. Plusieurs


committeret. Qui cùm eam mihi non
solUm docendam i'eriim etiam uehe-,
(21) Virgilii Ecl. II, V. S8. TorM /et Nou-
velles lettres contre le calvin. de Maimbourg,
menter constringendam traderet quid pag. ;
,

74 1.
aliud agebat quam ut fotis meis licen-
(22) Ttediosum. mihi vehemenler erat ad
tiam penitùs daret et occasionem scholas procedere, vel in ei.v niorari pariter et
,

etiamsi nollemus offerret ut quam laboriosuin curn noctumas amori vigitias et


, , ,

diurnas studio consecrarem. Abzelardi Opéra


fidelicet blanditiis non possem minis ,
pag. 12.
et uerberibus faciliiisjlecterem? Com-
(23) Ibid.
me il cite assez souvent les anciens poè- (24) Histoire d'Héloïse et d'Abélard, en 1693,
tes ,
m'étonne que sa jeune brebis
je in-12.

liurée a un loup affamé ne l'ait pas fait (îS) Fr.inçois d'Ambolse. f^ofei sa préface
apologétique à la tête des OEuvres d'Abélard ,
souvenir de ces paroles de Virgile :
qn''djit imprimer à Paris, l'an 1616, in-4°.
Eheu ,
quid volui misera mihi l Floribut * Leclerc reproche à Barle de faire la part de
austruin Jean de Meun trop petite , et dit que le premier
demi-quart de l'oui'rage seulement est de Guil-
(20) Ibidem, pag. n. laume de T.oris. Cesi aller trop loin. Sur les
,;

ABÉLARD. 59
autres écrivains , bien informes, assu- snphicas rationes requirelant, et plus
rent la même chose. L'histoire d'Abé- qiiœ inteliigi, quàm quœ dici possenl
lard et d'Héloise a été insérée dans ce ejflagitabanl ; dicentes quidem uerbo-
roman. rumsuperjîuam esseprolationem quam
(K) Sur les terres du comte de Cham- intsilligentia non sequeretur, nec credi

pagne.} On découvre cela en confé- posse aliquidnisiprimiliis intellectum


rant deux passages. Voici le premier : et ridiculosum esse aliquem aliis prœ-
j^d cellaiii quandani recessi, scholis dicare , quod nec ipse nec illi quos
more solitn i/acalurus (26). Voici le doceret intellectu capere possent , do-
second Nocle latenter anfu^i alque
: ,
mino ipso arguente quoi cœci essent
ad terram comitis Theobuldi proxi- duces cœcorucn (29I. Là-dessus, il se
mam ubi anted in celld moraUis Jue-
,
mit à leur expliquer l'unité de Dieu
ram, abscessi (27). Pasquier n'a rien par des comparaisons empruntées des
compris au premier, puisqu'il y a trou- choses humaines. Pasquier l'accuse
vé ce sens Se retirant en un arrière-
:
d'avoir soutenu qu'on ne dei'oit croi-
coin du monastère, lisait tantôt en phi- re une chose dont on ne pouvait rendre
losophie, tantôt en théologie (38}. Ce raison ; qui estoit en bon langage, pour-
ne fut nullement dans l'enceinte de suit-il destruire le fondement général
,

l'îibbaye de Saint-Denis qu'Abélard de nostre Joi (3o). Je ne lui demande


dressa une école il n'en eût pas été :
pas qui lui a dit qu'uu professeur ap-
moins importun aux moines ,
dont il prouve toutes les fantaisies de ses éco--
censurait les dérèglemens ; et c'était liers , lorsqu'il a la complaisance d'en
à cause de ses censures qu'ils souhai- prévenir autant qu'il peut les mauvai-
tèrent de se défaire de lui. M. Ducan- ses suites ; car il y a quelque apparen-
ge explique très-doctement, selon sa ce qu'Abélard trouvait assez raisonna-
coutume ce que c'est que cetla. Voyez
,
bles les maximes qu'il attribue à ses
la remarque (A) de l'article ParaclEt, auditeurs mais il ne faut pas appuyer
:

où j'explique les diverses stations de cette apparence sur le passage que


Pierre Abélard. Pasquier allègue ; il vaut mieux la
(L) Un sigrandnombre d'auditeurs."] fonder sur ces paroles de saint Ber-
Touchant le grand nombre d'écoliers nard: (^uidniagis contra fidem, quàm
qu'il eut Voyez la remarque (A) de
,
credere noll^quidquid non possis ra-
l'article Foolqce, prieur de Deuil. tione attingere? deniquè exponere fo-
lens (Abœlardus) illud sapientis, qui
(M) Sur le mystère de. la Trinité.}
crédit cita, levis est corde ; cita credere
L'occasion qui porta notre Abélard à
est, inquit , adhibere fideni anle ratio-
écri^re sur cette matière fut que ses ,

écoliers lui en demandaient des rai-


nem (3 1 ) . Le traité qu'Abélard composa
sur ce sujet plut extrêmement à tout
sons philosophiques. Ils ne se payaient
le monde hormis à ceux qui étaient
point de paroles, ils aimaient mieux ,

des idées ,
hautement, du même métier que lui; c'est-à-dire,
et ils disaient
qu'il n'était pas possible de croire ce
qui étaient professeurs en théologie.
et que c'é- Fâchés qu'un autre eût trouvé
des
que l'on n'entendait pas ,
explications et des éclaircisseraens
tait se moquer du monde que de prê-
cher une chose qui est incompréhen- qu'ils n'auraient pas pu trouver, ils

tant à celui qui parle qu'à crièrent à l'hérétique, et firent tant


sible , ,

ceux qui écoutent. Humanas et philo- de vacarme que peu s'en fallut que
,

le peuple ne lapidât Abélard. DuO


22,000 vera environ que contenait le roman de illiprœdicti œmuli nostri ita me in
Sa Rose, près d'un cinquième (/fiSo vers) est
clero et populo diffamai'erunt ut pêne ,
atlribui'' à Guillaume de Loris ; le reste est de
Jean de Meun. Depuis son édition publiée en me populus paucosque qui aduenerant
1814, ^^- Me'on a eu communication d'un ma- ex discipidis nostris prima die nostri
nuscrit de ta bibliothe'que du roi contenant la aduentûs lapidarent dicentes me très
,

seule partie de Vouvrai^e allribue'e a Guillaume


lie Loris. Ce manuscrit présente un dénoùment
deos prœdicare et scripsisse, sicut ipsis
que M. Méun a fait imprimer. Ainsi, Jean de persuasumjuerat (Sa). Leurs cabales
Meun n acheva pas l'ouvrage mais en refit la ,

fin sur un plan plus étendu. (29) Abaelardi Oper., pag. îo.
(26) Abwlardi Opcr., pag. 19. aô) Pasquier, Recherche de la Frauce, liv.

(2-) Idem
pag. 26. ,
VI chap. XVll.
,

(i9) Pasquier, Recherche delà France, liv. VI, (3i) Hernard. F.pist. CXC.
.hap, xrii. (32; Ahœlardi O^er., pag. 10.
,

6o ABÉLARD.
toutes-puissantes extorqnèrent du le- Alexandre (36) prouve fortement cela,
gat du pape (33) la condamnation tant contre Jean Picard, chanoine de
qu'on a vue dans le corps de cet arti- Saint-Victor qui a mis ce concile à
,

de. Ils avaient fait accroire qu'Abe- Tan ui6, que contre Binius, qui l'a
lard admettait trois dieux: cependant misa Tan 1 136. Onavait déjà censure',
certain qu'il eiait très-orthodose
il est dans la préface des œuvres df Pierre
sur le mystère de la trinilé, et que Abélard, les fautes chronologiques de
tous les procès qu'on lui Gt sur cette Binius, et celles de quelques autres.
matière sont de mauvaises chicane- On avait dit que Platine avait placé
ries, qui procédaient ou de malice sous le pape Lucius II le synode qui
ou d'ignorance. La comparaison qu'il condamna Abe'lard que Binius avait
;

emprunta de la logique (c'était son donne' dans cette erreur de Platine;


fort que la logique ) va plutôt à re- qu'il en avait commis une autre en
duire à une les personnes divines mettant sous l'année i\^n le concile
qu'à multiplier en trois l'essence de de Soissons et celui de Sens; et que
Dieu et voilà néanmoins qu'on l'ac-
: Génébrard n'a mis qu'une année d'in-
cuse, non pas de sabellianisme (34), tervalle entre ces conciles. Pour jus-
mais de trithéisme. Sa comparaison tifier que ce sont des fautes , on avait
est que , comme les trois propositions dit que le pontificat de ce Lucius ,
d'un syllogisme ne sont qu'une même qui ne fut pas d'un an tout entier,
vérité, de même, le Père, le Fils et tombe sur l'année ii45, et qu'il se
le Saint-Esprit ne sont qu'une même passa 2o années entre la tenue du
essence. Sicut eadem oralio est propo- concile de Soissons et la tenue du
sitio, assumplio, et cnnclusio; ha, concile de Sens. On soutient que 1 e-
eadcmessentia est Pater, elFilius ,et vêque de Préneste, qui présida au
Spiritus Snnctus (35^ Les inconvé- concile de Soissons en qualité de lé-
niens qui peuvent sortir d'un tel parai- gat du pape , sortit de France environ
îèle n'égalent point ou pour le moins
, l'an 1 1 20 , et qu'il n'y revint plus. On
ne surpassent point ceux qui naissent pouvait remarquer plus d'une faute
du parallèle delà trinité avec les trois dans ces paroles de Platine qu'on a
dimensions de la matièij. Ainsi, puis- citées: Qui (Abœlardus), prœsente
qu'on ne doute pas de Rrthodoxie de etiam Ludovico rege,rationibus victus,
M. Wallis, mathématicien d'Oxford , non modo sententiam muta^it , sed
qui a fait extrêmement valoir le pa- etiam monasticam i^itam etie/igionem
ralléle des trois dimensions, on ne induit, ac deinceps una ciimdtscipiilis
doit pas douter de celle de Pierre Ahé- quibusdam in loco deserto sanctissimè
lard, sous prétexte de la comparaison iHxit. Premièrement, il est certain
du syllogisme. Ce qu'il y a de certain, qu'Abélard s'était fait moine avant ,

c'est que, sur le pied du sjdlogisme, et que l'on tint aucun concile contre
mntrfi
sur celui des trois dimensions, il s'en lui. En second lieu c'i st au concile
r J it U; —,,.,.^1« »^-.rf.f A».fi A^ li f*.i_ Jl^ c — ,

« ....^ T #^nic Vil ncQi«:l

«,.u..,Li^ o.u».u . , — V.W v,^. que. Or, il est faux que


trois dimensions l'an i685. Cela pa- dans ce concile Abélard se soit rendu
raît par les nouvelles de la république aux raisons de ses adversaires, et
des lettres, à l'article III du mois de qu'il ait abjuré ses opinions. Il de-
juillet, à l'article X du mois d'août, manda dès l'entrée qu'on le renvoyât
et à l'article XII du mois de septem- au pape. En troisième lieu il n'est ,

bre. 11 fut réfuté par un autre minis- pas moins faux qu'il ait vécu depuis
tre l'an 1694- f^oyez l'Examen de la ce temps-là dans un lieu désert avec
Théologie de M. Juneii,Y}^v M. 'iiXM- quelques disciples car il passa tout
;

rin page 83i.


,
le reste de ses jours chez les moines
(Ji) Eni'iron Z'a«H2i.] Le père de Cluny. On voit bien que Platine a
j „, „ 'j mispêle mêle ce qui regarde les deux
(iî) Conan PreneHe. Il présida
eveque de i
ui V ^^f.-» AlitHa-rl Tn
'

conciIes assembles conti e A.Kla. d. l.a


,

k ce Laie de Soissons.
(34) Othon de Frislngen , ae Ge«t.
Fndpr. plupart des fautes que je viens de
lih I cap. XLVII, du pourtant qu'on l'ac-
cusa de rkéresie de SabelUus au concUe de XI H
^^^^ ^^^ Ale«nder, Hi,.. Eccl,, s>.c.

735)"Ab«larai Oper., pag- «o- X" - P"-'- ^^^ P'^S' ^^ " "l' '
, ,

ABÉLARD. 6r
relever sont reprochées à B lleforét lesse que celle-là ne fût incapable de
dans la préface mentionnée ci-dessus, séduire? Non , on ne le doit pas crain-
où d'ailleurs on le censure avec rai- dre; le monde est trop indiseipliuable
son d'avoir glosé sur Tépitaplie d'Abé- pour profiter des maladies des siècles
lard, comme si les louanges outrées passés. Chaque siècle se comporte
que Ton y lit étalent une preuve de comme s'il était le premier venu; et
son im;)riKlence et de son orgueil in- comme l'esprit de persécution et de
suppoitable. 11 est certain que cette vengeance a tâché jusqu'à présent d'in-
épitaphe fut composée par l'al)hé de téresser les souverains dans ses que-
Cluny, après la mort d'Abclard. Plu- relles particulières il tâchera de les
,

sieurs historiens ont mal distingué les y mêler jusqu'à la fin du monde :

deux conciles qui traitèrent la cause et nous pouvons bien appliquer ici la
de ce personnage. Paul Emile veut que sentence de Salomon, ce qui a été c'est
celui de Sens soit le premier où elle ce qui sera ; et ce qui a été. fait c'est
ait été examinée f37) Du Maillan dé-
: ce qui se fera (^ij. Nos desce'ndans
bite le même mensonge, et l'accom- diront, aussi-bien que nous,
pagne de plusieurs autres (3S;; com- Qui méprise Colin n'estim-^ point son roi
me, qu'Abélard n'osa comparaître; Et n'a, selon Colin, ni Dieu, ni 'foi ni
que tous ses écrits furent condamnés ici (43).

au feu et que la seconde fois quil fut


;
(P) Sont assez curieuses.'] Abélard
cité les prélats disputèrent longue- ,
nepouvant avoir de l'abbé de Saint-De-
ment avant que de le condamner.
nis la permission de se retirer, eut
Philippe de Berganie soutient que l'hé-
recours aux machines de la politique.
rétique (39), ayant été convaincu, en
Il savait que plus les moines de Saint-
présence du roi Louis par les puissan-
,
Denis se plongeaient dans le désor-
tes raisons de ces doctes et catholiques
dre, plus la cour exerçait d'autorité
prélats, abjura ses fausses doctrines,
sur cette abbaye et en tirait du pro-
se fit moine et passa le reste de ses
,
fit. Il fit donc entendre au roi et à sou
jours fort saintement dans un désert
conseil qu'il n'était pas de l'intérêt
avec quelques-uns de ses disciples.
de sa majesté qu'un religieux comme
On trouverait mille chroniqueurs qui
lui, qui censurait éternellement la
ont copié les uns des autres ces mê-
mauvaise \ie de ces moines demeu-
mes mensonges. Un petit livre (4o) ,

rât long-temps parmi eux. On enten-


,

que j'ai déjà cité, met dans la bouche


dit à demi-mot ce que cela voulait
d'Héloïse ces paroles: Çae n ava/icèrent
dire; et l'on donna ordre à l'un des
point ces deux faii.r prophètes qui dé- ^
principaux de la cour de demander
clamèrent si fortement contre vous au
à l'abbé, et aux confidens de l'abbé,
concile de Reims I Ces deux faux pro-
pour quelle raison ils voulaient rete-
phètes sont saint Bernard et saint Nor-
nir par force un moine dont la vie
bert. Héloïse n'a point dit qu'ils aient
ne s'accordait pas avec la leur et qui ,
crié dans quelque concile, et en tout
à cause de cela ne leur était bon à
,
cas ce n'est point dans celui de Reims.
rien et pouvait aisément leur procu-
(0) Les accusations de crime d'état.']
,

rer quelque honte. La conclusion fut


C'est un artifice dont on s'est servi tant
qu'Abélard se retira. Je me souviens
!de fois depuis que les Juifs l'employè-
à ce propos d'avoir demandé un jour
rent contre Notre Seigneur {^l'j, qu'il
à un homme qui me contait mille et
est étrange qu'on l'ose employer encore
mille dérèglemens des ecclésiastiques
aujourd'hui., Ne devrait-on pas crain-
de Venisç , comment il se pouvait
dre qu'une lâcheté aussi uséedevieil-
faire que le sénat soufirît des choses
(3-) Pauli .Silmilii, Hist. Franc, in Ludo- qui faisaient si peu d'honneur à la re-
vico Vil. ligion et à l'état. On me fit réponse
(38) n» Haiilan, Histoire de France, sous
que bien public obligeait le souve-
le
Louis VII.
nomme Baliardus
rain à user de cette indulgence; et
(39) Il le , in Snpplem.
Ctron. ad an. ii35. pour m'expliquer cette énigme , on
(40) Histoire d'Héloïse et d'Abélard, avec la ajouta que le sénat était bien aise que
lettre passionnée qu'elle lui écrivit. Imprime' il le peuple eût le dernier mépris pour
la Haye, en lôgS, tn-12.
(41) Evang. de tainl Luc, chap. XXIII , (42) Eccle.'!., chap. T . v. 9.
V. 2. (43} Despréaux, sal. IX , v. 3o5, 3of7.
62 ABÉLARD.
les prêtres et pour les moines ; car dès tant à des personnes qui scandalisent
lors ils sont moins capables de le faire le public.
soulever. L'une des raisons me dit- , (Q) (^)ui , comme de nom'eaux apô-
on ,
pourquoi les jésuites ne plaisent tres.']Lisez ce qui suit. Quosdam ad-
point là au souverain c'est qu'ils
, fersîim me noi'os apostolos , quibus
eardent mieux le décorum de leur ca- mundiis pluvimiini credebnt, excitai^e-
ractere; et qu ainsi, se jaisant plus rant. Quorum aller (c'était saint Nor-
respecter au menu peuple par un ex- bert) regularium canonicorutn filam ,
térieur plus réglé, ils sont plus en état aller (c'était saint Bernard) monncho-
d'e.t citer une sédition J'ai de !a peine rum se resuscilasse gloriabalur (47).
à m'imaginer qu'un désordre aussi af- Iléloïse page quarante-deuxième,
, à la
freux <{ue celui-là soit véritable. Où les nomme de faux apôtres. Voyez ci-
en serait-on si Tautorité souveraine dessus la lin de la remarque (N) où ,

avait besoin de se maintenir par un l'on réfute l'auteur de la nouvelle his-


tel expédient, et si le clergé se ren- toire d'Héloïse et d'Abélard.
dait plus formidable par ses bonnes (R) Les moines de l'abbaye de
que par ses mauvaises mœurs Ce dés- î Ruis.... l'élurent pour leur supérieur."]
ordre serait mille fois plus déplora- Le bénédictin tant travaillé sur
((ni a
ble que celui dont parle Tacite lors- , lesantiquités de Paris a eu grand tort
qu'il dit que, sous un mauvais gouver- de censurer Belleforêt, qui avait dit
nement la grande réputation n'expose
,
qu'Abélard posséda une abbaye dans
pas à moins de périls que la mau- la Bretagne. Qu'il ait été abbé en Bre-
vaise. Intra^'it aninium iiiilitnris glo- tagne, cela est faux; car, au sortir du
riœ cupido ingrata temporibus, qui-
, Paraclet il se retira a Cluny et a
, ,

bus sinistra erga eminentes inlerpretatio persévéré en icelle congrégation jus-


nec niiniis periculuni ex magna Jamâ, qu'à la mort (48). Voilà un auteur
quàmex w(«.'d(44). Mais voyons les pa- bien mal informé. 11 ignore que Pierre
roles mêmes d Abélard. Interuenienti- Abélard eut une abbaye en Bretagne
ùus utnicis quibusdam nostris regeni et avant et après la cession du Paraclet.
consiliuin ejus super hoc compellai'i et , S'il avait bien lu la lettre (49) dont il

sic quod uoleham impétrant. Stepha-


, cite quelques passages d y aurait vu ,

nus quippè régis tune dapifer l'ocato , cela avec la dernière évidence.
in partem ahbate et faniiliaribus ejus , (S) .Ci même nu.r plus grands dan-
quœsiuit ab eis cur invitum retinere gers.] Les moines tâchèrent souvent
relient, ex quo incurrere facile scan- de l'empoisonner; et, ne pouvant en
dalum passent, et nuHam utilitatem venir à bout dans les %iandes ordi-
habere ; citm nullateniis v'ila mea et naires, à cause de ses précautions, ils
ipsoruni coni'enire pnssent. Sciebnni essayèrent de l'empoisonner par le
auteni in hoc regii consilii sententiam pain et par le vin de l'eucharistie. Un
esse , ut qiionnniis regularis abbalia jour, n'ayant pas mangé d'une viande
illa esset , magis régi esset subjecta at- qui lui avait élé préparée il vit mou- ,

que utilis quantum videlicet ad lucra


,
rir son compagnon qui la mangea. Les
temporalia, Undè me J'acilè régis et excommunications dont il foudroyait
sunruni assensum consequi credideram; les plus mutins de ses religieux ne re-
sicque actum est (4^)- Quelques pages médièrent pas au désordre. Enfin il
après, il dit qu'un seigneur breton craignit plus le poignard que le poi-
s'était prévalu de la mauvaise vie des son, et se compara à celui que le ty-
moines de Ruis, afin de s'emparer de ran de Syracuse fit mettre à sa table
leurs biens (46)- Oter à dos gens qui sous une épée qui ne pendait qu'à un
par la sainteté de leur vie se sont ac- fil(5o).
quis la vénération des peuj)lcs ôter, , (T) On en causa , nonobstant sa
dis-je, à de telles gens ce que la clia- mutilation.] La médisance se déchaî-
rité des fidèles leur a donné, n'est pas nait si furieusement contre ce jiauvre
une petite entreprise ; mais on ne
croit pas risquer beaucoup en l'ô- (47) Abaflardi Oppr. ,pflg. 3i.
(48) Du Brpul, Antiq. de Paris, pag. 888,
édition lie i63g, 1/1-4.
(44) Tacitus , in Vitâ Agricolœ, cap. V.
(45) Abâtardi Oper. fa^. 27. (4fj) Celle ti'Abélaid qui contient la lelatioa
(4ti) l^x inordinaùone scilicet ipsius monasle- de sa vie.

riinactus occasionem. Âbailardi Oper. pag. 33. (/io) Abaslardi Opéra ,


pag. 3a et t^o.
, ,

A B É L A R D. 63
homme qu'encore qu'on sût qu'il n'a- abrégée d'Héloïse et d' Abélard, trois
,

vait plus de quoi contenter une fem- autres petites pièces.


me on ne laissait pas de dire qu'un
, (\ ) Son corps fut eni'oyé a Héloïse.^
reste de volupté sensuelle le tenait at- Pasquier assure qu'Abélard, par son
taché à son ancienne maîtresse. Quod testament ordonna délre inhumé dans ,

rue Jacere sincera chantas compel/e- le monastère du Paraclet (53j. Fran-


bat solita Jeroganiiurn pra^'itas im- çois d'Amboise l'assure aussi
,
(54) ;
jjudentissimè accusahal dicens me mais il n'en donne point d'autre preu-
,

adhuc quâdam carnalis cnncupiscen- ve que le témoignage de Pasquier. Ce


tice obleclatione teneri qui pristinœ qui me rend incrédule là-dessus est
,

dileclœ subslinere abscnliani idx aut que Pierre le Vénérable n'en fait au-
nunquani paterer. C'est la plainte que cune mention dans la lettre qu'il écrit
l'on trouve dans la page 35 de sa rela- à Héloïse, où il lui rend compte des
tion. 11 se consola par l'exemple de dernières heures d'Abélard (55). Bien
saint .Tc'rôme, dont l'amitié pour Paule plus, l'absolution d'Abélard fait foi
servit d'entretien aux médisans et il que l'on n'envoya son cor^is au Para-
^

crut réfuter invinciblement la calom- clet qu'atîn de gratifier Héloïse. C'est


nie en remanjuant que les plus jalous une marque qu'elle avait demandé cet-
commettent leurs femmes à la garde te faveur. Or, quel droit aurait eu l'ab-
des eunuques. Le père Thé iphile Ray- bé de Cluny de faire d'une disposi-
naud s'est moqué de cette raison tion testamentaire la matière d'un
,

parce qu'il avait lu quantité d'exem- bienfait? Le calendrier de l'abbaye du


ples de commerce impur entre des Paraclet confirme puissamment tout
femmes et des hommes mutilés. Jix ceci^ car on y trouve ces paroles vui :

quibus omnibus liquet qu'am frigida hal. januar. obiit Petrus cluniacen- ,

fuerit Pétri Abelardi apologia càiu sis abbas cujus concessd habet eccle-
, ,

redargutus de nimid familiantate cuni sia nostra corpus magistri nostri Pétri
amicd quidem sud Ueloïsd, et aliis mo- (56j. Le silence d'André Du Cliesne ,
nialibus paraclitensibus reposait , eu- dans ses notes sur l'épître où Abélard
nuchos, qunlis ipse factus erat , tutà raconte ses infortunes est une grande
et absque omiii periculo passe uersari raison pour moi contre Pasquier. il
y
cum fcminis (5i). J'en dirai quelque en a qui, sans parler de testament,
chose dans l'article Combabus. Héloïse disent qu'on donna à Héloïse le corps
aimait si ardemment Abélard, quoi- de feu son mari, comme il avait té-
qu'on le lui eût châtré, que les vertus moigné perses lettres qu'il souhaitait
de cet homme pouvaient courir de que l'on fît (57) mais on ne cite ni
:

grands risques auprès d'elle. Voyez ces lettres, ni personne qui les ait ci-
nos remarques suif l'article de cette tées. J'ai trouvé l'endroit à la page 53
femme. Ces paroles de Virgile, de ses œuvres. Il était alors dans son
abbaye de Ruis, et craignait d'être as-
. . . Nolumque furere quid femina possit
sassiné de jour en jour. Ouodsime Do-
Triste per augurium Teucroruiii peclora
ducuni (02) ,
minus in manibus inimicorum tradide-
rit (écrit-il à Héloïse)
, scilicet ut ipsL
représentent en quelque manière la prœi'alentes me
interficiant, aut quo-
conduite de ceux qui craindraient que cunque casu fiant unii'ersœ carnis ab-
la passion d'Héloïse n'ait eu trop de sens a vobis ingrediar , cadai'er obse-
force sur la chasteté de son Abélard. cro nostrum ubicunquè vel sepultum
,
(V) Le promoteur de l'oppression ] uel expositum jacuerit, ad cimiterium
C'est de quoi nous parlerons dans l'ar- i'estrum deferrifaciatis , ubi filiœ nos-
ticle de Bérenger de Poitiers. trœ, imà in Christo sorores, sepnlcruni
(X) Le 21 airil 1142.] Cela montre nostrum sœpiiis ^'identes, ad precespro
que le nouvel auteur de la vie d'Abé-
lard s'est fort abusé en le faisant vi- (5?>) Pasquier , Recbercte de la France, li-

vre Tan 1170. ,Tc parle de l'auteur


vre n, chap. WII.
(54) Prœf. Jpolog>-c. Oper. Abœlardi.
d'un petit livre imprimé à la Haye en (5.0; /nOperib. Aba-I,irdi pag. 33;.
,

1693, où l'on trouve, avec V Histoire (56; y4pud Aiidr. Qiiereetanum ( sit-e Du
,
'

Cbesne ) in \0ti9 ad Hislor. calamit. Aba:Iardi


i« ejtts Operibiis.
(5i) Th. RaynauJ «te Euniicliis pag. 148.
(5^) Cave, Histor. Liiter. Script. Eccles. pag-
,
,

(53) Virgilii ,¥.neia., M. K, v. S. 6Î2.


,, ,

64 ABÉLARD.
me Domino fun Jenàas ampliùs im'iien- qu'il a loué ait été professeur en droit.
tur. Voici Tabsolution d'Abëlard elle : Quelle merveille serait-ce qu'un pio-
devait être mise sur son tombeau et ; fesseur de dialectique avouât qu'il
c'est pour un tel usage qu'Hëloïse l'a- n'entend point un certain endroit em-
vait demandée à Pierre le Vénérable brouillé du code ? Aussi voyons-nous
(58). Ego Petrus , cluniacensis ahbas 3ue ce Bailard est un professeur en
qui Petruni Abœlardum in luonachum roit dans Pieri'e Crinitus, qui le nom-
cluniacensem recepi , et corpus ejus me Joannes Bajalardus. Concluons
jfurùm delatum Hehiisœ ahbatissce et qu'il ne s'agit point ici de notre Pierre
monialibus Paracleti concessi , autho- Abélard, et que Pasquier, qui a cru
ritate omnipotentis Dei et omnium faire une l'emarque qui ne devait pas
sanctorum absolvo eum pro ojjicio nb être oubliée en luia| pliquant ce qu'a
,

omnibus peccaiis suis (Sgl. Belleforèt dit Accurse (64), aurait mieux fait de
a débité un grand mensonge lorsqu'il n'en rien dire. Au moins devait-il bien
a dit que les os de Pierre Abélard fu- prendre garde qu'il y a dans le passa-
rent déterrés et brûlés (60). La pré- ge d'Accurse, non pas Petrus Abe-
face apologétique du sieur d'Amboise lardus , comme il le prétend, mais
réfute cela invinciblement. Petrus Bailàrdus. Que , s'il était vrai
(Z) Son maître Roscetin.'] Salabert que ce glossateur eût eu en vue notre
prêtre d'Agen , révoque en doute Abélard, il faudrait dire , ce me sem-
dans sa Dissertation sur la secte des ble qu'il se serait abusé ; car on ne
,

nominaux {61), que Roscelin ait été voit aucune raison de croire qu'Abé-
précepteur de Pierre Abélard. Nous lard se soit mêlé de jurisprudence.
examinerons ses raisons dans l'article Voyons les paroles de Crinitus. Quœ-
Roscelin *'. silum est superiori œtate a i^iris doc-
De l'explication du droit ciuil.']
(AA) tinribus quidnam in jure nostro ci^^ili
François d'Amboise se trompe ce me ,
prœscriptto quinque pedum signaret ,
semble, lorsqu'il croit qu'Accurse a qualisque J'oret inedintellectus. Quam
parlé de notre Pierre Abélard dans la rem Lanrentius P'alla et alii coniplu-
glose sur la loi Quinque pedum prœ- res ciim non satis perciperent , hdc und
scriptione.N o\c\\qs paroles d'Accurse ; se ratione dejendebant , qubd Joannes
Sed Petrus Bnilardus qui se jaclai'it ,
Bajalardus , inter eos qui jds civile
qubd ex qudlibel quanlumcunque dij- PROFiTENTUR consultissimus , ingé-
t^ir

jicdi lillerd traheret sanum intellec- nue illud ignorare {65}.


njffîrma^'it se
tum , liîc dixit NESCio (6a). Alciat loue Thomasius ne devait pas conclure de
la modestie de ce Pierre Bailard qui ce passage que Pierre Abélard ait été
avouait de si bonne foi son ignorance quelquefois nommé Baialard {66).
là-dessus Magnus ille j4ndreas Al-
: Voici une obs^ï^tion que M. de la
ciatus in Mo quem de Quinque pedum Monnoie me communiqua après a%oir
prîescriptione icnpsù tractutu, post- lu ma remarque (AA). Je suis sûr que
quhm Petrum Bailardum célèbrent sud l'on aura plus d'avances pour se bien
tempeslale projessorem laudauit qubd déterminer, quand on aura comparé
ingénue fassus esset eam legem a se ses pensées avec les miennes c'est ;

non intelligi, etc. C'est ainsi que parle pourquoi je me persuade qu'il me per-
François d'Amboise (63) : et ses pro- metti'a de mettre tous mes lecteurs en
pres expressions suffisent à le condam- état de comparer. Je suis persuadé
ner; car, afin qu' Alciat ait raisonné dit-il que c'est d'' Abélard qu'Ac-
,

juste, il faut que le professeur célèbre curse, sur la loi Quinque pedum a ,

entendu parler. Abélard, j'en con-


(58) yorei les OEuvres d'Abélard , pag. 343.
inens ne Jaisait pas projession de ju-
,
(Sg) In "Operibus Abœl., pag. if^S.
(6u) Bcllel'orêt, Chroniq. de France. risprudence 7uaiii il panait pour uni-
;

(61) Elle a pour titre Pbilosophia noiuina- versel , homme qui préten-
et pour un
lium vindicata, et est imprimée à Paris , en dait ne rien trouver au-dessus de son
l65i in-S.
,

* Cet article n'existe pas.


Ope- (64) Pasquier, Recbercbe de la France,
(62) Jpud Fr. d'Amboise , Prief. jipol.
TDm Âbîelardi.
iiV. r/, cap. XVII.
(63) Voici les paroles (VÀlciat : Adeô aatem (65j Crinitus, de honestâ Discipl., lib. XXV.,
existimata est difficilis, ut Petrus Bailàrdus , cap. IV.
non incelebris teonjestate suâ professor , ingeouè (66) Jacob. Thomas, in Yitâ Pétri Âlslardi,
fassus sit eam à se non inlelligi. num. 3. .
,

ABÉLARD. 65
intelligence qui totum scibile scie-
;
Dire que tous auteurs avouaient
le=!
bat comme on a dit de lui dans son
, quHeloise était nièce du chanoine
épitaphe. Accurse, dans l'endroit ci- tulbert est une mauvase
preuve con-
té ne nous en donne point d'autre idée
, tre Papyre Masson, qui
a dit qu'elle
que celle-là; et ceux qui sur les pa- , était iille naturelle d'un
chanoine.
roles du glossateur, ont cru que Petrus Bien n empêche que Fulbert
n'ait eu
Baylardus ou Bailarilus ai^'oil été un une sœur qui ne se soit
pas bien
célèbre professeur en droit, se sont conduite je dis „ne sœur,
:
car il
trompés. Il n'y en a jamais eu de ce était oncle maternel d'Héloïse,
auun^
nom-la. Bailardus n'est autre qu'Ahé- culus. Je m
étonne qu'André Du Chêne
lard, et c'est une des dix nu douze ma- (69J ait cru pouvoir réfuter Papyre
nières dont on a écrit le nom de cet au- Masson par la même preuve
dont
teur. Les Italiens, très- sujets à ces M. Moreri se sert. 6°. Il ne paraît
pas
sortes de retranchemens ont dit Bai- , qu Abc'laid se soit introduit chez
le
lardus pour Abailardus comme Ka- , chanoine sous prétexte d'enseigner
gona pour Aragona Naldo pour Ar- , la théologie à Uéloise pourquoi spé-
:

naldo Berto pour A\heY\o ou Lam-


, ciûe-t-on ce que les auteurs qu'on doit
berto. On ne niera pas du moins que suivre ne disent q l'en général?
Ces
Jacques-Philippe de Bergame moine , termes erat cupidus ille ualdè atque
, ,

uugustin, n'ait appelé notre Jtbelard erganeptimsiiam ut ampltiis seniper in


Baliardus (67), C'est Tobservation de doctrinam pro/iceret Ulteratoriam plu-
M. d£.la Monnaie. Je m'en vais dii'e rimiini studiosus (70), ne désignent-
une chose dont je ne m'avisai pas ils pas moins la théologie qu'une
au-
dans la première édition. Je crois tre science ? 4°. Il ne paraît point
qu'Abelard mourut avant que l'étude qu'Héloise ait eu beaucoup d'estime
du droit romain fût connue en Fran- pour Abélard , avant même qu'ils fus-
ce. On lavait ressuscitëe en Italie sent logés ensemble. 5°. 11 n'est pas
quelques années auparavant (68;, et vrai qu'il la mena en Bretagne, quand
l'on peut bien s'imaginer que l'en- elle se fut dérobée de chez son oncle :

fance de cette nouvelle vie dura quel- il l'envoya bien dans cette province
;
que temps. Il est donc hors d'appa- mais il se tint à Paris se précaution-

rence qu'on aiteu recours à notre dia- nant le mieux qu'il pouvait contre
lecticien français pour l'explicatiou les entreprises de Fulbert, jusqu'à ce
d'une au sou-
loi particulière difficile qu'il l'eut apaisé, en lui promettant
"5'erainpoint, et d'un très-petit usage. d'épouser sa nièce. Alors il fut la join-
On ne s'amuse guère à débrouiller de dre en Bretagne , comme on le voit
pareilles choses après qu'on prétend dans la relation de ses infortunes.
avoir ëclairci les plus importantes, L'Histoire abrégée d HAoïse et d'A-
ou lorsqu'on tâche de renchérir sur bélard, qu'on a imprimée depuis peu
les premiers inîerprètes. Il se passe (71), n'est point exacte sur ce point.
donc du temps avant qu'on en vienne On y suppose qu'Abelard sortit de Pa-
permis d'employer les rè-
là. S'il e'tait ris en même temps que de la maison
gles de M. Ménage, on dirait peut- du chanoine; qu'il y retourna quand
être que le Bai/ardus d'Accurse est il eut su que son écolière était grosse
;
une corruption du mot Bulgurus, Bal- et qu'il l'enlei'a de nuit afin de l'é-
,

garus Bailgarus Bailgardus Bai-


, , , pouser clandestinement, en attendant
lardus, Ceux qui copient mal les noms que ses parens lui permissent de l'épou-
propres, et ceux qui ne les pronon- ser publiquement. Il n'avait nul des-
cent pas bien, peuvent introduire peu sein de l'épouser quand il l'enleva
à peu de grands changemens. Peut- et il ne prétendit jamais que son ma-
être avait-on dit du jurisconsulte Bul- riage dût être connu dans le monde.
garus ce tpj'Accurse trompé par ces , 6°. Uéloise ne lui dit point franche-
corruptions de nom, attribua à Petrus ment quelle ne prétendait pas par ce
Bailardus. mariage prii^er l'F.glue d'un doc-
(BB) Des erreurs de M. Moréri.'] teur qui selon son espérance , y serait
,

1°. Il est faux qu'Abelard ait enseigné bientôt un illustre prélat. Rien cle sem-
la théologie à Corbeil et à Melua. 2". ,

(69) Nota ad Hist. calamit. Abœlardi-


f6-) Voyei ci-dessus , citation (Bg). (70) Abœ'.ardi Oper.,^a^. ii.
(68) Korei l'article Ibkesisi. (-i) yé la ffare^ en itigï , in-13.

TOME I.
,

66 ABÊLIENS.
blable ne se trouve dans la longue dé- direde s'unir corporellement avec
duction qii'Abélard nous a laissée des sa feinme : c'était pour lui l'ar-
raisonnemens d'Héloïse contre leur
bre de science de bien et de mal,
mariage. Voye=l'articled'HÉLoïsE(72).
^°. Il ne dit point qu'il l'ait épousée dont le fruit lui était sévèrement
pour le repos de sa conscience pour- : défendu. Ces gens-là réglaient le
quoi M. Moréri veut-il mieux savoir mariage sur le pied du paradis
les motifs de ce mariage qu'Abélard
même ne les a sus ? 8°. Il ne fallait pas terrestre où il n'y eut entre,

joindre ensemble les noces et le couvent Adam et Eve que l'union du


d'Argenteuil il y eut im milieu en-
: cœur : ou plutôt ils se réglaient
tre ces deux choses. Héloïse ne fut en- sur l'exemjîle d'Abel car ils pré- ;
voyée dans ce couvent que parce
tendaient qu'Abel avait été ma-
que son oncle la maltraitait, fâché de
ce qu'elle niait fortement son mariage. rié , mais qu'il était pourtant
9°. C'est donc une étrange fausseté mort sans avoir jamais connu de
que de dire que ce mariage ne fut pas femme. C'était de lui que leur sec-
si secret que Fulbert n'en fût averti;
car ce fut en sa présence qu'on bé-
te avait pris son nom («). Quand
nit les noces dans une église. Posl un homme et une femme étaient
paucos dies nncte secretis orationum entrés dans cette sorte de socié-
i^igiliis in quâdam ecclesid celebra-
té, ils adoptaient deux enfans,
tis, ibidem siimmo vtane, aidant ulo ejiis
atque quibusdom nosiris uel ipsius ami-
un garçon et une fille , qui suc-
cis assistentibiis , niiptiali benedictio- cédaient à leurs biens et qui ,

ne conj'œderamiir (73). io°. 11 n'est pas se mariaient sous les mêmes con-
vrai qu'Abélard ait fait leçon à un
ditions de ne faire point d'en—
grand nombre décoliers en Cham-
pagne, depuis que la mauvaise vie fans mais d'en adopter deux qui
,

des moines de Ruis l'eut contraint différassent en sexe.Ils ne man-


d'y retourner, et dans le temps que quaient pas de trouver de pau-
l'abbé Sriger fit sortir les religieuses
vres gens dans le voisinage qui
d'Argenteuil. Le père Lenfant a co-
pié quelques-unes de ces fautes (74)" leur fournissaient des enfans à
A la remarque (X).
adopter. Voilà ce que saint Au-
(72)
(73) Abaelardi Oper., pag. i6. gustin nous en apprend {b) et ;

(74) Len/ant, religieux dominicain , Hist.


générale de tous les siècles, au 21 avril. C'est comme il est presque le seul qui
un ouvrage en 6 vol. in-j2^ divise selon les
en parle, il faut croire que cette
jours de Vanne'e^ et imprime' il Paris Van 1684.
secte ne fut connue qu'en peu de
ABELIENS OU Abéloniens, sec- lieux , et qu'elle ne dura pas
te d'hérétiques qui s'était formée long-teinps. On croit qu'elle com-
à la canijîagne proche d'Hip- mença sous l'empire d'Arcadius
,

pone, et qui était déjà éteinte du et qu'elle finitsous celui de Théo-


temps de saint Augustin. Elle dose-le-Jeune. Tous ceux qui la
avait d'étranges principes, et peu coinposaient réduits enfin à un ,

propres à la faire durer (Aj. Elle seul village se réunirent à l'é- ,

ordonnait à chacun d'avoir sa glise catholique.


chacune elle ne trouvait point
;
(ni V^oyes Bocliart, Geogr. sacr-, lib. II ,
bon et ne souffrait point que cap XP'I qui croit que la fable de la con- ,

l'homme fût seul ; il fallait , se- pendant \io ans apiis la


tinence d'Ada?ti
mort d'Abel a donné lieu au nom de ces hé-
lon les statuts de l'ordre , qu'il rétiques.
eût une aide semblable à lui {b) August., deHcer., cap. LXXXriI.
;
Vide ibi Lambert. Danaeum.
mais il ne lui était pas permis de
s'appuyer sur cette aide; je veux (A) Peu propres h la faire durer.j
,

ABELLI. 67
C'était état trop violent que celui
un adoptions y
tenaient lien de généra-
de continence entre un liorcime et une tions ; et, à cause de cela on ne pou- ,

femme qui avaient d'ailleurs toutes vait pas dire des abéliens ce que Flo-
choses communes , et dont la société rus remarque touchant les premiers
e'tait censée un vrai mariage 5 c'était habitans de Rome Bes eral unius :

dis-je un état trop violent pour du-


,
œtatis, populus uirorum (4). Si d'au-
rer beaucoup nutluni uiolentum du-
; tres causes ne s'en fussent pas mêlées,
rablle. Les abe'liens n'étaient que des cette secte aurait pu durer éternelle-
encratites et des novatiens mitigés : ment Per sœculorum millia ( incre-
:

ceux-ci condamnaient hautement le clibiledictu) gens œlerna est in qud


mariage les abéliens le louaient et le
;
nemo nascitur. C'est ce
que Pline a dit
retenaient. Il est vrai que ce n'était des esséniens (5) , et ce que l'on dit
presque que de nom ils en aidaient : tous les jours des moines.
l'apparence mais ils en reniaient ta
;
(4t Florus , lib. T; cap. I.
force. Hi nonien quidem conjugii et
,

(5) Plinius, lib. r, cap. Wll.


nuptiarum retinueriint , fini aiileni et
effectuni earuni prorsùs susLulerunt ABELLI (Antoine), docteuren
(i). S'ils avaient cru que le mariage
théologie jacobin , abbé de No-
étaitun sacrement, ils avu'aient été ,

sur cet article ce que les zuingliens tre-Dame de Livri en l'Aulnoi ,


ont été sur celui de l'eucharistie ils :
confesseur de la reine mère , et
n'eussent admis que la figure et point auparavant son jjrédicateur , fit
,

du tout de réalité. Or c'est ce qui a ,

dîl contribuer à l'extinction de la


imprimer des Serinons sur les
secte. Vous trouverez, dans le dic- lamentations de Jérémie, à Paris,
tionnaire de Furetière (2), que l'an i582. Je ne fais que copier
Boire et manger, coucher ensemble la Croix du Maine et du Yerdier-
,
C'est mariage ce me semble.
,

\au-Privas; et si je ne corrige
Voilà l'idée naturelle qu'on se forme
point les fautes qu'ils peuvent
de cet état et, dans cette idée, le
5

dernier des trois attributs passe pour avoir commises , au moins pro-
le principal, et pour la diflérence spé- poserai-] e mes doutes (A). Si M.
cilique. C'est celui-là que l'on nomme Moréri en avait fait autant, peut-
la consommation du mariage sans :

être saurait-on aujourd'hui la vé-


celui-là le contrat le plus solennel , les
fiançailles, la bénédiction nuptiale, rité car rien ne jjousse davan-
;

ne passent que pour des préliminaires tage les curieux à faire part au
dont on se dégage facilement. C'est public de leurs éclaircissemens
celui-là qui serre le nœud et qui le
rend indissoluble. C'est la fin le but
que l'aveu que font les auteurs
,

et lacouronne de l'œuvre; c'est le non qu'ils ne savent pas telle ou telle


plus ultra. Il y avait donc peu d'appa- chose. C'est ce qui m'obligera à
rence que beaucoup de gens, même proposer souvent mes doutes. M.
après que la nouveauté du dogme se-
rait passée voulussent avoir le nom
Moréri avait tant d'occasions ,
,

et le lien de gens mariés et se priver ,


que je n'ai pas , de consulter ceux
de ce que le célibat avait dès lors de qui pouvaient rectifier ces sortes
plus éclatant, sans goûter les fruits et de choses , qu'il devait plus faire
les délices du mariage. Il n'a donc pas
ici que copier la Croix du Maine.
été nécessaire, quand j'ai dit que les
principes de cette secte étaient peu
propres à la faire durer que je lisse ( A) Proposerai-je mes doutes. ] Il
quelque allusion au bon mot qu'on at-
,
me paraît un peu étrange qu'un ja-
tribue à Si.^le V
cobin jouisse d'une abbaye et qu'on ,
JVon si cfiiai^a in
:

lui en donne le nom. Je ne connais


questa religione non dur ara (3). Les
,

point ôe pays en France qui s'appelle


fi) Danrciis in lib. Âugustiai de Hœres., cap. l'Aulnoi. Si l'on a voulu dire le Lao-
Lxxxrii.
(ï) Furetière, au mot Mariage.
nais c'est une autre chose
,
mais :

Ci) Confess. cathol. de Saacy , liv. I, chap. I. d'ailleurs je ne trouve aucune ab-
,
68 ABE LLY.
baye nommée Livri dans le diocèse Mediilla théologien (b), qui
a été
de Laon (i). L'abbaye de ce nom est
cause que M. Despréaux lui adon-
au diocèse de Paris. Enfin je trouve
dans l'acte par lequel l'université né l'épithète de moelleux (A) , et
de Paris prêta serment de fidélité à qui est fort éloigné des maximes
Henri IV, le 22 d'avril 1694, jy des jansénistes (B). Il
a fait aussi
trouve, dis-je entre ceux qui le si-
gnèrent , un François Abély
,

abbé
la Vie de Vincent de Pmile .,
in-
,

d'ivri, prédicateur et aumônier du stituteur et premier supérieur


roi (a). C'est à ceux qui en auront général de la congrégation de la
les occasions sous la main à vérifier mission un livre sur les Princi-
;
pas ici assemblé sur
si l'on n'aurait
une seule personne ce qui ne conve-
pes de la morale chrétienne ; un
nait qu'à plusieurs (3). autre sur les Here'sies ; un autre
Mes doutes m'ont procuré un bon sur la Tradition de l'Eglise ton--
éclaircissement , que j'insère ici. chant le culte de la sainte Vier-
« L'Aunoi , ou l'Aulnoi , est fort bien.
ge^ etc. Ce dernier ouvrage, im-
» C'est l'abbaye de Notre-Dame de Li-
« vri, en l'Aunoi , in Alneto (4) , de primé pour la seconde fois à Pa-
» l'ordre de saint Augustin , dans le ris l'an 16^5 , fit un grand plai-
,

» doyenné de Chelles diocèse de Pa- , sir aux protestans , parce qu'il


») ris. II faut supposer que, pour par-
leur fournit de bonnes armes con-
« venir à cette abbaye, Antoine Abelli
» passa de l'ordre de saint Dominique tre les convertisseurs , qui vou-
»' dans celui de saint Augutin, ce qui laient leur faire accroire que, s'il
» est une cliose fort aisée , et qui se avait quelque chose d'excessif
M pratique tous les jours. A l'égard de
y
dans cette espèce de dévotion , ce
» François Abely, abbé d'ivri, je crois
» qu'il y a faute, et que ce François, n'était que des pensées monaca-
» qui fut apparemment successeur les ou des abus que les évêques
») d'Antoine, doit être qualifié abbé de
corrigeaient journellement. Ce
» Livri, M Cet éclaircissement m'a été
communiqué par M. de la Monnaie.
même livre servit à ceux de la re-
M. l'abbé Baudrand m'a fait savoir que ligion contre celui de M. l'évé-
cette abbaye de Livri est a trois lieues que de Condom(c). En effet, M.
de Paris en allant l'ers Meaux^ dans Abelly se rendit le protecteur des
,

un petit quartier qu'on appelle l'ytul-


pensées les plus outrées concer-
nny où. il y a dix ou douze villages
,
,

et dont on ne plus les confins. Ces


sait nant dévotion envers la vierge
la
deux éclaircissemens lèvent suflisam- Marie. C'était ruiner les efforts
ment mes difficultés. de l'autre prélat , et les vues de
(i) VoyeT, TEtat de France, U imprimé en ceux qui ont publié ou approuvé
t68o tom. // pag. 3ii, 3 12.
,
les Avis salutaires de la sainte
,

(7) Voyei /'Flisl. du collège de Navarre, par


M. de Launoi, pag. 372. Vierge à ses dévots indiscrets.
Cela n'arrive que trop aux bibliographes.
(3)
M. Abelly était docteur en théo-
(4)'Claud.Robertus, in Nomeuclaturà abba-
tiarum Galli.%. logie de la faculté de Paris ; il fut
évêque de Rhodez lorsque M.fait
ABELLY (Louis), ëvéque et de Péréfixe précepteur du roi
,
comte de Rhodez , mort le 4 oc- monta à l'archevêché de Paris ,
, et
tobre 1691 , âgé de 88 ans {a) , il résigna son
évêché à un autre
était de Paris , et il y fut curé de
lorsque son grand âge ne lui jier-
Saint-Josse. II a composé di-
(6) La première édition est de Paris en
vers ouvrages , et entre autres ,

l65i. On jr en fil une sixième en deux vo-


un Traité de Théologie , intitulé lumes in- 12 l'an 1659. ,

.
f) Intitule' Exposition de la Doctrine de
(a) Mercure gcilant d'octobre 1691. l'Eglise catliolique.
,

ABELLY. 69
uiît plus d'en exercer les fonc— M. Abelly fût entièrement perdue et ,

q"e presque aucun auteur qui en eût


lions et se relira dans la maison
,

J c + T Tl ^A.rA\r.A^r.^ P^""'*^ °^ subsistât, et quil n'y eût


de Samt-Lazare. Il révéla dans p^int de note à la marge ciu Lutrïn vis-
la \ ie de M. ^ incent un secret à-vis de moelleux quels raouvemens ,

qui plut à beaucoup de monde (C). les critiques ne se donneraient-ils


point pour trouver la raison de cette
(A) L'epithète de moelleux. Ne ]
e'pithète et combien de faussetés no
!

faisons pas difBculte' de remonter un diraient-ils pas (3j ! Je m'imagine que


peu haut, en rapportant ce passa- quelqu'un mal satisfait des conjectu-
,

ge ; car , outre qu'il ne faut pas crain- res de tous ses prédécesseurs dirait en- ,

dre que la longueur de la citation de- fia que l'écris ain Abelly avait été ca-
plaise à personne , elle servira à con- ractérisé par cette épithète à cause
firmer ce que je dois dire dans la re- qu'on avait voulu faire allusion aux
marque suivante. offrandes d Abel, qui ne furent point
s^ciies comme celles de Gain mais un ,
Alain tousse et se lève, Alain (i), ce sa-
vant homme véritable sacrifice de bêtes. Il citerait
Qui de Banni vingljoir a lu toute la Somme, sur cela le sacrum pingiie dubo nec ,

Qui possède /ébellr, qui sait tout Baconis , macrum sacriftcabo il dirait que les :

Et même entend, dit-on, le latin d'A Kempis.


parties des victimes n'étaient pastou-
N'en doutez point leur dit ce savant cano-
,

nitte. tes également considérables et que ,

Ce coup part ,
j'en suis sûr, d'une mainjan- la graisse , sous laquelle il faut aussi
se'niste.
comprendre la moelle , était d'un usa-
Mes yeux en sont témoins : j'ai vu moi-même
hier ge singulier. Plus il serait docte, plus
Entier chez le prélat le chapelain Garnier. le verrait-on courir d'extravagance en
Arnaud, cet hérétique ardent à nous détruire.
extravagance , et accumuler des chi-
Par ce ministre adroit tente de le séduire:
Sans doute il aura ludans son saint Augustin mères. En cet endroit, comme en plu-
Qu'autre fuis saint Louis érigea ce lutrin. sieurs autres , verrait-on vérifiée l'es-
Il va nous inonder des torrens de sa plume : pérance dont il est parlé dans la IX®.
Il faut , pour lui répondre , ouvrir plus d'un
volume. satire de M. Boileau :

Consultons sur ce point quelque auteur signalé; El déjà vouf croyez, dans vos rimes obscures,
r^oruns si des lutrins Bauni n'a point parlé.
_ ,. .1.
Aux Saumatses futurs préparer des tortures,
iLludiom enfin il en est temps encore ;
,

Et pour ce grand projet, tantôt, des que


t aurore
Quelqu'un
", a dit qu'il
^ Serait à souhai
. y*. , ,. . ,

Kaltumera le jour dans l'onde enseveli. ter qu'on fît déjà un bon commentaire
Que chacun prenne en main le moelleux sur les satires de cet auteur (4j*- H est
Abellt (2). certain que celte sorte d'écrits devien-
Quand ces vers ne contiendraient autre nent bientôt obscurs, quanta un grand
chose que l'accolade de Bauni et d'A- nombre de choses. Le Catholicon d'Es-
belly, ils signifieraient assez l'anti-jan- pagne et la Confession catholique de ,

sénisme de ce dernier mais ils con- Sancy en sont une preuve. Le public
;
,

tiennent plusieurs autres traits qui est fort redevable à l'auteur, qui pu-
vont au même but et qui portent blia des remarques sur la dernière de
,

coup. L'auteur a mis en marge une ces deux satires Van 1693, et sur la pi'e-
note qui explique la raison ^Vépi- mière l'an 1696. Il est curieux et péné-
thète, et il a bien fait. Quand je songe trant et fort propre pour ce travail. ,

aux conjectures que formeraient les (B) Des maximes des jansénistes.']
critiques si la langue française avait Un de ces messieurs s'est plaint fort
un jour le destin qu'a eu la langue la-
(3) Conférez ce que dit le P. Bouliours dans
tine , et que les œuvres de 51. Des- te IV^, dialogue de la Manière de bien penser,
préaux se conservassent je me repré- pag. 399, au sujet de ces paroles de M. Des-
,

sente bien des chimères. Car sup- préaux, profès dans l'ordre des Coteaux.
,

(4) Nouvelles de la Rép. des leUres oct.


posons que la MeduLla theologica de ,

art. V. 1.684,
(i) Ondésigne l'ahbé Auhert, chanoine de * dessein a été exécnté depuis la mort de
[Ce
la Sainte-Chapelle, fameux nioUniste , frère de M. Barle par M. Brossète. Il publia en 1715
ce M. Auberi qui a fait l'histoire du cardinal à Genève les OEuvres de De^préaus avec des
Mazarin. Suite du Ménagiana, pag.^, édit. éclaircissemens historiques donnés par l'auteur
de Hollande. même, 2 vol. in-^. On les a réimprimées a Am-
(2) OEuvrei de Despiéaux Latrin , chant IV, , .sterdam en 1718, in-ful. et in-4 ; en 1722 a la
169, elc. Haye, en 4 t'ai, in-12. Addit. de ledit. d'A'iul.l
70 ABERDON,
amèrement de ce que M. de la Ber- de liaison avec l'abbé de St.-Cyran ,
chèie, archevêque d'Aix, avait ordon- après lui avoir entendu dire que le
lië au directeur de son séminaire de concile de Trente n'était qu'une ca-
suwre Abelly, et de ne plus enseigner bale et une assemblée des scolasti-
,

la Théologie morale (5) de Grenoble. ques et du pape ('])


Il dit qu^on trouve dans la MeduUa Un hommequi serait persuadé de cela
théologien de M. Abelly trois raëc.hans ne pourrait pasêtre catholique romain.
principes, dont le i". reiwerse In plus
(7) Alielly, T^ie de Vincent de
Paule, liv. II,
certaine règle de la bonne conscience, rliap. XII. ^''ovez les Préjugés légitimes contre
reconnue par les païens mêmes, qui le jansénisme, pag. i34-
n'ont pas cru qu'il fut permis de faire
une chose dont Von doute si elle est ABERDON , ville épiscopale
juste ou injuste. Le 2°. réduit à rien le cVEcosse sous l'archevêque de
,
plus grand de tous les comviandemens,
Saint— André , avec une acadé-
qui est celui qui nous oblige d'aimer
Dieu plus que toutes choses. Le S*^. est mie. Les Ecossais la noniiueiit
directement opposé au soin qu'a pris Aberdeen. On peut la considérer
M. le cardinal G rimaidi de faire ob- comme divisée en deux; car il y
server les règles de saint Charles dans
le sacrement de pénitence en mar- ,
a Aberdon , à l'eniboucliure de
quant un grand nombre de cas dans la Doue , et Aberdon à l'embou-
lesquels les confesseurs doii'cnt ou chure de la Dée. La première se
rejuser ou différer l'absolution. On
nomme la vieille Aberdon Old- ,
accuse donc M. ÀbelIy d'enseigner ,
1°, que l'on peut suii're une opinion
Aherdeen et l'autre la nouvelle ,

moins probable et ?noins sure en fai- Aberdon New-Aberdeen. Elles


,

sant ce qui est péché selon l'opinion ne sont éloignées l'une de l'autre
contraire qui nous paraît plus proba-
,
que de mille pas. Le siège de l'évé-
ble ; 1°. qu'il n'est point certain que
le précepte d'aimer Dieu plus que tou-
ché et l'académie sont à la vieille

tes choses oblige jamais par lui-même, Aberdon l'autre est plus riche
:

mais seulement par accident ; 3". et plus marchande. L'académie


cju'on peut sans scrupule absoudre
fut créée l'an 1 480 l'évèché y ;
toujours ceux dont la vie est une con-
tinuelle vicissitude de conjéssions et de
est depuis l'an 11 00 : il y fut
crimes. Voyez VAuisnux réuérendspè- transféré de Murtlac comme ,

res jésuites d' A


ix en Provence sur un ,
nous l'apprend Hector Boéthius,
itnprimé qui a pour titre , « Ballet
historien écossais {a). Cette ville
M dansé à la réception de monseigneur
)) i'archeiéque d'Aix. » On publia cet
se nomme
en latin indifférem-
avis Tan 1687, in-î2. ment Aberdonia, Aberdonium et
Il est aisé de connaître qu'il s'agit Aberdona. M. Moréri a voulu
du livre de M. Abelly dans cet endroit raffiner sur cet article (A), et
du Ménagiana. « Comme on parlait
n'y a ms trop réussi.
») de moelle d'A..., M, l'abbé le
la
» Camus à présent cardinal dit la
, , : (a) Apud Baudranil , Lexici geograpli.
i> lu/ie était en décours quand il fit
n cela (6). » Nouvelle preuve du mé-
pris des jansénistes pour cet ouvrage.
(A) M.
Moréri a voulu rajfflner sur
cet article.] Il trouve mau\ais que
(C) Vn secret qui plut a beaucoup
quelques-uns aient dit qu'Aberdonne
de monde.] lia fait savoir au public
ou Aberdoen, Aberdonia, Aberdona,
que M. Vincent ne voulut plus avoir
ou Devana, est une ville. // n'y a point
de ville, poursuit-il, qui porte ces noms
(5) Composée par^. Genct, quele cardinal
Grimaldi, prédécesseur de M. de la Berchire ,
en toute V Ecosse ; mais il y a deux
avait fait venir dans son séminaire pour r en- villes , flont l'une est nommée IVeiv-
seigner lui -même sa Morale, et qui a depuis été
Aberdon Old- Aberdon et
, et l'autre :
fait évéque de liaison.
si ce nom se rencontre ce n'est qu'en ,
(C) Ménagiana, pag. 65 de la i". édit. de
Ttollande. quelques livres ou cartes peu exactes.
ABYDE.
II serait inutile de prouver, que non- a été capable de s'imaginer cela,
seulement dans le lansjage ordinaire ,
il est cligne de toutes les duretés
on ne se sert point de la distinction
que \ossius lui a dites [b) car
de vieille et de nouvelle Aberdon i,
;

mais aussi qu'on s'en sert tris-peu que peut-on débiter de plus fa-
dausles livres. Car où sont les auteurs buleux que la conquête de JéfU—
qui ont dit l'e^êchcJ^ ^^'^ salem par Charlemaffue
^'' T'^jf o ?
don, l académie de la i'ieiHe Aberdonr
-i

Où sont les historiens t(ui ne se con- (6) O hominem


valdè simplicem ac propi .

tentent pas de dire ylheidon tout dixerim insipienlem , qui vanis adeà ac sUil-
iis commenlis habuerit Jidem! Vossius de
court, quand ils veulent designer cet-
Histor. lat. pag. 3oo.
te ville episcopale? M. Morëri ne se
souvenait pas apparemment de sa cri-
tique lorsque dans l'article d'Ecosse
,
ABYDE, ville d'Égvpte. Etien-
ne de Byzance veut qu'elle ait été
il disait, Saint- André a une iinii^ersi-
îc et Akerdonne l'autre car, autre- une colonie de Milésiens (A)
, ;
à
,
ment, il aurait dû dire Old- Aberdon. lacpielle un liomrae nommé Aby-

ABGILLUS ( Jean- ) , fils d'un de ait donné son nom. Straboa


roi des Frisons, mena une vie si en parle comme d'une ville fort
exemplaire qu'on le surnomma délabrée; mais il dit qu'il parais-
,

le Prêtre. Il accompagna Cliarle- sait qu'elle avait été autrefois fort

mague à l'expédition de grande et la première du pays


la Pales-
tine, et , aulieude s'en retourner après Thèbes {a). Le fameux roi
en Europe comnae fit Char-
,
Memnon y demeura et y fit bâ-
lemagne après la prise de Jéru- tir un magnifique palais {b). Le
salem, il poussa jusqu'aux Indes, temple et le sépulcre d'Osiris ser-

y fitde vastes conquêtes , et y vaient d'ungrand ornement à


fonda l'empiredes Abyssins, qui, ex-
cette ville, et la rendaient
de son nom , fut nommé Vem- trêmement recommandable. Les
jj ire du Préire Jean. Waicom^oié
pl"' grandsds seigneurs d'hgvqjte
d'Eî
deux histoires , dont l'une coia affectaient d'y être enterrés , afin
prend le voyage de Charlemagne d'avoir leur tombeau au même
à la Terre-Sainte et l'expédition ,
lieu qu'Osiris avait le sien (c).

qu'il fit lui-même aux Indes. Ce L'oracle du dieu Bésa n'était pas
dernier ouvrage contient la des- un ornement médiocre à ce lieu-
cription du pays et celle des dif- là. Tous les peuples du voisina-

férens peuples qui l'habitent. Si ge avaient beaucoup de dévotion


Sutfridus Pétri [a] a été capable de pour cette divinité, qui répondait
s'imaginer que ces histoires soient par écrit cjuand on n'avait pas la
autre chose qu'un de ces médians commodité de la consulter en
romans qu'on faisait dans les siè- personne. Il suffisait alors de lui

cles d'ignorance et oii l'on fai— ,


écrire ce que l'on avait à deman-
sait entrer Charlemagne avec au der [dj. Cet oracle subsistait en-
tant de hardiesse que si c'eût été core sous l'empire de Constan-
un héros imaginaire un Palme- , («) Strabo, Ub. XVII, pag. 55g, édit.

rin d'Oliveun -Huon de Bour-


,
' -, .
'^^,]^^Z' .« -
{b\ Memnoms regiaet Osins templo
, / •
./^
mcly-
, ,

deaux, un Geotiroi a la Grand tum. Plia., Ub. r, cap. /Y, Sirabo, Ub.
Dent; si , dis-ie , Suffridus Pétri xrii pag. 559
' ' •• (c) Plutarcli. de Iside et Osir., pag. 3di).

(a) // parle de cet auteur et de ses deux Amrnian. Marcel.,


{d^ lib. XIX, eap. XII,
livres dans son traite' de Scriplor. Frisiae. p^g- 22" 228. ,
72 ABY DE
tius de Constantin-le-Grand,
, fils Voici comment. Ceux qui consultaient
et causa bien des désordres (B), par écrit quelque-
l'oracle laissaient
fois leur lettredans le temple, après
Abyde ySoo pas du Nil ,
était à
avoir reçu la réponse (2). Il y eut clés
vers l'occident (e) mais on y ; gens malins c|ui envoyèrent quel-
avait conduit un canal qui lui ques-unes de ces lettres i'iConstantiusj
et comme c'était un petit génie soup-
portait les eaux de cette rivière ,

çonneux crédule, vétilleux, il se mit


,

(/). Elle était au-dessous de dans une colère horrible. Qui ut erat
Diospolis et de Tentjris (g) , et angusti pectoris , obsurdescens in aliis
au-dessus de Ptolémaïde (h) qui etiam nimiiini seris, in hoc titulo imd ,
,
c/uod aiunt , auriculâ mollior, et sus-
était la plus grande ville de la
picàx , et minutus acrijelle conca- ,

Thébaïde et aussi grande que


, luit (3). Tout aussitôt il expédia une
Memphis. Les habitans d' Abyde commission pour faire faire le procès
avaient en abomination le bruit aux coupables ; car on prétendait que
plusieurs personnes avaient consulté
des trompettes (C). On a fort
ce dieu touchant la vie de l'empereur,
parlé des épines qui croissaient et touchant le nom de la personne qui
dans leur territoire (D) ; on a dit régnerait après lui. Le chef de la com-
qu'elles étaient toujours chargées mission homme violent et avare ,
,

trouva le moyen d'envelopper qui il


de fleurs qui avaient la figure
voulut dans ces procès. Ce fut l'occa-
d'une couronne. On croit qu'au- sion d'une infinité de violences, com-
jourd'hui elle s'appelle Abulich. me vous pourrez le lire dans Ammien
Jean Léon ne dit point ce que M. Marcel lin.
Moréri lui impute, qu'elle soit au (C) En abomination le bruit des
trompettes } C'est Elien qui nous l'ap-
lieu où le patriarche Joseph fut
prend, pourvu que nous le corrigions
enseveli (E). Il y avait sur la côte selon la conjecture de Berkélius (4).
de l'Hellespont une ville nom-
mée Abyde dont je ne parlerai ,
fLcti'hSuSoç rt AiyuTTTÎu. { il y a dans
les éditions d' Elien "aCu ti AiyvTTTÎct
pas pour le coup quoique le dic- )
,
««,( AÔKiev Busiritœ et Abidus
TToKtç. ,

tionnaire de Moi-éri ait besoin jE^yptia et Lycopolis tubce sonitum


, ,

d'être rectifié à son sujet. deièstanlur (5). Strabon confirme cet-


te conjecture lorsqu'il dit qu'il était
(e) Plin. , lib. V, cap. TX. défendu d'employer aucune musique,
(f) Sfraho, lib. XVn, pag, 570. soit de voix, soit d'instrumens aux ,

{g\ Plin., lib. r, cap. IX. préludes des sacrifices que l'on offrait
{Il) Strabo, lib. XFIf, pag. 579.
à Osiris dans son temple d'Abyde (6).
(A) Une colonie de Miles iens. (D) Des épines qui croissaient dans
] Ce-
la n'estguère apparent. J]avoue qu'ils leur territoire.'] Athénée nous apprend
e'tablirentdes colonies en Egypte, mais ceci (7) mais il fautoter de son livre
:

ce fut proche des embouchures du Nil le raoi" AÇuX(i\ , ety substituer'ACj/J'ov.


:

leur puissance consistait alors en for- C'est »me conjecture très-raisonnable


ces de mer et leur commerce ne de-
,
du même Berkélius (8). Voici le fait
mandait pas qu'ils eussent un poste si dont parle Athénée. Les épines qui
éloigne' de la côte que l'était Abyde. croissaient autour du temple de Tin-
De plus, ils ne s'établirent en Egypte dium passaient pour être toujours
qu'au temps de Cyaxare, roi des Mè- fleuries 5 mais , selon la remarque
des (i). Or Abyde était considérable
(2)Amm. Marcel!., libro XIX, cap. XII,
avant ce temps là puisque Memnon ,
pa^. ^1-j , 228.
y avait non-seulement établi sa cour, (3) Aram. Marcell. ad ann. 35ç).
mais encore y avait fait bâtir un pa- (4) Berkel. in Stephan. de Urbibus, pag. 14.
lais magnifique. (.';) yElian. de Anim., Z,6. X, cap. XXriII.

(B) Et causa bien des désordres.'] (6) Strabo , Ub. Xri, pag. 56o.
(7) Atben.-eiis, Ub. XV, cap. VII.
(0 Strabo , lib. XFI, pag. 55i. (8) Berkélius, in Steph. de Urbibas, pag. \\-
,,

AR m E LECH. j3
d'Hellanicus (9), cela venaif de ce était le mari deSara ;raais, comme
qu'il se faisait des assemblées en ce
il craignit qu'on ne le tuât il se
lieu-là, pendant lesquelles on jetait
,

sur ces e'[)ines diverses sortes de bou- mit à dire qu'elle était sa sœur ,

quets. Démétrius rapporte qu'il crois- et il la pria de dire qu'il était son
sait de cette espèce d'épines autour frère (6). C'était la seconde fois
dAbyde et qu'il courait une fable qu'il employait cet
,

expédient (c) ,
parmi les Egyptiens, que les soldats
d'Ethiopie que Tithon envoyait au qui
sans doute ne mérite point
roi Priam ayant ouï dire que IMem- les éloges que saint Chrysostôme
,

non avait ëte tué jetèrent auprès lui a donnés (A). On croit que
,
le
d'Abyde leur couronne de fleurs sur
roi des Philistins fut frappé d'une
ces épines d'où il arriva que les fleurs
,

qu'elles produisirent ressemblèrent à maladie


qui le rendit impuissant
des couronnes (10). (B) , et , quoi qu'il en soit , il est
(E) Le patriarche Joseph fut ense- sûr que la providence de
Dieu
veli.'] M. Àloréri cite Jean Léon, p. 8.
empêcha ne satisfit la pas-
qu'il
On croit d'abord qu'il indique lu hui-
tième page ; mais on ne trouve qu'au sion qu'il avait conçue pour Sa-
livre 8 ce qu'il faut chercher. Or, voi- ra. Il fut averti en songe qu'elle
ci ce qu'on y trouve que c'est une :
était mariée avec un prophète
erreur de croire ()ue la ville nomme'e
et qu'il mourrait s'il ne la rendait
Mesre Hatichies[ ceWt oh demeuraient
les rois d'Egypte du temps de Joseph à son mari. Il ne manqua pas de
et de Moïse. 11 réfute cette pensée, par rendre ni de lui faire des
la lui ,

la raison que ces anciens rois demeu-


reproches de leurs mensonges.
raient au coté occidental du Nil^ ce
qu'il prouve par deux raisons 1°. par
Abraham s'excusa, entre autres
:

la situation de la ville que l'Ecriture raisons , sur ce qu'en effet il était


dit que les Juifs bâtirent à Pharao
; frère de Sara né du même père ,

3°. par la situation d'un édifice fort


quoiqu'ils n'eussent pas la même
ancien qu'on dit être la sépulture de
Joseph. Quelques pages après mère. C'est ainsi que l'Ecriture
il re- ,

marque que la ville où est cette sépul- M. Moréri substi-


le fait parler.
ture est un bras du Nil et s'appelle , tue mal à propos aux paroles du
aujourd'hui El Fiium. Je n'ai point texte sacré celles de Josephe
qui ,
trouvé qu'il dise rien de notre Abyde.
suppose faussement qu'Abraham
(9) In -ï^gyptiacis apud Athen., lib. XV, dit
cap. VII.
,
que Sara était fille de son
(10) Demetrius in Ubri! Rerum ^gvptiaca- frère (d). Il a suivi le même au-
Tum, apud Athenaeum, Ub. XV, cap. VII.
teur sur un fait dont l'Écriture
ABIMELECH roi de Guérar, ne dit pas un mot savoir sur
,
; ,

au pays des Philistins , était con- une prétendue alliance contrac-


temporain d'Abraliam. Ce pa- tée entre Abimelech et Abra-
triarche s'étant retiré avec sa fa- ham lors de la restitution de Sa-
mille au pays de Guérar, sa fem- ra. L'Ecriture s'est contentée de
me Sara, tout âgée qu'elle était dire qu' Abimelech fit de grands
de quatre-vingt-dix ans (a), ne s'y présens à ce patriarche, et lui of-
trouva pas en sûreté elle fut enle- frit la permission de séjourner
:

vée par Abmelech, qui la trouva oii il voudrait dans ses états. Il
assez belle pour en vouloir faire sa est vrai qu'il y eut entre eux une
femme. Abraham aurait évité cet alliance; mais elle ne fut faite
accident s'il avait déclaré qu'il
(b) Genèse , chap. XX.
(a) Voyez les dernières remarques de l'ar- (c) Il l'avait employé', Genèse, chap. XX.
itr.leS}Lh.\. (d) Joseph. Anliij., Itb. I cap. XI.
,
,

74 ABIMELECH.
que quelques années après (e). Ce Rébecca. Cette remontrance et
fut le traité de Beerscebah. Jo— cette ordonnance ne pouvaient
seplie comme s'il avait eu des venir que d'un bon cœur, et mé-
,

niémoires préférables à ceux de ritaient bien que nos modernes


Moïse (C), ose mettre ce traité prissent mieux garde à leurs pa—
avant la naissance d'Isaac , au rôles {/) La prospéi'ité d'Jsaac
lieu que l'Ecriture le met après changea cette bonne amitié d'A-
la rejection d'Jsmaël, qui n'ad— bimeîech. On lui déclara fran—
vint qu'après qu'Isaac eut été se- chement , lorsqu'on eut vu qu'il
vré. M. Moréri a suivi le même acquérait de grandes richesses ,

guide lorsqu'il assure que le mé- qu'il eût à se retirer. Il obéit , et


me Abimelech témoigna beau- n'ayant pas laissé de prospérer
coup de bonne volonté à Isaac ,
malgré les traverses qu'on
lui
qui s'était retiré au pays de Gué- suscita en divers endroits, à l'oc-
rar. Il ne serait pas impossible casion des puits qu'il faisait fai—
que ce fût le même Abimelech ;
re , il se vit recherché d'alliance
mais il y a beaucoup d'apparence par Abimelech , à quoi il répon-
que c'était le successeur de celui dit favorablement {g).
qui avait enlevé Sara(D). Ce qu'il (/) Tursellin, dans son Epit. Hist., pag.
'O' '^'< «^^ Franekeren 16^2 s'est fort
y a de bien certain c'est qu'une
{••'..
lamine étant survenue
T
ISaaC se
,

,
abuse dans ces paroles \s3acusGer3v3i aa-
:

nonœ causa pmfeclus, Dei numine conjugis


retira en Guérar , où régnait pudicitiam aU Abimelecbi régis iibidine in-

alors un Abimelech. La beauté de ''"^'"'t-^"^^'^» chapUre xxri de la Ge-


Rébecca fut cause que son mari nèse.

se servit des mêmes ruses qu'A- (-^) ^^, ^-;^„^, ^„^ ^^-^^^ ^/,^^„_
braham avait employées à cause siomelui a donnés.'] Nous toucherons
de la beauté de Sara. Isaac ayant en un antre lieu (1) ce qu'il y a
peur qu'on ne le tuât, si l'on ve- de bl.lraable dans cette dissimulation
* •. , VI CK • 1 . I
- d Abraham. Chacun lueera ce au il
naît a savoir qu il fut le mari de ,„i p,^;,.^ ,^„. ,^, .p^hute Le péril que
la belle Rébecca, la fit passer pour l'honneur de Sara avait essuyé la pre-
sa sœur. Abimelech découvrit à mière fois semble d'abord devoir ren-
'^'"^ «"«i"^ excusable la reiféralion du
un certain ,'ieu (E) qu'il aperçut-
^ ' 1 mensonge
i.
mais a autre cote, ne : ,
entre eux deux, en regardant par semble-t-il pas que l'on est plus excu-
sa fenêtre , que ce n'était point sable lorsqu'on emploie un remède
cela, et ayant fait venir Isaac : qui a réussi que lorsqu'on l'essaie?
Quoi que ce soit, \xAà\i-[\, c'est «» "^t-^' P?^ ^or^ de doute que le
^ / ,
premier essai avait eu tout le succès
votrefemme; comment donc avez- .^'Abraham avait espère ? Non-seule-
vous dit C'est , sœur ? ma
Quelle ment on ne lui ôta point la vie, mais
conduite avez-VOUS tenue ici ! Peu on le combla de présens et on lui ren- ,

dit sa femme sansqu'onl'eftt touchée


s'en est fallu que quelqu'un du
:

, -^ , /, .
-' chose a quoi peut-être il ne s était pas
-'

peuple naît couche avec votre attendu. Je me scvs A\m peut-êu-e


femme (F), et que vous najez car je n'oserais écrire ce que saint
attiré sur nous un crime. En mê- Chrysostôme osa prêcher f'^ous sa- :

que rien
me temps il défendit , sous peine «^^^ disait-il à ses auditeurs , ,

- 1 , } p ne cnasrine plus un mari que de \>oir


. .

de mort, a tous ses sujets de tai- ^^ femme soupçonnée dm-oir été au


re la moindre injure à Isaac ni à poui'oir d'un autre et néanmoins ;

(e) Genèse, chap. XXI w.


,
3l , 32. (0 Dnn.t les remarques de l'article Siha.
ABIMELECH. 75
ce juste emploie tous ses cjj'orts
- ci a obéir ? Qui pourrait jamais assez
pour que l acte d adultère s' accomplisse louer Sar-a Je ce qu'après une telle
(2). On devait attendre, après cela , continence, et à soiidge elle a voulu ,

que le prédicateur censurât le patriar- s'exposer a l'adultère , et livrer son


che mais au contraire on voit (ju'il
; , , corps a des barbares afin de sauifer ,

donne de très-grands éloges à sou cou- la vie de son époux (5j ? Je ne pense
rage et à sa prudence à son courage, : pas qu'aujourdliui un prédicateur
qui lui avait fait surmonter les mou- osât nsanier de la sorte une matière
vemens de la jalousie jusqu'à lui per- ,
aussi délicate que celle là il donne- :

mettre de conseiller de telles choses 5


rait trop de prise à la raillerie des
et à sa prudence qui lui av;iit mon- ,
profanes ; et je doute fort que les ha-
tré cet expédient si sAr de se tirer des bitans d'Àntioche, naturellement raé-
embarras et des péiils qui l'environ- disans eussent pu ouïr un tel sermon
,

naient. Saint Chrysostôme n'oublia sans s'émanciper à des réflexions ma-


pas de représenter vivement la terri- lignes. Saint Ambroise n'a pas donne
ble force de la jalousie afin de faire , de moindres éloges à la charité de Sa-
comprendre le grandcourage qui avait ra (6) et nous verrons, dans l'article
,

surmonté cette passion; mais, d'autre AciNDYNus {St-ptimius) , que saint Au-
côté, prudence d'Abraham,
il releva la gustin a été presque dans une sem-
en disant que il vit que Sara
, comme blable illusion. C'est une chose étran-
était trop belle pour pouvoir échap- ge que ces grandes lumières de l'E-
per à Tincontinence des Egyptiens ,
glise , avec toute leur vertu et tout
soit qu'elle se dît femme , soit qu'elle leur zèle , aient ignoré qu'il n'est pas
se dît sœur, il voulut qu'elle se dît permis de sauver sa vie ni celle d'un
sœur, parce qu'il espérait de sauver sa autre par un crime.
vie par ce moyen. Voyez, s'écrie saint (B) D'une maladie qui le rendit im-
Chrysostôme avec quelle prudence ce puissant.'] Pour éteinare l'ardeur de
,

juste imagine un bon moyen de rendre sa convoitise, Dieu lui envoya une
vaines toutes les embdches des Egyp- grande maladie qui mit à bout toute
tiens. Puis il l'excuse d'avoir consenti la science des médecins. Dieu l'aver-
à l'adultère de sa femme, sur ce que tit en songe de ne rien faire à la fem-
la mort qui n'avait pas été encore me de cet étranger. Abiraelech , se
,

dépouillée de sa tyrannie insjiirait trouvant un peu mieux, quelque temps ,

alors beaucoup de frayeur. 'Oti oi^roi après déclara à ses amis d'où venait
>iv x.a.TcLKuhuc-a. T'jZ B'ctvâ.'TOi/ yi Ttypotvvî?, sa maladie, et rendit Sara à Abraham.
(Tlst TOt/TO ICStI T« /Um^iict TMÇ yi/ta.ix.<ic Voilà comment Josephe conte la chose
apecrsti >cotva>v»^a.i (Ti'xstioç xstijUovovof^/ (7) peu soigneux, à son ordinaire,
,

VTHCiTA^U.S^a.t Tû) f/.^l/lâj iiç TMV T/IÇ yU- de se conformer aux narrations de
VùLIKOÇ llCçiV hu. TOV S-iviiTOV «Tisttf I/'),»! (3) : Moïse ou plutôt assez hardi pour le
,

Quia nondiim morlis erat soluta ty- démentir. Car Moïse ne dit - il pas
rannis , propiereh in adulterium uxo- cju'Abimelech après le songe se leva, ,

ris consentit justus , et quasi servit de grand matin et appela tous ses ,

adu/terio in mulieris contumeliam ut serviteurs afin de leur communiquer


,

mortem ejfugiat. Après cet éloge du ce qu'il avait appris en dormant (8) ?
mari il passe aux louanges de la fera-
, Aurait-il pu faire cela s'il avait été ,

me, et dit qu'elle accepta de bon cœur abandonné des médecins ? Josephe
la proposition , et qu'elle fit tout ce sentait bi<'a la difficulté; mais, pour
qu il fallait pour bien jouer cette co- l'ôter il suppose hardiment
, contre ,

médie (4- Là -dessus il exhorte les que ce prince


l'autorité de l'Ecriture ,

femmes à imiter celle-là, et il s'écrie : ne communiqua son songe à ses amis


Qui n'admirerait celte grande facilité
«Tiç yUêTît Toira.i/T(iv, x.a.1 sv iiKmia. Toisiô-
(2) 'Oy.iV TOI tTi'xîtioç ica.'i a-TOi/Ji^îi Kx) TM ÙtTSC T0£/ TOV élKeLlOV Sia.!rûSTa.l, CTOV SIC
rrivra. ttoiÙ, aç-i «iç s'fyov tjiv /noiXiîity
TJiv oiKua.v "jvœ^iiv x-sit ê/c^.oi/;êi'av 'eitu-
8xfi)V(ti. Clirysost. Ilomil. XXXII in Gènes. T«V i^fJctXiV, KSLI (rUVr^Ufictç »vî(r^__(TO -Ici^-
(3> Chrysost. Homil. XXXII in Gènes. é'stf(;c«ç. Iii. ib.

(4) nivTO. TTClit â'Çi T3 écXUX >.a.^i7v. (G) Ambr. de Abrali., lib. I , cap. II,
Oinnia facit ita ul fabula eljiclio illa laleant. Joseph. Antiq., lib. I cap. XI.
,

f')
8) Genèse . chap. XX, i-. 8.
76 ABIMELECH.
que quand maladie fut un peu pas-
sa n'est pas hors d'apparence que Dieu
sée quelque temps après le song;e. Il
, ait envoyé une pareille affliction à la
y en a qui croient qii'Abimelech ne famille d'Abimelech pour um- bonne ,

fut point incommodé en sa personne, et sainte fin qui était de conserver


,

mais seulement en la personne de ses la pudicitéde Sara


et de faire paraî- ,

femmes (g i
et que, quand TÉiriture tre très-certainement qu'elle n'avait
rapporte que Dieu le guérit cela ne , reçu aucune atteinte dans cette mai-
signifie sinon qu'il leva le scellé qui
, son. Il croit donc que tous les domes-
avait été apposé chez lui sur toute ma- tiques d'Abimelecii furent frappés du
trice lo). Je ne me ferais pas fort tirer
'
mal de stérilité les hommes par :
,

Toreilie pour approuver cette explica- une impuissance semblable à celle qui
tion car je ne vois aucune trace de
-y vient des sortilèges les femmes, par ;

maladie pour Abimelech dans tout le une entière fermeture des portes de la
chapitre XX de la Genèse, hormis dans vie ou j)ar un rétrécissement qui les ,

ces paroles du verset 17 Dieu guérit rendît inhabiles à concevoir. En i^ot-


:

abimelech sa Jeninia et ses servantes ; Ih trop de la riioitié dira-t-on ; et il


, ,

puis enfantèrent. Mais comme le verset suffisait aux desseins de Dieu que les
suivant ne fait mention que de l'in- hommes fussent malécifiés mais il •'

commodité de ces femmes, il est assez faut répondre cpie la clôture des par-
probable ((ue c'était en ela que con- ties féminines étant un fait dont Moï-
<

sistait tout le mal que Dieu a\ ait en- se parle nommément il n'y a pas ,

voyé à Abimelech. Je donne ailleurs moyen de le renvoyer comme super-


(i r) la réponse à la question que l'on flu. Voici deux explications de ce
me peut faire Pourquoi ce prince , fait qui n'aplanissent pas entière-
:

s'il se portait bien, ne satisfit pas la ment le chemin. Les uns veulent que
passion qui lui fit enlever Sara ? Je ne Moïse ait voulu dire que la femme et
m'étonne pas des rêveries que les Juifs les servantes d'Abimelech ne purent
ont débitées sur cette aventure je pas accoucher quand le terme fut ve-
]

m'étonnerais beaucoup plus de leur nu elles eurent bien des tranchées et :

conduite , s'ils n'avaient pas forgé bien des douleurs mais ce fut cçmme ;

cent chimères concernant notre Abi- au temps dont parle le prophète Esaie ,
melech. ils disent que tous les con- f^enerunt filii usque ad os tiiatricis ,
duits du corps furent bouchés dans sa et ^>is non est ad partant (i5;. Les au-
maison, tant aux hommes qu'aux bê- tres disent qu'il a voulu dire qu'el-
tes , tant aux mâles qu'aux femelles les ne concevaient plus. La première
;

de soi'te que rien ne pouvait y entrer, explication ne peut s'accorder avec la


ni en sortir (12). On ne pouvait plus Genèse , à moins qu'on ne suppose
ni manger ni boire on ne pouvait que toutes les femmes qui apparte-
5

plus rien chasser du ventre, etc. Les naient à Abimelech se trouvèrent


hommes furent d'ailleurs frappés d'une grosses au temps de l'enlèvement de
si grande froideur qu'Abiraelech fut Sara (16) , ce qui n'est point vrai- :

hors d'état d'exercer aucune fonction semblable. La seconde demanderait


virile, tant envers Sara qu'envers tou- que Sara eûtdemeuré plus long-temps
te autre. Un célèbre théologien pro- qu'elle n'a fait dans la maison de ce
testant (i3) adopte cette tradition , prince^ car il ne faut pas peu de
quant à la dernière partie, et rejette temps pour savoir si tout un grand
tout le reste comme ridicule ou su- nombre de femmes a perdu la faculté
perflu. Il dit que comme le diable de concevoir. Ces embarras ont obli-
,

empêche quelquefois par ses ligatures gé un très-savant interprète à dire que


{i4) que lespersonne mariées ne puis- la punition que Dieu envoya sur la
sent se rendre le devoir conjugal il , famille d'Abimelech fut connue d'une
manière qui ne nous est pas connue.
(o) Sallani Annal., loin. I,pag. 469. (17). Au reste, les rabbius ne mettent
(10) Genèse chap. XX, v. 18. ,

(11) Dans la remarque \{.'.) de Varlicle Sk%K.


(12) Àpud IMercerum. Vide Riveti Exercit.
(i5) Ésaie, cap. XXXVIII ,«s. 3.

in Gènes., Operum loin. /, pa^. 3q5. (16) L'Eternel avait entièrement resserré
(i3) Rivet, ia-meine. Heidegger le MtU pas à TOUTE matrice de la maison d'Abimelech. Gt"
pas, Hist. Palriarcli., (om. II,pag. 16.Î. nés., chap. XX, vs. 18.

(i4) On appelle cela fulgairemenl nouer l'ai- (17) Mercerus apud RIvetum, Oper. lom. I ,
({uillette. pag. 3r)5. •
,,

ABIMELECH. ^7
pas une grande différence entre Taf- mus (21). Je crois que tous les anciens
fliction personnelle d'Abimelech et historiens ont pris la même licence
Taftlicf ion personnelle du premier ra- à l'égard des ^icux mémoires qu'ils
Tisseur (18; de Sara. Ils disent de ce- consultaient Ils ont cousu des supplé-
lui-ci qu'il fut atteint de la maladie mens; et n'y trouvant pas les faits
,

ratnn qui est le plus incommode de


,
développés et embellis à leur fantai-
tous les ulcères , et celui particulière- sie ils les ont étendus
, et habillés
ment qui est le plus opposé aux cor- comme il leur a plu : et aujourd'hui
Te'es amoureuses (19). Salomou lar- nous prenons cela pour histoire,
chi veut que la plaie de ce roi d E- Ç^) C':*.ait le successeur Je celui qui
gypte ait été un mal de tète, causé nuait eiileue Sara.'] Je ne me
fonde
par un ver, qui s'était formé dans point sur la longue vie qu'il faudrait
son cerveau Moi bus periurbati ce-
: donner à Abimekch s'il avait été en- ,

rehri ob innaluni ipsi werniiculum coreaumondelorsquelsaacs'enallaen


quo qui taborunt, iis concubitus gravis Guéi ar. Ce voyage est postérieur à l'a-
jfit, et libeii gignuntur ulcerosi (20). chat que ût Jacob du droi' d'aînesse:
Quelques-uns croiront que ces der- on peut donc supposer qu'isaac avait
nières paroles gâtent tout; car ils s'i- alors quatre-vingts ans, car il en avait
maginent qu'il faut, pour l'honneur soixante lorsque Ésaii et Jacob naqui-
de Sara que la plaie de Pharao l'ait
, rent: et Esaii était déjà grand chasseur
rendu absolument impuissant. Voyez quaud il vendit son droit d'aînesse,
nos remarques sur l'article de cette D'autre côté Abimelech , qui enleva
,

sainte femme. Sara était roi et marié avant qu'isaac


,

(C) Des mémoires préférables a ceux \înt au monde il aurait donc eu cent :

de Mi^ïse.'] Il y a long-temps que j'ai bonnes années pour le moins lorsque ,

conçu de l'indignation contre Josephe, Isaac lit le voyage de Guérar. Maisest-


et contre ceux qui l'épargnent sur ce ce uneaflaire? En ce temps-là les hom-
sujet. Un homme qui faisait profes- mes ne vivaient- ils pas plus de cent
sion ouverte du judaïsme, dont la foi cinquante ans (22 ? On a peine à croi-
était fondée sur la divinité de l'Ecri- re, quand on le lit, que des personnes
ture , ose raconter les choses autre- habiles (aS) soient capables d'objec-
ment qu'il ne les lit dans la Genèse : ter ces paroles de l'Ecclésiastique, om-
il change, il ajoute, il supprime des nis potenlatds uita brebis {2^) comme
circonstances; en un mot, il se met en si,en supposant la canonicité de cet
opposition avec Moise de telle sorte , ouvrage , il était contre la révélation
qu'il faut que l'un des deux soit un que le règne d'un homme eût duré
faux historien. Cela est-il supporta- cent ans. Qui ne voit que si ce pas- ,

ble ? et n'en faut-il pas conclure , ou sage avait la force qu'on lui attribue
,
qu'il ne s'est guère soucié de scanda- il faudrait nier toutes les histoires
liser sa nation , ou qu'il a cru que le qui apprennent qu'il y a eu des rè°nes
sentiment particidier qu'il avait sur qui ont duré plus de cinquante ou
la faillibilité, et par conséquent sur soixante ans ? Qu'est-ce donc qui me
la non - inspiration de Moïse , était porte à croire que l'Abimelech qui
commun parmi les Juifs? Il méritait enleva Sara n'est point le même qui
bien que Théodore de Bèze lui donnât traita alliance avec Isaac ? Le voici. Ce
ce coup Hoc ego semel pronu/icio
: dernier Abimelech crut bonnement
quàdlu nunquamfuhum esse ostendes, sur la parole d'Isaac , que Rébecca n'é-
si cents est multis locis Josephus tait que sa sœur;
, et lorsqu'il en fut
mentilum esse multis locis Mosem et désabusé , non pas par
paroles les
sacrosomnesscriptores ôednospoiiits mais par les actions d'Isaac, il le re-
islos pro i^eris ipsius Dei interpretibus, prit doucement de son mensonge , sans
illum i^erô pro sacerdote rerum sacra- lui dire, i'ous chassez de race; Àbra-
rum l'aidé iruperito , aique eliani né-
gligente et prophano scriptore habebi- (21) Tli. Bej» , Respons. ad Baldainum ,
Oper. loin. IJ^ ptg- 220.
(18) Pharr.o, roi d'Égi^pLe. (22) Abraham
vécut 175 ans, et Isaac 180.
(19; j4pud Mercerum, in Rireti Opte., loin. {l'i) Pererius, in Gènes. .cap. , Prœf. XXKI
^ , pni<- ^95- Saliani Annal., loin. /, pag. Sao.
(20) .lpud^e'^des^.'Bis^. patriarch., tom. II, (24) La
version de Genève parle : Tonte tr-
pag. 154. rannie eside petite durée. Chap. XI, vt. 11
•8 ABIMELECH.
ham votre père m'a^'ait déjà joué le puisqu'il ne dit point à Isaac qu'elle
même tour. Or, quelle apparence que, avait été en danger de sa part, mais
s'il eût e'te' déjà attrapé par Abra- seulement de la part de ses sujets et, :

ham , eût donné encore une fois


il comme ceux-ci vivaient dans un tel
dans le mêmepiège ; ou qu'y ayant débordement, que toute belle femme
donné il n'eût pas fait une aigre cen-
, étrangère qui ne passait pas pour ma-
sure à Isaac, tant sur les mensonges de riée courait grand risque, je ne vois
son père que sur les siens propres? 11 point de cause plus vraisemblable de
n'aurait pas oublié ceux d'Abraham la continence d'Abimelech envers Ré-
qui lui avaient causé beaucoup de becca que la vieillesse. // fient un
dommage. Saint Chrysoslôme trouvait temps qu'on est trop sage, disent les
si vraisemblable ce que je viens de jeunes libertins.
dire, qu'il avança courageusement en (E) A
un certain jeu. ] Quelques-
chaire qu'Abimelech fil des repro- uns se sont imaginé que l'Écriture
ches à Isaac sur la supercherie d'Abra- avait voulu exprimer honnêtement.
ham. Rex adhuc fiabens recentem me- sous le mot de jeu, le devoir conjugal
morinmeorum quœ tempore patriarchce qu'Isaac rendait à sa femme lorsque
rapta Sara tuLerat, increpabat eunt par hasard Abimelech regardant par ,

reumque arguens dicebat , Cur hoc fe- la fenêtre rencontra sous ses yeux un ,

cisti? Hanc deceptionem et olirn tel objet. Piitant quitlani honestè si~
sustinnimus à pâtre tuo (iB). Mais tout gnijicari eo focabulo copulam carna-
cela n'a point d'autre fondement que lem. Sed non fît ferisiniile Isaac pru-
les privilèges de la rhétorique, les- dentissimum et sanctissimum uirum
quels on étend quelquefois presque tant incautè rem habuisse cum uxore ,
aussi loin que ceux des poètes et des ut id per Jénestram prospicere , ut
peintres. Scriptura inquit, rex posset Abime-
Pictoribut atque poélit lech, Credibilius igilur est eo uoca-
QuidlibeL audendi seinper fuit tequa potes- biilo signijicatos esse taies jocos et
tas (26).
blandiiias in amplexando et osculan-
do quales inter conjuges ngitari turpe
Deux choses semblent favoriser le ,

sentiment que le sieur Moréri a suivi.


non est extra conjii^ium uero nefas
:

est (27). D'autres ne veulent point


1°. Le roi deGuérar, au temps d'Abra-
ham , a le même nom qu'au temps ouïr parler de cette sorte d'interpréta-
tion ils disent qu'Isaac était trop sa-
d'Isaac , et il a un général darmée qui
:

ge et trop réglé pour avoir si mal pris


s'appelle Picol en l'un et en l'autre
ses mesures, et que, dans ces occa-
temps. 2°. Rébecca , quelque belle
sions, il se gardait bien d'être en lieu
qu'elle soit , n'est pas enlevée , comme
1 avait été Sara c'est qu'Abimelech
où les voisins le pussent voir par les
;
fenêtres. Il faut donc, disent-ils, en-
avait eu le temps de vieillir, et se sou-
tendre par le mot de jeu certains
venait des mauvaises suites de l'enlè- , ,

pour n'être pas le


vement de Sara. Je réponds, 1°., qu'il passe-temps qui,
dernier acte de la comédie ne laissent ,

y a eu des noms afi'ectés à tous les rois pas d'être trop forts entre des gens qui
d'un certain pays , comme celui de
Pharaon aux rois d'Egypte. Pourquoi ne sont point mariés quelque parenté ,

celui d'Abimelech n'aurait-il pas été


qu'il y
ait d'ailleurs entre eux. Ces

commun à tous les rois de Guérar ? passe-temps doivent signifier quelque


autre chose que causer familièrement.
Picol était peut-être un nom de char- 1, -
,1
que radier que rire ensemble; car
ge. Peut-être aussi que la charge avait ,

f|;ere et une sœur font tout cela


passé du père au fils. Je réponds , ""
très-honnêtement , et sans qu'on en
2". , que l'Abimelech d'Isaac pouvait
puisse conclure ce qu'Abimelech con-
n'être plus un jeune homme, quoi-
clut du jeu d'Isaac et de Rébecca. Cette
qu'il ne fiU pas celui qui avait enlevé
explication me paraît incomparable-
Sara. Je crois franchement que c'était
puisqu'il ne forma ment
plus raisonnable que la premiè-
un bon vieillard ,
re et néanmoins, il faut avouer ((ue
la belle Rébecca
:
aucun dessein sur ,
la tendresse empêchait quelquefois
laquelle il ne croyait point mariée j et
Isaac d'avoir cette grande précaution
(25; Chrysost. Homil. LI et LU.
(26) Horat. de Arle poëticâ , ». 9. (27) Pererius iu Gènes., cap. XXVI.
,

ABRABANEL. 79
queles moralistes rigides exigeraient boire. Il serait à souhaiter que la plu-

d'un patriarche car enfin, on ne petit


: part de ces imaginations mystiques
nier qu'Abimelech, regardant par les fussent inconnues à tout le monde.
fenêtres, ne Tait surpris se divertis- (F; Peu s'en est fa/lu que quelqu'un
sant avec Rebecca à un certain jeu d'où du peuple n'ait couche auec l'otre fem-
l'on pouvait conclure certainement me.] Il fallait (|iie les Pliilistins fus-

tre-vingts ans. Saint Augustin, dans ses ché avec Rébecca, qui ne passait que
livres contre Faustus le manichéen, pour sœur d'Isaac Nous apprenons de
grand frondeur des patriarclies , fait là en même temps qu'ils respectaient
Tapologie d'isaac d'une manière solide le mariage. Quant aux filles on ,

(28; 5 et dans le fond, c'est être trop ri- croyait assez en ces pays-là qu'elles
goureux que de vouloir qu'un patriar- e'taient pour le premier occupant. Té-
che ou qu'un prélat marié ne puisse moin Dina la fille de Jacob quand
,
,

prendre de petites récréations avec sa elle voulut s'aller promener on l'era- :

femme sans fermer tous les volets des pauma tout aussitôt on jouit d'elle , ,

fenêtres. Car il faut avoir cette bonne et puis on lui parla de mariage (Sa).
opinion de leur prud'homie, que , si
la nature voulait passer des petites
(32) Gènes., chap. XXXir.
caresses aux plus grandes ils se sou- ,

tiendraient assez sur un chemin si glis- ABLANCOURT ( Nicolas Per-


sant pour donner ordre que Ton ne ROT , SIEUR d'). Cherchez Perrot.
vît rien des fenêtres du voisin. Cor-
nélius à Lajiide ne sait ce qu'il réfute
ABRABANEL (a) ( Isaac), rab-
quand il s'emporte contre les auteuis naquit à Lisbonne bin célèbre ,

de la (A), l'an 1437 d'une famille qui


première explication. Judœi ini- ,

puri., dit-il f^g) jncum hune intetli- se disait descendre du roi David
,

gunt cnpulam cnnjui^aleni. Sed apage


(B). Il se poussa beaucoup à la
hos cynicos.Quis credat Isaae publiée,
et speclante l'ege, tant inuereeundujii cour d'Alphonse \ roi de Por— ,

lubricum,et cj nicum fuisse ? Ce n'est tugal , honoré des plus


et V fut
pas de quoi il s'agit personne ne j)ré-
:
grandes charges ce qui dura jus- ,

tend qu'Isaac fût alors au milieu des


qu'à la mort de ce prince; mais il
rues il était dans sa chambre et n'a-
; ,

vait pas bien fermé les fenêtres voilà :


éprouva un étrange changement
tout ; et si c'est trop vous serez vous- ,
sous le nouveau roi. Abrabanel
même obligé de condamner le patriar- était âgé de quarante-cinq ans lors-
che et de faire le Caton envers lui.
,
que Jean
II succéda à son père Al-
On sait que Caton chassa du sénat un
Manlius parce qu'en plein jour, et eu phonse. Tous ceux qui avaient
,

présence de sa fille, il avait donné un gouverné les affaires sous le rè-


baiser à sa femme (3o). Ce Manlius gne précédent furent chassés et ;

aurait été consul apparemment à la gj


,^^^5 ajoutions foi à notre rab-
prochaine élection. On cherche des , .
'

nous croirions qu on ma-


,

mystères allégoriques (3i) dans ce jeu ^i" '

d'isaac et de Rébecca auxquels sans china sourdement leur mort, sous


, ,

doute, ni eux, ni l'historien .sacré, prétexte qu'ils avaient dessein de


ne songèrent point. Je ne mets pas
ij^,j.er au roi d'Espagne la cou-
ces sortes d erreuis au nombre de cel- 1 T^ \ °T1
ce .serait la mer à ronne de Portugal. Il ne
les que je compile :
savait
rien de cela lorsque , pour obéir
^28) Aiigust. contra Fan^t., lib. XXIT, cap.
XLf^I. JI. Thiers ciip une partie de ce pas- à l'ordre qu'il avait reçu de se
*age, page de son Traité des jeux et desdiver-
lissemens,
!^
rendre auprès du roi , il s'en al—
(ïq) Cornet, à Lapide in Gènes., cap. XXVI,
i>s.8. [a) On le nomme aussi ALrabaniel Abar- ,

Çio) Plutareli. in Cat. P.Iojore, pag. 'i!fi.


Jianel. Abarbinel, Abravanel , Avravanel.
(3i) ^^lyezPererius, inCcnes. , cap. XXIV. A}>arbenel.
So ABRABANEL.
laitàLisbonneendiligence;inais, ce dernier lorsque Charles VIII ,
ayant appris en chemin ce que roi de France , le chassa de Na-
l'on brassait contre sa tête, il se pies car il fit avec lui le trajet
;

sauva proraptement dans les états de la Sicile (G). Après la mort


du roi de Castille. Tous ses biens d'Alphonse, il se retira à Corfou
furent confisqués dès le retour et y commença son Com777e77/<7/re
des soldats qui avaient eu ordre sur Esaie l'an i4u5. Il eut la ,

de l'amener mort ou vif. Il per- consolation de recouvrer par je ,

dit alors avec tous ses livres un ne sais quelle aventure , ce qu'il
commencement de Commentaire avait autrefois écrit sur le livre
sur le Deutéronome a. quoi il ent du Deutéronome. Il repassa en
,

beaucoup de regret. Quelques au- Italie l'année suivante , et s'alla


teurs chrétiens (D) ne convien— confiner à Monopoli , dans la
nent pas que la cause de cette dis- Fouille (b) , où il écrivit plusieurs
grâce soit aussi peu fondée sur sa livres. Il acheva son Deutérono-
mauvaise conduite qu'il ledit, me , et il composa son 5'epac^ Pe-
Ils font le même jugement de ses sach (c) et son Nachalaih Ax'Oth ,

autres persécutions (E). Quoi (</), l'an 1496. L'année suivante


qu'il en soit, s'étant établi dans la il composa son Majene Hajes-
Castille , il se mit à enseigner et à cJma (e) , et , en 4y8 , son Alas- 1

composer. Il fit , en i4B4 , son chmia Jeschua (/'), et son Com-


Commentaire sur le livre de Jo- mentaire sur Esaïe. Quelque
sué , sur celui des Juges et sur temps après il fit un voyage à ,

ceux de Samuel ; puis il fut ap- Venise pour y terminer les diffé-
pelé à la cour de Ferdinand et rens qui s'étaient émus entre
d'Isabelle, et il y eut des emplois les Vénitiens et les Portugais au
pendant huit ans , c'est-à-dire sujet des épiceries , et il fit pa-
lusqu'à ce qu'on chassât les Juifs raitre tant de prudence et tant
des états du roi catholique, en de capacité qu'il s'acquit l'es- ,

1492. Il fit tout ce qu'il put par time et la faveur des puissances,
ses prières et ses lamentations II composa à Venise son Com-
(F) pour détourner cette terrible mentaire surJérémie , l'an 1 5o4.
tempête; mais il n'obtint rien, Quelques-uns veulent qu'il ait
et il fallut qu'il sortît , comme aussi composé alors le Commen-
tons les autres , avec sa femme et
taire sur Éztchiel et sur les douze
ses enfans. Il se retira à Naples, petits prophètes. Il fit eu i5o6le

et y composa , en 1 49^ , son Commentaire sur l'Exode et il ,

Co??imentaire sur les livres des mourut à Venise l'an i5o8(H),à


Rois. Comme il était courtisan , l'âge de soixante et onze ans. Il
il n'oublia pas de se faire bien va- laissa trois fils Juda, Joseph et
:

loir parla connaissance qu'il pou- Samuel (I). L'aîné a été médecin
vait avoir accmise de la cour de et grand poète, et a composé plu-
d'Aragon; de
o et de celle .
Portugal
.
11 ,,,
{b) ^ , çii il y séjourna sept, ans., Rbar-
Notez
,., ,.

sorte qu il s msmua dans les bon- tolocci. BiU. vahhia. ,toin. irr, pa^. 873.
C'est-à dire, le Sacrifice de Pâ^fues.
SràceS de Ferdinand roi de
nés O ,
(c)

_T 1 11 J'tl
• ^d. CVi?-« c/(>e, l'Héritage des peies.
Naples et puis dans celles d Al-
, ,; Ccst-àdire. les Fontaines du salut.
phonse. Il suivit la fortune de {/) c'est à-Uire , le Prédicateur du salut.
ABRABANEL.
sieurs vers à la gloire de sou père. faitde livre où il n*ait marqué les
On dit que Samuel embrassa le traits de son désir de vengeance
christianisme à Ferrare , et qu'il et de son indignation , et il ra-

reçut le nom d'A'plionse, qui était menait à force de bras et de ma-


celuiduduc. Abrabanel a fait plu- chines toutes sortes de matières
dont oa ne
sieurs autres livres (K; à l'état misérable oii sa nation
sauraitmarquer la date , et dont était réduite. Il espérait de ra-
quelques-uns n'ont pas encore nimer par ce moyen la svnagogue
été imprimés. Plusieurs nobles mourante (g); et je crois aussi
Vénitiens et les principaux des qu'il trouvait là un soulagement
Juifs célébrèrent ses funérailles à l'oppression de sa bile, qui l'au-
avec assez de pompe. Son coqîs rait étouffé peut-être, s'il ne s'en
fut enterré à Padoue dans un ci- était déchargé sur le papier. Il
metière qui était hors de la ville. ne serait pas le seul qui se serait
On enterra peu après au mêm.e bien trouvé de ce remède. On
lieu le rabbin Juda Menz qui connaît des gens qui eu ont eu
,

avait été recteur de l'académie. grand besoin quoiqu'ils n'igno- ,

Le siège de l'an iSog ruina de rassent pas comme lui les pré-
telle sorte les environs de la pla- ceptes de l'Évangile. Je ne trou-
ce qu'on ne saurait plus discer-
,
ve point son profassorat de Pa-
ner ce cimetière. Abrabanel avait doue (L) ni son voyage d'Orient
,

de grands dons il va
: de pair (M). Ce sont des faits où M. Mo-
avec le fameux Maimonides, et réri s'est lourdement abusé. Je
il y a même des gens qui le met- n'en dis guère moins du voyage
tent au-dessus de lui. Les Juifs d'Allemagne (N).
prétendent qu'il a ruiné de fond Abrabanel était un homme in-
en comble toutes les raisons et fatigable dans le travail de l'étu-
toutes les objections des chré- de il V passait
: des nuits en-
tiens. Ceux— ci , méprisant avec tières et il pouvait jeûner fort
,

raison tout ce qu'il a dit concer- long-temps. Il écrivait avec une


nant nos controverses judaïques, grande facilité la haine impla- :

font beaucoup de cas de ses au- cable qu'il témoignait contre les
tres interprétations. Ils le trou- chrétiens en écrivant (0) ne l'em-
vent subtil clair , savant sin- pêchait pas de vivre avec eux
, ,

cère. Il ne canonise point les opi- d'une manière civile, enjouée ,


nions de ses maîtres et il cen- douce et flatteuse {h).
,

sure assez librement le plagiat et


{g) Ex Actis Erudilorutn Lipsiens, msni.
les autres fautes dont il les trou- novenib. l63t), pfg- 528 et sei/q.
ve coupables. Son grand défaut [h) Bartolocci; Bibliotb. Rabb., toin. II,
pag. 875.
est d'avoir été trop sensible aux
persécutions que les Juifs avaient (A) Nanuit a Lisbonne.^ ] Ses ancê-
souffertes , et auxquelles il avait tres étaient de Castille. E mn';oribuî
eu sa bonne part. Le souvenir de Casteilam Hispuniœ ex parenticriis ,

cette infortune l'animait d'une Olyssiponem LusiUiniœ agno^it pa-


triant. C'e^t ainsi que parle le journal
telle fureur contre les chrétiens ,
de Leipsick (i). Don Nicolas. Antonio
qu'il les traite avec le dernier em-
(i) Acta Lipsigos. mens. nof. i586, ;»«5«
portement. Il n'a presque point 5,9
ToTiiE r.
,

83 ABRABANEL..
veut que la famille d'Abrabanel ait cet Alphonse est le dernier roi de
eu son établissement à Séville pen- Castille qui ait porté ce nom-la (12).
dant plusieurs siècles (2). Il l'avait Il pourrait avoir raison jusqu'ici j mais
appris de Bartolocci et il cite (3) le il a tort quand il met près de deux
,

rabbin Salomon ben Virga , cjui a dit siècles entre ce roi et notre rabbin 5

à peu près la même chose dans son car ce dernier vint au monde l'an
histoire des Juifs (4j traduite en lalin 1437 , et ce roi mourut Tan i35o , à
>

par Gentius et citée ci-dessous.


,
l'âge de trente-huit ans.
(B) Qui se disait descendue du roi (C; ^gé de quarante-cinq ans."] Nico-
Dauid. ] Abrabanel a dit quelque part las Antonio a inséré à la fin de sa Bi-
(5) qu'au temps de Ja destruction du bliothèque d'Espagne ce que le P. Bar-
premier temple, il passa deux famil- tolocci lui avait dit touchant Isaac
les de la race de David en Espagne , Abrabanel. Il a corrigé par-là quel-
dont l'une s'établit à Lucène et l'au- ques fautes qui étaient déjà impri-
tre à Séville , où elle laissa postérité. mées dans l'article de ce rabbin ; mais
Il fait en un autre lieu (6) l'histoire de il me semble qu'il n'a point parle exac-

cette transmigration. Le rabbin Salo- tement lorsqu'il a dit Juvenis adhuc, :

mon ben Virga introduit un certain sed benè dodus in CaUellœ regnum ,

Thomas qui fait une longue déduction transiit , ctim Joanni II Portugal- ,

de la même histoire à Alphonse roi lice régi, parùm esset gratus (i3j II
,

d'Espagne, et lui débite que la famille s'agit là d'un âge qui , pour l'ordinaire,
des Abrabanel descendait des rois de n'ait pas pu donner le temps d'ac-
Juda ^ mais Alphonse n'en veut rien quérir de l'érudition. C'est ce qu'on ne
croire et forme des difEcultés insur- saurait direde l'âge de quarante-cinq
,

montables contre ces généalogies (7). ans. 11 est donc certain que l'auteur
Les Juifs pour se tirer d'embarras
,
de la Biblothéque espagnole a cru que
,

supposent qu' Abrabanel perdit ses li- le rabbin était fort au-dessous de cet
vres généalogiques dans le tumulte de âge quand il s'enfuit en Castille il :

ses déménagemens (8). M. Huet rap- s'est donc trompé.


porte (9) que Manassé ben Israël as- (D) Quelques auteurs chrétiens, etc."}
sure dans son Conciliator que ces Ils disent qu'Abrahanel méritait bien
deux familles issues de David se re- le traitement qu'il souflrit , et qu'il
tirèrent en Espagne après la ruine aurait été puni encore plus sévère-
du second temple. Ce rabbin avait un ment lorsque sa malice eut été con-
intérêt tout particulier à ce conte ri- nue si le naturel débonnaire du ,

dicule car sa
j
femme était de la fa- roi Jean ne l'eût porté à se contenter
mille des Abrabanel (10.) Au reste , de le bannir. Ils ajoutent que les re-
il n'est pas aisé de savoir qui est cet mords de la conscience firent pren-
Alphonse qui s'entretient si long- dre à ce rabbin la résolution de quit-
temps avec ce Thomas dans le livre ter le Portugal , et de se sauver de
de Salomon ben Virga. Quelques-uns nuit en Castille avec une prompti- ,

l'appellent roi de Portugal (ii); et tude extraordinaire (i4)-


comme ils veulent que l'Abrabanel (E) Ils font le même jugement de
dont Thomas lui parle soit notre rab- ses autres persécutions. ] Ils disent
bin , on ne doit pas douter qu''ils ne le qu'il se fourra à la cour de Ferdi-
prennent pour le roi Alphonse V. nand et d'Isabelle par le moyen de la
Don Nicolas Antonio croit qu'il s'agit banque qu'il faisait dans le royaume
là d'un tout autre Abrabanel , et que de Castille^ qu'il ama.ssa de grands
trésors en se servant adroitement de
(a) (i) N. Ant. BIW Hisp
. , tom. I , pag. 627,
rt tom. II . pag. 686. tous les artifices de sa nation ; qu'il
(4) Ou Sclifveth Jeliuda. tyrannisait les pauvres 5 que ses usu-
(5) (6) Comment, in Zacliar., cap. XI , fol. res rongeaient tout ; qu'il eut la va-
29^, et in II P>eg., cnp. fol. 3o5; XXV, apud
nité d'aspirer aux titres les plus illus-
Acta Lips. Nov. »686, pag. 628.
{•) In SchevetL Jehuila , f 11 et set}, apud
Acta Lips. Nov. 1686, pag. SîS. (12) Nicol. Anton. BiM. Hisp., tom. I,pag.
(8) Acta Lips. Nov. \6S6, pag. 529.
627.

(9) Uuelii Ueraonstr. Evaoget. pag. 708. edil.


(i3) Idem , tom. II, pag. C86.
Lips. An. t6y4. in-l^. (i4) iij Actis Lipsiens Nov. i6S6, pag. Sag,
(10) /f/pm , ibidem. Voyez aussi te P. Bartolocci , Tibl. Rabbia.
(iij Acta Lips. 1686, pag. Sîq. tom. III pag. 87/1.
,
ABRABANEL. 83
très , et les plus affecte's aux maisons de la négligence de M. Moréri. Il avait
nobles d'Espagne, et qu'étant d'ail en main la Bibliothèque d'Espagne de
leurs ennemi jui-e de la religion chré- cet auteur, et il ne prit point la peine
tienne il contribua plus qu'aucun au-
,
de consulter les Appendix, qui en font
tre à la tuinpète ({ui l'accabla avec une considérable partie et qui éclair- ,

toute sa nation (i5). cissent et corrigent plusieurs endroits


(F) Par ses prières et ses lamenta - de l'ouvrage. Ainsi il nous a donné
tioiis.'] Ilraconte lui-même dans l'un la faute concernant ce professorat de
de ses livres (16) ce qu'il fît en cette Padoue , sans savoir que l'auteur l'a-
rencontre. Salomon ben Vir^a le rap- vait corrigée lui-même à la fin du li-
porte dans son histoire des Juifs (17), vre , et s'en était excusé sur ce qu'il
avec la description tragique des mal- avait suivi Buxtorfe. f^enetias indè
heurs épouvantables qui accompagnè- profectus memoralur , ex qud urbe in
rent les trois cent mille Juifs qui fu- Germaniam aut in projessionem Pata-
rent contraints de sortir dans un mê- vinant hebraïcœ linguœ, quod Huxtor-
me jour des états du roi catholique. fiuni et alios sequuti nos littens in Bi-
(G) Il fit ai^ec lui le trajet de la Si- bliothecâ nostrd tnandai^imus priait ,

cile. ] Nicolas Antonio , corrigeant , conferre se. Constat autem f^enetiis


sur les conversations qu'il avait eues eum septuaginta (22) annos natum su-
avec le P. Barîoiocc-i , son article d'A- perioris sœculi anno octat^o dieni suum
brabaael dit que ce rabbin suivit en
, obiisse.Quocum non benè coni^enit
Sicile le roi Ferduiand ,
que les Fran- quôd circa annutn décimant projesso-
çais avaient renversé du trône , et rem, ut ibidem di.rimus, Palai'inumege-
qu'après la mort de ce prince il se re- rit (aS). C'est ce que dit Nicolas Anto-
tira à Corfou (i8y Voilà sans doute une nio. Il ne nie pas absolument cette
faute ; on prend Ferdinand pour Al- profession de Padoue; il se contente
phonse: c'est avec Alphonse (19) qu'A- de dire qu'il n'en avait pas bien mar-
C rabanel passa en Sicile, comme le qué le temps. Il ne fallait donc point
P. Baitolocci le remarque (20) et , que M. .Moréri nous vînt dire qu'eu i5io
non pas avec Ferdinand. Il demeura Abrabanel enseignait la langue hé-
à Messine jusqu'à ce qu'Alphonse fût braïque à Padoue.
mort au commencement de l'an-
, (I) // laissalrois fils Juda, Joseph
:

née 1495 et puis il s'en alla à Cor-


, et Samuel. ] Il semble d'abord qu'il
fou (aij. C'est là que fut commencé en aurait laissé quatre,, s'il était vrai,
le Commentaire sur Esaïe , en i^ç)5. comme le rapporte Nicolas Anto-
S il n'était passé en cette île qu'après nio (24) , que ce Léon , qui a fait des
la mort de Ferdinand on peut tenir , Dialop;ue3de l'Amour, était son tils'^.
pour très-certain qu il n'aurait pas Mais il faut savoir que l'auteur de ces
pu y être en i495- Ainsi \' Appendix dialogues pourrait bien être le même
de Nicolas Antonio aurait eu besoin que Juda, fils aîné d' Abrabanel. Ce
d'un autre Appendix qui le corrigeât. Juda était nommé vulgairement JMes-
{]\) L'an i5o8. ] Le P. Bartolocci ser Leone (25j. Son livre de l'Amour
mar([ua cette année à don Nicolas An- est fort connu Denis Sauvage, etPon-
;

tonio qui avait déjà fait imprimer


, tus de Tiard, l'ont mis en français.
que notre rabbin était professeur en On en cite ordinairement l'auteur
lani^ue hébraïque à Padoue environ ,

l'an i5io. Nous avons ici une preuve (22) Il fallait dire 71.
(23) Nicol. Anton. Bibl. Hisp., <om. II, pag.
(i5) Act Lips. Nov. 168G, pag. 53o. Barto- 686.
locci Biblioth Kabbinica, loin. III , pag. 874- (24) N. Anton. Bibl. Hispan., tom. I ,
pag.
(ifj; Comment, in Libros Regum, tnil. apud 63o.
Nicol. Anton Bibl. Hlsp., <om. /, f»ng. 627. * Dans sa lettre à Lacroie, du i*r. mars
(i-) Âpud Nicol. Anton. Bibl. Hisp., loin. I , 1704 Barle dit : " Il n'r a plus lieu de douter
,

pag 627. • que Le'on l'Hébreu ne fut le fils d' -ibrahanel;


(18) Nicol. Anton. Bibl. Hisp., loin. II pag. ,
» et, pnisqu*il a été chrétien , tl faut dire iju'tl
» se cofiuprliV. Un de set frèrer, cuinme je l'ai

(ici) Il e'iaU Ip II'. de ce nom. Il succéda à » rappunFdans le texte de l'article, Jit la même
Ferdinand le Bâtard, et eut pour successeur * cho.,e; mais il est surprenant que ni Bano'
Ferdinand II. » locci ni Nicolas Antonio n aient point parlé
,

I» de la conversion de L''on V Hébreu.


(20; Bartolocci, Bibl. Rwbbin. , tom. III, »•

pa^. 87.Ï. (25) Bartolocci, Bibl. Rihbin. , «e-n. ///,


(21^ Idem, ibidem. pag. 880.
«4 àBKABAKÉL.
sous le nom de Léo Hebrœus. Il est ductions qu'il avait faites de quelques
nomme mestie Ltton ytbarbunel, me- li\res de ce rabbin. Le Commentaire
clic> hehren , dans la traduction espa- sur Hafigée a été' traduit en langue
gnole imprimée à Venise l'an i568. latine par Adam Scherzenis, ef inséré
in-4 dans le Ti^oUum orientait publié à ,

Juda AerabaNel quitta son père lors- Leipsick, Fan i663 On a publié dans
que les Français conquirent le royau- la même ville, en 1686, in-folio, le
me de Naples, et se retira à Gènes Commentaire sur Joiue , sur les Ju-
pour y exercer la médecine (26J. Sa- ges et sur Samuel. Voyez ce que l'on
,

muel Abrabanel vivait encore sons le a dit de cette édition dans le journal
pontilicat de Jules III, comme il pa- de Leipsick, d'où j'ai tiré cet article.
raît par la requête qu'il présenta au En la même année 1686, ou imprima
cardinal Sirlet, protecteur des néo- à Leide le Commentaire sur Osée ,
phytes ^27). 11 se retira de Naples l'an auec la préface sur les douze petits
J540, et emporta avec soi la valeur prophètes; le tout traduit en latin et
de deux cent mille écus (28;. Son père accompagné de notes, par François
lui dédia le Commentaire in Pirke ab Husen. 3L de Veil juif converti ,
,

yii'oth, qu'il composa l'an 1496 (29). publia à Londres, l'an i683, la pré-
(J£) j4brahnnel a fait plusieurs au- face d'yibrribanel sur le Léi'itique.
tres lii^res ] Voici ceux qu'on marque Voyez le journal de Leipsick au ,

dans le journal de Leipsick (3o) des mois de janvier 1684. Nicolas Anto-
:

Comtnentaires sur la Genèse sur le nio vous donnera les titres de quel-
,

Léuitique , et sur les Nombres; Rascli ques autres ouvrages de ce raboin ,

Amana (3ij Sepht r Jeschuoth fl/es- avec le temps, et le lieu de l'impres-


;

chicho qui est un ouvrage sur les tra- sion quelquefois, selon que la Biblio-
,

ditions qui concernent le Messie Zc- théque rabbinique de Planta vit a pu le


j

dek Olamim; cela regarde les peines lui apprendre. M. Moréri ne devait pas
fit les récompenses de l'autre vie lie- dire qu'Abrabanel a écrit un Oom-
:

plier Jenioth Otam c est une histoi- mentaire sur le Thalraud mais seu-
; ,

re depuis Adam; ISlaamar Machase lemenl une pièce du Thalmud intitu-


Schaddai; c'est un traité de la pro- lée PjVAe^i^oift. Nicolas Antonio, sou
phétie et de la vision d'Ezéchiel con- unique source, lui a pu si bien expli-
tre le rabbin Maimonides 5 Sepher quer cela, qu'il ne de\ait point s'y
Atereth Srkenim ; Miphnloth Elnhini tromper. Le père Simon qui apprend ,

(ii)-^ Srpher Schamaim Chadaschim; beaucoup de choses curieuses tou-


Laliahalh Nebhiitn Le sieur Théo- chant les livres d'Abrabanel , observe
iihile Spizélius remarque que Jean
que le livre composé par ce rabbin ,
Juxtorfe le {ils lui a montré un grand smis le titre de Nahalat Avoth, pro-
nombre de dissertations tirées des ou- fession des pères est un Commentaire ,

vragesd'Abrabanel, lesquelles il avait sur le Traite Pirke Avoth , et que l'un


traduites en latin '33;. Elles ne peu- et l'autre ont été imprimés a f^enise ,
vent qu'être semblables à celles du in-quarto en i585; qu'il y o une sa- ,

même rabbin, (pie le même Buxtorfe luante préjiice de cet auteur au com-
a traduites et publiées avec le livre mencement de son livre Nahalat
Cosri. 11 montra aussi d'autres tra- Avotli où il explique la succession
,

de il tradition parmi la Juifs , ce qui


(26) Bartolorc'i Bibl. Rabbin., pag. 881.
,
est une chose fort embarraisée (3^).
(27; Idem, ibidi-m.
(L) Je ne troui'e point son proj esso-
(i8 Idem, ibidem, pag. 6&S,ex Heg. Davidc
Ganz rât de Padoiie ] Voyez ci-dessus la re-
(39; Idem, ibidem, pag 88i. marque (H). Les savans hommes qui
(3o) Acta Lips. Nuu. 1686, pag. 53i. nous ont donné (35) un abrégé histo-
(3i) C'est-à-dire. Taput Fidei II a /te' lia-
rique de la vie d'Abrabanel et qui ,
(luil en lalin par Guillaume Vorstin», (/ im-
primé avec ses notes a -Unsterdatt^ en i6j8. l'ont suivi presque d'année en année ,
r^icol. Anlon, B.bl. Hup., lom. I fli^. 629.
. dej)uis sa sortie d'Espagne jiis(|u'à sa
.3a) C'est-à-dire. Ouvrages de Dieu II y mort n'auraient pas
, laissé passer une
traite ductemeii de la création du monde et
examine tCuh Moïse a pris tout ce qui est éci tt (34 Histoire criti<]ue du Vieux Testament,
dans Ir livre de la Genèse. Simon, Hist. crit. pa^i. 53'.
du Vieu» Ti-ft., pag. 5'i- (.^5; Pans les Acta Lip^itn^. Nov. i(i86,p«J»,
(33) Spiidji Spécimen. Bibl, UnJTrrsil. 5j8 , cl set).
,,
.

àrrabanel. Si
circonçfance si remarquable ainsi , : qua pour le royaume de Naples et ,

]e conclus que, puisqu'ils n'en parlent qu il y arriva quelque temps après.


pas, Tautpur nVn a point parle. Or, Ainsi je ne laissais pas de trouver en-
il n'y a guère d'apparence qu'ayant core en faute M. Moréri. Abarbinel
dit beaucoup de ciioses qui ne lui dit-il, fut du nombre des exiles. Il
pouvaient pas faire autant d'honneur se retint en Allemagne , et puis en
qu'une profession à Padoue il n'eût ,
Italie. Et j'avais lieii d'être d^autant
rien dit de cette char;;e s'il en avait,
plus surpris de ctte faute que je sa- ,

été actuellement revêtu. El si d'au- vais que don Nicolas Antonio l'avait
tres que lui en avaient parlé avec corrigée après avoir été mieux instruit
quelque fondement je crois que mes-,
par le père Bartolocoi. Mais, ayant
sieurs de Leipsick ne l'auraient pas consulté le livre qu'on a cité, j'ai vu
lÊjnore, ni voulu passer sous silence. que l'auteur ne dit nullement qu'A-
C'est donc un fait un peu apocryphe, brabanel dise qu'il a voyagé en Alle-
pour ne rien dire de pis. magne, Voici ce que dit Buxtorfe Hic :

Joignez à cela que le père Barto- titulus (.Morenu, id est, doctor nos-
îocci, qui a d'inné une suite exacte ter) noi'us est., infra ducentos annos
des aventures de ce rabbin ne parle nalus in Germanid indè in ItuUam
,
,

point de cet emploi. traductus quod waldè mirnlus fuit ,

(.M) ni son t'oyage J' Orient."] Je don Isaa') ylb fbinel ex Hispanid in
le tiens pour faux par la raison que has terras l'eniens ut ipsemrt scribit
, ,

je viens de rapporter, tirée du silence in Commentarin Pirke Ablioth, cap. 6


de ces messieurs; mais, quand même (37). Je ne saurais plus douter que
ce voyage aurait été effectif, M. Mo- don Nicolas .\ntonio n'ait mal enti ndu
réri ne laisserait pas d'avancer une Buxtorf et c'est une méprise dont il

y

grande fausseté. Il suppoie en pre- ne s'est pas rétracté dans l'endroit où


,

mier lieu qu'Abrab.iuel enseignait la il nous apprend ce que


, père Barto- 1 >

langue hébraïque à Padoiie en i5io; lorci lui avait dit concernant Ahra-
,

et en second lieu que l'envie de fai- banel. Notez que ce père prouve dé-
,
,

re éclater sa haine contre les chré- monstrativement la fausseté de ce


tiens l'obligea à passer en Orient pour voyage d'Allemagne, duquel, dit il
y uifre ai'ec ceux de sa secte, et que (38;, quelques-uns parlent en citant
ce fut alors qu'il composa ce grand Buxtorfe. Je ne doute point que cela
nombre d'oui^rages que nous aidons de n'arrête la course de cette fausse cita-
lui. Nous avons vu qu'il mourut l'an tion.
i5o8 :c'est assez pour juger qu'on (0) Qu il témoignait contre les chré-
vient de nous dire des chimères- tiens en écrii'ant.'] Ses Commentaires
(N) Ce sont des faits ou Moréri sur l'Eciiture, et principalement ceux
s'est lourdement abusé. Jf. n'en dis qu'il a faits sur les prophètes, sont
si
guère moins du voyage d' Alttniagne.'] remplis de venin contre Jésus-Christ,
Je n'osais le traiter de faux pendant contre l'Église contre le pape, contre .

Îue j'étais persuadé que don Nicolas les cardinaux et tout le clergé et ,

ntoaio avait bien cité Buxtorfe; car, contre tous les chrétiens en général
en supposant qu'il l'a bien cité , on mais plus encore contre les catholi-
doit croire qu'Abrabanel a parlé de ques romains, que le père Baitolocci
son voyage d'Allemagne dans son Com- alirait voulu que l'on n'en eût point
mentaire sur Pirke ^it'oth. Projugus permis la lecture aux Juifs (Sg). Aussi
ergo is inGermaniam Jenil, quoJ ipse remanjue-t il que celle des Commen-
ait in Coramentariis ad librum Talmu- taires sur les derniers prophètes
leur
dicura Pirke Ai^otli... Buxtorfto teste a été interdite, et qu'ils n'osent pas
in tractatu de Abreviaturis Hebrœo- les garder. In his etiam pluribus
in
Tum,pag. 100 (36). Je me réduisais locis canino dente christianam religio-
donc à dire dans cette supposition
, nem mordet et lacérât ideoque meritb
, ,

qu'il était du moins certain qu'Abra-


banel n'alla pas en Allemagne dès qu'il (37) Buxtorf. de Abbreviat. Hebraor., pag
1 15. edU. secund.
fut exilé des terres du roi catholique,
(38; Bartoloc. , Blbliolli. Rabbin., tom. III,
puisqu'ea les quittant , il s'embar- pag. 688.
(39) Bartolocei, Biblioih, Rabbin., tans. 131,
(3î))N'ic. Anton, Bibl. Hisp., tom. I,pa§.Û3S. pasf. 876, 879.
,

gg
ABRAHAM.
Judœis in- traita avec lui, scelléedu signe de
illorum lectio et retentio
urdicta est, nec ens apud son obéissance à
se rttinere j^ circoncision;
prop-
auJent , publi"è saltew etpalàm, y^j.^j.q q^^'iJ avait recu de Dieu
ter metum chnsùanomm (4o).
^'immoler son fils unique; la ma-
(4«) Idem, ibidem, pag. 8-;8.
nièrc dout cct acte fut empécLé ;
-OT, 1 n»*j« ' * 1 son mariageavec Kétiira saraort ;

AERAHAM^le pere ^t la sou-


. -rr 1

àl'âgedeclntsoixante-quinzeans,
che des croyans, était fils de Tha- ^^ ^f ^ ji^^e auprès de Sara sa
-
,

ré. IldescendaitdelSoe par


Sein,
iè^e femme , dans la caverne
dont il était éloigne de neuf de- i,^ Macpela. 11 serait inutile cte
grés. L'opmio"jq^/l^/^^t"^'- g^^^endre sur ces choses; ceux de
tre l'a^ i3o de Thare (a), me pa- ^^ ^.^, .^^ j^^ ^^^.^^^^ ^^^^ 1^ ^^^^^
raît plus vraisemblable que celle ^^ -j^ ^.^^^^ j^^ prendre à
^P^ .

qui le fait an 70 du me- j^


naître ,^^ ^^„^,.^,
^^^^^^ ^^^ ,^,^^^
me Thare. 11 y a beaucoup d ap- 3„„^^, et pour ce qm est des ca- .

parencequ il naquit dans la me- ^holiques romains , ils n'ont pas


me ville d ou 1 Écriture Sainte ^^^^^^ ,^^ nouveau diction-
nous apprend que son père se re- ^^.^^ j^^ ^^^ instruise; celm de
tirapour aller au pays de Canaan Simon et celui de Moréri le ^
(b). C'était une ville de Chaldee Il serait plus du ca-
f^^^^ ^^^^^
qui s appelait Ur. Abraham en ^^^^^^,^ ^^ ^^^^^ compilation de
sortit avec son père et s arrêta
g^^^^éter aux faussetés et aux tra-
avec lui à Charan jusqu a ce que ^.^.^^^ incertaines qui regardent
son père y fut mort. Apres cela j^^^^^^^^^. ^^^-^ ^^ „^^tre serait
il reprit son premier dessein, qui ^^ ^^j^ ^^ ^^^^^^^^ j^^ ,^ -^^f^^
avait été le yoyage de la Pales- ^^^^ écrivains car que n'a- ;

tine. On peut voir dans lEcri- touchant les tf^j^^int supposé


ture les diverses stations qu il fit
^^^^.^1 ^^ sa conversion (A)!
dans la terre de Canaan; son
Q^^gi^ exploits ne lui a-t-on pas
voyage d'Egypte , ou on lui en-
^^^^ ^^.^^ ^^^^^^^ l'idolâtrie (E)
leva sa femme
qui était aussi sa ^^.^
,
^^^^^ ^^ Chaldée , soit dans la
sœur de père (c); son autre voya- ^^.jj^ ^^ ^j^^^^^ ^^.^ Combien de ,

ge en Guerar , ou elle lui tut pa- ^^-^^^^^^ ^j)^ et combien de livres ^

reillement enlevée et puis ren- ^^^ ^^. ^ttribue-t-on pas Les !

due tout comme la première fois; j^.^^ lui attribuent le privilège


la victoire qu il remporta sur j'étre né circoncis (e) et la même
quatre princes qui avaient pille ,^^^ qu'à Adam
(/). Ils croient
Sodome;sacomnlaisancepoursa
g J^te âme a été celle de Da-
feimne , qui voulut qu il se servit ^.^ ^^ ,^^^^ ^^^^ ^^„^ ^^ ^Ig^_
d'Agarleur servante afin d.^oir ^. Barto- ^J^^^ l'a remarqué
des enfans (d) 1 alliance que Dieu
;
^^^^ ^^ Bibliothèque Rabbi-
j^^^.

* Chaufepié a cru devoir donner lin Slip- nique. LcS mahométailS Se SOUt
plément à cet article. aussi mêlés de contcr des rêveries
{a) c est, selon les Hébreux, le 652' depuis „^,__„„„„. „„ pairiarcne
coucei uant ce iifltriirrhp , com
COm-
le déluge, et le 200S'' depuis la création du
monde. (g> ^pud Hottingerii Historiam Oritnlal. ,

(i) Genèse, XI, 3l. lib.I, cap. VI.


(c) Voyez l'article de Sara. (/) Entendez ceci de ceux qui, parmi les
Fojez l'article c/'Agar. juifs , ont cru la mélcmpsjcose.
idj
, ,
.

ABRAHAM. 8^
me on lepeut voirdansl'AIcoran pierre au soleil apr<3s la mort
et dans un des principaux au- d'Abraham (/} 2". que ce pa- ;

teurs nommé Kessœus. Ils lui triarche enseigna la magie aux


font faire le voyage de la Mec- enfans qu'il avait eus de ses con-
que , et ils prétendent qu'il y cubines (jn).
commença à bâtir le temple (F). ,7^ -d i> « \ 1,1
T\ oyez la" T3U1- *1
cibliotlieque f\
1 \ '^^ Barlolocci,
Orientale pag. 562.
Bibl.
' Rabbin. tom. lll 1
, ,
,

de M. d'Herbelot, depuis la page ("»' ^'^«'"i ibidem, pag. 594, et tom. i,

1 2 jusqu'à la page 16 on y trou- '"'^' ^° :

ve mille curiosités. Si nous avions (A) Touchant les motifs de sa con-


le livre qu'Hécatée avait com— f^ersio/z.] C'est une opinion assez com-
posé sur Abraham
^ •
* *t i,-
,
j i,
M
nous y ™'?"*^ ^"'^î^r^ha™ s^^Ç-i avec le lait le
poison de lidolatne, et que Tharé
verrions peut-être bien des cho- [^^ ^,, f^-^^-^ ^^^ ^^.^^^s , et enseil ^

ses dont on n a pas oui parler, enait qu'il les fallait adorer comme
Les chrétiens n'ont pas voulu des dieux (i). Quelques Juifs ont dé-
ètre les seuls qui ne débitassent ^^^^ qu'Abraham exerça assez long-

j . il temps le métier de Thare (a) c est-a- ,

point de sornettes ttouchanti Abra-


A i_ 1

ji^e, quil fit des idoles, et qu'il en


ham ils lui ont fait planter des vendit. D'autres disent que l'impiété
:

arbres d'une vertu bien singu— qui régnait en ce pays-là étant 1 ado-
»"ation du soleil et des étoiles, Abra-
lière CG^
,T 1 . . » ham croupit long-temps dans ce mal- .

Voici encore quelques rêveries heureux bourbier. Jp.um longo tem-


des rabbins. Ils disent que la ser- pore Chaldœorum delirto de astrorum
vitude d'Egypte fut la punition dii^initate innutritum fuisse (Sj. Mai-
de quelques fautes qu'Abraham monides donne pour un fait certain
-i ^ f, qu Abraham tut eleve dans la religion
. .

avait commises; car il avait con- aes Zabiens, qui ne reconnaissaient


traint les disciples de la sagesse à d'autre dieu que les étoiles (4;. D s'en
prendre les armes et permis que t"'a par les réflexions qu'il fit sur la
,

des personnes instruites en la loi


°^*"'"^ ^^^ « fo admirait les
, X. , mouvemens,^f^l'-
la beauté, 1 ordre: mais
,
de Dieu se replongeassent dans ;i y remarquait aussi des imperfec-
l'idolâtrie. C'est ainsi qu'ils en— tions : et il conclut de tout cela qu'il
tendent les y avait un être supérieur à toute la
paroles de l'Écriture
machine du monde, un auteur et un
-^;, ;i
ou il
^
estt ,l.t
ait qu^,.','7 ^^.,,^ "^.Q ^„
ï
II arma oio de j
j directeur de 1 univers, c
j
buidascite l-
. bien
. in- -..

ses serviteurs nés dans sa maison phibn pour prouver qu'Abraham s^é-
(h) ,et qu'il rendit [i) les person- leva jusqu'à la connaissance de Dieu
nés que le roi de Sodome lui re- par ces sortes de réflexions; mais,
j„ j + (k).
/L\ T„ ,'« « P^^*^ comme il rapporte, sur la foi du mê-
demandait Le père r>arto-
me auteur,
, ''-au u
Abraham j' p< j
.
,
^^^ ,
1 , qu des l âge de ,

locci s echautte beaucoup sur cet- quatorze ans, avait atteint ce haut
te matière et n'emploie pas une degré de lumière et avait eu le cou-
, ,

bonne réfutation (H). Ils disent rage de dire à Tharé reno/icez « ce ,

o „i„ ,„j» „ pernicieux trafic d'idoles avec quoi



^
aussi I que
, la vue d une pierre '^ , r mondej
,.' >
1-1
.
.
i> A
i'ous trompez le
précieuse qui pendait du COU d A- pas [^ un délateur uniforme de la
nous n avons ,
^

braham guérissait toutes les ma- longue idolâtrie d'Abraham. Il est


ladies , et que Dieu pendit cette certain que Josephe, sans avouer que

(i) Suidas, in Itt-çr^OX-


{g) Joseph. Antiquit., libr. I, cap. VII.
(k, Genèse, chap.Xiy , t>. 14. (2) Apud Geaehvirà. i;i Chron,
(i) La même. v. 31. (3) Philo, apud. Saliaoo, tom. I, pag. 387.
(A} Barlolocci. Bibl. Rabbin., tom, III, (4) HaimODidcs, Morch.Vevoch ,fa;j.X.Y/'X,
pa;^'. 530. pag. 3.
, ,

S8 ABRAHAM.
ce patriarche ait etë pendant quelque car quel fond y a-t-il à faire , ou
temps infecté d'idolâtrie, soutient égard aux nombres et aux citations,
que , par son esprit et par la considé- sur un auteur aussi estroj)ié et aussi
ration de Funivers, il connut l'unité falsifié que le Suidas d'aujourd'hui?
de Dieu et la providence, et qu'il fut Peut-être avait il écrit , non pas t/ua-
le premier qui osa combattre L'^-des- toize ans mais cinquante anf. 11 y a
,

»us r*rreur populaire (5j. Il trouva une vieille tradition qui donne ce der-
jine opposition assez redoutable pour "ier ."^ge à Abraham sortant du giron
se résoudre à abandonner sa patrie, de l'idolâtrie. On conte (9) que son
Voilà peut-rtre pn^miére fois qu'on
la père ayant eutrepris un voyaj^e lui
,
,

s'est exposé au bannissement par zèle commit la vente de ses statues, et


de religion. Abraham, sur ce pied-là, qu'un homme qui faisait semblant
serait, par rapport à ce genre de pei- d'en acheter lui demanda : Quel âi,'e
ne, sous la loi de nature, Cf que saint as-tu? Cinquante ans, lui répondit
Eîienne a été, par rapport au dernier AbraLara. Malheureua que tu es re- ,

supplice sous la loi de frâce. Il se-


, prit l'autre, tu adores, à iâgv de cm-
rait le patriarche des réfugiés, non qt"'fite tt'i'' ,ii" être qui /t'a qu un jour!
moins que le père dos croyans. Je ne Cela confondit Abialiam. Quelque
vois pas qu'on puisse nier que son pè- temps après ur.e femme lui vint âp-
,

re n'ait été un idolâtre puisque l'E- ,


porter de ia farine, afin qu'il l'otiiît
criture sainte l'assure en le nommant 'i"" statues, mais il pjit ui.e J.ache et
par son nom (6^; mais tout ce qu'on les brisa, puis mit cette liache entre
fiourrait inférer de là serait qu'Abra- les mains de la plus grande. Ihuré,
lara, avant l'âge de discernement, de retoi.r, demande d'où est venu ce
aurait été de la religion de son père, fracas. Abraham lui réjiond qu'il s'é-
C'est le sort inévitable des enfans d'ê- tait élevéune dspute entre ces idoles
tre en cela les fidèles sectateurs des à qui commencerait de manger l'of
personnes qui les élèvent. A quatorze fraude qu'une femme avait apportée
;
ans, comme le rappoite Suidas, il fit etla-tiessus,ce itieuijueuouiunYtz flus
usage de sa raison il connut l'abîme
: grand que Its autics , s'e^t Itn- ei les
où son père était plongé, et il l'en reti- « brises tous h criups de hatlu 1 hare' .

va de sorte que, quand Dieu lui com-


j '"i répond que c'est se moquer de lui
manda de sortir de son pays, Tharé et (pie ces idoles n'^avaicnt pas l'esprit
voulut être du voyage. Saint Épiphane défaire cela. Abraham tourna tout
rapporte que l'ido trie ayant com- aussitôt contre le culte de ces taux
niencé au temps de Sarug, bisaïeul dieux ces paroles de son père; mais
du patriarche Abraham les idoles ne ,
Tijaré n'entendit point raillerie il li- :

consistèrent »ju'en plate peinture, et vra son fils à l'inquisition. JXimrod, le


que ce fut Tharé qui commença d'en grand inquisiteur, aussi-bien que le
"
faire d'argile (j). conquérant du pays , exhorta d'abord
(B) Quels exploits ne luia-t-on pas Abraham à l'adoration du feu ensui- j

_faii j'aiiecontre l'idolâliie]} Je iae\nu- te, après quelques réjonses et quel-


drais pas accuser Philou de s'être con- tjues répliques de part et d'autre, il
tredit encore qu'on vienne de voir
: 1^ jeter au milieu des fldmmes :
fit

qu'il débite dans l'un de ses ouvrages C^"e ton dieu l'ienne l'en tirer, lui dit-
qu'Abraham a été long-temps infecté i^ Haran, frère d'Abraham fut fort ,

des extravagances des Chaldéens (8) j attentif à l'événement; car il résolut


et, dans le dictionnaire de Suidas, *^n lui-même de suivre paiti qui le
qu'Abraham connut à l'âge de qua- vaincrait d'être de la religion de
;

torze ans les absurdités de l'idolâtrie , Nimrod , feu brûlait


si le Abraham ,
,„ et de la religion d'Abraham si le feu ,
,
'^''- '''"" l*^ brûlait pas. Abraham sortit sain
„£^ wînit' ciLe^t .';..T-
comme Tha,r,pèr^^' Abraham
(6j ^ovperf.c,
7
^1 ^^"1 clu milieu des iJammes; et alors
cl de Nachor,onihabue jadis au-delà du {leuve, Kimrodayaut demandé Ven quicrois-
nioni^en.i h. d'autres dieux. Josué tu à Haran, et lecu Celle réponse,
(7) Epipl,. a.Ivers. Ilœrts , lib. i ,
pag. 7,8. •'^ *"'"* ^^ '^^^^ ^ ^bmhani ,
le fil je-

(8) XaX<f^,V«,; /^AK^'ov T.va ;tf ÔVOV. Per


(q) R. Moses Haadar.cli..n in Ber«scbit Rabla,
long uni tempus c/ialdaicu imbiUus delirio. Pbi- apud Heidegger, Hisior. l'atriarch. , tom. Il,
to, du Ahrahamoy pas- i6i.
pai'.'iG.
ABRAHAM. 8(^
1er c^an* une fournaise. Haran y fut si pouillë de tous ses biens, et condam-
maltraité, qu'il en mourut peu de né au bannissement. Le roi craignit
temps après en présence de son père
.
que Tautorité et l'éloquence d'un tel
(lo). Laraison pourquoi le feu eut tant homme ne détournassent le peuple
de prise sur lui, est que sa foi n'était d'adorer le feu. Cédréuus fait mourir
pas aussi vive que celle d'Ahraliam Haran pour une très-mauvaise cause,
,

et qu'il r'était pas prédestiné à de puisque c'est pour avoir tilché de tirer
grandes choses comme Abraham (ii). du feu les idoles de Tharé qu'Abra-
Cette tradition n'est pas nouvelle, ham y avait jetées. Ce fut en vain qu'il
j)uisque saint Jérôme la rapporte et y tâclia il fut consumé lui-même
^
:

il seuible même l'adopter en ce qui par les flammes.


concerne la conservation miraculeuse (C) Smt dans la ville de Charan.']
d'Abraiiam au milieu des flammes On prétend qu'il y devint convertis-
(12 ; car, pour la cruauté supersti- seur,etque, tandis qu'il travaillait à
tieuse de Tharé revêtant le person- faire des prosélytes parmi les hommes,
nage de délateur an saint oHice contre Sara faisait la même chose parmi les
son [)nipre tils, il n'en parle pas. Saint femmes (18); et c'est ainsi qu'il faut
Epiphane, qui n'en jiarle point non entendre les paroles delà Genève, où.
plus soutient au contraire que Tharé il est dit qu'Abraham sortit de Cha-
,

survécut à Haran son fils en punition ran avec Sara sa femme, avec Lot fils
, ,

de l'audace qu'il a\ ait eue défaire des de son frère, avec tout le bien qu'ils
dieux d'argile, et qu'avant lui aucun avaient acquis, et avec toutei les âmes
père n'avait vu mourir de mort natu- qu'Us ai'aient faites (19). On ne veut
relie ses enfans (i3;. L'é(piivo(jue du point entendre par-là une génération
mot 6V (i4j a pu donner lieu à ces fa- d'enfans mais une propagation de ,

blés Ceux qui piessent les paroles où foi; et on confirme (20) cette explica-
Dieu dit à Abiaham Je suis i Eternel tion par la métapiiore dont l'apôtre
:

quit'iii retiré d'fJrdei Chiildéens{\5}, saint Paul s'est servi au verset to du


s'imaginent qu'il le sauva d'une gran- chapitre IV de son épîlre aux Galates :

de persécution, puisqu'il se servit de Mes petits enfans, pour leiquels en-


Ici même phrase à la tête du Déca- f'anler je traînaille derechef, jusqu'à
logue ,pour signifier la délivrance ce que Christ soit formé entrons, li est
d'Egypte (16); mais c'est chercher plus vraisemblable que ces âmes, çî/'t/*
de.5 mystères sans nécessité. Kous ne aidaient faites étaient les esclaves ,

voyons aucune tiace de cette perse- qu'ils avaient achetés et les enfans qui
cution dans l'Ecriture ainsi l'on étaient nés de ces esclaves, sars que
5

peut mettre, à proportion, au même pour cela il faille douter qu'Abraham


rang d;5 pensées imaginaires le feu n'ait tâché d'instruire les infidèles au-
qui ne (it aucun mal à Abraham et ce tant que son zèle et sa sagesse le lui
,

que Maimonides emprunte (17) d'un suggéraient, et que, s'il en convertit


certain livre qui traitait de l'agricul- quelques-uns pendant son séjour à
ture des Egyptiens. Ou y trouvait Charan, ils n'aient pu le suivre an
qu'Abraham aj'anl soutenu dans une pays de Canaan. Il y a des gens qui
,

dispute publique contre les idolâtres veulent que son père n'ait servT les
que le feu n'était point digne des bon- faux dieux que depuis son arrivée à
neurs divins, fut rais en prison, dé- Charan (21). Cela paraît absurde; car,
/ \ Ti „ •
r
(10) Ils appuient cette circonstance iur laGe'
, comme il .,,est fort probable (11)
, j
V, ,i.
'^
que
', ,
,
nè»e, Xl,28. Cette lamille abandonna la Lbaldee
{il) hidai apud Lyrannm et Tostatnm, ci-
,
pour éviter la persécution qu'elle avait
tante Sahano Annal ,
to,n /, pag. 4o,. -^^ j^ Craindre à cause de son éloi-
(12; Hieroa. Iradil. Hrbraic.in Genesim. J
i iv i ia. -i •. i
.
• •

(i3) Epiph. de H«res., lib. I, pag. 8. gncment de 1 idolâtrie , il serait bien


(14, C'est le nom propre d'une ville et il si- ,

gnifiait aussi le feu. Au II', /iii? rf'Esdras, (iV) Voyei Oa^e\<K, parapJirasle chaldéen ,

chap IX , la version latine porte : Qui elegistt et Fagiiis qui l'a traduit.
Abrabam, et eduxi,tieura de sgne Cbaldseorum. (iqj Chap. XII, v. 5.
(i5) Genèse, XV, -. (20; y^uyei Salian. Ann., tom. /, pag. l^oQ.
(16) Paulus Burgensi^, in addil. ad Postillam (2i)Toslal.a;(U(i Pererium in Gènes., c«p. XA.
Lïrani in Gènes., cap. XI. (22) Cela est fonde' sur le témoignage de Jo-
(i-) Jpud Pauliiin Burgens. in Addit. ad Ly- sepbe et sur le livre de Jiidllli , citap. V. .S.ii
ran Poslill. in Gènes. , cap. XI. Voyei son Augustin Faffirme, de Civit. Dei , liv. Xf^l,
lorchKcvochim, part. III ,cap. XXlX. chap. XIII.
, ,

9° ABRAHAM.
étrange que chef ne se fût corrom- lique d'Eusèbe. Ce patriarche commu-
le
pu que dans le pays où il se réfugia. niqua aux Phéniciens et aux Egyp-
Jfais il pourrait bien être que le culte tiens l'astronomie, à ce que disent
des idoles dont Abraham avait guéri Eupolème et Artapan (27) mais, après
,
;

Tharé avant qu'ils sortissent de leur tout ce ne sont point articles de foi.
,

pays ressuscita dans Tâme du bon Les auteurs qui lui attribuent ces cho-
,

Bieillartl 5 car, en ces temps d'igno- ses aflaiblisNcnt le poids de leur té-
rance, il n'était pas donné à beau- moignage par les faussetés qu'ils y
coup de gens de maîtriser pour tou- mêlent. L'un dit qu'Abraham a régné
jours le penchant naturel à l'idolâ- à Damas (28) un autre dit qu'il sé- ;

trie. On croit même que Naclior, le journa vingt ans en Egypte avec toute
troisième fils de Tharé, ne fut jamais sa famille auprès du roi Pharéthon
bien converti, et qu'il se retira néan- (2g); un autre lui fait l'injustice de
moins de sa patrie, afin d'aller join- penser qu'un des motifs de son voya-
dre son père à Charan (23;. Ce pour- ge d'Egypte fut le désir de connaître
rait bien étj-e lui qui retraça dans l'â- les dogmes des Egyptiens touchant la
me de ce vieillard le culte idolâtre Divinité, afin de les suivre, s'ils étaient
qu'Abraham en avait été. 11 est cer- meilleurs que les siens ou de dés- ,

tain que Laban petit-fils de ce Na- abuser ces gens-là


,
s'ils avaient une ,

chor, servait les idoles. Quelques pè- croyance erronée (3o). Quelques mo-
res de l'Eglise ont cru que Tharé n'a dernes ne croient pas qu il ait ensei-
été fidèle ni pendant sa vie, ni à l'ar- gné les mathématiques aux Egyptiens
ticle de h mort. Voyez les homélies (3i). La raison qu'ils en donnent me
XXXI et ]ÏXXV1I de saint Chrysosto- paraît fausse c'est disent-ils , que la : ,

me. Comnent le prouveraient-ils? et détention de Sara auprès du roi d'E-


comment leur prouverait-on le con- gypte donnait tant de martel en tête
traire? Il y a sur l'histoire d'Abraham à Abraham qu'il n'était guère en état ,

cent embarras où ni ceux qui sou- de donner leçon sur des sciences aussi
,

tiennent le pour, ni ceux qui soutien- abstraites que celles là qui, tout com- ,

nent le outre ne raantjuent point de me la poésie demandent le repos et


, ,

raisons. Mais le pauvre père Bolduc la liberté d'esprit :

qui a cm que ce patriarche érigea des Cartniria secessum scribentis ei otia quterunt.
monastères à Charan et qu'il n'ame- ,

na avec lui dans la Palestine que les Mais il fallait prendre garde que Jo-
moines les plus novices (a^) n'est sephe a fort bien distingué les temps
, :

point Je ceux qui peuvent alléguer il dit que ce fut après la liberté de
quelque raison. Sara qu'Abraham eut des conférences
(D) Combien de sciences.'] Il savait, avec les savans d'Egypte, et lorsqu'il
dit-on, l'astronomie. C'est ce que Bé- avait le cœur content, tant à cause
roseett disait, sans le nommer, si nous que Pharao l'avait comblé de bien-
en crcyons Josephe (aS). On veut aussi faits, qu'à cause qu'il était persuadé
qu'il ait enseigné l'arithmétique et que sa femme lui était revenue sans
l'astronomie aux Egyptiens. Josephe avoir souffert aucune atteinte à son
l'assure (26) et JSicolas de Damas le honneur.
,

confirmerait s'il disait qu'Abraham (E) El combien de llires.'] Il y a un


enseigna la géométrie et l'arithméti- livre de la création qui lui est attri-
que aux Egyptiens; mais il ne le dit bué depuis long-temps (3-i). Il en est
pas. M. Heidegger, à la page i44 de mention dans le Thalmud (33)
fait : le
son tome II, cite le livre IV des His- rabbin Chanina, et le rabbin Hoschaia
toires de Nicolas de Damas comme ,

(27) .^pud Alex. Polyhist. citalum ab Euse-


si l'on y trouvait cela m;iis c'est avoir ;
bio , Prap., lib. IX, cap. XVII
et XVIII.
pris les paroles de Josephe pour celles (28) Nicol. Daraasc. apiid Joseph. Anliq.
de ce Nicolas dans le chapitre XVI
,
lih. I , cap. VII. Jusiiu le dit aussi , liv.
du livre IX de la Préparation évangé- XXXVI, chap. II.
(2g) Artapan, apud Euseb. Prœp., libr. IX,
cap. XVIII.
(23) f' orez saint Augustin, la même. (3o) Joseph. Antiq., libr. /, cap. XIII.
(24) f^orez
"
HeiJ., Hist. Patriarcb., tom. II, (3i) Vuyei Salian , loin. I , pai;. 4i4-
pag. 88. (.^2) Vorez la ri'marque 'Aj de VarUcle Ârisa.
(îS) Joseph. Antiq., libr. l , cap. VII. (33i Vuyez lieidcjgcr, Hist- Patriarch., tom.
(26J Idem , ibidem , caj}. VIII. II ,fag. i/jï.
,.

ABRAHAM. 91
avaient accouhimé d'y lire la veille Y) Qu'ily cnmmencnahâtirle tem-
du jour du sabbat. L'auteur du livre p'«.] Ils content qu'Adam , chassé du
intiuilé Cozri dit qie cet ouvraj^e d'A- paradis, pria le bon Dieu de lui per-
braham est profond et qu'il a besoin , mettre de bâtir une maison, sur le
d'iinr! explication prolixe; qu'il ensei- plan de celle qu'il avait vue dans le
gne l'unité de Dieu ; qu'à certains ciel; une maison , dis- je , qui fût le
égards il semble dire des choses bien
,
lien où il dirigeât ses prières, et au-
difiérentes; mais qu'à d'au'res égards tour duquel il marchât par dévotion.
il ne tend qu'à un même but. Tous Dieu fit tomber une tente qui ressem-
les Juifs n'ont pas attribué ce livre à blait maison qu'Adam avait vue-
à. la
C'^ grand patriarche. H y en a qui ont Adam servit de cette tente pour
se
déclaré hautement que c'est un ouvra- les usages qu'il souhaitait. Après sa
ge supp >sé et qui condamnent la har-
, mort , Seth bâtit une maison de pierre
diesse du rabbin Akiba , qu'ils croient et de boue sur ce modèle le déluge :

le véritable auteur de la pièce (34 j • la ruina ; mais Abraham et Ismaèl la


Q lis dcflU potestutein R. Aqulbœ scri- réparèrent par l'ordre de Dieu. D'au-
haruh Itbruni Jezira , nomine Abraha- tres l'ont successivement réparée à
mi patris nostri ,35) ? Le supplément mesure qu'elle se ruinait; et enGn
de Moréri a sur ce s-.tjet un article bien Héjazus, Tan 74 ^e Thégire , la mit en
curieux , tiré de l'Histoire Critique du l'état qu'elle est aujourd'hui : et c'est
père Simon, Consultez-la aux pages l'oratoire du temple de la Mecque ''.^1)
,

48 et556 de l'édition de Rotterdam. Voyez la remarque (I) de l'article


Aux premiers siècles du christianisme, Agar.
les hérétiques Séttiiens débitèrent une (G) D'une uerlu Lien singulière.'}
Apocalypse d'Abraham, comme saint Gretser témoigne avoirln, dans un ma
Épiphane 'e remarque (36;. Origène a nuscritgrec de la bibliothèque d'Augs-
ci!é un prétendu ndu ouvrage de ce pa- pa bourg, qu iinranam planta un cypr
qu'Abra'iam cyprès.
triarche où un bon et un mauvais an- un pin et un cèdre , qui se réunirent
ge sont introduits disputant de son en un seul arbre; chacun néanmoins
salut ou de sa per*e i^"]^. L'Assomp- retenant en propriété ses racines et ses
tion d'Abraham était aussi un ouvrage branches que cet arbre fut coupé , :

supposé (38; La bibliothèque du mo- lorsqu'on prépara les matériaux du


nastère de Sainte-Croix, sur le mont temple de Salomon mais qu'il ne fut ;

d'Amara en Ethiopie, contient, dit-on point possible de l'ajuster en aucun


(39) les livres qui furent composés endroit
, que Salomon, voyant cela, :

par Abraham dans la vallée de .Mara- résolut de le faire servir de banc :

bré où il enseigna la philosophie a. que la sibylle, y étant menée, ne vou-


,

ceux par le moyen desquels il défit les lut jamais s'y asseoir, et qu'elle pré-
cinq [^o) rois qui ai'uient pris Loth son dit que le rédempteur des hommes
neveu. Au reste l'ouvrage de la créa- mourrait triomphamment sur ce bois
, :

tion, supposé à Abraham, fut impri- que Salomon l'entoura de trente croix
mé à Paris l'an i552, traduit en latin d'argent, et que cette situation dura
par Postel et accompagné de notes. jusqu'à la mort de Jésus-Christ (43).
,

Piittangel, juif converti et professeur Cela me remet en mémoire le chêne


,

à Konigsberg en donna une traduc- de Mambré sous lequel on prétend


, ,

tion latine avec des notes Tan 1642 qu'Abraham ait quelquefois cherché
,

(40- la fraîcheur (44)- On a dit que ce


chêne vivait encore sous l'empire de
(34) Abraham Zachat, libro Judiaslo, pag.
in.

apud Heidegger,
Constans (45). Diys, id est, quercus
52 , ib:d.
(35) Piœfal. Il Zobai-MantuaDi, apud eumd. Mambre juxUiHebron in qud usquc- . ,

Heidegger, ibid. ad œlaiem infuntiœ ineœ et Conslantii


Çid) Kpipii.Tn. aJvers. Haeres., pag, 286.
(3-) Origen. Homil. XXXV; in Lucam, apud (42) Ex Pocockii Xotià in Specim. Hist. Arab
Hiidegger, ibid. pag. ii5.
(38) In Synopsi Attianasii , liber., t^ui Assamp- (43) Gretser. de Crnce lib. I. ,

tlo Abrabami diciCur, inler rejeclos rumeraiur. XVtlIj


^!^!^) La ver-ion des Septante, Genèse,
Heidegger, ibid. r. I favorise cela.
,

(3p) Kircherus, dans le Gallois, Traité des (45;iiidor. , ;,*. xrri, cap. apud ni,
Bibliolbéques , po^'. 142, e'd.t. de Paris. Bonifacium Histor. Ludicr,, pag. 385. // eut
,

(4o) Il fallait dire quatre. mieux fait s'il eiil cite' ce que je cite de saini.
',4iJ Spizelii Spccim. Bibl. Jerc-ni.
,

9'-î ABRAM.
régis impenum, terelynthus momira- humaniste
, et il parut à ses su-
batur peri'etus, et annns niiiiiniludine ^ i xi • '
i

imncans^suhqnâhnbaa^it Abraham. P^^^urs assez grand théologien


M'uo aiitem cultu ab ethnuis habita pour être élevé à la profession
est, et uelut quodnm insigni noinine en théo'ogie
dans l'université de
TJZT''
me ^^% ^\ 'I"^^'l"^^-"."^ ™f: Pont-à-Mousson. Il exerça cette
ont pousse extravagance jusqu 1 à
dire qu on l'a vu il n'y a que trois charge pendant dix-sept ans , et
cents ans. Il ne faut pas. disent ils le mourut le 7*. jour de septembre
,

distinguer de celte canne de Seth que i655. llavaitenseigiié les huma-


le voyageur Mandeville (ô quel té-
nités avant que de commencer la
moin !; vit proche de la ville d'Hébron
profession en théologie (a). Il pu-
(47)-.
(H) Et n'emploie pas une bonne re- blia plusieurs livres (A). C'est une
futatinn.'] prétend que ces paroles
Il chose assez étrange qu'ayant été
Sodome, donnez-moi les un auteur de distinction il ait été
t^JZ,^^
personnes, et preiuz les biens pour -^ j
*' peu Connu dans les pays etran-
,

i'ous f48) , signifient, selon le sens lit-


tëral et véritable, /rt/jsez rentrer duns g^rs (B).
le culte des idoles ceux que vous ai'cz
(a) r/rerfeNallian. Sotuel , BiLl. Societ.
instruits en l'otrejoi; mais qu'Abra- Jesu, ptig. 622.
ham protesta devant tout le peuple
qu'il n'en ferait rien. L'auteur cite les (A) Il publia plusieurs lit^res* '.^Dei
versets 22 et 23 du chapitre XIV delà «"'• « sur la paraphrase de l'euangile
Genèse, et puis il accuse d'impudence (^^ saint Jean, composée en vers grecs
et deblaspliéme les Thalmudistes qui par Nonnus : un Commentaire sur
ont dit qu<* le patriarche acquiesça Virgile un recueil de traités théo
:

aux demandes du roi de Sodome. lia logiques, intitulé P/irt/vi* f-^eteris Tcs-
raison de les condamner, en ce qu'ils tairienti sacrnnim Qnœstionum
, siue
supposent que ce prince redemandait Libri Xf^ les Axiomes de la rie
:

des personnes converties à la vraie re- chrétienne *^ et une Gr mimaire hé-


:

ligion car on ne redemandait point


; braïque, en vers latins. Il a traduit en
les domestiques du patriarche on i-e- français *' de l'italien de Bartoli la
,

demandait seulement les sujets que f^ie de f^incenl Carajfa, /.'Jinmihe de


les quatre rois avaient pris en pillant Lettres , et la Pauvreté contente {\).
Sodome (49). Mais le père Bartolocci Son Commentaire sur Cicéron est un
a grand tort de supposer qu'Abraham ouvrage d'un grand travail les ana- ^

ne les rendit pas Ce qu'il cite de l'É- lyses de logique y sont bonnes et
criture est visiblement sa condam- exactes les notes y sont remplies de
;

nation. beaucoup de littérature mais comme :

il a versé là-dedans avec trop de pro-


(46) HIeron. In Locis Hebr. Lilt.
D. Vorei la
remarque (G) de l'article BARCocoEBàs. fusion les fruits de ses veilles, il est
(47) ^ojez Ponlfacli Hist. Ludicr., pag. 2S9. tombé dans une longueur qui rebute
Son litrefui imprime' à Denise, chez Baleuniuy,
les moins paresseux. Ce (Commentaire
en 1643, ùi-4, el n'imprime à Bruxelles chez,
J. Muinmartiut en 1656, aussi in-4.
,
,
ne comprend que les oraisons du der-
(48) Oencse, chup. Xir, v. 21. nier volume, jusqu'à la 2*. philippique
(49) /' est dit au versH 16 qu'Abraham ra-
mena Lot, son frère , et ses biens, et aussi les *i De cviq ouvrages d' /thram donljolr donne
femmes et le peuple. les titres et qu'il reproche à Barle d''avuiroublie's,
deux sont des manwcrits, et un autre (Disposi-
tio analylica aliquot oralionnm Ciceronis brcvi-
ABRAM( Nicolas), jésuite lor- bus tabiilis corapreljpnsa , de l'at'en de Joly,
!

ram, ne au diocèse de Toul * /au partie du Commentaire sur les oraisons de


, ' Cicéron, menlioni.é par Barle.
P'Q . ,
an 1009

,
,
entra dans la société *i Mr remarque que ce Uure est en latin:
Axioraata vitœ Chri.-itiana;, iC54
en 1606 et fit profession du qua-
,
*i Barle, dit Jolr , est excusable d'avoir at-
trième vœu en 1623. Il était bon tribue' ces trois traductions au P Àbram , puis- .

qii'il tCa fait en cela que suivre le P. Sotuel


qui les donne ailleurs et avec raison au P. Tho-
• Jolj le/ait naître à Cherval. D. Calinel
mas Leblanc.
(fans sa Pihlio'lipque de Lorraine, dit à Xtt-
(i) Ex \alliaii. Sotuel, Bibl. Scriptor. Si;-
I ortfal
,
près de Charmes. ricl. Jesu pag- Cjî.
,
.

ABSTÉMIUS. (^^
inclusivement, Pt néanmoins, il est en le Mire et le père Oudin n'en disent
deux tomrs in-folio. Ils furent impri- pas davantage relui-ià dans son
:
,

niés à Paris, l'an i63i. Le Commen- ^uctunum de Scripiorilius EcclesiaS"


taire sur Virgile est beaucoii|) plus ticis imprimé Tan 1639 celui-Ci
,
j

court; ce qui est cause qu'il a rendu dans son Supplementum de Scriptori-
pliis de service dans les écoles. On *"s ^fc/es/Vjincà imprimé l'an 1686.
,

Toit à la tin de sou Pharus Veleris De la manière que .M. Simon cite plu-
Testamenli 2), un long traité f/e sieurs fois cet ouvrage du père Abram
f^erit'iie et âJendacio, où il ne donne (6), on voit bien qu'il en fait cas et
pas dans les maximes des casuistes que ce n'est pas m\ livre tiui méritât
„;„:j„„
rigides. J'a»
d'être ;m voici un
inconnu. Mais •
'

fait plus
M. de Monnaie m'a averti, 1°. que singulier. Martin Schoockius, dont le
la
ce jésuite a supplée, en soixante et fort était une vaste et prodigieuse lec-
onze vers grecs de sa façon, l'iustoire ture déclara sur ses vieux jours qu'il ,

de la femme adultère, qui manquait n'avait jamais ouï parler d'uu auteur
au Vlli^. chapitre de la paraphrase de qui s'appelât Nicolas Abraham. Uanc
Nonnus (3j 2°. que Reiuésius parle
''
:,
si tuitus fuerit nescio quis NlcoLius
de ce Nicolas Abrara dans la page Abinhanius (jani priuuliis euni nosse
l55de ses lettres ad H
ffmnnnum et inctpin ) prolixo examine haud opus
R'iperiuni. J'ai consulté cet endroit- J'uisset (7).
là , et j'y ai trouvé cet éloge Si me :
(6; Hist. Cr!t. Se' Comment, du ^'ûllveau
cuni tni mtionibus aiidirc liïc noies Teslament chap. XXIII. , ,

i^el hujus (Nie. Abrami ) auclorituti cè- Ct) Si h.iockiu'i, de Fieuore unciario, pag. lo-.
Il eit imprimé Van 1G68.
de. Est enim sanè ciuaiii dnctissimus ,
et maxime iduneus ejplicamlo l'uHio.
Joignons à ce témoignage celui d'un * (Laurent), ne ABSTÉMIUS
autre savant du même pays. .4d in- à Macéra ta, dans la Marche d' An-
tetligf.iidas , adque ad mum t'ansj'e- cône , s'attacha à l'étude des
rendas nraliones Ciceronis sujjlciet
belles-lettres et y fitde pro-
assez
Coiumeiitarius Jo Thomae Fre
nisi f/ms tiddere mnlii prniixns Com- gfès. Il les enseigna dans Urbia
menlarins Nicolai Abrami jesuitœ mul- et y fut bibliothécaire du duc
td reinm pariétale inslructns (4j. Guido Ubaido («) , auquel il
(B, Si peu connu dans les pays étran-
dédia un petit livre oii il expli-
gers.'] St^s notes sur la paraphrase de
Nonnus furent imprimées à Paris quait quelques passages difficiles
,

chez Sébasti.-n Crara)isi, l'au 1622, des anciens auteurs {b). Ce fut
et il ne paraît pas cpi'Heinsius eu et'lt sous le pontificat d'Alexandre VI
connais>ance lorsqu'en 1627 i' publia
qu'il publia cet ouvrage et un
cette mè.me paraplirase a\ei- un grand ,

commentaire. C'est ce qu'il nomme autre qui a pour titre Hecato-


Anstnrchus sacer M. Cave n'avait mjthium , et qui fut dédié à Oc-
point non plus ouï parler des notes tavien Ubaldini
, comte de Mer-
de ce jésuite, puisqu'il n'en dit rien
catelli. La raison de ce titre fut
dans l'endroit où il rapporte les ditlé-
rentes éditions de Nonnus (5). Aubert tirée de ce que l'ouvrage était un
recueil de cent fables (c). Il en
(2) Impiiinf' h Parir en 1648 , in-folio.
(3) Ce.t uni' eiri-ur. l'rançoi- N'aiiNius ,
qui doubla le nombre dans la suite.
donna unf édition dt* Xonnu? Cnn i5Hcj, e.^t

le\'éiitable auieurde cet endroit suppléé. [M. rïe


,

On les a souvent imprimées (A)


la Croze ni*a a^'evti que M. .Simon parle de cela avec celles à^s anciens faiseurs
a la page 33e de son Hist critiij. des Commen-
tateurs.] d'apologues , Ésope , Phèdre Ga- ,
* On voit dans Jtly que Namius a^'ait, en
ifi^g dans son édition de Nonnus
, suppléé , * Son véritable nom, dit /e Menagiaoa,
36{4 ^'ers ; (i .fon e.xetnple^ Ahrani suppléa par-i
1715,111, 4'l, était Be'vilacqiia.
vers de ta façon Vhisloiie d'- la ffinnie adultère.
(a Fojrez Gruteri Thés. Crit tom. I,
(4 .loh." An reas Bosius île Piudenliâ et Elo- ,

i^uetiiiâ t'omparanda pag. i^^o.


.
paff. 878.
(5 f'i-.tora litlrrari.! .Scriplorum ecclesiastico- [b Opusculum de nonnullis Locis oIjscu-
ruœ pag. sgq dt Vida, de Lundres
, , sn i638 ris. yide Episl dédient, cjiis Ilecatomytlùi.
,
in-foli» {c)Fajei-en Cépitra dJdicatoirv.
94 ABUC ARAS.
brias Aviénus , etc. taU-ns voici j'en ai gagné cinq autres
que Néve- ,
, ,

let a rassemblées en un corps et par-dessus. Le prélat prit tant de plai-


sir à une réponse si facétieuse qu'il ,
accompagnées de quelques notes. donna pleine absolution au prêtre.
Abstéraius ne s'est pas toujours ()uo dicLo tnm farelo perinntiis epi~
borné à l'idée de ces anciens ori- scopus homini l'tniam dédit, La mo- ,

ralité que l'auteur a mise au bas de la


ginaux; il mêle quelquefois par-
fable ne vaut pas mieux que la fable
m.i ses fables ce que l'on appelle même par rapport à de semblables
,

un conte pour rire , et il n'épar- profanations de l'Ecriture. Ptusqu'ort


gne pas toujours le clergé (B). m peut pas, dit-il (i), se jus'ijier
d un crime par de bonnes raisn ,s il
On trouve de ses conjectures sur
Jaut recourir a quelque plaisanterie.
,

quelques passages des anciens il est certain que cela a réuSii en plu-

dans le premier volume du Tré- sieurs rencontres; mais un évêque qui


sor Critique de Grutérus , on en se paierait d'une profanation aussi
goguenarde que celle qu'on vient de
trouve, dis -je, sous le titre
lire ne ferait guère rnieux son devoir
,

à^Annoiationes varice. Elles sont que le gardien des cinq religieuses.


en bien petit nombre et ne rem- (C) Prenez garde aux obstrt'ations
plissent pas quinze pages. Ily a que l'on nia communiquée^ depuis la
première édition. ] Les conjectures <c
une préface de sa façon à la tète d'Abstémius, inse'rées dans le pre-
))

de l'Aurélius Victor , qui fut im- raier volume du Trésor Critique de


j)

primé à Venise eu i5o5 {dj. Je Gruter ne sont qu'un extrait de


i> ,

ne sais pas s'il survécut beaucoup » l'ouvrage intitulé (Jbicurorum loco-


»«?7t (•2),d'idié au ducd'Urbin. Gru-
))
à cette édition. Il est un de ceux
ter, qui nous a donné cet extrait,
>>

que Laurent Valle a censurés » a mis au commencement une petite


Prenez garde aux observations note marginale, dans laquelle il dit
i>

que l'on m'a communiquées de- )) c[ue Laurent Valle a critiqué cet
» Abstémius. Je doute fort de ce fait;
puis la première édition (C).
» nulle trace de cette prétendue cri-
(d) Epilome Bibliot. Gemeri. j) tique ne se trouvant dans les œ'u-
» vres de Laurent Valle que d'ailleurs
,

(A) On a soufent imprimées.']


les » Abstémius a hautement loué dans
Gesner marf(ne l'édition de Stras- » la préface de son second Uecatomy-
bourg , en i552. Celle dont ISëvelet a » ihium et avec qui apparemment il
,

eu soin est plus moderne de quatre- » n'a pas dù avoir de grands démêlés,
vingt-huit ans. Les notes qu'il y a }) lui a3'ant survécu toutau moins qua-

jointes sont peu de chose; et ce n'est » rante-huit ans. II est le premier, que
point sans doute pour l'amour d'elles » je sache, qui ait écrit le conte des ta-
qu'on a renouvelé souvent l'impres- » lens multipliés. Le Bandel, Verville,
sion. Il n'en a point fait sur les fables » et d'autres l'ont depuis rapporté. »
d'Abstemius aussi n'en avaient-elles
: Ces paroles sont tirées d une lettre qui
pas besoin. m'a été écrite par M. de la Monnaie.
(B) Il n'épargna pns toujours le cler-
(i) Fabula indicat, peccala, c'um ratione
^e'.] Eu voici une preuve. La CIV*. de
neqwanl, urbanitaLe diluendà. Abstenu Fa-
ses fables est qu'un prêtre fut commis bul. ClV.
par son prélat à la garde d'un cou- (i) yojei ci-dessus la citaUon (b) de cet at'
ticle.
vent où il y avait cinq religieuses , de
chacune desquelles il eut un garçon
au bout de l'an. L'évêque apprenant ,
ABUCARAS (Théodore) a été
cette nouvelle , s'en fâcha , lit venir le un prélat (A) fort zélé pour l'or-
prêtre, lui fil une rude mercuriale , thodoxie , et il l'a fait paraître
et le traita de perfide de sacrilège ,
,
par plus de quarante disserta-
d'homme qui avait ose violer le tem-
ple du Saint-Esprit. Seigneur, lui ré-
tions qu'il a écrites , ou contre
pondit-on, yous m'aidez commis cinq les juifs ou contre les mahoraé-
,
,.

ABDC ARAS. g5
tans ou contre
,
hérétiques , les lui commanda de se tenir coi.
ou en général sur des matières Deux ans après (c) il se présenta
de religion. Génébrard mit en au concile de Constantinople
latin quinze de ces dissertations, et demanda humblement pardon
et les publia. Gretser , les joi- de ce qu'il avait suivi le parti
gnant aux autres (B) que le père de Photius , et protesta qu'on l'y
,

Turrien ou lui avaient traduites, avait entraîné par violence et par


donna une édition qui semblait artifice. Il obtint ce qu'il souhai-
complète (a). Mais il oublia quel- tait : le patriarche le reçut à la
que chose car M. Arnoldus fit
; paix de l'Eglise , et lui donna
imprimer à Paris, en i685, un place dans l'assemblée (^;. M. Ar-
Traité d'Abucaras qui n'était noldus avait connu en Angleter-
jamais sorti de dessous la presse. re un savant homme qui crovait
Il l'avait trouvé dans la Biblio- qu' Abucaras avait vécu au sep-
thèque d'Oxford. Il ne l'accom- tième siècle (e). On inséra les œu-
pagna point de notes, parce qu'il vres de cet auteur dans le sup-
n'osa toucher au grand mystère plément de la Bibliothèque des
que l'auteur examine dans ce rères , à l'édition de Paris , en
Traité {b) c'est celui de l'incar-
; 1624.
nation et de l'union hypostati- {c\ En 869.

que. On est en peine sur le temps (iiNicetai Papblagon. inVità Ignatii, apnd
CaTe Hislor. Lillerar. Scriplor. Eccles.
auquel Abucaras a vécu. Le jé-
,
,

pag. 557.
suite Turrien le croit disciple de (e; Ârnoldi prtrfatio.

Jean Damascène. C'est le placer


(A) Un prélat.'] Les uns l'appclleuf
au huitième siècle. Gretser le fait archiepiscopum CanVe(i); les antres
un peu plus jeune (Q , car il ne episcnpum Cariée. Ka^ûv 'EtiVxgtov,,
le distingue point de celui qui fut Carum episcopum (2). M. Arnolchi-»
si mêlé dans les troubles de l'é-
croitqu'Abucaras était évèque deCha-
ran dans la Mésopotamie
, c'a été :

glise de Constantinople au temps aussi le sentiment de Jnsias Semler


du patriarche Ignace et de Pho- (3). Photius avait destiné Abucaras à
tius. Cet Abucaras suivit d'abord la prélature de Laodicée comme iM ,

le parti de Photius et se char-


Cave le remarque.
,
(B) Gretser, les joignant aux autres."]
gea d'aller pour lui en ambassade
Le Journal des Sa vans donna une idée
avec Zacharie évèque de Chal-
,
très -fausse de l'édition de ce jésuite.
cédoine , à la cour de l'ejnpereur Génébrard, dit-on (4), a traduit et pu-
Louis II. Il devait présenter à blié quinze dissertations de cet auteur .

et Gretser les a jointes à ce qu'il a re-


ce prince le livre que Photius
cueilli d'ylnaslase Sinaïte dans deux
avait composé contre le pape Ni- manuscrits de la bibliothèque de Ba-
colas , et l'exciter à secouer le l'ière. Si l'on avait entendu le latin de

joug du pape. Mais à peine s'é- M. Arnoldus, on ne serait pas tombé


dans cette faute. Theo'Iori Ahucarce
tait-il rais en chemin, que Basile
dissertatinnes quindecirn jamdiii latine
le Macédonien qui avait usurpé
, rertit et edidtt Genebrardus , deindè
l'emjîire après avoir fait mourir
,
(1) Cave, Hislor. Liller. Script. F.cc\es. pag.
l'empereur Michel , le rappela et 55-. Oudio, Supplem., pag. sSg.
(aj Spizelii Spécimen Bibl.; Konigii Bibl. vet.
et nova; et Arnoldi prsefat o.
{a^ Elle est grec f ne et latine, et imprimée
(3) Simler, Epit. liibl. Grsneri.
àlngolslad en i6o6, in-!^.
(4) Journal XXHI de i6S5 ,
paç. 368, e4ii.
{h) Arnolili jir;ifjtio dr HoU
96 ABUDHAHER
Thcodorum Anastasio Sinaïtœ ob ar- pendant que ces pauvres supersti-
gumenti similitudinem conjuiixit Ja- tour de cet ora-
tieux faisaient le
cobiis Gretserus , deditque ea dimbus
toire sacré selon la rubrique de
codicibus MSS. ducis BauariœMuxi-
mUiini (5). On voit'trois chosfs dans leurs dévotions. Les karmatiens
1**. que Gretser publia les
ce latin :
ne se contentèrent pas de ce car-
œuvres d'Abncaras après que Gë- nage ; ils enlevèrent du temple la
nébrard en eut publié une quinzaine
de pièces a°. que Gretser les publia
:
pierre noire qu'on y vénérait
sur deux manuscrits du dur de Baviè- comme un présent descendu du
re 3°. qu'il les joignit avec Auasfase
: ciel {h) ;ils abattirent la porte du
Sinaïte. Il ne paraît pres(|ue rien de
temple, et remplirent de corps
tout cela dans le Journal des Savaus.
On n'y voit pas que Gretser ait publie' morts le puits Zamzam , l'une
plus de pièces que Gènëbrard , ni que des plus saintes et des plus sa-
les manuscrits de Bavière aient servi crées parties du lieu. Pour sur-
à l'édition d'Abncaras et ou y voit
croît d'affliction Abudhalier fai-
:
,
qu'ils ne servirent qu'à l'édition d'A-
nastase, de quoi M. Arnoldus n'avait
sait m^ille railleries de la religion
dît mot. Au reste , il ne faut pas mahométane; il amena son che-
croire que toutes les œuvres d'Ana- val à l'entrée de la Caaba , afin
stase Sinaïte aient été publiées avec
de lui faire faire ses ordures en
Tiie'odore Abucaras il n'y a que le
:

Traité intitulé 'OcTuyàc , i. e. i'iœ Dux cet endroit— là, et il disait aux
adi^e/'iùs acephar'os , que l'on ait joint mahométans qu'ils étaient bien
aux œuvres d'Abucaïas dans l'édi- fous de donner à cet édifice le
tion du père Gretser.
(C j Gretser le J ait un peu plus jeune.']
nom de maison de Dieu ; car ,

En lisant la préface de M. Arnoldtis,


ajoutait-il , si Dieu faisait cas
on est presque convaincu que ce jé- de ce temple , // m'aurait déjà
suite n a osé rien avancer touchant écrasé de sa foudre moi qui ai ^

r,1ge d'Ahucaras. Grelàerus i>eio quis


profané d'une manière si outrée
fueril jibucaras qun seculojlnruerit ,
{C) celte maison. La dévot'on des
,

ab Antonio f^elsero SS. T/ieol. D.


Hcclesiœ Friicngensis canonico p'te- ,
mahométans pour ce temple ne
posito Spaltemi, cujus honnri libium diminua point pour cela; ils con-
suum dedicnt^it, discere uolebat (6). tinuèrent à y aller tous les ans en
M. Arnoldus ne disant que cela de
Gretser, insinue manifestement qu il
pèlerinage. Lorsque les karma-
n'en faut pas chercher davantage dans tiens l'eurent aperçu ils se réso- ,

la préface de ce jésuite. On y trouve lurent à leur renvoyer la pierre


néanmoins d'autres choses , savoir , noire, après l'avoir gardée vingt-
que l'Abucaïas dont il est parlé dans
la vie de saint Ignace, patriarche de
deux ans. Ils voulurent plaisan-
Constantinople, est le même que ce- ter quelque temps après , et se
lui qui a composé les Dissertations. naoquer de la sottise de ces dévo-
(5) Arnolfli prefatio. tions. T^oilà des gens disaient- ,
(ti;Id. Ibid.
ils , qui croient a^'oir la [n'erre

ABUDHAHER. C'est le nom noire ; mais nous leur en. a^ons


du chef des karmatiens (A), sous envoyé une autre à la place de
lequel profanèreut et désolè-
ils celle-là : l'objet donc de leur dé-
rent la Mecque,
l'an 817 de l'iié- votion est un être faux et suppo^
gire (B). Ils dépouillèrent les pè- se. Ils songeaient par de tels dis-
lerins , et en tuèrent 1700 dans temple qui est destinée à l'adoration et à
l'enceinte même de la Caaba (a) ,
l'oraison.
\b) rojet la remarqua (K) du l'article
!(i) C'esl ainsi qu'on nomme la partie du AOAK.
ABULFEDA. 97
aune'e, et tlisent qu'on ne recouvra
cours à quelque chose de plus so-
la pierre qu'en SSg mais Safioddia :

lide (Dy que n'est le plaisir d'in- abrège le temps il met l'enlèvement :

sulter. On leur répondit qu'ils de la pierre à l'an 3 19, et la restitu-


n'avaient qu'à venir voir l'épreu- tion à l'an 335 (4).
(C) D' une manièie si outrée.'] Ahmed
ve qu'on voulait faire et que , si,
Ebn Yusef dit que jamais la religion
la pierre nageait sur l'eau ,
elle se-
maliométane n'a souliert une afflic-
rait la véritable. Elle nagea ef- tion comparable à celle-là (5).

fectivement en présence des kar- (D) quelque chose de plus snliJe.']^


Ils avaient espéré d'attirer à eux les
raatiens, et ainsi on racla de
caravanes des pèlerins car ils s'é- ,

tous les esprits les doutes et les taient imaginé que ces bonnes gens
scrupules que les railleries de iraient au lieu où serait la pierre. Voi-
ces profanes pouvaient faire naî- là pourquoi ils ne voulurent point
la mettre à rançon ils n'écoutèrent
tre (c). Voilà un petit échan-
:

ni les prières ni les promesses. Mais,


tillon de la légende des peuples voyaut qu'on ne discontinuait point
orientaux. d'aller à la Mecque, et que personne
Vous trouverez beaucoup de ne venait faire ses dévotions à la pier-
re qu'ils avaient chez eux, ils la ren-
choses curieuses touchant les kar-
dirent. Ce ne fut pas sans s'y réser-
matiens et Abudhaher dans la ver quelque droit; car, lorsqu ils di-
Bibliothèque Orientale de M. rent qu'ils n'avaient rendu (|u'une
d'Herbelot (d). Il les nomme fausse pierre ils prétendirent sans ,

des scrupules dans les es-


carmathes , et il écrit Jbu Tha- doute jeter
prits, et partager pour le moins les
Jier le nom de leur chef. pèlerinages, tôt ou tard. Ceux de la
Pocockii Noiae in Spécimen Hist. Arab , Mecque en prévirent les conséquences,
(c)
pag. 1 18 1 19, ejc Abulfed;i et Ahmede
,
ELn et s'avisèrent de publier que leur
Yusef. pierre avait passé par l'épreuve et y
{d] Dans l'article CarmatK pag. 256
,
et
avait été vérifiée.
suiv.
C4) Ibidem, pag. 119.
(A) Desharmatiens.'\ Cesf le nom (5) Ih'd.
d'une secte qui s''ele\a dans l'Arabie,
environ Tan 278 de Thégire (t). Le ABULFEDA ( Ismael) , prince
premier chef de cette secte fut un de Haraah, ville de Syrie, succéda
blaspliemateiir et un imposteur qui,
à son frère l'an ^.f^ de l'hégire
attirant dans son parti ceux d'entre
(A), qui répond à l'an iSp de
les hahitans de la campagne et des
déserts qui avaient le moins de reli- Jésus-Christ et mourut trois ans ,

gion et de lumières s'acquit une plei- après , à l'âge d'environ soixante-


ne autorité' sur eux. On peut voir douze ans [a). Il aimait l'étude ,
dansPocock (1) diverses etymolo-ics
et en particulier celle de la géo-
du nom des karmatiens. Ils firent
peu de chose au commencement mais , graphie comme on le peut con-
,

ils firent des progrès incroyables.


Ils
naître par l'ouvrage qui a pour ti-
s'emparèrent de la plus grande partie Chorasmiœ et Mawaralnah-
tre :

des provinces d'Eraki et de Hejazi et ;

se répandirent dans la Syrie et ius- ,


rœ , hnc est regiomim extra fin-
,

ques aux portes du g' and Caire (3). viiim Oxitm descn'ptio ex tabulis
(B) L'an3f] de l'héi^lre.'] Abulfeda Ahiilfedœ Ismaelis ,
principis
et Ahmed Ebn Yusef marquent cette imprimé à Lon-
Hamah'p). Il fut
Ci) C'est noire année 891.
(al Vocock., dans ses notes sur /e Spécimen
Hislor. Arab. ,
(2) Pocock. , Xotœ in spécimen dit qiiil naquit l'an
Hist. Arab., pag. 363 ,
pa^. 371. Ce Spécimen fui imprime' à Oxford
i5r2.de l'hégire. ,
en i65o.
{b) Le titre arabe signife Canon, o« plutôt
(3)Pococl., Not»ia Spécimen Histor. Arab.,
Rcctificatio Terrarum, à ce que t/ùGravius,
pa^. 371.

TOME I.
-

98 ABUL FEDA.
dres l'an i65o. L'auteur y cite plaire de la bibliothèque impé-
quantité d'auteurs arabes. Il le riale qui lui fut prêté par Ten-
,

composa long-temps avant que gnagélius, n'était pas lisible en


de monter sur le trône; car on a divers endroits , il laissa le prin-
marqué à la fin du livre qu'il fut cipal de la peine et de la gloire
achevé l'an 721 de l'hégire, qui à Jean Gravius (c). 11 est surpre-
était le iSai de Jésus-Christ. Le nant que M. Moréri ait pu en-
docte Jean Gravius est celui à qui tasser autant de fautes dans un
l'on est redevable de l'édition de seul article (B) qu'il eu a entas-
Londres dont j'ai parlé. 11 joignit sé dans l'article d'Abulfeda. Spi-
à l'original ,
qui est en arabe ,
zélius ne savait pas en 1668, ni
une traduction latine et une pré- Konig en 1678, qu'Abulfeda
face où il nous apprend qu'il a eût été en Angleterre {d).
consulté cinq différens manu- (c) Inférez de là que Fabriciiis , dans son
scrits : le qu'Er- Specimea Lingua; Arab. paff. gg, a tort de dire
premier est celui
dans Konig que Schickard a traduit en la-
pénius avait copié sur l'exem- tin Pouiii'age
d' Jhulfeda. Spizélius, dans son
plaire de la bibliothèque palati- Specim. Bibl., cite le même Fabrice, comme
ayant dit que Schickard a traduit tout cet
ne; le second est cet exemplaire
ouvrage.
même, qui est aujourd'hui à la [il) Spizelii Specim. Bibliotli. univers.

bibliothèque du Vatican deux ;

autres appartenaient à Pocock (A) L'an 74^ ^^ l'hégire.'] C'est et


;
que témoijçne l'auteur arabe du livre
le cinquième avait été acheté à
intitule al Sucer Jan (i). Ainsi le je'-
Constantinople. On apprend de suite Clancanus s'est abusé lorsqu'il
plus dans cette préface que Ra- a uais Abnlfeda au quatrième siècle du
musius est le premier qui ait loué cliristianisme (•2). Cette erreur devait
le garantir de l'autre méprise où il
cet ouvrage d'Abulfeda et qui en
est tombé en donnant à ce géographe
ait indiqué l'usage; qu'ensuite le titre de prince de Syrie d'Assy-
^

Castaldus s'en servit à corriger rie et de Perse. Un peu d'attention


les longitudes et les latitudes de aurait pu lui faire comprendre qu'un
auteur arabe et mahométan ne pou-
divers lieux; qu'Ortèlius en parle
vait pas être roi de Perse quatre cents
souvent dans son Trésor Géogra- ans après Jésus-Christ. Vossius, ayant
phique, non pas comme l'ayant rapporté le sentiment de Blancanus,
vu mais sur la foi de Castal- s'est contenté de dire qu'il croyait
,
qu'Abulfeda n'était pas à beaucoup
dus qu'Erpénius fâché que per- ,
;
près si ancien mais au reste il lui
;
sonne ne l'eût encore donné au donne les qualités de prince de Syrie,
public , résolut de le publier, et d'Assyrie et de Perse (3) Simler les
:

qu'il l'aurait fait , si la mort ne lui donne aussi. Il s'approche assez du


vrai quant à la chronologie puisqu'il
l'eûtemporté au beau milieu de ,

dit qu'il y avait trois cents ans qu'A-


sa course que Schickard fut le
; bulfeda florissait (4). Au lieu de cela ,
premier qui en tira plusieurs re- M. lAIorérilui imputed'avoir cru, avec
marques d'une profonde érudi- Blancanus que ce prince de Syrie vi-
,

vaitdans le lll"'. ou le IV«. siècle Mais


tion inconnues jusqu'alors ,
, et
:

il est sdr ajoute M. Moréri, qu'il a


.

qu'il a insérées dans son Tarich


Persicum ; mais coraime l'exem- ,
(i) Àpud Gravium, prœfal.
(2) Il le nomme Abifeldea dans sa Chronol.
Mntbematic.
Cest pourquoi Konig n'a pas eu tort de (3) Vossius de Mathemalic. Discipl. pag. 200.
dire ijn'Ahiilfeda a fait un ouvrage de géo- (^4) /^^«nomiHirAbifeldeas elAbilfedôe.ts. ^ojeï
graphie intitulé Directorium Regionum. rEpitome Biblioth. Gesneri.
,

ABULFEDA. 99
uécu bennrnup plus tarcJ et peat-é r<i tingués 5 car, s'il Payait su, il n'au-
,

dam le FUI', nn dans le IX«. , ou mê- rait point rapporté Popinion de ces
me l'un 1200. Il ne fallait pas s'expri- gen.s-là sans y apposer sa censure. 2°.
mer par un peiit-éLre il fallait assurer 11 confirme cette première ob-iervalion
:

qu'il vivait dans le X1V«. siècle, puis- quand il aioute qu'Abulfeda a traité
que son ouvrage fut achevé l'an 721 de sa Gen^niphie p ,r climats. Cela con-
rhegire, coni'ne on le de'clare sur la vient mieux à col li qui nous a donné
fin. il s'est glissé une faute d'impres- la Gens^raphia Nubœnsis qu'à Abul-
sion dans le Moiéri de Hollande eu cet feda. On n'a vu de ce dernier que la
endroit. On fait dire à Jean Gravius description de quelques parties de l'A-
que notre Abiilfeda vivait au com- sie situées au delà de POxus, lesquelles
mencem -nldu XIII*. siècle; cependant il met sous les climats aS et 26 La
il a mis la mort de ce prince à l'an Géographie de Nubie est tout aulre-
1345*'. Ce qui m j fait (le la peine est ment disposée. On n'y connaît que
,

de voir que le docte Edouard Pocock sept climats on s'en tient à cette di-
:

assure qu'Abulfeda prit possession du vision des anciens; c'est à elle qu'on
gouvernement de la province de Ha- rapporte la description qu'on y donne
mah l'an 700 de l'hégire (5). On ne de toutes les parties du monde connu.
peut accorder cela avec ce que Jean Je remarquerai eu passant qu'Abul-
Gravius a établi. Or, il est plus raison- feda commence le premier climat à
nable de s'en rapporter à ce dernier l'Arabie, et non pas, comme la Geo-
qu'à l'autre parce qu'Abulfe la est grupliia IVubiensis, à la côte la plus
,

la principale matière de Gi'avius, au occidentale de l'Océan Atlantique; et


lieu que Pocock. n'en parle ([ue com- qu'il prend pour le premier méridien
me d'un fort pe4t accessoire. Mais celui ((ui passe sur le cap de Saint-
u est-il pas bien f;lciieux que des gens Vincent. 3°. On n'a fu, dit M. Moréri,
de la force de Pocock en fait d'é- jusqu'à présent que les premiers cli-
rudition orientale ne soient point un mats d'Abiilfeda; on nous J'ait espérer
guide bien sûr, et que, dans le même les autres cette année. Voilà un grand
temps qu'ils publient une chose, un mensonge; ce qu'on a public d'Abul-
de leurs collègues en fasse voir la faus- feda se rapporte, non pas atix pre-
seté? miers climats mais au 25 et au 26. 4°-
,

(B) M. Mnrériait pu entasser autant Un auteur ne devrait jamais se s?rvir


de fautes dans un seul article.'] On du terme vague de cette année; car au
vient d'en voir que'ques-unes, et voici bout de dix ans son lecteur ne sait
le reste : 1°. en disant que (pielques- plus où il en est il faut recourir à la
:

uns croient qu'Abulfeda était de Nu- date de la première imprfssion on ne ;

bie, il le confond manifestement avec la trouve qu'en quelques livres : et


l'auteur de la Geoi^ruphia NubLensis dans ceux où on la trouve, elle n'est
,

dont nous parlerons en son lieu*\ Pour pas toujours un bon garant, puisqu'il
le moins il fait connaître qu'il ignore se passe quelqui^fois bien des années
que ces deu.K auteurs doivent être dis- entre la composition et la publication
d'un livre. Nous avons ici un exemple
*' Gravius avait comme on la voit dans de l'embarras où l'on jette les lecteurs
,

Jolr pris un roi mameluck d'Egypte pour un


,

gouverneur delà province de Hamah en Srrie


par les termes de cette année. Où est
et a induit en erreur non-seulement Barle
,
l'homme qui, lisant .Moréri, puisse
mait encore Pndeaux, d''Herbelot et de la Ro- deviner en quel temps on promettait
que.
les autres climats d'Abulfeda? Cette
(5) Pncock. Nolae in Specim. Histor. Arab.,
,
année-là est bien longue ; elle a régne'
pas- 363.
*^ Barle a point dam son Dictionnaire d'ar-
jusqu'à la sixième édition inclusive-
ri

ticle sous ce litre ni qui r toit relatif; il «'r en


,
ment. 5°. Guillaume Postel est le pre-
a même aucun dans ses OEiivres diverses. La mier qui a apporte en Eurnps cet ou-
Geographia \ublensis a pour auteur un Afri- vrage, dont il publia un abrège en la-
cain nommé Edri<i. Son ouvrage, écrit en
tin. Voilà deux nouvelles fautes de
arabe, fut im/irimé dant cette langue à Bome
en i5c|2. Comme on ne connaissait pas encore Moréri. De tous les auteurs quil cite ,
le nom de Va'ileur lors de Vimpretsivn de la il n'y a que Simler qui ait relation à
iraduciion latine qui fut faite par Gabriel Sio-
cela. Or
, Simler ne dit autre chose ,
niie et J. ITeironite en 1619 à Paris on intiuila
,

le volume Geographia Nubiensii, en raison


des
sinon que Postel, ayant apporté ce li-
détails qu'd contient sur l'Afrique. vre de rOrient , laissa à Venise l'a-
,

lOO ABULPHARAGE.
brëgé qu'il en traduisit, au sieur Ra- nés (B). Il vivait sur la fin du
rausius (6) qui avait dessein de pu-
, treizième siècle * , et faisait pro-
blier un second toute du Noiiveau-
fession du christianisme (C). Cela
Mrinde. Il y a bien de la diflercnce
entre apporter un livre de TOrient n'empêclia point que plusieurs
et être le premier qui l'apporte de mahométans n'étudiassent sous
l'Orient; entre publier uu livre , et lui (D). Un certain bruit qui a
en laisser le manuscrit à un homme
qui s'en peut servir. Il est sûr que Ra-
couru que , se voyant près de la
rausiusn'a pas publié ce que Postel lui mort, il abjura sa religion , doit
laissa ; et s'il est vrai que l'Abulfeda , être mis au nombre de mille fa-
qui était en arabe dans la bibliothèque bles de cette nature qui se dé-
palatine, comme le remarque M. Mo-
bitent dans toutes les sectes CE).
réri , apporté en Europe par
ait été
Postel, et que cet exemplaire soit le Il a divisé par dynasties l'histoire
premier qu'on ait eu dans rOcoident, qu'il a composée en arabe c'est ;

il ne laisse pas d'être viai que M. Mo-


un Abrégé de llustoire univer-
réri fait dire aux gens plus qu'ils ne
selle , depuis le commencement
disent, et qu'on a raison de se plain-
dre de ses falsifications. Celles-ci mé- du inonde jusqu'à son temps. Sa
ritaient particulièrement d'être rele- division est en dix parties. On
vées. peut voir dans le supplément de
(6) Simler le nomm Rhamnasius , et Spizé- Moréri ce que chacune contient.
lias lui donne le même
Edouard Pocock [a) publia ce li-
ABULPHARAGE (Grégoire), vre d'Abulpharage en I 663, avec
la version latine qu'il en avait
filsd'un médecin nommé Aaron,
faite. Il y a joint un supplément
fut médecin lui aussi, et s'acquit
une grande réputation en son qui contient en abrégé la suite
art, de sorte qu'on l'allait con- de cette histoire à l'égard des
sulter des pays les plus éloignés. princes orientaux. Il avait déjà

Il étaitde Malatia (A) proche de publié en 1 65o


,
avec beaucoup ,

l'Euphrate et il serait
, à présent de savantes notes, un petit ex-
fort peu connu s'il s'était borné trait de la neuvième dynastie de
,

à la connaissance de la médecine cet auteur. C'est ce qu'il intitu-


;

mais il entendait l'histoire et il ,


la : Spécimen Historiée Ara—
nous reste un ouvrage de sa façon hum ; Gregorii Abiil Fa—
sii'e

en ce genre— là qui fait honneur ragii , Malatiensis , de origine


à sa mémoire. Ce n'est pas que et moribus Arabum succincta
notre siècle en juge aussi avanta- narratio. Il s'en faut bien qu'A-
geusement que les Orientaux en bulpharage ne soit aussi exact sur
les affaires des Grecs et sur celles
ont jugé. Ces gens-là sont exces-
sifs dans leurs éloges, soit à cause
des Romains que sur celles des
'
que es véritables savans sont fort Sarrasins et des Tartares Mogols.
rares parmi eux soit par le ca- ,
Ce dernier morceau est le meil-
ractère de leur génie. Quoi qu'il leur de l'ouvrage. On y trouve,
d'une manière très- instructive
en soit il,y a cent historiens
dans l'Occident dont les compo- et qui paraît digne de foi les pro- ,

sitions ne cèdent pas en bonté à digieuses conquêtes de Gengis-


celles d'Abulpharage et à qui ,
' Chaiifepié du qu'il naquit en 1226, et
mourut en 1286-
personne ne s'est jamais avisé de a Professeur royal en hébreu à Oxford
donner les titres qu'on lui a don- et lecteur en langue arabe»
ABULPHARAGE.
Kan *'. Tout ce qu'Abraham in theologicis occultorum "ETrihù'rvii ,

Zacuth en a dit dans son Jucha- chrinianoruni princeps prinim tus sec- ,

tœ jacobiticœ medulla Mar Grego- ,


sin a été pillé , et bien d'autres rius, doniinus , pater, u/iicum œ^i dé-
choses aussi , dans l'histoire d'A- çus , et seculi phoenix. Ajoutons ce
bulpharage. On ne saurait devi- qu'il a trouvé à la tèle d'une gram-
maire svriaque composée par cet au-
ner en vertu de quoi Abraham Pater noster sanctui rex doc-
teur :
,
Ecchellensis a donné [b] à notre torum Mar Gregorius, doctor Orien-
,

auteur Gregorius Bar


le nom de tis qui idem est j4bul-Phaiaï Jilius
,
,

Hebrœus ** Syrus (c)(F). .Aarnnis medici mililiiiiensis , i. e.


malatiensis.
*' Abulpharage, dit Chaufepié a com- ,
(C) Faisait profession du christia-
posé plus de trente autres traités dont on
trouve la liste dans la Biblioth. Orientalis
nisme.] Nous venons de voir qu'il était
d'Assemanni. de la secte des jacobites. Cela est plus
\b) In prœfat. Biblior. Tiay^vyhâi'r'rctv ,
croyable, selon Pocock, que ce qu'un
Paris et alibi. savant Juif a débité, qu'Abulpharage
(r Tiré des préfaces de Pocock. était de la secte des melchltes. Cui po-
*' Ce nom de Bar qui signi^e tiiis pdem habemus qunm dodo citi-
Hebraeiis ,

,
d'un Itfki>u, se lit au titre des ouvrages
fils
dam Judceo, qui eum l'Ocal EbnorKofl",
d' Abulpharage. Cette remarque d'Asseman-
Christian util malaliensem, sectd mel-
ni ,rapportée par Chaufepié prouve que ,

Pocock a induit Bayle en erreur. chitiini (a).


(D) Plusieurs mahomelans n'étu-
(A) Il était Je Malatia.'] C'est en diassent sous lui.] L'un des exemplai-
vain que cherché cette ville dans
j'ai res de Pocock contient ces paroles d'un
les iirétaces de Pocock dans le Trésor ,
mahométan : Auctor libri est Abul-
d'Ortclius, et dans la Géographie de Faraï Ebn Hociraa i^ir multœ lectio-
,

M. Daiidrand. Le hasard m'a été plus nis fariisque scientiis instructus et pe-
favorable que mes recherches; car, en nilùs inibutus prœcipuè autem medi-
,

feuilletant pour d'autres choses ce cii/œ glorid seculo suo clariis , ndeô
<[u"on appelle la Géographie de Nu- ut ad eufii è plagis occidentalibus fré-
bie, j'y ai trouvé que Malatia était quentes conlenderent. Christianm trat,
une ville forte, à cinquante-un mille à qiio tameii didicerunt niulti è D/us-
pas de Samosate tirunt vers la souixe, Icmnrum eximiè doctis- Ferunt ipsuni
del'Euphrate {\). morte propinquuni à fde chiistiand
M. Baudrand m'a fait savoir qu'il a descii'isse. Ebn Chalecan auteur fa- ,

parlé de cette ville sous le mot Melila meux qui a fait la Vie des hommes
et Melitène. Cela est vrai il la pose :
illustres, est celui qui a écrit ces pa-
dans la petite Arménie , sur l'Euphra- roles, s'il en faut croire la remarque
te et dit qu'on la nomme aujourd hui
,
écrite d'une autre main au même lieu
Malatiah. de l'exemplaire (3j.
(B) Les titres qu'on lui a donnés.']
(E) Qui se débitent dans toutes les
Voici ce que Pocock a trouvé à la fête sectes.] Nous venons de voir ce qu'on
d'un exemplaire d'Abulpiiarage, écrit fit courir touchant les dernières heu-
l'an 900 de l'hégire Dixit dnminus
res d'Abulpharage. Les mahométans
:

nnsler , pater sanctiis , eritnius, doc-


avaient de la peine à convenir qu'un
trinâ et eruditione insignis doctorum
si grand homme eût été intérieure-
.

rex excellentium excellenlissinius , ils aimaient mieux


,
ment chrétien :

tenipnruni suoruni exemplar , seculi


croire qu'il avait détenu la vérité en
phuenix sapientum gloria , doctor di-
,
injustice jusqu'à ce que les approches
,
rind ope siiffullus , Mar Gregorius de la mort fissent cesser les raisons de
Abul-Pharaï, excellenler sa-
Jîlius
feindre. Voilà une prévention qui rè-
picrdis Aaronis medici malatiensis.
gne partout. Chacun s'imagine que les
P^l voici ce (pi'il a trouvé à la lin d'un
vérités de sa relii;ioa sont si claires,
autre exemplaire Pater et dominas
que les habiles gens d'un autre parti
:

nostcr, rex doctorum et corona uiro-


ne manquent pas de les voir, et qu'il
rum virtule prœstantium , dubioruni
(i) Geogr. Nubieos., clin. IV, pag. 5 et
(>) Pocock. Prœf. Specimin. Hisl. Arab.
vag. iÇTj. (?) Poceck. Praf. Compend. Dynait.
I03 ABUMUSLIMUS.
n'y a que des considérations humai- basi l'an 13.5 de l'Jiégire (Z»). Il
nés q.ù les aetouruent dVn faire nne l'accepta et mourut la même an-
ouverte prolession. On se natte donc -

"^e. Jbrahim,son
ïi i

a
fils
^
et son suc-
qu'à l'arrivée de l'heure fatale où le
sort de l'éternité fraj^pe plus forte- cesseur, envoya dans ce pays Abu-
ment Tesprit (4), es dissimulateurs muslimus qui n'avait que dix— ,
re.ident gloire à la venté et jettent ^^^( ^j^^ ç^^^^^ grande jeunesse
^* '^ '
ne l'empêcha pas de chasser Nas-
Ifitin verœ voces luin denùimpeclore ah imo _ J "i J
Ej.ciuntur, et eripiturpersona, munrl r«(5). TUS, qUlCommandait
,
daUS la prO- 1

^, ,
C est de ce mauvais principe que sont
... ^ vince au nom du calife Mervpan.
^ j,,, -

^Pres la mort d Ibrahim, am-


i . i ,

venus tant de cont. s insérés dans le


dictionnaiiedeiVloréri,tourhant Pier- an l3l de l'hégire , Saffa-
Vee I

re du Moulin, Joseph Scaliger, etc. son frère fut élevé à la hus


Cestencorelasourcedeje nesaiscom- dignité de calife. Il laissa le gOU-
bien de discours ou 1 on lait dire a ^ ^ i i ?-i .

certaines gens La ,el,g,on que je vernement de la province de Cho-


:

projtisetst meilleure que l'autre pour rasan à Abumuslimus , et se ser-


ce monde-ci, mais non pas a V article vit de lui pour faire 4uer SOn
de La mort. Voyez la remarque (DD) conseiller Abumuslimas, qui lui
de 1 Mahomet.
article -^ i , n • .

Le nom de Grégorius Bar He- «t^i* devenu suspect. Il mourut


(F)
braîus Sjrus.] A l'occasion de cela je l'an ï 36 , et eut pour Slicces-
,

ferai celte petite remarque. Pocock seur Almansor son frère qui ,
,
rapporte deux passages où notre au-
^^^^ d'Âbumuslimus
.^^ ^^.^^^
teur est nomme mar Gregoniis et j* , /•. . . .
•'
.
i

un où est nommé
il 3ior Gregorius "^ tres-nnportans services le ht
: ,

il ne fait nullement réflexion sur le mourir traîtreusement. Abdalla


premier de ces deux mots ^ il ne dit s'était soulevé dans la Syrie : Abu-
.lamais qu'Abulpharage ait été appelé
muslimus envoyé contre , lui à
Marc. Je dis la-dessus qu on aurait , » i? i W '
i j '

bien pu se tromper dans le supplé- ^^ tête d une belle armée, le de-

notre langue, on l'aura pris, dis-je, t^ contre lui qu a 1 importance


pour Marc, nom de baptême. Je vois de sa victoire , le manda afin de
la même faute dans la Perpétuité de le faire tuer. Abumuslimus, plein
lafoLdéJendue (6) le patnarche de :
d'une juste défiance, refusa d'al-
Banylone, qui se réunit a 1 église ro- ,
' ,' ,r •

raaine sous le pape Paul V, y est nom- ^^^ trouver Son maître mais S e- ;

mé Marc Elie. Mais l'auteur qu'on tant laisser leurrer par les cares-
cite (7) l'avait nommé Marc Elias. ses qu'on h i fit faire , il se ren-
{à) Diilongipnoctisquoruminm numinanobis
Murs in'tant majora Jacit. irr" .-^
dit aUprès d'AlmailSOr , Qui Ic
/-•i/.
Dido, apuri SiWumhaVicum, lib. nii,vs. 140. jeta dans le ligre. Cela se fit en
(5) Lucret.. tib. III, vs. 5'}. l'ov^r^^,-. i"î_ J„ V\^Â~'
1 anuce 1 37 de I hegire , qui re-
" '
'

(6; Livre V. chap. X.


(7) P€tru^StrozI.^dcCll.^ld^eo^. Dogmat. fiVie poud à notre aimée ^^54. Oïl contc
Aub. MirKura Polit, eccles.,
, vaù. aiq. » i- ' J 1 t ,

qu Abumuslimus avait ete cause


ABUMUSLIMUS {a) , général ^^ la mort de six cent mille per-
d'armée sous les premiers califes sonnes. Il passait pour se connaî-
de la race d'Abbasi. La province ^^^ "« peu en magie, et il était
de Chorasan se donna à cet Ab- d'une secte dont celle du mal-
,
T., „a ^ ,
heureux Spinoza
.,
n'est pas dans le
[a), Herbelot, r/iti en a
M. d , , ,
fait un long ^ '
article, le nomme Abou-Moslera. (t) Cest notre année 742.
,, ,

ACA MAS. io3


fond fort différente (A). Erpé- » avec toutes ses vicissitudes et chan-
» gemens éternel.» Quelque diffé-
niiis n'a point entendu les paro-
,

rence qu'il y ait entre ce dogme et le


les d'Elmacin sur ce sujet-là (B). système de
Spinoza, le fond est tou-
Ce que je viens de dire (c) et les jours le même on tient de coté et :

deux remarques que l'on va voir d'antre que l'univers n'est qu'une seule
substance, et que tout ce qu'on ap-
sont des choses dont je ne me
pelle générations et corruptions, mort
rends point garant je les rap- :
et vie, n'est qu'une certaine combi-
porte sur la foi d'autrui. Il n'y naison ou dissolution de modes. El-
a de moi là-dedans que le paral- macin appelle métempsycose de réso-
lution celle qu'Abumuslimns croyait.
lèle du sjîinozisme , et je ne suis
(B) Erpénius n'a point entendu les
pas trop persuadé que celui qui paroles d'Elmacin sur re suj«ii-/à.'\ U
critique Erpénius entende mieux lui fait dire qu'AhumusUmus suivit la
que lui l'endroit en question. secte de la succession descendante
prnjîtebatur seclam successionis des-
(c) Tiré d'Elmacini Hislor. Sarraceo. , cendentis (3) U fallait dire qu'il suivait
.

lib. II , cap. I, et seq. la sec^e qui enseignait la métempsy-


cose de résolution, f»;o^«e&arMr sec-
(A) D'une secte dont celle de Spi- tam eitnim qui credunt metempsyco-
noza n'est pas fort différente.'] La secte sim resolutionis. C'est ainsi que le sieur
dont Abumuslimus faisait profession Bespier a censuré et corrigé la traduc-
enseignait une sorte de me'fempsy- tion d'Erpénius en cet endroit-là
(4).
cose qui n'était guère semblable à
celle de Pythagoras (i). Celle-ci ne dé- (3) Elmac. Histor. Sarrac., lib. II, cap. III,
pag. loo.
truisait point les ânies^ elle ne faisait (4) Bespier, Remarq. sar l'éut présent de
que les envoyer d'un corps à un autre rEœpire Ottoman, par Ricaut, pag. 665.
corps mais l'autre métempsycose
AC AGI A ou AC AKI A (Martin)
:

est ainsi décrite par le fameux voya-


geur Pietro délia Valle dans l'endroit Cherchez Akakia.
,

où il fait mention de certains héréti- , fils de Thésée (a) , ACAMAS


ques mahoméfans qui s'appellent Ehl suivit les autres princes grecs au
l£llahkik hommes de férité , gens de
,

siège de Troie. Il fut député aux


certitude. « Ils croient , dit-il (2; , qu'il
» n'y a poiuî d'autre dieu que les qua- Troyens avec Diomède pour re-
» tre éléraens... qu'il n'y a point d'â-
; demander Hélène. Cette ambas-
3) me raisonnable ni d'autre vie après sade fut inutile quant au des-
" celle-ci; mais que tout homme n'est
" qu'un mélange des quatre élémens
sein principal , mais elle valut à
)) dont l'homme est composé pendant Acamas ce qu'on appelle bonne
') sa vie conjoints ensemble et animés
, fortune en fait de galanterie.
» par cette étroite union qui les tient
Laodice fille de Priam , devint
,
'» liés les uns aux autres, et qui , en
si amoureuse de lui, qu'ayant ap-
« mourant résout et se dissipe
, se
'> dans les quatre élémens simples, et pelé en vain à gon secours l'hon-
» par conséquent s'en retourne à Dieu, neur et la honte, elle fut con-
» duquel il a été ci'éé et ainsi de tou- ;
trainte d'ouvrir son cœur à Phi-
))tes les autres choses qui sont sur la
lohie , femme dePersée, et de
» terre et dans le ciel eu un mot :

» qu'il n'y a pour tout que les quatre lui demander assistance pour un
«élémens, qui sont Dieu, qui sont des plus pressans besoins oii l'on
w l'homme et qui sont toutes choses;
,
se pût rencontrer {b). Philobie ,
» et que, par conséquent, les quatre
« élémens sont éternels et le monde ,
touchée de compassion , pria sou
mari de faire que Laodice pût
(i^ Bespier , Remarques sur l'état présent de
l'Empire Ottoman, par Ricaut pa^- 66>j. fa)Pausania? , hb. I,pag.5, et lib. X,
,

(2) Pielro Hella \ aile Lom. , III pag. 392, pag. 325 et 3^3.
,
cité par Berpier, là même.
,

T04 ACAMAS.
contenter son envie. Persée eut àRhéa mère des dieux. Elle lui
,

pitié de cette pauvre demoiselle ; recommanda de ne l'ouvrir que


et d'ailleurs, complai- lorsqu'il n'aurait plus d'espéran-
ayant de la
sance pour sa femme, il fit ami ce de revoir la Thrace. Acamas
tié avec Acamas, et en obtint aborda dans l'ile de Cypre (C) ,
une visite dans la ville (c) dont et résolut de s'y établir. Phyllis
il était gouverneur. Laodice ne s'en pendit après avoir vomi ,

manqua pas de s'y rendre ac- cent imprécations contre ce per-


,

compagnée de quelques Troyen- fide. Il ouvrit la boîte , et se


nés. Il y eut un magnifique fes- trouva saisi d'étranges visions il ;

tin ,après quoi Persée la plaça monta sur un cheval, et lepous


dans un même lit avec Acamas , sa si mal à propos et d'une ma-
auquel il dit que c'était une des nière si étourdie , qu'ils furent
concubines du roi. Laodice s'en tous deux renversés d'oii il ad- ;

retourna fort contente et au vint qu' Acamas s'enferra dans


,

bout de neuf mois elle accou- son épée. Tzetzès raconte cette
cha d'un garçon qu'elle fit élever histoire (/"); mais il a confondu
par iEthra aïeule paternelle d'A-
, Acamas avec Démophoon (g) car ;

camas (A). Cet enfant eut nom c'estde ce dernier que tous les au-
Munitus (B) nous dirons dans : teurs racontent ce qui concerne
les remarques ce qu'il devint {d). la malheureuse Phyllis. Voyez la
Acamas fut un des braves qui lettre passionnée qu'Ovide feint
s'enfermèrent dans le cheval de qu'elle écrivit à Démophoon. Il

bois (e). Il eut depuis , dans la paraît par celte lettre que leur
Thrace , une aventure assez sem- mariage avait été consommé (h).
blable à la première mais les ; N'oublions point qu'une des tri-
suites eu furent très-malheureu- bus d'Athènes fut nommée Aca-
ses. Phyllis , la fille du roi , de- mantide (D) du nom de notre ,

vint amoureuse de lui on passa : Acamas (/) par la dési-


, et cela
bientôt aux propositions de ma- gnation de Etienne de
l'oracle.
riage la belle lui fut promise ,
; Byzance le fait fondateur d'une
dotée de la couronne. Il deman- ville de la grande Phrygie (E) ,
da la permission d'aller faire un et lui fait avoir une guerre con-
tour chez lui Phyllis s'y opposa
; tre les Solymes. Je n'oserais dé-
avec toutes les prières dont elle cider si la mère d'Acamas était
put s'aviser et, ne pouvant obte-
; Phèdre ou Ariadne (F). Nous
nir de lui qu'un serment qu'il parlons dans la remarque (D) de
reviendrait elle lui fit présent quelques autres Acamas sur les-
,

d'une boîte consacrée, disait-elle, quels M. Moréri s'est comporté


à son ordinaire.
àLpnynv ttîn-vj. lUnmque. sic
J"ioi'P(^o//êVMV,
advocasse , (/uantkm tandem posset jain
itt (y) Tzelzes in Lycophron.
,

jam pcreiinti mixilium ferret. Parlhenii f^ Qui était wissi^ls de Thésée,


Erolic, cap. XP^l {h) Turpitcr hospitiitim lecto cumulasse
(c) Elle se nommait Dardanns. jugali
(d) Tiré £/'Hegesi|>pi lih. I de Refius Panitct et lateri conscruisse latus.
,

Milesiorurn, ri/c z^(7r Parllienius Erolicor ,


, Ovid. Epist. Pliyll. Jl, 57.
cap. XVI et de Tzetzes sur Lycopliron.
:
{i) Pausanias, lib. I, pn^. f), et lih. X,
(e) Trvpliiodiirus , de Excicl. Troj». Vide 325 l'oyez aussi Suidas et Sieplianus
paf;.

etiam Pausaniam , lib. I, pag. 31. Byzantin us.


A C AMAS. io5
(A) Le fît ^lei^r par .Elhra , aïeule cela dans rarficlc Ephore. Je ne sais
paternelle â' Âcamas.'] Jl faut savoir s'il ne faut pas imputer à un défaut

<juc Castor et Pollux, faisant une ir- de mémoire ce que dit Plutarque, que
ruption dans l'Attiquc pour recouvrer ce fut Démophoon qui coucha avec
Hélt ne leur sœur, prirent la ville d'A- Laodice. Peut-tire l'avait-il lu dans
jihidiies. Celait l;i que cette belle avait quelques auteurs que nous ne connais-
cté envoyée par son ravisseur. yEthra , sons points peut-être aussi que Tzet-
raére de Thésée, y avait été envoyée zès avait lu dans quelqu'un de ces
en même temps. Ils la firent prison- écrivains perdus que les aventures de
nière, et remmenèrent à Lacédémone. Phyilis regardaient Acamas. Quoiqu'il
Elle s'y trouva lorsrpte P;1ris enleva en soit, il semble que Ton ait usé de
Hélène, et on l'y embarqua pour Troie, compensation et de dédommagement
Démophoon et Acamas suivirent les envers ces deux frères. Si Plutarque
autres Grecs, principalement afin de ôte d'un côté à Acamas les bons mo-
délivrer cette bonne femme, leur mens passés avec Laodice, et s'il les
aïeule , ou en payant sa rançon ou , transporte à Démophoon d'autre cô- ,

par la prise de la ville (i). Ils la ren- té Tzetzès ote à celui-ci les nuits agréa-
contrèrentdans les rues durant le sac- blement passées auprès de Phyilis, et
ca^ement de Troie; et ayant appris les transporte à Acamas. Parlons plus
qui elle était, ce ne furent qu'embras- sérieusement. Si Meursius eût bien
seiiieris réciproques {i). Ce fut alors pesé les passages où le fils de Laodice
qu'j£thra fit reconnaître iVIunitus par est appelé Munitus, il ne se fl\t pas
son père Acamas (3). Elle l'avait éle- servi des paroles de Plutarque pour
vé; car Laodice lui avait fait confi- prouver que le port de iMunychia n'a-
dence de ce qui s'était passé dans la vait point tiré son nom de Munj chus,
maison de Persée. Jean Cornarius a fils de Pantacles, comme on le dit or-
fait une assez grosse bévue dans sa dinaircment mais de Munychus fils
, ,

traduction de Parthénius il a rendu : de Démophoon et de Laodice (5j. Voi-


ces paroles ôv ùtt' AlSfo. Tfa.i^îvTct/ut.irà.
: ci les termes de Plutarque Oî «Tè kai :

Tpo\a.ç etXaiTiv étiKOf/AO-iv itt Vmov , par tgDto to s^iç J'ia.Câ.KKoua-i , Keti anv îrsp
celles-ci quem sub dio enutritum post
, M'jiivùX'''^ juvBoKoylttv, ov îit An//.o<f '.Dvtoç
Troiœ captivitatem transportai' it in AstoiTiKHç kùÎk^o, 'riKovTn; h 'Ihian trt/vêx.-

dnritiimAMMahiVweélefé pnr^thra, Ô/js^at t«v A'i'9fa.vhune xiyjuTi (^i). Alii


et non pas nourri h la belle étoile, versum rcjiciunt Ho- {c'eil celui oii
Kous allons citer Plutarque, qui rap- mère dit qu'Hélène mena yEthra at^ec
porte que quelques-uns traitaient tout elle à Troie), et Munychi fabulam
ceci de fabuleux. quem ex Demophoonte à Laodice clàm
(B) Eut nom Munitus.'] Il suivit editum Ilii crevisse sub .ïlthr;! memo-
sou père en Thrace et y mourut d'u- , rant.
ne morsure de serpent (^). 11 est nom- (C) Acamas aborda dans File de
me Munychus, Moi/vt/;t^'Çj dans Plu- Crpre-I y avait dans cette île une
11
tarquc à la vie de Thésée mais, puis-
. : montagne nommée Acamas qui avait ,

que Parthénius, Lycopiiron et Tzetzès tiré son nom du fils de Thésée. Uésy-
le nomment constamment Munitus, chius l'atteste, et remarque que la
Moi/viToç, faut croire que le texte de
il rivière Bocurus, qui passait' par Sala-
Plutarque a été altéré en cet endroit- mine, avait sa source dans cette raon-
là , ou que l'auteur ne se souvenait pas ta"ne. Les géographes parlent du
bien de la vraie prononciation de ce promontoire Acamas , fort notable
mol. Ne nous arrive- t-il pas tous les dans la même île (7). Il y en a même
jours,quand nous citons de mémoire qui observent que toute l'île s'ap-
quelque autour, d'y brouiller quelque pelait autrefois Acamantis [8) mais 5

syllabe, et quelquefois même plus^ d'u- ... .. , -rrr^i—


W
...
-'
T I ^, 1
'
, ,
' , (i)Meursiiis, lib. I, cap. XI r Lect.
. 4..-
Atti-
ne.'' Je parlerai plus amplement de car. par MézWinc, ^ui re;;rend ceUe fn,ur
dans set Comment, sur les Epitres d'Ovide ,

(i) vSchoIiast. Enripid. in Hercul. Paiisan. , „„.> ,A4


f^P^ë- 342-
l,b.
(6) Plut. mTheseo, .mbfy'. pag. 16.
(^J QuiDtiis Calaber, hb.
P,,.c=n^,. ;./, Y „„„•;/,
XIII, vs. 4q6.
^'^
, \ c i
(-iSlral'O, ii
lib.
viv
XIV ri. i
; Vlo\em. , Ub. M V
K ,
,^..
cap.

T«lzès sur Lvcôpbron cilé par Méilrlac, ^' '^ P''"' ''*• ^' '"P' ^^^[
(3) ,
' '

apud V,cap.
^v r
.^
XXXI.
sur les Epîires d'Ovide pag. it^>..
,
(8) Ptilonides Plin., lib.
(4) Partlitnii Eroticor., cap. XVl. Slcpliamis, verbo ^î/TTfiijÇ.
io6 ACAMAS.
personne que je sache ,
entre les ,
norninis filius Antenoris , qui tenipore
anciens n'a dit que le promontoire
, belli trnjani cœlebs erat et dits si- ,

Acainas emprunta son nom d'une milis habebaliir. Comme cet auteur ne
ville (^uAccfianie Athénien ami , ,
citi; personne pour ce fait-là , je n'ai
des Troyens qui s'en était Jui b:itit
, , pu faire des recherches sur ce célibat;
sur ce promontoii-e et à laquelle il ,
et si j'osais donner carrière à la con-
donna son nom. Cette ville, et Tami- jecture , je dirais cpie cœlebs a été
tie' de l'Athénien Acamas pour les mis p'Hir celebrisf^dv les imprimeurs,
Troyens sont aussi chimériques l'une
, dans quelque livreque Charles Etienne
que l'autre. Je voudrais bien savoir copia sans que néanmoins je veuille
,

où frère Etienne de Lusignan lecteur ,


nier qu'Homère n'ait observé quelque-
en théologie aux frères prêcheurs de fois que tels et tels furent tués avant
Paris , au seizième siècle , avait trou- que d'être maris (12). Mais posons le
vé cette rare érudition (9). cas que ce Troyen fût garçon et ,

Une des tribus d'.4thènes fut


(D) qu'on lui ait donné l'éloge de sem-
nommée Acamanlide. ] M. Moréri a[>- blable aux dieux en faudrait-il con-
,

pelle cette tribu acanmnle mais je ne ;


clure que sa pureté fut si admirable
vois point d'auteur français qui ne qu'elle lui fit obtenir les honneurs di-
dise ta tribu acamnntide. Pour n'en vins ? Si tous ceux à qui Homère dis-
faire pas à deux fois marquons ici ,
tribue l'épithète S-soê/Kê^oç, avaient été
une autre erreur de cet écrivain (10). déifiés,que seraient devenues les épau-
Il dit qu'Homère, au II''. livre de l'I- les du pauvre Atlas (i3) ?
liade fait mention d'un Acamas
, (E) Etienne de Bjzance le fait fon-
,

prince thrace qui vint au secours ,


dateur d'une ville de la grande Phry-
de Priam et d'un Acamas ^fîls d' An-
,
gie. ] Il la nomme Acamantium. Les
ténor que sa pudeur admirable fit
,
géographes n'en disent quoi que ce
mettre au nombre des dieux. Il est vrai soit. L'abrévialeur de cet écrivain ,
qu'Homère, au livre cité, parle de ou les copistes ont estropié de telle ,

ce prince thrace et qu'il dit ailleuis sorte ce passage, qu'on n'y saurait trou-
,

(pi'Ajax le tua (ii)- Il est vrai encore ver le sens si l'on n'y supplée quoique ,

qu'il parle d'Archilochus et d'Acainas chose.Mais suppléez-y ce qu'il vous plai-


fils d'Anténor et qu'il les fait bien
, ra, vous n'en serez pas mieux instruitde
experts dans toutes sortes de combats , la guerre d'Acamas et des Solymes.
juû.X*'^ S" ê((fÔTê TTst^-Mç ^ mais pour la (F) Etait Phèdre oti Ariadne. "]

déification du chaste Acamas il n'en Je vois deux savans hommes appointés


,

jiarle nullement. Il s'en faut peu que contraires sur cette question. Méziriac
M. Moréri n'en soit le créateur ; car il affirme qu'Acamas était fils de Phèdre
le serait rigoureusement parlant si (i4)
,_ mais toute la preuve qu'il sem-
, ;

Charles Etienne ne lui avait fourni ce ble en donner est que Démophoon ,
fonds à bâtir F'uit et alius ejusdeni frère d'Acamas était fils de Phèdre
: , :

ce qu'il prouve par la lettre que Sabi-


(9) Hist. de Cypre, fui. 4 et 29. nus a écrite à Phyllis sous le nom de
(10) On supprime ici les autres fautes qui
avaient été marquées dans la première édition.
Démophoon. M. de Valois prétend
[
'
Bavlcy dans sa première édition^ reprochait qu'Ariadne était la mère d'Acamas
fncore a Moréri., i°. d'avoir donné douze tribus (i5); etil cite pour cela le scoliaste
a Athènes. Bayle n'en donnait que dix. Les d'Homère (16) il ajoute que Démo-
:
éditeurs de Moréri sont depuis venus à cet avis
de Bavle; tandis que Bayle lui-même s^est aussi phoon était frère d'Acamas selon ce ,

corrigé et n^a plus indiqué le nombre précis des scoliaste , et qu'Euripide confirme
le
tribus qui tantôt a été de dix , tantôt de douze ;
quand on veut donc parler de leur nombre , il (17). Ni l'un ni l'autre de ces mes-
faut faire attention à Vépoque dont il s'agit; (12) Homer., lliad., lib IV, vs. 474.
3**.de citer le livre i^'^. de Strahon touchant Aca-
(i3) Voyez Juvénal, dans la XIll^. satire
mas, promontoire de VVe de Crpre tandis que
verset 47, ou il dit :
,

c'était le i4'. qttil fallait citer; i". de nom-


contentaque sidéra paiicis
mer Acamante le fils de Thésée ; 4°. de dire
Niirainibus miserum urgebant Atlanta minori
que Suidât fait mention d^ Acnmanlides , philo-
Pondère.
fophe d'fféliopolis , que Suidas nomme Aca-
mantius. Ces fautes ont été corrigées dans l'édi- (i4) Méziriac, sur les Epitres rf'Ovide pag. ,

tion de Moréri de 1*753, et même dans quelques >37-


, ,
autres antérieures. Le .Moréri de l'^âc) ne parle (i?!) ITenr. Valesius in Harpocrat.,pa^. 4 et 5.
plus du promontoire de Cypre.] (lO) In 'OS'ucrT. O.
(m) Homer. lliad., Ib. FI, vs. 7. (17) Jn lonc.
AC A UN AN JE. lo;
sieurs n'a remarqué c^nll est inutile pour maintenir leur liberté con-
dans cette question qu Aramas et Dé- ^^e les armes romaines mais en- ;

mophotn aient ete frères car ils pou- ;


-, ., ,, . .
. . -i j-
fi" épuisèrent et lis perdl-
'^^ S
vaieut r.Mre, encore .|ue l'un flH lils
d Ariadne , et l'autre de Phèdre. rent courage. L'année n'était que
de six mois dans l'Acarnanie (e).
ACARNANTE, pays situé sur Les habitaus de ce pays-là étaient
la mer Ionienne, entre l'Etolie fort lascifs si l'on en croit quel-
,

et le golfe d'Ambracie. On dit ques dictionnaires (C). 11 est plus


que les Taphiens et les Téléboes certain que la modestie n'y pa-
en furent les premiers maîtres , raissait pas dans les vêtemens des
et que réi^bale le subjugua après femmes (D). Il n'est point vrai
avQir été établi seigneur des îles que Cicéron parle d'une ville qui
voisines de Taphos par Amphi- eût nom Acarnanie (E).
trvon (a). On ajoute qu'Aie- J'ai dit que les habitans de ce
méon, d'Amphiaraiis , s'en
fils pays -là se tinrent long-temps
rendit maître après la seconde
le unis avec les Éloliens mais j'a- ;

guerre de Thèbes et qu'il lui fit , joute qu'il y eut souvent des
porter le nom de son fils Acar- guerres entre ces deux peuples, et
nan {b). Il s'était associé avec que les Étoliens firent de grands
Diomède,et ils avaient conquis niaux aux autres. Polybe nous
l'Etolie qui fut le partage de ce
, apprend cela lorsqu'il raconte
dernier. Quelque temps après , que les Acarnaniens à la pre- ,

011 les somma


de se trouver à l'ex- mière sollicitation qui leur en fut
pédition de Troie l'un d'eux :
, faite par le roi de Macédoine, dé-
savoir D-omède ,
fut joindre les clarèrent la guerre aux Étoliens
autres Grecs mais Alcméon se (y). H leur donne l'éloge d'a-
;

tint coi dans l'Acarnanie (c). Ce- voir tenu une politique fort loua-
la fut utile, après plusieurs siè- ble qui est d'avoir préféré l'hoii- ,

c!es,auxAcaruanieiis, car ils s'en nête à l'utile, et cela dans les


firent à Rome un grand mérite périls les plus pressans
{g).
(A) ayant représenté qu'entre
;

Macro!)! I, cap. XII,


tous les (jrecs il n y avait eu que „' ^^
. /^ -1 1 -Z 'e) » as, Saturnal., lib.
/- .
.

leurs ancêtres qui n'allassent pas (/) Polybii Hist., Ub. iv, cap, xxx.
au siège de Troie. Cette belle g, idem, ibidem.

raison fut alléeruée par le peuple ,.,.,,, ^ r.


( \) ils s en hienl a nome un eramt
.

VI 1 , 1
romain lorsqu il embrassa leur ,„^^,-,g 3 L'iiistorien Éphore qui n'a-
,
,

parti contre l'Etolie (B) tant il vait jamais songé à leur en fournir
,

est vrai au'en certaines occasions l'nccasion, la leur fournit néanmoins,


ils surent ce qu'il racon-
la politique ne refuse point de se •^^.'' 'l»^"^
^ j' •
^
^ ,. tait touchant Alcmeon
, , , . us son nre- ,

servir des prétextes les pius ridi- valurent adroitement auprès des Ro-
cules. Les Etoliens et les Acarna- mains qui préfendaient que lefon- ,

niens se tinrent unis long-temps, dateur de Rome descendait d'Enée-


conjecture de Strahon. ToJto.ç
{d) soit pour repousser les Macé- 9-^:* *^
doniens et les autres Grecs, soit 'a>,^-,^,u yo<f/y*^9^. k^V^*' ,
'^r
"*' '^'"' «''Tfivo^/stv ira/;' a.ô'r^v
ià) Stralio, lib. X. pa^. 3^^. fff'''",^ '

{b) Idem, ibidem, pag. 3l8. (ç«tvw!raT9*i>s').cVT{ç, tù utTO.jrXC'HV tè;

(c) Idem, ibidfm . /Urtioi tÏÏc £T* toi/? TTfO'jôvofÇ rouç exinaiv
(d) Idem, lib. X, pag 317. ç-;<tTM'*f oi/Tê •) xp £v AirahiKo^ K*TX>.iiyifi
loS ACARNANIE.
^pst^'vivTo, oÙTê iVi'ef oi/tTê yiÀp oKceç Toîi- » ^e , creva l'œil a nnstre berger {5).»
voy.at toÎ/t' ê/>t<pspoiTo sv Toiç êVe!r(v(ij. Ce que je vais dire est encore plus ba-
f^nrisimile est Acarnanes hanc seculos din Jflnliumet
: second de ce nom , ,

nnrratinneni , catlulè eo penluxisse empereur des Turcs, escrwunt a nnstre


/îomanns ut ab , iis outillèrent liberuni pnpe Pie second « Je m'estonne (dit- :

palrioruin leguni usum : qitàd se solos » il ) comment les Italiens se bandent


non inteijuisse bello contra Romano- » contre moy, attendu que nous ai'ons
rum majores gesto dicerent , ut qui ne- ))nostre origine commune des Troyens •

que in yEliihco censu , neque senrsïm., ))et que j'ai comme eux intérest de
neqiie omnino in i^ersibus Homericis ))l'enger te sang d'' tiector sur les Grecs,
comnientorarentur. Jls se fondèrent i> lesquels ils ^ont fni'orisnnt contre
sur un mensonge car Strabon fait :
)) moi (6). «Voyez comment des maux
voir (2} par le catalogue du ll'^'. livre chirae'riques forges par des poètes ,
,

de l'Iliade (3) , que les Acaruanietis ont sBTvi d'apologie à des maux réels.
fournirent leurquote part pour Texpe- (C) Ses habitans étaient fort lascifs ,
ditioa de 'l roie. si l'on en croit quelques dictionnaires.^
(B) Fut allfguée par le peuple ro- Citons d'abord AI. Lloyd : Mollitiei et
main , lorsqu'il embrassa leur parti lascivioe nolati leguniur (Acarnanes) \

contre l'Eiolie. ] Après la mort d'A- teste Luciano in JJial. Meretricis ,un-
lexandre , (ils de Pyrrhus , roi des dèproi'erbium Porcellus Acarnanius in
Epirotes_, l'Acaruanieeut tout à crain- lascii'os. M. Hofman a transporte tout
dre des Etoliens et ne se confiait pas
,
ce passage dans son dictionnaire ] et
beaucoup à la veuve de ce prince, tu- voici comment Moréri a parlé Les ;

trice de ses deux C'est pourquoi fils. -A carnaniens furent aussi accusés d^é-
ils implorèrent l'assistance des Ko- ire trop lascifs et trop délicats. C'est
mains. Elle ne leur fut pas refusée. de la qu'est venu ce vilain proi^erbe
On fit savoir aux Etoliens qu'ils eus- des anciens Porcellus Acarnanius.
,

sent à laisser en repos une nation qui Vous lirez la même chose dans les
e'tait la seule qui n'avait pas assisté notes de Pinédo sur Etienne de By-
les Grecs contre les Troyens. acarna- zance (7). J'ai consulté les Dialogues
nes qiioque, dijjîsi Epirotis, adverstis des courtisanes de Lucien et je n'y ,

yÎLiidos auxilium, Romanorum implo- ai point trouvé que les habitans d'A-
rantes , ohtinuerunt à romaiio senatu, caruanie passassent pour des volup-
utlegati mitterentur, qui denuntiarenl tueux et pour des efféminés. Il est vrai
yEtolis, prœsidia ab urbibus Acarna- que la courtisane Musarium, ayant
niœ dediicerent ; pattrenturque esse li- à répondre à sa mère qui lui repro-
beros , qui soli quondam adversUs Tro- chait de ne gagner rien par les faveurs
janos , auctores originis suce, auxilia qu'elle accordait à Chéréas et qui ,

Grœcis nonmiserint (4j.Plutarque rap- trouvait fort étrange qu'elle eût fait
porte deux faits aussi ridicules que la sourde oreille à un paysan d'Acar-
celui-là. « Agathocles, le tyran de Sy- nanie, lui répondit Quoi donc j'au- :
,

» rucuse... se moqua de ceux de Cor- rais quitté Chéréas pour me livrer à ce


» fou, qui lui demandèrent pour quelle lourdaud qui sent le bouquin? Chéréas
« occasion fourrageait leur île Pour
il :
est sans poil pour moi comme l'on ,

» autant, dit-il, que vos ancestres jadis parle et un cochon acarnanien (8).
,

)> rcceurent Ulysse. Etsemblablement, Éiasme suppose que par cochon d'A- ,

» comme ceux de l'île d'Ithaque se carnanie on entendait un favori effé-


j) plaignirent à lui de ce que ses sol- miné ,9) , et que c'était une allusion
» dats prenaient leurs moutons Et :
f 5) Plutarctus de ser.î ^fumiIlis Vindictn. Je me
') voslre roi , leur dit-il , estant jadis sers de la version d'Amyot ,
pag. Si2 du tome /,
y> venu en la nostre ne prit pus seule- ,
j/i-8.
(6) Montaigne, Essais, liv. II, eh. XXXFI,
» ment nos moutons , mais davanta- pag. -,6'i.
(7)ThomasJePineJoinSlepli. Byzant.pag. 5o.
(i) Slrabp lib. X, pag. 3i8.
,
(8) AêVôç [Aoi , <^ctf) , X«,if éa,ç k*/ p^oipV-
(2) Idem ibidem.
, KtiÇ aiKctfVa.vtoç. Levis mihi ut a j uni, Chte- ,

(.^) Homère désigne seulement leur pays , et reas Porcellus Acarnanius. Lucian. Dialog.
et
ne le nomme pas Âcarnauie. Merelric, pag. 'js3, tom. II.
(4) Justin. , Itb. XXrrrr, cap. I. Voyez la (()) In mollem et amabilem atque in deliciis
IWnihe le Vayer, lettre XCV , à tapage 325 du habilum dicehatur. Erasm., chil. II cent. III, ,

iomK II. nitm 6f), vag. 445.


ACARNANIE. [09
comédie d'Aristophane où un co-
à la , (Dj La
modestie n'y paraissait p^is
chon est le symbole des instrumensde dan-, les l'êlemens des Jèmnies. ] La
la volupté vénérienne. Allusum , npi- manière dont Apollonius censure les
nor, ad porrellum, quem induclt Aris- dames athéniennes nous ap{>rend ce-
tnphanes in'Ay^!t.pviZ^tv , sytnbolum eo- la. Ces wnstres pompeux hnbiUeviKns
nim membrorum obscenœ •-n-
,
qiiibus de pourpre leur dit-il (i/l) d'incar-
, ,

Ittplates peraguntitr (lo). Je ne crois natin de roses sèc/ies et feuilles mor-


,

pas que Ton entende le mystère de la tes ,jausnes certes et autres sembla
, ,

réponse de Musarium et pour moi, 5


hles dont fous i^ous rioUe-piollez a
,

j'avoue que je n'y entends rien c'est : guise d'une pratrie au mois de may
pourquoi je ne critiquerai |)as ceux qui d'oii est-ce que l'ous en ai'ez aiurc l u-
assurent que les habitans d'Acarnanie soge ? Car il ne se frnui'e point que les
étaient réputés lascifs. .Mais si cela femmes de V A' nrnanie se soient onc
est m'étonne un peu que les au-
,
je ainsi attiflèes. C'est ainsi que le tra-
teurs n'en fassent pas de mention. Au ducteur français s'exprime. Le traduc-
reste Erasme ne se trompe point sur
, teur latin i,'i5; avait dit Coccmeœ :

la signification figurée du mot /^oifiV- alque eliam purpureœ cmceœque vestes


x.'jç. Les Latins avaient adopté cette undè a vobis sumplœ ? Ciim ncque
fii^ure. IVnstrœ muHeres , dit Varron Acarnanides muHeres ita exornentur.
(il), maxiriiè nutricts naturam , qud , On voit manifestement qu'Apollonius
feminœ surit in uirginibus appallant
, n'eût point raisonné de la sorte si les
porcum , et Qrœrè y^ucr:. Vovez les femmes d'Acarnanie n'eussent eu la ré-
Origines Italiennes de M. Ménage, au putation de s'iiabiller d'une manière
mot Polta. Voici une conjecture dont immodeste. Il semble que cela puisse
je ne suis pas content , et que je n'a- favoriser les dictionnaires (jui assu-
vance ([u'afin d'essayer si elle pourra rent que les Acarnaniens étaient diffa-
fournir qticlque ouverture à ceux qui més comme gens lascifs mais au ] ,

auront plus de génie et plus de scien- fond la conséquence serait tirée un


,

ce que moi. Chéréas repaissait tou- peu par force. Ces auteurs-là ont be-
jours d'espérances sa courtisane c'é- ; soin d'une autorité plus précise. Artus
tait son seul paiement (12J Dès que : Thomas n"a rien compris dans les pa-
mnn père sera mort , disait-il , dès que roles d'Apollonius qu'il s'est mêlé de ,

je serai en possession de mon patri- commenter. Les Acarnaniens dit-il ,

moine , fous di-iposerez de tous mes (l6j ont été autrefois Jort adroits à
,

biens et je l'ous épouserai. Musaritim,


, la course des chariots au rapport^ de ,

leurrée par ces promesses, lui prêtait Pausanias livre 6 et dernier des Elia-
,

son corps et sa bourse. N'avait-elle pas ques ayant este le temps pissé tenus
,

raison de dire à sa mère? f^oici un pour gens sages et Jort grands politi-
galant que je ne puis ni plumer ni ton- ques , pour avoir si bien dresse leur
dre ; mais c'est un pourceau d'Acar- estât et leur république qu'il y en a ,

nanie que je nourris: le profit viendra qui disent qu'Aristote a fait cent cin-
tout a coup. C'est en effet le propre de quante livres sur le seul argument du
ces animaux on ne gagne rien à les
: gouvernement et lois île cette nation :

nourrir qu'après qu'ils ont été en- mais les livres se sont perdus avec la
graissés, etqu'ona fait ponrceia toutes police ; voilà pourquoy Pliilostrate par-
les dépenses nécessaires j mais enfin le icy de leurs femmes. Ole misérable
on se dédommage avec usure. L'Acar- commentaire le sens du texte y est !

nanie était peut-être , comme aujour- pris tout de travers.


d'hui la AVestphalie un pays fécond ,
l,E) // n'est point vrai que Cicéron
en pourceaux. C'est de là peut-être
que les traiteurs des grandes villes de f^eliili cauponariis mulieres cx.-
Tpî(^'jllT>,
la Grèce faisaient venir beaucoup de XI K
guos poicellos nulriunl. Atlien. , lib. ,
cochons pour les nourrir ( 3) , et voilà 1
pag. C56.
pourquoi la courtisane se servit de (i4) PIiilosT. in Vitâ Apollonii, lib. IV,
l'épithète àxctfvotvioç. cap. yil. Je me sers de la version de Vigé-
nère.
(10) Idem, ibidem. (i5) Alemanns Rbinuccinus ,
pa^. 167.
(11) Varro de Ke rusticâ , lib. II , cap. IV.
,
(16; Artus Thomas, sieur d'Embry, Annotât.
{12) I.uciani Uialog. Mfrelric., pnj;.72i, 722. sur la Viea'Apollonius, Uv. IF, chap. VU ,

pag. 800 du i". i'ol.


.

ACCARISÎ.
parle d'une ville qui eût nom ^carna- pliquer les Institutes à Sienne ;
«ie.] M. Morëri l'assure pourtant, /'^lle
ce qu'il fit pendant six ans. On
est dans la Sicile ajoute-t-i! et célè-
, ,

bre par un temple dédié à Jupiter. Il lui commit ensuite l'explica-


cite Cicero Or. in f^errem et 1^6;- tion des Pandectes
, et , comme
, ;

t'iiis in lib. P' jE/ietd. M. Uofman va plusieurs ultramontains allaient


beaucoup plus loin car il marque
étudier à S enne , le grand-duc
j

deux circonstances Tune (|ue cette


ville était proche de Syracuse
:

l'autre Ferdinand voulut qu'ils trou-


;
V .

f|u'elle fut brûle'e par les Goîtjs. îl vassent un professeur qui ex-
avait lu tout cela dans Charles Etienne. pliquât le droit civil de la ma-
La vérité' est que Cicéron parle non nière
que Cujas l'avait expliqué.
d'Acarnanie mais d'Acradine l'une
, ,

des quatre parties de Syracuse. Ea Accarisi fut choisi pour cette


ianta est urbs ut ex quatuor urbibus charge, et s'en acquitta digne-
,

maxintis constare dicatur quaruni ment après quoi il fut promu à


,
;

una etc.. altéra auleni est urbs Sy-


,
celle de professeur ordinaire en
rncusis , cui no'ue.i Acradina est in :

qud forum maximum pulcherrimœ droit , vacante par la mort de


^

porticus ornalissimum prytnneum


, Bargalio, et la remplit avec gloire ,

amplissima est curia , temphimque pendant vingt ans. Sa répu-


egregium Jovis Oly'mpii (17). Servjus,
tation se répandit : toutes les
cite' par M. Moreri a dit seulement,

que l'Acarnanie est une partie de TÉ- universités d'Italie le souhaitè-


pire (18) non pas un petit pays d'E- rent et lui offrirent des condi-
,

gypte , comme veut M. Hofman (19). tions très-avantageuses. Il résista

(17) Cicero in Verrem, Orat. VI ,


Jotio 77 long-temps à par
ces tentations
verso
la considération douceurs
des
(18) Servius in lib. T^, ^neid. vs. 298.
(if)) Item re^iuncula jt^gypti. Servius in dont il jouissait à Sienne. Mais , à
JEneiii. , lib. ; V
Holmao , voce Âuroania. force de revenir à la charge on ,

le gagna enfin et on lui fit per-


ACCARISI (François) , juris- ,

consulte italien , né à Ancône , dre la résolution qu'il avait prise


fit ses études à Sienne. Bargalio
de mourir dans son premier pos-
te , résolution qui n'a presque
et Benevolente y enseignaient la
point d'exemple parmi les per-
jurisprudence avec assez de répu-
sonnes de son caractère (A). Ce
tation. Il eut pour eux beaucoup
fut Rainuce Farnèse , duc de
d'amitié , mais pour le premier
bien plus que pour l'autre. Les
Parme qui le fit succomber à la ,

tentation en ajoutant aux pro-


raisons de cette inégalité étaient
messes qu'il lui fit , et à la g!oire
naturelles Bargalio avait eu tou-
:

de succéder à Sforce Oddus et


tes sortes d'ouvertures de cabinet
pour cedisciple(a) il l'avait loué à Philippe Marini, le grade de
;

extrêmement dans une harangue son conseiller dont il l'honora.


qui est imprimée et qui contient
Le grand-duc ne souffrit point
qu' Accarisi fût long -temps au
les éloges des Accarisi , et il lui
avait commis en mourant le soin service d'un autre prince. Il le
fit revenir bientôt (B) en lui don-
défaire imprimer sa belle Dispute
nant la première chaire de ju-
de Dolo. Le premier emploi pu-
blic de notre Accarisi fut d'ex- risprudence dans l'université de
Pise. Accarisi quitta donc le duc
!à) Ab dlofaclnsflierai omnium suoritm
de Parme , et alla exercer à Pise
studiorum parliccps. ViC. Eryllirieus, Pioa-
cotli II, cap. X\K. l'emploi qu'on lui avait pré-
ACCARÎSI. ï II
sonté. Il l'exerça jusqu'àsa mort, lats (jiii, commençant par un évèrlié
d'un médiocre revenu, passent de de-
qui arriva quatre ans après : ce
gré en degré justju'aux plus émi-
fut le 4 d'octobre 1622 qu'il nenfes métropoles. C'est une poljga-
mourut à Sienne. L'auteur {b) raie spirituelle, ou quelque chose de
qui me fournit cet article et qui ,
pis car selon l'esprit des anciens ca-
; ,

nons {"i), il se contracte un maria-


est le seul que M. Moréri ait ci-
ge spiiituel entre un pasteur et son
té , ne dit jjoint qu'Accarisi ait troupeau. Les communions à plus pe-
écrit divers traités de Droit, ni tits bénéfices n'ignorent pas les efl'ets

que Rainuce Farnèse ait tâché de cette humeur.


en vain de l'attirer. Ce soat deux Parci'us ista viris iainen objicienda memenlo (3).
faussetés de M. Moréri qui d'ail- (B) Il le fil retenir bientôt.'] Voilà le
,

leurs n'a pas entendu ce que c'est succès de tant de sollicitations et de


que //^ JSon. Oclobris ; car il gratifications que le duc de Parme
avait employées pour attirer Accarisi.
s'est imaginé que cela signifiait
Il l'eut enfin je l'avoue mais on le ;

le 26 septembre. Nous lui mar- lui ôta bientôt par les mêmes voies
,

quons une autre méprise dans la dont il s'était servi pour l'ôfcr aux
seconde remarque. autres. M. Moréri dit pourtant qu'Ac-
carisi n'alla point trouver ce duc, et
(6) Janus Nicius Erjthraeus ,
Pinacoth- II, qn'tZ aurait trop fait de l'iolence à son
cap.XXr. inclination s'il eiil quitte sa patrie ,
oit il par les bienfaits de
était arrêté
(A) Réiolulionqul n n presque point
Ferdinand grand-duc de Toscane.
d'exemple parmi les personnes de son ,

Nouvelle faute que l'on ne saurait


caractère.'^ Un des plus ordinaires dé-
excuser; car nous lisons dans Nicius
fauts des professeurs est de ne pouvoir
Erythraeus que lorsque Accarisi alla ,
se fixer aux académies où ils commen-
servir le duc de Parme il y avait
cent d'avoir de l'emploi. Au lieu de
,

pour le moins vingt ans qu'on lui avait


regarder cette première vocation com-
conféré la nouvelle charge que le
me une espèce de mariage, ils ne la
grand-duc Ferdinand avait fait créer
considèrent que comme un engage-
dans le collège de Sienne. Nous li-
ment passager que comme un inté-
sons aussi dans le même auteur qu'Ac-
,

rim , et une place d'entrepôt. Ils y


carisi ne professa que quatre ans à
demeurent en attendant mieux. Ils
Pise, où il fut appelé peu après son
n'ont pas plus d'attachement pour la
engagement de Parme. Or il mourut
seconde mcation que pour la premiè-
en 1622, quatre ans après qu'il eut ac-
re, et ils attendent h planter leurs
cepté la chaire de Pise. Il faut donc
tabernacles pour la dernière fois qu'ils
que le duc de Parme soit venu à bout
soient parvenus aux meilleures chai-
de son dessein environ l'an 1616 au- ,
res On a dit de quelques personnes
quel tem[>s il n'y avait point de grand-
qu'en peu de temps elles font tout le
duc qui se nommiU Ferdinand. M. Mo-
tour des religions il y en a d'autres
:

réri dit lui-même dans l'article Médi-


qui font aussitôt qu'elles peuvent tout
cis que Ferdinand I mourut en l'an-
le tour des académies. Quelques-uns
née 1609 et que Ferdinand 11 succéda
de ceux qui ne déménagent pas se font ,

à son père l'an 1621.


bien payer leur constanct;. Il en coûte
une bonne augmentation de gages à (j) iVe virginatis pauperculœ scc^etaiê con-
lempld diliorii udulterœ qiicBial ampl.exut. Hie-
qui veut les retenir. Tacite qui a ,
ronvmi Epist. ad Oceanum, lom. II pag. 744- ,

sans doute compris bien des défauts cile dans TAvis aux Jésuites d'Âix sur an Bal-
30US les termes de professa) ia lingua let, etc. paç;- "i",.
,

(i) , n'en eût pas exclu celui dont je (3) Virgil. Eclog. UI , vs. 7.

parle s'il l'avait connu. Les gens d'é-


ACCARISI (Jacques)natif de ,
glise ne sont pas exempts de cette pe-
tite infirmité on sait les plaintes des
:
Bologne , et docteur en théo-
moralistes rigides contre certains pré- logie. Je n'ai rien à ajouter à ce

fi) Taciti .Vnual., Uh. XIII, cap XIV. que M. Moréri en a dit, si ce
,

112 ACCIAIOLI.
qae les Harangues c[u.^i\ sur son tombeau est de la façon
n'est, 1°.
a données au public sont des pie- de Politien. Les ouvrages qu'on
ces qu'il avait récitées à Rome a de lui se réduisent à la T'ra-
à Cologne ,àMantoue et ailleurs; duclion latine de quelques Vies
1°. qu'il a professé la rhétori- de Plutnrqne (A) , à la f^ie de
que pendant quatre ans à Man- Charlemagne et à des Com—
,

toue dans l'académie que le duc menlaires sur la Morale et sur


,

Ferdinand y établit l'an 1627 {a), la Politique d' Arislote. Cette vie
(a^Ex Aut. Mirao, Script. Eccl. Sa=c. ^^ Charlemagne ayant été quel-
XVII ,pag. 35i. quefois jointe avec celles de Plu-
t^^^q^^ ' » «^0»"^ lieu à une étran-
ACCI AIOLI (DoNAT) homme ,

illustre tant par son érudition ge bévue de George Wicelms. Il


que par emplois qu'il eut à a «^^bité cette vie comme un ou-
les
Florence sa patrie, a fleuri dans ^rage de Plutarque (/)
tant il ,

était verse dans la doctrine des


le quinzième siècle. Il aurait pu
accuse
devenir beaucoup plus docte qu'il t^mps. Quelques-uns ont
Acciaioli de plagiat (B) par rap-
ne l'a été si les affaires publiques
,
,

lui avaient permis de donner plus


po^t au Commentaire sur la Mo-
i-^'^ d'Aristote d'autres ont ou-
de temps à ses études , et si la dé- ;

t^e les louanges qu ils lui ont


licatesse de son tempérament ne
l'eût empêché de jouir d'une Ion-
données pour ce livre (C). Il a eu
estime du
gue vie (a). Sa probité et son dés- beaucoup de part à 1
intéressement n'ont pas besoin cardinal de Pavie ,
comme il pa-

l'aï* P^r les lettres qu il en rece-


d'autres preuves que du peu de
^'^i*' «t que l'on trouve parmi
bien qu'il laissa à ses enfans. Ses
celles de ce cardinal qui ont ete
filles furent mariées aux dépens
comme publiées.
du public {b) , autrefois
celles d'Aristide et cela marquait
;
?'^ trouvera ci-dessous un sup-
*.
en même temps combien sa pa- plement considérable (D)
trie était satisfaite des services (/) /« Hagiologiâ /o/ i-j^, apud Nos-
,

•. J 1 • f\„ T„ sium lie Hist. Lat. pU". 624.


qu
j 11
elle avait reçus de lui. Un 1 a- .
,

j^,^ ^ ,„^^/J lu corrigé plusieurs


Vait envoyé en France pour de— choses dans un long- et ennuyeux article et ,

J J ^^^*-r.o. ^a
^r^„«,,„o contre -nt il y revient encore dans ses additions et cor-
mander du secours lepa- ^J^.^^^ Chaufepœ donne la liste de quel.
pe Sixte IV, qui harcelait extre- ques ouvrages d' Acciaioli omis par Bajle.
mement les Florentins; mais il
J,
... r,
(A) Ua nuelquei y

j F'ular-
r^tes de '
, m .

mourut avant que d avoir passe ^^^^ ^ „ ^^'^^^^^^^^ traduit quatre, si


les Alpes (c). Ce fut à Milan au „ous en croyions Vossius i) it Konig , f

mois d'août ï473 * il courait (a) celle d'Annihai, celle de Scipinn


: :
,

celle d'Alcibiade, et celle de Drmé-


sa trente-neuvième année {d).
o f ^ X
Son corps fut porte a Florence, ^,^^ ^j
' '
n
trius: mais, comme i! ne parait pas
^j^ j^ Scipion, n. la vie ,^,

et enterré dans l'église des Char- d'Annibal pai-Plutaniue, soient dans


treux(e). L'épitapheque l'on voit la nature des choses, il est beaucoup
plus probable qu'Acciaiolus a com-
(a) Jovius in Elo^iis, cap. XVI. ^^^^ Jg gç,,^ ^j^çf jgj, ^jgg ^^ (.pg jJeuX
{h) VoUi^rr lib. XXr. n'est pro-
j^ capitaines (3)/j quMl i
{c^ Jovius in Eloons, cap. \ri.
*> i v i ,

* Jolj dit que c'est en \[^']%.


f,^ Vossius He Pist. Lat. , pag. 624.
(rfi Varillis, Anecd. de Floreme, ;;. ID9. (2) Konigii Bitil. vet. rt nov. . pag. 4.
(«} Jovius UJ ElogiJs, et//;. Xyi. (33„Poteiaotlu-i, de Scrlpi. Flor. , pag. 5i ,
,

ACCIAIOLI. iir-i

babie qu'il les ait traduites du grec, trant qu'Argyropylus n'avait point
C'est à quoi Vossius ne semble pas fourni les matériaux de rou\rin»e
avoir pris garde. Apparemment l'a- mais en disant q 'Acriai oli a\ait in-
bréviafeurde la Bibliothèque de Ges- diqué sa source (8j. QutI aveu peut-
ner lui a servi de mauvais guide. Le on demandfr plus authentique que
père Mëne'trier assure qu'Acciaioli fut celui-ci? Jnann-s AruyrovYlus Èy-
un imposteur en se vantant d'avoir Z'/ritius, cùni FL-irtnt'ce inter cce'era
traduit siir le grec la vied'Annibal(4)- phUasnf'Inœ -pera Ansiotelis lihrns
(B) Quelques-uns ont accust Ac- qui ad JMicnniackuni di monhvs icri-
ciuio/i de plagiat.'] On prétend qu'il bitntur, miri/icé csset cr,m lerus eos ,

s'appropria les Leçons de Jean Argy- tnn nnminc latinos Jlcit puùticèque ,

ropyliis et qu'il en biliit le commen-


, deindè explicuit non sine inagnd uu-
,

taire qu'il publia ïur la morale d'Aris- dientiuni npprobalione baient enim
:

tote sans rendre à chacun ce qui lui


, iibri 2 summam diifnitateni admimbi- .

appartenait. Scripta, quœ sub nnmlne lenique doctrinam


, orJintni werô pro-
Âcciaio!i ed de re rircumferunlur pè singularem. llaque , si iccurala et
,

non Acciaioli commenlaria sed Ar exquisitri quœdam ej p^annlio accédât.


,

gyropyli Piœleclinnes Florentiœ ha- magnum auditoribua njf renlj'rui.rurn


bitce, et ab Acciainlo desciiptœ edilae- qund egn jam indè iib initio ntecum
que a plerisque existimantur. C'est consideram una cum pleri'ique ahis ,
ainsi que parle Simon Simonius dans qui huju^ qwiqnc prœcepioiis discipU-
l'epître de'dicatoire d'un livre impri- nani sequuntur, in lis audendis prce-
me' en i56^ (5j. Gabriel Naude' renou- cipuam curant ddigentiarnquc alhi-
vela cette accusation long-temps après bai ro cùm
Poiteà l'cib cuni \'ider,-ni kos
d'une manière fort positive. Àrgyio- libros a le et nb iis omnibus qui inge- ,

pylus Byzantinus , dit-il (6), cujus nio ueltenienter excellant , Ubcnti.'si-


Prœlectiones Florenliœ habitas nr>n niè Idgi , ulieriiis progredieuduni ratas
absque ntanifesto pingii crimine sibi EXFOSiTiONEM HCJt's DOCTOKis, accommo-
pnsicn uindicai^it Donntus Acciainlus. datam prœcipaè menti plulosop'ii , lit-
M. .Moréri a confondu la Morale d'A- teris viandare cumlitui , ut li , qui
ristote avec le Commentaire sur celte adesse non potutrunt hœcquœ nos —
morale On a même cru , dit-il, que EX E3US ORE accepiml's perciptre cl ipsi
:

la Morale d'Arislote à IVicomachus , pro arbitrto pussent; quare tr/iductio-


que Donat ai'nit publiée était de la ncm illius ac ordinem explicanili plu-
,

Jacon du même Argyrnpyle ; mais ribus uerbis srcuti sumus, latd inter-
f^nlaterran Soutient le contraire. Voilà diini et djffiisd orali'ine ulcnles, ut
comment cet auteur savait traduire le ej p'anatio apertu mnais magisquc om-
latin le plus aise je veux dire le latin nibus esset communis tg). Si Vossius
,

de Vossius il avait lu Cfs paroles


: avait eu connaissance de le passage,
dans Vossius /wô, commentar-a illa se serait-il contente d'opposir aux ac-
:

in IVicomachid Ai istotelis multi ar- cusateurs d'Acciai oli le silence de Vo-


bitrnntur non tpsius esse Acciaiuli , laterran ?11 pouvait lire cela dans un
sed Prœlectiones esse Argyrnpyli, ub ouvrage de Gesner fin) N'est-ii pas
Acciaiolo autem ilescriptas inque lu- bien èlrang:; qu'un pauvre auteur qui
,

cem emissas. IV hil taie tamen de eo avait si so;eu»ielleiaent déclaré dans


f^xlaterranus (-j). C'est confondre sa prëlace qu'il ne donnait qu'une tra-
deux fois les choses ; c'est prendre le duction paraphrasée des leçons d'Ar-
commentaire pour le texte c'est pren- : gyroi>vlu3 ait été pendant long-temps
dre le silence d un homme pour la ré- accusé de plagiat ?
futation formelle d'une accusation Le (C) Outre les louantes.] Cela paraît
docte Conringius a justilié notre Do- par ic parallèle du texte de Paul Jove
nat contre Naudé^ non pas en mon avec la parajihra^e île .M. Varillas.
Eiudild et ptreleganti comnienlattone
le du
i-xprerfemenl : ilictavit proprio Marte Vi-
tam Annibalis et Scipionis
(8) rr.nrrg. latro'l. in Polit Arist pag.S^Cf,
(4) ymez le Journal des Savans du i sep-
tembre i6g7, pa^'. 654- 6Ï9 apud Thomisiuui de PIngio iiltt-rar ptig.
iSi.
(5) Sim. Simoaii Commeatar. in Arislotel.
Eth.c (ii)Donat. Acciaioli Prœfat. ad Coimum Me-
(6) Vautlsi Bibliogr. polit, pag. i6. dic'enCom.nrntar. m Elhicn Ari:,!. ad Nicoinach.
(:; Vossius, de Hist. Lat. pag. 6i^. Cioy Gesn. Bibliotb./o/. 3i6, vtrso.

TOME I.
S
, ,

ii4 ACCIAIOLÎ.
nwifniim lumen attulisse judicatur Mo- 3) fut enterréaux dépens du public;
ralibus Aristotelis, explosis scilicet so- 5j que Christophle Landin fit son orai-
phislaruni interpietum ineptiis , quitm funèbre (*).Les autres particu-
w son
F.uiiratii Giœci plncila secutus, cer- )) longues à rap-
larités seraient trop
tiore ubique uestigio niteretur (n)- porter Sabellic, dans son Dialo-
j)

» gue de Reparntione Linguœ latinœ


Voilà le texte ; et voici la paraphrase.
Il ne laissa pas de traduire les flora- (Dialogue, pour le dire en passant,
))

les d' Arislote beaucoup plus exacte- i) qu'on cite ordinairement comme
ment que ceux qui l'auaient précédé « d'un anonyme)', et Vives, libro f
dans cette sorte de travail, ni de les M de Tradendis disciplinés ont parle ,

purger des interprétations ridicules, que avec éloge de la Vie de Charlema-


))

les anciens et les sophistes nouveaux » gne par Donat Acciaioli. L'Histoire
leur aidaient données, par un admirable » Florentine de Léonard d'Arezzo ,

commentaire oti il montra que quicon- » traduite du latin en italien par ce


que s'engage dans ce labyrinthe sans » Donat, a été imprimée à Venise,
,

un autre guide que le fameux Eusta- » in folio, en i473, au rapport du


chius ne saurait éi^iter de s'égarer
,
père Labbe, page 34 1 de son Sup-
))

(12). Il n'est pas besoin que j'aver- » plem. Wouce Biblioth. MSS. »
tisse que l'auteur des anecdotes va
(*) Pocciantius, de Script. Florent, pag- 5i
plus loin que son latin tant à l'égard observe cela.
,

d'Acciaioli qu'à l'égard d'Eustratius


(1 3) ; et qu'au lieu de louer ce dernier,
comme il en a l'intention, il le ravale ACCIAIOLI * (Zénobius) , Flo-
au dernier rang des interprètes; il de- rentin et moine de l'ordre de
vait dire «p-ec un autre et non pas , saint Dominique s'est distingué
,

.v«/««««««re. Que dirait le père Bou- ^^^_^ o^^rages qu'il a donnés


j^^
houis de par un admirable commen-
taire ? Ces paroles sont si mal placées,
au public. Il fallait qu'il eût de
qu'elles font penser que les sophistes l'érudition, puisque, sous le pape
ont donné des interprétations ridi- Léon X , il fut bibliothécaire du

mémoire qu'un fort habile homme cinquante-huit ans. Il entendait


(i4) m'a communiqué. «Le traité que j^
^^ l'hébreu, et il a tra-
Matthieu Palmieri a laisse de Ion- P '
3)

).gine de la famille des Acciaioli peut


duit en latin quelques ouvrages
3) beaucoup servir à rectifier et à rem- des anciens pères : Oljwpiodore
3> plir l'article de Donat AcciaioU. Ce ^.j^,. l'Ecclésiaste, le Traité cV Eu-

traité , écrit en latin par Matthieu


3;
^^^^ ^^^^^^^ Hiérodcs , les XII
•» Palmieri, a été traduit en italien
3) par un Donat Acciaioli chevalier Livres de Théodoret , de Grœ-
,

3) de Rhodes. L'original jusqu'ici n'a cariim ajfectioniim Curatione ;


3) point paru la traduction seule a Justin martjr. Comme il était
;

3) été impriméeà Florence, in-4°', l'iin


poëte et orateur, il a loué le ciel
3) i588, chez Barthélemi Sermarlelli,
3) à la suite de l'Histoire des L'baldini,
et la terre , tant en vers qu'en
3J et de la Vie de Nicolas Acciaioli , prose. Nous avons de lui àes poè-
3) grand sénéchal des royaumes de Si- mes et des serinons sur l'Epi-
3) cile et de Jérusalem. Il y est dit que
phanie , et des vers et des haran-
3) notre Donat naquit en 1428 *; qu'il
gues en l'honneur de Léon X.
(u) Jovius , Klogior. cap. XVI. On a publié quelques lettres qu'il
(15) V.-irilIa5, Anecilot. de riorcnce.pag. iGg.
{l'i) C'est ainsi qu'U faut dire, et non pas avait écrites à Pic de la Miran-
Eustatliius.
04) M
de la Monnaie.
Joly le dit né en 1 462 d'après Echard
* Joly rrpruche à Barle un mécompte. Né ,

^t Quelif, et lecroUjUs d'Ange, qui élail caii-


1428, AcaaMi auraù eu plus de irenle-neuf
nns fn i!i'i. J-'oynt Le texte. un de Donat.
,

ACC lus. ii5


(lolo * ;au Traité de Laudibus a pas trop de lieu de s'y fier (13).

iirbis Romœ ; le Panégyrique Il se fit connaître avant la mort

de la ville de Naples récité , de Pacuvius car on représenta ;

dans le chapitre général de l'or- l'une de ses pièces la même an-


dre et la Chronique du couvent
;
née que Pacuvius (C) produisit
de Saint-Marc de Florence II sur le théâtre une pièce de sa fa-
rassembla en un volume les Epi- çon. Celui-ci avait alors quatre-
grammes grecques de Politien vingts ans ; l'autre n'en avait
et les publia l'an i
49^ {a)- que trente. On ne point le
sait

Ambroise d'Altamura que ,


j'ai nom de la pièce qu'Accius four-
suivi pas à pas dans cet article, nit cette année-là mais on sait ;

s'est apparemment dispensé des celui de plusieurs de ses tragé-


lois de l'exactitude ; car voici ce dies par le moyen de quelques
que M. de Monnaie m'a écrit
la :
auteurs qui les ont citées {a). Il
Des ouvrages de Zénobe Ac- prit les plus grands sujets qui
ciaioU nous n'avons que la tra- eussent paru sur le théâtre des
duction du livre d'Euièbe con- Athéniens Andromaque , An- :

tre Hiéroclès celle <^'0!yuipio— dromède Atrée Cljlemnestre ,


. .

M
,

dore sur l'Ecctésiaste, et celle de Médée ^D), léagre, Philoc-


Théodoret de la Guérison des
,
tète la Tliébaïde
, Terée les , ,

fausses opinions des Gentils. Les Troades etc. Il n'emprunta pas


,

poésies dont parle Gjraldus , toujours des Grecs la matière de


soit grecques soit latines n'ont
.
ses pièces il en fit une dont le
:
,

jamais été imprimées. Quelques- sujet fut entièremcTit romain :


uns croient qu'il ne mourut qu'en elle s'appelait Brutus (E) , et trai-
l'j^'^ parce que Jérôme Aléan- tait de la destitution de Tarquin.
,

dre son successeur diuit la char- S'il est vrai qu'il ait fait une pièce
,

ge de bibliothécaire du Pâli— intitulée les Noces, et une au-


can, ne commença que la même tre intitulée /e Marchand 'b) on ,

année à remplir cette place aurait raison de croire qu'il fai-


,

ainsi que Zénobe l'avait rem- sait aussi des comédies fF). Il ne
plie l'an i5i8, après Philippe se borna pas à faire des pièces de
Beroalde le jeune mort la mê- théâtre il composa fpielques au-
,
:

me année. tres livres et nommément des ,

Annales, que Macrobe,Priscien ,


* // n'j en a qu'une dit Soly et elle est
, ,

adressée à Jean François Pic de la Miran- Festus et Nonius Marcellus ont


do le. citées. Il eut pour ami et pour
(n Tire «i'iVmLroisc, d'Altamura, Bibhot.
Ordin. Priedical. pag. 24'}.
patron Décimus Brutus, qui fut
consul l'an de Rome b 5 , et qui 1

ACCirS (Lucirs), poëte tra- remporta en Espagne plusieurs


gique latin fils d'un affranchi victoire^ qui lui valurent l'hon-
,

(A; ,serait né sous le consulat neur du triomphe quelque temps


d'Hostilius Mancinus et d'Ati- Auiu-
(a) Nonim Marcellus Vairon , ,

lius Serranus, l'an de Rome 5o-5, Gelle etc.


si nous en croyions la Cfirouolo- {b Vossius, dePoët. l't. pag. 7 cite ces ,

deux pièces et la dernière sur l'antnrde de.


gie de saint Jérôme. Mais nous trouvé cela dans Var-
;

Varron n'ai point : je


montrerons ci-dessous qu'il u'y ron.
,i6 ACCïUS.
après Ce Brutus prit tant de comédien (M) qui n'avait fait qiio
(c).

plaisir aux vers oli Accius l'avait le nommer sur le théâtre. Nous
îoué qu'il en orna l'entrée des verrons dans les remarques si on
,

temples et des monumens (G) peut lui attribuer ce que Galère


qu'il fit construire de la dépouille Maxime raconte d'un poëte Ac-
des ennemis. On pouvait faire cius qui ne se leva jamais pour
cela beaucoup plus par un jjrin- faire honneur à Jules César dans
cipe de vanité que par un prin- les assemblées des poètes. Cicé-
cipe d'amitié; et ce pouvait être ron a parlé avec beaucoup de mé-
moins une preuve qu'on aimât pris d'un Accius qui avait fait une
le poëte qu'une preuve qu'on histoire et comme le poëte tra- ;

aimait les louanges mais, en gique a composé des Annales, il


:

tout cas, cela faisait voir que Dé- y en a qui veulent que ce soit lui
cimus Rrutus trouvait beaux les que Cicéron ait maltraité en cet
vers d' Accius. Or c'était un hom- endroit-là. D'autres ne le croient
me qui pouvait juger d'un ou- point (N). Il y eut en ce même
vrage de cette nature (Tl). Je ne temps un assez bon orateur nom-
trouve point que Cicéron ait ac— mé Accius, contre lequel Cicé-
cusé Accius d'une rudesse de ron défendit Cluentius. Il était
sljle un peu trop affectée; cela de Pisaure, et cela pevit le faire
regarde un autre poëte (I) com- passer pour parent de notre poè-
,

me M. Moréri l'eût facilement te (0). Il n'est point vrai que Ci-


reconnu, s'il ne s'en fût point céroa parle aussi d'un autre cé~
fié à ses précurseurs. Ce n'est pas lebre orateur de ce nom, sur-
que la dureté de style n'ait été nommé Naviiis M. Moréri a fait .

jamais reprochée à Accius qui là une bévue il n'a pas considé-


,
:

d'ailleurs a été un jDoëte fort es- ré que cet Accius Navius n'est
timé {d). On peut voir dans Au- pas différent du fameux devin (/)
lu-Gelle la réilexion de bon sens dont il parle quelques pages après,
qu'il opposa à ce reproche (K). dans l'article Actius IS.evius. Il
La réponse qu'il fit à ceux qui ne se trompe pas moins lorsqu'il
lui demandaient pourquoi il ne distingue du poëte tragique celui
plaidait pas, lui qui réussissait qui a fait les Annales citées par
sibien sur le théâtre n'est pas Macrobe. Ce qu'il ajoute, qu'j^w-
,

moins sensée (L). Il était de pe- lu-Guelle parle aussi d' Accius
tite cependant il se fit l'historien, distinct du poêle tra-
taille;
dresser une très-grande statue gique, auchapiuei.)dulir .livre,
dans le temple des Muses (e). La est doublement faux. Cet auteur
considération qu'on avait pour ue parle d'aucun Accius en cet
lui fut telle, que l'on châtia un endroit-là; et partout ailleurs
,

,,,«,„ , p
(C)Z an 02J. ^oye; /«Fastes ,
de
^.
Sioonius.
.
lorsqu'il parle d'Accius
•.f
, c'est le
poetc tragique qu i-\
. •

(d Voyez la remarque (IN .


il laut enten-
Notauim ab aiiciorihm et L. Àccium
(e) Il y a cu des gcus qui Se sont
dre.
poéiam m Camœnarum lede majcimii forma a,.,^^„À. l„ -il •

statunm s./n posu.sse cùm hre.is adLdum ^M^^^^^ » ^^ raillerie pOUr aVOir
fuisset. l'Iinius Hisl. !Sat. lib. XXXI r
, ,
,

cap. r. Cliarles Elieune dit faussement que f) Cicer. , lib. 7. de Divinalione, encontc
'
Dec. Priitus lut dressa celle statue. Hojcl et l'histoire. M.iren cite lili de i)itia. iu "Verr.
Hofnian ont adopte ctlte/auK. qui est une fausse citation.
,

A ce lus. 117
imilé ou admiré le latin de cet place la naissance d'Accius quarante
ans plus bas que saint J<-rôme ne
Accius (Pj dans les siècles d'une Ta
placée (3). Mais ce n'est pas le fout
meilleure latinité. Ci- :

céron, «lans sa 1*" philippiq,,^,


n^u,
apprend .pie l'on avait représenté
une
(A) Fils d'un affranchi.'] Plus je con- tragédie d'Accius pendant la
célébra-
sidère ces paroles de More'ri A'Jarci- ,
tion des ]eux que Brutus devait
nus et Serrnnus , que l'ancienne Rome
don-
ner, et auxquels il n'assista point
aidait i'its cleués a la dignité du con-
à
cause qu'il était sorti de Rome
sulat, furent sei proches parens , plus
depuis
le meurtre de Jides César Cette pièce
je trouve diUicile de deviner une au- fut fort applaudie
i
mais les appiau-
tre cause de ce mensonge que celle-ci. dissemeus eurent plus de relation à
Il avait lu dans Charles Etienne, na-
Brutus qu'à Accius. Us seraient reve-
tus pnrentibus libertinis , Marcino et nus de loin sur ce poète, et par un
Serrano cnnsulibus et ne faisant pas ; ,
saut de soixante ans JVisijonè Âccio :

assez d'attention au mot libertinis ni ,


tîim plaudi , et sexagesimo post annn
à celui de parenti/ius il crut devoir ,
palmam dari putabalis , non Biuto.
dire que le poète était proche parent Si vous comptez ces soixante ans de-
de ces deux consuls. Au moins devait- puis la mirt d'Accius (4)i il faudra
il clianger Marcinus en Mancinus.
soit décédé l'an 65o de Rome,qu'il
Voici comme parle saint Jérôme Tai- par conséquent que Cicéron mente
:
et
cius Accius tra^œdiaruni scriptor cla- quand
il raconte qu'il a souvent ouï
ms hitbetur natus Mancino et Ser- dire certaines choses à Accius. Si vous
, ,

rano comulibus parentibus libertinis les


,
comptez depuis le temps que cette
(i). Le père Briet attribue à Aulu-
pièce commença de paraître sur le
Gelle deux ou trois choses touchant théâtre,
vous ferez raisonner l'ora-
Accius qu'il ne fallait attribuer qu'à teur assez
,
faiblement; car il suppo-
saint Jérôme (a).
sera qu'on n'applaudit qu'aux pre-
(D) Qu'il n'y a pas trop de lieu de mières
représentations d'une bonne
s'y fier.'] Je parle ainsi sans avoir des
pièce de théâtre, ce qui est très-faux.
raisons démonstratives contre cette
11 vaut mieux néanmoins prendre ce
chi'onologie je n'ai que des embarras parti
:
que de mettre la mort d'Accius
à montrer de part et d'autre. Cicéron
à la troisième année de Cicéron. Si
avait parlé plusieurs fois avec Accius: donc le passage
de la l*"*"*. philippique
j'en apporte la preuve dans la remar- ne prouve
point qu'.\ccius soit mort
ue (H) Or Cicéron était né l'an 647 avant l'an
667 de Rome prolongeons
.

,
a:e Rome et il n'y a guère d'appa-
i
la vie de ce poète jusque-là mais, :

rence qu'avant Và°e de vingt ans il comme nous n'avons pas lieu
d'être
ait pu avoir de fré(juentes conversa- assurés
de l'exactitude de saint Jérô-
tions avec ce pacte il faudrait donc:
me (5) ne faisons pas difîiculté de ,
qn'Acclus eût été encore en vie l'an dire qu'Accius
pouvait être encore un
667 de Rome. 11 aurait donc eu alors homme de soixante à S'nxante- dix ans
j
quatre-vingt-quatre ans, selon la et que s'il a vécu autant que
Pacuve , ,
chronique d'Eusèbe. J'avoue qu'il n'y rien n'empêche (ja'on n'entende
de lui
a rien là d'impossible mais il faut et de César ce que dit Valère
;
Maxime :

bien que la vraisemblance n'y soit Is (poèta Accius) Julio Cassari , ani-
pas, puisque Gyraldus n'a pu croire plissimo etjlorentissinin wiro,
in colle-
que le poète avec lequel Cicéron avait gium poëtarum l'cnienti nunquani as-
tant de fois parlé fût le même Lu- surrexit
non majestatis ejus imnie- ,

cius Accius dont on cite tant de tra- nior sed quod in coinparatinne
com-
,

gédies. 11 croit qu'il y a eu deux poè-


jHunium sludiorum aliquanto superio-
tes nonjmés Accius. Joignez à cela que
Corradus qui n'admet point cette
, (3) Corrad. ia Prut. Cicer. pag. 198.
distinction n'ose faire concourir la
, (4) P. Maouce, in Philipp. I, 5iib"Cnem, Ii-a

comple ainsi aranl oubli'-' ce que Cicéron a dit


vingtième année de Cicéron qu'avec ,

de ses conversations avec Accius. î^emarquet


la soixante-dixième d'Accins tle sorte :
en passant que l'opinion rapporte'e dans les
qu'à cause du passage de Cicéron il Ju!;emens de> Sa^ans sur les Pcetes , tom. //
pa^. i.T en fausse ; savoir qu Accius mourut
,

(i)/n Chron. Euiebii , arf«»n. toljmp' 160. Van 618 tiff Rome, en l'olymp. x6i.
(^3 Biietins, i!c Poel. lat. pag. 5. (5) Voyei la remarque (O).
i8 ACCîUS.
rem se esse cnnfîâeret. Quapropter in- dans ses Annales (i3) mais Vossiu-; 5

solentiœ rrimine cariiit quia ibi t^o- prétend que ce fut dans lui ouvrage
,

lumi.'tuin , non inirt^inuni ce'-tainina intitulé Dida.'tcalica (i/f) H en donne


exercebitntnr (6). Cette dfrnière pen- pour raison qu'Accius traitait de la
se'e revient à celle dont l'auteur (7) poésie et des poètes dans cet ouvrage
d'une satire contre l'académie fran- comme on le peut recueillir de ce que
çaise (8) se servit. J'avoue que ce n'est Charissius et Aulu-Gelle en ont cité.
pas satis quelque difficulté' que l'on Mais cette raison n'est nullement forte :
peljt étendre la vie du poète Accius Vossius se réfute lui-même en réfu-
lusqu'àla grande prospe'rité de Jules tant Corradus. Celui-ci a recouru aux
Cësar; et c'est ce qui a obligé Corra- Annales d'Accius, parce, disait-il,
dus à supposer qu'il s'aj^it de Sextus qu'un poète ne parle pas de lui-même
Julius Ce'sar dans ce passage de Va- dans une pièce de théâire. Les prolo-
lère Maxime. Mais pourquoi n'enten- gues de Térence font voir le conliaire.
drait-on point ce Caius César, qui fut Comment Vossius qui s'est servi de
tué par les satellites de Matins, et qui, cette raison, n'a-t-il pas vu qu'Accius
n'ayant été qu'édile ne laissait pas pouvait fort naturellement faire réci-
,

d'av<iir un si grand crédit, que ses dis- ter dans im prologue qu'une de ses
putes avec le tribun Sulpitius excitè- pièces avait été produite sur !e thé;U
rent la guerre civile (9, ? 11 était un tre en même temps qu'une pièce de
des premiers orateurs de son temps Pacuvius ? Joignez à ceci qu'outre
,

et bon poète trat^iqne. Quoi qu'il en les Annales et le Didusca'.ica Accius ,

soit, souvenons-nous que César fut avait fait des livres qui n'étaient point
poète de fort bonne iieure Feiunlur pièces de théiitre.
et a pueru et ,tb atlofcscentufo quœilam (Dj Médte.'] La conjecture du père
scrivla, ut Laudes Hercuiis, tragœJia Lescalopier me paraît fort vraisem-
OEaipus (10). bial)lc que les vers cités par Cict-ron ,

(Cj La méfie année que Paruuius ] au 11*^ livre de la Nature des Dieux, ap-
Cicéron le rapporte sur le témoigna- partenaient à la Médée de noti'e poète
ge même d'Accius. Ut accius iis<Um (i5). Ces vers décrivent l'étonnement
(edilibus ait se et Pacuviuin docuisie oùl'onsupposait un berger qui, n'ayant
J'abulant , viim Me octoginla ipse tri- jamais vu de vais.seau, découvrit du
,

ginta annos natus esset (11). Il y a haut d'une montagne celui qui portait
dans Cicéron iisJem œdi/ibus; mais les Argonautes. Le bon Pierre Crini-
quelques - uns ayant mal écrit ou tus en conséquence de ce passage se , ,

mal lu cela ont débité que ces deux figure que Cicéron avait allégué une
,

poètes publièrent leurs ouvrages dans tragédie d'Accius, intittdée les Argn-
la même maison, in iisdem œdibus, nautes (i6j. Quand même ce poète
peu d'années l'un après l'autre pau- aurait composé une semb'able ti'agé-
,

cis quidein annis inlerposi'is (12). Ce die, Crinitus ne laisserait pas d'être
qui est visiblement une double fal- bliîmable, puisqu'il l'aurait assuré sur
sification. Corradus croit qn'Accius un très-méchant fondement- L'auteur
avait écrit cet te circonstance de sa vie dont je viens de rapporter la conjec-
ture ne devait pas nous prouver par
(G) Valer. Maxim, lib. JIT cap. VII. le ,
témoignage de Crinitus que les
S (7) Saint Evrfiiionfl
- selon qurlques-uns.
,

Vojez /'Histoire de l'académie française pa^, grammairiens font mention de la Mé-


,

69: mais dant le Chevrîeana pn^. 'iu-j on at-


,
dée d'Accius , il devait citer tout :

tribue celle satire au comte (i'KlIan^


f Cette co- droit Nonius Marcetlus. .Te viens de
ine'iîie est re'ellemenl d" Saint-Ei'remund Jolr
reproche à Bayle de laisser le lecteur dans le voir dans les fiagmens des poètes tra-
doute. ] giques recueillis par Scrivérius que ,
,

(8) Intitulée La Comédie des aradémistcs. les vers touchant le vaisseau des Argo-
,

ià Godrau ayant dit à Colletel


,
nautes appartiennent à la tragédie in-
,

Colletet je vous trouve un gentil violon


,

reçoit cette rr'ponse


, titulée Mcdée. '
:
(E) Elle s\q)pelait Brutus.] Manuce
Nous sommes tous égaux, étant fils d'Apollon.

(g) Ascon. Psdian. in Orat. pro M. Scauro. (i3) r.orrad. in Cicer. Brut. pag. 34a.
(10; Sucton. in ejus Vilâ, cap. 1,VI. (14) Vo^sins , de Histor. lat. pag. io.
(iij Cicerii in lîrulo. (i5) Voyez Lcscilopier, Cnmmentar. in Ci^
(12) 'Tiniins. flcPoèt. lat. cap. Vf Glandorp. c-cr.de Nat. Heorum pag. 'i&i.
,

Onomast. pag. 3. (16) Crirjt. de Putt. lat. hb. I , cap. VU.


,

ACCIUS. »'9
a cru faussement qu'elle fut repré- et des monumens, etc.'] Cicéroa et Vu-
senlee quand ou celtibra les jeux ap- 1ère Maxime nous Tapprcnnent. Deci-
pollinaires, auxquels le frère de Marc- mus quideni Bruius dit le premier
,

Antoine présida en la place de Bru- {"i^), summus ille vlr et imperatnr, Ac-

tus, qui s'était absenté de Rome (17) ;


cii nnticissimi sui carminibus templo-
mais il est clair, par les lettres de runi ac monuinenlorum aditus exorna-
Cicéron, que la tragédie d'Accius l'it suorum. Voici ce que dit Valére
,

qui fut représentée en cette rencontre Maxime. Similiter honnratus animas


était le Terée (18). Il est surprenant erga poëlam Accium D. Bruti, suis
que la plupart des commentateurs de temporibus clariducis, extitil, cujusfa-
Cicéron aient ignoré cela. Maturantius miliari cultu et promptd laudatinne de-
a cru qu'on représenta l'Atrée Bé- : leclatus , ejus l'ersibus templorum adi-
roalde et Hégendorphin ont cru qu'on tus , quœ ex manubiis consecruferat
représenta le Brutus. adomai>it (22). Scrivérius a cité un
(F) Qu'il faisait aussides comédies."] autre passage en ces propres termes ;
Le grammairien Donat ne nous per- Amatus etiamnitrn in tantum Atlius h
met pas d'en douter; car il met entre Decimo Bruto fuisse dicilur, ut Allia-
les perfections de Térence de s'être nis fersibus templorum et monumento-
contenté de faire des comédies sans , rum frontes et adilus exornare consue-
avoir jamais succombé à la tentation cerit (20). Il le donne pour les propres
de faire des tragédies ce qui , ai'ec : paroles de Cicéron in Bruto; mais je
d'autres choses, ajoute-il, a été au-des- suis sûr qu'elles ne s'y trouvent point.
sus des forces de Plaute d' Afranius , Apparemment, quelque auteur moder-
et d'ylccius et de presque tous les
, ne trompé de cette façon. Il avait
l'a
plus grands poètes comiques. Comme cité Cicéron in Bruto touchant l'îlge
je ne m'attaclie pas servilement à tra- de Pacuvius et d'Accius; et puis il avait
duire mot à mot, il est bon de rap- rapporté ce qui concerne D. Brutus
porter les propres paroles de cet au- et s'était contenté d'exprimer le sens
teur. Jîlœc ciun artijîciosissinia Teren- des paroles de Cicéron et n'avait pas
,

tiusjeceril , tiim illud est admirandum, laissé de citer idem Cicero. Sur cela
'

quàd et inorem retinuit ut comœdiani Scrivérius s'est imaginé qu'on avait


scriberet, et temperafit affectum ne in cité les propres paroles de Cicéron, et
irngœdiani transiliret, quod cum aliis qu'on les avait tirées du même livre
rébus minime oblentum esse à Plauto, qui avait été cité auparavant, et il
et ab Afranio , et ab Accio , et niul- n'a point pris la peine de vérifier.
tisjerc magnis comicis im'enimus (19). Voilà comment les compilateurs les
On pourrait recueillir de là qu'Ac- plus laborieux et les plus habiles ai-
cius au commencement ne faisait que ment à trouver besogne faite. Vossius,
des comédies; mais, comme les tra- trompé sans doute par Scrivérius, cite
gédies firent sa grande réputation , je Cicéron pro Arthiii et in Bruto, tou-
ne sais si Donat a eu toute l'exacti- chant cette action de D. Brutus (i}).
tude nécessaire lorsqu'il l'a ainsi pla-
,
L'illusion est peut être plus ancienne
cé parmi les poètes comiques. M. Da- que je ne dis Scrivérius pourrait bien
:

cier a très-bien su que c'était un poète l'avoir pas eu de la première main.


tragique et il l'a dit expressément
,
Quelque soigneux qu'il ait été de re-
dans sa remai'que sur ce vers d'Horace : cueillir tout ce qui a été dit d'Accius ,
11 n'a point cité le passage de Columella
iVJ comis tragici mutât Lucilius Aitt (20) ?
que nous verrons ci-dessous (aS).
Néanmoins il a traduit ce vers en (H) Qui pouu ait juger d'un nui^rage
cette manière. Lucilius.... ne troiwe- de cette nature.'] Paterculiis fait en peu
t-il rien a changer dans les comédies de mots un grand éloge de ce Brutus
d'Attius ? par rapport à la vertu militaire (26);
(G) // en orna l'entrée des temples
mais voici comment Cicéron le loue

(!•;) Paulus Manutius in Pliillpp. I Cicer. sub (21) Cicero, pro Arcliiâ poptà , cap. XI.
fine. (22) Val. Maxim, ib. VIII, cap. XIV.
C18) Ciceion. Epist. ad Auic Ub.XVI, Ep. (23) Scriver.m Testimon. de Auio.
JI et V. (24) Vossius , de Poet. lat. pag. 7.
(iq) Donat. de Tragœd. et Comœd. (25) Dans la remarque (??).
(20) Horati Sat. X, Ub. I., ys. 53. (26) Vell. Palercul. llb. II, cap. V.
,,, ,

1 ao A C C lus.
lïii côte de l'eriidition. D. Brulus venir à la prétendue accusation contre
M. filius, ut ex j'am'diari ejiis L. le sTyle d'Accius je dois dire que Ci-
,

ytccio poëld sum awJire solitus et di- , ceron a cité souvent ce poète, et que
ccre non incuftè solebal , et erat ( Um dans l'oraison pour Sextius il l'a trai-
l'uterut iitinii twii etiam i;rœcis ,
, té de grand poète Summi pnetœ tnge-
:

utteriiporibus illis , salis erurhtus (27). niuni n n solkm une sud, sed etiant do-
(1) Cel>^ ri^Kurde un autre poëu ']
lore e.tprhnebat. L'endroit est curieux:
Savoir Attilins dout Ciceron pai'le , on y voit que le fameux acteur Éso-
non -seulement dans l'un ^ de ses let- pe se servait des vers d'Accius qui
tres à Attiius, hncenirn Aililius, p^ë- avaient quelque rapport à l'exil de
ta durissimus (38) mais aussi dans , Cicéron qu'il s'en servait, dis-je,
;

un anti'e endroit. Cet autre passage l>our faire sentir au peuple cette injus-
rae'rlte d'êlre rapporté un peu au tice. Les Romains étaient fort accou-
long, parce qu'il apprend de quelle tumé> à faire des applications au
manière il faut jui^er l'ie ceux qui me'- temps présent, lorsqu'ils entendaient
prisent leur propre laTii^ue, et les au- certaines pensées à la comédie. Voyez
teurs de leur nation. quibus inniùm A Suétone (33; et la ]<^'''=. et la X«. pbiïip-
dUsentio ut cùm Sophocfes i'eli ptimè
. pique de Cicéron elles nous appren-
:

scnpsent Electram, la'nen malè con- nent que pendant qu'on jouait une
,

fersnni /Ittilii niilii legendant putem, tragédie d'Accius, le peuple ne ces-


de quo Lici/iius ; sait de témoigner par ses applaudis

Ffrreum(ic)) ^cnplorern opinoVy vet'um scrip- semens l'amitié qu'il avait pour Brii-
lori-m tainen tus.
Vt le^endu.1 sit.
(K) La réflexion de bon sens qu'il op-
posa à ce reproche.] Accius, allant eu
litiJem enirn esse oninino in nostris
Asie, passa par Ta rente et y vit Pacu-
poèlis iiut inertis.\irnœ segniliœ est
.
,

ye, qui s'y était retiré sur ses vieux


nul fdslidii dehcnliss'mi. J^Jibi quideni
jours. H fut le voir la tragédie d'Atrée
nul a siitis crudiii l'id.- ntur qutbus nns-
en poche, et lui en fit la lecture. Tel-
tra ignitfi suni (3o). Suétone fait men-
les gens ne séparent guère ces choses-
tion de l'Electra d'Attilins, comme
là. Pacuve^' trouva d'un côté beaucoup
nous le ferons voir dans l'article de
de grandeur et de cadence^ et de l'au-
ce p lè'le. L'Electra était .sans doute
une trage'die cependant Attilius n'est tre beaucoup de dureté et de crudi-
:

compte t|u'au nombre des p/)ëtes co- té. Accius avoua la dette avec joie,
et en tira un bon augure pour ses pro-
mi(jues dans le catalogue de Volcatius
ductions à venir ^ les esprits étant sem-
Sedigitus i^SiJ ; et, selon la remarque
de Vossius , les morceaux que Cice- blables aux pommes, qui ne valent
ron , Varron et Macrobe (Si) cilentde jamais rien, si elles ne sont dures et
vertes avant que de mt'irir. Mais il
lui, seatent plus ie comique que le tra-
gique. Qui prétendrait faire de cela
vaut mieux peser les paroles de l'ori-
une dilBculté serait dans une grande ginal. Tune Pacuuium dixisse aiunt
illusion. iMM. Corneille et Raciue ne
sonnra quideni esse quœ scripsisset et
sonl-ils point des poètes tragiques sim-
graiidia scd uideri ea tameii sibi du- ,

plement et absolum-nt? néanmoins riora pauliim et acerbiora. lia est


inquit Accius, uti dicis nequc id sa-
ils ont fait Aa
comédies. Ei si Molière ,

de composer «pielque tra-


s'était avisé
nè nie pœnilet, mciiora eniinj'ore spero
gédie comme on dit que S<arron
,
qua' demci-ps scribani. Nam quod in
s'en voulut enfin mêler eùl-il cessé
ponds est, itident, inquit, esse aiunt
,

d'être tout court un poète comique ? in ingeniis, quœ dwa et acerba nas-
yl niajori porte suimtur denoininaùn, cunltir post Jiunt mitia et jucunda
,

Vojez la remarque (F). Mais, pourre- sed quœ gigniintur statim viela et
moUiii atquc in principio sunt uv'ida-^
(27) < icero , in Bruto, cap. XXVIII. non matura niox jiiint, sed putria Re-
(28) Idem, Epist. XX. Ub. XIV, ad Auic. linquendum igilur uisum est in ingénia
(2g) C'est ainsi que Vossius, de Poët. lat.
quod dies alque œlas mitificet (34).
piig- 7 , raige Us parolr.i de Licinius.

(3oj Cicero, de Finit) lib. T circa inil. ,


Cela me fait souvenir d'un conseil
Çii) Jpud A. GftI. /,/,. XV, cap. XXIV.
(il) Je cruii rfii' Vossiu* de Poét. lat- ,
(.13)Sucton. I» Cœsar. cap. LXXXIV.
f/rty;. -S .te trompe louchant Mai-robe.
, (34; Aulus Geiliu-s l,h. XIII, cap. II.
,
,

ACCIUS. 121
Ïue donnait aux jeunes gens,
Lij)se serait féroce; Térence aimerait la bon-
u passion énorme quMl avait conçue ne cliere ; ceux qui décrivent la guerre
pour je ne sais quel style concis, qui seraient braves •

dég-Ùfe ou qui fait rire la pluparf de Jcctus es.tel atrox, conviva Terenlius essel,
ceux qui lisent les lettres de ce grand Eisent pugnaces qui fera beUa canunl (Sg).
homme ne Tempèctia pas de condam-
,

ner la jeunesse qui aflccte la brièveté'.


(L) ^ <^'>'-
P/">
Quintilien qui nous a conservé ce pe-
nioins sensée.^ C'est
Il disait que c'était le chemin de la
tit fait. Aiunt Accium interrogatuni
maigreur, et qu'il fallait avoir à cet
âge-là plusieurs supertluités que Ton
car causas non tgeret , citni apud eum
in trui^œdiis taiita uis esset , hanc red-
donnât à éraonder aux années sui-
didisse rationem, qitôd illic eu dice~
vantes. AiJeà-, dit-il (35, , ^«fe/jtM-
rentur quœ ip.^e rel'et mforo dicturi
tcm ad brei'itatem non woco, ut etiam ,

ahsterreain, sive quia Uitn ndnimere adt^ersani eiseiit quœ minime lellet
i>ix potesl, et hrcfitalis imitatio Jhcil-
(4o). <( Dans mes tragédies, répon~
liniè (étaient hanc decipU sive quia :
» <Jit-il, je dis tout ce qu'il me plaît;
nec utiliter potest , et jut^enili Mo bre- » maisdans le baireau, il me faudrait
uitatis studio aridua plerumquè et ex- )) enteadr«ce quejeue voudrais jias. »
succus Stylus et^adit, necj'acilè ad lau- Je connais un homme d'esprit qui
datnm illani tcniperieiu venilur , nisi employa une sembiable raison pour
initia uberlas qucedam et luxuries sit détouruer son (Ils de l'étude de la ju-
quant œiai p'iulatim depascat. Balzac risprudence et pour l'encourager à
,

étaitdans le même -entiraent. Ampu- l'étude de la théologie. Quoi île plus


tanda plura sunt effloiescenli iUicetaù commode, lui disait il, que de parler de-
quant Inserenda; facileque est renie- i'ant des gens qui ne wous contredisent

diuni ubertalis steriha nullo lubjre


pas ? c'est l'avantage des prédicateurs :
,

superantur {^i6). JMais pour revenir à I'"t quoi de plus incommode que d'ê-
,

Accius, on n'a pas eu tort de dire tre obligé a entendre dès que uous ,

dans le Dictionnaire de Charl^^s Etien- ai'ez cesse de parler, un homme qui

ne, et dans ceux qui ont été bâtis sur vous rtjute, et qui vous fait rendre
le même fond, que Quintilicn Ta ex- compte sans quartier de tout ce que
cuse sur le temps où il vi\ait. Tragœ- vous avez dit? c'est la condition d'un
diœ icripiores .Iccius atque Pucui'ius avocat.
clarissimi grni'itate senteiitiarum , t'e/- Cela me fait souvenir d'une pen-
b'Tuni pondère, et auctoritate persona- sée de .Montaij;ne. « Au don d éloqu.?n-
» ce, dii-il^^\), les uus ont la faci-
runi. CœlerUm nitot\ et summa in ex-
coltndis operibus nianus niagis l'ideri
)> lité et la promptitude , et ce qu'on
,

potest ttniporibus qu'uni ipsis ilefuiise.



dit le boute-iiors qu'à cha- si aisé ,

P^inum tanien Accio plus irihuitur » que bout de champ ils sont pi-ests :

Pa(Ui'iunL videri doctiorem , qui esse » les autres plus tardifs ne parlent
,
,

doiti affectant, uoliint (o")- On dirait


» jamais rien qu élabouré prémé-
et

que Quintilien cojiie ces vers d'Ho- » dite Si j'avois à conseiller de


race :
» mesmesen ces deux dis ers avantages
» de l'éloquence, de laquelle il semble
AinbiguiLur quolic.^ uter iitro sit prîor nuferl
,
" en notre siècle que les prescheurs et
Pacti^iUi docti famam senif, Accim alti (38).
» les advocats fassent principalement
11y a un passage d'Ovide qui semble ,
i> profession , le tardif seroit mieux
reprocher je ue sais quoi de sauvage » prescheur, et l'autre mieux advocat:
et de farouche au style de notre Ac- ') parce que la charge de celuy-là luy
cius; mais, tont bien compté, j'aime- w donne autant qu'il lui plaist de loi-
rais mieux entendre i>ar-là les actions " sir pour se préparer et puis sa car- ;

cruelles dont il avait fait la descrip- » rière se passe d'un ûl et dune suite
tion dans ses tragédies. La pensée d'O- » sans interruption là oiiles commo- :

vide est que, si Ion jugeait de* mœurs )) ditez de l'advocat le pressent à toute
d'un homme par ses écrits , Accius )' heure de se mettre en lice; et les

(35) Lips. in Institut- Epistol. (39) Ovi^J. Triit. Uh. II , vs. ?.^9.
(36) Balzac. Epist. splecta;. (40) Quintil. lost. Orat. hb. V, cap. XIIT.
(3:) Qiiintil. Institut. Orat. hb L. cap. I. (hi) Fssais de Montaigne, liv. I, chap. X,
(38) Horat. Epist I, lih. Il .i-s. 5o. (tu coinmciiccinerit ,
pages 5î , 53.
,,

ACCIUS.
y responses imprévues de sa partie faitopposées au caractère de celui qui
j> adverse le rejettent de son branle fait le sujet de cet article. L'éléva-
'> où il luy faut sur-le-champ prendre tion, la grandeur, la force, étaient le
» nouveau party... La part de l'advo- caractère d'Accius, et nous avons ouï
î) cat , ajoiite-l-il (^-2) , est plus diffi— (47) le témoignageque Horace et Quin-
5> cile que celle du prescheur et nous : tilien lui ont rendu là-dessus. Joi-
» trouvons, ceme semble, plus de pas- gnons-y deux vers d'Ovide, et \\\\

» sablesadvocats que de prescheurs arrêt décisif de Paterculus.


» au moins en France. » Ennius arte carens , animosiqtje Accius oris^
(M) Que l'on' châtia un comédien.^ Casurum nullo tempore iioinen habenl (48).
Se voyant traduit devant les juges,
en re'paration d'injures, il dit pour sa Clara etiam per idem œfi spatiuni
défense qu'il était permis de nommer j'uêre ingénia in togalis Afranii in , ,

un homme qui donnait ses pièces de tragœdiis Pacuuii atqiie Attii usque
théâtre à représenter. PubliusMutius, in Grœcorum contparalionem evecti ,
devant qui la cause fut débattue le magnumque inter hos ipsos Jacientis ,

condamna. Le poète satirique Lucilius operi suo Incum adeo qnidem ut in ;

n'eut pas le même succès car on ren- illis limœ, in hoc penè plus l'idealur
;

voya absous le comédien qui l'avait fuisse sANGUiNis (49)- Si le nouveau té-
nommément offensé sur le théâtre moin que je vais produire était de la :

tant il est vrai que les juges ne sont force des précédens, ce qui suit en-
jias tous de la même humeur, ou qu'il chérirait de beaucoup sur tout ce que

y a des gens que l'on considère plus j'ai déjà rapporté; car Yoici Accius
que d'autres. Celui qui nous apprend sur la tête du grand Euripide ylc- :

ces deux procès s'exprime ainsi


cius poêla junior suo ingenio prœcel-
3Ii- :

mus qtdrlani nnminathii Acciinn poë- luil Euripidtin y qui fuit altus et inge-
tam cnnipellavit in scend cuni en Ac- nio sublimis (5o). Un autre nous donne
:

cius injuriarum agit hic Accius et Virgile pour les deux plus
: iiihil défen-
dit , nisi liceri nominal i eum , cujus excellens poètes de Rome Laliœ : An
nnmine scripta dentiir agenda musœ non solos adytis suis Accium
(43).
Caius Cœlius judex absoîvit eum in- et f^irgilium recepére , sed eorum et

juriarum qui Lucilium pnëlam in sce- proxiniis , et procul a secundis sacras ,


,

nd nominatum lœsernt cnncessêre sedes (5i)? Quelle appa-


: Piiblius Mu-
tius eum
qui L. Accium poëlam no- rence qu'un tel homme ait fait une
,

minui'erat histoire digne de cette censure de Ci-


condemnai'il (44)- Glan-
,

dorp ji'a point su où l'on trouvait cet- céron? JYum quid Accium memorem ,
te histoire il ne la rapporte (45) que
cujus loquacitas habel aliquid argu-
:

sur la foi d'un auteur moderne dont tiarum , nec id tamen ex illd eruditd
il copie la fausse glose, savoir, que
Grœcorum copia, sed ex librarioUs la-
le défendeur fut condamné tinisa In orationibus aiitein multus et
parce
qu'il avait prononcé tout simplement
,
ineptus ad summum impudentinm
,

he nom d'Accius sans titre d'hon-


(Sa). Remarquez bien que les Annales
,

neur, ni complimens sine prcej'atione ,


du poète tragique Accius étaient en
honoris nominafcrat (46). vers, et que Cicéron ne parle là que
de ceux qui avaient écrit l'histoire en
(N) D'autres ne te croient point,'\
prose latine; car il ne dit rien d'En-
Si j'avais à prendre parti , je me ran-
nius. Nos meilleurs critiques pensent
gerais au leur; car, outre que Cicéron,
que ce passage de Cicéron est corrom-
qui a tant de fois cité notre Accius,
pu , et qu'il faut lire, non pas Ac-
ou avec éloge, ou sans le blâmer, au-
cium mais Macrum. Ainsi la censure
,
rait mauvaise grâce de lui venir dire
tombera sur l'historien Liciniiis Ma-
des injures dans le I*^''. livre des Lois,
cer. Vossius embrasse ce sentiment
je remarque que ces injures sont tout-à
(53). Mais, lorsqu'il apporte en preuve
(42) Là même, pag. 5^.
(47) JJans la remarque (K).
(43J Aiictor Rlintoric. ad Herenn. lib. I.
lib. I, elen. Xr, vs. iq.
(48) Ovldlus, A.nor.
(44> IbiJ., l,b. II.
(Ag) Patercul. Itb. Il cap. IX. ,

(45) Glandorp. Ouom.ist. png. 3. (5o) Acron in Horat. Eplst. I , lib. II.
(46) CatanîKus , dotiC Glandorp ne cite pas (5i) Columella, de Rc rust. , tib. I, prwj.
l'enilruU ; mais on le trouve dans le Commen- (.'»2) Cicero, de Legibus, lih. /, inilio.

taire in Plin. Ëpist. III , Ub. ,


pag. 391. V (53) Voss. de Ilist. Ut. lib. I , cap. X.
, ,

ACCIUS.
ramitie qui était entre Sisenna et ce- pêle-mêle la grande réputation et la
Jiii qiK! Cirëron raaltraitu, lors , dis- mort de Pacu\ius sous la 3''. année de
je ,
qii il en couclut que Ciceron n'a la iSG"". olympiade (58), et la grande
poinf parle d'Acrius, il se trompe: réputation d'Accius sous la i'. année
car, ne lui en déplaise, Acciiis et Si- delà ido*^ olympiade. Il ne peut sor-
senna ont eu à peu près le même .Ige. tir de là que des confusions pour ceux
Siseniia était vit ux apics la j^uerre ci- qui savent que Pacuvius avait cin-
vile de Marins et de Sjlla (54) cVst- , quante ans plus qu'Accius. Car, si l'on
à-dire, ^ers Tan 672 i\e lionie, et Ac- supposait que Pacuvius mourut âgé
cius n'était point mort en G65. d'environ quatre-vingt-dix ans, en
(0) Pasidr pour pjreiU de notre l'année sous laquelle saint Jérôme
pnèle ] ï»aint Jérôme remarcjue en , pa'le de sa mort , il faudrait dire
pariant du poète Aicius ipi'il lut me- ,
qu'Accius était âgé d'environ f[uarante
né à Pisaure lorscpie les Romains y ans la 3*^. année de la 156"^. olym-
envoyèrent une colonie; et qu'il y piade ; et cependant il naquit, seloa
a\ait auprès de la ville une terre saint Jérôme, sous le consulat de Man-
nommée Jumlus Accianus (55). C'é- cinus et de Serran us, qui tombe sur la
ta'.l la })cirtion qui lui échut dans le 2<" année de la iSa*. olympiade. Il
partage que l'on Ut des terres aux lia- faut donc, comme je l'ai dit dans la
bitans de cette nouvelle colonie, ^ur seconde remarque, se défier ici un
cela Scaiigtr obsi-rve que la colonie peu de ce chronologue.
de Pisaure ne fut établie que ([uatre (P) Le latin de cet Accius,'] Perse
ans après celle de Boidogne c'est-à- , et Martial se sont bien moqués de ces
dire, l'an de Rome 568, quinze ans gens-là :

avant la naissance d'Accius (56j. Di-


Est nunc Brirtsi (09) qnetn venosus liber Àcci,
sons donc que saint Jérôme s'est trom-
Sunl rjiws Pacuviuique et verrucosa moretiir
pé Rome était un séjour plus propre
:
Anliopa, wnimnis cor lucufcabile fiiUa (60).
qu'uue colonie à un poëte qui était la
gloire du théâtre en ce temps-là : Voici ce qu'en dit Martial, dans l'épi-
mais ne croyons pas que ce mensoii- grarame XCI du II®, livre.
gf" soit sans aucun t'oudeiuent. Le père
Allomlusque lefif terrai fnigi ferai
d'Accius suivit peut-être ceux qui con-
Accius et quidquid Facuviusque voiniinl.
duisirent la colonie de Pisaure; et
peut-être que le patron auquel il de- Si l'on avait imité ces vieux auteurs,
vait sa liberté fut un des principaux comme nos plus beaux esprits imitent
commissaires de ce nouvel établisse- aujourd'hui Marot et les autres poètes
ment. En cas qu'il eiU suivi son pa- du WV.siècle, dans des contes,
tron il aurait pu être partagé de la
,
dans des ballades, dans des odes pin-
terre que l'on appela dans la suite dariques dans des rondeaux
,
etc. , ,

Jumlus Accianus, et il aurait pu lais- faits exprès en vieux langage, je ne


ser entre autres enfans le père de l'o- vois pas que personne eût pu raison-
rateur Accius. Voici comment Cice- nablement y trouver à mordre mais j

ron a parlé de cet orateur. T. Acciuiu apparemment, c'était tout de l.-on


Pisnurenstiii cujiis accusaùoni res-
,
(pi'on employait ce style moisi et sur-
pnndil pr<> A. Cluciitio qui et accu ^ anné on le prenait pour la parfaite
:

raie ilicebat , et salis lopiniè , eralque éloquence, soit qu'on le débitât tout
picBtereà Joctus Hcnnagoiœ prcecc) - pur, soit qu'on le mêlât avec celui de
tis ,
quibus elsi 01 namcnta non salis son siècle. Voyez les bons conseils que
opima dicendi , tamen ut hastce veliti- Phavorin donne à un jeune homme
bus ainentatœ , sic npla quœdam et pa-
rata singulis causartini generilnis ar- (58) Pacuvius Brundu.'inus tragadiarum
gumenta tiudunlur (57). Scaliger ne scriptor clarus hahetur , vixilque Romœ quoad
picluram exercuil et fabulas vendidit. Deindè
censure pas saint Jérôme d'avoir mis Tarentutn transgressas , prop'e nonagenariut
diem obiit. Chron. Eu.«eb. num. i863.
(54) Vell. Patercul. , lib. Il, cap. IX. (on' Casaubon slir cet endroit de Perse, con-
,

(55) In Chron. Eiiseb. num. 1876. jecture qu'il faut lire BriȎis , el que c'r'tait le
(56) Scalig. Anim. in Euseb. ibid. ex Pater- titred'une tragédie d'Accius. Scriveriu-, Tes- m
culo , lib. I , cap. XV. lim. (le Altio a tort de croire que Perse ne
,

Vorei aussi parle pas du poêle tragique.


(57) Cicero, w: Bruto , eap. 78.
(60) Fers. Sal. I. vs.
roraison pro Claenlio. -fi.
,
,

124 ^^ ^ ^' ^•
Jece goùt-là n'est point su- (6i). On la vieillesse Tavait eniaidie. Il
jet aujourd'hui à cette sorte de mala-
die, et Ion trouve beaucoup plus de
^^^^ j^ chapitre XV du livre VF.
mais oa
j /-^ i-
<-œIius Rhodiginus
't,i t •

gens qui se degolMent trop tôt d'un ;


^f
mot ordinaire ou qui courent trop n'y trouve rien qui approche de
,

ardemment après les mots nouveaux- cela (a). Le continuateur de Me-


nés, qu'on n'en trouve qui veuillent
^^^j -^^^e que cette femme .se
retenir avec trop d aiiectjon (021 les , ' ^ , . . ,

vieux termes. Si l'on emploie le vieux plcisnit a parler a^ec son image
langage, c'est par forme de plaisan- devant un miroir., et que souvent
teriejc'est par jeu d'esprit, c'est pour elle faisait semblant de refuser
un ouvrage burlesque. Ce n'est qu'en ^^ qu'elle souhvlail
fort Plutar-
lalm qu il se trouve encore des au- ' ''., , . .

teurs qui se plaisent à débiter les plus que ajoute .^onrsint-Û, que c est
vieilles phrases. 11 y avait sans doute un mol dont les mères se ser-
parmi les anciens Romains une au- vaient pour épouvanter les petits
tre espèce de gens lorsque le latin r^^^^
^^ ^^^ retenir en leur de-
lut venu a sa periection. Ces gens- *^.
ti •. v-ittc i- 1 r^
là étaient admirateurs perpétuels des
1
"O'r. Il cite leXVI .livre de Cœ-
vieux poètes sans se servir, ou sans lius Rhodiginus, et Cice'ron II ad
,

vouloir que l'on se servît de leurs ex- Aiticum. Je ferai ci-dessous la


pressions surannées ils voulaient seu-
critique de ce passaee (A).
:

°
at- En
iemcnt mortiiier les écrivains de leur , ^' ^ > il t>i t .

temps, en les mettant au-dessous des tendant, VOiCl ce que dit Rhodl-
vieux auteurs. Horace avait bien corn- ginus dans un lieu qu'on ne cite
pris leur intention point (A). Acco radotait de telle
:

Sic fauior vetenim, ui tabulas peccarf ve- sorte , quc , lorsqu'eilc se regar—
QuàTbù ^uinque „iri sanxerunl : fœdera ^^^^ ^-^^S le miroir, elle s'cntrC-
"S"-"^ .
,
yel LraOïis, i'el cum rigiais n
,
œnuala Sauinis, .
tenait avec son image
'-'„
comme si
, ^ , ,

Pontifcum libiof annom voiu.nina fatum , C cut ete Une autre temme on :

DutUet Jlbano Musas in monte locutas.


j^ ^^^^ j^ ^^^^ ^^ g -^,^^3 ^ ^^ ^^j.^.
Jam Saliare Numœ carmen qui laudal , et mCSSeS de meuaceS de SOIIFIS , , ,

Quod mecum ignorât, solus vultscire videri ;


Ct de tOUt Ce qiÙ a lieU daUS UUC
Ingénias non Me fa^et, plauditqu.sepuUis,
jyostra sed impugnal, nos nostraque lividus
couversatiou . D'autres écrivcnt
« 1 •
1 ^ •
i>
odu ,63). qu elle tachait quelquefois d en-
foncer un clou à coups d'épongé,
C'est encore une maladie dont notre
siècle est exenii.t. On se contente de Comme Si elle eut tenu un mar-
mettre la Grèce et l'ancienne Rome au- teau. PJiodigijius n'en dit pas da-
dessus de notre siècle mais on ne yant.-îge. Pour ce qui est de Plu-
5

préfère lias les harangues et les poc- -i j-i. * ^^ ,


dit seulement que Clir.y-
i
tarque, il
siesdu XV. et duXVÎe. siècle à celles
qu'on fait aujourd'hui. sippe lî approuvait point que 1 on

nous fit peur delà justice de Dieu


(bi) y4pud ku\. Gell. hb. /, cap. ,

ide eiiam ibid. cap. VU. pour iious detoumcr du pèche


(61) L'orateur Stsenna avait celle affectation. „„„ j;^,.,'t
Cicer. in Biulo. SMh.sIe enaeieaccn-fe'. Sue.o,,.
cap. Lxxxvi
et in vitâ Giainm.
/
^Or, „
dlSait-lI On ,^ «„„„„,.,.
lie manque W ',

;
,'1

in AuR. , lyas de raisous qui combattent ce


cap Xr;
et de l aj/ectation contraire , c'ert-ii- ^ . .. ,* . . /• •

dire, de forger des mou nouveaux. Atil. Gell. qUl SC dit SU/' LcS pUnitlOllS dlVl-
lib. I, iap. XV.
(63)Horat. Epist. I, W. //, w. 23 .... e£ 80. ,sti j i . , >;
^ ' '^ (a) Lloyn ne change rien si ce n esl qii . il

, cite Rhodiginus nu livre XVI cfiap. If. ,

ACCO. Charles Etienne débite [h.Lechap. iidn xvii^.n^re. ildurjud


que c'était une vieille femme qui " i" <"«/« ^<^"s /'Épiiome des adages de Tar-
j • . r 11 j 1 • . r.eus et de Didvme.
devint lotie de chagrin en vovant . r,, ^
., j II
" ' • • ^^) Plul. de Sloicorura répugnant, pae.
dans un miroir de quelle manière lo^o B
,

»ES ACCORDS. 125

fies qui montrent que ce dis- oui condamner cela par de fort lia'ai-
, et
-^hJ^ u
:, r'oh.i rl^c A^.i les docteurs. Les anciens Romains
cours ressemble celui aes oon-
avaient leur »!
. .

j, j . ,.Mandnciis, dont» ils me i i i

nesjemmes qui ont peur d Ac-


J , nacaienl les enfans, comme je le dirai
co et d'Aljthito aux petits enfans sous ce mot-là.
(B), afin d'empêcher qu'ils n'a-
busent de leur loisir. Plutarque
ACCORDS (Étien-n-e Tabourot,
seigneur des) , avocat au parle-
fait voir ensuite que Chrysippe
se contredisait lui— mèn\e.
ment de Dijon et puis avocat du ,

roi * au bailliage et à la clian-


'

(A) L'i critique de ce passage."] cellerie de la même ville naquit ,


i".Su! des trois auteurs qu'on cite n'a
l'au 5^c) (a). Ce fut un homme
I
dit qu'Acco devint folle pour s'être
vue dans un miroir, et qu'elle faisait d'esprit et d'érudition mais qui ,

folie d'Acco , ses illusions touchant luière édition est de Paris, eu


son image et sa dissimulation, on s'es- i 582 (A). Je l'ai cité quelquefois
prime ainsi Phuarquc ajoute. C'est ,^, q^ ^^ f^^ -^^ ^^.^ premier
dire que Plutarque a débite ces trois ;.' ., ^ . » . .
1

faits, et par conséquent c'est trom- l^vre; car avait fait mipnmer
il

perle monde, vu que cet auteur dit quelques sonnets *^ (c) : ce que
seulement ce que j'ai cite de lui. 2°. n'ont point su ni la Croix du
Quelle iiésligence n'e,t.ce pas que
Maine, ni du Yerdier Vau-Pri-
de citer Cui ron 11 adjiitLcntnr \ eut-
on citer la 11*. lettre, ou bien le II"-', vas. L'ouvrage qu'il intitula les
livre ? Faut-il laisser deviner cela aux "^rouches fut imprimé à Paris ,
lecteurs? Fatit-il leur laisser la peine l'an i585 (B). C'est un recueil de
de chercher quelle lettre c'est, quel
, à la vérité poésies ingénieuses
livre c'est? Ceux qui auront la pa- ,

tience de le chertlm' perdront bien plupart sur des matières mais la


leur [)eine. obscènes, et qu'il traitait trop li-
Ils trouveront dansla XIX*^.
lettre du 11*-", livre Certi sumus pe- brement
,
selon la mauvaise cou- ,
nisiS nmnia t/uuJ eniin dx.x.i^',/j.iisi..
:
tume d'alors. 11 règne un sem-
tamdiii? C'est ma lil^. censure. Licé-
ron est cité à faux il n'a rien dit blable esprit dans ses Bigarrures.
:

d'Acco. Le mot grec dont il s'est On lui en fit des reproches qui
servi, et dont plusieurs autres auteurs l'obligèrent à se justifier fC). On
se servent pour signuier ce ijue nous
lui attribue un Dictionnaire des
appelons oateLiner, biaiser, faire le
sur des choses que Ion sou-
ditiicile
rimes françaises *^ (Dj. Au res-
liaitepassionnément: ce mot, dis je, "It procureur du roi, dit Joly.
fiait
qu'Erasme a mis entre ses proverbes (ai On mit autour de sa taille-douce,
(ij, a fait soupçonner qu'Acco avait qu'en tâS^ H avait 3") ans. [ Joly remarqua
été un hypocrite ^ mais ce n'est qu'une qu'à ce portrait de 58i on laissa l'inscrip-
1

coujecture, et il ne doit pas être per- tion mise à celui de Jo2 iExA. 35 de là i , ;

l'erreur de Bayle. L'epitaphe de Tabnurot


mis de citer Plutarque , ni Cicéron ,
apprend qu'il naquit en iS^y et qu'il mou-
ni même Cœlius Khodiginus , pour ,

rut en i J90.]
des conjectures que d'autres gens ont [hj Voyez la lahle des matières , au moi
avancées. Accords.
(li; Qui font peur d'Acco et d'Al- *^ Ces sonnets
, dU Joly furent imprimes ,

phtto luar petits enfaiis.] Je ne pense en 1572.


pas qu'il y ait de pays au monde , où (cj Voyez le livre IV de ses Bigarrures,

l'on n'ait une semblable coutume. J'ai


édition de Paris , chez Mautroy , en 1 662
i/1-12. pag. 477.
*' Joiy donne te titre de quelques aulrc^
(1) Voyez Accissare Adagior. chil. Il ,

cent. Il nnm. ç<).


,
opuscules.
, ,

126 DES ACCORDS


te , seigneurie des Accords est
la lei^itimes , conceus hors mariage : car
ainsi nonimoit-Ll ses trois premiers li-
lia fief imaginaire qu'il ne fonda
Dt sorte que j'ay coiineu arer-
que sur la devise de ses aïeux (E). tement que c'tfloit une excuse recher-
Remarquez que Guillaume Ta- chée , pour nous rniretenir qui m'a ,

BOUROT , son père qui fut avocat (iccasioné de nicllre en tuniière ce c/ue
,

de copie, hauteur , de son


au parlement
^-
de Dijon conseil- , /'f .«^"'^
- ' cote, ne manqua pas de prétendre
1er du l'oi et maitre extraordi- cause d'ignorance. » Je fus fort eston-
naire de la chambre des comptes, )> ne deciara-t-il (3;
, quand je vy ,

est fort loué jjar Pierre de Saint- j) la première impression de ce livre,


n duquel je pensais que la mémoire
Julien dans le livre de l Origine
))tust esiemte. Mais, le relisant quasi
des Bourguignons (d). Il mourut » comme riiose nouvelle que je u'a- ,

le 24 de juillet 1691 *, dans sa » vois \ eu y uvoit quatorze ans ,


je
quarante-sixième année (e). » conueu incontinent, et mon génie,
» et mon style du temps que je l'avois
{d) yoyez Croix du Maine, pag. l56
la » basti pour me chastouiilcr rao^-mes-
(e) yoyez sonépitaphc dans /e^ Bigarrures i> me , alin de me faire rire le prë-
de sonjils pag 325. ,
.
« mier , et puis après les autres : tel-
* Son épilhaphe dit en iSqo « /^3 ans.
,
>» le.T.ent que je n'avois observe' autre

qu'il intitula Bigar-


>> ordre, sinon d'entasser pesh-raesle
(A) L'ouvrasse ,

dont la première cdi'.io/i est de


» les exemples, selon qu ils me ve-
rr.rcs ,

Paris, en i582.] 11 marque cette an-


>' noient en fantaisie. K'cstant ce li-
née-là dans l'avant-propos de la se-
,
» we que pièces rapportées sans au- ,

conde édition et il doit être plus


'> cune curiosité, et fait seulement
;
» \>î.r petits papiers, à diverses fois
croyable que la Croix du Maine et ,

que du Verdier Vau-Privas qui met-


» adjoustez, desquels je reconneu tou-
,

tent la première édition des Bigairn-


)) tes fois qu'une grande f artie avoit
« esté perdue. TellenienI que, comme
rcs à l'an i583. Le premier livre de
» cbuscun e^t amateur de son ouvra-
ces Bigarrures est divisé en vingt-deux
>' ge je me délihéray lors d'envoyer îe
cbapitres , qui traitent , entre autres ,

» surplus des adjonctions qui estoient


choses, des Rébus de Picardie, des
Eqidi'oques des yinli-strophes , des
)» crues depuis ce temjis-là, avec cel-
,

» les que l'on avoit omises. » Qnoi


J^ers relrogades, des Allusions , des
ylcrosliches de Y Echo, des f^ers léo-
,
qu'il en soit il avoue et il adopte
,

nins des autres sortes de f^ers fn- cette seconde édition. Occasion de
,

Instrement et ingénieusement practi-


quoy , coritinue-t-il (4), j'ay releu ce

qucs , des Epitaphes etc. Tout cela de hnul it autre, ce que


,
Jolastre ài'rc ,

jamais aupann'ant je /l'atoisjail ; afin


est rempli de facéties et jnyeusetez
comme l'assure la Croix du Maine (i). de le reritctire en lumière aclnn ma
,
,

Et, pair ce que de-


L'imprimeur ne manqua pas d'exposer vraye conception.
puis ce temps'ia quelques petites cu-
qu'il publiait cet ouvrage sans la per-
riositfz me sont vmues en mémoire
mission de l'auteur, qui déclara tout
et autres m'ont esté amiablement en-
ouvertement dit - il (2) , que l'dge,
,
i'oyees par un des plus doctes de nos-
le temps et sa profession lui ai'oient ,

'fait changer d'humeur et la folonte


Ve France sur le mesnie suject je les
,
, ,

et qu'il lui serait mal-séanl d' ad vouer


ay adjmistees par Jhrnte d'adjonction
l'auteur.
ce qu'il avoit j ait en ses premiers ans
Pasquier ne trouva pas bon que Ta-
et verdeur de J'olaslre jeunesse , alant
bourot eût augmenli- ses Bigarrures.
a grand' peine accomply dix-huict ans •

C'était faire \oir qu'on s'arrêtait trop


et qu'après qu'il avoit donne preu\e de
long-temps à des endroits par où il ne
sa siijjisance en (juelque brave et docte
fallait que passer. Il faut les considé-
suhject il adviseroit de ne point es-
,
rer comme des hôlelleries de voya-
touj/'er ses petits enj'ans naturels et il-

(3) À^anl-propos de l'auteur sur le' éditions


(i) La Croix du Maine, Bibl. française, p. 80. des Hls;arrnres II eit date' de Vciroijoyj le quin-
(3) André Pasquet , Avis au lecteur à la léte ziènif de srptenibr*' i;'i84.

ihs iJigarruies. (4; Lit ihc'ine, f<jlio A v.


DES ACCORDS. 12'^

^eur ,non pas comme son logis. Ce qui n'ont achepté que le premier livre
et
doivent être des promenades, et non pour gausser tt rire seront conlraints ,

pas un séjour lise. La jeunesse peut d'achepler aussi cesluycy, allcchts par
excuser ceux qui donnent quehjues ce qucj'y ayeiUremesle de JoUuitre ,

heures à ces badinages mais si, quel- : comme sont les apophtegmes , aulre-
ques années après on s'applique à ,
ment propos niais ou plutost considé-
,

les retoucher, et à y faire des addi- rations absurdes de M. Gaulard, sur


tions, il semble que l'on ait dessein de le moule duquel on en a voulu figurer
blanchir sous ce harnais et tanquan ,
quelques autres par la France comme ,

ad Sirenum scopulos consenescere. j'ay esté adverly mais ceux qui le :

Voilà le sens que je donne à ces pa- font ont tort doster la gloire a nostre
rôles de la lettre qui fut écrite par Comtois Bourguignon. Et par ainsi
Pasquier au sieur Taboui'ot l'an i584. je ferai comme la veuve du Castillan,
,

J'ay leu vos belles Bigarrures, et les ay qui ne voulait vendre son cheval sans
leues de bien bon cœur non-seulement ion chat. ,

pour l'amitié que je vous porte mais Katez que le quatrième livre des Bi-
,

aussi pour une gentillesse et naïveté garrures est plus sérieux que le pre-
d esprit ou, mier. 11 est divisé en trois chapitres.
dont elles sont pleines :

pour mieux dire, pour Le \". contient quelques traits \\\We5


estre bigarrées
€t diversifiées d'une infinité de beaux pour l'institution des enfans^ le II<^.
traits. J'eusse souhaite qu'a la seconde regarde le changement de surnom et :

impression on n'y eust rien augmenté, le lll*^. ])iusieurs pariiculières observa-


S il m'est loisible de deviner, il me lions sur les vers français. L'ouvrage
semble que l'on y a ajouste plusieurs finit par un discours des faux sorciers
choses qui ne se ressentent en rien de et de leurs impostures. Tout cela est
vostre naïf; et croirois aisément que plein de choses curieuses, et que l'on
c'eust esté quelque autre qui vous eust peut lire utilement. Ce caractère par-
mal h propos preste ceste nouvelle cha- ticulier du quatrième livre est une
rite. Ilfauten tels sujets que l'on pense des raisons que l'auteur emploie pour
que ce soit un jeu, non un vœu au- se justifier de l'avoir donné ;ui pubhc
queljichions toutes nos pensées, f^ous avant le second et le troisî^>me. Ji
cognoistrez par l'a que je vous aime et faut que je cite ses paroles. Elles té-
honore -.puisque, pour la première fois, moignent qu'il n'avaitpoint abandon-
ne vous parle si librement (5). né ses badinages, depuis la lettre que
Je crois que des Accords ne profita Pasquier lui avait écrite; car il s'ex-
guère de cet avis et qu'il fit encore cuse d"y persévérer. Ce que j'en ai
,

d'aiiti-es additions à ses Bigarrures faict {%) à'\i-i\{'Q) a esté principale- ,


, ,

quaud on les réimprima. J'ai l'édition ment afin de faire entendre par les ,

de Paris, en i6i4, où l'on voit, non- discours de ce livre, que j'ai l'esprit
seulement le l/^^. livre des Bigar- disposé a autres choses qu'a des lasci-
,

rures mais aussi les Contes facétieux vêtez pour fermer la bouche à urt tas
,
,

du sieur Gaulard, gentil-homme de de calomniateurs ignorants, qui me


lu Franche-Comté Bourguignote et l'ont malignement objecté. El, pour ,

les Escratgnes Dijonnoises, recueillies le regard de ceu.x qui trouvent a d'ire


par le sieur des Accords. Ce quatriè- qu'un homme de ma profession se mesle
me livre n'est précédé ni du second encore de follaslrer tantost en prose, ,

ni du troisième. L'auteur donne plu- tantost en vers je les renvoyé à la ,

sieurs raisons pourquoi il le nomme docte epislre liminaire des épistres


néanmoins le quatrième (6); et il dit françoises du scavant Pasquier, qui a ,

entre autres choses, que ce volume 'bien monstre, tant par vives raisons
entier ne serait pas bien bigarré, s'il qu'exemples comme il ne faut pas ,

suivait la façon des ordinaires escri- assubjectir l'esprit a une seule profes-
vuins. Il avoue que, pour le faire sion si opiniastrement que l'on ne luy
mieux vendre, il y a joint les Contes permette s'égayer en la source abon-
da sieur Gaulard. Ceux dit il (7) dante de la vivacité d'iceluy. Je loue
,
,

(5) Pasquier , LeUres , liy. VIH, lom. I , (8) CeH-a-dire , en publiant le TV. livre de
pages 492 , 493. ^„ Bigarrures avant le II'. et le III'.
(6)Dans sapre'l'acedu iy*.liy. disfit^aTruTts. (9) PrefaccduIV'. Uyre det Iligarrurci, fol
(7) L'a même fotw A lij. , A ij.
,

128 i>Es ACCORDS.


certainement ceux qui, à la façon des i>erce à i^ranrl'peinc la peau,
et ne peut
yiltcmans se peui^ciit contenir à n'erii'
, uli'eniKnt ntanier La c/tair (i3). On
r

brasser qu'une seule profession : mais avertit ailleurs (!4)/['ie touches, sc-
il ne faut pus aussi blasmer ceux qui ,
Ion l'auteur , est ua mol tire des es-
avant l'esprit capuhle d'en manier ili- crimeurs qui appelle ni touche le coup
verses, les scavent si Lien exener, qu'iU donnent a<^ec leurs rpces rabat-
qti'en chaque espèce Us ne devront rien tues duquel la marque apparnist sur
,

ou peu de reste à chacun des particu- riia/jit de celui <pn est touehf- , h
liers qui s'adonnent à une. L'on scuit cause de la craie dont on blanchit
assez que l' esprit du François est plein l'épee Les Touches dii seigneur
, etc.
de telle vii'aeilé et t'arietè, que c'est des Accords qui s^iniprimi nt ordi-
,

vialgré luy si l' on L'attache a unescien- naircment à la suite de ses Bigarrures,


ce seule. Pourquoi donc iroiu^e-t-on sorit diJI'érentes de celles dont je viens
maiii^ais que je laisse aller le temps de parler.
{que les autres jouent) a cette honnesle (C) On lui fit des reproches sur ses
occupation qui n'est pas du tout uai- obscénités qui l'obligèrent h se jusli'
,

ne et sans fruit , si l'ony regarde de f^r. ] J'ai riié ailleurs (j5) sou a|)olo
près gie et j'ajoute ici que son imprimeur ,

Voici une autre raison qui marque lui a rendu un témoignage qui la poiir-
en particulier qu'il ne pliait que peu- j-git confirmer. « Qui m'a occasionné,
dant un temps sous les attaques de ses w dit-il (16; , de mettre l'ii lumière or
censeurs , et (ju'il n'avait pas dessein )) que j'en avois de copié avec !es li-
de sup|)rimer le deuxième livre, quoi- )) bres adjonctions des mots tant sales
qu'un peu lascif, Au second, dit-il
ic
» et lubriques que vous pourries dire ,
» (lO;, je lraictcdemesineiespt;r/p/i;v(- » pourvcu (pi'ils soient ingénieux^ car
)) ses, hyperboles , métonymies , méta- i> encore «pie Fauteur ayt voulu avoir
}> phores , synecdoches etc., avec la » égard aux chastes aureilles, et sciem-
,

3) plus propre diction Françoise que )) ment obmettre plusieurs propos, si


« i'ay peu choisir, etsi gracieux cxem- >' est-ce que luy, ayant oiiy dire à luy-
» pies qu'on ne les pourroit lire sans )) mesme que c'étoit ipsum et'ilTie
)) plaisir. Mais pour ce qu'il y en a » Priapnm, et qu'il y a voit infinis
» d'aussi lascifs et chatouilleux aux » beaux traits qui perdoient leur
» oreilles de nos veaux critiques que » gr:1ce sans cette liberté j'ay enfin ^

» les premiers ,
je les laisse pour ime M mieux aymé suivre sa conception
» autre saison expressément
, et suis M ({ne son conseil. 11 me pardonnera
))sauté au quatricsme de plein vol , » si jesonde si avant ce qu'il a dans
» pour contenter les plus sérieux es «le cœur, et jtrendray pour ma dé-
3)prits qui auront dequoy mesçavoir » fense envers luy ces vers de Ca-
» gré d'aucunes inventions non tou- :> tulle :

/>chées, que je sçache, par aucuns cy-


> Catlum esse drcet pitim poiUtm
» devant. » " I/isnin ; t'ersicidoi inhil nupsse esl,
L'ouvrage qu'il intitula les
(B) » Qui l'uni deniqup hahi-ntsnlem el Ippurein,
*
Touches fut imprimé a Pans l'an ,
Si suiit inoUiCuli el pariiin pudici :

i585. ] Il le divisa en trois livre.s et ,


» Et oseray bien dire (jue tant s'en
dédia le premier à un prélal à Pon- ,
)) faut que
cela oflénse personne ( lior-
tus de Tyard seigneur de Bissy et
,
)) mis (pielques hyppocriles ) t|u'au ,

évêqne de Ch.llons. 11 se vante (i ; de i

» contraire cela servira à la jeunesse


les avoir faits en deux mois à Ver- ,
» d'advertlssement de ne se pas tant
dun sur Saône, l'an i585 (12^ et il ,
» amuser à ces reciierches curieuses ,
dit que ce sont des épit^rammes, à qui
)> puisqu'elles les verra in toutes
le surnom de Touches convient véri-
» aprestées et en telle quantité que
,

tablement car c^est une espèce de lé-


i

gère eseriine où, av'ec l'epee rabattue, (i3) F.phre de'dicatoire des Touches.
je donne simplement une touche qui (14) Avertissement des Touches imprinires
a^'ec lef Bigarrure.';.

(10) Pri'facedujy. livre des Bigarrures, fui. (l5, Dans la remarque (M) de Varlicle Mi-
A iij,

(11) Dans l'rpîlre de'ilicaloire. (iG) ADi'ré Pasquet, Av ait lecteur^ au-dc-
aux vaut des Bigarniret.
{12) Ceci con/irme qu'il ne defe'ra point
d'iilienne P.isqiiior.
«l'i.t
* Carra. XVI, vs. 5.
,

DES ACCORDS. i2q


Apperceu que mots gras
l'abondance leur en engendrera un les
N'entrent vi>en]ent dans l'ame
» dégoût qui les occasionera de met- Pour suborner une dame ,

» tre le nez aux bons livres, et lire Comme les mignards appas. •
)) choses dont ils pourront retirer du
)) fruit car je suis ferme en celte Je me souviens ici d'une pensée de
;

)) opinion, que la multitude et facilité


Sorel. Les poêles, dit-il (19), qui
» grande des livres que nous avons composent dis ouvrages sujets à la cen-
3) aujourd'huy abastardissent les es- sure de la justice, et que l'on brûle en
)) prits de rechercher et lire curieuse-
place de Grèi^e, sont de grands sots, car
)) ment les bons livres mesme quand ,
ils s'imaginent que ce/a est fort agréa-

n ils s'estiment assurez d'avoir des re- ble à ceux qui aiment le plaisir des
» cueils qui leur enseignent où gist le femmes ,
et cependant Von ne scauroit

» lièvre , et où sont les viandes tou lire leur Cabinet Satyriquc que ion
j) tes à avaler Quant
maschées prestes n'ait envie de quitter le déduit pour
» à la lasciveté ne puis penser je long-temps à cause que cela est si
,
,

)) qu'elle les puissetant offenser que suie et si que cela fait de ilior-
vilain ,

» les priapées de Virgile , épigrammes reur. Pour ne rien dissimuler, il faut


)i de Catulle, de Martial, amours que j'observe qu'il ajoute uu correctif
3) d'Ovide , comédies de Tcrence Pé- ,
à cela. Mais quand j'y pense
, , poui'-
3) troniiis Arbiter, et bref tout ce qui suit-il (20) , en ce cas l'a l'on pour- me
3) est de plus beau et rare en lanti- rait dire qu'il n
en faudrait donc pas
» quité qu on leur propose comme défendre la lecture ,
puisqu'elle fait
3) choses sérieuses et à imiter devant ,
hayr le vice mais ceci n'est entendu
:

» les yeux au lieu que les lascivetez


;
que par les bons esprits et ion ne ,

3) icy rapportées représentent folastre- doit pas donner des pénitences qui
3) ment ce qui
y est comme chose lé- puissent faire entrer en tentation. IL
3) gère et de peu d'effect. Du surplus, il n'y n que trop de personnes qui se plai-
3) n'y a rien que curieux, gentil et in- sent à vivre dans i ordure.
3) génieux en ce livre et ne s'en de- , (D) On lui attribue un Dictionnaire
3) vroit pas Fauteur cacher, sous om- des Rimes françaises. ] La Croi.K du
3) bre qu'il estime le subject si léger. » Maine l'avait fait auteur du livre inti-
Cela veut dire que Des Accords se tulé, des Rythmes françaises (21); mais
donnait cette licence, non pas pour il reconnut (22) qu'il
se rétracta, et il

favoriser les passions du cœur, mais Jean le Fèvre, na-


fallait l'attribuer à
pour amuser l'esprit , et pour n'èter tif de Dijon secrétaire du cardinal
,

pas à ses vers le sel qui les pouvait de Givri et chanoine de Laugres.
,

rendre plus agréables et plus pif[uans, Cette rétractation est juste; car Des
selon le goût qui régnait depuis plu- Accords reconnaît que cet ouvrage ne
sieurs siècles. 11 n'ignorait pas la maxi- lui appa'"tient point. Voyons ce qu'il
me que les saletez grossières sont moins dit en finissant son chapitre de la poé-
dangereuses que les (hlicaîes (17)^ car sie française. Je réserve , dit-il (23)
voici comme il la mit en œuvre pour d'en dire plus amplement mon opinion
se disculper. au recueil que je fais des arts poé-
tiques français , oii Pelletier fort
« Des AmnJis (18). doctement et laborieusement Ronsard ,

.. voudra voir ces cscrits


Qn'i ,
divinement et jort a propos comme
" !,e> lise auprès de sa mie ,
toute chose et le Quintil Censeur as-
,
»• Car ils donneront envie
» A tous deux d'estre lascifs. " sez aentillement selon son temps, ont ,

desj'a desfriche les espines avec quel-


« D'un lecteur d'Amadls qui blas-
(19) Sorel Remarques sur le Berger extrava-
13 nioil les Bigarrures. ,

gant, liv. VI, pig. 37g, édition de Rouen ,

» Toi qui permets les lectures en 1646 eu 2 l'o/. i>!-8.


,
,

.• D'Amadis, et ne veux pas (20) La même , pag. 33.


.. Qu'on li«e les Bigarrures , (21) Bibliolliéque Française, pag. i56.
Cauteleusement tu as
(22) L'a même, pag. 222 ; et notez quit dtl
(1-1 Voyez mon Eclaircissement sur les Ob- que ce Dictionnaire des Rythmes fr,inçai«es fui
jrénités nttin. XFI.
.
imprimé à Paris chez GaUotdu Pré,
, l'an i5-/i.

Touclies imprimées aux (îS) Des Accords , Bigarrures livre IV, cha-
Ci9) Des Accord» ,
,

n^Tc les Bigarrures, a Paris, chez Maucroy ^ pitre III , tout à la fin , page 494 ^^ l'édition
r.n i66î , m-i2 , pag. 8a. déjà citée.

TOilE I.
1 ,

i3o ACCURSE.
ques autres ; desquels avec mention ,
» père,ayeuletbisayeuiravoientporté
de leur nom et rapport de leur propre » de suite. Tu verras, au chapitre des
texte, je m'aiderai en brief pour faire » particulières remarques sur la poe'-
une suite du Dictionnaire des Rimes D sie françoise l'occasion pourquoy
,

fraticoises de nostre oncle monsieur » ceste devise fut érigée en seigneu-


le Fèvre^ que je ferai uoir un de ces » rie. » 11 est bon de voir ce qu'il ra-
joiirs^- conte dans le chapitre où il nous ren-
Ce qui me fait croire qu'il a tenu sa voie. avait envoyé un sonnet à
Il

parole nn passage que je trouve


, est <f une honneste et gracieuse damoi-
dans préface du Dictionnaire des
la « selle fille de feu ce grand et docte
,

Bimes françaises, imprimé Tan iSgG , » président de Bourgogne, M. Bégat ,


par les héritiers d'Eustache f^ignon ,
» lequel , dit-il (29) , me faisoit cet
inoctauo. L'auteur débute de cette » honneur de m'aymer Et pour ce,
façon. J'ai premièrement recueilli, dit- » continue-t-il , qu'au-dessous du son-
il (24) , par manière de passe-temps ,
» net j'avois mis seulement ma devise,
celDictionnaire {h peu près tel quilest) » A tous Accords , ce fut la première
pour la quantité des mots , désireux de » qui en sa réponse me baptisa du
suln'enir a la défectuosité de ma trom- » nom du seigneur des Accords, cora-
peuse mémoire. Depuis , m'estanl ve- » me aussi son père mi'appela ainsi
nu en main celuy du seigneur Des Ac- » plusieurs fois qui a esté cause qu'en
:

cords , enrichi de plusieurs annota- » tous mes discours de ce temps-là j'ay


tions pour la rime, il m'a pris em'ie » rhoisy ce surnom et même en ces ,

de revoir le mien et philosopher aussi » livres. » 11 se donna par anagramme


un peu sur ce suùject , ce qui n'a point le nom de Tort'obatius , comme l'as-
esté sans profit. sure M. Bailiet (3o).
(E) La seigneurie des Accords est un
(29) Bigarrures , liv. IV , chap. III pagag
fief imaginaire qu'il ne fonda que sur
,

491,' 49^-
la devise de ses aïeux. ] Laissons-le
_ _

(joj Auteurs déguisés ^n^^« 44°' 607. [Joly ,

parler lui-même « Et pour ce que ,


: remarque que c^est une faute de Bailiet, qui a
e'té releve'e par de la Monnaie, et que jamais Ta-
» dit-il (aS) , par le discours du chan-
bourot ne publia rien sous le nom de Torvoba-
« gement de surnom (a6) je blasme , tius. Vans son chapitre des anagramniatismes ,
» ceux qui l'entreprennent, et qu'il Tabourol cite un officier langrois, nomme' Jtaa
w semble que pour m'estre appelé sei- Toruobat^ qui anagrammatisa son nom. Toruo-
bat est le mol Tabourot retourne'; et ce Jean Ta-
3) gneur des Accords je me déclare , bouret e'tait oncle d' Etienne.
» digne de la peine que je veux estre
donnée à autruy je veux bien que
))

« tu saches que je n'ai point tant des-


:

ACCURSE * , professeur en ju-


» daigné ces écrits qu'es Lettres ac- risprudence au treizième siècle
» crosticlies (27) des chapitres du pre- était Florentin. Il s'acquit un
H mier livre je n'aye mis mon nom, très-grand nom par les gloses qu'il
» et au second tu cognoistras encor
M lan et le lieu où il fut fait. Mais
composa sur le corps du droit.
M comme le sujet estoit de légère estofl'e, On dit qu'il ne commença que sur
» je n'y mis pas mon nom mais une le tard à étudier la jurispruden-
,

«seigneurie prise sur ma devise, le ce et qu'il avait bien quarante ,


» corps de laquelle est un tambour
ans (A) lorsqu'il se mit à ouïr les
"(28}, et pour l'esprit j'ai mis ces
>' mots : A
tous Accords, selon que mes leçons du fameux Azo. Il s'était
appliqué avant ce temps -là à
(24) Pri\face de ce Dictiounaire des Rimes.
(a5) Préface du IV. livre des Bigarrures. d'autres études. Les progrès qu'il
(26) Cest le II'. chapitre du IV'. livre des
Bigarrures. fit dans le droit civil furent si
(2-) En ejjel la première lettre du chapi-
,
grands , qu'il devint un célèbre
tre I est un E celle du,II'- une S et ain-.i de ,

prenntre du chapitre Xf^I qui


suite jusijii"a la ,
professeur en cette science. Il
eslun T, etpar Va toutes ensemble font Estiemne
Tabourot. IX autres avaient de'jà fait une telle l'enseigna à Bologne , et puis
chpse. Vuyei M. Balllet dans ses Auteurs dé-
* Chaufepié raconte qu'ayant perdu son
guisés , pages 44^ 44^- >

(a8) C'e'tail donc une devise parlante et une ,


nom et son surnom , il retint seulement celui
allusion manifeste à son nom Tabaurot. rf'Accorso. ,
ACCU RSE. ,3t
s'enfonçant dans la retraite , il diaient bien, comme on le verra
composa une glose continue sur bientôt. Il y a des gens qui lui
tout le droit , laquelle parut si donnent une fille fort savante

commode et si utile aux jeunes (E), et installée à la profession du


gens qu'on ne parla plus des gloses
,
droit civil. Il mourut l'an 1229
qui avaient précédé celle-là et , (F) , à l'âge de soixante-dix-huit
qui sans doute n'étaient point si ans. Son tombeau se voit à Bo-
bien disposées , ni si complètes. logne , dans l'église des Corde-
Les contradictions que l'on re- liers avec cette inscription très-
,

marque dans Accurse viennent , courte et très-simple Sepul— :

selon quelques-uns non pas de , chrum Accursiif glossatoris le—


son inconstance ou d'un défaut gum , et Francis ci ejus filii [d).
de mémoire , mais de ce qu'en Il disait qu'on n'avait que faire
rapportant les diverses opinions de théologie pour connaître
la

de ceux qui l'avaient précédé , il les choses divines (G), puisque


ne faisait connaître les auteurs les lois romaines nous en instrui-
que par la première lettre de leur saient assez. M. Moréri allègue
nom. On veut que cette lettre, très-mal le sieur Catel(H). Fran-
étant disparue de divers endroits, çois Hotman n'a pas eu raison de
ait été causeque les lecteurs aient dire qu'Odofred enseigna Azo et
pris pour son sentiment ce qu'il Accurse car Odofred et Accurse
;

n'avait dit que comme témoin furent tous deux disciples d'Azo,
de la doctrine d'un autre. Son et puis professeurs en même
autorité était autrefois si gran- temps à Bologne. Albéric Gen-
de (B) que quelques-uns l'ont
, til a remarqué cette faute de
nommé l'idole des avocats {a). François Hotman (e).
La plupart des interprètes ont
{d) Panzirol. de Cl. Leg. Interpr. Lib. II,
pris autant {b) ou plus (c) de cap. XIX, pair. 146
soin d'expliquer sa glose que de (e) Alberic. Gentil, in Dialog. de Juiislo-

commenter le texte même des terprelibus,yb/. (jo.

lois. Quelques critiques grands ,


(A) Et qu'il avait bien quarante
amateurs de la politesse du lan- D'antres disent qu'il n'en avait
aiis.'\
gage, ont horriblement crié con- que vingt-huit. Jajn qnadragtnaiius ,
tre la barbarie de cet auteur (C) ;
wel ut alii scribunt, XXf^lH annos
,

natits , jus cit'ile ab Azone audit'it.


mais on convient assez générale-
C'est ainsi que parle Panzirole dans la
ment que c'était un grand génie, page 147 'le la seconde e'dition , qui
et que ses défauts viennent du est celle de Venise en i655 (i). M. ,

siècle ou il a vécu (D). Il vécut Pope Blount citant Panzirole et Ko-


,

fort à son aise , ayant belle mai- nig, met trente-sept ans, et non vingt-
huit (2). La citation de Konig est
son à la ville belle maison à la
,
bonne; mais celle de Panzirole ne Test
campagne , et deux fils qui étu- pas, à moins que mon édition ne soit
différente de la première. Forsterus
(a) r/re f/e Panzirol. deClaris Legiim In-
terpr. lih. II, cap. XXIX, pag. et
aurait été plus propre à être cité car :
147,
seq. il rapporte qu'Accurse devint disciple

{b) .\rlu. Dui:k de Usu et Author. Jurij


Civ. Rom. lib. f, cap. V
, apud Pope EloiiQt. (i) P.in2iiol. de Clar. Leg. Interpr. lilt. II ,

Cens, celelj. Autor, pag. 286. cap. XXIX.


(c Forsteri Histor. Juris Civil, lib. III, (2) Pope Bloont, Cens. Celebr. Aiîtor. pag.
cap. XII, -8»>.
, ,

l32 ACCURSE.
d'Azo à l'âge de trente-sept ans (3). là (6).Voyez aussi Bernartius dans
Voyez ci-dessous la remarque (F). son Traité du profit qu'apporte la lec-
(B) Son autorité était autrefois si ture de l'histoire. Il s^st trouvé par-
grande. ] Je ne saurais rien alléguer mi les jurisconsultes du seizième siè-
ici de plus à px'opos ni de plus diver- cle bien des auteurs qui ont censuré
tissant qu'un passage cité par un des cette barbarie. Il semble gue l'Alciat
jurisconsultes modernes qui ont le mis en branle, et qu^il ait com-
les ait
moins estimé les glossateurs JVostis : mencé de donner du goftt pour l'u-
quanta sit auctoritas glossatoris. Non- nion des belles-lettres et du droit ci-
ne lieri dixit Çyn. glossam timendam Budée * , l'un des plus ardens
vil.
propter prœscriplam idololatriam per censeurs d'Accurse , a contribué aussi
aduocatos significans quod sicut an-
,
à cela (7). On ne peut nier que l'igno-
tiqui adorabant idola pro diis ita
,
rance des belles-lettres n'ait fait tom-
adi^ocali adorant glossatores pro e^'an- ber les glossateurs dans plusieurs bé-
gelislis. f^olo enim potiùs pro me vues. Albéric Gentil s'est fort déclaré
glossatorem quam textum; nam si al- leur partisan il n'a pas voulu avouer :

lego textum, dicunt adi'ocati div'ersœ qu'Accurse ait mis en usage la maxime,
partis et etiam judices , credis tu quôd grcecum est non potest legi (8) , qui ,

glossa non ita viderit illum textum si- lui a été leprochée (g). Il croit que
eut tu et non ita benè intellexerit
,
ces paroles ne se trouvent nulle part
sicut tu ? Ego recordor ( et sit illud dans ce glossateur , et il le fait plus
pro novo ) quod diim essem scliolaris
, habile dans la langue grecque qu'on
eram salis acutus et dUm semel esse- ne le pense ordinairement. Quoi qu'il
,

mus multi socii in und collalione , au- en soit, le proverbe grcecum est, non
sus fui unum textum allegare contra potest legi , passe pour avoir tiré son
sententiam doctoris mei : tantnm au- origine de la coutume des elossateurs
daciam habui. Dixit unus socius Tu On prétend que , lorsqu'ils tombaient
:

loqueris contra glossam quœ dicit sic, sur un mot grec, ils cessaient d'inter-
£t ego respondi Etsi glossa dicit sic préter, et en donnaient pour raison
:

ego dico sic , ignarus auctoritatis glos- que c'était du grec qui ne pouvait être
satorum. Credebam enim quod essent lu ; et après avoir ainsi sauté celte
communes aposlillœ , quales sunt in fosse ils reprenaient l'explication du ,

abris grammaticœ , sicut super f^irgi- latin.


lio et Ouidio : sed tamen non ita est ; (D) Que c'était un grand génie , et
fuerunt enim glossatores maximœ scien- que ses défauts tiennent du siècle oh
tice t'iri et auctoritatis. Etsi aliud non il a vécu. ] Je ne citerai que deux au-
esset quam glossarum ordinatio , et de teurs. Hanc signijicationem in animo
quibus potest dici id quod arbitror de habuit F. A
ccursius , glossatorum l'été-
nullo dici passe , uidelicet quôd totuni rum coryphœus homo ingenii prorsiis ,

corpus juris viderunt. Magis ergo stupenJi , qui in tanlis disciplinarum


standum est eis qui i^iderunt, quam tencbris ipsam disciplinarum disci-
nobis qui non l'idimus (4). Hotman plinam accuratissimè intellexit , ciim
cite quelques autres passages du même non jurisdiclionem seJ jurisditionem ,

auteur, qui confirment la même cho- scribendum censuit (10). Voilà ce que
se, etquinous apprennent que, devant, dit un Allemand voyons ce qu'a dit :

les juges, la glose, mise en balance


Ludov. Vives, de Causis corrupt. Artium,
contre le sentiment de deux interprè- lib.(6)
/, p. 52, et lib. VII, pag. 206. Vide etiam
tes l'emportait toujours. Si sententia Brassicanum inter F.pislol. Eobani He»si.
,

glossatoris duobus doctoribus est con- * Julr dit qu'il faut écrire et prononcer Budé.

traria, projectb in judiciis prœualeret CV.ff ce qu'a fait Bajle à l'article de ce per- ,

sonnaj^e. Ce n'est donc qu'une faute d'impres-


sententia ipsius glossce (5). sion que relève July.
(C) Crié contre la barbarie de cet (7) Voyez Pasquier Recherclie de la France,
,

auteur. ] Louis Vives est un de ceux- liv.IX chap. XXXIX pag goi , qui donne
, ,
.

lepremier rang à Budée, et le second à Alciat.


(31 Forst. Histor. Juris civil. Ii6, III , cap. (8) Alb. Gentilis, de Juris Interpret. fol. iÇf.
XII. (9) ^iVie Sich. in Prœfat. ad Codicem Tbeo-
(4) Raptiael Fiilgosius in L. Si !n Solutum dosianum ; et Alciatum , cap. XVI, lib. II,
C. de Action, et Oblig. apud Fr. Uottomanum, Di.spunct.
Prœf. Consiliorum. (10) Baribii Animad. ad Claudian. in Rufin,
(5) IJein , ibid. apud eundem. lib. II , vs. 85, pag. 1200, J20I.
ACCU RSE. ,33
un Français. Anliqui (inteipietes ju- une observation qui m'a été commu-
ris ) inler <juos Accursius et Bartolus niquée de bon lieu (17). « Volaterran
principatum terient , de sermone non » dit qu'Accurse commença d'étudier
i'aldè anxii, rerum qitas tractant cu- » en droit à quarante ans et qu'il ,

rant solam fiaùuerunt : quas ciim nos- » mourut Fan 1279, en la soixante-
sent , quantum in illd barbarie et co- )j dix-huitième année de son âge
(18) ^
dicum depraualione nnsse poterant ,
J) d'où il s'ensuivrait qu'il
serait né
eocplicare nisi incondilè et barbare ne- ))lan 1201. Cependant Accurse lui-
quiferunt , quod non tant eis qiiani se- •» Doème nous apprend sur l'Authen- ,

culo illi tribuenduni , quo linguœ et y> tique utprœp. nom. imp. au mot in-
bonœ litterœ pronùs jacebant{\ i). Ko- « dicliones , qu'il écrivait actuelle-
tez que Barthius donne à Accurse le M ment en Tannée 1220 et sur la loi ;

pre'nom Francisciis il n'est pas le seul: » pénultième au code rfe accusationi-


iiui le fasse (l'i). J'avais suivi ces gens- » bus qu'il écrivait en l'année 1227
, :

la dans Ja première édition j mais je » ce qu'il n'aurait pu faire si le calcul


les abandonne dans celle-ci. w de Volaterran avait lieu; autrement
(E) Une fort sai^ante. ] Panzi-
fille » Accurse aurait travaillé sur le droit
role n'en parle que par un on dit. Fi- )> long-temps avant que d'y avoir étu-
liam quoqiie habuisse dicitur, quœ jus )> dié. Ces époques de 1220 et de 1227
cifile Boloniœ publiée docuit (i 3). Dès » excluent celle de ia36, qui est fa u-
qu'un fait de cette nature est douteux, « tive, et qui ne peut être admise par
il s'en faut très-peu qu'il ne soit faux
^
» ceux qui mettent la mort d' Accurse
car de telles choses sont trop singuliè- » en 1229. n
res pour demeurer dans l'incertitude [G) Qu'on
n'avait que faire de la
quand elles sont véritables. Ainsi je théologie pour connaître les choses
n'ajoute pas beaucoup de foi à ce que dit^inss.^ Coringiusl'en a censuré com-
je \ iens de lire dans le Théâtre de Paul me il fallait. Voici ses paroles Ridi- :

Fréher, qu'Accurse eut quelques filles cula est Accursii gloriatio in gl. ad 1.
qui à cause de leur excellente érudi-
, 10, sect. 2. ff. de J. et J. , nihil opus
tion , furent employées à faire des le- esse théologien studio ad cognoscenda
çons publiques à Bologne (i4)- Fré- di^ina, ut quœ ex legum romanarum
her agréera s'il lui plaît , que je me
, libris aff'atim queat peli (19).
défie de Jean Frauenlobius , dont il (H) M. Moréri allègue très-mal le
cite un livre allemand. sieur Catel. ] Comparons le texte de
(F) // mourut Vous ne
l'an 122g. ] ces deux auteurs l'un avec l'autre il :

voyez rien de semblable dans le Théâ- ne faut que cela pour connaître la bé-
tre de Paul Fréher qui a été compilé,
vue. Catel ayant dit que Montpellier
avec tant de peine et pendant un si est une des premières villes de Fiance ,
long temps. Vous y voyez au con- , en laquelle le droit romain a élé lu
traire, qu'Accurse florissait l'an laSô, publiquement ajoute « Car nous
, :

qu'il mourut l'an 1279 *, et qu'il Ct » trouvons que le grand et ancien ju-
les gloses sur les Authentiques l'an " risconsulte Placentin qui vivoit
,

1236 (i5). Il est cité lui-même pour » avant glossateur Accurse , a lu


le
ce dernier fait par Jean Fichard ,
w publiquement îe droit dans la ville
dans la Vie des jurisconsultes (16). J) de Montpellier, delaquelle ilfaitsou-
Cette citation est fausse ; car voici » vent mention dans sa Somme, qu'il
)» composa (
selon qu'il en a escrit sur
(11) Rolandiis Maresius, Epist. XL, lib. /, « les Institutes ) , demeurant à Mont-
pag 176, 177, edit. Lfips A. 1687. )' pellier ainsi qu'ont remarqué ceux
;
ArihusDuck et Pope Blount le font aussi.
(12)
« qui ont escrit sa vie. 11 mourut dans
Voyez Pope Blotiat, Cens. cel. Aut. pag. 286.
\i) Paniirol. de Cl. Leg. Interpr. lib. II cap.
>' Alontpellier le 12 février 1192 , et
,

XXIX, pag. 149. » est enterré dans le cimetière Saint-


(i4) Paul. FreLer. Theatr. Viror. Erndit.
pag 784 (17) C'eslparM. de la Monnaie.
* JoIy critique celte date de 1279, ain.<i que (18) Volaterr. lib. XXI, pag. 781. Il remar-
cellede 1229 qu'on lit dans le texte. Il ajoute que qu kccurst commença cette élude sous l'em-
que d'autres disent 1209 ou 1260 , mais quUl est pire de Frédéric II Or cet empereur régna
.

pour 1245. depuis l'an 1212 jusqu'à 125o.


(i5) Idem, ibid. (19) Conriog. de Civili Prudentiâ, cap. III,
16) Jpud Fréher. ibid. avud Pope Blount Cens. ce). Aat. pitg. 286.
,

i34 ACCURSE.
V Barthélemi (20) ». Or voici les pa-
et le menacèrent de lui confis-
,

roles de iMoreri : Le sieur Catel sou-


quer tous ses biens s'il sortait
tient qii' ytccurse mourut a Montpel-
lier en 192. Ce qu'il ajoute a bon be-
1
hors de leur ville. ]I crut être
soin de correction D'autres dit-il : plus fin qu'eux en vendant tous
, ,

comme Fischard et Trithème le pla- ses biens à un ami mais sa finesse


, ,
;

cent dans le siècle suivant même le fut nulle on ne laissa pas de


;
:
dernier dit qu'il prnj'essait a Bologne
en 1240 If lais peut -être se sont- ils
lesconfisquer. Cela le contrai-
trompi-js en confondant ce grand hom-
,
gnit de revenir, et en obtint il

me auec François Accurse son fils qui , la restitution. Il avait enseigné


at'oit beaucoup de science et de mérite
à Toulouse , et s'était trouvé un
et qui fut professeur en droit a Bolo-
gne, et conseiller de Richard, roi d'' An-
jour fort embarrassé en expli-
gleterre. On a dû placer le père an quant la matière des intérêts.
XIll*. siècle , et on ne courait ea cela Jacques de Ravanne l'un des ,

précisément aucun risque de le con- plus doctes jurisconsultes de son


fondre avec le fils de sorte que le :

doute de M. Moreri est très-mal fondé. temps, se fourra parmi les au-
Il n'y avait point en ce temps - là un diteurs incognito en faisant de ,

roi d'Angleterre nommé Richard. l'écolier, et lui des objectionsfit

(20) Catel, Mémoires de l'Histoire du Langue- qui demeurèrent sans bonne ré-
doc , pag' sgï-
ponse. Quelques - uns ont dit
ACCURSE (Cervot), fils du qu' Accurse , à son retour à Bo-
précédent, se hâta beaucoup plus logne , y fut professeur en droit
que son père de se faire graduer ; avec Bartole , et qu'ayant eu avec
car il voulut être docteur en droit lui une dispute sur la leçon d'une
avant l'âge de dix-sept ans , et il loi il fallut envoyer à Pise pour
,

vint à bout de sa demande, après y consulter l'ancien manuscrit


qu'on eut long-temps discuté si des Pandectes. Mais quelle ap-
les lois le permettaient (a). Il se parence qu'il ait vécu jusqu'au
mêla de faire des gloses et les , temps que Bartole était profes-
joignit avec celles de son père ;
seur (A) (a) ?
mais on n'en fit pas beaucoup de (a.) Tiré de Panzirol, de Clar. Leg. Interpr.
cas. Deterior interpres ineptas lib. II, cap. XIX ,
pag. 148.
glossas et longe à vero distantes
(A) Qu'il ait fécu jusqu'au temps
paternis addidit , quce Cervo- que Bartole était professeur ? ] Bar-
tianœ vocatœ ut plurintiim reji- iole naquit l'an i3i3, et fut reçu doc-

ciuntur {b). teur en droit à l'âge de vingt et un ans,


c'est-à-dire l'an i334 (•) il faudrait
(a) Panzir. de CI. Leg. Interpr. lib. 1/ donc qii'Accurse le fils eût vécu pour
cap. XIX, pag-. 1^9. le moins si.x-vingts ans s'il avait ,
^b) Idem ibidem. ,

vu Bartole enseigner le droit; car il


avait été émancipé de son père (2).
ACCURSE ( François) * ,
Prenons qu'il n'eût que quinze ans
frère
aîné du précédent , fut si estimé
lorsqu'il fut émancipé et que l'année ,

par ceux de Bologne , que , lors- de son émancipation ait été la dernière
qu'ils eurent appris qu'il devait de son père, c'est-à-dire Tan 1229;
suivre le roi d'Angleterre en nous ne laisserons point de trouver
qu'en i334 il aurait eu six-vingts ans.
France poury enseigner le droit, La conjecture de Panzirole est assez
ils lui défendirent de s'absenter, bonne c'est que l'Accurse qui fut :

* Joly est d'avis d'écrire , François , fils {i)PaniiroI.deCl. Leg. Interpr. cap.LXfJI.
d'Accurse. (j) Idem , ibid. cap. XXIX
ACCURSE. i35
collègue Eartole était fils <l"iin
lîo de ce qu'un pareil ouvrage n'est
AccURSE qui enseignait le droit à Reg- point sorti de dessous la presse
gio sa patrie , vers l'an la^S et qui ,
{a) et de ce qu'on ne réimpri-
lut aussi à Guillaume Du-
Padoue (3).
,

rant! fait souvent mention de lui.


mait point les autres {b). Il ne
Donnons encore ici une observation méprise point Accurse du côté
de M. de la Monnaie. « Antoine Au- de l'esprit et il le trouve sou-
,

r gustin parle en plusieurs endroits (4) vent judicieux. Ce critique fai-


w de ses EmenJationes de cette dis-
sait des vers en latin et en ita-
« pute de Bartole touchant la leçon
w d'un certain mot du paragraphe lien (C) il entendait et la musi-
;

î) dernier de la loi si creditov au D- de que et l'optique, et il voyagea au


ji distract, piifn. et incline à croire
,
septentrion (D). Ceux qui nous
i> ([uece fut plutôt avec Balde qu'avec

M François fils d'Accurse *


que Bar- apprennent cela pouvaient ajou-
,

» tôle eut Alexandre ter qu'il entendait parfaitement


cette dispute.
w d'Imola cité par le même Antoine la langue française , l'espagnole
,

« Augustin a aussi cru que c'est en- et l'allemande qu'il ramassa un


,
;
» tre Balde et Bartole que la contes-
» tatiou était survenue. Mais Bariole
grand nombre d'antiques qui fu-
3) lui-même ayant positivement écrit rent mises dans le Capitole , et
» que c'était avec François fils d'Ac- qu'il passa trente-trois ans * à la
i> ourse l'expédient que Panzirole
,
cour de Charles-Quint, auquel il
» fournit paraît le plus rece^able : »
et, comme on le vient de voir , c'est
était fort agréable , et dont il re-
aussi le parti qui m'a paru le plus pro- çut bien des faveurs (c). Il ne
bable. faut pas oublier que son édition
(3) Idem, ihid. cap. XLfl, png ï6o , iGi. de Marcellin est plus ample de
Et surtout au Uy. IV ckap. XVII.
(4)
* Jolr remarque que dans le texte de Bartole
,
cinq livres que les précédentes
il y a seulement François Accurse, lequel, e'iant {d) (E). Cette édition est d'Augs-
collègue de Bartole en i34o ne saurait être
François fils d'Accurse , professeur avant 1270.
,
bourg, en 1 533. Il prétend avoir
corrigé cinq mille fautes dans cet
ACCURSE ( Marie- Anc.e, en historien (e). Il publia, en la
latin Makiangelus ) est un des même année et dans la même
critiques qui ont vécu au seizième ville , les Lettres de Cassiodore ,
siècle. Il était d'Aquila (A) dans , en douze livres, accompagnées
le royaume de Naples. Sa grande du Traité de l'âme ; et c'est à lui
passion était de chercher et de con- que l'on doit la première édition
férer les vieux manuscrits, afin de
{a Barlli. in Slatium ioin. II, pag. SgO-,
,

corriger les passages des anciens. tom. III , pcg. 1602 in Claudian. pag. 826
; ;

Adversarior. lib. XX, cap. Xf III.


Les Diatribes y qu'il fit imprimer et
{b) On fait à l'égard li'Ausone dans
l'a
à Rome , in-folio , l'an \^i^,sur l'édition d'' Amsterdam e« 1671 , mais non
,

Ausone sur Solin


, sur Ovide, et pas selon toute l'étendue du titre qui promet
Notas intégras Accursii.
montrèrent de quoi il était ca- * Charles-Quint ayant abdiqué en i555,
pable en ce genre d'érudition. et Accurse étant encore à Borne en l524, Joly
Il avait fort travaillé sur Clau- remarque qu'Accurse ne peut avoir passé 33
ans à la cour de ce monarque. Caserait tout
dien (B); mais cet ouvrage n'a au plus 3l , qu'il faut réduire de beaucoup,
point été publié , encore que l'au- si A. M. Accurse est mort en i535 , comme
le croit Joly.
teur eût fait savoir qu'il y avait (c) Kicolo Toppi BiLlioth. Napoletana
, ,

corrigé environ sept cents pas- pag. 206.


(rf Henr. Valcsii Prsef. in Animian. Mar-
sages sur les anciens manuscrits.
cel).
Barthius a témoigné du chagrin (e) Toppi, Bibliolh. KapDÎet-, pa^. 206.
, ,

i36 AGCURSE.
de cet auteur (f). Comme il y contient 87 vers. La pièce d'ArsilIus a
avait de son temps quelques écri- pour titre, de Poé'ds urbanis ad Pau-
lumJ'n'ium. Pierius Valerianus con-
vains latins qui aimaient à se ser- temporain d'Accurse le surnomme
,

vir des termes les plus surannés, Aquilanus non-seulement dans son il ,

se moqua d'eux fort plaisamment commentaire sur le XII". livre de l'É-


dans un dialogue qu'il publia l'an ^. ne'ide mais a\issi dans des vers la- ;
,n ,•, . -,

,^0, /T-N T| i ,•. tins (5) qu il lui adresse. Comptons


'^ ""P^tl* donc à coup sûr pour une faute ce que


'Rv^i^^'^'^^r"'*
traite de Volusuis Metianus , an- Barthius a dit de la patrie d'Accurse.
cien jurisconsulte (g). Il a fait II l'a fait naître à Amiterne (4)- Ko-
aussi un livre touchant l'inven- î?^S "'ayant point su que cela fût '

taux
On 1i>ac- ^oles d'Accurse 2Vec du
.• j !>• //^N •
a adopte tout long. Ces lia-
tion de 1 imprimerie (G). r»

, 1

placuureticere :

cusa de plagiat au sujet de son ne quis ( ciuod Sallustius civis ait


Ausone ; car on débita qu'il s'était meus) viodestiam in cnnscientiam du- ,

approprié le travail de Fabricio '^^'i^'. <^^) ont trompé Barthius. Or, '

voici pourquoi Accurse a traité Sal-


Varano , évêque de Camerin ; luste cle compatriote Saliuste
dis-je ^ ,

mais il s'en purgea avec serment, qui était natif d'Amiterne c'est que :

et protesta qu'il n'avait jamais lu la ville d'Aquila a profité de la ruine


de livre dont il eût tiré quelque d'Amiterne, et lui a été substituée en
quelque façon. Elle n'est qu'à cinq
chose qui eut servi à orner le sien. milles
des masures d'Amiterne. Con-
La forme de son serment est re- sultez M. Baudrand.
marquable (H). On aurait vu sor- (B) // avait fort travaillé sur Clau-
tir de dessous la presse plusieurs dicn. ] Puisque les fatigues de son
voyage d'Allemagne et de Pologne ne
ouvrages de sa façon , si son fils
/-, - • , . , , l'empêchèrent pas de corriger près de
.

Casimir , qui était homme de sept cents fautes dans ce poète on


,

lettres (I) , avait vécu plus long- peuts'imaginer que pendant un meil-
temps (/?) leur loisir il s'appliqua fortement au
même travail. Talis , dit-il (6) , non
LeoDjrdo Nicodemo Addizioni alla
(f aies legitur in cof^/cj£>H4
,
Claiidiani) (
Bibliot. Napolet., pag ino. .

etiam novissimè recognitis. Qui lan-


(g) Il a pour titre, Distribulio, item vo-
liini abcst ut non etiam nunc uersibus
caLula ac nota; partium io rébus pecuniariis,
pondère, numéro, meiisurâ. sint claudi ac déformes ut eos ex ve- ,

(A) Toppi, Bibliotb. Napolet. /jct^-. 206. exempUtribus , diim Germanium


tustis
Sannatiasque nuper peragramus sep- ,
(A) // était d'Aquila. ] Outre le tingentis ferè mendis inler eqnitan-
témoignage du Toppi approuvé par , dum eluerimus.
le silence de Léonard Nicodème voi- , (C) Faisait des l'ers en latin et en ita-
ci des vers qui confirment cette vé-
lien. ] Voici ce qu'Accurse nous ap-
rité.
prend sur ce su|et dans une fable
Ut folucrum regina supervolal lelhera, et alù intitulée Testudo , qu'il a jointe à ses
Iinmotwn lumen sulis in orbe tenet; Diatribes. II y raconte les persécutions
Sic illâ genilus Mariangelus urbe ....
Alite quœ il Jovid nohile nomen habet qu'il souffrait à Rome de la part de
,
Felici ingenio solers specutatur , etc. ses envieux , et comment ils lui fai-
saient un crime des choses les plus
Ils sont dans une pièce de François innocentes. JVovistis dit -il en s'a- ,
Arsillns(i), imprimée à la fin d'un dressant à deux jeunes princes de la
recueil de vers intitulé Corjciana maison de Brandebourg
,
,
, auxquels il
qui fut publié à Home, l'an i524. Il
y a dans ce recueil un protrepiicon (3) Lib. ly AmoTum, apud Nicodem. Add.
de notre Accurse ad Corycium alla BibliolVi. Napoitt., pag. 170.
(2), qui
(4) Ipse Sallii.rtii citais, Ainiterninus nempe.
(l) L. Nicodemo le nomme mal Arsiliiis dans Barlh. in Stat. (o»i. // pag.
,
3()f).

ses Addizioni all.i Bibllolli. iXapolet., pag. 1711. (5) Mariang. Accurs. in Testituii;oe.
(i) Ce'tait un Àlleiiiaml nomme' Gorilt., il ce (6) Accursii Dialr. in Ausonium. On a retran-
que j'ai apprii de M. de la Monnaie. ché ces paroles dans Pédnion J'Ausouc de 1671.
ACCURSE. i37
a de'Jié son \'i\re,ipsi principes, quàm dème a relevé là-dessus comme il fal-
mi/u i-eititum propè (ut aiunt) mili- lait Kicolas Toppi (81.
tarem probro uerterint , tiim Jidibus (F) Dans un dialogue qu'il publia
scire nuisicen callere philosopha in- , fan i53t .
] Commetouç ceux qui au-
digniim prœdicent , quantiimque im'a- ront mon livre n'auront pas celui de
serint , qiihd et opticen cum litlera- Léonard Nirodème copions ample- ,

rum studiis fernaculosqiie cum lati-


, ment de ce dialogue. Osco ,
le titre
nis nunieris conjunxerim. Il dit là qu'il f^olsco Romanoque elnquentid in-
,

travaillait à l'histoire de la maison de terlocutoribiis Dialogus ludis Rnma- ,

Erandebourg , sur les mémoires qu'on „is actus. In quo oitenditur uerbis pu-
lai fournissait. blicd monetâ signatis utendum esse ,
(D) Et
voyagea au septentrion. ] prisca ferb nimis et exolela tanquàm
il
Nous l'avons déjà entendu lui-même scopulos esse fugienda. Si quid ita- ,

faisant savoir à ses lecteurs le grand que ,lectoroptinie,anliquitatem amas,


nombre de passages qu'il corrigeait ut sanè debes libel/um hune ingenti ,

sur les arcon? delà selle, en traversant quanwis ptcuniâ h biblinpold te tibi
l'Allemagne et la Pologne. Ce qui suit redemisse non pœnitebit. JVam prœter
nous apprendra qu'il remarquait jus- quant quod uocibus partimOscis, par-
qu'aux moindres choses, jusqu'aux tim f^olscis conscripiusest, latina quo-
cliansons avec quoi l'on endormait les queistuci'erba exoleiioranimisquepris-
enfans; mais il n'en tirait pas de fort cnqutbusAborigines,Picus,Ei'andius,
bonnes conséquences. On le va voir Carmentaque ipsa loqutbantur aj)'a- :
,

JViiper dit-il (7)


, non in Pannoniâ tïm collata sunt. Quœque ontnia apud
,

soliim, atqiie adeà apud ieptemtriona- Ennium Pacmàiim Plautum, alios- , ,

les plerosque populos , i^eriim etiam ue hujus notée priscos auctoi es abstru-
ullra Sauromatas , non sine admira- siora leguntur. Itenique recentiorum
tione audii'imus ad suadendum nutri-, cacatas yipulei et Capellce chartas ,
cio trtnie iiijanlibus soninum , dici li hujusniodi^'e alioiitm. Quœ ut cette
lu , li lu, tiim et la lu, la lu et la tamen ab eo qui
, sunt evitanda , ita
la, la la. Quod nostrates Jeiè nan dodi nomenjèrat agnoscenda sunt ut ,

na ,nan na et nin na ,nin na riim aliquandb in eas offenderit


, de , .

etiani mord quddam uoceni suspendeji- iUorum sensu ei turpiter hœsitandum


tes passtm dicere consueuerunt. Mo- non sit (g). Voici le jugement qu'An-
l'il porro nns majori quddam admira- dré Scholtus fait de ce livre DeApu- :

tione,qund infantes ipsi et horriduli leionietamorphoseosexLucioPatrensi,


et sordiduli vixdiim jari incipien- seu Luciano scriptore audi amabo , , ,

tes mamman atque tatam latine bal- quœ in Dialogo olim ante tios ipsos
butiunt ipsis quoque matribus non ocloginta annos à Mariangelo Accur-
,

intcllecti. Ut videri possint et hœ quo- sio {homine ut iltis temporibus per- ,

que i^oces naturales magis quhni arbi- erudito, quique lYasonem, Ausonium,
trariœ. 11 a tort de simaginer que ac Solinum Diatribâ illustraint) oscè
les mères n'entendissent pas ce que ac uolscè conseripto , ut sœcuti dege-
leurs petits enfans voidaient dire c'é- nerantis nimiîim a prima eloquentiâ ;

taient elles qui leur avaient appris ces insaniam ueluti acetn aspersa sutira
mots. perstnngeret audi, inquam, et risuni ,

(E) Son
édition de Marcellin est plus confine , si potes , etc. (»o).
ample de cinq Hures que les précéden- Notez que ce livi^de notre Accurse
tes. ] Le Toppi avait de mauvais mé- est in-8°. mais n(«^ surtout ce qui
moires sur ce. fait. Il n"a point dit ce ma été communi^é par M. de la
qu'il fallait dire , et il a dit ce qu'il ne Monnaie. « Le dialogue de Marie-Ange
fallait pas avancer. Il n'a point dit » Accurse contre ces corrupteurs de
quAccurse eût joint cinq nouveaux » la langue latine peut avoir été im-
livres à ceux qu'on a\ait déjà; il n'a
parlé que du sixième. Or il est faux (8) Leonarao Nicodemo Addiiioni alla Bi- ,

' • • •» 't'. -1 ' bl:oth Napolei pa^. i-o.


que
1
I
le sixième ait ete trouve
,
il nous
.
:
... , t j \ j
,

ajj- „„;
(q) Tire de Leooardo iNicodemo, Addizioni
•. v .

manque encore les treize premiers h- oiia'Biblioih. Napolet , pag. 170.


vres de cet historien. Léonard Kico- (10) Andr. Sdiotius. w. /. Qnajst. Tullianar.,
paç. 5g, apud Léon. Nirodemum, Addiiioni
{*) Diatrib. in Aason. alla Bibl. Fiapuletana pag. 170. ,
,

i38 ACHÉE.
5> prime mais il faut croire
l'an i53i j que Zel en parlait (i4)' Chacun com-
y> qu'il avait déjà paru quelques an- prend qu'une année de plus ou de
)> nées auparavant puisque Geoffroi
, moins est ici sans conséquence. De
5) Tory le cite dans son Champ fleuri, plus, doit-on dire qu'un nomme qui
>) imprimé par lui-même in-4°- Tan a passé trente-trois années à la cour
,

« iSag Semblahlement dit-il, mille , de Charles-Quint, vivait l'an i5oo? *'


)) autres façons de dire que Hiéronyme (H) La forme de son serment est re-
» Avance, natif de f^érone allègue
, marquable. ] La voici Quod dii ho- :

)) au commencement de ses Annota- minesque fas fidesque audiat sa-


, ,
,

Ji lions qu'il a très-diligentementfaites cramenti religione, ac si qiiid estjus-


» sur les œut^res du poète ancien jurando sanctius , affirma , idque rite
3) niim.iné Lucretius que je laisse aux
,
pariter ac sine dolo malo dici ccete- ,

» curieux et amateurs d'antiquité , et risque accipi volo , me nec ullius un-


3> de laquelle chose on peut amplement quam scripta perlegisse ac ne con-
» t^oir et lire en un dialogue intitulé spexisse quidem undè i>el tantiUiim, ,

5) Osci et f^olsci Dialogus ludis Ro- lucubraliones nostrœ redimiri juvari-


» manis nctus. Cette pièce est désignée que datum fuerit. Quin immo labo-
» par Paul Jove dans l'éloge de Bap- râsse ,
quoad ejusfieri licuerit , ut si
3) tiste Pio
qu'elle attaquait princi-
,
quippiam alterius , post observationem
» paiement. Le titre du dialogue est quoque meam , editum occurreril è ,

assez particulier , et bien honnête-


•><
nostris protiniis aboleverimus. Quod
^) mentlong mais : j'ai peine à en con- si pejerem , tiini pontifex perjurio ,

» struire ies premiers mots Osco , : malus autem genius Diatribis contin-
» f^olsco , Ronianoque eloquentid in- gat usque adeo ut si qua bona aut
, ,

3) terlocutonbus 11 faudrait , ce me
. saltem mediocria in ipsis fuerint im- ,

» semble eloquentid , etc. »


, et peritorumturbœ pessima bonis levius- ,

(G) Un lit're touchant l'im'ention de cula tricisque viliora censeantur,famœ


l'imprimerie. ] Je ne me vante point si qua manent munera vento evolent, ,

de l'avoir vu * j'avance cela sur la


: proque vulgi levitate ferantur (i5).
foi du Toppi (il); mais voici un fait Combien de réûexions pourrait - on
dont je suis bien assuré. On a cru que faire sur ce serment !

notre Accurse avait écrit de sa main (I) Son Jils Casimir *' était
au premier feuillet d'une grammaire homme de C'est apparem-
lettres. ]
de Donat imprimée sur papier uélin , ment celui que le docte et le fameux
que ce Donat , «i^ec un autre litre in- patron des doctes , Vincent Pinelli
titulé Confessionalia , étaient les pre- eut pendant quelque temps dans sa
miers Hures imprimes , et que Jean maison car encore que le Gualdo
; ,

Faust , Bourgeois de Mayence in- , donne le nom de François au fils d' Ac-
venteur de l'art les avait mis sous la
, curse, il a peur de se méprendre en
presse l'année i45o (12), M. Chevillier le lui donnant. Voici comme il parle.
observe que cet Accurse vivait en l'an Prœter hos domi habuit Benedictum
i5oo (i3) ; et néanmoins il met quel- Octavianum res philosophicns iheo-
,

que différence entre son témoignage et logicasque doctum... Mariangeli Ac-


celui qui fut rendu par Ulric Zel li- , cursii Jilium Franciscum ni fallor , ,

braire de Cologne, l'an 1499: il y met, insignem moribus et doctrind (16).


dis-je,quelque diflërence à l'égard du
temps. Il y avait, dit-il un plus long , (,4) Là même, pag. 284.
*' Jolf-, sur le poids des le'moignages de Zel
temps que le DÀat était imprimé ,
et Accurse, dit que le plus rapproché des temps
lorsqu'Âccurse ^m^vait cela que lors- , ou les faits ont eu lieu a le plus de poids ; que
* Le livre dont parle le Toppi n^existe par, Zel est antérieur à Accurse, et conclut que /e
raisonnement de Chevillier a éié a tort attaqué
ainsi que le remarque Joly. Le Toppi a meta-
par Payle,
morpjiose' en litre ta note sur te Donat.
(i.î) Mariang. Accursius in Testudine ad cal-
(il) Tojjpi , Bibllotb. iNapolft., pag. 206.
cem Dialrib.
12) Chevillier, Origine de l'Imprimcrip de *' Ce Casimir était, suivant Jolj, non le
Paris, pag. ai. Il cite le lifre de Bibliothecâ
fils , mais le petit-Jils d'Accurse.
Vaticanâ , compose' par Ange Roccba , et impri'
<i6) Gualdus , in vitâ Vinc. Pinelli.
me à Hcme l'an lôyi. Boxhornius , dam son
Théâtre Hollandais, pag. i38, cite Jort au long
te passage d'Ange Koicha.
(i3) Chevillier, Origine de l'Imprim. de Pa-
ACHÉE , en latin Ach^us ,

ris , pag. 21 et 281.


cousin germain de Sélencus Ce-
A cil ÉE. 139
raunus et d'Antiochus-le-Grand péra ou que cette expédition fe- ,

(A) , rois de Syrie devint un rait périr Antiochus, ou qu'elle


,

puissant monarque et posséda serait si longue , qu'il aurait le


,

long-temps les états dont il s'é- temps de s'emparer de la Syrie


tait emparé; mais enfin ses usur- avant le retour de ce monarque.
pations furent punies d'une ter- II compta aussi beaucoup sur la
rible manière. Il rendit d'abord rébellion de quelques provinces
de très-grands services et avec qui venaient de se soulever. Il
,

une admirable fidélité, à ses sou- partit donc de Lydie avec une
verains; car, ayant accompagné grande armée, et pendant sa
Séleucus Céraunus dans l'expédi- marche il écrivit aux sujets d' An-
tion contre Attalus, il fit mourir tiochus mais, quand il fut pro- ;

les deux capitaines qui avaient che de Lycaonie, il s'aperçut que


ôté la vie à ce Séleucus et il re- ses soldats ne voulaient point por-
,

gagna toutes les provinces qu'At- ter les armes contre leur ancien
talus avait conquises et refusa roi. Celafitqu'il leur dédaraqu'il
,

le titre de roi que les suffrages se désistait de son entreprise. Il


des troupes et la faveur des cir- rebroussa chemin et ayant pillé ,

constances lui mettaient en main la Pisidie il leur distribua un ,

(a). Il résista généreusement à butin si considérable, qu'il rega-


ces tentations et ne voulut vain- gna entièrement leur amitié (d).
,

cre que pour le successeur légi- Inférons de là en passant que


time du monarque dont il avait ceux qui disent qu'il se déclara
vengé la mort, c'est-à-dire pour roi de Syrie parlent sans exac-
Antiochus, frère puîné de Séleu- titude. Antiochus, ayant fini glo-
cus. Mais la bonne fortune l'a- rieusement la guerre qu'il avait
veugla car, dès qu'il vit que ses faite à Artabazane, envoya des
;

victoires l'avaient rendu maître ambassadeurs à Achée pour se


de tous les états d'Attalus, si vous plaindre de ce qu'il prenait le ti-
en excepter la seule ville de Per- tre de roi et favorisait ouverte- ,

game, il se fit appeler roi. Il sou- ment les Egyptiens (e). Ce re-
tint cette usurpation avec beau- proche ne fut pas entièrement
coup de prudence et de courage sans effet car nous trouvons
,
;

et il n'y eut au-deçà du Tau- qu'Antiochus fit une trêve avec


rus aucun prince qui se fît crain- leur prince (J') , parce qu'il sa-
dre autant que lui (b). Les gran- vait qu' Achée , son allié en appa-
des et belles provinces qu'il pos- rence, était réellement dans leurs
sédait au-deçà de cette montagne intérêts. Cela montre que l'usur-
ne sufllrent pas à son ambition pateur eut quelques égards pour
;

il songea aussi à la conquête de les plaintes d'Antiochus, et qu'il


la Syrie quand il eut appris fit semblant de se joindre à lui
,

qu'Antioclius était allé faire la contre Ptolomée , roi d'Egypte.


guerre à Artabazane (c). Il es- Celui-ci tâcha vainement de le
(a) Ce fui vers la Jin de la liO)". olym- che de la mer Caspienne. Voyez Pol' be ,

piade, et l'an de Rome 533. Cjlvisii CUro- liv.V chap. XIII pag. ^08.
.
,

nol . pag 278. d) Polvbii Hislor. lib. V, cap. XIII. f\lo


(i) Tiré de Polybe, Iw /^, ch. XIII, p. 322. (eS Idem , ibid ,
pag. t\ii\i.
(t'; Frince dont les étais étaient situés pro- f'jJdem, ibid. cap. XV, pag. 4 18.
i4o ACH EE.
faire comprendre au traité de pour lui demander Andromaque. Leur
paix Antiochus en rejeta tou- dessein était d'en faire un présent à
;
Achée afin de l'engager à ne pas te- ,
jours la proposition et ne pou- nir aux Byzantins la promesse qu'il
,

vait souffrir que le roi d'Egypte leur avait faite de les secourir. Il y
osât lui parler pour des rebelles avait alors une forte guerre entre les
Rhodiens et les Byzantins. Le roi d'E-
(g-) ; et, dès qu'il eut les mains li-
gypte fît quelffue difficulté de se des-
bres, il s'appliqua fortement à saisir d'Andromaque il savait qu'un :

recouvrer les états qu'Achée avait prisonnier tel que celui-là lui pourrait
usurpés il en vint à bout il le
: ;
être de quelque utilité en temps et
lieu ; car il était encore brouillé avec
confina dans Sardes il l'y assié- ,
le roi de Syrie , et il n'ignorait pas la
gea , il prit la ville après un long grande puissance d'Acliée. Mais, pour
siège {h) et il se trouva des traî-
, faire plaisir à ceux de Rhodes, il vou-
tres dont l'intrigue fit donner lut bien enfin leur remettre ce pri-
Achée dans le panneau. Ils l'en- sonnier afin que, s'ils le jugeaient à ;

propos ils renvo3'assent à son fils. ,


gagèrent à sortir de la citadelle C'est ce qu'ils firent; et par ce moyen,
de Sardes et ils le livrèrent à An- et par quelques autres ils se procu-
, ,

tiochus qui le fit punir du der- rèrent l'amitié d'Achée et ôtèrent au


,
,

Byzantin le principal fondement de


nier supplice , cruellement et
ses espérances (2). Notez qu'Achée fut
ignoininieusement il lui fit cou- marié à Laodice fille du roi Mithri-
:
,

per les extrémités des membres, et date (3) , laquelle avait été très-biea
puis la tête, qui fut cousue dans élevée par Logbasis bourgeois de ,

une peau d'âne , et il fit attacher Selge ville de Pisidie (4). Cette dame ,

soutint le siège de Sardes avec son


le reste du corps sur une croix mari et se vit contrainte de se ren-
,

(/). Ceci se passa l'an 54 o de dre après qu'il eut été mis à mort (5).
Home. Ce fut un exemple propre (B) Ce fui un exemple propre h ser-

à servir en deux façons (B). Je ne vir en deux façons. ] Car ce fut un


avertissement de se tenir dans la dé-
marque point les fautes de M. fiance et de ne point abuser des fa- .

Morériron les connaîtra aisément veurs de la fortune. Copions les paro-


par la seule comparaison de son les de Polybe l'auteur de cette mo- ,

narré avec le mien mais pour ralité. KsITÀ (fl/O TpilTrOilç OÙX. ÀVCtXfiXiÇ
; les
VTrôSuy/ma. yiv'o/ui.iVoç to7ç so-o/z-êvotç' k-aÔ'
fautes de François Patrice je les
, iVet JUÏV , TTpOÇ TO jUifJ'iVt TTlÇiUli^ fcthoùi'
marquerai nettement (C).

{g) Idem ibicl, pag-, 418.


h Titiç iô^pctyletiç, 'TtS.v Si Trpocri'oKcf.v ctv-
Bfânrauç ovTsiç (6). Exemplum pnsteris
,

{/ij Tdem , ibid , lib. VII, cap. III.


Idem, FUI, cap. V et VI.
duobus modis utile : priniiim , ut ne-
(j) ibid. lib.
mini teinerè esse credenduni discanius :

deindc rébus lœtis ut spiritus ne


(A) Cousin germain de Séleucus , ,

Céraunus et d' Antiochus-le-Grand. ] attollnnius, sed, ut homines humani ,


,
nihil a nnbis alienurn putenius.
Il était fils d'Andromaque qui était ,

frère de Laodice femme de Séleucus ,


(C) Pour lis fautes de François Pa-
Callinicus et mère de ces deux prin-
,
trice ,
je les marquerai nettement. ] 11
ces (1). Observons qu'il fut bon fils prétend que les sujets d'Achée acca- : ,

car , ayant su qu'Androraaque était blés d'impôts, se soulevèrent et le


en prison dans Alexandrie il n'ou- massacrèrent avec toute sa famille ,,

blia rien pour le tirer de celte capti- et jetèren; son cadavre dans le Pactole
vité. Les Bhodiens ayant connu là- ,
(2) Polyb. lib. IV, cap. XIII.
dessus ses dispositions , envoyèrent (3 Idem , lib. VIII cap. VF, ,
pag. 53i.
des ambassadeurs au roi Ptolomée (4) I,1em, l,h. XV, cap. XVII pag. 4^5. ,

(5 1,1 fin , lib. VIII , cap. VI pag. 53a.


.

(i) Polybii Hislor. lib. IV, cap. XII J, pag. (6; Idem, li'j. VIII, pag. 528, eMi. Ca-
324; et lib. VIII ,
ca^: VI, pan- 53i. 5auboni.
,

ACHÉMÈNES.
pourlui faire boire des eaux dorées. bition. Aquilius qu'on lui associe
,

^chœus , Lytiice Mceoniœque rex , (i2;,àcauseque.Mithridafelui fit ver-


gentilitio avarilice crimine ardebat ; is ser de l'or fondu dans la bouche n"a
,

siquidcm crehra ac ^ravia populis tri- rien de commun avec la veDgeance


bula seniper impernbat in quibiis exl- , qu'Antiochus employa.
gendi.% sœvus, iniprobus atqiie ine.ro- ,
(12) Patricias, de Reg. IX,
rabilis eiat femm cùni tantam inju- pag.
:
243-
Inslit. Ub. IF,IU.

riant diutiîis populi Jèrre nequirent ,

nocturnâ tesserd inter se datd subito ACHEMÈNES a été le père de ,

hominum concwsu illum cum omni


familiâ trucidaueruni , et regiâ incen-
Cambyses, et le grand-père de
sâ ejus cadauer unco tractum in Pac- Cyrus, premier roi de Perse, si
toluni flunien demersertint lit nuriju- nous en croyons Hérodote (a). ,

ras aqitas semper potnret (7). Piemar- Il a d'autres passages


quez d'abord qu'il se trompe en pré-
y oii cet au-
teur semble parler d'un Acbé-
tendant que notre Aciiee e'tait Lydien
issu des anciens rois du pays et hé- mènes beaucoup plus ancien que ,

ritier de leur avarice. Il songeait et celui-là; car il dit que la nation


aux richesses de Crësus et aux de- persane était divisée en
plusieurs
mandes de Midas (8) il eût mieux :

valu se souvenir qu'Achefe était Sy espèces dont la plus illustre était


rien. Mais cette faute est petite en composée des Pasargades,sous les-
comparaison du reste car toutes les quels étaient compris les Aché-
;

circonstances de ce narre' sont des ,-,,ôni'rIo^ lo- ^^:^ J„ D ^


^, 1 menmes , ^r^.,f
dont tes rois» de rerse
,

mensonges. 31. de T,
tsoissieu se persuade
1
j , ., ti i
. • •

que les mauvais interprètes de ces pa- descendaient (b). 11 introduit


rôles d'Ovide, ailleurs (c) Cambyses , fils de Cy-

Morte uel interras capU suspensus Achœi, ^US exllOrtaut aU Ht dc la mort


,

Qui miser auriferâ teste pependit aqud (9, leS principaUX SeigUCUrS de PerSe,
ont trompé cet écrivain. Il observe et surtout les Achéméuides à ne ,

avec raison qu'elles signifient qu'on point souffrir que les Mèdes re-
pendit le corps d'Achée proche du couvrissent la royauté. Cela sem-
Pactole (10). Il ajoute que Zarottus
ble donner l'idée d'un Acliémè-
est le premier qui ait entrevu la pen-
sée du poète et que Léopardus l'a
nes , tige de ces Achéménides ,
,

connue pleinement et qu'ainsi Lipse ;


beaucoup plus ancien que l'aïeul
n'a pas dû se glorifier de la première de Cyrus. Etienne de Byzance
découverte du vrai sens de ce passage.
fait mention d'un Aciiémènes
Hanc fssepnëtœ noatri mentem primus ,

l'idit Zaroitiis, sed quasi per nebulam;


fils d'Egée qu'il prétend avoir
,

etomninn Paiilus Léopardus Emen- donné son nom à une province


dat. lib. I cap. 20 ,ideh non erat , , de Perse nommée Achéraénie.
quô Jusliis Lipsius, lib. 1. de Cruce ,
D'autres disent que cet Achémè-
cap. 4 principem sibi hujits loci ex-
,

planationeni tribueret. f^aleat aiitem nes fut fils de Persée [d] d'au- ;

Alctatiis cum sud illd expUcalir'ne ,


tres infèrent cela de ce que les
quam libro , IX
capile y.^ , Parer- rois de Perse étaient descendus
gon Juris inseruil (11). Quoi qu'il en
de Persée (A). Presque tous les
soit , François Patrice place très-mal
ses exemples. Achée ne fut point puni commentateurs d Horace veulent
pour son avarice mais pour son ara- , que l'Achemènes dont il parle
dans l'ode 12". du IP. livre com-
Franciscas Fatricius
(7) de Régis lostlta- ,

lione, lib. If
lit. IX pag. 242.
,
,
VU,
(a) Herodot. lib. cap. XI.
(8) Ovidii Metam. Itb. XI, vs. io3.
(g) Ovidius, in Ibio vs. 3oi. ,
{b) Idem, lib. I, cap.CXXr.
(10) Dionvs. Salvagnii Boessii Notae in libel- (c) Idem, lib. III, cap. LXV.
Inm Ovidii in Ibin , pag. 63. (rf^Nicolaùs, lib. II, Histor. apud Ety
(il) Idem, ibid. mol. niarai Aitlor^m.
, ,

l42 ACHÉMÈNES.
me d'un homme
très-opulent , du nom iie Perses ; une autre qu'il
ait été un roi de Perse (B) mais,
nomme les Pasargades, sous lesquels
;
il met les Acheme'nides. Ailleurs
(4)
si cela est , il faut qu'il ait régné il dit bien que les Perses acquirent le

avant que les Mèdes eussent sub- nom de Perses depuis que Perse'e, tîls
jugué les Perses; car, depuis que de Jupiter et de Danae, leur eut laissé
s"n fils Perses qu'il avait eu d'Andro-
ceux-ci eurent fondé cette gran-
1
- mede mais il ne (ht pas comme le
i> .
: ,
de monarchie
I

on compte suppose M.
,
que 1 ., „. * '.
Chevreau que les rois de
'
. ,
,

pour la seconde universelle on Perse tirassent leur extraction de


,

ne leur voit aucun roi de ce Persee. Le raisonnement de M. Che-


Yieau va là que Cyrus n'était point
nom-là. Cyrus passe constamment ,

infe'rieur en naissance aux rois de Me'-


pour leur premier roi et ceux die ni aux rois de Perse
;
puisque ,

qui veulent qu'il y en ait eu deux ceux-ci descendaient d'Achémen aussi


avant distinguent fort net
lui les bien que Cyrus il prouve qu'ils en
:

descendaient , parce que les Persides


temcnt de son père Camby-
et
eu descendaient. Outre les faussetés
ses et de son aïeul Achémènes que j'ai déjà relevées, il suppose celle-
(e). Quoi qu'il en soit , l'épithète ci , que le premier qui porta le nom

d'Achémcniens est souvent don- d'Achémen était antérieur à Persee,


,

fils de Jupiter. M. Dacier avait fort


née aux Perses dans les anciens bien retenu ce qu'il cite de mémoire
poètes latins, et encore aujour- de cet endroit de M. Chevieau (5).
d'hui la Perse se nomme ^zcmi'a (B) Ait été un roi de Perse. ] AI. Mo-

{/), et les Perses Agemis {g). réri dit bonnement qu'Achémènes a


été le premier roi des Perses , et que
{a) Marsham. Chron. Can. pag\ 6'o5, édit.
de lui sont descendus tous tes princes
Lips.
(/)Bizari, Hist. Pers. lib. I, pag. 5.
qui ont gouverné cette monarchie jus-
(g) Teixera in Itiner. Indiœ cap, , VI ,
que! a Darius. Mais d'abord je vou-
apttd Pioedo in Steph. Byz. pag. il\b. drais bien lui demander pourquoi ,
quand il parle de Cyrus , il lui attri-
(A) De ce que les rois de Perse bue la première fondation de la mo-
étaient descendus de Persee. ] M. Che- narchie des Perses ^ et pourquoi , en
vreau attribue à Hérodote d'avoir dit donnant la liste des rois de Perse , il
que les Persides c'esl-à-dire ceux de
, ne met point Achémènes au-dessus
la maison de Persis, ou Perse'e claient , de Cyrus mais celui-ci au-dessus de
,

sortis des Acheménidcs alliés des Pa- tous les autres. Il ne faut point se
sargades (i). 11 assure dans la même mêler de se tromper ou il faut le ,

page que, selon le témoignage d'Héro- faire conséquemment. Puis je vou-


dote, les rois de Perse i>enaient de Per- drais bien qu'il me dît de quel Darius
see ou Persis, et que les Persides étaient il parle car il y a eu deux ou trois
;

descendus des Achéménides , c'est- rois de ce nom en Perse. Parle-t-il de


à-dire du premier qui eut le nom d'A- celui qui fut vaincu par Alexandre-le-
chœmen dans cette famille. Tout cela Grand ? Mais en ce cas , il ferait
,

est fort brouille. Hérodote nedit])oint trop le décisif les anciens ne demeu-
5

en général que les Persides fussent sor- rent pas d'accord que ce Darius fût
tis des Achéménides il ne dit cela
: de la famille royale. S'il parle de Da-
que des rois de Perse (2) c'est à-dire ; , rius fils d'Hystaspes il s'exprime mal ,

de Cyrus et de ceux qui ont régné


, ce terme de tous les princes n'est pas
après lui (3). Il distingue les Perses en à propos quand de plus de douze on
,

plusieurs classes, parmi lesquelles il ne veut parler que de deux. Je ne sais


y en a une qu'il qualifie en particulier pourcjuoi M. Dacier borne l'épithète

du monde lit. J , cltap.


Hist.
,. , , a Achéménides au temps de Darius
i,rj j •
^1^ Clicvreau . , r-. i-. .

édiùon de Hollande, en .687. «'^ d Hysta^pes^, quand il dit que tes


Vpag.a5, 96
(ai Herodot. lib. I , cap. CXXV. descendans d Achénienes,roidc I^crse,
(3) TlifTûùv ^oicrtKÛç,...

dwere. Plalo in I. Alcibiad-


'AXai-iy-ivouç 'U-

VOVOI. Persarum reget.... ab'iÀchœmeae genus


/i^ng 440, E.
(4) Herodot.
rodot. Ub.
(5) Dacier sur
m
Hlorice .
cap. I.XJ.
lom. Il , pag î43.
.

ACII ERI. i4.3


portèrent son nnm jusqu'à ce Darius car fut battu par Inarus, chef
il
(G). Je ne doute point qu'ils ne l'aient
des rebelles , assistés des Athé-
porté encore après lui ; car outre ,

que Xersès son fils rapporte son ex- niens.


traction en ligne directe à Achéraènes
(n) , nous voyons en ce mênae temps
ACHERI (Luc d'), bénédic-
un Tigranes général des Mèdes, qua-
,
tm de la
congrégation de Saint-
lifié Achéméiiide{%) et nous trouvons : Maur, naquit à Saint-Quentin
,
un Achéraènes dont je parle ci-des-,
en Picardie l'an 1609. Il s'est
,
sous qui était frère de Xerxès. Je ne
,
rendu célèbre par la publication
dis rien de Sapor , appelé Achémè-
nes dans Ammien iMarcellin c'est un :
de plusieurs livres qui n'étaient
passage corrompu (q). M. Chevreau , encore qu'en manuscrit dans l'ob-
étonné sans doute de voir cinq géné- scurité des bibliothèques. II com-
rations entre ce Xerxès et Cyrus, croit
mença en 1645 par de
l'édition
que ce prince compte d'un coté ses
ancêtres paternels et de l'autre ses ,
l'épître attribuée à saint Barnabe.
ancêtres maternels ^ en sorte qu'il ne Le père Hugues Ménard , reli-
se fasse sortir d'Achémènes que du gieux de la même
congrégation ,
côté maternel mais c'est ce qu'on ne
:

avait eu dessein de publier cette


trouve pas dans Hérodote; à moins
qu'on ne change le texte grec , selon épître, et l'avait déjà éclaircie par
la conjecture fort vraisemblable de diverses notes mais , la mort
;

M. de Saumaise (lo). l'ayant empêché d'exécuter sa ré-


(6) Dacier sur Horace, loin. II pag. a43. , solution ce fut le P. Luc d'A-
,
(-) Herodot. Ub. Vit, cap. XI.
(H) Ibidem, cap. LXII cheri qui l'exécuta. On vit donc
(g) Voyez M. de Valois in Âmm. Marcell. sortir de dessous
Ub. XIX , cap. II pag. 2io. presse, par la
,

(lO; Salmas. Exercit. Plinian., pag. ii83. de saint Bar- ses soins , l'épilre

ACHÉMÈNES , fils de Darius nabe , en grec et en latin , avec


les notes du P. Ménard, en l'an-
premier du nom , roi de Perse ,
née 1645. Au bout de trois ans,
et frère de Xerxès de père et de
dom Luc publia la vie et les OEu-
mère eut le commandement
(a) ,
vres de Lanfranc , archevêque
de l'Egypte après que Xerxès
de Cantorbérj , et la Chronique
l'eut remise sous le joug de l'o-
de VAbbaje du Bec. En i65i ,
béissance qu'elle avait osé secouer
ilpublia la A ie et les Ouvrage.-^
(b). Quelque temps après , il
de Guibert , abbé de Nagent
commanda la d'Egypte
flotte ,

avec quelques autres Traités.


dans la fameuse et funeste expé-
Ayant ensuite ramassé plusieurs
dition contre la Grèce (c). Ou ne
pièces rares et curieuses et espé-
trouve point quels autres em-
,

rant d'en recouvrer un grand


plois il eut pendant la vie du roi
nombre de semblables , il forma
son frère; mais on voit que,
le dessein d'en publier la plus
l'Egypte s'étant encore révoltée
ample compilation qu'il pour-
après la mort de ce monarque ,
rait, sous le titre modeste de
on y envoya Achémènes pour
Spicilt'ge. Il fit voir le jour à
la remettre dans son devoir (d).
son premier tome l'an i655. Ce
Cette entreprise fut malheureuse,
volume a été suivi de douze au-
Herod. Hist. lih. VII, cap. XCriI.
(a)
tres, dont le dernier fut imprimé
Ibidem, cap. VII.
(6)
Ibidem cap. XCVII.
(c) ,
en l'année 1677 {a). Ce recueil,
{d\ Ibdem., Ub. III cap. XII. Diod. Si- ,

cul. Uà. XI {a) Voyes dans le Journal des Savans rf«


,
, ,

i44 ACHI LLE.


en volumes in-4°. » est
treize ACHILLE. Il y a eu plusieurs
fort estimé de ceux qui cherchent personnes de ce nom. Le premier
à éclaircir dans-un grand détail qui l'ait porté n'avait point d'au-
les matières ecclésiastiques mais ; tre mère que la terre, et ren-
on n'y trouve guère de traités ditun fort bon office à Jupiter ;

qui n'aient été composés depuis car ayant reçu la déesse Junon
,

la décadence de l'empire romain dans son antre lorsqu'elle fuyait


en Occident. Le même auteur a les poursuites amoureuses de ce

publié la Règle des Solitaires ,


dieu , il lui tint des discours si
composée par le prêtre Grimlaïc, persuasifs ,
qu'elle consentit à
et quelques ouvrages ascétiques consommer le mariage (A). On
(A). Ses préfaces et ses petites ne nous a point appris comment
notes font voir qu'il avait de l'ha- elle témoigna sa gratitude à un
bileté. Il a eu part * au travail hôte qui sut lui inspirer une telle
critique qui paraît dans les pre- docilité ; mais nous savons que
miers volumes des Actes des Jupiter, en reconnaissance de ce
saints de l'ordre de saint Benoît , service , promit à Achille que dé-
et c'est à et au P. Mabillon sormais tous ceux qui s'appelle-
lui
que de ces actes attribue raient comme lui feraient parler
le titre
le travail de les avoir assemblés d'eux. C'est pour cela que le fils
et publiés. Luc d'Acheri mourut de Thétis a été célèbre. Le pré-
à Paris le 29 avril i685, dans cepteur de Chiron se nommait
l'abbaye de Saint-Germain-des- Achille , et de là vint que Chiron
Prés , oii il avait été bibliothé- imposa le nom à! Achille au fils
caire {b). de Thétis, son disciple. Cela seul
2^ defévrier \&']^ pourquoi ce Spicilége n'a
,
pour renverser toutes ces
suffirait
pas été continué. étymologies froides et forcées du
* Joly reproche, à Bayle de faire la part

du P. d'Acheri trop petite. mot Achille , que l'on fait dépen-


(b) Vojez le Journal des Savans du 26 de dre des qualités personnelles du
novembre i685; et M. Baillet, iom, III des
fils de Thétis (B). L'inventeur de
Jugem. des Savans, pag. 5l8.
l'ostracisme parmi les Athéniens
(A) Et quelques ouvrages ascéti- s'appelait Achille. Un fils de Jupi-
ques. ] Il ne mit pas son nom au re-
ter et de Lamie porta ce nom. C'é-
cueil qu'il en publia *' et dont je
,

m'en vais donner le titre tel que je tait un si bel homme, que, par sen-
,

le trouve dans la Bibliotheca Biblio- tence du dieu Pan il remporta le ,

thecarum du P. Labbe. Asceticorum prix de beauté qu'on lui disputait.


,

i'utqo spiritualium , Opusculorum


Vénus , indignée de ce jugement
,

quœ inter Patrum Opéra reperiuntur


indiculus Chrislianœ pietatis cultori- rendit Pan amoureux d'Écho, et
bus ab Ascetd Benedlctinn Coni^rega- le changea de telle sorte (C) qu'il
tionis sancti Mauri digestus. Parisiis, devint un objet affreux. Un autre
in-\° 1648. M. Teissier dans ses ad-
, ,
Achille , fils de Galate , vint au
ditions à cet ouvrage du P. Labbe ,

dit que Luc d'Acheri publia la f^ie de monde avec des cheveux blancs.
saint Augustin, *' à Paris en la même Il y a eu cinquante-quatre autres
,

année. AcHiLLES très-renommés , deux


*' Le titre même de l'ouvrage dit -Joly
,
desquels ne se distinguèrent que
,

prouve que ce n'est point un recueil mais un ,

catalogue raisonne'. par des actions de chien (a). Mous


*''
il fallait, dit .Joly, ajouter raoine et
apôtre de la Grande-Bretagne-
fn> Tiré du VT". Liorr de Ptolomt'e , fil»
ACHILLE. 145
allons faire un article à part pour conserve souvenir de ses bonte's. Tout ce
le
que l'on verra de nouveau et qui sera bon
celui de tous qui a eu le plus de ,

dans les remarques sur l'AcLiUe de ce Dic-


gloire *. tionnaire , et tout ce qui aura été corrigé
dans l'Achille du projet, vient d« JL Dre-
d'Héphaestion, Novae ad variam Eruditionem lincourt.
Historise, apud Pholium, num. 190, pag. Les preuves de tout ce que je viens de dire
488, 489. sont publiques ; on n'a qu'a consulter l'ou-
* Dans la première édition , après ces vrage qui a été imprimé à Leide en 1693,
mots , on lisait : intitulé Homericus ÀchiUcs Caroli Drelin-
:

curtii penicillo delineatus


• Mais avant cela je dois arrêter ici mon per convicia et
.

laudes. Il ne diffère du tableau que je garde


lecteur pour un moment Voici pourquoi . :

en manuscrit, qu'en ce que les choses n'y


AVERTISSEMENT AU LECTEUR. sont pas disposées par colonnes L'avertisse-
ment qu'on vient de lire était déjà composé
Monsieur Drelincourt professeur en me'-
, lorsque cet ouvrage a paru et je l'ai laissé en
,

decine et doyen de l'université de Leiden


, , Sun état. Je copierais volontiers l'article 2)
m'a fourni tant de remarques concernant de l'Histoire des Ouvrages des Savans , dans
Achille que je ne saurais les placer toutes
, lequel on a donné à l'Index ffomericus et à ,

dans ce Dictionnaire. Elles mériteraient un son auteur une partie des louanges qui leur
ouvrage sépare' ce serait l'histoire la plus
;
sont dues ; mais, comme celte excellente his-
complète qu'on ait jamais vue et si je pou- :
toire est entra les mains de tout le monde ,
vais obtenir qu'avec la même bonté qui lui a il n'est pas nécessaire de transporter ici cet
fait prendre la peine de me communiquer article. »
tant d'eicelleos matériaux il voulût corri- ,

(Test le 11 du mois de mai i6g3. Voyez


ger la manière dont je les mettrais en œuvre, (2)

il en résulterait un ouvrage parfaitement aussi M. Bobus dans son journal Jlamand in- ,

iiudé Backraal van Europe , au mois de sep-


:

beau. Il m'a fourni tous les traits dont le ta-


tembre 1693 page 286 Je voudrais qu'on vît
,
bleau de ce héros a pu être composé. Tout ce la lettre que M. Gronovius ,l'un des plus dat-
que les anciens ont dit d'Achille se trouve tes critiques de l'Europe, a icrite à M. Drelin-
dans ce recuïil, avec une exactitude et une court, a la louange de 2'Iadex Homericas.
méthode admirables. Ce tableau est un ou- Ce passage y
compris les deux notes a été
vrage à trois colonnes ; celle du milieu est la depuis remplacé par les dix-sept lignes qu'on
chaîne ou la suite de toutes les qualités et de lit en této de l'article qui suit.
toutes les actions d'Acbille. Les colonnes d'à
côté contiennent très-exactement les preuves (A) Qu'elle consentit a consommer
et les citations de tout , avuc une inlinita
le mariage. ] Ces paroles de Pothius,
d'ouvertures sur les rapports et les allusions
truvih^ih Tœ Ai/, signifient cela (i) ,
qui régnent entre ces matières et plusieurs
autres et sur les ornémens dont on les pour-
,
comme il paraît par cette suite , xeti
rait enrichir. 11 est impossible de voir ce ta-
bleau sans en admirer l'auteur, soit pour ^sts-îv 5 et ce Jut alors, dit-on,
ves^sti
l'étendue de ses lumières, soit pour la jus- que Jitpiler jouit de Junon pour la
tesse de sa raétUode mais il est surtout im-
;
première J'ois.
possible de l'admirer autant qu'il le faut à
(Bj Etymologies.... que Von fait dé-
ceux qui savent qu'il a placé avec tant d'é-
conomie le fonds de sa vaste lecture, qu il en pendre des qualités persoimelles duJiU
pût recueillir en peu de temps tout le profil, de Thélis. ] Il n'y a rien de plus plai-
quelle que soit la matière qui se présente. Ja- sant que de voir ce que la Grèce a in-
mais homme n'eut comme lui les trésors de venté sur ce sujet, tlle mérite là-des-
son érudition en argent comptant (l). Je suis sus non-seulement Tépithete de men-
,
bien lâché que la nature de mon ouvrage ne mais
teuse (a) et de fabuleuse (3) ,
me puisse pas permettre d'étaler ici tout ce
aussi celle de malèferiata , que notre
que cet illustre doyen de la faculté de Hol-
lande m'a communiqué louchant Achille et ,
terme â^oiseuse n'est pas encore en
qu'en attendant l'occasion d'en faire part au possession de signifier pleinement.
public, je sois contraint de n'en prendre que Demandez aux grammairiens grecs
quelques portions pour les insérer dans mes pourquoi ce héros fut nommé Achille :

remarques. Que cette occasion se bâte tant


les uns vous répondront parce qu'il ,
qu'elle voudra, elle ne saurait jamais être
assez prompte, vu l'impatience que j'ai de
donna beaucoup d'inquiétude à sa
m'en servir pour témoigner à cet incompa- mère et à ses ennemis ; d'autres, parce
rable professeur combien je l'honore et je
{i) Le P. Scholtps les a mal traduites par ad
l'admire , et avec quelle reconnaissance je
Jovein redire.
(i) Ingenium, (adde scientiam), in numerato (2) Grœcia mendax. Jnvenal. Sat. X. vs. 174.
habel. Augustus de 'Vinicio ajiuj Seues. Cou- (3) Ml/âoTOXOÇ 'ExXîtî, Fabulanim parent
trov. i3, »ub. fin. Grteçia. Noon. Diony«. M. !
TOJIK U
^6
14'
ACHILLE.
chagrina beaucoup les Troyens \ laid homme du monde (7). C'est eu
au'il
'autres parce qu'ayant appris le se- vain que l'on consulterait l'original
,

cret de la médecine , il apaisait les


pour savoir si la version d'André
douleurs d'autres parce qu'il n'a- Schottus est meilleure que celle de
; ,

vait qu'une lèvre 5 d'autres , parce Méziriac car si d'un côté l'on peut
: ,

qu'il était propre au commandement^


dire que les règles d'une grammaire
d'autres parce qu'il n'avait jamais exacte sont pour Schottus l'on peut ,
,

tété et d'autres parce qu'il sortit dire de l'autre que les auteurs grecs
; ,

de chez son précepteur Chiron , sans ne s'assujettissaient pas à de telles


avoir jamais mangé des fruits de la règles et qu'il n'est point rare que,
,

terre. Qui voudrait montrer par quel- s'agissant de plusieurs personnes dans

les analyses de grammaire ils trou-


une de leurs périodes le pronom le , ,

vaient dans le nom d'Achille tant d'é- lui , se rapporte indiflëremment ou ,

tymologies différentes hérisserait de ,


à la personne la plus éloignée ou à la ,

trop de grec cet endroit-ci. C'est pour- personne la plus prochaine. Les La-
quoi je l'envoie le lecteur, s'il lui plaît, tins n'y sont pas plus scrupuleux.
au ^vaiTid Etyniolngicum, à Eustathius C'est la grammaire française qui est
etc. Messieurs Lloyd en cela d'une merveilleuse exactitude;
(4) àTzetzès (5),
,

et Hofman qui, à l'exemple de Funge- car elle veut que l'on répète plutôt
,

rus et de plusieurs autres ont enri- ,


deux ou trois fois le même nom pro-
chi de ces assoitimens étymologiques pre en peu de lignes que de laisser ,

l'article du fils de Pelée, devaien t pour en suspens l'esprit du lecteur. Si l'on


le moins nous avertir qu'on a pris bien consulte la raison ou pour ou contre ,

de la peine pour rien en voulant , Méziriac et le père Schottus, on aura


à toute force que le mot Achille dé- de la peine à trouver quelque point
pendît des qualités personnelles du fixe. Il se peut faire qu'une personne
héros de l'Iliade. Ils auraient pu réfu- qui a perdu son procès ne se venge
ter cette prétention en montrant qu'il que du juge. Apollon se contenta de
y a eu des Achilles avant celui-là ; et punir Midas qui avait blâmé la sen-
,

nous indiquer une raison mille fois tence de supériorité prononcée en fa-
plus naturelle que toutes les autres veur d'Apollon et au préjudice de
pourquoi celui-là fut nommé Achille : Pan (8). Par là Méziriac perdrait sa ,

c'est celle que j'ai rapportée savoir, , cause mais on se venge aussi quel-
:

que le précepteur de son précepteur quefois et de son juge et de son ri-


avait été ainsi appelé. val (9) et sur ce pied-là , le père
]

(C) Et
changea de telle sorte. ]
le André Schottus aurait mal traduit :
Photius, qui nous a conservé quelques car ,selon lui Vénus indignée ne ,

fragmens des sept livres quePtolomée, fait aucun mal à celui qui remporte
fils d'Héphœstion avait remplis des , la victoire. Il est vrai aussi que , se-
plus curieuses bagatelles de l'antiqui- lon l'autre interprète, elle ne fait pas
té fabuleuse, a tronqué de telle sorte grand mal au juge inique ^ elle se
ce qui regarde Achille, fils de Jupiter contente de lui donner de l'amour
et de Lamie (6) qu'il faut se donner
,
pour une njmphe, qui , selon la tra-
la peine de conjecturer que ce fut dition des anciens (10) , eut une fille
avec la déesse Vénus qu'il entra en de lui. Tout bien compté il semble ,

concurrence sur la beauté. On fonde que Méziriac a du dessous; et, s'il


cette conjecture sur l'indignation de avait raison Photius ou son Ptolo- ,

Vénus contre le juge qui conféra le mée seraient bMmables de n'avoir pas
prix à Achille. Vénus , pour punir ce déclaré que la même, Vénus qui ren-
juge , le rendit amoureux d'Echo , et dit Pan amoureux d'Écho le rendit ,

si laid que sa seule figure le faisait malheureux dans ses amours. Il fal-
,

haïr. C'est ainsi que Schottus a en- lait nécessairement marquer cette
tendu le texte de Photius. Mais M. de
(7) Méîiriac Épîlres d'Ovide pag. 253.
Méziriac partage les efléts de la colère , ,

(8)0vidius, Melani. Ub. XI, vs. i^S.


de Vénus à Pan et à Achille celui-là (9) Arachné Marsyas, Thamjrris
:
les fille f , ,

devint amoureux et celui-ci le plus de Fiérus, sont une preuve qu'on se venge au.tit
,

quelquejois d'un compétiteur.


(4) Eustalli. in Iliad. lib. I. (10) Il y avait une tradition diff'f'rente de
(5) Tzelzps in Lycophron. celle-là: nous en parlons dans l'article Pan.
(()) PLotius, Bibliulheca: nnin. 190. \Bajle n'a pas donné cet article.^
ACHILLE. 147
circonstance et on le pouvait faire faut pas croire cependant que les
:

sans choquer le seutiment de tout le auteurs soient bien d'accord sur


monde ; car quelques-uns ont parlé cela; car on en voit qui parlent
des rigueurs de cette nymphe pour le
dieu Pan. C'est peut être le plus mal- de plusieurs blessures reçues par
aisé de tous les ouvrages de plu«ie Achille en divers endroits du
que celui de bien abréger il faut un corps (c). Je rapporterai dans les
:

discernement peu commun pour juger


remarques une autre précaution
quelles sont les circonstances dont la
suppression obscurcit ou n'obscurcit de Thétis c'est qu'afin de rendre ;

pas un abrégé. Justin n'est pas le seul son fils immortel , elle l'oiçjnait
qui ait manqué de ce fin discernement. d'ambroisie et le mettait sous la
Je me suis servi de cette pensée quel-
que autre part dans cet Ouvrage.
braise (d). On le fit élever sous
la discipline du centaure Chiron ;

J'avais mis ici, dans la pre- c'était la meilleure école du mon-


mière édition , une espèce de pré- de en ces siècles-là. Chiron le
face à l'article suivant, que je nourrit d'une façon assez singu-
ne supprime quà regret. Elle lière ,
puisqu'au lieu de lait ou
contient un éloge de feu M. Dre- de pain , ou de tels autres ali-
LivcouRT professeur en méde-
, , il lui donnait à mangermens
cine à Leide. Tout le monde de la moelle de lion ou de celle ,

a trouvé que je m'éloignais si de quelques autres bêtes sauvages


étrangement de l'usage et que (A). Les étymologistes n'ont pas
,

je plaçais si mal une telle pièce ,négligé leurs intérêts en cette


que , pour faire cesser une cen- rencontre. Ils ont mis à profit
sure si générale je suis obligé cette tradition
, car ils préten- ;

d'effacer cela. Mais je déclare dent que c'est de là qu'est venu


que j'entends que ce témoignage le nom d'Achille (B). Il ne se
de ma gratitude et de mon estime contenta pas de lui aguerrir le
soit censé demeurer ici, comme coq)S aux exercices les plus pé-
s'iljr était répété de mot à mot. nibles , il lui orna aussi l'âme de
plusieurs belles connaissances.
ACHILLE de Pelée et de
, fils

Tliétis, aété l'un des plus grands Mais nous en croyons Ho-
, si

héros de l'ancienne Grèce. Ilna- mère c'est à Phénix et non pas


,
,

quit à Phthia, dans la Thessalie à Chiron (C), qu'il faut donner la


qualité de précepteur et de père
(a), et fut plongé dès son enfance
nourricier d'Achille. Les inquie-
dans les eaux du Styx afin d'être ,

rendu invulnérable et il le serait ;


tudes de Thetis ne lui permirent
devenu par tout le corps si sa pas de laisser son fils dans 1 an-
mère eât eu l'esprit de le prendre tre de Chiron pendant tout e
temps qu'elle aurait voulu; elle
par un talon après l'avoir tenu
l'en tira qu'il n avait encore que
par l'autre (6) mais comme elle;

neuf ans (e) et le cacha parmi


n'eut point cette précaution il , ,^

des filles degmse en fille, a a


y eut un des talons de son fils qui ,

demeura sujet aux blessures , et ^--^^^ de Lycomedes roi de 1 île ,

ce fut aussi par cet endroit que (c) DLctjs Cret. Hb. 11 ,- Dares; P'ole-

la mort se saisit de Im. Il ne J„":f;3VEu»ia.hius in Odyss. XI.


{a) Servius in ^neid. lib. Il, vs. 197. {d) yojez la Bemarquc (A) num. ,
3.

{ù) Voyez la Remarque {K) ,


num. 5, ie) Apollodor. Bibliotli. l:b. Ill ..
p- ^^
,

î48 ACHI LLE.


de Scyros , dès qu'elle €ut su les trocle fut vengée bientôt après
préparatifs que l'on faisait contre (G) Achille se battit avec Hec-
;

les Troyens. La raison de sa con- tor {k) , et , l'ayant tué , l'atta-


duite, la voici : elle savait , d'un cha à son chariot , et le traîna
côté, que si son fils allait à Troie, autour des murailles de Troie
iln'en reviendrait jamais et de (H). Priam en personne lui alla ;

l'autre,
demander le cadavre et l'obtint
que Calchas avait prédit ,

moyennant une grosse rançon


qu'on ne prendrait jamais la ville
de Troie sans Achille. La ruse (/). Il y a plusieurs opinions sur

de Thétis ne lui servit de rien la mort d'Achille les uns disent : :

le devin Calchas découvrit aux qu'Apollon le tua {m) ou qu'il ,

Grecs Achille (/) , qu'ils


oii était aida Paris à le tuer {n) , en diri-
avaient cherché en divers endroits geant sa flèche sur la partie qui
sans le trouver; et là-dessus Ulysse n'était point invulnérable; les
ayant été député à la cour de autres disent que Paris le tua
Lycomèdes y démêla aisément en trahison dans un temple oii
Achille (D) , et l'en retira sans Achille s'était rendu pour y trai-
peine, quoiqu'il fût tellement ai- ter de son mariage avec Philoxè—
m.é de la princesse Déidamie , ne, de Priam (o). Les Grecs
fille

fille du roi , qu'elle lui avait per- lui firent de magnifiques funé-
mis de l'engrosser (E). Voilàd'ou railles dont le dictionnaire de
,

sortit Néoptolémus ou Pyrrhus ,


Moréri a touché quelques circon-
comme nous le dirons en son lieu. stances avec très-peu d'exactitude
Achille fit une infinité de beaux (I) , pour ne rien dire de pis. Ils
combats pendant le long siège de l'enterrèrent au promontoire de
Troie , et avant que l'on eût cam- Sigée (K) et, après la prise de la ;

pé devant la ville. La grosse que- ville , ils immolèrent Philoxène


relle qui s'éleva entre Agamem— sur son tombeau, comme son om-
non et lui pour leurs garces ( car bre le demanda. Ce guerrier , le
Agamemnon ayant rendu Chry- plus violent de tous les guerriers,
seis , qui était la sienne , enleva et si brave que son nom devint
Briseïs , qui était celle d'Achille) celui de la suprême bravoure (L)
(.g) , obligea celui-ci à se tenir aimait beaucoup la musique (M)
dans sa tente, sans se vouloir plus et la poésie {p) , et passait pour
mêler de guerre et rien ne fut le plus bel homme de son temps
,

capable de le faire changer de ré- (N). Si sa beauté Je rendit aima-


solution , que la mort de son cher ble aux femmes , i\ ne les aimait
ami Patrocle, auquel il avait prêté pas moins de son côté (0) et l'on ,

.ses armes dont Hector l'avait a dit même que ses amours s'é-
,

dépouillé aussi-bien que de la vie (k) Homer. lliad. lib. XXII 3l2. , 1.5.

(h). Vulcain , à la prière de Thé- {[) Ibid. lib. XXIV, w. 555.


{m) Qujntus Calab. lib. III fs. 62. Eu-
fit alors de nouvelles armes
,
tis ,
ripide in Philoclete.
k Achille (/) (F). La mort dePa- (h) Viigil. jEueid. lib. VI vs. 67. Ovi- ,

dius, Metam lib. XII, i^s. 58o scq. ,

{(j) DictysCret. liJ). IF; Dares Phryj:iiis


[/) Statius, Acliilleïd. lib. I, vs. t\C)3 , seqq. ;

Ilyi^iaiis cap. CX; Servius in .Saeid. lib.


,

{g-) Homer, lliad., lib, I , vs. 323 , seçç. r/,Pi. 57. .

{h) Ibidem, lib. XVI , vs. 8l8. (p) Voyez la remarque (B) dts Vanicit:
(i) Ibidem , lib. XyiII , i^s. ifiz , scqq. Agiuli.éÀ.
,

ACHI LLE. i/Jg


taient répandues sur les person- une tradition si vul- Au reste, c'est
gaire pai-rai les anciens que Chiron
nes de son sexe * (P). Nous ver- ,

nonrrit Achille de moelle de lion


rons dans l'article suivant ce qu'on ne saurait assez admirer qu'un ,

qu'il fit après sa mort , et un mi- aussi savant homme que l'était .M. de
racle qu'il opéra dont Tertullien Girac ait accusé M. Cosîar d'une ,

grossière ignorance (12) pour s'être


a parlé. Je vous renvoie à VHo- ,

servi de ces paroles yous t^ous étiez :

mericus Achilles de feu M. Dre- nourri dès notre enfance du suc de ,

lincourt {q) , comme à un recueil la substance et de lame des bons


de littérature le plus complet qui Hures tout ainsi qu'Achille de la ,

moelle des lions. M. de Girac fait


se puisse voir touchant ce héros
là-dcssus une demande qui n'est pas
du paganisme. d'un critique exact, puisqu'elle change
* L'édition de 1697 contient de plus ces mots
l'étatde la question et nu'elle fait dire
quijinissent la phrase : - et qu'il avait pris
à M. Costar plus qu'il n'a dit. Où
ses licences en l'une et l'autre /'acuités Ju- .•
est-cequil a trouvé ,à'i\.-'\\, qu'Achille
ris utriusqtie licentialus doctor in-utroque. » ne se nourrissait que de la moelle des
(q) Imprime à Leide l'an 1693. Voyez, lions ? Mais voici bien pis ayant :

/'Histoire des ouvrages des Savaus, mai 1693, allégué entre plusieurs autres raison^,
pag. 5ll. pour soutenir son sentiment, que, se-
lon Plutarque , Achille fut nourri de
(A) De la moelle de lion , ou de choses qui n'ont point de san^ , il
celle de quelques autres bêtes sauna- ajoute , qu'il ne croit point qu'aucurt
ges. ] Lib.inius en trois endroits (1) , auteur digne de foi ait écrit qu' A-
et Priscien en un endroit (2) ne
, , ch'ille fut nourri de moelle de lion :
parlent que de la moelle de lion ;
et néanmoins il cite lui-même tout
,

Grégoire de Nazianze y joint la moelle aussitôtsaint Grégoire de Nazianze


de cerf (3) le scoliaste dHomére
:
remarquant que saint Basile n'avait
celle d'ours (4) l'auteur du grand
:
pas eu comme Achille un centaure
Etymologicum ne parle que de la auprès de soi qui lui présentât des
,

moelle de cerf (5j Apollodore parle :


MOELLES FABCLEUSES DE LIONS ET DE
de celle de sanglier et de celle d'ours CERFS. Ce qui fait l'oir, poursuit M. de-
et y joint les entrailles de lion (6) :
Girac que saint Grégoire a tenu cela
,
Sface joint ensemble les entrailles et pour une chose feinte et impossible.
la moelle du lion , ou , selon la le- Soit mais il ne laissera pas d'être un
i
çon de quelques vieux manuscrits , témoin digne de foi car, pour l'êli-e j

les entrailles de lion et la moelle de en ces choses-là il n'est pas néces- ,

louve (7). Philostrate joint au miel et saire ni que l'on soit persuadé des
,

au lait la moelle des faons de biche et faits qu'on rapporte ni qu'ils exis- ,

ia moelle des chevreuils (8j Tertul- :


tent réellement ni même qu'ils soient ,

lien se contente de parler simplement possibles il suffit que l'on ne forge


:

et d'une manière indéterminée de pas de sa tête ce que l'on avance. Or,


moelle de bètes sauvages {9) Eusta- :
sans aucun doute saint Grégoire de ,

thius s'exprime d'une façon encore Nazianze est dans le cas. Il n'assure
plus vague puisqu'il ne parle que de
, point sans l'avoir lu
, ce qu'il rap- ,

moelle d'animaux (10) Suidas dit :


porte du centaure Chiron et d'Achille.
simplement moelle (i i). Il ne le croit pas je l'avoue mais il , 5

(i) Liban. Progymn. pag. 70, D ne l'invente pas aussi et cela suffit ,
; pag. (y^ ,

C; paj^. 159, À; etc. pour le rendre digne de foi. On ne


(1) In Prajexerc. Rhetor. doit demander là-dessus ni la vérité
(3) Orat. XX , paç. 324.
morale ni la vérité physique mais
(4) In Iliad. Ub. Xri. , ;

In 'A/;iX. seulement la vérité de relation. M. de


(5)
(6) Apollodor. Biblioth. Ub. III.
Girac qui veut que la moelle des
,

(7)Slatli Achilleid. Ub. II, vs. 382. cerfs ait été la seule nourriture du.
(8j Philostrat. in Hetoic. pag. 'oS , B ; e( in héros d' Homère , suivant iopin'ion
Icon. II , pag. -81 , C.
(9) Terliillian. de Palllo. commune des anciens , a trouvé sans
(10) Euslath. in Iliad. Ub. I, pag. 11, vs, 28.
,(12) Réplique à Costar , secl. VII . p3g. SQ,
(11) Suidas , vei'jo X'>-^- ÊiHliOit de HoUiiTide , in-8.
,

i5o ACHI LLE.


doute dignes de foi les auteurs qui le yichille dès sa naissance de choses
rapportent, quoiqu'il n'y ait aucun qui n'avaient point de sang (i5). 11 y
lieu de croire ni qu'ils l'aient cru a déjà bien des années que Méziriac
effectivement ni que la chose soit
, a fait voir dans son commentaire sur
ye'ritable. 11 a mis sans doute dans le l'Epître de Briséide à Achille , qu'A-
même rang saint Grégoire de Na- miot avait en cela trompé Vigénère ,
zianze pour ce qui regarde la moelle et qu'au lieu de dire avec Amiot :

de cerf. Il ne peut donc point le récu- Mais ce Philinus ici comme un nou- ,

ser quant à celle de lion et par ;


l'eau Chiron , nourrit son fils en la
conséquent il a lui-même produit un manière quejitt esleué Achille dès son
témoin digne de foi , immédiatement enfance , de viande dont il ri a point
après avoir dit qu'il ne croyait pas esté tiré de sang cest-a-savoir des
,

qu'il y en eût. fruits de la terre ( 1 6) , il faut dire :

^
Je trouve moins surprenant qu il Mais ce nouveau Chiron nourrit ce
ait cité là saint Grégoire de Nazianze ,
garçon tout au rebours d'Achille (iv-
que de voir qu'il ait ignoré ce que deux Ttçf'oi/oùç TU) 'Axt>-MÏ) à savoir de vian-

auteurs modernes qui sont entre les


,
des non sanglantes (17). On pouvait
mains de tout le monde , avaient mis envelopper Xylander dans la même
dans la dernière évidence. L'un est erreur ^ car sa traduction latine porte :

M. de Méziriac qui a prouvé par


, ,
JVostruni autevi quo pacto Achillem
le témoignage du scoliaste d'Homère Chiron niitriens iste staûm à natali-
sur le livre XVI de l'Iliade ; par celui de bus SANGUINE CARENTiBos. H y a Une la-
Libanius dans ses deux harangues ,
,
cune dans ce passage de Plutarque ;
l'une pour et l'autre contre Achille ^ mais le mot àvTiç-pô<t)œcn'en devait pas
et par celui de Stace au livre II de
, être moins intelligible pour le sens
l'Achilléide ; que ce héros fut nourri à'au rebours que les dictionnaires
,

de moelle de lion. L'autre est Bar- lui donnent communément.


thius , qui , sur ce passage de Stace, Ce que j'ai dit , en prouvant la va-
a cité pour le même fait , outre les lidité du témoignage de saint Gré-
deux textes de Libanius , ces paroles goire montre que M. de Girac a cité
,

de Priscien Deindè sequitur uictus ,


: mal à propos Elien Pline et Aristote ,

ut in Achille quod medollis leonum


,
pour montrer que les lions n'ont point
pastus est (ï3). Ces témoins sont aussi de moelle ou que 5 s'ils en ont , ,

valables que ceux que M. de Girac c'est si peu que rien. Il aurait pu citer
produit pour justiûer que l'on donnait aussi Galien , au livre XI de l'usage
à Achille une autre nourriture. des parties , chap. XVllI ] et il ne
Il ne faut pas dissimuler que Bar- semble pas que ce fait doive être révo-
thius nous ôte le témoignage de Stace qué en doute, puisque ordinairement
pour la moelle de lion car, au lieu de: les modernes le passent aux anciens
lubens, il prétend qu'il faut lire lupce, naturalistes , lors même qu'ils les ac-
dans le passage où Achille parle ainsi : cusent de plusieurs méprises sur le
Dicor et in teneris et adhuc crescentibus ann'it sujet des lions. Consultez Vossius au
Thessalus ut rigido senior me monte recepit , chapitre LJI du IIP. livre de Origine
Non illas ex more dapes habuisse , nec almis et Progressu Idolatriœ ; Franzius et
fjberibus satidfse famem , sed spissa leonum
Bocliart aux livres de Aninutlibus
Viscera , semianimesqae lupœ traxisse. me-
dullas (l4). Sacrœ Scripturœ , le père Hardouin
dans son Commentaire sur le cha-
Ce que M. de Girac fait dire à Plu- pitre XXXVII du XI de Pli- livre
larque nous découvre qu'il n'a pas ne , en croyait Vos-
etc. (18). Si l'on
consulté le grec et comme il allègue
:
sius on prétendrait qu'Athénée au-
,

là quelques-unes des remarques dont rait chicané Ai'isiote sur ce fait-là :

Vîgénère s'est servi dans ses notes sur


Philostrate il se pourrait bien faire (i5) Vigénère, Comment, , sur Pbilostr. de la
,
Nourrit. d'Achille, édit. in-4i pog- 544-
qu'il n'a point eu d'autre mauvais (i6) Pllitar^e, des Propos de Table, Uv. IV,
guide que ces paroles de Vigénère : chap. I.
Plutarque dit que Chiron nourrit (17) Méîiïiac, Epîtrcs d'Ovide, pig- 249-
(18) iVci^es lyu'Hofnian , Continuât. Lexici
(i!?) In Progvmn. Rhctoriciscj: Hermogene. univcr?. , tom. I ,,pag. 1002, n'attribue cela
(i/j) Slatii AchiU. Ub. II , vs. 382. D'autres qu'aux dents du lion, et de jrler des e'iincelles
Usent lubens ou libens, dans ce dernier vers. eu se choquant.
,

ACHILLE. i5j
mais quand on consulte Athëne'e contes que comme des jeux d'esprit.
,

même on voit tju'il ne dit rien tou- Ne serait-on pas bien de loisir si l'on
, ,

chant la moelle , et qu'il se contente s'amusait à réfuter par la physique


d'attaquer la dureté' des os du lion ce qui a été dit du talon du même
(19) , laquelle Aristote fait si grande , Achille et de sa lèvre brûlée? On a
qu'il dit quelors(ju'i!s s'entrechoquent dit que sa mère l'ayant plonge dans
il en sort des étincelles comme d'un les eaux du Styx pour le rendre in-
caillou. On pourrait nier cela sans vulnérable ne put procurer cet avan-
,

douter qu'ils ne fussent destitués de tage au talon , parce qu'elle tenait


moelle. Ce pourrait donc être un son fils par là. Fulgence au chapitre ,

fait constant et que M. Furetière au-, VII du livre III et le scoliaste d'Ho-
,

rait dû mêler parmi les autres remar- race sur l'ode XIII du Livre V mar- ,

ques qu'il rapporte sous le mot Lion , quent qu'elle le tint par le talon. Ceux
si l'on n'avait enfin vérifié le con- qui disent qu'il mourut d'une blessure
traire. Borrichius parle de deux ana- au talon comme Hygin au chapitre
tomies de lion faites à Copenhagen ,
CVII et Quintus Calaber au vers 6a
,

l'une il y avait seize ans, l'autre de- du IIl'^. livre conviennent au fond
,

puis deux ans et il assure qu'elles ,


avec les deux autres. Servius sur le ,

firent voir beaucoup de moelle , co- vers 57 du Vl*^. livre de l'Enéide dit ,

piosam meduJlam , dans les os de cet en général qu'il était invulnérable ,

animal et même dans la plupart des


, exceptd parte qud à matr£ tentas est.
os \ et il cite Severiu ,
qui rapporte D'autres ont dit que pour consumer ,

que Tibère Carrafa nourrit un lion , tout ce que le corps de son fils avait
dont les os furent trouvés creux et de mortel, elle le mettait sous la braise
moelleux comme ceux des autres
, toutes les nuits et que le jour elle
,

bêtes (20). Mais quand même il serait l'oignait d'ambroisie et Qu'il n'y eut ,

constant que les lions n'ont point de ([u'une des lèvres de l'enfant qui fut
moelle 51. de Girac n'aurait pas dû
, brûlée ce qui avint à cause qu'il s'é-
]

recourir à cette raison , puisque ce tait léché cette partie.


n'est pas ainsi qu'on réfute les faits Il y a plusieurs auteurs qui rappor-
empruntés de la mythologie païenne , tent cette conduite de Thétis et qui ,

et principalement lorsqu'on a <]it disent même que par ce manège elle ,

qu'aucun auteur digne de foi n'en avait fait périr six de ses enfans , lors-
parle. Le seul témoignage de quel- que son mari l'y ayant surprise fut ,

ques auteurs anciens suHît alors à faire cause qu'Achille, qui était le septième,
^
perdre hautement le procès quand , en réchappa (21). Néanmoins, Tzet-
même les naturalistes nous appren- zès s'inscrit en faux contre ce conte ,
draient l'impossibilité de la chose. et dit qu'il sait d'où. Lfcophron a
ne
D'où il paraît que Barthius s'engage pu pêcher que Thétis
cette menterie
dans une réfutation superflue lors- , eut sept enfans de PeleUs (22). Autre
qu'en commentant les vers de Stace exemple à joindre à celui de M. de
que j'ai rapportés ci-dessus, il s'écrie Girac, pour montrer le danger à quoi
fort sérieusement C'est une étrange : l'on s'expose par une confiance trop
fable, ingeus fabula; puisqu'un en- décisive car M. de Méziriac cite qua-
:

fant qui prendrait quelque chose de tre auteurs fort grades qui tous s'ac- ,

semblable, ne fût-ce qu'en suçant, cordent à ce qu'escrit Lycophron. On a


périrait , n'y ayant pas jusqu'à l'ha- bien raison dédire lorsqu'on entend ,

leine des lions qui ne soit ueniineuse , parler, ou de (juelque phrase extraor-
principalement pour un tel dge. En- dinaire, ou de quelque fait inouï que ,

suite de quoi il cite un passage d'A- cela est bon pour attraper les parieurs,
ristote portant que les lions n'ont
, c'est-à-dire, certains savans téméraires
point de moelle. Peine perdue que qui sont toujours prêts en ces sortes ,

tout cela parce que les anciens eux-


;
de rencontres , à parier que l'on ne
mêmes qui avaient un peu examiné
, trouvera point une telle chose dans
les choses ne regardaient tous ces
,

(21) ApoUodor. Biblioth. Ub. IIJ ; Scboliast.

AUienœi Deipnosopli. lih. VIII,cap.XI.


(19)
Homeri IHad. II, vs. 36; Sclioliast. Aristoph.
(20) Dans son Traite pro Hermelis A^gyp- , pas- 184, A.
l'corum et Chemiconira SapUntià, imprimé à
, (22) Voyez les Epîtres d'Ovide de Méiinac
Copenhague , l'an. i6';4 ,
'""4- jrag. 248.
,

102 ACHILLE.
aucun auteur. Ils ne manquent guère Or il est certain que, pour faire re-
,

de perdre. Mais , ce qu'il y a de plus monter à la cause de ce caractère


étonnant , c'est qu'ils nient quelque- par des fictions propres à la poésie
fois les choses les plus aisées à trouver, et imprimées du merveilleux de ces
.l'en donnerai divers exemples dans ce anciens siècles la moelle de lion ,

Dictionnaire. était quelque chose de mieux imaginé

Ne quittons point Bartliius sans re- que toute autre nourriture. C'est dans
marquer qu'il prétend que la leçon la moelle que se trouvent les parties
les plus succulentes de l'animal, et mê-
fupœ , au lieu de lubens , fait beaucoup
d'honneur à Stace , qui par là ne se me à ce qu'on prétend les parties
, ,

trouve point en opposition avec Aris- spéciGques et séminales. Homère nous


tote, et observe les mêmes distinc- insinue, par l'exemple du petit Astya-
tions qu'Apollodore, puisque celui-ci nax, que c'était le morceau d'un en-
a dit que Chiron faisait manger des
fant gâté ;

entrailles de lion et des moelles de ,

sanglier et d'ours à son Achille (aS).


Mais peu après, Barthius reprenant Mi/êXÔv olov ïi'icrx.i Kdù èiœv Trlovet cTuyWÔv.
l'air de réfutation, rejette comme une Aslyanax , tjuiprius quidem sui super genua
absurdité manifeste cette moelle de patris ,
Medullam solam comedebat elovium pinguem
louve et dit qu'il sait qu'un enfant
:
adipeni (sS).
qui ne prendrait une telle nourriture
qu'une fois, ne laisserait pas de mou- Et les railleurs disent quelquefois aux
rir avant le lendemain. C'est pour- mères que c'est celui du gendre de
quoi, ajoute-t-il, Grégoire de Na- la maison. D'ailleurs, il n'y a point
zianze accommode mieux la chose , en d'animal aussi colère que le lion et ;
joignant la moelle de cerf avec celle c'est de lui qu'on supposait que Pro-
de lion. On ne voit pas comment Bar- méthée avait emprunté le principe
thius est d'accord ici avec lui-même, qui avait assujetti le premier homme
ayant dit dans la page précédente à la colère :

que la rejection de la moelle de lion


Ferlur Prometheus addere principi
était à Stace une marque de juge-
Linio conclus particulain unditjuè
ment et que l'approche des lions est
,
Deseclam , et insani leonis
très-dangeureuse à l'enfance. Vim stomacho apposuisse nostro (26).
Remarquons aussi que la raison
pour laquelle ApoUodore et quelques Ce qu'on n'eût pu trouver
n'est pas
^
autres ont plutôt parlé des entrailles assez bien son compte, en donnant
que de la moelle des lions , pour la une lionne pour nourrice à Achille.
nourriture d'Achille semble venir de , Virgile a suivi cette idée, pour des
ce qu'ils auront ouï dire que ces ani- reproches de cruauté :

maux sont presque sans moelle; car il Duris genuit te cautibus horrens
était d'ailleurs plus convenable de lui Caucasus , Hjrcanœque admôrunl ubera ti-

faire avaler cette moelle que de lui gres (27;.


fournir un autre aliment, vu le ca-
Et le capitan delà comédie des Vision-
ractère sous lequel les poètes le repré-
naires ne s'ea éloigne pas dans cette
sentent. Ce n'est pas tant sous l'idée
rodomontade :
de bravoure quoiqu'on l'en partage
,

dans un degré éminent, que sous celle Le dieu Mars m'engendra d'une Jiire atna-
d'une colère indomptable c'est par là :
zone ,
El je suçai le lait d'une ajffreuse lionne.
qu'Homère se propose de le décrire dans
l'Iliade où selon la remarque d'Ho-
, ,
Par cette clef, on entendra pourquoi
race , il prend pour thème Grat'em ,
quelques-uns ont choisi la moelle de
Peleidce stomachum cedere nescii (24)»
cerfpréférablement à toute autre pour
et où il débute par
Achille c'est qu'ils étaient frappés
:

Mmviv ôià. Tï»Kifiâ.Pcce 'AX.t>Sioç,


a.ii<f'i de la tradition qui lui donnait beau-
Jrain cane, Dea, Peltdœ Achillis,
(25) Homer. lliad. lib- XXII ,
vs. 5oo.

(23) Barth. Comment, in Âchil. lib. II , vol. (26) Horat, Odje XVI, lib. I , vs. i3.

III, pag. 1753. (27) VirgU. 7En. lih. IV, vs. 36*3 Macrob.
(j4) Horat. Oae VI, lib. I , vt, 5. Salurn Ub. V, cap. XI.
, ,

ACHILLE. i53
coup de vitesse à la course, et qui a catus (undè et nominis consilium (3?.)
porte Homère à l'honorer incessam- quandoquidemlablis i^acueratab iibe-
ment, ou de l'éloge de TroS'itç cèx.vç, ruvi gustu) Lui qui ai^oit este nourri
:

allant bien du pied, ou de quelque de moelle de ce rj (d'où il fut nomme-


autre épithète de même significa- à dessein, attendu qu'il n' au oit jamais
tion, TToJ'céx.ïlÇ, V^SdLfX-M, TToicti TO.X'Ji-, sucé mamelle de ses lèpres ) etc. ,

ta-X^^^'^h JtpajrrvoîVij etc. Présen-


cTis-i Théodore Marcilius a bronché aussi
tement c'est ainsi que nous recom- sur ces paroles, ajant prétendu que
manderions le mérite d'un laquais Tertullien désigne l'étyraologie sine
basque mais anciennement c'était
;
chilo ,ivs!/ /^ixoî/ (33; ce qui est yisi-

une qualité héroïque (28) et ainsi : blement faux, comme M. de Saumai»


on ne pourrait tout au plus blâmer se l'a remarqué. On aurait pu remar-
Homère que d'en avoir fait une che- quer une autre méprise de ce même
ville de vers répétée trop souvent. On auteur. La voici : c'est qu'Achille ,
a donc cru qu'il fallait feindre qu'un selon Vélius Longus , cité par Cassio-
licros d'une vitesse extraordinaire dore , devait son nom au mot ;^5rxcç
avait été nourri de moelle de cerf: comme s'il eût été de ces personnes
et on s'est tellement appliqué à cette qu'on nommait chilones ou labeones,
notion qu'on n'a pas pris garde
,
c'est-à-dire , qui avaient de grosses
que la moelle d'un animal si timide lèvres. Lucrèce leur donne le nom
était d'ailleurs très-peu propre à ce de labiosus (34) et remarque qu'un
,

foudre de guerre et à ce cœur de amant qui veut excuser les imper-


lion, 'A;(^ixx>i* p^iivof* ât///.ciXêGVT«t (29) fections de sa maîtresse, dit labiosa,
Achillem frangentemviros animo leo- cfi/.Hy.ît, une grosse lippiie est un beau

nino cfui, dans l'extrême mépris qu il


, et spacieux champ de baisers. Mais il
témoigna au général de l'armée lui , est faux que sur ce pied-là Achille
dit entre autres injures, doive son nom à /-jUxaç, lettre c'est
:

plutôt sur le pied d'avoir été mutilé


f^a , sac à vin , jeujc de chien , cœur de cerf.
en cette partie , quoique M. de Sau-
C'est ainsi que Vigénère traduit (3o) maise l'ait nié, contre un passage
ce vers du de l'Iliade
I*'. livre :
formel de Photius , dont j'ai déjà fait
mention , et contre ce qu'en a dit po-
sitivement un vieux poète nommé
(T' êX*<pO«0. Agamestor (35) , cité par Tzetzès.
Voici les paroles de Saumaise , si chi-
Je ne pense pas que , si l'on déci- lones dicti h magnis et improbis la-
dait la chose à la pluralité des voix, bris , Achilles dictas fuerit quasi i-nu
l'on jugeât que la moelle du cerf ait X,ii>-îa>v, non quôd sine labris fuerit
été la nourriture d'Achille, ni que sed quod labioriini ministerio nonusus
M. de Girac pût trouver confirmation fuent infans (36). Je ne nie point
de ce qu'il a dit trop légèrement, que qu'Apollodore ne dise que le fils de
cette moelle a été la seule nourriture Thétis, nommé Ligyron auparavant,
du héros d' Homère suii'ant l'opinion fut nommé Achille par Chiron
, à ,
commune des anciens. 3Iais, quand ce- cause qu'il n'avait jamais appliqué
la serait vrai un vieux traducteur ses lèvres à la mamelle. "Oti rà. ;t*'>"
,

français du traité de Pallio (3i) ne p-o-ç-oïç w 7rfoTi}/éy>i»


(37), quod mam-
serait point excusable d'avoir déter- mis labra minime admowisset.
miné à cette moelle ce que Tertullien (B) Que c'est de là qu'est venu le
avait dit en général de celle des bêtes
sauvages. Les traducteurs n'ont point f32) M. de Saumaise approuve ceux qui lisent
ce droit-là. Illeferarum medullis edu- concilium.
f 33) Noi. crit. in Tertul. de Pall. pag. 77 ,

(28) y^ojez la prodigieuse vitesse que Virgile eJil. Paris, anne i6i4 > in S.
donne à une jeune amazone nommée Camille, (34) Lucret. lib. ir.
dans le livre VII de TEoéide , vs. 807 , et là- (35) Dans son poème sur les Koces de Thétis
dessus le père La Cerda. et de Pélêe qu'ion prétend avoir précédé celui
,

(29) Homer. Ilisd 1:1.. f'II , vs. 028. ïi'Hésiode sur le même sujet. iVt Vossios , ni
(3e) Vigénère, Comment, sur Pbiloslr., Je la Lorenzo Crasso, ne disert rien de ce poêle.
Nourrit. d'Achille, pag. 544- (3G) Salmas. in Tertul. de Pallio pag. 281 ,
,

(3i) Edmond Richer, quipublin sa version à edit. anno i656.


Paris en 1600 , iri-S.
(37) Apollodor. Bibliotti. lib. III, pag. 335.
,

,54 ACHI LLE.


nom d'Achille.'] Nous avons parle des (4o)^ et que, dans l'édition où l'on a
étymologies de ce nom
dans la remar- supprime les fautes on ne dit pas ,

que (B) de Tarticle précédent ; mais pourquoi on les a ôtées.


il faut parler en particulier de celle L'erreur est venue de ce que le ter-
dont il s'agit ici. Elle va toujours de me ;t"^'f> dont Euphorion s'est servi
compagnie avec la tradition qui porte dans des vers cités par l'auteur du
qu'Achille ne fut nourri que de chair grand £ty'mologicum, et par Eusta-
et de moelle d'animaux. La liaison thius, a été pris pour celte substance
de ces deux choses est fondée sur ce molle et blanchâtre en quoi l'estomac
que le mot grec X'>^oç signifie propre- convertit les alimens, et que les mé-
ment la nourriture que la terre nous decins appellent chyle , du mot grec
fournit. Mais quelques auteurs ont ;t«AÔc : au lieu qu il fallait entendre
là-dessus une assez plaisante opinion. par Al"^'f ) comme a fait M. de Mézi-
La voici, selon les propres termes du riac (4i) , après Eustathius , la nour-
père Gautruche dans son Histoire
, riture qu'on prend des choses que l'on
poétique- Je choisis cet ouvrage plutôt sème en terre. Natalis Cornes a mal
qu'un autre parce qu'il a été impri-
,
traduit Euphorion car il lui fait :

mé plusieurs fois et en plusieurs lan- dire qu'Achille n'avait point goûté de


gues , et qu'il passe pour être propre lait (^1). Vigénère et Fungérus , se
à tout le monde (38). Or il n'y a point fortifiant faussement de l'autorité de
de fautes qu'il faille plus soigneuse- saint Grégoire de Nazianze ne ren- ,

ment remarquer que celles qui peu- contrent pas mieux. Ils attribuent à
vent séduire beaucoup de gens. Au saint Grégoire ce qui n'est que dans
lieu de lait c'est le père Gautruche
, la version latine des Commentaires de
qui parle (Sgl et des autres i'iandes
, Nicétas Serron , archevêque d'Héra-
communes Chiron ne le nourrissait
, clée dans le onzième siècle, sur les
que de moelle Je lion ou de sanglier, oraisons de ce père (43)- Fungérus
pour faire naître en sa personne le cou- conclut qu'Achille a été nourri sine
rage et la force de ces animaux. De cibo , de ce qu'on ne lui donna à
là vint , selon l'opinion de quelques- manger que de la moelle de cerf.
uns, que n'étant ainsi nourri d'aucune L'autre veut que Al'^»? signifie suc, et
viande, on le nomma Achille, c'est- qu'Achille ait été nourri sans suc
à-dire SANS CHYLE. Quoique la der-
, pour ce qu'il fut nourri, non de wian-
nière période de ce passage ne paraisse des accoutumées aux hommes, mais
pas dans les dernières éditions, je ne de chairs de bêtes saut^ages toutes
laisserai pas de remarquer, i°. que crues (44)- François Alunno adopte
c'est une erreur de dire que l'on n'est la moitié de cette dernière erreur. Fu
nourri d'aucune viande lorsque
, nutrito dit-il (45), nel monte Pelio
,

l'on n'est nourri que de moelle d'a- da Chirone centauro ne mai in quel ,

nimaux^ car la moelle est comprise tempo mangio cibo cotto , perché fu
incontestablement sous le mot de noniinato Achille, perché a. in Greco
viande, par opposition même aux signijîca sesza , e ;t'^'5 cibo cotto.
alimens qui sont permis durant le ca- Il y en prenant le mot ;t*'^°5
a qui,
rême ^ 2°. qu'il est faux que la moelle simplement pour nourriture, fondent
ne se convertisse pas en chyle et que , l'étymologie d'Achille sur ce que son
ceux qui ne seraient nourris que de précepteur Chiron au bout d'un cer- ,

moelle seraient sans chyle. Ces re- tain temps ne lui fournit plus ni
,

marques ne paraîtront pas superflues moelle de bêtes sauvages , ni quoi


à ceux qui considéreront que cette
(4o) Entre autres dans le Dictionnaire histori-
doctrine du père Gautruche se trouve
que de Juigaé.
dans une infinité d'exemplaires de son
(4i) Méiiriac, Épîtres d'Ovide , pag. 24S, oii
ouvrage et dans d'autres écrivains le poète Euphorion est mal nommp' Euphoron.

(42) Natal. Cornes, Mythol. lib. IX, cap. XII.


(38) Il s'en est fait une e'dition a Vlrechl , en OEu-
ifgo à laquelle on a ajouté la traduction en (43) Cette version est imprimée avec les
,
vres de saint Grégoire.
laitn et en flamand. La traduction latine avait
déjà paru il part. Les Anglais le publièrent en (44) Vigénère , Comment, sur Philoslr. , de la

leur langue l'an 1671. Nourrit. d'Achille, pag. 543.


(3g) Hist. poét. lil'. II, chap. XV ,
pag. id8, (45) Dans sa Fabrica del mondo qui est un ,

édition de la Haye, en 168 1, qxti est l'a qua- Dictionnaire surBazcice. Dante, Pétrarque, etc.,
trième. imprimé à Venise en i5&8, in-folio.
,,

ACHILLE.
que ce soit à manger, de sorte qu'il rifiv y oTê <J« <r tn ijU'jiTiv iyù yw-
fut oblige de vivre de ce qu'il prenait vas-cri jcctSiVîtç,

à la chasse ^4^)- Mais était-ce vivre O401' T cL<rct.ifj.i Trfii'TeLfji.ùy , xati oivfiv
sans nourriture ? Cette explication est tTris-pi^tèv
,

peut être pire que les précédentes. rioxxstxf ^uo< KctTiSius-Ai iTr) ç-riBts-a-t
(C) Si nous en croyons Homère
c'est à Phénix , et non pas à Chiron ,
Oivow , stToCx:/^a)v Iv vdttish âxtyii-
etc.'] Il y a bien des gens qui ne *? (49)-
prennent point garde à cela. De'cima- .... Dfon enim volebas cum alto
Neque ad convivium ire, nerjue in œdibus
tor dit qu'Achille, après avoir été cïbum. suinere,
élevé par Chiron , qui lui enseigna Jntequam te meis ego genibus impositum
l'art militaire, la musique et la mo- Obsonio satiavi secato anle'a , ei vinum ad-
moi'ens
rale , fut mis sous la direction de
Sœpè mihi rigasli ad peclora vestem
Phénix qui lui apprit et à bien par-
, Vmo ,
ejeclans in infanliâ difficili.
ler et à bien vivre , comme il s'en
vante lui-même (47)- H prouve cela Il a fallu nécessairement que je citas-
à l'égard de la musique et de la mo- se ce grec car c'est un discours si
5

rale , par ces vers d'Ovide au P'. \i- étrange qu'on aurait cru aisément
,

\re de ^rteamandi, t's. ii : qu'il n'est pas tel que je le traduis.


Phyllirides puerum cithara prœfecit Achillem^ Voyez ci-dessous le paragraphe XI.
Alque animas molli contudit arle feros. Mais quoi qu'il en soit, cela montre
,

que, si l'on veut se servir de l'autorité


Je les rapporte sans rien changer ni d'Homère à l'égard de Phénix , il faut
à l'orthographe, nia citharœ prœje- renoncer à ce que d'autres rapportent
cit, qui doit être changé en cithard
'touchant Chiron ou que du moins \
perfecit. Chacun peut voir qu'il ne
il ne faut pas donner à Chiron la pre-
que de la musique et nulle-
s'agit là ,
mière éducation d'Acliille et moins ,
ment de l'étude de la morale. Ses encore la faire durer jusqu'à ce qu'il
preuves à l'égard de Phénix sont ces
eût appris à son disciple l'art mili-
paroles d'Homère :
taire, la musique et la morale. Quand
ToVVêXit f/.i TTÇOÎVX.i M:LTK'if/.iV 0.1 Tol/ê on est en état d'apprendre ces choses,
on ne mange plus sur le giron de son
Mt/9û!V Tê lïltYlù e/UHyctl, TrfïIKTVIfcL Tê père nourricier, et on ne lui rejette
ifyaoi (48). point du vin sur ses habits. Joignez à
Proplereà me misil ul docerem isia omnia , cela que ceux qui font élever Achille
yeiborumtjue oralor essem , aclorque rerum. par Chiron, disent qu'il fut tiré de
Mais, pour peu qu'on lise avec ré- dessous sa discipline , pour être en-
flexion le livre de l'Iliade d"où cette voyé, sous l'habit de Glle , à la cour du
roi Lycomède, où son déguisement
autorité est empruntée on verra que ,

lui facilita bientôt les occasions de


Décimator s'est abusé. Les expressions
de Phénix témoignent qu'il fut le pre- voir de près la fille du roi comme il ,

mier précepteur d'Achille, f^oiis ne y parut par l'enfant qu'elle mit au


fouliez rien manger, représente-t-il à monde. Or, depuis qu'il fut père, il
n'y a point d'apparence qu'on lui ait
ce héros , a moins que je ne vous prisse
sur mes genoux , et que je ne wous donné de précepteur par conséquent :

coupasse les morceaux. Le uin , que point de temps où placer les fonctions
i'ous l'Omissiez sur ma poitrine
de Phénix après celles de Chiron. Les
pen- ,

dant i^ntre enfance malaisée , a sou- fautes de Décimator se trouvent dans


vent sali mes habits. le Thésaurus scholastica' eruditionis
de la dernière édition quoique cet ,
.... 'EîTii rjùit iiî\ia-x.iç a./x a,xxa> ouvrage ait été souxent corrigé par
de doctes humanistes (5o). Demp-

(49) Idem ibidem i?. 482.


, ,

(46) Commentaires sur les Emblèmes <l'AIclat, (50) Le premier auleur de ce Tbesanms s'cp-
pag. 624 de l'e'dition de Tlipilius , à Padoue pe^^ Basiliiis Fabcr, Soranus. Il e'iait recleur-
en 16G1 , i>i-4- d'un coUe'ge a Erford , et il publia son livre
(47) Décimator in Tbesauro liogoariim. C'ett l'an 1571 après avoir employé' 36 ans à ensei-
,

un gros in-folio, imprime' à Leipsick l'an 1606, gner la langue latine. L'ouvrage fut reimprime'
pour la première fou. en 1625, avec les corrections et les additions de
(48) Homer. Iliad. lib. IX, vs. 4^2. Buchnerus, qui est mcrl en 1661 , à l'âge d-e 70^
, ,

i56 ACHILLE.
sterus a dit aussi qu'Achille , ayant ceux qui font élever Achille par Chi-
lite instruit par Chiron pendant son ron depuis l'âge de six ans jusqu'à
enfance, fut é\evé par Phénix quand l'ilge de puberté (53) jusqu'à ce que ,

il fut devenu plus grand (5i). Remar- non-seulement il eût appris à se tenir
quez que je n'entends point nier que à cheval sur le dos de son précepteur
depuis qu'Achille fut père , on n'ait (54) mais aussi qu'il se fût endurci
,

recommande' à Phe'nix de lui ensei- aux exercices les plus rudes (55) ;
gner comment il se faut conduire dans sans compter tant d'autres choses que
le métier des armes et dans les con- , Chiron lui enseigna l'art militaire :

seilsde guerre (Ss). Mais je n'appelle la musique la morale (comme Dé- ,

point cela lui avoir donné un précep- cimator vient de nous le dire), la
teur. médecine et en particulier la bota-
,

Je ne sais si Malherbe avait jamais nique et la jurisprudence comme un ,

pris garde à ceci ^ mais il est sûr qu'il ancien auteur nommé Staphylus (56),
s'est exprimé en homme qui aurait et plusieurs autres nous l'apprennent?
bien observé qu'il ne faut donner Stalius au II*, livre de l'Achilléide ;
,

qu'un précepteur à Achille. Voici com- Claudien dans son ouvrage sur le troi-
,

me il parle de ce guerrier au IV*. li- sième consulat d'HonoriuS; Sldonius


vre de ses poésies , page io6 : Apollinaris, dans son poème IX spé- ,

De quelque adresse qu'au giron cifient ce qu'Achille apprit de Chiron.


,

Ou de Phe'nix ou de Chiron , Notez que l'on donne à Chiron, dans


Il eût fait son apprentissage. les Commentaires sur les Emblèmes
d'Alciat , et cela sur le témoignage
Il faut lui donner seulement Phénix,
d'Homère , ce qui ne convient qu'à
si l'on veut s'en rapporter à Homère
,
Phénix, si nous en croyons Homère.
qui ne fait nulle mention du précep-
Rien n'est plus fréquent que ces qui-
torat de Chiron ^ et il ne lui faut don-
proquo parmi les auteurs.
ner que Chiron , si l'on s'en rapporte
J'ai dit qu'Homère n'a point parlé
à la foule des auteurs. M. Ménage a
du préceptorat de Chiron. Que veu-
dit néanmoins, dans ses notes sur cet
lent donc dire me demandera-t-on ,
,
endroit de Malherbe , que Chiron fut
ces paroles d'Eurypyle à Patrocle
le premier gouverneur d'Achille , et
dans le onzième livre de l'Iliade :
Phénix le second. Je ne m'arrête
point à l'autorité de Tzetzès , qui, par »... 'Ett» <r' vi7t\a. <Sfa.fiA.a.)ta, TtOLtrai
une explication allégorique de ce qu'il
avait lu dans quelques atlteurs, que
Phénix, aveuglé par son propre père, 'Ov Xê/pœv ié'iS'tt^i cTwAlÔTStTOÇ KêV-
fut mené à Chiron qui lui rendit la Tctôpcey (5^)
5
vue, prétend que cela veut dire que
Chiron lui mit en main le jeune Achil- Mettez sur ma blessure les médicamens
le i car , outre qu'il n'y a rien de plus salutaires que l'on dit que uous ai>ez ap-
Iroid ni de plus forcé que cette pen- pris d' Achille , qui a été instruit prir
sée , il faut savoir que Tzetzès ne Chiron, le plus juste des centaures ? Je
prouve nullement le fait. Il veut ac- réponds qu'elles signifient, non pas
corder, par ses prétendues allégories, que Chiron ait été précepteur d'A-
Homère avec Lycophron mais com- :
chille, mais seulement qu'il lui ap-
ment accordera-t-il Homère, qui dit prit des remèdes. Chacun voit la dif-
«ju'Achille , tout petit enfant encore ,
férence de ces deux choses. Monconis,
était sous la conduite de Phénix? com- dans ses Voyages , nomme cent per-
ment , dis-je accordera-t-il cela avec
, sonnes qui lui apprenaient des recettes
et des secrets de guérison : ces gens-là
ans après avoir été professeur en poésie pen-
,

dant 45 ans et en éloquence pendant 3o ans a


,
, (53) Pindar. Nem. Ode III.
Wiltetnberg. Il corrigea encore el augmenta ce
Dictionnaire, priur l'édition de i655. Enfin, (54) Tœ itûra TrceKat Kotï i'iS'a.o-x.â.KCfiXfoô-

Christophe Cellarius l'a corrigé de nouveau, fXi^li. Eodem utens et puUo et prceceplore,
premièrement pour l'édition de l'année 1686 ,
Greg. Nazianz. Orat. XX.
ensuite pour celle de 1692 , el enJSn pour celle
(55) Statii Achil./it. //, vs. 38?.
Je 1696. (56) Il est cilé par Notai. Coines liv. IX,
,

(5i) Dempsteri Paralip. ad Rosinum, lib.II, chap. XII , el dans, les Commentaires sur les
cap. XI. Emblèmes d'Alcial.
<5î) Hom. Iliad. lib. IX, vs. 44ov (57) Honter. Hiad. lib- XI , vs- 82g.
,

ACHILLE.
jioarfant u'avaient pas été ses pédago- tarque (G;) , Pausanias (68), Clément
gues, ne l'avaient point élevé dans son d'Alexandrie (69) Philostrate (70), ,

enfance. Les professeurs en médecine, Libanius (71) saint Grégoire de Na- ,

qui enseignent, ou apprennent publi- 2ianze (72) , et plusieurs autres moins


quement cent bons remèdes à leurs anciens (78), n'ont-ils point dit la
auditeurs ou en particulier quelques
,
même chose? Mais, d'autre côté, ceux
recettes fort rares à des amis distin- qui ont fait mention du préceptorat
gués, sont-ils pour cela ce qu'on ap- de Phénix (74) ne sont pas en plus pe- ,

pelle précepteurs ou gouverneurs d'un tit nombre, il ne faut donc pas tant s'é-
jeune homme? Et, sans sortir de ce tonner que même selon quelques an- ,

passage d'Homère ne voyons-nous ciens auteurs Phénix et Chiron aient


, ,

pas Achille qui apprend des remèdes été tous deux précepteurs d'Achille :

à Patrocle, duquel néanmoins il n'a- il se faut contenter de dire que ces


vait pas été précepteur ? Pour entrer auteurs-là n'avaient point examiné la
donc dans la pensée d'Homère, il faut chose de près, ou qu'ils n'avaient eu au-
dire qu'Achille fut élevé par Phénix de- cun é^ard à l'incompatibilité qui ré-
puis 1 âge de trois ou quatre ans jus- sulte des circonstances du préceptorat ,

qu'à l'âge où l'on peut apprendre à de Phénix et des circonstances du ,

bien parler et à faire de belles ac- préceptorat de Chiron.


tions; mais qu'il ne laissa pas, dans J'ai donc pu nier dans le Projet, que
cet intervalle de temps, ou après, Stace , en parlant de Phénix et de
d'ouïr les leçons de Chiron. C'est Chiron comme de deux précepteur.-;
ainsi qu'un scoliaste a pris la pen- d'Achille, puisse apporter quelque se-
sée d'Homère car il remarque qu'A- cours à Décimator et à ses complices
;
^
pollonius, qui feint que Chiron des- car, outre que Stace ne marque point
cendit au bord de la mer pour sou- s'ils exercèrent cet emploi en même
haiter un bon voyage aux Argonau- temps ou l'un après l'autre, ni lequel
tes et que sa femme l'y accompagna
, des deux fut le premier, on ne peut
tenant Achille entre ses bras et le le mettre d'accord avec Homère qui, ,
,

montrant à Pelée a suivi les poètes en cas de concurrence, le doit em-


,

qui sont venus après Homère et sup- porter hautement sur lui. Considérez ,

posé avec eux que Chiron nourrit le bien ces deux passages :

petit Achille, chose dont Homère n'a-


Non libi cerldssei juvenilia fingere corda
vait fait aucune mention. 'Hxo/.siSas-fv Nestor, et indomiti Phœnix modeiaior aluru-
rii
,

Qiiique tubas acres liluosque audire volentein


1//T0 XêlfûJVOC hîyùCV TSV 'A^lXKÎsi Tf*<5>>t-
.£aciden, aliofrangebalcarmine Chiron(-;5).
V5t(. "Oy.tifljÇ (Ts Ot/lTêV TOlùt/TOV ^ê')-SI (58).
Apollonius a été fort excusable, C'est le premier, et voici l'autre :

puisqu'il n'a fait que suivre la foule ;


Tenero sic blandus Achilli
car qui n'a point parlé de Chiron com- Semifer ./Emonium vincebal Pelea Chiron.
me de celui qui avait élevé Achille?
K'est-ce point ce qu'Orphée (Sg) , ce (67) Sympos. lib. IV . cap. I pag. 660, F;
,
et de Muisic. pag. 1146, Â.
que Pindare (60) , ce qu'Euripide (61) (68) In Lacon. pag. 197.
ce que tant d'autres poètes (63) ont Stromaton Itb. I pag. 3o6, B.
(69) ,

chanté? Xenophon (63) Platon (64), , In Heroïc. pag. 682 A tt 70$ A.


(70) , , ,

ApoUodore (65) Pline (66) Plu- , , Progymn. pag. 71, A; pag. 97. C;
(71)
pag. 129 A; pag. j42, C; pag. i4î j A ; et
,

Déclamât, pa^. 239, D.


(58) Scholl. Apollon, in lib. I , vs. 558.
(Sg) Ârgoaaat. vs. 3-g. (72) Orat. XX, pag. 3i^.
(60) >em. Od. IIÏ. (73) Eiisthat. in Homer. pages 11, 34, et
840 : Sclioliast. Homeri in Iliad. lib. I vs. 5o,
(61 Ipliig. in Aul. vs. 209, "jog.
et lib. XFI, vs. i4 et 36.
(62) Seoec. Troad. ad. III, vs. 833, Stat.
Silv. I, Ub. II, vs. Achil. Ub. I, vs. i{^, (74) Voici Ips principaux: SchoWist. Homeri
89; in Uiad. hb.IX, vs. 168 et 448. Dicljs, lib. II.
cl passini nltbi. \ Val. Flaccus, lib. I vs. 254,
,
Xenopbon , Conv. pag. 897, A. Plato, Itb. II ,
et l\o- Ausoaius , Protrept. vs. 20
; ClaiiJian.
;
de Republ. tom. II , pag. 390, E. Cicero, de
de ni Consul. Honor. vs. 61.
Orat. lib. III cap. i5. Strubo, lib. IX, pag.
(G3) De Vénal, pag. 973, A, et 974 . ^ ,

29-. Quiutll., Ub. II, cap. III. Slatius, Silva


(64) Hipp. loin. I pag. i'i , , C. 3. de Re- ///, lib. V
vs. igi. Plutarcb. rooi. //
, pag. ,

publ. tom. II , pag. 3gi , B. 4, îG et 72. Lucian. Dialog. Morl. Philostrat.


(05) B.blioth. lih. III. Lemn. pag. i3ô. Libanius, Pjogymn. pag. gg.

(66) Hisl. Nat. W. XXr, cap. V. (75; Stit. lib. V, Silva /// , 'vs,. igi.
;58 ACHILLE.
Ifec senior Peleus nalum coinitalus in arma race qui, aurapportdeM. Moréri (8i),
Troica, sedcaroPhœnix hcBrebalalumno{''fi).
se vante dans la 6^. satire du i^', li-
vre, qu'ilavait appris l'Ihade par
Xénophon (77) , et Lucien (78) ,
qui
donnent ces deux précepteurs à
cœur avait sans doute oublié cette
,

sont exposes à la même bat-


harangue chargée de mille inutilités ,
Achille ,
lorsqu'il donna à l'auteur de l'Iliade
terie que Stace; et au pis aller, sont-ils
cet éloge , qu'il court toujours à son
Homère, que Dëcimator a donne pour
but, qu'il va vite à la conclusion:
son garant ? Notez qu'encore que
Stace dise que Phe'nix accompagna
semper ad ei^enlum festinat (82). Si
cela était , amuserait-il un député de
Achille à Troie (7g) , il ne s'ensuit pas
l'armée grecque, chargé d'une com-
qu'il le fasse successeur de Chiron 5
mission très-importante et très-pres-
car il exprime assez clairement que
sante ? l'amuserait-il dis-je, à de pe- ,
Phénix avait été' auprès d'Achille
tits contes de nourrice et au récit
avant ce voyage: il nomme celui-ci
alumnus de Phénix (80). Pour ce qui de ses vieilles aventures ?
est de Tzetzès , qui nous conte , dans
(D) Y
démêla aisément Achille. ]
son commentaire sur Lycophron, que
M. Moréri prétend, avec peu d'exac-
titude, qu'Ulysse le découvrit, lui
Pelée ayant mené Phénix à l'antre de
ayant fait présenter par un marchand
Chiron , où Achille était élevé , lui
des bijoux et des armes car, si l'on s'en :
dit: i^oila ton fils , conduis-le donc
tient à ce qu'Ulysse lui-même en dit
comme un bon père doit élci^er sonjils ;
dans sa harangue aux généraux de l'ar-
il ne prouve rien contre moi , et il
n'est point favorable à ceux qui vou-
mée, ce fut lui qui présenta non-seu» ,

draient recourir à la distinction de


lement à Achille mais aussi à toutes
,

les jeunes demoiselles delà cour, ces


gouverneur et de précepteur , qui est
bijoux etces armes (83). Si l'on .s'en rap-
si claire dans Plutarque à l'égard du
porte à Hygin et au jeune Philostrate
fils de Philippe , roi de Macédoine. ,

c'est encore Ulysse qui les présenta,


Voyez l'article Lysimachus. Je ne pense
étant l'un des ambassadeurs que les
pas que les poètes nous la fassent voir
Grecs envoyèrent à Lycoraède, pour lui
quant au même temps dans ces siècles
reculés en tout cas ne paraît
demander Achille. Que si l'on s'en rap-
si ^ et , il
porte à Stacs l'on dira bien que ce
,

f)oint que Pelée ait commis à Phénix


ne fut pas UI3 sse même le chef de
a coadjutorerie de Chiron ; et si Tzet-
,

l'ambassade grecque, qui fit l'étalage ;


zès, en s'esprimant tout-à-fait mal,
mais non pas qu'il le fit faire par un
avait voulu dire cela il ne mériterait ,

point de créance. C'est un auteur trop


marchand. Quelques modernes disent
qu'il le fit lui-même déguisé en mar-
nouveau-venu pour mériter d'être ,

suivi à regard d'un fait que l'on ne


chand (84). Je n'oserais soutenir qu'ils
forgent cela mais il est bien sûr qu'ils
peut accorder ni avec Homère ni avec ,
;

ne l'ont pas pris dans les bonnes sour-


les auteurs anciens qui ont attribué à
ces. Langius prétend que Lycomède
Chiron 1 éducation du petit Achille.

Finissons cette trop longue remar-


fit tout ce qu'il put par ses pleurs et
,

que par un trait qui paraîtra bien par ses pi'ières pour empêcher qu'A-
,

Hardi. Je ne saurais qu'y faire j'ose :


chille ne suivît Ulysse (85) et il ac- ,

cuse Cicéron d'avoir pris le fils pour


avancer qu'il ne faut que lire le dis-
lepère dans ces paroles lYec enim...
cours de Phénix dans le IX*^. livre de :

l'Hiade, pour admirer ceux qui ad-


Trojam Neoptolemus capere potuis-
mirent encore aujourd'hui ce poëme;
set. si Lycomedem, apud quem erat
car sont-ce là des discours dignes de
educatus multis cum lacrymis iler
,

la majesté du poème épique ? Et Uo-


suum impedientem audire voluisset.
C'est Langius qui se trompe, et non
<76) Idem, lib. II SUva /, vs. 88.
(•;r) In ConviT. (81} Dans l'article (f Horace ; mais c'est une
fausseté.
('fi)
In Dial. Achll. et Ant.
(82) Horat. tls Arte poët. , vs. i48.
{:9) Statius, W. //; Silv. /, i-j. 83 et lib.
(83) Ovidii Metamorph. lib. XIII, vs. i-q.
m,
;

Silv. //, vs.1,6.

(80) Meursius Canlerus entendent par le


et
(84) Texior. OfBciD. lib. II cap. ; , XXXÏl
Nat. Cornes, Mythol. Ub. VI, cap. I; Vigé-
mol KOt/fOTfOi^OC, dont Lycophroa s'est servi nère, .fur Philostrale , au sommaire de la Nour-
pour désigner Phénix , que celui-ci ai/ail été' riture d'Achille Pomey, in Pantheo Mythlco, etc.
;

l-e père nourricier d'Achilk.


(85) In Cicer. de Aaiicit. , cap. XX.
, ,,

ACHILLE. 159
pas Cicéron. Voyez la remarque (A) (89) ; car, quand même oe jeune hé-
de Tarticle Pyrrhus fils d'Acbille.
,
ros aurait joui de la belle dès le pre-
(E) Elle lui aidait permis de l'en- mier jour, son fils aurait pu n'avoir
gros'ser. ] Achille était alors si jeune, que trois mois à l'arrivée d'Ulysse. Il
qu'il y a peu d'exemples d'une faculté y en a qui ont dit qu'il réitéra la dose
générative aussi prématurée que la
generativ à sa maîtresse après
près les pipremières
sienne. Néanmoins la bonne instruc couches, et qu'il en eut un autre fils
tion avait été encore plus prompte , (90). Mais puisqu'il était né avant le
et il n'y avait pas eu là le désordre voyage des Argonautes (91), entre le-
dont Montaigne se plaignait dans le quel et l'expédition de Troie les chro-
chapitre 25 du I*'. livre de ses Essais. nologues mettent pour le moins trente
On nous apprend à uiure dit-il , ,
ans (92), jugez si les anciens poètes
quand la i^ie Cent escoliers
est passée. ont bien concerté leurs calculs.
ont prins la férolle avant que d'estre (F) F'ulcain... fit alors de nouvelles
arrit^ez à leur leçon d' Aristnte de la armes a Achille. ] Personne ne doit
Tempérance. Mais si l'on voulait mo- trouver mauvais que Charles Etienne
raliser sur l'histoire poétique on di- , et MM. Lloyd , Hofman Moréri etc., ,

rait à Montaigne que cette aventure parlent des armes impénétrables que
du fils de Pelée est un avertissement Thétis fit faire à son fils par Vulcain ,

qu'on a beau faire prendre le de- pour l'expédition de Troie car en- ; ,

vant à l'éducation elle ne laisse pas


, core qu'elle eût déjà rendu le corps
de succomber sous le poids de la na- invulnérable en le plongeant dans le
ture. Styx on sait qu'il y a peu de précau-
,

Je dirai en passant que les fictions tions qui paraissent superflues à la


des anciens seraient un peu plus sup- tendresse maternelle. Malherbe a voulu
portables qu'elles ne le sont s'ils s'é- marquer ces deux précautions de Thé-
taient donné la peine de ne pas tant tis quand il a dit :

se contredii-e les uns les autres; mais 3ien que sa mère eut a ses armes
il paraît qu'ils ont regardé leur his- Ajoute' la force des charmes (gï).
toire fabuleuse comme un pays où
chacun faisait ce qu'il lui plaisait Mais néanmoins il ne les a pas mar-
sans dépendance d'autrui. Apollodore quées , parce que son expression fait
dit qu'Achille n'avait que neuf ans plutôt penser que Thétis donna des ar-
lorsqu'on l'amena dans l'île de Scy-
mes fées à son fils , que penser qu'ou-
ros que l'on parlait déjà de l'ex-
et tre qu'elle lui avait charmé le corps
,

pédition de Troie (86). Selon Stace , les armes donna étaient à


qu'elle lui
les préparatifs des Grecs avaient déjà l'épreuve. M. Ménage, qui censure
duré un an lorsque Ulysse fut en- justement l'équivoque de l'expression,
voyé à l'île de Scyros pour en retirer reconnaît d'ailleurs que Thétis usa de
Achille. Quand Ulysse y arriva, Achille ce double expédient qui, dans le fond,
était déjà père (87) jugez si la nature
:
ne choque pas le vraisemblable (94)-
avait été lente à lui accorder les forces De plus, ce n'est pas à l'auteur d'un
viriles , et s'il différa long-temps à dictionnaire à supprimer une chose ,
les exercer sur la jeune Déidamie. sous ombre qu'elle a été faite inuti-
Sface n'a pas osé retenir le calcul d'A- lement. Il lui suffit qu'elle se trouve
poîlodore \ il donne pour le moins dans les livres sauf à lui à nous for-
,

douze ans à Achille avant que de lo tifier dans le besoin par ses sages ré-

tirer de l'antre de Chiron (88). Je ne flexions. Or, il est certain qu'un an-
sais pas comment Barthius a pu trou- cien auteur nommé Philarque ou Pby-
ver que, selon le calcul de Stace , il larque, avait laissé par écrit que Thé-
fallait que le fils d'Achille eût plus
(89) Bartli. ia Statium, lom. III, pag. 1684,
d'un an lors de l'ambassade d'Ulysse 1736.
(90) Voyez Eustatliias in Iliad. XI , el Ptol.
Ilephiest. apud Pbotium.
(86) 'Hç iyhiTa hvictTÂç. Barthius «<e ces
(91) Apollon. Argon, lib. I vs. 558. Valer.
,
paroles dant tapage 1579, et dans la page iG85
Flaccns, Argon, lib. I vs. 2.50.
,
du lome III de son Comaientaire sur Stace; el
néanmoins tl dit dans la page i584 711'ApolIo- (92) Voyez Calvisius sur l'an du monde 2727,
el 2-^(i'] et te P. Labbe, Chronol. Franc lom.
;
«Jore ne marque point l'âge d'Achille.
/, pag. 127.
(87) Stat. AchiU. lib. II , vs. 234. (9 i) Malherbe, liv. III, pag. 75.
(88) Ibid. vs. 396. (94) Ménage, Observât, sur Malberte, p. 37a.
, .

\6o ACHILLE.
tis voyant qu'elle ne pouvait éviter lorsqu'il débita comme un fait certain
,

qu'Achille n'allât au siéee de Troie , qu'Achille avait été neuf ans devant
lut supplier Vulcain de faire des ar- la ville de Troie sans se battre.
mes pour Achille, à l'épreuve de toute Achille, à qui la Grèce a donné cette marque
force humaine (gS). Vulcain ayant D'avoir eu te courage aussi haut que les deux,
fait ces armes déclara qu'il ne les li- Fut en la même peine, et ne put faire mieux
Que soupirer neuf ans dans le fond d'une
vrerait point qu'après avoir obtenu
barque {98).
de Thétis ce qu'elle pouvait accorder
de plus précieux. Elle s'en défendit Sarrazin trompé apparemment par ,

oflVant de témoigner sa reconnaissance cet endroit de Malherbe, qu'il voulut


par toute sorte d'autres services j mais imiter, avait dit dans une ode qui est
voyant qu'il ne voulait que le service fort belle :

personnel, elle lui promit de payer de Achille, beau comme le jour.


sa personne, pourvu que les armes fus- Et vaillant comme son e'pe'e ,
Pleura neuf ans pour son amour
sent propres à Achille, ce qu'il faudrait Comme un enfant pour sa poupée.
essayer sur elle-même, qui était de la
taille de son fils. Vulcain, content de Mais M. Ménage a corrigé cette faute
son marché, livra les armes à Thétis, (99) dans l'édition qu'il a procurée des
qui les endossa et s'enfuit. Ce pauvre œuvres de Sarrazin il fit mettre neuf j

boiteux, ne pouvant l'atteindre, lui mois au lieu de neuf ans. Au reste ,


jeta son marteau et la blessa au talon. cette comparaison d'Achille avec un
On a donc pu dire en général que enfant qui pleure pour sa poupée a son
Thétis fit faire à son fils des armes im- fondement dans l'Iliade où nous ,

pénétrables pour sa première campa- voyons qu'Achille après avoir perdu ,

sa concubine Briséis, court, fondanten


gne. Mais puisqu'Homère est la prin-
cipale source où il fallait puiser pour larmes, en faire ses plaintes à sa mère,
et que sa bonne mère le console tout
cet article il ne fallait pas oublier
,

qu'après la mort de Patroele, à qui comme s'il eût été un petit garçon.
Hector avait ôté les armes d'Achille, Xlif,t Tê /UtV Kltrépi^iV , ITTOÇ T ï<^ct<T SX.
Thétis en obtint d'autres de Vulcain. t' OvÔ/Z-Ct^ê ,
C'est plus beaux épisodes de
un des TsxVSV, T« XAatlêlÇ Tt (Tê
5 <ri <pùî)/Aç
l'Iliade , et il a servi de modèle à Vir-
gile pour l'un des meilleurs morceaux E^a,vS^a., y.ii mdSi vôu net
, iij'aifjttv
de l'Enéide 11 méritait donc bien qu'on
.
a./jt.<^ai (100).
en touchât quelque mot. Remarquez Manuque ipsum demulsit , verbumque dixit
que, selon Servius, les armes que Pa- et nomen :
Fili quidjles ? quis ver'o tibi menlem inva-
trocle portait quand il fut tué, avaient
sit
,

mœror?
été faites à Pelée par Vulcain (96). Die , ne cela animo , ut sciamus ambo.
(G) La mort de Patroclefut l'érigée
La majesté de l'épopée souffrait ces
bientôt après. ^ Moréri a eu raison de
naïvetés en ce temps-là 5 n'en disons
dire qu'Achille reprit bientôt les ar-
donc rien. Convenons du beau génie
mes, que la perte de Briséis lui avait d'Homère convenons de la fécondité
,
fait mettre bas. En effet, puisque
et de l'éloquence de sa muse mais di-
toute riliade ne comprend qu'une an-
5

sons aussi,
née (97)» selon le sentiment du P. Sed nie.
Mambrun dans son Traité du Poème
,
Si foret hoc nostrum fato dilalus in œvum ,
etc. (loi)'
épique, faut que depuis la retraite
il

d Achille jusqu'à son retour à l'armée (H) Le traîna autour des muraille^
après la mort de Patrocle , il ne se soit de Troie. ] Personne peut-être n'avait
fiasseque peu de mois. Ainsi, Mal- dit avant Virgile quelecadavre d'Hec-
lerbe tomba dans une étrange bévue tor fut traîné trois fois autour des mu-
railles de Troie .

(95) Jpud Natal. Comitem, MytViol. lib. IX,


cap. XII. TzeUès jur Lycopbron, pag. ï6, en Ter circuin Iliacos raptaverat Hectora tnurot.
touche ijuelijue chose. Ce que je rapporte, et que
Nalalis Cornes ne rapporte pus se trouve ilans
,

le scoliaste de Pindare, in Nem., Ode IV. (f)8) Malherbe , Poés. lir. , pag. la.ï. V
(96 Servius, inâlneid. lib. I, vs. 483.
_) (99) Ménage, Observât, bur Malherbe, p. /^\i
M. Ménage , Observât, sur Malherbe ,
((1';) (100) Homer. Iliad. lib. /, et. 36i.
png.'44i, croit qu'elle en comprend beaucoup (101; Horat. Sat^ X, Ub. I , vs. 68.
in€:4î.S. (102; Yirgil. iEneid. , Ub. I , vs. 483.
ACHILLE. iGl
Homère n'avait marqué le nombre des ete censure , et que cette
faute a fait
tours que par rapport au sépulcre de croire a 1 un de ses
commentateurs
Palrocle, et il n'est pas hors d'appa- qu Ausone n'a point fait tous les
som-
rence ([ue Virgile ait converti en trois maires que nous avons sous
son nom
circuits autour des murailles les trois (luo). Au reste, le
traînement de ce
circuits autour du sépulcre, desquels cadavre, les discours qu'Achille
tinta
Homère avait expressément fait men- Hector prêt a expirer, la
liberté qu'il
tion (io3)j qu'il les ait, dis-je, con- accorda a qui voulut d'insulter
et de
vertis de cette sorte, ou par un dé- frapper ce corps mort, cette
âme vé-
faut de mémoire , ou pour faire un nale qui se laissa ainsi
persuader à
meilleur vers. La liberté de cette mé- force de riches présens de rendre
Pnam le corps de son fils sont desà
,

tamorphose n'a été imitée pi'esque de ,

personne vous ne vo3'ez pas plus les


: choses si éloignées, je ne dirai
pas de
trois circuits des murailles dans les la vertu héroïque, mais delà
généro-
auteurs qui ont vécu après Virgile que sité la plus commune, qu'il faut néces-
dans ceux qui l'ont précédé. Sophocle sairement jugei- ou qu'Homère n avait
(io4), Euripide (io5), Ovide (io6) , aucune idée de l'héroïsme, ou qu'il
Sénèque (loy) , Stace (io8j , Dictys de n'a eu dessein que de peindre le
ca-
Crète (109), Platon (no), Cicéron ractère d'un brutal. Il nous représente
(m), Hygin (112), Philostrate (ii3), Achille qui souhaite d'avoir assez de
Libanius (ii4), Servius (n5),Tzet- brutalité pour manger crue la chair
zès (u6}, Eustathius (117), parlent d'Hector :

bien du traînement d'Hector, mais


non pas du nombre des tours. 11 n'y
StVÊ())
a que l'auteur de la petite Iliade en
"CLix à;roT-ît^vô^.«vov xfê<t scTyMêvai
vers latins autant qu'il m'en peut
,
(121).
Vlinam enim ullo pacto ipsum me furor et
souvenir, qui ait marqué nommément anitnus slirnulareC
trois courses autour des murailles et Crudas dissecanleni carnes comedere !

trois courses autour du tombeau. Cet


Il n'a pas même compris que, pour
auteur se nomme Pindarus Thebanus ;
faire plus d'honneur à son héros, il
il a été cité par le vieux scoliaste de
ne fallait pas donner à son ennemi
Stace , ce que Vossius n'a point su
aulant de lâcheté et de faiblesse qu'il
(118). Barthius a souvent parlé de lui
lui en donne.
dans le gros volume de ses Adi'ersaria,
et ailleurs (119). Je sais qu'Ausone , (1) Funérailles dont le dictionnaire

dans le sommaire du XXII*^. livre de de Moréri a touché quelques circon-


stances avec très-peu d'exactitude.'] Cet
l'Iliade débite qu'Hector fut traîné
,

trois fois autour des murailles de auteur a dit que les dieux pleurèrent
Troie mais je sais aussi qu'il en a dix-sept jours la mort d'AchiHe,- mais
j
il ue fallait pas citer Homère
sans co-
ter le lieu où il parle de cela. Ce
(io3)Homer. Iliad. lib. XXIII, vs. i3; et ne
XXIV, V. x(^. peut pas être dans l'Iliade car il y a ;

(io4) In Ajace, vs. io45. fort bien observé la règle qui


défend
(io5j In Androra. vs. io8, 3gg. d'ensevehr le héros d'un poème épi-
(lot!) Metani. lib. XII , vs. 5oi. Amor. lib .
que dans le poème même. Virgile l'a
II , Eleg. I , vs. 'il, et in Ibin , vs. 333. observée aussi. Il eût donc faifu dire
(107) /nTroad. act. III, vs, 4i3; et in Agam. qu'Homère parle des funérailles d'A-
act. III , vs. 447.
chille dans le XXIV^. livre de l'Odys-
(108) Achilleul. i<i. /, vs. 6.
sée, où il amène cet épisode à l'occasion
(109) Lib. III.
(iio) De Republ. lib. III, tom. II, p. igi B.
des galans de Pénélope tués par Ulys-
(m) Tusciil. /. se, C'est à tort que , dans l'édition
(112) Cap. cri. d'Amsterdam on a fait venir les con-
,

(ni) In Heroic. , ptg. Gg-. tinuateurs d'Homère à la place d'Ho-


(ii4J Progyran. pug. 100, D. mère. Ce n'est pas tout il n'eût point
:

(ii5J In Virgil. Eclog. IX , vs. 6. fallu dire les dieux en général, sans
(iS) Pag. 75. spécitier ce qu'Homère marque que
(117J In Homeri Ili»a. XXII, vs. 401.
,

(118) Vossius, Histor. lat. pai,'. 819. (120) Voyez les Diatribes de Mariang. Accur-
(119) Voyei son Commentaire sur Stace, sjus sur Aumône.
tom. /, ptig. 340; et tuin. III p. 3y3, 1G09, (m; Iliad. XXH
, , vs. 346.

T03IE I. II
,

i62 ACHILLE.
Thetis accompagnée des déesses ma- qu'après la correction de ce passage ,
,

rines vint au camp des Grecs pour Isaac Vossius se soit avise' d'accuser
rendre à son fils les devoirs funèbres Pline de mettre le tombeau d'Achille
conjointement avec eux , et que les au rivage de Khe'tee et celui d'Ajax ,

neuf Muscs y tinrent bien leur partie au rivage de Sige'e (i23). Pline a fait
par leurs chants lugubres. Ou pouvait tout le contraire. Solin, par un abus
citer Pindare pour ce dernier fait : qui lui est assez ordinaire a trans- ,

porte ce sépulcre sur un autre cap voi-


Tov ;U£V oi/n SavovT à.iiiS'a.1
sin savoir sur celui de Rhétée , où
,

SXiVûVt'. OtÀXst 01
était le tombeau d'Ajax (124)- Cette
yra-fi ti TTUfdLv , T«.<f>ov
méprise se trouve dans les Emblèmes
6' 'EAïKcévist» TTstpâêVOt
d'Alciat.
tç-CtV , iv'i QfîivOVTS TTO-
jEacidœ tumulum Uheeleo in liltore cernis (ii5).

^iv âifo. <r' ÀÔsivaToiç


Ses commentateurs avouent qu'il s'est
^voiç Qioiv é'iéif/.iv (122). trompé, à la réserve de Pignorius ,
qui a soutenu le contraire. 11 est pour-
Quem ne mortuum quidein cnrmina tant certain , par le témoignage una-
dejecerunt : sed el ejiis rogo et sepul- nime des auteurs ,
que le tombeau
cro Heiiconice f^irgines adstiterunt, el d'Achille était au rivage de Sigée.
lanientaùoaevi meniorabilem effude- Nous avons déjà dit qu'on y allait
runt. Plaçait ergo inimorlaiibus stre- tous les ans lui offrir des sacrifices :
nuum i'irutn ellani mortuum. hymnis la tradition était que son fantôme s'y
dearum tradere. Ce que le diction- faisait voir armé et en posture mena-
naire ajoute, sur la foi d'Homère en- çante ; ce qui n'empêcha point Apollo-
core , qu'ensuite de ces dix-sept jours nius de vouloir s'aboucher avec lui
les jeunes gens de la Thessalie firent (126). Je crois même qu'on a dit qu'il
les funérailles d'Achille où ils pieu- , se faisait des miracles à ce tombeau.
rèrent couronnés de Jieurs d'amaran- Voyez l'article suivant.
te , devi'ait être naturellement au (L) Son nomdevint celui de la su-
même endroit de l'Odyssée où est le prême bravoure. M. Moréri sans ci-
] ,

deuil de dix-sept jours cependant il :


ter livre, ni chapitre, prétend qu'Au-
n'y est pas et j'ai bien peur que
, lugelle a dit que , quand on veut par-
M. Moréri ne se soit servi de quelque ler de quelque soldat généreux , on
livreoù l'on avait mal rajiporfè la cé- dit que c'est un Achille ; mais il est
rémonie dont Philostrate fait mention faux qu'Aulugelledise cela. 11 dit seu-
dans le tableau de Néoptolème. C'est lement au chapitre XI du IF, livre (jue
qu'ayant été ordonné aux Grecs par , Sicinius Dentatus, pour avoir fait des
l'oracle deDodone d'aller faire tous , actions fort surprenantes à la guerre,
les ans l'anniversaire d'Achille, les fut nommé l'Achille romain. Notre
Thessaliens furent les premiers qui auteur en rapporte quelques cii'con-
joignirent des couronnes d'amarante sfances prises de cet endroit d'Aulu-
aux autres cérémonies. gelle sans nous avertir d'où il les
,

(K) Ils l' enterrèrent au promontoire prend de sorte qu'il le cite non
; ,

de Sigée. ] Presque tous les diction- quand il le faut mais quand il ne le


,

naires le remarquent. Lloyd reje- , faut pas non quand il lui emprunte
;

tant les autres citations de Pline, qu'il son bien mais quand il lui donne
,

avait trouvées en mauvais état dans ce qui ne lui est point di^. S'il avait
Charles Etienne, garde celle du chap. cité Servius (127) il eût allégué
, de
XII du IV '^. livre, mais à tort; car Pline meilleures preuves. Or , ce n'était
ne parle point là du tombeau qui était point seulement la vigueur martiale ,
à Sigée il parle de celui qu'on disait
: c'était aussi celle qu'on faisait paraî-
être dans une île du Pont-Euxin. C'est
(123) Vossius in Melam pag. 98.
au chap.XXXduV*. livre qu'il ditqn'il
,

(124) Sollni Poljliistor. cap. XL.


y avait eu une ville nommée Achil- (i25) Alciatl Emblema CXXXF.
léon , auprès du sépulcre d'Achille (126) Philoslr. in Vitâ Apollon, lib. IV, cap.
sur la côte de Sigée. 11 est étonnant III elir.
(127) Servius in Vjrgilii Eclog. ill , l'J.
79;
(laï)Pinaar. Islhm., Ode FIJI,pag. ^SS. el mEclog. IV, vs. 34-
ACHILLE. ï63
Ire au service de Venus qui faisait écoles le principal argument d'une
donner le nom d'Achille te'moin ce 5 secte sou Achille.
, Ce qui ne vient
débauche qui, se sentant déjà mort pas tant de ce qu'Achille était un in-
quant aux parties qu'on ne nomme vincible guerri. r, que de la dil! culte
pas, dit daos Pétrone, funerata est illa tout-à-fait embarrassante que Zenon
pars corporis qud quondhm Achilles d'Elée proposait contre l'existence du
eram (*). Il avait apparemment plus mouvement ^i3oj. 11 mettait une tor-
de regret à cela que Miion à la perte tue en comparaison avec Achille, pour
de la force de ses bras, et il aurait montrer que jamais un mobile lent qui
paru plus blâmable à Cicéron que cet précéderait tant soil peu un mobile
athlète , pour de très-bonnes raisons. vite n'en pourrait être devancé. Ca-
Quœ i-ox polest esse conlemptinr lepin , citant d'ailleurs fort mal
Au-
quant Milonis Crotoniatœ, qui ciim lugelle met argumentum et non pas
,

jam seiiex esset athletasque se in


, argentum ; ce qui nous apprend que
curriculo exercentes videret, adspexis- le mal vient d'une ancienne source
se laccrtos suos dicitiir illacrymans- , qui a formé comme deux branches de
que diaisse At hi quidem jam mor-
: copistes. Les uns ayant à moitié che-
tui sunt JYon ! i>erà tenu isti quàm min perdu aigurnentum , apparem-
tu ipse nugator , neque enini ex te ment par de l'imprimeur qui
la faute
unquhm es nobditatus sed ex lateri-
, substitua argentum, ont été cause que
bus et facertis tuis (12S). leurs descendans conservent de main
Le dictionnaire de Ctiav'es Etienne, en main ce deinier mot les autres , ;

dans l'édition de Paris, en 1620 re- , à cet égard n'ont point encore for-
,

vue et corrigée par Frédéric Morel ,


ligne. Ainsi ceux qui vont à eux ,
professeur royal et dans celle de Ge-
, comme ont fait les correcteurs de Ca-
nève en 1662, corrigée encore d'une
, lepin évitent le défaut qui s'est glissé
,

infinité de fautes à ce que le titre


, dans l'autre branche.
porte , attribue à Aulugelle bien cité, (Mi aimait beaucoup la musique. ]
non pas que tes soldats généreux ,
M. Moréri en a parlé avec très peu
mais que les capitaines d'une valeur d'exactitude. Il a dit qu'Homère fait
extraordinaire étaient appelés Achil- souient connaître que le son de la lyre
le, et que l'argent s'appelait ac/jt7/eert, Ui-'ait un merveilleux poni^nir pour taire

parce qu'il était insurmontable ou , passer la colère d Achille et calmer


lorsqu'il était insurmontable. Tantœ cette passion furieuse qui avait tant
Jortitudinis fuisse fertur (Achillesj ut, donné de peine aux Troyens. Il ajoute
teste Gellio , lib. 2, cap. 11 insigni ,
qu Athénée l'a remarque aussi après
Jortitudine duces Achilles appellen- Theopompe. Mais il est certain qu'on
tur et argentum i'ocetur achilleum ,
, ne remarque dans Homère sinon que les
Îuodsii insuperabde et insnlubileii-îQ). députés de l'armée trouvèrent Achille
e texte latin de Charles Etienne peut chantant sur la l3re les belles actions
s'entendre en ces deux façons , et j'a- des grands hommes, pour se divertir.
voue même qu'aux dépens d'une mau-
Tov i' iùp'jV <fpÉv« T(p7ript.iyov (^ôpufyyi
vaise situation de paroles et de beau-
Kiy tin
coup d'inexactitude dont on se recon-
naîtrait coupable, on se pourrait sau-
Tîî cyt dvy.oM ïnpTriy *êi/ê S' sipat Kh'ia.
ver de l'accusation d'avoir imputé à
ÀvS'fSv (i3i).
Aulugelle ce qui regarde ce prétendu
argent achillëen. Mais ni Charles Etien- Achille offensé par Agamemnon ,
,

ne, ni ses correcteurs, ni M. Llojd , avait alors abandonné , de dépit et de


ni M. Hofman , qui l'ont suivi pied à colère la cause commune. C'est tout
,

pied , ne peuvent se justifier d'avoir ce qu'Homère nous en apprend. Pour


pris argentum pour argumeiituni. Car des rétlexions, il n'en fait point sur
c'est pour une objection insoluble l'occupation où les députés trouvèrent
qu'on se sert de lépithète d^achillea , Achille ; c'est Athénée qui en conclut
et l'on appelle ordinairement dans les qu'Homère a voulu signifier que la
(*) Pelron. Salyr. C. 129. (i3o) Aristolel. Itb.VI Physic. cap. IX , et
(128) Cicero de Senectute cap. IX. , ibi Simplicius el Themisliui. Diogeneà Laërt.
(i?q) Car. Steplianus in Dictionario , Yoc. lib. IX , in Zenone.
AchiUes. (i30 Hemer..lliad. l,b. IX, ys. 186.
,

i64 ACHILLE.
lyre était d'un grand secours à ce harmonie trop molle et trop féminine

he'ros pour modérer Taideur vio- sur laquelle il chantait des chanson-
lente de sa colère (i32). 11 n'est pas nettes d'amour. Ce n'est pas le seul
vrai qu'Athi-ne'e fasse cette remar- exemple qui montre que Plutarque se
que après Theopompe et je suis tort ,
rendait tellement maître de certains
trompe' si la cause de l'e'garement de faits, qu'il les tournait et les appli-
Worcri n'est un passage de Vossius au quait tantôt d'une façon , tantôt de
Traite de la .Musique. Ce savant hom- l'autre. Assurément Alexandre n'a
me, ayant cite Athénée pour l'obser- point répondu ces deux choses, et ap-
vation qu'on vient de voir, dit tout paremment c'est la dernière qui est
de suite que les ambassadeurs des de l'invention de l'historien. Pour ce
Gètes, qui allaient pour quelque traité qui regarde ces paroles, car j'ai celle
de paix ou de trêve vers des gens , d'Achille, on croit aisément qu'A-
dont il fallait apaiser l'irritation, se lexandre eût voulu l'avoir; mais qui
pressentaient jouant de la lyre (i33), doute qu'il ne soit très-faux qu'il lait
et allègue pour son garant Athénée ,
eue Elien rapporte le fait conformé-
.''

qui rapporte cela du livre XLVI*. de ment à la première narration de Plu-


rhistoire de Théopompe. M. Uofman tarque (i38). Un commentateur d'É-
est à peu près dans la même erreur lien assure qu'Homère représente en
que je viens de remarquer. On eftt divers endroits Achille chantant sur
trouvé un peu mieux son compte la lyre les exploits des grands capi-
dans Philostrate car il observe que
;
taines (iSg). Il se trompe : Homère
Chiron ayant aperçu qu'Achille ne ne qu'en un seul lieu, et son
le fait
pouvait vaincre sa colère , lui ensei- erreur étant celle d'un homme tout
gna la musique (i34)- autrement fort de reins que Moréri
Il y a eu des gens qui ont voulu dire
en fait de littérature, pourrait con-
((u'Arhille chantait sur la lyre , non soler Moréri s'il était envie. Kuh-
,

le-;beaux exploits des grands hommes, nius ne corrige point cette faute
mais les maux que l'amour lui faisait (i4o). Stace qui contre les termes
,

iouilrir. formels d'Homère suppose qu'A- ,

chille pendant sa retraite chantait ses


Talis canlalâ Briseide venil Jchilles
jicrior et positis erupil in Heciora plec-
amours et sa Briséis , témoigne en
,

trb (i35). d'autres endroits que, dès sa plus ten-


Ille Pelelhi-oniam cecinii tniserabile cartnen dre jeunesse, il avait employé ses in-
jtdcUharain, cUhard tensior ipse siid(ii6).
strumens de musique dans l'antre de
Chiron, à célébrer les grandes actions
Ce sont, je médisances qu'on
crois, des
peut réfuter par la réponse que fit des anciens.
Alexandre-le-Grand à relui qui iui of- JVec major in istit
Sudor^ Apollineo quàinjiia sonanùa pîeciro
frait la lyre de P;îris 7e ?n'cii soucie :
Cwn qualercm , priscosque virùin mirarer ho-
peu, lui dit-il; mais je l'errais i^olon- nores (i40'
ticrs celle d'Achille, sur laquelle il
chantait les actions des héros du temps Ce furent les combats d'Hercule , ceux

passé. Plutarque, qui rapporte ainsi la de Pollux et ceux de Thésée qu'il ,

c'iose dans la vie de ce prince, lui at- chanta devant sa mère , qui l'était
tribue ailleurs (i3-) une autre répon- allée voir daus cet antre, à quoi il
se , savoir celle-ci Je n'ai que faire
:
joignit les famé uses no ces de son pèi'e :

de celle-là ; car j'ai celle d'ylchille, au Canit ille libens immania lauduni
snn de laquelle il se reposait en chan- Semina, qui tumidce superdnt jussa novercce
Ainphitrronades : crudum quo Bebryca cœstu
tant les louanges des Paillans person-
Obruerii Pollux : quanta circurndata nexit
nages ; mais celle de Paris aidait une Huperit yEgides Minoi bracliia Tauri ,

Maternas injine thoros, superisque gravalum.


(iSa) Âtbenxns, lib. XI f, pag. 614. Pelion {1^2).
(i33) Vo5^iu>, deMusice,;;(ig. ^3. Lepassage
d'Âtlieuée est page 627. J'avoue cependant que Phiiostrate le
(i34) In Heroïc. pag. '"oS C. Vide etiam
A:iiani Hist. Nar. lib. XI V ,
,

cap. XXIII. (i38) ^liani Histor. Var. lib. IX , caf.


(i35) Stalius, Silv. ir, Ub. IV,
xxxyiii.
vs. 35.
(139) Scbeffer. in hune locum iEîiani.
(i36) Priajieior. carm. LXIX. ^i4"o) Kulmîus, in.'Elian. ibid.
(i3-) Plularnue , delà Forlime d'Alexandre, (i4ij Slaliui , Ax'hill. Ub. II , vs. i{\i.
lit. t ,ehap. Kl. (iijsj Idem ibidem , Ub. I , vs. itiS.
,
ACHILLE. 165
faitchanter, sous la discipline de Chi- Anibiguus , tenuique laUns discrimine
ron diverses matières qui avaient in- sexHs (148).
,
(C'est Slace qui parle. )
finiment moins de rapport à la guerre
qu'à l'amour; Hyacinthe, Narcisse, Pour ce qniestde la taille, je nereraar-
J\doni'!, Hilas, etc. (i43). querai point ce quePhilostrafedit dans
Achevons cette remarque par quel- la vie d Apollonius, que l'ombre d'A-
que chose qui concerne la lyre uièrae caille, evo([uée par ce philosophe ,
d'Achille. Quelques-uns disent que panit d abord de cinq coude'es et puis
Corybas, fils de Jasus et de Cybèle ,
de douze,
et d'une beauté qu'il n'e-
ëtaiitpassé en Plirygie avec son oncle possible d'exprimer (i49)- Je
ti*it P/»s

Dardanus , y établit le service de Cy- "e dirai jioint non plus , avec Lyco-
bèle, donna" son nom aux Corybantes, pbron, qu'Achille avait neuf coudées
;
qui étaient les prêtres de cette déesse, ce n est point ce qu'on nomme belle
et y transporta la Ivre de Mercure tai^e , cela n'est bon que pour Quin-
(i44). Elle fut gardée a Lyrnesse, d'où tus Calaber qui Ta converti en géant
Achille l'emporta lorsqu il se saisit de (i5o) , et ce ne serait pas le moyen de
cette ville. Homère n'est pas de ce justifier le sieur Moréri. Disons donc
sentiment , puisqu'il dit que la lyre q""'! est fort vrai que l'auteur qif il
de ce héros avait été trouvée dans la cite (i5i) donne une belle et haute
ville d'Éetion c'est-à-dire dans Thè- taille à ce héros , et un visage d'oii il
,

bes de Phrygie lorsque les Grecs la sortait des rayons, un nez ni aquiHn
pillèrent (i45). "' crochu; mais tel qu'il défait lou-
<^emeurer. C'est ainsi que Vigé-
(N) Le plus bel homme de son temps.-} >","'«
Au lieu de ce fait, dont on a des preu- «^""6 a traduit sur la version latine ,

ves si authentiques, M. Moréri s'est apparemment J aimerais mieux tra-


contenté d'observer que Philostrate '^''^'e tel qu d deuail eire, et donner
dit qu' Achille était de belle taille, au verbe /^j>.xa) cette signification.
Achille se vante lui-même , dans le (0) ^^ «e les aimait pas moins de
XXI'=. livre de riliade, d'être grand et son côté. ] La lubricité d'Achille fut
beau, X4XÔÇ Ts^.^,aç Tê: et lors qu'Ho- »" fruit précoce et de durée. Nous
mère a voulu parler de Nirée il a re- avons vu que dès VXga de dix ans il
,

marqué qu'après Achille c'était le plus engrossa Déidamie. Les suites furent
beau de tous les Grecs dignes d'un si prompt début. 11 ne
:

^
tarda pas long-temps à traiter de la
, ôs xixMç-^ç «tVJip J^o Ixioï
Ni^fîîç »ix9« niême sorte Iphigénie (tSa); et siDiane
Tmv*x>.û!V A*V£tâv,,MêT' à.fj.{/y.<i\a. n»- crut qu'où lui avait oflért une vierge
hûoBvtt (146). pour victime en la personne de cette
Nireu., quifornwsi.simus wV ad Tlium venit j-jj^ d'Agamemnon elle fut pHse pour ,

Pelidein. dupe Achille avait mis bon ordre


:

qu'au pis aller Iphigénie ne sortît

ros, avait teileiuent le visage d'une lène sur les murailles de Troie, et en
femme ,
qu'il lui fut aisé de passer devint si furieusement amoureux ,

pourfille à la courde Lycomède(i47). qu'il en perdit le repos et qu'il re ,

.... Plurimus illi


courut à sa mère pour la prier de
Invictd virLute décor falliique tuenles trouver quelque moyen de le faire
jouir de cette femme (i53) ; bel em-
, pag.
(143) Pbitoslrate in Heroïc. 700, les
nomme Toùç nXizetç , ce que Vigé-
<t3x;a.l0I/ç (i48) Staiius , AcLilI., lib. T, vs. 335. Dictys
lière Irnduil, les anciens qui esloient au mesaie Cretensisj lib. I.

aage qu'Aclnlle. Ct^la e\l très-equii'oque : il eut (i4y) Philostrate, de la Vie d'ApolIonios, liv.
mieux valu se servir du mol de siècle que de IV chap. V. Vigénère cite le livre III , et dit
,

celui d'dge ; et sans doute Philoslrale a voulu que Vombre apparut premii'rement de la hau-
dire , non qu'Us e'iaient contemporains avec teur de sept coudées.
j4chille , mais qu^ils Criaient entre eux. (i5o) Q. Calaber, lib. I , vs. 5i4 lib. III, ;

(144) Diodor. Sicul. , lib. VI. vs, 7i(j , 722-


(i45> Homer. lliad. lib. IX, vs. 188. (i5i) Pliilostrale in Ileroic. pag. 7o5. ,

(i4(i) Ibi<l. lib. II, vs. 673. (i52) Vide Tzeizera in Ljcophron.
('4?) f^orei le Banquet <îe Platon. ^i53') Ticlies in Lycophron.
,66 ACHILLÉA.
ploi pour une mère ! The'tis ne laissa le proposa à Ménélas (161). Mais c'est
pas de Taccepter, et d'inventer une principalement envers Patrocle qu'on
manière de maquerellage qui consista a donné un tour criminel à la tendresse
à faire arcroire à son fils qu'il jouissait d^Achille. Piaton prend son parti là-
de la belle Hélène ^ mais ce ne fut dessus contre Eschyle (162). Xéno-
qu'un songe, et néanmoins ce re'gal phon est en cela de l'avis de Platon
imai^inaire apaisa les tourmens d'A- (t63). SextusEmpiricus traite la chose
chilie. On eut beau lui ôter sa Briseis, en homme de sa profession je veux ,

il ne coucha yiourtant point seul il : dire pvi'rhoniqueraent (164)- Mais Lu-


avait eu trop de soin de ses provisions cien et Philostrate (i65) y mettent
de lit. Il pouvait trouver des relais tout leur venin l'un d'eux prétend ;

chez lui en cas de besoin Diome'de'e : qu'Achille ne se tint point assez sur
prit la place de Brise'is (iS/jl Dès qu'il SCS gardes en pleurant la mort de son
eut vu Polyxène fille de Priam il
, , ami , et qu'il se laissa écliapper la vé-
voulut en faire sa femme; et n'ayant rité par ces paroles :
f/.nfm ts tûjv s-â»
pu satisfaire ce désir pendant sa vie , lôs-i^hç oy.tXtx xctxKicev {^iQfij ,
feninrum
il demanda après sa mort qu'on la lui et lunruiii sancta cnni'ersatio mellor.
sacrifiiU, afin qu'il en pût jouir aux Que dirai-je de ces deux vers de l'épi-
Champs Élyse'es (i55;. Il avait si bien gramme XLIV du livre onzième de
rae'rité en ce monde d'être nommé Martial ?
(i56) ipuTiito;, XTix-yn; , ÀnpnTMÇ., iptuTi-
Brrtcjt mnilutn quaim'is aversa jaceret,
xwTaiToç (157) , qu'on crut que même JEa<:i{lœ propior levis amicus eral.
dans l'autre il avait besoin de fem-
mes , et c'est pour cela qu''Ui l'y a ma- (i6i) Homer. Iliad. lib. XVI , vs. 628, 65i,
653 655.
rié avec !\Iédée et avec Hélène. Il fut
,

(162) în Conviv. tom. III , pag. 180, A.


accusé d'être devenu amoureux de (i63) In Conviv. pag. 89S J. ,

l'amazone Penthésilée , peu après lui (164) Sexl. Empir. Pyrrh. llyp. III , pag.
132 , //.
avoir ôté la vie et d'avoir assouvi sa
,
(i65) Pbiloslr. in Eprst. pag. goi , A.
passion sur ce corps de femme frais (c66) Lucian. in Amorib. pag. lo'-i , loin. I,
tué (i58}. Nous en parlerons dans edil. Salniuriensis.

l'article de Thersite *. Voj'ez aussi


l'article de Tenis. île du Pont- ACHILLE A,
(P) S'étaient répandues sur les per-
que l'on a nommée aussi Eiixin ,
sonnes de son sexe.'] Il y en a qui
l'île des Héros l'île Macaron (a),
veulent que Troïîus fils de Priam
,
, ,

soit mort étouffé entre les bras du ou l'île des Bienheureux Leu- ,

lascif Achille, qui le voulait violer, ce etc. était selon quelques- , , ,

et qui trouva trop de résistance (i5g).


uns, vis-à-vis du Borysthène, et,
On a donné un tour fort malin au
choix qii'Ajax suggéra à Ménélas il selon quelques autres , vis-à-vis
;

lui conseilla de faire porter à Achille du Danube. Le nom dH Achillea


par le bel Antiiochus la nouvelle de lui fut donné à cause que l'on y
la mort de Patrocle. Philostrate, qui
voyait le tombeau d'Achille {b) ,
dit assez clairement quelles pouvaient
être les liaisons du héros avec le mes- et qu'elle était consacrée à ce
sager choisi, s'est trompé sur l'auteur héros. Tlîétis ou Neptune la lui
du choix (160) car ce ne fut point
; donnèrent (c) , et il obtint les
Ménélas comme il le dit qui jeta les
, ,
honneurs divins temple , ora- ,
yeux sur Antiiochus ce fut Ajax qui j

cle , autel , sacrifices et ce qui


(i54) Homer., Iliad. lib. TX, w. 660.
(i55) Seneca in Troad. vs. g^S.
s'ensuit. Quelques-uns parlent
(i56) Libanins Progymn. pag. loi B, Pt
, ,
de cette île comme si elle avait
pag. Il'; , A ; Declam. IV , pag. 2J6 B ; el ,

Orat. IX , pag. 258 C. ;


été inhabitée , et s'il n'y avait eu
(157) Plutarcli. in Amator. pag-. ^Gi D. ,

(i58) Tzeizes in Lycoplir. Libanius , Progymn. (a) Plinii Hist. Natur. , lib. IV . cap. XII
pag. loi , C el pag. i53 , J.
; et XIII. P.iusan , lib. III, png. 102.
* Barle ria point donne d'article TaEKsnt..
{!>) Mêla , lib. Il , cap. VII. Scylax, p. 28.
(iSg) Servius in £neid. Lycophron, fs. 807,
el ibi Tzetzps. (c) Aiitor Peripli Ponti Eiixini o/>Ts. Vos-
(iGo) In Anti!, pag. 670, el Icon. p. 789, D. sio et/(<(/j , Ouinlus Galaber, subjin. lib. III.
ACHILLÉA. ,67
aucune sûreté à vouloir y passer cultivait alors avec d'autant plus
la nuit (d) c'est ce qui faisait que de soin le talent de la poésie dont
;

les gens qui y prenaient terre se Calliope l'avait gratifié (B)


,
qu'il
rembarquaient vers le soir, après n'eu était point détourné par
avoir vu les antiquités du lieu ,
des occupations belliqueuses. JI
le temple et dons qui avaient
les ajoute encore que ceux qui pas-
été consacrés à Achille. Ce héros saient auprès de ce rivage enten-
n'y était point seul les âmes de ,
daient une musique qui '

plusieurs autres héros y avaient donnait une admiration mêlée


aussi leur demeure (A) et quant d'horreur et qu'ils entendaient
; ,

à lui, il fallait bien qu'il y fut en aussi un bruit de chevaux, un


corps et en âme puisqu'il y épou- cliquetis d'armes et des cris com-
,

sa Hélène et qu'il en eut un fils me à la guerre. Maxime de Tyr


qui s'appela Euphorion que Ju- et Arrien ne disent pas des cho-
,

piter aima criminellement etsans ses moins surprenantes (C). Il


succès et qu'il tua d'un coup de ne faut point douter que ce ne
,

foudre pour le punir de son re- fût là qu'Achille fit le miracle


fus (e). D'autres disent qu'Achille dont Tertullien a parlé (D). Il

y avait pour femme Jj)higénie en fit bien d'autres dont celui


, ,

que Diane y avait transportée qu'il exploita contre l'impiété ,

après lui avoir communiqué le des Amazones (E) qui voulaient ,

don d'une immortelle jeunesse piller son temple ne fut jîas le ,

avec la nature divine (J^). D'au- moins éclatant. Celui qui con-
tres enfin veulent que la femme cerne le vol des oiseaux (F) a été
qu'il épousa dans l'autre monde mal rapporté par M. Moréri qui
,

fut la fameuse Médée (g) mais d'ailleurs nous fait un article à


;

la plus commune opinion lui don- part d'une fontaine Aciiillkf. (G),
nait Hélène pour femme c'est dans laquelle Acliille s'était lavé,
:

le sentiment que Philostrate et et qui avait une propriété mer-


Pausanias ont suivi (h). Le pre- veilleuse. Achille n'était pas le
mier raconte que si les étrangers seul qui fit des miracles dans l'île
qui abordaient dans cette île ne de Leuce Hélène sa femme s'en ;

pouvaient point faire voile le mêlait aussi {k) comme nous le ,

jour même , il fallait qu'ils pas- dirons dans l'article de Stesicho-


sassent la nuit dans leurs vais- RE *. L'abondance est ici plus nui-
seaux, ou Achille et Hélène les sible que la disette (H).
venaient voir , buvaient avec eux (/') Voj'ez la remarque (D).

et chantaient non — seulement * Cet article n'a jamais existé.

leurs amours, mais aussi les vers


(A) Les âmes de plusieurs autres
d'Homère (/). Il ajoute qu'Achille hcrns ym'aient aussi leur demeure.
(i). 3 C'est ce qui paraît, par un pas-
(çf) Amm. Marcell. lib. XXII , cap. VIII.
Vous trouverez ses paroles dans la remar-
sage de Pausanias, où il raconte que
que (A.). Lëoiiyme , général îles Crotoniates ,
(e) Ptol. Hephœst. apud Piiotinm, p. ^80. étant allé à l'île ilo Leucc pour y ap-
(/) Antoo. Libeialis, cap. XXVII. prendre le reinèile qui le £;iiériiait
(g) Tzelzes in Lycophr. schol. Apollon. d'une blessure, rapporta ((iiMl y avait
lib. IV. TU Achille, les deux Ajax, Patroclc ,
{h) Pausanias, lib. III, pag. 102.
[}) Philostrat. in Heroïc. (i) Dionys- PcricgcU
,,

.68 ACHILLEA.
Antilochus , etc. (2). m^ étonne poète
(7). C'est un témoin qui parle
Je
qu'Amraien Marcellin oublie cela dans fort clairement là-dessus.
1 endroit où il rapporte que cette île (C) Maxime de Tjr et Arrien ne
était un lieu dangereux. In hâc Tau- disent pas des choses moins surpre-
ricâ, dit-il (3) insula Leuce sine,
lia- nantes. 3 Celui-là dit qu'Achille de-
bilaloribus uUls Achilll est deàicata ; meurait dans une île proche du Pont-
în quam si fuerinl quidam forte dilati, Euxin à l'opposife du Danube , et ,

t'isis andquilatis i^estigiis temploque et quil y avait des temples et des au-
donariïs e.idein heroi consecratis i^es- tels ; qu'on aurait eu bien de la peine
,

peri repetiiiit naines aiunl eniin non à y descendre avant que d'avoir of-
,

sine discrimine t'itœ illlc quemquam. fert des sacrifices ; que l'équipage des
pernoctare. Peut-être aussi ignorait-il vaisseaux avait souvent vu Achille
cette particularité'. sous la figure d'un jeune blondinqui,
(B) Le talent de la poésie , dont Cal- avec ses armes d'or , dansait une dan-
liope V m'ait gratifié J] 11 y a des gens qui se guerrière: quelques-uns l'enten-
veulent que quand Plutarque rapporte daient chanter sans le voir; d'autres le
que Minerve la de'esse des sciences,
,
voyaient et l'entendaient tout ensem-
coula des gouttes de nectar et d'am- ble. Il arriva que quelqu'un s'étant
broisie à Achille qui ne voulait rien ,
endormi sans y penser dans cette île ,
manger il nous insinue que ce héros
,
fut éveillé par Achille et conduit ,

avait une science universelle. 'H 'AÔ»- dans une tente où on lui donna à
VÔt TOI 'A^JÀKfi VêJCTapÔç Tl H-O.) àw/îfc- souper. Patrocle versait à boire , et
0-ia.ç hiçcL'^i y.h vpoiTif/nivef) TfocfJi'v (4). Achille jouait de la lyre Thétis et :

JMiner^'a Ackillem nutrimenlum res- les autres Dieux étaient présens (8).
puentem neclare et anibrosid instillatis Arrien avait ouï dire , et le croyait
aluit. une des autorités em-
C'est que ceux qui étaient jetés sur cette île
ployées par Lorenzo Crasso (5) pour par quelque tempête , allaient con-
prouver (ju'Achille doit tenir rang sulter l'oracle d'Achille pour savoir
pai'mi les poètes grecs. Dans le langa- s'il leur était expédient de lui immo-

ge des pointes ce serait de la science


, ler la victime qu'ils choisiraient eux-
infuse , ou bien il n'y en aurait jamais mêmes au pâturage qu'en même ;

eu. Mais quoi qu'il en soit, les paro- temps ils consignaient sur l'autel le
,

les de Plutarque ne servent de rien à prix qu'elle leur semblait valoir que ;

prouver ce que Lorenzo Crasso en iii- si l'oracle rejetait leur proposition ,


1ère il s'agit là d'une véritable nour- ils ajoutaient quelque chose à ce prix
;

riture du corps, comme il paraît par le jusqu'à ce qu'ils pussent connaître,


XIX*. livre de l'Iliade d'où elles ont été par son acquiescement qu'ils avaient ,

prises. Homère nous conte que Jupiter atteint la juste valeur que cela fait
;

s'étant aperçu qu'Achille après la la victime se présentait d'elle-même


,

mort de Patrocle ne voulait ni man- au temple et ne s'enfuyait plus ;


, ,

ger ni boire, dit à Minerve de lui infu- qu'Achille apparaissait en songe à ceux
ser du nectar et de l'ambroisie dans le qui s'approchaient de lîle et leur ,

corps, afin qu'il ne mourût pas de faim. montrait le lieu qui était le plus com-

0« ViKTO-p Tt KO.) tt/Z/SfOC-l'oV êfSlTSIVMV.


mode pour l'abordage ([u'il se mon- ;

trait aussi quelquefois à ceux qui veil-


2t«.|ov h) ç-it'Sêo-iT 'ivA ju^ jAiv >.iy.lç
laient, etc. (9). Arrien trouvait cela
digne de foi entre autres raisons , ,
F.i neclarque et ambrosiam ainabilem
parce qu'Achille était mort jeune et ,
Instilla in pectora, ul ne ipsum faines occu-
pel(6). qu'il avait été extrêmement beau et ,

si constant en amour et en amitié


,
C'est à Philostrate qu'il faut recou-
qu'il voulut même mourir pour l'ob-
rir pour prouver que ce Héros a été
jet de ses amours a'c xst) l^tt'xoSa.viïi ,

(2) Pausan. lib. III, pa^. 102. iAêVS^i Toiç TrtLiS'iK'jii;. L'équivoque de ce
Ci) Amm. Marcel!. Ub. XXII, cap. VIII. dernier mot et la moindi'e réflexion ,
(4) Plutarcb. de Facie in orbeLunx, pag. g38-
edil- Paris, anno 1624.
sur le péril où il s'exposa afin de ven-
(5) Istoria de' Poeti Greci ,
pag. 6 , où il rap-
porte la version latine de Plutarque comme s'il (7) Pliilosir. Heroïc. in Achille, fol. Sig; et
in ^eoptol. fol. 338.
y avait aluit , et non alluil. Aluit est pour le
moins aussi bon. (8) Maximus Trjius , Oraiione XXVIl.
(G) Homcr. Iliad. lib- XIX, vs. 3.'(7. (r)) Arrian. in Periplo Poati Euxiiii.
ACHILLE A. 169
dePatroclc, suflirontiibien vrer la vue. Il est clair que cette Lis-
ferlamort
es "enspourmeltreArriennarmi ceux toire et relie que Pausariias (i4) et
qui élisent que la passion tle ces deux Coiion (i5) racontent sont la même
personnes passait l'amilie (10). Voyez quant au fond mais , dans Pausanias, :

c'est Ajax, fils d'Oïléus, qui blessa Léo-


la remarque (P) de l'article Achille,
et qui le guérit. Dans Conon ,
et ci-dessous (11) l'une des merveilles nyme
qu'Arrien a débitées. C'est celle de ces ce n'est point Léonyme qui fut
blessé

oiseaux qui balayaient chaque jour le et guéri par cet Ajax mais Autolëon. ,

temple de l'île d'AchilIéa. l'y a quelques autres diversités que je


(D) Le miracle dont TerluUlen a ne remarque point me contentantde ,

parlé.'] Tertullien , comme le remar- conjecturer


que le Cléonymc de Terlul-
que M. Moréri nous apprend qu'A-
,
lien estvenu de ce Léonyme. Au reste,
chille guérit en songe un athlète nom- l'auteur cité par Léon d'AUazzi (iG)
mé Cléonyme (12) : c'est-à-dire , très- dit une chose que |e ne dois pas ou-

gnait .^ . A ; •

se sert de ce fait et de plusieurs au- cations, que ce héros se montrât a lui;


très semblables contre les épicuriens mais il se fit voir environne de tant de
qui ne voulaient reconnaître rien de lumière, qu'Homère n en put soutenir
surnaturel dans les songes. Cette aven- l'éclat. Il fut non-seulement ébloui

ture n'est guère connue car on n'en ;


de cette vue, mais aussi aveugle,
trouve rien dans un grand nombre (E) Celui qu'il exploita contre l'im-
d'auteurs qui ont amplement parlé piété des Amazones. ] Qu'il me soit

d'Achille. Pamélius dans son cora- , permis de conter le fait selon la ver-
mentaire sur Tertullien, ne fait que sion de Vigénère elle a ses grâces et
:

nous renvoyer à Homère qui autant ,


, ses agrémens , quoique en vieux gau-
qu'il m'en peut souvenir ne parle , lois. Voici donc comment parle cet
Îoint de ce songe. Un passage cité par auteur après avoir dit que les Ama-
,

éon d'AUazzi (i3) donne quelque zones firent faire des vaisseaux pour
jour à ce fait il porte que Léonyme
: , aller piller letemple d'Achille. Es-
général de ceux de Crotone dans la tant abordées en L'isle , >\'\X.-i\ {i']) , la
guerre contre ceux de Locres fut , première chose qu'elles firent Ji/t de
blessé sans savoir par qui en atta- , commander à ces cstrangers de l' Hel-
quaut une partie des troupes ennemies lesponte d'aller coupper tous les ar-
qui ne se retranchait jamais, parce bres plantez en rond aultour du tem-
qii'ou la consacrait aux héros dont , pie : mais les coignées se venans rem-
on croyait que la protection lui devait barrer contr'eux mesmes les extermi-
suffire ; que ce général ne pouvant nèrent là sur la place , et tombèrent
guérir consulta l'oracle de Delphes , tous roiddes morts au pied des arbres.
qui lui apprit qu'Achille qui l'avait El là-dessus les Amazones s'estans
blessé le guérirait aussi que sur cela, ^
espandues à l'entour du temple, se
il fut à l'île de Leuce faire ses prières; mirent h vouloir presser leurs montu-
qu'il vit en dormant quelques héros ; res ; mais Achille les ayant regardées
qu'Achille fut celui qui le guérit que félonneusement et d'un mauvais œil,
;

les autres lui ordonnèrent de faire sa- de la mesme sorte que quand de-
voir aux hommes certaines choses; et i/ant Ilion il s'alla ruer sur le Sca-
qivHélène en particulier le chargea de mandre , donna un tel espnuuante a
dire à Stésichorus qui était devenu leurs chewaux , que ceste frayeur se
,

aveugle pour avoir écrit contre elle ,

(i4) Pausan. «.&.///,?«?. 102.


qu'il
^ se rétractât s'il voulait recou-
(i5) Pbot. Blblioll). codice 186, narrât. 18.
,„ , .,«•/•-, f^oreï Méîiriac, sur les Épitres d'Ovide, pag-
(.0) Quelques savans ont pense au Arj,enfaU ^^ ^.^ .^ _.^,._,^ nuelques he^ues faites par V .-
telof:e d'Adonis , sous le nom d Achille afin ',^^ ^^^^ ^^ passage de Pauwnias.
défaire sa cour a l empereur Adrien. Voyez 8 °
nomme
no,„m Hermias
nerraïas r'que
le passage
Casaubon. in Spartianum , Vit. Hadnan. , cap.
Xir, et Tristan Comment, historiq. to,n. 1,
y°>
,\[,^
Lé"" iVkW^ZT^ en rapporte
:
.

est tire J '


„ J>
"
,

meninire in Phaîdrum Platonis ,


.^J"
ne" «"'P'""'"-
rfnnVHadrien
(17; Pl"lostrate dans /«
Néoplolème de latra-
(, Dans la remarque (F). eUi-
duct. de Vigénère , loin. Il fol- 34i de l
(12) Tertull. Lib. de Anima , cap. XLVI. ,

(i3) Allatius , de Palriâ Horaeii , pag. i45. tton in-^.


,

ACHILLE A.
retrowa assez plus forte que la brid- avis in Ponti insuld qud sepultus
de si que se cabrans ils rebondirent
, est Achilles sacratam ei œdem (i8).
,

en arrière, eslimans que ce qu'ils por- C'est-à-dire les perdri.v ne volent pas
,

taient sur leur dosfust une charge ex- au del'a des Jroniières de la Béotie
traordinaire et estrange ; et a guise de dans l'Attique ni aucun oiseau ne ,

testes saui'ages se retournèrent contre vole au delà du temple d'Achille qui ,

leurs cavalcalrices , les jettans par ter- est dans une île du Pont-Euxin. M. de
re et fouUans aux pieds, les creins hé- Saiimaise prétend qu'il faut enten-
rissez de la furie où. ils estaient et les_ dre par ces paroles qu'aucun oiseau
oreilles dressées encontremont ainsi , n'élevait jamais son vol au-dessus de
que de cruels lyons les desmembroient ce temple et il prouve, par un passa-
\

à belles dents et leur dévoraient bras ge d'Anfigonus Carystius qu'on dé- ,

et jambes faisans un fort piteux car-


,
bitait cela anciennement ( 19). Et
nage de leurs entrailles, ylprès dan- comme d'ailleurs il prouve par un ,

ques qu'ils se furent saouliez de cette passage formel d'Arrien , que les oi-
chair, ils se prindrent a bondir etàga- seaux entraient dans ce temple tous
lopper à trai'ers l'isle pleins de rage les matins afin tî'y faire tomber l'eau
,
,

et forcené rie et les babines teintes de dont ils s'étaient mouillé les ailes
, et ,

sang tant qu'ils pan-'indrent au hault afin de balayer ensuite le temple avec
,

d un cap, d'où, descou^^rans la marine leurs ailes (20) il insulte Solin pour , ,

applanie en bas et cuiddans que ce


,
avoir dit qu'aucun oiseau n'entre dans
fust une belle large cauipaigne ils s'y le temple d' Achille et que s'il arrive
, ,

jellèrent a corps perdu et ainsi péri- a quelqu'un de s'en approcher , il s'en


rent. Quant aux l'aisseaux des Ama- éloigne au plus vite tout aussitôt.
zones un impétueux tourbillon de
, M. de Saumaise veut que Solin n'ait
vents estant uenu donner a travers ,
rien qu'il n'ait emprunté de Pline
d'aidt'int mestnes qu'ils estaient vuid- et que celui-ci ait dit la même chose
des et destituez qu'Àntigonus Carystius
de tout appareil pour mais il est ;

les gouverner , plus vraisemblable que Pline n'a point


venaient à se frois-
ils
ser l'un contre l'autre ny plus nf eu en vue la pensée d'Antigonus Ca-
,

moins qu'en quelque grosse rencontre rystius et que Solin avait lu ce fait ,

navalle, dont ils se brisaient et met- ailleurs revêtu de circonstances plus


taient a fonds spécialement ceux qui particulières que celles de Pline. Car
,

estaient investis et choquez en flanc de quelle néslicence ne serait-ce point


droit fil par les espérons et proues des a ce dernier , si pour nous taire con-
,

autres , comme il advient ordinaire- naître que les oiseaux ne volaient


ment en des vaisseaux desgarnis de jamais au-dessus d'un temple il s'é- ,

leurs conducteurs , de manière que le tait servi d'une expression qui signifie
bris de ce naufrage se venant rencon- qu'ils ne volaient jamais au delà ? Ces
trer vers le temple où. il
y avait force deux choses sont si peu la même, qu'il
personnes 'a demy-martes respirantes n'y a rien de plus aisé que de ne pas-
encore, et plusieurs membres horrible- ser jamais par-dessus une maison et ,

ment dispersez c'a et l'a avec la chair néanmoins de la laisser derrière soi.
que les chevaux inaccoutumez 'a telle 11 n^est pas plus difficile de s'élever en
posture avoient rejettée, ce lieu sainct volant jusqu'au-dessus d'une maison
,
devait estre bien prophané mais sans passer plus outre. De plus les
: ,

.Achilles l'eut bientast purgé, réconci- anciens aimaient si fort à diversifier


lié et expié comme il estait aisé a faire les miracles qu'il n'est guère appa-
,
en une isle de si peu d'eslenduè où les
(18) Plinii Hist. Nat. lib. X, cap. XXIX.
flots battaient de toutes parts h l'en-
(iC)) Salraas. Exercil. Plinian. in Solin. cap.
viron si qu Achilles y ayant attiré
,
XiX pag. 21 5. ,
le sommet des ondes tout fut lavé et ,
(20) In Peripio Ponti Euxlnl. Pbilostrale a
nettoyé en moins de rien. du à peu près la tnetn/^ chose. En celte isle ,

(F) Celui qui concerne le vol des oi- { selon la traduction de Vigénère toni. II fo- , ,

seaux. ] Ce que More'ri fait dire A lio 33*^ verso de l'édition in-^. ) il y a , certaine ,

engeance d'oiseaax tous blancs mais aquatiques ,


Pline , qu'on n'y voit point voler d'oi- et sentans leur marine dont AcUille se sert à ,

seau est mal rapporte. Voici les pa- nestoyer son ?acré bosquet le ballians de réven-
, ,

et Tarrousans de leur
roles <le Pline Perdices non transvo- tenient de leurs aisles
:
,

pennoge mouillé d'e.ift de raer car ils volletent ;

lant Bœotia'fines in Atticd, nec ulla pour ccst efl'ect un bien peu soub'levez de terre.
,

ACHILLÉA.
rent après ce qu'on débitait dés le
, tation si cette fontaine s'appelait 'A,;^"^"
temps d'Antigonus Carystius , qu'on Xîiov substantivement ou adjective-
ait attendu jusqu'à Solin à débiter ment et si elle ne peut pas entrer en
,

que les oiseaux s'enfuj aient à la vue son ordre alphabétique avec autant de
lu temple d'Achille. Quoi qu'il en raison que les îles d'^cfiilléa. Elle
y
soit, on ne pourrait pas prouver, par entre dans leTrésor géographique d'Or-
^' .-
Pline contre Solin
^ que les oiseaux y
.
,
1
• télius (aS), sousle mot^cAi7/a?um, et
entrassent et en tout cas M. Moréri
; , , puis sous le raot Achillius fons ; ce
fera dire à Pline plus qu'il n'a dit , et qui, en tout cas , vaut mieux que l'A-
se sera laisse tromper j ar ces paroles chillea ^fons Miteti, de M. llolman.
de Charles Etienne dans les deux édi- Je n'examine point si Freinshemius
tions ci-dessus cotées (^i) , AchilUs a bien expliqué le passage d'Athénée
insnlam. nulla nuis tnmsuolat. Plin. qui regarde les singularités de celte
10. 29. 10. Mais il prendra sa revanche fontaine (26). Je me contente de dire
avec usure sur M. Hofman qui attri- , qu'au moins on devait citer Athénée
bue la même chose à Sirabon aussi. comme Freinshemius l'a cité , c'est-à-
C'est sans doute pour avoir vu que dire au VI^. chapitre , et non au IP.
M. Moréri citait Strabon immédiate- du W. livre. M. Hofman cite comme
ment après Pline , et pour n'avoir M. Moréri et ils avaient été précédés
,

pas pris garde que cette citation de en cela par Ortélius. C'est peu de cho-
Strabon avec celle de Pomponius
, se si on le compare avec l'erreur de
Mêla qui la suit se rapporte à d'au-
, , nous donner Aristobule fils de Cas- ,

tres choses contenues dans l'article. sander au lieu d'Aristohule natif de


,

JXullam lue auem vnlare ( dit-il ) , Cassandrie. C'est ce que fait M. ^loréri.
Plin. l. 10. c. 19. habel et Stiabo On ne saurait trop se plaindre de la
l. i3 (2a). négligence de ceux qui font des addi-
(G) Un article a part d'une fontaine tions aux dictionnaires 5 car bien sou-
AcHiLLÉE. ] Cet article m'avait paru vent ils y cousent des choses qui sont
d'abord un sujet à critiquer il me : contraires à celles qui y sont déjà et, ;

semblait que cette fontaine ne s'appe- en général ils oublient d'accommo-


,

lait pas ainsi en nom propre substan- der de telle sorte l'addition au fond
tif ou substantifié ; mais , en épithète sur quoi ils la jiosent qu'il n'en ré- ,

ou en nom adjectif, commun à toutes sulte point de dissonance :

les choses qui appartiennent à AchiUe.


Pritno ne médium , medio ne discrepet
En un mot Jons Achilleus , et fon-, imuin (27).
taine d'Achille, me semblaient la mê-
me chose. Or , comme il serait ridi- Par exemple , ceux qui ont augmenté
cule de faire un article de Jacobée le dictionnaire de Charles Etienne ,
pour Celte fontaine de Jacob dont il n'ont point fait difficulté d'y fourrer,
est parlé au chapitre IV de saint Jean soi'.s le mot Achillea, ces paroles d'Or-

(23) , laquelle un traducteur latin télius toutes crues et sans le moindre


pourrait appeler, s'il voulait, fonleiii changement P'ideo a JVebrissensi
:

Jacobœum il me semblait aussi qu'on


,
Caceariani , et a Carolo Slephano
n'en de\ ait pas faire un de l'épithète Cacariuni in suis dictionariis poni ,
(^ Achilltus , dont Freinshemius se sed pro Ponti insulâ , quant dicwit
sert en parlant de la fontaine d'A- apud Mêlant Collisaria dici , ex de-
chille. JJais , après avoir consulté prauatdforte lectinne etc : ce qui fait ,

Athénée (24) , j'ai trouvé que cette un sens assez singulier; car c'est faire
critique serait douteuse , parce qu'il parler Charles Etienne de son propre
m'a paru qu'on peut mettre en contes- dictionnaire dans le dictionnaire mê-
me comme si c'était un autre ou-
,

(21) Dans ta remarque(L) deVarticte Acaii.L%i


vers te milieu.
vrage qu'il citiU et encore paraît-il :

(22) Hofiuan. f^oce Âcbitle.i. incertain en se citant de ce qu'il avait


("ii) Ceux qui traduisent , il y avait là xïne avaticé sac; nulle marque d'incerti-
fontaine de iacob , feraient mieux de dire, la
tude dans l'endroit qu'il cite.
fontaine de Jacob était là ou , comme le Port- ;

Boral , il y avait là un puits qu'on appelait la (H) L'abondance est ici plus nuisible
fontaine de Jacob.
(î.t) Edit. Hano^'. ann. iGii , ir-^.
(24) Ev MlXrtT» KfHVHV êivai 'A^/xxêiov
(26) Freinsbem. Supplem.iuQ. Curt. 2, 7, 2.^.
XXh'yjfAiim. Alhenfeui, lib. II, cap. VI. 127) Iloral. lie Arte poët. is. l52.
, .

172 ACHMET.
que la disette. ] Si Ton rencontre dans pour soa polaire , en faisant vo-
e'toile
cel ouvrage le récit de plusieurs pro guer la de ses marchandises
flotte
diges et de plusieurs traditions mira- (Sa) ,deux maximes que j'ai rap-
les
culeuses, ce ue sera pas un signe que portées. Nous verrons dans !a remar-
je veuille les faire passer pour ve'ri- que (Q) de l'article de Pyrrhus , roi
itables ; je ne crains point les délateurs d Épire une fausseté de Camerarius
,

de ce coté-là si c'était mon inteution,


: touoliant un prétendu miracle de no-
je n'en rapporterais que très-peu. Je tre Achille.
sais bien qu'en ces sortes de matières,
(32) Quartier pour la dureté ou . SI l on
la crédulité est la source de la multi- veut , le galimalhias de celte Ji%ure.
plication et qu'il n'y a point de meil-
,

leure pépinière que celle-là (38 mais .;


ACHMET , fils de Seiri'm. Ou
enfin , on en abuse avec tant d'ex-
a un de sa façon qui con-
livre
cès,qu'on guérit tous ceux qui ne sont
pas incurables. La crédulité est une tient l'interprétation des songes,
mère que sa propre fécondité étouffe selon la doctrine des Indiens, des
tôt oi/tard dans les esprits qui se sei- Perses et des Éevptiens. Il fut
vent de leur raison. Il aurait été de . j •+ j ^^
traduit du grec en latin.,^-i>uvfn
1

IV j j , environ

' A.
linteret des1
païens qui ont* voulu dei- 1
o •-

fier leurs héros , de ne leur attribuer 1 a» HO»


par Léon Tuscus [a]
, ,

que peu de miracles la maxime tt^jov


: qui le dédia à Hugues Echérien
iyxo^u ff«Tk , dimidiwn plus toto , et r^). Ou le publia en
latin , l'an
cette autre, «eo/af/niffiis, étaient ici r ^7\ -1 r ^
' - ^ 1 077 [o) , sur un manuscrit fort
de saison. Ceux qui ont 'tant multi-
plié les saints suaires, les images de mutilé qu'on trouva dans la bi-
la sainte Vierge faites par saint Luc bliothèque de Sambucus (c) mais ;

les cheveux de la même sainte, les


on donna comme un ouvrage
le
chefs de saint Jean-Baptiste les mor- ,

ceaux de la vraie croix et cent autres d'Apomasares(6?). Le docte Leun-


,

choses de cette nature, devaient aussi clavius fit savoir lui-même cette
songer à ces deux maximes ; car , à méprise au public dans ses An-
force de redoubler la dose , ils ont
nales des Turcs (e). M. Rigault
énervé leur venin , et ont fourni tout
est le premier qui a publié cet
à la fois le poison et l'antidote ipsa :

sibi obstat magnitudo (29). Achille, ouvrage en grec. Il le joignit, à


dans l'île de Lfuce , a eu la même des- cause de la conformité des ma-
tinée qu'en allant à Troie les mêmes :
tières , avec l'Artémidore qu'il fit
miracles qui ont pu tromper les lec-
teurs , les ont pu détromper ; comme imprimer à Paris en l'année i îoS (

!a même lance dont il avait blessé Il ne changea rien à la traduc-


Télèphi; , lui fournit l'emplâtre qui tion latine de Leunclavius , et ne
guérit parfaitement la blessure.
fit point de notes sur le texte (/").
y^ulnw in herculeo quœ quondam feceral hoste,
Il croit qu'Achmet fils de Sei- ,
Vulneris auxilium Pelias hasla lulil (3o).
^rsus et ^moriid juvenis qud curpide vulnus rim n'est point différent de ce-
,
Senserat, hdc ipsd cuspide sensilopem (3i).
lui dont Gesner a fait mention.
Mais je ne songe pas que le nombre de Celui de Gesner était fils d'Ha—
ceux qui se desabusent par la multi- bramius et médecin , et a com-
plication des prodiges est si petit en ,
posé un ouvrage divisé en sept
comparaison de ceux qui ne se désa-
busent pas que ce n'est pas la peine livres , et intitulé Peregrinan-
,

de changer son train et de prendre


(a) Bigallii Prsef. libriAchmetis.
(28) Prodigia eo anno multa nunciala <unt , (b) Leunclavius à Francfort in-^.
, ,

gttte qub rnagis credebant siinplices ac religiosi (c) Bartliius Advers. lib. XXXI, cap.XIV.
,

hûmines , eo eliain plura nunciabantur. T. Li- {d) Id est Aburaasher seu Albumasar. f^ide
Tius, lib. XXXiy, cap. 45. Catal. Oxoniens. pag^. 35.
(20)) Florus in Vroœm.
, (c) Rigaltii Pr^f. in Achmet.
(3o) Ovid. Remed. Amor. v.t. ^-. , (/') On le dit pourtant dans le Catalogue
(3i) Propert. lib. Il Elcg. I.
, vs. , ù\. d'Oxford pag. 5. ,
ACHMET. j-j-i

tiiim viaticn qui était en grec ,


qu'on n'avait point traduit à la
dans la bibliotliéque de don Die- lettre, et qu'on avait retranché
gue Hurtade de Mendoza , am- bien des clioses. Ce qu'il y a de
bassadeur à Venise de la part de considérable, c'est que le nom
l'empereur, lorsque Gesner com- d'Achmet et celui de Seirim sont
posait son livre (g). Jean-Antoine au titre du manuscrit avec ceux
Sarrazin possédait le même ou- de SjTiiacham de Darani et de ,

vrage (/z) comme il l'assure dans


, Tarphan. Le premier de ces trois
ses notes sur Dioscoride. Les deux derniers personnages {m) était
exemplaires grecs de la bibliothé- interprète des songes à la cour
que du roi de France , sur les- du roi des Indes, et le second l'e-
quels M. Rigault publia le livre tait à celle de Saanisan , roi de
des Songes, ne portent point que Perse ; et le troisième à celle de
l'auteur se nommât Aclimet, fils Pharao, roi d'Egypte (n). Bar-
de Seirim. Il est vrai que, com- tliius conjecture de là qu'Ach-
me le commencement y man- met et Seirim étaient aussi deux
que, on peut soupçonner que, interprètes de songes dans quel-
lorsqu'ils étaient entiers , le nom que cour barbare. Quoi qu'il en
de cet auteur y paraissait à la soit, l'ouvrage a été compilé par
tête. Mais enfin ce ne sont que un chrétien , car l'auteur le com-
des conjectures qui peuvent être mence au nom de la Sainte Tri-
fortifiées par une autre considé- nité(o). M. Rigault ne i^egarde le
ration : c'est qu'on a écrit d'une texte grec que comme une an-
main plus fraîche le nom d'Ach- cienne traduction de l'ouvrage,
met sur l'un des deux exemplai- L'original était en arabe,
res. Ce nom ne paraissait pas Lambécius fait fleurir Achmet
dans l'exemplaire dont Léon Tus- au IX". siècle à la cour de Ma- ,

cus se servit au XIP. siècle pour moun , calife de Babylone. M. du


faire sa traduction : c'est ce qu'on Cange n'est pas de ce sentiment,
infère de la version italienne que Voyez son Glossaire grec , au mot
l'on a de cet ouvrage composée MaaoOv. ,

par Tricasso (/). M. Rigault en ^a « , i. i . . , ..


^ . , ,
'
1? 1 , ('«) Syrbacham, jn e^i/ione Rigaltii.
»

a tire le prologue , et a donne („) Cda pamU par h commencement du


1

en latin , quoiqu'il estime que ce t^'- '^" ''''• du iy<:. chapitre du livre. < <='

n'est point Achmet même, mais (°) ^"•>'" ^''^" '^'^ "'"'P- "
Léon Tuscus qui l'a composé {k). (A) Hugues Échérien. ] Barthius le
Barthius avait la traduction de nomme Uugonem Eleriarium et dit ,

ce Léon et il croit que son exem- ^ue c'était un excellent auteur, scrip-
,

1 r

\
4-
plaire tut écrit au temps m.eme
' * torem œi'o suo luculentum (i). Il v
"4, * a

\ , 1 r,
f
une laute dr impression dansj /> .i
Barthius
t •

de ce traducteur (/J. Les echau- aussL-bien que dans ces paroles de


tillons qu'il en donne font voir M. Rigault Rugoni Echeriano dedi- ,

cat'il. Il fallait dire Hugonem Eteria-


(g-) Gesn. Bibliolli. yb/io 2, verso. num , Hugnni Eteriano. Allatius, au
(A) Ri(,'aU. Pr;ef. ira Acliraet. chapitreXI dulivre II </e /'er/;er«o co«-
(t) Palrice Tricasso des C resars ,
ifTan- sensu Ecclesiœ Occi/lentalis et Orien-
Juan. ^qxe5 /a Bibliothèque de Du Verdier. lalis , écrit mal Hugo JE therianus.
P^S- 940- Baronius , Bellarmin , et plusieurs au-
'
(A) Ex Prafal. Rigaltii. ' ^

\i) Bartbii Advtrsar. lib. XXXI, cap. XIV. (i) B«rtb. Adrerj. llb. XXXI , cap. Xir.
, , ,,

1^4 ACIDALIUS.
très écrivent Hugo Etherianusj mais (c). On lui avait imputé un à tort
Eterianus est plas correct. C'est le petit livre (G) qui fut imprimé
nom d'un auteur ecclésiastique du l'an i5i)5,dont le sujet était que
XIP. siècle. Ceci m'a été communiqué
par M. de la Monnaie. les femmes ne sont pas des ani-
maux raisonnables , mulieres
ACIDALIUS (Valens) aurait non esse homines *. J'ai lu quel-
été un des bons critiques de ces que part qu'il était médecin (H)
derniers siècles si une plus Ion— et qu'il aurait fait des notes sur
gue vie lui eût permis de porter Aulugelle s'il avait encore vécu
à leur perfection les talens qu'il quelque temps {d). Il paraît par
avait reçus delà nature {a). Il na- ses lettres qu'il avait travaillé sur
quit à Wistoch , dans la Marche Apulée. M. Baillet l'a inséré par-
de Brandebourg ; et , ayant vu mi ses Enfans célèbres, ayant dit
diverses académies d'Allemagne qu'^7 travaillait sur Piaule à dix-
d'Italie, et de quelques autres sept om dix-huit ans , 5rt/?5/?<7/7er
pays , où. aimer (A) , de diverses poésies latines que
il se fit fort
il s'arrêta à capitale de nous avons de lui, et qui sont de
Breslaw ,

laSilésie. Il y attendit assez long- même temps. Un de ses premiers


temps quelque emploi mais , ouvrages imprimés est le Vel- ;

comme rien ne venait, il passa leius Paterculus , qu'il publia à


dans la communion romaine et Padoue l'an iSgi. Il dit lui— ,

y trouva bientôt le rectorat d'une même qu'il eut honte de ce fruit


école (B). On dit qu'à peine qua- précoce de sa plume (e), et il s'ê-
tre mois furent expirés qu'il lui tonna qu'on eût voulu le réim— ,

arriva un accident tout-à-fait primer en France (y). Lipse, qui


étrange. Il suivait une procession lui écrivit quelques lettres rem-
du Sacrement et il tomba plies d'estime et d'amitié ig) le
saint , ,

tout à coup en frénésie. On le regardait comme un grand hom-


porta chez lui , et il mourut bien- me à venir. Jpse Valens ( non
tôt après. Quelques-uns dirent te fallam augur) gemmula erit
qu'il s'était tué lui-même (C). Ce Germaniœ vestrce vivat modo. ,

fut dommage car il avait de l'es- C'est ce qu'il écrivit à Monavius


;

prit, et il travaillait beaucoup


(c) Koyez la remarque (D).
Cette grande application fut la * 3. C. Leuschncr a publié De Valentis :

cause de sa mort si nous en Acidalii vitâ, moribus et script commenta tio;


,
is

croyons M. de Thou {b) qui dit Leipsic i^Sy.in-S"., où il cherche à prouver


,
,

que V AcidaliHS n' est pas atileur de V ouvrage .

que pour avoir trop veillé en qu'on lui attribue et dont il existe une tra-
, ,

composant ses Divinations sur duction française par Querlon sous le titre ,

de Problèmes sur les Femmes, i']l\l\, in-12;


Piaule (D) il devint sujet à un et une traduction libre par Clapiès sous
,
,

mal (E) qui l'emporta dans trois le titre de Paradoxes sur Jes Femmes , etc.
in-i2.
jours 25 de mai iSgS. Il ne
, le l'j&i ,

Nisi juveni illi fala quietem misera-


faisait que commencer sa vingt-
{d)
hililer properassent. Sciopp. de Arte Critic.
neuvième année (F). Nous avons pag. 18.

plusieurs ouvrages de sa façon Val. Acidal. Epistolar. p. 70, 78, 127.


(e)

(/)Val. Acidal. Epistolar. /Ja^. 160, 161,


(a) Adolescens summœ spei et enidilionis. 209 255.,

Thuan. Hist. lib. CXIII pag. 687.


,
(g) La X'. et la XXFI". de la Centuria ad
{b) Ibidem. Ital. et Hisp..
ACIDALIUS
en 1 594 comme on le peut voir de obitu ipsius sparsit propagare por-
, ,

rà in exleras
au commencement des letti'es nare imà etiam regiones et propug-
, nescio quas non tragœdias
d'Acidalius. etiam in concionibus ad plebem ubi ,

regnare soient, excilare non erubue-


(A) Où ilse fît fort aimer.'] Par le runt (6). 11 ne nie point que son frère
commerce de lettres qu'il entretenait n'eiit eu des transports au cerveau qui
avec Vincent Pinelli, Jérôme Mercu- bouleversèrent sa raison: Grai'issimum
rial Antoine Riccobon Ascai^ne Per-
, ,
illudfebrium acutarum symptoma pa-
sio etc. on peut voir la considéra-
, ,
raphrenitidem aliquotiessensU quod
tion qu'avaient pour lui les illustres extremum tiialorum animam etiam
,

d'Italie il avait demeuré trois ans en


:
sud sede ejecit (7). Mais il soutient que
ce pays-là (i).
de très-habi!es médecins et la fa-
(B) Le rectorat d'une écoZe.] C'est
,

mille de M. Wacker, chez qui Valens


Larthius qui l'assure Rector scholœ :
était malade , l'assistèrent jusqu'à sa
Neussanœ jactus dit-il (2). Je crois ,
mort. 11 n'y a peut-être rien sur quoi
qu'il fallait dire Neissanœ ou Nissa-
la fabuleuse renommée débite plus de
nœ. rseisse , qu'Acidalius nomme tou- mensonges que sur les maladies et sur
jours Nyssa dans ses lettres , est à trois
la mort des hommes illustres : c'est
ou quatre lieues de Breslaw. L'évêque pourquoi prédicateurs , et en géné-
les
de ce nom y réside (3). Celui qui l'é-
ral tous les moralistes , devraient être
tait alors avait pour son chancelier
extrêmement réservés à faire des ré-
Jean Mathieu Wacker, qui aimait les
flexions là-dessus. On ne saurait se dé-
sciences et les savans. Il fit venir Aci-
fier autant qu'il le faut de la téméraire
dalius à Neisse, et le logea chez lui.
crédulité ou de la malice artificieuse
Voyez les lettres d'Acidalius (4). Je de ces sortes de nouvellistes.
n'ai point remarqué dans celles qu'il
(D) Ses Divinations sur Piaule."] Il
a écrites de ce lieu-là qu'il ait jamais
eut d'un côté le plaisir de les voir an-
fait mention du rectorat de l'école.
noncées dans le catalogue de Franc-
(C) Qu'il s'était tué lui-même (5).]
fort (8) et de l'autre le déplaisir de
,
Christien Acidalius frère de Valens, ,
faire cent plaintes contre la lenteur de
n'a pas osé franchir le mot quand il
son libraire. En un mot , elles ne pa-
s'est plaint des calomnies qui avaient
rurent qu'après sa mort. Barthius fait
été répandues touchant la mort de son
cas de cet ouvrage. Pauci, dit-il (g),
frère j mais il ne faut plus douter,
eum comici locum assecuti sunt so-
après ce que Barthius avait écrit dans
lus ./acidalius rectum sensum percepit,
un de ses livres , que le sujet de ces
ut alia multa in comico. M. Teissier
plaintes ne fût bruit que l'on fît
le
dit qu'on estime fort le Commentaire
courir qu'Acidalius s'était tué chose :
d'Acidalius sur Quinle-Curce (10). Il
qni ût bien pousser des exclamations
le dédia à l'évêque de Breslaw, qui l'en
en chaire. Voici comme parle Chris-
récompensa bien , comme les reraercî-
tien Acidalius, après avoir dit que son
mens le témoignent dans la LXXXIX''.
frère fut enterré pompeusement: Ul
lettre de l'auteur. Il fit des notes sur
mirari satis nequeam calida muUorum
Tacite, sur les J^II panégyriques, et
in judicando niniiiin prœcipitnntiuni
sur P^elleius Paterculus ,' outre des
et temerariorum ingénia , qui et ipsius
harangues des lettres et des poésies
,
morbi et Inci etiam sœpè ignari, quic-
(1 1). Ce dernier ouvrage, inséré dans
qiiid nialedicendi libido dicla^'it , l'el
les Délices des Poètes allemands, con-
jCama quœ
tient des vers épiques , des odes et des
Tatnjicti prai.'ique tenax quant nuncia veri , épigramraes que Borrichius ne trouve
que médiocres (12). Sa dissertation
(i) Valens Acidal. in Epist.pag. 20g, 2i5. ,

(2) ^pud Konigii Bibliotli. pag. 6. (6) Clristian. Acidalius in prœf. Epist. Va-
(3) Ni^sa. ad jluvium cognoininfm , epi'copi lentis Acidalii , Hanoviœ editarum anno , i6o6-
JF^ratiflafiensis sedet. Banc, in Cluverji Introd. (•;) Id. ihid.
lib. III cap. XIII, pag. 196, edit. Ainsi,
,
Valens Acidal. Epist. pag. 317 , 326.
(S)
anno 169-. Statium , tom. I , pag. 239.
(9) Barlh. in
(4) Pag, 228 , 3i8. (10) Teissier, Eloges tirés de M. de ïhou,
(5) Barthius ar/zi£ écrit cela de sa main sur tom. II pag. 2i5.
,

son exemplaire des Poe'sies (i'Acidalius. Vojfeu (11) Là même.


Konigii Biblioth. vet. et nOT. pag. 6.
(12J Borrich. Liissert. de Poet. pag. 12Î.
,

.76 ACIDALÎUS.
de Constitutione Carminis Jilegiaci entre les mains un écrit que plusieurs
plaît à Barthius (i3). personnes avaient déjà fait copier :

deuint sujet a
(E) Il devint un mal.2 M. de c'est celui dont il est ici question,
question. II
Thou n'explique point quelle était le lut^ et l'ayant trouvé plaisant il
, ,

cette maladie ; mais on apprend d'ail- le copia et l'ofl'rit à son libraire com-
,

leurs qu'Acidaliuss'e'chaiiiià tellement me une copie lucrative. Il ne l'exhorta


le sang lorsqu'il employa trop de veil- pas néanmoinsà la mettre sous la pres-
les à commenter Plante , qu'il fut su- se on crut sans doute qu'il sufîisait
:

jet depuis ce temps-là à des fièvres de lui dire qu'elle pourrait le dédom-
chaudes. Voici comme son frère en mager du uiauvais débit de Quinte-
parle Uratislai^lœ
: quœ Sdesionim
,
Curce : mais on
lui déclara que c'é-
inetrnpolis, per sesquiannum phis mi- tait à lui à voir ce qu'il voulait faire
nus ulrumque se ?nUii prœstitit ( prœ- là-dessus, et à bien examiner si les
cejitorem et patrem ) ^ donec indè IVvs- railleries trop libres de la pièce ne le
sam euocalus Jàntiliari morbo suo commettraient pas. Cela ne refroidit
quem ex nintiis uigiliis in adoniandis point le libraire : il se hâta d'impri-
PLaulinis Dn^inalionihus suis con- mer. On cria terriblement contre la
traxerat , bdiosi alihs etiatn habitiis dissertation on le mit en justice et,
5 :

ju^enis , febri scilicet acctissima oppri- parce qu'il avoua d'où la copie lui
merctur (i4)- H fut grièvement ma- était venue on se déchaîna d'une ma-
,

lade plus d'une fois en Italie et il , nière épouvantable contre Valens Aci-
écrivait à ses amis que la fièvre était dalius, qui s'étonna qu'on s'alarmât
son mal ordinaire en ce pays-là. Voyez tant pour des jeux d'esprit. Obstu-
ses lettres ,page 97 et à la 11 -2.
à la pesco adjudicia sœciili nostri, et tant
ne j'uisait que commencer sa
(F) IL irritabiles animas illorum ( bonos non
uingl-neuviènie année."] C'est ainsi que tango) èioKo'youjuhwf. Jocos nemoferè
je traduis ce latin de M. de Tiiou , jant adniiitit eV ex leidssimâ quisque
,

ciim i'ix anninn 28 excessiiset. Du re graueni cnlnmniandi caussam et an-


Plier \r-^(\ml, n'ayant pas encore at- satn captai (19). 11 pria son bon ami
teint sa i^ingt-Jiuitième année. Je laisse Monavius d'intercéder pour le libraire
à juger aux lecteurs s'il a mieux ren- auprès des magistrats et des profes-
contré que moi. M. Baillet ne donne seurs de Leipsick et de faire en sorte ,

que vingt-sept ans et quelques mois à qu'ils ne fissent rien qui pût flétrir
notre Acidalius (i5). Il a peut-être dé- l'iinnneur de lui Acidalius. Il crai-
couvert que l'on n'avait pas appris à gnait de n'en être pas (piitte pour les
M. de Thon avec toute sorte d'exac- difl'amations dont on l'accablait il :

titude l'âge de ce jeune auteur n'était pas sans quelque peur que l'on
(G) On lui aidait imputé h tort un n'excitât contre lui la fureur du peu
petit lii're , etc.'] Geisler l'a justifié de pie et surtout il désirait passionné-
,

cette fausse imputation , comme il pa- ment de n'avoir rien à démêler avec
raît par ce passage de Placcius Prio- : les prédicateurs. JVomen sic traduc-
ris (i6) auctor quomodo non ex i'ero tuni jam in vulgus caiumniosis fa-
sil habitas Valens Acidalius , uide bulis salis sit, quod est niniio plus sa-
apud Geislerum decadis 3 n. 8 (17). lis ulterius ne quid furori populari
:

Nous parlerons de cette dissertation concedalur. In primis à theolcgis et


dans l'article Gediccus mais, sans aller
: concionatoribus ne quid noceatur nii-
plus loin , je dois dire ici sur quel fon- hi , cum quibiis nolo commitli , nec
dement elle fut attribuée à noire Aci- quicquam magis opto quàm illorum iri-
dalius. Comme il cherchait à dédom- bunitiis ediciis nrinqu/im misceri , nec
mager le libraire qui avait imprimé son scriptis publicis incessi (20). Il mou-
Quintc-Curce, et qui se plaignait sou- rut peu de mois après; et comme la
vent d'y avoir perdu (18), il lui tomba mémoire du scandale que causa la pu-
blication de ce livre était encore toute
(i3) /nCIaudiar. apud Konigii Bibliotli. p. 6.
(i4) Christ. Aeidal. prcpfal. Epistolar. Val. ctitn aviditati ejus emolrimentuin ediiiotùs non
Âcidalil. salis ri^'pondisspt,
quesiutn persœpi: de jaclmd
(i5) Faillet, Jugem. sur les poët. num. i346. sud. Valens Acidal. Episl. Apolog. ad calcein
(16) Cesl-a-dire , Dissertalionis Mulieres noa Epi>tolaruni.
fsse li'oniines. (19) Acidalii Epislola Apologet. ad ealcem
(17) Placcius de Aoonymis , prtg. 72. £pi^tola^. ,

(jèj Vl ^eiiiis hoininutn lunri ciipidum est, (30) Ibid.


,

ACINDYNUS. 77
fraîche on fui beaucoup plus dispose
,
signifiedavantage Indè rediens cum
,

à crier et à tempêter sur le genre »le soUrini illorum (studiorum medicinae)


sa mort : Quœ calumniarum et menda- honore.
cLoruni lerna inclè potissiinùm naia est,
qubd recens adhuc esset fabula illa in ACINDYNUS (Grégoire), moi-
iipologelicd epislolâ salis refutata , ne grec du XIV\ siècle. Il se joi-
quœ multorum aniniis altè nimis inse-
gnit à Barlaam qui depuis son
derat, ut facile esset iniprobis quid^is , ,

in ini^idiaryi t/ahere, con^'iciis prascin- entrée dans l'église grecque, avait


dere , et è plaustio quasi calumnïari pris à tâche de confondre les lié-
(21). Au reste, il assure que l'e'crit en sycastes qui s'étaient fort multi-
question courait depuis assez long-
pliés parmi les religieux du mont
temps de main en main , et qu'appa-
remment il avait été composé dans la Athos. Les hesjcastes étaient des
Pologne. dévots contemplatifs dont le nom
Peu de gens s'étonneront qu'Acida- fait assez connaître que dès ce
lius ait cru qu'il aurait afiaire à une
trop forte partie s'il se commettait
temps-là il y avait des quiétistes
avec les prédicateurs ; car, comme on dans le monde. Ils croyaient voir
est fort enclin à mal juger de son pro- dans le fort de leurs oraisons une
chain , on se figure assez ordinaire- lumière semblable à celle qui pa-
•ment qu'ils ressemblent à Eole :
rut sur Jésus-Christ lors de la
^ole (namque tibi divùm paler atque homi-
,

num rex transfiguration à la montagne de


,

Etmulcere dediljluclus et tollere vento) (22); Thabor, et ils disaient que cette
mais de manière qu'ils sont plus
telle
Imnière était incréée quoiqu'elle ,

capables d'exciter une tempête que de fût très-distincte de l'essence de


l'apaiser. Ce dernier effet demande Dieu {a). Acindynus, secondant
des hommes graves :
l'impétuosité de Barlaam écri- ,

T'wn pietaie gravein ac tneritis si fottè vi- vit contre les illusions de ces fa-
rum quem. . . .

Ille regii dicUs animas, et pectora mulcel (23). natiques , et fut un des tenans
contre eux dans un concile de
Il n'en faut pas tant pour produire
Constantinople. Mais il eut le
l'autre.
Qu'il était médecin."] On lui
(H) malheur de rencontrer des anta-
donne cette qualité dans un ouvrage gonistes qui avaient plus de cré-
de Scioppius (24 )• Il arriva en effet dit que lui ni que Barlaam , et
jusqu'au doctorat mais ce fut seule- :

qui leur firent essuyer bien des


ment ad honores ; car il ne pratiqua
jamais et n'eut jamais envie de pra-
,
censures et bien des condamna-
tiquer. Il n'y avait que les maladies tions en divers conciles. Le mau-
des manuscrits qu'il se proposât de vais succès qu'il avaiteu à celui
guérir. Medicum th Tr^â-^n nec ago ,
de Constantinople environ l'an ,
nec agere proposituni unquavi fuit :

cerlo consilio tanien inter ejus artis iSSy ne l'empêcha point d'ac-
,

candidates nonten dedi , nec pœnitet , cuser publiquement d'hérésie les


eo , quod petii , indè jam ablatn etc. , fauteurs de Grégoire Palamas.
(aS). Un peu auparavant il avait dit
C'est pourquoi il se vit cité par
Dabam (in Italiâ) me to7ç K^x.\n-
illic '

TrtiSitn, quorum
sacris et In Italidfue- le patriarche de Constantinojile,
lam initiatus : ce qu'il dit ailleurs (26) l'an i34i. Il se trouva au con-
cile, et fut condamné à se taire ,
(21) Christ. Acidal. prœf, Epist. Val. ÂciJal.
(22; Virgil. .Eneid. lih. I, vs. 05. sous peine d'excommunication.
(23) Ibidem, vs. l5l.
(24) .Scioppius, de Arlc criticâ , pag. i8.
(a) Voyez les auteurs cités par le père
(25) Val. Aciilal. Epist. pag. ai5, ae *tiam
pogJiQi, 209. Maimbourg, Histoire du Schisme des Grer«,
(26) Ibid, pag. 24n- liv. y, pag. 149, l5o. Edit. de Holl.

XOME I.
,, ,

,.8
j
ACIND YISÛS.
sus-Christ (i). Tout cela fourmille de
Six ans après on le poussa encore
fautes, car, 1°. dans le siècle (a; dont
plus vivement, parce que Jean
il s'agit ici il n'y a point d'autre em-

Cantacuzëne, qui était devenu pereur de Constantinople qui puisse


empereur , aimait Palamas. Les être traité de bienheureux par un
catholique romain que Micliel Paléo-
censures et les excommunica-
logue 11 se réunit avec le saint siège,
tions qui tombèrent à diverses
et il mourut dans cette union. Or il
fois sur la tête d'Acindynus ,
le ne se nomme pas Michel Andronic il
;

réduisirent enfin à une vie plus n'eut point de fils nommé Jean et il ,

mourut l'an ia83. En second lieu


tranquille et tout-à-fait obscure. ,

l'empereur dont le fils se nomme Jean


Jacques Gretser , jésuite alle- ne se nomme qu' Andronic Paléologue
mand, publia à Ingolstad, en l'an- ne commença de régner qu'en iSaS,
née i6ib les deux livres d'Acin- et n'eut point pour contemporains
,

Henri Vil et Jean XXII. EnGn il est


dynus , De essetiliâ et operatione faux qu'Acindynus ait été condamné ,

Dei. Léon d'Allazzi a publié un environ l'an i3i3 Le père Gaultier


poëme {b) et quelques fragniens n'oublie point dans ses tables chrono-
de ce même auteur (c), qui , ayant lo$;iques Barlaam et Acindynus il les :

loge au quartier des hérétiques , et


eu la destinée de passer pour hé- cela sur le témoignage de Pratéolus.
rétique assez long-temps (A), a (B) ^ trnuvf enjin des juges plus
trouvé enfin des juges plus éclai- équitables ] Voyez les auteurs cités
rés et plus équitables (B). par M. Moréri je veux dire Pontanus
:

sur Cantacuzène, et les Annales de


{b) Gia;c. Orlhod. lom. /, à pag. 766
M. de Sponde. Voyez aussi celles de
ad 770. Bzovius le père Gretser i3) , le père
,
H. cap. XVI, de Conseusu, etc.
(c) In lib.
apud Appendic. Cave Hist. Liter. Script,
,
Maimbourg il^), et les auteurs qu'il
Eccles. pag. il\. Consultez cet /.ppendix ,
cite dans l'ouvrage indiqué à la marge.
touchant cet article- ci. fil Prateoli Elencb. Haeret. pag. 86, edil.
Colon, ann. i6o5, in-^.
(A) Dépasser pour héi étique assez (2) On
prend ici ce mot en gênerai pour
long-temps.'] Comme dans la chaleur Ve'pnce de cent années , à les commencer oîi
Von veut.
de la dispute on ne songe qu'à presser (3) Gretseri Noix in CaDtacnzennm , et in
son adversaire on ne s'éblouit que
, editione Ac.nttyni.
trop souvent à un tel point, qu'on ne (4^ Maimbourg , Hist. du Schisme des Grecs,
liv. V.
s'aperçoit pas que l'on passe d'uae
extrémité à l'autre, ou qu'au moins
on pousse ses raisons si loin qu'elles
ACINDYNUS (Septimius) fut
consul de Rome avec Yalérius
,

prouvent trop. Je ne doute point que


Barlaam et Acindynus n'aient par là Proculus l'année que Constan- ,

donné prise à leur adversaire Palamas, tin, fils du grand Constantin,


et qu'étant orthodoxes dans le fond ,
fut tué auprès d'Aquilée 'a). Il
ils n'aieut quelquefois raisonné en hé-
rétiques. Pratéolus n'a pas manqué de
avait été gouverneur d'Antioche ,
les placer dans son catalogue; mais il et il arriva une chose sous son
est impossible de rien comprendre gouvernement qui mérite d'être
dans l'arrêt de leur condamnation,
rapportée. Saint Augustin en fait
tel qu'il le rapporte. Ce qu il y a de
moins obscu>- dans son livre, à l'é- le récit {b). Un certain homme
gard de Barlaam et d'Acindynus, est ne portant pas à l'épargne la livre
que le concile qui fut coiivoq'ié pour d'or à laquelle il avait été taxé,
les condamner fut célébré en présence
fut mis en prison par Acindynus ,
du bi nlieureux tt très-célèbn; empe-
reur Micliel Andronic Paléologue et qui lui jura qu'il le ferait pendre
,

de Jean son lils sous Henri Vil


,
(a> 'En .3^0, selon Calvisius.
empereur d'Allemagne t le pape , <
(61 Âugust. Je SermoneOomini in monte.
Jean XXII, environ l'an i3i3 de Je- lib. I , cap. xri.
,

At:iNDYNUS. «79
s il ne
lie recevait
leccvaii uciic somme ic
cette suiuij-ic le le
i-c galant
gaiiiui, a sa maison ae
à de ciimija-
jour qu'il lui marquait. Le terme gaej , n'eut pas plus tôt aperçu
allait expirer sans que ce pauvre cette tromperie qu'elle s'en plai-
homme se vit en état de satisfaire Elle en de- gnit publiquement.
le gouverneur. Il avait à la vé- au gouverneur, et manda justice
rite une belle femme, mais qui lui raconta le fait d'une manière
n'avait point d'argent ce fut fort ingénue. Acindynus com-
:

néanmoins de ce côté-là que l'es- mença par se déclarer coupable


pérance de sa liberté lui apparut, puisque ses rigueurs et ses me-
Un homme fort riche brûlant naces avaient fait recourir ces
,

d'amour pour cette femme , lui bonnes gens à de tels remèdes :


offrit la livre d'or d'oii dépen- il se condamna à payer au fisc la
dait la vie de son mari, et ne de- livre d'or ensuite il adjugea à ;

manda pour toute reconnaissance la femme la terre d'oii avait été


que de passer une nuit auprès prise celle qu'elle avait trouvée
d'elle fc). Cette femme , instruite dans la bourse. Saint Augustin
par l'Ecriture que son corps n'é- n'ose décider si la conduite de
tait point sous sa puissance , mais cette femme est bonne ou mau-
sous celle de son mari, commu- vaise (A), et il jjenche beaucoup
niqua au prisonnier les offres de plus à l'approuver qu'à la con-
ce galant , et lui déclara qu'elle daminer (B) , ce qui est assez sur-
était prête de les accepter, pour- prenant (C). Nous avons vu ci-
vu qu'il y consentît, lui qui était dessus (e) le même relâchement
le véritable maître du corps de sa de morale dans saint Chrysosto-
femme , et s'il voulait bien ra- me , au sujet de la conduite d'A-
cheter sa vie aux dépens d'une braham et de Sara.
chasteté qui lui aiJpartenait tout (e) Dans la remarque (A) de Varlicle Abi-

entière et dont il pouvait dispo- i«;i.ech.


ser. remercia, et lui or-
Il l'en (a) N'ose décider si la conduite de
donna coucher avec cet
d'aller cette femme estbonne ou mauuaise.'\
homme. Elle le fit , prêtant mê- Cela est clair par ces paroles JVihil :

P'^nemdi.puioUceot
^'' '" '^^'^''""
me en cette rencontre son corps •T cuique œstimare quod l'élit (i). Ail-
a son man , non par rapport aux en question si la chasteté-
i^u..^ ii ,net
désirs accoutumés mais par rap- , d'une femme perdrait son inte'grité
port à l'envie qu'il avait de vi- en cas que pour la vie de son mari
,

et par son ordre elle couchât avec un


vre (d).
^ '
On lui donna bien l'ar-
. . . autre homme. Acnipulnsius disputari
,
gent qu on avait promis mais ; p^test utrùm ilUus mulieris pudicitia
on le lui Ôta adroitement et puis , l'iolaretur eliam si quisquam carni
,

on lui donna une autre bourse oii «jus commixtus foret àim id in se ,

il n'y avait que de la terre. La f^ri pro marit, ^itd nec iUo nesciente
^ j ^^" 7"°c'c permilteret nequaquani
bonne ctemme, de retour a son
-,
• ,

fidem deserens conjugalem, etnotesta-


logis (car elle avait été trouver tem non abnuens maritalem (2) ? Ri-
vet ayant cité ces paroles ajoute (3}
, ,

Pollicens pro iinâ nocte si ei misceri


(c) ,

vellelse aiiri librain dalurutn. Auguslinus,


,
(i) Angast. de Sermone Domini in Monte,
lib. /, cap. xri.
do Serm.DomiQi in Mon te, lih.l ^cap.'X.VI.
(1) Augustinus contra Faust. Manich., hb.
(d Illa corpus non nisi marilo dedit non ,
XXII, cap. XXXVII.
roncitmbere ut solet, sed vivere cupienti. Op<r.
,
(3) Riveii Exercit. LXXIII in Gènes.
Auiîustinus ihid. , tem. I, pap. aSi
i8o ACINDYNUS.
que saint Augustin rapporte que le sait sans avoir dessein de sauver sa
cas arriva sous l'empereur Consfan- vie, devient innocente lorsqu'on la
tin (4/ » lorsque Acindynus, etc. fait pour sauver sa vie. Le prisonnier
(B; Bcanrnup pl'is à l'apprower d'Acindjnus aurait fait un honteux
quh la comlnuiner ] Cela parait ina- maqnereHaj^e , el consenti à un adul-
nifesttrmf nt par ces paroles Non ttà : tère proprement avait permis
dit , s'il

est ctiitunandum ne hoc etiam fcmi- à sa femme de coucher avec ce calant,


na , i^iro perntiuente facere pnsse t'i-
,
aGn de gagner une livre d'or^ mais
dealur; qnml omnium sensus exclutht. parce qn il n'y consent qu'afin de sau-
Quaniqu'am nonnul'œ ctinsœ pnssint versa vie, ce n'est plus un consente-
exutere itbi el uxi.r juariti consemu ment à l'adultère , c'est une chose per-
pro ipso ntarito hocjncere Jcbeie wi- mise. Qui ne voit que si une telle
dentur.... Nthil lue in aheram partem morale avait lieu, il n'y aurait point
dispulo... SeJ lamen nniroto liocJiè<,lo de précepte daus le Décalogue dont la
(savoir celui delà femme dont le mari crainte de la mort ne nous dispensât?
était en jirison sous Acindynus) non Où sont les exceptions en faveur de
ila respuithoc sen'sus hiunanus , quod 1adultère? Si une femme n'est pas
In illd mulitre ifiro jubenle commis- obligée d'obéir au commandement de
sumest, qiienuidmodùm anle'a , (iini ne point souiller son corps quand cela
sine ulln e.remplo res ipsa ponertlur, peut épargner à son mari le dernier
horruimus (5) Je ne sais donc sur quoi supplice, elle ne sera point obligée à
.se fonde le tjiéojogien prolestant que y obéir quand il s'agira de sauver sa
i'ai cité dans la remarcjue précédente, propre vie j car Dieu n'a pas exigé de
lorsqu'il assure que saint Augustin nous que nous aimassions personne
penche plus vers la condamnation que plus que nous-mêmes. On pourra donc
vers la justification de cette femme *. impunément transgress^-r la loi de la
Quojaclo Acindyni explicato, li.be- chasteté atin d'éviter la mort. Pour-
rum unicuique permiitit Augustinus quoi une semblable raison ne rendra-
œstimaie quod uelil , quann'is in eam t-elle pas permis l'homicide, le vol,
partem propensior wideatur , quôd id le faux témoignage, l'abjuration de sa
fîerl non liceat (C). religion , etc. ? Les plus grands hom-
(C) Ce qui est assez surprenant."] Vin mes sont sujets à donner à gauche et
grand théologien comme lui ne de- à s'égarer dans les chemins les plus
vait-il pas savoir que notre vie, qui unis. Est-il bien difficile de connaî-
n'est qu'un bien temporel et périssa- tre que saint Paul n'a point prétendu
ble , ne nous doit pas être assez pré- qu'un mari pût disposer du corps de
cieuse pour nous sembler digne d'être sa femme en faveur du tiers et du
rachetée par la désobéissance à la loi quart saint Paul dis-je lorsqu'il a
j , ,

de Dieu? Car, comme cette désobéis- dit que la femme n'a point la puis-
sance est un péché qui nous soumet à sance de son corps et que cette puis-
une peine éternelle et à un mal rao- sance est à son mari? Cependant vous
rai qui ble-sse un être infini, il n'est voyez que saint Augustin s'emb.irrasse
pas moins conire la prudence que con- dans ces paroles de l'apôtre, et qu'il
tre la droite raison d'aimer mieux fait grand fond sur la distinction ma-
commettre un péché que perdre sa nto jubenle poiestatein non abnuens
vie. Je ne dis rien des abîmes de cor- inaritalem. Nous verrons ailleurs (7),
ruption que l'on ouvre de toutes parts qu'il s'est servi de cette doctrine de
sous nos pieds, en nous disant qu'une saint Paul pour justifier Abraham et
chose qui serait un crime si on la fai- Sara touchant le concubinage d'Agar.
Ecoutons un théologien qui pour ,
(4) Il y a Coo^tanlius dans l'Ouvrage de
saint A Justin que j'ai cite.
il
avoir vécu plusieurs siècles après ce
(1 Autçi.sl de Sermone Domini in Monte, père, ne laisse pas d'être meilleur
lib. I.cap. Xri. moraliste sur ce point. Qud in re
* Julr ne ciinlrste par les IrilPs eile's
par Csavoir l'aventure de la femme dont
Buvle mais il prend la défpn\e de taint ,4u-
^

^'U.rtm, qui opine seulement par corap;traison le mari était prisonnier d'Acindynus)
,

et dit que, bors iVxrmple qu'il jllègii. et rrlmè TTiirum est tnlem OC tantunt viruni po-
,"

fait horreur, et q,.e d.ns o.t e xem,1e il ne ré- lume dubiture cùni ex sacrû scrip- ,
voUr pa, tant. I^.-J. I,eclerc de/end aussi taint
Augustin.
(6j Kivuli Oper. tom. l,pas. aSi. (ijl Dans la reinarijut (I) rfr VarUclr Si»*.
ACONCE. ,81
turdconstetapertissimèmalumalufiiod ériger en auteurs; mais on n'y
pœnœnunquam e.^e rtdimendumma-
lo culpœ et uitnm polius esse dcpo-
,
^^^^^^.^
,
^
^^^ ^^.^-^ ^ ^ ^^
1 , .,

nemlà u quàm ut eam nobis aut ulils ^'^^de (c; qui est une bonne piece
,
,

serueinus iidjacientes ex quo Deus oj- (B) , quoique l'auteur ne l'eût pu-
Jtnderrtu r. /Vullo mndo iiaque cen- bliée que coinnie un essai (d). Il
sendum al Uciluni esse adu/leiii renie
avait compose en italien un ou-
dium i^el manto ce/ , lixori l'itnndœ
manière de for- vrage touchant la
alterius nccis causa ; quin poliùs mor-

teni ex pectare convenu , iinà t'eiô ultra il mit lui- tifier les villes, lequel
même en latin pendant son sé-
€3 piftere , quhin alterutrius castitat-'m
pf'idere , ob cujits cnnsen'aHonetn ntul-
jour en Angleterre (e) mais je ne ;
tœ pudiclssimœ feminœ non solU.ru ah
aliis occidi suslinuerunt sed etiani crois pas qu'on l'ait jamais im-
,

{quod tamen probare nolini) sibi ipsis primé. Il travaillait aussi à une
uim intulerunt, non solàtt inter Eih- logique (/) , à quoi la mort ap-
nlcas. sed ctiam inter Christianas (8).
paremment l'empêcha de mettre
Il cite Texemple de Sophronie j'en :

parlerai en son lieu. la dernière main. Ce fut domma-


Lisez les /tmœnllates Juris de M. Mé- ge; car c'était un homme qui
nage, au chapitre intitule, de Marlli Sensait juste, qui avait beaucoup
lenocinio Adullerarwn viros ordinuri
:
e discernement et beaucoup de
non poiuisse. C'est le X*. chapitre de
cet ouvrage. Voyez-en la page ôi de pénétration. Il s'était formé l'idée
la plus raisonnable de cet ouvra-
l'édition de Leipsick en 1680 ; in 8°.,

(3) Riveli Oper. tom. I pag. i8i.


,
ge , et il se croyait obligé d'y tra-
,

vailler avec d'autant plus de soin ,


ACONCE (Jacques), en latin qu'il
prévoyait qu'on allait pas-
AcoNTius, philosophe, juriscon-
ser dans un siècle encore ph<5
sulte et théologien , naquit à
éclairé que celui oii il vivait (C).
Trente, au XV P. siècle (o). II
Sa conjecture était bien fondée
embrassa la réfornaation et ;
(D). Il n'a pas eu sur la religion ,

ayant passé en Angleterre au


les mêmes principes que Calvin :

temps de la reine Elisabeth , il


il penchait beaucoup vers la to—
reçut mille marques de bonté de
^ ^^^ ^^
-j
,^/^^^^^ .^^^^ ^^^_
cette princesse, comme il le te^
^^-^^^ maximes qui l'ont rendu
moigiie à la tête du livre qu
^ il lui r j-
^,1 quelques ii
-
i
lort odieux a
1 1

V'i-^ 1 o 1
theolo-
dedia (A). C est le fameux recueil
jens protestans (E) J'ai trouvé
des Stratagèmes du Diable ^Mi ,

J^^^
J^ ^^^^.^^ concernant ses
a été si souvent traduit et si ,
aventures *. Il dit lui-même ^
souvent imprimé. La première
en passant, qu'il avait employé
édition est celle de Bàle en 1 5b5 :
,
une bonne partie de sa vie à l'é-
l'auteur mourut peu après en An-
gleterre (Z»). Jacques Grasserus en (c) Voyez-en le titre à la Jin de la remar-
que (B).
procura une seconde édition à (rf^ Pnst illnd tempus quo excidil no^is ,

Bàle, Fan 1610, où l'on trouve inchoatum Uludde Methndo Opusculuin. scis
me bis sedem ac lociim mutasse. Argenloi a-
bien la lettre d'Aconce de fui-
ium primo deindè m .-ingliam Acoiitius, in
,

tione edendorum Libroruni , dans Epist. ad Joli. Wolfium Tigurincim de Ra-


laquelle il donne des conseils si tioiie ed-^ndornm librorurn /ag- ^'O. Elle
est datée de Londres, le 2,0 de noi>embre l562.
salutaires à ceux qui se veulent (e) Aconlius, Epistula ad Wolfium ;). 4 lO.

(a) ^loTéri lemet faussement au XV'. siècle, (/) Ibidem, pag. l\ll.
yb) Grassirus in Epistol. ad Lectorem ,
,
* On voit dans Chaufepié que J Acorea
irùlio Sirala"emalum SaUncÇ. laissa quelques-uns de ses papiers à J.-li.
,

Qo ACO NCE.
non pas en qualité de théologien,
et de
tude de Bariole de Balde , ,
mais en qualité d'ingénieur cela pa- :

écrivains barbares et
semblables raît par la raison qu'il allègue pour-
,

plusieurs années à la cour (g^). ^


quoi il donnait son temps à un ou-
vrage de la fortification des villes.
La lettre d'Aconce qui a ete ,
(B) Qui est une bonne pièce."] C'est
fait voir
publiée l'an 1696 (^2), le jugement qu'en a fait un
savant
un esprit exact qui entendait la cartésien (3), dans une lettre qu'il
bonne logique. Elle est datée de écrivit au père Mersenne peu après ,

5 de juin i565 et que les Méditations de M. Descartes


Londres, le ,
eurent vu le jour. « Il témoignait
sert d'éclaircissement à
une chose
goûter sur toutes choses la méthode
de Sabellius et
qu'il avait dite ,
avec laquelle M. Descartes avait
qui avait été critiquée. î^otez traité son sujet ; il en admirait les
propriétés, et relevait les avantages
qu'encore que laplupart des théo-
qu'elle avait sur celle des écoles or-
logiens protestans regardent
cet
dinaires mais surtout, il estimait
:

homme avec horreur, il y en a son jugement et les raisons pourles-


méthode
parmi eux qui l'ont fort loué (F). quelies il avait préféré la
analytique ou de résolution, à la
italienne de
Castiglioni qui publia une pièce méthode synthétique ou de com-
Ona Esortazione al timor di
lui intitulée
position, tant pour enseigner que
:

italiane, nuovaraente
Dio', con akune rime
pour démontrer. Il n'avait encore
messe in luce Londres sans date.
: ,

trouvé rien de semblable jusque-là


(g) Idem , ibid.
à la page l32, et hors le petit livre de la Méthode,
{h) Par M. Cre'nius,
suiv. de la II'- partie des Animadversiones composé par Jacques Acontius, qui,
outre cet excellent traité avait
Philologicœ et Hisloricse. ,

., encoi'e de la mé-
donné un bel essai
(A) Jt la tête du livre qu'il lui dé- thode analytique, dans son livre des
I)

dia.'] Au lieu d'epître dëdicatoire, il


Stratagèmes de Satan, qu'il con-
se conienla d'une
inscription canoni- -seille de lire à tous ceux qui aiment
sante , qui commence par Div.c Elisa- » la paixde lÉglise, quoique Acontius

BETH£ A>-GU£ FraXCLE HiBERNIi; Re-


, , ,
n'y soit pas exempt des préjugés de
GVfM. Il déclare qu'il lui dédie son li- sa communion, et qu'il ait eu in-
vre, de lui témoigner sa grati-
afin tention d'y favoriser ceux de son
tude In signum memoriamque gratl
:
- parti (3). » Cette petite pièce d'A-
animiob parlumejus liberalitate, quùin conce, sous le titre de Methodus sit'e
in Angliam propter Ei'ani^eticœ veri- recla ini^estigandarum tradendarum-
tatis professionern extorris
appuUssel ,
que Arliuni ac Scientiarum ratio, fut
humanissimèque exceptas esset, lilte- insérée, l'an i658, dans un recueil du
rarum otium. Il dit dans sa lettre à dissertations deStudiis benè inslituen-
Wolûus que sa pension soulageait en
, dis qui fut imprimé à Utrecht.
,

quelque sorte son indigence, et lui (C). Qu'on allait passer dans un
donnait quelque loisir pour étudier :
siècle encore plus éclairé que celui
Ut autem quicquid est operœ id istam où il Il faut l'entendre lui-
t'/Vaù.]
in artem (muniendorum oppidorum) même Voici ce qu'il dit après avoir
:

conferrem , ex parte priuatis sum ra- touché les autres raisons qui rendaient
tionibus adduclus, eteniin in hoc \'o- fort difficile l'exécution de son projet.
luntario rrieo exilio inopiam UTCUN- Intelligo eliam me in seculum incidisse
QUE sub'ei'al, ad alla sludia et otii
cultum prœter modum . nec tam certè
suppedilal JSOJS'NIHIL, impelrato i^ereor eorum qui regnarenunc viden-
,

viihi ai hujus sapientissimœ atque op- tur, judicia, quàni exorientem quan-
tiinœ Reginœ liberalitate honesto sti- dam seculi adhuc paulb cultions lucem
pendia (i). Quelles restrictions! et pertimescor. Elsi enim multos habuit
qu'elles marquent qu'il est difficile de
habetque cetas nostra uirns prcestantes,
contenter les exilés !

(1) Healnerus. Sa leUre est datée du 29


d'août
Notez qu'il obtint cette pension
1641. Vijjez Baillet, Vie de Descartes, tom. II,
(i) AcoDtii Episl. ad VSfolfium , <Ie Rationc
eilfixlorum Ubrorum ,
pag. ifii. (,•) Gaillet ,
là même.
ACONCE. 183
adhuc tamen uiilcre uideor nescio quid » comme on
présent qu'on est
fait à
triiigis futurum (4). » i)lus raisonnable et moins savant ,
(D^ Sa conjecture était bienjondée.'} » et qu'on fait bien plus d'état du bon
Je crois que le XVi*. siècle a produit « sens tout simple que d'une capacité
un plus grand nombre de savans hom- » de travers. »
mes, que le XVile^ et néanmoins, il (E^ O
lieux à quelques thénlnqiens
s'en faut beaucoup que le promit r de pro(est<ins. ] Afin qu'on ne m'accuse
ces deux siècles ait eu autant de lu- point d'avancer ceci en l'air et sans
mières que l'autre. Pendant q le le rè- preuve , je citerai les paroles d'un
gne de la critique et de la pliilologie ministre de la Haye. « Jucohus ^con-
a dure', on a vu par toute l'Europe » tius dit- il (6)
, ( de qun jure quod ,

plusieurs prodiges d'e'rudifion. L'étu- » de Origene dici soltt, ubi benè ne-
de de la nouvelle philosophie et celle » nio meliis ; ubi malè nemo pe- ,

des langues \ivaules ayant introduit » jus , ) .... fuit. ... vir verè doctus
,
un autre goût, on a cessé de voir cette )) sed ingenii ut acris quidern , ita et
vaste et cette profonde littérature; ') elatioris et juslo liberalioris
, quin
mais en récompense, il s'est répandu » à nescio quali scepticisnio et irtdif.
dans la république des lettres un cer- »J'ere/itismo in ipsam Theologiam
tain esprit plus fin et accompagné » introducendo hnudquaquam alieni ,
d'un discernement plus exquis les : » quod traclatu suo de Stratagematis
gens sont aujourd'liui moins savans et » Satanse tcstatuni salin fecit , libello
plus habiles. Aconce avait donc rai- » (Simone Goidaitio jndice) omnium
son de voir en éloignement un siècle » malorum psssimo (*). f^oetius ei
qui serait un juge plus à craindre pour )> ndscribit {**), quod vel imperitè vel
!a logique qu'il m^itait, que ne le » subdolècommunemconfessioniscon-
pouvait être le siècle d'alors. Ce n'est » ceptuni moiitussit, sub cujus vesilio
pas moi, au reste, qui m'érige ainsi en « militari pnssunt et ipsi Ariani. » Ce
luge de la supériorité de notre siècle qui vient d'être rapporté de Simon
:

je ne fais que me conformer au senti- Goulart ne se trouve point que je sa- ,

ment des connaisseurs les plus fins. che dans ses livres je crois qu'on ne
, :

« Nous sommes dans un temps, dit l'un le tient que d'Uytenbogard qui a dit ,

» d'eus (5;, où l'on devient sensible au dans quelqu'un de ses ouvrages que
» sens et à la raison plus qu'à tout le lorsqu il étudiait à Genève, il tut ctn-
» reste. En quoi on peut dire, à la suré de la lecture d'Acontius par Si-
n louange de notre siècle que nous mon Gou'art
,
et averti que le livre ,

}) connaissons déjà mieux le caractère des Stratagèmes de Satan était le plus


i> des auteurs anciens, et que nous méchant livre du monde esse librum ,

» sommes plus entrés dans leur esprit omnium malorum pessinium .n). J'ai
j) que ceux qui nous ont precédés. La trouvé un autre passade de Voetius
» diflerence qu'il y a entre eux et nous concernant cette matière :.ce docteur
>j est qu'on se piquait bien plus d'é- y met Aconce j)armi les hérétiques
» rudition dans le siècle passé que aui sortirent d'Italie sous le prétexte
i) dans celui-ci.... C'était le génie de e la réformation (8; \ et il assure que
)) ce temps-là oij rien n'a été plus en si l'on avait pris garde au venin qui
,

y> vogue que la grande capacité et est c^ché dans quelques endroits de
3> une profi)nde littérature on étu- son livre (***), on l'aurait excommunié
:

» diait à fond les langues on s'appli- ou contraint de signer un formulaire


:

» quait à réformer le texte des an- d'orthodoxie. Judicetiir quis (induis


» ciens auteurs par des interprétations in herbd latueril q-^bd hic t^ir infun- ,

j) recherchées , à pointiller sur une damentalibus assertionibus nunquani


3) équivoque à fonder une conjec- tÔ ô^oovs-iov trium personarum staluerit,
,

)) ture pour bien établir une correc-


» lion : enfinon s'attachait au sens
,
(6) Saldeniis, de Libris etc., pag. 33^, 338- .

(') Trigland. Hisl. Eccleï. pag. 232.


» littéral d'un auteur , parce qu'on (**) Voetius , Politic. Ecoles, part. III , »>•
» n'avait pas la force de s'élever jus- Indice et pag 3i
, 398. ,

)) qu'à l'esprit pour le bien connaître, (7; Uyienbojard, Hisloria, Belgicè conscrip-
ta , cap. I pag. 7, edit. in-t^.
,

(4) Acontii Ep 5t. ad WolGum pag. 4i2., (8) Voetius Disput. thcol. loin. I,pag. 49^.
,

(5) Le père Rapin dans la préface de la


, (***) Pag. ij4, >ï3, 341, edil. Basil. An
Comparaison de Thucydide et de Tite-Live- 1610.
i84 ACO STA.
nec adversarios ,
Samosatenuni , Pho- Trît la on voit dans
porte (i3). Enfin ,

tinum , Anium Eunomium , , Pnett- le même


ouvrage que non-seulement ,

matomachos , aiit eorum errores reje- Arminius etGrevinchovius ont donné


cerit contentus solos illos rejectos ,
,
beaucoup de louanges à notre Aconce :,

qui negarenl filiuni non esse alium à mais aussi , qu'Amésius et George
pâtre (9). Pauli(i4), théologiens réformés, l'ont
(F) Il jr en a parmi les prolesfans fort loué. Jacobo Ar/ninio tamen in
qui L'ont fort loué. ] M. Crénius four- Respons. ad excerpta theol. Leidens.
nit des preuves de ces deux faits. Il pag. 65. Acontius est divinum pru-
observe (10) que Conrad Bergius dé- dentiœ ac moderationis lumen. Ame-
clare qu'Aconce a raisonné prudem- sio prœfat. ad Puritan. Anglicanos et
ment et pieusement. Ce Bergius était Grei'inchoi'io in Abstersione calumn.
ministre et professeur en théologie à Smoutii pag. 125. apud B Hulseman- ,

Brème. Le livre où il parla de la sorte num in Dedical. Supplementi Bre-


est intitulé Praxis catholica dii'ini
: fiarii llieologici pag. 6. idemAcon-
canonis contra quasuis hœreses et tiuS est é'uveLTciTa.TOÇ CV TOLIÇ •y^cL^n.ii: ,

schismata, etc., et fut imprimé à Brè- qui sementem Ecclesise anglicanae ca-
me Tan 1639 in-8°. Rivet, en ayant
, , loie et rore cœlesti fovit sedulô (i5).
eu un exemplaire ex dono autoris , y
(i 3) Peltius in DedicaCione Harmonias , apud
écrivit quelques remarques dont je Crenium, ibid, pag. 3i.
rapporte celle qui concerne Aconce. (i4) /n Reformato Augustano , seu Apologia
3îiror cur {pag. 524)» t<^nti Jaciat l'ir pro dictatÎ5 suis de Aug. Confess. apud Crenium,
ibid. pag. 33.
doctus judiciurn Aconlii, hominis am-
(i5) Crenius , ibid, pag. 3i.
biguës fidei et Socinianorum wel pro-
dromi , l'el comniilitonis , cujus rei
gratid ab Arminianis loties recusus
ACOSTA (iflEL) gentilhom- ,

est et commendatus , etiani in l'arias me portugais naquit à Porto , ,

linguas bulgares translatus. Huic ho- vers la fin du XVP. siècle. Il fut
mini scopus J'uit , ut ex toto libro ap- élevé dans la religion romaine ,
paret , ad tant pauca necessaria doc-
dont son père faisait sincèrement
trinam christianam arctare ut omnibus ,

sectis in christianismo pateret aditus profession (a) quoique issu de ,

ad mutuam communia nein. f^eliern l'une de ces familles juives qui


docliss. et pium virum à talibus lau- avaient été contraintes à vive
dandii et imilandis abstinuisse (^Ji).
Le livre qui me fournit ce passage , force de recevoir le baptême. Il
m'apprend aussi qu'Isaac Junius (12) ,
fut élevé aussi de la manière que
ministre deDelft, mettait Aconce, les le doivent être les enfans de bonne
remontrans et Socin dans la même clas- famille : on lui fit apprendre plu-
se , et le regardait comme un homme
qui voulait réduire à l'unité toutes les sieurs choses, et enfin la juris-
sectes et les enfermer dans une même prudence. La nature lui avait
arche , comme Noé enferma toutes donné de bonnes inclinations (A) ;
sortes d'animaux dans la sienne, où
et la religion le pénétra de telle
elles furent conservées quoiqu'ellc-5 se
nourrissent de diflërentes pâtures. On
sorte, qu'il souhaita ardemment
voit dans le même livre le jugement de pratiquer tous les préceptes
quePeltius faisait d'Aconce:c'estqu'en de l'Eglise afin d'éviter la mort
,

réduisant à un petit nombre les points éternelle qu'il craignait beau-


nécessaires au salut, et en demandant
la tolérance pour les opinions qui com-
pourquoi il s'appliqua
coujî. C'est
battaient les autres articles il n'y ,
soigneusement à la lecture de
avait point d'hérésies à quoi il n'ou- l'Evangile et des autres livres spi-

(9) Voelias , Dispot. Tlieolog. tom. I, p. Soi. (a) Paler meus ferè erat chrihianus Uriel .

(10) Thom. Crenhis , Aaimadv. Philolog. ït Acosia dans 50/j Exemplar Vita; liuraanœ ,
,

Historicar. , par(e //, pag. 32. inséré par ^\. LimborcU à la fin de son Arni-
(11) Rivet, apud Crenium, ibid; pag. 3o. ca Coliatio cum Judaeo de Verilale Eeligio-
(12) Isaac. Juuins inExamine Apologia; Rc- liis christianœ, imprimée à Amsterdam, en

monslraiilium , pag. 45 apud Crenium ibid. , , 1687 , in-!^.


,

ACOSTA. i85
rituels , et à consulter ne pouvant pas le profes-
les som- mais ,

mes des confesseurs mais plus il ser dans le Portugal il se réso-


:
,

s'attachait à cela plus il sentait lut à sortir de son pays. Il rési-


,

croître ses difficultés et enfin gna son bénéfice et il s'embar-


, ,

elles l'accablèrent que qua pour Amsterdam avec sa


si fort , ,

n'y pouvant trouver aucun dé- mère et avec ses frères qu'il avait
uoûment il se vit livré à des in- eu le courage de catéchiser (B) ,
,

quiétudes mortelles. Il ne voyait et qu'il avait effectivement im-


pas qu'il lui fût possible de s'ac- bus de ses opinions. Dès qu'ils fu-
quitter ponctuellement de son rent arrivés là , ils s'agrégèrent à
devoir , à l'égard des conditions la synagogue, et furent circon-
que l'absolution demande, selon cis selon la coutume. Il chan-
les bons casuistes et ainsi il dés- gea son nom de Gabriel en celui
;

espéra de son salut en cas qu'il d'Uriel. Peu de jours lui suffirent
,

ne le pût obtenir que par cette pour reconnaître que les inoeurs
voie. Mais, comme il lui était et les observances des juifs n'é-
difficile d'abandonner une reli- taient pas conformes aux lois de
gion à laquelle il était accoutumé Moïse ne put garder le silence
: il

depuis son enfance et qui s'était , sur une telle non -conformité ;
profondément enracinée dans son mais les principaux de la syna-
esprit par la force de la persua- gogue lui firent entendre qu'il
sion tout ce qu'il put faire fut
, devait suivre de point en point
de chercher s'il ne serait pas pos- leurs dogmes et leurs usages ; et
sible que ce que l'on dit de l'au- que, s'il s'en écartait tant soit
tre vie fût faux , et si ces choses- peu, on l'excommunierait. Cette
là sont bien conformes à la rai- menace ne l'étonna point il :

son. Il lui semblait que la raison trouva qu'il siérait mal à un hom-
lui suggérait incessamment de me qui avait quitté les commo-
quoi les combattre. Il avait alors dités de sa patrie pour la liberté
environ vingt-deux ans et voilà , de conscience de céder à des rab-
,

l'état oii il se tint il douta; et : bins qui étaient sans juridic-


quoi qu'il en fût il décida que ,
,
tion (C) , et qu'il ne ferait paraî-
par la route où l'éducation l'avait tre ni du cœur , ni de la piété ,

mis, il ne sauverait jamais son sentimens danss'il trahissait ses


âme. Il étudiait cependant en une pareille rencontre c'est :

droit, et il impétra un bénéfice pourquoi il continua son train.


{b) à l'âge de vingt-cinq ans. Or, Aussi fut-il excommunié et avec ,

comme il ne voulait point être un tel effet que ses propres frè- ,

sans religion et que la profes- res, je parle de ceux qu'il avait


,

sion du papisme ne lui donnait instruits au judaïsme n'osaient ,

point de repos il lut Moïse et


, lui parler ni le saluer quand ils
les prophètes y trouva mieux le trouvaient dans les rues. Se
,

son compte que dans l'Évangile voyant en cet état il composa


,
,

et se vit enfin persuadé que le ju- un ouvrage pour sa justification ,


daïsme était la vraie religion et il y fit voir que les observan-
:

ces et les traditions des Phari-


{b) La dignité de Trésorier dans une église
collégiale. siens sont contraires aux écrits de
,,

i86 ACOSÏA.
Moïse. A peine l'eut-il commencé périence le poussèrent beaucoup
embrassa l'opinion des sad-
qu'il plus loin. Il examina si la loi
ducéens car il se persuada for-
: de Moïse venait de Dieu et il ,

tement que les peines et les ré- crut trouver de bonnes raisons
compenses de l'ancienne loi ne pour se convaincre qu'elle n'était
regardent que cette vie , et se qu'une invention de l'esprit de
fonda principalement sur ce que l'homme mais , au lieu d'en ti-
;

Moïse ne fait aucune mention ni rer cette conséquence , je ne dois


du bonheur du paradis ni du , donc pas rentrer dans la commu-
malheur de l'enfer. Dès que ses nion judaïf/ue il en tira celle-ci
, :

adversaires eurent appris qu'il Pourquoi m'obstinerais-je à en


était tombé dans cette opinion , demeurer séparé toute ma vie ,

ils en eurent une extrême joie , avec tant d' incommodités , moi
parce qu'ils prévirent que cela qui suis dans un pajs étranger
leur serait d'un grand usage pour dont je n entends point la lan-
justifier auprès des chrétiens la gue ? Ne vaut-il pas bien mieux
conduite de la synagogue contre faire le singe entre les singes?
lui , etc. De là vint qu'avant mè- Ayant considéré ces choses , il re-
me que son ouvrage s'imprimât tourna au giron du judaïsme
ils publièrent (c) un livre tou- quinze ans après son excommu-
chant l'immortalité de l'àme ,
nication, et il rétracta ce qu'il
composé par un médecin , qui avait dit , et signa ce qu'on vou-
n'oublia rien de tout ce qui était lut. Il fut déféré quelques jours
le plus capable de faire pas- après , par un neveu qu'il avait
ser Acosta pour un athée. On chez lui. C'était un jeune gar-
excita les enfans à l'insulter en çon qui avait pris garde que son
pleine rue et à jeter des pierres oncle n'observait point les lois de
contre sa maison. Il ne laissa pas la synagogue ni dans son man-
,

de pii.bh'er un ouvrage contre le ger, m sur d'autres points. Cette


livre du médecin , et d'y combat- accusation eut d'étranges suites ;

tre de toutes ses forces l'immor- car un parent d'Acosta , qui l'a-
talité de l'âme (d). Les juifs s'a- vait réconcilié avec les juifs , se
dressèrent aux tribunaux d'Am— crut engagé d'honneur à le per-
sterdam, et le déférèrent comme sécuter à toute outrance (D). Les
une personne qui renversait tous rabbins et tout leur peuple se re-
les fondemens du judaïsme et du vêtirent du même esprit, et
christianisme. On le fit empri- principalement lorsqu'ils eurent
sonner on le relâcha sous cau-
, su que notre Acosta avait con-
tion au bout de huit ou dix jours, seillé à deux chrétiens qui étaient
on confisqua l'édition du livre venus de Londres à Amsterdam
et on lui fit payer une amende de ne pas se faire juifs. On le
de trois cents florins. Il ne s'ar- cita au grand conseil de la syna-
rêta point là le temps et l'ex- gogue, et on lui déclara qu'il se-
:

rait encore une fois excommu-


(c) L'an 1623.
nié s'il ne faisait les satisfactions
(d) Cet ouvrage est intilulé Examen Tra-
tlilionuni
,

qu'on lui prescrirait. Il les trou-


Pliilosoriliicaruin ad legem scrip-
taui. va si dures , qu'il répondit au'ii
ACOSTA. 1S7
ne pouvait pas Là-des- les subir. de philosopher sur les matières
sus ils résolurent de le chasser de de religion; car ils s'appuient
leur communion et l'on ne sau- ;
beaucoup sur ce que cette mé-
fait représenter les avanies qui thodeconduit peuàpeuàTathéis-
lui furent faites depuis ce temps- me ou au déisme (G). Je touche-
là et les persécutions qu'il eut
,
rai la réflexion que fit Acosta sur
àsouffrir de la part deses parens. ce que les juifs pour le rendre ,

Ayant passé sept années dans ce plus odieux affectaient de dire


,

triste état il prit le parti de dé-


, qu'il n'était ni juif, ni chrétien
,

clarer qu'il était prêt à se sou- ni mahométan (H).


mettre à la sentence de la syna-
(A) La nature lui auait donné de
gogue; car on lui avait fait en- bonnes inclinations.'] Il était si tendre
tendre qu'au moyen de cette dé- et si porté à la compassion qu'il ne
claration il se tirerait d'affaire ponvait s'empêcher de verser des lar-
quand il entendait le récit de
commodément , parce que les ju- mes quelque malheur arrivé ù son pro-
ges , satisfaits de sa soumission , chain. La pudeur avait jeté de si pro-
tempéreraient la sévérité de la fondes racines dans sou âme, qu'il ne
discipline. Mais il y fut attrapé : craignait rien autant que ce qui pou-
on lui fit subir a. toute rigueur vait le déshonorer. Courageux et sus-
, , . .,-,,, ceptible de colère dans une occasion
.
, .

lapénitence qui lui ayaitete da- légitime, il s'opposait à ces insolens


bord proposée (E). Voilà ce que et à ces brutaux qui se plaisent à in~
j'aitiré, sans déguisement ni al- sulter, et il se joignait au parti faible.
C'est le témoignage qu'il se donne. /«-
tération, et sans prétendre ga-
T c . •!• j- prmorum partes aajuuare cupiens ail- ,

rantir les faits voila , dis-]e ce n


(,) ^t illis poiiùs me socium adjun-
: ,
^

que j'ai tiré d'un petit écrit cona- gens.


posé par Acosta (e) , publié et (B) Qu'il at^ait eu le courage de ca-

réfuté par M. Limborch ( n. On 'f


"^e'-]
^ "'«'^blie pas les cuxon-
1
,., , j stances qui étaient propres a relever
croit quil le composa peu de le sacrifice qu'il faisait à sareHgiou.
jours avant sa mort, et dejDuis 11 observe qu'il renonça à un bénéfice
qu'il eut résolu de s'ôter la vie. lucratif et honorable et à une belle ,

maison, que son père avait fait bâtir


Il exécuta cette étrange résolu-
ville dans le meilleur quartier de la
tion un peu après qu'il eut man- (2). 11 ajoute le péril de l'embarque-
qué son principal ennemi (g) : ment ; car ceux qui sont descendus
car dès que le pistolet qu'il avait des Juifs ne peuvent sortir du royau-
me, sans en obtenir du roi une per-
pris pour le tuer dans le temps
mission spéciale Nai^eni adscendimus :

qu'il le vit passer devant sa mai- non sine magno periculo {non licet il-
son eut fait faux-feu, il ferma lis qui ab Hebrœis originem ducunt a

sa porte , et prenant un autre regno discedere sine speciali régis ,


,
facullale (">). Enfin, il dit que si l'on
pistolet, il s'en tua {h). Cela se
el^t su qu'il parlait de judaïsme à sa
fit à Amsterdam mais on ne sait mère et à ses frères on l'eût fait pé-
;
,

pas au vrai en quelle année (F). rir. Sa charité le porta à négliger ce


Voilà un exemple qui favorise danger Quibus ego fraterno amore
:

motus ea comniunicai^eram quœ niilii


ceux qui condamnent la liberté
super religione i^isa J'utrant magis
,

(e) Intitulé, Exemplar Vitœ liumanaE. consentanea, licet super aliquibiis dii-

(f) ^oyez ci-dessiis la citation (a).


(i) Uriel Acosta, in Exemplari Viiœ Lumana ,

(gf) C'était son frère ou son cousin. Lim- iiii!. pag. 346.
horcli, in prœfal. Exeiiipîar VitiK liumati. (2) flnil. pas. 34'.
,

{h) Limborch , ibid. (S) Ibid.


, ,

.88 ACOSTA.
christianis-
les blâmerait de traiter le
quodquidem in magnum ma-
hitarem vieux palais qui a be-
;
tantum eiX me comme un
luni nicum poterat recidere ,
parts tant
Inqiii soin d'étancons de toutes ,

in eo regno periculum de talibus et le judaïsme


passant il menace cle ruine;
(i; Nous pouvons voir là en
que les Espagnols et les Portugais
comme une forterefse, qu'il faut ca-
tout ce que la po- nonner et bombarder incessamrnent
n'ont rien oublié de On peut juste-
plus sévère si on le veut aflaiblir.
litique la plus fine et la
pour maintenir un ment condamner certaines manières
peut inventer mais
parti, lis ont employé tout cela
pour de maintenir la bonne cause;
christianisme et pour enfin elle a besoin d'aide et la défian- ,

le soutien du
mère de la sûreté. Voyez la
,

Ton aurait ce est la


la ruine du judaïsme, et
mis remarque (B) de l'article Drabicios et ,
i^rand tort de les accuser d'avoir
avec la remarque (E) de l'article Lubie-
l'Église sous la protection céleste,
les dispositions de ceux qui
attendent NIETSKI.
tout tranquillement de l'efficace
de (Cj des rabbins qui étaient sans A
doute une
leurs prières. On dirait plutôt
qu ils juridiclion.'l II y a sans
tribunaux,
païen grande diflérence entre les
ont suivi les avis qu'un poète avait à craindre
d'agricul- que notre Acosta
a donnés sur une affaire
dans son pays et le tribunal de la
ture : Celui-ci ne
synagogue d'Amsterdam.
Non lamen ullti magis prœsens fortuna la-
peut infliger que des peines canoni-
boruiii est,
Qu'am siquti f'erro poluil re'cmdere summum ques ;
mais Tinquisition des chrétiens
Vlceris os. Alilur viûum vwilque tPgendo peut faire mourir, car elle livre au
,
:

bras sécnlier ceux qu'elle condamne.


D'uin medicas adhibere manus ad vulnera
pasLor
Abnegal et meliora Deos sedel omina pos- Je
,
ne m'étonne donc pasqu'Acosta ait
cens (5j. eu moins de peur pour l'inquisition
des juifs que pour celle de Portugal:
Ou bien on dirait qu'ils se sont réglés il savait que la synagogue n'avait
sur les reproches que Caton fit aux. point de tribunaux qui se mêlassent
Romains, lor^^qu'il les bl.lma de se des procès civils ni des procès cri-
confier en l'assistance des Dieux , qui minels et ainsi il regardait ses ex-
;

n'exaucent jamais les fainéans , ajou- communications comme un brutum


tait-il car la paresse est une marque fulmen il ne découvrait à la suite
j ;

de cette peine canonique ni la mort ou


de l'irritation du ciel, f^ns inerlLd
et moUitid animi aliiis aHuni exsptc- quelque aiifre fonction de bourreau ,
tantcs cunctnmini, i^idelicel diis im- ni la prison, ni les amendes pécuniai-
rncrlaiiius confisi, qui hanc lempubl. res. Il crut donc qu'ayant eu assiz ,

in maxinds sœpè periculis seifwêre. de courage pour ne trahir pas sa


JYon i^otis neque iuppliciis muliebri- religion en Portugal, il devait à beau-
,

bus auxilia deorum pnranlur : l'igilan- coup plus forte raison avoir la har-
do, aqendo, benèronsulendo ^prospéré diesse de parler selon sa
conscience
omniacedunt Ubi socordiœ telealqne parmi les juifs, dussent - ils 1 es-^
nequicquam communier; car c'était tout ce que
ignauiœ tradideris ,
tiens

implores :
iunt (6) En-
irati infestique pouvaient faire des gens qm n ont
fin on dirait que la leçon pour laquelle point de magistrature- Quia minime,
ils ont le plus de docilité, est la der- decebat ut propter talem mtlum terga
nière partie de l'axiome qu'un auteur i^erleret il.le qui pro libertate
natale
moderne a rapporté de cette façon. /i solum et utihtates alias conlempsernt
jaui pour aimi dire s'abandonner a la et succiimbere hominibus
prœsertïni
,

providence de Dieu, comme si toute JuKisDiCTioNEM non habenUbus, in tali


la prudence humaine était inutile; et causa necpium nec i'irile erat; decrei'i^
iljaut se gouverner par les règles de potiiis nmnia perferre et in
sententia
la prudence humaine, comme s'il n'y perdurare (8). Mais il lui arriva ce
a^int point de proi'idence{"j Us se mo- .
qui arrive à pre-^que tons ceux
qui ju-
queraient sansdoulcde toutauteurqui gent des maux combinés. Us
s'imagi-

nent que c'est dans l'union de deu.^


(4) Jf"<i-
(5) Virgil. Gf orgie, lih. III , vs.
4->î.
ou troispeines que consiste rinfoitune^
(6i Sallusl. in Bello Catilm. pag. i6o.
galaates , lom. /, au Dii-
(7) Colin, OEuvres Exemplar Viu bara. pag- 347-
(8) Acosia,
cours sur la Vérité des Songes, png. 260.

ACOSTA. i8p
et qu'on serait pas fort à plaindre si
ne embarras lorsque, n'ayant pas voulu
l'on n'avait à soutlrir que l'un de ces subir la pénitence ignominieuse que
maux éprouvent le contraire,
Ils la synagogue lui prescrivait, il se vit
quand providence ne les fait passer
la encore dans les liens de l'excommuni-
que par l'une de ces deux ou trois dis- cation ? On crachait en le rencontrant,
gr.îces. Ils sentent beaucoup plus
la et l'on instruisait à cela les petits gar-
rude qu'ils n'avaient cru qu'elle le ju- çons. Mulii eorum Iranseunte me in
rait L'inquisition de Portugal panit pliiteâ spuebnnt , quod etiam et pueri
terrible au juif Acosla. Pourquoi? lUorumfnctebant ab illis edocti; tan-
Parce qu'il la voyait jointe avec le tiim non lapidabar quia facultas de- ,

pouvoir ou immédiat ou médiat d'em- erat (la). Ses parens le persécutèrent;


prisonner, de torturer, de brùlt-r les personne ne fallait voir dans ses ma-
gens. S'il ne l'eût considérée qu'en tant ladies. Coupons court. On le vexa en
qu'elle excommunie, il n'en eût pas tant de manières, que l'on extorqua
eu grand'peur. Voilà le sujet de son enlin de lui la soumission que l'on de-
mépris pour les menaces de la syna- mandait Durai'it pugiia ista per an-
:

gogue d'Amsterdam. .Mais il connut nos scptem , intra quoi lempus incre-
par expérience, que la simple faculté dibilia passas swn (i3j. Nous verrons
d'excommunierest bien terrible, quoi- dans la remarque (E, quelle fut la
que entièrement privée des fjoctions peine qu'on lui imposa. 11 connut alors
du bras séculierOn le regardait com- plus que jamais, combien sont terri-
me un hiboudepuis sou excommuni-
, bles ceux même qui, sans aucune
cation. Ses propres frères n'osaient pas juridiction , disposent des lois de la
même le saluer Ipsi fralres inihi,
: discipline.
qiuhns ego prœceploi J'ueram nie trans- Je me garde bien de dire que les rai-
ibunt, nec in plated salutabant , prnp- sons des indépendans soient considé-
ter metum illorum (g). Les petits en- rables eux qui trouvent si mauvais
,

fans couraient après lui, avec des que l'Eglises'atlribueledroitd'excom-


huées dans les rues, et le chargeaient munier, c'e-)t-a-dire , d'infliger des
de malédictions ils s'attroupaient
:
peines qui sont quelquefois plus infa-
devant sou logis et ils y jetaient des mantes que la fleur de Us et qui ex- ,

pierres : janiquf. J'aces et saxa isolant. posent à plus de ma'heurs temporels


Il ne pouvait être tranquille ni dans que les peines afilictives à quoi les
sa maison, ni deliors Pueri iiloruru :
juges civils condamnent. Les arrêts
h rahbinis eiparentibus eJocti turniu- , des juges ne supprimant point les ac-
lim pt-r p'ateas coni'eniebaiit, et elatis tes ou les offices de l'humanité, et
i'Ocibus iitiki maiedict-banl , et onini(^e- encore moins les devoirs de la paren-
nis conlurneliis irritabtnt, hœreticum té. Mais l'excommunication arme quel-
et defectorein inclainantes. yiUquando quefois les pères contre les enfaus, et
eliam , unie fores ui-^as con^regabun- ceux-ci contre les pères elle étoufl'c :

tur, lapides jaciebant, et nikil inlen- tous les senliinens de la nature; ell<^
tatuni relinquebunt ut me turbareiit, ne rompt de l'amitié et de l'hos-
les liens
tranc/uillus eliani in domo proprid age- pitalité ; gens à la con-
elle rétluit les
re p-ssin (lo). Les ma ix à quoi son dition d.^s pestiférés, et même à uo
excommunication l'assujettit furent si abandon beaucoup plus grand.
rudes, qu'il se sentit entin incapablede
les supporter; car quelque haine qu'il
(Dj Un purent.... se crut engagé —
à lepersécuter h toute outrance.^ Voi-
eût pour la syuagogue , il aima mieux ci les maux qu'il lui fît. Acosta était
y revenir par une réconciliation si- sur le pjint de convoler en secondes
mulée , que d'en être séparé ou- noces; il avait beaucoup d'eiiéts entre
vertement. Aussi disait-il à quelques lesmaius de l'un de ses frères, et un
chrétiens qui voulaient se faire juifs ,
grand besoin de continuer le com-
qu'ils ne savaient pas quel joug ils merce qui était entre eux. Ce parent
allaient se mettre sur la tête lYeicie- :
lui fut contraire sur tous ces chefs ;
jugurn suis uerlicibus ini-
b.tnt quitte il empêcha le mariage , et il engagea
ponerent (l'j. Mais quels furent ses le frère à retenir tous ces efl'etslà, et

(y) Arosta , ExempUr Vitse luira, pa^- 347-


(12) Ihid. ,
png- 340
flij Ihid., pag. îi"- (iB; Ibid.
,
, , ,

rgo ACOSTA.
à ne plus négocier avec son frère. Ces jarn porta coeli mihi erat aperla, quœ
procédures doivent être considérées antea fortissimls seris clausa me a li-
comme Tune des raisons qui confir- rtiine et ingressu excludebat(i'j). Acos-
maient Acosta dans ses impiétés y car ta reprit ses habits et s'alla couche
,

il se persuada sans doute que ces par terre à la porte de la synagogue


passions et ces injustices pouvaient et tous ceux qui sortirent passèrent
ctre autorisées par quelques passages cru qu'on serait bien aise
^H| lui. J'ai
du Vieux Testament où la loi ordon- , d^ trouver
ce petit morceau des ici
ne aux frères, aux pères, et aux ma- cérémonies judaïques (i8).
ris, de n'épargner point la vie de (F). On ne sait pas au (^rai en quelle
leurs frères, de leurs enfans de leursannée.'l II y a beaucoup d'apparence
,

femmes, en cas de révolte contre la qu'il se tua peu après la cérémonie de


son absolution, enragé du traitement
religion (i4)' Et il faut savoir qu'il se

1- ni-v
de ——
servait de cette preuve contre la loiqu'il avait souffert contre l'espérance
,^y.Aia„A^^t .,,,\,^o 1^,
qu'il avait conçue dune peine miti-
il prétendait qu'une loi
Moïse; car ;i
qui renversait la religion naturelle gée. Mais cela ne peut point fixer le
ne pouvait pas procéder de Dieu l'au- temps avec précision
, puisqu on ,

teur de cette religion (i5). Or, dit- ignore l'année où il fit cette péni-
il, la religion naturelle établit un lien tence. Si l'on savait combien il y avait
d'amitié entre les parens.Voyez ce que de temps qu'il était excommunié ,

M. Limborch a répondu à ce sophisme quand le livre fut mis au


du médecin
(.6) jour, l'an i623 , il ne serait pas difE-
(E) yi toute rigueur la pénitence cile de calculer juste ; puisqu'il ob
qui lui auait été d'abord proposée.'] serve que sa première excoramunica-
Voici la description qu'il en fait. Une tion dura quinze ans, et que la seconde
grande foule d'hommes et de femmes en dura sept , et que celle-ci suivit de
s'étant rendus synagogue pour
à la près celle-là. On suppose , dans la Bi-
voir ce spectacle, rentra, et au il bliolhéque universelle, qu'il se tua
temps marqué il monta en chaire, et environ l'an 1647 (19); mais d'autres
lut tout haut un écrit où il confessait disent que ce fut en 1640 (20).
qu'il avait mérité mille fois la mort, (G) Que cette méthode conduit peu
pour n'avoir point gardé le jour du h peu a l'athéisme, ou au déisme."] A-
sabbat, ni la foi qu'il avait donnée et , costa leur sert d'exemple. Il ne voulut
pour avoir déconseillé la profession point acquiescer aux décisions de l'E-
du jiidaïsme à des gens qui se voulaient glise catholique parce qu'il ne les
,

convertir; que pour l'expiation de ces trouva point conformes à sa raison :

crimes, il était prêt de souffrir tout et il embrassa le judaïsme, parce


ce qu'on ordonnerait, et qu'il promet- qu'il le trouva plus conforme à ses lu-
tait de ne retomber jamais dans de mières. Ensuite, il rejeta une infinité
telles finîtes. Etant descendu de chaire, de traditions judaïques , parce qu'il
il reçut ordre de se retirer à un coin jugea qu'elles n'étaient point conte
delà synagogue, où il se déshabilla nues dans l'Écriture il rejeta mêmi :

jusqu'à la ceinture , et se déchaussa , l'immortalité de l'ame, sous prétexte


et le portier lui attacha les mains à que la loi de Dieu n'en parle point ;
une colonne ensuite le maître chantre
:
et enfin il nia la divinité des livres
,

lui donna trente- neuf coups de fouet de Moïse, parce qu'il jugea que la re-
ni plus ni moins ; car, dans ces sort s ligion naturelle n'était point conforme
de cérémonies, on a soin de n'excéder aux ordonnances de ce législateur.
pas le nombre prescrit par la loi. Le S'il eût vécu encore six ou sept ans
prédicateur vint ensuite et le fit as- ,
il aurait peut-être nié la religion na-
seoir par terre, et le déclara absous turelle, parce que sa misérable raison
de l'excommunication; de sorte que lui eût fait trouver des difficultés
l'entrée du paradis n'était plus fermée
pour lui comme auparavant. Et ita (17) Acosta , Exemplar Vium. Viiœ, pag. 35o.

(18) Je l'ai tire de TExemplar humana; Vitae ,


(li) Voyt% le livre du Deutéionome , chap. J'Acosta ,
pag. 349 et 35o.
xiir. (ig) Biblioth. Univers, lom. fil pag. 3a7. ,

(i5) Acosta, Exemplar liumanae Vita:, p. ïSi. (20) Joh. HelvTcus Willemeius i« Dissertât,
(16) Philippus à Limborch m KfrruUt- Urielis [iliilologicà de Sadduca;is, pag. ull- Il cite Mul-
Acosta , pctg. 36i , el sea- 'criis . Jiid.iïsm. Proleg. pag. 71- •
,

ACOSTA. Ȕ)^
dans l'hypothèse de la provideuce et » quibus me honoribus fuisses cwnu-
du libr arbitre de l'Être éternel et » laiurus et ila nunquhin iinguam
:

néces.-'aire. Quoi qu'il en soit il n'y , » tuuni possem evadere ; unicuni hoc
a personne qui eu se servant de la
, " '^/^"à''""» hibens, nemp'e ad genua
raison, n'ait besoin de l'assistance de » tua procumbere etfœdissimos pedes
,

Dieu 5 car sans cela, c'est un guide


,
)) tuostuas inquarn ncfarias et pu-
,

qui s'égare et l'on peut conii)arer la


: » dendas instiiutiones o^culun. » Il se
philosophie à des poudres si corrosi- sert d'une autre léponsej car il de-
ves, qu'après avoir consumé les chairs mande à ses adversaires si , outre les
baveuses d'une plaie , elles rongeraient trois religions qu'ils ont nommées, et
la chair vive, et carieraient les os , et dont les deux dernières leur parais-
perceraient jusqu'aux moelles. La sent moins une religion qu'une ré-
phiiosophierétute d'abord les erreurs, volte contre Dieu , ils en reconnais-
mais, si on ne l'arrête point là, elle sent quelque autre. Il suppose <(u'i!s
alta(pie les vérités : et quand on la reconnaissent une religion naturelle
laisse faire à sa fantaisie, elle va si comme véritable , et comme un
loin qu'elle ne sait plus oiî elle est moyen de plaire à Dieu , et qui suliit
ni ne trouve plus où s'asseoir. Il faut à sauver toutes les nations , excepté
imputer cela à la faiblesse de l'esprit les Juifs. C'est celle qui est contenue
de riiomme , ou au mauvais usage dans les sept préceptes que Noé et ses
qu'il fait de
prétendues forces.
ses descendans jusqu'à Abraham obser-
Par bonheur, ou plutôt par une sage vèrent. /;'/ a donc selon i^ous dit-il. ,

dispensation de la providence, il y a une religion sur laquelle je puis m' ap-


peu d'iiommes qui soient en état de puyer quoique je descende des Juifs-
,

tomber dans cet abus. car, si mes prières ne peuvent pas vrais
(H) .^Jflctaienl de dire qu'il n'était engager 'a me permettre de me méier
ni j mJ'y ni ihretien, ni ntuhnmétan.'] dans la foule des autres peuples je ne ,

Il y avait en ola, répondait-il, et de laisserai pas de me donner celte li-


la malire et de l'ignorance j car, s'il cence. La-dessus il fait l'éloge de In.
,

eût été chrétien, ils l'eussent con>idé- religion naturelle.


ré comme un idolâtre abominable, Par sa première réponse il est aisé ,

qui, avec le fondateur du christia- de connaître que les juifs lui fai-
nisme, eût été puni du vrai Dieu saient une objection plus spécieuse
comme un révolté S il eût suivi la re- que forte: elle avait moins de solidité
ligion mahométane ils n'eussent ,
que d'éclat ; elle était jilus propre à
point parlé de lui moins odieusement. les amener à leurs Uns que conforme
Il ne pouvait donc en nulle manière aux lois exacSes du raisonnement ;
se garantir des coups de leur langue, elle était au fond un peu suspecte de
à moins qu'il ne s'attachât dévote- supercherie. Voici d'où vient son
aieut aux traditions pharisaïques. éclat. L'esprit de l'homme est telle-
Considérons ses propres paroles Scio :
ment fait, que, par les premières im-
adi'ersarios i.^tns, dit-il (ai), ut nn- pressions la neutralité en fait de
,

men meum coram indoctâ pl-he dila- cuite de Dieu le choque plus rude-
nient , solitos esse dicere , « Isle nul- ment (jue le faux culte et ainsi dès ; ,

1) tant habet religionrrn , Judœus non qu il entend dire que certaines gens
j) est , non chnstinnus , non mahorne- ont abandonné la religion de leurs
5) tan'ds. yide priiis phnrisœe quid , ,
pères sans en prendre une autre, il
,

» dicas ;cœcus enim es et licel ma- ,


se sent saisi de plus d"horreur que
11 litid abundes tamen sicut cœcus .s"il apprenait qu'ils étaient passés de
,

» impingis. Quœso , die mihi , si ego la meilleure à la pire. Celte première


» christianus esseni, quid fuisses dic- impression l'éblouit, et le remue de
}) turus ? Planum est , dicturutn te , telle sorte qu'il se règle là-dessus
Il J'œdissimum me esse idololatram ,
pour juger de ces gens-là ; et c'est à
» et cuni JeiU lYazareno chnstiano- quoi il proportionne les passions qu'il
)> rutn dnctore pœnns t'e/ô Deo solu- conçoit contre eux. Il ne se donne
j) turum à quo defecerani. Si maho-
,
point la patience d'examiner profon-
;j mctanus esstm , norunl etia'u omnes dément si en effet il vaut mieux s'.d-
1er ranger sous les étendards du diable,
(il) Acosta, Eicmpl.ir. hnm. Vit» ,pni;. 35i. dans quelqu'une des fausses religions
,

19^ ACROMUS.
que cet ennemi de Dieu et des hom- une fausse religion que de n'en ai'oir
mes a établies que de garder la neu- aucune. Nonobstant cela nous con-
, ,

tralité. On peut donc croire que les clurons que c'était un personnage
Pharisiens qui perse'cutaient Acosta, digne d'horreur, et un esprit si mal
,

ne faisaient valoir leur objection tourné qu'il se perdit misérablement ,

qu'à cause qu^ils la trouvaient propre par les travers de sa fausse philoso-
à eflaroucher le peuple et à intéres- phie.
ser les chrétiens dans ce procès. J'a-
Toue qu'ils auraient fait moins de %-a- ACRONIUS ( Jean ) enseigna
carme s'il eût embrasse' le christia-
les mathématiques et la médecine
nisme à Amsterdam , ou le mahotné-
tisme à Constantinople ; mais ils ne à Baie avec beaucouj3 de réputa-
l'eussent pas trouvé ellectivement tion , et composa quelques livres,
moins perdu, moins damné, moins ^g Terrœ Motu de Sphœrd, de ,

apostat ménagement n'aurait


: leur
Astrolabii et Annuli Aslrono—
été qu'une retenue de politique, et
l'eflét d'une juste crainte du ressenti- mici confectione. Il était de Fri-
ment de la religion dominante. A se , et mourut à Baie à la fleur
juger des choses selon les premières de son âge l'an 563. Cet auteur , 1

impressions , il n'y a guère de protes-


a échappé à la diligence de Vos-
tans qui sur la nouvelle que Titius
,

aurait quitté la profession de l'église sius («) quoique Swertius et Va- ,

réformée , sans entrer dans aucune lère André l'eussent mis dans leur
autre communion , ne prétendissent Bibliothèque des Pays-Bas , où
qu'il serait plus criminel que s'il
d'ailleurs ils ont oublié un autre
s'était fait papiste; mais je demande-
rais volontiers à ces protestans: f^ous Jea\ Acronius, qui était minis-
tles-i'ous bien sondés ? ^iuez-i'ous tre et natif peut-être de la mê-
,

bien examiné ce que uous diriez en me province que le précédent. Ce


cas qu'il J'dl devenu un grand déi'Ot
du papisme, qu'on le i'il chargé de ministre était un esprit fort in-
reliques et courir a toutes les proces-
,
quiet et fort séditieux. Il aban-
sions , et qu'en un mot il pratiquât donna l'église de Wesel dans un
tout ce qu'ily a de plus outré dans
temps oîi elle courait un grand
l'idolâtrie et dans les superstitions
des moines ? Pourriez-v^ous répondre
risque ; il fît connaître à Deven-
que uous ne changeriez pas de lan ter qu'on n'aurait pu l'y faire
gage. , si uous appreniez qu'il s'était pasteur sans établir dans la ville
fait juif, ou mahometan, ou adora- ^^ f^rt mauvais citoyen il se sé- ;
teur des pagodes de la Chine r tncore *, i i? t i .^ '

un coup, de
c'est ainsi que l'esprit
para peu honnêtement de 1 église
l'homme est tourné la première : de Groningue il n eut pas à Fra ;

chose qui le frappe est la règle de ses neker la science qui lui était né-
passions il prolite de l'état présent
; cessaire pour la profession en
et ne cherclie point ce (lu il dirait sous .i ' -i ir t7
• /• .

une autre conjoncture. Ce particulier théologie OU il se fourra. Enfin


nous a quittés et n'a point pris de , il fut ministre à Harlem , et s'y

parti ailleurs j c'est |>ar là qu'il faut comporta comme de coutume : il


l'attaquer soii indifiérence doit être
:
contredisait , il critiquait tout,
son plus grand crime s il s était lait : t >i ^ •
i •
^i. n •

paien, nous l'attaquerions par là, et


L historien de cette ville ne i
lui
nous dirions , ou pour le moins nous ôte pas la qualité d'homme fort
le penserions Encore s'il s'était tenu
: docte; mais il lui donne aussi
neutre et attaché au gros de la reli- celled'un esprit turbulent {b).
gion naturelle, passe; mais, etc.
seconde réponse, Acosta ô-
Quelqu'un le compare à Heshu—
Par la
lait à ses adversaires un grand avan- {a) Il n'en parle pas dans son livre d(-
tage il se mettait à couvert de celle
: Scienliis Malliematicis.
forte batterie // faut mieux ai^oir: (ù) Tlieodoro Screvrlius.
. , ,

ACT OR- 193


sius , contre lequel on fit courir mourut en chemin (a). C'est
ce distique : aussi le nom du grand-père de

Quœrilur, ffeshusi, quartâ cur pulsus ab


Patrocle car Menetius père de
;
,

urbe ? Patrocle, était fils d'AcTOR et d'É-


In promptu causa est, sediliosus eras.
gine. Cet Actor était Locrien
,

en flamand un selon quelques-uns (b) mais il


Acronius a fait li- ;

s'établit dans l'îled'OEnone, après


vre de Jure Patronatûs , oii il
a inséré pkisieurs citations du avoir épousé Égine fille du fleu- ,

Droit canonique (c). Je lui don- ve Asopus et y devint père de ,

nerais volontiers V Elenclius or— Menetius. D'autres disent qu'il


ihodoxus pseudo-Religionis Ro- était Thessalien fils de Myrmi- ,

mano-Catholicœ qui fut impri- don qui était fils de Jupiter (c)
,
,

mé à Deventer Pan i6i5. Il et que la nymphe Egine ayant


,
,

pourrait bien être aussi l'auteur déjà eu un enfant de Jupiter ,

du traité de Studio Theologico nommé jEacus s'en alla en Thes-


,
,

que le sieur Konig attribue à ce- salie oii Actor fut d'assez bonne ,

lui qui a écrit de la Sphère. Le volonté pour l'épouser sans se ,

même Konig parle d'un Ruard faire un scrupule du noviciat par


Acronius qui publia des Expo- où elle avait passé (d). H en eut
,

sitions catëchétiques en l'année plusieurs enfans qui conspirè- ,

1606. On aurait pu ajouter qu'au rent contre lui (e) ce qui l'obli- ,

commencement des troubles de gea à les chasser et à donner son


l'arminianisme il composa quel- royaume à Peleus avec sa fille Po-
que chose contre l'hypothèse des lymèle. Peleus était fils d'iEacus ,
arminiens touchant le pouvoir et par conséquent petit-fils d'E-
des magistrats dans les matières gine il était réftigié à Phthie où : ,

de religion , et que ce fut lui qui Actor régnait il s'y était , dis-je, ;

publia un sermon qu'Uytenbo- réfugié après qu'il eut tué son


gard avait prêché à la Haye avant frère Phocus. Il y a eu un Ac-
les troubles , fort différent de la
tor, fils d'Hippasus qui fit le ,

doctrine qu'il soutint depuis sur voyage des Argonautes (y) et ;

cette question {d). Ruard Acro- un autre qui était fils de Neptune
nius fut l'un des six tenans des et d'Agamède (B), fille d'Augeus
réformés contre les arminiens (g) et un autre (h) ;qui était ,

dans la fameuse conférence de la fils d'Axeus (C) et père d'Astyo-


Haye, en 161 1 que , dont le dieu Mars eut deux
fils qui commandèrent au siège
(c) Voyez Martin. Schoockii Exercilat.
Sacr. pag. 255 edit. in-[\°.
de Troie les troupes d'Aspledon
;

(d) Sa? Voetii Polit. Eccles. tom. I, p. 126. et d'Orchomène , villes de Béotie.
Carol. Slephanus, i/zDictionar. Histor.
ACTOR (A) est le nom de plu- (a)
(è)Scholiast.Honieriin lliad., lib.XVIII.
sieurs personnes dans l'histoire (c) Eustath in lliad. /; Scholiast. Apol-
lon, in lib. IV.
fabuleuse. C'est ainsi que s'appe-
(d) Scholiast. Pindari in Olymp. IX.
lait l'un des compagnons d'Her- (e) Eustalh. in lliad. //.

cule dans la guerre des Amazo- (/; Hygin. cap. XIV.


Id. cap. CLVII.
nes ', qui
nés ayant été messe
eie , vou-
blessé '. H w h
~i
,
' J T,{
(Il)
'^
Homer. lliadis Iw. a-
,
tt
II; r>,,c-,n
l'ausan. m
,„

lut S en retourner chez lui , et Bœoticij.

TOME I,
,g4 ACTUA RIUS.
Un autre Actor , fils de Phorbas,
ou selon quelques-uns, de Molione et
,

de Neptune. Homère les croyait fils de


bâtit une ville dans l'Elide son ,
ce Dieu car il ajoute qu'ils auraient
j

pays natal à laquelle il donna


, éfë tués si Neptune leur père ne fût
,

le nom d'Hyrmine , qui était ce- venu à leur secours dans la mêlée eu .

mère
Augias , roi les couvrant d'un brouillard épais
lui de sa (i). ;

d'Élide, qui, selon quelques-uns,


Kx- TTOXê/ZOC iTOLûea-i, XstXti-J/Stç JISfl 5T0\-
était son frère (A") , et dont les
X«(l).
étables nettoyées par Hercule ont JViti iptos paler laie dominons Neplunus
fait tant de bruit, l'associa lui et Ex pugnâ ereplos servdsset tectos caligine
ntuitd.
ses deux fils à son royaume (Z).
(C) Qui était fils dATeus."} Homère
Ses deux fils se nommaient Eu- nomme Azeus
le :

rytus et Cteatus, et poétique-


"Oi/Ç Tîtcit' Kçuix^ efô//£i)"AKTopoî'AÇê<'-
ment Molionides a cause que ,
cT*. (2).
leur mère s'appelait Molione.
Méziriac (3) relève une faute de l'au-
A'oyez l'article Moliomdes. En- teur du grand £tYmologicum,qm a cru
fin , il y a eu un Actor parmi les que l'Actor, dont Homère parle ici , est
Aurunces , qu'on nous a désigné le grand-père de Patrocle. C'est à quoi

comme un brave de la première Homère ne songeait point. 11 parle d'un


Actor Béotien, petit-filsd'Erginus, et
volée (D). de Cly menus. Méziriac
arrière-petit-fils
(i) Pausan. lih. V, pag. \!\9. cite pour cette filiation Eustathius sur
(A:) ApoUodor. BibliolLecae lib. Il, pag. le 11*. livre de l'Iliade , et Pausanias in
l38 , edil. Salmuriensis. Bœoticis mais Pausanias donne Cly-
;
(/) Pausan. lib. F ,
pag. I^S.
menus pour grand-père à Actor , et
non pas pour bisaïeul (4)-
(A) ACTOR.} M. Moréri a chan- (D) Un ACTOR
.... qu'on nous
gé sans raison ce mot en celui d''yicto- a désigné comme un braire de la pre-
rius mais cette faute est légère, en
:
mière uolée.'\ C'est Virgile qui nous
comparaison de celle où il tombe peu l'a ainsi dépeint. Voici comme il s'en
de lignes après, lorsqu'il prouve par exprime dans le XH* livre de l'Enéide . :

ces paroles,
yalidam vi corripil hastam ,
QuœfuU Acloridœ cum magno semper Achille, Actoris Aurunci spoliuin ,
quassaU^ue tretnen-
tern.
qu'Ovide, dont il les cite, a parlé d'un Vociférant : Nunc , 6 nunquamfrustrata vo-
Actorius. Comment n'a-t-il point vu calus
Hasla ineos nunc tempus adest : le maximus
qu'il n'est point question en cet en-
,

Actor ,
droit d'un homme qui s'appelât Acto- Te Turni nunc dexlra geril (5)
rius , ou Actorides ; mais de Patrocle ,
(i) Homer. Iliad., lib. XI vs. •jSo.
que les poètes, quand la versification Idem, Illad., lib. II.
,

(2)
le demande, ont accoutume de dési- (i) Epîlres d'Ovide pag. 44- ,

gner par le nom patronymique Acto- (4) Pausan., hb. IX, pag. iii.
rides qui veut dire issu d' Actor? (5) Virgil. S.ae\à., lib. XII , vs. gS el seif.
,

de Neptune et dAgamcde,']
(B) Fils
Munckerus , dans son Commentaire
ACTUARIUS (A) , médecin
sur la CLVII fable d'Hygin prétend ,
grec dont on a plusieurs ouvra-
,

que le scoliaste d'Homère veut que ges (B). Ambroise Léon de Noie ,
cet Actor soit fils de Neptune et de qui en a traduit quelques-uns ,
Molione mais ce n'est pas ce que dit
et qui lui donne beaucoup de
;

le scoliasfe. Homère dans le 749*^- ,

versdu 11*^. livre de l'Iliade, fait men- louanges , avoue qu'il n'a pu dé-
tion de deux frères, qu'il nomme couvrir quel homme c'était , ni
'AxTOf/cevê MoÀi'ovê, Aclorionas Molio- quelle était sa patrie (a). Pierre
nas. Son scoliaste dit là-dessus qu'il
faut entendre par ces mots Cteatus , {a) Apud Gesnerum ,
Bibliollieca; /oho 3
et Eurytus, filsd'Actoret de Molione, verso
ACUNA.
,g5
Castellan, dans la Vie des illus- Medicamentorum compositione ; Kuel
a traduit ce traite Melhodi medentli,
très Médecins etWolfgang Jus-
:

,
libri F/, traduits par Henri Mathisius]
tus , dans. la Chronologie des de Bruges, et imprimés à Venise, l'an
Médecins, avouent la même cho- i554 (5).
se {b). M. Moreau , dans son (C) Qu'il a l'écu ern^ironl'an 1 100.
]
M. du Gange n'ose le placer sous l'em-
Traité de la Saignée durant la
pire d'Alexis (6) encore que son li- ,

pleurésie , croit qu'il a vécu en- vre de Affectlbus spiriids


animalis ,
viron l'an lïoo (C). soit dédié à J. Racendytes, et que Nice-
tas, au livre de l'Histoire d'Alexis,
II
(6) Voyez Meicklinus, dans son Linde-
nius renovatus, pag. 6.
nombr. 5 parle d'un Racendytes. lî
,

approuve ce que Lambécius a décidé


{k)ACTXJARIUSr[ Quelques-uns touchant le temps de ce médecin (7)-
l'appellent Jean, fils de Zacharie (i) 5 c'est qu'il a vécu sous l'empire d'An-
d'autres aiment mieux le faire fils de dronic le Vieil puisque dans le ma-
,

Jean Zacharie (2)- Vossius , qui a pris nuscrit de l'un de ses livres, qui est à lu
1 •••
.l__._*i Ai"!!!,!- l-i-^UK^»!, ^ — .^-1^ 1'
ce dernier parti , au chapitre XIII de bibliothèque de l'empereur, !1 il y a un

son livre de Pkilosophld parle peu ,


titre qui montre qu'il est dédié à Apo-
après, d'un Jean Actuarius, qui vivait cauchus. Or, onsait qu'Apocauchus a
du temps de Constantin Ducas(3j, vécu sous cet Andronic. M. du Gange
comme on l'infère de ce qu'il avait a observé qu'Actuarius raconte au ,

une sœur sur laquelle Michel Psellus


, commencement de sa Méthode des Re-
composa une Monodie. S'il se trouvait mèdes qu'il fut envoyé par l'empe-
,

que ce Jean Actuarius ne diflerât pas reur son maître aux Scythes hypcrbo-
du médecin dont il s'agit ici Vossius , réens. Voilà M. Moreau un peu éloi-
aurait eu tort de les distinguer, et de gné de son compte car Andronic le ;

ne pas donner au médecin le nom de Vieil ne commença son empire qu'en


Jean mais, par la remarque (C) il
: ,
l'an 1283, et ne mourut qu'en i332.
n'est guère apparent qu'ils soient la
(5) Mercklinus , in Lindenio renovato, pag.
même personne. Au reste ,M. du Gan- 6 , 7.
ge fait voir que le titre à'Acluaiius entend , mais
(6) Il il eut mieux fait de Vex-
primer^ Alexis VAnge qui commença à régner
inarque une dignité particulière , af- -,

l'an 1195
fectée aux médecins à la cour de Gon- Lambec. de Bibl. , Csesar. lib. VI, p. n'i.
(7)
stantinoplei et il avoue qu'il ignore
la raison de tout cela , après toutes ACUNA (a) (Christophle de) Jé-
les recherches du père Poussines. Il
suite espagnol natif de Burgos ,,
avoue aussi , qu'il ne sait point si no-
tre Actuarius, qu'il nomme Jean fils
entra dans la Société l'an 1612 ,
de Zacharie , possédait cette digni- âgé de quinze ans. Après avoir
té (4). donné quelques années à l'étude,
(b) Dont on a plusieurs ouvrages.']
il passa en Amérique, et travailla
Ils furent imprimés à Paris en un vo- ,

lume in-folio , par Henri Etienne , l'an aux conversions dans le royaume
1567. Ils l'avaient déjà été ailleurs, en de Chili et dans le Pérou et fut ,

3 volumes in-S". Ils ont été aussi im- professeur en théologie morale.
rimes séparément plus d'une fois,
£ II revint en Espagne l'an i64o ,
es principaux sont , de Actionibus et
Affectibus spiritus animalis ejusque et rendit compte au roi son maî-
IVutritione libri II ; de Urinis , libri
, tre de la commission qu'il avait
f^Il , traduits premièrement en latin reçue d'examiner la rivière des
par Ambroise Léon, et imprimés à
Amazones. Il publia l'année sui-
Venise, l'an iSig, et puis revus et
ornés de notes par Jacques Goupil j de vante à Madrid , une relation
,

de cette rivière. Il fut envoyé à


(i) Hyde Catal. Biblioth. Oxon.; e£ Merckli-
,

DUS, in Ljndcnio renovato. Rome en qualité de procureur de


(2) Gesner, Bibliotli. el ejw Epilomatorcs.
Il commença à régner L'un loSg. ((() On prononce Acujna ; mais lus Espa-
fS)
4) Du Caage , Glossar. Gra:c. pajf. 46. gnols écrivent Ai;un;i.
196 ADA.
sa province ayant passé en du Vatican. M. de Gomberville
, et
Espagne , honoré du titre de est l'auteur de cette version fran-
qualificateur de l'Inquisition , il çaise on ne l'a publiée qu'après :

s'en retourna aux Indes occiden- sa mort , et l'on y a joint une


tales. Il était à Lima lorsque le longue dissertation qui mérite
P. Sotuel, dont j'ai tiré ce qu'on d'être lue. La relation le mérite
vient de lire ,
publiait à Rome , aussi beaucoup. Ceux qui ne l'au-
l'an 1675 Bibliothèque des
, la ront pas en pourront prendre
auteurs Jésuites. La relation de quelque teinture dans le Journal
Tiotre Acuna est intitulée, ISuevo de Paris (e) , dans celui de Leip-
Descubrirniento del gran Rio de sick {f) et dans l'histoire de
las Amazonas. L'auteur fut dix M. Chevreau {g).
mois de suite sur cette rivière , {e) Du 19 avril lt)83.
et eut ordre de s'instruire exacte- U')P"g- 323, ann. i683.
ment de tout ce qui le pourrait (g) Chevreau, Hist. du Monde, tom. IV ,

pag. 171 édit. de Holl. ;

mettre en état de faire savoir au


roi les moyens d'en rendre la na- (A) Au mois deféirier 1639.] J'a-
vigation aisée et avantageuse. voue franchement que je n'ai pas la
relation du pèreChristophle de Acuûa
Pour cet effet on le fit embar- (i). Ainsi je prends cette date dans
,

quer à Quito {b) avec Pierre M. Chevreau, et je la préfère au mois


Texeira qui avait remonté cette de janvier marque dans le journal
,
,

rivière jusque-là , et qu'on fut de Leipsick parce que la faute que


,

les imprimeurs de ce journal ont lais-


bien aise de renvoyer. L'embar- me
sé glisser à la page précédente ,
quement se fit au mois de fé- donne quelque sujet de me défier. Je
vrier i6v39 (A). Ils n'arrivèrent
vois dans la page 82 j de ce journal
à Para qu'au inois de décembre que le gouverneur du Brésil fit remon-
ter la rivièi'e des Amazones à Pierre
suivant. On croit que les révo-
Texeira , l'an lôSg et que Texeira ,

lutions de Portugal , qui firent ne put arriver à Quito qu'au bout


perdre aux Espagnols tout le Bré- d'un an (2). Il ne se rembarqua donc
sil , et la colonie de Para à l'em- point à Quito au mois de janvier i63q,
bouchure de la rivière des Ama- comme on l'assure croyable quaud
dans la page SaS.
M. Chevreau est plu?
zones , furent cause qu'on sup- il débite que Pierre Texeira partit au
prima la relation de ce jésuite mois d'octobre 1687 et rendit compte ,

(c) on craignit que, ne pouvant de son voyage au vice-roi du Pérou (3)


:

l'an i638, en septembre (4)- M. Che-


plus servir aux Espagnols, elle ne
vreau ne nomme pas bien l'auteur de
fut d'ailleurs très-utile aux Por- la relation, puisqu'il l'appelle Chris-
tugais. Les exemplaires en devin- tofe à^Alcuna.
rent extrêmement rares de sorte fi) Je ne dis point d'AcuBa; car fai remar-
;

que ceux qui ont publié à Paris qué dans don Nicolas Antonio que les Espa-* ,

gnols ne mettent point d'apostrophe entre l'ar-


(c?) la version française de ce li- ticleàe et un nom propre qui commence par une

vre , ont débité qu'il n'en restait voyelle.


(2) j4cta erudil. Lips. ann. i683.
plus aucun , excepté celui dont (3) // s'appelait le comte de Ckinchon.
(4) Chevreau , Histoire du Monde , tom. IV,
le traducteur s'était servi , et pag. i^i.

peut-être celui de la bibliothèque


(/>) Cest une ville du Pérou. ADA fille d'Hécatomne {a)
, ,

(c) Voyez la préface de la traduction et sœur d'Artémise reine de ,

française.
{d) En 1683, in- 12. {a) Stral) , lib . XIV, pag. /i52.
, . .

AD A,
Carie , épousa sou propre frère lui avait autrefois
donné de plus
Idriée , et régna avec lui dans la excellens cuisiniers en lui ap- ,

Carie , après la mort d'Artémise prenant que pour dîner avec ap-
,

qui ne survécut que deux ans à pétit^


ilfallait se lever malin et se
Mausole son mari \h). Idriée ré- promener^ et que pour faire un ^

gna sept ans (A) , et mourut de souper délicieux, il fallait faire


maladie, sans laisser postérité. Sa un sobre dîner
(f).
veuve,ayantrégnéenviron quatre (j-^ pj^t. inMe^andr., pag.
677.
ans, fut chassée du trône par Pexo-
dare son cadet (c), qui pour se „-^^^ ^'^^'^l ':^^"«/fP«. ans. ] C'est
,

mamtenir dans 1 usu^iation, s al- ^.^eau qui a converti les


années en ,

lia avec un seigneur persan nom- mois (2) aurait eu peut-être plus de ,

mé Orontobate, auquel il donna raison d'allonger le terme qu'il n'en


«^" ^^ raccourcir car Idr.ée était
sa fille en mariage (B). Elle avait ""
^

il j 'i » encore vivant lorsque Isocrate fit sa


nom Ada, comme la reine detro- 1 -

philippique. Or, si l'on en croit ller-


nee, et avait pour mère Aplmeïs, mippus (3j , il la fit peu avant sa
fille de Syunesis roi de Cappa- ,
mort et peu avant la mort de Philip-
doce. Orontobate succéda à son pe il faudrait donc qu'Jdriée eût vécu
:

jusqu"à la 110*. olympiade, puisqu'I-


beau-père dans le royaume, au socrate mourut peu de jours après la
bout de six ans et défendit Ha— bataille de Chéronée qui se donna
, ,

licarnasse contre Alexandre (d). Tan 3 de la 110''. olympiade, deux


Les révolutions qui arrivèrent en ans seulement avant la mort de Phi-
lippe. Comme donc le règne dldriée
ce temps-là furent favorables à n'a commencé qu'environ l'an 3
de
Ada; elle implora la protection 107^. olympiade (car j'ai montré dans
de ce conquérant contre l'usur- les remarques de l'article d'ARiÉMisE,
pateur, lui livra la ville d'Alinde, que son mari Mausole auquel elle ,

survécut deux ans ne mourut qu'à la,


qui était encore à elle , et lui pro- fin de la 106^.) on n'a pas assez des
,

mit de travailler à le rendre maî- sept années que Diodore lui donne.
tredeplusieurs autres (e). Alexan- Je crois néanmoins sa chronologie
plus certaine que celle d'Hermippus.
dre lui fit un très-bon accueil ,
Où est-ce qu'Herraippus placerait le
et la rétablit dans sa première règne d'Ada et celui de Pexodare ,
autorité sur toute la Carie , lors- qui ont duré, l'un quatre ans et l'au-
qu'il eut subjugué d'Ha- la ville tre six, et qui ont précédé l'expéditioa
'^ "

licarnasse. Elle crut lui pouvoir ')i^x^/P'^r ^,, . -,

j ^ (d) Il donna sa pile en mariage. J


.

marquer sa gratitude en lui en- i^j ^e Valois a cru que Philippe, roi
voyant toutes sortes de rafraî— de Macédoine demanda cette même ,

chissemens confitures pâtisse- ^He de Pexodare pour Aridée sou frè-


,
,
il a Cité Plutarque (4). Cet his-
rip« viandes rlpliratP.
ries v,-^r,rlp«
, délicates , ^vf>r Ips re et
avec les ,

torien ne nous apprend pas si la fille


meilleurs cuisiniers qu'elle put de Pexodare de laquelle il fait men- ,

trouver; mais il lui répondit qu'il tion s'apiielait Ada mais on peut , ;

n'avait que faire de tout cela et très-bien l'inférer de ce qu'il dit qu'elle
,
était l'aînée (5); car on sait d'ailleurs
que Léouidas son gouverneur ,
,
qu'Orontobate ayant épousé une fille
,

{b) Diodor. SIcul., lib. XVl. C'est de lui


(i) Diodor. S\cui., lib. Xri.
que je tire la durée des autres règnes.
(a) Chevreau, Histoire du Monde, loin. If,
(c) Str.-ib, et Diod. , ibid.
yag. 33 , édition de Hollande
{d) Arriaii. lih. I.
(3) Voye-L le iommaire de celle Harangue
(e) Diodor. Sicul., Ub. XFII: Strab. lib. (4) Valesii Nota: in Harpocrat. J>og. (J*!-
xrr. (5J Plut, in Aleiandr.pa^. 6f>g.
igS AD AM.
de Pexodare nommée Ada
crut , se Lemême Dieu qui avait produit
possesseur légitime du royaume de Adam le plaça dans un beau jar-
Carie. Jusque-là donc M. de Valois me
semble très-bien fonde' ; mais il n'a din (a) et pour le mettre en état
,

pas eu raison de dire que Philippe re- d'imposer un nom aux animaux,
chercha cette alliance pour Aridée son il les fit venir vers lui puis il fit,

frère j ce fut Pexodare qui la recher-


tomber sur lui un profond soin—
cha , et qui envoya pour cet effet un
ambassadeur à Philippe. D'autre côte', meil et lui ôta une côte (B) , de
Aridee n'était point le frère mais le ,
laquelle il forma une femme.
fils de Philippe, Plutarque le dit ex- Adam reconnut que cette femme
pressément. 11 ajoute une chose qu'il était os de ses os , et chair de sa
n'est pas inutile de savoir pour mieux
connaître les obliquités des cours. Les chair, et vécut avec elle sans
amis d'Alexandre l'alarmèrent sur qu'ils eussent honte de se voir
les propositions de l'ambassadeur de nus. Il y avait dans le jardin un
Pexodare ils lui mirent dans la tête
:
arbre dont Dieu leur avait dé-
que Philippe ne voulait avancer Ari-
dée par un gros mariage qu'afin de le fendu de manger , à peine de la
mettre plus en état de succéder au vie. Cependant la femme, séduite
roj'aume. Alexandre pour rompre ,
, par un serpent {b) ne laissa pas
ce coup dépêcha un homme à Pexo-
,

, d'en manger et de persuader à


dare afin de lui représenter qu'il de-
,

vait plutôt jeter les yeux sur Alexan- Adam d'en manger aussi. Dès
dre que sur Aridée qui était bâtard lors ils s'ajîerçurent qu'ils étaient
,

et presque fou. Pexodare ne balança nus (C) et se firent des ceintu-


,
point sur le choix mais Philippe
res avec des feuilles de figuier
j

ayant eu vent de ce manège censura


vivement Alexandre, et lui dit qu'il cousues ensemble. Dieu vint leur
serait bien lâche et bien indigne de prononcer la peine dont il vou-
lui succéder s'il se contentait de la
lait punir leur crime, les chassa
fille d'un Carien vassal d'un prince
barbare. En même temps il exila tous du jardin, et leur fit des
,
habits
les confidens de son fils et écrivit de peau. Adam donna le nom
,

aux Corinthiens de lui envoyer pieds d'Eve à sa femme , et consomma


et poings liés l'homme qu'Alexandre
son mariage. Il devint père de
avait dépêché en Carie. C'était un co-
médien nommé Thessalus.
Caïn et d'Abel , et puis de Seth ,
et de plusieurs autres fils et filles
ADAM * , de tout dont on ne sait pas le nom et il
tige et père ,

le genre humain fut produit mourut à l'âge de neuf cent tren-


,

immédiatement de Dieu, le sixiè- te ans (c). Voilà tout ce que nous


me jour de la création. Son coqîs savons de certain sur son chapi-
ayant été formé de la poudre de tre. Une infinité d'autres choses
la terre (A) Dieu lui souffla aux que l'on a dites de lui sont ou très-
,

narines respiration de vie c'est- fausses ou très-incertaines


, il est :

à-dire qu'il l'anima et qu'il en fit vrai qu'on peut juger de quelques-
ce composé qu'on appelle hom- unes qu'elles ne sont point con-
me qui comjîrend un corps or- traires à l'analogie de la foi ni à
, ,

ganisé et une âme raisonnable. la probabilité. Je mets en ce der-


* Jolj- approuve le texte de cet article ;
(a) On rappelle ordinairement le Paradis
mais en blâme les remarques.
il terrestre et le jardin d'Eden.
Chaiifepic indiqite les légendes orientales {b) Touchant ce serpent t>oyez
, les remar-
comme contenant un grand nombre de cir- ques de l'article ÈvE.
constances fabuleuses dont il rapporte Us Voyez
(c) les cinc/ premiers chapitres de
plus singulières. la Grnf'sp.
.

KJ9 ADAM.
nier rang ce que l'on dit de sa mais gardons-nous cre (Mj , etc. ;

vaste science (D) nous ne lisons bien d'avoir sur l'affaire de son
:

rien dans la Genèse qui ne soit salut les incertitudes de l'abbé


moins propre à nous donner Rupert (g) , et encore plus de le
cette idée qu'à nous en éloigner, croire condamné aux flammes
Néanmoins il pourrait être qu'A- infernales, comme faisaient les
dam sortit des mains de son créa- Tatianites [h). Piien ne nous obli-
teur avec les sciences infuses et ge d'adopter le sentiment d'Ori— ,

qu'il ne lesperdit point par son gène , de saint Augustin de


péché, non plus que les mauvais saint Athanase, et de plusieurs
anges ne sont pas devenus moins autres qu'Adam fut des pre- ,

savans depuis leur chute, et que miers parmi ceux qui ressuscitè-
les crimes des gens doctes ne leur rent avec Jésus -Christ ^i") en— :

font pas perdre les sciences qu'ils coremoins est-on obligé de croire
possédaient. On peut mettre en- que sa repentance l'aurait fait
core au rang des choses proba- mourir de tristesse si Dieu ne lui
blés ce que disent quelques-uns avait envoyé l'ange Raziel pour
touchant la beauté d'Adam (E) le consoler (k). Mais la raison ;

mais il est tout-à-fait faux qu'il veut que nous croyions que sa
ait été créé avec les deux sexes foi et ses prières lui firent trou—
(F). C'est avoir bronché lourde- ver miséricorde et qu'il fit une ,

xnent sur les paroles de l'Écri- belle mort sans que pour cela il ,

ture (d) que de s'être imaginé faille s'imaginer qu'il harangua


,

une semblable rêverie. Les rêvé- ses enfans avant que de rendre
lations d'Antoinette Bourignon l'âme , et qu'il leur recommanda
(G) seraient alléguées mal à pro- nommément d'honorer leur mè-
pos pour confirmer cette fausse re et de l'enterrer auprès de lui.
,

glose. Autant vaudrait-il em— On se donne trop de liberté quand


ployer à cet usage les narrations on forge de telles harangues di-
romanesques de Jacques Sadeur rectes (N). Nous avons rapporté
(H). Il n'est pas plus vrai qu'A- ailleurs (/) ce qui se dit de la du-
dam ait été produit avec la cir— rée de sou état d'innocence,
concisiçn

(e) ,
-,
et que
^
, comme cela , ^^ .. „ ^ ,, ,,^
ig-) nuperti Comment, in Gènes., /lO.
.

///,
^ I \ , r
luidéplut , il ait commis la taute cap. xxxi.
de ceux dont saint Paul a fait (^ Epiphan. Hœres. XLVI. EuseLius
1 ,, 1 ,^ , Histor. lib. /^, cap. XXril.
mention dans i une de ses epitres
(,j ^^„^ Cornel. à Lapide in Gènes., cap.

{f). Rangeons aussi parmi les y vs. 5. ,

^** ^ic/e Reuchlinumde ArteCabbal. ;,a^.


rnnfpsrpniipl'nn
COnieSCequelOnaaitaeSaTaïUe
i rlit rip sn tqillp
g g, Heidegger. Histor. Patriarcb. tom. 1, .

gigantesque (I) et de ses livres , pag. i6o.


^^ '^'"'"•7"« (A) de Varudc
(Kj, et de son sépulcre (L) et ,
^^-j^^J^f"'"
d'un arbre planté sur ce sépul-
(A) De la poudre de la terre.'] Pho-
Dieu donc créa l'homme à son image ,
((!• tius , si Ton en croit le père Garasse
il le créa à l'image de Dieu , il les créa mâle a rapporte que les Egyptiens di-
^,) ^
et femelle. Genèse, chap. I , ^. 27.
^^-ç^j ,^ye /^ Sapience pondit un oeuf
Les Juifs l'assurent, f^oyez Batlohcci,
(e) ^^ans le paradh terre stie, d'où nos
BM.B.a.hhia., tom. I, pag. 2gi. premiers pères sortirent comme une
(f) V. Epîtreaux Corinthiens, c^a;?. y/T,
v. 18. (i^ Garasse, Doctr. curieuse ,
^n^. îîî-
. ,

200 ADAM.
paire de poulets. Je ne pense pas que croire au peuple qu'Adam et Eve fu-
Photius ait dit cela , et je serais fort rent aveugles jusqu'à ce qu'ils eurent
trompe si ce n'est point une para- transgressé le commandement de
phrase trop licencieuse de ce jésuite, Dieu: Neque enim cœcl creali erant
ut imperitunn'ulgusopinatiir (6). S'dini
forcée sur ce que Photius rapporte
touchant un certain homme marin , Augustin réfute solidement cette faus-
nommé Oé que quelques-uns fai- seté en divers endroits de ses écrits
,

saient issu êx. toù 7rpoToyôvou"nou (2), (7), et dit que cette ouverture des
c'est-à-dire , selon le P. Garasse , en yeux de nos premiers pères consista
un autre livre (3) , de la race du pre- en ce qu'ils s'aperçurent de certains
mier de tous les hommes qui s'appelait mouvemens corporels qu'ils ignoraient
OEuf; ou, selon le P. Schottus , è auparavant, et qui leur donnèrent de
primo parente aurait mille
'Clou. 11 y la honte Exstitit in motu corporis
:

recherches à faire sur l'œuf qui servit, quœdam impudens nouitas undè es- ,

f elon la doctrine
des anciens , à la gé- setindecens nuditas, et fecit attentas,
nération des choses lorsque le chaos reddiditque confusos (8)
fut débrouillé. Nous en toucherons Ce que l'on dit de sa faste scien {Q)
ffuelques particularités sous le mot M. Moréri ne secontentepasd'as-ce. ]
ARiMANius- surer en généi'al qu'Adam a^'ait une
(B) Et lui ôta une côte. ] Un auteur parfaite connaissance des sciences et
moderne (4) > voulant montrer aux surtout de l'astrologie , dont il apprit
catholiques romains qu'ils ont tort de plusieurs beaux secrets a ses enjans,
se croire plus
habiles que les protes- il ajoute que Josephe dit qv^Adam
tans leur reproche entre autres bé- grava sur deux dii^erses tables des ob-
vues celle d'un prédicateur (5) qui servations qu il ai> aitfaites sur le cours
,

dit qu'Adam avait été


formé de l'une des astres. J'ai cherché cela dans Jo-
des côtes d'Eve. Il rapportait qu'un sephe ^ mais j'y ai seulement trouvé
philosophe , ayant proposé ces trois que les descendans de Seth Gis d'A- ,

(juestions à Théodore, disciple de dam, inventèrent l'astrologie, et qu'ils


saint Pacôme Quel homme n'est firent graver leurs inventions sur un
:

point né mais est mort ? Quel homme pilier de brique et sur un pilier de
,

est né mais n'est point mort ? Quel pierre afin de les préserver de la ,

homme est né et mort, mais non pas destruction générale, qui, selon les
wourt ? eut pour réponse que les trois prédictions d'Adam, devait arriver
personnes en question étaient Adam , une fois par le feu et une fois par le
Enoch et la femme de Loth. Adam déluge (9). Quand on est capable de
n'est point né ajouta le prédicateur , falsifier de la sorte un auteur qu'on
,

car il a été formé de l'une des cotes cite on ne regarde pas assez près au ,

d'Eve. Son sermon a été imprimé à texte de ses témoins pour ne leur rien
Vienne en Autriche l'an i654 avec faire dire que ce qu'ils déposent. Ainsi
,

l'approbation du sous-doyen des pro- je ne m'étonne nullement que M. Mo-


fesseurs en théologie qui était alors le réri attribue à notre premier père d'a-
,

qu il ny
ni contre les bonnes mœurs 5 preuve nom des bêtes. Ceux qui infèrent de
du peu d'attention avec quoi les cen- cette imposition de noms qu'Adam
seurs des livres examinent certains était un grand philosophe , ne raison-
manuscrits, nent pas assez bien pour mériter d'ê-
(C) Ils s'aperçurent qu'ils étaient tre réfutés. Pour revenir à la vaste
nus. ] L'Écriture dit que leurs yeux science qu'on attribue à Adam , je dis
furent ouverts. Cette expression fit
„ .. , Dw .1 cQî (6) Augustin, de Civitat. DeijW. X/F, cap.
ex Helladio, Bibhotli. f^ag. i583,
(3) Photius xriT.
num. 279. „, „!,,;,„„ c (j) Ibid , H lib. XI de Genesi aàLitter. cap.
,

(3) Somme Tteolog.que


,
.

pag. .26, ou U rap- ^^-^^ ^^^.^^ j ^^ ^^^^^ ^^ Concupisc, cap.


porte ceci avec mille alteiauuns. y ^^ ^^.^ j Locutionum in Gènes, imm q et ;

Francu.s D.squ.s. de Ind.c.b. L.-


(4) Daniel
,
^^.^ ^^ ^^^ p^^^^^ ^^^.^ ^^ ^^^.^^ ^^^ ^-^^j
(8) Id. de Ci.it. Dei XIV, cap. XFII.
"%] Z,!:!t-Ffo^:nùn ScbUling, clerc régnUer , ^,^.

BarnabiU. (9) J«5PP>'- Antiqust. Ith. I, cap. II.


deSainl-Paul, et
* V •

ADAM. 20I
que , selon l'opinion commune (lo) il , les consulta sur sa cre'ation , Dieu leur
savait plus de choses , dès le premier re'pliquaque l'homme e'tait plus habile
jour de sa vie, qu'aucun homme n'en qu'eus, et pour les en convaincre, il
peut apprendi-e par une longue expe'- leur présenta toutes sortes d'animaux
rience. Il n'y avait guère que l'ave- et leur en demanda le nom ils ne su- :

nir casuel, les pensées du cœur et une rent que répondre. Tout aussitôt il
partie des individus qui échappassent fit la même question à l'homme, qui

à son esprit. Cajétan, qui a osé lui lesnomma tous l'un après l'autre: et
dérober la parfaite connaissance des interrogé quel serait son nom et quel
astres et des élémens, en a été fort était cehii de Dieu il répondit tout- ,

censuré. Quelques-uns ayant voulu à-faitbien, et donna à Dieu le nom de


mettre en dispute si Salomon ne doit Jehovah. Selon ces mêmes rabbins
point être excepté de la thèse gêné- voici le sens qu'il faut donner à cet
raie qui met les lumières d'Adam au- aphorisme de leurs docteurs , la taille
dessus des lumières de tous les autres d'Adam s' étendait d'un bout dumonde
mortels, ont été condamnés à recon- h l'autre ; c'est qu'il connaissait tou-
naître qu'Adam était plus habile que tes choses (i4)'
Salomon. Il est vrai que Pinédo en (Ej Touchant la beauté d'Adam. ]
excepte la politique; mais on n'a point Si l'on s'était contenté de dire qu'il
d'égard à son sentiment particulier ; était bel homme et bien fait, on n'au-
on prononce que l'entendement spé- rait rien dit qui ne fût probable ;
culatif du premier homme était imbu maison a donné sur cette matière
de toutes les connaissances philoso- dans les gaietés de la rhétorique et de
phiques et mathématiques dont le la poétique et même dans la vision,
,

genre humain est naturellement ca- On a débité que Dieu, voulant créer
pable et que son entendement pra-
, Thorame se revêtit d'un corps hu-
,

tique possédait une prudence cunsom- main parfaitement beau et qu'il for- ,

mée à l'égard de tout ce que l'homme ma sur ce modèle le corps d'Adam,


doit faire soit en particulier, soit en
, Par là , Dieu a pu dire à Tégard du
public et outre cela toutes les scien-
; corps ,
qu'il a fait l'homme à son ima-
ces morales et tous les arts libéraux , ge. On ajoute que cette apparition de
la rhétorique, la poésie la peinture ,, Dieu sous la forme humaine fut le pre-
la sculpture, l'agriculture, l'écri- mier prélude de rincarnation: c'est-à-
ture , etc. Chacun sait les louanges dire que la seconde personne de la
qui ont été versées à pleines mains sur Trinité se revêtit des apparences de
la mémoire d'Aristote , comme si l'on la même nature qu'il devait un jour
s'étaitétudié à renvier les uns sur les prendre jusqu'à la chair et aux os
, 5

autres. On avait déjà épuisé toutes et que sous l'apparence du plus bel
,

les idées et toutes les comparaisons , homme qui ait jamais été, il travailla
lorsqu'un bon chartreux, voulant es- à la production d'Adam lequel il fit ,

calader un superlatif auquel on n'eût une copie de ce grand et divin origi-


point encore porté la vue , soutint nal de beauté dont il s'était revêtu :

que la science d'Aristote était aussi Hanc speciem divinamque pulchritu-


étendue que celle d'Adam (11). Quel- dinem clementissimus J'ormosissimus-
ques rabbins se sont contentés d'éga- que assumens quant err.t post multa ,

1er, en fait de science, le premier tempora usque ad carnem et ossa as-


homme à Moïse et à Salomon (12) ; sunipturus creabat hominem /ar-
, ,

mais quelques autres ont soutenu qu'il giens ei speciem hanc tantaru ipse ,

surpassait en cela les anges, et en ont piimus archet/pus speciosissimus ,

allégué pour preuve le témoignage de ipse speciosissimœ prolis crealor (i5).


Dieu lui-même (i3). Ils disent que les 11 ne faut pas s'étonner après cela
anges ayant parlé de l'homme avec qu'on fasse ces exclamations Quan- :

quelque sorte de mépris lorsque Dieu tant qualenive credas fuisse primi ho-
tninis illius l'enuslateni ? quantum in
(10) y^ojez Saliani Annalium loin. I pas. oredecus
,
,
quas gratias insedisse{i6)?
107 , ii3.
(11) Henri de Hassia. Il vivait au commence- (i4) Ibid., pag. 56.
ment du XV^. siècle.
(i5) Eagubin. in Cosmnpceiâ , ap"d Salian.
(12) .,épud Rivini Serpent, sedncl. , pag. 5o. Annal., tom. /, pag. io6.
<i3) Ibid,pag.^rj,5Q, 5-. (16) Id. ibid.
,

ADAM.
Car enfin cette forme dont le Verbe
, dait la pareille avec samain droite
se revêtit était semblable à la forme Chacun était animé chacun tomba,

<)ui fut vue par saint Pierre sur le dans un profond assoupissement lors-
Thabor , et par Moïse sur le mont que Dieu voulut former Eve c'est-à- ,

Sinai et à celle que Moïse et Élie fi-


, dire la séparer du corps mâle. 11 ne
lent paraître le jour de la transfigu- faut que savoir lire l'Ecriture pour ré-
ration. Mais ce qu'il y a de plus mer- futer pleinement toutes ces visions.
veilleux , c'est qu'Adam voyait lui- Avant que de passer à d'autres choses
même son propre ouvrier , et la ma- je dirai un mot de ces androgynes ,
nière dont son corps était formé par dont Platon a parlé assez amplement
les belles mains de son auteur Ciim : C22). C'étaient des corps hermaphro-
fingeretur komo manus illas divinas dites à quatre bras et à quatre jambes,
aspexit anibrosiosque l'ullus illos, pul- et à deux visages sur un seul cou, tour-
cherrima brachia corpus suunijîngen- nés l'un vers l'autre. Cette duplicité
tia singulosque artus ducentia (17).
,
de membres leur donnait beaucoup
C'est un fort liabile homme qui a de force , et par là beaucoup d'inso-
débité toutes ces visions (18), et il lence ils ne songeaient pas à moins
;

ne manque point de gens qui en ap- qu'à faire la guerre aux Dieux. On dé-
prouvent une partie pour le moins. libéra dans le ciel sur la manière de
(F) Il est faux qu'il ait été créé auec les mettre à la raison et l'avis de
,

les deux sexes. ] Un grand nombre de Jupiter passa , qui était qu'il les fal-
rabbins ont cru que le corps d'Adam lait partager en deux. Chacune des
fut créédouble, mâle d'un côté, femelle pièces conserva une forte inclination
de l'autre , et que l'un des corps était pour se réunir avec l'autre ; et voilà
joint à l'autre par les épaules les têtes : l'origine de l'amour, si l'on en croît ce
regardaient des lieux directement op- philosophe. Mais il fallut faire des
posés, comme les têtes de Janus (19). changemens à la situation de certains
Or ils prétendent que Dieu quand il ,
membres , afin que la réunion fût fé-
fit Eve n'eut besoin d'autre chose
,
conde. Je remarquerai en passant que
que de diviser ce corps en deux celui : ceux qui parlent de ces androgynes
où était le sexe masculin fut Adam ;
de Platon ne rapportent pas pour
,

celui où était le sexe féminin fut Eve. l'ordinaire la chose telle qu'elle est.
Manassé-Ben-Israèl, le plus habile rab- Ils lui font dire qu'au commencement
bin qui ait vécu dans le XVIP. siècle , les hommes avaient cette nature-là
;

a soutenu ce bizarre sentiment (20) ,


mais il ne le dit que de quelques-uns ;
si l'on en croit M. Heidegger. Le docte il reconnaît qu'il y avait aussi comme

Maimonides l'honneur et la gloire de


, à présent des mâles et des femelles.
la nation judaïque, l'avait déjà soute- Voyez les remarques de l'article Sal-
nu (21) si l'on en croit le même té-
, MAcis. L'auteur d'un livre intitulé le
moin. Eugubin ne s'en est éloigné qu'à Nouveau f^isionnaire de Rotterdam
l'égard de la situation des deux corps; (aS) assure que selon les rabbins ,
,

car il prétend qu'ils étaient collés en- Adam et Eve, avant leur péché, étaient
semble par les côtés et qu'ils se res- , tous deux hermaphrodites (24)- Je ne
semblaient en tout, hormis le sexe. Le sache que lui qui attribue cette opi-
corps mâle était à la droite et embras- nion aux rabbins.
sait l'autre par le cou avec sa main (G) Les Révélations d'Antoinette
gauche pendant que l'autre lui ren-
,
Bourignon. ] Les livres de cette de-
moiselle font foi qu'elle a eu des sen-
(17) Id. ibid.
(18) SaliaD. Annal. loin. I pag. 106.
timens fort particuliers ; mais elle n'a
, ,

(19) jépud Heideggerum , Hist. Patriarch. peut-être rien avancé de plus étran-
,
lom. / ,
pag. 128. ge que ce qui regarde le premier
(20) Conciliât, in Genesira , apud Heidegge- homme. Elle prétend qu'avant qu'il
rum, Hist. Palriarch., tom. I pag. 128. Voyez
Hoornbeecli qui le refuie au chap. I du IV^,
,
péchât , ri avait en soi les principes
liv. de Conveilendi.s Jfudieis. des deux sexes et la vertu de produire
(21 j In Moreh Nebocliim, pag. 2, cap. XXX; son semblable sans le concours d'une
apud Heidegger. Hist. Patriarch. , lom. /, pag.
128. Mais notez, comme m'en a averti M. Van (22) Plato in Convivio ,
png. Ii85, edit.
Dale , (fue M. Heidegger ne rapporte pas fidèle- Franco f., ann. 1602.
menti'opjnior. <yueManassé-ben-lsrael c< Maimo- (23) imprime' Van 1686.
nides ont approuvée te plus. (24) NouT. Vision de Rotterdam, pag. 36.
,,

ADAM. 2o3
femme que le besoin que chaque
, et )) de toutes sortes et de toutes cou-
sexe a présentement de s'unir à l'autre » leurs , très - vives et toutes dia-
pour la multiplication est une suite » fanes , non - seulement d'eau, de
des changemens que le pe'ché fit au " lait , mais de feu . d'air et d'au-
corps humain. Zei hommes, dit-elle, » très. Ses mouvemens rendoient des
(aSj croyenl d'ai'oir esté créez de Dieu )) harmonies admirables tout lui :

comme ils se trouue/it à présent ,


quoi- » obéissoit ; rien ne lui resistoit et
que cela ne puis que le
soit uérilable ,
ne pouvoit lui nuire. Il estoit de
péché a déjigwé en eux ï'œui^re de « stature plus grande que les hom-
Dieu : et , au lieu d'homme qu'ils de- » mes d'à pre'sent les cheveux courts, ;

l'oient estre devenus des


,
ils sont " annelez tirans sur le noir, la lèvre
,

monstres dans la nature diuisez en deux « de dessus couverte d'un petit poil :

sexes imparfaits inipuissans a pro-


, " et, au lieu des parties bestiales que
duire leurs semblables seuls , comme " l'on ne uomme pas , il estoit fait
se produisent les arbres et les plantes » comme seront rétablis nos corps
qui en ce point ont plus de perjéction » dans la vie éternelle , et que je ne
que les hommes ou les femmes inca- ,
)) dois dire. 11 avoit dans
sais si je
pables de produire seuls , ains par » cette région la structure d'un nés
conjonction d'un autre , et a^'ec dou- )) de mesme forme que celui du visage 5
leurs et misères. On explique dans un » et c'estoit là une source d'odeurs et
autre ouvrage (26^ le détail do tout ce " de parfums admirables de là de- :

mystère selon qu^il fut révélé de Dieu M voient aussi sortir les hommes dont
à la demoiselle Bourignon. Elle crut )> avoit tous les principes dans soi 5
il

voir en extase comment Adam était )j car il y avoit dans son ventre un
fait avant le péché et comment il ,
» vaisseau où naissoient de petits
pouvait produire tout seul d'autres )' œufs et un autre vaisseau plein de
,

hommes. Bien plus elle crut appren- ,


» liqueur qui rendoit ces œufs fé-
dre qu'il avait mis en pratique cette " conds. Et lorsque l'homme s'échauf-
rare fécondité par la production de la » foit dans l'amour de son Dieu le ,

nature humaine de Jésus-Christ. Quoi- w désir où il estoit qu'il y eust d'au-


que le passage soit un peu long je ,
J> très créatures que lui pour louer , ,

ne laisse pas de le rapporter tout en- » pour aimer et pour adorer cette
tier, afin qu'on découvre mieux l'é- )) grande Majesté faisoit répandre,

tendue des égaremens dont notre es- » par le feu de l'amour de Dieu cette
prit est capable. w liqueur sur un ou plusieurs de ces
« Dieu lui représenta dans l'esprit w œufs avec des délices inconcevables:
» sans l'entremise des yeux corporels » et cet œuf rendu fécond sortoitquel-
qui auroient esté accablez sous le
') n que temps après par ce canal hors
poids d'une si grande gloire , la
'> w de l'homme en forme d'œuf et ve- ,

» beauté du premier monde et la ,


Jj noit peu après à éclore un homme
» manière dont il l'avoit tiré du M parfait. C'est ainsi que
la vie dans
'> chaos tout estoit brillant
: trans- ,
)) éternelle il y aura une génération
» parent, rayonnant de lumière et de ') sainte et sans fin bien autre que ,

)) gloire inefl'able. Il lui fit paroistrede » celle que


péché a introduite par
le
» lamesme manière spirituelle Adam, J) le moyen de la femme laquelle ,

» le premier homme corps , dont le )) Dieu forma de l'homme en tirant


'> estoit plus pur et plus transparent i> hors des flancs d'Adam ce viscère
» que le cristal, tout léger et volant, )) qui contenoit les œufs que la femme
» pour ainsi dire dans lequel et au
: ,
» possède , et desquels les hommes
» travers duquel , on voyoit des vais- )) naissent encore à présent dans elle,
w seaux et des ruisseaux de lumière M conformément aux nouvelles décou-
)) qui pénétroit du dedans en dehors » vertes de l'anatomie. Le premier
» par tous ses pores , des vaisseaux » homme qu'Adam produisit par lui
.) qui rouloient dans eux des liqueurs » seul en son estât glorieux, fut choisi
)) de Dieu pour estre le trône de la di-
(25) Préface du livre intitule', Nouveau
le » vinité , l'organe et l'instrument par
< iel et la Nouvelle Terre imprime' à Amster-
dam en l6rg.
,
w lequel Dieu voulait se communi-
(26) Vie continuée de mademoiselle Eonri-
)i quer éternellement avec les hom-
giion ,
pag. 3i5. » mes. C'est là Jéshs-Christ , le pre-
,
,

2ô4 AD A M.
)>mier né uni à la nature humaine , les viennent à la gorge ? egahaî pri' N
M Dieu et homme tout ensemble (27).» mos parentes ante lapsum habuisse
Je voudrais que l'auteur du IVout'eau partes generationihominis necessarias,
f^isionnaire de Rotterdam, n'eût pas in- poslea accessisse ut strumam gutturi
sulté comme il a fait d'une manière (32). Ma seconde réflexion est que
,

trop enjouée les visions de cette fille celte femme attribue à Jésus-Christ
,

et celles du ministre qu'il attaque. On né d'Adam toutes les apparitions de


pouvait tourner en ridicule ce dernier Dieu desquelles le Vieux Testament
sur ses imaginations du mariage d'A- a parlé , et qu'elle croit que quand il
dara et d'Eve , sans égayer si fort ce voulut se rei^estir de la corruption de
sujet. nostre chair et de nostre sang dans les
Je joins à cela deux petites réflexions entrailles de la sainte Vierge il
y ,

seulement. L'une est , qu'Antoinette renferma son corps soit en le rédui- ,

Bourignon n'a pas dû croire qu'elle sant à la petitesse qu'il ai'oit lors de
ressusciterait ; car selon ses princi- sa première conception ou naissance ,
,

pes la matière crasse, qui a été jointe soit d'une autre manière inconcevable
,

depuis le péché au corps de l'homme a nostre raison grossière (33). ,

et qui pourit dans le tombeau ne Ces deux réflexions, qui suffisaient ,

ressuscitera point (28) et la résur- dans la première édition de cet ou-


,

rection n'est autre chose que le réta- vrage , ne suffisent pas dans la se-
blissement de l'homme dans son état conde car il s'est trouvé des gens si ;

d'innocence état où selon les belles bourrus qu'ils ont dit que mon arti-
: ,
,

révélations de cette Antoinette il n'y cle d'AoAM contenait des obscénités ,

avait point de femmes. On condamna insupportables. Il faut leur répondre


autrefois (29) à Paris un hérétique qu'ils font trop les délicats et les scru-
nommé Amaulri ,
qui soutenait entre puleux et qu'ils ignorent les droits
,

autres erreurs , qu'a la fin du monde de l'histoire. Ceux qui fontla vie d'un
les deux sexes seront réunis ensemble méchant homme peuvent et doivent
,

dans une même personne , et que cette représenter en général les dérèglemens
réunion aidait commencé en Jésds- de son impudicité et, quelque choix
;

Christ ; et que si l'homme était de- qu'ils fassent des termes ils rappor-
,

meuré dans l'état où. Dieu l'ai'ait pro- teront toujours nécessairement des
duit , il n'y aurait eu nulle distinction choses impures et qui salissent l'ima-
de sexes (3o). Faber d'Étaples a cru gination. Cela est inévitable. Tout ce
que, dans l'état d'innocence, Adam qu'ils peuvent éviter , c'est le détail
aurait engendré de lui-même son sem- et les phrases trop grossières. Or, c'est
blable , sans l'aide d'aucune femme ce que j'ai évité. Ceux qui font l'his-
(3i). La Bourignon n'a donc pas été toire des sectes dont les dogmes ou les
la première qui ait enseigné ces cho- actions ont été impures , se trouvent
ses j mais elle y a mis beaucoup du dans la même nécessité. Les plus
sien comme vous diriez cette perpé-
, grands scrupules de style ne pour-
tuelle propagation qui se fera dit- ,
, ront jamais empêcher qu'ils ne pré-
elle dans le paradis , de la manière
, sentent des images sales et obscènes
que les hommes auraient multiplié à leurs lecteurs. Ce qui me justifie ici
sur la terre s'ils avaient conservé leur en particulier est que je rapporte des
,

innocence. Que dirai-je de Paracelse, absurdités qui sont contenues dans un


qui croyait que les parties nécessaires livre qui se vend publiquement. Outre
à la génération ne se trouvaient point cela , j'ai pour moi l'exemple des an-
dans nos premiers pères avant qu'ils ciens pères qui ont inséré dans leurs
péchassent mais qu'après qu'ils eu- ^ ouvrages les plus affreuses impuretés
rent péché elles sortirent comme une
, des hérétiques.
excroissance ou comme les écrouel-
(H) Les narrations romanesques de
(27) Là même.
Jacques Sadeur.^Cest une prétendue
(28) Préface du Nouveau Ciel. relation de certains peuples herma-
("29) y4u commencement du XIII^. siècle.
(3o) Prateoli Elench. Ha;ret. coce Almaricus ;
et Defensio Relationis de Ant. Burign. in Act.
(32) Paracelsus , apud Vossium, de Phlloso-
phiâ cap. IX, pag. 71.
erutlit. Lipsiens. xnserlx , pag. i5o.
,

(3i) Apud. Cornel. à Lajiide in Gènes. , cap. (33) Vie continuée de Mlle. Bourignon ,
pag.
11 . V. 24- 3i7-
,

AD A M. 2u5
phrodites de la Terre Australe. Voyez dis-je , du neuvième jour entrant au
l'article de Sadeur. dixième qui est à Z'Àsser toutes les
, ,

(I) De sa taille gigantesque. ] Phi- troiscaravanes montent au-dessus de


Ion a cru qu'Adam surpassait tous les cette montagne au sommet de la- ,

autres hommes, et quant au corps et quelle ( qui est fort bus comme de ,

quant à l'âme (34) ; mais les Thalmu- ces monts de terre qui se trouvent seuls
distes vont infiniment ])lus loin ils as- : au piilieu des plaines ) ils croient
surent qu'Adam s'étendait depuis l'un qu'Eve avait la télé appuyée lorsque
des bouts du monde jusqu'à l'autre Adam la connut la première fois , et
quandDieule forma; qu'après qu'il eut qu'elle avait ses deux genoux bien
péché , Dieu appesantit sa main sur lui loin dans le bas de la plaine sur deux
et lui réduisit la taille à la mesure de autres distans l'un de l'autre de deux ,

cent aunes (35). Quelques-uns disent portées de mousquet a chaque endroit ,

que Dieu fit cela à la requête des An- desquels on ajait mettre une colonne
ges qui avaient peur de ce géant; mais entre lesquelles il faut pour être bon ,

ils supposent que Dieu laissa au pre- Agi , c'est-à-dire pèlerin passer en ,

mier homme la hauteur de neuf cents allant et en revenant de la montagne


coudées. Voyez le premier volume de au sommet de laquelle est une mosquée
la Bibliothèque rabbinique du père qui est faite comme une niche où. il ne
Bartolocci à la page 65 et à la 66. peut entrer que sept ou huit personnes
,

Barcepha fait mention de quelques (4o). Je vois qu'on cite un Jean Lucidus
auteurs qui disaient que le paradis ter- qui a cru qu'Adam était le plus grand
restre était séparé de notre monde par de tous les géans (4^), et qu'il l'a vou-
l'Océan et qu'Adam
; chassé de ce lu prouver par ces paroles de rÉcri-
,

paradis, traversa la mer à pied pour ture selon la Vulgate nomen Hebron ,

venir dans notre monde et qu'il la ante vocabatur Cariaih-Arbe Adam


, :

trouva partout guéable tant sa taille , maximus ibi inter Enacim situs est
était énorme (36). Voilà justement (42). Saint Jérôme s'imagine
en vei- ,

l'Orion ou le Polyphèrae des poètes : tu de ce passage qu'Adam a été en- ,

Quam magnus Orion,


terré à Hebron (43). Mais on lui montre
C'um pedes incedil medii per tnaxirna Nerei que ni l'hébreu ni la version des sep-
Stagna viam scindens kuinero supereininet
, tantene disent quoi que ce soit qui con-
undas (B^).
cerne Adam ou quelque tombeau (44)-
Sumrno cum monte videmus
Ipsum inler pecudes vasld se mole movenlem La version de Genève porte Le nom :

Pastorem Polrphemum et littora nota pe-


, de Hebron estoit auparavant Karjath-
tentem (38). Arbah lequel Arbah avait esté fort
,

Graditurque per œquoi grand homme parmi les Hanakins. Il


Jam médium, necdum Jluctus lalera ardua y a dans lîle de Ceilan une montagne
ùnxil (îg). qu'on nomme le pic d'Adam parce ,

que, selon la tradition du pays elle


Les Arabes n'ont pas une moindre
a été le lieu de sa résidence (45). On
idée de la taille de nos premiers pè-
res que les auteurs de Jloïse Barcepha.
y trouve encore les traces de ses pieds,
longues de plus de deux palmes. Py-
Voici ce que nous apprend M. de Jlon-
thagoras ne trouverait point là une
conis Mon Arabe me dit comme la
:
taille aussi gigantesque que celle que
caravane du Caire arrii^ait la première
d'autres attribuent à Adam Pylha- :

à la Mecque, et qu'après y afoir fait


goras dis-je qui par la longueur du
, ,
sa prière elle allait au pied de la mon-
pied d'Hercule jugea de la taille de ce
tagne, qui en est distante d'une lieue ,
héros (46). On dit aussi qu'il y a sur
attendre les deux autres caravanes de
Damas et de Bagdet qui arrii/aient , (4o) Moncon. Voyages, part. I pag. 372,
,

les jours suiwans a la Mecque ; et qu'é- 373 , e'dition de Lyon.


(4i) Job. Lucidus de Emendal. Tempor. , lib,
tant toutes, le neuvième de la douzième
/, cap. IV, apud Pererium in Gènes., Ub.
lune , qui est Diel Heghe , h lajîn , ly, quœU.III.
(42) Josué cap. XIV, V. ull.
,

(•34) Philo, de OpiCc. Muadi. (43) Uieron. in Matlh. cap. XXVII. ,

(35) In llbro SanheJnm. (44) Pererius in Gènes. Ub. IV, quœU. III. ,

(36) In Tractatu de Paradi«o (45) Ludovic. Romanus Patricius lud ?>'a- m


(37) V.rgil. JEneid., lib. X, i':r. 7G3. Tigat. apud Bisselium, illustr. Kuiaarum , dé-
(38) Id. ibid , lib. III, vs. 655. cade I.
(39) Id. ibid, Ub. III , vs. 664. (46) A. Gellins , Noct. Au. , lib. I , cap. I.
,,.

206 ADAM.
cette montagne quelques monumens nière opinion est meilleure per lapre-
des pleurs qui furent verse's sur la dica ; car elle est beaucoup plus fé-
mort d'Abeljmais d'autres disentqu'A- conde en allusions , en antithèses , en
dam et Eve pleurèrent cette mortdans moralités, et en toutes sortes de belles
une caverne qui est en Jude'e , où l'on figures de rhétorique mais une sem- :

voit leurs lits de pierre longs de trente blable raison n'est guère propre qu'à
pieds (47). servir de preuve envers ceux qui de-
(K) De ses libres. ] Les Juifs jire'- manderaient pourquoi le sentiment
tendent (ju'Adam fit un livre sur la de saint Jérôme a eu moins de secta-
Création du monde et un autre sur
,
teurs que l'autre. Concurrence à part
la Divinité (48j. Masius parle du pre- qu'il nous suflise de savoir que les pè-
mier (49)- Un auteur mahométan ,
res ont cru fort communément que le
nommé Kissœ,us , rapporte qu'Abra- premier homme mourut au lieu où
ham, étant allé au pays des Sabéens ,
Jérusalem fut bâtie depuis et qu'on ,

ouvrit le coffre d'Adam et y trouva ,


l'enterra sur une montagne voisine
ses livres avec ceux de Seth et avec qui a été appelée Golgotha ou le Cal-
ceux d'Edris (5o). Ce dernier nom est vaire : c'est celle où Jésus-Christ fut
celui que les Arabes donnent à Enocb. crucifié. Si vous demandez comment
Ils disent qu'Adam avait une ving- le sépulcre d'Adam a pu résister aux
taine de livres tombés du ciel qui eaux du déluge et comment ses os
,

contenaient plusieurs lois plusieurs ,


ont pu maintenir leur place afin d'y
promesses et plusieurs menaces de recevoir l'aspersion du sang de notre
Dieu et les prédictions de plusieurs
,
Seigneur car c'est là le point et le
:

événemens (5i). Quelques rabbins at- mystère ,


tribuent le psaume XCIl à Adam et ,
Hic hominem primum suscepimus esse sepul-
il se trouve des manuscrits où le ti-
tum ,
tre chaldaïque de ce psaume porte , Hic patitur Christus ; pia sanguine terra ma-
que c'est la louange et le cantique que descit ,

le premier homme récita pour le jour


Pulvis Adce ut possit, veleris cum sanguine
Christi
du sabbat (52). Le bon Êusèbe Nie- Commixtus,slillanlis aquœ virtute lavari (55)
remberg la crédulité même , rappor-
,

te deux cantiques qu'il a fidèlement Si dis-je vous faites cette question


, ,
copiés de l'apocalypse du bienheureux Barcepha vous alléguera un docteur
Amadeus dans la bibliothèque de l'Es- fort estimé en Syrie (56) qui a dit
curial (53). Adam , dit-on , est l'au-
,

que Noé demeura dans la Judée qu'il ;


teur de ces deux pièces il fit l'une la :
planta dans les campagnes de Sodome
première Eve j l'autre
fois qu'il vit
les cèdres dont il bâtit l'arclie qu'il
est le psaume pénitentiel que lui et sa transporta avec lui dans l'arche les os
;

femme récitèrent après leur péché. d'Adam qu'après qu'il en fut sorti
5
(L) De son sépulcre. ] Nous avons il l^s partagea à ses trois fils j qu'il
déjà vu que saint Jérôme s'est imaginé donna le crâne à Sem , et que les des-
sans nul fondement qu'Adam avaitété cendans de Sem, s'étant mis en posses-
enterré à Hebron ; mais on n'aurait sion de la Judée, enterrèrent ce crâne
pas moins de droit de croire cela au même lieu où avait été le tombeau
avec lui , que de penser avec tant d'Adam.
d'autres qu'Adam fut enterré sur le (M) D'un arbre planté sur ce sépul-
Calvaire (54)- J'avoue que cette der- cre. ] Cornélius àLapide dit que les
Saldenum Otiorum Tlieolog.
Hébreux content que Seth par le
(4') j^pud ,
,

pag. 34G. commandement d'un ange , mit de


(48) Heidegg. Hist. Patr. , tom. I .pag. 481. la semence de l'arbre défendu dans !a
(49) ^"is Salian., tom. I pag. 23o. ,

(50) ^pud .Stanleium , Philosoph. Orient. , OH il montre que saint Jérôme même adopte en
lib. III, cap. III. quelques endroits l'opinion commune.
(5i) Hotting. Hist. Orient. pag. 22, citante
, (55) Tertulliani Carm. contra Marcion. , lih.
Lysero in Polygamiâ Iriumph. pag. i45. ,
II, vs. 100.
(5ï) Gaspar. Scbottus, Techn. Curiosse, pn^. (56) Doininus Jacobus Orrobaita (sive Edf <-
S56. senus). Saint Ephrem qui a vécu au 4^. siècle ,
,

(53) Lib. II, cap. XIII, de Orig. sacrae a été son disciple, ^oj'ez Salian. Annal. , tom. I,
Script, apud Scbottuni , ibid. ,
pag. 556. pag. 226; Corn«I. à Lapide in Gcnesim pag. ,

(54) Voyei Salian. Ann. , tom. I, pag, laS ,


,
,, ,

ADAM. 20-
bouche d'Adam déjà enterre et que les autres grands auteurs delà Sociél-
,

de là sortit un arbre, dont la croix de des jésuites jugeraient de cela comme


Jésus-Christ fut faite ; et qu'il était j'en juge.
juste que le même bois qui avait fait
pécher Adam fût celui sur lequel ADAM, archidiacre de la cham-
Jésus- Christ expiât le péché d'Adam bre patriarcale, et supérieur des
(57). Ce jésuite nous renvoie à Pinédo religieux de la Chaldée fut en-
qui a raconté au long cette fable. ,

Mais que veut-il dire parles hébreux ? voyé àRome au commencement


Il entend sans doute les juifs. Or les du XYIP. siècle, par Élie, pa-
juifs conviennent-ils que Jésus-Christ triarche nestorien de Babylone.
ait expié le péché d'Adam par le sup-
Ce patriarche, ayant fait exami-
plice de la croix, auquel leur nation
le condamna sous Ponce Pilate? Quand
ner par ses évéques la profession
un auteur est plein d'une chose il , de foi que le pape Paul V lui avait
s'imagine que les autres le sont aussi envoyée chargea Adam de la pré-
,

et il ne s'aperçoit pas toujours de l'ab-


senter à ce pape avec les chan-,
surdité où il tombe en leur attribuant
ses propres pensées. Cette fable au ,
gemens qu'ils y avaient faits ;

reste a été rapportée diversement


,
;
mais il lui donna ordre en même
car on trouve dans un rabbin qui a temps d'y corriger ce que le pape
vécu long-temps avant Jésus-Christ
y trouverait à redire. C'était une
et dont l'ouvrage est intitulé Gale
Rasejah (58) que les anges portèrent
,
ambassade d'obédience que celle
à Adam dans le désert une branche de notre Adam. Ce religieux ,
de l'arbre de vie que Seth la planta
, étant arrivé à Rome, s'acquitta de
et qu'elle devint un arbre dont Moïse
sa commission avec le plus de
se servit utilement car, après en avoir
:

tiré la verge qui lui servit à faire tant soin qu'il put. Il avait porté avec
de prodiges il en tira le bois qu'il
, lui un écrit oiiil prétendait allier
jeta dans les eaux amères pour les la foi desOrientaux avec celle de
adoucir et celui où il attacha le ser-
,
l'Egliseromaine, et faire voir que
pent d'airain. Quelques - uns disent
qu'Adam envoya Seth à la porte du leurs difFérens n'étaient qu'une
jardin d'Eden pour prier les anges
,
dispute de mots (A). Il avait d'a-
qui en défendaient l'entrée de lui bord montré cet
,
écrit à son pa-
accorder une branche de l'arbre de
triarche , et puis par son ordre
vie , ce qu'ils firent (59). ,

(N) Quand on forge de telles haran-


à tous les évéques du parti et il ;

gues.l C'est au père Salian que j'en avait été un an entier à aller de
veux. Non content de la harangue, il ville en ville pour le faire ap-
a fait une longue épitaphe pour Adam prouver à ces évéques. Pierre
où il a désigné son nom par ces trois
Strozza, secrétaire de Paul V,
lettres J. S. P. (60). Il a fait aussi des
épitaphes pour Abel, pour Abraham, fut chargé de répondre à cet écrit.
pour Sara, etc. En vérité, cela n'est La réponse approcha plus de la
guère pardonnable qu'à des auteurs dureté que de la condescendance :
irais émoulus d'une régence de rhétori-
il n'expliqua rien favorablement,
que ; et je suis fort persuadéque les Sir-
monds, lesPétaux, les Hardouins, et et il fallut que le légat du pa-
triarche se soumît , non-seule-
(57) Cornel. à Lapide in Genesim cap. Il
•"• 9/pa^- 'A-
,
,
ment aux dogmes , mais aussi
(58) VojeT,, louchant ce rabbin et son ouvra- aux expressions de Rome. Il si-
ge, les Nouvelles He la République îles Lettres ,
juillet1686, art. III pa^. 770 et suit'., lire' de
,
gna tout ce qui lui fut proposé
Alœbius, de œneo Serpenle. de la part du pape et , ne se con- ;
(ôg) foyez Saldeni Otia Tbeolog., pag. 608.
tentant pas d'abjurer toutes les
(60) Elles veulent dire , Jacobus Saliaaus po-
suil. erreurs de sa nation, il fit de* li-
,

2o8 AD AM.
vres , et les adressa à sescompa- résie de IVeslorius , il était ce scm~
triotes pour leur communiquer ble nécessaire qu'on fit voir k Rome
que le nestorianisme était une i/érita-
les lumières qu'il avait acquises ble hérésie puisqu'elle aidait été con-
,

à Rome. Il en partit après un sé- damnée par l'Eglise dans un concile


jour de trois années , et il porta général. 11 ajoute avec les mêmes mé-
nagemens que quelques-uns pourraient
à son patriarche Élie un bref
injërer des actes mêmes des anciens
de Paul V qui rejetait tous les conciles que le nestorianisme n'est ,

moyens d'accommodement que qu'une hérésie de nom,


et que si IVes-

ce patriarche avait proposés , et torius et saint Cyrille se fussent en-


tendus, ils auraient pu concilier leurs
l'obligeait à condamner tous les
opinions (3).
termes qui pourraient couvrir
(3) Là même, pag. 94.
l'erreur {a). Adam fut accompa-
gné de deux jésuites {b) , qui eu- ADAM
(Jean), jésuite fran-
rent ordre de travailler à l'en-
çais, a été un fameux prédica-
tière réunion de cette secte.
teur (A) dans le XVIP. siècle. Il
(a) Tiré du chap. X du livre V de la Per- était du Limousin , et il entra
pétuité de la Foi défendue. M. Arnaud cile chez les j ésuites l'an 1 622 à l'âge ,
le Traité de Pierre Strozza de Dogmatibus ,

ChaldEeOrum. de quatorze ans (a). Ses supé-


(Jb) Nicol. Godignus, de rébus Abassino- rieurs , l'ayant trouvé propre à
rum lit. I apud Aub. Mirseum de Statu
, , ,
réussir dans la chaire l'appliquè- ,
Relig. Cbrist. ,
pag. 226.
rent à cela après qu'il eut régen-
(A) Leurs dlfférens n'étaient qu'une té les humanités et la philoso-
dispute de mots.'] Le sieur de Moni (''') phie. Il a exercé le métier de pré-
dans son Histoire critique du Levant,
dicateur pendant quarante ans
paraît fort persuade que le patriarche ,

Elie avait raison de soutenir qu'il n'y a et s'est fait ouïr dans les princi-
qu'une pure question de nom entre les pales villes de France et au Lou- ,

nestoriens d'aujourd'hui et les catholi- vre même (b). Il commença ,


ques. Le nestorianisme d'aujourd'hui
dit-il ( i) , n'estquune hérésie imaginai-
comme de raison par les provin- ,

re , toute cette dii'ersilé desentiniens ne ces ; mais lorsqu'il s'y fut suffi-
consiste qu'en des équivoques , d'au- samment sigaalé on l'envoya sur ,

tant que les nestoriens prennent le le grand théâtre du royaume. Les


nom de personne d'une autrejaçon que
ne font les Latins. Pourquoi donc n'a-
conjonctures du temps le favori-
quiesça-t-on pas aux e'claircissemens sèrent les disputes du jansénis-
:

que le patriarche de Babylone fit don- me


avaient déjà fort échauffé les
ner? C'est que, pour garder le déco- esprits et jamais homme ne fut
;
rum, et par une fausse délicatesse de
plus propre que le père Adam
point d'honneur, il fallait toujours
soutenir que le nestorianisme était à être détaché contre le parti
une dangereuse he'résie autrement en aventurier téméraire. Il était
:

il aurait fallu prostituer l'honneur des


hardi et bouillant , et avait tou-
conciles œcuméniques. C'est ce que
tes les parties nécessaires à un
le sieur de Moni aurait dit en pays de
liberté mais on France il a fallu grand déclamateur. Le carême
;

qu'il se soit servi d'expressions un peu qu'il prêcha à Paris , dans l'église
moins développées. Comme les conci- de Saint-Paul , en l'année i65o
,
les a-t-il dit (2), ont condamné l'hé-
,
fit du fracas. Le prédicateur pous-
{*) Moni est le pseudonyme de B. Simon.
(i) Moni Hisloire Critique de la Créance et
, (a) Sotuel, Bibliotli. Societatis Jesu, pag.
des Coutumes des Nations du Levant, pag. gS. 397-
(3) Moni , Histoire Critique, etc. pag. 93, 94. [ù) Idem , ibid.
ADAM. 209
àa les choses si loin, que, s'il lui que fort peu de temps. Ses
n'eût pas eu de puissans patrons, écrits commencèrent en i6";o et
on lui eût interdit la chaire (B). finirent en i65i (G). Apparem—
Il eut assez de bonne foi (C) pour ment on trouva qu'il rendait plus
reconnaître que saint Augustin de services à l'I^glise et à sa so-
n'était nullement favorable au ciété par ses autres dons que par
molinisme; et il s'échauffa bien sa plume. Il fut envoyé à Sedan
fort contre cet ancien docteur, un collège de ié-
afin d'y établir
Les jansénistes ne laissèrent pas en serait difficilement
suites. Il
tomber cette incartade (D). Ils venu à bout pendant la vie du
publièrent un écrit contre son maréchal de Fabert, l'homme du
sermon, et ne se contentèrent monde le moins bigot, et le plus
pas de faire l'apologie de saint ferme sur le principe de la bonne
Augustin ils réfutèrent quel-: foi. Ceux de la religion se tron-
ques autres propositions de ce je- vaient fort à leur aise sous son
suite et nommément celle qui se
, gouvernement les choses chan-
;

rapportait à l'inspiration des écri- gèrent après sa mort (<•). Ils fu-
vains canoniques (E). Le père rent inquiétés en mille manières
Adam n'eut point d'égard aux par ce jésuite, et obligésde paver
plaintes que l'on fit de son ser- des sommes et de céder des fonds
mon et d'un livre oli il avait dé-
, qui lui donnèrent moyen d'éta—
bité beaucoup de choses choquan- blir le collège qu'il méditait. Il
tes contre le même saint Augus- publia un projet auquel M. de
tin. Il ne se rétracta de rien, et Saint-Maurice professeur en
,

il continua d'écrire sur le même théologie à Sedan (d) opposa une ,

ton. Les jansénistes renouvelé- réponse qui demeura sans repar-


rent leurs plaintes et leurs écritu- tie. Il demeura quelques années

res , et il s'éleva un conflit parti- à Sedan et y avança les affaires


,

culier entre eux et le père Adam,


de son ordre et le projet des cou-
lis critiquèrent les livres qu'il versions autant qu'il put. Mais
publia et il en fit quelques-uns enfin les puissances même se dé-
,

à l'usage des âmes dévotes pour goûtèrent de lui; et soit que


, ,

contrecarrer les desseins de ces l'on redoutât son esprit hardi et


messieurs. C'est dans cette vue intrigant, soit que l'on vit que
qu'il fit sortir de dessous la presse sa manière de prêcher n'avait jjas
les Psaumes de David les Hym- toute la gravité requise dans un
,

nés et les Prières de l'Église, en lieuoii il y avait une académie de


latin et en français. Personne protestans on fut bien aise que ,

n'ignore que les jansénistes cher- ses supérieurs le retirassent j'ai :

chèrent à se rendre recomman— même ouï dire qu'on en fit queî-


dables par des traductions fran- ques instances. Il avait été en—
çaises de cette sorte de livres. Ils
{C: Arrivée cm mois de ,nai 1662.
critiquèrent les muses du père
Adam, je veux dire la version ,ifll-l'"éieàVaesiridu,depuissaso^
,. '. „ . j . liede trance après la revocation de t hait de
qu il avait faite des liymnes en Nantes jusr/ u' à sa mort, arrivée le Z'^ d'août
combat '7"° Le père Adam lui tendu cent sortes de
diplume ne duraMais
vers français (F).
e entre eux
' -,
ce
et
pièges ; mais il trouva un adversaire aiti se
démêla de tout hainiement.
TOME I. 14
,,

aïo ADAM.
voyé à Loudun pour y prêcher en quelle année le père Aciam fui
pendant que ceux de la religion le procureur de la province de
y tinrent un synode national Champagne à Rome la Biblio- :

sur la fin de l'année i65c). Ce fut thèque des jésuites ne le marque


apparemment ce qui l'engagea à pas {g) mais elle m'apprend qu'en ;

la composition d'un ouvrage qui 1674 il était supérieur de la mai-


l'a fait connaître aux protestans son professe à Bordeaux. Je pense
de France plus qu'autre chose, qu'il mourut dans cet emploi en-
et plus que bien des auteurs de viron l'an 1680. Il avait publié
la première volée n'en sont con- quelques sermons de controverse
'^
^
nus. Jn ministre de Poitiers (e) sur la matière de l'eucharistie,
' ' ' '

ayant changé de religion peu qui fut l'évangile du jour par


après la clôture de ce synode toute la France pendant la que-
,

écrivit une lettre où il critiqua relle de M. Arnaud et de M. Clau-


fort malignement le ieûne que de il les avait, dis-je, publiés :

cette compagnie avait ordonne a depuis l'impression de l'ouvrage


toutes les réformées du du père Sotuel
églises et il les avait ,

royaume (/). M. qui avait prêches je pense dans le fort de


Daillé , , ,

été le modérateur de cette assem- cette contestation. Ils ne sont pas


blée , répondit à la lettre de cet mal tournés mais ils tiennent un ;

ex-ministre. Celui-ci lui répliqua: peu trop du dramatique par le


le père Adam voulut être de la personnage d'interlocuteur qvi'ou
partie et publia une réponse à y donne quelquefois à M. Claude.
,

l'écrit de M. Daillé (H), l'an i6(ïo. Je n'en parle que par ouï-dire.
M. Daillé leur répondit à tous Le père Adam passa par les mains
deux dans un même livre. Il n'a du père Jarrige mais beaucoup ,

peut-être jamais fait d'ouvrage plus doucement que plusieurs au-


qui lui ait mieux réussi que ce- tres et il en fut quitte à bon ,

lui-là , ni qui ait été tant lu par marché (K). Au reste il ne fut ,

toutes sortes de gens parmi ceux pas le premier qui parla peu obli-
,

de la religion et voilà pourquoi geamment de saint Augustin (L),


;

le père Adam qui s'y trouve pres- et qui tâcha de persuader que
,

que à chaque période , et souvent saint Paul outrait les choses* par
sous un caractère d'esprit qui fait son tempérament trop vif (M).
impression leur est plus connu
,
(g) Pexit collegium Sednnense in prot'in-
que cent auteurs qui le surpas- ciâ Campanice à f/iiâ electiis est Prvciira- ,

tor ad iirbim. Sotuel, BiLlioth. Sociel. Jesu,


sent. Cet ouvrage de M. Daillé pag.
397.
demeura sans repartie (I) et il • Au chapitre JI du livre II de la Confes-
,

sion de Sancy il est parlé dUtn frère Gilles


ne faut pas s'en étonner ceux qui disait (pie :
,

S. Paul se serait bien passe


qui auraient dû répliquer n'é- de dire beaucoup de choses qui sentaient le
taient pas de la force d'un tel fagot. Rem. Crit.
Z. J. Leclcrc nie que le père Adam ail pris
adversaire qui , même dans une à tache de persuader que saint Paul outrait
,

mauvaise cause aurait pu les


, les choses.

mener battant. Je ne sais point (A) yi été un fameux prédicateur.^


Voyez la lettre que M. de Balzac lui
(e) ri s'appelait M. Cottibi.
écrivit le i5 de janvier )C>^3 (i) , après
(/) yojyez la Vie de M. Daillé, pag. 33 et
(i) Cetti' Lettre est la onzième du livre III de
, ,

ADAM. 211
avoir lu les (fiiinze sermons qiie ce je- saint Augustin marquait
clairement
suife lui avait envoyés. qu 11 voulait bien que l'on sOt qu'il
(B) On
lui eilt interdit la chaire.^ ne tenait pas saint Augustin
pour un
C'est ce que nous apprenons d une dans ces matières. "'''^ de foi
lettre de Guy
Patin écrite le 13 d'a- .
Tn^
ne laissèrent
r
{D) Les jansénistes
Notre archet'cque dit-il , a
vril i65o. pas tomber cette incartade.
] Peu de
,

défendu ta chaire a M. Brnussel , jours après ils publier, nt un


écrit de
docteur de IVauarre et chanoine de soixante pages in quarto, dont voici le
Saint-Honoré qui est grandjanséniste titre Dejense de saint Augustin con-
,
:

et point du tout mazarin pour a^'oir tre les erreurs les calomnies , les in-
,
,

prêché depuis trois jours un peu trop ^ectives scandaleuses que le père y4 dam
hardiment. Le père Adam jésuite etit jésuite a prêchéts dans léglist deSaint-
éprout'é la même rigueur pour avoir J^aul le second jeudi du carême sur ,

prêché contre saint yiuguslin dans l'é- ce texte de l'évangile de la Chana-


glise de Saint-Paul et V avoir appe- née « Je ne suis envoyé qu'aux bre-
, :

lé l'Africain échauffe et le docteur » bis perdues de la maison


, d'Israël. »
bouillant, sans le crédit des jésuites et Ilsl'accusèrent d'avoir dit « 1°. Que :

des capucins qui en ont détourné l'ar- « saint Augustin était embarrassé""
, et
chevêque (3). » obscur en ses écrits qu'étant un ,

'Cj // eut assez de bonne foi etc.] » esprit africain , ardent et plein
, de
Il faut entendre ceci cum grano salis
" chaleur il s'était souvent trop em-
,

M porté était tombé dans l'excès


avec quelque restriction et l'on se : ,
,
M avait passé au delà de la vérité,
tromperait si l'on s'allait figurer que en
ce jésuite ne retint rien des obliquités
J) combattant les ennemis de la grâce,

artificieuses de ceux qui ont prétendu » comme arrive quelquefois ({u'ua


il

que saint Augustin n'est favorable, ni » homme qui a dessein de frapper son
aux calvinistes, ni aux jansénistes » ennemi , le frappe avec tant de vio-
5

car dans le même sermon qui excita » lence, qu'il le jette contre un ar-

tant de plaintes, et qu'il divisa en » bre , et lui donne un contre-coup

deux parties, il destina la seconde à » contre son intention 2° Que saint


montrer par la doctrine de ce père » Augustin même, en établissant con-
,

que Jescs-Chbist était mort pour tous « tre les pélagiensle péchéoriginel, s"é-

les hommes sans en excepter aucun ; » tait emporté jusqu'à l'excès de l'er-
j

et il avait déjà publié un livre intitu- » reur, en disant que le péché origi-
lé Citlvin défait par soi-même et par ,
•n nel était puni dans les enfans qui
les armes de saint Augustin qu'il
') mouraient sans baptême de la ,
,

avait injustement usurpées sur les ma- » peine du feu et du dam. 3°. Que
tières de la grâce de la liberté de la " saint Augustin n'était pas bien assu-
, ,

prédestination '3'. Or, il ne faisait au- » ré en ce qu'il a écrit, puisque, se-


cune dillîrulté de dire que Jansénius
w Ion la remarque de M. Gamache
,

et Calvin enseignent la même chose


)> changé trois fois dans la ma-
il a

sur les matières de la grâce et il ré- ,


)) de la grâce. » Ces reproches
tière

pondit peu de jours après son sermon et quelques autres de cette nature

à quelqu'un qui lui en reprochait l'ex-


avaient déjà paru dans un livre da
cès : Je ne crains rien ; personne ne père Adam. Ceux qui n'auront pas
peut attaquer mon sermon ni mon livre ce livre les trouNeront dans un ou-
de la Grâce qu'il n'entreprenne de
vrage qu'il est facile de consulter je
, ;

soutenir Calvin ('4)- Qu'est-ce donc que veux dire dans les f^indiciœ Aitgus-
l'on doit entendre par la bonne foi tinianœ où le père Adam est le pre-
,

que je lui donne? On doit entendre mier des adversaires modernes de


saint Augustin que le père Noris ait
que la liberté avec laquelle il expli-
réfut('s.
quait ses pense'es sur les défauts de
(Ej Qui se rapportait à l'inspiration
la première partie des LeUres choisies , pag. des écrivains canoniques.^ a Que per-
ïoC), e'dit. de Hollande. )) sonne ne s'étonne si le père Adam a
(2 Patin, Letire XXXVII, pag. 162 du » dit en son sermon, que saint Au-
toin. /, edit. de Genève., en i6<)i , în-12.
3) gustin a excédé par l'ardeur de soa
(3) Défense de saint Augustin contre le père
Adam pag. 2.
,
)) zèle puisqu'il a écrit dans un mé-
,

(4) Là même. » chaut livre plein de faussetés et


,

212 ADAM.
» d'erreurs (*) , que celte faiblesse souffre, dirent-ils (6)quelquefaiblesse
,

» n'est pas si criminelle que Dieu ne dans les auteurs canoniques qu'il in-
» la souffre en la personne des auteurs spire ; s'ily a un feu naturel en saint
i) qu'il inspire,et que nous appelons Paul, qui ne soit point celui de Dieu,
i> canoniques et que le Jeu naturel tout ce qu'un libertin ou un hérétique
» de saint Paul était bien capable Je trouvera dans les livres saints contre
» le porter dans des expressions de cet- son sentiment il dira que c'est ce qui
,

i> te nature.... Pour prouver qu'il y a vient de la faiblesse ou du feu natu-


M qne]qiiefois de la faiblesse dans les rel de l'homme et non de l'esprit de
)) auteurs canoniques et qu'ils par-
, Dieu... Vouloir reconnaître dans l'E-
» lent suit'ant leur imagination dans criture quelque chose de la faiblesse
» l'expressiondes choses que Dieu leur et de l'esprit naturel de Ihomme, c'est
M a révélées,, il dit que lorsque le donner la liberté a chacun d'en faire le
n prophète Elie se plaint de l'impiété discernement, et de rejeter ce qu'il lui
j) de son siècle, il dit a Dieu que la ,
plaira de l'JEcriture comme venant
,

» foi est éteinte dans le cœur de tous plutôt de la faiblesse de l'homme que
» les hommes, et qu'il est resté seul de de l'esprit de Dieu.... Le libertin dira
» tous ceux qui l'adoraient sur la que le feu de l'enfer ne durera pas
» terre... David assure que l'on n'a toujours, et que lorsque saint Matthieu
» jamais uu plus de désordre et plus a dit allez maudits au feu éternel ,
,

)> de corruption que de son temps , cest une expression excessive pour ,

» qu'il ne se trouve pas un seul homme marquer la longue durée et la grandeur


» qui fasse une bonne action. » Voilà des peines préparées aux méchans, sui-
le dogme que les censeurs du père vant l'imagination de cet évangéliste
Adam lui reprochèrent. Il en résul- (7). Ces messieurs prétendirent que le
tait que la doctrine inspire'e et l'es- , V)ère Adam n'en avait jamais usé ainsi
pression de l'inspiré étaient deux
, que pour se pouvoir défaire des ear-
choses différentes que Dieu était l'au-
;
pressions de saint Paul qui lui sem-
,

tenr unique de la première mais qu'il ; bleraient dures et contraires h ses sen-
laissait l'autre à l'imagination de ce- timens et pour enseigner l'art de se
,

lui qu'il inspirait, et qu'il n'empê- jouer de la force invincible des paroles
cliait pas que cette imagination n'al- du docteur des nations sur la grâce et
lât plus loinque le Saint-Esprit. C'é- sur la prédestination divine, aussi-bien
taitsans doute la pensée du père Adam ; que celles de saint Augustin, S'il se
car l'exemp'e d'Élie et de David , voit pressé par le chapitre neuvième de
qu'il allègue, ne servirait de rien à l'épîlre aux Romains , où saint Paul
un homme qui serait persuadé que dit, que Dieu fait miséricorde à celui
Dieu révéla qu'Elie était le seul ado- qu'il veut, etendurcit celui qu'il veut
rateur du vrai Dieu , et qu'au temps il pourra répondre que c'est le feu natu-
de David il n'y avait pas un seul hon- rel de saint Paul qui l'a porté dans des
nête homme sur la terre. 11 faut donc expressionsde cettenature^ que cest la
que celui qui emploie ces exemples faiblesse que Dieu souffre dans les au-
soit persuadé que Dieu n'avait point teurs canoniques ; que c^est l'expression
révélé cela , mais seulement que le d'une chose révélée suivant l'imagina-
nombre des gens de bien était petit. tion , le naturel et le tempérament de
Sur ce pied-là , l'imagination de l'in- saint Paul (8). Je ne rapporte point
spiré rend universel ce qu'on lui donne ce qu'ils repondaient sur ce qui avait
avec restriction : elle tombe dans le été cité d'Élie et de David je dirai :

sophisme, à dicto secundiim quid , ad seulement qu'ils trouvèrent une gros-


dictuni simpliciter ; en un mot , elle se erreur de fait dans la première de
sophistique la révélation, elle trompe ces citations^ car l'auteur canonique
l'Église, elle ment. Les jansénistes ne qui a rapporté la plainte d'Élie , ne
manquèrent pas de s'écrier que cette l'a point rapportée comme l'expres-
doctrine était impie , et qu'elle ou- sion d'un homme inspiré, mais com-
vrait la porte à mille attentats contre me l'expression d'un homme qui se
l'autorité de l'Écriture (5) Car si Dieu
:

Là même.
(*) Troisième partie, chap. Vn,pag. 622. 7) Là même pag. i6.
f6) ,

(5) DéTeDsc de saint Augustin contre le père (8) Conférex ce qui esl dit page Î74 '^^ ''Avis
Adnm ,
pag^. 11. aun Réfugiés.
,,

ADAM. 2l3
trompait, et à qui Dieu reve'la qu'il se " comme il dit quecela arrivait à d'au-
trompait. Ainsi cet auteur, en rappor- « très inspirés, en qui Dieu produit
tant une fausse plainte d'Elie ne , « ces moui'emens extraordinaires pour
s'est nullement ëcarle' de Tesactitude 3) signe et pour prodige et qui uont ,

la plus historique. Ces messieurs fi- » soutient plus loin qu'ils ne de-
rent souvenir le public que « eutre ,
J> fiaient. A
quelle marque veut-il que
» les propositions extraites des leçons » l'on reconnaisse ces gens là que Dieu
i) publiques des jésuites de Louvain , )» envoie pour signes, si leur imagi-
i> reconnues par eux, et censurées par » nation une fois remuée confond
}> les facultés de Louvain et de Douai » ce qui vient de Dieu avec leur folie,
i> id88, l'on voit les deux sui-
l'an }> et s'ils débitent le vrai et le faux
3) vantes i°. -^Jin que quelque chose
: » avec l'extérieur de gens hors du
» soit écriture sainte il n'est pas né- , 3> sens et qui sont dans un mouue-
,

» cessaire que toutes les paroles soient }> ment déréglé. Ce mélange d'inspira-
i' inspirées du Saint-Esprit, 2°. // î) tion divine et d'extravagance ca-
» n'est pas nécessaire que toutes les » chéessouslemêmeextérieurqui res-
» i>érités et toutes les sentences soient semble à la manie, blesse l'idée que
))

» immédiatement inspirées par le Saint- nous avons de la sagesse de Dieu)>

» Esprit à l'auteur sacre. « Mais ces « (12) )). 11 y a des gens d'une imagi-
deux propositions-là quelque quali- nation si ardente qu'ils ne rapportent
, ,

fication qu'elles méritent d'ailleurs jamais, sans l'outrer, cequ'onleur adit.


sont bien difl'e'rentes du dogme du Ils se contentent de retenir la chose ,

père Adam , et infiniment moins dan- et ne se chargent pas des expressions


gereuses (9). de celui qui leur a parlé ils en sub- :

Je me suis e'tendu sur ceci parce stituent d autres, qui sont revêtues de
,

que j'ai remarque' que c'était un fait tout leur feu et par conséquent une ,

qui a été ignore de ceux qui, à l'occa- image peu fidèle de ce qu'on leur avait
sion des sentimens de quelques théolo- dit. Ces gens-là croient aisément que
giens de Hollande, ont tant écrit pen- les prophètes et les apôtres ont ainsi
dant ces dernières années sur l'inspi- traité les idées que le Saint Esprit leur
ration des livres sacrés. Au reste, tou- communiquait.
tes les communions ont
leur père (1) La faite des
i'ersion qu'il ai'ait
Adam il se trouve partout des écri-
:
hymnes en i>ersfrançais {ii) Ce qu'on ."]

vains à qui d'autres doivent faire la


, trouve là-dessus dans la IX*. partie des
même leçon qui fut faite à ce jésuite. difficultés proposées à M. Steyaert,
Voici celle que M. Saurin ministre , mérite que je le rapporte « Il y a :

d'Utrecht a faite à M. Jurieu minis-


, , » long-temps qu'un livre de prières n'a
tre de Rotterdam (10): « La compa- » été plus estimé que celui qui a pour
» raison qu'a faite M. J. , del'imagina- » titre L'Office de l'Eglise et de
:

» tion des prophètes, laquelle a reçu i> la f^ierge, en latin et en fran-


)> des impressions d'en-haut avec une 1) cais auec les Hymnes traduites en
,

» l'oue qui étant mise en branle , ne


, )) i^ers qu'on appelle autrement Les
:

» cesse pas d'aller quand la main » Heures de Port-Royal. Il s'en fit en


j) cesse de la remuer (11), est encore )) un an quatre éditions ce qui donna :

» uue autre profanation. Car, s'il ne •f> tant de jalousie aux jésuites, qu'il
» l'a point appliquée aux grands pro- » n'y a rien qu'ils n'ayent fait pour
» phètes cela y va de plein droit
, : )) les décrier. Ils y firent de méchantes
» ou bien il devait montrer que leur r> objections, qui furent aussitost re-
» imagination ébranlée ne roulait pas i> poussées. Ilsy op[)osèrent les Heures
» au-delà de l'impression, par sa pro- » du père Adam, sous le nom d'Heures
» pre impétuosité , de même que la » catholiques comme si les autres
,

i) loue que l'on a mise en branle, w eussent esté hérétiques. Les hymnes

Voyez la Réponse de M. Simon aux senli-


)'v estoient aussi ti-aduites eu vers;
(9)
ïiicus de théologiens de IloUande ,
({Uf^lques
» mais si ridiculement ,
que cela ne fit

cliap. XII ; el son Histoire critique du Nouveau


J r^ilamenl, chap. XXIII. Voyez autsi /aBililio- {12) Saurin, Examen de la Doctrine de M. Jo-
iViéqiie universelle, lotn. X, pag. iSa, loin. XI, rieu , pour servir de réponse à un libelle intitule

ijug. 80, el tom. XIX, pag. ijgg.


Seconde Apologie de M. Jurieu , png' 21.
(10) En 1692. (i3) Voyez la République de M. Vt^Mi- part. .

Ùi) y^oiei'/rt XX^. Lettre pastotaledc 1689. II pa'^.' ig pari. III , pa§. ï34 el 4j4-
, ;
2i4 ADAM.
» que relever l'e'clat de celles de Port- Charenton nomme' M. AUix , croi-
» Koyal. Enfin ils les déférèrent
, raient, sans hésiter, que le père Adam a
» l'inquisition àf home, et einployè- fait un livre contre lui s'ils n'avaient ,

)) rent tout leur crédit pour les y faire point d'autres lumières que celles que
n condamner (i4)- " Le cardinal Spa- l'article de ce jésuite fournit dans le
da lit entendre à M. de Saint-Amour, continuateur d'Alegambe et voilà :

que si Ton accusaitautribunal de Fln- comment les moindres fautes sur les
quisition cet ouvrage du père Adam, noms propres sont capables de faire
elle le condamnerait. M. de Saint- illusion aux lecteurs. Un homme qui
Amour répondit que si tes Heures aurait pris une fois M. Allix pour
,

qu'il défendoit avaient à esira flus- VAllius de ce continuateur, serait ca-


tritts... il aininit autant quelles le fus- pable de le mettre au catalogue des
sent seules, que dons la compagnie de enfans célèbres et de l'envoyer à ,

celles du père Adam, et qu'il ne ju M. Baillet(i6j comme une addition ,


5

geoii pas qu'il fallust accoutumer ces car il le croirait imprimé dès l'année
pères a composer un méchant lii're 1660 et réfuté par un jésuite fa , ,

dès qu'ils en verraient paroistre un meux.


boa qui ne leur plairait pas
,
dans (I) Cet ouurage de M, Daillé de-,

l'espérance qu'ils auraient de Juire meura sans repartie.'} Les curieux ne


condamner l'un et l'autre sous om- seront pas fâchés de voir ici ce f(ue le
,

bre de tenir la balance égale , et de fils de cet habile ministre a observé


mettre lu paix entre Its uns et les au- touchant ce livre. // est entre les
très (i5j. mains de tant le monde, dit-il, et il a
(G) Comnirncèrent e/z i65o et fi- été si bien reçu qu'an en a drja fait
, ,

nirent en i65i ] Le père Sotuel ne deux éditions. Ceux de notre cantmu-


marque que cinc| ouvrages du père nian, pour lesquels il était fait princi-
Adam'^ Le dernier est sa Réponse à palement ,y troui'enl auec satisfaction
une lettre de M. Daillé et parut en In plupart de nos controverses traitées
,

1660; et voici les titres des précé- d'une façon fort capable de les in-
deris Cali'inus a seipso et à sancto struire
: et notre religion justifiée de ,

j4ugustina projligalus Parisiis, i65o, tous les blâmes dont ses ennemis la
,

in-S" Psalmi JJat'idis latine et gal- chargent ordinairement. Et si l'on


j ,

licè cum canticis undecim quibus peut tirer quelque avantage du silence
, ,

ulLtur Ecclesia,Pâris'ns i65i, in-i de nos parties il semble qu'ils nient


, ,

Fidelium Régula ex sacra Scripturd passé condamnation eux-mêmes puis-


,
,

et sanrtis Patrihus deprompta Pari- que jusqu'à présent ils n'y ont rien op-
,

siis ifiSi
, in-12; Prêtes cathalicœ
, posé ni l'un ni l'autre quoiqu'ils ,
,
,

latine et gallicè , Parisiis, i65i aient souvent promis le contraire et ,


,

in-8 et 12. qu'on leur en ail fait des reproches


(H) Une réponse à l'écrit de M. plus d'une fais (17). M. Daillé le fils
Daillé.'] Le })ère Sotuel intitule cet ou- venait de dire une chose qui insinue ,

vrage, Responsum ad Epistolain D. manifestement que le père Adam fut le


.Alla Ministri CharenUmensis Hœre- convertisseur du ministre Cottibi. Je
tici. C'est latiniser misérablement le dois donc la remarquer comme l'une
nom de M. Daillé, et c'est une mar- des prouesses de celui qui fait le sujet
que que le père Sotuel ne lisait guère de cet article. Écoutons donc encore
1„„ 1;
les livres det .
controverse. f^;, ri.-i. •-..
/-. j-
Car où est une fois l'historien de M. Daillé
m T^_:lI' - .

le controversiste à qui les livres la- « Non-seulement le néophyte romain,


tins de M. Daillé soient inconnus, et 3> qui était la partie intéressée, se dé-
qui ne sache, par conséquent , que ce )j fendit lui-même, en mettant au
ministre se nommait en Latin Dal- jour une assez grosse réponse; mais >'
,

lœus ? Tous ceux qui savent confu- de plus, comme si sa cause n'eût J)

sément qu'il y a eu un ministre de » pas été en siireté entre ses mains ,

il vint à son secours un fameux ))

(14) DiflScuIlés proposées à M. Steyaert, IX^.


part. , pag. 42.
(16) Il publia en 1688 un livre intitulé. Des
(i5) Là même pag. , 45. Enfans devenus célèbres par leurs études, ou par
* Joir donne de onze. Le quatrième
le lilre leurs écrits.
intitulé^ le Ti>niboan du Jansénisme , et les cinq (17 Abrégé de la Vie de M. Daillé pa^. 'i^.
,
lleimeii avaient été oniis par Sutuel. H fut imprimé Cajt 1670.
, -
,

AD AM. 2i5
» jesiiife , de qui quelqu'un de sa dans son Anatomie
Le second (21).
» communion a dit qu'il n'est le pre- contient ces paroles Tous ceux qui, :

j) mier homme du monde que de nom l'an \Q\Q estoient dans le collège de ,

)' seulement. On entend assez par Poitiers, scawent les querelles de Jean
)) là que c'est le père Adam qui Adani et de Jacques Biroat deux
, ,

«pour soutenir SON PROSÉLYTE fit pa- personnes les plus considérables de
,

» raître en m^me temps que lui une l'ordre. Ils se sont si hostilement atta
5) seconde réponse à peu près de quez, qu'ils ont fait paroistre, par un
,

» même taille et de même force que la secret de la Providence de Dieu


,
» sienne. » leurs puantes ordures, et Jacques Bi-
Ce previicr homme âa passage qu'on roat a demeuré convaincu etc. (il). ,

vient de lire m'a fourni dans la pre- Le troisième porte que le plus excel-
mière e'dition de ce dictionnaire une lent de leurs hommes de chaire, nommé
note marginale, qui fera présentement Jean Adam, estfi!s d'un couturier {^i).
une partie du corps de cette colonne. De ces trois passages, il n'y a que le
Voici ce que c'est « J'ai ouï dire que premier qui puisse faire du tort à la
:

>' la reine mère, ayant demandé à un mémoire du père Adam; car le second
« grand seigneur, qui l'avait accom- fait tombersur la tête du seul biroat les
» pagnée à un sermon du père Adam orduies (jui se découvrirent en consé-
,

» ce qu'il en pensait, il la remercia quence de leur démêlé. Ainsi tout ce que


)i d'y avoir été si bien convaincu de la chronique scandaleuse et les anec-
j) l'opinion des préadamites. On lui dotes avaient révélé au père Jarrige ,
J> demanda l'explication de cette é- concernant le père Adam, se réduisait
>) nigme il répondit Ce sermon m'a à quelques leçons d'anatomie, faites à
; :

ty fait ijoir très-clairement qu Adant une religieuse, sur la génération des


'> n'est pas le premier homme du enfans. Encore un coup c'est sortir à ,

» monde. » Vous trouverez ce conte peu de frais des mains de Jarrige, on


dans la suite du Ménagiana (i8j, et me l'avouera pour peu que l'on fasse ,

vous y apprendrez que le grand sei- réflexion sur le caractère de son ou-
gneur qui répondit cela à la reine vrage. Si cet auteur nous avait dit
était le prince de Guémené, et que le l'ilge de la religieuse, nous pourrions
sermon qui donna lieu à ce bon mot plus sûrement juger de la faute. Parler
,

Jut très - mal reçu a la taille et à la de CCS chosesavec unejeune religieuse


cour (19). Le père Adam y tit une est sans doute un grand péché à ,

comparaison fort odieuse des Pari- cause qu'il est moralement impossible
siens ai'ec les Juifs qui aidaient cru- qu'une telle conversation n'excite des
cifie IVotre- Seigneur. Il compara la sentimens impurs; mais je voudrais
reine h la P^ierge, et le cardinal Maza- bien qu'un casuiste de bon sens, qui
rin a saint Jean l'euangélisle. Notez ne fût ni trop relâché, ni trop rigide,
f[ue d'autres donnent ce bon mot à examinât cette question Une reli- ;

Benserade. Lisez sa Vie au-devant fieuse ,


d'un âge si avancé qu'elle ,

de la dernière édition de ses OEu- coûterait une leçon d'anatomie sur les
vres (ao). organes de la génération avec la même
(K) Il en fut quitte a bon marché-l indifférence que l'e.rplication des par-
Je trouve trois passages qui le concer- tiesde l'oreille, pècherait-elle par la
nent, dans les libelles de l'ex-jésuite curiosité d'entendre cette leçon ? Je
Jarrige. Voici le premier Le père : crois qu^on m'avouera qu'il est fort
Jean Adam l'un des meilleurs pré-
,
permis à une femme, de quelque con-
dicateurs qu'ils ayent interprétait a ,
dition qu'elle soit de savoir tout ce
,

ttneursutine du couvent de Saint-Ma- c[ui se dit touchant la circulation du


cnire le Traité de la Génération , et sang. Ce n'est point un péché à elle
parlnit ai'ec autant de clarté des par- de savoir que les plus subtiles parties
ties qui contribuent h la procréation du chyle passent des intestins aux
des ert/'ans, que le sieur du Laurent veines lactées, et de là successive
(21) Jarrige, jésuite, mis sur lechafauil
(18) Page 3q de l'édition de Hollande.
Chap. X.
(iq) Ce un Sermon de la Passion, prêché
fut
par le père Adam, à Saint-Germain de l'kuxer- (22) Là même.
rçis. (23) .Tarrige, Réponse à Jacqncs Beauféi ,

(20) Celle de l'an 1C97. chap. XIV.


,

i6 ADAM.
ment dans réservoir de Pe'qiiet ,
le Le père Adam, quatre jours après son
dans le canal tliorachiqne , dans la sermon avoua à une personne qui lui
,

veine soiiclaviôre, dans la veine cave, représentait !e préjudice que cette pré-
dans le ventricule droit du cœur, dication pouvait causer. Que Gabriel
dans l'artère du poumon dans la , à Porta jésuite disait souvent qu'il
, ,

veine du poumon, dans le ventricule serait a désirer que jamais saint y4u-
gauche du cœur dans l'aorte. Elle , ffuslin n'eût écrit de la Grâce (aS).
peut savoir sans pe'clië le jeu des val- Long-temps avant la naissance du jan-
vules qui sont aux extre'raite's des vei- sénisme, il y avait eu des théologiens
nes et des artères, les anastomoses, la qui avaient déclaré fort librement que
sécrétion de l'urine, etc. Pourquoi se- saint Augustin poussait les choses trop
rait-elle donc criminelle d'achever loin et que, quand il avait en tête
,

tout son cours d'anatoraie , et d'e'tu- certains adversaires il s'éloignait de ,

dier exactement tout ce quisedit sur leur erreur si ardemment, qu'il sem-
les parties tant intérieures qu'exté-
,
blait passer jusqu'à l'extrémité op-
rieures, qui sont destinées à la pro- posée par exemple, qu'en combattant
:

cre'ation des enfans ? Le crime ne sau- l'erreur des pélagiens, il semblait s'a-

rait consister dans la simple connais- vancer trop vers celle des manichéens,
sance de ces choses il faudrait donc : et qu'en combattant les manichéens ,
qu'il consistât dans lespense'es impures il semblait adopter l'hérésie de Pelage.

quLaccompagneraient , qui pre'céde- Un Irlandais, nommé Paulus Léonar-


raienl, qui suivraient cette etude-là :
dus cite là dessus Génebiard , Cor-
,

mais j'ai suppose' qu'on fût dans le nélius Mussus, évêque de Bitonte Ca- ,

même calme que si l'on e'tudiait l'a- jetan, et Sixte de Sienne (a6). Mais le
natomie de l'oreille. Voilà le cas et père Annat en cite bien d'autres, dans
l'espèce sur quoi il faut raisonner. Ne le même livre où il s'eftbrce de prou-
m'èrigeant point en casuiste, je donne ver que saint Angustin n'est point du
la chose à décider à qui il appartien- sentiment de .Tansénius (ay). Voyez ce
dra et je dis seulement <pie pour
j ,
que le père Noris a répondu à cette
]"ouer au plus sur, il vaut mieux que grandi' nuée de témoin";, produite con-
es personnes qui ne sont pas de tre ce grand évêque d'Hippone. Quel-
profession à devoir connaître ces cho- ques protestans ne s'éloignent pas de
ses , et surtout celles qui ont fait cette pensée, que saint Augustin ou-
vœu de continence n'aient jamais , trait les choses. Je ne parle pas du
une telle curiosité, et ne la conten- Commentaire Philosophique (aSj, où
tent jamais de sorte que le père
: l'on approuve en quelque manière le
Adam n'aurait pu convenir du fait ,
jugement du père Adam ni de la Bi- ;

sans avouer qu'il était tombé en bliothéque Universelle (29), où saint


faute. La plus grande charité des gens Augustin est représenté tout tel que le
n'irait guère qu'à ceci c'est que son :
père Adam l'aurait voulu je parle :

auditrice en était logée à la maxi- de M. Daillé, qui non-seulement en- ,

me amare liceat si poliri non licetT


, ,
veloppe saint Augustin dans l'accusa-
DUnt caremus i'eris , gaudia Jalsa tion générale qu'il fait aux Pères de ,

jut^ant. sembler donner dans un précipice


(L) Il fut pas le premier qui parla
rie quand ils en fuient un autre (3o);
peu obligeamment de saint Augustin.'] mais qui l'accuse aussi d'avoir traité
M. Sarrau écrivit à M. de Sauinaise , trop les choses à la manière flottante
en 1646, que les jésuites disaient tous des philosophes académiciens (3i). 11
les jours eu chaire, que saint Augustin a paru depuis quelque temps un petit
n'était point la règle delà foi, et que, livre inii\.\\\é Afis importuns a M. Ar-
pour débarrasser des objections
se
(iS) Défense de saint Angusiin cont/e te père
qu'on il avait avancé bien
lui faisait, Adam pitg- 24.
,
des choses indiscrètement. IVon est (26; Paulus Léonard. Respous. ad Exposlula-
hic paler rei^ula ftdei. Ut se expedirel tiones contra scieutlam inediaui pag. ii-, ii8.
,

ab argumentis hœreùcoriuii sui tem- (27) Annati Augustinus vindicalus à Bajanis.

pnris , milita libérais et inconsidera- Ç28) Pari. III , pag. 4. Vo^ez aussi le Sup-
pléinpul pag. 2,
tiiis dixit, quibus non tenemiir
.,

(24). (29) T^me Xir, pag. 287.


(30) Daillé, de l'Emploi des Pères, pag. i53.
{^l\) Vide Epistol, Sarravii ,
pag. irjG. (3iJ L'a mente, pag. 3t)'i.
AD AM. 2,7
naud sur le projet d'une nouvelle Bi- ils ont une jalousie contre quel-
si vif'e
bliothèque d'auteurs jansénistes, dans ques parties de iEscriture , et surtout
lequel on parle d'un tiers parti qui se contre tes épistres de saint Paul, que
forme, qui ne sera ni janséniste , ni quelques jésuites naguères en publi-
moliniste, et qui mettra saint Augustin ques prédications et autres leurs fau-
entre ciel et terre , ni trop haut, ni teurs en conversations privées exal-
,

trop bas. Ce milieu pacifierait les trou- tans saint Pierre comme un esprit ex-
bles, si l'on voulait être bien raison- cellent, censuraient saint Paul comme
nable. Parla, il serait permis d'être personne de cerveau bouillant et fou-
janséniste ou moliniste, selon que le gueux qui s'estoit laissé emporter en
,

cœur en dirait. Ne doit-il pas suffire la pluspurt de ses disputes si immodé-


aux je'suifes que saint Au£;nstin ne soit rément aux saillies de son zèle, et a
point la règle de la foi ? En deman- l'acrimonie de son esprit, qu'Une fal-
daient-ils davantage dans les livres loit pas faire grand estai de ses asser-
dont députes des jansénistes (82)
les tions ains, que sa lecture est fort pé-
:

tirèrent plus de cent propositions qui rilleuse, sentant l'hérétique en divers


attaquaient l'autorité de ce père ? endroits; etqueptut-estre ileust mieux
(M) De persuader que saint Paul valu qu'Un'eust jamais escril. Encnn-
outrait les choses par son tempéra- formité de quoy j'ai ouy dire a des ,

ment trop t^if.'} Il y a dans la censure catholiques romains plus d'une fois
,

du sermon du père Adam (33) un pas- qu'on a j'a souvent et par plusieurs
sage du père Caussin où saint Paul fois consulté bien à certes entr'eux île
,

et saint Augustin sont comparés à censurer en quelque manière, et réfor-


deux grandes mers, qui s'enflent par mer les épistres de saint Paul quoy- :

impétuosité d'esprit tellement en une qu'a dire ce que j'en pense je n'y ,

rii-e ,
qiCils semblent uouloir laisser puisse presterfoy tant est l'entreprise. ;

l'autre a sec pour un temps inais en soy blasphématoire et abominable,


; ,

comme V Océan, après s'estre large- et tant serait désespéré le scandale en


ment répandu d' un costé, retourne dans ces temps. Mais comme qu'il en soit, ,

les limites que Dieu lui a ordonnées il est certain qu'ils


, estiment saint
aussi ceux-ci, après avoir couru sur Paul au-dessous de tous les escrivains
les esprits rebelles, qui s'élèvent contre sacrez et je scay de proprescience,
:

la vérité, retournent dans une égalité et ouïe que quelques-uns d'entr'eux ,

paisible pour édifip.r la maison de enseignent en leurs chaires que ce


,
,

Dieu {*). Voilà cette roue qui fait plus saint apostre n'avoit autre assurance
de tours qu'on ne lui commande à de sa prédication que la conférence
,
,

laquelle nous avons vu qu'un ministre qu'il en fit avec saint Pierre et qu'il ;

a comparé l'esprit prophétique (34). n'osa publier ses épistres, que tout pre-
Saint Paul et saint Augustin se débor- mier saint Pierre ne les eust approu-
dent de temps en temps mais ils re- vées. Noûà des gens bien maladroits;
;

tournent ensuite comme la marée dans car si les épîtres de saint Paul fu-
,

les bornes que Dieu leur marque. rent approuvées par saint Pierre, elles
le beau moyen de répondre à tous les ont toute l'authenticité qu'on peut
passages de saint Paul, qui incommo- souhaiter.
dent! On n'a qu'à dire qu'il avait alors
inondé toute la campagne , et qu'il ADAM ( Melchior) a vécu dans
faut l'attendre à son retour dans le
lit que Dieu lui avait donné. Le che-
le XVIP. siècle. Les soins infati-
valier Edwin Sandis m'apprend une gables qu'il a pris de recueillir,
chose qui vient trop bien ici pour d'ajuster et de publier les Vies
n'y être pas insérée. Je scay de très- d'un très-grand nombre de sa-
bonne part , dit-il (35) , qu'en Italie
vans , méritaient que quelqu'un
(32) En 1653. Voyet le Mémorial liistorique lui rendit un semblable office ;
touchant les cinq Propositions, pag. 82.
(ii)Pag. I-. et cependant je ne pense pas que
(*) De la Cour Sainte, torn. III, maxime VI personne le lui ait rendu. M. Mo-
de la pre'deslination «uni. a.
,

(34) Ci-dessus remarque (E) vers la fin-


, réri s'était engagé à parler de lui ;
(35) RelatiouJe la Religion, chnp. XXVI,
pag. 2i5. mais il ne se souvint plus de sa
, ,

2l8 ADAM.
promesse lorsque le temps de imprimé l'an iGrç) : celui des ju-
l'exécuter se présenta L'en- risconsultes vint ensuite et enfin
(a). ,

gagement et la non— exécution celui des médecins. Ces deux der-


ont subsisté jusqu'ici dans toutes niers furent imprimés en 1620.
les éditions de son dictionnaire Tous les savans dont on voit la
(b). Il était difficile d'oublier un vie dans ces quatre tomes in-8''.
écrivain dont on empruntait si ont vécu *' au XVP. siècle, ou
souvent beaucoup d'articles. Pour au commencement du XVI P. ,
moi qui me sens très-redevable et sont Allemands ou Flamands
, ;

à ses travaux je voudrais lui té- mais il y a une vingtaine de théo-


,

moigner ma gratitude en don- logiens des autres pays dont no- ,

nant un long détail de sa vie tre auteur publia les Vies séparé- ;

mais je n'ai su trouver nulle part ment, en l'année i6i8 *^. Tous
les matériaux nécessaires. Voici ses théologiens sont pro tes tans.
ce que j'ai trouvé. Meixhior Adam Quoiqu'il n'ait composé que peu
naquit dans le territoire deGrot- de ces Vies il n'a pas laissé de ,

kaw en Silésie et fit ses études donner beau^coup de temps à cet


,

dans le collège de Brieg oii les ouvrage , et d'y prendre beau- ,

ducs de ce nom avaient grand coup de peine parce qu'il a mis ,

soin de faire fleurir les belles- en abrégé les écrits qui lui four-
lettres et surtout la religion ré- nissaient les matériaux , soit que
,

formée (c) j'entends celle qu'un ce fussent des Vies proprement


:

catholique romain appellerait le dites , soit que ce fussent orai-


calvinisine. Le jeune homme ap- sons funèbres programmes élo- , ,

prit dans cette école à être bon ges préfaces ou mémoires de ,


,

réformé. Il eut part pour con- famille. Je ne dis rien des som-
,

tinuer ses études aux libéralités maires qu'il a mis aux marges en
,

qu'un grand seigneur (d) avait fort grand nonabre. Il a oublié


destinées à l'entretien d'un cer- quelques personnes qui n'étaient
tain nombre d'écoliers. Il devint pas moins considérables que plu-
recteur d'un collège à Heidel- sieurs de celles dont il a parlé (A).
berg (e) et ce fut dans cette ville Les luthériens ne sont pas con-
;

qu'il publia, en l'année i6i5, le tens de lui


(/) ils le trouvent trop ;

premier volume de ses Hommes partial et ne veulent pas que son ,

illustres. Ce premier volume recueil serve de règle pour ju- ,

qui contenait les philosophes, et, ger de l'Allemagne savante (g').


sous ce nom-là, les poètes, les *' Au lieu de ont vécu, Joly dit qu'ilfal-
humanistes, les historiens etc. lait écrire sont morts ce qui à la lettre
, ; , ,

fut suivi de trois autres celui ne serait pas plus exact, puisqu'il y en a un
:
dit XIII^. siècle un du XIV^. et quatorze , ,

qui contient les théologiens fut du XV^.


*^ Bayle a déjà compté quatre autres vo-
(a) Sons le mot Aiiam il dit chercliez
, :
lumes. Celui-ci est le cinquième dont il parle.
Melcliior Adam mois quand on va à Mel-
;
Joly a donc tort de lui reprocher d'avoir
cliior, on ne trouve rien là-dessus.
omis la mention d'un volume. Tous les cinq ,

(b) On a écrit ceci en Juin it)g8. réimprimés en i653 in-S"., l'ont été aussi en
,

(c)Melch. Adam , in Epist. dedicat. Ger- 1706 in-folio en cinq parties.


,

man. Theol. (/} Vide Konig. Bibliotli. veter. et nov. ,


(d) Joacliim lîcrgerus. Voyez CËpilrc dé- page'i., ubi citatur Heun. Wilte pra-fat.
dicatoire de ses Pliilosophes d'Allemagne. Menior. Tlieologoruni /ifl°'. \'^ et i8.
,

(e) Henn. Witle , Diuriiim Biogijjih. (§) MorhofiiTS, Pol)liistor.,p«5-. 192, 209.
, ,,
,

ADAMITES
Il mourut 1622. Il a fait l'an ADAMITES (a)
, secte ridicule

d'autres ouvrages (B). Consultez qui selon quelques auteurs , était


,

M. Paillet à , la page 1 77 et 1 78 une branche des carpocratiens et


du IF. tome des Jugemens des des valentiniens (b). Théodoret
Sa vans. lui donne un certain Prodicus
pour fondateur (A). Saint Épi-
(A) // a oublié quelques personnes
qui n'étaient pas moins considérables
phane témoigne que le nom d'a-
que celles dont il a parle.'] 11 l'avoue damites * leur venait d'un cer-
lui-même ^ mais il déclare qu'il n'y a tain Adam qui vivait au temps
point eu en cela quelque aflectation , et
qu'ils furent ainsi appelés (c). Il
que le défaut de mémoires en a e'te la
seule cause. 11 se proposait de suppléer y a plus d'apparence
qu'Adam
ces oublis dans d'autres volumes. Voi- îa tige de tout le genre humain
,
ci ses paroles Quœdam mihi tnonen-
:
était la source de ce nom-là
dus aut rogandus es , nd leclor. Prl-
niiim, ne prœterilos aut omisses non
comme nous l'apprend saint Au-
priucos queraris haud indignos qui ,
gustin (<'/);carces misérables imi-
hoc in thealro appareant. In eo niea ,
taient la nudité dans laquelle nos
nd lector culpu nulla est; sed pe-
,
premiers pères vécurent pendant
nuria f'ecil historiée : quant nancisci
l'état d'innocence , et condam-
nullam uspinm potui. 3Ialui itaque
prorsùs tacere de niultis prœstantibus naient le mariage , par la raison
viris, quàm, ut ille de Carlliagine, qu'Adam ne connut Eve qu'après
pauca dicere ; et trita i7/a, Natus est son péché , et ajîrès sa sortie du *
obiit , scribere. Suppleri tamen poterit
paradis. croyaient donc que,
Ils
hic defectus l'olente , />eo, et muluas
opéras tradentibus bonis patrtceque si l'homme eut persévéré dans son
amantibus hujus i'olundnis toinus innocence , il ne se fut fait aucun
, si
secundusfuerit adornatus. Quod idem mariage. Aussi faisaient-ils pro-
dictumi^olo, de reliquis /^i/Ji Juriscon-
fession de continence et de vie
sultornm et politicorum, medicorum
ac pliilosophorum (i). monastique (e). Quant à la nu-
(B) Il a fait d'autres oui'rages. ] dité, ils ne l'observaient que lors-
Savoir: ytpographum Monumentorum qu'ils étaient assemblés (B) pour
Heidelbergensium Nolœin (Jrationem .

les exercices de leur religion


Juin CœsarisScaligeri pro RI T. Cicé- .
{f].
rone contra Ciceronianuni Erasmi. Pa- Ils s'assemblaient dans un poêle,
rodiœel Metaphrases Horaliance (2)- Il afin de chasser le froid par le
n'est pas vrai, comme on l'assure dans le moyen du feu qu'ils allumaient
catalogue d'Oxford qu'il soit l'auteur
sous la chambre : ils quittaient
,

d'une Hisloria KcclesLastica l'icclesiœ


Hamburgensisel Breinensis, C'est l'ou- leurs habits en y entrant , et se
vrage d'un chanoine de Brème, nom- mettaient , aussi-bien les femmes
mé Adam, qui vivait dans le XI*. que les hommes , aussi-bien les
siècle. Conringius et Possevin qui
l'ont rais dans le X*. se sont trompes. (a) Saint Augustin les nomme Adamiani
Voyez Mollèrus à la page 65 de la l""". après saint Epiphane ,
qui les appelle 'AcTa-
partie de VIsagoge ad Historiam Cher-
sonesi Cinibricœ. {b) Vide Danscum in August. de Haeres.
Adam, prn;/a^
cap. XXXI
(i)Melcli. Tlieolog. Germa-
*Chaufepié conteste l'existence des irri-
norum.
(2) Ex Diario Biograph. Henningi Witte. tables Adamites avant lajîn du IV' siècle. ,

(c) Epipban in Synopsi tom. I lib, II ,


, ,

ADAM, menuisier de Nevers, pag. 397.


id) August. de H:cres. cap. XXXI. ,
et poète français. Cherchez Bil- (e) Voyez la remarque [C).
LALT, {/) Kpipli. ILeres., lib. LU.
,

220 ADAM ITES.


ministres que au mê- qu'en i535 on vit des adamites à
les laïques ,

me état que en sortant Ajiisterdam


l'on est riches et de fort ,

du ventre de la mère. On s'as- bonne famille , courir tout nus ,


seyait pêle-mêle sur des bancs qui et qu'il y en eut d'assez fanatiques
étaient les uns au-dessus des au- pour monter sur des arbres oii
tres et l'on faisait ses dévotions
,
ils attendirent vainement que lo
;

après quoi l'on reprenait ses ha- pain leur tombât du ciel, iusqu'à
bits et l'on retournait chez soi. ce qu'ils tombèrent eux-mêmes à
,

Si quelqu'un faisait quelque fau- demi morts sur la terre. Je ci-


te, on ne le recevait plus dans terai ailleurs (/') un écrivain (A)
l'assemblée (C) on disait qu'ayant qui atteste une partie de ces
:

mangé comme Adam du


, , fruit faits.

défendu , il devait être chassé (i) Dans la remarque (B) de l'article Pi-
comme lui du pai-adis ; c'est ainsi cards.
{h) Lambertus Ilortensius, in Hist. Tu-
que ces gens-lk nommaient leur
mult. ADabaptist.
église. Yoilà ce que saint Epipha-
ne en rapporte (D) non pas pour ,
(A) Théodorct lui donne un certain
Prodicus pour fondateur (i).] Baro-
l'avoir lu dans quelques livres ,
niiis le place sous l'anne'e 120, et lo
ou pour l'avoir appris de quel- fait antérieur à Valentin ce qui l'o- ;

qu'un d'entre eux mais sur ce blige de censurer en un autre endioit


;

qu'il eu avait ouï dire à plusieurs (2) ceux qui le mettent entre les disci-
ples de Valentin. Selon cela, Lam-
autres personnes. Il ne sait point
bert Daneau que j'ai cite' ne serait pas
si de son temps cette secte était digne de créance. Je parlerai à part

entièrement abolie ou si elle sub- de ce Pkodicos.


,

sistait encore. Évagrius fait men- (B) Ils ne V obsen^alenl que lorsqu'ils

tion de quelques moines de la Pa- étaient assemblés. Daneau s'est donc


abusélorsqu'il a mis au nombre de leurs
lestine qui par un excès de dé-
,
erreurs, qu'il faut que les chrétiens
votion et pour bien mortifier de l'un et de l'autre sexe aillent nus par
,

leur corps , s'en allaient , tant les rues. Oportere christianos homines
hommes que femmes , dans des i>ersari in Publico in cœtu Kcclesiœ , ,

in precibus, nudos, sii'e mares sint


solitudes , tout nus , excepté les
sii^efœminœ (3).
parties que la pudeur défend de (C) (Jn ne le receuait plus dans
nommer, et s'exposaient là d'une /'fliiem&Ze'e.] Saint Ëpipbane témoigne
manière fort étrange (E) aux ri- que ces gens-là professaient la conti-
gueurs du chaud et du froid (g). nence et la vie monastique et qu'ils ,

condamnaient le mariage. MoviÇovTêf


Nous parlerons des adamites mo- Tj x,a.'i 'iy)cpat.Tiuo/ut.îvoi ïvTêç >ieLi ycL/Liav y.»
dernes sous le mot Picards. Je éiX'^fji^voi (4). Monachoruni ac conli-
vois que les catholiques et les pro- ncntium nupliasque
instituta sectantur
condeninant. 11 ne faut donc point dou-
testans se reprochent les uns aux
ter que leur discipline ne condamnât
autres (F) d'avoir de ces adamites la fornication et l'adultère et qu'ain-
;

dans leurs pays peut-être n'ont-: si , n'excommuniassent et ne chas-


ils

ils pas plus de raison les uns que sassent de leurs assemblées ceux qui
les autres de se le reprocher. Si
commettaient cette faute. Et il esta
je n'avais pas d'autre caution que (i) Tbeodoret. Hieiel. Fabul. , Ub. I.
(2) Hatoaius ad an. 1^5, num. 33.
Lindanus {h), je ne croirais pas f3) D.inaius , in Augustin, de Hœres. , cap.
XXXr,fuUo83.
(» Evagr. Hist. Eccl., lih. I. rnp. YV/. (/|) lîpiphij. in Synopsi , tom. I, Lb.II,
[h] Liudan.Dul)iUiilii/>ifl/. If,png. 171. pas- 397-
, ,.

ADAMITES. 211
remarquer, qu'encore que cet ancien de cela; car ce sont des choses que la
père ne veuille pas convenir de ce que renommée ne laissepoint périr, lors-
disaient les adamites savoir , qu'ils ;
qu'une fois elle s'en trouve saisie, à
se dépouillaient à cause qu'ils n'avaient moins que la fausseté n'en devienne
point de honte de leur nudité non , tout-a-fait palpable. Encore n'arrive-
plus qu'Adam il est, dis-je, à remar-
:
t-d pas toujours, en ce cas-là, que la
craer qu'encore que saint Épiphane renommée lâche prise. Voyez dans la
àime mieux attribuer leur conduite à remarque suivante le moyen d'accor-
une lasciveté insatiable, qui voulait der ces deux pères avec Clément d'A-
procurer des amorces à la vue (5) il lexandrie. ,

ne dit pas néanmoins qu'il se fît des (D) f^oilh ce que saint Épiphane en
actions impures dans leurs assemblées. rapporte.^ Il ne dit point que chacun
C'est donc faussement que Baronius se ruât sur sa chacune dans leurs as- ,

lui impute de les avoir appelées des semblées: c'est ce qui acte touché dans
bordels lupanaria
, il s'est servi du
: la remarque précédente. 11 leur impute
terme de i^mKio; latibuluni, et de celui encore moins les hérésies de Prodicus
,

de cr-TrMxuyya,, caferna (6) et cela dans dont le père Gaultier donne la liste
;

la signification de tanière, d'antre, (10), et que Moréri leur impute pour


et de caverne simplement, comme il la plupart. Moréri n'est pas aussi blâ-
paraît de ce qu'il remarque que c'est mable en cela, qu'en ce <{u'il assure
le nom qu'il voudrait donner aux con- que saint Epiphane nomme leurs tem-
venticulesdes hérésies. Manifestement ples des lieux infâmes, à cause des cri-
il fait allusion à ce qui est dit dans mes abominables qu'il commettaient
l'Evangile qu'on avait fait de la dans ces cat'ernés d'horreur et de pro-
,

maison de Dieu une caverne de bri- stitution. Cet auteur ajoute qu'ils re- ,

gands {•j). La notion d'impureté cor- jetaient la prière. Daneau le dit aussi
})orelle ou de commerce charnel en- sur la foi de Clément d'Alexandrie
, :

tre les deux sexes, n'a point lieu ici. Deum a nobis precanduni et orandutn
Le père Gaultier a donc grand tort de esse negant, quia scit ipte per se qui-
dire en citant saint Épiphane, que bus egeamus. Clemens hoc de illis
,

les adamites ayant laissé leurs habits


, tradit lib. 7 Slrom, (i i). Cependant
à la porte de leurs assemblées se mê- saint Epiphane et saint Augustin di-
,

laient indifiéremment avec les fem- sent le contraire: T-jy.vù yà.i aJç Ik /jl»'
mes qui leur tombaient sous la main, Tfoç... crt/vsfj/OVTou, xa.( cutcdc; tÀç dvxyvd-
mulieribus promiscuè ulentes (S). Pour
la citation d'Alphonse de Castro qu'on Ils s'assemblent tout aussi nus qu'ils
,

voit après celle de saint Epiphane à étaient au sortir du ventre de leurs


la marge du père Gaultier, elle ne mères et en cet état ils font leurs lec- ,

peut que multiplier le nombre des tures leurs Or.usoss et leurs au- , ,

faux accusateurs. Lambert Daneau tres exercices de religion. C'est ainsi


qui accuse de la même impureté les que parle saint Epiphane , dans le
adamites, ne cite point saint Epipha- sommaire du II* livre du tome 1*'. ;
ne, mais Clément d'Alexandrie cité et voici les termes de saint Augustin :

par Théodoret: Exstinclis in siio cœtu JYudi itaque mares fominœque conve-
lucernis promiscuè coëunt quemad- niunt , midi lectiones audiunl nudi
, ,

modiiniex ClemeiiteStrom. notât Theo- Orant nudi célébrant sacramenta ( 2 , 1 ,'

Joretus (9). On verra bientôt que ce Le moyen d'accorder ces deux derniers
passage n'a pas été bien allégué. Il est pères avec Clément d'Alexandrie se-
assez étrange que saint Epiphane et rait de supposer que les adamites
saint Augustin n'aient rien ouï dire auxquels celui-ci donne Prodicus pour
fondateur, ne suivaient pas toutes les
(Sy'Evêxst à.x.if'içau (SJovîc xô/jaiç èxfSstX- erreurs de Prodicus. Cette supposition
fAMl iy-TTOioÙTHç TMV ^îh^iv. Id insatUUœ li- n'a rien d'extraordinaire il ne faut ;
bidini tnbuunt qute ejusinodi ocults illecebras
tjuelquefois que trente ou quarante
objUil. Epiphan. Hxresi LI[ pag. 4G0. ,

(6) Epiph. Hœres. lll , pag. 459.


(lo)Gaulter. Tabul. Clirouojr., seculo II
(7)]Matth. chap. XXI li. ,
,

cap. XXXIII.
(8) Ganlter. Tabul. Chronogr. , seculo II ,
cap. XXXIII. (il) Daiiœus, iu August. île Ha;res. , cap.
(9) DanKus , in Âugastin. de Haeres. , cap. XXXI, fuUo 83.
XXXI, foUo 83. (12J Augtist. de liserés. , cap. XXXI.
ADAMITES.
ans , pour rendre une secte fuit dis- témoigner plus de mépris jiour la gloi-
semblable à celui qui l'a fondée. Ainsi re, lis allaient manger dans les caba-
l'on n'est point exact lorsqu'on attri- rets ,ils entraient dans les bains pu-

bue aux adamites toutes les extrava- blics ils conversaient et ils se lavaient
,

gances deProdicus, sous prétexte qu'il avec l'autre sexe mais avec tant d'in- ;

a e'té leur fondateur. En efiet il est , sensibilité que ni la vue


,
ni le tou- ,

constant par le lémoij^nage de saint cher, ni même l'embrassement d'une


Épiphane, et par celui de saint Augiis- femme ne leur causaient aucune émo-
tin , qu'ils se dépouillaient totalement tion. Ils étaient hommes avec les hom-
dans leurs assemblées ; mais Clément mes, et femmes avec les femmes ils ;

d'Alexandrie , bien loin de dire rien voulaient être de tous les deux sexes :

de semblable des sectateurs de Prodi- MïTat à.vJ'pôov j'i à.vé'pa.ç ùvoLi , y.iTO. yu-
cus, observe qu'avant que d'en venir VctluSv Ti a,Ù yilVa.lKa,ç, iKltTipcLÇ Tê fA.i-
aux prises , ils faisaient ôter les chan- Tê^V^êlV i^iXilV <^ÙTiCtlÇKa.l fJ.» fAi5.Ç. jîvc(,((l5).

delles qui leur auraient donne de la hon- Cum i>iris quidem l'iri sunt,feniinœ
te To KOL'raiKT-X.^vvjv olÔtUov tjiv îropvi)£«v
: uero cumjeniinis, nontninmnius sed
Tst^THV ifino-ioa-ûvrii 'iKTroéoov 7ront7-at.jtAÎyouç utriusque iiniul sexUs este cuyiunt. Il y
^£ç ail Tov xi^^vot/ TTiptTfOTr^ jiy.iyvua-Ôcti a de l'apparence qu'ils n'avaient pas
(i3). Liimine aniolo quod eorum J'nr- beaucouj) de peine à contrefaire les
nicatoriant hanc justiliam pudnre ajji- fous et qu'ils l'étaient eiî'ectivement ;
,

ciebal aveisâ lucernâ coïre. Ainsi Da- c'est à eux pour le moins qu'on peut
neau n'a pas eu raison d'appliquer appliquer ce que Fvutilius Numatianus
aux adamites ce que ce père avait dit n'a pas eu raison de dire de toutes
des sectateurs de Pi'odicus. En uu mot, sortes de solitaires :

quand je considère les calomnies des Quœnain perverti rahïes lam stulta cerebri^
païens contre les premiers chrétiens Diim mala jormides , nec bona passe
pâli (i6)
et celles des catholiques contre les ?

protestans , par rapport aux assem-


blées nocturnes, je ne crois pas de
Au reste leur nudité était bien con-
traire aux principes de ces religieux
léger tout ce que le gros de l'arbre im-
dont je parlerai dans la lemarque sui-
pute.
vante, et ne pourrait pas même bien
(E) D'une manière fort étrange.'] Ils
s'accorder avec la doctrine du père
renchérirent sur les autres moines,
Sanchez.
dont le même Évagrius fait mention ,
Se reprochent les uns aux au-
(f )
qui, n'ayant pas un habit en propre,
M. Moréri assure qu'il y a des
tres. 2
vu que celui qui avait été porté un
adamites en Angleterre où ils font ,
jour par un religieux servait le lende-
leurs assemblées de nuit et n'appren-
main à un autre , avaient du moins
.

nent que ces mots « Jure , parjure, et ;

l'usage de quelque habit (i4)- Les so-


ne découure point le secret. » On a eu
litaires dont je parle se contentèrent
raison de lui dire dans l'édition d'Am-
de porter une ceinture^ et quant au
sterdam qu'il n'y a point de telles gens
reste ils renoncèrent, autant qu'ils
en Angleterre que la police j- est trop
purent, à l'humanité ils ne voulurent
: ;

bonne pour y souffrir une infamie de


point se nourrir des alimens qui ser-
cette nature qui nepourrait pas demeu-
vent aux autres hommes ils se mirent :
,

rer cachée, et qu'il n'y a gucie d'appa-


à paître comme font les animaux; et
rence non plus qu'il y en ait en Po-
ils ne paissaient qu'autant qu'ils en
,

logne; car il avait dit qu'il s'y trouve


avaient besoin pour ne mourir pas.
encore de ces déi^oyés. Il ne pourrait
Ils devinrent enfin semblables aux bê-
pas se défendre en disant qu'il ne
leur figure changea et leur sen-
,
tes : ,

prétend point que ces gens-là se mon-


timent aussi. Dès qu'ils voyaient d'au-
trent nus au public, mais seulement
tres personnes ils prenaient la fuite ;
,

qu'ils se déshabillent dans leurs con-


et s'ils se voyaient poursuivis, ils se
venticules nocturnes ce qu'une bon-
sauvaient à toutes jambes ou dans ,
,

police peut ignorer il ne pourrait


quelque trou inaccessible. Quelques- ne
:

et point ,dis-je, alléguer cela


pour sa jus-
uns rentraient dans le monde ,

tification, puisqu'il venait de parler


faisaient semblant d'être fous, afin de
(i3) Clfm. Alex. Stromat. , lib. III , p. 43o. (i5) Evagrius, Hist. Ecoles, lib. /, cap. XXI.
(j4; Evagrius, Hist. Ecoles. lib.I,
cap. XXI. {!&) Rulil. Uiner. , lib. /, vs. 445.
.

ADONIS. 223
des adamites de Bohème qui allaient stent ('î\). Voir nager une personne
toujours nus à ce qu'on prétend. Il
,
nue de diflérent sexe est selon lui un , ,

faut donc que M. Moreri, s'il a enten- péché mortel. Deux hommes d'un ca-
du ce qu'il disait, assure qu'il y a ractère grave, comme deuxprélats qui
encore aujourd'hui en Angleterre des s'entrevoient nus, commettent dit- ,

gens qui par principe de religion ,


,
il (22),^ un péché mortel. Le Bernia
vont toujours nus tant hommes que ,
parle d'un homme qui ne portait ja-
femmes. Or, c'est ce que la police ne mais la main qu'avec le gant à ses
souffrirait pas, et ne saurait ignorer. parties honteuses (23). Pourquoi un
Voilà donc un catholique qui soutient casuiste ne ])Ourri ait-il pas exiger qu'on
qu'il y a des adamites dans les pays s'abstînt de les toucher à nu, aussi-bien
protestans. .Te ne dis rien de ces contes quede les contemplera nu? Un ancien
vagues et ridicules louchant la Hollan- philosophe, par alFectation de chaste-
de qui se voient dans le Sorberiana , à té, n'y allait ni avec le gant, ni sans
la page i^. Mais voyons d'autre côte un gant il s'éloignait bien en cela du prin-
:

ministre qui dit qu'il y a des moines cipe d'Anacharsis (2.^). Cet ancien phi-
en Italie, nommes adamites, qui vont losopheétait le sévère Xénocrate Aris- :

nus en conséquence des vœux qu'ils Chalcedonium Xeno- loteles, irridens


font conforme'ment aux règles les plus crateni quod niejendo uirilibus non ,

sacrées de leur ordre yJc ne niinc qui- admoueret maniim, inquit, « Purœ qui-
:

dem, dit-il (17), nomen ejus (haeresis dem nianns, at inquinatamens (aS). » >/

Ad'djmanoram) exslaret nisi monachi Nous dirons dans la remarque (0)


,

quidam, qui se Julso pielatis et l'ilœ de l'article Hadrien VI, que la Mothp-le-
austeritatis prœte.xlu comniendârunl Vayer n'a j)oint dù prendre au pied de,

horuni hcerelicnrum impudentes pror- la lettre le passage de Bernia.


siis mores reiinuissent, et inter sanctis'
(21) Ibid. num. 25 et 26. ,

sima ordinis et regulœ suœprœcepta po- (22) Ibid. num. 27 el 28.


suissent; quales ii qui etiani nunc hodiè (23) Voyez la Molhe-le-Vayer, Hexam. rust.,
adamitœ dicuntur, uigentque pluri- V^S- 79^((ie Plularchum, de Garrulit. pag.
(24j 5o5 ;
iniim in IlaLid. f^ivunt enim nudi non et Clément. Alexandrin., SlromaX. lib y,pai!.
. . , , .

nccessilale quâdam adacli vel inopid 568.

i'estimentorum sedex l'oliprofessione. (25) Atben. , lib. XII, pag. 53o.


,

Je voudrais qu'il eftteu plus d'empres-


, mignon de la déesse ADONIS
sement pour prouver ce fait, que pour,
Vénus , était fils de Cinyras , roi
faire une opposition entre la conduite
de ces gens -là, et celle des anciens de Cypre (A). Les poètes ont pré-
moines , qui ne s'étaient jamais vus tendu que Myrrlia {a) , fille de
nus (i8j , et qui disaient qu'un hom- ce roi {b) , devint si éperdunient
me de leur profession ne pouvait amoureuse de son père qu'elle
,
contempler lui-même sa nudité, sans
faire une chose indigne de lui Un se fit introduire dans son lit ,
(19).
casuiste moderne ,
qui n'est pas des sans qu'il sût qui elle était. Quel-
plus rigides (20) compte néanmoins ques-uns disent qu'elle se servit
,

pour un péché véniel propria l'erenJa


de l'artifice des filles de Lot (c).
,

aspicere ex quddain cwiositate abs- ,

que alid niald intentione et periculo Adonis fut le fruit de cet inceste ; ;

et pour un péché mortel, aspicere i^e- il était parfaitement beau , et il


renda allerius sexds operta l'estibus parut si aimable aux yeux de
ità sublilibus , ut paiùm aspectui ob-
Vénus qu'elle l'enleva (B) et
, ,

(17) Lanib. Danseus , in August. de Hœres., qu'elle quitta toutpour être avec
cap. XXXI.
(18) Àpiid Socraf. Hist. Eccles.
lui. Le ciel même lui sembla un
, lib. IK, cap.
XXIII ; et Sozomen. , lib. I, cap. XII f. séjour peu agréable en compa- ,

(19) f^vrez dans /'Historia liidicra de Baltha-


sar fioniface , pag. 181 , cominnnl saint Jérôme
raison des montagnes et des bois
soutenait se quoque ipsam virginera eriibesee- où elle suivait Adonis qui était ,
re deberc, nec se sibi nudam o^Iendere ; et des
exemples sur cela loue's par Théodore!. {a) Voyez l'article Mybrha.
(20) Sancbez, de MaUiinOQ., lib. IX, DisptU. (fc)Ov'id. Melam. , lih X, vs. i'i'J.
XLfl, nuin. 27 el 28. [c) Hy-ia, , cap. CLXIV
2?.4 ADONIS.
un grand chasseur (C). Jugez si que mâle jouissait de Vénus ,
,

les poètes n'ont pas distillé tou- et en tant que femelle, se dou-
tes les figures de leur art (^) pour naità Apollon (i). D'autres, sans
représenter la douleur inexpri— lui donner les deux sexes , n'ont
mable qui saisit le cœur de cette pas laissé de dire qu'il était le fa-
déesse lorsqu'un sanglier lui eut vori de Vénus et de Bacchus
tué son cher Adonis (D). Jamais (F). Il y a un scoliaste qui as-
deuil n'a été plus célébré ni plus sure qu'Adonis fut aimé de Ju-
immortalisé que celui-là près- ;
piter (k) , et que Proserpine en
<jue tous les peuples du monde en devint amoureuse dans les enfers
perpétuèrent le souvenir par un (G). Elle ne laissa pas d'avoir
grand de cérémonies an- quelque compassion pour sa ri-
attirail
niversaires (E). Quelques auteurs vale désolée qui demandait avec ,

disent que ce ne fut pas un san- instance la résurrection de son


glier, mais un Dieu, sous la for- amant (l) elle voulut bien con- ;

me de cette bête, qui tua Adonis, sentir à s'en passer pendant six
Ce fut Mars selon quelques- mois en faveur de Vénus. Il fut
,

uns (e) ce fut Apollon , selon donc dit qu'Adonis passerait six
;

quelques autres (f). Mars , di— mois avec Vénus et six mois avec
sent ceux-là , fit le coup afin de Proserpine. Le scoliaste que j'ai
satisfaire sa jalousie, et pour se cité nous dit là-dessus le blanc et
venger de Vénus qui lui préfé- le noir (H), et quelques-uns ne
rait ce rival. Apollon, disent parlent pas si avantageusement de
ceux-ci se porta à cet excès de la complaisance de Proserpine
,

violence , afin de venger son fils (m). Onallégorisecepartaged'an-


Erjmanthus , qui avait été aveu- née, comme s'il fallait entendre
glé pour avoir vu Vénus pendant par-là, ou le temps que les semen-
qu'elle se lavait, fraîche sortie ces sont successivement sous la
d'entre les bras de son Adonis terre et sur la terre («) , ou le
(g). L'endroit de la plaie semble temps employé par le soleil à par-
indiquer quelque principe de ja— courir tour à tour les signesméri-
lousie (h) mais la seconde tra- dionaux du zodiaque et les signes
;

dition ne s'accorde pas avec ceux septentrionaux (o). Ces explica—


qui ont débité qu'Adonis était tions me paraissent moins soli-
im hermaphrodite qui en tant des que la pensée de ceux qui ré-
,

^ï^"^^"* '«. ^^^^^ d'Adouis à l'his-


(d) Ovidius Metam. lib. X. Bion Ei-
, , ,

cT^Ax. tt. Voytz aussi Théocnte, EicTi^xA. toire d'Osiris [p). Les anciens ne
xi et entre les modernes M. Ménage dans convenaient Uas du paVS OÎl était
; ,

ici Poésies grecques /7fl^. 167. -^ J^ J


,

(e) Servius Eclog. X; Firm. Matern. ,


iii fi) Plolem. Hephast. apud V\ioX\^xm, pag.
pag. 22 ; IN^onnus Dionysius, lib. XLI ; Cy- ^85.
rillus in Esaiam. (A) Sclioliast. Theocriti in Syracus. , iiVe
(/) Plolem. Hepbœst. a;)z/</ Pliolium, Eidyll, Xl^.
pag. liJZ. ^ (/J ^(«^eSeldenum, deDiisSyiis, W. //•,
^ , , ,

(g) AioTt îV'oi Xo^/o^svnv 'A(^to<r/TJ)V, Àtto cap. XI pag. 269


, et la remarque (I).
,

tSç 'AJûjvkTcç //l'^tœç. Quod post congres- {'"} ^'oyez la remarque ,G .

sum ciim Adontdelavantem Venerem yidis- (") Scboliast. Theocriti Eidyll. Xy. ,

set. Ibidem. {») Macrobius. Saturnal., lib. T. cap. XXT.

(/() Triuc aper insequitur, tolosque sub ip^ l'ojez le IJI". volume de lu Bi)pliollié-
inguine dentés, queUDivtrselle, pag.'] Berkr!jus. inStepba-
Abdidil Ovid. Melam., hh.X, vs. 7i5- num B^iaot. Vojez' hy.(t.h<iZç.
, ,
,

ADONIS. 225
lascène d'Adonis ; les uns la met- Il y
avait auprès de Byblos une
taient dans la Syrie; les autres rivière nommée Adonis qui des-
,

dans l'île de Cypre ou en Egypte,


cendait du mont Liban. Elle
comme on le verra dans les re— devenait rouge une fois l'an
, à
m.arques. On a dit d'Hercule deux cause que les vents y transpor-
choses bien opposées par rapport taient beaucoup de poussière qui
à notre Adonis : l'une , qu'il en ressemblait à du vermillon. On
fut amoureux , et que la jalousie ne manquait pas alors de dire
porta Vénus à indiquer au cen- que c'était le temps de pleurer
taure Nessus comment il pour- Adonis ; que c'était le temps oii
rait dresser des embûches à Her- il recevait des blessures sur le
cule {q); l'autre, que ce héros, Liban , et oii son sang coulait
voyant sortir beaucoup de monde dans cette rivière {t).

d'un temple dans une ville de


(t) Lucian. de Deâ Syriâ.
Macédoine , y voulut entrer
pour y faire ses dévotions mais ;
(A) Fils de Cinyras, roi de Crpre.]
qu'ayant appris qu'Adonis était Presque tous les auteurs conviennent
que Cinyras régnaiten cette île (i) en- ,
la divinité qu'on y adorait , il
core que quelques-uns aient dit qu'il
s'en moqua (r). Quelqu'un dé- avait règne' premièrement dans l'As-
bite qu'Adonis était né de Jupi- syrie (2). Voyez l'article Byblos. Ovide
ter , sans le concours d'aucune le fait naîtredans l'île de Cypre mais 5

il veut que Myrrha, fuyant son père,


femme {s). Saint Jérôme a cru qui la voulait tuer , après qu'il eut
que le prophète Ezéchiel a parlé connu son inceste ait traverse' l'Ara-
,

de la fête d'Adonis, (I). Au reste, bie et soit accouchée d'Adonis au


,

il est difficile de comprendre pays des Sabe'ens (3). Il n'eût pas mal
fait de remarquer en quatre mots
pourquoi les anciens ont feint que Cinyras était passé de l'île de Cy-
que Vénus cacha ou même qu'elle pre dans l'Arabie, ou que Myrrha s'é-
enterra ce sien mignon sous des tait embarquée dans celte île. Lorsque

laitues (K), puisqu'ils observaient Adonis naquit, sa mère avait déjà été
métamorphoséeen l'arbre d'où coule la
que cette plante rend inhabile à myrrhe. Nous apprenons de Ptolomée
l'acte vénérien. On compren- fils d'Héphestion, que Vénus, cher-

drait peut-être leur allégorie s'ils chant Adonis dont elle avait su la
,

avaient entendu par-là que Vé- mort, le trouva à Argos, ville de Cypre,
dans le temple d'Apollon Ery thien. 11
nus avait m.is sur les dents son
y avait donc des gens qui disaient qu'il
favori , et qu'elle l'avait fait tel- avait été tué dans cette île. Properce
lement passer par l'alambic, qu'il est de ce nombre, lorsqu'il dit dans la

n'était plus comparable qu'à la XIIP. élégie du II«. livre :

terra damnata , et qu'au caput TesUs, qui niveum quondain percussii Ad»-
nim
mortuum des chimistes; mais ils Kenanteni Idalio vertice , durus ttper,

ne parlent pas d'une telle expli-


cation; ils n'ont pas dit tous
Il y avait à Araathonte , dans l'île de
Cypre un temple d'Adonis et de
,

qu'il soit mort de sa blessure (L). Vénus (4). Strabon dit que Byblos
était le séjour du roi Cinyras, et qu'on
{q) Plolem. Hepiixst. apud Photium
pag. 473. (i) Voyez Meursiust^e Insulâ Cypro, lib. II,
(r) Scholiasl. Theocrifi, advs. 21 Eidyll.
, cap. IX.
y . Zenobius et Aposlolius in Proverb. (2) Âpollodor. , lib. III ,
pag. 338.
[s) Val. Prob. in Ecl. X. Virgil. ex Pbilc- (3) Ovid. Metam., lib. X, vs. 480 et 5iî.
stepliano. (4) Paosan. in Breoticit.

TOME I. i5
2a6 AUOÎ^ IS.
y voyait des temples d'Adonis à Vénus de ce qu'elle avait (5). du mal ,

Notez qu'Antouius Liberalis conte que inspiré à plusieurs d'entre elles de Fa-
Myrrha, qu^il appelle Srayrna était mour pour les mortels Afin d en tirer ,

ne'e au mont Liban et que son père vengeance , elles chantèrent devant ,

s'appelait Theias (6). Apparemment Adonis quelques airs qui lui donnè-
Panyasislui avait donné le même nom, rent une passion violente pour la
et non pas celui de Tlioas, qu'on lit chasse. C'est peut être par-là qu'il de-
aujourd'hui dans Apollodore (7). On vint odieux à Diane car gens de j

le lit aussi dans Probus sur la X*. églo- même métier ne s'aiment pas trop.
gue de Virgile avec cette circon- Quelques-uns ont dit que la colère de
,

stance, que ce Thoas étai t roi de Syrie Diane fut cause qu'un sanglier tua ce
et d'Arabie c'est d'Antimaclius que jeune homme(i2).
:

Probus emprunte cela. (D) Lorsqu'un sanglier lui eut tué


(B) frémis. l'enlet'a.'] Ce fait
. son cher Ad nis.] Théocrite feint que
. .

n'a été guère remarqué par les an- Vénus s'étant fait amener ce sanglier,
ciens écrivains je m'en étonne car le querella rudement j mais qu'il lui
:
,

il était connu d'un chacun. Les pein- fît ses excuses sur la passion violente

tres en faisaient la matière de leurs qui l'avait saisi à la vue d'une si belle
tableaux, tout comme du ravissement cuisse. 11 la voulut baiser, et le fît
de Ganymède c'est ce que Plaute: d'une manière trop emportée. H en
nous apprend : eut tant de regret, qu'il trouva que
Ms. Die mihi: numrfuà vtdhti tabulait! pictam
ses défenses méritaient d'être coupées,
in parietSy lui-même (i3;. C'est
et qu'il les brûla
Ubi atjuila catamiluni raperel , aul ubi ainsi qu'un écrivain docteet poli (i4)
Venus Adoiieum ?
a expliqué le dernier vers de cette
Pï. Scep'e (8). idylle de Théocrite. Les éditions por-
tent Ïkxii Tcèç ipcDTtiç, cxcussit atiiores;
(C) Le ciel lui sembla un séjour peu
mais croit qu'il faudrait lire hJ^ôvrcti
il
agréable en comparaison.,., des bois
dentés, au lieu d'êpoiTitç- Ce terrible bai-
où. elle suii^ait Adonis qui était un ,
ser me fait souvenir d'une pensée du
grand chasseur.'] Lisez ce passage d'O- cavalier Marin il introduit le dieu
:

vide :
Pan , qui se vante que les taches qu'on
j4bslinet et cœloi cœlo pitsferlur Adonis. voit sur la lune sont les impressions
Hune tenet: huic cornes est : assuetatjue sem~ des baisers qu'il lui a donnés. II fallait
perin uinbrd
Indulgere sibi formainque augere cûlendo, qu'il y allât d'une grande force. Quelles
,

Perjuga per sj/lvas, duinosaque saxa va-


, caresses! pour peu qu'on y ajoutât,
gatur (9). elles ressembleraient à celles des singes.
Onditqu'ilsétoulTentquelquefois leurs
Virgile représente Adonis sous une
petits à force de les caresser. Qu'au-
autre idée que sous celle de chasseur :

rait dit Horace sur tout ceci, puisque


iV«: pecoris divine poêla ,
te ptxniteat y
pour une bien plus petite chose il a
El formosus oves ad Jluinina pat^it Ado~
nis (10)-
parlé de cette manière?
puer furens
Sii'e
Peu de gens, ce me semble, ont parlé Impressil memorem
dente labris nolaiit'
de ce mignon de Vénus comme d'un iVo/i , si meaudiat
salii ^

Speres peipetuutn diitcia barbare


berger. Servius débite sur ce passage
Ijteitentern uscula^ quce Venus
certaines choses qui ne sont pas moins Çuintd parle sui nectaris imbuit (i5^.
éloignées de la traditive commune que
celle-là. (Quelques-uns ontdit que cette
Nous parlerons peut-être de ces sortes
inclination pour la chasse était l'ou- de morsures dans l'article Flora.
vrage des Muses (11). Elles voulaient Notez qu'un très bon critique m'a
fait savoir que la correction ô<fôyTotf
(5)Slrab. , W. XVI
pas- 5îo. ,
pour ificuTeti n'est point nécessaire. La
(b) Antonin. Liberalis ea^,. XXXIV. ,

() Vide Munckeii Notas in Hysin. , eav.


'^
(12) Apollod. , Lb. III, pag. 238.
^
LVIII. (i3) Theoc. EiSùhX. XXXI, ou se XXX
(8; Plaut. in Menxcbmis , acl. I , scen. II , Ion d^nutres édit.vns.
Vf. 34. (4^ M. <\e Longepierre. Voyez sa traduction
(9) Ovid. Melam., lib. X, l'v. 53a. de liion , pag. 47, édit. de Paris, en 168Û ,
(to) Virgil. Eclo^. X, i-f. I-. in- 11.
(il; TjeUiii .cur L_v0O|)bign. (iSJHorat. Od. XIII, lib. I, w. n.
,

ADONIS. 127
xréritable explication lïe ce i^e/'i, dit-il, tus essetjuturus in luctu
(20) ? Saint
est que le sanglier Tm Truft yrpuTikBait , Augustin approuve cette raillerie :
en se jetant dans le Jeu, Ïkxh tocç 'îpai- Sacra sunt f^eneris, dit-il (21;, ubi
1*5 , brilla en même temps ses amours. amatus ejiis Adonis aprino dente ex-
Il Y a non-seulement de la rai son y stinclus jui'enis Jnrmosissimus plangi-
mais de la finesse , à dire que ce san- liir. Les peuples de
Syrie étaient en-
glier, briilé auparat'ant parsonamour, core plus fous à cet égard-là que les
aidait trouvé a son tour le secret de le Grecs , puisqu'ils ne se contentaient
briller. Politien a bienfait valoir cette pas de gémir et de pleurer ils se
,

pensée dans l'cpigramnte qu'il fit sur donnaient aussi la discipline; et


après
Pic de la Mirande , qui jeta au feu s'être fouettés, et avoir assez pleuré
,
ses i^ers d'amour. Ajoutez a tout ceci ils faisaient le sacrifice des morts pour
qu'il est bien difficile de s'imaginer Adonis, et se rasaient la tête. Les
comment l' amoureux sanglier aurait pu femmes qui ne -voulaient pas être
mettre ses dents au Jeu et les briller , rasées devaient se prostituer tout un
sans se brûler lui-même. jour aux étrangers ; et l'argent qu'elles
(E) Grand attirail de cérémonies gagnaient était employé à un sacri-
anniversaires. ] Aristophane dans sa fice qu'on oflVait à Vénus. Le deuil
comédie de la Pais compte la fête d'A- finissait par la joie car on feignait
;

donis pour Tune des principales fêtes qu'Adonis avait recouvré la vie. Lu-
des Athéniens. Presque tous les peu- cien , qui nous apprend ces circon-
ples de la Grèce la célébraient les : stances , dit aussi que les Syriens pré-
femmes y jouaient le principal per- tendaient qu'Adonis avait été tué par
sonnage en pleurant la mort de ce
, un sanglier dans leur pays (22). Voyez
falant, ou de ce mari (16) de Vénus : la remarque (/), où nous dirons entre ,

''émince miser abili planctuinprirnœi'O autres choses , que cette fête se célé-
flore succisani spem gentis solitisfle- brait encore à Alexandrie, au temps de
tibus conclamabant, ut lacrymare cul- saint Cyrille. La procession était pom-
trices T^eneris sœpè speclantur in so- peuse puisque la reine même y portait
,

lemnibus Adonidis sacris ( 7}. Elles y 1 le simulacre d'Adonis. Arsinoé, femme


faisaient des funérailles en peinture , de Ptolémée Philadeiphe , reçoit sur
comme nous l'apprend Plutarcjue , cela de l'encens de Théocrite (23). Les
dans la Vie d'Alcibiade, et dans celle femmes qui accompagnaient la reine
de Nicias. Les courtisanes n'étaient portaient des fleurs et des fruits, etcent
pas des moins empressées à célébrer autres choses. On prétend que tout
cette grande solennité, comme on le cela, et le simulacre même d Adonis,
peut recueillir d'un passage du poète devaient être jetés dans la mer ou ,

Diphilus, rapporté par Athénée fiS). dans des fontaines. Voyez Hesychius,
On n'oubliait pas de dresser deux lits, Zenobius , Suidas , le Scoliaste de
dans l'un desquels on couchait la fi- Théocrite , cités par Fasoldus , aux
gure de Vénus, et dans l'autre celle pages ^5 et 76 de sou lérologie des
d'Adonis. C'est ce qu'on apprend de anciens Grecs. Les jardins d'Adonis
ïhéocrite (19). Les esprits forts se ont passé en proverbe, pour signifier
moquaient d'un culte de religion qui une chose de passade, et qui n'est pas
consistait à pleurer : Çuid absurdius faite pour durer. C'est manifestement
qu'am. homines jam morte deletos
. . .
en ce sens-là que Platon, que Plular-
reponere in Deos, qu&rum omnis cul- que, et que l'empereur Julien, se sont
servis de ce proverbe, dont l'origine
(16) Fenus, dam l Idylle XXX'. de TLéo-
crite , le nomme son mari. venait de ces pots et de ces corbeilles
de fleurs qu'on portait en procession
'SU //.OU TOV a.vé'p' «Tw^stç-
Tun' meuin virum percussisti?
pendant la fête d'Adonis. Voyez Eras-
me à l;i page 23 de ses Adages. Au res-
Bion dans Vldjlle sur la mort d''.4donis repré-
te, il y a de l'apparence que la célé-
,

senle Kénus, /iurjOlTa. TTOtriV , appelant son mari!


et CîcérOD, de Naturà Deorum, lib. III, cap. 23, (20) Cic. de Natnrâ Deor., lib. I. cap. XV.
parle d'une Vénus de Syrie, mariée à Adonis. (21) Augi.st. de Civil. Dei, lib VI, cap. VII.
Voyez Vldjlle XV
de f béocnle el Fi.m. Ma- ;
Voyei aussi Firm. Mater, de Errore profan. Re-
terDus de Error. prof. Relis- , pag. il.
,

(!•;) Amm. Marcel. lib. XIX, cap. I , (22; Luciaous, de Deâ SvrlS.
(i8) Alben. , lib. , pag. 392. VU (23) Theocrit. Eidyll. XV. Voyet U sommaire
^»9> Tlieocnt. Eidyl). XF. dt celle lùflte
,

ADONIS,
brafion tle cette fête n'a pas moins religion et de la mythologie païennes.
duré à Antioclie qu'à AlexanJrie. Ju- Un des interlocuteurs de Piufarque
lien TApostat fit son entrée clans la soutient fort sérieusement et fort gra-
première de ces deux vilKs, l'an 36i ,
vement qu'Adonis ,
et Bacchus sont la
lorsqu'on y célébrait la fête d'Adonis, même divinité, et que les Juifs s'abs-

ce qui fut pris pour mauvais augure. tenaient du porc


à cause qu'Adonis ,

Ei'eneial autt^m ii}Jtin diebtis, anniio avilit ététué par un sanglier. Or il


cursu completo , Adonia ritu feteri prétend que leur religion, leurs fêtes,
ceLbrari, arnnla f^eneris , ut Jabulœ leurs cérémonies , étaient à peu près
Jîngunt, apri dente ferati deleto, quod ce qu'on faisait dans la Grèce pour
in adullo flore secUirum est indicium Bacchus j et il dit même que leurs lé-
friigum Et l'isum est triste, quod am- vites étaient ainsi appelés, à cause de
plam urbem principumque domicilitnn ACtioc ou d'E^'ioç, Lysius, Ei'ius, deux
introèunte imperatore mine primiiin noms de cette divinité. Ausone dé-
ulidabiles undique planctus et lugu- clare que Bacchus, Osiris, Adonis, etc.
bres sonus audiebantur (a4) Une pa- •
étaient un seul et même Dieu ^29).
reille chose parut de mauvais augure Macrobe sa encore plus loin (3o).
aux Athéniens en deux occasions (aS) (G) Proserpine en deuint amoureuse
(Y) Fuunride f^cnuseldeBacchits'.] dans les enfers.'^ S'il en^ faut croire
Dans l'endroit où Athénée rapporte Apollodore ( 3i ) , elle n'attendit pas
qu.lques exemples d'expressions énig- tant à l'aimer , et n'attendit pas même
matiques (26;, il n'oublie point l'o- du berceau. Vénus, char-
qu'il fût sorti
rade qui fat rendu à Cinyras j le voici :
méedela beauté de cet enfant, le mit
dans un coflVe , et ne le montra qu'à
'il YitvûfiA, /istTtKiu KuTT^iav sivJ'pSv
Proserpine. Celle-ci protesta qu'elle le
voulait garder. 11 fallut que Jupiter
prononçât sur le diftérent ; et voici de
tU Ti quelle manière il le partagea qu'A- :

nivTœv ùivBfùi>Tù6v S'ûo /' a,ùrov cTst/-


,
donis serait libre pendant les quatre
premiers mois de l'année , et qu'il
'H/nh exxuvcj/J-h» XctBploiç iptr/tAoîç , é
passerait auprès de Proserpine les qua-
/' Ixstuvœv.
tre suivans , et auprès de Vénus les
O Cinjra , rex Cjpriorum quihus kirlus po-
quatre autres. Il aurait mieux vahi
dex fst ,

Infans genilut est fonnosissimiis et pul-


tibi mettre la portion d'Adonis au milieu
chritudinis de l'an et peut-être l'avail-on ainsi
j
Inler universos homines summoperè admi-
dit avant que les abrévialeurs ou les
randce.
Illuin duo numina in potestate habebunt , copistes d'Apollodore eussent mis sa
OccuUis et ai/iis calUbus allentinille subiget, Bibliothèque dans 1 état où nous l'a-
iltuin fera alter.
vons, (^uoi qu'il en soit Adonis no ,

Athénée ajoute que cela signifiait Vé- voulut point des vacances que Jupiter
lui avait données iJ y renonça en fa-
nus et Bacchus; car tous deux l'aimè- :

rent. Platon le comique avait rapporté


veur de Vénus; car il lui fit présent
cet oracle (î^j.Il n'estpasle seul poète
de ses quatre mois. D'autres (32) di-
sent, 1°. que la muse Calliope, chargée
qui ait parlé de ces amouis de Bac-
chus. On trouve deux vers dans Plu- de la décision de cette dispute par Ju-
tarque qui assurent que Bacchus piter ordonna qu'Adonis serait si.t
,
, ,

ayant vu le bel Adonis dans l'île de mois à Vénus et six mois à Proser-
,

Cypre, en devint amoureux , et l'en- pine. 2°. Que Vénus indignée qu'on ,

leva (28). Ce que Plutarque ajoute ne lui donnât qu'à moitié ce qu'elle
voulait avoir tout entier elle seule
est curieux, et pourrait en un besoin
inspira à toutes les femmes de Thracn
faire leçon à ceux qui nous donnent
tant de généalogies orientales de la
un tel amour pour Orphée, fils de Cal-
liope , que chacune le voulant ôter
(24) Amm. Marcell. , lib. XXII, cap. IX. aux autres, elles le mirent en cent
(a5; Plutarcl.. in Alcib. ,
pag. 100 ; in Niciâ ,

pag. 532. (29) Âuson. Epigramm. XXX.


(a6; Atlien. , iib. X , cap. XXII , pag. 456. ho) Macrob. SaturaaI. , lib. /, cap. XVII l
(2') In AdODJdc , apud Alhen. , lib. X , cap. et XXI.
XXlI pag. 456. (30 ApoUod. Eibl. , lib. III , t^ag. 240.
,

(îS) Plut, ^ympâs. , lib- IV ,


cap. V. (32) Hygin. Asironom. , lib. II, cap. VU
,
,

ADONIS. ooy
pièces. L'une des plaintes que Venus mois que les jours sont si courts et les
fait de son fils dans les Dialogues de iniin si Ioniques.Dans les pa^'s dont je
Lucien, est qu'il Tenvoie courir tantôt parle, la drUercnce du plus lon^ jour
sur le muit Ida pour Anchise, tantôt de l'année, et du plus court, netlonnc
sur le inont Liban pour le bel Assy- point lieu à celte expression. Il y au-
rien, dont il lui enlevait la moitié , rait bieu d'autres choses à corri 'er
*'
par le soin qu'il avait pris de le faire dans l'Adonis de cet auteur.
aimer de Proserpine. (33 Arnobe(34) (I) Que le prophète Ézéchiel a
et Cleini;n{ Alexandrin (35) ont parle' parlé de la Jttc d'^4donis.'\ Saint Jé-
des amours de celte dernière déesse rôme a cru que le Thamraus de cts
pour Adonis : et c'est sans raison que paroles d'Ézcchiel HtneJ.t entrer par
:

Sylburgius voudrait mettre dans le l'huis de la porte de la maison de l'É-


père grec 'AitTajvêr, au lieu de 'Ajcé'iié't ;
ternel qui est ^^ers Aquilon ; et i^oici
car, si on lisait AiSccvii, on ferait dire il y avoit là des femmes q li estoient
à Clément Alexandrin une fausseté : assises pleurantes Tliamnius (3e)) , est
savoir que l'amour de Proserpine
, Adonis. Il n'a pas oublié de remar-
pour Pluton était un adultère. Mé- quer les deux fates de cette fête d'a- :

ziriac est l'auteur de cette dernière bord on pleurait Adonis comme mort;
remarque. Voyez la page ^o3 de son et puis on le chantait et on le louait ,

Comaieutaire sur les épîtres d'Ovide. comme revenu au monde Plangiiur :

Le jugement de Calliope me fait sou- à mulieribus quasi mortuus, et pos'.eh


venir de ces deux vers : rct'iuiscens canitur atqne laudatur (40).
Et viiuld lu dignus et hic, et quitquis amores, Saint Cj'rille nous apprend diverses
Aulmeluel dulces, aut expenelur amaros{Z6), particularités de cette fête. 11 dit
qu'on la célébrait encore dans Alexan-
(H) JVous dit la-dessus le blanc et
drie (41)5 et quand il explique ces pa-
le noir. ] D'un coté et avec peu de
,
roles, malheur sur le pays... qui en-
vraisemblance, qu'Adonis séjournait t'oie par mer des ambassadeurs, et ce
six mois chez Proserpine, et six mois
en des uaisseaux de jonc sur les eaitr
chez Vénus sans les toucher
, lit à
(4a) il veut qu'on ies enrende d« s
,
,
part:' Aviu T^d ^iiyKO.^tûS'iiv x*( 7rpcç-ip- lettres
que l'on envoyait pour faire
vii^iTÔctt (3y) ; et de l'autre qu'il pas- savoir qu'Adonis
, était retrouvé. Jls
sait six mois entre les bras de Proser-
prenaient, dit-il (43,i, un t^ase de terre;
pine, et autant entre les bras de Vé- et ensuite
, écrivant une lettre aux
nus: Ef ;C/«v«,C£7ro.«3-£v ivrctiç s^.^xsi^.aic femmes de Biblos, comme si Adonis
Tifç A(^|:oJ'iTilç, aiTTTtf, Ka.i \;< Taiç à.-\-
eût été K'éritablement retrouvé , et la
«ixaiç T»; nep!r«(ÇÔviiç (38). Remarquez mettant dans ce uase, ils le scellaient
qu'on disait quel({ue chose de si-m- et le mettaient sur la mer, après avoir
blable touchant les conventions de employé quelques cérémonies Ce vase, .

Cérès et de Pluton savoir, qu'il fut;


à ce qu'ils assuraient, se rendait de lui-
accordé que Proserpine demeurerait même à Biblos dans certains jours do
avec lui six mois, et qu'elle irait l'année et quelques feintes chéries
,

achever l'année chez Cérès. Les an- de f^énus l'y recevant , cessaient de
ciens n'étaient point assez féconds , pleurer, après avoir ouvert la lettre
ils appliquaient à trop de sujets le comme si f^énuseiit letraurc srm Ado-
denoOlment de leurs fables. D'ailleurs, nis. Lucien dit qu'il a vu à Byblos la
l'Egypte la Phénicie l'île de Cypie
, , , tète de carton que les Egyptiens y
qui ont été la scène d'Adonis, ne sont envo3'aient tous les ans, sans autre cé-
pas assez éloignées du soleil depuis ,
rémonie que de la jeter dans la mer.
le mois de septembre jusqu'au mois
Les vents portaient tout droit à By-
la
de mars, pour qu'on puisse dire qu'A- blos dans sep t jours, qui était le temps
donis est alors dans le sépulcre ou ,

dans les enfers et je ne sais pas à


: (3g) Eiécbiel , cliap. VIII , vs. i4- Je me
sers de la version de Genève.
quoi songeait M. Moréri, avec ces six
(4o) Hieron. , lib. III. Comment, in Erediiel.
(33) Lucian. Dialog. Veneriset Lanz.
(4i) CyriU. in Esaîam , lih. II.

C34) Arnob. , lib. ir


,pag. 1^5. (42) Esaie, chap. XVIII , vs. 1 et 2.
(35) Clem. Alex, in Prolrep. , vag. 2i. (43) CyriU. in Esaîam , /iV. //. Je me sers de
(361 Virgil. Ecl. ///, ^s. 109. la Traduction de M. de Lonf-epierre qui rap-
(f;) Scholla^t. Theocriti, ad vs. 31, Etdrll. V. porte cp passage dans ses Notes sur Bion , pag.
(38) Ihid. 45.
, , ,

200 ADONIS.
ordinaire qu'on employait pour pas- plus raisonnable dépenser que Nicanr
ser d'Egypte à celte -ville. Procope de der a parlé de cette laitue comme
Gaze raconte ceci tout de même que d'un aliment d'Adonis, que de croire
saint Cyrille (44)- Selon ce dernier qu'il en ait parlé comme d'un asile
les Grecs croyaient que Vénus était qu'Adonis chercha contre le sanglier.
descendue dans les enfers, pour le re- J'avertirai mon lecteur, que M. de
couvrement d'Adonis et comme ils la Monnaie n'est pas de ce sentiment.
:

disaient qu'à son retour on avait su Voici une remarque qu'il a bien ,

qu'elle l'avait retrouvé ( 4^ ) il f 'al- voulu me communiquer: « Le uolto.-


,

lait que les commencemens tristes et » (fuyeiv des manuscrits est préférable
lugubres delafête se terminassent par » de beaucoup au noiTiK^u.'yctiv des im-
_.':...; J.._
primes. at: i'
-1 1 _ .1 1 ;«. : .'_
de grandes réjouissances Nicandre dans l'endroit .
j) ,

{K) Sous des laitues.^ C'est Calli- » que cite Athénée, parle d'une sorte
machus qui a dit que Vénus cacha » de laitue sous laquelle dit - il , ,

Adonis sous des laitues (46). Selon » Adonis s'était réfugié lorsque le ,

Cratinus, elle en fit autant à Phaon, » sanglier le tua. Cela fait un fort
pour qui elle avait beaucoup d'amour. >) bon sens au lieu qu'il y en aurait ;

Qu'avait fait Athénée de son bon sens » trop peu à dire que c'est de cette
lorsqu'il avança que les poètes ont 3) laitue qu'Adonis avait trop mangé
voulu signifier par une semblable al- )) lorsque le sanglier le tua l'expres- :

légorie , que les laitues causent une )) sion ne serait ni claire ni suivie,
espèce d'impuissance à ceux qui )) et ce ne serait qu'un mélange con-
çu mangent ordinairement? Si elles » fus de l'allégorie et de la fable. Il
avaient cette vertu , Vénus les aurait- » faut prendre garde de plus queÙpUtt^
elle choisies, pour en faire une cou- » étant du féminin, il faudrait «cou
verture à ses mignons? Ne les eût-elle « îh Ka.'rçt^etyèv, parce que aloi's cî/ se
pas abhorrées jusqu'aunom et à lavue? » prend adverbialement pour quo.^ »
ii'eût-elle pas craint que leur simple II est certain que Casaubon a préféré

attouchement ne fît un mauvais effet? xstTst^i/^aSv à x.cttAcfia.'^œv (49): il a


Remarquez une difiërence entre Cal- confirmésonsentiraentpar les paroles
limachus et Eubulus ce dernier a qui se trouvent dans la même page
:

dit qu'après qu'Adonis fut mort


,
d'Athénée h KctXtLiç èpiS'a.Kiva.t; ùttù-
, ,

Vénus l'enterra sous des laitues d'où : nfù-^cti (5o), in pulchris /actuels abdi-
il infère que cette plante n'est bonne disse mais il aurait dû prendre garde
;

que pour les morts (47). L'origine de qu'Athénée ne les rapporte qu'après
tous ces contes pourrait bien être ce avoir cité un long passage d'un poète
que l'on disait ,
qu'Adonis , ayant bien qui a dit que si quelqu'un mange de
mangé d'une certaine laitue qui crois- ces laitues il ne peut rien faire avec
sait dans de Cypre fut tué par
l'île , une femme (5i). Remarquez bien que
lin sanglier.Ceux qui feront rétlexion les paroles de ce poète suivent immé-
sur l'endroit où le sanglier le blessa diatement ce qu'a dit Nicander. Or
trouveront sans peine le dénoûment c'est un signe qu'Athénée n'a point
de tout ceci. Adonis était devenu im- écrit oS na.Tct.i^uyei]/, mais mv ou iiç xctT*-
puissant pour avoir trop mangé de <fa,yùv. C'en est un signe d'autant plus
ces laitues voilà pourquoi on a feint
: clair, que nous voyons que cet auteur
qu'après cela il reçut à l'aine une bles- ayant cité Callimaque ,
qui a dit que
sure mortelle. Il ne faut donc point Vénus cacha Adonis sous des laitues ,

préférer le mot xaTi»<^!/yav à celui de observe que c'est une allégorie desti-
xa.Tai<^a.yciv (48) ; et il est beaucoup née à montrer que ceux qui mangent
ordinairement cette herbe devien- ,
^44) Pfocop. Gaj. Comment, in Esaï. , cap.
XVIII. nent lâches et invalides par rapport
(45) 'Av«x6ot'3->)c i'i i^ AJût/ x.a,i [j.n\ «.cti à cette déesse : Axxn-j/o/ic.t/vTûiv Tâvwoix-
l<n tla-ÔiVÙs ÀifpoS'io-ict OJ
iiupi^Bctt KiyoÔTKç tÔv ^yirovy.iiov a-ouvii- 'Tûëv ilO-ï TTfOi

/î!7-9ai ustl à.voLTKiprci)/. Cyiil). in Esaïam


hh. II. Casaubon. in Athen. , lib. II cap.
(4o) ,

(46) Jpud Aiheoxum Itb. II, cap. XXVIII, ;ïX^//,pag. i44-


pa{;. 6(j.
(^r)' Ibidem. (5o) Casaubon dil x<*T«,!cpi/4*'' Cesl h
(43) Dnn\ le passage de Nicaiirler , rapporte même sens.

pur Allicnée , fà même. (5i) Ampbis in lalemo.


,

ADRASTK. 23i
«ri/v«;t^c XtStîy'jt èfîSu.^t, Ed quidem " incommodes. On eu trouve un exem-
allegoi id fioëiis iniiuentibus , qui assi- » f'ie dans le I*"". livre de Samuel ch. ,

due l'ictucd l'cscuiitur , ad ytnerem » VI, vs. 4. Adonis, ayant été blessé
eue iiifa/idos. 11 ne faut point se faire " dans l'aine, et étant guéri de sa bles-
une atiaire de ce que Nicander aurait >' sure, il consacra un phallus d'or....
mêlé fort confusément l'allegone avec » L'on avait un très -grand rcï^pect
la fable ^caries poètes sont tout pleins » pour cette ligure dans les mystères
de ce mélange. Remar^iuons de plus « d'Osiris ,5-;). » Nous trouvons ici la
qu'il a entendu très-mal le mot qu'il contirmation de la remarque précé-
a voulu expliquer: Bcév&iv xé'jîs-Sstf ^vo-i dente les nuages se dissipent^ on
:

çrapi Kî/Tf/oiç fif.Uxx.x (Si). Liclucam commence à voir le jour. Vénus crut
h Cyprtis dicit vacari Brenthui 11 a avoir perdu pour jamais , non pas la
pris un sapin pour une laitue (53). vie mais
, le sexe de son mari soit ;

Cette faute l'a dû conduire à changer qu'tfl'ectivement un sanglier lui eût


la tradition ; car il a bien vu auil eût maltraité cette partie soit f(u'un sor- ,

été ridicule de supposer qu'Adonis se tilège , ou bieu quelque autre principe


réfugia sous une laitue. Il a donc conté que nous ne connaissons pas, y eût
qu'elle lui ser\it d'aliment. jeté et une funeste mor-
un dévolu
(£j lia n'ont pas dit tous qu'il soit tification voilà le sujet de ses larmes.
;

mort de sa blesiure.^ Consultez sur Mais la plaie ayant été consolidée, ou


cela le troisième tome de la Biblio-^ le charme ayant été levé, Vénus se
théque universelle (54 j On peut ajou- persuada que son mari ressuscitait , et
ter aux remarques que l'on y trouve qu'il lui revenait du plus profond des
un de Ptolomée tils d'Hephes-
pas'^age enfers : voilàde sa joie et
le sujet ;

tion (55) c'est celui où il est dit que


:
atin de conserver la mémoire de tout
ce vers de IHyacinthe d'Euphorion, cela plus mystérieusemeot et plus ,

honorablement tout ensemble il fut ,

dit que tous les ans la fête d'Adonis


'AS'eeviv , serait célébrée de telle et dételle ma-
Solus Cocylus sua vulnera lavil Adonim ,
nière. Il serait aisé d'adapter à cette
n'a pas été entendu. Il signifie tout hypothèse les explications de Ma-
autre chose que ce que 1 on pense ; c;ir crobe son soleil descendant aux par-
:

lies inférieures du zodiaque et puis


il nous apprend qu'un certain Cocyte,
,

disciple de Chiron, avait guéri Ado- remontant aux supérieures son san-f :

nis de la blessure du sanglier. Les cé- glier l'image du froid et par consé-
, ,

rémonies de la fête nous, doivent per- quent de ceux qui appartiennent au


suader qu'Adonis n'en mourut pas. titre du Droit canonique De frigidis
et maleficiatis sa Vénus désolée à
On s'affligeait au commencement ,
: ,

comme s'il eût été mort ; et ensuite


cause qu'elle est veuve de son soleil
et puis riante au retour de ce bel astre
l'on se réjouissait, comme s'il fût re-
venu au monde. « H n'est pas difficile
qui la rend féconde. Chacun voit qu'il
)> de deviner que l'on a formé cette ne serait pas difficile de faire usage
» fablesur quelques expressions fortes des conventions de Venus et de Pro-
)» des Egyptiens ou des Phéniciens serpine je veux dire de ces semences
,

concentrées au sein de la terre pen-


,

» qui disaient que ceux qui étaient


» guéris d'une grande maladie ou ,
dant quelques mois , dont elles sortent
» échappés d'un grand péril, avaient ensuite pour la propagation ae
de 1l'espèce.
espèce.

)) été tirés du tombeau. On en trouve {S'J Là même ^ P'^S- ^^-


M divers exemples dans les psaumes
)) (56j. Ajoutez à cela que c était la
ADRASTE , roi d'Argos fils ,

3) coutume des Orientaux de consa- de Talaiis et de Lysianasse (a) ,


,

» crer des figures d'or des parties du fille de Polybe , roi de Sicyone ,
« corps dans lesquelles ils avaient été
g'^cquit une grande réputation
{5i)Mheosui,iib. ri,cap. xxriii,p.6g. daus la fameuse guerre de Thè-
f53) Vorei !a Bibliolhéijue Universelle tom
Iir^pa^'.iS. bes où il s'engagea pour sou-
,

(54) Pag. 3.. tenir les droits de Polynice son


(55) Àpud Pholium pag. , 472.
(56) Bibliotb, Unirers. , tom. /// , vag. 3i (a) Pausan. , lit. If, p«y. 5o.
?

aSa ADRASTE.
gendre (A) , qui avait été exclus vieillesse qu'il en mourut de ,

de la couronne de Thèbes par chagrin (C) à Mégare (h) comme ,

Étéocle son frère {b) nonob- il ramenait l'armée victorieuse


,

stant les conventions passées en- qui avait pris la ville de Thèbes.
tre eux. Adraste, suivi de Poly- C'est une marque qu'il fut en per-
nice et de Tydée son autre gen- sonne à la seconde expédition
dre , de Capanée et d'Hipponié- (D) de quoi pourtant il n^j a ,

don , fils de ses sœurs , d'Am- guère d'écrivains qui aient parlé.
phiaraiis son beau frère , et de Ceux de Mégare honorèrent beau-
Parthenopée (c) , marcha contre coup sa mémoire mais ce n'é- ;

la ville de Thèbes et c'est là tait rien en comparaison de ce


;

cette expédition des sept Preuxy que firent ceux de Sicyone (E).
qui a été tant chantée par les Ceux-ci lui dressèrent un tom-
poètes. Ils y périrent tous , à la beau au milieu de leur grande
réserve d' Adraste que son cheval place, et lui instituèrent des fêtes
sauva. C'était un cheval d'impor- et des sacrifices qu'ils célébraient
tance nommé Arion il en fau- ; chaque année pompeuseinent. On
dra parler en son lieu. Cette pre- peut voir dans Hérodote com-
mière guerre fut suivie de quel- ment Callisthène , tyran de Si-
ques autres; car Adraste, n'ayant cyone fit cesser ces choses en
,

pu obtenir les corps des Argiens haine des Argiens (/). Il faut sa-
qui avaient été tués devant Thè- voir qu' Adraste avait été roi de
bes , eut recours aux Athéniens Sicyone (k) , en vertu du testa-
{d) qui , sous la conduite de
,
ment de Polybe son aïeul mater-
Thésée , contraignirent le nou- nel chez qui il se réfugia une
,

veau roi de Thèbes (e) à faire fois , se voyant contraint de sor-


ce que souhaitait Adraste. Cette tir d'Argos (F), et que, pendant
satisfaction ne termina point la son règne , il rendit fort illustre
guerre car les fils de ceux qui
; la ville de Sicyone (/) par les jeux
avaient si mal réussi dans la pre- pythiques qu'il y établit (m). Il y
mière expédition en firent une a des écrivains qui remarquent
seconde dix ans après , qui fut que son royaume héréditaire fut
nommée la guerre des Épigones Mcyone , et qu'il obtint
celui de Sicyone
(B), et qui se termina par la prise celui d'Argos par élection la ;

et le saccagement de Thèbes. Au- douceur de son naturel ayant été


cun des chefs n'y périt (J") ex- cause que ceux d'Argos le priè-
cepté jEgialéus, fils d' Adraste. Ce rent (G) de venir humaniser leur
fut une espèce de com2:)ensation mœurs barbares. Homère ne dit
pratiquée par la fortune fg-). Cette pas tout cela , mais seulement
perte toucha si sensiblement
(/i) Pausan. , lib. 1, pag. ^i.
Adraste, d'ailleurs affaibli par sa Ilerod., lib. V, cap. LXVll.
(j)
(A) Id. ibid.\ et Pausan.
lib. 11, pag. 5o. ,
{b) Pausan. , lih. IX, pag. 286.
(/)Pindar. Nem. , Ode IX.
(c) Hygin. cap. LXX ; Apollod. lib. 111;
, ,
[m] Scholiast. Slatii , apud Bartliium ,
Diodor. Sicul., lib. cap. VI. V , tom. II pag. 36l, in hœc verba Statii Tlie-
,
,

(cl) Pausan. lib. 1, pag-. 3j.


, Laïdos lib. 11.^ vs.
, 179.
(e) Étéocle et Polynice s'étaient enlre-tués.
Quiii te solio Sicyonis aviix
W) Hygiu cap. LXXI.
,
Excitum infreaos componere legiLus A rgos
iifj ^ oyez la re/narçue (H). IVfscial
,

ADRA STE. 23^


qu'il régna en premier lieu à Si- avait marié sa fille avec Polynice
,
avant les disputes pour la succession
cyone (n). Servius le dit aussi
de Thèbes (i) mais d'autres préten-

sur le VF. livre de l'Enéide et ,


dent que ce mariage ne se fit qu'après
on lit la même chose dans Pin- que Polynice, exclus par son frère se ,

dare (o) et dans son vieux sco- fut retiré chez Adraste. Ils content que

liaste. Ordinairement on ne lui


Tydée s'y retira en même temps , et
que ces deux réfugiés étaient couverts,
donne que deux filles Argie , ,
peau de sanglier, celui- celui-ci d'une
femme de Polj^nice , et Déipyle , d'une peau de lion ce qui fut là ^

femme de Tydée (p) mais il eut cause qu'Adraste leur fit épouser ses
;

filles, se souvenant d'un oracle


encore deux fils , ^Egialéus et (2)
qui lui avait commandé de les marier
Cyanippus , et ime fille qui s'ap- avec un sanglier et un lion (3). Le
pelait jEgialée qui épousa Dio—
, Supplément de Moréri dit faussement
mède son neveu fils de Tydée ,
,
que Tydée, interrogé pourquoi il por-
tait la peau d'un sanglier répondit
et le chagrina extrém^ement par ,

que c'était parce qu'Œnée son pèi-e


ses impudicités. Quelques-uns était le vainqueur du sanglier
de Ca-
disent qu'il fut le premier qui lydonie. Il ne fit point cette réponse 5
bâtit un temple à la déesse Né- et ce n'était point OEnée mais Mé- ,

mésis , et que de là vient qu'elle léagre qui avait tué ce furieux san-
glier. On rapporte mal dans le même
a eu le nom d'Adrastée (H). Mais Supplément l'oracle qui avait été ren-
jene doute pas qu'ils ne le con- du à Adraste.
fondent avec un autre Adraste. (B) La guerre des Epigones.] Si l'on

Celui qui bâtit le premier autel avait bien pris garde en composant
le III*. volume de Moréri que cette
à cette déesse , le bâtit sur la ri- guerre n'est postérieure à la précé-
vière d'^Esèpe , dans la Phrygie deute que de dix ans on n'aurait pas ,

(q). On ne
trouve point que no- traduit le mot à^ Epigones , par ceux
qui naquirent après le siège de Thè-
tre Adraste ait jamais été en Asie
bes on se serait contenté de dire :
:

et nous trouvons un roi de ce Ceux qui survécurent a leurs pères ,

nom dans la Phrygie , au temps ou bien on eût dit en général , les


dusiége de Troie (r). Ilvautdonc descendans des premiers chejs.
(C) Quil en mourut de chagrin. ]
mieux attribuer l'établissement
Le Supplément de Moréri lui impute
de ce culte de Némésis à un prin- de s'être jeté dans le bûcher de son
ce asiatique nommé Adraste, qu'à Jils, et cite Ilygin,fab. 2^2. et Héro- 5

un roi d'Argos de même nom. dote liv. 5. Or il est à remarquer


,

qu'Hérodote ne dit rien d'Adraste qui


Hérodote parle d'un Adraste qui
ait été employé dans cet article du
se réfugia à la cour de Crésus , Supplément. La seule chose que l'on
roi de Lydie et qui tua par mé-
, pourrait soupçonner avoir été prise
gardele fils de ce roi (s). L'article d'Hérodote est au commencement de
l'article en ces termes yldraste Jut
, :
de cet Adraste est assez bon dans
obligé de se retirer en la taille de
le Dictionnaire de Moréri (i). Sicyone chez le roi Polybe qui lui
, ,

(n) Horaer. Iliad. , lib. II , es. 79. Jit un bon accueil et lui donna sa fille
(o) Pindar. Nera., Ode IX. Amphitée en mariage; mais cela même
(p) Stat. Theb., lib. I, i's.3g3. est fort éloigné d'Hérodote, qui dit que
Antimachus
{ç) apiicl Strabonem , lib. Polybe laissa son royaume par testa-
XIII pag. 4o5.
,
(i) Paasan., lib. IX, pag. 286.
(r) Homer. Iliad. , lib. II, i>s, 337- (2) Il est dans le Scoliaste d'Euripide
ad
(5) Herod., lib. I , cap. XXXV , et sei/. Ptœniss. , fs. .'(iS. yo/ei aussi Stace , Thfb. ,
l. I, vs. 390.

(3) Hygin. cap. LXIX. Apollodore, liv.


,
III,
(A) Les droits de Polynice son dit qite. l'un d'eux portail sur son bouclier lajt-
gendre.] Pausauias dit qu' Adraste 'iure d'ur.e lé'.e de sanglier.
,

234 ADRASÏE.
ment à Adraste fils de sa fille. Voyez plus la souveraine puissance (8). Ce
]a remarque suivante. La citation poète ajoute qu'Adraste arrêta le cours
d'Hysin est encore plus mauvaise ; de ce mal , et que le mariage d'Eri-
car nygin ne parle point là de notre phyle avec Amphiaraiis fut le lien qui
Adraste , mais d'un autre qui fut père réunit les esprits par la pacitication
d'HippoDoiis , et qui se jeta dans le des troubles. Ampliiaraii>! n'étaitdonc
feu pour obéir à un ordre d'Apollon. pas beau frère d'Adraste quand ce
, par le même
Hipponoiis principe en dernier fut obligé de se retirer à Si-
fit tout autant. L'auteur de VIndtx cyone. Pindare ne dit point que ce
d'Hygin, dans l'édition d'Amsterdam prince fugitif ait épousé la fille du roi
en itiSi donne pour fils à Hercule
,
Poiybe ni que Talaiis ait été tué par
,

cet Adraste et cet Hipponoiis- et ne'an- Amphiaraùs mais l'un et l'autre de


;

moins il prétend que le même Adraste ces deux laits dont le premier est si
,

est le père d'jEgialeedont Hygin parle opposé à Hérodote se trouvent dans ,

au chapitre LXXl et qui est visible-


,
le scoliaste de Pindare. Diodore de
ment le beau-père de Polynice et le Sicile dit que le mariage d'Amphia-
fils de Talaiis. C'est avoir mal enten- raiis avec Eriphyle sœur d'Adraste
du ces paroles Hercules J ouis Jilius
: n'apaisa point les ditItTens, puisqu un
ipie tese in igncm misU. Adrastus et peu avant la guerre deThèbes ces deux
tlipponoûs ejus JiUus ipsi se in ignem
,
beaux- frères disputaient encore à qui
jeceiunt ex lesponso ApoUinis {\). régnerait (9). Ils furent divisés sur
(D) Qu'il fut en personne a la se- un autre point Amphiaraiis ne vou- :

conde eipcduion.'] Je puis joindre à lait pas être de l'expédition , et Adras-


Pausanias un second témoin savoir te souhaitait passionnément qu'il en
,

Pindare qui dit positivement qu'A- fût. Eriphyle fut choisie l'arbitre de
draste ayant recueilli les os de son
,
tous leurs démêlés , et donna gain de
fils , ramena heureusement l'armëe cause à son frère. Apollodore dit en
à Argos (5). Il ne le fait donc point partie la même chose quoique assez
mourir en chemin à Me'gare comme confusément (10). Barthius a mal rap-
fait Pausanias mais ne'anraoins , voilà
\
porté ce que dit Diodore de Sicile
;
deux autorités uniformes sur ce point- car il suppose qu'Ériphyle était fille
ci, qu'Adraste se trouva à la seconde d'Adraste (11). La version latine de
guerre de Thèbes. cet historien , imprimée à Bâle en
(E) En comparaison de ce quejirent i548 dit faussement qu'Eriphyle ad-
,

ceux de Sicyone. ] Le scoliaste de Pin- jugea la couronne à son mari.


dare rapporte (6; que Dieutuchide (G) Ceux d'Argos le prièrent. ] Si
soutient qu'on n'avait à Sicyone que M. Moréri avait su cela il se serait ,

le cénotaphe d'Adraste et que son bien gardé de dire qu'Adra-te, après


,

véritable tombeau était à Me'gare (7). quatre ans de règne quitta la l'ille de ,

(F) Se i'oyant contraint de sortir Sicyone sans qu'on en sache le sujet


d'j4rgns.'\ On a dit dans le Supplé- et yint régner a Argos où. il eut deux
ment de Moréii qu'Adraste/wt chassé (i2 filles, etc. Mais, quoi qu'il en soit,
du royaume d'Argos par Amphiaraûs voici un morceau pour le Pyrrhonisme
son beau-frère et obligé de se retirer historique les anciens appointés con-
, ,

en la ville de Sicyone mais par une traires sur les deux royaumes d'A-
;
,

négligence peu excusable on n'a cité draste i je veux dire sur l'ordre et le
personne qui ait dit cela c'est donner tilre de la possession. Voyez l'article
:

Bien du pays à courir à un h cteur qui Talaùs.


veut avoir des garans. J'ai tant cher- (H) Et que de la trient qu'elle a eu
ché qu'enfin j'ai trouvé une source le nom d'Adraslt^e. ] Le scoliaste de
dans Pindare , où j'ai vu qu'Adra'^tc Pindare veut que ce nom ail été don-
sortit d'Argos et qu'il se retira à Si- né à la déesse Némésis à cause de la
,

cyone à cause des attentats d'Ampliia- compensation dont j'ai parlé. Adraste
raiis et à cause du renversement de la
(8) Pindar. Nem. Od. IX.
famille de Talaiis laquelle n'avait
,

(9) Diod. Sicul. Ub. y, cap. VI.


(4) Hygini Fabul. cnp. CCXLII.
,

(5) PincLir. Pyth., Od. VIII.


(10) ApoUod., Ub.
(11)
pag. 187.
Barlli.
,

In Slat.
m
,
,

loin. II, pag. 870.


(6) Scbol. Pindari in Nem., Od. IX. Vojei autsi pag. 914.
(7) Dieutucbides, HisloriajMegarlcst, W. ///. (la) // fallait dire ^ trois filles el deux fils.
ADRIANI. 235
avait été le seul des chefs qui ne périt passa son temps. Sou ouvrage
de.
point à la première guerre île Thè- est une continuation de Guic-
bes ; et son fils fut le seul des chefs
qui périt à la seconde. Le conlre- et commence à l'an 1 536 ciardin ,

Foids est beaucoup plus juste selon Lejugementetlabonne foi, (A).


hypothèse de ceux qui donnent toute la diligence et l'exactitude
y ré-
la conduite de la seconde guerre aux
gnent beaucoup et il paraît que ,
Épigones mais ceux qui prétendent
;

qu'Adraste y alla et qui lui donnent Cosme ,


grand-duc de Toscane , ,

la gloire d'en avoir ramené l'armée prince d'un esprit vaste et d'une
victorieuse , supposent nécessaire-
prudence consommée avait com- ,
ment qu'il y commandait. C'était donc
afin que la balance
muniqué ses mémoires à l'au-
à lui à y périr ,

devînt égale entre lui et les six collè- teur (B). M. de Thon de qui ,

gues qu'il avait eus la première fois. j'emprunte ce qu'on vient de li-
(l) Est assez bon dans le Diction- re, reconnaît ingénument qu'il
naire de Moréri. ] Je n'y ai trouvé
a pris beaucoup de choses dans
que les petites fautes suivantes i°. On :

y fait Adrasfe fils de Gordius au lieu cette histoire , et qu'il n'y en


,

de le faire fils de Midas et * , petit-fils a point qui lui ait fourni plus
de Gordius conformément
, à la tra- de matériaux que celle-là (a). Il
duction latine d'Hérodote. Je sais bien
trouve étrange que les Italiens ne
ue le texte grec porte qu'il était fils
3 e Gordius, et petit-fils dtf Midas(î3): considèrent pas Adriani à pro-
mais je sais aussi d'une part, que , portion de son mérite. Outre
M. Morérin'étaitpas homme à rectifier cette histoire , on a six Haran-
les versions par les originaux grecs
et de l'autre qu'il y a une leçon
j
gues de la façon de cet auteur ;
,

grecque conforme à la traduction. 2°. savoir l'Oraison funèbre de


:

On ne devait pas supprimer que Cré- Charles V, celle de l'empereur


sus usa envers Adraste des cérémonies Ferdinand celle d'Éléonore de
,
expiatoires que l'on employait pour
Tolède femme de Cosme duc
, ,
la purification des homicides involon-
taires. 3°. Il ne fallait pas dire qu'A- de Florence celle d'Isabelle
; ,

draste se tua sur le corps du fils de reine d'Espagne celle de Cosme, ;

Crésus mais sur son tombeau


, car :
grand-duc de Toscane et celle ;
Hérodote remarqtie que Crésus, ayant
excusé et consolé le meurtrier, fit en-
de Jeanne d'Autriche, femme de
terrer son fils. 4°- Enfin , il ne fallait François de Médicis {b). Il mou-
pas citer Clio ou Li. Les noms des rut à Florence l'an iS^t). Je le ,

Muses donnés aux livres d'Hérodote crois aussi auteur d'une longue
ne servent de rien dans les citations ,
Lettre touchant les anciens pein-
et principalement lorsqu'on fait un li-
vre français dun usage aussi populaire tres et sculpteurs ,
qui est à la
que le Dictionnaire de Moréri ; mais tête du troisième volume du Va-
en tout cas il fallait achever l'éva- sari (*).
luation de Clio à lii^re premier.
Il était fils du docte Marcel
* Diaprés celle critique de Barle tes
teurs de More'ri firent la correction qu'il de-
, e'di-
Virgile (c) secrétaire de la répu-
,

mandait; mais d'après un article inse're dans le blique de Florence et professeur


tome XI des Jugemens sur quelques Ouvrages
nooTeanx , les e'diteurs de More'ri de i^Sg ont
(fl1 Thuan. Hist., lib. LXVIII , siibfn.
rétabli : Adrasle, CIs de Gordius.
(b) Jacolio Rilli Notilie litlerarie ed isU>-
(i3) Herod. lib. I , cap.
, XXXV. ,

riche intorno a gli Uomini illustri dell' Aca-


demia Fiorentina, pag, ^5.
ADRIANI Jeax -Baptiste ) , (
(*) Ce n'est pas dans le troisième volume,
né à Florence l'an i5i i d'une , , tnnis dans la troisième partie du second vo-
famille patricienne a écrit en bimc.
,
(c) Micliaël Pocciaulius , de Scriplor. Flo-
italien \Histoire de ce qui se rent. pag. io3.
,
,

:î36 ADRICHOMIÂ.
aux belles-lettres dans l'acadé- Florence avaient fourni bien des cho-
ses (4) a de'bifé qu'on avait conclu
mie. Il lui succéda dans cette ,

dans cette entrevue selon l'avis du ,


charge de professeur (c?) et laissa roi d'Espagne explique' par le duc ,
,

un fils nommé Makcfx Adriam , d'Albe ,


que l'on abattrait les piinci-
qui fut très-docte, et qui exerça pal^s têtes des protestans, et qu'aprè

le même emploi [e) , et qui prit


"'" Ton ferait main basse sur eux
, j .
1 fr> 1 -j 1 1»
tous, a la manière des vêpres Sici-
le titre de // 1 orbldv dans la- Hennes. Je voudrais que cf'Aubigné
cadémie de gli Alterati [f). 11 n'eût pas enche'ri sur l'auteur qui lui
servait d'original. Presque tous les
y a des gens qui trouvent notre
historiens ,àx\.û {^), et entre ceux
Jean -Baptiste un peu partial
là , Jean-Baptiste Adrian , qui avoit
contre le pape Paul III {g). entre les mains les chiffres et secrets
du duc de Florence , ont voulu comme
(rf( Eilll Nolilie litterarie, pag. 253.
d'un consentement que l'a ayent estcpro-
(e) Là même pag. , 255.
jettées les guerres des Païs-Bas , et les
(JD Le BcKchi au V" livre des Eloges , .

joints au Rllli, pag. ^8. massacres qui ont depuis ensuivi. 11


(gj Spund. Aoaal. ad annum l545, num. n'y a point de doute que M. de! Iiou ne
,

l8, pag. 492. soit en cela l'original que d'Aubigné


a copié; mais le cripiste ne se donne-
(A) Et commence à l'an i536. ] Ne t-il pas trop de Hrence ? n«'donne-t-il
l'ayant point , il faut que je m'en rap- pas comme un fait certain ce qu«
porte au témoignage de 11. de Thou M. de ThoD n'avait donné que comme
5

mais j'avertis mon lecteur que, selon une chose apparente ? Ne parie-t-il
SI. de Sponde (i) notre Adriani a , pas des chiflres et des secrets du grand-
commencé son histoire à l'an i53^ , et dur de quoi M. de Thou n'avait rien
,

l'a finie à l'an iS-^^. Elle comprend dit ? car commentarii ne signifie point
vingt-deux livres , et fut imprime'e à une accusation
chiffres et secrets. Plus
Florence chez les Ginnfi l'an i583
, ,
, est atroce plus doit-on s'aiTeter aux
,

in-folio^ et à Venise, en deux volumes termes d'une déposition, lorsmêraeque


in-4.°,l'an i58^. Marcel Adriasi, fils comme ici les apparences sont tiVs-fa-
de l'auteur fut relui qui publia cette
, vorablcs- Si Zei'ler avait je!é U"; yeux
histoire. 11 la dédia à François de Me- sur cet endroit de AI. de Thou , il n'au-
dicis grand-duc de Toscane. Elle
, rait pas osé dire que l'histoire d'A-
comprend l'espace de 4i ans si nous , driani finit à la mort de Charles V (6).
en croyons le Bocchi (2).
(B) Avait communiqué ses mémoi- (4) Ex Cosini EtruriiB Duci.r Commentants
ut vero simile est rnulia htiunt. là. ihicî.
res a l'auteur. ] M. de Thou avait dé- ,

(5) D'Aubigné, Hist., tom. I, ?iV. ir, ch. V.


jà dit dans le XXXVll*. livre ce qu'il
pensait là-dessus à l'occasion des se- (6) Zeiller, de Historlcis, par/. II ,
pag. 1.
,

crètes conférences qu'eut Catherine


de Médicis avec le duc d'Albe, lors de ADRIA]SUS ou ADRIAN ou , ,

l'entrevue de Bayonne. Ceux de la


reliiçion gcnsj'ort soupçonneux- , dit-
plutôt ADRIEN empereur , ,
pa-
,
il (3) , ont publié qu'on machina dans pe , etc. Cherchez Hadriex.
ces conférences l'extirpation de leur
secte. Ce qui est arrivé ensuite appren-
ADRICHOMIA ( Corneille ) ,

dra certainement à notre postérité si religieuse de l'ordre de saint Au-


cela est faux ou non. 11 ajoute que gustin, au seizième siècle, fille
Jean-Baptiste Adriani, historien très- d'un gentilhomme hollandais ,
sincère et très-judicieux et à qui ap-
s'acquit beaucoup de réputation
,

paremment les mémoires du duc de


par la connaissance de la poésie,
(1) Spoiid. Annal., ad ann. i534, num. 18, dont elle fit un usage conforme
f>aj^. 426.
des Eloges joints à sa profession; car
elle mit en
(2) Le Bocchi au I". , lii".

au flilli
, p«g. 49- vers les Psaumes de David et
,
(3) Genut hominum xuspicax. Tliuan. Hist.
ib. XXXyiI ,
pag. ^49i <"^ ann. i565.
,
composa plusieurs autres Poèmes
A FEU. 23^
sacrés. Jacques Faber d'Étaples prenait quelquefois Je titre de
admirait l'esprit et l'érudition Chrislianus Crucius, et il pu-
de cette fille. Cornélius Musius bJia sous ce nom , à Anvers (a)
eut de grandes liaisons de bonne la Via de. Jésus-Christ, scvec une
et chaste amitié avec elle. harangue de Christiand beatitu-
C'est
ce que François Swert nous en dine , qui avait été prononcée
apprend {a). Je m'étonne que dans un chapitre général [b]. li
Valère André, dont le recueil des mourut à Cologne au mois de ,

écrivains du Pays-Bas est beau- juin 1 585, la treizième année de


coup plus ample que celui de son exil et fut enterré dans le ,

François Swert, ne dise rien de monastère des chanoinesses du


cette illustre Hollandaise. 11 ne Nazareth dont il avait été direc- ,

pouvait pas ignorer ce que l'au- teur pendant quelque temps (c).
tre en avait dit. («) £„ ,5^,8.

{a)' Swertii Alhea. Belgic.


a 'f
,
pag. l8l.
ù f\ ^/ f
{"'"f
(c)L-i- Valer. i^^?-
Aodrea, Bibl. Belg., p. i3l.

ADRICHOMIUS ChrisTIE?? )
( (A) En Brabant. L'auteur que M,
3
naquit à Delft en Hollande, l'an Morëri et moi citons, sVsprime ainsi:
i533. Ce fut un prêtre zélé pour ^'"^^ C""l?-^«'^^«""* z^'/'-
,- • * ,. * . • , . , sus, V/'Tr
Machliniœ , J rajecli , et Colo'
sa re igion , et qui s appliquait a «^^ „,-^ie (,). j^ „^ joute nullement
l'étude. Il fut assez long-temps que M. Moreri ne se soit trompe eu
directeur des religieuses de Sain- prenant ici Tmjecium pour Utreclit
;

te-Barbe, dans le lieu de sa nais- *:"^ ."'^"^ ^'«^" ^^ prendre pour


i'
. ...
, Alaestncht.
sauce; mais le, guerres civiles (B) Un oui'rage considérable, qui
de religion l'ayant contraint de fut imprimé après sa mort. ] Ce que
s'exiler, il se retira d'abord en M- i^Ioréri assure qu'Adrichomius pu-
ouvrage et que le
'Brabant A) et puis à Cologne
'
,
° , it,*^^, ';"-™^™V=«*
,

, ., ^ -i ^ Iheâtre de la Terre-Sainte est distinct


OU il entreprit un ouvrage con- jg ,^ Description de la Terre-Sainte ,
sidérable, qui fut imprimé après etc. , sont deux mensonges.
sa mort (B). La matière qu'il (i) Valer. Andréas, Bibl. Belgic. ,
pa^. i3i.
donna à ses études fut la descrip- tt^c
2i?r^T
lion de la Terre-Sainte en gé- >EGIALEL, fille d'Adraste, roi
néral , et celle de la ville de Je- « Argos. Cherchez Egialf.e. J'ea

rusalem en particulier, comme ^'^ •^"t^"* ^^ *«"* ^^^ "«^^ H»^

on peut connaître par son commencent en latin par la diph-


le

Tlieatrum Terrœ Sanclœ im-


thongue A, et que Ion prononce
,

primé avec des cartes géographi- ^'^. lançais comme s ils commen-
ques , à Cologne, l'an i5q3 , in- pi^"^ P^,!; ^- ?" '^^ trouvera à
^^ ^^"re h , selon leur rang,
folio. Cet ouvrage contient, ou-
tre ce que j'ai déjà marqué , une ^RODIUS , savant juriscon-
chronique du Vieux et du Nou- suite du seizième siècle. Cher-
veau Testament. On en fait assez chez Atrault.
de cas et on l'estimerait davan-
,
AFER (Domitius ), célèbre ora-
tage si l'auteur ne s'était pas trop teur sous Tibère et sous les trois
fié au Manethon au Berose, et ,
empereurs suivans , était de Nî-
à tels autres écrits chimériques mes (a). Peu après sa préture ,
du moine Auuius de Viterbe. Il („) Eus^j,. cbroDic, num. 2060.
238 A F ER.
ne se trouvant pas dans une gran- 812 (e). L'on dit que ce fut à ta-

de élévation, et se sentant beau- ble pour avoir trop mangé {/)


coup d'envie de se pousser de Quintilien qui , dans sa jeunesse,
quelque manière que ce fût , il s'était fort attaché à lui (C) , en
se porta pour accusateur contre parle souvent {g). Il dit qu'on
Claudia Pulchra , cousine d'A- voyait dans ses plaidoyers plu-
grippine 'b). Il gagna cette cause, sieurs narrations agréables , et
et se vit par ce succès au nom- qu'il y avait des recueils publics
bre des premiers orateurs , et de ses bons mots dont il rapporte
dans les bonnes grâces de Ti- quelques-uns. Il parle aussi des
bère qui haïssait mortellement
,
deux livres que cet orateur avait
Agrippine(A). Les éloges que son publiés sur les témoins. Bien lui
éloquence reçut de cet empereur en prit une fois d'avoir l'esprit
lui firent prendre goût au mé- aussi présent que flatteur , car il
tier de sorte qu'il n'était guère
; eût été perdu sans cela ; ce fut
sans avoir en main quelque ac- lorsque Caligula devint sa partie
cusation ou quelque cause de per- (h) , et plaida en personne contre
sonne accusée; ce qui donna plus lui (i). Domitius , au lieu de se
de réputation à sa langue qu'à défendre, se mit à répéter avec
sa jjrobité jusqu'à ce que même
,
, des témoignages d'admiration le
du côté de l'éloquence, il perdit plaidoyer de ce prince (D), et puis
beaucoup de sa gloire , lorsque la se mit à genoux , et cria merci ,
vieillesse , lui ayant usé l'esprit en déclarant qu'il redoutait plus
(c) , ne put néanmoins l'obliger l'éloquence de Caligula que sa
à ne plaider plus (B). L'accusa- qualité d'empereur. Non-seul e-
tion de Claudia Pulchra tombe m^ent on lui pardonna, mais aussi
sur l'an de Rome 779. L'année on réleva au consulat par la des-
d'après , son fils Quintilius Varus titution de ceux qui étaient alors
fut accusé par le même orateur en charge. Sa faute était bien lé-
et par Publius Dolabella {d). Per- gère il avait érigé une statue à
:

sonne ne s'étonnait qu'Afer , qui Caligula, et marqué dans l'in-


avait été long-temps pauvre , et scription que ce prince était con-
qui n'avait pas bien miénagé le sul pour la seconde fois à l'âge de
gain de l'accusation précédente , vingt-sept ans. Il croyait faire
revînt à la charge mais on s'é- ; sa cour par-là mais l'empereur
;

tonnait qu'un parent de Varus , le mit en justice prétendant ,

d'aussi grande maison que l'était qu'il lui reprochait sa jeunesse et


Publius Dolabella , se fût associé l'inobservation des lois (A).
à ce délateur. Afer mourut sous Afer eut des enfans adoptifs.
l'empire de Néron , l'an de Rome Pline le jeune vous l'apprendra

(b) Taciti Annal. , lib. ir , cap. LU. (e) Tacit. Annal. , lib. XIF, cap. XIX.
(c) Nisi quodœtas extrema mulliim etiam if) EuseL. Chronic. , num. 2o6o.
floqiicnliœ dempsit , tl'um fessa meute letinet (^) Quintil. , lib. V, cap. Vil, et lib.
silentii iinpatientiam. Taciti Annal., lib. IF, VI, cap. III. Vide eliam PJin. Epist. XIV,
cap. LU. Voyez dans la remarque (Cj le lib. II, et i^iCatanœuni pag. I2I- ,

passage du chap. XI du XII'. livre de Quin- (h) Dio Cassius lib. LIX, ad anmtm 792.
,
(ilien.
(il // lut son plaidoyer.
{d) Tacit. Annal. , lib. IV, cap, LXVl. (k) Dio. lib. LIX.
,
,

A FER.
et vous en dira des circonstances posèrent qu'après un certain âge il ne
fallait plus songer à procréer des eu-
curieuses (E). L'abbé Faydit ,
fans soit à cause de l'extinction soit ,
dans ses Remarques sur Virgile, à cause de ,

l'ailaiblisseuient des facul-


page 3, le fait de la maison royale tés chacun devrait aussi se faire des ;

des Domitiens. bornes pour la production des livres,


qui est une manière de génération à
(A) Tibère qui haïssait mortelle- quoi tout âge n'est nullement propre.
ment Agrippine. ] Cette princesse La comparaison employée par Horace
doutait si peu que ce fût lui qui eût me fait souvenir d'un précepte que
suscité ce procès, qu'elle n'en témoi- Virgile nous a laissé les vittux poètes ;

gna point de ressentiment à Domiiius. s'en devraient faire l'application :

Celui-ci , la rencontrant un jour dans Hune morbo gravis , auliam.


quoque., ubi aut
les rues, se détourna elle crut que la : segnior annis
honte l'avait porté à faire cette dé- Déficit , abde doino , nec turpi ignosce .»<>
necla.
marche et l'ayant fait appeler elle
\ ,
Frigidus in Venerem senior frustraque la'-
lui dit de ne rien craindre et que ce
,
,
borem
n'était point lui , mais Agamemnon Jngratum trahit ; et si quando ad prcelia
ventutn est
qui était cause de tout cela : ©ipe» ,
Vl quondam in stipulis magnus tine viribiu
AouiTii , où ya.fl iru y.'ji Tai/Tcev ctWioç tî ignis ,
Bnno sis animo, Do-
«ixx 'Kya.fA.iy.voiv. Incassuin furil (4).
initi non enim tu horum causa es
;
,
Les vieux poètes dis-je , devraient
sed Agamemnon (i). C'est une mar- ,

proliter de celte leçon , et ne pas vou-


que qu'elle avait lu l'Iliade.
(B) La uieiilesse , lui ayant usé l'es-
loir monter sur le Parnasse lors même
prit , ne put néanmoins l'obliger a ne
qu'ils sont devenus semblables à ce
plaider plus. ] Ce défaut n'est que
cheval dont Pline a parlé après Aris
tote Générât mas ad annos triginta
trop commun il n'y a pas beaucoup;
:

très..., Opunle et ad quadraginta du-


de gens qui sachent faire leur retraite
rasse tradunt adjutuni modo in atlol-
bien à propos , ni qui puissent dire
lendd priore parte corporis (5). Ils
comme Horace :

obcurcissent par-là leur première gloi-


Est mihi purgatam crebrb ijui personel aurem :
re à l'exemple de notre Domitius Afer.
Sohe senesceniem inaLurè sanus etfuurn, ne
Peccet ad exlremuin ridendus , el ilia du- Voyez ce qui sera dit de Jean Daurat
cal (ïj. dans son article. Il y en a qui consa-
crent à des poésies dévotes leurs Mu-
Les poètes et les orateurs devTaient ses sur le retour ce sont pour l'ordi-:

être les plus diligens à se retirer , naire des fruits insipides {6). Je dis ,
parce qu'ils ont plus de besoin que pour l'ordinaire; car sur toutes sorte*
les autres d'un grand feu d'imagina- de sujets on a de fort excellens ou-
tion cependant il ne leur arrive que
:
vrages composés par des vieillards.
trop de se tenir dans la carrière jus- (C) Quintilien.. s'etaitjort attaché
qu'au dernier déclin de l'âge. Il leur à lui. ] Cliarles Etienne , Lloyd et
semble qu'on a condamné le public à Hofman dans leurs dictionnaires, Glan-
boire jusques à la lie tout leur pré- dorp à la page 3o6 de son Onomasli-
tendu nectar. Mais si autrefois les lé- con et plusieurs autres remarquent
, ,
gislateurs renfermèrent dans certai- que Quintilien nous apprend cette
nes bornes le temps où on se pouvait I
particularité au livre V Confitetur :

marier (car ils défendirent aux fem- senem Domitium sibi adolescc/ilulo
mes de cinquante ans el aux hommes , culium ; mais ils disent tous qu'il
de soixante de le faire (3) et s'ils sup- ,
ajoute que l'autorité que Domitius
(i) Dio CbssÎus ad ann, 792, avait eue était fort diminuée Sed :
, P(t§. ''Sa.
(2) Horal. Epist. /, lib. l\\s. 7. priore autoritnte multiirn imminutâ.
(3) Çuid est quare npud Poëlm fallacissimus Je n'ai point trouvé cela dans cet ea-
Jupiter dfsierit librros lutlere ? Utrwn sexnge-
ciariHs factus eu et dit lex Papta fibuiam iin-
^ (4) Virgil. Georg. , lib. III, vs. oS.
posuit? Laclant. Ub. I , cap. XVl. CapUi
, (5; Plin., hb. rill, cap. XLII.
PapicB Pofjpeœ legis n Tibeito Cœsaie, quasi (6) Vu-iei. Baillel, Jug. sur les Poètes, lom.
sexageiiani generare non pussent^ addito obro- III, pag. 246- Voyei. aussi ce qu^U dit des e'crits
gavii. Suelon. in Ciaiid. eap. II, et ibi
, XXI co'uposés en vieillesse , iom. /*^. det Jugcn*.
GommemaWrtt. de» Savens, pag. 383.
9.f\0 AFER.
droit de Quintilien. Siifficiebaiit , dit- nous reste de lui , parle de Domitiu8
il (^)aiioqui lihri duo a Domiiio
, Afer. Ainsi , lorsque Scaliger avance
-Afro in hanc rem compositi , quent dans ses notes sur la Ciironique d'Eu-
ado/escentulus seiiern colni , ut non scbe , que ce qui a été dit de cet ora-
lecla mihi tanlùm eu , sed plernque teur par saint Jérôme a été pris de
ex ipso sint cognita. l\ aurait fallu Suétone il faut nécessairement qu'il
,

citer le chapitre XI du Xli^. livre de ait égard à des livres qui se sont per-
Quintilien. CV-st là qu'on trouve la dus depuis la mort cfe ce ])ère. M.
décadence de l'autorité de notre Do- Hofman nous donne deux Domitius
mitius , et l'on y trouve comme la Afer au lieu d'un, et tombe dans la
confirmation du précepte que l'au- mauvaise citation que l'on vient de
teur venait de donner touchant la re- censurer à iVl. Moréri.
traite que les orateuis doivent faire Le plaidoyer de ce prince,^ Ca-
(J))
quand l'âge ne leur permet plus de Hgula était si charmé de cette pièce ,
soutenir leur première gloire. JVon que lorsqu'un de es affranchis qui
quia prodesse unquam salis sit, dit-il avait fort contribué à l'apaiser, lui
(8) , et iltâ menle , atque illd Jacul- voulut faire des reproches touchant
tate prœdito non confeniat opnis pul- le procès intenté à Domitius , il lui
cherrimi quitm longissimum tenipus ; répondit Je ne devais pas supprimer :

sed quia docet hoc quoque pfospicere , ^n discours de cette importance. C'est
ne quid pejus quarn fecerit Jaciat. Ne- autant que s'il avait dit Quoi ! j'au- :

que enim scientiâ modo constat orator, rais tra^'aillé inutilement h ce plai-
quœ augetur annis , sed i'oce , late- doyer? j'aurais mieux aimé renoncer
rum firmitate quibus J'ractis aul im- aux louanges que ma rhétorique méri-
;

minulis cetate seu laleludine , ca- tait , que d'exposer la lue de Domi-
,

uenJum est , ne quid in oratore sum- tins? Il n'y a que trop de grands qui
mo (lesideretur,neintersistatjatigatus, prendraient cela pour un grand dés-
ne quœ dicat pariim audiri sentiat, ne ordre ils croient que tout doit être :

5e queratur priorem. f^uli ego longé sacinfié à leurs passions. Ceux qui ont
omnium quos mihi cognoscere con- dit que le cardmal de Lori'aine aima
,

tigit , summum oratorem , Domilium mieux exposer le catholicisme à tous


AJ'rum l'aldè senem , quotidiè aliquid les dangers du colloque de Poissy que
ex ed , quarn merueral , autoritale par- de se priver de la gloire d'y étaler son
dentcm , cîim agente illo , quem pria- savoir et son éloquence (9) , ne le con-
cipem fuisse quondani fori non erat naissaient pas mal.
dubium,alii{quodindignumuideba- (E) Des circonstances curieuses. 2
tur ) ridèrent , alii erubescerent ; quœ Domitius Afer adopta deux frères, qui
occasio illisfuit dicendi , malle eum furent nommés Domitius TuUus et
deficere , qukmdesinere. lYeque erant Domitius Lucanus. Il tit ensuite con-
illa quaiiacunque mala , sed minora, fisquer les biens de leur père , et leur
Quure , ut nunquam in has œtalis t^e- \^{^^j, les siens , malgré lui en quelque
niai insidias ,
receptui canet , et in façon; car il y a beaucoup d'apparence
porlum inlegrd naue per^eniet. Je ne qu'une surprise de la mort l'empêcha
marque point grandes et capitales
les ^g révoquer le testament qu'il avait
oraissiousde Moréri on les peut assez :
f^jt àleuravantage. Domitius Lucanus,
connaître par la seule confrontation, gendre de Curtius Mantia, se rendit
Je marquerai seulement que sa cita- odieux à son beau-père. Il eut une
tion de Suétone et de Dion in Cah-
, f^\^^^ ^^ faveur de qui Mantia ne vou-
guld ne vaut rien car outre que ce :
lut faire son testament qu'à condition
n'est pas la coutume de citer Dion q^g Lucanus l'émanciperait ; mais
autrement que par rapport a tel ou ^^^^n^ elle eut été émancipée , Domi-
tel livre, et que ce n est que son tins Tullus l'adopta. Ce fut une col-
abréviateur Xiphilin qui est cite par i„sio„ ^^^ ^^^^^ frères. Ils vivaient en
rapport à tel ou tel empereur il n'est ; communauté de biens; et ainsi, dès que
pas vrai que Suétone ni dans la vie , j^ f^Ug eut été remise sous la puissance
de Caligula , ni dans aucun livre qui paternelle par le moyen de l'adoption,

(7) Quintil. Instit. , lib. V, cap. Vil. (9) Vorei la remarque (0) de VarUcle de
'.%) Ibidem . lib. XII , cap. XI , inUio. CharUs Je Louraihe.
,

A FER. 241
Domifins Lucanus eut part à Tlieri- ac ne in lectnlo quidem, nisi ab aliis
tage de Mantia quoique celui-ci eût mot'ebiUur. Quincùam, jœdum mise-
,

pris bien des pre'cautions pour Ten ramlumque dictu dentés loi'andos , ,

empêcher (10). Domitius TuUus fut fricandosque prœbebal. Auditum est


l'héritier de son frère, préferablement fréquenter oh ipso quUm quereretur ,

à la fille qui leur était commune. Il de contunieliia debiUtaiis suœ se di-


avait fait espérer sa succession à bien gitos sen^orum suorur/i quoiidiè lin-
ges gens, et s'était procuré par-là gère, f^itebal tamen, eH'ii'erc folebat
toutes les caresses tous les présens, suitentiinte maxirnè uxore
,
quœ ciil- .

toufes les assiduités empressées qu'on pam inchoati matrimonii in qloriam


met en usage auprès des riches vieil- persévérant id i^erterat (12). Les vertus
lards dont on brigue l'héritage mais ; de cette femme seraient sans doute
il les trompa tous. La fille qu'il avait plus admirables si elle eût prévu la
adoptée fut son héritière, et tous ses longue durée des infirmités de l'hom-
legs furent destinés à ses parens. Il se me qu'elle épousait. Mais enfin elle
souvint surtout de sa femme, car il mérita d'être louée; car si Tespérance
lui laissa beaucoup de bien. Elle s'é- d'acheter au prix de quelques dé^^oùts
tait déshonorée en l'épousant vu le , très-fâcheux, mais courts, un douaire
pitoyable état où l'âge et les maladies très-ample , la trompa , elle ne fit
l'avaient réduit. 11 eût pu dégoûter en point paraître par son dépit que sa
cet état une femme qui aurait été à condition lui déplût ; elle fit toujours
lui dès temps qu'il était jeune et vi-
le son devoir de bonne grâce. Qiie de
goureux. A combien plus forte raison bons portraits dans cette lettre de
devait- il paraître désagréable à une Pline ! Que ce misérable perclus qui ,

épouse quv commençait son commerce craint la mort, représente viveinent la


par un si mauvais endroit ^ Néan- faiblesse humaine défaut dont nous
!

moins cette femme supporta si con- parlerons ailleurs (i3), et qui en ce


stamment tous les déçfoûts de sa con- temps-là était beaucoup plus honteux
dition et soutint avec tant de cha-
, qu'aujourd'hui car on prenait pour
;

rite la vie infirme et caduque de son une action de courage la résolution


mari, qu'elle se réhabilita envers le de mettre soi-même une fin à des ma-
public. Ce pauvre homme était si per- ladies trop longues. Quel désordre ,
dus de tous ses membres, qu'il fallait d'autre côté, que de voir un homme
que ses domestiques lui lavassent et qui a une fille et des petits-fils , faire
lui curassent les dents ; et de là vint savoir qu'il cherche des héritiers hors
qu'il se plaignait d'être obligé chaque de sa maison et qu'on n'a qu'à faire
,

jour à lécher doigts de ses esclaves.


les le siège de son héritage dans les for-
Cependant n'avait aucune envie de
il mes pour prendre la place Quel trafic !

mourir (i i). Les paroles de Pline, qui sordide ! quelles ruses C'étaient de !

nous apprennent tout cela, et qui semblables gens qui trouvaient leur
contiennent tant de caractères des compte auprès de ceux qui briguaient
mœurs , méritent d'être rapportées : des successions.
ylccepit ( uxor ) amœnissimas rilfas ^
oniinus tanien et tiotnini rex
accepit magnaui, pecuniani uxor opti- Si vis tujieri^ nuUus tibi par^'ttlus aida
rna et paùentissima : ac tanto meltiis Liiseril yEneas , nec filia duhtor illo.

de uiro mérita, quanta ntagis est re- Jucundwn et carum sterilis fuctl uxor aini-
cutn (i4).
prehensa ,
qubd mulier nupsit. Nam
nalalibus clara mnribus proba œta- , , Mais si cette avarice était lâche ,
te dccUwis diii l'idua mater olim,
, , celle des gens qu'elle dupa ne l'était
pariirn decoiè iequuta niatrimonium pas moins. Ils eussent été moins blâ-
videhatur dii'itis senis ita perditi mables s'ils eussent brigué la faveur
niorùo ut esse tœJio posset iixnri
, , d'un homme qui n'aurait point eu
quant jui'enis sanusqiie duxiaset. d'enfans, et s'ils n'eussent point crié
Quippè omnibus nienibris extoi tus et contre Domitius Tullus après sa mort.
Jraclus Lanlas opes solis oculis obibat :
On se moqua de leurs plaintes qui fai-
(10) Fuil fralrilius Mis quasi Jaio âaltim ut (12) piinius, Epist. xyiii, lib. Vin.
divites Jierent invitissimis à qnihiit facti fssent. (i3) Dans l'une des remarques de l'article de
Piioii Kpisioia xriii, iih. Vin', p,ig. 492.

(11) Ibidem ,
pag. IjÇi'i i4) Juvenal., Sat. V, ivr. 137.

TOiME I, 16
AGAR.
saient connaître leur honte on loua j depuis long-lemps (B) pria son ,

le défunt et l'on jugea que sa con-


,
mari d'essayer s'il pourrait avoir
Juite bonne pour un siècle
était
des enfans de cette servante et
aussi corrompu que celui-là. Servons-
,

nous encore du pinceau de Pline qu'Abraham, vaincu par ces sol- :

yarii totii ciuitale sermones alufic- licitations, et faisant même se-


:
,

lu7n iiii^r/ituw immemoietn, loquiin- lon la version de quelques inter-


, ,

tur, seque ifjsos, dùm insectantur il-


lum , turpisiimis confessionibus pro-
prètes , un acte d'obéissance (C) ,

diint qui de illo ull de patie (wo


, , ,
s'approcha d'Agar avec tout le
,

proauo, quasi orbi querantur : alii succès que sa femme s'en pouvait
contra hoc ipsum hmdibus feriint , promettre sa femme dis-je, car ,
;
ouod sit frustralus impiobas spes ho-
c'était pour son compte qu'elle
iiLinum , quos sic decipere pro mori-
bus temporuni piudentia est (i5). souhaitait que sa servante fît des
XVIII, Ub. FUI. eufans et n'en pouvant donner
; ,
(,5) Plinii Episiola
par elle-même à son mari elle ,

AFRANIUS (QuiNCTiANUs), sé- voulait du moins lui en donner


nateur romain perdu de répu- par procureur {b). Ceux qui trou-
,

tation à cause de ses impudicités veront peu conforme aux maniè-


infâmes entra dans la grande res de notre siècle qu'il ait fallu
,

conspiration contre Néron qui employer de grandes prières au- ,

coûta la vie à Sénèque l'an de près d'Abraham pour de telles


,

Rome 8i8. Il avait une raison choses et surtout que ces prières ,

personnelle de vouloir du mal à soient venues de sa propre fem—


ce prince, qui avait fait contre me, doivent une bonne fois se
lui une cruelle satire en vers. Il bien mettre dans l'esprit que
nia long-temps qu'il fut de celte tous les temps et tous les peu])les
conspiration mais il le confessa du monde ne sont point sembla-
;

enfin trompé par l'espérance blés. Quoi qu'il en soit Agar se


, ,

d'avoir sa grâce. Il témoigna en sentant grosse devint si fière ,

souffrant le dernier supplice plus qu'on eût dit qu'elle venait de


de fermeté que l'on n'aurait dû faire un très-grand exploit mais ;

s'en promettre de la vie qu'il on rabattit bientôt son insolence.


avait menée (a). Sara qui ne put souffrir de s'en ,

(n^ Tacit. Annal, Ub XF cap. XLIX, voir traitée de haut en bas la


,
,

LFI.LXX. maltraita de telle sorte qu'elle la


contraignit de déserter la maison
AGAR, servante et puis con- (D). Agar n'y rentra qu'après s'ê-
cubine du patriarche Abraham ^^^ h^'ï'nniée, suivant l'ordre que
était Egyptienne [a] Il y a quel- j^- •

^^^ ^^^^^^^ ^^^ j^^j ^^^_


que apparence qu il la pnt a son ^^^^^^ ,^^^^ accoucherait d'un
service lorsqu il revint d iigjpte,
fils qui aurait des querelles avec
après avoir recouvré sa femme , tout le monde (E). Elle accoucha
que le roi Pharao avait enlevée.
Mais c'est une fable que de dire , (b) Ecce concliisit me Dominus ne parè-

comme font les Juifs (A), qu'A- rent ing redore ad ancillam nieatn
,
sij'ortè ,

saltemex- illâ sttscipiamjîlios ; c'est-à-dire,


gar était de ce roi. Chacun
fille
selon la version de Genève Foici l'Eternel :

sait que Sara , se voyant stérile m'a empeschée d'enfanter; viens je te prie , ,

vers ma servante , peut-cstre serai-jc édijiéc.


{il) Genèse, chap. XFI , c. I. de par elle. Genèse, chap. XFI , v. 2.
^i^ AG AR. 243
lin qui fut qu'Abraham épousa une servante
peu après d'Ismaël ,

élevé chez son père jusqu'à l'âge égyptienne, dont il eut une dou-
de quinze ou seize ans pour le zaine d'enfaus qui s'emparèrent
moins (F). On ne sait pas si la de l'Arabie et la partagèrent en- ,

concorde des deux femmes fut tre eux cf;. Les rabbins ont avan-
bien grande pendant ce temps- cé une autre fable , savoir qu'Is-
là; mais on sait qu'enfin Agar maël ressuscita avant que de naî-
fut obligée de décamper avec son tre; car, disent-ils, sa mère per-
fils. Sara le voulut absolument, dit son fruit en jninilion de sa
et cela pour avoir vu qu'Ismaël vanité et par les fatigues du
se moquait de quelque chose (G). vojage;mais sa déférence pour
Abraham congédia la mère et Vange , qui lui conseilla de s'hu-
l'enfant avec un très-petit via- milier sous sa mattresse, obligea
,

tique la bouteille d'eau qu'il leur Dieu à ranimer son enfant.


;

donna ayant été vidée, la pauvre Cornélius à Lapide assure dans


Agar vit l'heure que son fils mou- la page 1 7 1 de son Commentaire
rait de soif (H). De peur d'être sur le Pentateuque, que Tostat a
présente à ce spectacle , elle s'é- cru cette rêverie. C'est à tort que
carta du lieu oii elle avait mis l'on accuse Calvin d'avoir vomi
Ismaël. Un ange vint à son se- les injures les plus grossières con-
cours, et lui découvrit un puits tre Abraham et Sara au sujet du ,

oïl elle remplit sa bouteille par concubinage d'Agar; mais on a


;

ce moyen elle sauva la vie à son plus de raison de trouver faible


enfant. Elle le maria ensuite à l'apologie de saint Augustin pour
une femme d'tgypte. Yoilàjus- cette conduite du patriarche.
qu'oii l'Écriture conduit son Voyez les remarques (I) et (K)
histoire. C'est sans aucune rai- de l'article de Sara.
son que plusieurs rabbins préten- id) Melo, apud Alexand. Polyliist. citante
dent qu'Agar est la même que Euseb. Prœp. Ev. lib. IX, cap. XIX.
,

Kethura, qui fut femme


d'Abra-
(A) Comme font les Juifs. ] On croit
ham après la mort de Sara (c). que le paraphraste chaKleen est le
Mais cette erreur est infiniment premier qui ait publie cette fausse
plus supportable que la ridicule tradition. Il prétend que Pharao ,

superstition des Sarrasins , qui ayant enlevé Sara lui donna sa pro- ,

pre fille Agar pour servante , et que


honoraient comme une sainte re- Sara la fit venir avec elle au pays de
lique la pierre sur laquelle Agar Clianaan c'est aussi la pensée du
;

(I) , disaient-ils accorda la der-


,
rabbin Josué (i). Un autre rabbin
nière faveur à Abraham. Leurs conte la chose comme si Pharao, ay^nt
remarqué les prodiges qui s'étaient
écrivains ne marquent pas cette
faits sur sa personne depuis qu'il
raison, et ne reconnaissent qu'un a^ ait enlevé Sara avait dit à Agar , ;

rapport très-éloigné entre Agar jy/a fille il uaul mieux que tu sois
,

seri'ante dans cette maison-là que maî-


et cette pierre (K). Un auteur
tresse dans une autre ("x). Mais Abra-
cité par Eusèbe voulait sans dou-
ham Zachutli ne la fait point d'une
te parler d'Agar lorsqu'il disait si bonne maison il se contente de
^

(1) R. 3o'ivi3,JjUus Karctia, in Pirlic Elieier,


(c) Targum Jonatlianis P<iraplirasis Hie-
,
cap. XXVI apud Heidegg., Hislor. Patriarcb.,
.

rosolyrailana Jarcliius , R. Eliezer, apud


,
iom. II, pag i((2.
Ileideg. Hist. PatriarcK. , tom. II, pag. l36. ,2* Salom. Jarchi , apud Heideg. ,
ibidem.
244 AGAR.
dire qu'elle était servante de Churia ,
rôles de l'Écriture ; car aprùs avoir
femme de Pharao que Churia , et ,
observé qu'Abraham eut tour à tour
après la mort de son mari la donna , la com|)laisanee de s'attacher à Agar,
à Sara (3). Saint Chrysostome veut et de la quitter , selon que Sara chan-
que ce soit Pharao lui-même qui ait gea de désirs il fait celte exclama-
,

donné cette_ servante à Abraham (4). tion : O


i'irum t^iriliter ulenlem fe-
En l'Ecrilure observe qu'entre
effet , minis conjuge temperanter ancillâ
, ,

autres présensqu'il lui fit, il lui donna OBTEMPERANTER Tiullâ inteiupei aliter
,

des servantes (5). S'il lui donna celle- (il) 11 s'était déjà servi de cette ex-
!

ci ne doutons point qu'il ne la choi-


, pression usus eut ed ( concubinâ ) ,
,

sît entre les personnes dont la condi- non ad expleadani libidinem , nec
tion était de servir. Je croirais volon- insultans sed potliis obediens con-
,

tiers ce que dit Philon qu'elle avait , jugi (12


erabrassé la religion d'Abraham (6) j (D) ha maltraita de telle sorte ,

mais quant à ce qu'il ajoute que ce ,


quelle la contraignit de déserter la
patriarche cessa d'en jouir dès qu'il maison. ] Qui aurait jamais deviné
se fut aperçu qu'elle était grosse je , que cela servirait un jour d'apologie
n'ai garde de le nier ni de l'aflirmer. à ceux qui persécutent les sectes ?
Ce sont des mystères dont il ne faut Cependant l'esprit fécond et Imagi-
point être curieux il faut supposer : natif de saint Augustin y a trouvé
qu'ils se passent sous les voiles de la ce secret. 11 a soutenu par la con-
nuit ou derrière le rideau , et les lais- duite de Sara envers Agar que la
ser dans leurs ténèbres naturelles. Les vraie Eglise peut infliger de» châti-
Juifs , toujours guindés sur les mira- mens à la fausse, l'exiler, la tourmen-
cles attribuent la conversion d'Agar
, ter, et ce qui s'ensuit. On l'a relancé
aux prodiges qui se firent chez Pha- en peu de mots bien fortement dans
rao, à cause du rapt de Sara (7). leCommentaire Philosophique sur les
(B) Depuis longtemps ] 11 est dit . fameuses paroles contrains-les d'en- ,

dans la Genèse qu'Abraham avait ha- trer (i3j.


bité dix ans au pays de Chanaan lors- , (E) aurait des querelles avec Qui
qu'il coucha avec Agar; d'où les Juifs tout le monde.'] Ce sera, lui dit l'ange
ont inféré qu'un mari ne doit plus (14) , un brutal ou un âne sauvage.
habiter avec sa femme lorsque pen- Sa main sera contre un chacun , et les
,

dant dix ans il l'a éprouvée stérile mains d'un chacun seront contre lui.
(8) j absurde conséquence, tant parce S'il était permis de cherclier ici des
qu'il y avait plus de dix ans qu'A- types à la saint Augustin, ne dirait-
braham était marié avec Sara lors- on pas qu'Ismaël a été l'emblème de
,

qu'elle lui proposa sa servante (9) , certains controversistes misanthropes


que parce qu'il ne songeait à rien qui ne font que naordre le tiers et le
moins qu'à la quitter lorsqu'il eut quart, et (jui , pour mieux déclarer la
vécu dix ans avec elle au pays de guerre au genre humain, sortent à
Chanaan sans procréation de lignée. tout moment de leur sphère, écrivent
(C) Faisant même, selon la i^ersion sur toutes sortes de matières à tort et à
de quelques interprètes un acte d'o- travers , et toujours en style de li-
,

béissance.'] La Vulgate porte Cumque belle difTamatoire ? Tous les âges et


:

ille acquiesceret deprecanti ; et la ver- tous les pays fournissent de ces copies
sion de Genève Et Abraliani obéit h d'ismaè'i. 11 y a même de ces co})ies
:

la parole de Saraï (ïo). Saint Augus- qui diflcrent de l'original en ce qu'en-


tin a donné ce dernier sens aux pa- core qu'elles jettent des pierres sur
tout le monde, peu de gens prennent
(3) In libro Jucbasin, apud Ileideg., ibidem.
(4) ^pud Coriiel. à Lapide in Gen. p. 171.
la peine de leur en rejeter on les :

(5) Genèse , chap. XII c. 16.


laisse jouir en repos de la malheureuse
,

(6) Jn libro de Abrahamo. impunité qui augmente leur audace


(7) Apud Cornai, à Lapide in Gen. p. i^i. et leur frénésie. ,

(8) Àbenezrain Gen. Xf^I, 3, apud HeiJeg.


Hist. Patriarch., pai^. ig-. (11) Âugust. de Cjvit. Dei, lib. XVI , cao.
(9) La stérilité de Sara était connue avant xxr.
qu'Abraham sortît de son pa>s pour venir à (12) Ibidem.
Charan. Voyez Genè.se, XI , 'io. (i3) Comment. Philos. ,
part. III, pag. 62.
^lo) Genèse, chap. Xfl , v, >. (i-^^ Gcuèse, XVI, 12.
AGAR. 2^5
(F) Jusqu'à l'âge de quinze ou seize Le mot hébreu, dit-on /ao), signifie
ans ,
pour le moins. ] En voici la quatre choses dans l'Écriture le :

preuve. Ismaël avait quatorze ans lors- passe-temps l'idolâtrie le jeu d'a- , ,

que Isaac naquit; car il était né lors- mour, et un combat à outrance. Pour
qu' Abraham avait quatre-vingt-six ans prouver la troisième signification, on
(i5), et Abraham était âge de cent se sert du chapitre XXVI de la Ge-
ans lorsque Sara enfanta Isaac (16). nèse où il est dit ([u' Abimelech re- ,

Or celui-ci était sevré avant que l'on gardant par la fenêtre fit Isaac se
chassât Ismaél donc etc. Je ne jouant auec Rébecca sa femme. Mais
; ,

m'arrête point à Topinionde ces Juifs c'est étendre la signification de ce


c[ui croyaient qu'lsaac avait tété pen- mot au delà de ses justes bornes que
dant douze ans ou pendant cin(f ans de prétendre qu'il signifie en cet en-
(17) ; car si j'y faisais quelque fond droitlà l'œuvre de la chair. Il suffit
,

j'aurais donné une plus longue durée de le prendre pour une certaine pri-
au séjour d'Jsmaèl chez Abraham que vauté qui prouve entre honnêtes gens
celle qu'on vient de lire. Voyez la re- qu'on n'est point frère et sœur, mais
marque (H). mari et femme car c'est la conclusion ;

(G) Qu Ismaël se moquait de quel- qu'Abimelech en tira. Je ne trouve-


que chose. ] La version des Septante rais rien de plus plausible que ceci :
porte que la mauvaise humeur de Sara c'est qu'Ismaèl avait témoigné des
vint de ce qu'elle aperçut Ismaél airs de mépris qui tirent craindre à
jouant avec Isaac. La Vulgate les a Sara qu'il ne voull^t un jour disputer
suivis en cela cùni uidisset Sara fi- le droit d'aînesse si l'on n'y remédiait
,

lium .^gar -'Hgypliœ ludentem cum de bonne heure.


Jilio suo. Le teste hébreu ne particu- (H) Que son fils mourait de soif."]
larise rien il nous laisse à deviner si En supposant que la moquerie dont
;

le fih d'Agar se moqua de Sara ou d"I- Sara fut si choquée se passa à l'occa-
saac, ou du festin qui fut fait quand sion du festin qui fut donné lorsque
On sevra Isaac, ou de telles autres l'on sevra Isaac il faudrait qu'Ismaèl ,

clioses ou bien s'il fit trop le fami- eût été chassé à l'âge d'environ seize
;

lier et le supérieur avec Isaac, ou enfin ans. Que si l'on suppose que celte
s'il le voulut battre. Il y a des inter- mofjucrie fut de beaucoup postérieure
prètes qui ont là-dessus bien des pen- au festin, on augmentera d'autant
sr'es frivoles car ils croient que Sara l'âge qu'il avait en sortant de chez
;

vit, ou quismaél faisait des actes d"i- son père. Mais prenons la chose au
dolAtrie, ou qu'il poussait le jeu à des pis ne lui donnons que seize ans , ;

impudicités, ou qu'il voulait battre n'est-il pas bien étrange qu'à cet âge-
Isaac Hebrœi nonnuUi accipiunt
: de là sa mère soit contrainte de le porter
lusu idololalriœ , quasi widelicet idoln sur ses épaules, de le mettre sous un
f ingénient et colentem Isniaëlem 1^1-
arbrisseau de le lever, de le prendre ,

disset Sara .Aid i^enereum hune dans ses mains, et de lui donner à
Jiiisse lusum statuunt et detectio- boire ? Qu'on lise cet endroit de l'E-
nem turpitudinis. IVeque desunt qui criture, tout y porte , par rapport à
Isniaëlem fralri neceni molitum esse Ismaél l'image d'un eufant qui est ,

existiment (t8). Il faisait bien plus au maillot ou peu s'en faut. On ne


, ,

selon quelques-uns que le vouloir saurait sortir de cet abîme en suppo-


,

battre, car ils prétendent qu'il lui tira sant que ce fait n'a pas été mis à sa
un coup de flèche pour le tuer (19)- place; car il est expressément déclaré
que Sara fit chasser Ismaël parce ,
(i5) Gen{!se,XKA, 16.
qu'elle ne voulait point qu'il partageât
(16) Gen«e, X.X/, 5.
(17) Àpnd Hieronymnm cnp. XXI in Tra- ,
l'héritage avec
,
Isaac. Ismaël ne fut
dit. Hfbtaïcis. f^ide Salian. Annal., tom. I donc chassé qu'après la naissance d'I-
,

pag. 474* Cornélius à LapiJe, in Gènes., pag. saac; et par conséquent il devait être
iqq
, tient pour certain qu Isaac ne Jut set^re
qnà cinq ans Salian pag. 4^4 <^''* pour la aussi propre que sa mère à chercher
:
,
'

ii.e'ine opinion ^iit est la sienne, saint Jérôme,


, de l'eau et il n'était plus, oUi vûv ^fo- ,

Del Rio, Pererius. To« êiViv un petit enfant à être porté ,

(18) lieidejg. Hisl. Palriarcti. pne. 2o5.


(19) R. Eliezer, Pirlse, cap. , dans le XXX
même ouvrage d^Heideggçr qui cite aussi le (20) Lyranus , npud Pererium in Geue*. ,
,

Baat Halburim. cap. XXI.


, ,,

34^ AGAR.
sur les épaules, etc. (21). Je pre'vois sa vie. Quoi qu'il en soit nous ap- ,

que Ton me dira que la version des prenons d'Euthymius Zigabenus que
Si^ptantc , ni la Vulgate , ne diseat pas les Sarrasins honoraient et baisaient
qu'lsmaè'l ait été mis sur le dos d'A- une pierre qu'ils nommaient Brach-
gar , et qu'ainsi l'on doit conclure que than et que quand on leur en de-
, ,

le texte hébreu ne favorise pas nette- mandait la raison, les uns répondaient
ment ma supposition. Hé bien , aban- que c'était à cause qu'Abraham avait
donnons-la le reste du narré me suf-
: connu Agar sur cette pierre les au- ;

fit, et je m'en rapporte au jugement tres que c'était à cause qu'il y avait
de tous les lecteurs qui considéreront attaché son chameau en allant immo-
la chose sans préjugé. La meilleure ler Isaac (24)- 1^6 même auteur dit
solution serait peut-être de dire que que cette pierre était la tête de la sta-
comme Ton vivait plus long-temps en tue de Vénus, la divinité que les an-
ces siècles-là , on ne sortait pas de ciens Ismaélites avaient adorée. Le
l'enfance aussitôt que nous en sortons. formulaire des ana thèmes que doit
Voilà qui serait fort bien, s'il n'en ré- réciter un Sarrasin qui embrasse le
sultait qu'Ismaè'l avait vingt ans lors- christianisme confirme tout ce que
qu'il fut chassé; car il faut que, selon dit cet auteur; car il marque que cette
cette réponse , Isaac ait tété plus long- pien-e est une figure de Vénus (25) ,
temps que l'on ne tétait au siècle des et que les Sarrasins en parlaient com-
Machabées. Or dans ce siècle on tétait me d'une chose qui avait servi à Abra-
trois ans (aa) faudrait donc croire
: il ham pour ce que dessus. Par occasion,
avec saint Jérôme et avec plusieurs je dirai que la pierre qui était adorée
modernes la vieille tradition hébraï- par les Arabes , et qu'ils prenaient
que dont j'ai parlé; savoir que l'on ne pour le dieu Mars était toute noire et ,

sevra Isaac qu'à cinq ans. Je m'étonne toute brute To J'i a.yat.xy.et xi'Soç èç-J
:

que ceux qui la suivent (^S) ne sen- //.iKctç, TiTpii.yoi>voç , à.T!J7ra>T(tç. Stmula-

tent pas la difficulté ; car elle ne laisse cruni auteni est lapis niger quadra- ,

pas d'être grande , quoique l'on sup- tus nullam Jîgurani incisam hnbens
,

pose comme je fais qu'lsaac téta moins (26). Itidciis temporibus priscis Persas
de temps que les Machabées- Jlui'iuni coluisse... Informem .Arabas
(I) pierre sur laquelle ^gar. ]
La lapidem (27). Maxime de Tyr qui ,

Quels contes ! comme si Abraham ,


l'avait vue, dit seulement qu'elle était
qui était un grand seigneur et dont le carrée (28). La mère des dieux, que
train montait à plus de trois cents les Phrygiens adoraient avec un zèle
domestiques capables de porter les tout particulier n'était qu'une simple ,

armes, n'avait pas eu un lit à donner pierre et ils ne donnèrent qu'une


,

à une concubine de cette espèce Il ! pierre aux ambassadeurs romains qui


ne la prenait qu'à la sollicitation de souhaitaient d'établir à Rome le culte
son épouse; c'était Sara qui faisait en de cette divinité /* legatos comiler :

quelque manière les fonctions de pa- acceplos Pessinunteni in Phrygiam


ranymphe ; cela ressemblait plus à deduxit , sacrumqiie iis lapidem quem
des noces qu'à toute autre chose ; et matrent Deûni incolœ esse dicebant
l'on nous viendra dire qu'un tel ma- tradidit , ac deportare Roniam jussit
riage se consomma sur' une pierre ! (29). Quelque mauvaise que fût l'ido-
Ce conte serait bon à débiter s'il s'a- lâtrie de ceux qui adorèrent la pierre
gissait d'un maître qui aurait eu peur dont Jacob fît un monument qu'il
de sa femme, et que cent raisons au- oignit et qu'il consacra à Dieu (3oj ,

raient obligé à faire sou coup à la dé- (24) Euthymius Zigabenas, iV. Panopliâ, apud
robée partout où il en aurait trouvé Vossium Ae iOrig. Idol. Ub. II, cap. XXXI , ,

l'occasion, persuadé que s'il la laissait et M. VI, cap. XXXIX.


échapper pour attendre un meilleur ("25) ''E.x.TVTroi/j.it T«ç 'A<|)po<r/T>iç tAS^"' 5

ejffigicm Veneris habere. Vossius de Origine


gîte il ne la retrouverait peut-être de
,

Idololalrite, Ub. II, cap. XXXI, pag. 4(>7


edit. Francofurt.
(21) C'est-à-dire, de la manière que les gens
(26) Suidas, in SêOÇ ApHÇ.
sont faits aujourd'hui.
(27) Arnobius, Ub. VI , pag. igfi.
(22) La mère dfs Machabf'es dit à son fils (281 Maxim. Tynus D.ssert. XXXVI II
,
qu'elle l'a allaité trois ans. II Machab. , chap. pag. 384
ni, vs. 27.
(2q) Livius . Histor. . Ub. XXIX , cap. XI.
(23) Moréri est de ce nombre (3o) Gtnèse , XXVIII, v. ig.
AGAll. 247
elle plus tolérable que celle
était maël (35). Cette dernière pierre est
des Sarrasins ] car la pierre de Ja- enfermée dans un coffre de fer. Ah-
cob lui avait servi de chevet pen- med Ebn Yuscf se vante de l'avoir \ni
dant une nuit qu'il avait passée, pour et baisée et d'y avoir bu de l'eau du
,

ainsi dire, avec Dieu tant les songes , puits Zanzani et d'avoir pris garde
,

et les visions qui recoupèrent repré- que la trace du pied droit est plus en-
sentèrent les choses célestes. Les Sar- foncée que celle du gauche , et que
rasins n'auraient osé en dire autant les doigts y sont aiwsi longs que ceux
par rapport à leur prétendue pierre de la main (37). On cacha cette pierre
d'Agar. Scaliger a ramassé une éru- dans une des montagnes de la Mec-
dition très -curieuse touchant cette que lorsque les karmatiens firent mille
pierre de Jacob (3i) ; mais ce que le profanations dans le temple et eu en- ,

savant Pocock a dit touchant celle que levèrent la pierre noire (38). Or, puis-
les Sarrasins honoraient nest pas que Euthymius et le Catéchisme à l'u-
moins considérable. J'en vais rappor- sage des Sarrasins convertis remar-
ter quelque chose. quent que la pierre sur laquelle on
(K) Qu'un rapport très-éloigné en- prétendait qu'Abraham avait eu af-
tre Agar et celte pierre. ] Pour savoir faire avec Agar , ou à laquelle il avait
exactement leur religion là-dessus, il lié le chameau , était au milieu de l'o-
faut consulter Pocock (32). La pierre ratoire , in Ttiedio "oixou tÎç st//^JÏc ; ce
noire qu'ils vénèrent est au temple n'est point de la pierre noire qu'il
de la Mecque à l'un des coins, à deux
, faut entendre cela , car elle est fichée
coudées et im tiers de terre. Ils sup- dans un coin du temple mais de la :

posent que c'était l'une des pierres pierre où se voit la trace des pieds
précieuses du paradis , et quelle en d'Abraham. De plus , encore qu'au-
descendit avec Adam ; qu'elle y fut cun écrivain arabe ne dise que la
reportée au temps du déluge ; qu'elle raison pourquoi on vénère cette pier-
fut renvoyée au monde lorsque Abra- re est qu'elle a fourni à ce patriarche
ham bâtissait le temple ^ et que ce fut les usages dont Euthymius a parlé , il
l'ange Gabriel qui la mit entre les est à croire que la tradition rapportée
mains de cet architecte (33). Elle par Euthymius regarde plutôt la pier-
avait été au commencement plus blan- re où les pieds d'Abraham sont impri-
che que la neige et plus brillante que
, més que la pierre noire ; d'où l'on
le soleil ; mais elle devint noire pour doit conclure deux choses 1°. Qu'Eu- :

avoir été touchée par une femme qui thymius et le catéchiste des Sarrasins
avait ses mois. D'autres disent que les n'ont guère connu distinctement les
péchés des hommes lui flrent perdre erreurs de ces gens-là , par rapport
sa blancheur et son éclat d'autres : au culte des pierres; 2". Que les écri-
avouent qu'on l'a salie à force de la vains arabes ne reconnaissent point
baiser et de la toucher. Ce que saint de rapport prochain et direct entre
Jean Damascène et Euthjmius assu- Agar et la vénérable pierre de la Mec-
rent qu'on y a gravé une tète qui est
,
que. Agar n'y a que voir, qu'en tant
cellede Vénus serait fort difllcile à
, qu'Abraham y posa ses pieds, pen-
prouver par les livres des Arabes. Il dant que la femme d'Ismaèl lui lavait
y a une autre pierre qu'ils estiment la létc. 11 y a une troisième piei're
sacrée , et sur laquelle ils prétendent considérable à la Mecque elle e«.t :

que se voit une figure mais c'est une j blanche , et passe pour être le sépul-
figure de pied et non pas une figure
, cre dismaël ; elle est dans une espèce
de tète c'est la trace des pieds d'A-
: de parquet , proche les fondemens du
braham qui s'appuyait sur cette pierre, temple. De toutes ces choses ,on peut
ou en bâtissant le temple (34) ou pen- , recueillir qu'il est très-facile de trom-
dant que sa bru (35) lui lavait la tête per l'homme en matière de religion .

lorsqu'il eut été faire une visite à Is- et très-difficile de Fy détromper. Il


aime ses préjugés et il trouve des
,
(3i'i Animadv. in Eiiseb. , num. ai5o.
Scali^.
(3î) Pocockii T^otse in Specimine Historiar. conducteurs qui le favorisent là-de-
.\ral>., pas. Il3 et seq. dans et qui disent dans leur âme :

(33) yoyez la remarque (F) de l'article Abra-


ham. (.36) Ex Ahmed Ebn Ynscf , et SaCodino.
(34) Ex AbnUedS. 3-) Alimed Ebn "insef , in Viià Ismaélii.
(i.î) La femme d'Ismael. (38; V^jej. l'arlicle ABonaAHEit.
24^ AGATHON.
Quandoquidem pnpulus vult decipi voulait ôter /^ous ne prenez pas , :

decipiatur. Ils y trouvent leur comp- garde que vous arrachez Aga-
te et quant à l'autorité et quant au ,

thon à Agathon (k). Il fut le mi-


,

Erofit les plus de'sintéressés appré-


:

endent, loisque la maladie est inve'- gnon de Pausanias le Céramien ,

tére'e que le remède ne fût pire que et il le suivit à la cour d'Arche—


,

le mal. Ceux-ci n'osent guérir la plaie: laiis roi de Macédoine (Z]. Il se ,


les autres ne la voudraient pas guérir.
brouillait souvent avec lui mais
ainsi que l'abus se perpétue
;
C'est :

les malhonnêtes gens le protègent ;


c'était afin de lui procurer par la
les honnêtes gens le tolèrent. réconciliation un plaisir plus vif.
C'est ainsi qu'il s'en expliqua à
AGATHON poëte tragique et ,
ce prince , qui lui demandait la
poëte comique (A) disciple de ,
cause de leurs fréquentes querel-
Prodicus {a) et de Socrate (b) est ,
les , comme nous l'apprenons d'E-
fort célèbre par sa beauté dans les lien au chapitre XXI du second
,

Dialogues de Platon (c) , oii d'ail- livre de son Histoire diverse. J'ai
leurs on lui attribue un bon na- dit ailleurs (m) ce que l'on conte
turel [d). Il y a quelques auteurs de la passion d'Euripide pour Aga-
qui rapportent qu'il était fort thon. La réponse de celui-là est
honnête homme et que sa table ,
mal rapportée dans les diction-
était magnifique (e). Ils se fon-
naires historiques (B). Il semble
dent peut-être sur les festins qu'il que le scoliaste d'Aristophane
donna après que sa première tra- nous apprenne qu'Agathon mou-
gédie eut remporté la victoire fy), rut à la cour d'Archelaiis (C) et :

et qu'il eut été couronné en pré- l'on pourrait conclure des paro-
sence de plus de trente mille hom- les d'Aristophane qu'il ne vivait
mes (g-) l'an 4 de la 90^. olym- plus lorsque la comédie des Gre-
,

piade (h). Platon suppose que les nouilles fut jouée (D) c'est-à- ,

discours qu'il raconte sur la na-


dire l'an 3 de la^S". olympiade ,

ture de l'amour, dans l'un de ses Il ne nous reste d' Agathon (n).
livres (i) furent tenus le jour
,
que ce qu'on en trouve dans Aris-
d'après ce couronnement au se- tote dans Athénée etc. qui l'a- ,
, .
,

cond festin qu'Agathon donna. vaient cité. Ce sont d'assez belles


Les pièces de ce poète étaient si sentences et qui confirment ce ,

remplies d'antithèses qu'il dit que l'on a dit de sa passion pour ,

un jour à un homme qui les en les antithèses (E). J'en rapporte-


(a) Vide infer Plalonis opéra ejits Dinlo- rai un exemple oii l'on verra une
guin , cui titulus Protagoras pa^- 220. ,
maxime de très-bon sens sur la
(6) Scboliastes Aristophanis in Ranas , act.
I, scen. II.
tromperie des apparences (Fj.
(c) Plato in Protagorâ ,
pag. 220, et in
Qorxviv'w pag. wjb.
,
{k) jElian. Var. Hislor. , lib. XIV, cap.
(d) Plato m Protagorâ pag. 220. ,
XIII. Voyez aussi Athénée, V, p. 187. lib.

(e) 'Aynioç tÔv TpoTov x.!ti tjiv rp ÀTric^tti (l) Plato in Protagorâ, pag. 220; Athen.,

K-j.pi7rpiiÇ. Moribus bonis et niensd lautiis- ,


lib. V, pag. 216 ;]\la]iimus Tyrius, Sermon.

Scholiast. Aristoph. in Rauas, act. I, se. IT. X pag. Iû6 jEliani Var. Hist., lib. II,
, ;

cap. XXI.
Voyez aussi Suidas in 'A'^â.Sav.
{m) Dans la remarque (O) de l'article Eu-
(_/") Plato in Gonvivio , init. ,
pag. II74-
pag. ripide. Voyez aussi Sclioliast. in Ranas
(g) Id. ibid. ,
1 176.
V Aristophanis, act. I , scen. II.
(h) Voyez Athénée, liv. ,
pag. 217; et
Casaubon. sur Albén. pag. i'^. ,
in, Voyez Saniiic-1. Petiti Miscell. , lib. I,
(j, Dans son Convivium. cap. XIV pag ,
. 5o.
A G A T HON. 249
Aristophane beaucoup arle tragicus est esse quoque comi-
le satirise ,

du côté des mœurs dans l'une de cum. Je trouve assez vraisemblable


que l'on multiplie les êtres sans né-
ses comédies (o). Je crois que cessité
lorsqu'on nous donne un Aga-
nous devons distinguer de cet thon poète comique différent du nô-
le ,

Agathon que le philosophe Platon tre. C'est ce qu'ont fait Vossius (4) ,

aima tendrement (G). La faute Moréri Hofman etc. , ,

;B) La réponse d'Euripide est mal


de Budé fut sans doute volontai- rapportée dins les dictionnaires
histo-
re lorsqu'il dit dans le chapi- riques. ] Je la donne ailleurs (5) com-
,

tre XXV de l'Institution du Prin- me elle doit êlre la voici dans un ;

ce, qu'Euripide, à la table d'Ar- frand désordre Agalho phUosnphus :

ythagoricus , Jrequens antilhetis


chelaiis , baisa une dame qui avait adhibitus quondhm convivio ab Ar-
,

nom la belle Agathe. chelao Rege cujus erat fnmiliarissi-


,

(o) In Thesmophoriazuzis.
mus , interrogatusque ab eo , tiimjam
esset annoruni octoginta , si robur ad-
(A) Poète tragique , et poète comi- huc uUuin seri'arei? Sanè, inquit <(
,

que. ] Personne ne doute qu'il n'ait » non soliim fer sed autumnus snlet
,

fait des traf;edies il suffit donc de :


» bona et prosperitatem adferre ^6,. »
prouver qu'il a fait des comédies. J'ai Comptons les fautes. i°.L'Agathonqui
à citer là-dessus le &coliasfe d'Aris- aimait les antithèses et qui fut à !a ,

topiiane sur la 11*^. ^*ène du I*'". acte cour d'Archelaiis n'était point py- ,

des Grenouilles. O^toç ô 'AyâBcev icu- thagoricien. 2". Il n'avait qu'environ


/t/.a'<rt.^oioçTo!/2aj)tpâT(j[/5 (TitTats-xi^ot/. Hic quarante ans lorsque Archelaiis donna
agathon comicus Sacrale doctnte. ,
lieu à la réponse dont il s'agit {•]).
NotPZ(ju'il parle du même poète qui 3°. Ce ne fut point Agathon mais ,

est l'un des interlocuteurs de Platon Euripide qui fit la réponse. 4°- La
dans le qui très certaine-
Festin , et question ne roulait point sur la force,
ment composa des tragédies. Je cite mais sur la beauté et la réponse ne ;

aussi ces paroles de Philostrate , Ksti roulait pas sur les biens de la fortune.
^A-j-itSajv (Tê Tïiç Tfo-yaiSictç TTotinriiç 5°. Ce serait une absurdité que de
, ôv
« Kce/ucifiA trocfijvri x.a.i n^tWiiTt» cTcTê , prendre pour l'automne de la vie l'âge
7rt,K>.etX^'J TûJV lu/^.Silccv TopyiÂi^ii (i). de quatre-vingts ans. 6°. Je ne pense
Enimuerà etiam ^galho tragicus point qu'aucun philosophe de la secte
,

quem comœdia sapientem et elegantem de Pjthagore se soit nommé Agathon.


agnoi'it in ïanibis suis sivpè Gorgiœ Toutes ces fautes de Charles Etienne
,

sljluni imitaiur. Je sais bien que ces se rencontrent dans la seconde édi-
paroles peuvent signifier qu'on le loua tion de Lloyd , et l'on y voit même
dans les comédies^ mais elles peuvent plus exactement marqué le prétendu
aussi être prises en ce sens: c'est qu'il témoignage dElien (8). Cette exacti-
fit paraître son habileté et son élé- tude nuit à l'auteur ^ car puisqu'il ,

gance dans les comédies qu'il com- n'ignorait pas en quel chapitre se pou-
posa. Un docte critique conjecture vait trouver la chose , il est plus inex-
que c'est en faveur de notre Agathon cusable d'avoir copié tous les menson-
que Socrace dit qu il appartient à un ges du dictionnaire qu'il corrigeait.
même liomme de composer des tragé- M. Hofman l'a suivi lettre pour lettre,
dies et des comédies et que si quel- et a distingué de cet Agathon celui
5

qu'un ))ossède l'art des tragédies il qui alla à la cour d'Archelaiis. M. Mo-
,

est dès là poè'te comique {•!) Tou o-Ùti^u réri a parlé aussi d'un Agathon philo-
ivéf,oç eivoti Kccy.Cf>Si<tv Kett Tpa.yaiSia.v ÎTri- sophe pythagoricien qui à l'îige de ,
,

ç-ctî-âcti 7r(jlHt , Kttt TOV T£/^V>l Tpa') Cixf'o- quatre-vingts ans , répondit à ce mo-
5T0I6V ovTat Kxi Kceuaié'oTrrAO)/ eîvsti (3).
(4) Vossius, de Poetis Grœcis, pag. Sf), 5o.
£jusdem ojjicium esse tragœdiam
l'iri
(5) Dans la remarque (O) de l'article Eom-
comœdicwujue componere , euvique qui PIDE.
Agatbo, p. 117.
(6) Caroliis .Stcplianus in l'oce
(i) Pliilostr. de Viiis Sophist. , Itb. I. (7) Vo^ei la remarque (0) de l'article Euri-
(2) Kulinius, m
^liani Var. Hislor. , lib. II, pide.
cnp. \XI,
/Jig, 104. (8) -îlian. Var. Histor., Ub. XIII, cap. IF,
(J) Plato m
Convivio , in fine , pag. 1207. Lla,>d, t'oce ÀcATUO.
,

aSo AGATHON.
qu'il soit certain qu'Agathon poète
narque que l'automne donne des fleurs
et des fruits aussi-bien que le prin-
tragique diffère d'Agathon poète co-
temps. Il parle ensuite d'A gathon poète mique. M. Moréri, selon sa coutume,
tragique, et d'Agathon poètecomique. a copié Vossius. Je m'étonne que M,

(C) Qu'Aî^nthon mourut h ta cour Kuhnius n'ait pas allégué ceci :

d'Archelaiis.'] 'Ap;^^^*'?' ''"'? f^3"'>'S( ,us- ύ Toiov^ioct


To ;MSV Tripipyov 'îfiyov
Ta <r' «p-j/ov eèç Tripipyiiv «jcTTovon/zê-
Mo-KêtTov/çi (9) : c'est-à-dire , il demeu- (16).BcL
ra a^ec plusieurs autres dans la Ma- Operis loco ducimus accessorium,
cédoine auprès du roi Archelaiis jus- El in opère sataginnis ut accessorio,

qu'à sa mort. Cela peut signiGer ,


(F) Une maxime de très-bon sens
ou jusqu'à la mort d'Archelaiis , ou tromperie des apparences. ]
sur la
jusqu'à la raortd'Agathon. C'est pour-
Agathon observe qu'il est vraisem-
quoi je ne donne point ces paroles
blable que plusieurs choses arrivent
comme une preuve certaine.
qui ne sont pas vraisemblables. Eluo;
(D) Qu'il ne i'ii'ait plus lorsque la TO P'eri-
yivi^ban TroKKai iccii TTstfà. iix.lç.
comédie des Grenouilles fut jouée. ]
simile est et multa fîeri prœter veri
Nous y trouvons ces trois vers :

simile. C'est ainsi que Vossius rapporte


H P. 'A-^iâffiv ifs wot/Viv \
A I. à;roM- cette sentence et il observe qu'Aris- ,

tote l'a alléguée en plus d'un endroit


( 7). Voici de quelle
i manière ce grand
XCilç. philosophe l'a (ftée dans le chapitre
H P. nor-j.îtc ô Thrty.oùv ; A I- U fj.ttKo.- XXIV du IP. livre de sa Rhétorique.
fûùV iùùsX'"-'' (10).
me, Ta.pc *^ '''f "'*°5 ttÔTO rour ùvitt Xs")/!)!,
Hb. Vbi ver'o est Jgalho ? Ba. Beliquil
et abiil BpoTo7o-( 7ro^^à TvyXÂvuv eux, imô-
,

Ponui poêla el amicis optalissimus.


, Tct (18).
Hb. Quà abiil miser? Ba. Ad bealorum con- Parlasse aliquis verisimile id ipsum esse
i'iviwn. dixerit ,

Morlalibus multa evenire non verisimilia.


(E) Qui confirment ce que l'on a dit
de sa passion pour les antithèses. ] On peut comparer à cette maxime
M. Kuhnius a rapporte trois .sentences celle de saint Bernard Ordinatissi- :

d'Agathon dans la vue de faire sentir mum est miniis inlerdiim ordinale ,

ce goût (11). Les deux premières ont fieri c'est-à-dire , il est tout-à-
(19) :

ete' citées par Aristote et l'autre par


fait de l'ordre que de temps en temps
,

Athénée. Le sens de celle-ci est Si il se fasse quelque chose contre l'ordre. :

je i^ous dis la uérité je ne vous plairai M. de Balzac rapporte si mal cette


,

point; et si je vous plais., je ne vous di- pensée d'Agathon qu'il fait d'une ,
rai pas la vérité {j-i). Celles qu'Aris- très-belle maxime un mensonge af-
tote allégua signifient l'une que la freux. Combien que les affaires du
, ,

seule chose qui est impos.sible à Dieu , monde dit-il (20) changent quelque- , ,

est de faire que ce qui a été fait n'ait prenant un autre che-
fois de cours ,

été fait (i3) l'autre que la fortune min que le leur accoustumé
:
, et que ,

aime l'art et que , l'art aime la for-


cela seulement soit vraisemblable, ain-
tune (i4-) Vossius s'est imaginé que
si que disait Agathon, que beaucoup
cette dernière sentence est d'Agathon de choses arrivent contre la vraisem-
le comique (i5) mais il eût mieux,
;
fait
blance toutes fois, communément par- ;

de la donner au tragique et de pren- lant semblables entreprises produi- ,

dre garde que l'esprit d'antithèse la sent semblables événemens. L'adverbe


lui adjuge. Je dis ceci , sans prétendre seulement produit là un monstre et, ;

Cg) Sdiol. Aristoph.io Ran.


net. I, scen. II. si c'était une faute d'impression (2 1 ), je
,

(10) Aristoplian. in Eanis, acl. I ,


scen. II ,

vs. 46. (16) Agatli. apud Attien. , lib. V, initia.

(il) Guflnm anlilketorum Agathonir dare (ir) Vossins , Institut. Poetic. , lib. /, p. 16.
lib. XIV, cap. f i8) AsatVi. apud Arist. Rlietoric. lib. II,
pov.tumuî. Kuhnius iu JLliani ,
,

XIII, pag. 735. ca XXIV, pag. 448.


(i2)Atlien. , Ub. V, cap. XII I , png. 0.11. (19) Berna rdiEpisl. CCLXXVI zi^a^ea. Ht.
(20) Balzac , dant son Prince num. 1^2
Ct3) Arist. Ethic. Euderaior. , lib. V, cap.
, ,

II , pas- 182. png, 100 Édit. de Rouen, en iGSi in-4- ,

cap. pag. 18?. IV (51) Seulement, au lieu de sflrement. Notrz


(4) Id. ibid. , ,

(i5) Vossius, (le Poëtis Giacis , pag. Sg. qiiil j a des gasconitmes ou seulement signijie
,
,

AGATIION. 25r
m'étonneraisqir lin correcteur d'impri- ditm non est meliora proponc... nihil
merie n'en eût pas été épouvanté. Car tam ceitum est ex his (jucv timentur ut ,

qu'y a-t-il de plus énorme que de sou- non certius su et formldota sitbsidere
,
tenir qu'il n'est jamais vraisemblable et spernta decipt-.re {i'i). Le cardinal
qu'une chose arrive conformément à Pallavicin s'est fort emporté contre
la vraîlemblance ? Voilà le bel axiome Fra-Paolo qui a pris la réception de
,

que l'on prête à notre Agatlion dans ladoctrine de Zuingle par les cantons
le Prince de Balzac; mais la suite du evangéliqurs comme une preuve ma
,

discours témoigne que si la pensée de qu'une cause plus relevée que


nifesfe
ce poète a été gâtée sur le papier, Zuingle s'était mêlée là -dedans. Je
elle ne l'a pas été dans res[)rit de laisse là les réflexions du Pallavicin ^
l'écrivain il est sûr ({ue Balzac a
: mais je copie ce qu'il emprunte d'A-
voulu dire avec Agatbon que cela ,
ristote ,
qu'il arrive quelquefois que
MÊME est vraisemblable, que beaucoup les choses les plus probables sont faus
de choses arriuent contre la vraisem- ses ; car , si elles étaient toujours sé-
blance. Euripide trouvait si beau cet parées de la fausseté , elles seraient
aphorisme qu'il l'a répété cinq fois ;
,
certaines, et non pas probables. Vous
car dit M. Cosfar (2a) il a fini sa
, ,
allez voir qu'on se fonde sur cette
Médée son Alcesle , son Androma-
, maxime pour accuser de témérité et
que ses Bacchiques et son Hclène
, de présomption ceux qui se mêlent de
par cette sentence (*) « Les dieux se : juger de la providence de Dieu. Un
') jouent de la prévoyance des hom- tel est chrétien et dévot; donc il est
« mes , et trompent également leurs prédestiné au salut un tel est maho- :

M espérances et leurs craintes. Ils dé- raétan et scélérat ; donc il est pré-
» tournent quelquefois des évënemens destiné à la damnation. Conséquences
« que tout le moude attendait ; et, ou- téméraires, puisqu'elles trompent quel-
le vrant des passages et des chemins quefois. C'est le cardinal Pallavicin
» inconnus , font réussir des desseins qui le remarque; voici le passage tout
)) apparemment impossibles. » Séné- entier Per tanto chi ascrive le pres-
:

que s'est très-bien servi de cette pen- perita délia nùglinr causa ad una uo-
sée pour rassurer ceux qui s'étonnent lonta die Dio habbia difarla slnhil-
des approches a[)parentes et très-pro- mente prevalere alla rea ; discorre cou
bables de la raaiivaise fortune Com- : pieta probabile e saggia quantunque :

bien de choses dit-il , sont arrivées


,
lalora s'inganni , secondo l'insegna-
que personne n'attendait ; combien mento del filosofo che taluolla il pili
;

d'autres n'ont jamais paru , quoique probabile èfalso , percioche se dajal-


tout le monde les attendu ? Il n'y a sitafosse csente , non saria probabile
rien de si assuré parmi celles que l'on ma cerio. E
se basta il potersi ingan-
redoute , qu'il ne soit encore plus cer- nare accioche ogiii giudicio, quantun-
tain que nos craintes et nos espérances que dubitatii-'o délia rovidenza divi- P
n'ont quelquefois aucune suite. Les pa- na chiatuisi presontuoso ; chiamerassi
roles de Séntque ont plus de force il ,
presontuoso chiunque daW haverlo
vaut mieux les copier f^erisimile est : DioJ'alto nascere J'ra' Cristiani e viver
aliquid futurum, mali ? JYon statun divotaniente , prende conghieltura che
verum est. Quant multa non exspec- l'habbia destinato alla vila eterna ; e 'l
tata venerunt quant multa exspectata
,
contrario s'awisa di chi nacque Sara-f
nunquam comp/iruerunt !... multa in- ceno e vive scelerato : essendo nia/ii-
terveniunt quibus vicinum periculum j'esto poler succedere che il primo si
t^el propè admotum , aitt subsistât , aut danni e 7 secondo si salvi {1^).
,

desinat,autinalienumcaput iranseat Is'on-seulement les médecins doivent


habet eliam niala fortunn levitatem : profiter de la sentence d'Agathon
J'ortassè erit ,Jortassè non erit. Intérim mais aussi les nouvellistes. Un profes-
seur de Leipsick exhorte les médecins
même. Vuyei les Remarques de Vaugelas tom. ,

II pag- 180. à ne parler qu'avec beaucoup de pré-


,

(22) r.oslar, suite de la Défense de Voiture, caution , s'ils veulent faire honneur a
pag. 406. la médecine. Il veut qu'ils ne promel-
(*) no?vXà <r' àsATTaiç KpttîvoiiiTt ètol.
Ka.1 T«t J'oKMÔévT' oÙk niKîa-Oït t*v «T' «(To-
(iT.) Seneca , Epist. XXI^,
pag. 187.
(2/j) Pallavicini, Istor. dfl Concilio, lib- III,
HilTW» -TrifOV iÙflV èidç. C(J/'. y/Il pag. 3o3.
,
, ,

552 AGATHON.
tcnt point trop, qu'ils n'époui^antent que eodem tempore faciendis prcelu-
pas aussi excessii'ement, et qu'ils par- deret :

lent toujours conditionnellenient , et


T«v '\,uXnv 'A'j/â.Soeva. <^i^âv i7r\ X^'^~
ai'ec un peut-être (aS). Tout cela , ea , 3

vertu de la maxime de Sënèque


qu'on a vue ci-dessus. On peut donner
un semblable avis aux grands raison- V). (27).
neurs sur les nouvelles je parle des
:
Hoc distichon amicus meus oÙk ajuouo-^ç
raisonneurs qui ont beaucoup de sa- adolescent in plures fersiculos licen-
gacité et beaucoup de jugement. Ils tiiis liberiusque t^ertit : qui quoniam
devinent juste en mille occasions il :
mihi quideni tnsi sunt non esse me-
leur arrive cent fois l'année de n'avoir
moralu indigni , subdidi.
pas lieu de se repentir du ton décisif
avec lequel ils se sont moques des es- Diim semihulco savio
Meum pupllutn savior ;
pe'rances ou des menaces des gazetiers. Dulcetnquejlorein spirîtus
Cela les rend plus hardis à rejeter Duco ex aperlo Iramile :

magistralement toutes les nouvelles Animula tegra et saucia


Cucurrit ad labias iniki ,
qui choquent la vraisemblance; mais Bictiimque in oris perviutn ,
ils s'y e'chaudent quelquefois car l'e'- : Et labra pueri tnollia ,
venement confirme en quelques ren- Rimata ilineri transitas ,
Lit transiliret nititiir.
contres les nouvelles les plus imperti- Twn si inorœ quid pluscuîœ
nentes et les plus extravagantes qui Fuissel in cœtu osculi :
se puissent débiter, et qu'ils avaient j4inoris igni percita
Transtsset, et me Unqueret;
condamnées comme des chimères ou Et mira prorsiim res foret ,
comme des démarches incompatibles Ut ad me Jierein tnortuus ,
avec la sagesse qui a tant paru daus le Adpuerum al inius viverem.
conseil d'un ëtat. Celte règle se dé-
ment; elle attrape les raisonneurs qui Notez que Platon n'était âgé que de
s'y lient trop. Il est donc de la pru-
quatorze ans lorsque notre poè'te Aga-
dence d'aller un peu bride en main thon remporta le pris de la tragédie
(28) il n'y a donc pas beaucoup d'ap-
,

et de ne pas prononcer des arrêts dé-


:

finitifs sous prétexte que l'on a pour


parence qu'il ait soupiré pour lui ce :
,

soi les apparences les plus plausibles.


fut pour un Agathon beaucoup plus
Mais si, même dans ce cas là, il est jeune.
juste de ne point faire le dictateur, (27) Notez que Diogène Laërce , liv. III ,
quel blâme ne méritent pas ceux qui nuni. 32 , en rapportant ces deux vers grecs ,
dit iju'ils furent faits par Platon , pour Asa-
se mêlent de promettre , contre tou- thon. On les a traduits ainsi dans l'édition
tes les apparences les plus grands
, grecque-latine de Diogène Laërce :

succès et de publier ces promesses


, Suavia dans Agatlioni , animam ipse in labra
comme fondées sur l'Apocalypse ? tenebam :

jEgra etenim properans tanquàm abilura fuit.


(G) Cet ylgatlion, que le philosophe
Platon aima tendrement.'} Ce philoso- (28) Atben. , lib. y, cap. Xrill,p. 217.

phe fit un distique tout-à-fait tendre


et si plein de sens qu'un poète latin
, AGÉSILAÙS ,
premier du
y trouva de la matière pour dix-sept nom de Sparte , succéda à
, roi
vers. Rapportons ici tout un chapitre
d'Aulu-Gelle (26) Celebranlur duo
:
son père Doryssus , qui était le
isti grceci l'ersiculi multorumque doc-
,
cinquième roi depuis Eurystliè-
torum hominum memorid dignanlur, nes. Le règne de cet Agésilaiis a
quod sint lepidtssimi et uenustissimœ été fort long (A), et néanmoins
hrevitalis. JVeque adeo pmici sunt ve~
il ne fournit presque rien à un
teres scriptores qui eos Platonis esse
,

philosophi offirniant, quibus ille ado- auteur. Les histoires de ces temps
lescens luserit, quiim tragœdiis quo- si reculés {a) ne se sont pas con-

servées. Pausanias ne devait pas


(25) BibliotliéquR Universelle , tom. XI f
pag. 80, 81 dans l'extrait (if.c Miscellanea cu-
, {a\ Le règne d' Agésilaiis commence l'an du
riosa Medica de Christianiis Langius. monde 3992 , selon Helvicus , 2/j ans après
(ï6; Le XI'. du XIX'. li^re. la mort de Salomon.
,,,

AGÉSI LAUS. 253


dire que Lycurgue ait donné des de mauvaise raine et boiteux (B), ,

lois à Lacédémone (B) sous ce rè- il acquit à juste titre la réputa-


gne {b). Charles Etienne Lloyd tion d'un grand capitaine. Il était ,

et Hofuian confondent cet Agé- brave, vigilant, prompt il mé- :

avec Agésilaiis II
silaiis car : ils nageait bien ses avantages , il pro-
disent de ce dernier qu'il fut le fitait bien des occurrences , il en-
sixième roi de Lacédémone. tendait toutes les ruses de la guer-
(b) Pausan. lib. III pag. 82.
re , et il s'était mis sur un pied
, ,

qu'il trompait ses ennemis lors


(A) Son rè^ne a été fort long.'} En même qu'il leur faisait savoir ses
disant cela je défère plus à l'autoi-ité
,
véritables intentions (C). Il n'é-
d'Euièhe qu'à celle de Pausanias. Ce-
lui-ci assure que Doryssus et son fils taitpas bien aise qu'ils ignoras-
Agésilaiis n'ont fait que se montrer sent le métier des armes; car il
sur le trône A oKiyt^u o-^olç ro Xp-"'^
:
ne savait alors comment les faire
s^-êXstCêv iy.^t^rîpwç. Mors brevïulruni-
que oppresiit (i); mais Eusèbc les fait donner dans le piège (b). Il sa-
régner soixante-treize ans il donne vait aussi tromper ses propres sol-
:

vingt-neuf ans au règne du père et dats en substituant aux mauvai- ,

quarante-quatre au règne du fils. Cal- ses nouvelles qu'il recevait une re-
visius cite Pausanias pour cette du-
c'est bien choisir ses témoins.
lation supposée d'un grand triom-
rée :

(B.) Que Lycurgue ait donné des phe (c). Cela vaut la peine d'être
lois a Lacédémone.'] Meursius prouve remarqué afin de désabuser ceux ,

dans ses Antiquités de Lacédémone


qui croient que ce n'est que de- ,

que Lycurgue publia ses lois l'an tren-


tième d'Archelaiis, fils et successeur puis l'invention de la gazette que
d'Agésilaiis. l'on trompe le public. Dès qu'A-
(i) Pausan., lib. III pag. 82. gésilaiis fut sur le trône, il con-
,

seilla aux Lacédémoniens de pré-


AGÉSILAUS second du nom venir le roi de Perse, qui faisait
,
,

roi des Lacédémoniens était fils de grands préparatifs de guerre,


,

d'Arcliidamus. Il avait peut-être et d'aller l'attaquer dans ses états


assez d'ambition pour souhaiter pour cette expé-
(dj. Il fut choisi
•de régner à l'exclusion d'Agis, son dition et il remporta tant d'a-
,

frère aîné; mais, quoi qu'il en vantages sur l'ennemi que si , ,

soit, on ne s'aperçut qu'après la la ligue que les Athéniens et les


mort d'Agis qu'il eût envie que Thébains avaient fonnée contre
pour l'amour de lui on troublât , Lacédémone n'eût traversé ses
l'ordre de la succession. Cette en- entreprises aurait porté ses ar-
, il

vie eut tout le succès qu'il pou- mes victorieuses jusqu'au cen-
vait attendre; car on fit l'injus- de la monarchie des Perses. tre
tice à Léotychide (A) fils d'Agis renonça de bonne grâce à tous
, Il
de l'exclure de la couronne en ces triomphes pour venir au se-
faveur d'Agésilaiis (a). Celui-ci cours de la patrie, et il la tira
répara , par un grand nombre de d'affaire très-heureusement par
belles actions , ce qu'il y eut d'ir- la bataille qu'il gagna sur les al-
régulier dans cette première dé-
marche; et tout petit qu'il était (i) Plut, in Agesilao pag. 617, E- ,

(c) Id. , pag, 6"o5. Xenophoa de Rébus


(n) Ceci arriva , selon Calvisius, l'an 3 de Graec, lib. /f', pag. 224.
la gS'. Olympiade. (c/) Coruel. Nepos in Agesil. Vitâ, cap II.
,

5.54 AGÉSI LAUS.


liés Béotie (D). Il en ga-
dans la Il rendit de grands services à ce
gna une autre auprès de Corinthe Nectanabe, après quoi il voulut
(e); mais il eut ensuite le déplai- s'en retourner à Lacédémone ;
sir de voir les Thébains rempor- mais il mourut de maladie en che-
ter des victoires signalées sur ceux min , l'an 3 de la io4^. olym-
de Lacédémone. Ces malheurs piade (E). Il était âgé de quatre-
l'exposèrent aux murmures de vingt-quatre ans dont il en avait
,

bien des gens; mais après tout , régné quarante-un (h). M. Mo—
ils n'obscurcirent point sa gloire. réri a fait ici quelques fautes (F).
Il avait été malade pendant les Nous verrons dans l'article de
premiers avantages que l'ennemi CoxoN si Cornélius Népos et Jus-
remporta (f); et lorsqu'il fut en tin ont fait leur devoir sur l'his-
état d'agir, il arrêta par sa va- toire d'Agésilaùs. Ce prince ne
leur et par sa prudence les suites voulut jamais souffrir que l'on fît
des dernières victoires des Thé- son effigie, soit en bosse, soit en
bains de sorte qu'on crut que,
: plate peinture (/), et il le dé-
s'il avait été en bonne santé au fendit même par son testament.
commencement, on n'aurait pas Quelques-uns ont cru qu'il en
eu du pire, et que sans lui tout avait usé de la sorte parce qu'il
aurait été perdu à la fin {g). On n'ignorait pas sa laideur , dijjfi-
ne peut nier qu'il n'aimât la guer- dens formœ suce (m). Jamais per-
re plus que l'intérêt de ses sujets sonne n'a vécu dans une plus gran-
ne le demandait (A); car, s'il eût de simplicité que lui (G). Mais il
pu vivre en paix, il eût épargné savait très-bien loger l'esprit , le
à sa patrie beaucoup de pertes , cœur d'un souve-
et la religion
et ne l'eût point engagée à des rain (H) sous cet extérieur de re-
entreprises qui ne se terminèrent forme et sous cette frugalité phi-
,

que par une extrême diminution losophique. Il avait une si grande


de la puissance des Lacédémo— tendresse pour ses enfans, qu'il
niens. Cette avidité insatiable de s'amusait avec eux aux exercices
guerres et de combats le poussa les plus puériles (I), comme est
sur ses vieux jours à une chose celui d'aller à cheval sur un bâton.
qui fut généralement désapprou- Il ne sera pas inutile de remar-

vée (^'). Il avait plus de quatre- quer le peu de cas qu'il faisait de
vingts ans lorsqu'il entrejjrit de ceux qui tiraient beaucoup de
mener des troupes en Egyptepour gloire de nourrir et de dresser des
soutenir Tachus qui s'était soule- chevaux pour la dispute du prix
vé contre les Perses. N'étant pas aux jeux olympiques. Il voulut
content de ce Tachus il l'aban- leur faire voir que ce n'était pas
,

donna pour se jeter dans le parti grand'chose et que c'était une ,

de Nectanabe parent de Tachus. affaire de dépense et non pas une


, ,

(e) Ex' Cornelio Nepote, ibid. preuve de mérite et de vertu et ;

(f) Plutarch. in Agesil., pag. 61 1, B. pour cet effet il persuada à sa


(g) Tialem se imperaloretn prœbiiit , ut eo
tempore omnibus apparuerit, nisi illej~uis- (A) Plut, in Agesil., pag. 617 , 618 Corn.
;

set ,Sparlam futuram non fuisse. Corael. Nep. in Agesil.


,

Wep. , in Agesil. Vitâ, cap. VI. (/] Plut, in Agesil. circa init. Voyez aussi
(h) Plul. in A^esilao pag, 611 B-
,
, Ciceronis Epislol. ad Famil. XII , lib. V.
(ij IJ ibiJ. 'C.
, , (m) Apuleius in Apulogiâ , pag. 282.
,

AGÉSI LA US. 255


sœur d'aspirer à cette victoire [ji). ner son fils, entre les dents, le nom
à
d'Alcibiade, plutôt que celui de Le'oty-
Cette dame , ayant fait dresser des chide (a) il n'y aurait eu rien à con-
,

chevaux à cet exercice, se mit sur clure juridiquement de ce fait-là en


fa-
les rangs et gagna le prix. Ce veur d' Agesilaiis. Il aurait fallu savoir
,

de Timéa même ce qu'elle entendait


fut la première femme qui rem-
par ce langage
porta cette gloire (o). Elle s'ap- bon ou par (3) et si c'était tout de ,

bravade ou par une folle , ,


pelait Cynisca. Je ne crois pas que plaisanterie, qu'elle l'avait employé.
Dicéarque l'ait ignoré, lui qui se Bien moins aurait-on pu alléguer l'in-
plaignait de ne trouver pas quel discrétion d'Alcibiade, s'il eût été
vrai qu'il se vantât d'avoir eu
était le nom de la fille d'Agési- afiàire
à Timéa, non par un principe de ga-
laûs (K). Il l'aurait su s'il avait lanterie niais par l'ambition
de don- ,

fait ce que fit Plutarque (L). ner des rois à Lacédémone (4). Cent
raisons comme ne devaient
celles-là
(n) Plutarclx. in Agesilao , peig^. 6of>, D.
point balancer l'acte Agis j)ar lequel
(o) Pausaa., lib.III ^ P"g- 88 et 96.
au lit de la mort, et en présence de
bons témoins avait reconnu Léoty-
(A) Onjîl l'injustice a Léotychide ,
,

chide pour son fils. La seconde raison


etc.] On ne peut qualifier autrement
d'Agésilaiis était une badinerie; car
la manière dont il fut traite, si Ton en
que Neptune soit tant qu'on voudra la
examine bien les i-aisons. Agesilaiis
cause des tremble-terres comment
ne niait point que, selon les lois du ,

auraiton prouvé qu'Agis n'osa plus


pays la couronne n'appartînt aux
,
coucher avec Timéa depuis le trem-
iils de son frère mais il soutenait que
;

blement en question ? Un accouche-


Le'otychide n'était pas fils d'Agis; et
pour le prouver, il se servait de ces
ment postérieur de dix mois (5) aux
dernières caresses d'un mari ne fait
deux moyens. Il disait en premier lieu,
poin t de preuve eu j ustice la maxime,
queTiméa, mère de Le'otychide, s'e'tait ;

Pater est quem nuptiœ demonstrunt


tellement coifiée d'Alcibiade ,
qui s'é- ,
et les décisions niêuie des médecins
tait réfugié à Lacédémone, que son ,
dissipent tous ces ombrages. Ainsi
mari soupçonna que l'enfant qu'elle
l'on peut dire que ceux de Lacédé-
eut quelque temps après n'avait point
d'autre père que ce galant. Cela re-
mone ,
gens qui se piqnaientd'une mo-
rale tout-à-fait sévère, ùtèrentune cou-
gardait Le'otychide c'était lui que
:

ronne pour des raisons qui seraient


Timéa mit au monde vers ce temps-là 5
insuffisantes dans un tribunal bien ré-
c'était lui qu'Agis n'avait reconnu pour ,

glé, à exclure de la succession d'un ar-


son qu'au lit de la mort. Agesilaiis
fils
pent de terre. Mais le malheur de Léo-
alléguait en second lieu le témoi-
, ,
tychide fut que Lysander le plus
gnage de Neptune. Il disait qu'A- ,

intrigant, le plus fourbe, et le pluss


gis avait été chassé du lit de sa fem-
factieux de tous les hommes, accrédi-
me par un tremblement de terre et ,
té dans la ville à proportion de son
que Timéa était accouchée de Léoty-
savoir-faire, et des victoires qu'il avait
chide plus de dix mois après (1). Ces
gagnées sur les ennemis, se mit en tê-
deux raisons ne valaient rien la maxi- :

te de faire couronner Agesilaiis (6). U


me, Pater est queni nuptiœ demons-
n'y a point de loi fondamentale qui
trant les ruine de fond en comble.
,

puisse tenir contre de pareilles gens


Si toutes les fois qu'un mari prend
,
:

quelque ombrage de voir son épouse (2) Duris,apud Plularcli., in Agesilao, p. Sq'j.
sensible aux visites et aux tête-à-tête (3) Selon les maximes du droit, le léiaoi-
d'un étranger, il fallait exclure de la gnage qu'une personne porte contre elle-mém*
n''eft point reçu.
succession lesenfans qui naissent vers
(4) Plut, in Agesilao, pag. 214.
ce temps-là, où en serait-on? Ainsi, (5) Notez que les anciens donnaient dix mois
»[uand même ce qu'a dit un historien au terme de l'accouchement,
serait vrai,que Timéa ne faisait point Matri longa decemtulerunt fastidia menses.
de scrupule devant ses femmes de don- rorez Virgile, Ecl. I T, vs. 61 et La Cerda sur
,

cet endroit.
(i) Ejc Plut, in Agesilao, pag. 597; el Xe- pa^. $97; Xenophor,
(6) Plut, in Agesilao, irÉ
u.i.h. de Rrb. Graec. , l,b. III, pa^. Ï14, de Ûebus Gra:cis, lib. III pag. 3i4-
,
256 AGESILAUS.
lleguez-leur la loi divine, ils Texpli- minuit prœsentia famnm r\t fat plus
[uent à leur mode. C'est ce que fit
qu vrai qu'à son égard. Sa renommée l'a-
.ysander quand il eut appris
Ly -
qu'un -
vait préce'dé en Egypte , et l'y avait
. , , - . .

prophète de Lacédémone voulait faire représente' sous les idtrs les plus pom-
valoir en faveur de Léotychide un penses. Dès qu'on sut son débarque-
oracle qui défendait aux Lacédémo- ment, on courut en foule pour le voir :

nions de laisser régner un boiteux, jugez de la surprise où l'on fut en


Cela, dit Lysander, ne regarde pas les voyant un petit bout d'homme , cou-
déjauts du pied , mais les défauts du ché sur l'herbe, mal habillé, mal-
sang , et ce serait Léotychide qui Je- propre. On ne
se put empêcher de ri-
rail clocher votre royaume, lui qui re , et appliquer la fable d'une
de lui
n'est pas de la race de i^os rois. montagne qui enfante une souris (t3).
(Bj Tout petit qu'il était, de mawai- Le mépris ne diminua point lorsqu'on
se mine, et boiteux.^ 11 était tout le efttvu ce qu'il choisit parmi les rafraî-
premier à faire des railleries de sa chissemens que le roi lui envoya (i4).
mauvaise jambe (7) , et c'est le parti Voyez ci-dessous le remarque (G).
ijueprennent en part-il cas toutes les (C) Il trompait ses ennemis lors
personnes d'esprit. On fait avorter même qu'il leur faisait sai'oir ses yéri-
parlà tous les complots des moqueurs, tables intentions.} C'est parce qu'ils ne
Materia petulantibus et per conlu- croyaient pas qu'un capitaine si fin
vieliarn urbanis deUahitur si ullro il- , donnât à connaître son dessein, f^idit
lam et prior occupes. JYemo aliis ri- ^j qu^j esset iter facturus palarn pro-
sumprœbuil, qui ex se cepil. Futi- riunciasset,hostes non credituros alias-
nium hominem natum ad risuni et ad qug regiones occupaluros nec dubila- , ,

odium scurrum fuisse ^enustum ac turos aliud esse facturum ac prnnun-


,

dicacem, menioriœ proditum est. In ciasset. Itaque ciiin ilte Snrdis se itu-
pedes suos ipse plurinia dicebat et in ,-y„j dixuset Tissaphernes eamdem
,

fauces concisas sic ininncorum, quos Carianidcfcndendam putafit (i5). On


plures habebatquam inorbos, et in pri- j^g pourrait pas faire ici une juste ap-
mis Ciceronis urbanitatenie/pjgit (S). pHcation de cette pensée de M. de
La gaieté d'Agésilaiis, et la force avec ÎVicquefort. George Douning ,ambas-
laquelle il soutenait les plus rudes sadeur d'Angleterre ,n'ai'oit pas assez
exercices, réparaient tous ses détauts ^/g probité ni de prudence pour se
corporels (9); car, sans cela, son exté- persuader qu'il n'y a point de minis-
rieur méprisable lui eût fait grand ^^g q^i trompe plus seuremenî ni plus
tort. Aê-yêTsti (Tê juiKfiôç Tê ytvKT^a.t Kdi agréablement que celui qui ne trompe
Tiiv o-\,tv lÙKetTa.^povnTt'Ç. Diciturauteni jamais parce qu'en battant le grand
,

fuisse pusillus et specie aspernandd chemin, ceux (pu cherchent les détours
(10). Les éphores avaient mis à l'amen- et les faux-fuy ans ne le rencontrent
de le roi Archidamus son père, parce point en leurs routes (16). La compa-
qu'il avait épousé une petite femme maison entre un tel ministre et notre
(11)5 d'où ils conclurent qu'il ne ^gesilaiis clocherait beaucoup car ce ;

leur voulait donner que des roitelets, j-qj j^. Lacédémone, en publiantes
Cornélius Népos parle plus expressé- qu'il voulait faire ne trompa ses en-
,

ment que Plutarque de la mauvaise nemis que parce qu'en d'autres ren-
mine d'Agésilaiis : Atque hic tantus contres il avait caché ses desseins. Un
vir, àil-'il {1-2), ut naturamfautricem ^(5^:^31 qui s'est établi sur ce pied-
habuerat in tnbuendis animi i'irlulibus ]à ^g saurait guère se servir d'un stra-
sic maleficam nactus est in corpore , ta^ème plus sûr que de faire courir
exiguus et claudus altero pede quœ , ^^ bruit sincère de ses marches. La
res etiam nonnuUam afferebat dejor- i.„se est alors très-bonne, parce qu'elle
milatem atque ignoti Jacievt ejus cum
, ^^^ ^-^^^ ^Q^^J. nouveau, et que les en-
intuerentur contemnebant. Jamais le nemis n'y outpas été encore attrapés.
{7) Plut, in Agesilao, p«g. 5g6 , E. Voyez Var-
cap. (i3) Plut, in Agesilao, pag- 616.
(H) Seneca de Constantiâ bapientis
, ,
ticle de Tachus.
XFII, pag. 692.
(i4)Corn. Nrpos, in VilâAge.silai, cap. VIII.
(g) Plut, in Agesilao, jjag. 5(jfJ.

(io) Ide,n,ibid. (i5) Idem, ibid. , cap. III. Vide eiiuin


(ij) Idem , ihid. Plut, m Ages. pas. (ioo , F.
,

(12) Cortt. Nepos in Vitâ Agesil. , cap. FUI. ( 16) Wlcquef. Mémoires
des Aiiil)aii5ad.,p 170.
, ,

AGÉSILAUS. 257
Lisez ce passage de Xe'oophou c'est : citus decessit (22). Ce fut l'an 3 de
Cambyses qui parle à Cyrus son fils la 104*=. olympiade, selon Calvisius
;
et qui compare les nouvelles ruses de mais on voit par là que son calcul
guerre avec les nouveaux airs de mu- ne vaut rien car depuis la 3«. année
;

sique. Kotl a-O/'oS'f.a. fAiv ko.) h tcK/M0U3-i- de la 95«. olympiade, commencement


Ktlïç tÀ Vê* Kitl oèv&Mf * illS'oX.l/y.il , TTOKU «Tê selon lui du règne d'Agésilaiis, jusqu'à
xeii iv Tdiç 7roKif/.tx.ciiç fjt.a,KKrjv tu. xsuva. la troisième année de la 104*^. olym-
y.ïi^a.'vn/j'.ctTi/. iùS''jX.tjLx,ii. 'ra.uTct yctp f/.xK- piade il n'y a que trente-six ans , et
,

ÂOV HXI i^aL7roLTd,V J{/Va,VTStl roui TTOKlfAioViil en donne quarante-un


à néanmoins
musuisquoque noi^a ce règne. Mettons-en donc le commen-
(17).' yît sicut in
etjlorida habentur plurimUm in pretio, cement avec Uelvicus à la 2». an- , ,

rébus bellicis noua ini'enta exis-


sic in née de olympiade, et la fin
la gS".
timantur longé illuslriora ; quoniam à la 3*. année de la io4''.
hœc magis queunt hostes. jecipere. (F) M. Moréri a fait ici quelques
Nous dirons ailleurs (18) , qu'il y a fautes.} 11 est faux, i«. que Léoty-
des gens qui , à force d'être sots, évi- chide frtt fils naturel du roi Agis •

tent qu'on ne les trompe. 2°. que Lysander ait soutenu avec
(D) Qu'il gagna sur
les alliés dans chaleur les prétentions deLéotychide
la Bcotie.^ La bataille se donna à (23) j
3°. qu'Agésilaiis ait jamais cam-
Coronëe. Xe'oophon , qui y servit sous pé auprès de la ville d'Héronce , dans
le roi Age'silaùs le témoigne (19), et
, la Béotie (24) ; 4°- qu'il ait eu l'air
Plutarque le dit aussi (20J. Lambin , noble et plein de majesté (25) j 5".
dans son Commentaire sur ces paro- qu'il ait dit que l'oracle qui excluait
les de Cornélius Népos , apud Coro- de la couronne les boiteux se devait
neam, quos orunes grawi prœlio ficit, entendre des défauts de l'âme ou de
a voulu corriger sans nécessite' le mot celui de la naissance. Ces deux der-
XAipû)vs<*v de Plutarque par celui de ,
nières fautes appartiennent au Sup-
Kopa)v«ia.v. Plutarque a fait mention de plément de Moréri. Je ne remarquerai
ces deux lieux sans prétendre que la
, pas qu'on nomme mal l'Egyptien a
bataille se soit donnée au premier. qui Agésilaiis rendit du service il ne ;

Mais, dit Lambin , gésilaiis put-il, A s'appelait Y>oint IVactenebon.


en sortant de la Phocide , s'at^ancer (G) JV'a fécu dans une plus grande
dans la Béotie jusqu'à Chéronée , si simplicité. ] Il n'y avait presque per-
Chéronée dans la Phocide ? Non
est sonne dans son armée plus mal habillé
sans doute mais ce si est faux et
; , que lui (26). Après son expédition
Lambin témoigne par-là qu'il ne sa- d'Asie, où il avait acquis une si haute
vait guère de géographie. Voyez le réputation , qui avait reçu de nou-
Commentaire de Kii'ckmaier sur Cor- veau un si grand éclat à la bataille de
nélius Népos, à la page 722. Char- Coronée il vécut dans Sparte, tout ,

les Etienne a erré encore plus grossière-comme aurait fait un bon Lacédémo-
ment lorsqu'il a mis Coronée dans nien du vieux temps. Il ne changea
. le Péloponnèse. MM. Lloyd et Uofman rien dans ses habits, dans ses bains,
l'ont Suivi dans cette faute. dans ses repas et ce qui était peut- ;

(£) // mourut de maladie en che- être plus diBicile, il ne souifrit point


min, l'an 3 de la \o\^. olympiade.'} que sa femme fût mieux vêtue qu'au-
Une tempête l'ayant obligé de relâ- paravant, ni qu'elle distinguât sa fille
cher , on le porta dans un lieu désert dans les processions par des ornemens
nommé le port de Ménélas et il y qui surpassassent ceux des autres filles.
,

mourut (21). Rie ciim ex Mgypto 11 ne fit aucune réparation aux portes
rei>erteretur.... uenisselque in porlum de son logis , quoiqu'elles fussent si
qui Menelai uocatur, jacens inter Cy- vieilles, et si délabrées, qu'il semblait
renas et jEgypium in morbum impli- que c'étaient les mêmes qu'Aristodème
,

(ir) Xenophon , Cyropaed. , llb. I , circa fin. (22) Corn.Nepos in Vità Agesil. , sub fin.
,

pag. 21.
(23)Sur ces deux premières fautes, voyet la
(18) Dans la remarque (L) de l'article SiMO-
remarque (A).
MDE.
(19) Xenopbon. de Reb. Grac. lib. IV (24) Je ne crois pas que ni dans la Béotie ni
ailleurs il y ait eu une ville nommée Héroace.
,

pag. 225.
(20) Plut, in Agesilao ,
pag. 6«ï. (23) Voyez la remarque (B).
(21) Plut. , pag. 618. (26) Plut, i/i Agesilao ,
pag- 6o3 , C.

TOME I. ^7
258 AGÉSILAUS.
y avait mises (27). Notez qu'Aristo- (33). C'était parmi eux la règle et la
dème était celui des Héraclides qui mesure du droit et de l'honnête si :

eut pour sa part la ville de Sparte , une chose était utile au public elle ,

et duquel descendirent les rois de La- passait dès là pour légitime. Je crois
céde'mone divise's en deux familles à , que Plutarque dit la vérité mais il ;

cause des deux (ils qu'il laissa. In hoc ne devait pas mettre en jeu la seule
(Agesilao) illud in primis fuLl admi- ville de Sparte. Celle d'Athènes (34),
rabile, , cùm viaxima muneia ei ab re- et celle de Thèbes n'avaient point de ,

gibus et dynaslis cu'ilatibusque con- meilleurs principes^ ce sont, générale-


ferrentur nihil unqu'am in dojuum
, ment parlant , les maximes de tous les
suam cnntulit, nihil de l'ictu, nihil de états la différence des uns aux autres
:

vestitu Laconum mutai il. Domo eâ- n'est que du plus au moins 5 les uns
fjem fuit contentus qud Eurysthenes sauvent mieux les apparences que les
(aS) progenitor majorimt suorumfue- autres. Quoi qu'il en soit, Agésilaiis
rat usus , quant qui intrdrat nulluni était tout pénétré de cette méchante
signum Ubidinis , nullum luxuiiœ l'i- morale. Se voyant soupçonné d'avoir
dere poterat contra plurima patientiœ
: induit Phebidas à surprendre la cita-
atque abstinentiœ. Sic enim erat in- delle de Thèbes en pleine paix, et par
structa, ut nullâ in re diff'erret a cu- une fraude qui faisait crier toute la
jusi^is inopis atque priwati (29). Quand Grèce, il leprésenta qu'il fallait, avant
on eut su qu'Agesilaiis était arrive' en toutes choses, examiner si cette action
Egypte, on lui envoya de toutes sortes était profitable à la patrie , et que
de provisions : il ne choisit que les chacun devait faire de son propre
plus communes, et laissa à ses valets mouvement ce qui tendait à l'avan-
les parfums, les confitures , et tout ce tage de l'état (35). 11 obtint que Phe-
qui s'y trouvait de plus délicieux (3o). bidas serait disculpé, et qu'on enver-
Les Égyptiens, au lieud'admirercela, se raitune garnison dans la citadelle.
moquèrent de ce prince, et le prirent Dans son expédition d'Egypte, n'a-
pour un niais qui ne savait pas en- bandonna-t-il point Tachus, qui l'a-
core ce qu'il y avait de bon au monde. vait pris à sa solde, et n'embrassa-t-il
llle prœter t'ilulina et hujusmodi gê- pas les intérêts de Nectabane , par la
nera obsonii , quœ prœsens tenipus de- seule raison qu'il était plus important
siderabat , nihil accepit , unguenta ,
aux Lacédémoniens de soutenir celui-
coronas secundanique niensam serais
,
ci que celui-là ? Action qui, sous le
dispertiit, cœtera rejerri jussit. Quo masque du bien public , était une
facto eum barbari magis etiam con- trahison toute pure, comme Plutarque
temserunt, qubd eum ignoranliâ bona- l'a remarqué. 'ATÔîrot/ ko.) «.axoxotoo
rum rerum illa polissimiim sumpsisse vpa.yjuxTciç Tra.pa.KttKvjuf/.XTi tZ a-u/u^î-
arbitrabantur (3i). Vous trouverez pOVTi T«ç TTATplJ'oç ;tf "^^/^^f^?. 'Evit Tul/-
dans Plutarque 1°. que ce prince se
,

comporta de la même sorte quand les Koi.i'd'ra.Tov ovo/na, t«ç Trpa^^iceç «v TrpoS'otrîct.

Thessalicns lui envoyèrent des^présens; (36). jibsurdo et indigno Jacinori


1°. qu'il se moqua d'eux quand ils lui commodum prœtexens patriœ quando :

offrirent les honneurs divins (Sa). hoc quidem velamento detracto nonien
(H) Le cœur l'esprit et la religion
,
istius facti l'erissiniuni erat proditio.
d'un souverain, ] Plutarque te'moigne En conversation, ne parlait
Agésilaiis
que ceux qui gouvernaient dans La- que de justice c'étaient les plus beaux
:

cédémone ne reconnaissaient point discours du monde que les siens (37).


d'autre justice que ce qui servait au Entendant dire qu'une certaine chose
bien et à l'agrandissement de l'état était agréable au grand roi (38). Par

(2';) Idem, ibid. , pag. 606. (33) Plut, in Agesilao , pag. 617. Idem in
(28) Oneût mieux jait de dire, comme Plu- Alcibiad.
tarque, Aristodemus ; car ^gésilaiis ne descen- (34) Voyez la remarque (^C) de l'article Aris-
dait pas d'Eurjstkènes , mais de Proclès ^e , TiDir.
second Jîls d^Aristodème. (35) Plut, in Agesilao, pag. 608.
(ag) Corn. Ncpos in Agesilao cap. VII.
, ,
(36) Id. ibid., pag. 617.
(3o) Plut, in k^esWào, pag. 616. (37) Id. ibid. , pag. 608.
(3i) Corncl. Nepos, in Agesil. , cap.VIII. (38) Les Grecs parlaient ainsi du roi de
(32) Plut, in Apophll)., pflg. 210- Vojex ausii Perse. Voyez la remarque (A) de l'article Ar-
Atliénée, /ji'. XIV. , pag, 65';'. TiOAN IV.
AGÉSILAUS.
où plus grand roi que tnni, s'il
est-il profanât leurs temples, ni en Grèce
n'est plus juste? demanda-t-il. Voilà m aux pays des Barbares; et il met-
,

une belle théorie ^ mais la pratique tait au nombre des


sacrilèges ceux
n'y rcpoiulait pas lorsqu'il s'agissait
, qui maltraitaient un ennemi réfugié
Je son royaume. Je -veux croire que, dans un temple {3g). Pendant la mar-
pour des interêls particuliers, il n au- che de ses troupes il allait toujours
,

rait jias facilement contrevenu à ses loger dans les temples les plus
sacrés,
lumières; et c'est par-là que je pré- ahn d avoir les dieux pour témoins
tends qu'il avait l'esprit et la religion des actions les plus secrètes de son do-
d'un souverain. Combien y a-t-il de mestique. 'Es-xiivo:/ f^h yip ÀTTcS^n/uâv
rois et de princes zélés pour leur re- xui' cturov «V Toù âT-iaTÎToïc
l'sfoiV. i
ligion, équitables et honnêtes de leur
personne ? Mais * s'agit-il de nuire à ToÛTaiV SiOtJç TTOIC^MtVOÇ 'iTrLTTTCt; HCtipLÂû-
leurs ennemis , ils suivent tous , ou Tupa.ç. Tendebat enim ciim ilerface- ,

presque tous , les maximes de Lacédé- ret, solus in sanctissimis delubris , ac


moae. Ce serait, je crois, un livre quibus rébus paucos adhibemus arbi-
de bon débit que celui de la Reli- tras, earum deos faciebat inspectores
gion du Souverain il ferait oublier : {4o). Vodà
sa religion personnelle
;
celui de la Religion du Médecin. mais dès qu'il se regardait comme
,

J'ai oui dire depuis deux jours à un roi, le bien et l'avantage de son royau-
homme de mérite qu'un prince ita-
, me était sa Divinité principale à la- ,

lien demandant des conditions trop quelle il sacrifiait la vertu et la justice,


avantageuses lorsqu'il négociait un les lois divines et les lois humaines.
traité de paix avec un puissant mo- Je ne saisi tous ceux qui citent cette
narque qui lui avait enlevé la plu- sentence d'Euripide,
part de ses états l'envoyé de ce mo-
,
Nain si violandum est jus, regnandi gratid
,

narque lui répondit JMais quelle as- : yiolandumesl : aliis rébus pietatemcolas{t{i);
surance voulez-vous que le roi mon
en comprennent toute l'énergie on
maître puisse prendre s'il vous rend ,
y :

voit l'esprit, et de ceux qui acquiè-


tout ce que vous demandez ? .Assurez-
rent des royaumes et de ceux qui
,
le réplicjua le prince
, que je lui en- ,
gouvernent les états ils vont quel-
gage ma parole, non pas en qualité de ;

quefois jusqu'à la superstition. Re-


souverain car, en tant que tel, il faut
;
gardez la conduite particulière d'A-
que je sacrifie toutes choses à mon
gésilaiis tout y est dans l'ordre, aliis
:
agrandissement à la gloire et à l'a-
,
rébus pielatem colas il ne sort de l'é-
:
vantage de mes états , selon que les
quité, qu'en tant qu'il règne, regnandi
conjonctures s'en offriront dites-lui :
gratiâ violanduniest. En tant qu'hom-
donc que je lui engage ma parole, non
me, il vous dira sincèrement, comme
pas sous cette qualité-là, ce ne serait
rien promettre , mais comme cavalier,
un autre , amicus usque ad aras :
mais, en tant que souverain, s'il parle
et honnête homme. Quoique ce langage
selon sa pensée, il vous dira, j'obser-
ne réponde point aux idées de ceux
verai le traité de paix, pendant que le
qui ont introduit dans le style de la
bien de mon royaume le demandera;
chancellerie la formule , nous promet-
je me moquerai de mon serment dès ,
tons enj'oi et parole de roi, il est pour-
que la maxime d'état le voudra. Que
tant trés-sincère et très-raisonnable.
s'il aimait mieux que les Perses vio-
Faisons encore deux remarques Pre- :

lassent la trêve que de commencer


mièrement je distingue entre ce que ,
,
lui-même à la violer, c'est qu'il espé-
croyait Urbain VIII, et ce que croyait
rait un grand protit de cette conduite
?ilaphée Barberin- La religion du sou-
des Perses. Muliiim in eo consequi se
verain, en tant que tel, et la religion,
dicebat quod Tissaphernes perjurio
,
])ersonnellement parlant , sont deux
suo et hornines suis rébus abaUenaret,
choses.
et deos sibi iratos redderet (^2).
Autre remarque. Agésilaiis avait un
Notre bon Agésilaiis qui eût cru
respect extrême pour ses dieux il ne :
,

blesser la belle morale, s'il avait été


souflVait point qu'on piUât, ou qu'on
(39) Corn. Nepos , in Vitâ Age.sil. cap. IF^. ,

(*) Les éiluions de 1697 el l'joa portent : (40) Plut, in Agesilao , pag. 6o3.
Mais de leur grandeur ou de l'utilité pu-
s'agit-il (40 Cicer. Officier. , iib. III , cap. XXI.
blique, s'agit-il de nuire etc. , (4'} Corncl. Xep»5 in Agesil. cap. II. ,
,,

26o AGÉSILAUS.
bien vêtu, et eût fait bonne chère,
s'il l^cev jUiTÀ AetfATT^ox-Xioui; 'inrt V)tTiot/ (47)-
ne se faisait nul scrupule d'être l'u- Sacrâtes etium nliquando deprehensus
surpateur d'un royaume. C'est ainsi est ab Alcibiade ludere cum Lampro-
que certains casuistes damnent sans cle adhuc infante. Mais je ne me sou-
rémission les femmes qui s'ajustent viens pas d avoir lu que d'autres y
trop miguonnementj ils ne peuvent aient surpris Alcibiade. 6°. Ces deu.\
soufi'rir ni leurs rubans ni leurs , auteurs observent que c'était avec se.^
pierreries mais non-seulement ils
: propres enfans que Socrate folâtrait.
permettent aux hommesde se soulever (K) Je ne crois pas que Dicéarque
et de s'engager à une guerre civile , ail ignoré le nomde la fille d' Agé-
ils les y exhortent aussi. silaûs. ]Cynisca fut non-seulement la
(I) ^tix exercices plus puériles,']
les première femme qui gagna aux jeux
Un jou;- qu'on le surprit à cheval sur olympiques le prix de la course de
un bâton avec ses enfans , il se con- chevaux, mais aussi la plus illustre de
tenta de dire à celui qui l'avait vu en toutes celles qui dans la suite rempor-
cette posture, attendez henparlerque tèrent une semblable victoire (48).
fous soyez père (43). On ne pourrait Le poète Simonide l'honora d'une
pas citer ici ces vers d'Horace :
épigramme (49)- Elle consacra, pour
^dificare casas , plotlello adjungere muret un monument de sa victoire , des
Ludeie par iinpar, equitare in arundink chevaux d'airain qui furent placés à
LONGA ï l'entrée du temple de Jupiter Olym-
Si quein deleclelbarbaluin, amenda cer/et (44)-
pien (5o). Sa figure, faite par Apelle
Car ce poëte n'entend point parler et ornée de plusieurs inscriptions, se
de ceux qui', par complaisance pour voyait au temple de Junon, à Elide
leurs propres enfans, s'amuseraient à (5i).Les Lacédémoniens lui érigèrent
de telles choses dans leur logis. La un monument de héros Upûov (Sa). ,

Mothe-le- Vayer n'est point exact Il n'y a donc point d'apparence que

lorsqu'il dit que le roi Agésilaiis le nom de la sœur d'Agésilaiis ait été
aussi-bien qu Alcibiade , J'urent sur- inconnu à aucun historien grec.
pris folâtrant au milieu des petits (L) Il aurait su le de la fille nom
garçons , et que le philosophe Socrate d'Agésilaiis s'il aidait fait ce que fil
en faisait gloire (45)- On cite Sénèque Plutarque. ] Ce dernier historien nous
au dernier chapitre du \" livre De . apprend que Dicéarque s'était mis
Trarujuillitale. Il y a plusieurs choses fort en colère de ce qu'on ne savait
qui manquent d'exactitude. i°. Il au- pas le nom ni delà fille d'Agésilaiis,
rait fallu spécifier qu'Agésilaiis ne fo- ni de la mère d'Epaminondas. 'O Ai-
lâtrait qu'avec ses enfans. 2°. LeTraité Ko.la.pX'^^ iTryiyàLMMTmriv. Stomachatur
De Tranquillitate ne contient qu'un Dicœarchus etc. (53). Pour moi ,con-
,

livre. 3°. Il n'est rien dit , ni d'Alci- tinue-t-il fai trompe dans les regis-
,

biade , ni d' Agésilaiis dans le chapitre tres des Lacédémoniens que la femme
cité. \°. Il n'y est point dit que So- d'Agésilaiis se nommait Cléore et ,

crate faisait gloire de folâtrer avec que l'une de ses deux filles s'appelait
les enfans. On se contente de dire Apolia et l'autre Prolyta. On ne doit
qu'il n'en avait point de honte. Cum pas trouver mauvais que Dicéarque se
pueris S ocrâtes ludere non erubescebat. soit fâché de la négligence des histo-
5°. Valère Maxime et Elien , qui rap- riens car nous aimons naturellement
5

portent ce jeu de Socrate , disent à connaître la famille des grands


qu'Alcibiade l'y surprit. IVon erubuit hommes. Il était un peu étrange que
tune cum interpositd arundiiie cruri- le nom des filles et de la femme d'A-
bus suis cum pari^ulis filiolis ludens gésilaiis ne se trouvât que dans les
ab Alcibiade risus est {l\G). 2a)«pa.T>tç archives de Lacédémone.
«Té K«TêM)<^9>) ;roT£ Otto AXKiQixé'au vrcti-
'

Agesilao, nag. 6io (47) JF-lian. Var. Hist., lib. XII, cap. XV
(43) Plut, in ; jElianiis
Var. Hist. lib. , XII , cap. XF. (48) Paus. , Ub. III, pag. 88.

(44) Horat. Sal. ///, Ub. IT, vs. 247. (49) Id. ibid.
(45) La Motlie-le-Vayer, tom. /, pag. 217, (50) Idem, lib. V, pag. iSg.
r'dit. in-ii. (Si) Idem , lib. VI, pag. 178.
(46) Valer. Maximus, lib. VIII, cap. VIII, (52) Idem, lib. III, pag. 96.
sitbjin. (53) Piularch. in Agesilao, pag. ÙhU
AGÉSIPOLIS. 261
AGÉSIPOLIS, premier du pour mieux prendre ses précau-
nom, roi de Lacédémone suc- tions, courut aussitôt à Delphes, ,

céda à Pausanias son père qui afin de savoir si le sentiment du ,

s'était réfugié dans un temple {a) fils (f) serait conforme à celui du
dès qu'il avait su qu'on désap- père (g) (A). La réponse d'Apol-
prouvait la conduite qu'il avait Ion fut toute semblable à celle de
tenue en concluant une paix avec Jupiter; et alors Agésipolis ne ba-
ies Thébains. On le laissa dans cet lança plus , et fit marcher sonar-
asile, et l'on éleva sur le trône niée du côté d'Argos. Les Argiens
Agésipolis, sous la tutelle d'Aris- lui envoyèrent deux hérauts pour
todémus Ce fut la 3". année lui demander la paix il leur ré-
(b). :

de la g6*. olympiade (c). 11 était pondit que les dieux avaient trou-
majeur lorsque les Lacédémo- vé bon qu'il n'acceptât point ces
niens résolurent d'attaquer tout offres, et continua sa marche. Il
à la fois les Athéniens et les Thé- y eut un tremblement de terre
bains; mais, comme ils jugèrent le premier jour qu'il campa dans
qu'il ne serait pas de la prudence leurs états et comme une partie , ;

pendant une telle guerre , de n'é- des troupes jugea que c'était un
tre pas assurés des Argiens , ce signe qu'il fallait s'en retourner,
fut par ceux-ci qu'ils commencé- ildissipa leur superstition par la
rent(rf). Agésipolis, chargé de les remai-que que ce prodige était
attaquer, se fit un scrupule sur arrivé après leur entrée dans le
ce qu'ils lui demandèrent une trc- pays ennemi. 11 marcha donc
ve. Il voulut donc s'éclaircir avec plus avant s'approcha de la ville,

.fupiter sur un tel cas de conscien- d'Argos et la serra de bien près,


,

ce, et il le consulta en personne II l'eut peut-être subjuguée si la


dans le fameux temple d'Olympe, foudi-e, qui lui tua quelques sol-
11 lui demanda si l'on pouvait re- dats et si quelque autre mauvais
,

jeter les propositions de trêve que présage ne l'eût obligé à se re-


les Argiens faisaient et si , l'on ne tirer {h). N'oublions pas son ému-
pouvait pas prétendre qu'ils pre- lation dès qu'il fut entré au
:

naient très -mal leur temps, vu pays des Argiens, il s'informa jus-
qu'ils avaient attendu à parler de qu'oii Agésilaiis l'avait ravagé
paix que les troupes de Lacédé- quelque temps auparavant et il ;

mone fussent à la veille de les at- n'eut cette curiosité que pour ren-
taquer. L'oracle répondit que les chérir sur les exploits de ceprin-
demandes des Argiens étaient in- ce , qu'il tâchait de surpasser ,
justes, et qu'on pouvait les refu- comme s'il avait été un athlète
ser saintement (e). Agésipolis , apparié avec lui (z). La paix gé-

(a) Dans celui de Minerve, à Te'ge'e. Pau- cias non rite oblatas respuere. XenopK. de
sanias, lih. III, pag. 86. Reb. Gra;c. lib. ir , pag. 3l2.
,

ib) Id. ibid. (/) C'est-à-dire, d'Jpollon.


, i 1^- j c- 1 vri' cnp.
7/ A/K, ^ -r/"
AC. (s;] C'est-à-dire , de Jupiter.
(c) Diodor. Siculus. /ii'. T,i yr j tj i /- ;/ Tir
)' t> L
,
/- Il Tir (/i)XenopLon,
i
de Reb. Giœc. ,
/ii>. /^,
(d) Xenoplion, de Reb. Graec.
,
, lib. ly ,
^J 3^2
pag. 313. [i)"P.T7ri;i 7rsvTa.9xo{ vrivr»! iTri ro ^Xs'ov
^
, ^ „ rr
(e) "O efê 6m è^«s-,i//*'yêV eLÔTa 6«0V eï- C7rifCâ.X>.iiv fTrsicâtTO. Tanquam enim pen-
\a.i fA» (rê;tOjUêV» a-TTOt S'a.; ÀS'iiiocç ÛTTCK^i- tathlos omninô illum supcrarc conlcndcbci;
:'y.hcit,ç. Cui Deiis rêspondilfas eiesse indu- Xenoplion ,
ibid.
, ,

262 AGÉSI POLIS.


nérale , que les Lacédémoniens à M. Moréri (E). Agésilaùs ne
procurèrent à la Grèce (A:) par les fut point aise de cette perte,
négociations d'Antalcidas , leur comme on l'aurait cru (F) : il en
ambassadeur à la cour de Perse , pleura et en eut un long regret ,

l'an 2 de la 98^. olympiade, fut à ce que dit Xénophon [p). No-


bientôt suivie de la guerre parti- tez qu'Agésipolis ne laissa point
culière qu'ils déclarèrent aux ha- de postérité {q) , et que Cléom-
bitans de Mantinée. Agésilaiis brotus, son frère et son succes-
ayant prié qu'on le dispensât du seur, fut père d' Agésipolis II (r),
commandement des troupes , ce qui ne régna qu'un an {s) et de ,

fut Agésipolis qui marcha contre qui les apophthegmes ont été
l'ennemi. Il ravagea le territoire plus mémorables que les actions.
de Mantinée, et il subjugua en- Personne ne parle de celles-ci et ,

iin cette ville. L'expédient dont l'on trouve dans Plutarque {t) un
il se servit est trop curieux pour petit recueil de ceux—là.
n'être pas rapporté (B). Il y a
[p) Voyez la remarque (F).
quelque apparence que ce fut dans (17) Pausan., lib. II , pag. 86.
cette guerre que Pélojiidas et Epa- (r) Pausan. , lib. II pag. 86.
,

minondas furent dégagés du pé- [s) Diod. , lib. XV, cap. LX.
[t^ Plut, in Apopblh. Lacon., pag. 2l5.
ril (C) à quoi leur courage et
leur amitié les exposèrent. Il fut
(A) Si le sentiment d'Apollon serait
envoyé quelques années après(D), conforme a celui de Jupiter.] Recueil-
nvec une bonne armée , contre lous de ceci une vérité qui est d'ailleurs
les Olynthiens (/}. Amyntas , roi assez manifeste ; c'est que la religion
des païens était fondée sur des idées
de Macédoine, et Derdas, prince de Dieu aussi fausses que l'athéisme.
d'Élimée fm), le secondèrent vi- Je ne parle point des sentimens du
goureusement. Il s'approcha d'O- commun peuple ; je ne parle point de
lynthe et , ne voyant point pa-
;
l'abus de quelques particuliers , je
parle du culte public pi'atiqué par
raître l'armée ennemie qu'il vou-
les personnes les plus éminentes et ,

lait combattre , il ravagea le pays soutenu par la majesté de l'état. Voici


et se rendit maître de la ville de un roi de Lacédémone qui , apiès les _
Torone. Mais comme les gran- sacrifices que l'on offrait solennelle-
*
,
ment , et comme des préliminaires
des chaleurs de l'été ne l'empê-
dune expédition fi), et après même
chaient point de fatiguer extrê- la réponse favorable du plus grand des
mement , il fut attaqué d'une fiè- dieux, va consulter une»autre divi-
vre continue qui l'emporta dans nité , incertain si elle réfutera ou
si elle confirmera cette réponse. Il
sept jours (n) , l'an 14 de son rè-
croyait donc que les décisions de Ju-
gne (0). Voyez ce que je critique piter n'étaient pas telles que l'on pût
(A) Diodor. Sicul. lib. XIV cap. CXI,
toujours les suivre en sûreté de con-
, ,

pag. 65o. science , et il supposait que les lumiè-


il] Xenopb. de Reb. Grsec, lib. V ,
png. res d'Apollon n'étaient pas toujours
329. conformes à celles de Jupiter. N'était-
(;«) Xenopbon de Beb. Grœc, lib.V, fg. ce pas croire que tous les dieux, sans
327 , dit 'Eâî/Uiaî ap/^GVTO. ; mais appa-
remment c'est une J'aille de copiste ,
pour (i) 'E^-êi... Tst S'ixCctr-^put Bfoy.hai
iyhiTO, ixTciv ilç Tiiv '0}My.7rla.ç ^f»-
(n) Id. ibid. pag. 329.
,
Ç'HfUt^ùf/.iVtiç. Qiiiini pro felici transita .(acri-
(o)Diodor. Situl., lib. XIV , cap. CXI , Jicdsset, Oh'mpiain oraculuni coiisullurus pro~
pag. 65o, et lib. XV, cap. XXIII, pag. 67^, fici'citiir. Xenopli. de Geslis Grsec. , lib. IV, p.
ad aniiiim l Olymp. 100. '3ii.
,

ÂGÉ SI POLI s. 563


exception du plus grand , étaient linis eria bona sint , Dianœ non bo-
bornes dans leurs connaissances, et na (2) ?
'[ue d'eux aux hommes il n'y avait TJn auteur moderne s'est servi de
que la différence du plus au moins ? cette conduite de notre Agésipolis
Le tôt capita toi sensus , autant de pour faire voir que par rapport aux
sentimens que de télés avait lieu se-, , oracles le plus grand des dieux du pa-
lon cela dans le ciel à peu près com-
, ganisnie ne conservait point son avan-
me sur la terre. On consultait Jupiter tage ni sa supériorité. Les oracles de
comme l'on consulte le plus fameux Jupiter, dit-il (3), tels qu'estaient
avocat d'un parlement lorsqu'on a ceux de Trophonius, de Dodone et de
dessein de s'engager à un procès. La Hammon n'avaient pas tant de cré-
,

réponse de cet avocat n'assure pas les dit que celui de Delphes... car, ni en
plaideurs prudens ils sont bien aises
: durée, ni en estime, ils n'ont jamais
d'avoir l'avis de quelques autres ju- égalé ce dernier. Et cela se prouve
,
risconsultes et il y a tel homme qui
;
outre le consentement de la plus part
fait consulter son aflàire dans toutes des auteurs qui en ont parle par ce ,

les cours du royaume aux plus habi- que rapporte Xénophon de Agésipolis
les docteurs. Les païens en usaient {*), qui, après avoir consulté Jupiter
ainsi à Tegard de leurs oracles ils en ; olympien et reçu sa réponse fut à ,

consultaient plusieurs sur les mêmes Delphes trouver Apollon , lui deman-
cas afin de voir si les dieux se con-
, dant, comme a un juge de dernier res-
trediraient les uns les autres et afin , sort , s'il estait du mesme avis que son
de prendre mieux leurs mesures par père. Aristote attribue cette espèce de
la comparaison des re'ponses. Ainsi raillerie dévole a un Uégésippus au ,

leurs dieux c'taient aussi chime'rlques second livre de ses Rhétoriques. Ce pas-
que la divinité' de Spinoza car il est ; sage fournit la matière de deux notes.
aussi impossible qu'une nature bornée La première que les idées de l'é-
est
soit Dieu qu'il est impossible que le
, glise gallicane touchant le concile, et
monde soit l'Eti'e suprême qui gou- sur le pape parlant même ex cathe-
,

verne toutes choses par une sage pro- dra peuvent être comparées à celles
,

vidence. Confirmons ce que j'avance du paganisme touchant les oracles de


sur la fausse ide'e que les païens se Jupiter et celui de Delphes Le Jupiter
formaient de Dieu. Ils n'étaient point olympien , répondant à une question ,
scandalises du sort diffèrent qu'a- trouvait dans l'esprit des peuples
vaient les victimes. Celles qu'on of- beaucoup de respect; on rendait bien
frait à une divinité fiiisaient espérer, des hommages à son aufoi'ité mais ;

pendant que celles que l'on offrait à enfin son jugement quand même il ,

une autre faisaient craindre. Apollon aurait été rendu ex cathedra, ou plu-
et Diane, enfans jumeaux de Jupiter, tôt e.r tripnde ne passait pas pour ir-
,

se contredisaient quelquefois: le frère réformable voilà le pape de l'église


;

rejetait une victime; la sœur l'admet- gallicane. L'Apollon de Delphes était


tait. Le paganisme ne trouvait rien le juge de dernier ressort voilà le con- :

là de scandaleux: il eût bien voulu cile. Ma deuxième note est qu'Agési-


plus de concorde dans les promesses polis y procéda tout de bon il n'y :

du bien mais enfin il ne croyait pas eut point dans son fait une raillerie
:

que la nature divine donnât l'exclu- dévote. Pour ce qui est d'Hégésippus,
sion à l'ignorance, au caprice, à la je n'en réponds point. 11 fut peut-être
discorde il acquiesçait donc à cela
; assez malin pour vouloir tendre des
comme à des effets inévitables de la pièges aux oracles, afin de les insulter
nature des choses. Ne croyez pas que s'ils ne s'entre-accordaient pas. C'esl
les objections de Cicéron aient des- une honte, aurait-il pu dire, que vous
sillé les yeux à beaucoup de gens. répondiez le oui et le non.'Hyns-tTrTroçh
Quid quiiin pluribus dits iminola- AiK^-Àç ÎTntfcérttTov âsov, xêJ^pdy.Évoç ^fô-
tnr ,
qui tandem ei'enlt ut litetur aliis , TêpOV 'OhllfA.7ria,Tlt 3 il ctÙTO) TctZia. Sokh
aliis non litetur ? Quœ auleni in- a.Tip TOù TTXTfi, liç cLiirXpoy bv Tetyctyrix
rOJistantia deorum est ut primis mi- ,

.(3) Cicero de Divinat. , lib. II cap. 38.


nentur e.rtis , benè promillanl secun- , ,

(3)LaMolhc-le-Vaj-er, Lettre CVI, toni. Xf.


dis ? jlul lanta inter eos dissensio
pap. 4'i9.
sœpè etiam inler proximos , ut j4pol- (') /.<>. ir Ili5tcri.nr.
Î564 AGÉSIPOLIS.
iiTTw (4)-Hegesippiis Delphis inter- dans l'expédition de Mantinée, et que
rogabat Deuni , ciim accepisset priùs l'aile où ces deux braves combatti-

oraculum Ofympiœ , num ipsi eadem rent ayant plié , ils ne reculèrent
vlderentur quœ patri, quasi turpe esset point. Pélopidas reçut sept blessures,
contraria dicere. Si notre Agësipolis et tomba sur un monceau de corps
avait eu un mauvais dessein contre morts. Epaminondas courut à lui, et
Apollon , à l'exemple de ce malin per- s'opposa seul à plusieurs , bien résolu
sonnage dont Esope a fait Thistoire de mourir plutôt que d'abandonner son
(5) , il y aurait été attrapé ; car la ré- ami. Il fut blesséen deux endroits, et se
ponse de Delphes fut semblable à celle défendait néanmoins vigoureusement,
d'Olympe. lorsque Agésipolis, menant des troupes
(B) L'expédient dont il se sériait est de l'autre aile de l'armée , les dégagea
trop curieux pour n'être pas rapporié.'\ l'un et l'autre (8). Vous me direz que
11 boucha le cours de la rivière qui Xénophon ne parle d'aucune bataille
passait par le milieu de la ville cela quand il raconte ce qui se passa dans
:

causa une inondation qui affaiblit de cette guérie de Mantinée mais je :

telle sorte les fondemens des maisons et vous répondrai que Pausanias observe
des murailles, que les habitans crai- qu'Agésipolis avait gagné une bataille
gnirent qu'elles ne tombassent; et com- avant que de mettre le siège devant
me ils virent que , si quelque pan de la ville , 'Clç éi ix.fâ.Tyicriv h 'A^/itr/w-oXiç
muraille se renversait , leur ville serait
emportée d'assaut, ils capitulèrent. Ils To:/ç MAVTivsotç (9). Cùm x'cro Agési-
n'obtinrent que des conditions très-du- polis Mantinenses prœlio superatos in-
res ; car on les força d'aller demeurer tra mœnia compulisset; et j'ajouteiHii
à la campagne divisés en quatre can- que Xénophon même remarque qu'il
,

tons, et l'on démantela leur ville on y avait des troupes auxiliaires dans
:

aurait puni de mort leurs magistrats si l'armée de Lacédémone (10). Notez


le père d'Agésipolis n'eût intercédé que l'événement dont Plutarque fait
pour eux (6). Xénophon qui narre mention précéda la supercherie avec
,

toutes ces choses ne touche point laquelle Phébidas se rendit maître de


,

une circonstance que Pausanias rap- la forteresse des Thébains (ii)- Ce


porte. Agésipolis détourna vers les caractère chronologique convient à
murailles de la ville le cours de la l'expédition d'Agésipolis contre Man-
rivière. Or la brique de ces murail- tinée.
les n'étant pas cuite se fondait dans (D) // fut eni'ojé quelques années
l'eau comme la cire se fond par la après, etc.] Je ne fais cette remarque
chaleur du soleil. La raison pour que pour censurer Pausanias , qui con-
quoi les Mantinéens avaient préféré la te qu'Agésipolis, abandonnant à regret
brique crue à la brique cuite , est la guerre d'Argos tourna toute sa ,

qu'elle ne se brisait pas et ne se dé- colère contre les Olynthiens. OSto) /L/.iv
rangeait pas lorsqu'on battait les mu- Jjî in THÇ ApytiKlSoç àvêÇêt/^êV StXûJV , iTTt
Agésipolis n'inventa point ce «Ts'Oxi/vôi'ouç iTroiiÏTO a.uQtç çpa.Tlsiv. (12)
railles.
stratagème il ne s'en servit qu'après Invitissimus itaque ille ex j4rgii^oruni
;

avoir su que Ciraon l'avait employé Jinibus castra moi'it , et contra Olyn-
pour se rendre maître de la ville impetum convertit. Qui ne
thios bellL
d'Eione sur le Strymon (7)., croirait en lisant cela que l'expédition
(C) Que Pélopidas et Epaminon- d'Olynthe fut une suite immédiate de
das furent dégagés du péril.'] Plutar- celled'Argos Qui ne s'imaginerait
!

que raconte que les Thébains envoyè- qu'Agésipolis, en sortant de l'Argoli-


rent du secours aux Lacédémoniens dc, prit la route de la Macédoine? Ce-
pendant cela est faux. Il se passa quel-
(4) Aristotel. Rhetor., Uh. II, cap. XXI II, ques années entre cesdeux expéditions.
pas- 445. ^•
^sopus, Fabula XVI, La guerre de Mantinée, dont le même
(5) cujujt Titulus
3Ialignas. Celait un homme
Vi.oLX.'iTrpâ.yy.a»!
,
Pausanias a dit quelque chose suivit ,

tfiti un moineau h la main et qui detnan'


avait
m Vitâ
,

liait à VOracle : Ce que je tiens vit-il, ou non? (8) Plutarclius Pelopidœ pag. aSo.
,

Son dessein était à^'éioujffer le moineau en cas , (g) Pansan. , lib. VIII pag. il^i.
^

que VOracle eût re'pondu Il vit, etc.


, (10) Xenoplion , Uh. V pag, 323.
,

(C) XenopVion, lib. V pag- 323.


, (11) Plut, in Pelopid. pag. 280.
,

(7) Pausanias, lib. VIII pag. ^^3,


,
z/^i. (i;) Pausanias, lib. II ,pag. 86.
, , , ,

AGÉSIPOLIS. 265
celle d'Ar^os, et précéda de six ans leseptième jour de sa fièvre {i^). En
celle d'Olynthe. Notons ici une faute second lieu c'est une glose chimëri-
que que de^
,

nous venir - conter


*-
que" ,
de Calvisius. Il place la guerre d'Ar-
gos sous Tan 4 de la 96^ olympiade par un respect religieux pour la sain-
peu après la mort de Pausanias roi ,
teté du temple, il ne voulut pas y

de Macédoine ( 1 3) Or, Agésipolis mon-


.
mourir. Xénophon, oii quelque autre
ta sur le trône la même année que
auteur digne de foi ont-ils dit cela ? ,

mourut ce Pausanias (i4); et parce Pour n'en faire pas à deux fois, criti-
qu'il était mineur, on le mit sous la quons ici la faute que M. Moréri a
tutelle d'Aristodémus CiS). Il faudrait faite dans l'article d'Agésipolis II. Il

donc . si Calvisius était exact , que la assure que ce prince ayant été en ota- ,

guerre d'Argos concourût , ou à peu ge durant sa jeunesse , répondit à ceux


près, avec la première année du règne quilui en faisaient reproclie, c'est parce
d'Agésipolis , et que cette guerre eût que les rois portent les défauts de leur
été conduite par Aristodémus car ;
empire. Cette réponse est aussi fausse
il est certain que sous la minorité ,
que contraire à ce bon mot
d'Agésipolis, on mit son tuteur à la Quicquid délirant Reges, pleclunlur Achivi (20},
tête des armées lorsqu'il échéait à ce
c'est-à-dire
roi d'aller en campagne (i 6). Calvisius
Princes font les folies, et leurs sujets
ne manque pas d'observer qu' Aristo- enLes
portettt la peine.
démus y alla l'an 3 de la gô*". olym-
piade à cause du bas âge d'Agésipo- Voici le fait. On lui dit un jour
,
Tnut :

lis (17}. Voici en quoi il se trompe :


,-oi que ijous éles uous as^ez été en
,

c'est qu'il met la première année de otage avec les principaux de la jeu-
son règne à l'an "i de la 96"^. olym- nesse de Lacédemone ; vos femmes et
piade et la guerre d'Argos trop peu
, vos enfans n'y ont point été. C'est
a)>rès la mort de Pausanias , roi de Ma- parce qu'il était juste répondit-il que , ,

cédoine. nous portassions nous-mêmes la peine


(E) Ployez ce que je critique
a de nos propres fautes (21).
M. Moréri.'] a Agésipolis fut surpris (F) Agésilaûs ne fut point aise de
d'une fièvre ardente , et revint tou- cette perte comme on l'aurait cru.'\
,

jours à la fraîcheur des eaux d'un Xénophon nous porte à croire qu'il
certain temple de Bacchus qui était régnait entre ces deux princes une
à Aphite; il s'y fit porter, et mourut émulation fort propre à produire l'ini-
le septième jour de sa fièvre après , mitié. Mais Plutarque nous les repré-
être sorti de ce temple , pour ne le sente comme fort unis. Il observe

point souiller par sa mort .» Ce sont qu'Agésipolis doux et modeste , et


,

les paroles de M. Moréri. Il y aurait s'intrigaut peu dans les .nifaires pu-
de l'injustice à critiquer l'expression bliques se laissa gagner par son collè-
,

reuint toujours a la fraîcheur ; car il gue Agésilaiis (22) qui, le connaissant


,

est aisé de voir que les imprimeurs decomplexion amoureuse, lui parlait
ont mis revint a.i\ lieu de rêvant (18). toujours de beaux garçons et le pous- ,

Mais on peut dire deux choses. L'une, saitde ce côté-là , et l'y servait même.
qu'il aurait fallu s'exprimer ainsi Se :

souvenantdu temple deBacchus qu'il o-iVoXiv, cos-yrip «v aÙTOç, an tivoç vTrxpX.^


,

avait vu à Aphite, il souhaita de jouir y}j-^w Vifi tSv h «pot* ksli Trfcttyi tov
de l'ombre et de la fraîcheur des eaux vfaviVxov ih toÎ/to, ko.) (t^vhco. khi <r!/-
claires de cet endroit-là- Il jr fut porté véTfstTTê (23). Qui autem teneri sci-
en fie , mais il mourut hors du temple, let Agesipolim, sicut se, amoribus
sermoneru assidue de forinosis ado-
(i3) Sethi Calvisli Clironol. ad ann. mundi,
lesceutibus inferebat eodcni iUurn ini- ,
5557 pag. 162.
pellebat sociusque erat ei in amore
,

(i4) Diodorus Sicul. lib. XIV cap. XC, p.


, ,
,

637. et adjutor. Il ajoute que cette espèce


fi5) Xenopbon de Reb. gestis Grwcor.
,
lib. J'
d'amour -,' «';t *.t^n
n'avait Aa criminel
rien de
, /^«.imin^l à
à
IV ,pag. Soi. Pausanias, lib. Il, pag. 86.
Ci6) Xenopbon, de Reb. gestis Gracor. , lib. Voyez Xenopbon liv. IV, p. 329, 33o.
C19) ,

IV ,
pag. 3oi. (20) //,
Ho'rat. Epl5t. lib. I, vs. 14.

(17) Colvisins, Cbronol. , pag- 160. (21) Plalarcb. in Apopbtli. Laconic. , p. 2i>-
Plut, in Agesilao, pag- 607 , A.
(j8) On a mis rêvant dans les e'dilions de (22)
JloUande. (23) Plut, in Agesilao, pag. Po- /. .
,

2G6 AGIS.
Lacédëmone. Voici un passage grec à son projet que ceux qui avaient
qui nous apprend qu'Aarésilaûs regret- i^„; J,., „„ia^i,^
loui du relâchement+j j- i- •

.'
j 11' 'A ^ de discipline
^ 1"""=
'
ta la perte de ce collègue. Aytta-tKetoç Si
I , -"
.
t i , '

TodTo âKoÔTAç oôx M T. etv â'sTo I<|.mV9m plusicurs anuccs. La plus grande
, ,

ce; ÀvTtTrâLKa) , ÀKKÔ, Kn) îj'â.K.pva-i itcii îttû- clifiiculte paraissait devoir venir
6»a-4 TMv cruvo-jcriAv ^gesilaûs his
la part des femmes (B). Elles
(24). de
nnn, ut quidam existimassent „,,„:„.^* „]„„„ „1 „ J
r.udilis, 'j-.
,,' ,
„, aiwersaru avaient alors plus de crédit aue
o& / , .
casuni lœlatus ,
est, sed7 l
^
Tl ^ . . ,

huinnniter mortem illiiis lachijmatus jamais; Car leur règne n est ja-
e$t et consueludinem desideraint.
, mais plus grand que lorsque le
(a4) Xenophon , de Gest. Graec. , lib. V, p. luxe cst à la modc. La mère d'A-
'^°'
gésilaiis ne trouvait nullement
AGIS , roi de Lace'de'mone , son compte à cette réformation ;
issu d'Agésilaiis II en droite li- elle y aurait perdu ses richesses,
gne (a) eut une fin trës-malheu-
, qui la faisaient entrer de part
reuse. Il s'était mis en tète de ré- dans mille sortes d'intrigues ;
former son royaume par le ré— au des- ainsi elle s'opposa d'abord
tablissement des lois de Lycur- de vision, sein d'Agis , et le traita
gue mais il succomba sous le
; Mais Agésilalls son frère , qu'A- ,

poids d'une entreprise qui ne gis avait engagé dans ses intérêts,
pouvait être que désagréable à la sut tellement manier qu'elle ,

tous ceux qui possédaient de promit de seconder l'entreprise,


grands biens , et qui s'étaient tel- Elle tâcha de gagner les femmes ;

lement accoutumés aux douceurs mais , au lieu de se laisser per-


d'une vie voluptueuse qu'ils n'é- suader, elles s'adressèrent à Léo-
,

taient plus capables de s'accom- nidas l'autre roi de Lacédémo- ,

moder de l'ancienne discipline de ne, et le supplièrent très-lium-


Lacédémone. Agis, à la fleur de blement de faire avorter les des-
son âge, par un désir de gloire seins de son collègue. Léonidas
assez raffiné (A), conçut le des- n'osa point s'y opposer ouverte-
sein de cette réforme, et la pra- ment, de peur d'irriter le peu-
tiqua tout le premier en saper- pie, à qui la réformation était
sonne ses habits et sa table agréable parce qu'elle devait lui
:
,

étaient selon les manières du être utile. Il se contenta de la


vieux temps ce qui méritait d'au- traverser par des intrigues et en
; ,

tant plus d'admiration, qu'Agé- semant des soupçons, comme si


sistrata , sa mère et Archidamia, Agis eût aspiré à la tyrannie par
,

sa grand'mère , l'avaient élevé l'abaissement des riches et par


mollement (b). Lorsqu'il sonda l'élévation des pauvres. Agis ne
îa disposition des esprits, il trou- laissa point de proposer au sénat
va les jeunes gens moins opposés ses nouvelles lois, qui portaient
\.a) Il étail éloigné de lui de cinq degrés de l'abolitioU dcS dettes et Un lîOU-
5^é>ie>-n<io«. vcau partage des terres. Léoni-
Plut, in Agide, /jfl^. 79t}.
{b) 'Evrépay.yihoç a-?.o^To.ç ko.) Tfu-
Jas soutenu par les ffens riches, ,

T« >.cl) T.-Ç ^i^^.c 'Afi.cT^^Lc J Ci] S «PP«s^ «1 fortement a ce projet


Trxùça. xi'^M-tt-'ta. AAxiS'cniJLo^lm iy-ix.- qu'il y eut uii suffrage de plus
TnvTo. Enuiritits cssci in opibus deliciis pour la rejectioii que pour l'ad-
et.

cniaamtœ, (juœ in Lacedœtnomis erant pecu- mission. Il paya


£„t7.*"!,r/f7^ff''"'"'''"1"''''' i ^
chèrement le
,

niosisiimœ.V\i\Ka\-.inhg\àe,pag.']Q'j. succès de SOU affaire. Lysaiider,


, ,

AGIS. 26-

l'un des éphores ,


qui avait été le admirable à tout le monde (c).

grand promoteur de la réforme Léonidas se contenta de faire ,

le mit en justice, allégua les si- exiler son gendre, après quoi il
gnes célestes (C), et poussa un s'appliqua tout entier à la ruine
prince du sang royal , qui s'ap- d'Agis. Un des éphores , qui sou-
pelait Cléombrotus et qui était ,
haitait de ne point rendre ce
gendre de Léouidas à s'assurer , qu'Agésistrata lui avait prêté
du royaume. Léonidas transi de ,
fut le principal instrument de
peur, se réfugia dans un temple, l'infortune de cette famille. Agis
oïl sa fille femme de Cléombro-
,
ne sortait de son asile que pour
tus , l'alla joindre. On le cita ; jour qu'il
et aller se baigner. Un
parce qu'il ne comparut point, retournait du bain à son temple ,
on le déclara décliu de sa digni- cet éphore l'entraîna dans la pri-
té , et on la conféra à Cléombro- son. On lui fit son procès, on le
tus. Il obtint la permission de se condamna à mort , et on le livra
retirer à Tégée. Les nouveaux à l'exécuteur. Sa mère et sa
éphores firent un procès d'inno- grand'mère demandaient avec
vation à Lysander et à Mandro- instance que pour le moins on , ,

clidas ceux-ci persuadèrent aux accordât à un roi de Lacédémone


:

deux rois de s'unir et de casser la permission de plaider sa cause


ces éphores. La chose fut exécu- devant le peuple. On craignit que
tée ,mais non jjas sans que la ces paroles ne fissent trop d'im-
.ville fût dans un grand trouble. pression , et l'on se hâta dès
Agésilaiis l'un des éphores sub- l'heure même d'étrangler Agis.
,

stitués à ceux que l'on venait de L'éphore, débiteur d' Agésistrata,


casser, aurait fait mourir Léoni- permit à cette princesse d'entrer
das sur le chemin de Tégée , si en prison il permit la même :

Agis ne lui eût envoyé une bonne chose à la grand'mère , et puis il


escorte. La réformation aurait les fit étrangler l'une après l'au-
]m alors s'établir si Agésilaiis n'a- tre. Agésistrata mourut d'une
vait trouvé le moyen d'éluder les manière tout-ii-fait glorieuse (d].
bonnes intentions des deux rois. L'épouse d'Agis (e) princesse ,

Sur ces entrefaites les Achéens très-riche et fort sage et l'une


, , ,

demandèrent du secours :on leur des plus belles femmes de la Grè-


en donna et ce fut Agis qui eut ce fut arrachée de son logis par
; ,

le commandement des troupes. le roi Léonidas , et contrainte


Il acquit beaucoup de réputation d'épouser le fils de ce prince. C'é-
dans cette campagne (D). A son tait un jeune garçon peu capa-
retour il trouva les choses si ble encore du mariage. Il régna
brouillées par la mauvaise con- après son père, et eut une fin
duite d' Agésilaiis , qu'il lui fut jiour le moins aussi tragique que
impossible de se maintenir. Léo- celle d'Agis, dont il avait tâché
nidas fut rappelé à Lacédémoue : d'exécuter les desseins. Il s'appe-
Agis se retira dans un temple et ,

i'c) Elle s'appelait Chki.onis. Foyer- son


Cléombrotus dans un autre. La iirliclc.
femme de ce dernier se condui- {(l) Voyez l'article Amphabks.
sit d'une manière qui la rendit (e) Elle se nommait Agiatis.
,

268 A G IS.
lait Cléomène {f). M. Moréri ne raient été l'opulence d'Agis et celle
rapporte pas comme il faut ce des rois de Syrie ?
(B) De la part des femmes."] Les
que dit Agis (E) à ceux qui plai- Lacédémoniens étaient les meilleurs
gnaient sa destinée. Les autres maris du monde comrauniquaieut
: ils

dictionnaires sont très-fautifs sur à leurs femmes de la répu-


les afTaires

cet article (F). Meursius ne de- blique , beaucoup plus qu'elles ne


communiquaient à leurs maris les af-
vait pas dire que cet Agis régna faires du ménage (2). Au temps dont
neuf ans {g) car le passage de
; nous parlons presque toutes les ri-
,

Diodore de Sicile , qu'il allègue , chesses de Lacédémone étaient tom-


bées en quenouille elles se trouvaient
regarde un autre Agis. Celui dont :

à la disposition du
sexe; et c'est ce
il est ici question perdit la vie ([ui fit échouer dessein du prince.
le
dans la i35*. olympiade. Les Les dames craignirent de perdre tout
considérations de Plutarque sur à la fois leurs richesses leurs plai- ,

sirs et leur crédit ; et peut-être ne


le supplice de ce roi se verront
se trompaient-elles pas. Mais laissons
dans l'article Ampharès. parler Plutarque. Or, faut-il natter,
dit-il (3) , que la plus-part de la ri-
{/) Tiré de Plutarque , in Vitâ Agidis et
Cleomenis. chesse de Lacédémone estait pour lors
Regao Lacedaem. entre les mains des femmes , ce qui
{g) Meurs, de , p. 87.
rendit l'entreprise plus difficile ; car
(A) Par un de gloire assez raf-
désir les femmes y résistèrent , non-seule-

finé.^ La narration de Plutarque (i)


ment paurce que par icelle elles ve-
nous insinue clairement qu'Age'sis- naient h perdre leurs délices esquel- ,

trata fit voir à son préjudicefils le les , pour n'avoir pas cognoissance du
qu'il se ferait à lui-même par son vray bien , elles constituaient leur fé-
plan de rëformation, vu les grands licité; mais ausii parce quelles voyaient

biens qu'elle posse'dait 5 mais il la que l'honneur qu'on leur faisait et la


pria de vouloir sacrifier ses richesses puissance et autorité qu elles avaient a
à la gloire de son fils. Car jamais , lui cause de leurs richesses , leur venaient
dit-il je ne pourrai aller du pair at'ec
,
à estre retranchées de tout poinct.
les autres monarques sur le chapitre (C) Les signes célestes.] Voici ce
des richesses les i^aleLs des satrapes ,
:
que c'est. Une fois tous les neuf ans
les valets des financiers de Séleucus les e'phores contemplaient le ciel pen-
et de Ptolémée sont plus riches que dant une nuit sereine et sans lune ;
tous les rois de Lacédémone mais si et, s'ils voyaient tomber une étoile ils
:
,
,

par ma tempérance par la grandeur jugeaient que les rois avaient péché
et
de mon âme je m'élève au-dessus du contre Dieu, et ils les suspendaient de
luxe de ces princes et si je puis intro- leur dignité jusqu'à ce qu'il vînt un
,

duire dans mon royaume l'égalité des oracle ou de Delphes ou d'Olympe


biens j'arriverai a la véritable gran- qui les réhabilitât {4)- Lysander, se
,

deur je passerai pour grand prince. vantant d'avoir vu ce phénomène


,

C'est là un raffinement de l'amonr- intenta un procès au roi, et produisit


propre. On vous surpasserait, quelque des témoins qui déclarèrent queLéo-
progrès que vous fissiez par une cer- nidas avait eu deux enfans d'une fem-
taine route; prenez-en une toute con- me asiatique. Or, il y avait une an-
traire, où vous n'aurez pas de rivaux cienne loi qui défendait aux Héracli-
:

ceux qui vous mettront en balance des (5) de faire des enfans à une fem-
avec d'autres pourront soutenir qu'en me étrangère. Quelle bizarrerie qu'un
son genre votre mérite ne cède point gouvernement comme celui-là où la ,

à celui d'autrui. Mais, l'oserait-on fortune des rois n'était attachée qu'au
dire, si la dispute roulait sur des
(2) Idem ibid. ,

qualités de même espèce les unes vi- (3) Plat. ,


Va même. Je me sers de la version ,

siblement inférieures (i'Amyot.


et. les autres ,
(4 Plularcli. in Agide, pag. 800.
visiblement supérieures, comme l'au- (5) C'est-ii-dire aux descendans d Hercule^ ,

du nombre desquels étaient les rois de Lacédé-


(i) Plularcli. in Agide, pag. 798. mone.
.

AGREDA. 269
bon plaisir d'un éphore qui avait vu très-fautifs sur cet article. ] Charles
tomber une étoile, ait subsisté si long- Etienne confond cet Agis avec un au-
temps ? tre plus ancien , et le distingue de ce-
(Dj II acquit beaucoup de réputa- luique les Laccdémoniens pendirent.
tion dans cette campasne.'] Ayant M. Hofman ne commet que la pre-
joint, auprès de Corinthe, Aratus , mitre de ces deux fautes. Lloyd n'eu
général des Achéens il fut d'a\is de ,
corrige aucune,
donner bataille à Tennemi au delà de
Tisthme ; mais il soumit son senti- AGRED4 (a) ( AIapif, d' ) re-
ment à celui de ce général, qui trou- Hgieuse visionnaire Vt^xauxcuac
va plus propos de ne point donner
a ^ fameuse ,
'

bataille. Aratus l'avoue lui-même dans P^^ "^ ouvrage que la borbonne
son livre. XJn certain Bâton de Si- ,
a censuré , a vécu au dix-septième
nope ne laissa pas de publier qu'Agis
, siècle. François Coronel son père,
dissuada le combat, auquel Aratus „i
'1-1 ^^\ A-5
' 1 il u- '.
était résolu 1^6). ^ est-il pas bien etran-
ge qu'un historien débite des choses
*-'' fatliPrinT

<î^i
. ,
Ac Areua
v^ainerma ae A»-û,to sa

demeuraient a Agreda , ville -.ai


niere
.» -

^'

touchant un général qui sont démen- ,


d'Espagne, fondèrent un couvent
ties par les relations de ce général? dans leur maison, le iq de ian-
Est-il bien croyable que ces relations
soient menteuses an préjudice de leur
^.^^^ ^g
,.,
Une révélation parti-
."^ 1

auteur? On peut souôrir cette har- culiere les y poussa. INotre Ma-
diesse pendant quelques mois, et pour ne y prit l'habit de religieuse le
cause mais quand les événemens ont
; même jour que sa mère et que sa
passé ce terme, il ne faut plus contre- «11^ ,/^^
o^,,^ elle „f„- •

j- 1
dire les grands j acteurs.
. sœur y iitproiession avecsa
"-^^"
,
-i"^ r'
'
r
(E) Moréri ne rapporte pas comme
^^^e le 2 de février lb2o{b). Elle
il faut ce que dit ^gis. ] Voici ce que fut élue supérieure l'an 1627 , et
dit Agis en voyant pleurer un des pendant
sergens
gens ^- me
Ne — - pleure
-
:
-' '—
point car — ,
— '
les dix premières années
....--
^^ ^^ supériorité elle reçut de
squ onmejaitviourir avec une in-
puisqu -p.- .11
nr
^}^^ ^^ «^ la vierge Marie plu-

,
•"'
1

lice si criante
justice je suis d'un plus
,

grand mérite que les auteurs de' ma sieurs commandemens d'écrire la


mort (7) Au lieu de cela , M. Moréri vie de la sainte Vierge. Elle ré-
lui fait dire iVe pleure point, car
:
^^^^^ ^ ^g, ^^^dres jusqu'en l'an
ceux qui pleurent sont beaucoup plus /-, , ,, -' -'
.7,
« /^ZaïWre çHe moi. Ce n'est point la ^^.'V qi'flle commença a l e-
seule faute de cet article. M. Moréri crire. lu ajant achevée , elle la
dit faussement 1°. quau commen-
, brûla avec plusieurs écrits quel-
cement du règne d'Agis un éphore
/^ ^^^,-^ composés sur d'autres
,

nomme hpitadeus lit ordonner que , ,, -T . . .

les pères pourraient déshériter leurs ^t'jets;e[le Suivit en cela le COn-


enfans 2°. Q^a'^gis rectifia les ter-
; seil d'un confesseur , gui la
mes de cette ordonnance qui repeu- conduisait en l'absence de son
,

pla en peu de temps la ^ille 3.« que


confesseur ordinaire. Ses supé-
;

les plus considérables donnèrent les -^ , - * . .

mains au dessein d'Agis. Lisez Plutar- fleures et le premier confesseur


que vous verrez 1°. qu'il y avait l'c?i reprirent tres-aig7'emenl ,
, ,

long-temps qu'Épitadeus avait fait et lui commandèrent d'écrire une


passer son décret ^_ qu'Agis n'eut
seconde fois
:
la vie de la sainte
point le bonheur d y taire changer la *'

moindre chose 3°. que ce furent les :


(a) On la nomme ainsi ordinairement pour
gens riches qui s'opposèrent à son des- abréger; mais ce n'est point son nom de fa-
sein. Est-ce consulter les originaux ? mille : ce n'est que nom de
la ville oii était
le
Est-ce les entendre ? le monastère dont elle était supérieure.

(F) Les autres dictionnaires sont {b) La profession de sa sœur fut différée
parce qu'elle n'avait pas l âs^e. Journal de^
(6) Plutarcli. in Agide, pag. 802 Savans du 16 de janvier 1696, pag;. 5i, 32.
(7) Plut, in Agide ,
pag. 804. Edit. de Hollande.
>r!0 AGREDA.
Vierge. Dieu et la Vierge lui la remarque (C) , au commen-
réitérèrent le même commande— cement.
ment. Elle commença d'obéir le
(A) Il y
n tant de folies dans cet
8 de décembre i655. Elle di-
(c) otiurage.'\ « On y
voit qu'aussitôt que
visa cet ouvrage en trois parties » la Vierge fut venue au monde le ,

contenues en huit livres , qui ont ))Tout-Puissant ordonna aux anges


» de transporter cette aimable enfant
étéimprimés à Lisbonne à Ma- ,
« dans le ciel empyree ce qu'ils fî- j

drid , à Perpignan et à Anvers. » reut plusieurs fois. Que Dieu assigna


Le premier a été traduit d'espa- « cent de chacun des neuf chœurs des

gnol en français sur V édition de » anges c'est-à-dire neuf cents pour


,

» la servir et qu'il en destina douze


Perpignan par le père Croset
, ,
,

» autres pour la servir en forme visi-


récollet. Cette traduction fut im- » ble et corporelle, et encore dix-huit
primée à Marseille l'an 1696 {d). » des plus relevés qui descendaient

Il y a tant de folies dans cet ou-


» par l'échelle de Jacob pour faire ,

» les ambassades de la reine au grand


vrage (A), si capables néanmoins « roi- Que pour mieux ordonner cet
de plaire aux dévots outrés de la » invincible escadron on y mit à la ,

sainte Vierge ,
que de
la faculté )) tête le prince de la milice céleste ,
théologie de Paris jugea à propos « saint Micliel. Que la première con-
» ception du corps de la très-sainte
de le censurer (B). Elle en vint » Vierge se fit en un jour de diman-
à bout , malgré les oppositions et n che correspondant à Cflui de la créa-
les vacarmes épouvantables d'une » tion des anges. Que si la Vierge ne
» parla pas dès sa naissance ce n'est
partie des docteurs qui la com- ,

i>pas qu'elle ne le pft t fairej c'est qu'elle


posent (C). Cette censure, quel- w ne le voulut pas. Qu'avant l'âge de
que juste qu'elle soit, n'a pas » trois ans elle balayât la maison et les
laissé de scandaliser une infinité » anges l'aidaient, etc.» 11 y a je ne sais

de gens. On croit que la prévi- combien de pareilles imaginations.


Voilà les extraits qu'un journaliste
sion de ce scandale obligea la protestant en a donnés (i). Un autre
compagnie à insérer dans sou journaliste qui est un bon catholique ,

acte une déclaration (D) qui eût ,


nous assure (2) qu'on ne trouve dans ,

les six premiers cliapitres que des in-


été sans cela bien superflue , puis-
sions par lesquelles la sœur Marie de
qu'il ne s'agissait point des cho- Jésus dit que Dieu lui découvrit les
ses spécifiéesdans cette déclara- mystères de la sainte Vierge et les ,

tion. N'oublions pas que le père décrets qu'il Jit de créer toutes cho-
ses... que, dans le vingtième chapitre
de Marie d'Agreda se fit moine
(3) elle fait le récit de ce qui arriva
,
dans un couvent de l'ordre de a la sainte f^ierge , pendant les neuf
Saint-François , ou deux de ses mois qu'elle fut dans le sein de sainte
fils étaient déjà religieux , et Anne ; qu'elle vient ensuite à la nais-
sance lie la sainte f^ierge au nom qui
quilj vécut avec un grand exem- ,

lui fut donné, aux ^nges qui furent


ple et y mourut saintement (e). chargés de sa garde , aux occupations
Encore moins faut- il oublier des dix-huit premiers mois de son en-
qu'on travaille à Rome à faire fance a l'entretien qu'elle eut avec
,

canoniser Marie d'Agi'eda. Voyez Dieu à la fin de ces dix-huit mois à ,

ses conversations avec saint Joachini

(c) c'est le jour de la Conception de la


et sainte Anne , et aux saints exercice^
Vierge, dans le calendrier. (i) Histoire des Ouvrages des Savans, novein.
(d) Tiré du Journal des Savans du i6 ,
bre 1696, pag. i4o, i4i-
de janvier 1696. (2) Journal des Savans du 16 de janvier lCi)G,
(e) Journal des Savans du l6 de jam>ier
,
pag. 5v.
(3) Là inéinc y
}>ag. 53.
AGREDA. ^V
auxquels elle s' occupajusqu' à ce qu'elle la neuvième proposition explique h la
fût mise dans le temple de Jérusalem, lettre de la sainte f^ierse les paroles
Si quelqu'un s'imaginait que parmi duf^lll'^. chapitre des Proi^erbes
et
tant de visions il n'y a rien qui con- insinue que par elle les rois
, sont éle-
cerne l'apocalypse il se tromperait vez et maintenus sur le trône
,
, les
lourdement car notre Marie , non princes commandent , et les
; puissans
contente d'avoir explique' le XIP. cha- de la terre administrent Injustice
(7).
pitre des réve'lations de saint Jean ,
4°. Que la treizième proposition
est ,
s'est fort étendue à expliquer le XX*^. que SI les hommes
nuaient des yeux
par rapport a la conception de la sainte assez pénétrons pour voir les lumières
Vierge (4). Il serait bien surprenant de la sainte Vierge , elles suffiraient
qu'elle eût pu voguer sur cette mer pour les conduire a l'éternité bienheu-
plusieurs années sans donner dans cet reuse (8). 5°. Qu'ouOe ces propositions
e'cueil. Si vous souhaitez de connaître i-l
J
en a plusieurs autres comprises
le titre de son ouvrage dans la traduc- sous l'article quatorzième et qui sont ,

tion de Thomas Croset lisez ce qui , respectivement condamnées comme té-


suit La mystique cité de Dieu mi-
: ,
méraires , comme contraires à la sa-
racle de la Toute-Puissance , abîme gesse des règles que V Eglise prescrit
de la grâce , histoire divine de la vie à quoi il est ajouté que la plupart res-
de la très-sainte f^ierge Marie mère sentent la fable et les rêveries des au-
de Dieu notre reine et maîtresse ma-
, , teurs apocryphes et exposent la religion
nijestée dans ces derniers siècles par catholique au mépris des impies et des
la sainte f^ierge a la sœur Marie de hérétiques (9) 6°. Qu'au reste , lafa-
.

Jësus abesse du couvent de l'Imma-


, culte déclare quelle ne prétend pas
culée Conception de la ville d'^greda , approuver plusieurs autres choses con-
de l'ordre de saint François et écrite , tenues dans ce livre , et principalement
par cette même sœur par ordre de ses les endroits oit l'auteur abuse du texte
supérieurs et de ses confesseurs. de l'Ecriture en l'appliquant à son
,

(B) La faculté de théologie de Paris propre sens et ceux oii il assure que
,

jugea à propos de le censurer. ] La '^^* opinions qui sont purement scolas


censure qu'elle publia ne m'est connue tiques lui ont esté révélée s. Faisons là-
que par le journal des Savans où j'ai ,
dessus quelques petites réflexions.
vu, 1°. que la sixième proposition con- I. En premier lieu les scolastiques ,

damne'e porte que Dieu donna a la ,


enseignent communément que le ca-
sainte f^ierge tout ce qu'il voulut, et lui ractère distinctif de Dieu et des créa-
voulut donner tout ce qu'il put , et lui tures est que Dieu n'a rien qui vienne
put donner tout ce qui n'était pas l'être d'ailleurs , et que les créatures n'ont
deOieu (5). 2°. Que la septième propo- rien qui ne procède d'ailleurs. C'est
sition est conçue en ces termes : « Je ce qu'ils expriment par les mots bar-
» déclare par la force de la vérité et
,
bares d'a^etras et à'abalieitas: d'où ils
» de lumière en laquelle je vois tous
la concluent que tous les attributs de Dieu
» ces mystères ineffables , que tous les sont communicables à la créature, hor-
» privilèges les grâces, les préro^a-
,
mis Yaseitas; et par conséquent qu'il est
« tives les faveurs et les dons de la
,
possible qu'une créature soit éter-
•»
très-pure Marie y comprenant la nelle , a parte ante , et h parte post
,

» dignité de mère de Dieu dépen- ,


(10) , et infinie quant à la science ,
T> dent et tirent leur
origine d'avoir quant à la puissance quant à la pré- ,

3< esté immaculée et pleine de grâce sence locale quant à la bonté , quant
,

j> en sa conception de sorte que, sans ^ la justice , etc. Ils enseignent cora-
^

j) ce privilège , tous les autres paroî- munément que par la puissance obé-
» troient défectueux , ou comme un dientielle créatures sont suscep-
, les
j) superbe édifice sans un fondement bibles de la faculté d'opérer tous les
j) solide et proportionné
(6). » 3°. Que miracles, et même de la vertu de
créer. Si donc Dieu a conféré effecti-
(4) Journal des Savans du 16 de janvier 1696,
pa^. 53. Là même, pag.
(7) 718.
(5) Journal des Savans du 26 de novembre (8) Là même, pag. 71g.
1696, pag. -17. (9) Là même pag, 720.
,

C6) Joarnal des Savans du 26 de novembre (10) C'est-à-dire, qu^elle n^ait ni commer.çer-
1696,^(1^. 71-. ment ni fin.
,

aya AGREDA.
vement à la sainte Vierge touf ce qu'il et plusieurs nonains qui ont tant
a pu lui conférer il s'ensuit selon cherché à raffiner, il n'y ait eu encore
, ,

les dogmes de l'école dont la sœur personne qui ait dit que la sainte
,

Marie de Jésus faisait grand cas que Vierge gouvernait seule le monde,,

la sainteVierge a existé de tout temps, D'où vient que l'Espagne n'a point
qu'elle peut tout qu'elle sait tout
,
, encore produit des écrivains qui se
qu'elle remplit tous les lieux , et qu'à soient vantés de connaître par révéla-
tous égards elle est infinie. Je n'ai que tion qu'une longue expérience ayant
,

faire de supposer que notre abbesse fait connaître à Dieu le père la capa-
d'Agreda s'est réglée sur les dogmes delà sainteVierge, et le bon
cité infinie
des scolastiques espagnols j car peu usage qu'elle avait fait de la puissance
m'importe qu'elle dont il l'avait l'evétue il avait résolu
les ait sus ou qu'elle ,

les ait ignorés. d'abdiquer l'empire de l'Univei's et


Elle enseigne nette- ;

ment que Dieu que Dieu le fils ne croyant pas pou-


a donné à la sainte ,

Vierge tout ce qu'il a pu et qu'il a voir suivre un meilleur exemple, avait


,

pu lui donner tous ses attributs hor- suivi la même résolution de sorte que
, :

mis l'essence même divine. Cela me le Saint-Esprit toujours conforme ,

suffit pour tirer la conclusion que j'ai aux volontés des deux personnes dont
tirée; et, cela étant, ne doit-on pas il procède approuvant ce beau des- ,

s'étonner que la Sorbonne ait seule- sein toute la Trinité avait remis le ,

vaeat dit c{ue cette proposition estJaiis- gouvernement du monde entre les
se, tf-méraire, etcontraire h la doctrine mains de la sainte Vierge et que la ,

Je /'.Cffl/î^i/e (i i) ? Une telle censure cérémonie de l'abdication, et celle


ne sent-elle pas la mollesse ? Fallait-il de la translation de l'empire, s'étaient
se contenter de ces faibles qualifica- faites solennellement en présence de
tions ? Suffisait-il d'assurer que l'on tous les anges qu'il en avait été dres-
5

se trompe témérairement lorsqu'on se un acte dans la forme la plus au-


applique à la sainte Vierge le sens lit- thentique ; que depuis ce jour-là ,
téral de ces paroles de Salomon Par : Dieu ne se mêlait de rien et se re- ,

met régnent les rois, et les puissansde posait de tout sur la vigilance de Ma-
la terre administrent la justice (12) ? rie ;
que les ordres avaient été expé-
Voici ma deuxième réfiexion. *
11.
diés à plusieurs anges d'aller notifier
Ceux qui ont examiné attentivement sur la terre ce changement de gouver-
tout ce qui s'est dit de la puissance nement afin que les hommes sussent
,

de la sainte Vierge , et toute la part à qui et comnaent il fallait avoir re-


qu'on lui donne au gouvernement de cours à l'avenir dans les actes d'invo-
rUnivers , ont pris garde que les der- cation que ce n'était plus à Dieu ,
;

niera venus voulant enchérir sur les


,
puisqu'il s'était déclaré lui-même eme-
auteurs précédens ont été cause que ,
ritus , et rude donatus a la samte , m
Ton a trouvé enfin les dernières bornes Vierge comme à une médiatrice ou ,

de la flatterie. Mais comme les raisons à une reine subordonnée mais com- ,

d'aller toujours plus avant n'ont jamais me à l'impératrice souveraine et ab-


cessé ; car lorsque la dévotion des solue de toutes choses ? D'où vient
peuples doit servir de revenu à beau- encore un coup qu'une telle extra- ,

coup de gens qui veulent vivre à leur vagance est encore à naître ? En avez-
aise , il la faut réveiller , et la rani- ^ous jamais ouï parler? me demanda-
mer de temps en temps par des râ- t-on un jour. JYon, répondis-je; mais
goûts d'une nouvelle invention com- :
je ne t^oudrois pas jurer que cette pen-
me cela fait qu'il est utile de
dis-je sée^ n'ait jamais paru et encore moins ,
, ,

franchir les bornes , il y a lieu de s'é- qu'elle n'éclora jamais de quelque


tonner qu'on n'ait pas rompu la bar- ceri^eau malade de dévotion et peut- ;

rière et qu'entre plusieurs religieux être que si Mprie d'Agreda eût t^ccu
,
encore dix ans elle eût enfanté ce,

(11) Journal des Savans , novembre 16961 TO0«4tre (l3) , et nous eilt donné une
p. -ji:-

Là même, pag- 718.


(12) (i3) Notez qu'abusant comme elle faisait île
i'L. J. Leclerc, et Joly , qui le plus souvent VEcrilure (voyez le Journal des Savans île no-
n'eilque son rrpe'liteur , disent que cette ré- vembre i6y6, pag. 720, ) elle n'eût pas manqué
flexion est une imagination creuse pour ne rien ,
de se prévaloir de ce qui est du dans saint Jean,
dire de plus. iliap. V, v. 11 Le Père ne ju^e peraonne; mais
:
,

AGREDA.
copie de l'acte de l'abdication , où (C) Malgré les oppositions... d'une
nous eussions l'u que la 'J'rinité , i^ou- partie des docteurs qui la composent.']
lant désormais viure en repos et re- , Voici quelques extraits dun imprimé
connoîlre les obligations qu'elle afoit qui a pour litre L'affaire de Marie
:

à la sainte P'ierge , qui soutenoit si d'Agreda manière dont on a


, et la
sagement depuis tant de siècles une cabale en Sorbonne sa condamnation
partie considérable des fatigues de la (i5). C'est une lettre d'un anonyme
régence du inonde n'a^oit cru pou- , à un anonyme. L'odeur de sainteté
l'oir rien faire de plus à propos , ni dans laquelle est morte cette bonne
choisir une récompense plus conve- religieuse , et la canonisation que l'on
nable a ses mérites que de se démettre ,
poursuit en la cour de Rome, m' aboient
ensajafeurde l'autorité absolue sur donné une si haute idée de sa per-
toutes choses. Il faut pourtant avouer sonne , que je fus surpris d'apprendre
que l'idée de Taction inaliénable de que la faculté de Théologie de Paris
Dieu est si clairement connue dans s'assembloit pour condamner ses ou-
toutes les communions chrétiennes , vrages. C'est ainsi que parle l'auteur
qu'il n'y a point lieu d'appréhender (16). Après cela , il suppose que c'é-
que ce monstre d'abdication y pi\t taient quelques dmes vénales , qui , à
vivre quelque temps , supposé qu'il y sollicitation de trois prélats , ausquels
pût naître. Nous ne devons pas crain- ils sont dévouez en poursuiuoient la
,

dre cela de nos jours que cela nous : condamnation (17). « En voici toute
suffise ; ne nous tourmentons point de » l'intrigue , continue-t-il (18). Mon-
ce que l'on pourra voir dans cent » seigneur prélat plus attaché
ans d'ici nostros maneat ea cura ne-
: » aux sentimens de saint Thomas
potes. )) qu'un jeune jacobin qui ne doit ju-
III. Je dis, en troisième lieu, qu'il n"y » rer qu'w verba magistri , n'a pu
a rien de plus vrai que la remarque )) souflrir jusqu'à présent que la fa-
de la Sorbonne que le livre de l'ab-
,
» culte ait donné avec tant de préci-
besse d'Agreda contient plusieurs cho- » pitation dans l'immaculée Concep-
ses qui exposent l'Eglise romaine au )> tion de la Vierge. La haine qu'il
mépris des impies et des hérétiques. )' portoit au F. Thomas Croset, récol-
Bien a valu à la religion chrétienne ,
» let et traducteur de ce livre , causée
que les Celsus et les Porphyres n'aient » par le rapport qu'on lui avoit fait
pas pu la combattre par les armes que j) de ce que le traducteur avoit dit con-
de tels écrits infinis en nombre peu- » tre lui, après le refus qu'il lui avoit
vent fournir aujourd'hui. Que n'eût » fait d'une station dans son diocèse ;
point dit en ce temps-là contre l'E- » et l'envie de dédommager A... im- ,

glise un auteur païen qui aurait eu » primeur du roi , demeurant à pré-


la véhémence et le caractère d'Ar- )) sent ici , de considérable
la perte
nobe ? Si Henri Etienne et Philippe , » qu'il avoit ouvrages ,
faite sur ses
de Marnix revenaient au monde, quels » et qui avoit pris l'impression de ce
supplémens ne feraient-ils point par » livre, imprimé chez fl... demeurant
la mystique cité de notre Marie d'A- » à Marseille furent le fondement du
,

greda l'un à son Apologie d'Hérodote,


,
» trouble qui est dans la faculté ; car,
l'autre à son Tableau des différens de )) pour vendre un livre , il suffit
faire
la religion ? » qu'on le condamner. Cha-
veuille
IV. Enfin je dis que nos prétendus
,
;> cun y court comme au feu 5 et ce
auteurs à révélation se moquent du » livre qui ne valoit que 20 s., A...
monde. nous donnent comme ré-
Ils ))le vend 10 liv. , sans ce qui s'en
vélé ce qu'ils ont appris par la lecture. » débite sous le manteau d'une im-
Voici l'abbesse d'Agreda qui affirme » pression contrefaite. Ce prélat, pour
que des opinions qui sont purement
,
t> réussir mieux dans son dessein, pré-
sco'astiques lui ont été enseignées
,
» vint monseigneur... , prélat des plus
divinement (i4)-
(i5) Quoiqu'on marque au titre qu'on l'a
dans la /'*.
imprimé à Cologne , l'an 1697 , je crois qu'il a
il a donné tout jngement au Fils : eL
été imprimé à Paris. C'est un in -11. de ^o pag,
aux Corinthiens, chap. v. 24 Huand XV, >

Christ aura remis le royaume à Dieu le Père. (16; Pag. 3.


(i4) Journal des Savans; novembre 1696, (17) Pag. 12.
p. 720. (18) Pag. i3e« îuiV.

TOME I. 18
,

274 AGREDA.
modérez du royaume fous deux se : l'assemblée , d'une telle manière, qu il
5)

«joignirent à monseigneur d'un — ,


semblait qu'on fust dans une halle
j) génie fort médiocre et susceptible (25).... Le lendemain , messieurs du
)) de prévention donnant dans la cé- ,
It'las et du Mas , cy-devant conseil-

» rémonie et dans la bagatelle il faut : lers au parlement de Paris , protestè-


» que vous remarquiez que ces sei- rent de nullité contre la censure , et
» gneurs se tieunent tous par la main. firent signifier leurs protestations au
« Ces triumvirs parlèrent donc à leurs doyen et syndic de la faculté qui ,

5) créatures et gagnèrent M. Lefèvre subsiste , ne s'en estant pas désistez ,

j) syndic de Sorbonne,» qui proposa à par aucun acte {16). Depuis ce temps
la faculté le 20 mai le liure de Ma- le syndic et les députez se sont assem-
, ,

rie d'^greda. On nomma des députes blez et ont fait une autre censure ,

pour Texaminer. Us rapportèrent (19) qui fut lue le premier octobre mais ;

soixante-huit propositions qu'ils qua- ,


auparavant la lecture , monsieur le
lifié' eut d'hérétiques , de téméraires ,
syndic fit savoir a la faculté l'oppo-
de scandaleuses et qui offensaient les
,
sition qui lui avait esté signifiée par
oreilles chastes. Elles furent impri- ces deux messieurs. Il dit de plus, que
mées avec les qualifications des dépu- monseigneur de Paris, les ayant fait
tés , et distribuées aniessieurs les doc- venir dans i archevesche les avait ,

teurs (20) pour y


dire leurs sentirnens convaincus par de si bonnes raisons ,

h la première assemblée ("il). Le pèi'e que monsieur l'abbé du Mas s'y estait
IMéron , cordelier , dont nous aidons de laissé aller , et qu'il estait sur que
très-beaux ouvrages , tant de philoso- lorsque monsieur du Fias aurait ouy
phie que de chronologie supplia la ,
la lecture de la censure comme elle
faculté de vouloir ne pas se précipiter estait, il y donnerait les mains. L'on
dans la condamnation d'un lit're, dont lut donc l'ouvrage du syndic et l'on ,

le souuerain pontife s'éloit réservé la fut surpris qu'il y avait des proposi-
connaissance et avoit député des car-
, tions nouvelles et censurées dont on ,

dinaux qui l'examinaient à présent n'avait point entendu parler dans la


(22].... La cabale se déchaîna contre faculté , qu'an en avait retranché plu-
lui ; et ilfut contraint de dire que si , sieurs condamnées , etc. (2']). Mes lec-
l'on passait outre sans avoir égard a , teurs jugeront ce qu'il leur plaira de
sa supplique qu'il appelait de tout
,
ces extraits.
ce qui se ferait contre ce livre au pon- ( Z> ) Que la prévision de ce scan-

tife. Il déclara néanmoins que si cet , dale obligea la compagnie à insérer


appel blessait en quelque manière les dans son acte une déclaration.'] « Elle
droits de l'église gallicane , il s'en dé- » a fait , avant toutes choses , une pro-
sistait (23). Depuis ce jour-là, jus- )) testation solennelle
,
qu'elle ne pré-
qu'au temps de l'assemblée , on mit » tendrien diminuer par cette censure
en usage plusieurs brigues. Le jour de » du légitime culte que l'Eglise ca-
l'assemblée venu messieurs du Saus- , » tholique rend à la sainte Vierge:
soy et Gobillon condamnèrent le li- » qu'elle l'honore comme mère de
vre (24).--. « mais M. le Caron mon- » Dieu^ qu'elle a une confiance parti-
« tra qu'il n'y a voit rien qui méritât » culière en son intercession ; qu'elle
» d'estre censuré ce qu'il appuya de , » se tient au sentiment de ses pères
)) bonnes raisons. Chacun eut ses par- touchant la Conception immaculée
))
,

» tisans qui parurent dans vingt-


, son Assomption au
» et qu'elle croit
j) neuf assemblées consécutives. Le » ciel en corps et en âme ( 28 ). »
)> syndic baptisa ceux du parti de M. L'auteur de la lettre dont on a vu
» le Caron , Agredins , nom qui leur des extraits dans la remarque précé-
» reste. » L'afiàire fut conclue le i" dente dit que la censure où l'on a
, ,

septembre. On ciia dans la salle de établi pour dogme la Conception et


l'ytssamption delà P^ierge , fut faite
(19) Dans l'assemblée du 2 de juillet. Là mê-
me, pag. 28. par le syndic et les députés , depuis
(20) Là même pag. , 2g. (îS) Là même pag. 37.
,
(21) Indique'e au ^!^ du mois de juillet.
(26) Là même pag. 38. ,
(22_) Là même pag. , 3o.
(27) Là même pag. 3g.
,

(23) Affaire de Marie d'Agreda, pag. 3l. (28) Jouroal des Savans novembre 1696, p-
,

(7.!^J Là même, pag. 35 , 36. 716, 717.


,

AGREDA. 2t5
que corps de la faculté eut mis la
le qu'ils sont tous demeurés muefs jus-
dernière main au jugement (29). Cela qu à présent , si je ne me trompe
,

montre que Ton n'eut pas le courage eux qui sont si alertes à condamner
de publier la censure de la faculté , lesouvrages qui s'opposent tant soit
sans y joindre des préservatifs ^ et par- peu aux traditions les plus douteuses,
là , nous pouvons connaître à quels mais favorables à l'augmenlation du
périls on s'expose quand on désap- ,
culte des saints (33).
prouve les erreurs les plus palpables Notez qu'il y a une raison parti-
qui amplifient les honneurs de la culière qui peut obliger la Sorbonne
sainte Vierge. On s'espose , non-seu- à quelque ménagement, et l'exposer
lement à l'indignation des peuples , aux oppositions de plusieurs docteurs.
mais aussi à celle des moines et de C'est qu'on a tiré tant de conséquen-
plusieurs autres ecclésiastiques. On ces de l'épithète de Mère de Dieu
,

cherche donc des moyens de parer le qu'il n'y a presque point de pensée
coup par des préfaces étudiées (3o). outrée touchant l'excellence et le pou-
Quelle servitude! et qu'elle fait voir voir de la Vierge qui ne puisse être ,

que le mal est incurable Ce que Tite- ! en quelque façon soutenue par les
Live disait de la république romaine argumens ad hominem que ces consé-
convient aujourd'hui à l'Église de ce 3uences fournissent. On vous mène de
nom Labente deindè paulathn disci-
: egré en degré presque partout où.
plina Inclut desidentes primo mores
, l'on veut les subtilités des scolasti-
:

sequatur animo deindè ut m'igis ma- : ques vous désolent si vous reculez ; ,

gisque lapsi sint , tîim ire cœperint on vous convainc d'inconséquence.


prœcipites , donec ad hœc tempora , De là est venu que ceux qui se sont
quibus nec l'itia nostra nec remédia piqués de raisonner conséquemment
pati possumus , perfentum. est (3i). et de favoriser tout à la fois la dévo-
Elle ne peut souffrir ni le mal ni le , , tion populaire, ont mieux aimé s'a-
remède. L'ouvrage de Marie d'Agreda vancer toujours de plus en plus que
est manifestement plein de fables, et de reculer. Et néanmoins, leur systè-
de doctrines absurdes; cependant, me n'est pas encore d'une figure ré-
comme il favorise les fausses idées gulière il y manque la divinité de
:

que l'on veut avoir de la dignité émi- -Vfarie au sens littéral ; pui=;que selon ,

nente et du pouvoir de la illimité l'ordre la mère de Dieu doit éti'e


,

sainte Vierge il faut se servir de tou-


, déesse et univoquement de même na-
,

tes sortes de machines pour venir à ture que son ûls. Elle le serait, si l'on
bout de le censurer dans Paris. L'au- voulait adopter l'imagination du ca-
teur de la lettre (Sa) fait plus de tort valier Borri (34); mais on l'a condam-
qu'il ne pense à son église et à sa née. Un jour viendra peut être qu'on
nation lorsqu'il étale les brigues qui
, en connaîtra la nécessité et qu'on ,

ont été employées par ceux qui vou- carrera par ce moyen la figure irré-
laient faire censurer la Cité mystique gulière. C'est le vœu croit -on de , ,

de cette abbesse espagnole. 11 n'eût beaucoup de gens (35). Tout est pos-
point fallucabaler, si les esprits n'eus- sible en ce genre-là , sous certaines
sent été dans un endurcissement pro- circonstances comme vous diriez la
,

digieux il n'eût point fallu recourir


; combinaison des intérêts temporels et
à des adoucissemens. La censure au- des intérêts spirituels. Tout passe ,
rait été faite du bonnet et personne , lorsque les princes concourent avec
n'en eût murmuré. Tous les tribunaux les chefs d'un parti ecclésiastique ,
de l'inquisition eussent prévenu la fa- pendant certaines dispositions des af-
culté de théologie de Paris au lieu , faires générales.
Finissons par dire que si la faculté
(29) Affaire de Marie d'Agreda , pag. 3o.
(3o} NoLez que , par rapport aux dévots , on (33) T.es ActaSanclorum des jésuites d'Anvers
a appliqué sur ce sujet ces deux vers de M. Des- ont été condamnés par l'inquisition de Tulhde.
préaux :
(34) Voyez la remarque (B; de l'article Bo«-
Un auteur à genoux, dans nne humble préface, r.i ^ et le texte de cet article un peu au-dessus
,

Au lecteur qu'il ennuie a beau demander grâce. de Cendroil auquel se rapporte cette remarque.
(35) O si angulus ille
(3i) Livius, Hlstoriar. lib. I , initia. Proximus accédai , qui nunc déformât
(32) Dont on n rapporté le titre au commen- (tsellunu
ciment de la remarque ^C] Horat. Sat, VI , Ub. II , os. S.
,, ,
.

AGRICOLA.
de théologie de Paris a espéré que sa Maurice, duc de Saxe mais aussi ,

censure ôlerait du chemin de ceux une partie de son bien de sorte ;

qu'on nomme noui'eaux réunis une


qu'il remporta de ses travaux
pierre d'achoppement, elle s'est trom-
pée ; car les oppositions qu'il lui a beaucoup plus de gloire que de
fallu surmonterdans son propre corps, profit. 11 composa plusieurs ou-
et le mécontentement qui a éclaté vrages sur la matière qui lui te-
après la publication de la censure
nait le plus au cœur , et quelques
ont beaucoup plus scandalisé les réu-
nis que la censure n'aurait pu les autres sur divers sujets (A). Il
,

édifier. Outre que leur grand sujet examina ce que Budé , Léonard
de scandale est tout entier dans la Porcins et Alciat avaient observé
pi'éface de cette censure préface qui :

touchant les poids et les mesu-


est un signal élevé de la continua-
tion d'une controverse capitale je res , et y remarqua bien des fau-
,

veux dire d'un culte dont les excès tes. Alciat se voulut défendre et
ont excité quelques curieux à philo- n'y trouva point son compte.
sopher pour en découvrir l'origine
Bodin soutient qu'en comparai-
(36).
son d'Agricola les Aristote et les
(36) Voyeila remarque (N) de l'article Nes-
TORIOS. Pline n'ont été que des aveugles
sur les questions métalliques {b).
AGRICOLA. Un nombre près- i\ ^e faut pas oublier que lorsque
que infini d'auteurs portent ce jg j^. Maurice et le duc Auguste
nom mais comme il n'y en a allèrent joindre en Bohème l'ar-
;

que trois ou quatre qui me soient ^^^^ ^^ Charles-Quint Agricola ,

un peu connus je ne parlerai i^^ sej,^.jt po^r leur témoigner sa


,

que de ceux-là. fidélité quoiqu'il fallût qu'il ,

AGRICOLA (George) , méde- abandonnât le soin de son bien ,

cin allemand , excella dans la ses enfans , et sa femme qui était


connaissance des métaux. Il na- enceinte (c). Il mourut à Chem-
quit à Glaucha , dans la Misnie nits le 21 novembre i555, très-
le 24 mars i494- Les découver- bon papiste. L'ardeur avec la-
tes qu'il fit dans les montagnes quelle il combattit sur ses vieux
de Bohême , après son voyage jours la doctrine protestante ,
d'Italie , lui donnèrent une pas- dont il n'avait point paru fort
sion ardente de connaître à
si éloigné au commencement (B) ,

fond tout ce qui concerne les mé- le rendit si odieux aux luthériens,
taux , que lors même que par le qu'ils le laissèrent cinq jours sans
conseil de ses amis il se fut en- sépulture (C). 11 fallut qu'on al-
gagé à pratiquer la médecine à lât tirer de Chemnits ce cada-
Joachimstal {a) il donnait le vre , pour le transporter à Zeits
,

plus de temps qu'il pouvait à l'é- oii il fut enterré dans la princi-
tude des fossiles. Pour mieux sa-
{b) Bodin. in Metliod. Hisl. Voyez dans
tisfaire cette passion, il se trans-
Pope Blount, Censura celebrior. Authorum.
porta à Chemnits , oii il s'appli- pag. ^i3 rin grand nombre d'éloges très-
,

qua tout entier à cette étude. Il honorables d'Agricola.


Vxore prœgnanle cum dulcissimis libe-
y dépensait non - seuleinent
(c)
la
ris doini reliclâ fortitnis etiam omnibus
,

pension qu'on lui avait obtenue de posthabitis ciim jiisjurandum , r/uo eis erat
,

devinctiis, nitllo modo negligendum putaret,


(a) C'est-à-dire , la vallée de Joachim. in excrcitn eoriim penè senex militavit. M elcli
C'est une ville de Misnie. Adam, Yilie Medic. ,
pag. 79.
, ,

AGRICOLA. irjrj

pale église {d). Voilà des fruits au même piège qu'Érasme j el de là


vient que 'Théodore de Bèze rencontre
du zèle aveugle (D).
tant de personnes dans son chemin ,
(d) Id. ibid. ,
pag. 77 el seq. qui avaient d'abord goûté la bonne
semence, et puis s'étaient replongées
(A) H
composa plusieurs ombrages au bourbier ;4). Quand on parle de
sur la matière qui lui tenait le plus au cela à des gens qui peuvent entendre
cœur, et quelques autres sur dii'ers su- raison , on les voit dire que dans l'état
jets.} Voici les titres de (|uelqiies-uns :
où étaient les choses , il n'y avait pas
De Orlu et Causis Suhterraneorum. moyen de se soutenir ni de s'avancer
De naturd eorum quce ejfluunt ex Ter- avec un sfyle débonnaire , et par la
ra. De naturd Fossiliuin. De niedica- pure patience et qu'ainsi la Provi- ;
tisFontibus. De subterraneis Aninian- dence de Dieu, dont les voies sont tou-
tibus. De t'eteribus et notais Metallis. jours infiniment sages , laissa voir
De MetalUcd. Je compte pour un
re grand ouvrage de la
l'homme dans le
ovivrage de politique sa Harangue de ,
réformation afin de parvenir plus ,
Belto Turcis injèrendo (i); pour un naturellement à son but , qui était ,
ouvrage de controverse son Traite' comme l'expérience nous l'apprend
,

de Traditionibus Apnstoticis ; et pour d'empêcher qu'aucune des deux reli-


un ouvrage de médecine, son Traite' gions n'achevât de ruiner l'autre.
de Peste. Alelchior Adam ignore si ces C'est bien dit. Il
y a certains moyens
deux derniers ouvrages ont jamais été qui par cela même qu'ils sont fort
,
imprimés je l'ignore aussi quant au propres à faire la moitié de l'œuvre
:
,
,
traité de controverse ^ mais je sais
sont incapables de la faire toute.
que l'autre parut à Bâie l'an i55^ (C),
Ils le laissèrent cinq
, jours sans
et qu'il avait été depuis imprimé deux
sépulture. ] Scaliger a condamné avec
fois avant que Melchior Adam publiait
raison cette conduite. Agricolam, dit-
son livre. Voyez Mercklin dans son quo nihil dociius Lutlierani
il (5) , ,

Lindenius reiioi'utus. mortuum sepelire noluerunt ^ quia


(B) Il n'auait point paru fort éloi-
manserat Ponlificius. Ilalus quidam
gne, au commencement, de la doctrine scripsit et liortatus est ut sepelirent ,

prolestante. ] Il avait désapprouvé , hominemchristianum ; barbaries mag-


non-seulement le trafic sordide des na. Je n'oserais soutenir qu'il est faux
indulgences mais aussi plusieurs au- qu'un Italien ait exhorté par une let-
,

tres choses. Voici quatre vers de sa tre à cet office d'humanité mais je ;

façon, qu'on afficha en l'an 1 5 19 dans n'y vois aucune apparence la mé- :

les rues de Zwickaw (2); ils regardent moire de Scaliger ou celle de ses pen-
les indulgences de Rome sionnaires ont confondu apparem-
;

Si nos injecto salvabil cistuia nuintno ment les objets. 11 y a une lettre de
,

Heu nimi'uin infelix tu miki pauper eris Matthiole , où il fait ses doléances de
'.

Si nos Christe lud servatos morte beasli


^
ce qu'un véritable vieillard tel que
,

Jani nihil infelix tu niihi pauper eris.


George Agricola n'avait pu trouver
Melchior Adam a cru que quatre cho- dans sa patrie autant de terre qu'il
ses empêchèreut la conversion d'Agri- en fallait pour couvrir son corps. Id.
cola. i^Les écrits téméraires de quel- MntOiiolus ad Caspar. Ncevium Med.
ques théologiens. 2° La vie scanda- ( lib. 1. Epist.) qiieriliir hune prœ- ,

leuse de quelques sectateurs de la ré- claruin probumque senem in patrid


forme. 3° Le brisement des images et tantiim îerrœ non im^enisse quo suiim. ,

la révolte des paysans. 4'^. L'inclina- operiretur cadat^er. '6). De cela on a


tion naturelle qu'il avait pour la pom- pu forger qu'un Italien exhorta par
pe des cérémonies (3). De ces quatre une lettre ceux qui avaient le corps de
choses les trois premières dégoûtè- ce savant homme à l'inhumer. Qu'on
,

rent entièrement Erasme du parti des ne s'étonne point que je fasse peu de
protestans. Un grand nombre d'autres cas de ce que dit ici le grand Scali-
personnes c[ui avaient soupiré après la ger ; car quel fond pourrais-js faire
ré'formation de l'Eglise, s'achoppèrent sur lui concernant Agricola puis- ,

(1) Imprime' à Baie , Cait i538. (4) Korez son Histoire des Eglises.
12) Ilj- enseignait le grec. (.5) In Scaligeraois, pag. 5.
(ï; Mcfcli. Adam, Vit. Medicor. pag. 80. (G)iileli.'u. Adam, Vit. Medicor. ,
pag. Sa.
,

2^8 A GR ICO LA.


qu'il avait dit un autre jour que c'é- a dit qu'il avait suivi l'électeur
tait UD grand impie qui n'avait mé- de Saxe en qualité de son mi-
rite qu'à peine d'être enterré ? Non
nistre à la diète de Spire l'an ,
minus eriiditus et in censendâ melal-
loruin natuiâ curiosus Juil quant uerè 1626, et à celle d'Augsbourg ,
inipius , nulli addictus religioni , ut l'an i53o mais il est sûr qu'il
;

post junrteni mix sepeliri meruerit (7). ne fit ces deux voyages qu'en
(Dj f^oila des fruits du zèle ai'eu-
qualité de ministre du comte de
gle. 1 II n'y a point aujourd'hui de

protestant qui ne condamne la con- Mansfeld. Il est vrai que ce


duite que l'on tint envers ce cadavre 5 comte les fit avec l'électeur de
et je ne doute pas que dès ce temps-là
Saxe , et que pendant ce temps-
la plupart des luthériens ne la con-
là son ministre prêcha quelque-
damnassent. Melchior Adam paraît en
jeter toute la faute sur le ministre du fois devant l'électeur, et voilà
lieu. Il est maintenant plus aisé de l'origine de la naéprise. Agricola
voir le désordre de ce faux zélé ^ le
ne réussit pas mal à prêcher ;
temps a calmé les ressentimens qui
comme des tempêtes impétueuses , dé- cela lui fit croire qu'il était un
robaient la vue du ciel : grand personnage , et qu'il pou-
Eripiunl subito nubes calumque diemque vait s'élever au-dessus de Mélan-
Teucroruni ex oculis : ponto nox incubai
atra (8).
chthon. C'est pourquoi il écrivit
contre lui , en i52y (c). Son hu-
A quoi ne se porte- t- on pas pour
meur inquiète et ainbitieuse l'en-
user de représailles , et lorsqu'on a
sujet de parler ainsi ?
gagea en i536 , à demander
,

Bes dura et regni noviias me talia cogunl


permission de sortir de sa patrie,
, ,

Moliri (9). où il exerçait le ministère et la


Le sieur Freher remarque qu'Agricola principalité du collège. Sa de—
se mit tellement en colère dans une iTiande fut accompagnée de plain-
dispute de théologie, qu'il gagna une tes et parut si déraisonnable au
,

lièvre chaude qui l'emporta (10). Il


comte de Mansfeld qu'il n'ob-
ne cite que Melchior Adam qui n'en ,
,

dit rien.faut croire qu'Agricola


Il
tint son congé qu'avec de fâcheux
avait irrité les luthériens par des mar- reproches d'ingratitude , d'ava-
ques d'une aversion excessive. Pierre nce et d'ivrognerie; outre qu'on
Albinus le représente (11) comme un
lui dit qu'il avait exercé sa charge
catholique romain obstiné. Comparez
cela , je vous prie , avec le premier négligemment, et plus disputé
Scaligerafia. contre évangéliques que con-
les

(7) Scaligerana prima , pag. ^3.


tre les catholiques. Il s'en alla à
jEnfid. , lib. /, vs. 88.
(8) Virgil.
Wittemberg et y obtint une ,
(9) nido apud Virgilium, yEn. lib. I, m. 563.
(10) Paul. Fielieri Thealr. Viror. Ulusti-. , p. chaire de professeur et de minis-
1238.
(il) Dans la Chronique de Misnie. tre. Il enseigna des doctrines
peu édifiantes touchant l'usage
AGRICOLA (Jean), théolo- de la loi sous l'Évangile en un ;

gien saxon né à Islèbe {a) le 20 mot il


, devint fondateur de la
d'avril 1492 {b) ne causa que secte antinomienne
,
(d). Luther,
des désordres dans la religion qui avait été son bon ami (A) ,

protestante qu'il embrassa. On l'attaqua bien rudement et l'o- ,

(a) Ville du comté de Mansjeld. Il bligea à promettre qu'il rétrac-


était aussi connu sous le nom de d'islebius
t/uc sous celui frAgricola. (c) C'était touchant le formulaire de la
(^)Melcli. Adam, Vit. Theologor., pag. Visite ecclésiastique, dressé par Melanchihnn.
409, ((•/) Voyez ('article IsLÉBlENS.
AGRICOLA. :9
terait ses erreurs mais pendant pardon à ceux qu'il avait pu of-
;

quel'on ti-availlait à dresser le for- fenser par ses erreurs, et à Lu—


niulaire qu'il devait signer , Lu- ther nommément , et protesta
ther fit de nouveaux livres dont de vouloir vivre et mourir dans
Agricola se sentit tellement pi- la foi qu'il avait combattue. Lu-
qué , qu'il présenta (e) à l'élec- ther ne se fia point à ces belles
teur une requête fort choquante protestations. Agricola s'en plai-
contre son antagoniste , oii il gnit à l'électeur de Saxe , et lui
se plaignait entre autres choses témoigna qu'il n'avait jamais eu
qu'on lui imputait des sentimens un déplaisir aussi grand que celui
qu
qu'ilu n avait pas. Luther lui ré-
n'avait j;
que son démêlé avec l'homme de
pondit avec tout son feu et ; Dieu lui avait donné (g) et que ,

pour ne demeurer pas chargé de puisqu'il ne gagnait rien par l'of-


la note de calomniateur public , fre de son serment, il remettait
il fit venir des attestations d'Is- sa cause au juge du monde, sup-
lèbe sur quelques conversations pliant néanmoins très— humble-
particulières d' Agricola. Les théo- ment monsieur l'électeur de lui
Wittemberg accouru-
logiens de fairepayer trois mois de gages qui
rent au secours de Luther , et lui étaient dus, dont il avait bon
prononcèrent que ses accusations besoin pour nourrir sa femme et
étaient bien fondées. L'électeur ses neuf enfans (/?). Je ne pense
de Saxe, bien embarrassé, avait pas qu'il ait jamais pu rentrer en
fait donner des juges aux parties, grâce ni auprès de l'électeur ni ,

et témoigné qu'il souhaitait qu'on auprès de Martin Luther. Il s'en


trouvât des voies d'accommode- consola sans doute par l'éclat que
ment; et puis il fit promettre à lui donnait à Berlin sa charge de
Agricola de ne se point retirer prédicateur de cour et par le ,

avant la fin du procès. Cette pro- choix que l'on fit de sa personne
messe fut violée Agricola se re— pour la composition d'un ouvra-
;

tira tout doucement à Berlin (J"), ge qui fit grand bruit. Je parle
sans attendre la réponse à la de- de Vlntéritn qu'il dressa avec Ju-
mande qu'il avait faite de son les Phlug et avec Michel Heldin-
congé. L'électeur de Brandebourg gus (/) l'an i548. On prétend ,

tâcha de le réconcilier avec Lu- que l'empereur récompensa lar-


ther; mais il n'y eut rien à faire gement Agricola de la peine qu'il
qiie sous l'une ou l'autre de ces avait prise en cette rencontre.
deux conditions ou qu'Agricola La guerre qui s'éleva quelque
,

reviendrait poursuivre le juge- temps après en Allemagne entre


ment du procès, ou qu'il donne- les théologiens protestans (k) fit
rait par écrit une rétractation de connaître que ce ministre était
ses erreurs, et des injures qu'il
{g) Voyez la remarque (B).
avait dites à Luther. Il choisit {h) Tiré de la Réponse de Seck^nàorS au
ce dernier parti (B), et publia un Luthéranisme c/k père Maimbourg liv. Itl, ,

pag. 3o6, 3 10.


livre à Berlin , où. il demanda (r On le nomme ordinairement Michaël
Siduuius parce qu'il était évéque titulaire de
(c^ Le 3o mars iS^o, pendant VassonbU'e Sidon.
*
de Smalcalde. (A) C'était sur la question des choses in-

{/) En i54o. différentes en la religion.


280 AGRICOLA.
un espl-it dangereux et un grand gagner en Saxe un procès à ce prix-là,
1 -11^ Ti r„:_ „:4. i' ; Les neunles
peuples auraient lapidé
lanirlé lf>s indrïs
es juges
brouillon. Il faisait l'empressé ^
.£ i„. „T „ i* „'^ qui auraient nelri de la sorte la répu-
pour pacifier les choses , et n'é- tation du réformateur. L'Eglise, eût-
pargnait point dans les confé- on dit a besoin de la bonne renom-
,

rences que l'on tenait sur ces ma- mée de Luther; les papistes tireraient
trop d'avantage de sa flétrissure. N'a-
tières le don de langue dont il
vons-nous pas vu des gens qui ne sont
était pourvu miais il n'accom- ; que des pygmées en comparaison de
modait rien. Il mourut à Berlin Luther, se dérober par cette voie aux
en i566. Il avait été surinten- peines canoniques qu'ils méritaient ?
La seconde raison dAgricola fut ap-
dant (/) de la Marche de Bran-
paremment qu'il craignait de perdre,
debourg {m). On dit qu'il aurait en ne se soumettant pas le quartier ,

voulu ramener l'usage des sain- de gages qui lui était dû. Lisez ce qui
malades , et
tes huiles envers les suit JVetfue taincn hoc scripto stattm,
:

utsperai^erat, Luthero deuerd conuer-


qu'il ne doutait point que les
sione suâfidenij'ecit ; id quod ipse Agri-
guérisons miraculeuses n'y eus- cola llteris d. 19. decemb. apud elec-
sent été attachées comme ancien- torum Saxoniœ queritur, nihilque totâ
nement fit que peu de Il ne vitâ sibi gravius accidisse quàm simul-
(«).
tatera illam cum viro Dei quem ipse
livres (C). outre les chosesOn patris loco veneratus sit, et in cujus
quand on dit qu'il rentra dans la obsequio mori velit apud quem ta- ,

papauté (D). men nihil proliciat ne juramenti qui-


(/) C'est ainsi qu'on nomme parmi les lit-
dem oblatione , ideô se Deo causam
ihériens les ministres qui ont l'inspection sur committere. Petit tanien ut sibi, ad
plusieurs églises. alendam uxorem novemque liberos ,
(m) Micrœlius Hist. Eccles. , pag: ^33.
, trimestre quod restare sibi dicit, sa-
,
Edil. ann. 1679. larium non deuegetur, se enim id di-
n) Melch. Adam, Vit. Tlieolog. t\ll.
, p. ligenti lectione proraeritum (4).

(A) Luther auait été son bon (C) Il ne fit que peu de litres. ]
ami. ] Ils étaient de la même ville. L'explication de trois cents prouerbes
jYous trouvons qu'Agricola servit de allemands fut un des premiers. Il y
secrétaire à Luther dans la conférence maltraita beaucoup Ulric , duc de
de Leipsick , en i5i9(i), et qu'il fut Wirtemberg (5). On en fit des plain-
envoyé à Francfort en iSaS (a) , avec tes qui obligèrent l'auteur à recon-
une lettre de Luther aux magistrats, naître sa faute dans une lettre fort
pour y être l'un des ministres de l'É- soumise. Cela n'empêcha point que
vangile. L'auteur que je cite (3) cen- le duc Ulric n'alléguât, entre autres
sure M. Varillas , qui a dit que Luther griefs à la diète de Francfort
, l'an ,

n'entreprenait rien de considérable i536 que l'on protégeait dans le


,

sans Agricola. C'est pousser la chose comté de Mansfeld Jean Agricola ,

trop loin , et l'on ne saurait donner dont il avait été maltraité par des mé-
des preuves de ce fait-là. disances publiques (6). L'auteur aug-
(B) // choiiit ce dernier parti. ] Il menta de plus de quatre cents pro-
y verbes son ouvrage , dans la seconde
a quelque a|)parence qu'il se porta à
cette bassesse par ces deux raisons. édition. Il fit des Commentaires sur
Premièrement il ne voyait rien à es- saint Luc ; il réfuta l'explication du
,

pérer du jugement de son procès; il psaume dix-neuvième, publiée en al-


ne pouvait le gagner, sans que Luther lemand par Thomas Muncer, etc. (7)*.
fût déclaré calomniateur de ses frères. (D) //ne rentra pas dans la papauté.^
<^r, il aurait fallu être le plus crédule
(4) Seclcendorf , Hist. Luther. pag. 3io,
de tous les hommes pour espérer de nuin. 16.
(i) Seckendorf , Hist. Lulh., Ub. I,pag. 93 (5) Idem II, pag. i35.
, lib.
,
II!, r. (6) Seckendorf, Hist. Luther. , p. 142, lit. b.
(2) I^d. pag. 143
, , lit. c. (7) Mclch. Adam , Vit. Theolog. , pag. 411.
(3) Seckendorf, Hist. Luth. , lib. III pag. * Jolj- cite les titres de trois autres ouvra-
,
3oG , num. I. ges d'.\grirola.
AGRICOLA.
C'est un fait certain ,
qu'en sortant de
quinzième siècle*. L'Italie qui ,
Saxe il se retira à la cour de Brande-
en ce temps-là traitait de bar-
bourg et que l'électeur Joachim II
,
bare tout ce qui était au delà des
qui avait établi la réformation dans
ses états en l'année iSSg^S), le reçut
,
Alpes , n'avait rien à quoi la
honorablement et le tit son prédica-
, Frise ne pût comparer son Agri-
teur. Il n'est pas moins certain qu'il cola, sans avoir peur d'être vain-
a joui toute sa vie de la faveur de ce
cue. Ce grand homme était de
prince c'est donc une fausseté que
:

de dire, comme font Melchior Adam basse naissance (A) il naquit en- :

et Paul Freher qu'Agricola élait pa-


, viron l'an 1442 dans le village ,

piste, tune ponlijîciis sese adjunxerat ,


de Bqfflon^ à deux milles de Gro-
lorsque Charles-Quint se servit de lui
pour la construction de Ylntérim. Il
ningue. Il fit connaître dès les
se relâcha je l'avoue sur bien des
,
,
basses classes ce qu'il serait un
choses dans cei Intérim ; maisPhluget jour; et à peine avait-il recule
l'évêque de Sidon ne se reUchèrent- degré de maître es arts à Lou-
ils pas aussi sur bien d'autres? Etaient-
ils pour cela luthériens? Le projet de
vain , qu'il aurait trouvé tine
ces trois personnes ne contenta ni les chaire de professeur s'il avait eu
protestans ni les catholiques cela est cette envie son inclination le
j :

très-sûr mais il y a une grande dis-


]
porta plutôt à voyager. Il passa
tinction à faire entre ceux qui pour
abandonneraient de Louvain à Paris , après avoir
,

le bien de la paix ,

quelques parties de la réforma lion, et vécu dans la première de ces deux


ceux qui sortent actuellement de la villes comme un athlète ;
je veux
communion protestante pour en- ,
dire avec beaucoup de sobriété ,
trer dans la communion de Rome.
Agricola était sans doute de cette pre- de chasteté et d'application au
mière classe de gens mais n'ayant ; ,
travail (B). De
il alla enParis ,

pas été de la seconde il ne doit point , Italie , deux ans à Fer-


et s'arrêta
passer pour papiste. Trouvez donc une
rare (C) oii le duc le gratifia de
,
faute dans ces paroles de Micrœlius :

Joh. Agricola noster primo, deindè plusieurs bienfaits. Théodore Ga-


suus tandem Pontificiorum (9). Je ne
, za expliquait Aristote dans cette
sais si quand il dit trois lignes après, ville. Agricola , qui fut l'un de
,

HoTiiini Epicurœo similior quant pio


ses auditeurs, se fit entendre à
Theologo, ut scribit Osiander ad annum
i566, quo obiit Agricola, il entend son tour, et ne fit pas moins ad-
un homme voluptueux ou un homme mirer son style que son accent.
qui tenait l'indifle'rence des religions. On avait du chagrin en ce pays-

(8) Seckendorf, Hist. Lather., lib. III pag. là qu'un tel homme ne fut pas
,

234 el seq.
(9) Micraelius Syntagm. Hist. Ecelesjie pag.
,
né en Italie. Il n'eût tenu qu'à
,

-ii. lui, lorsqu'il eut regagné son pays

AGRICOLA (Michel), minis- natal d'y occuper des charges ,

tre luthérien à Abo , dans la considérables mais l'amour des


,
;

Finlande , est le premier qui a livres l'empêcha de songer à ces


traduit le Nouveau Testament en sortes d'établissemens on l'en :

la langue du pays, ce qui contri- retira bientôt. Il avait accepté


bua beaucoup à la propagation enfin une charge dans Gronin-
du luthéranisme {a). gue et il suivit la cour de Maxi- ,

milien F^ pendant six mois pour


{a) Ex Mici-ïlio, Hist. Ecclesiast., p. jBS.
les affaires de cette ville. Il s'ac-
AGRICOLA (Rodolphe) a été * Joly annonce que son nom allemand
un des plus savans hommes du était Cruninïcn.
,

-82 AGRI COLA.


quitta heureusement de sa com- continuer. Il se résigna chré-
mission , et n'eut pas beaucoup tiennement aux ordres d'en-haut,
de sujet de se louer de la grati- et fut enterré en habit de corde-
tude de ses maîtres aussi les: dans l'église des Frères Mi-
lier
laissa-t-il là et se remit à voya- neurs de cette ville. La descrip-
ger. Il n'avait garde amateur de
, tion qu'on a faite de son carac-
sa liberté comme il l'était , d'ac- tère peut persuader aisément que
cepter la principal ité de collège c'était un fort honnête homme,
que ceux d'Anvers lui offrirent. franc sans envie , modéré , de ,

Comment l'aurait - il acceptée , belle humeur. Il ne se maria ja-


puisqu'il avait refusé d'entrer , mais , quoiqu'il eût aimé ou fait
sous des conditions très-avanta- semblant d'aimer quelquefois. Il
geuses , chez l'empereur Maximi- avait en ses jeunes ans résolu de
lien ? Il préférait le repos et l'in- se marier; mais, après avoir exa-
dépendance à toutes choses c'é- miné profondément ce qu'il al-
;

tait avoir le goût bon. Après avoir lait faire il abandonna ce des- ,

mené une vie fort ambulatoire sein non pas tant par la crainte
, ,

il se fixa au Palatinat , oii l'évê- des incommodités domestiques ,


que de Worms , auquel il avait que par une certaine paresse na-
enseigné le grec, trouva le moyen turelle qu'il se sentait (F) qui ,

de l'arrêter. Ce fut l'an 1482 le faisait succomber aux moin-


qu'il alla au Palatinat il y passa dres soins. On ne dirait pas qu'un
;

tout le reste de sa vie (D) tan- homme aussi enfoncé que lui
,

tôtàHeidelberg, tantôt à Worms. dans les études de l'antiquité ait


L'électeur palatin se plut à l'en- su chanter sur les instrumens les
tendre discourir sur l'antiquité , chansons qu'il faisait lui-même ;

et souhaita qu'il composât un cependant il donnait quelquefois


Abrégé de l'ancienne Histoire. ce régal aux dames (G). On pré-
Agricola le fit en habile homme. tend que sur le chapitre de la
Il lut en public à Worms mais religion il avait senti quelques
;

ses auditeurs , étant plus faits avant-goûts de la lumière qui pa-


aux chicaneries de la dialectique rut au siècle suivant (H). Il laissa
qu'aux belles-lettres , n'avaient ses livres à Adolphe Occo, natif
pas le tour d'esprit qu'il souhai- de Frise et médecin de la ville ,

tait. Il commença d'étudier en d'Augsbourg (b). M. Moréri n'a


théologie à l'âge d'environ qua- pas eu raison de dire qu'Erasme
rante ans et n'espérant pas d'y et Agricola firent connaissance à
;

réussir sans l'intelligence de l'hé- Ferrare (I). Le sieur Paul Freher


breu , il s'attacha à l'étude de n'a pas entendu tout ce qu'il a
cette langue et , avec le secours copié d'Érasme (K) à la louange
;

d'un Juif, il commençait à y d' Agricola. Nous apprenons du


faire de bons progrès (E). La uiême Erasme qu' Agricola mou-
mort qui le vint saisir à Hei- rut pour n'avoir pas été secouru
delberg le 28 d'octobre i/(85
,

l'âge de /juarante ans. Adagior. Gliil. I


(«), ne lui donna pas le temps de , ,

Ccnl. IV , iiuni. 39.


(a) Erasme avait donc été trompé lors- (A) Tiré dels\(i\z\\\ox Adam, Vit. Philos.,
r/ii'il avait ouï dire ^M'Agricola mourut avant pag. i3 et suiv.
,

AGRICOLA. 283
assez tôt des médecins (L). Reu- s'endurcissaient au travail et s'abste- ,

<:hlin prononça l'oraison fu- naient du vin et des femmes.


Qui sindel opiaiam cursu conlingere metain
nèbre de ce savant homme (c). Muha lulkfecilque puer: sudavil et alsil: ,

M. Varillas nous fournira ici bien JBSTINUIT VENERE ET VINO (3).


des fautes (M) , et nous donnera Cette abstinence fat insigne dans
lieu de rapporter ce qui concerne
la publication d'un des livres d'A- rare à l'égard du premier point au ,

pays où il vivait Louanii fixil ho-


gricola c'est celui de Inventione
;
:

nestissimc , ab nmni compotatione ac


dialecticâ (N). comessalione cnntra gentis suœ morem.
alienissimus. Tantus erat in eo bona-
(c) Valer. Andreœ Bibl. Belg. pag. 798.
,
rum literarum amor tam indefessum ,

(A) // était de basse naissance. ] Je studinm, ut turpis f^eneris fornices et


sais bien que dans la vie d'Agricola ,
lustra ne nouerit quidem (4). Elle
parmi celles des professeurs de Gro- était rare partout, et l'est encore à

ningue , on assure qu'il e'tait d'une des l'égard de l'autre point. Car, à la honte
plus conside'rables familles de Frise : du christianisme et des lettres on ne ,

Ex yii;ricolarum.J'ami,Ud apud Frisios voit presque partout dans les écoliers


inter honoratioras sernper habita , l'ir qu'un penchant horrible à la débau-
hic incomparabilis oriundus ; mais che. Ils ne valaient peut-être pas mieux
comme cette vie n'est point différente anciennement et en ce cas-là je m'é-
j ,

de celle qu'on trouve dans Melchior tonnerais qu'on n'et\( pas mis en pro-
Adam elle ne saurait balancer le té-
,
verbe, sine f^enere et Baccho J'rigent
moignage d'Ubbo Emmius. Or, voici Musœ comme l'on y mit , sine Ce-
,

ce que dit Ubbo Emmius, l'homme rere etBaccho friget f^enus. Il sem-
du monde qui connaissait le mieux ble que depuis long-temps la jeunesse
son pays de Frise Obscuris natalibus :
qui étudie se conduit comme si la pre-
apud Ba/lnos ortus ( Rodolphus Agri- mière de ces deux maximes était vé-
cola ) tantum sibi in literis jiomen pa- ritable.
ravit per oninem Europant, ut., etc. (1). (C) Et s'arrêta deux ans (5) à Fer"
On m'a indiqué deux preuves
(2)
rare. ] Il y apprit
grec , et y ensei-
le

du sentiment d'Emraius dans les let- gna le latin il disputait avec Guarin,
:

tres d'Agricola. L'une est que sa sœur à qui écrirait le mieux en prose ; et
utérine fut envoyée à Groningue avec les Strozza , à qui ferait mieux
,

pour appi-endre à travailler en pelle- des vers et pour ce qui regarde la


:

terie pellicea opéra et texturam pul- philosophie , il en discourait avec


,

i^inariam ; l'autre est que le père de Théodore Gaza (6).


cette fille était receveur de l'église de (D) Ce fut l'an 1482 qu'il alla au
son village. Il fut fort désolé lors- Palatinat ; il y passa tout le reste de
qu'un de ses fils déroba la somme de sa fie.^ Melchior Adam l'assure Cum :

cent florins des deniers de cette re- hoc (Joanne Camerario Dalburgio) ab
cette f^enit ad me nudius tertius pa-
:
a?ino xl^^i parlhn Heidelbergœ , par-
ter tuHs turbatus et geniens et propè ,
thn Wormatiae, ad ultinium vitœ ac-,
cuni lacrimis questus est mihi Henri- ,
tum usque l'ixit conjunctissimè (^).
cum fralrem nostrum pridiè ejus diei Mais M. de la Monnoie l'a trouvé en
clam sibi abstulisse centum, ftorenos faute ^ car voici ce qu'il me marque :

ûostrœ monetœ ex pecunid sacra « Rodolphe Agricola , dans une lettre


cujus curam ut scis ille gerit. Notre
, ,
» qu'il écrit Jacobo Barbiriano mal ,

Rodolphe étant à Groningue écrivit » datée de XCII au lieu de XXCII, et


,

cela à Jean son frère utérin, » dans une autre de même date à Jean
,

(B) Comme un athlète je feux dire » son frère , dit qu'en un voyage qu'il
;

auec beaucoup de sobriété de chas- ,


» fit cette même année à Heidelberg ,_

au travail. ]
teté et d'application Les » il donna sa parole à Jean d'Alburg ^
anciens remarquent que les athlètes (3) Horat. deArle Poët., vs. 412 el seq.
(4) Melch. Adami Vitffi Pbilosoph. pag. i5. ,

(i) Ubbo Emmius , Histor. Fris. Ub. XXX, (5) En 1476, et 1477.
ad ann. 1490 pag- h^'r , (6) Valerii Andreae Bibl. Belg. pag. 798.
,

(2) M. de la Monnaie. (7) Melcb. Adami Vilse Pbilosopb., pag. 16.


.

284 AGRl COLA.


du comte palatin, et évê-
chancelier très-docte en hébreu , hebraicè doc
aue deVormes, de retourner auprès tissimus (12) on peut , sans faire in-
:

e lui l'année suivante. On recon- justice, dégrader ce superlatif, et le


naît cependant par ses autres let- traiter comme un cavalier que l'on
tres ,
qu'il n'y retourna point avant démonte , pour l'incorporer dans l'in-
le milieu de l'année i484' Ainsi , le fanterie. Gesner a mieux distingué que
calcul de Vossius, pag. 566. de Hist. Vossius celui-ci a mis le superlatif au
:

lai. touchant les trois ans de la ré- latin, au grec et à l'hébreu d'Agricola,
gence de Rodolphe à Heidelberg (8), indifféremment; mais voici comment
n'est point juste. Sigismond de Fo- Gesner s'est exprimé : Grœci et latini
ligni autrement Sigismundus Ful-
, serinonis peritus Hehraïcce linguœ
, et
ginas se trompe aussi
, quand il ,
non ignarus (i3). 11 emprunte de Tri-
dit que Rodolphe mourut en che- thème ces paroles. Konig enchérit sur
i^ min , au retour de Rome en son Vossius ; car il se sert du superlatif
pays. Rodolphe partit de Rome en eflZ/e«ù.ssiffiHi. Voyez ci-dessous la troi-
i48o et mourut cinq ans après à
, sième faute de Varillas. Remarquons
Heidelberg. On ne voit point par la aussi que Trithème ne parle point
lecture de ses OEuvres ,
qu'il ait fait exactement lorsqu'il assure qu Agrico-
) àVormes fonction de professeur.»
la la avait fait une traduction du psautier
Ou a une lettre de Pierre Schottus , sur l'original hébreu (i4) car on ne ;

datée du i8 de février i484 , dans la- met point parmi les ouvrages d'un au-
quelle il témoigne qu'il avait appris teur les thèmes qu'il fait en apprenant
avec beaucoup de plaisir qu'Agi'icola une langue. Or, il est manifeste que la
avait commencé de faire des leçons à traduction que faisait Agricola de
la jeunesse dans Heidelberg. Argen- quelques psaumes de David était un ,

tinam reuersus , cUm intellexissem thème que son Juif lui corrigeait. Ce
te Heidelbergœ cœpisse purgare et lin- Juif s'était converti à la religion chré-
guas juvenum et aures , ut illce nil tienne. Jean d'Albuig évêque de ,

scelerosuiu balbutiant , hce uerb luis Worms (i5), ne l'entretenait chez lui
tam perilis et dulcibus elegantiis deli- que pour l'amour d'Agricola si nous ,

batœ , omnes illas sciolorum insulsas en croyons Valère André Primus ex- :

et uerbosas ineptias quasi niagicas in- sulantes è Gernianiâ grœcas restituit


cantaliones déclinent tàm ego t^eAe- : litteras, quibus œtale prouectior etiam
menter sum gadsus (g) Uebraïcas adjecit, prœceptore usus Ju-
(E) Il commençait a y faire de bons dœo quodani adjidem com^erso, quem
progrès. ] On sait de lui-même qu'au ,
fVormatiensis episcopus Joannes d'Al-
commencement cette étude lui parut burgius, solius Rodolphi causa, demi
très-difficile Studia Hebrœa : pri- suœ alebat (16).
miini ei plurimiim negotii uti scribit , (F) Par une certaine paresse natu-
ipse exhibuerunt , ut sibi i^ideretur
, relle qu'il se sentait. ] Comme je ne
cum Antceo luctari ( i o) Ensuite ayant . saurais atteindre à la force de ses ex-
rencontré un Juif qui entendait pas- pressions , je rapporterai les mots
.sablement celte langue il alla en peu , grecs dont il se servit Uxorem nun- :

de mois jusqu'à pouvoir traduire sans quain duxit quanquam in priore œtate
•'

fautes quelques psaumes de David : duclurum destinârat. Sed posleaquam


JVactus Judœuni ejus linguœ ulcun- incepit diligentiiis se ipse introspicere,
que peritum paucis niensibus tantiim auersus est ab eo consilio , non incom-
profecit, ut aliquot psalnios Da^'idicos modis rei œconomicœ , sed deterruU
in latinam linguamcitra culpam trans- ipsunigenus vitœ suœ et animus lei^is^
tulerit (il). Il n'y a pas là de quoi simis etiam curis iinpar kai <^iKïi3-i/X'^^ ,

dire avec Vossius qu'Agricola était Ti tÎÎç 4>y3-ia)ç (^verha sunt ipsius , epis-
,

tolâ quâdam ad Capnioneni) Myi/n£x>.ùv


(8) Notez que Melcb. Adam ne dit point
^«'Agricola ait jamais enseigné la philosophie (12) De Histor. Latin., pag. 566.
dans Heidelberg. Vossius suppose qu'il l'j en- (i3) Gesnerl Bibliolh. ,
folio 585.
seigna trois ans. (i4) Jpud Valerinm Andr. ,
Bibl. Belg. , p.
Cenluria Epistolarun Philologicarum
(f)) à jgS. Gesner l'assure aussi.
Goldaslo editarnm pag. 55 , 56. , (i5)Et non d' Heidelberg, comme dit BuUart,
(lo) Melcli. Adami Yitœ Philosoph. ,
p. 18. Académie des Scienc, tom. I, pag. 276.
Valer. Andréas, Bibl. Belg. fag- 'jgS.
(ij) Id. ibid., pag. ig. (i(l) ,
AGRICOLA. 285
à.TTfia.yfAOs-ùvit xsti jxt^ufAici tiç vetvroç tou liesde la Théologie, et même dans les
fiiov (17). questions de la grâce. La langue grec-
(G) // donnait quelquefois ce régal que n'est-elle pas une des plus nobles
aux dames. ] Voici corame parle son parties de la littérature ? Je ne sais

historien Puellas amare se nonnun-
: M. Morëri a lu qu'Agricola fut syndic
quam siniulab'at , ueriiiu nunquam de- de la ville de Gronineue pendant
peribat. In earuni grutiam uernaculd deux ans *.
lingud quœdam carmina scripsit ele- (K) Tout
ce qu'il a copié d'Érasme
gantissiniè quœ inrginibus primariis-
: (21).] applique à notre Acricola ce
11
que amicis prœsenlibus t'oce et testU' qu'Erasme a dit d'un autre. Il faut
dîne modulatissimè canebal (18). l\ en- savoir qu'Erasme, ayant bien loué
tendait toute sorte de musique Ca- : Agricola , confesse qu'une des raisons
nebat i^oce flatu pulsu (19).
, ,
qui le rendaient si enclin A lui donner
(H) Quelques afant-godts de la lu- des éloges, était que lui Érasme avait
mière qui parut au siècle suiuant, ] eu pour maître un homme (22) qui
Quelqu'un qui avait oui discourir en- avait été' disciple d'Agricoîa (28). Là-
tre eux Agricola et Wesselus témoi- dessus , il nous étale le mérite de cet
gne qu'ils déploraient les ténèbres de homme, et il dit entre autres choses
l'Eglise, et qu'ils blâmaient la messe, que l'envie même ne le pourrait cri-
le célibat et la doctrine des moines
, tiquer en chicanant, que d'avoir trop
sur la justification parles œuvres(2o). méprisé la renommée , de s'être peu
(I) M.^Moréri n'a pas eu raison de soucié de l'avenir, et de n'avoir rien
dire qu'Erasme et Agricola firent con- écrit que par forme d'amusement. Fre-
naissance a Ferrure.'] La preuve en her rapporte cette remarque, comme
est facile à donner. Erasme naquit si elle concernait Agricola : par où il
l'an 14^7. Il étudiait à Deventer à attribue à Erasme une fausseté- car
l'âge de douze ou treize ans. Agri -
les œuvres d'Agricoîa recueillis en un
cola était à Ferrare, l'an 1476 et i477- corps (24) , et imprimés à Cologne,
Comment donc aurait-il pu contracter l'an iSSg, font foi qu'il a écrit beau-
dans cette ville une amitié éternelle coup de choses avec soin, et avec
avec Erasme ? Si M. Moréri avait lu le toute son industrie,
prognostic d'Agricoîa touchant Eras- (L) // mourut pour n'avoir pas été
me, il n'aurait pas dit que ce fut à secouru assez toi des médecins.] Voici
Ferrare qu'ils se connurent. Agricola ce qu'Erasme nous en apprend ; on ne
était revenu d'Italie, lorsque, ayant lu sera pas fâché de le voir dans ses pro-
ies thèmes des écoliers d'Hégius à près termes f^eluti si quis in morbo
:

Deventer, il trouva je ne sais quoi capitali medicuni opperiatur insignem


dans celui d'Erasme, qui lui donna aut procul accersenduni; quœ res ho-
envie de voir cet enfant ^ et après l'a- minem illum uerè diuinum extinxit
voir bien considéré il dit que ce se- , Rodolphum Agricolara ; etenim, dùm
rait un grand homme. Érasme n'avait cunctaturmedicus,morsantevertit(25).
pas vingt ans lorsque Agricola mou- (M) M. f^arillas nous fournira ici
rut; et il n'était point encore sorti des bien des fautes.] 1°. Agricola, dit-il
ténèbres où des tuteurs impertinens {'^Q), eut lamémoiresii'aste, qu'il ne lui
l'avaient détenu il ne pouvait donc
: échappa jamais rien de ce qu'il aidait
pas y avoir entre lui et Agricola cette une fois retenu. C'est une hyperbole
amitié dont M. Moréri parle. Voici, dont je ne trouve nul fondement dans
pour n'en faire pas à deux fois , quel-
ques autres méprises de cet écrivain. *
Joly reproche U Bayle de critiquer More'-
Agricola dit-il était sa^'ant en tout
, ,
'' ^' '^'' ?"' le fait du syndical est rapporte'
'

genre de littérature, et même en la lan-


Adam; mais M. Adam ne parle
" T
IZ nlJ"^
r"^ ae sa auree de deux ans.
gue grecque, L est comme si-n
r\, . .

1 on disait, (21) Dans son Theatrum Viror. eruditor. ;:,.


,
un tel est suivant dans toutes les par- '430.
(22) Alexander Hegius.
(^3) Erasmi Adagiorum Cl>iliade/,cenr«r. IF,
(17) Melcb. Adami Vitœ Philosopli. pa?. 10.
Forez aussi layied'\^T]coU, parmi celles des
,
""™- 39 , P«ff- i45-
professeurs de Gronineue. ^^'<'' ^«''" ^oins d Alard d'Amsterdam. Elles
/,o^ ivT I i- * j \r-t r>i -1
• 1- o •omprennent ueux
deux volumes in-d.
'-^'ftf^f i:ii.itcni in-!,.
(18) Melch. Adami Vilœ PhilosODh. , pflif. 18. i'„<:i v„ »j -i^i-
„ Adagior. Vrr rrr
, ; ,,., • "^ ° (=5; brasm. Cliil. III, cent. III,
{iQ) Ibid. num. 62, pag. ';oi
(20} Ibid., et Vitœ Professorum Groningens. (2G) Varillas ,'Anecdoles de Florence, p. 184.
.

286 AGRÏCOLA.
l'histoirede ce grand homme, encore c'estune apostrophe à Agricola, he
que l'on s'y soit fort étendu sur ses braïcas ,grœcasque litteras usque adeà
talens. Aurait-on oublié celui-là, qui stupendâ celeritate , ut nequaquam
est le plus extraordinaire qui se puisse Gruningiœ in ultimâ Frisid, sed Hie-
voir? 2°. // deuint sat^anljui qu'au pro- rosolymis Athenisque natus ac edu-
dige, arec des liures d'emprunt, et sans catus à doclissimis crederêre. Lalinas
maître. L'hyperbole est ici accompa- porro tantdjélicitate didicisti, docuis-
,'
gnée d'une fausseté palpable : car tique ut , etc. (3o). Voilà pourquoi
,

nous lisons dans sa vie, qu'il fut en- ce me semble , M. Varillas s'est ima-
voyé de très-bonne heure au collège giné qu'Agricola apprit d'abord la
(27) , et qu'après l'étude de la gram- langue hébraïque , puis la grecque ,
maire, il alla étudier à Louvain, où il et enfin la latine , et qu'il composait
logea au collège du Faucon , et y fît et parlait souvent en hébreu 4°- ^^
toutes les fonctions d'un écolier de fit un progrès si surprenant dans le
philosophie et il s'attacha d'ailleurs latin, qu'Erasme , si peu accoutumé à
:

à quelques personnes qui avaient du louer en autrui les richesses qu'il pos-
goût pour la belle latinité. A Ferrare , sédait , ne se pouvait lasser de l'ad-
il fut un auditeur assidu de Théodore mirer , principalement après qu'il eut
de Gaza Ibi Theodorum Gazant Aris- donné au public ses Commentaires , si
:

totelis scripta enarrantem diligenter polis et si dignes du siècle d'' Auguste,


audii>it (28). II est bien vrai que dans sur la Rhétorique et la Logique d' Aris-
ses voyages il ne portait avec lui que tote. Erasme était si peu de chose
peu de livres, et que laissant le reste lorsque Agricola mourut , que c'est
de sa bibliothèque chez ses amis, il se mal chercher les progrès de son ad-
servait de livres d'emprunt, selon qu'il miration , que de les chercher dans
en avait besoin ; mais, outre qu'il n'y les années qui ont précédé la mort
a point d'homme de lettres qui n'en d'Agricola. C'est d'ailleurs un ana-
use ainsi en voyageant, oserait - on chronisme que de dire que cet illus-
dire qu'Agricola a tout appris pen- tre Frison a vécu jusqu'au temps que
dant ses voyages? 3°. Il commença la possession des belles-lettres empê-
ses éludes par où les autres m'aient chait Erasme de les louer en autrui.
accoutumé de les finir , c' est-a-dire , Voici encore deux observations. Les
par la langue hébraïque. Il la t'oulut Commentaii'es sur la Logique d'Aris-
savoir, non-seulement dans sa pureté, tote ne parurent qu'après la mort de
mais encore avec toutes les altérations l'auteur. C'est Erasme qui nous l'ap-
que le temps et le raffinement des rab- prend, et qui dit même qu'ils étaient
binsy ont produites. Il eut le même soin tronqués Latitabant apud nescio quos
:

de s'introduire en la langue grecque. . Commentarii Dialectices ; nuperin pu-


Enfin, il se mit au latin, sans auoir blicum prodierunt , sed mulili (à\). A
égard aux remontrances de ceux qui coup sûr, ce n'est pas dans cet ou-
prétendaient l'en dissuader, sur ce que vrage qu'on peut admirer le latin d'A-
V habitude d'écrire et de prononcer l'hé- gricola, ni les manières polies du siè-
breu semblait avoir introduit dans son cle d'Auguste. 5". L'électeur palatin-,
esprit de l'incompatibilité avec les fit venir Agricola à Ueidelberg... lui
phrases et les expressions romaines. donna la première chaire pour l'élo-
Où est l'homme qui puisse lire cela quence dans V université... et lefit son
sans étonnement , s'il sait que notre conseiller d'état. La Vie d'Agricola , ni
fiodolphe n'apprit l'hébreu qtie peu parmi celles des professeurs de Gro-
d'années avant sa mort, et que les pro- ningue , ni dans Melchior Adam , ne
grès qu'il y fit furent médiocres (29)? dit rien de tout cela. C'est à l'évêque
Je m'imagine que M. Varillas a été de Worms qu'elle attribue d'avoir at-
trompé par ce latin. Transisti enim , tiré Agricola au Palatinat.
(N) C'est celid de Inventione dia-
(27) Puer admodiim in liidum lillerarium
lecticâ. ] Voici une remarque qui m'a
mùssus. Ailami Vit» Philosoph. ,
pan,, l'i.
(28) Ihid. ,pas- ï5. été communiquée depuis la pi-emière
(2g) Voyez ci-dessus ta remarque (E), et joi- édition. « Rodolphe Agricola n'a fait
gnez-y ces mou d'Erasme Extreino vilœ tem-
:

pore ad liUeras Ilebraïcas..- totuin aniinum ap- (3o) Paul. Jovius,Elegiorum cap. XXXII-
puierai. Erasm. Adaglor. Cbiliad. /, cent- IV , (3i) Erasm. Adaglor. Chil. /, cent. IV, num.
num. 39 -ipag. i/JS. -9 1 P<^S- ^45.
,,

AGR IPPA. 287


» nuls Commentaires règles sur la Lo- (B). Voulant marcher sur les
» gique ni sur la Rhétorique d'Aris- traces de ses
ancêtres {h) qui , que
» tote. Nous n'avons de lui les
j>trois livres de lin'cnlione dialecticd,
depuis plusieurs générations
,

» imprimés premièrement à Louvain, avaient exercé des charges au-


» l'an i5i6, par les soins d'Alard près des princes de la mai-
» d'Amsterdam qui les publia en .
son d'Autriche, il entra de fort
» mauvais ordre, tels qu'il les avait
))pu recouvrer. Quelque temps après, bonne heure au service de l'em-
» un certain Jacques le Febvre de pereur Maximilien. Il y eut d'a- ,

» Deventer, fit courir le bruit qu'il bord un emploi de secrétaire


» avait un manuscrit de Infentione mais comme il
;

était aussi propre


)) dialecticd plus ample de trois li-
,

» vres que l'édition de Louvain. C'é- à l'épée qu'à la plume, il prit en-
)> tait un mensonge. Alard qui ,
alla armes et servit
suite le parti des ,

)> trouver exprès ce le Febvre à De- sept ans cet empereur dans l'ar-
» venter, ayant vu son manuscrit ne ,
mée d'Italie (C). Il se signala
}> le trouva ni plus ample, ni plus cor-
» rect que celui sur lequel l'édition
,
dans plusieurs rencontres et il ,

» de Louvain avait été faite. 11 en fit obtint en récompense de ses beaux


>) des reproches à le Febvre, qui s'ex-
faits le titre de chevalier. Il vou-
» cusa comme il put, quoique assez
» mal. Depuis l'an iSaS Pompée ,
lut joindre à ses honneurs mili-
)) Occo, ayant eu de la succession d'A- taires les honneurs académiques
» dolphe son oncle le propre manu- (D) : il se fit donc recevoir doc-
» scrit d'Agrii ola le mit entre les
» mains d' Alard, qui l'ayant reconnu
,
teur en droit et en médecine. On
,

M bien complet et bien conditionné


ne peut nier que ce ne fût un
,

» le fit imprimer à Cologne, in-4°M avec très-grand esprit , et qu'il n'eût


» de longs commentaires l'an iSSg. , la connaissance d'une infinité de
)) Quelques années auparavant, Jean choses et de plusieurs langues (E);
)) Matthieu Prissemius à qui Alard ,

!» avait communiqué son manuscrit


mais sa trop grande curiosité , sa
i>l'avait fait imprimer en la même plume trop libre et son humeur
M ville , commenté de sa façon. Cet inconstante le rendirent malheu-
» ouvrage, qui est le chef-d'œuvre de reux. Il changeait éternellement
" Rodolphe a toujours été générale-
,

'» ment estimé, pour l'exactitude du


de poste il se faisait partout des
;

j) style ( 32 ) et du raisonnement. »
affaires , et ,
pour comble d'infor-
Ceci vient du même lieu que l'obser- tune il s'attira par ses écrits la
,

vation contenue dans la remarque haine des gens d'église. On voit


{D) (33j.
par ses lettres qu'il avait été en
(32) Tout cela peut être vrai , encore que cet
Ouvrage soilforl éloigné Aes manières polies du France avant l'année iSoy (c) ,
siècle d'Auguste, et qu'il soit même moins élo-
qu'il voyagea en Espagne l'an
quent que d'autres pièces trAgricoIa.
(33) Oesl-à-dire , de M. de la Monnaie. 1 5o8 {d) , et qu'il était à Dole en

1 5og (e). Il y fit des leçons publi-


AGRIPPA ( Hexri Corneille ) ques (F) qui commirent avec
le
grand magicien si l'on en croit le cordelier ,
Catilinet. Les moi-
beaucoup de gens (A) a été un nes en ce temps-là soupçon-
,
, ,

fort savant liomme dans le sei- naient d'erreur ou d'hérésie tout


zième siècle. Il naquit à Cologne
[b) Agrippa, Epist. Xrin, lib. VI, pag.
le i4 de septembre i486 (a) ,
970 ,
et Epist. XXr. lib. VII, pag. 1021.
d'une famille noble et ancienne Voyez aussi pag. ']'6Q.

ic) Aprippa, Epist. /, lib. I.


(a) Agrippa, Epistola XX^f , lib. Vil, [di Epist. X, lib. /.
pag. io4l cdil. Lugd.
, , in-8. (e Epist. XVir. lib I.
288 AGRIPPA,
ce qu'ils n'entendaient pas; com- et à Turin (k). Il fit des leçons
meut auraient-ils soufl'ert qu'A- sur Mercure TrismegisteàPavie,
grippa expliquât impunément le l'an i5i5 Sa sortie de cette
(/).
mystérieux ouvrage de Reuchlin ville , la même
année ou l'année
de T'erho mirifico ? Ce fut la ma- suivante tint plus de la fuite que
,

tièredes leçons qu'il fît à DôIe, en de la retraite. Cela paraît par sa


l'année 1 5oc) , avec un fort grand lettre XLIX du premier livre
éclat. Les conseillers même du comparée avec la LU. Il avait

pari ementl'allaient entendre (y), dès lors femme et enfans (H). Il


Pour mieux s'insinuer dans la fa- paraît par le second livre de ses
veur de Marguerite d'Autriche , Lettres que ses amis travaillèrent
gouvernante des Pays-Bas il fit , en divers lieux à lui procurer
alors le Traité de V Excellence quelque établissement honorable,
des femmes {g) mais la perse- ; ou à Grenoble ou à Genève, ou à
cution qu'il souffrit de la part Avignon, ou à Metz. Il préféra
des moines l'empêcha de le pu- le parti qui lui fut offert dans ce
blier. Il leur quitta la partie et dernier lieu , et je trouve que ,
s'en alla en Angleterre (A), oii il dès l'an i5i8 {m) il y exerçait ,

travailla sur les épîtres de saint l'emploi de syndic d'avocat et ,

Paul (/) quoiqu'il eût entre les


,
d'orateur de la ville {n). Les per-
mains une autre affaire fort secrè- sécutions que les moines lui sus-
te. Étant repassé à Cologne, il y fit citèrent, tant parce qu'il avait
des leçons publiques sur les ques- refuté l'opinion commune tou-
tions de théologie qu'on nomme chaut les trois maris de sainte
qiiodlibetales y après quoi il alla Anne , que parce qu'il avait pro-
i oindre en Italie l'armée de l'em- tégé une paysanne accusée de sor-
pereur Maximilien, et y de- cellerie (I),lui firent abandon-
meura jusqu'à ce que le cardi- ner la ville de Metz. Ce qui le
nal de Sainte-Croix l'appelât à poussa à écrire sur la monogamie
Pise. Agrippa y aurait fait pa- de sainte Anne fut de voir que
raître ses talens en qualité de Jacques Faber d'É tapies , son
théologien du concile , si cette ami , était mis en pièces par les
assemblée avait duré. Ce n'eut prédicateurs de Metz, pour avoir
pas été le moyen de plaire à la soutenu ce sentiment (o). Agrip-
cour de Rome, ni de mériter la pa se retira en son pays de Colo—
lettre obligeante qu'il reçut de gne l'an ïSao quittant volon-
, ,

Léon X
(G) et d'oii nous pou-
, tiers une ville que ces inquisi-
vons conclure qu'il changea de teurs séditieux avaient rendue
sentiment. Il enseigna depuis pu- l'ennemie des belles-lettres et du
bliquement la théologie à Pavie véritable mérite (p). C'est la des-

( y) Voyez son Expostulatio cum Joanne (h) Id. ibid.pag. 5q6,


.

Catilinelo , Fratrum Franciscauorum per Agrippa, Operura tom. Il pag. \0']j.


(/) ,

Burgundiam Provinciali Minislro. Operum


{m) Agrippa Epist. XII, lib. II.
,

lomo II pag- 5o8. Operum


Voyez sa IV'. Harangue
,
(n)
[g) Voyez VÉpitre dédicatoiredece
,
Traité,
ioin. II, pag-. 1090.
datée d' 'invers an mois d'avril 1629.
(h) C'est de Londres //ne son Expostulatio (o) Epist. XXV, lib. II, pag. 743. Voyez
c.it datée en l5lo.
,
aussi pag. 746.
(1; Agrippée Defensio
Proposit. ,
pag-. SOfd, (p) Epist. XXXII , lib II ,
pag. 749.
,

AGRIPPA. 289
tinée de tous les pays où pareil- des clio^es plus importantes. La
les gens s'inipatronisent, de ([uel- dame prit en mauvaise part cette
que religion qu'ils soient. Il sor- leçon [y) mais elle fut encore
;

tit de sa patrie l'an 1021 , et s'en plus irritée lorsqu'elle sut que
alla à Genève {q) il n'y gagnait l'astrologie d' Agrippa promettait
;

pas beaucoup d'argent , puisqu'il de nouveaux triomphes au cou-


se plaint de n'être pas assez riche nétable de Bourbon (K). Agrip-
pour faire un voyage à Chambéri pa , se voyant cassé , murmura ,
(/•), afin d'y solliciter lui-même pesta, m.enaça (L,, écrivit, et
la pension qu'on lui faisait espé- dit tout ce que son humeur mal—
rer du duc de Savoie. Cette es- endurante lui suggérait; mais en-
pérance n'aboutit à rien, et alors fin il fallut songera un nouvel
Agrippa sortit de Genève et s'en établissement. Il jeta les yeux sur
alla à Fribourg en Suisse {s) le Pays-Bas, et ayant obtenu à ,

l'an 15^3 {t), pour y pratiquer Paris , après une infinité de lou-
la médecine comme il avait fait gueurs, le passe-port qui lui était
à Genève. L'année suivante, il nécessaire, il arriva à Anvers au
s'en alla à Lyon , et obtint une mois de juillet iSsS (z). Une des
pension de François I*"^ Il en- causes de ces longueurs fut la
tra chez la mère de ce prince en brusquerie du duc de Vendôme
qualité de médecin mais il n'y qui au lieu de signer le passe-
; ,

fit point fortune, et ne suivit pas port le déchira en disant qu'il , ,

même cette princesse {u) lors- ne voulait point signer pour un


qu'elle partit de Lyon au mois devin {aa). En l'année iSac),
,

d'août 1 520, pour aller mener sa Agrippa se vit appelé tout à la


fille sur les frontières d'Espagne, fois par Henri roi d'Angleterre, ,

On le laissa morfondre à Lyon, et par le chancelier de l'empereur ,

implorer vainement le crédit de par un marquis italien et par


ses amis pour le paiement de ses Marguerite d'Autriche gouver- ,

gages. Avant que de les toucher nante du Pays-Bas [bb]. Il choi-


il eut le chagrin d'être averti sit ce dernier parti et accepta la ,

qu'on l'avait rayé de dessus l'état charge d'historiographe de l'em-


(cc). La cause de sa disgrâce fut pereur que cette princesse lui fit
qu'ayant reçu ordre de sa mai— donner. Il publia pour prélude
tresse de chercher par les règles l'Histoire du gouvernement de
de l'astrologie le cours que les Charles-Quint et bientôt après ,

affaires de France devaient tenir, il fallut qu'il fît V Oraison funè-


il désapprouva trop librement bre de cette dame dont la mort ,

que cette princesse voulut l'ap— fut en quelque manière la vie de


pliquer à ces vaines curiosités , notre Agrippa; car on avait ter—
au lieu de se servir de lui dans „ ^^^1^7 librily
Epist. WXVll 1 u iir pag. or , ,
.
,
[y) y
ODÇ ,

(7) Epist.
^IJ v r///,6W//f,pag>.
r o 784. ''T/., 'T^^'^'^v rr/A ir ^, •
/ -t
'
,
Agrippa, tpist. Zi /(orj ^, pûj». QJ2.
^ '" r '
•» /»-t (^^ Conspeclo sive aiidito nomme meo ,
,

{s)Etnonj>as en Brisgaw ,
comme dit
prœcipiti ira repente dirupil papynim totam,
JMelcb. Adam. inquiens se ,
nequaquàm signaiurum in fa-
(t) Agrippa, Epist. XLI libri III, et seq. ^,orem divinatoris. Epist. XXX libri V , p.
(u) Epist. LXXIX Itbri III, pa^. 828. 920.
(a-) Epist. LU libri ir ,
pag. 809, 'bh) Epist. LXXXir libri ?' , pa». 9a,

TOHE I. 19
,

290 AGR IPPA.


ribleraent prévenu contre lui En dépit d'eux , on acheva l'im-l'es-

prit de cette princesse (M). On


pression c'est celle de l'an 1 533. ;

lui rendit les mêmes mauvais of- Il se tint à Bonn jusqu'en l'an-
fices auprès de sa majesté impé- née i535. Alors il eut envie de
riale (ce). Le Traité de retourner à Lyon. On l'empri-
la Ina-
nité des Sciences impri- sonna en France pour quelque
,
qu'il fit

mer en i53o, irrita furieuse- chose qu'il avait écrit contre la


ment ses ennemis {dd). Celui mère de François \" mais il . ;

qu'il publia bientôt après à An- fut élargi, à la prière de quel-


vers (ee) de la Philosophie oc- ques personnes
, et il s'en alla à ,

culte [ff) leur fournit encore Grenoble oii il mourut la même


,

plus de prétextes de le diffamer. année 1 535 (m/??). Quelques-uns


Bien lui valut que le cardinal disent qu'il mourut à l'hôpital ;

Campège légat du pape , et le mais, selon Gabriel Naudé, ce


,

cardinal de la Mark évoque de fut chez le receveur général de


,

Liège parlassent pour lui igg). la province de Dauphiné le fils


,
,

Leurs bons offices ne firent pas duquel a été premier président


qu'il put recevoir un soude sa pen- de Grenoble {nn). M. Allard
sion d'historiographe, et n'empê- page 4 de laBibliothéque de Dau-
chèrent point qu'il ne fût mis phiné, assurequ' Agrippa mourut
dans les prisons de Bruxelles l'an à Grenoble , dans la maison qui
i53i (lih). Il n'y demeura pas appartient à la famille de Fer-~
long-temps. Il fit une visite l'an- rand rue des Clercs qui était , ,

née suivante à l'archevêque de alors au président T^achon et ,

Cologne {ii) il lui avait dédié


; qui! fut enterré aux Jacobins.
sa Philosophie occulte , et il en Il vécut toujours dans la com-
avait reçu une lettre remplie munion romaine ainsi on n'a :

d'honnêtetés (kk). La crainte des pas dû dire qu'il a été luthérien


créanciers fut cause qu'il se tint (N). Je ne crois point qu'il ait
dans le pays de Cologne plus écrit pour le divorce de Henri
long—temps qu'il n'aurait voulu VIII (0). Quant à la magie dont
(//). Il s'opposa vigoureusement on l'accuse je consens que cha- ,

aux inquisiteurs qui avaient fait cun en croie ce qu'il voudra. Une
arrêter l'impression de sa Philo- chose sais-je bien c'est que les ,

sophie occulte , lorsqu'il en fai- lettres qu'il écrivait à ses intimes


sait faire à Cologne une nouvelle amis , sans prétendre qu'elles
édition ,corrigée et augmentée. fussent un jour imprimées, por-
Voyez la XXYP. lettre de son tent toutes les marques d'un hom-
septième livre, et les suivantes. me stylé aux réflexions de religion
(ccl Epist. -VF libri VI pag. 96g.
et au langage du christianisiue.
,

(drfj Kpist. XX lihri VI pnf^. ^-j^. Ses accusateurs n'ont pas été bien
,

lee)E^isl. XIV lil/rt VI, pat;. 968.


informés de ses aventures (P) ,
\ff) Voyez la remarque (Qi.
(/?•§) Agrippa, JCpisl. XX libri 7'/, pag^. et cela énerve leur témoignage.
9^5; EpisL XII libri VII, pag. loIO; Epist.
KXI libri VII pag. 1022.
{hhj
,

Epist. XXIII libri VI, pag. 980. {mm) Joh. Wierus de Magis , , cap. V , p»
iii)Epist. VI libri VII.
(Ik) Epist. / libri VII. {nn) Naudé Âpolog.
, des grande Hommes ,

(IF) Epist. X.\7 libri VII, pag. 1024. pag. 427.


,

AGRIPPA. agi
On aura lieu d'être surpris âe II ne faut pas oublier la clef
leurs bévues et de l'effet qu'ils , de sa Philosophie occulte. Il la
ont produit nonobstant la né- , gardait uniquement pour ses
gligence avec laquelle ils ont re- amis du premier ordre, et il l'ex-
cherché les faits. Après tout, s'il pliquait d'une manière qui
n'est
a été magicien il est une forte , guère différente des spéculations
preuve de l'impuissance de la de nos quiétistes (V). Disons aussi
magie; car jamais homme n'a que l'édition de ses œuvres faite
échoué plus de fois que lui , ni à Lyon , en deux volumes in-
né s'est vu plus souvent que lui 8°., est mutilée dans un endroit*
dans la crainte de manquer de qui pouvait déplaire aux gens d'é-
pain. Les financiers de Fran— glise (X).
çois I*"^. et ceux de Charles-Quint
^^"'^''^^^1^ de saiote Anne, Operum tom. II,
étaient sans doute très-persuadés
j i . j . ' P^S- io53.
de son innocence a Cet^ égard , . Ce n'est pas dan,, m
endroit seulement
vu la manière dont ils le jouaient 7"^ ''^"<' édition d'.4«:rippa est mutilée.
quand il s'adressait à eux pour
-l^Mho'-nJans ses kmœr.Ks.r^^^^^^^
1 1 i>2l a restitue beaucoup d autres passages.
,

tOUclier ses gages. Il y a des er- Joly pense fjue ce fut Agrippa lui même qui.
"^"/'"' <''' reiranchemens. il s'appuie sur
reurs de fait dans les moyens dont "'
, • . une édition posthume df Cologne i575 ,

quelques-uns se sont servis pour ,«-12 au frontispice de laquelle on lit : Es


,

faire son apologie (Q). M. Mo- Postremâ authorù recognitione. Jolj- re-
' • j . j' 1 P, '. . pousse l idée que cette annonce ne soit nu une
ren s hautement pour
est déclare fourberie de librairie.
lui , qu'on ne de-
et c'est ce
Cet article Agrippa a fourni, au reste,
de treize pages de remarques à m/,
vait pas attendre de sa plume. P^",'
c P* ^ ^1 f" y rei-ient encore dans ses additions et
bes tautes ne sont pas nombreu- corrections mais c'est pour mettre des res- ,

ses dans cet article (R). ISOUS 'dictions à léloge qu'il a fait d'igrippa.

avons déjà marqué les principaux ... ^ ,


,. i> i i
(A) Grand mas;icien, SI Ion en croit
livres d Agrippa, et nous en par- /„v„ j^s gens.^ Paul Jove, Thevet et
lerons plus en détail dans les re- Martin Del Rio, sont ses principaux
marques. Il suffit d'ajouter qu'il accusateurs. Nous verrons dans la re-
marque fP) les bévues où ils sont
a fait un Commentaire sur l'art
, r> 1 r 71 i r-k • tombes, tlles sont palpables : et nean-
de Rajmoiid Lulle et une Dis- , ^j^i^s une infinité de per^nnes se
sertatwn sur l'origine du péché persuadent encore aujourd'hui sur ,

oii il établit que la chute de nos l'autoritë de ces écrivains, qu'A£;iippa


^'?'t consommé dans la science du
premiers pères vint de ce qu'ils
> • z T
' i Ti • enmoiie.
s aimèrent impudiquement. 11 ° ,n, r
1 T [n) r», une famille
-ii ?;
noble et, an-
promettait un ouvrage contre les cienne.^ Elle "s'appelait de Netles-
Dominicains (S) qui aurait ré— ,
heym.'Si. Teissier, à la page 99 du
joui bien des gens, et hors de H"- tome de ses additions aux éloges
tirés de M. de Thou assure qu'Agnp-
l'Église
o romaine et dans l'Église
o
. . pa ftait natif de IveUesheim.., clans le
romaine. H eut quelques opi- pays de Cologne. Melchior Adam ,
nions qui n'étaient pas de la rou- qu'il cite, ne dit point cela il le :

tine (T) et jamais protestant ne ,


fait naître à Cologne même (i), et

parla avec plus de force que lui "?"^ renvoie à une lettre d'Agnppa
1
1 j
contre 1 audace des légendaires
ni 1 ' • ou on lit ces propres paroles adres-
sées aux magistrats de Cologne P05- :

(00). sem l'cbis hontm ^'erissima exempta


(00) Voyez la préface de son Traite' de la (i) Melcli. Adami Vitre Med. , fag- i6.
2 ,,

292 AGR IPPA.


refeire, cwiuvi uestrofum pudori
iiisi huit; et de ce grand nombre, il n'y
purcendum et patrlœ meœ ratlonem en avait que deux qu'il n'entendît
habeiidiim ducerem. Sum enini et ego, pas en perfection. Il nous le dira lui-
si forte iieseitis , ciuilate uestrâ oriun- même sans faire trop le modeste:
,

dus, et prima puerilid apud vos enu- n'appréhendons pas de lui faire tort
tritus^i). Thevet, par une pliisgrande en l'estimant selon le prix où il se met.
faute , a débité qu'Agrippa naquit a Octo linguarum mediocriter doctus ,
la i'il/e de JVestre (3). Je ne sais rien sed illaruin sex adeo peritus , ut sin-
du père de notre Agrippa, sinon qu'il gulis non loqui modo et intelligere >
servit la maison d'Autriche (4), et seil et eleganter orare , dictare , et
qu'il mourut vers le commencement transferre nouerim, tiim prœter niul-
de l'année i5i8 (5). timodam etiam abstrusnrum rerum
(C) Il sériait sept ans dans l'année cognitionem, periliam, et cyclicam eru-
d'Italie. ] Le sieur Freher, qui ne se dilionem , utriusque juris et medici-
hasarde que rarement à sortir des naruni doctor et^asi (7). Il travailla de
bornes de ceux qu'il copie, a voulu fort bonne heure à la pierre philoso-
ici agir en maître, et faire voir qu'il phale, et il paraît qu'on l'avait vanté
pouvait dire ce que Melchior Adam à quelques princes comme un excel-
n'avait point dit. Mal lui en a pris ;
lent sujet pour le grand œuvre ;
'''

car il fait commencer ces sept années ce qui mit quelquefois en risque sa
à l'an i5o8, et finir à l'an iSi.*). S'il liberté (8). il est sûr qu'un homme
avait bien su son Agrippa, il n'aurait qu'on croirait capable de faire de
pas ignoré que cet auteur était en Es- l'or, aurait à craindre que quelque
pagne l'an i5o8; à Dole l'an iSog; en prince ne l'emprisonnât. On vou-
Angleterre l'an 1 5 10. Il faut que cette drait se servir de lui , et empêcher
semaine d'années ait commencé en que d'autres princes ne s'en servis-
i5i I, et qu'Agrippa ait prétendu avoir sent.
passé au service militaire de l'empe- (F) leçons publiques à
// Jît des
reur tout le temps qu'il demeura en Dufe.] Il semble
se contredire lui-
Italie. Mais ses propres lettres l'eussent même sur ce sujet ; car tantôt il as-
trahi, si l'on se fi\t mis à compter. On sure qu'il les fit sans avoir de gages
ne voit point que depuis qu'il monta et tantôt qu'il avait des gages Publi- :

en chaire à Pavie en i5i5, il ait eu , cis prœlectionibus quas ad honorent ,

de l'emploi dans les armées. Quant au Illuslrissimœ Principis Margaretœ et


reste le sieur Freher en tout ce qu'il
, , unici studii Dolani feci gratis. C'est
copie de Melchior Adam se contente , ainsi qu'il parle dans sa plainte con-
des fautes de cet auteur, il n'y en tre le cordelier Catilinet (9). Mais ail-
ajoute point d'autres. Voyez sou Théâ- leurs, il dit qu'il fut agrégé au corps
tre à la page l'iai.
, des professeurs en théologie , et gra-
(D) Il uouliit joindre a ses honneurs tifié d'une pension. In Dold Burgun-
militaires les honneurs académiques. diœ publ. leclurd sacras litteras pro-
11 est bon de voir comment il s'expri- cessus suni ob quant nb liujus studii
,

me. Ulriusque juris et medicinaruni doctoribus in collegium receplus in- ,

doctor evasi ante'a etiam


,
auratus super regentid et stipendhs donatus sum
eques ; queni ordineni non precario (10). Le moyen d'accorder c.s choses
Tnihi redemi non h transmarind pere-
, est de dire qu'au commencement il li-
grinatione ntutuai'i non in région , sait gratis , et dans la suite pour de
inthronisatione impudenli insolcntiâ l'argent.
surripui, sed in publicis prœltis niedid (G) La lettre obligeante qu'il recul
acie bellicâ i^irtute commerui (6).
(E) Plusieurs langues.'] 11 en savait
(7)Idem, Epist. XXI libri VII, pag. lOii.
'Joly pense que ce ne fut pas son talent pour
(2) Agrippa , Epist. XXri , Uh. VU ,
yiag. le grand œm're qui compromit sa liberté' mais ,

les de'couvertes qu'il avait faitesde machines


(3) Thevet, Histoire^ des Hommes illustres , de guerre et de moyens de destruction. Il dé-
tom. VII ^ P'ig- 222- Edit. de Paris, en 1671, très-longue et
veloppe son opinion dans une noie
en 7 vol. in- 11.
curieuse.
(4 Agrippa, Epist. XVIII libri VI, p. 970.
Idem, Epist. IV el X libri I.
(8)
(5) Idem, Epist. XIX l.bri II ,pag. 736.
(G) Idem, Ep.st. XXI Ubn Vil pas- ion. (9)Idem Operum tom. II pag. 5io.
, ,
^
Vôjet aussi pag. 737, 977. (10; Idem, Defens. Proposit. pag. SgS ,
,

AGRIPPA. 293
de Léon X (n)] Elle est datée de fût enterrée à ne demeu-
Metz, où
rait plus (i5). Il a\ait soin de recom-
il

Rome, le 12 de juillet i5i3 et signée ,

Pelrus Bembus i\ y est loue de son mander que l'on s'acquittât de tous
apostolique les anniversaires (pi'il as ait fondés
zèle pour le saint siéî^e ;

et cela sur le bon témoignage que le


,
pour l'âme de la défiuile (16) Il con-
nonce lui avait rendu /'Jx luteris ve- :
vola en secondes noces à Genève , l'an
ntrabilis fratris Ennii episcnpi i^eru- i522 (17). Il ne se loue pas moins de
lani nuncii nnstri, aliorumque sermo- cette seconde femme que de la pre-
nibus , de tud in sanctaru sedeni apos- mière yinte biennium hoc dit-il ,18),
:
,

tnlicam de^'oUone deque tuo in ejus ,


secundnrii uxorem duxi ^irginem no- ,

liberlale.incolumitateque tuendd stu- bilem pulcherrimamque quœ adeo ad ,

dio diligentidque intelleximus : quod meam wivit consuetudinetn , ut nescias


quideni nobis gratissimum fiiil. Qiia- istane priorem , anne hanc illa , utra
propler te in Domino magnoperè com- alteram in amando obsequendoque
mendamus laudarnmque istiim ani-
,
œquat an superet. La dernière surpas-
intiiii atque l'irtuteni {\-i). Notons que saitde beaucoup Tautre en fécondité :
ce bref ne peut pas servir à disculper il ne vint qu'un fils de la première ;
Agrippa par rapport aux accusations la seconde accoucha trois fois dans
de nécromantie (i3); car il précéda deux ans et une quatrième fois l'an-
,

de plusieurs années la mauvaise répu- née suivante Duos isltt mihi Jilios
:

tation de cet homme-là. peperit ambo siiperstites Jiliamque , ,

(H) // aidait dès lors femme et en- unam


quœ fitd excasit (19).-. Uxov
fans. ] Quoique je me serve du nom- niea jam partui proxima est (20). Il
bre pluriel, je sais qu'il n'avait qu'un ne dit pas si elle était riche mais un ;

fils: Quorsùm quœso, in tant suspecta de ses amis assure qu'elle l'était Tu :

tenipestate un'a cum. uxore fdioque ac nunc degere Gebennis illicque probâ, ,

Jannitd confagissent . retictd Piiplœ nobiU,jormosu ac locuplele ducld ,

domn ac supeltectile rebusque omni- uxore in artis ^pollineœ experimen-


,

bus ? C est ainsi qu'il parle dans la tis clarere singulariter (21) mais il ne :

XLiX^ lettre dulP. livre. 11 était fort me le persuade point; car les lettres
content de sa femme; et voici ce qu'il en d'Agrippa, depuis le second mariage,
dit en un autre lieu Ego quideni Deo ne prêchent pas moins la
:
misère qu'au-
qu'il eut de
omnipotenli innumeram habeo gra- paravant. Le troisième fils
ttant qui uxorem mihi conjunxit se- son second
mariage eut le cardinal
,

cundùni cor meum, l'irgineni nobilem, de Loiraioe pour parrain (22). Lors-
bené ntoratam adolescentulam Jor- qu'il partit de Paris pour
Anvers, au
, ,

ntosam quce ita ad nieam viidt con- mois de juillet 1628, il laissa sa
,

suetudinem ut ne contumeliosum l'er- femme grosse à Paris (23). Elle accou-


,

bum inter nos intercidat atque quà cha de son cinquième fils à Anvers
,

felicissimum me dixero quorsùm se le i3 de mars 1529(24^7 et


mourut
,

res uertunt in prosperis et adt'ersis


,
au mois d'août iSag, à Anvers, extrê-
,

semper œquè mihi benigna a/fabiUs mement regrettée de son mari comme
, ,
,

constans, inlegerrimiunimi, sani con- on le voit


dans la LXXXI". lettre du \ *.
elle avait près de vingt-sept
silii semper apud se manens (i^)- H livre
,
:

n'y a qu'une chose qu'il ne dit pas ans accomplis. Je n'ai point remarqué ;

c'est si elle était riche ou non car qu'il fasse mention de son troisième
j ,

d'ailleurs il la représente douée de mariage


dans ses lettres; mais on sait
,
l'année i535, il répu-
tout ce qu'il pouvait souhaiter belle, d'ailleurs, qu'en ,

jeune, vertueuse de famille noble, dia sa femme C/bi conjugeni Mechli


,
:

et d'une complaisance qui ne se dé-


(i5) Epist. VIII Ubri III pag. 785. ,
mentait jamais. Il la perdit l'an i52i
(16) Epist. XIX Ubri IV pag. 846. ,
et voulut, je ne sais pourquoi, qu'elle
(17; Epist. XXXIII Ubri IV, pag. 800.
Vide euam pag. 85 1.
(11) C'est la XXXFIII'. du /". livre, par- (i8; Epist. LX Ubri III pag. 8iS. ,

mi celles (i^Agrippa.
(19J Ibid.
(i2)0per. Agrippas, tom. II , pag- 710. (so) Epia. LXXIVUbri III, pag. 826.
(i3) On l'emploie à cet usage , en quelque fa- (21) Epist. XXXIII Ubri III, pag. 800.
çon , dans Crenii Aniraadv. Pliilol. et Hislor. , (22J Epist. LXXVIUbn III, pag. 827.
pan. II , pag. 1,4 et lï. (23) Epist. LV Ubri V, pas. ({.VS.

(14) Agrippa , Epist. XIX Ubri II pag- 736, ,


(24) Epist. LXVlILUbn V,pas. <j4i-
, ,

•J9 î
A G R I PP.4.
mtnsein Bonnes repudiâsset anno tiice- avec elle dans l'Italie? Ajoutez à cela ,

simn c/uinto supra sesquimillesimum. qu'avant son voyage de Metz il


C'est ce que nous apprend Jean Wier n'avait point planté le piquet au pays
(sS) qui avait été sou domestique. Si
, des Allobroges ; et qu'il était syndic
Thevet avait su toutes ces choses il , de Metz avant que Maximilien fût
ne se serait pas contenté de nous ap- décédé. Melchior Adam est tout plein
prendre qu'Agrippa espoifsa mademoi- de semblables fautes- Une partie de
selle Louyss Tyssie , issue de fort no- celles que je viens de marquer sont
ble maison l'an de son dife a3 et de
, , d'autant plus excusables, qu'on les a
saint iSog (26) il eût parlé en géné- : faites après Agrippa qui , faute de
,

ral pour ie moins des deux autres ma- mémoire ou autrement exposa à Mar- ,

riages. Melchior Adam en savait plus guerite reine de Hongrie, que depuis
que Thevet car il • n'a pas ignoré la mort de Maximilien il avait fait
qu'Agrippa avait eu deux femmes : tels et tels voyages , etc. Voyez sa
i)iiwn uxoruni maritus nobiliurii et , lettre XXI du VI1<". livre. Il ferait beau
liberorum aliquot parens mais ou- ; , voir quelqu'un occupé à accorder Mel-
tre qu'il paraît avoir ignoré le troi- chior Adam avec Thevet. Selon celui-
sième mariage , il a fait plusieurs fau- ci Agrippa se marie à vingt-trois ans;
,

tes de chronologie quand il a parlé selon l'autre il ne se marie qu'après


,

du premier. Voici ses paroles Mor- : une infinité de voyages et d'aflaires


tuo Maximiliano siib di^ersis etprin- , soûl du travail , et cherchant enfin
cipibus et civitalum magistrnlibus per quelque repos.
Italiam, Hispaniam, Angliara Gal- , (I) // avait protégé une paysanne
liam, egit, uiidtaque egregia jacinora ('') accusée de sorcellerie .'] Le domini-

designauit. Tandem , laborum terra cain Nicolas Savini inquisiteur de la


,

manque exantlatorum satur ac quietis foi à Metz voulait que l'on mît cette
,

et olii cupidus , ductd iixore , uirgine femme à la question sur le simple ,

nobUi , scdem in /tllobrogibusjixit préjugé que l'on tirait de ce qu'elle


ut procul negoliis sibi ac musis l'Ife- était tille d'une sorcière qui avait été
ret- Ini'itatus autem ab inclytd Medio- brûlée (3i). Agrippa fit tout ce qu'il
matricum repub. munus syndici , ad- put pour faire observer exactement
focali et oratoris , obii^it (27). Notez
, les procédures; et néanmoins il n'em-
que 1 empereur Masimilien mourut pêcha pas que la femme ne fût appli-
le 12 de janvier iSig et qu'Agrippa , quée à la question mais il donna
:

fit voyage d'Espagne en i5o8 , et lieu à faire connaître qu'elle n'était


le
celui d'Angleterre en i5io. Voilà donc point coupable. On condamna à l'a-
déjà un anachronisme. Après son re- mende les accusateurs (Sa). La peine
tour d'Angleterre il s'arrêta à Co- fut trop douce et trop éloignée du
,

logne quelque temps et puis s'en alla talion. ,

en Italie. Il y était encore l'an i5i7 (K) // promettait de noui'eaux triom-


(38) il était à Metz l'an i5i8 (ag) il phes au connétable de Bourbon.'} Les
: ;

ne retourna point en Italie depuis plaintes d'être employé à des sottises ,

qu'il en fut sorti pour venir à Metz d'astrologie étaient fort propres à dé- :

voilà donc un nouvel anachronisme. plaire Scripsi seneschallo ut admo- : ,

Remarquez aussi qu'en l'année i5i5 neat illam ne ad tant indignum artifi-
il était déjà marié (3o). Où sont donc

ces grandes fatigues essuyées par mer (*) Cette paysanne était de Vapey [l^illa fa-
et par terre depuis la mort de l'em- peya ] -village silué aux portes île Metz et ap-
,
, ,

partenant au chapitre de la cathédrale. Du reste


pereur Maximilien auxquelles il vou- il avait paru dans le clergé messin principal
,
,
lut mettre fin par le mariage ? Com- accusateur de cette femme tant de passions ,

ment a-t-il pu se fixer avec sa femme basses, et en toutes manières une si grande igno-
bonne philoso-
au pays des Allobroges, lui qu'on rance des belles-lettres et desalaLettre du 2 juin
phie, qu'à cet égard, dans
voit mener une vie fort ambulatoire jSig, Agrippa traitant la ville de Metz d'omnium
bonarum liUerarum virlulumque noveica , ce
(23) Wier. de Magis , cap. f ,
pag. iti. pourrait bien être lui qui, par ces lletnssanles
(26) Thevet, Hommes illustr. ,
j>ag. ?.î2, 2î3. paroles , aurait donné lieu au proverbe Métis
avara , scienliantm noverca. Rem. crit.
\^l) Melcli. AHami Vit. Medicor. pag. 17. ,

(28) Agrippîl. Fpist. / Uhri II, pag. 722. (:.i) Epist. XXXIX Uhri II pag. 754. ,

(2n) rpisl. XII libnll, pni;. 730. (32) Epist, XL libri II, pag. 757. Fide eliair.
(30) r.pist. XLVH el XLVHI libri t. pas- 763,
AGRIPPA. Î295
eiitm ingenio meo cfiutiùs ahutalur , ingens siquidem temanet glorice trium-
nec m has niigas ulteiiUs impins^ere phus (36,. La mort de ce connétable ,
cnqar, qui multo felicioribus stuJiis arrivée avant qu'Agrippa sortît de
lin insert'iie qiieam (33). Mais le pis Lyon, me fait songer à trois fautes de
fut que ces sottises faisaient découvrir Melchior Adam. 11 dit qu'Agrippa,

des prospérités pour le parti odieux. attiré premièrement par le connéta-


« Rediit in raenteni scripsisse me se- ble , et puis par le chancelier, s'en
)) nescbalio , comperisse me in Borbo- alla à la cour de Bourgogne et se ,

)) nii revoUitionibus illura


nataliliis trouva peu après fort malheureux à ,

)) frustratis vestris esercitibus etiara cause de la mort de ces deux patrons.


j) in bunc annum victorem fore C'est tomber trois fois dans Fanachro-
» dixique intra me infelixpiophe-
: O nisme. 1°. Le connétable était mort
» ta'. Iioc i^ai.icinio jar/i omneni princi- avant qu'Agrippa sortît de France et ,

j) pis titœ gratiam concacdsti : hoc est jamais il n'avait songé à Fattirer à la
3) ulcus , hic antrax , hic carbo , hir. cour de la princesse Marguerite (37).
i> cancer quem
ille ,
noli me tangere 2°. Le chancelier Gattinara le voulut
» dicunt ,
quem tu iinprudens tetigisti bien attirer, mais ce fut à la cour de
» eliam cauterio (34)- " Ceux qui sa- Charles-Quint et c'était une voca-
;

vent carte de ce temps-là voient


la tion qu'Agrippa distinguait fort clai-
fort bien que notre astrologue ne pou- rement de celle qui lui était proposée
vait pas faire plus mal sa cour à la par rapport à la cour de Marguerite
mère de François \" qu'en promet- . (38). 3°. Il était déjà dans le Pays-
tant de bons succès à ce connétable. Bas lorsque ce chancelier lui faisait
Agrippa fut dès lors regarde comme faire des propositions.
un bourboniste (35). Pour réfuter ce (L) Agrippa se i^ojrant cassé , mur-
reprocbe , il représenta le service qu'il mura ,
pesta , menaça
avait usé . ] 11
avait rendu à la France en détournant de menaces avant même qu'on lui ôtât
quatre mille bons fantassins de suivre sa pension le dépit de n'être point
:

le parti de l'empereur, et en les atta- payé de ses gages et de se voir mé-


chant à celui de François F''. Il allé- prisé lui fit dire qu'il se porterait à
gua le refus qu'il fît des grands avan- faire quelque méchant coup : Crede
tages qu'on lui promettait quand il mihi, écrit-il à un ami (Sg) , eô se in-
sortit de Fribourg, en cas qu'il voulût clinant res meœ atque aninius ni tuis ,

entrer au service du connétable. Il precibus illiusque céleri adjuuer auxi-


paraît par la IV^. et par la VI*. lettre lio , malo aliquo utar consdio , siqui-
du V. livre qu'il avait des corres-,
dem et malis artibus nnnnunquàm ho-
))ondances étroites avec ce prince au nafortuna parla est. Après qu'il eut
commencement de l'année 1527. Il lui su sa destitution , il écrivit plusieurs
donnait des avis et des conseils re- , lettres foudroyantes et menaça de ,

fusant pourtant de l'aller joindre , et faire des livres où il découvrirait tous


lui promettait la victoire. Il l'assura les défauts des courtisans qui Favaient
que les murailles de Rome tombe- perdu (4o). Il se porta jusqu'à dire
raient dès les premières attaques il : brutalement qu'il tiendrait désormais
n'oublia que le principal; c'est que le la princesse dont il avait été conseil-

connétable y serait tué: JtvuJ'ata illis ler et médecin , pour une cruelle et
prnpinquam slragem suamque perni- perfide Jesabel Nec ultra illam ego
:

ciem denunciant : mox illa superba pro principe med {jani enini esse de-
mœnia l'ix oppugnata corruere l'ide- siit } , sed prn atrocissimâ perjîdd et
bis. Eja ergo nunc, streniiissime prin- qundam Jesabele mihi habendam de-
ceps quem tantce l'ictoriœ duceni Jata
, crei'i (40- Q"*' n'aurail-il point fait
constiluunl , rumpe morns perge in- ,
(36) Epist. F/ Uhri V, pag. 900. CeUe lettre
trépide quo cœpisii prospère , aggre-
fui écrite de Lyon , le 3o mars 1327.
dr.re forliter , pugna constanter, habes
(3-) C^esl celle que Von entend par la Cour
eieciissim.orum militum armatas acies : lie Bourgogne.
adest cœlorum Ja^'or , aderit et justi (38) Agrippa, Epist. LXXXIVUbri V, p. gSi.
belli findex Deus; nihil formida^eris, (3q) Epist. XXV
Uhri ,
pag. 85o. IV
(40) Voyez la LU', el la LXII'.
du IV'.
(33) Epist. XXIX Uhri IV ,
pnç. 85^. livre.

(34) Agrippa, Epist. LXII Ubril F',pas.SHo. (4.) Epist. LXII Ub. , IV, pas- 884. ^OJ"
!35) Jbiil.,pag. 8S1. la LU'. Lettre du livre V, toute pleine de-Ju-
296 AGRIPPA.
dans une telle colère et clans un tel ment de ce que Luther on les sectateurs
désir de vengeance, s'il avait eu au- de Luther publiaient sur les matiè-
tant de crédit auprès des démons res de controverses mais cela ne veut j

qu'on a voulu le persuader ? Je ne sa- pas dire qu'il approuvât les dogmes
ciie point que quelqu'un ait dit que de ce réformateur. Les plus rigides pro-
cette indignation d'Agrippa devint fu- testans de la confession de Genève ne
neste à quelque personne de la cour pourraient-ils pas donner ordre qu'on
de France. Ce niallieureux homme ne leur achetât tout ce que les sectaires
fut pas plus satisfait de la cour de de Transylvanie font imprimer; et ne
Charles-Quint. 11 présenta une requê- serait-on pas bien ridicule de préten-
te au conseil privé de ce prince , dans dre sur cela qu'ils sont du sentiment
laquelle il se fît tout blanc de son de ces hérétiques Ceux qui embras- .''

épée, et représenta qu'il pouvait faire saient la réformation de Luther ne


du bien et du mal. Ses menaces étaient traitaient pas ce docteur avec cette
les plus intelligibles du monde mais indifiérence que l'on voit dans les let-
;

on y fut insensible impunément: Co- tres d'Agrippa c'est-à-dire sans le , ,

geretis me acceplain ed repulsd inju- louer ni le blâmer. Si Agrippa était


riant ad noi^aruni reruni licentiam l'auteur de la LXXXIl^ lettre du \\V.
iransj'erre et vialo aliquo consilio livre, il ne faudrait plus être en doute
,

( ceu quale Hermocles dédit Pausa- qu'il n'eût été un bon et franc luthé-
niœ) iili oportere.... Qiiin et riialis rien mais encore qu'on ait mis au ti-
;

artibus sœpissimè bona fortuna porta tre Agrippa ad amicum il est certain ,

est..,. Sed intere'a memineritis inter qu'elle n'est pas d'Agrippa en voici 5

jEsopi Apologos esse murent ali- la démonstration Celui qui a écrit


, :

quando subi'enisse leoni, etscarabœum cette lettre marque que sa femme


expugndsse aquitain (43). était accouchée d'un fils au mois de
(M; On av'ail.... prévenu contre lui novembre i5a5. Or, la femme d'A-
l'esprit de cette princesse. ] Voilà ce grippa était accouchée d'un (ils au
qu'il nous apprend là-dessus après mois de juillet précédent cela est clair
, :

s'être plaint qu'on le laissait mourir par la lettre LXXVP. du IIF. livre,
de faim Quod ad te scribani non ha- où l'on voit même que le cardinal de
:

beo aliud , nisi quod ego hic egregiè Lorraine fut parrain de cet enfant. 11
esurio ab istis aulicis diis totus prœ- est donc incontestable qu'Agrippa n'a
,

teritus. Quid niagnusille Jupiter {^i), point écrit la lettre en question. Je


suspicari nequeo. Ego quanta fuerim laisse à dire qu'il n'était point à Stras-
in periculo , jam primiim resciui; tan- bourg mais à Lyon au temps que , ,

tum eiiini dictuni est mihi ; prcBi^alue- cette lettre fut écrite de Strasbourg.
ranl cuculliones illi apud Dominant , Ainsi , ceux qui voudraient procurer
sed muUebriter religiosam principem , une telle preuve à Sixte de Sienne,
ut nisi illa mox periisset jam ego , qui a dit qu'Agrippa était luthérien
,

quod maximum crimen est , monacha- (45), (*) ne lui fourniraient rien qui
lis majeslatis sacrœque cucullœ reus vaille. Quenstedt a réfuté Sixte de
tanquam in religionem chrislianam Sienne par le VP. chapitre du Traité
impius periturus J'uissem (44)- Ordi- de la Vanité des Sciences, où Agrippa
nairement une maîtresse est plus à traite Luther d'hérésiarque. Cette ré-
craindre qu'un maître quand on est
accusé d'irréligion.
,
(45) Sixti .Senensis Biblioth. Sancta , lib. , V
ytnnolat. LXXIII
, apud Quenstedt, de Patriis
(N) On n'a pas du dire qu'il a été illustr. Viroriira pai;. i44- Deirio
. Di:-quis. ,,

luthérien. ] J'avoue que je n'ai point lib. II , quarsl- XVI, et Tannerus .fur le Traité

remarqué dans ses lettres que quand de saint Thomas, de Potentiâ Angelorum, qucest.
,
III, font Agrippa protestant. Vojez Voel. Disp.
U parle de Luther, il se serve de paro- part. III , pag. 616.
les ou de réflexions injurieuses. J'avoue (') Agrippa , au ch. 19 de son Apologie parle ,

si magnifiquement de Lutlier, et avec tant de


aussi qu'il s'informe assez curieuse-
mépris des principaux adversaires de ce réforma-
teur , que c'est apparemment là-dessus que -l'csl
reur , et la XXIII'. du même livre oii il dit que

cette princesse serait fort mal conseillée ^ si elle


fondé Sixte de Sienne, pour avancer qu'Agrippa
était luthérien. Comme c'ét.nit ici un endroit à
le reprenait à son service,
alléguer cette pièce, plutôt que cerlaines lettres
(/fi) Agrippa , Epist. XXII lihri VI ^
pag. 97g. d'Agrippa on peut croire que M. Bayle ne l'a-
,

(43) CVsL-U-dire, Charles-Quml. vait pas lue si exaciement que ces lettres. Rem.
(44) Agrippa, Epist. XV Ubn FI, pa^. 968. CHIT.
AGRIPPA. 297
futalion est infiniment plus solide que l'impiété des hérétiques (48) ; et peu
celle dont s'est servi un théologien après il écrivit à Melanchfhoii le plus
d'Utrecht en alléguant la profession
, honnêtement du monde (49) il le pria '

de théologie à laquelle Agrippa fut de saluer de sa part l'invincible héré-


ë!evé à Dole et à Pavie , et Temploi tique Martin Luther Snlulahis mihi :

qu'il eut auprès du cardinal de Sainte ini'iclum illttm hœreticum iMartinuni


Crois, pour le concile de Pise (46). Lutherum, qui, ut in Actibus ait Pau-
Cela ne prouve rien du tout parce ,
lus, sentit fJco secundiini sectani quam
que tous ces honneurs dAgrippa pre'- hœresim i-ocant ; et lui témoigna
ce'dèrent la première prédication de souhaiter de sortir de Babylone Uti- :

Luther contre le pape. Si l'on me de- nam hic IVabuchodonosor (il parle de
mande pourquoi Agrippa parle plus Charles - Quint ) aliquandà ex beslid
durement de Luther dans son livre redirel in hominem aut ego relinquere ,

de la Vanité des Sciences que dans ses possem istud Ur ChaUœorum (5o) ?
Lettres je ne répondrai point que
,
Un temps a été qu'on lui recomman-
c'est un ouvrage où il se proposait de dait les frères (5i) ainsi, ce qu'on :

critiquer tout le monde j'aime mieux "


vient de voir qu'il écrivit à Mélanch-
me servir d'une autre raison. Quand thon était un retour de certains pre-
,

il composa ce Traité il était appa- , miers mouvemens que ses disgrâces et


remment revenu de l'espérance qu'il les injustes procédures des théologiens
avait d'abord conçue de Luther. Je catholiques lui inspiraient. En tout
crois qu'aussi-bien qu Erasme, il avait cas, il est bien certain qu'il a vécu et
regardé au commencement mort dans la communion ro-
ce réfor- qu'il est
mateur comme un héros qui ferait maine. Nous toucheronsquelquesunes
cesser la tyrannie que les moines men- de ses opinions dans la remarque (T)-
dians et le reste du clergé exerçaient
(0) Je ne crois pas qu'il ait écrit
sur l'esprit et sur la conscience. Igno- pour le dii'orce de Henri Vlll. ] J'ai
rans et voluptueux , ils fomentaient lu dans l'ouvrage d'un fort habile
mille basses superstitions , et ne pou- homme que Cramraer ayant fait « un
,
vaient Souffrir qu'on étudiât les bel- )) voyage en Allemagne où il acquit ,

les-lettres ils ne voulaient ni sortir


:
» la connaissance du célèbre Cornélius
de la barbarie , ni soufl'rir que les au- j) Agrippa l'entretint de l'affaire du
,

tres en sortissent de sorte qu'il suffi-


j » divorce et lui en représenta si
,

sait d'être bel-esprit savant poli , ,


, « bien la nécessité , que ce grand
pour être l'objet de leurs violentes dé- » homme défendant avec chaleur les
clamations. Agrippa, Erasme, et quel- » poursuites de Henri , fut fort mal
ques autres grands génies, furent ra- » traité par l'empereur , et mourut
vis que Luther eût rompu la glace ils ; » enfin en prison (52). » Celui qui a
en attendirent une crise qui délivre- critiqué cet ouvrage a répondu en-
rait de l'oppression les honnêtes gens ; tre autres choses i". que R. Wak- :

mais quand ils virent que les choses J'eld , qui écrivait en ce temps-la pour
ne prenaient pas le train qu'ils au- Henri VIH
a dit positivement qu'il
,

raient voulu ils furent les premiers


,
répond au livre de l'éi'êque de Roches-
à jeter la pierre contre Luther. Di- ter , et à un autre qu'on croit être de
sons pourtant qu'Agrippa fut sujet à f^iuès ou d' Agrippa 2°. qu Agrippa :

diverses alternatives. 11 protestait à est mort en France et nullement pri- ,

Erasme, en lui envoyant sa déclama- sonnier en Allemagne (53). J'ai trouvé


lion sur la Vanité des Sciences , qu'il
n'avait point d'autres sentiraens que (48) Epiit. XII libri yil, pag. loiî.
ceux de l'Eglise catholique Illud te :
(49) royez la lettre XIII du VII'. livre ,

adnionituin de his quœ ad


t'olo me pag. ioi3. // paraît assez favurable à la nou-
reh^ionem altinent nequaquam. secàs
,
velle Peltgion dans les lettres XyiII et LU
du III'. livre.
ser.tire quant sentit Ecclesia catholica
(50) Epist. XII Ubri m, pag. ioi3.
(47). 11 souhaitait en dédiant l'apolo- (5il Epist. XVI et XXXIV Ubri III. Vide
gie de cette Déclamation au légat du etiain Epist. XV ejusdem libri.

pape que Dieu purgeât son Eglise de (02) Histoire de la Réformation d'Angleterre ,
par le docteur Biirnet ( it présent é.éque de
,

(!{&) Voelii Disputât. Tlieoloeic. fart. III -,


Salishtirr ) n Van. i53o , Uv. II , pag. zBo ,
,
,

édition ^Ainsterd.
^ Àjrippa, Epist. XXXVl libri FI, p. 909. Le Grand Histoire du Divorce de Heu-
('47) (53) ,
298 AGRIPPA.
dans d'Agrippa certaines comptait pour engagé à cet ouvrage
les Lettres ;

choses qui me persuadent qu'il ne fut car dans la lettre qu'il écrivit à la
point du sentiment de Crammer. L'am- reine de Hongrie après qu'il se fut ,

bassadeur de sa majesté impériale à retiré à Bonn il représente comment ,

Londres (54) écrivit à Agrippa le 26 il donnait toutes ses veilles à son em-
de juin i53i pour Teshorter à sou- ploi d'historiographe , quoitpi'il n'en
,

tenir les intérêts de la reine (55), et le ei\t encore retiré aucun profit. Je ra-
fît souvenir d'un endroit de la Vanité masse des mémoires, dit -il, pour
des Sciences qui censure Henri Vlll l'histoire de la guerre d'Italie et de
:

Hoilik adhuc nescio cul régi persuasum Hongrie et outre cela j'ai un plus ; ,

iiudio , ut liceat sibijani plus t^ii^inti grand dessein en tête c'est d ccrirs ,

onriorum uxorern dimlttere et nubere pour la reine Catherine notre tante.


,

pellici (56). Agrippa fît réponse, que Voici ses propres termes Sed longe :

de bon cœur il s'engageait à cette en majus his negotium pro vestri sangui-
treprise pouvu que l'empereur lui nis décore pro lud inqunm mater-
, , , ,

expédiât ou ses ordres ou sa per- tcrdAngliœ celebratissimn regina mets


, ,

mission. Il marqua très-fortement qu'il humeris impositum suscepi in quo li- ,

détestait ces lâches théologiens qui cet multi hacteniis operam siinm col-
approuvaient le divorce ; et voici ce Incdrunl nullus alhuc noduni rei dis- ,

qu'il dit touchant la Sorbonne Non secuit (Sg). .Te ne pense pas que ce
:

est mihi incognitum


ICOg/llt queis arlibus res dessein ait .1' iamais été esécuté l'aii- :

hœc apud Parislorum Sorbonani trac- teur, en disgrâce à la cour impériale,


iata e^t , quœ cœteris tanti sceleris au- trouva bon sans doute de ne se pas
sum temerario porrexit exemplo. Vix exposer à l'indignation du roi d'An-
me continere queo quin imilalus poë- gleterre. Si Crammer l'avait gagné ("),
,

tani illuin exclaniem Dicite Sorbo- il faudrait qu'il eût fait cette conquête
; ,

nici in theologiâ quid valet aurum ? pour le plus tôt en l'année i532 et si
,
:

Qaantiim pietatiset fidei illorum pec- Robert Wakfeld pub'ia son livre
tore clausum putabinius quorum ve avant l'année iSS'a (60)
,
il est sûr ,

nalis magis quam sincera conscientia que le traité qu'il réfute et qui pas- ,

est ,qui extimescendas uniferso orbi sait pour être de Vives ou d'Agrippa ,

christiano determinationes auro uena- n'est nullement d'Agrippa. Notez que


lesfecerunt,acserfatamtotannisfi- Sandérus qui nomme plusieurs au- ,

dei et smcerilatis opinionem nunc tan- teurs qui écrivirent contre le divorce
dem extremâ ai'ariliœ infnmiâ corru- (61), ne parle point de ce dernier.
perunt {5-]) ? Il ne laisse pas de repré-
(5o) Epist. XXI libri VII , pag. 1024.
senter le péril où il s'exposerait en (*) AoRiPPi ne s'était pas encore lais-é gagner
écrivant contre un divorce que tant en i533, temps auqueV, si je ne me trompe, il
de théologiens avaient approuvé publia son Apologie contre les Docteur-; de Lou-
:

n'a pn le faire drpuis sans la même


gens dit il qui me i'eulent beau- vain et ; il ,

lionleuse prévarication qu'd y reproche à la Sor-


, ,

coup de mal à cause de ma f^anité des bonne. Eodem y dit-il, parl.nnt de ce corps ,

Sciences. L'ambassadeur revint à la fameux, his recenùbus annis delerminavil, Pa-


dispentare ut fraler ducal uxo-
charge lui fit espérer que la reine pain non potse
,
remfralris morlui sine hberis alque proptereà ,

d'Angleterre écrirait ou à l'empe- malrimonium inler Angliœ Bcgem et Cietaris


,

reur ou à la reine de Hongrie


,
tou- amilam velut cnntra jus nalurale el divinuin
, , ,

chant l'ordre d'écrire sur cette ma- indi'penrabile pro incesluoso abominabili el . , ,

sacrdego adullfrio damndrunl, magna Sorbonœ


tière, et lui expliqua pourquoi Erasme,
infamid. C'um non mullis annis anl'e pro Augus-
Vives et les autres bonnes plumes du tino Furnario dvt ac Palrtcio Genuensi deler-
,

temps ne devaient pas être choisis minavissenl oppoHltim. [Agrippœ Apolog., etc.,
,
cap. 2. ] Ce n'est pas, au reste, dans la seule
aussitôt que lui (58). Agrippa se
édition i536 que se trouve le passage que de ,

ri VIII , tom. II, pag. ii5. Voyez aussi toni. I, sous la Lettre X, Crénius remarque avoir élc
pag. 24Ç)-
relrancbé du Traité de la Vanité des .Sciences
(54) il est nommr dans les LeUres (Vyfgrippa, dans l'édition de Lyon. Ce passage reparaît en-
Eiistocliius Cliapusius, el dans celles d'' Érasme, core dans l'édition de iSSg, et on le trouve dans
Euslatbius Chapiisiuiî. toutes les précédentes éditions de ce Traité.
'55) Agrip. , F.pist. XlXUbri VI, pay. 978. PlEM. CRIT.
(56) Agrip. de Vanitate Scieuliar., cap. LXIII, (Go) W. le Grand, tom. I, pag. 249, du
nue Or, selon
cet Oni-rage est intitule', Cotzcr.
pag. 124.
le Cotzer /ut
(5r) AEfippa, Kpist. XX
lihri VI , pitg. çr;^. le Catalogne d'Oxford. pag._ 246 ,

(58)Fpistr XXfXWW
yi, pag. ^S6. Vide impriinr il Londres l'an iHt]. ,

rliam Epistol. XXXII f, pug- 99^- (tii) Sanderi Hist. Schismalis An|li»!.
,

AGRIPPA. 299
(P) Ses accusateurs n'ont pas été alitis familiarissimè quem nimirîim ,

bien informés de ses a-'enlures. ] J ai non raro ubi Agrippam seclarer Inro ,

dit dans la première remarque qne ,


ex pilis concinnato aUigatuni duxi
Paul Jove Thevet
,
et Martin Del , at uerc natwalis ernl canis mnsculus ,
Fiio, sont ses principaux accusateurs ,
cui alias femellam ferè colore et re-
etjai promis de montrer leurs fautes; liqud corporis conslitutione simi/em ,
les voici donc : quant Gallicè Mademoiselle ( Domi-
1°. Paul Jove !e fait mourir à Lyon nam ) appellahat me prcesente , nd-,

dans un cabaret et le char-


rat'cliant , junxit. Cet auteur ajoute qu'Agrippa
ge du soupçon infilme de magie par , aimait follement ce chien qu'il le ,

la raison que vous allez voir. ^:,'a/7>o, baisait souvent , (ju'il le faisait quel-
dit-il (62) menait toujours ax'ec lui
, quefois manger à sa table qu^l le ,

un diable sous la figure d'un chien soufiVait dans son lit, et que pendant
noir. Aux approches de la mort ,
que lui Wier et Agrippa étudiaient
comme on le pressait de se repentir ,
sur la même table , ce chien se tenait
il 6ia au chien un collier garni de clous toujours couché entre eux deux au
qui formaient des inscriptions nécro- milieu d'un tas de papiers. Or, comme
niantiques et lui dit
, va-l'en, mal- Agrippa était des semaines tout en-
litureuse bète qui es cause de ma perte tières sans sortir de son poêle, et
totale. Ce chien prit tout aussitôt la qu'il ne laissait pas de savoir presque
fuite l'ers la Saône s'y jeta et n'en , , tout ce qui se passait en divers pays
sortit point. Cet auteur avait donné du monde, il y avait des badauds qui
de grands éloges à Agrippa du coté disaient que son chien était un diable
de Tesprit et de la science jusqu'à ,
qui lui apprenait tout cela. Il n'y a
dire (jue cette science lui avait pro- pas long-temps qu'un soldat réfugié
curé la dignité de chevalier que l'em- me disait fort sérieusement que ,

pereur lui avait donnée: P'ir educalus pourvu que M. de Mélac (66) eût son
inlilteris,eta Cœsare eruditionis ergo dogue, il revenait toujours victo-
equestris ordinis dignitate cohonesta- rieux.Il m'assura que dans l'opinion ,

tus (63). Commençons par-là notre générale des soldats , ce dogue était
critique. un esprit familier qui révélait à son
H est certain par le témoignage
, maître les postes des ennemis , et leur
d'Agrippa ,
que son ordre de cheva- nombre leurs desseins
,
etc. M. de ,

lerie fut la récompense de ses exploits Mélac n'était point fâché peut-être
militaires (64)- D'ailleurs il n'est pas , qu'on crût cela cette opinion pouvait
:

mort à Lyon ; et enfin, Jean Wier, faire que les soldats ne craignissent
son domestique témoigne que ce , rien sous sa conduite (67). Voilà de
chien noir était un vrai chien, et qu'il quelle nature étaient les bruits sur
l'a souvent mené avec un cordon de lesquels Paul Jove s'était fondé,
crin. Silentio involi'i , dit-il (65) ,
2°. Passons à Thevet. On ne peut
diutiiis oh verilatis prœrogatiuam non
nier , dit -il (68) , qu'Agrij)pa n'ait
patiar qiujd in dii'ersis aliquot scrip- esté misérablement ensorcelé de la
toribus {*) legerim diabolum formd plus fine et exécrable magie qu'on
,

canis ad extremum Agrippée halitum puisse imaginer , et de laquelle , au


comileni ipsi fuisse et posteà nacio veu et sceu d'un chacun , il ajait pro-
,

quibus modis eranuisse. Satis equi- fession si évidente ( ainsi que le pré-
dem mirari h\c nequeo iantœ existi- sent discours le justifiera) qu'il n'est
Tuationis uiros tant insulsè aliqiunido possible de reculer en arrière par né-
loqui , sentire , et scribere ex inanis- gatires palliations ou déguisemens. ,
,

sinio l'ulgi rumore. Canem hune ni- Or voyons à quoi se réduisent les ,

griim mediocris statures , gallico no- preuves que ce présent discours ap-
mine Monsieur , quod Dominum. so-
nat , nuncupatum noi'i ego si quis (G6) Lieutenant gênerai dans les années de
"^ o « France: il servaU dans les années d Alleinaf;ne
cap. XCI. pendant la guerre qm a éle terminée l'an 1697.
(62) Paulas Jovius in Eloglis,
o r I
)- ; ,,.,., yoreilaremarque{i)del articlet,UiDt.v,alaJin.
(Oi)J't.iOui.
(f,-) rorez ce que PluUirque rapporte de la
(64; Voret ct-dessus la rémarque [D). j,,,;,^ j^ Sertorius , dans la Vie de ce général.
(65; Joann. Wier, de Magis, cap. V, p. m. ((jg) Thevet Hisl.
, «les Hommes illustres ,

(*) Jovius in Elogiis, et ex hoc .iudrcas Hou- lom. Vil pa^. 221
, , édil. de î'aris, en 1671 ,
ilurlFin libro Exemploriini Geruuo. et alii. en S vol. in-ii.


3oo AGRIPPA.
porlc. En premier Antoine de facultez il chercha tous les moyens
lieu , ;

Lève chérissoit telleiiie-nt ce person- qu'il put pour uivotcr remuant le ,

nage que par son conseil adi'is et mieux qu'il pouuoit la queue du bas-
, , ,

prudence, il l'cnoit a bout des desseins ton et il gagnoit si peu qu'il mourut ,

de SCS hautes et superbes entreprises ; en un chétif cabaret abhorré de tout ,

ce (J'ii a fait que certains eni'ians à le monde qui le détestoit comme un ,

cet Espagnol ses victoires ont dit que maudit et exécrable magicien parce ,

par art migique et Agrippine il a que tousjours il menoit en sa compa-


grippé sur ses ennemis ai^ec ses mains gnie un diable sous la figure d'un
podacres et crochues ce que beau- chien. Thevet ajoute à cela le reste du
,

coup de vaillans capitaines n'eussent conte que Paul Jove a inséré dans ses
seau par le cliquetis de leurs armes et Eloges.
combats Jurieux (69). En second lieu, Il serait facile de montrer la nullité
les enseignemens d'Agrippa sont tel- de ces cinq preuves. Il n'est pas be-
lement déraisonnables que le doc- soin de réfuter la première , puisque
,

teur Jean f^uier quoiqu'on plusieurs Thevet a reconnu qu'Antoine de Lève


,

endroits de ses œui'res il le loue et ne s'adressait point à Agrippa pour


exalte grandement comme son bon quelques prestigieux et iniques char-
maistrc il est néanmoins quelquefois mes (73) mais plustost pour la rare
, , ,

contraint de lui donner un coup de merveille de son esprit (74) et que ;

pied et le désai^ouer (70). On nous l'empereur ne le prit h son seriàce ,

renvoie au chapitre XLIV du H*, li- par l'intercession d'Antoine de Lève ,

vre des Illusions et Apparitions des que pour l'asseurance qu'il ai'oit que
Esprits (71)» pour y trouver que Jean par son rneur et rassis jugement il pour-
Vuier se moque ( avec Cardan au rait suri'enir aux grandes affaires qui
XVÎIP. livre de la Subtilité' ) des res- lui étaient tombées sur les bras. Voilà
ueries d' Ag'ippa qui Jhrgeoit des donc l'accusé hors d'ailàire
,
par la ,

apparitions pins que ridicu'es. En troi- confession même de l'accusateur il :

sième lieu, son li^'re de la Philosophie est bien plus malaisé de justifier ce-
cachée a esté condamné et censuré lui-ci d'une très-crasse ignorance. Je
par les chresliens... et pour cette oc- n'ai remarqué dans les Lettres d'A-
;

casion fut contraint Agrippa d'a- grippa aucun vestige de ses liaisons
,

bandonner la Flandres oh il ne put avec Antoine de Lève, et je m'étonne


,

estre s'^uffert faisant profession de la que, sur la foi d'un auteur comme
,

magie de manière qu'il prit la route Thevet tant d'habiles gens aient dé-
:
,

d' Italie où, il séjourna t'espace de


, bité qu'Agrippa^iit/rti'orj d'Antoine
trois ans ou eni^imn et y épancha plus de Lèue
, et capitaine en ses troupes ,

que n'eût été requis du poison ai>ec (•j5). Il ne fut jamais au service des
telle abondance que plusieurs gens Espagnols il ne servit que dans les
,
:

de bien appercei^ans qu'il en at'oit en si troupes de l'empei'eur Maximilien ; et


peu de temps infecté l'air de l'Italie je ne pense pas que depuis la haran-
,
,

lui donnèrent la chasse si uife qu'il gue qu'il fit à Pavie l'an i5i5 il ait , ,

n'eut rien de plus hasif que de se reti- endossé le harnais. Voici quelques
rer h Do'e où il lent publiquement mots de cette harangue Neque mire-
, :

le Hure de Verbo mirifico (72). En qua- ris marchio illustrts Joannes Gon- , ,

trième lieu il obscurcit tellement la zaga strenuiss. mililum dux


, quod ,

Bourgoii;ne des fumées et brouillard cùm me projiimis his annis felicissi-


de ses sciences noires , que s'il n'eust mis Cœsareis casiris prœfectiim cog-
fait un trou à la nue , il est bien à nosceres, nunc me sacrariim lilterarum
craindre qu'ai'ec le feu on ne l'eust prœpositum pulpito cernas (76). 11 fit
éclairé de p'us près qu'il n'eust sceu encore quelque séjour en Italie il y :

souhaiter. En cinquième lieu il se , eut pour patron Guillaume Paléolo-


rendit à Lyon , fort piètre et dénué de
(73) Là même png. ,
223.
(69) Là même pag. ,
223. (743 XiV même pag. ,
22.'».

(70) Là même, paf;. 225. (75) Naudé , Apologie «les grands Hommes ,

^^ (7') n ai point trouvé de livre qui ait ce


•^'^ pag. 4o5. Voyez aussi Teissier Elog tirés fie ,

titre ni celle division dant les OKtivrcs de Jean M. (te Tliou , tom. II , pag. 99 Vojez ci-des-
Wier ,
imprimées à Amsterdam, en 1660, iiî-Zf. sous Citation (79;.
(72) Thevet, Hommes illustr. , pag. 22G. (-6) Agrippa , Oprr. , lom, II ,
pag, lo-jS.
,

AGRIPPA. 3oi
gue marquis de Monferrat à qui il
,
, draient Bodin , Martin Del Rio , le
dédia son Traite De liiplici ratlone Loyer , et la plupart des di'mouogra-
cognoscendi Deiim, l'an i5i6;77) il : phes si cette manière tle raisonner
,

enseigna à Turin et il rejiassa les ,


avait lieu ? La troisième raison four-
Alpes vers le commencement de Faii- mille de faussetés. Si Agrippa eût fait
nee 1618(78;. Qu'on me montre qu'An- profession de magie on ne se fût ,

toine de Lève ait servi l'empereur pas contenté de le faire sortir de


Maximilien. Mais voici une ignorance Flandre ; on ne punit pas si dou-
encore plus crasse. Agrippa n'obtint cement une telle profession. Il ne
le titre de conseiller et historiographe fut jamais en Italie depuis les cen-
de Charles-Quint que par le moyen sures de sa Philosopliie occulte. Cet
des amis qu'il rencontra à la cour de ouvrage ne parut qu'en i53i. Si
la princesse Marguerite gouvernante A,;ripi>a eiU épanche dans l'Italie avec
,

du Pays-Bas. Cliarles- Quiut n'était tant d'abondance le poison de sa ma-


point alors dans le Pays-Bas il
y gie le cardinal de Suinte-Croix Tau-
: ,

vint quelque temps après si pre'venu rait-il choisi pour l'un des théologiens
,

contre Agrippa, tjue, sans les bons of- du concile de Pise ? Le pape lui aurait-
fices du cardinal Campège et du car- il écrit un bref si honnête en l'an i5i5
,

dinal delà Mark. il Taurait fait met- (81) ? Bien loin que notre Agrippa
,

tre dans un cachot. Le sieur Clavigni chassé d'Italie se soit retiré à Dole il ,

de Sainte-Honorine dit que la fin d'A- n'alla en Italie qu'après avoir* quitté
grippa n'ei\t pas ëtë moins funeste que DôIe. La quatrième raison suppose
celle de Lucilius Vaninius si le car- faux. Agrippa se fit des affaires à
,

dinal Campège , et Antoine de Lève, Dole pour avoir donné dans les hypo-
ses protecteurs n'eussent détourne thèses de Capnion dont il expliquait
, ,

Charles-Quint de le faire punir (79). le livre de f^erbo mirifico. On sait les


Il ne vit point Agrippa et ne lui tit longues querelles des moines et de
,

point payer ses gages tant s'en faut Capnion. Le cordelier Catilinet
: ai- ,

qu'il se soit servi de ses conseils pour mant mieux prêcher contre Agrippa
se de'barrasser îles grandes affaires qui devant la princesse Marguerite que ,

lui étaient tombées sur les bras. C'est disputer ou s'éclaircir avec lui à Dùle ,

«ne plaisante preuve de l'habileté' prit le parti de l'allerdiflaraer à Gaud


d'Agrippa dans le droit que de dire sur la chaire de vérité ,
mais il ne :

que Charies-Quinl le recul au nom- l'accusa point de magie il ne l'accusa ^

bre de ses conseillers. A


la jurispru- que d'attachement à la cabale judaï-
dence dit Thevet (80) ilai"iit don- que
,
et de pervertir l'Ecriture par
, ,

né une si uiife atteinte que ( comme des explications cabalistitpies (82).


,

j'ai ci-dessus remarqué ) l'empereur Les déclamations mal placées de ce


Charles-Quint le reçut au nombre de cordelier qui au lieu de prévenir , ,

ses conseillers II avait dit dans la page la cour et le peuple contre un profes-
préce'dente (.[n Agrippa fut si bien seur absent devait l'accuser dans les
, ,

reçu h la cour de cet empereur qu'il formes devant les juges académiques, ,

fut du nombre de ses conseillers. Ne n'empêchèrent point que le célèbre


sait-on pas que le titre de conseiller Jean Colet ne loge;1t Agrippa chez lui
du roi se donne à une infinité de gens à Londres et que l'empereur Maxi- ,

à des me'decins à des historiographes, milien aïeul de ta princesse Margue-


, ,

à des auteurs qui entrent dans les con- rite ne lui donnât de l'emploi en ,

seils du prince aussi peu que le dernier Italie (83). La cint[uième raison de
de tous les bourgeois ? La deuxième Thevet a déjà été réfutée il n'a fait :

raison de Thevet ne prouve rien. <(ue copier Paul Jove et ils ont été \

Agrippa a parlé de quelques a])pari- l'un et l'autre assez iraprudens pour


tions si ridicules que même l'un de parler de la misère d'Agiippa. Beau
,

ses meilleurs amis s'en est moqué moyen de persuader à un lecteur judi- j

donc il a été magicien. Que devien- cieux que cet homme était un grand ,

(-7) Ibid. ,
paç;. 480 et •;i8.
(81) Agrippa, Eplst. XXXVIIlLbri I, pag.
(78) Voyez tes Lettres , pag. '^28 ,
730. 710.
(:i)) Clavigni de Sainte-Honoriue , de l'Usage (82) Voyez rEiposliilalio rl'Agrippa ,
au II'.
des Livres suspects, pag. 106. tome de ses OEiivres , pag. 5o8.
(80) Thevet, Hommes illustr. ,
pag- Î22, 2î3. (83) Agrippa, Oper. , loin. II pag.,
5g6.
, , ,

3o2 AGRIPPA.
magicien Belle méthode de le per-
! La misère d'Agrippa et la peur ,

suader au peuple lorsqu'on sait d'ail- , qu'il fait paraître tantde fois dans ses
leurs que dès qu'il y a un prince ou
,
épîtres de n'avoir pas de quoi manger,
seigneur auquel l'heur rit soudain on , réfutent pleinement la première de
lui jette le chai aux jambes qu'il cour- ces histoires. Quand on a un moyen
tise agrippa (84) ! si court de payer ses créanciers , on
3°. Quant à Martin Del Rio , il ra- ne doit pas être en peine de quoi vi-
conte ou quatre choses
ces trois : vre c'est la pistole volante. Il n'est
:

1°. Agrippa en voyageant payait dans point vrai que Charles-Quint ait ja-
les hôtelleries en monnaie qui parais- mais chassé Agrippa de ses états il :

sait très-bonne mais au bout de ; , était trop habile homme pour punir
quelques jours , on s'apercevait qu'il de celte manière un magicien dispen-
avait donné des morceaux de corne sateur des trésors ; il aurait craint que
ou de coquille (85). 2°. Charles-Quint les autres princesne profitassent à son
le chassa de sa cour et de ses états dommage des secrets d'un tel banni.
et avec lai deux autres personnes de Del Rio réfute la seconde historiette
condition qui lui avaient promis de par la troisième j car il prétend dans
grands trésors par le moyen de la la troisième , que sa Majesté Impé-
magie (86). 3°. Le même empereur ne riale eût fait mourir Agrippa si elle ,

remit point la peine de mort à Agrip- l'eût eu en sa puissance , et que 1 ar-


pa ; mais il le condamna au bannisse- rêt de bannissement fut postérieur à
ment après qu'il eut su sa fuite (87). la fuite de ce magicien. Pures fiibles.
4°. Agrippa tenait à Louvain un pen- Agrippa présentait requête sur requê-
sionnaire fort curieux. Un jour qu'il te au conseil de cet empereur, ou pour
sortit hors de la ville , il recommanda être payé de ses gages, ou pour avoir
à sa femme de ne laisser entrer per- son congé (89); et, quand il fut las de
sonne dans son cabinet. Le pension- n'obtenir rien , il s'en alla à Cologne
naire en obtint pourtant la clef il y : où il parla le plus jiardiment du monde
entre, et y lit un livre de conjura- aux magistrats , contre les moines qui
tions il entend frapper à la porte
: arrêtaient l'impression de son ouvra-
une et deux fois sans interrompre sa ge (90). Il vécut tranquillement à
lecture le démon veut savoir qui
: Bonn , jusqu'à ce qu'il en partit pour
l'appelle et pourquoi et parce qu'on 5 aller en France. Charles-Quint aurait-
ne que lui répondre, il étrangle le
sait il souffert cela à un homme qu'il au-
lecteur. Agrippa revenant à son lo- rait banni de ses états ? L'eût-ii souf-
gis , voit les démons qui sautent sur fert à un magicien , qui n'aurait évité
sa maison j il les appelle , et apprend le dernier supplice que par la fuite ?
d'eux ce qui était arrivé. Il donne Sur la quatrième historiette soit ,

ordre à l'homicide d'entrer dans le renvoyé à Gabriel Naudé dont voici ,

cadavre et de lui faire faire quelques les paroles On la peut nier encore :

tours de promenade à la place la plus plus raisonnablement avec Ludwigius


fréquentée des écoliers et puis de se {*) que Del Rio ne l'asseure
,
p'êu ,
,

retii-er. Cela fut fait. Le pensionnaire, qu'il l'a traduite mot pour mot d'un
après trois ou quatre tours de prome- Hure intitulé le Théâtre de la Nature,
nade tomba raide mort. On pensa divulgué en italien et en latin sous le
long-temps que ce fut de mort subite nom de Strnze Cicogna et en français ; ,

mais certaines marques de suffocation et espagnol sous celui de f^alderama


rendirent la chose suspecte dès le (91). On peut se servir d'une autre
commencement ensuite le temps réfutation la voici Del Rio remarque
: , ; :

apprit tout ; et Agrippa fugitif dans que la femme qui avait prêté la clef
,

la Lorraine commença d'y vomir les au pensionnaire fut répudiée depuis


,

hérésies qu'il avait retenues dans le par Agrippa. 11 faut donc que ce soit
cœur (88).
(89) fide Operum ejiis volumen II , à pa^.
(R4) Tlievet, Hommes illustr. , ptig. 224.
975 , usque ad paginam 984 l'e"' pt^S- *'*''7 **
:

(85) Del Rio Disqiiisit. Magicar. , Ub. II,


,
sequeiit.
au/eu. XH
nuin, 10. ,

(90) Ihid. , paij. io33.


(86) Ibid.
F, (*) Qutesl. AA^Daimonomag. fulio 187.
(87; Del Rio , Disquisit. Magicar. Ub. secl. ,

(91) X,ia<lé , .\pol- pour les grands Ilorames


tSS; Jbid. , l,b. Il, ijiiœstion. XXIX.<ecl. I.
,,

AGRIPPA. 3o3
la troisième ce magicien. justifier Agrippa entre aulres raisons ,
femme de ,

Or la seconde ne mourut qu'en iScsg par la Jafeur de deux empereurs , et :

il faut donc que Taventiire du pen- autant de roia (()\j. C'est su|>poser
sionnaire soit postérieure à Fan iS^g ; queCliarles Quint eut de l'amitié pour
il faudrait donc qu'Agi ippa eftt pris Agrippa mais on n'a qu'à lire les ;

la fuite vers la Lorraine depuis l'an plaintes de cet auteur fgS) pour voir
i53o ou environ il faudrait que de- clairement le contraire. De plus , Nau-
:

puis qu'il fut installe' à la charge d'His- dé suppose qu'on ne s'avisa de crier
toriographe de Charles-Quint il eût ,
contre la Philosophie occulte que
été louer une maison à Louvain pour long-temps après quelle eut c(é pu-
y tenir des pensionnaires mais rien : bliée il prétend qu'on ne cria contn
;

n'est plus faux que cela j car i°. il , ce livre que pour se venger des inju-
n'alla point en Lorraine comme fugi- res qu'on croyait avoir reçues dans
tif: il y alla pour exercer une belle celui de la '^'anité des Sciences. 11 est
charge à 5Ietz laquelle lui avait été
,
fort vrai que ce dernier livre irrita
oflVrte avec tous les agrémens possi- furieusement plusieurs personnes. Les
bles pendant qu'on lui présentait
,
moines, les suppôts des académies,
ailleurs des conditions honorables les prédicateurs les théologiens s'y,

(qa 2°.
. Il n'alla en Lorraine qu'en reconnurent. Agrippa était lui esprit
iSiS et il avait encore sa première
, trop ardent. Ex ejiis libri fde Vanita-
femme. 3''. Les doctrines qu'il soutint te Scientiarum) quaUcuntjue gustude-
en ce pa}'S-là , et pour lesquelles il fut prehendi hominem esse ardentis inge-
exposé aux vexations de quelques moi- nii , fariœ lectionis et niultœ niemo- ,

nes n'élaient ni magiques , ni hé-


, riœ alicubi tauien majore copia quam
,

rétiques elles roulaient sur la ques-


; delectu ne dictinne tiimultuosd ue-
,

tion si sainte Anne mère de , la sainte riiis quant compositd. In omni génère

\^ierge, a eu trois maris, et un enfant rentm vitupérât mala laudat bona; ,

de chacun ou si elle n'a eu qu'un


; sed sunt qui nihil aliud sustinent quant
mari et une ûlle. Agrippa soutint ce laudari vgG). Ses peintures étaient
dernier parti (gS) ,
qui fait infiniment trop fortes les couleurs en étaient
;

plus d'honneur que l'autre à la mé- trop noires, ses traits étaient trop
moire de sainte Anne. 4"- H ne paraît marqués. On s'en f;lcha donc je l'a- ,

jioint tpi'il ait demeuré ailleurs {ju"à voue; mais il n'est pas vrai que cette
Anvers Malines , depuis qu'il fut
et à colère ait eu un ellét rétroactif sur un
fait historiographe de l'empereur , livre qu'on eût laissé en repos plusieurs
jusqu'à ce quil se retira chez l'élec- années. Naudé eût mieux fait de gar-
teur de Cologne ; et je ne pense pas der cette jiensée pour une autre appli-
que jamais il ait tenu de pensionnai- cation il ei\t trouvé où la placer tôt
:

res à Louvain. On pourrait donc se ou tard quand même il n'aurait pas


,

dispenser de répondre à Martiii Del eu autant de lecture qu'il en avait. Je


Kio et à ses consorts , jusqu'à ce qu'ils m'explique. Il n'est point rare que des
eussent iia peu arrangé les circon- zélateurs laissent long-temps en repos
stances des temps et des lieux. im livre et celui qui l'a composé
Je m'étonne que le célèbre Naudé t|uel c[ue puisse être d'ailleurs ce livre
n'ait ]ias eu la prévoyance d'objecter pourvu qu'il n'attaque point
person-
aux. accusateurs d' Agrippa It; grand nellement ces zélateurs. Mais si, au
nombre de faussetés historiques dont bout de dix quinze , vingt ans ils se
, ,

je viens de les consaincre. brouillent avec l'auteur; si quelque


(()) // y a des erreurs de fait dans
Pliilosopbie occulte, de ce quijiouvail s'être glissé
les moyens de son apologie. 1 J'ai de contraire à la doctrine de VEgUte. La rétrac-
Gabriel Naudé en vue *. Il tilche de tation ne pouvait , dit Jolr , être sincère, pute
que Agrippa fit imprimer lui-même cet ouvrage
(92) Agrippa FpUt. IX et
, X
lihri II ; mais peu de temps (^lroi< am) avant sa mort. On verra
fiurlOiit t'Oie:: son Kemercîment à messieurs de dans la remarque de Barle les motifs qui por^
Melx, pig. ioi|2. tèrent Agrippa à cette publication.
(t)3) fovpi les OEuvres d'Agrippa , tom. II, (94) Naudé Apol. des grands Hommes, p. ^og.
,

pag. 583;:',:. (gâ) Agrippa , Epist. libro Î'^I , pag. Ç)',S , et


* Barle l'a pas re'eve, dit -^oly , toutes les alihi pasiim. J^OYezle Ile. volume de ses OEa '
fautes de Nauile, au >ujfl d' Agrippa. C'est a vres, pag. 25 1 , 44' > 584, *' '" endroits notés
ton , par exemtle , t/ue G. Naudé avance ci-de<sns page aqo note (gg''-
au Agrippa se rétracta dans la préface de la (96) Erasni.is.Episl. lib. XXVII ,
p- «083.
, ,

3o4 AGRIPPA.
nouvel ouvrage vient faire des des- avait léfuté, dans son écrit de la Vani-
criptions où Ton puisse reconnaî- té des Sciences, sa Philosophie occulte
;
tre ce que Ton cache le plus soi- et néanmoins il la publia afin d'em- ,

gneusement que l'on peut au peuple pêcher que d'autres ne l'imprimassent


j

le premier livre ne peut plus jouir de pleine de fautes et mutilée (100). II


son repos il devient he'retique, im- la fit approuver par des docteurs en
:

pie, brùlable. On commence alors théologie et par des personnes que le


d'être ronge du zèle de la maison de conseil de l'empereur commit spécia-
Dieu on le persuade aux bonnes lement à cette lecture Liber illc jam
, :

gens; mais ceux qui ne sont point du- niiper per aliqiios Ecclesiœ prœlaLos
pes voient bien quelle est la passion et doctores sacrarum humanantmque
honteuse que Ton couvre sous le beau litleranimerudilissimos, et ex Cœsaris
masque des intérêts de la piêtê. Ren- consilio ad hoc specialiler deputatos
dons justice aux théologiens de Lou- commissarios examinatus et probatus
vain ils ne méritent pas la flétrissu- Juerit,deindè etiarn totius Cœs<\rei con-
:

re dont l'apologisfe d'Agrippa les char- sitii assenait admissus, et ejusdeni de-
ge par un tel endroit. La Philosophie sareœ majeslatis authentico diplomate
occulte ne fut imprimée qu'après la et appensd in rubid cerd Cœsaris aqui-
De'clamation de la Vanité des Sciences Id prit^ilegiatits, insuper Antverpiœ
:

il suffit de leur reprocher qu'ils usè- et postca etiam Parisiis sine contra- ,

rent de mille chicaneries pour tiou- dictione impressiis et publiée uenditus


ver des propositions condamnables et distractus sit (101). Sur ces appro-
dans celte Déclamation. Voyez la forte bations il obtint un privilège de sa
réponse qui leur fut faite elle est au majesté impériale il fit imprimer son
:
,

second volume d'Agrippa et com- livre à Anvers et le dédia à l'électeiir


, ,

mence à la page 252. de Cologne. Son épître dédicatoire


Faisons eu peu de mots l'histoire de est datée de Malines au mois de jan- ,

cette Philosophie occulte. Agrippa fit vier i53i et c'est la treizième du VI*. ;

cet ouvrage dans ses jeunes ans (97) livre de ses Lettres. Ce livre parut
et le montra à l'abbé Trithème dont l'an i53i. 11 fut réimprimé d'abord à
,

il avait appris bien des choses (98). Paris. Ces deux éditions se vendirent
Trithème en fut charmé, comme il sans nul obstacle. L'auteur fit tra-
paraît par la lettre qu'il lui écrivit le vailler à une troisième à Cologne. Le
8 d'avril i5io (99); mais il lui conseil- père Conrad d'Ulra inquisiteur de la ,

la de ne le communiquer qu'à des foi, en eut le vent et fit arrêter Tira- ,

personnes affidées. Je ne sais si l'auteur pression mais la vigoureuse requête ;

le communiqua à trop de gens , ou si d'Agrippa aux magistrats eut sans


les premiers qui en eurent une copie doute son effet, puisqu'il y a une édi-
manquèrent de discrétion la vérité tion de Cologne de la Philosophie oc-
:

est qu'il en courut diverses copies ma- culte en i533. Elle contient trois li-
nuscrites presque par toute 1 Europe. vres au lieu que les précédentes ne ,

Il n'est pas besoin d'avertir que la plu-


contenaient que le premier (102). On
part étaient fort défectueuses cela ne y joignit, après la mort d'Agrippa, un
:

manque jamais d'arriver en pareil cas. quatrième livie qui n'est point du
On se préparait à l'imprimer sur une même auteur. Optirno jure his iTibris
de ces mauvaises copies c'est ce qui raagicis) anniuneratur uboniinabilis li-
:

détermina l'auteur à le publier lui- bellas nuper in lucem ab inipio hond-


même avec les additions et les chan- ne emisstts Iribulusque Henr. Corn, ,

gemens dont il l'avait embelli depuis yigrippœ, rneo olim hospiti et prœcep-
qu'il l'avait montré à l'abbé Trithème. tori honorando ultra annos quadra- ,

Mclchior Adam se trompe quand il ginta jam mortuo , ut hinc falso ejus
dit qu'Agrippa, ayant corrigé et aug- manibus jam inscribi sperem, sub ti-
menté ce livre dans un âge plus avan- tulo quart i libri de occull d philosophid
cé, le fit voira l'abbé Trithème. Il seu de cerenioniis magicis qui insuper ;

(gr) Voyez-en la préface. (100) yojez-en la préface.


(g8) Agrippa ,
Epist. XXXIII libri III, p. (loi) Agi-. Epistola XXrHibri VU, p. io33.
8oo'. Voyei aussi paf;. loifS.
(90^ Elle fst à la léle du livre , et a la page (102) Vorei Ir'pitre dédicaloiie du II'. et du
o^ du Ilf. tome de ses OEufres. III^. livre au même électeur de Coloîine.
,,

AGR IPPA. 3o5


datais libiorum trium de Occulta Phi- Ces paroles de Naudé, vingt-sept ans
losophiaomniumquemagicariimopera- après sa mort , comparées avec le
pas-
tionuni jacialur (loj). C'est ainsi que sage latin que l'on a vu ci-dessus
parle Jean ^Vier. J'ai vu une édition (107), peuvent causer de l'embarras :
in-folio de la Philosophie occulte, en mais, pour débrouiller cela, il suffit
i533 sans le lieu de l'impression. Le
, de prendre garde aux diverses éditions
privilège de Charles-Quint y est à la de Jean Wier. Il revit et il augmenta
tète, en français, daté de Malines six fois son ouvrage. Naudé avait sans
le 12 de janvier iSag, si je ne me doute une édition que l'auteur avait
trompe. préparée l'an iSGa. Il s'était alors
Voyons présentement les menson- passe vingt-sept années depuis la
mort
ges qui sont répandus dans ces paro- d'Agrippa. Mon édition fut préparée
les de Naudé « Les théologiens de
: treize ou quatorze ans après voilà :

M Louvain censurèrent rigoureusement pourquoi l'auteur y emploie cette


j) sa Déclamation contre les Sciences : phrase, ultra annos quadraginta jam
» Jean Catilinet, cordelier, déclama mortuo. Il retint toujours son nuper,
)> publiquement contre l'explication et il est blâmable en celaj car il
)) qu'il avoit faictc à Dole de f^erbo mi- trompe par ce moyen ses lecteurs. Il
» rifico les jacobins de la ville de
: leur fait accroire que le quatrième li-
» Metz escrivirent contre les proposi- vre Philosophiœ occultœ ne fut im-
» tions qu'il avoit divulguées pour primé que vingt- sept ou quarante
}> soutenir l'opinion de Fabert Stapu- ans après la mort d'Agrippa ce qui :

» lensis, touchant la monogamie de est faux. Il arrive rarement à ceux


» sainte Anne ; et toutefois pas un qui augmentent plusieurs fois leurs
H de ces censeurs ne put trouver au- livres, de changer partout les par-
)) cun sujet de rien dire ou remarquer ticules qui marquent les dates du
» sur les deux premiers livres de sa temps.
)) Philosophie occulte qui furent im- , En faveur de ceux qui n'auront pas
» primés long-temps auparavant toutes les ouvrages d'Agrippa je dirai ici
,
)) ces pièces, tant à Paris qu'à Anvers comment on prouve que la Déclama-
» et ailleurs.... (io4). « Notez qu'il tion contre les Sciences fut imprimée
x'épète ces mêmes
mots, long-temps au- l'an i53o, et la Philosophie occulte
paravant, dans la page 4 '6. Pour com- l'an i53r. Par une lettre imprimée
prendre toute la faute, il faut se sou- avec celle d'Agrippa et datée le lo de
venir que Catilinet déclama l'an iSoQj janvier i53i (io8;, on apprendque l'é-
que les jacobins de Metz écrivirent sur lecteur de Cologne avait reçu un exem-
sainte Anne l'an i5ig^ et que la Dé- plaire de la Vanité des Sciences , et vu
clamation sur la Vanité des Sciences quehiues feuilles de la Philosophie oc-
parut en i53o , un an avant la Philo- culte qui s'imprimait à Anvers. L'au-
sophie occulte, 't L'avarice des librai- teur de la Bibliothèque de Dauphiné
» res , et la vanité de certains es- a pris une peine bien inutile dans
» prits , ajoute ÎS^audé (io5) , son errata : il y a fait mettre i5G7 »
» font tort à la mémoire de cet auteur, au lieu de i4^7- ^o" livre porte que
» lui attribuant un quatrième livre le traité de la Vanité des Sciences fut
)> plein de cérémonies magiques , vai- composé dans Grenoble l'an 1467. ,

» nés, superstitieuses et abominables Corrigez selon V errata, vous suppose-


)) et le mettant en lumière avec les rez que ce livre fut composé trente-deux
» trois de sa Philosophie occulte ans après la mort de son auteur. Il
» Wierus asseure (*), pour la défense aurait autant valu ne point corriger. Je
))d'Agrippa que ce livre ne fut di-
,
pense qu'on se tromperait , quelque
» vulgué que vingt-sept ans après sa année que Ton mît car je ne crois
5

» mort, et qu'asseurément il ne l'a- pas que cet auteur eût séjourné ja-
)) voit point composé (io6). » mais à Grenoble considérablement
lorsqu'il y alla mourir.
Wierus de Magis, cap.
(io3) , p. io8. V ,
(Fi) Les fautes de 3Ioréri ne sont pas
Naudé, Apologie pour les grandi Hom-
(io4)
mes, pag. 4ii. nombreuses dans cet article.'] i". On
(105; Là même, pag. 4^3.
(*) Lib. Il de Prsestigiis.
y voit Cofiori, au lieu de Gohori; Gu-
,

(io6) Naudé Apologie pour les grands Ilom-


, (lo-) CUalion (io3).
laes, pas- l\^'-\- U
(ie8; C'est XIF". du VI'. li-re, pag- pCS.

TOME r.
, ,,,

3o6 AGRI PPA.


tinaria, au lieu de Galtinara ; Rau- réri prétend donc qu'aucun parti ne
clin, au lieu de Reuchlin; Carlinelus ,
fut accepté : néanmoins celui de la
au lieu de Catilineius. 2°. On y voit princesse Marguerite le fut ; et lors-
qu'Agrippa obtint une chaire de pro- qu'on l'offrit, Agrippa ne songeait plus
fesseur a Padoue : cela est faux 5 il à voyager il en avait passé son en-
:

fallait dire Pairie. M. Teissier a été vie; il avait été à Genève, à Fribourg
trompé aussi par la ressemblance des et à Lyon. 5°. Il n'est pas vrai que
mots il a mis Paris pour Pai'ie ;
: Paul Jove, Del P>io , Thevet, et quel-
peut-être n'est-ce qu'une faute d'im- ques autres , soutiennent qu'Agrippa
pression en tout cas le lecteur doit
: ,
avait deux démons sous la forme de
être averti qu'il ne doit pas croii-e ce deux petits chiens, et qu'il en nommait
qu'il trouve dans M. Teissier, savoir , zi/zMonsieur et /'«Mtre Mademoiselle.
,

qu'Agrippa a été professeur des lettres Paul Jove Thevet , etc. parlent seule-
,

saintes à Dole et a Paris (109). 11 est ment d'un chien sans dire quel nom
,

à craindre que quelque compilateur il portait. 6°. 11 ne fallait pas distin-

ne ramasse tout ce qu'il trouvera épars guer le livre de la Vanité des Scien-
en plusieurs livres, et qu'il ne nous ces d'avec les autres œuvres d'Agrip-
Tienne débiter l'un de ces jours qu'A- pa, qui composent deux volumes car ;

grippa a professé les lettres saintes à ce livre est en tête du second volume.
Dole, à Paris, à Pavie, à Turin, à Je ne dis rien du désordre qui règne
Padoue, à Cologne, etc. Il est arrivé dans le narré de Moréri, par rapport à
sans doute plus d'une fois , par ime la chronologie.
semblable cause, qu'on a multiplié (S) // promettait un ouvrage contre
faussement les charges d'un homme les Dominicains.'] Comme ils étaient
avec bien desi'éflexions à son avantage les principaux directeurs de l'inquisi-
sur l'étendue de son mérite. 3°. Ces tion , il ne faut pas s'étonner qu'il
paroles iettent dans la confusion Le : leur en voulût plus particulièrement
cardinal de Sainte-Croix le i^outut en- qu'à d'autres. La patience lui échap-
gager a le suii're au concile qu'on dé- pait lorsqu'il les voyait si indulgens
liait assembler à Pise ; et, dans le mê- pour les erreurs de leurs confrères, et
me temps, le roi d' Angleterre Mar- , si durs envers les propositions équivo-
guerite d' Auslriche et Galinaria , , ques des autres gens. Cette indulgence
chancelier du même Charles f^ , Rap- aurait été moins scandaleuse si elle
pelèrent a leur sen'ice. Les règles de ne se fût trouvée qu'en eux ; mais
notre grammaire veulent qu'on rap- le mal est que les peuples sont si sots,
porte tout cela à un même temps et, :
que pendant qu'ils louent le zèle d'un
sur ce pied-là Moréri aurait débité
, inquisiteur qui trouve des hérésies
un grand mensonge car ce fut en j partout où bon lui semble, ils ne souf-
ïSag, long-temps après l'affaire de frent pas que l'on use de récrimina-
Pise, qu'Agrippa se vil recherché par tion contre lui, et qu'on étale aux
Henri VIII, par Marguerite d'Autriche yeux du public ses doctrines pernicieu-
et par le chancelier de Charles-Quint. ses. Agrippa devait là-dessus parler
Mais d'ailleurs si l'on veut bien chi-
, de la belle manièi'e aux Dominicains
caner on niera qu'on ait appliqué à
,
et sur d'autres choses aussi. lYeque ta-
la même année les offres de tous les nieii /^M^etis dit-il (no) aux magis-
,

emplois. Un lecteur prévoit la possi- trats de Cologne hune solum articu-,

bilité de ces chicanes; et ainsi, il ne lum apud illum reperiri hœreticum, sed
sait à quoi s'en tenir. 4°. H n'y a point alii multi, quos cîim hicnimis longum
de chicanerie à trouver en faveur de vobisque tœdiosum foret referre , enu-
ce qui suit Mais Agrippa, qui aimait
:
rnerabo alibi , in eo scilicet tibro
extrêmement la liberté , préféra le plai- quem de fratrum prœdicatorum scele-
sir de voyager à ces avantages ; et ribus et hœresibus inscripsi ubi infec-
,

après avoir passé quelque temps a ta sœpiiis veneno sacramenta ementi-


,

Fribourg a Genève et ailleurs il se ta sœpissimè miracula


,
interemptos
, ,

retira h Lyon. Pitoyable anachronis- veneno reges et principes proditas ur-


,
me compliqué d'autres faussetés! Mo- bes et respublicas seductos populos
,
,

asserlasque hœreses , et ccelera ejus-


(lOC)) Teissier, Eloj;. tirés de M.
de Tliou ,
titm. Il ,
pcig' 99 , cdition d'Vlrechl en 1696. fiio) Ajr. Operuni tom. II ,
png. ioSt-
,, .

AGRIPPA. 3o'
moJi heroum illorumfacinorajlagitia- duquel avait esté séparé, et non
il
que in varias transfusa Unguas ont- , plus : outre celte raison , dii-je
, il ex-
nique populo exposita dilucidè nar- plique assez ce qu'il entendait par une
ral/o. telle clef, quand il dit
en la ig^. épist.
(T) Il eut quelques opinions qui du hure 5 « Uœc est Ma vera et mi-
:

n étaient pas de la routine.'] J'ai déjà » rabilium operum occultissima philo-


touché celle qui regardait la ciiute » sophia; clav>is ejus intellectus est :

d'Adam. Les autres n'étaient pas si » quaiito enim altiora intelligimus ,


scabreuses, et n'avaient point d'autre tanto sublimiores induimus
»
uirtutes
mal que d'être conformes aux hypo- tanloque, et majora, etfaciliùs,
>)
et
thèses des réformateurs. Sa Disserta- M ejjicacius operamur. »
Kaudé s'est
tion du Mariage , dédiée à Louise de arrêté là; mais 31. de la Monnaie
ne
Savoie, mère de François F"^. donne , s'y est pas arrêté; il m'a fait
la grâce
de bonnes atteintes
à la loi du célibat de m
avertir que les pensées d'Agrip-
et marque assez clairement que l'a- pa sont assez conformes à celles des
dultère rompt l'engagement conjugal. quiétistes. On en sera persuadé si l'on
Un de ses amis savoir que
(ii i) lui fit examine ce que je vais rapporter.
cette Dissertation avait déplu à la cour, Agrippa fait mention de cette clef
et qu'on n'avait osé d'abord le pré- dans deux lettres qu'il écrivit à un
senter à la princesse. Voyez ce qu'il religieux (ii5) qui s'attachait fort
répondit. 11 n'approuvait point les aux sciences occultes. Il lui représente
images et de tout son cœur il aurait
, que tout ce que les livres apprennent
donné dans une réforme qui n'aurait touchant la vertu de la magie, et de
pas produit l'érection d'autel contre l'astrologie , et de l'alchimie , est faux
autel (112). et trompeur quand on l'entend à la
(Vj // expliquait sa Philosophie oc- lettre; qu'il
y faut chercher le sens
culte d'une manière qui n'est guère dif- mystique sens qu'aucun des maîtres
,

férente des spéculations de nos quié- n'avait encore développé et qu'il ,

tistes.] Citons encore une observation était presque impossible de découvrir


de Naudé destinée à faire voir que
, sans le secours d'un bon interprète
,
sous préteste de cette clef, on ne peut à moins qu'on ne fût illuminé de l'es-
pas soutenir qu'Agrippa est le vrai au- prit de Dieu, ce qui arrive à très-peu
teur du IV*. livre de la Philosophie oc- de gens (ii6): quanta leguntur O
culte. Sans qu'ilfaille objecter, dit-il scripta de inexpugnabili magicœ arlis
(i i3) ce que le mesnie agrippa dit en
, potentiâ, de prodigiosis astrologorum
quelques endroits de ses épistres (*') ,
imaginibus de monstrificd alchimis-
,

qu'il se réseri^oii la ctej des trois Uires tarum metamorphosi deque lapide illo ,

qu publiés (ii4) ccjr, outre que


il ai^oit •' benedicto quo Midœ instar, contac-
, ,

l'on pourroit respondre avec beaucoup ta œra mox omnia in aurum argent-
de probabilité , qu'il faisait mention de tumi^e permutentur ; quœ omnia com-
cette clef pour se faire courtiser par periuntur vana, Jicta , etfalsa, quo-
les curieux , comme Jacques Gohory ties ad litteram praclicantur (117). Il
(*^) et f^igenere {*^) disent qu'il se fan- ne faut point chercher hors de nous-
toita mesme dessein de sa^'oir la pra- mêmes, ajoute-t-il « le principe de ces,

tique du miroir de Pythagore et le se- ,


w grandes opérations il est chez nous :
;
cret d'extraire l'esprit de l'or d'ai^ec » c'est un esprit intérieur qui peut
son corps pour conifertir enfin or l'ar- » très-innocemment effectuer tout ce
gent et le cuivre, non toutesfois,si non » que les magiciens et les alchimistes
autant que m.ontoil le poids de celui « promettent. Je ne vous écrirai point
» sur cela; car ce ne sont point des
(111} Capellanus , médecin de François I^^.
Voyez les Lettres d' Agrippa , p. 832, 833 , 836.
M choses qu'il faille confier au papier.
(112) Vide Gesnerum in Biblioth. fol. 3og , ,
» L'esprit les communique à l'esprit
verso, » en peu de mots consacrée. « Atque
(ii3) Naudé, Apologie pour les grands Hom-
mes , png. 4^4. 4'^*
(•' Epistola
, libri IV,LVl libri V. XIV (ii5} Aurelius ah Aquapendente , Augitstinia-'
(ii4) Naudé se trompe , ils n^e'uùenl pas pu- nus.
hliés encore. {116) Nisi fuerit divino numine illuslralus ,
(*^) Libro lîeMyst. not. Comment, in Paracels. quod dalur paucissimis. Agrippa, Epist. XIV
de Vità longâ ,
folio 6i. libri V ,
pag. 904
(*') En ses Cbifires , folio iG et 2^. (117) Idem, ibid.
3o8 AGRIPPA.
qnod te nunc scire i^olo, quia sibi cjuam similibus congredntntur) ac
hoc est
est omnium mirabilium ef- peruidendis illis occullissunis Dei et
nobis ilJsis
qui quicquid por- naturœ secretis omnino inejfficax est :

Jectuum operator :

tenlosl Mathematici, quicquid prodi- atque


eiosi Magi, quicquid irn>identes natu- jj^,,. opus^ hic labor est, superas evaderc ad
Tce persecutores Alchimistœ quicquid ,
auras.

mantes promiUere audent , ipse nouit


quam mundo et carni ac sensibus
discernere et efficere , idque sine om-
, ,

reh-
omnibus ac toli honiini animali qui
, ,

ni crimine, sine Dei offensa, sine velit ad liœc secretorum penetralia in-
gionis injuria. In nobis, inquam, est gredi non quod corpus separetur
:
,
ille mirandorum operator,
ab anima sed quod anima relinquat ,

Nos liabitat tartara sed nec sidéra cœli.


, non :
corOUS. De quâ jnorte Paulus scribit
Spiritusin nobis qui viget, illa facit- CoLossensibus Moitui estis , et vita
:

vestra abscondita est c«m Chrlsto ;


VerUm de his nobis quam latissimè te-
et alibi claritis de seipso ait Scio ho •

cum conferendumesset et coram. Non minem, in corpore ycI extra corpus, ,

committuntur hcec litteris nec


enim ,
nescio (Deus scit ) raptum usque ad
scribunlur calamo,sed spiritu ipiritui
I / j •
• tertium cœlum : quœ reliqua se-
et
paucis sacrisque l'erbis injunduntur, ^„„„,yr (j ,q). « Celte précieuse mort,
idque,siqunndonosadtei^enirecon- /, continue-t-il , n'est accordée qu'à
tigerit (i 18). Je tire ceci d une
lettre
^^ ^^ -^ j^^j^bre de sens cliéris de

datée de Lyon, le :î4 de septembre 1527. ^^ ^-^^^ ^^ ^ratifies d'une influence


L'autre lettre fut écrite dans la même ^^ jj^'^i jg l'étoile , ou soutenus de
ville, le 19 de novembre
suivant. Agrip-
jeurs^nérites et du secret de l'art: »
^^

pa y étale son mystère 1 dit que la :


^^^ inquam , pretiosd in conspectu
Traie et la solide philosophie consiste ^^^^^^^^,1^ mori oportet , quôd con-
à être uni avec Dieu par un contact es- ^ paucissimis , et forte non sem-

sentiel et immédiat qui puisse nous


transformerenDieu." L entendement,
r J
^^^^ .^

)>aioute-t-il, est la clef de cette philo- Panci quos œquus amavit


mais pour être uni avec Jupiter, autardens evexit adsethera vinus,
J) sonhie

,

V Dieu il doit être détaché de la ma-


,
»"' S«°"' P'"""^ =

5. tière , et mort au
monde , à la chair, p^-^^„,^ „o„ ^^ ^arne et sanguine.

V à tous les sens , et a tout 1 homme ^^^ ^^ ^^^ ^^^ ^^^^ -^^ „j „«!
.

>,animal » Sonlatm exprimera mieux


.
^^^^ heneficio ac cœlorum genethliaco
ce^aVimixlhs-.Qundadpostulatampfn. ^^^^ ^^^^ iddignificatisunt: ccelerime-
losophiam atlinet te scire i^olo , quod , ^.^.^nitunturet arte, dequibus ,Hua^ox
omnium rerum cognoscere opificem ip- ^^ certiorem reddat ( 1 20) 11 reconnaît .

sum Deum,et m aium tota sirnditudi-


inillumtotâsi
^^^^..^^^^ ,^ii ^^gst pas du nombre
«(5 imagine ceu esseniinli quodam con- ^^^^^ favoris du ciel , et qu'il n'espère
uinculn transire, quo ipse
tactil sii'e pas même de parvenir à ce haut de-
transformeris , effîciaieque Deus , ea gré de bonheur car il s'était toujours :

demùmi'era solidaque philosophia sit : trouvé dans les tourbillons de la ma-


quemadmodkmdeMoyseaitIJondnus, tière , homme sensuel , attaché à une
inquiens Ecce ego constitui te Deum
:
femme , à la chair , au monde , aux
Pharaonis. tiœc est illa uera et summa soins domestiques , etc. Il veut seu-
mirabilium operum occultissima phi- lement qu'on le considère comme un
losophia. Claris ejus intellectus est, portier qui montre aux autres le che-
Çuantnenim altiora intelligimus tan- ,
min qu'il faut tenir (121). f^eriim hoc
tb snbtimiores induimus t'irtutes, tan' te admonitum uolo , ne circa me de-
toque majora etfaciliiis et ejfficaciiis
, ,
cipiaris , ac si ego aliquando diuina
operamur. p^eriim intellectus noster
carni inclusus corruptibili, nisi p-iawi (119) Idem, Epist. XIX libri V, pag. 909,
carnis superauerit ,Jueritquc propriam (120) Agr. Epist. X/-Y libri pag. 909. K ,

(121) Confères at'ec cela les Suisses de la Foi,


naturam sortilus dii'inis illis wirtuti- ,
dont le sieur Parisol/L>aWe dans son livre de La
bus, non polerit uniri {non enim nisi ,
Foi dévoilée par la R.iison. On en trouve des
Extraits dans les Nouvelles de la Républ. de»
(n8) Idfin , ibid. Lettres, octobre, i685 , pag. il4o « .'"«'»'•
,

AGUIRRE. 309
passas, tibi ista prœdicem , aut taie uxores forte quia ex concubinis pro-
,

quld mihi arrogare velim t'el concedi , vcntus illis est amplior. De quo legi-
passe spereni qui hactenus hurnano
,
mus gloriatura in convivioqiiemdam
sanguine sacratus miles semper ferè , episcopum, habere se undecim millia
auUcus , tiim carnis uinculo charissi- sacerdotum concubinarioram qui in
,
rnœ iixori alligalus , omnihusque in- singulos annos illi aureum pendant.
itabilis forlunœjlatibus expositus, to- Hœc nmnia et alia forte plura ne-
,
,

tusque à carne , à lîtundo a domes- , que enim integrum Hacteniis contuli


,
ticis curis transwersum actiis , tant pro more eraserunt adversarii cla- ,
subiuniu imniorlalium deorum dona runi relinquentes documentum illorum
non suni ndseculus : sed accipi me fo- quid editionibus tribuendum sit (laSj.
lo l'élut indicern , qui ipse semper prce
quod iler in- (ii3) Thomas Crenius, Animadvers.
foribus manens aliis , ,
Philoloe.
Historié. ,pcirt. 11, pag. i3, 14.
grediendum sit ostendo (122), ,

(Xj Mutilée dans un endroit qui


pout^ait déplaire aux gens d'église. ] AGUIRRE. La Bibliothèque
L'auteur déclame dans cet endroit- des écrivains espagnols
fournit
là contre la loi du célibat , et dit que
cinq ou six auteurs qui ont ce
peut-être ceux qui en sont les protec-
teurs aiment mieux souffrir le con- nom-là. Le plus considérable de
,

cubinage que le mariage des prêtres , tous est ce me semble , Michel ,

parce qu'ils retirent un gros revenu DE Aguirre natif d'Aspeitia ,


,
de la permission qu'ils leur donnent de
au diocèse de Panipelonne dans ,
tenir des concubines. Il ajoute qu'il a
lu qu'un certain prélat se vanta à table la province de Guipuscoa. C'était
d'avoir dans son diocèse onze mille un jurisconsulte qui ,
pendant
prêtres concubinaires qui lui don- qu'il était membre du collège de
naient un écu chacun tous les ans.
Saint-Clément à Bologne écri- , ,
Voilà un passage qui ne paraît pas dans
l'e'dition de Lyon. M.Crênius, quia vit pour les prétentions du roi
fait d'Espagne Philippe II sur la cou-
cette de'couverte s'est bien plaint ,

de cette supercherie. Voici ses paroles ronne de Portugal (A). Il exerça :

Maldfide per Beringosjratres Lug- la charge de juge ,


,
en divers tri-
duni annoMDC in%°., édita sunt Hen-
rici Cornelii Agrippœ.,.. Opéra; ut- bunaux du royaume de Naples ,
potè in quâ multaomissa sunteditione, etpuis il eut en Espagne la charge
quœ in prioribus erant. Alque ne hoc de conseiller au conseil de Gre-
gratis dixisse widear , capias exem-
nade. Il mourut en i588 {a).
flum è Tractatu de Incertiludine et
f-'^anitate S cientiarum atque Artiiini Ceux qui continueront l'ouvrage
in cujus C. LXlf^ P(tg- Ht. 18g de de don Nicolas Antonio auront
, ,

Lenonid sequenlia hœc quœ ex op- un Aguirre infiniment plus cé-


, ,

timd recognitâ plend et scholiis


,
lèbre à y placer. Je parle de Jo-
, ,

marginariis ( retineo i^ocem in titulo


libri posilam) illustratd eduione sine seph Saenz de Aguirre *, béné- ,

Inci adjectione , anno MDXXXf^I dictin , l'un des savans hommes


in-è". excusa adniodîim rara
, da-
, , du dix-septième siècle. Il était
turus sum, in Lugdunensi plané demp-
censeur et secrétaire du conseil
ta sunt. Jam verô etiam lenociniis mi-
litant leges atque canones , cùm in suprême de l'inquisition en Es-
potentum favorera pro iniquis nuptiis pagne, premier interprète de l'E-
pugnant , et justa matrimonia diri-
[a) Eo.' N. Anloaii fiibliotliecâ Scriptorum
munt : sacerdotesque sublatis honestis
Hispani* tom II pag. 102.
nuptiis turpiter scortari compellunt :
, ,

* Ce Joseph Sacnz d' Aguirre, né dit Le-


malueruntque illi legislatores sacer- ,

rlerc, à Logrogno, le 2^ mars i63o, mourut


dotes sucs cum infami.1 habere con-
le 19 août itigi^. JSicéron lui a donné un J'en
cubinas ,
quùm cura honestâ famâ bon article dans le tome III de ses Mémoires.
Chaufepié lui a aussi donné place dans son
(122) Agr. Epiit. XIX lihri F, p. 909, ()io. dictionnaire^
310 AGUI RRE.
et aliorum Monumentorum sacrœ an-
criture clans l'université de Sala- tiquitatis ad ipsam spectantium , mag-
manque , et avait été plus d'une nd ex parte hacteniis ineditorum , quo-
fois abbé du collège de
Saint- rum cditio paratur Salmanticœ cum
Vincent , lorsqu'en i685 il fut JVotis et Dissertationibus , sub auspi-
ciis Catholici Mnnarchœ Caroli II :
honoi-é du chapeau de cardinal studio et ^'igiliis M. Fr. Josephi Saenz
par le pape Innocent XI. Il avait de u4guirre. Salmanticœ , apud Lu-
entrepris un très-grand ouvrage cam Perez , Uni^'ersitatis Typogra-
{b) et il n'a pas laissé de s'y
,
ap- phum 1686
, , i«-8°.
Notez que ce cardinal n'a pas suivi
pliquer tout de bon depuis son
en toutes choses dans l'exécution les
cardinalat. Ceux qui voudront idées de son projet. Ceux qui n'auront
s'en former une juste idée doi- point les quatre tomes in-folio qu'il ,

de
vent lire \e Prodrome qu'il publia a publiés à Rome sous le titre ,

ou Collectio maxima Conciliorum om-


à Salamanque , l'an 1686 , ,
et noui Orbis , etc. ,
s'ils ne l'ont pas, les extraits
qu'en nium Hispaniœ
n'auront qu'à lire les extraits que les
donnèrent les journalistes (C). journalistes de Leipsick en donnent
On l'a cru pendant quelque temps dans leurs Acta Eruditorum de l'an
l'auteur d'un ouvrage fort docte 1696.
(C) Les extraits quen donnèrent les
contre les décisions du clergé de journalistes.'] Messieurs de Leipsick en
France de l'an 1682 (D) mais parlèrent dans leurs Acta du mois de
;

on a su enfin le contraire (c). Les février 1688. L'abbé de la Roque en


conjectures n'étaient pas sans ap-
donna un extrait dans son journal
de ce du i3 de janvier 1687. Je m'étonne
parence , vu l'attachement que ce journal n'ait point paru dans
cardinal aux doctrines des ultra- les éditions de Hollande. L'article qui
montains , et l'ardeur qu'il a fait concerne l'ouvrage dont je parle ici
j)araître pour éloigner l'accom- est très-curieux : l'on y donne des avis
fort adroitement à M. le cardinal de
modement de cour de Rome
la
Aguirre sur ce qu'il a déclaré qu'il ,

avec la France, qui fut néan- voulait garantir pour bonnes plusieurs
moins conclu au mois d'octobre décrétâtes que tous les sa\'ans jugent
supposées.
1693. La dépense qu'il a faite
de deux volu- (D) On l'a cru l'auteurd'un ouvrage
pour l'impression
fort docte (1) contre les décisions du
mes de don Nicolas Antonio, son clergé de France del'aniGS'î.l En voici
ancien ami, est fort louable. J'en le titre Tractatus de Libertatibus :

parlerai dans l'article Antomo. Ecclesiœ Gallicanœ continens am- ,

plam discussionem Declarationis fac-


(i) L'édition de tous les conciles tenus en Archiepiscopis
tœ ab Illustrissimis
Espagne. et Episcopis mandalo regio
, Parisiis
(c) Voyez la remarque (D). congregatis anno i68'2 Auctore M.
,
;

C. S. Theolog. Doctore. Leodii ,


(A) // écrivit pour les prétentions du apud Matthiam Hovium, 1684, Su-
roi d'Espagne.... sur la couronne de periorum permissu. J'ai lu une préface
Portugal. ] Son livre fut imprimé à
de l'Abbé Faydit (2), où, entre autres
Venise l'an i58i , sous ce titre Res-
,
:
choses il fait espérer /a réfutation
,
ponsum pro successione regni Porta- des principales maximes du Traité de
galliœproPhiUppoHispaniarurnRege, Libertatibus Ecclesiœ Gallicanœ ad-
adversiis Bononiensium, Patauinonim
versùs quatuor propositiones Cleri ,
et Perusinorum collegia. Besoldus l'a
Nourelles
inséré dans son Pieciieil de Conseils. (i) Voyet ce qui en fui dit dans les
de la République des" Lettres , mois de
juillet
(B) Le Prodrome qu'il publia a Sa-
i685 , arùcle I,
lamanque , en 1686. ] En voici le titre :
sermon prcchc le jour
(2) Voyez Vexlrail d'un
IS'otitia conciliorum Hispaniœ atque de satnl'Poljcarpe àSainl-Jean en Grève, a
noui Orbis , Epistolarum decretalium Pans , imprimé à Lie'ge en 1689. ,
AGUIRRE. 3ii
imprimé a Liège à mon-, et attribue rite d'être rapportée afin que mon ,

sieur le cardinal d'A^uirre, et a mon- lecteur sache le jugement que l'on fait
signor Cazzoni. Et voici comment il en France du livre de ce cardinal :

parie dans la page i84 f^' auteur du : « A peine nos quatre articles eurent-
T/aitedeLibertatibusÈcclesiseGallica- » ils paru ajoute-t-on (5)
, qu'une ,

nae, ou plutôt les auteurs; car) apprends » foule d'écrivains s'élevèrent pour les
qu'ils sont plusieurs qui ont travaillé )) combattre ; et à peine s'est-il trouvé
a cet ouvrage , et que tous les docteurs w quelqu'un en France qui ait pris la
romains y ont épuisé toute leur scien- » plume pour les défendre. Je ne dis
ce quoique ce soit un très-médiocre
,
» pas que les ouvrages qui les com-
cuivrage ces auteurs , dis-je , sou-
; » battent soient formidables. Ils font
tiennent etc. Mais voyons un peu ce
, » pitié la plupart ; mais ils ne laisssent
que dit l'auteur delà Lettre d'un abbé » pas de faire du mal dan s les pays où
h un prélat de la cour de Rome sur le « l'on est déjà disposé en faveur de la
décret de l'inquisition du 7 décembre M doctrine qu'ils défendent Et en-
1690 contre trente-une propositions.
,
w fin les récompenses éclatantes dont
,

« Nous-mêmes (3) , daus nos assem- )' cour de Rome sait payer le zèle de
la
>> ble'es nous n'avons pas seulement
, » ceux qui se déclarent pour elle ,

)) la liberté de proposer ce que nous » donnent du prix et du lustre aux


» jugerions d'avantageux pour notre )) ouvrages les moins considérables et

» cause. Vous savez à qui il tient. j) les plus obscurs. N'est-ce pas par-là
» C'est ce qui a fait qu'un des livres » que le cardinal d'Aguirre est deve-
» qui aurait dû être plus fortement » nu ce qu'il est, de moine espagnol
)) réfute par nos théologiens, et même » qu'il était auparavant ? L'abbé de
n flétri par une censure épiscopale , » Saint-Gai n'avait-il pas été nommé
» court la France impunément et , n à un évêché , et n'avait-on pas des-
» que ceux qui en suivent les senti- » sein de le faire cardinal (6) ,
pour
3) mens le répandent et en font par- » récompense d'un ouvrage fait contre
» tout l'éloge se vantant qu'on n'a
, » lesquatre articles aussi-bien que ,

1) osé
y répondre. Il me nomma aussi- M celui du cardinal d'Aguirre ? n Au
» tôt le livre de Libertatibus Ecclesiœ reste trois ans avant que la lettre
,

)> Gallicanœ qui est un in-4''- dont


, , d'où ce passage est tiré fût imprimée ,
» l'auteur n'est pas si inconnu qu'il on s'était plaint publiquement (7) de
» s'imagine. C'est une chose honteuse, ce que les pensionnaires du clergé
» continua-t-il que le clergé de Fran- ,
laissaient le Tractalus de Libertatibus
« ce souffre , sans dire mot que cet ,
Ecclesiœ Gallicanœ sans y répondre.
» auteur qui est un leligieux Fran-
,
L'Histoire des Ouvrages des Savans
> cais enseigne uue doctrine que
, nous a appris (8) que l'auteur de ce ,

')
nous tenons tous comme hérétique ;
Tractatus est un prêtre français, nom-
') car il soutient tout franc que nous mé Antoine Charlus , réfugié à Rome
» n'avons pas de droit divin notre à cause de la régale. Peut-être le fau-
» juridiction épiscopale. » L'anato- drait-il appeler Charlas * ; car appa-
mie de la sentence contre le père Ques- remment , il est de la même famille
nel m'apprend (4) que le livre de Li- qu'un religieux de ce nom , natif de
bertatibus Ecclesiœ Gallicanœ fut rile-en-Jourdain (9) , mort dans son
composé à Rome à l'instance des , exil , après avoir soufl'ert plusieurs
ministres du saint siège et imprimé , disgrâces pour les affaires de l'évêque
par leur ordre et par les soins de de Pamiers (10).
M. l'intemonce de Bruxelles , dans
Abbé an Prélat, pag. 55, 56.
Bruxelles même , quoique sous le nom (5) Lettre d'an à

(6) Il le fut fait l'an 1696. Il s'appelait Slon-


de Liège. Mais si le cardinal d'A- ,
drate. // mourut quelque temps après.
guirre n'est pas l'auteur de ce traité- Dans les Sentiment d'Erasme publiés à
(7) ,

là , il est toujours vi-ai qu'il a écrit Cologne Van 1688, pag. i55.
,

contreles décisions de l'assemblée de (8) Dans le mois de mai 1696 pag. ,


4'6.

1682. La lettre qu'on vient de citer , *' La conjecture de Burle sur ce nom est
juste. Jolr dit que ce prêtre s'appelait Antoine
me l'apprend d'une manière qui mé-
Charlas ; qu'il était prébendier à Conserans , ci
mourut en i6gS.
(3) C'est un evéque que l'on fait parler , p. 5g« (g) j4u diocèse de Toulouse.

(4) Pages -jG, 77. (10) François de Caulst.


3 12 AJAX.
AJAX , fils d'Oïlée , fut un des (e). Il paraît par quelques pas-
principaux seigneurs qui allèrent sages des anciens auteurs qu'A—
au siège de Troie. Comme il jax n'avouait point le fait , et
était fils d'un prince dont les états qu'il s'en voulut purger par ser-
avaient beaucoup d'étendue aux inent {f). Il avoue bien qu'il
pays des Locriens , il ne lui fut enleva cette fille dans le tem-
pas malaisé d'équiper quarante ple même de Minerve et qu'il ,

vaisseaux pour cette fameuse ex- l'arracha du simulacre de cette


pédition {a). Il se signala en déesse qu'elle tenait embrassé (g);
plusieurs rencontres , et on pré- mais il soutient qu'il ne la viola
tend qu'il y a trois vers dans le pas , et que ce fut Agamemnon
W. livre de l'Iliade qui ne sont qui fit répandre ce mauvais bruit
point d'Homère parce qu'ils ,
afin de pouvoir garder Cassandre
donnent une insigne supériorité dont il s'était saisi , et que lui
à Ajax , fils de Télamou , sur Ajax réclamait comme le premier
l'Ajax de cet article {b) ce qui occupant. Nous verrons dans les
;

ne s'accorde nullement avec ce remarquescommentMinerve tira


qu'Homère a dit d'eux en un au- raison de cette injure (C). Le
tre endroit (c). Il est sûr que no- corps d'Ajax fut jeté par les va-
tre Ajaxpeut être comparé atout gues de la mer sur l'île de Délos,
autre prince qui fût dans l'armée oit Thétis l'enterra (D). Quelques
grecque {d), pour ce qui regarde auteurs ont débité qu'il se sauva
le courage, lahardiesse, lapromp- de la tempête et qu'il arriva en ,

titude (A). Quant au jugement bonne santé chez lui (E). Les Lo-
et à la conduite , c'est une autre criens ont eu une singulière vé-
chose, et ce n'était point son fort. nération pour sa mémoire (h).
Les poètes l'ont fait si intrépide, Nous dirons dans l'article de Cas-
qu'ils ont même dit que les dieux sandre comment ils furent obli-
tombant sur lui avec leurs fou- gés d'expier son crime. II avait
dres et leurs tempêtes , ne pou- tellement apprivoisé un serpent
vaient dompter son audace , de long de quinze pieds , qu'il s'en
sorte qu'il leur fut plus facile de faisait suivre comme d'un chien.
le perdre que de l'himiilier (B). Il le faisait manger à sa table {i).

L'action qui l'exposa à cette co- (e) Pausan. lib. X pag. 347. , .

lère des dieux était infâme et bru- (f) Id.ibid.,pag.3^3.


tale au dernier point. Il avait {g) Philostr. in Heroicis.
(/() Voyez la remarque (D) de l'article
violé Cassandre, fille de Priam ACHILLEA.
,

dan» le temple même de Minerve, (i) Philostr. in Heroïcis.

oii elle avait cru trouver un asile. (A) La promptitude. ] Homère lui
Les Grecs même furent choqués donne ordinairement l'épithète To-xiiç,
l'elox (i). Les trois mains que d'au-
d'une violence si profane, et ,

tres lui ont données , ne signifiaient


Ulysse fut d'avis qu'on le lapidât que la rapidité' de son action dans le
(a) Homer. Iliad. lib. II,
combat, ji multis historicis grœcis
, t>s. !^l , in Des-
cript. tertiam inanum dicitur post tergum
(Il) Scholiast. Hom. in Iliad., lib. II, w. 35. hahiiisse ,
qiiod ideo estjictum. quia
in Descript. sic ceteriter utebatur in prœlio ninni-
(c) Homer. Iliados lib. XIII vs. 70I.
,
(i) Voyez surtout les derniers vers du XIV'',
{(t) Philostr. in Heroïc. Uire de 2'Iliade.
,

AJAX. 3!^
Dixtl vel invilis Diisfure lU effiigerel ingén-
hns ut tertiam habere putaretur (^).
,
ies Jluctus maris.
Plusieurs interprètes entendent de lui
ces mots d'Horace et celerern sequi , Neptune
, indigne de cette auda-
Ajacem (3). M. Hofman adopte leur ce fendit le rocher en deux avec
,

explication ; car il confirme par ces sou trident , de sorte que la portioa
paroles TOfAÎoc T*;tî/ç ùi'n d'Homère sur laquelle Ajax était assis tomba
Je ne savais ce qu'il voulait dire , en dans la mer. C'est ainsi qu'Homère le
confirmant par ces mots grecs ce que conte dans le IV^. livre de TOdysse'e.
le compilateur de son Dictionnaire Quintus Calaber particularise les cho-
avait dit touchant la vitesse des pieds ses avec beaucoup plus d'étendue il :

d'Ajax Quod autem supra , Ajacem


: est si prolixe que ce seul endroit té-
,

pedibus i'elocemfuisse scribit hujusce moigne qu'il n'était pas un grand


Dictionnrii compilator , Homerum ha- maître. Quoi qu'il en soit il nous ap~ ,

bet auihorem. Je trouvais étrange, je prend que Minerve, nou contente des
trouvais incompréhensible , que M. foudres que Jupiter lui mit en main ,
Hofman parhlt du compilateur de son voulut encore que Neptune lui prêtât
Dictionnaire comme d'un auteur dis-
,
tous ses orages. La tempête fut la
tinct de lui mais enfin j'ai ren-
; ,
plus horrible qu'on se puisse figurer :
contré la solution de cette éuigme. Minerve lançait la foudre à tous mo-
M. Hofman avait tiré mot à mot da mens; elle mit en feu et en pièces le vais-
Dictionnaire de Lloyd ce que je viens seau d'Ajax ce furieux homme ne lais-
:

de citer. Dans Lloyd la chose n'a , sa pas de sesauver au travers des ondes
point de difficulté parce que cet au- ,
les plus agitées , et de braver tous les
teur n'a donné son Dictionnaire que Dieux sur le rocher qu'il gagna.
comme une augmentation et une cor- $>ï ii xcii il //.iha. îTatvTsç 'OKÙf/.7rn>t
rection de celui d'un autre. Il y a dans ilç iV IKO^Tttl
les livres un grand nombre d'obscu- T«3-*v 6*-
Xûûôy.ivoi , x!t( «vaç-ji!rû)(S-i
ritésqui procèdent du même principe
que de ce passage de M. Hofman.
celle
'Enifti-yinv (7).
On ne change point ce qu'il faut chan- Jaclavit autem, eiiamsi cuncti cœlitesin unum
ger quandon abrège, ou quand on tran- convenirent ,

Irait totum ex imo eruerent mare


et
splante les passages d'un auteur (4). , ,
EJfugilurum se.
(B) Il fut plus facile de le perdre
que de l'humilier. J Minerve avait en 11 fallut ,
pour venir à bout de lui
quehpie manière joué de son reste l'accabler sous la cliute d'une mon-
pour le punir elle avait excité une : tagne , comme l'on en avait usé autre-
tempête furieuse il avait vu périr son 5
foisenvers Encelade. Séncque , dans
vaisseau et néanmoins : , il s'était sau- la tragédie d'Agamemnon , s'accorde
vé sur un rocher: à cela lisez la première scène du
:

troisième acte, vous y verrez la des-


cription d'une résistance et d'une fier-
TTit 'ASiîvil.
té poussées jusqu'aux dernières bor-
El f/.h i/7rfp<fi*Aov iTroçiKCxy^i , xa< //.îy
nes. Le Festin de Pierre ne donne rien
qui en approche. On ne souflVirait pas
Et sane effugisset moriem^ quaniwnvis invi-
sus Paltadi , aujourd'hui que les poètes portassent si
iVût iinpium diclum proCulissei, et grave fa- loin leursfictionssur le théâtre. Voilà
cinus palrassel (5).
donc un poète latin , et deux poètes
grecs, qui attribuent à Neptune lamort
Alors il avait chanté le triomphe avec
un blasphème horrible Malgré d'Ajax; mais Virgile et Hygin (8) , en
: les
Dieux s'écria-t-il (6) j'en réchap-
donnent toute la gloire à Minerve :
, ,

perai : Pallasne exitrere classem,


Argivûm, atque ipsos poluit submergereponlo,
Unius ob noxam eljurias Ajacis Oilei ?
Ipsa Jovis rapidum jaculata è nubibiis ignem,
Ditjecitque rates , evertil/]ue œquora ventis,
(2^ Servius, in jEneïd. , Ub. I vs. 4i- ,
pectorejlammas
Jlluin expiranlem transfi.xo
(3; Horal. Od. XV
Ubri l , vs. 19. Turbine corripuil,scopuloque inJixU aculo (9).
(4) Voyez la reinarque{Q) de l'article AcaiL-
LEA , vers lajin. (:) Qaint. Calaber. , lib. XIV, vs. 56^.
(5) Homer. Odyssea Ub. IV, vs. 5o2. (8) Hvgin. , cap. CXVI.
(6) Id, ibid ,
vs. 5o4- (9) Virgil. ,îaeid. hi. J, vs. ?q. ,
Il/* AJAX.
(E) Quelques auteurs ont débite
(C) Comment Minevue tira raison
qu'il se saui'a de la tempête et cfu d
de cette mmre.l Voyez la remarque
arri^>a en bonne sanle chez lui. ]
précédente. J'ajouterai seulement ici
M. Lloyd a cite ces pa,-oles de Timaeus
Le la tempête qu'elle excita fit périr
Hist. lib. 2. M.t* a«ç tjmct,
un grand nombre de vaisseaux pro- Locrus,

A.!tyT.//oXKK Aoxf
auiouranui iNégrepont. Un ne pour- plu
à-d.re , après la prise de Fioie
rait, sans une extrême imprudence, et
sieurs ^«-'•'^«^/'7'
sans supposer un faux principe , con- "^'V^ '
2
damnerTes poètes grecl qux ont fait Pf-:^i-P-5-.^'':^l^:^'l/::Sl
châtier par cette déesse toute une na se saiiua a peine avec A'jax et revint ,

tion pour le crime d'un particulier : dans le pays. 11 y a quelque apparence


qu'au lieu de Timœus Locrus, il aurait
Vnius ob noxam etjurias Jjacis Oilei
fallu citer Timœus Tauromenita.
;

ou, comme dit un autre poète, (i4) Rochers de la mer Ége'e. Voyei les Pein-
tures de Philostrate.
Quicquid O'dides commiserai , omnibus unus
Peccavil Danois, omnibus ira nocens (loj.
AJAX , fils de Télamon (a) ,
L'objection prouverait trop , et pour-
rait être rétorquée contre l'histoire de était après Achille le plus vail-
David. Il est vrai, non-seulement dans lant capitaine grec (A) qui fut au
les écrivains profanes, mais aussi dans siège de Troie. Il y commandait
les écrivains sacrés, que
les troupes de Salamine {h) ,
et
Quidijuid délirant reges plecluntur Achivi (i i).
plusieurs beaux exploits
il y fit

("D) Délos où. Thétis l'en-


L'île de , l'on peut lire dans l'Iliade que ,

terra.}Lycophron nous apprend cette dans Dictys de Crète, dans Quin-


particularité (12), depuis que les in-
tus Calaber, et auXIIF. livre des
terprètes l'ont arrachée du milieu de
ses énigmes. Voyez ce que Cantérus et
Métamorphoses dans la haran- ,

Meursius ont dit là-dessus mais ne gue qu'il fit au sujet de la dispute
:

vous fiez pas à tout ce qu'ils disent ; armes d'Achille. Il


touchant les
car ils se trompent sur le passage de
perdit sa cause , car elles furent
Pausanias qu'ils emploient pour con-
adjugées à Ulysse son compéti-
,

firmer leurs conjectures. Pausanias ne


parle point du tombeau du fils d'Oï- teur il en fut si indigné qu'il
;

il ne parle que de celui d'A-


lée (i3j ,
en devint fou (c). Il se rua sur
jax, fils de Télamon. La critique de
des troupeaux, et y fit une gran-
'Meursius sur le grec de Pausanias
n'est point juste il voudrait qu'au
: de tuerie , s'imaginant qu'il tuait
lieu de lire t«v ss-otTov TTfoç to //.v>)//st où ceux qui l'avaient offensé en lui
XctKiTTMV TTOlîta-Stf j on lût TMV i^roS'oV TTpCÇ disputant les armes d'Achille ou ,

To y.v'iif/.tt 0» ;:t;!*Xê7r))V variTsti. Selon cette


correction le Mysien qui parlait à
en les donnant à un autre. S'é-
, ,

Pausanias lui, aurait dit que la mer tant aperçu qu'il n'avait tué que
lui avait rendu malaisée l'approche des bêtes, il devint encore plus fu-
de ce tombeau mais au contraire ; ,
rieux , et se tua. On a dit que sa
,

il racontait à Pausanias que la


mer
fureur fit beaucoup de bien aux
avait été cause qu'où y avait vu la
grosseur d'un des os d'Ajax. Il faut assiégeans (B). Il fut condamné ,

donc entendre que mer, ayant fait la


(rt) Voyez dans la remarque (A) de
,
l'ar-
ébouler des terres, avait rendu cet d'/ijax tant
ticle TÉLAMON , la généalogie ,

endroit,plus accessible , moins escar-


du côté paternel que du maternel.
pé etc. cette île II donna,
{b) Son père régnait dans
,

douze vaisseaux à Ajax. Horaerilhad.


lib. ,
vs. loi.
(10) Sablnns, in Epist. /, Ulyssis.
(11) Horat. Epislol. // Ubri I ,
vs. 14.
Calaber,
(c) Sophocl. Ui Ajace. Quintus
(12) Lycophron. , vs. 400.
Hb. V.
(i3) Pausan. , lib. /, pag. 34-
,

AJ AX. 3i5
selon quelques-uns , non par les que l'Ecriture Sainte donne au
sufïrages des princes grecs , mais roi Saiil à l'égard de la taille (Ji).

par la décision des Troyens, aux- Ilfut le sujet de plusieurs pièces


quels on avait demandé lequel de théâtre , tant en grec qu'en
leur avait fait plus de mal, d'Ajax latin{i). Le fameux comédien
ou d'Ulysse (f/j. Le fondement de Esope n'aimait pas à les jouer
cette opinion est expressément (A). Les Grecs rendirent beau-
contenu dans le onzième livre de coup d'honneurs à ce brave ca-
l'Odyssée. Ajax ressemblait en pitaine après sa mort [l). Ils lui
plusieurs choses à Achille; il était dressèrent un superbe monu-
colère et mal-endurant comme ment sur le promontoire de Rhé-
lui (ej , et invulnérable a conté quelques
par tout tée (F). On
le corps , à une partie près (Cj. aventures miraculeuses touchant
Oti connaîtrait peu la mytholo- ce tombeau (G). La faute que
gie si l'on croyait que les causes Ronsard crut avoir faite tou-
,

et les circonstaiïces de sa mort chant Ajax (H) fut corrigée dans


n'ont pas été rapportées en plu- une nouvelle édition.
sieurs manières , dont les unes {h) Voyez la remarque (G),
détruisent les autres (D). Un des (i Auguste en m'ait commencé une. Voyez
Sue'tone dans sa Vie chap. LXXXV.
caractères d'Ajax était l'impiété , ,

(A) Cicero de Officiis, lib. I , cap. XXXI.


(E^^ : ce n'est pas qu'il crût que V Diclys Cret,
(1) Quintus Calaber , lib. ;

les dieux n'avaient pas un grand lib. y.

pouvoir c'est qu'il s'imaginait


; (A) C était , après Achille , le plus
vaillant capitaine grec.'] C'est sur le
que, les plus lâches pouvant vain-
temoiguage de plusieurs poètes, que
cre par leur entremise , il n'y
je fais cette restriction :

avait point de gloire à vaincre de


'Av<rcœv (T' etZ fjiiy afjç-oç «mv Tsa*/x«-
cette façon. Il ne voulait être vioç A»*ç
redevable de la victoire qu'à son
courage. On a feint que son TATOÇ MêV.) (l)
Virorum verb longe prœsianlissimus erat Te-
âme , ayant de choisir
la liberté lamonius Ajax ,

un corps {f) pour retourner Inlereà d'uni Achilles in odio permanebat;


( nam is multà Jorlissimus erat. )
dans ce monde préféra celui ,

d'un lion à celui d'un homme : Pindare appelle Ajax ;cpiTiç-!iv , 'A;^^lXsoç
oLTip , yi-X,^ (2) 5 strenuissimum ex- ,
tant elle détestait le genre hu-
ceptn Achille , in pugnd. Sophocle
main en se souvenant de l'injus- en dit autant (3). Horace n'en dit pas
tice qu'on lui avait faite touchant moins Ajax Héros ab Achille se-
:

les armes d'Achille. Nous dirons cundus (4). Plutarque rapporte comme
une tradition qui ne recevait point de
ailleurs {g) quelque chose de la
difficulté qu'Ajax était le plus beau ,
,
postérité qu'il laissa , d'oii sortit le plus grand et le plus vaillant de
,

de Miltiade. Les poètes


la famille tous les Grecs , après Achille (5). Cela
ont donné à Ajax le même éloge est bâti sur ces paroles d'Homère :

A»*v6' ÔÇ TTifl f/lV SÎtToÇ TTêfi cT' ifyO, Tê*


((/) EustatLius, elScholiastes in Odysseae TUKrO
lib. XI ; Sclioliast. Aristoplian, iu Equit,
(c) Plutar. Symposiac. , lib. /, sub Jin. , (i) Homer. lllados lib. II , vs. -6S.
pa^ç-. 62g. Cicero, de Officiis , lib. I, cap. (2) Pindar. Nem. VII.
XXXI. (3) Sophoc. in Ajace.
(4 Horat. Sat. /// , lib. II ,
i'.r. igS.
(f) Plato de Republ., lib. X, pag. 765.
,
(5; Plntar. Sjraposiac, lib. IX , -/uai-t. V ,

{g) Dans l'article Tecmesse,


,

3i6 AJAX.
Tœv aXXMV Aavaœv //«t à.y.iifj.^'^tt. IIm- gle après avoir cessé de prier et la
, ,

>,ïiœvst (6). prenant pour un bon augure, il pro-


A']acein , i/ui e.ximius et forma et rébus gestis mit à Te'lamon un fils tel qu'il venait
J'uit j
de lui souhaiter et ordonna que cet ,
Inler altos Grcpcos posl Achillem, in quo ni-
hil desiderabalur. enfant fût nommé Ajax, à cause de
„, r 1 1 n 1 - 1 • l'aicle (g) qui avait fourni le présage.
Plutarque fonde la-dessus 1 objection ^^-^ Télamon, après la nais-
jj j.^^j^^j
qu'il fait à Platon qui a feint que ,
^^^^^ ^^p^- ^t se faisant donner cet
iârae dAjax ne fut enrôlée que la g^f^^^ ^^^j ^^^ jj l'enveloppa de la
vingtième T. oiv (e.Vêv) ou ^ivr^ctia,
:
^^ jg ^^^ i^^^ je Némée d'où il :

/J.IV Ai*ç x.a.KMvç kx, f^iyéavç kcii


^^^^^^ ^,„^ to^t jg corps d'Ajax devint
avSfitcLç <fîptTttifMT xfAv/Aova, n«Aê.-
a.i>
invulnérable , excepté la partie qui

tout falsifie j VOICI ses paroles Pm- :


lés uns'la
^^ ,^^^,^3 g^^^, ^^ trou :

targue remarque en ses Questions de


njett^^t sous l'aisselle (ti) , d'autres
table, pour quelle raison Platon ne
^^ ^^^ ,^^^ d'autres au côté (i3),
donne après Achille que la t^ingt- d'autres à la poitrine. Tzetzès sur
deuxième place a lame d Ajax , qui Lycophron se range à ce dernier sen-
e'tait estimé le premier en beauté, en tre au
^-^^^^^ ^^ Qvide paraît en êti
force et en courage; et d fait i^oir xiIIMivre des Métamorphoses vers.
que ce philosophe se jouait par la aij- 3_j .

férente signification des noT7ts


Dixit el in peclus lum denique vulnera pas-
(B) Sa fureur fit beaucoup de bien ,

su tn
aux assiégeans.'] On aurait néanmoins Quà
,

paluitjerro lelhalem condidit ensem.


grand tort d'en conclure que vrai le
courage a besoin d'un (D) On a rapporté des circonstances
tel secours. Les
utilités du vice n'empêchent pas qu'il de sa mort, dont les unes détruisent
ne soit mauvais. Je vous renvoie à ce les autres.'] Car il y a des auteurs qui
beau passage de Cicéron. lYon igitur veulent qu'il se soit donné la mort,
desideratfortitudo advocatam iracun- dans la fureur qiii le transporta, après
diam ; satis est instructa, arniata avoir perdu le procès des armes d'A-
parata, per sese. JYam isto modo qui- cliille d'autres disent qu'il n'eut :

dem licet dicere utilem l'inolentiam ad point de démêlé avec Ulysse touchant
fortitudinem , utilem etiam demen- ces armes; mais touchant le palla-
tiam , quod et insani et ebrii multa dium qu'on avait enlevé de Troie
faciunt sœpè iiehementiiis. Semper au saccagement de la place. Ces deux
Ajax fortis, forlissinius tamen in narrés sont incompatibles, vu que
furore. les armes d'Achille furent adjugées à
troie, et
Namfacinus fecit maximum, quum, Danais UljSSe avant la prise de
inclinaniibus, qu'Ajax se desespera peu après 1 ad-
Summnm rem perfecil manus, prtBlium quiim indication. Quoiqu'il en Soit, DictyS
restiiuit insaniens.
j^ raconle qu'Ulysse remporta
^.^^^^
Dicamus igilur utilem insaniam (j). le le juge-
palladium sur Ajax, par
(C) Il était ini^ulnérahle par tout le ment des chefs, et qu'Ajax, transporté
corps, à une partie près.'] Voici l'ori- de colère, menaça de tuer ceux qui
gine de cette singularité. Hercule , lui avaient fait cette injustice ; mais
voyant Télamon fâché d'être sans en- que le lendemain il fut trouvé mort
fans, pria Jupiter de lui donner un dans sa lente, transpercé d'un coup
garçon qui eût la peau aussi dure que
celle du lion de Némée , et autant de (g) Les Grecs nomment Vaigle
Auroç.
courage que ce lion (8). Il vit une ai- (10) Suidas in 'i^^'SfO.S'd.Ç'Cfi ; Scboliastes So-
ptoclis in Ajacera ; Sclioliàst. Horacri in Uiadoï
(6) Homeri Odysse» lib. XI , vs. 5!^ç^, vide lib. XXIII ! el TzeUes in Lycophr.
eliam vs.468.
(-) Cicero TqscuI. lib. IV, cap. XXIII (il) Suidas m ' AtT<Sfa.ià.çr(t,.

Tzeizen; item ScLoliastes Homeri


,

et XXIV. {i>) Àpud


Pindar. Istlimic. Ode VI. ApoUodor. in lliados lib. XXIII.
(8) ,
lib. III. (y.) SchoUast. Soplioclis in Ajacem.
, ,

AJAX. 3f7
d'épce(i4)- Ulysse, soupçonne de cet -Minerve se voulut mêler un jour de
homicide, et voyant les murmures de lui donner des avis
; il lui repondit
l'armée, s'embarqua, et mit à la voile fit-rement IVe i^ous mettez point
:
en
le plus promptement Sui- qu'il put. peine de mon poste ; j'en rendrai bon
das (i5) et Sédrenus avouent bien compte ; i/OHs n'afez qu'à garder vos
qu'Ajax et Ulysse disputèrent le pal- bons offices pour les autres Grecs (ai).
ladium; mais non pas que les juges Une autre fois , elle s'offrit à conduire
aient prononcé en faveur de l'un ou le chariot d'Ajax dans la mêlée
ne
il :

de l'autre. Ils disent qu'on se sépara , le voulut point souffrir (22). 11 fit
avant qu'il y eftt rien de décidé , et même effacer de son écu la chouette
que la nuit suivante Ajax fut trouvé qu'on y avait peinte (aS). Il craignit
raido mort. 11 y en a qui veulent que apparemment que cette peinture ne
sou combat avec Paris lui ait été aussi fût prise pour un acte de dévotion
funeste qu'à son adversaire il y reçut : envers Minerve, et pour une défiance
une blessure dont il mourut (16} et , de ses propres forces. On ne serait pas
il y tua Paris (17J. D'autres disent que équitable, si l'on" n'apprenait ici aux
les Troyens , avertis par un oracle ,
lecteurs qu'il n'est pas si indévot dans
que le fer ne pouvait rien sur son Homère car , s'il n'y prie pas Jupiter
;

corps et que si on voulait le faire


, , en se préparant au combat contre le
mourir il fallait l'accabler de boue
, vaillant Hector, il demande pour le
le firent périr de cette façon (i8j. moins que d'autres fassent des priè-
(E) Un de ses caractères était l'im- res à ce Dieu, ou tout bas, de peur
piété.^Quand il partit pour l'armée ,
que les Troyens ne l'entendent , ou
son père lui recommanda de joindre même tout haut 5 car , ajoute-t-il je ,

toujours à la force de son courage ne crains personne (24 j. Il n'y a pas là


l'assistance du bon Dieu. Ajax lui ré- de quoi le donner pour un modèle de
pondit que les poltrons même sont dévotion , comme on le fait dans le
souvent victorieux avec une telle as- Commentaire sur les Emblèmes d'Al-
sistance mais que pour lui, il s'en
j ciat. Rectè Ajax apud Homerum qui
passerait et qu'il était assuré de
, Deos inwûcat sese ad arma compo-
vaincre sans cela : nens ; neque enim pulat sibi felicius
TêKvov , Sof) rei benè gerendœ auspicium capere
Boi/XOO X,pSLTi7v fjl.i1 , S-I/V ÔêÔi tT' ÀÙ posse quant ab inwocatione numinis
KfSLTih. (aS). C'est mal rapporter le fait; le
passage du X VIP. livre de l'Iliade, vers
TïaTip , Qioiç fjLiv Ksii y.viS'ii à'v 'oy.'jZ 645 ne sert de rien ici. Il ne veut pas
,

KcstToç Ka.Ta.x.TYiTo.i'r . 'i.ym S^e ko.) élX"- que les Troyens sachent qu'on prie
Keiyoïv , ^sToiSa. toSt ès-is-Tarêiv Dieu pour le bon succès de ses armes
;
xxtof (19). cela peut recevoir deux explications :

Mifili, inquU,virtute il craignait peut-être que les Troyens


relis vincere , sed auxilianie Deo ieniper vê-
tis vincere.
ne prissent cette invocation de Dieu
Jpse vero superbe ac stullè respondebat. pour une marque qu'on se défiait de
Deo , inquit , eiiain ignavi
Adjuvant'' sa valeur ; ou bien , il craignait que
f^incere soient. Ego verb , vel absque
les Troyens , avertis des vœux que les
Auxilio divino , confido me islam aUracturum
esse gloriam. Grecs feraient pour lui , n'en fissent
de semblables , ou même de plus ar-
On trouve encore un passage tout dens pour leur Hector. La première
,

semblable dans le même auteur. de ces deux explications lui laisse une
vanité fort injurieuse à Dieu : la se-
hxkI; T5V xoêiVa-ova. (20). conde lui laisse beaucoup de persua-
Sed cum Deus adversalur tuuc etinm ignavi ,
sion du pouvoir
céleste. Mais , à quoi
ejlfugiuiit è manibus virorumjortium. sert cela, puisqu'il consent qu'on prie
tout haut; qu'il y consent, dis-je
(i4) Dict. Cret. , lib. V.
(i5) Soldas in voce. naÀ^iiTioy.
(2i) Ibid., pag. 8:.
(16) Dares Phryigius s£ Scholiast. Sopliocl. i«
(22; Scholiastes Sophoclis.
.Argument. Ajacis.
(17) Dares Phrygius.
(23) Idem.
(iS) Apud Sclioliast. Sophod , ibid. (24) Homeri lUad. lib. VII, vs. 196.
,

(19) Sophocles in A\iQe,pag. 80, 81. (25) Comment. inErablem. CYX^// Alciali,
("aoj Ibid., pag. 5i. pag. 547.
,,

3i8 AJAX.
par la confiance qu'il met en sa force est du premier. Il dit que Calchas dé-
et en son adresse; en nn mot, par la clara que la religion ne souffrait pas
raison qu'il ne craint rien, et qu'il se que l'on brûlât ceux qui se tuaient
soucie peu que les Troyens fassent des eux-mêmes 129). Voyez dans le même
contre-prières ou qu'ils n'en fassent
, Philostrate comment les Athéniens se
pas ? Est-ce là un exemple de piété distinguèrent à honorer ce héros. Pau-
que le coraraentateur d'Alciat doive sanias nous apprend que l'une de leurs
proposer? Un homme disait l'autre tribus portait le nom d'Aj.ix (3o) , et
jour que les princes catholiques font que les honneurs qu'ils décernèrent
fort mal de laisser mettre dans les ga- tant à lui qu'à Eurysaces, son fils,
zetres les pèlerinages de Lorette, les subsistaient encore (3i). Ceux de Sa-
offrandes les vœux
,
les prières de , laniine avaient bâti un temple à Ajax
quarante heures , qu'ils ordonnent (Sa). Toute la nation grecque l'invo-
pour obtenir une glorieuse campa- 3ua quelque temps avant la bataille
gne; car, dès que leur ennemi le sait, e Salamine (33) et lui consacia en- ,

il ordonne les mêmes choses chez lui, suite, comme une partie des prémices
et promet encore plus de largesses destinées aux Dieux, l'un des vais-
aux saints et aux saintes. On lui ré- seaux qu'on prit sur les Perses dans
pondit que cela montrait la bonne foi cette mémorable journée (34)-
de ces princes ils ne veulent pas sur-
: (G) On a conté quelques iwentures
prendre les arrêts du ciel ils ne veu- ; miraculeuses touchant son tombeau, j
lent pas, comme Ajax, ôter à leur Ulysse , ayant fait naufrage sur les
advex'se partie la connaissance de leurs côtes de la Sicile, perdit, entre autres
requêtes , et les moyens de se pour- choses , les armes d'Achille. Le bou-
voir contre ce serait vouloir qu'on
: clier sortit ensuite de dessous les ondes
prononçât sans avoir oui les deux auprès du sépulcre d'Ajax , et y fut
parties. appendu; mais, le lendemain il fut ,

(F) Les Grecs lui dressèrent un su- frappé de la foudre. Voilà ce que
perbe monument sur le promontoire de Ptoloraée fils d'Hephestion rapporte
B.hétée.'] Ce fut uu de ceux qu'Alexan- (35). Pausanias dit , en général , que
dre voulut voir et honorer (26). Nous la tempête porta sur le tombeau d'A-
disons ailleurs (27), qu'on a torl d'ac- jax les armes d'Achille , après le nau-
cuser Pline d'avoir ignoré la vraie si- frage d'Ulysse (36). La matière était
tuation de ce tombeau. Mais s'il est , trop belle et trop féconde en morali-
vrai que les Grecs aient érigé ce mo- tés pour n'être pas empaumée par les
nument que veut dire Horace, quand
,
poètes. Voyez dans l'Anthologie ce que
il censure Agamemnon d'avoir laissé les Grecs ont chanté sur ce sujet (37).
Ajax sans sépulture ? Alciat en a tiré l'un de ses emblèmes
- . . Cur Ajax héros ah Achille secundus (38). Quant aux prodiges, ou aux mer-
Pulrescit, toiles servaiis clams Achivis ^ veilles, qui firent parler d'Ajax après
Gaudcal ut populus Priami Priamusque sa mort , voyez Pausanias , à la page
iiihuniato
Per quein
,

toi juvenes patrio caruere sepul-


trente-quatrième du premier livre. Ne
cro (28)? finissons point cette remarque , sans
diie que les vagues, ayant entr'ou-
Je réponds que cepoè'te ne fait qu'em- vert le tombeau d'Ajax on fut cu- ,

ployer un des incidens de la tragédie rieux d'y regarder , et l'on remarqua


d'Ajax c'est celui où Sophocle feint
:
qu'un os du genou était aussi grand
qu'Agamemnon ne voulait pas con- qu'un de ces disques ou palets dont
sentir qu'Ajax jouît des honneurs de on se servait dans les jeux de prix
la sépulture. Il céda enfin aux fortes
instances de Teucer. Remarquez qu'il (29) Ptiilostrat. in Heroïcis.
(30) Pausan. lib, /, pag. 33. PlutarcVi. Sym-
,
Y a des auteurs qui disent que l'on ne pos. ,lib. I, qiiipsl. X, pag. 628. Herodot.
brûla point le corps d'Ajax et qu'il , i,b. V cap. Lxri.
,

(3i) Pausan., ihid pag. 33.


y en a qui disent que l'on le brùla. .,

(32) Id. ibid.


Dictys de Crète et Ouintus Calaber
(33) Herodot., lib. FUI
, cap. I.XIV.

sont de ce dernier parti Philostrate :


(34) Id. ibid. , cap. CXXl.
(35) Apud Pliotiura, pag. 484.
(2G) Diodor, SJcuI. M. XVJI. ,
(36) Paiisatiias , lib. ï, pag. 34-
Oans la remarque (K) de l^arlicleKcB.iLl.ii. (37) Aolhol. , lib. /, cap. XXII, inilio.
fi'])
28; Horat. Satir.///, /iV. //, i's. 198. (38; C'est le XXFIII'.
, ,

AJ AX. 3ig
(Sq). L'homme racontait à Pau-
qui le d'Ajax et qu'Aba , fille de Ze-
;

sanias (4o) voulait qu'il jugeât par-là nophanes, l'un des tyrans, étant
quelle avait été la taille d'Ajax. Ho-
donne tout-à-fait avanta-
entrée par mariage dans celte fa-
mère la lui
geuse. mille, se rendit maîtresse du pays
'Avtif >tii( ti [xîya.ç ts après que son père l'eut gouver-
"E^o^oç 'Apyila>v Ki<fa,K»v «cT' lùpictç
né sous le titre de tuteur. Elle
eiojjiovç (4i)'
........ Kir laltisque magnusque fut confirmée dans la possession
Procerissimus Argi^'orum lurn capile tum latis
par Marc-Antoine et par Cléopà-
humeris.
tre, auxquels elle avait fait sa
(H) Ronsard crut at'oir fait une
cour habilement. Après sa mort,
Jaute touchant Ajax. ] Il avait mis
Ajax parmi les bravas qui prirent le pays revint au pouvoir de ceux
Troie ; mais il l'en ôta dans la deuxiè- qui en devaient être les posses-
me édition de sa Franciade ayant ,
seurs légitimes. C'est là tout ce
été averti par Florent Chrétien, qu'A-
que Strabon nous en apprend («).
jas se tua avant la prise de cette ville
(42). Apparemment, Recueillons de là que le Supplé-
il ne savait pas ,

que, selon quelques auteurs, ce grand ment de Moréri est tout plein de
capitaine ne mourut qu'après le sac- fautes dans cet article (A). La re-
cagement de Troie car s'il l'avait ;

su il aurait dit à Florent Chrétien


marque que je joins à cet article
,

qu'il n'ignorait pas ce que Homère, le prouvera suffisamment.


Sophocle , Ovide et quelques autres
,

ont raconté ^ mais qu'il savait aussi


(a) Ex Strab. , lib. XIV ,
pag. 462.
ce que d'autres avaient dit et qu'il ,

avait mieux aimé se conformer à Dic-


(A) Le Supplément de Moréri est
tout plein de fautes dans cet article. "^
tys de Crète qu'à Homère et ainsi, il :

n'eût point fait l'aveu d'une faute.


Après l'avoir bien mesuré, je trouve
C'est un aveu très-mal plaisant .à un
que le meilleur moyen d'être court
c'est de rapporter tout entier l'article
poète, et même aux autres auteurs.
du Supplément ; le voici: Ajax , fils
(39) Pausanias , lib. I,pag. 34. de Teucer, roi de Salamine en l'Ue
(40) Korez dans la remarque {h) de l'article de Cypre, ayant succédé a son père ,
précédent quelques fautes concernant ce pas-
,

sage de Pausanias. consacra un temple a Jupiter en la


(4i) Homer. Iliad. , lib. III vs. 226. , ville d Olbus. Il se maintint dans la
(42) Korez les Notes de Florent Chrétien sur possesiion de ce royaume contre plu-
le Pbiloctète de Sophocle.
sieurs jtrinces qui s'en foulaient rendre
a ses descendans , niaîLres , et le laissa
AJAX, de Teucer, fit bâtir
fils
qui portèrent presque tous le nom d'A-
un temple à Jupiter, dans Olbe , jax ou de Teucer. Strabon, l. 14. Je
ville de Cilicie. Le prêtre de ce remarque contre cela 1°. Qu'il n'y a :

temple était seigneur du pays point de lecteur qui ne soit tenté de


croire, en vertu de ce narré que la
qu'on appelait Traclnotide. Plu- ,

ville d'Olbus était dans l'île de Cypre.


sieurs tyrans tâchèrent d'envahir 2°. Qu'il n'est point vrai que Strabon
ce pays-là , et de s'y maintenir ;
dise qu'Ajax succéda à son père au
de sorte qu'il devint un vrai théâ- royaume de Salamine. L'infatigable
Meursius, qui a tant cherché les noms
tre de brigandage. Après qu'on
de tous ceux qui ont régné dans l'île
eut exterminé ces tyrans , il fut de Cypre, n'a pas trouvé un seul Ajax
appelé le Pays de Teucer et la (i). 3°. Qu'il n'est point vrai que plu-

Prêtrise. Voilà les noms qu'il sieurs princes aient tAché d'ôler à
Ajax le ro3 aume de Salamine. Leurs
avait du temps de Strabon , qui
attentats regardaient la Trachiotide ,
ajoute que la plupart des ponti- le patrimoine ou le domaine de l'é-
fes qu'on y avait vus avaient por-
d) yorez son Traité de Cypro, lib, II cap,
té le nom de Teucer ou celui
,

VU et seq.
,

320 AIGUILLON.
glise de Jupiter Olbien dans la Cilicie; on renouvela l'érection SOUS Je
et Strabon ne dit pas qu'on ait taché règne de Louis XIII , l'an i638
d'en dépouiller Ajax, ni même qu'A-
,

par lettres qui furent vérifiées la


iax en ait été possesseur. On peut
bien bâtir un temple sans en être le ,
même année (b). Le cardinal de
f)ontife, et sans jouir des biens
qu'on Richelieu fit faire cela en faveur
ui attribue. 4°- Que, supposé qu Ajax de la dame de Combalet sa nièce,
eût été tout à la fois prince et prêtre
qui a été depuis si connue sous le
de la Trachiotide , il serait faux qu'il
en eût conservé la possession, et qu'il nom de duchesse d'Aiguillon.
l'eût laissée à ses descendans : il est Nous parlerons d'elk en son lieu
clair narration de Strabon ,
par la
,
(c). Elle a laissé par^son testa-,
que la suite des successions légitimes
fut interrompue quelquefois.
ment duché à Marie-Magde-
, ce
leine -Thérèse de Yignerod sa ,

AJAX , ecclésiastique recom- nièce, sœur du duc de Richelieu


mandable par sa piété et par ses (d). Rien n'est plus singulier dans
bonnes mœurs sous l'empire de , l'histoire que la résistance faite
Théodose. Il avait un frère nom- par la ville d'Aiguillon (B) en ,

mé Zenon ,
qui était de la même 1346 au duc de Normandie qui
, ,

sagesse que lui. Ils la firent écla- depuis fut le roi Jean. On a hon-
ter d'abord , non pas dans la so- te aujourd'hui de lire cela; et nos
litude, mais dans la ville de Ga- guerriers ne sauraient assez ad—
za ; puis ils s'attachèrent à la vie mirer que l'art militaire fût alors
monastique. Ils reçurent souvent si misérable en comparaison de

de rudes coups à cause qu'ils sou- ce qu'il est à présent. Si le duc


tenaient courageusement la foi de Normandie , fils aîné du roi
orthodoxe contre les païens. Ajax de France, avait emporté Aiguil
avait épousé une très-belle fem- Ion après quatorze mois de sié-
me mais on dit qu'il ne la con- ge il se serait rendu digne d'un
; ,

nut que trois fois , d'oii sortirent grand triomphe et aujourd'hui ;

trois garçons après quoi il se sé- une ville comme était alors celle-
;

para d'elle par rapport au com- là ne ferait point d'honneur à un


merce conjugal, et gouverna sa- colonel qui l'emporterait d'em-
gement l'église de Botoliwn. Il blée. Les Romains faisaient à peu
éleva deux de ses fils à l'étude des près cette réflexion , lorsqu'ils
choses divines et au célibat et comparaient les y^remières guer-
,

maria le troisième («). res de leur ville (C) avec les con-
(a) Sozom., lib. quêtes qu'ils firent long- temps
VU, cap. XXFIII.
après .Mézerai s'embarrasse beau-
AIGUILLON , petite ville de coup à l'aflaire dont je parle (e).
Guienne , sur le confluent du Lot Aiguillon n'eut pas entièrement
et de la Garonne , à quatre lieues contre les Anglais le même avan-
au-dessous d'Agen (A) , fut érigé tage que contre le duc de Nor-
en duché-pairie , pour le duc de mandie; car, lorsqu'ils l'assiégè-
Mayenne l'an 1 699. Les lettres
,
(i) Le 19 de mai.
en furent vérifiées au parlement (c) Dans de (Marie de ) ViGNEROn.
l'article

l'année suivante («) mais la pos- ;


[Bayle n'a pas donné cet article.]
(cl) Voyez /'État delà France, Utm. II ^
térité de ce duc ayant manqué , pay. 88 et 8i). Édil. de 1680.
(a) Le 2 de mars. (e) Voyez la remarque (B).
,

AIGUILLON. 3j,
rent en 1480, ils ne prirent point siégea la lille d'.aiguillon tenue par
le château: ils prirent seulement ^** -anglais ; H envoya quérir à To-
la ville et ils la pillèrent (/). l^îll"/',..!"/''/" ^I^""* 9"'
,
estoient dam ladue ^'V."''
uiile ; et lorsqu'on
i>oulusl assaillir ceux
(y) Damait, Antiquités d'Agen , p. loo. d'Aiguillon , il
Jut nrrestépar les seigneurs Jrancois
,
que ceux de Tolose
(A) Au-dessous d'Agen.l^ïî^^vais Carcassonne, ,

et Beaucaire assaUliroient
voulu marquer au milieu de quelles du matin ,

jusques a midi et ceux de


Tilles celle d'Aiguillon est située je ,
Rauergue, ,

Cahors, et Agenois, quand


n'aurais pas pris Agen et Nérac , les autres
comme a fait M. More'ri; car ce sont seraient retires jusques à uespres (6) ,

Que Mézerai ne fasse durer qu'une


trois lieux qui font un triangle mais : se-
maine les trois assauts par .}"•••> ^^^
j'aurais pris Agen et -Tonneins, l'une i-- jour, c'est
1 . ,

au-dessus et l'autre au-dessous d'Ai- "°^, *=^?''f, ^"' P«^


repond point à l'at
,
t'^'î^e ou il avait mis son
guillon sur ia Garonne. La faute que
,
lecteur
je reprendsici est d'autant plus con-
sidérable, qu'il n'y a point de lecteur
qui n'en conclût que Kerac est sur la
donner de ces attaques. 11 a fait d'ail-
même rivière.
leurs une faute de chronologie. Selon
(B) Rien que
n'est plus singulier...
lui le duc de Normandie arrive
la résistance d'Aiguillon. ] Papyre à
,

Masson dit que ce sie'ge dura qua- Toulouse au mois de janvier i346
il emploie trois mois à prendre
torze mois. Acilionem (i) urhem ir- quel-
ques bicoques ensuite, il prend An-
rita Joannis postea régis Francorum
:

et tune ducis IVormanniœ, quatuor-


gouléme ,
et puis retourne vers la ,

decim mensium obsidione memorabi- Garonne, prend Tonneins, assiège Ai-


guillon, et en lève le siège, à cause de
lem (2). La nombreuse arme'e du duc
la bataille de Creci. Cette bataille se
de Normandie n'est pas moins à con

soulêmc, d'où, elle se rabattit sur Ton- ,. „ . , \ „ o ., . -j

neins, et de là ^int assiéger Aiguil- " faH^'.* mettre à


f,'^" ^f '"f''-'.^?)-
'^*^ ^''"^^^ ^« ce prince à Tou-
Ion,.... bien muni et bienfirl^é^ur ^
\^^^
ce tem^i/à (3). Les manières de l'atta- .^' ,

que sont une troisième circonstance \^) ^o^^^l^ ^^ comparaient les pre-
à considérer. Dans tout ce siècle (4), "»^/ei guerres de leur uille. ] Voyez
on ne voit point de siège plus mémo- Florus, et son style plein d'exclama-
rable, soit pour les attaques, soit pour *'0"*- '^"'^ (^"'^ credat?) et Algi-
les défenses. On y
donna trois as- 'It""
^^'''''"'tfuerunt : Satricum atque
sauts par jour, une semaine durant ; ^ornicu/um proi^inciœ. De f^erulis et
après, on en ^'inl à l'artillerie, et aux ^''^"'" triumpha^imus.
P"'^"^^ '
^^'^

machines par terre et par eau (5). ^'*"'" ^unc suburbanum et œsiivœ
Voici une citation qui embrasse les t'rœnsste deliciœ nuncupatis in Ca- ,

deux passages de Mëzerai. Je la tire /^"o"" ^'^"^ petebantur. Idem tune


de Catel. Froissard au chapitre
r cent , /es r^ . , .»- ,,,,. .

(6^ Calel, Mémoires pour l'Histoire


'
du Lan-
vingt-uniesme du premier volume, es- guedoc, pag. 563.
crit, comme lors que le duc de Nor- * CV<rPapyre Masson qui fait durer le
mandie avec cent mille François as- siège quatorze mois. C'est donc sur lui que
porte ta critique de Leclerc qui dit qu'il ne ,

(i) Baudrand la nomme Âguillionum, dura pas la moitié de ce temps et celle de Jolf ,

(2) Papyr. Masso , Descript. Flnmin. GaUii qui, d'après Froissard et Me'ierai , en réduit la
(3) Mezerai , Abrégé Chron. à l'an ;n i346,
i3 durée à six mois , en observant que c'est encore
tom. III , pag. 24 edit. de HoU., en 1673. un siège assez long pour le tempt,
(4; C'était le Xiy (7) Mêlerai, Abrégé chronol. , lom, IJI
(5^ Lci même.

21
322' AILLI.
Fœsulce, qund Carrce nuper; idem plication à la science de l'école
nemus Aricinum, qund Hercynius sal- ne l'empêcha pas de devenir bon
tus : Fregellœ, quod Gesoriacuni Ti- :

beris, quod Euplirates. Coriolus quo-


prédicateur. obtint le doc- Il

que [proh pudor!) uictus, adeo gloriœ torat en un canonicat


I 38o , et
jfuit, ut captum oppidum Cajus Mar- à Noyon. Il fut rappelé à Pa-
cius Coriolanus quasO^' ]\ umantlani
ris quatre ans après pour y
aut Afrïcam nonien induerit (8). Mais ,

quelque honte qu'il y eût pour les exercer la charge de grand-maî-


Français à n'avoir pu prendre Ai- tre du collège de Navarre. Il
y
guillon avec tant de gens comniande's eut une infinité de disciples et
par le Gis aîné de leur roi, ce fut une entre autres Jean Gerson et Ni-
grande gloire pour les Anglais d'a-
voir défendu si long-temps ce poste. colas de Clémangis. Il plaida avec
tant de force, en iSÔy, devant
(8) Florus , cap. XI , lib. I.
le pape (rf), contre un jacobin
AILLI {a) (Pierre d'), évéque de (e) appelant de la sentence que

Cambrai {b) et cardinal naquit ,


la faculté de théologie de Paris

à Compiègne en Picardie (A), l'an avait prononcée contre lui ,


qu'il
35o. Sa famille était fort obscu-
I obtint la confirmation de cette
re * : quelques-uns disent qu'il sentence. Il fit aussi un Traité
fut sous - portier du collège de contre ce même jacobin. Cela le
Navarre (c), mais ils se trompent. mit dans une telle réputation ,
II n'entra dans ce collège qu'en- qu'en 1 889 il fut fait confesseur
viron l'an 1872. Il y fut reçu et aumônier de Charles VI (C), et
boursier parmi les étudians en chancelier de l'université. Cinq
théologie. Il était alors procu- ans après , on lui conféra la pre-
reur de la nation de France dans mière dignité de la Sainte-Cha-
l'université de Paris , et capable pelle de Paris ; c'est celle de tré-
de s'ériger en bon auteur , com- Tant de difFèrens emplois
sorier.
me il le témoigna par des traités n'empêchèrent pas qu'il ne s'ap-
de logique (B), selon les hypothè- pliquât fortement à chercher les
ses des nominaux, et par des trai- moyens les yjlus efficaces de faire
tés sur la nature de Vâmc et sur cesser le schisme qui divisait l'É-
celle des météores. Il fit paraître gliseromaine. Il alla trouver de
tant de pénétration et de netteté la part du roi l'anti-pape Be-
dans ses ouvrages , qu'il jeta par- noit XI II, en 1 894 5 6t il îiii ï'cn-
là les fondemens de cette haute dit un témoignage si avantageux
réputation oii il s'est vu élevé. à son retour
au ,
qu'il fut résolu
Il ne réussit pas moins dans l'ex- conseil du roi de le reconnaître
plication de Pierre Lombard en pour le pape légitime. Il obtint ,

l'année iSyS. Cette heureuse ap- î'évêché du Puy en Vellay


{f) ,
sur la fin de l'année 1 896 , et ce-
(n) En latin Petrus de Alliaco
, ou ab ,

Alyaco, ou Alliacensis ou Alliacus, ou Ail- lui de Cambrai au commence-


,

liacus, etc.
(b) Tlievet et Vossius de Hist. Lat. pag., , {d) C'est l'anti-pape Clément Vil qui sié-
548; de Se Malh. ,;)a^. 182, 228, l'en font geait à Avignon.
archevêque. (e) C'était un Aragonais, nommé
Jean de
* Chaiifepié raconte quelques particula- Monteson qui niait
, la Conception im?nacu-
rités sur d^Ailli , et entre autres qu'il était lée de la l'ierge.
,
Jils d'un boucher.
{f) Selon More'ri , ce fut l'éféché de Bellei;
(c) yoyez la 1-emarque TA). mais il se trompe.
AIL LI- 323
ment de l'année suivante. Il fut un beau corps doctrine dePier- la
fort considéré de Boniface IX et ; re d'Ailli touchant la puissance
il se servit de cette faveur pour ecclésiastique. Il veut que l'on im-
faire établir un théologal dans pute cela au malheur du temps
toutes les églises épiscopales du je m'étonne qu'il ait ou- (/); mais
royaume. Il prêcha à Gênes l'an une autre tache de ce doc- blié
i4o5 sur le mystère de la Tri- teur je veux dire son entêtement
, ;

nité, devant le pape Benoit XIII, pour l'astrologie judiciaire (F).


et persuada à ce pape de faire cé- Au reste notre Pierre d'Ailli ,
,

lébrer à toute l'Eglise la fête de qui soumettait à la puissance ec-


la Trinité. Il fit admirer son éru- clésiastique les sceptres et les
dition et sa jjrudence dans le con- couronnes qui travaillait à , la
cile de Pise l'an i/jog. 11 avait
, multiplication des fêtes, qui fon-
soutenu à Paris dans toutes les , da un si grand nombre de mes-
assemblées oii l'on avait délibéré ses pour le repos de son âme ,

sur les remèdes du schisme que ,


qui condamna Jean Hus au sup-
la seule voie de l'éteindre était la plice (G) ne
laisse pas de paraî-
,

convocation d'un concile géné- tre dans catalogue des témoins


le
ral. Deux ans après il fut pro- , de la vérité (H) comme un pré- ,

mu au cardinalat (§•) il alla en : curseur de Luther et de Calvin.


Allemagne l'an i4i4 ? ^n qualité Les cartésiens le mettent aussi
de légat du pape. Il présida à la au nombre de leurs précurseurs
troisième session du concile de dans la question des accidens (I).
Constance il composa trois écrits
; Il avait été chassé de son église
pendant la tenue de ce concile : épiscopale , si nous en croyons
l'un de Emeiidandd Ecclesid ;
, Erasme qui ajoute que cet exil
,

un autre de Duodfcim Honori—


, lui procura le chapeau de cardi-
bus beati Josephi ; un autre de , nal composa beaucoup de
{k). Il
Modo et Forma eligendi Papœ, livres dont quelques-uns
(K) ,

et personne n'eut plus de part n'ont encore jamais été impri-


que lui aux affaires de cette gran- més (L). Il se mêla même de ri-
de assemblée qui dura trois ans. mailler * en langue vulgaire
Il mourut l'an 1426 (D) , et fut (M). Consultez les auteurs cités
enterré dans sa cathédrale de par M. Moréri et , au lieu de ,

Cambrai. Il fit de grands biens Frissart , auquel il renvoie , li-


au collège de Navarre (E) et des- sez Froissard. ,

tina de grandes sommes par son {i) Dictala hujusmodi danda injuriœ tem-

testament aux services que l'on poris sunt, nœ^us in candidissimo pectore,
Launoius ibid. pag. 480.
ferait en plusieurs églises pour le
,

k Petrum /lliacensem Camcracensis civU


repos de son âme {h). M. de Lau- las epLscopum ejecit. Borna ex exule Jecil
noi , dont j'emprunte tout ce que cardinalem. Erasm. de Ratione conscrib.
Epistolarum Episl. consolât. ,

l'on vient de lire n'oublie point ' Prosper Marchand


, dans Son Diction- ,

de regarder comme une tache sur naire an mot Vo-.sn;s, trouve cette exprès- ,

sion désobligeante . et rapporte une pièce de


d mu ,
pour prouver que le jugement de
Moréri dit que ce fut à Pise
(g-) .• i7 se Ba^le est trop séfère.
trompe.
h] Tiré de THisloria Eegii Navarrae Gytn- A) Naquit a Compiègne en Pi-
nasii, de. M. de LauDoi, pag- 4^y et suii>. cardie.'i Cela paraîtpar les registres
324 AIL LI.
publics tic de Cambrai (i)
l'église observe que Pierre d'Ailli n'a jamais
:

on peut donc mettre dans la liste des porté la qualité de grand aumosnier
mensonges de Thevet ce qu'il dit tou- de France ny de grand aumosnier ,

chant la patrie de Pierre d'Ailli. Il du roy, lesquelles csloient encore in-


fut natij d'Allemagne dit-il (2), en cognues, et n'ont
,
commencé à paroixtre
un village fort obscur, dit Ailli, dont que sous les règnes de Charles f^IIl
aussi, pour la t'ilité de ses parens, il a et de François I" ., quoi que
die l'au-
tire' sa denominaison. Il fut sipawre,
theur de la Gaule chrestienne (*) en ,

que pour avoir le moyen de vacquer a quoi s'est trompé de mesme le conti-
l'estude des lettres, il fut contraint nuateur des Annales de Bnrontus.
de servir de snus-portier au collège (D) Il mourut l'an i425.] C'est
de Navarre. Volaterran avait déjà une chose étrange qu'un homme de ,

publié que Pierre d' Ailli était Alle- ce rang et de cette distinction soit
mand (3). mort, sans qu'on sache au vrai ni ,

(B) Par des traités de logique. ] Il où ni en quelle année. Les uns di- ,

l'entendait parfaitement et c'est à sent qu'il mourut en Allemagne ,


:

cela qu'il fut redevable de la force l'an 1416. Les autres, qu'il mourut
et de l'adresse avec quoi il soutenait à Avignon le 8 d'août 14^5 étant , ,

ses opinions, et renversait celles d'au- légat du pape en France (6;. D'autres
trui. Le célère Wesselus, de Gronin- disent bien qu'il mourut à Avignon ;
gue en parle de cette manière Quis mais ils mettent sa mort à l'année
, :

unquam ad illiim apicem Theologiœ 1426 (7). M. de Launoi se contente de


qub Petrus de Alliaco conscendit abs- la marquer à l'année 1425 dans la ,

que definitionibus divisionibus, ar- page 479 de son livre mais, dans la
, j

eumentationibus instantiis logicali- page 129


, il avait dit que Pierre ,

bus ,
perveniret ? In dispuUilionibus d'Ailli était mort légat du saint siège
dico ubi discussione disertd opus est. en Allemagne, l'an i^iZ Anno post- :

Quomodo Petrus Joannem de Monte- quani vastatum est à Burgundionibus


sono in Hold de errore quatuordecim quinlo. Or, dans la page 126 de ce
illarum conc/usionuiu coiicussisset même livre il avait mis ce ravage
, ,

nisi dis'inctione muliiplici, aut elen- sous l'an i4i8. Les registres de l'é-
chi ignnrantid antécédente vel consé- glise de Cambrai portent qu'il mourut
quente delusum docuisset? Opus igitur le 9 d'octobre i425 étant légat du ,

Theologicis Logicam inferre. Et Ger- saint siège dans la basse Allemagne j


son ipse, quo tandem tanlus ipseTheo- et qu'au mois de juillet suivant, oa
logus niii per accaralissimam illam porta son corps à Cambrai, où on l'en-
,

suam ma^istri Pétri Logicam evasit terra derrière le grand autel (8j. La
(4)? On doit remarquer que M. de diflérence de i4i6, et de 1426, est
Launoi croit que ces mots du passage venue d'une faute d'impression le :

qu'on vient de lire Rota de errore , chifi're i, mis par mégarde au lieu du
,

etc. étaient le titre d'un livre fait chitlre 2, a tonde deux sentimens.
,

par Pierre d'Ailli mais j'aimeraisj (E) Hft de grands biens au col-
mieux entendre par Rota le lieu où le lège de Navarre. Il en a été appelé '\

pape entendit les disputans. Quoi le second fondateur (9). C'est lui qui
qu'il -n soit, c'est sans doute la Dia- y fît bâtir la maison des théologiens
j
lectique qui contribua puissamment mais ce n'est point lui qui y tit bâtir la
à cet éloge de Pierre d'Ailli Aquila bibliothèque. M. de Sponde, qui l'as-
:

Franciœ atque aberrantium à veritate sure, s'est trompé c'est l'ouvrage de :

jnalleus indefessus (5). Charles VIII. Spondanus inAnnalibus


(C) Aumônier de Charles VI. ']

Voyez du Pcyrat, à la page 345 des (*) Claudius Robertus, in Galliâ Chrislianà ,

68.
Aïïtiquilés de la chapelle du roi. Il y folio
(6) Labbe , de Scriptor. Ecclesiast. , lom. II ,
(i) Apud Lounoium Hjsl. Coll. Nav. p. iS^.
,
pag. 179.
(a Thevet, Homme» ilinslres, tom. VII, (7) Vossius.de Hislor. Lat., pag. 543. Bellar-
pag. 86 del'edil. in-ji. min, de Script. Ecclesia^t. , pag. 384, met la
(3) Gesneri BiblioOi.fol. 543 verso,
,
même anne'e , mais sans marquer aucune ville.
(4) Wesselus
de Pote^tate Papse, cap.
, IX ,
(8) Apud Launoiam , Hist. Gymn. Navarrie,
apud Launoium, t.'ist. Navar. , pag. 469. pag. li'j.

(5) LauDoiut ibiii. , pti^. i34) 47^-


,
(9) Launoius , ibid., png. i34, 47^-
AILLI. 325
Ecclesiasticis prodidit ab eo exslruc- trement s'enquérir plus m'ant de la
tnm esse Biblinthecarn ; sed aberrat : i^erité combien que de trente-six gran-
,

id est opus Caro/i octavi régis, cujus et des conjonctions que ce cardinal a ,

nonien juovLy^a.fXfAov in Bibliolhecœ vi- remarquées depuis 1 5 ans après la


, 1

tro centies def in^itur, et statua in oc- création du monde , jusqu'à l'an de
cidentali tiirbinati parietis cono erecta Jésus-Christ i385 il ne s'en trouue ,

cnnspicitur 'lo). Il est bien vrai que pas six i-ériîables (18). Ce passage de
Pierre d'Ailli voulut qu'une partie des Bodin a été ainsi changé dans l'édi-
biens qu'il laissait à ce collège servît tion latine Mirum niihi wisum est
:

à acheter des livres et qu'il donna , quamobrem J. Picus Mirandulœ prin-


souvent des livres (i i). Je ne «ais point ceps illius hominis errores sanè puden-
s'il donna sa propre bibiiotliéque , dos in cœlestium orbium doctrinâ pro
comme Aubert le Mire la débite. Al- certis et compertis demonstrationibus
liacus, dit-il {\i),anno i!^i^ Awenione habuerit ; ciim enim post orhem con-
moriens Biblinthecarn. suam legai'it dituni anno centesimo decimo quinto
JVafarrœo Parisiis collegio , quam ibi usque ad annum Christi i385 trigin- ,

magnâ cuni l'oluptate aliquando t^idi- ta sex Jouis et Saturni concursus tra-
nius. Je n'ai point vu que M. de Lau- diderit fix tamen ullus eo quo decuit
,

noi le son silenc° seul serait ca-


dise : loco ac tempore describitur. Le même
pable de flamand.
re'futer l'c'crivain Bodin attaque ces hypothèses par le
(F) Son entêtement pour l'astrologie fondement Le cardinal d'Arliac ,
:

judiciaire (i3). ] Bellarmiia n'a point dit-il (19) prend sa racine aux gran'
,

oublié cette tache. Unum est dit-il , des conjonctions au temps de la créa-
(i4), in quo reprehenditur hic auc- tion du monde supposant h son comp- ,

tor , qu6d uidelicet sensisse i'idea- te qu'il y a ^i58 ans suii'ant l'erreur ,

tur Christi natiuitatem prœnosci po- d'yilphnns qui est réprouvé de tous
,

tuisse ex genethliacis obseruationi- les Hebrieux, et maintenant d'un com-


bus atque ad hoc adduxerit appari-
, mun consentement de toutes les égli-
tioneni stellœ quœ apparuit Magis. ses.... Et par ainsi , c'est une erreur
,

D'autres observent que Pierre d'Ailli , insupportable de supposer la grande


dans son livre de Concordid Historiée conjonction de trois hautes planètes
et Astrologiœ diidnatricis , a soutenu l an de la création Sao , et poser qu'il
que le déluge de Noé la naissance y
eust à présent ^it8 ans: c'est-à-
,

de Jésus-Clirist et tels autres mira- dire douze cents ans dei'ant que le
, ,

cles , et tous les prodiges , ont pu être monde fust créé. Cette manière de
devinés et prédits par l'astrologie fi 5) j combattre Pierre d'Ailli ne saurait
et qu'il a rapporté les naissances, chan- être décisive présentement, vu le poids
gemens et ruines des républiques et des hommes doctes, ([ui préfèrent le
,

des religions , aux conjonctions des calcul de la Bible grecque touchant la


hautes planètes (16). Bodin ajoute que durée du monde au calcul du texte ,

Jean Pic , prince de la Alirande , hébreu. Vossius a plus de raison de


prend les hypothèses de Pierre d'Ar- l'insulter sur la naissance de l'hé-
liac ('] (17) pour certaines , sans au- résie d'Arius que sur la durée du ,

monde. Voici les paroles de Vossius j


(10) Ibidem pag. 4t5. ,
on y volt que notre astrologue a mis
Ibidem, pag. i34i '35.
le commencement de cette hérésie
(11)
(12) Mirsus. m
Âuctario de Script. Eccles.
sept cents ans après Jésus-Christ , ce
,
cap. CCCCLIV, p^g. 265.
(i3J Voyez la remarque (K) l'erj la fin. ui est une très - crasse ignorance
qui :

(i4) BelUrmiD He Script. Ecclesiast., p. 384-


,
Kaaidé eliam futile est fundamentum
// now renvoie à Sixtf He Sienne, Bibliothecs quod arti isti ponit. Ait ab initio
Sancts Jnn. XV
elLXXXI ,ellib. VI, 4nn.X. mundi usque ad dilu^'ium
Jluxisse
(i5) Vossius de Scientiis Mathemal.. p. i\S.
annos in^i (20) à dilui-io ad natalem
(16) Bodin, de la République, liv. pag. IV ,

548 , de
première e'dilion.
la
^
Christi 5 lo-i. His ita conslitutis totus ,

(*) De éUiaco est le nom vulgaire latin de est ineo ut ostendat quandocunquè
Pierre d'Ailli { Alliacus ) : et c'est de là que mirandum aliquid contigit in terris ,
Bodin a fait à^ Arliac par le changement de la
etiani illustrem aliquarn stellarum con-
première des deux il en r, comme en Varlet,
Merlin Merlusine , faits de Vallel MelUn ,
, , (iS) Bodin, de la République, liv. IF, p. 548.
Mellusine. Rem. crit. (19) Pag. 549.
(17) Cest ainù qu'il le nomme. {20J Vossius a voulu aire 2242.
, ,.

33.6 AILLL
junclionem apparaisse 4tqui in cœlis 1) vice duœ propositœ sunt tibl ut ex,

Jalsissimurn est quod sibi sumit de « his eligas unain : mit te offèras om.
anno wel diluvii t^el natalis Domini nino totum in potestatem et graliant
»
nec error , sed spississinius ;
lei>is est i> Concilii, ejusque decrelis super hâc
in priori guident numéro annorum » re acquiesças ; lia namque Jiet ut
penè sexcentorum , in altero auteni » Concilium ob honorem Domini nos-
paulb pauciorum (ai). Quidmirum? )) tri Régis Romanoruni nunc prœsen-

Oninino Cameracensis J'uit Chrono- » tis ac fratris ejus Bohemice Megis ,


logiœ iniperitissimus ut t>el argult , )) clenienter acturuni sit tecum aut si ;

quod yirrianam hœresim cœpisse dicat » ex dictis articulis quosdam tenere


anno Christi septingentesimo quani ,
» ac defendere intendas , et desideres
i'erisimiliiisliim penè exstinclamdixis- )) aiiani audientiam concedetur tibi
,

') quidem; sed tune scias hic esse mag-


set. Ortam uero constat foré initio
sceculi quarti (22). Si Thevet eût )>nos et illuininatos firos qui j'ortis-
écrit avec jugement, aurait-il parlé » sima habent adi^ersiis articidns tuos
de Pieri'e d'Ailli en ces termes ? « Je nfundamenta , et l'erendum est ne in-
« désirei'ois que tous ceux qui se mes- » de grauioribus int-'oluaris erroribus
» lent d'astrologiser daignassent un j) Jd consulendo dixerim tibi non ut ,

» peu mettre le nez avant dans ses » judex (25). » M. de Launoi ayant ,

)» livres n'y pei'droient leurs pei-


: ils rapporté cela, ajoute que cet hérétique
)) nés 5 car, outre les singulières obser- aima mieux soutenir opiniâtrement
« vations que je viens de ramentevoir ses opinions et être brûlé, que suivre
» (23) , ils y trouveroient la sentence le conseil salutaire du cardinal d'Ailli :

w minutée à l'encontre de ceux qui P^eràm litigiosus horno dogniata sua


» sous le nom de la vraye astrologie , nimis pertinaciter propugnare maluit
)) prennent plaisir de s'embéguiner et comburi , quam usque adeô salubre
» du faux masque d'astrologie , in- cardinalis yilliaci consilium sequi.
» froduisans une idolâtrie des astres (H) Il parait dans le Catalogue des
3» du tout abominable (24). » Cette témoins de la ^-érité. ] « Par la déter-
prétendue idolâtrie n'était pas plus à » mination du concile de l'Eglise fran-
craindre au temps de Thevet que le ,
3>çoise , il fut délégué pour dénoncer
culte religieux de la terre ; de sorte >»aux deux papes , qui s'entrequerel-
que si les livres de Pierre d'Ailli n'é-
, » loient pour la papauté , qu'ils se
taient bons qu'à convertir cette sorte » démissent du siège papal. Pour res-
d'idolâtres, on n'avait presque point « ponse , lui fut dit que les papes de
à faire d'eux. Mais comme d'autre )> Rome sont exempts de toute tache
côté ils étaient propres à entretenir » de schisme j mais que c'estoient les
le crédit de l'astrologie par les ver- ,
« prélats françois , qui de gayeté de
tus que cet auteur attribue aux con- « cœur schismatisoient. Pour cette
jonctions des planètes , choses dont " occasion , il fut depuis renvoyé ,

Thevet ne dit pas un mot leur lec- ,


» suivant l'avis du concile tenu à
ture était infiniment plus préjudicia- « Paris , avec le sieur Jean Maingre
ble que profitable. J> maréchal de Boucicaud , lequel par
(G) Qui condamna Jean Hus au » après estrilla bien l'antipape à Avi-
supplice. ] Ce ne fut point sans l'ex- w gnon comme aussi le cardinal
,

horter à se soumettre et sans lui dé- ,


w d'Ailli lui lava la tète du long et du
clarer que c'était le meilleur parti à » large (26J. Et c'est ce que Henri
prendre ; Examinatis dictis testium « Pantaléon semble le coucher au
,

et recitatis articulis erroneis in Pa- » roolle de ceux qui en cette saison


truni consessu , cardinalis Camera- » crièrent et de voix et d'escrits con-
censis , judex causas depuiatus à Con- » tre l'ambition des papes coxTup- ,

cilio , dixit ad Joannem Huss : a En « tion de l'Eglise , schismes et divi-


}> sions qui lors pulluloient grande-
(21) Vossius , dans son hypothèse, a dû trou-
fer ici une erreur de plus de six cents ans. (20) Lauiioii Hist. Gymnasii Navarrœ, p. 474»
ex Hussitœ cujusdam Èelalione, apud Bzovium,
(22) Vossius, de Sclentiis Mathemat. , p. 2i5.
ad ann. i4l5, nutn. 4?.
(î3) Il n'avait parle' que de la re'duction de
{26) Vojez ce que du Plessis-Moruay cite de
tous les parallèles de Ptolome'e à douze. Froissard , .fur celte nuitiire , dans son Mystère
(î4) Thevet, Histoire des Hommes illustres, d'Initjuilé ,_pnè. 4SC, et suiv. Edition de Sau~
(om. ril , p. 89. mur , en i6x i , in-folio.
,

AILLI. 32-
« ment ; disant qu'il a escrit un livçe zélés sectateurs après afoir troui'é ,

j)intitulé de la Réformation île L'E- dans des auteurs fort approu<^és de


» giise , lequel pourtant ne se trouve i Eglise son sentiment de la transsub-
« pas au catalogue de ses livres , qui stantiation qui était presque le seul
,

» sont en grand nombre , tant en thëo point qui l'arrêtait. Il mit quelque

d'Ailli. Quant au Catalogue des te- foit sur le Maître des Sentences, pour
moins de la vérité compile par Fia- /aire i^oir que ce cardinal propose l'o-
,

cius lUyricus on y trouve Pierre pinion de M. Descartes touchant les


,

d'Ailli , condamnant *' le dogme de la accidens de l'Eucharistie et l'accorde ,

transsubstantiation (28) et donnant ,


a^ec la d finition du concile œcunié-
au concile de Constance un projet de nique de Constance (Sa).
réformalion , selon lecjuel la cour de (K) Il composa beaucoup de litjres."]
Rome eût été privée de tant de moyens Ses Commentaires sur le Maître des
qu'elle employait pour amasser de l'ar- Sentences et les quatre Traités qui
,

gent ; les prélats eussent été obligés à ont été mis dans l'appcndix du /'as-
bien vivre et à rempiirleurs fonctions; ciculiis rerum expeterularum furent ,

la pompe des cérémonies , les fêtes su- imprimés à Strasbourg en 1490. On


perdues '^^ , l'abus des jeûnes et la , imprima au même lieu et eu même ,

canonisation des saints eussent été , temps un volume de ses Traités et


,

abolis ; le nombre des moines des , de ses Sermons. Une partie de ces
images et des temples eût été dimi- traités fut réimprimée à Douai l'an ,

nué (29). Nous pouvons croire certai- 1634, parles soins de LéandredeSaint-
nement que tous les écrits de Pierre Martin professeur en hébreu à Douai
,

ne sont pas propres à plaire à


d'Ailli Thevet assure qu'il a un livre de Pierre
la cour de Rome puisque Ton en a
,
d'Ailli achevé d'imprimer l'an mil
,

inséré trois ou quatre dans l'Appendix quatre cens dix le douziesme aoust ,

du Easciculus rerum expetendarum et au commencement que l'art d'impri-


fttgiendarum (3o). Orthuinus Gratins merie fut en usage en France dans ,

avait déjà inséré dans ce Fasciculus lequel il y c grand nombre de figures


le traité de ce cardinal de Emenda- de mathématiques (33). Cela ne peut
tione Ecclesiœ. Ce que j'ai dit tou- être; car l'imprimerie ne fut inventée
chant la diminution des moines ne qu'environ l'an 14^0 * 11 eût pu dire .

s'accorde pas avec ce que Thevet avait qu'on imprima à Louvain en 1487 , 1

ouï dire, que Pierre d'Ailli composa le Sacramentale de cet auteur , et à


un livre intitulé /e Bouclier de la Pau- Paris en 1488 (34)
. ses Quœstiones ,

vreté où il faisait l'apologie des reli-


, in sphœram mundi Jonnnis de Sacro-
gieux mendians (3i). bosco cum Commentnriis Pétri Cir-
,

(I) Les cartésiens le mettent aussi ueli Daronemis Hispani. Ses Météo-
au nombre de leurs précurseurs dans res furent imprimés à Strasbourg, l'an
la question des accidens. ] Un profes- i5o4 , et à Vienne en Autriche l'an ,

seur de Louvain , des plus opposés (32) Baillet , Vie de Descartes, tom. II , p.
à M. Descartes , devint l'un de ses plus 522.
(33) Thevet , Hommes illustres , tom. VII ,
(27I Thevet, Hommes illustres , tom. VJI ,
pag. 89.
* Joly reproche à Bayle son ignorance sur
pat;. 88.
*^JoIy observer que Barle lui-même, dans
fait ce qui concerne Vori^ine de Vimprimerie , et sa
sa remarque (/), reconnaît que d'Ailli admettait date ; mais quoique le premier produit connu de
lu transsubstantiation. l'imprimerie , ayant une date certaine soit de ,

1457 il est à croire que Vmvenlion et les pre-


(28) la Dissertation de M. AUis, à la
yorez ,

miers essais ont du pre'ce'der d'un certain novibre


tête de la Determinalio Fr. Juanois Parisiensis ,
d'années; et Bayle n'est pas remonté trop haut,
imprime'e a Londres en 1686, in 8° , p. ^i, 'J2.
en disant i44o i malgré la critique de Julr.
*^ Leclerc et Joly remarquent que , loin de
Quant à la date de ll^\o que Thevet donne a
conseiller d'abolir des fêtes , d'Ailli travaillait un Une imprimé de d\4illi, Leclerc pense
à leur multiplication , ainsi que Sajrle Va dit qu'il faut lire i4ç)o , et qu'il s'agit du trcile :

dans le texte. De Concordantiâ Astronomie" cum Tl.eologia ,

(29) Foret du Plessis , Myst. d'Iniquité , p. imprimé en ejfet cette année même à Augstourg,
.123. in-4"'.
(io) Imprime' à Londres , Pan 1690. (34) Selon Gesncr, Biblicth. ,
folio 547 ^erso,
(3i) Thevet, Hommes illiistr., piisf. 90. ce fui en i468.
.

328 AILLI.
iSog. Sa J^ie du pape Célestin /^fut Launoi en donne la liste. Il y en a qui
imprimée à Paris , l'an iSSg (35) , et contiennent la réponse à des questions
se trouve dans les Vies des Saints , bien curieuses comme , Utrùm esse :

compilées par Surius. Le titre de cet tria supposita unius naturœ sit perjec-
ouvrage fait quelque peine , parce tio Utrùm libertas creaturœ raliona-
:

3u'il donne à Pierre d'Ailli la qualité lisante et post lapsum intrinsecè sit
e confesseur de Charles V mais il j œqualis : Utrùm creaturœ rationalis
vaut incomparablement mieux, sup- conscientia erronea ejus actum excu-
poser qu'on a mis là Charles V^. , sare pnssit ? Cette dernière question
au lieu de Charles VI*. , que de dire me fait souvenir de certains écrits
qu'il y a eu un autre Pierre d'Ailli. Pos- qui ont paru en Hollande depuis quel-
scvin , qui a cru cela, s'est fort trom que temps , sur les droits de la con-
pé. Je ne vois point de mat/ère qui ait science erronée. On y a prouvé d'une
autant tenu au cœur à ce cardinal manière si démonstrative , que toute
que l'astrologie ; car, outre qu'il pré- action faite contre les lumières de la
senta au concile de Constance un écrit conscience est essentiellement mau-
sur la réforination du calendrier, il a vaise , et qu'il la faut éviter nécessai-
composé les livres suivans Tractntus : rement et indispensablement que ,

de vero Cjclo lunnri; f^igintilogiiim ceux qui ont voulu combattre cette
de Concordanlid astronomicœ t^eritatis doctrine se sont précipités dans ce
cum theologid; Tract atus de Concor- sentiment affreux qu'il ne faut pas
,

did astronomicœ l'eritatis et narralio- toujours agir selon les lumières de sa


nishistnricœ (36); Tractatus elucida- conscience ; d'oîi il s'ensuit qu'on ,

rius astronomicœ concordiœ cum theo- fait quelquefois ime bonne action en
logid et cum historicd narratione ; agissant contre les lumières de sa con-
^poiogetica Defensio astronomicœ science monstre de doctrine
: qui ,

feritutis (3^) J4lia secunda apolo-


j renverse toute la morale et en com- ,

getica Defensio ejusdem (38) ; Trac- paraison duquel le probabilisme le


tatus de Concordiâdiscordantium As- plus outré est un sentiment innocent.
tronomorum. Ce qu'il y a de rare en cela c'est que ,

Le sieur du Peyrat a'isure (Sg) que ce sont des fanatiques qui se sont je-
Bodin , en sa préface de la Démono- tés dans ce précipice , eux qui ont ,

manie des Sorciers fait mention d'un , plus d'intérêt que personne à travail-
livre composé parle cardinal d'Ailly, 1er pour les droits de L-ia conscience.
où il a soustenu qu'il n'y a pas une
(M) De rimailler en langue
(^) jy^ L vulgai-
seule démonstration nécessaire en j4ris-
re. ] Je cite en marge mon garant ,
tote hormis celle par laquelle il a dé-
,
qui assure que Pierre d'Ailli a escrit
monslré qu'il n'y avoit qu'un Dieu. Il
plusieurs i>ers francois en rithme usi-
,

y a là deux petites choses à reprendre ^ tée de son temps lesquels ont esté mis
,

car Bodin ne dit point comme du ,


en uers latins par Nicolas deClemangis
Peyrat l'insinue que Pierre d'Ailli J'en ai l'u quelques-uns
,
dit-il (4»)
, ,
ait fait un traité particulier sur cette
imprimez il y a plus de cent ans. Il
matière et il dit que cet auteur a
;
ajoute que le même auteur a escrit en
remarqué dans Aristote quelques au-
français un lit^re intitulé les sept ,
tres démonstrations quoiqu'en petit , Degrez de l'Eschelle de Pénitence ,
nombre (4o).
figurez et exposez sur les sept psalmes
(L) Quelques-uns n'ont jamais été
penitentiels , imprimé a Paris. Je
imprimés. ] Ils sont dans la bibliothè- crains que la Croix du Maine ne nous
que du collège de Navarre (40 M. de :
trompe quant à ce dernier ouvrage ;

(35) Tout ceci est tiré , ou de M. de Launoi car M. de Launoi marque positi-
,
His». Gymn. Navarr.-K, pag. 476 et suiv. , ou du vement qu'Antoine BéJard fit une
P. Labbe , de Script. Ecclesjast. , pag. i8o. version française du Traité latin de
(36) Il lefl à Bdle , l'an i4i8.
Pierre d'Ailli sur les sept Psaumes
(37) Il lajil à Cologne, au rnoix de septemb.
i4i8. Pénitentiels , et que Denvs de Harsi
(38) Faite à Cologne, au mois d^octobre i4i8.
(39) Dans ses Antiquités de la Chapelle du dans le collège d'Emmanuel. Oudin, Supplem.
lîoi de France, pag, 345. de Script. Ecclesiast., pag^. 6go.
(40) Podin, Pre'f. de la Démonomanie, p. 14.
(42) La Croix du Maine , Bibliulb. Franc. ,
(4'.' On en trouve une partie k Cambridge
, Vë- 38i.
AYRAULT. 329
imprima cette traduction à Lyoa , d'Epternacli nous apprend que ,
Fan 1544 in-i6 (43).
Voici un supplément
ippl
,

« Les vers
« français de Pierre d'Ailîi , desquels
:
Renaud l'aîné de ces quatre
t
^es a ete martyrise pour le nom
,
....
,
frè- ,
',
. ,

jj la Croix du JMaine a parlé , sont au


de Jésus-Christ qu'il a été cano- ,
'"~
» nombre de trente-deux seulement , nise, que l'Église célèbre sa fête,
' '

contiennent une courte descrip-


et
))
et qu'on lui a consacré des tem-
)) tion de la vie d'un tyran. ISicolas
en a fait une para- ples et entre autres l'église de
)) de Cle'raangis
,

» phrase en vers latins hexarattres ,


Saint-Renaud dans le pays de ,

}) imprimée avec les français de Pierre


Cologne à laquelle est annexé ,

V d'Ailli , à la fin du livre intitulé


un couvent de filles. On voit
j) de la Cour, traduit de
le 3'Iépris
0) l'espagnol de Guévare en français aussi à Cologne l'église du même
, ,

j) italien et allemand à Genève , ,


saint auprès de celle de Saint-
,

)) in-i6 chez Jean de Tournes


, en , Maurice et dans cette église ;
,
)) i6o5. La paraphrase de Clémangis l'image des quatre frères sur la
j) se voit aussi à la fin de ses épîtres
,

3) page 355 de l'édition de Leyde. A muraille. Ils sont sur le même


>j l'égard de la traduction d'Antoine cheval , et leur aîné Renaud a un
3> Bélard Antoine du Verdier page
, , diadème (*) autour de la tête ,
5i de sa Bibliothèque dit que c'est
))

5) en 1542 qu'elle fut imprimée chez


,
comme une marque de sa sain-
,

w Denys de Harsi in- 16 , à Lyon , ,


teté. On prétend qu'après avoir
" (44)'. " étéun grand guerrier sous Char-
43) Launoii Hlst. Gymnasii Navarrœ, p. 479*
lemagne il se fit moine à Colo- ,

44) ^J- de la Blonnaie, Remarques MSS. gne (c) qu'il mourut martyr , ,

et qu'à cause qu'il fit des mira-


AIMON
prince des Ardennes, ,
cles après sa mort , on lui bâtit
a été dit-on («) le père de ces
, ,
une église {d).
quatre preux que nos vieux ro-
(') Le mot d'usage est auréole , du latin
mans ont tant chantés. On les auréola, employé en cette signification mais ,

appelle ordinairement les quatre tien ironiquement par l'université' de Cra- ,

jils Aimon. Ils n'avaient qu'un covie dans ces paroles de la page 585 du ,

T. L (2. e'dit. Amst. 1726} de l'Histoire du


cheval à eux quatre , nommé concile de Constance de M. Lenfant. Si fines
Bavard. Je ne parlerais ^pas d'une '"f (r'« regni Poloniœ lanquàm vulp eculœ....-
1
• subintrare satagerent Hussitac ^ non
no segniiti
Chose qui ne passe que pour un apiid nos ac apiid vos facibus Jlamtneis ves-
conte à dormir debout, si je n'a- lili pro suis dogmatibus ignitas exciperent
.

auréolas. Veyez Me'nage au vaol /i aréole de


vais à dire que ces grotesques de
,

son Dict. Etym. Rem. crit.


nos vieux romanciers et les fa- (c Ferrarius in Catal. Saoctorum
'
ad 7 ,

januar.
bles qu'ils
, .. T-
ont écrites de nos pa-
r
ladins , ont tait irruption dans le
• • 11 ,
{d^
pag. 568.
., ^^
r
-r, .-r»
oyez yoelnUisçut. ti .
iheol., tom. rrr
III . i

sanctuaire. La superstition des


peuples
AYRAULT ( Pierre), en latin
les a introduites dans la
AErodius , lieutenant criminel
religion; et si quelqu'un avait dit
au siège présidial d'Angers , sa
à ces impertineris écrivains , Hœ patrie , naquit l'an i536. Il fit
niigœ séria ducent in tnala (b),
ses humanités et son cours de
il n'aurait pas été un mauvais de-
philosophie à Paris ensuite il ;
vin. L'histoire de Luxembourg,
fut étudier en droit à Toulouse;
composée par Jean Bertels , abbé
d'oii il passa à Bourges, pour pro-
(rt Johan. Bertels, Hist. Luxemb. in Des-
fiter des leçons de Duaréiius de ,
cript. oppidi Ckimiachi.
il Horat. de Arte Poëticâ. Cujas et de Doneau trois des ,
33o AYKAULT.
plus excellens jurisconsultes de contre lui en 1677 (a). Il fut ,

ce temps-là. Ayant pris à Bour- ferme dans le bon parti contre la


ges le degré de bachelier, il alla ligue; et il était obligé de l'être ,
revoir sa patrie, y fit quelques non-seulement par la charge qu'il
leçons publiques sur le droit civil, avait au présidial mais aussi par ,

etyplaidaquelquescauses. Ilavait celle de maître des requêtes du


alors vingt-deux ans. Il retourna duc d'Anjou qu'il avait eue con- ,

à Paris quelque temps après et jointement avec le jurisconsulte


,

y devint l'un des plus célèbres Baudouin , avant que ce prince


avocats du parlement (A). Il y montât sur le trône. La Haran-
publia , en i563, les Déclama— gue qu'il fit à ce duc faisant son
lions de Çm'ntilien, qu'il corri- entrée à Angers, le 7 de jan-
,
gea en divers endroits , et qu'il vier i^'jo^ a été imprimée avec
accompagna de notes. L'année le Discours (D) qu'il lui adressa
suivante, il fit imprimer dans la pour le louer de ses victoires et
même ville un Traité du Retrait de la restauration de l'université
lignager composé par François d'Angers. Ce discours roule prin-
,

Grimaudet avocat du roi à An- cipalement sur ce que Baudouin


,

gers , et y mit une préface de la avait dédié à ce prince deux an-


naturf. , variété et mutation des ciens panégyriques celui qu'Eu- :

loix. Il publia, en 1667 , un li- ménius avait fait de Constan tins,


vre intitulé Decretorum Re— et celui que Pacatus avait fait de
,

rumve apud diverses populos ah Théodose. Le J/^cOMA-.squ'Ayrault


omni antiquitate judicatarum. li- publia l'an 1 689 , sur la mort de
bri duo —
Accedit Tractatus de Henri Ifl et sur le scandale ,

origine et auctorilate rerum ju— qu'en avait l'Église , témoigne


dicatarum. Il l'augmenta beau- son attachement au parti de
coup dans les autres éditions (B). ce monarque. Il n'y mit ni son
Il quitta Paris l'année suivante nom ni celui de l'imprimeur.
pour aller exercer dans sa patrie M. de Thou en a parlé avec élo-
la charge de lieutenant criminel, ge {b). On a trouvé parmi les pâ-
li l'exerça avec tant d'exactitu- piers de l'auteur , la version la-
de qvie, comme un nouveau Cas- tine qu'il en avait faite. Il écri-
sius, il fut appelé l'^CMe//tf?e,? en ce temps-là un discours
<3C- vit
cusés. désordres de la où il exhortait Henri IV à se fai-
Pendant les
ligue , il exerça par intérim (C) re catholique mais de tous ses ;

la charge de président au même ouvrages celui qui l'a fait le plus,

siège , et s'en acquitta avec la connaître dans les pays étran-


même intégrité que de l'autre, gers , et surtout parmi les pro-
La ville d'Angers lui témoigna testans , est le 7>azVe </e /a pw/i-
son estime en plusieurs manières, sance paternelle (E). Il le corn-
et principalement par la charge posa pendant le procès qu'il eut
d'échevin perpétuel qu'elle lui avec les jésuites , au sujet de son
donna. Il fut fort brouillé avec
Philippe Gourreau , maître des («) ^' «« 7^' ^^"^ éditions dans la méim-
AT i i i -1
• année, à Angers la seconde plus ample nue
,

requêtes , son compatriote et il ;


l„ première Cette pièce est en latm.
publia une lettre apologétique (/,) xhuan. iiistoriar. Ub. xcr.
2 , ,

AYRAULT. 33i

fils aîné, qui avait pris l'habit de (A Il déteint l'un des plus célèbres
(A)
tcats du parlement. ] Antoine Loi-
"7'^
leur ordre (r). Il l'avait envoyé
,, j T) /. aci , en s-on Dialogue des Avocats du
, •

dans leur collège de Fans , alin parlement de Pans met notre Ay- ,

de le rendre plus capable de lui rault dans la liste des plus fameux,
succéder un jour , et il eut quel- et lui donne la prééminence sur Bodin.
après le chagrin " ^'^. ^' ^; ^'^'^^ remarque que Bodin
H" temps
que 1 "^^
^1 o d'ap-
i^ ne réussit pas dans le barreau. Voici
prendre qu ils lux avaient per- comme parle Loisel Maistre Pierre :

suadé d'entrer dans leur corps. Aymult fut aussi pourveu de l'estat
Il en fit ses plaintes au parle- ^e
lieutenant criminel à Angers, dont
J n j\ i J :i il estait et s y retira sur lu fin des
Pans /(rf)

ment de 4.
quand
et 'A. il _ •,..,. j„ p„;„,.„, j
grands jours
4.
-^
de foictiers de l an \bO'j
; , ,
,
/. ;:<;
/ '! ,
,

eut su quils lavaient tait eva- encore qu'il plaidast assez bien et doc-
der, il présenta requête au pape tentent mieux beaucoup que nefai- ,
,

et obtint des lettres de Henri III ^oit maistre Jean Bodin Angevin , ,

j- J'T? i 4-4. 1J«, quelque srande et exquise doctrine Qui


au cardinal d Est,'1protecteur des j ,^ P- car
just en lui ^^ /„„/„, „,
il ne lui succédaj ja-
. . ;

altaires de Irrance, et au marquis „j^,i en plaidoirie qu'il ait fuite (i).


de Pisani ambassadeur de cette On imprima à Paris l'an i568, quel-
, ,

couronne (e) par lesquelles let- ques plaidoyers de Pierre Ayrault (2).
,
Ils furent imprimés à Rouen, en i6i4,
tres le roi demandait très -in-
avec les notes et les additions d'un
stamment qu'on sollicitât un or- jeune jurisconsulte. M. Ménage qui ,

dre du pape pour la liberté du dit cela (3) pouvait ajouter qu'on ,

jeune garçon. Tout cela fut inu- les imprimaà Paris, en i5g8, in-8°.,
avec quelques autres opuscules de
tile. Le Traité de laPuissance pa-
,, j^ ,
-
,
. Pierre Ayrault. Les curés de Paris le
ternelle * quil adressa trois ans choisirent en i564 pour plaider leur
après à ce fils désobéissant, ne cause contre les jésuites^ cependant
fut pas plus efficace. Quoique Ay- il ne la plaida pas et peut-être que ;

cela vint de ce qu'on ne trouva


rault eût d'autres fils il ne lais- ,
pas à propos que les intérêts des cu-
sa pas de se chagriner excessive- rés fussent séparés de ceux de l'évê-
ment de la perte de celui-là. II que de Paris. C'est la conjecture du
avait épousé à Paris , en sieur du Boulai (4)- Quoi qu'il en
564 1
?
soit son plaidoyer fut rendu public,
Anne Des-Jardins , fille de Jean comme
,

je viens de le dire dans la


Des-Jardins , médecin de Fran- note (2).
çois F"". de laquelle il eut quinze
, (B) // augmenta beaucoup son livre
enfans (F) dont dix étaient en ,
dans les autres éditions.'] La seconde
édition est de Paris , en i5^3 in-8°.,
vie quand il mourut à Angers ,
,

et contient six livres. La troisième est


le 2 1 de juillet i6oi âgé de ,
in-folio, et a pour titi'e, Rerunt ab
soixante-cinq ans {J').
J'emprunte omnl antïquitate judicatarum Pan-
de M. Ménage cet article deciœ. Elle est aussi de Paris , en
(g).
i588. Après la mort de l'auteur on im-
{c) Voyez l'article suivant.
(rfl Le ig de mai i586. prima les mêmes Pandectes à Paris,
(e^ Elles sont datées du iS juillet l586. l'an i6i5, avec le petit Traité de Pa-
*
Ce Traité de la Puissaore palernelleyH/, trio Jure. Il les avait revues et corri-
dit Lee 1ère imprimé à Tours en 1 582
, in- 1 ,

de S2 /euillets. Joly rem-oie aux Mémoires (1) Loisel, apud Menag. in Testim. de P. ^ro
de Kicéron pour un catalogue plus détaillé
,
diO, ejus Vilae prjiosxis , pci^. xxvj.
des oui>rages de P. Ayrault. (2) en a XXII. Le XX'. est celui
Il y
{f) Sainte Marthe s''est trompé dans /'E- quil ai'ail prépare pour les curés de Paris contre
ïoge de Pierre Ayrault , oii il ne lui a donné les jésuites en i564.
que soixante-trois ans de vie. (3)In Vitâ Pétri yErodii pag. 26. ,

(g) Ex Vitâ Pétri iErodii ab ^gidio Me- ,


(4) In Historiâ Acadetn. Parisiens., loin. VI
uagio, ejus exjiliânepote, scripld et typis , pag. 966, npud Meoag. in Teslim. de P. ^rod.,
data Paristis , anno I0'j5 , in-l^. pag. kvij.
332 AYRAULT.
gees. M. Ménage en avait promis (5) ne'anmoins le duc d'Anjou fut sacre à
une nouvelle édition qu'il devait ac- Keims au mois de février iS^S, et il
corapagner de petites notes raargina- était censé roi de France dès le jour
les qui auraient indiqué les sources que Charles IX décéda (lo). Soyez as-
d'où Ayrault avait tiré ses exemples. sure que la Harangue et le Discours eri
L'ouvrage est fort docte Cuntinet : question parurent en iS'^o, et par
enini rcs ab nrnni antiquitate upud In- conséquent lorsque celui qu'on y louait
dos j Judœos Grœcos ,
Rnmanns , ,
n'était pas encore roi de Pologne.
Francos, allosquejudicatas (6). Celui (E) Le Truite de la Puissance pa-
qu'il fit en français de l'Ordre et in-
, ternelle.'] L'auteur l'écrivit en fran-

struction judiciaire dont les anciens çais et en latin un de ses compatrio-


:

Grecs et Romains ont usé en accusa tes nommé Jacob Frubert le tra-
, ,

tions publiques, conféré a l'usage de duisit en italien (i i). Voyons ce qu'en


"
" " cum -.»..." Ji-
nostre France, est bon et curieux. Il dit M. Ménage: Egit
"^
"
J'ugitu'o
'

fut imprimé pour la première fois à lin tanqu'am cum absente reo , hoc est
Paris, en iSyS, in-8°. La seconde édi- annotatione et programmate :

tion , qui est de Paris, en i588, in-4°' ,


Qualis poj/uled nitriena philomela sub umbrâ
fut augmentée de deux livres. La troi- Anussos querilur fœlus (12) ,
sième fut augmentée d'un livre à Pa- ,

ris, l'an iSgS, in-]". (7). Ainsi l'on- etquœ sequuntur JVntum enim tihi :

vrage comprend quatre livres. Le qua- carmen est talis Petrus jErodius
;

trième livre, qui traite des Procès amissum filium insolabililer in scrip-
faits au cadavre, aux cendres, a la tissuis queritur. f^ide quœso.... quos
mémoire , aux bestes brutes , choses ipie qnestus fundat in libro tertio Or-
inanimées , et conlumax , avait été im- dinis jutliciarii, modo Jralrem Johan-
primé à part, à Paris, en i5gi , in-8°. nem jErodium, modo Rcnatumjilium
J'ai oublié de dire que son Traité de competlans. Quis verà tam férus ac
Decrelis Rebusi'e apud dit'ersos popu- ferreus est , qui cùm querelas ejus lé-
los nb omni antiquitate judicalis fut gat in libella illo aureo et tôt laudi-
, ,

imprimé à Francfort, l'an i58o, sur bus a Stcphano Pascnsio celebratn


la première édition. Les abréviiteurs (i3), quem de Patrio Jure ad fugiti-
de Gesner n'ont connu notre Pierre vum Jilium contra jesiiitas scripstt ,
Ayrault que par cette édition d'Alle- à gejnitu et lacrimis temperare pns-
magne. Ils ont mal cru qu'il s'appe- sit?.... At non soins JErodius Jatuni
lait Paul. suum gemuit , ingemuére et alii lege ;

(C) Par intérim.] M. Ménage fait Slephiini Pascasii et Jnhannis Ho-


durer deux ans cet intérim : Et prœ- dini (i4) e« de re ad Pelrum yEro-
turce munere per biennium functus dium Epistolas. Lege Antonii Ar-
jErodius est (8) et néanmoins il dit naldi ad\^ocati Parisiensis. .,. Orutio-
;

qu'Ayrault ne fut nommé à cette char- nem pulcherrimam habitant in sena- ,

ge que le onzième de mai iSSg, et tu Parisiensi , contra jesuitas , anno


'

qu'Henri- le -Grand en pourvut un au- MDLXXXXiy


(i5). M. Ménage a
tre au commencement de l'année iSgo, rapporté dans ses remarques ce qu'An-
ineunte anno iSgo (g). toine Arnauld dit là-dessus, et ce qui
(D) Sa Harangue a été imprimée fut répondu par Pierre Barni, procu-
avec te Discours , etc.] !M. Ménage n'a reur des jésuites du collège de Cler-
pas bien marqué le temps auquel ces mont. La réponse va là, que les jésui-
deux pièces furent imprimées il dit tes ne voulurent jamais recevoir en
:

que ce fut en 1577, ^^ qu'alors le prin- France René Ayrault , bien qu'il eust
ce qui y est loué était roi de Pologne pour le moins dix-huit ans ; mais que ,
et duc d'Anjou. C'est dire assez clai- sans leur rien découvrir, il s'en alla en
rement qu'il n'était pas roi de France :

(10) CVlail le 3o lie mai iS-j^.


(5^ In VitS P. iErotlii, pag. 18.
(11 Menagii Vita P. Jîrotlii, pag. 28.
(6) Ibidem pag. 27. IF, vs. 5ii.
,
(12) Vligti. Geoigic. , lib.
(7) f
C'est ainsi qu'il nul traduire ces paroles
(i3) Korez la X'. Lettre du Livre XI' des
de M. Ménage Quem posle'a anno i.'iSS duobus
:

Lettres de Pasquier.
libris et anno i.'>98 tribut auctiorem in eddem

urbe publicanit. ^'ila Pétri iErodii, pag. 17- (i4) !H. Ménage produit la Lettre Ae Bodin,
(8 Ibidem , pag. 24.
pag. 242.
(i5) Ménage, Vita iErodii pag.
(9) Ibidem , pag- 23- ,
i"].
,

AYRA ULT. 333


Allemuf^ne, où futreceu (16;. Voyez
il du de Clermont
collège lors- ,

la ieraan|iie (A) de Tarlicle suivant.


qu'il leur mit cet enfant entre les
(F) Il eut quinze enfans. Nous des- '\

tinons un article particulier à son fils


mains qu'on ne le sollicitât en
,

aîné. Pierre Ayrault son second fils, ,


aucune manière à entrer dans
succéda aux vertus et à la charge de leur religion il leur dit qu'il
:

son père, et fut président en la séné- avait d'autres eufans à consacrer


chaussée d'Angers, conseiller de ville,
et maire. Il procura, en i6.j3 une ,
à l'Église mais qu'il destinait
;

profession en droit dans Tacadémie celui-là à remplir sa charge , et


d'Angers à Guillaume Bardai. La Ha- qu'il en voulait faire le soutien
rangue qiTil fit à .Marie de Mcdicis ,
de sa famille. On lui promit tout
mère de Louis Xlll à Angers, le 16 ,

d'octobre 1619, se voit au VF. tome ce qu'il voulut. Néanmoins , les


du Mercure français. Il fut député à grands talens de ce jeune hom-
l'assemblée des notables convoquée à me firent souhaiter aux jésuites
Rouen en 1617. Il a laissé postérité.
d'avoir un sujet de cette impor-
Jean Ayraolt, son frère, fut avocat au
parlement de Paris. Guillaume Ay- tance dans leur société de sorte ;

RACLT, leur frère, religieux de l'ordre qu'après qu'il eut étudié deux
de Saint-Benoît, docteur de Sorbon- années en rhétorique sous le pè-
ne eut beaucoup de part à l'amitié
,
re Jacques Sinuond ils lui don- ,
de Louis Servin avocat général au ,

parlement de Paris. Gcyonne Ayrault, nèrent l'habit de leur ordre en


l'une de leurs soeurs épousa Guillau- , i586. Son père , sans l'avis du-
me Ménage avocat du roi au prési-
,
quel cela s'était exécuté , fait
dial d'Angers. De ce mariage est sorti
feu M. Ménage (17), l'un des plus
beaucoup de bruit. Il les accuse
doctes hommes de France. de plagiat et les somme de lui
,

C16 Ibidem, p. aSi. rendre son enfant. Ils répon-


(17) Ex Viiâ P. iErodii. Fora la CUation(g)
dent qu'ils ne savent ce qu'il est
de Cft article.
devenu. Avrault impètre chefs
AYRAULT fils aîné (René), de monitoire, et obtient un ar-
du précédent causa un très- ,
rêt du parlement qui ordonne
grand chagrin à son père. Il na- aux jésuites du collège de Cler-
quit à Paris le 11 de novembre
mont de ne point recevoir dans
1567 et fut donné à instruire
,
leur ordre René Ayrault et de ,

aux pères jésuites (a). Pierre Ay- notifier aux autres collèges cet-
rault les estimait alors et les ai-
te défense. On n'obéit pas à cet
mait (b) et n'aurait pas accepté arrêt
,
on transporte le jeune :

de plaider contre eux pour les homme de lieu


en lieu on lui ;

curés de Paris comme il l'avait change le


,
nom on l'envoie en ;

accepté en l'année i56/{. Ayant


Lorraine, en Allemagne en Ita- ,
vu dans son fils aîné un esprit lie (A). Henri III fait agir au-
fort vif, beaucoup de mémoire,
près du pape son ambassadeur et
et plusieurs qualités aimables
le protecteur de ses affaires; Ay- ,

il pria très-instamment le pro-


rault en écrit à sa sainteté le ;

vincial des jésuites et le recteur


pape se fait montrer * le rôle
{a) Menagii Vita P .Erodii, pag. 245. de tous les jésuites du monde ;
[b) Quos tune ipse et amaùat et magni
faciehal . qiiin et eos focari Andegavum et René Ayrault revêtu d'un au-
,

ibi sedem habere aliquandà k'oIuH. Vita jEro- tre nom , ne paraît pas dans le
dii pag. 35. Voyez-en aussi la page 2l\'j
oii il cite Âyraull au livre lH de son Ordre * Leclerc demande où est la preuve de ce
judiciaire. /ail.
,, .

334 AYRA ULT.


rôle Trois ans de peines et de
(c). recteur à Reims, à Dijon , à Sens,
recherches n'ayant rien produit à Dôle , à Besançon ; il fut assis-

le père recourt à sa plume , fait tant du provincial , et procureur


un livre de la Puissance pater- de la province de Champagne , et
nelle et l'adresse à René son
,
puis de celle de Lyon à Rome.
fils (d). René y lit une réponse Enfin il mourut à la Flèche , le ;
,

mais ses supérieurs ne trouvèrent i8 de décembre 1644 (g). Son


pas à propos de la publier. On ai- père par acte passé devant no- ,

ma mieux que Richeome, pro- taire et témoins le priva de sa ,

vincial des jésuites de Paris ré- bénédiction l'an i ôgS mais il


, , ;

futât l'ouvrage de Pierre Ayrault ne persévéra pas dans sa colère


(B). Voici les aventures de René. jusqu'à sa mort , car on trouva
Il entra dans l'ordre à Trêves parmi ses papiers un écrit oii il
, ,

le 12 de juin i586 il passa en- lui donnait sa bénédiction (C).


:

suite à Fulde oîi il répéta ses


{g) Ex Vitâ P. jEiodii. Foj-es la Citation
,

études de rhétorique. Il parcou- {g) de l'article précédent.


rut l'Alleniagne , et y fut pris
En Lorraine en Allemngni; , (A)
les protestans : il alla à Ro-
,
par en Italie.'] Antoine Arnauld dans et ,

me , et y étudia un an en philo- son plaidoyer de l'an i594, exposa


sophie , sous Mutins Vitelleschi que les je'suites avaient soustrait René
Ayrault dès l'dge de quatorze ans et
(e). Il continua cette étude l'an-
,

qu'ils le tenaient en Italie et en Espa-


née suivante à Milan , et vint gne. Il ne paraît pas qu'on lui ait ja-
l'achever à Dijon {/). Ayant ré- mais fait voir TEspagne (i) et il li'e'- j

genté les classes dans la même tait guère loin de sa dix-neuvième an-
née quand il prit l'habit de jésuite.
ville pendant quatre ans , avec
(B) On aima riiieux que Richeome..
beaucoup de succès , il en sortit réjutdl l'ouurage de Pierre yljrnidt.l
lorsque les jésuites furent bannis Sa réponse n'a pas été imprimée, non
de plusieurs villes du royaume , plus que celle de René Ayrault Quia :

indecorum visuni est adi'ersiis parentes


l'an iSg'i , et s'en alla en Pié-
scriberejilios , proliibitus est h recto-
mont, oii il régenta deux ans. Il ribus suis responsionern fulgare. Igi-
vint ensuite à Avignon , et y tiir id aggressus est Ludovicus Riclieo-

étudia pendant quatre ans en mus... qiiod me docuit priuata ipsius


Renati yErodii ad ipsuni Richeomum
théologie après quoi il retour-
Epistola, cujus exemple r, quœ sua est
;

na à Rome envoyé à
, d'oii il fut humanitas , misit ad me Rom cî Pet rus
Milan pour y enseigner la rhé- Possinus presbytersocietatisJesu doc-
,

torique. Il le fit pendant quel- tissimus idenique jesuiticœ historiée ,

scriptor celeberrimus. Sed neque res-


ques années et puis il revint en ,
ponsionern suatn wulgavit Richeomus :

France. Il y passa par les plus quâ de causa nescin (^2).


illustres emplois de son ordre. Il (C) Son père laissa un écrit où il
régenta philosophie, il prêcha
la lui donnait sa bénédiction.'] Il était si-
;

gné de sa main et contenait ce qui ,


il fut préfet de collège il fut ;
suit Dieu doint sa paix son amour : ,

et sa grâce à mon fils René Ayrault.


(c) Voyez le texte de l'article précédent ,
Je lui donne bénédiction au nom
ma ,
vers lajin,
(E) de Partiale pré-
du Père , et du
Eils , et du Saint-Es-
{d) Vojez la remarque
cédent.
prit. Et je lui pardonne tout ce en
(e)a été général des jésuites.
// (i) fïi'panittmquoque petiisse faho creditutn
if) En ce temps-là le cours de philoso- , est. MenagiiVita P. >Érociii, pag. 'i-.
phie durait 3 ans. (2}Menag. , Vita P. ^rodii, pn^. 3g.
AITZEMA. 335
quoy il peut m'tn'oir offensé. Et je dilFere point de l'historien dont
prie Dieu l'assister de son bennist dans cet article (c). Léon
je parle
Saint-Esprit, quelque estât ou l'uca-
tion qu'il puisse entreprendre (3j.
d'Aitzema mourut à la Haye , le
23 de février 1669, aprësy avoir
(3) Menag. Vlta P. jErodii pag. a5n.
, ,
exercé environ 4o ans la charge

AITZEMA (Léon d'), gentil- de résident des villes anséatiques


homme de Frise, né à Doccum qui lui avait été procurée parFop-
,
PILS d'Aitze>ia son oncle rési-
l'an 1600 , a été conseiller des , ,

dent de Hollande à Hambourg


villes anséatiques , et leur rési-
(C). Notre Léon était uu fort hon-
dent à la Haye. 11 a compilé une
nête homme , officieux affable
histoire des Provinces - Unies ,
,
,

libéral envers les pauvres et


qui a eu beaucoup de débit et ,
,

très-versé dans la politique. Il


qui est d'un grand usage à ceux
parlait plusieurs langues, l'alle-
qui sont employés aux affaires
politiques car on y trouve mot
,
mand le français l'italien , , ,

l'anglais. Son père était secré-


à mot les traités de paix , les in-
taire de l'amirauté de Frise {d).
structions et les mémoires des
ambassadeurs les lettres et les Il ne sera pas inutile de remar-
,

réponses des souverains les ca-


quer qu'on a déjà vu trois volu-
,

pitulations des villes et autres ac-


mes in-folio de la continuation
tes publics, chacun en sa langue
d'Aitzema le premier s'étend :

jusqu'à 1679; '^ se-


originale, et puis traduit en fia- ^^P^^^ ^^^9
mand. C'est en cette dernière coud depuis 1679 jusqu'à 1607;
langue que cette histoire est et le troisième depuis 1687 jus-
qu'à 1692 (e). Un ministre nom-
écrite. On en a fait deux éditions
(A). Quoiqu'elle soit jjrincipale-
mé AiTZEMA , a écrit en Hauiaud

considérable à cause des sur


les Sibylles.
ment
pièces authentiques que l'auteur (c) Konig. BiLlioth., pag. ic).

(d; Elle résidait alors à Dnccum présen- •

y a ramassées avec beaucoup de tement elle resiile à Harlingen.


patience et d'application , je ne (e; Ces t-olumes sont imprimés à Amster-

voudrais pas juger du reste com- dam ; le premier en 685 le second en it)88 1 , ,

me a fait M. de VVicquefort (B). et le troisième en itigS-


J'ai ouï dire que cet historien a (A) On a fait deux éditions de son
parlé d'une manière désintéres- kistoire.lLa première comprend quin-
sée de ce qui regarde les disputes ze voluiues in-4''. qui ont été impri- ,

més Tua après l'autre le premier on :

de religion. M. Arnaud l'a cité


dernier en 1671. Le pre-
et le
1657 ,

pour une chose qui n'est pas trop mier commence à la cessation de la
avantageuse aux protestans {a). trêve qui avait été conclue par les
Valère André parle d'un Léon soins de Henri-le-Grand entre l'Espa-
gne et les Provinces-Unies et s'étend ,
Aetsma, Frison , qui fit impri- depuis Tannée 1621 jusqu'à l'année
mer ses vers latins de jeunesse à 1625. Le dernier comprend l'histoire
Franeker l'an 161 7 {b). Quel-
, de l'an 1668. La seconde édition est
ques-uns croient que ce poète ne en sept volumes in-folio qui ont été ,

imprimés en 1669 ^^ ^° 1671. Le der-


{a) Voyez/'Apologie pour les Catholiques, nier de ces volumes contient une ta-
part. II, pag. 267. ble générale des six autres , avec la
(6) Valer. Andr. Bibliotheca Belgica, pus- Ilelalion de la Paix de Munster, et un
623. traité qui a pour titre le Lion rétabli ,
336 AKA KTA.
et qui est la naiTalion des choses qui tœ rei autor habebalur omnibus qui ,

se passèrent dans les Provinces-Unies hominem norant irridontibus quod ,

en i65o et en i65i par rapport à iste heic se in^erere non dubiiaret


, ;

quelques charges importantes dont la quem prœsertlm post suscepta sacra


vacance fut remplie. Ce traité avait Romana graliœ Cœsaris omnibus mo-
déjà paru Tan iGSî, in-4°La Relation dis adrepere constabat (3),
de la Paix de Munster avait été im-
(3) Idem ibid. ,
primée en latin l'an i654-
(B) Comme a fait M. de Wicque-
fori.'] Cest d'Aitzema qu'il parle dans
(Mart^), professeur AKAKIA
les paroles que l'on va lire L'histoi- en médecine , dans l'université
: <(

» re ou le récit des affaires d'étal et de Paris , au XVP. siècle , était


,

î) de guerre^ qui a été écrite en Hol-


de Châlons en Champagne (A). Il
3> lande en quatorze ou quinze volu-
,
s'appelait Sans-Malice * mais
3> mes contient plusieurs traités ré-
, ,
;

3) solutions , et autres pièces authenti- selon la coutume d'alors, il chan-


:» quesj de sorte qu'elle peut servir gea son nom en celui â^Akakia
M comme d'inventaire à ceux qui (B), qui signifie en grec la même
)> n'ont point d'accès aux archives de

3> l'état; mais ce que l'auteur y a chose que Sans-Malice en fran-


3) ajouté du sien ne vaut pas la gazet- çais. Il le transmit à ses descen-
3) te de quelque façon qu'on le puisse dans qui l'ont toujours porté jus-
,

3) prendre. Il n'a point de style, son


qu'à cette heure. Il fit desprogrès
3) langage est tout-à-fait barbare et ,

3) ce n'est qu'un chaos que tout le


considérables à Paris, sous le pro-
3j composé de son ouvrage. Cela lui est fesseur Pierre Brissot {a) , et ap-
3> commun avec la plupart de ceux prit de lui la plupart des choses
3) qui en ce pays se mêlent d'écrire qu'il publia ensuite sur Galien (C).
, ,

j) l histoire sans ordre et sans permis-


Il fut reçu docteur en la faculté
» sion, et presque toujours sans juge-
3) ment et sans vérité (i). m Avouons de médecine de Paris , l'an i526.
que ce jugement est bien sec et bien François F""., dont il fut l'un des
désavantageux et qu'il choque bien ,
principaux médecins , le consi-
des gens.
(C) FoppiTJs d'Aitzema, son oncle ,
déra beaucoup Je ne sais point
résident de Hollande h Hambourg.'} en quelle année il devint profes-
J'ai trouvé un endroit qui le concerne seur en médecine mais il l'était ;

dans l'un des volumes de M. Pufen- au temps que Gesner publia sa


dorf. J'y ai vu qu'en i636 ce Foppius,
envoyé des Provinces-Unies à l'empe- Bibliothèque , c'est-à-dire l'an ,

reur assura dans Ratisbonne


,
que , 1545. Il mourut l'an i55i. Il
Salvius lui avait écrit que les Suédois avait pris pour armes, de gueules
voulaient commencer à négocier la
à la croix d'or accompagnée de
paix à la cour de Vienne et que Sal- ,

vius nia cela (î). Néanmoins Foppius quatre cubes aussi d'or
, avec cet-

s'empressait extrêmement à négocier te devise Quœcunque ferai for-


:

la paix mais la Suède ne le crut


:
tuna ferenda est; Faut suppor-
,

point propre à un tel ouvrage ; et


terfortune^ quoi quelle apporte.
l'on trouvait ridicule qu'il se fîtdefête
pour un tel dessein et surtout quand ,
Il pour femme Marie Chau-
prit
on songeait que depuis qu'il était veau veuve de Silvain de Mon-
,

passé dans la communion de Rome , thelon , et en eut un fils qui fut ,


ilemployait toutes sortes de moyens
Leclerc doute que Sans-Malice fut le
*
à s'insinuer dans les bonnes grâces de
nom de la famille d'Âkahia. Goujet qui, dans
l'empereur. Nec Ailznia idoneus lan-
son Mémoire sur le Collège royal de France,
toin. III pag. 37 cite les JRecherches sur
(i) Wicquefort, de l'Ambassadeur /, ,
, loin. ,

l'Origine delà Chirurgie, rapporte que l»


pag. i^î- J^oyei aussi la pagf 446-
(i) Pufendorf , de Rébus Suecicis . llb. IX. vrai nom d'Akakia était Malice.
pag- 296 "wn. 53 ail ann. 1637.
, ,
{a) Moreau , in Yilâ Brissoti.
, ,

AKA Kl A. 337
professeur en médecine , comme qu'il s'appelast auparat^ant Sans -Ma-
lice, eust mieuj fait de quitter ce
l'on va voir. Presque tous ses des-
nom féminin 'AKa.Kict, pour en prtndre
cendans ont marché dans la mê- un plus masle et qui eust du rapport
me route mais il s'en est trouvé ; a Ana.Kio;, Acacius , mots usilez par-
un qui s'est mêlé d'autre chose mjr les Grecs et les Latins. Qui est-ce
qui ne se mocqueroit de la simplicité
que de médecine (D). Ceux qui
ou bestisc de celui qui,afant pour nom
ont mis la mort de notre Martin de famille Pelé ou Vertueux
,
lour-
,
,

Akakia à l'année i6o5 , se sont neroit son nom en grec , et s'appelle-


étrangement abusés (E). Marot a roil 'KhceTTiKla. , ou "AfêTii' ? Ces raisons-
parlé de lui avec éloge ce qu'il :
là sont très-faiblis. peut avouer, On
quant à la seconde, que dans Tordre
en a dit a été cité par M. Mé- il fallait écrire, ou Acacia, ou Aka-
nage {b). kia; mais je pense qu'eflèctivcraeut
cet habile médecin signait de la der-
(b) Méaage, Orig. de la Langue Françaiie,
nière manière. A Tégard de l'autre
raison ,il est facile de voir que le

(A) Il était de Châlons en Cham- père Labbe ne dit rien qui vaille -

pagne.'] M.- Moréri n'ayant pas en- ,


car le nom masculin 'Akxxioç ne ré-
tendu ce que veut dire Catulaurtfnsis, pond pas aussi juste que le féminin
'AKaxi'o. au mot français sans malice.
a cru bonnement qu'Akakia était Ca-
talan. // etail ds Catalogne dit-il j La comparaison de pelé ou i^'ertueux ,
,

pour comble de méprise il nous est hors de propos, puisqu'il est cer-
et , ,

renvoie à Quensted qui a marque' tain que Sans-Malice n'a point la na-
,

positivement que ce médecin était de ture d^un nom adjectif, et que si un


Châlons fille dont l'éfêque se dit
,
homme qui,auiait porté le nom j^p-ec-
Peliire, eût voulu le gréciser, il eût
comte et pair de France (i),
dû prendre celui de Synulopecia plu-
{^) Il s' appelail Sans- Malice; mais... tôt que celui de Synalopecius.
il chaiigeason nom en celui d'Akakia.]
dii'erses choses sur (C) // publia
C'est ce que témoignent René iVJoreau
Galien.1 II publia, en i538*, une
dans la Vie de Sylvius et Gabriel ,
traduction latine des deux livres de
Naudé dans son Jugement sur Au-
,
Galien de Ratione curandi, et J'ac-
gustiu ^ipbus {1). Voyez aussi la Mo-
compagna d'un Commentaire (5).
the-le-Vaïer, à tapage 277 du XIl*".
tome de ses OEuvres et M. Ménage
Après cela il traduisit ï'Ars Me- ,

dica , quœ et ars parva , du même


^ ,

dans les Origines de la langue fran-


Galien. Cet ouvrage fut imprimé à
çaise (3). Le père Labbe croit que
Lyon, en i548. Il est aussi l'auteur
tout cela n'est qu'un ex post facto, ou
d'un livre imprimé à Paris, Tan i555,
allusion gentille faite après coup ou ,
sous le titre de Synopsis eorutn quœ
Lien un sobriquet qu'on lui aurait
quinque prioribus libris Galeni defa-
donné et qui aurait ensuite passé en
,
cultatibus simplicium medicamento-
nom de famille (4). Il se fonde sur
ruin continentur.
deux raisons la première est qu'AV.5txi'a
(D) Un de ses descendons se
:

mêla
signifie, non pas un homme éloigné
d'autre chose que de nudecine.'} Une
de toute malice; mais l'éloignement
lettre de Guy-Patin, datée du 33 juil-
de la malice. La seconde est que ce
let 1664 contient ces paroles « Le
médecin de François !*. aurait écrit
1 :

)) roi a fait mettre à la Bastille le


Acacia ou Akakia, s'il avait pris
,
» frère de M. Akakia, notre collègue,
un nom métamorphosé de la langue )) pour avoir écrit quelque chose qui a
grecque. Pour confirmer la première,
» déplu à M. le prince. Il avait été
il ajoute que ce médecin, s'il est urui
y> employé il n'y a pas long-temps,
,

(1) Quenst. de Paliiis Viror. Eruditoram » pour le mariage du duc d'Enguieu


pag.il. i> et avait été secrétaire de l'ambas-
*
(2) Au feuilUl O iij.

(3) A la page 4 de l'édition de Paris, en i(394, * Quoique n'*a)'anL été imprimée qu'yen i538,
in folio, [ou page 6 e'dil. de i^So] ceUe traduction est de \5i2, comme leprouic
(4) Labbe , Etymologics des mots français ,
Julr après Leclerc.
pai;. 10. (5) Gcsner. m
BibliolU. folio 5oo. ,

TOME I. ?.2
338 AKAKIA.
i)sade tle Pologne. » Tout le monde a kia , Gidlus Catalacnensis medicinœ ,

su les plaintes qu'un ami de la maison doctor et prnj'essor Luletice Paris.


d'Autriche , déguise sous le nom de Après quoi il donne le titre de quel-
Stanislaiis Lysimachus , eques polo ques livres dont Akakia de Châlons
nus , publia en i683 contre les intel- est véritablement l'auteur. Si l'on
ligences que la France entretenait avait su que Brissot , dont notre Aka-
avec le comte de Tëkéli, parle moyen kia fut disciple, n'était plus en France
d'Akakia et de du Vernai-Boucauld. l'an iSig, on n'aurait pas allongé la
Je viens de lire dans un imprimé qui
, vie de ce disciple jusqu'à l'année
a pour titre Journal d'Amsterdam
, i6o5 , ou bien on aurait dû dire quel-
(6) que ce
,
même M. Akakia
eut que chose d'une vieillesse aussi extra-
beaucoup de part aux intrigues qui ordinaire que l'aurait été celle-là. Ce
tendaient à faire tomber la couronne qui a pu tiomper l'auteur du Diarium
de Pologne sur la tête du duc de Lon- est qu'en l'année i6o5 il mourut un
gueville par la déposition du roi Mi-
,
médecin qui s'appelait Akakia- Il était
chel. On assure dans ce Journal que petit-fils du disciple de Brissot. Guy-
Tempereur en avait fait faire des plain- Patin en parle de cette manière avec
tes au roi de France et qu'il avait , sa liberté cynique Deux docteurs de :

nommé , entre autres , M. Akakia notre compagnie travaillèrent à l'Apo-


comme un des principaux conducteurs logie de Théodore Mayerne Turquet ;
de cette affaire que M. Akakia fut savoir, Seguin notre ancien, qui a
:

mis à la Bastille ; mais qitil n'en eut toujours porté les charlatans et son ,

que plus d'attention h l'intrigue qu'il beau-frère Akakia qui mourut , l an ,

m'ait commencée, et plus de loisir i6o5, de la vérole qu'il avait rappor-


pour entretenir les correspondances tée d'Italie où il était allé avec M. de ,

qu'il avait liées que ses lettres et sa Béthune ambassadeur h Rome (9). Si
: ,

négociation allèrent toujours leurtrain, notre Martin Akakia eût pu gagner un


nonobstant cet emprisonnement et tel mal au temps de cette ambassade ,
,

que l'afl'aire fut si avancée qu'il n'y il aurait été sans contredit le plus
, , ,

eut que la mort de M. de Longueville vieux paillard de l'Europe.


(-;) qui en empêchât l'exécution. Les ,,„ ^ T^rrr ,, .
, <

(9) P^iity.-LetUeVIII de la première ediuon.


médailles étaient déjà toutes prépa-
rées. Ce second emprisonnement de it/- àtt-ta /ht •

M. Akakia ne dura que cinq ou six AKAKIA v


^Martw), r«
Pansien ,

mois s'il en faut croire une personne fils du précédent , fut reçu doc-
,

que j'ai consultée depuis la lecture de teur en médecine de la faculté de


ce Journal. Cette personne m'a dit de p^^^^ y^^^
^ ^5^^ Tristan de Ros-
plus que M. Akakia eut tant de joie
de se voir choisi pour aller fomenter taing , chevalier de l'ordre , et
les troubles de la Hongrie qu'encore Amiot , évêque d'Auxerre , se
,

qu'il fût bien malade,


trouva bien- il se rendirent ses patrons (A) , et lui
tôt assez de santé pour partir. N'osant
firent donner par Charles IX ,
prendre la route d'Allemagne il s'en ,

alla en Angleterre où il s'embarqua ,


en 1674 » la charge de premier
pour la Suède d'où il se rendit par
, lecteur et professeur royal en
mer à Riga , et de là en Pologne où ,
chirurgie. Quatre ans après , il
il est mort. C'était un homme d'intri-
devint second médecin de Hen-
gue, et qui agit vivement pour la
conclusion de la paix d'Olive ri III (a). Comme il se plaisait à
(E) Ceux qui ont mis sa mort h l'an- porter des leçons fort étudiées
née i6o5 se sont abusés.l C'est ce qu'a j^ns les écoles royales et que ,
fait l auteur du Diarium Biosrapni- 1 1 •. • j 1
^ela lui prenait beaucoup de
(8)5 car voici comm
cuni (o; 5 comme fl parle
sous cette année-là : Martinus Aka temps , il craignit que la visite

des malades et les fonctions qu'il


(6) Il a paru au mois de septembre i6g3.
au passage du Rhin, le 12 de lui fallait faire à la cour ne fus-
(7) Il fut lue
juin 16*; 2. sent un fardeau trop pesant pour
(8) Ilenningus Wilte ,
professeur à. Riga , en
Hvonie. (rt) Voyez la remarque (A).
AKAKIA. 33i)
lui de sorte que pour ne pas le recueil de pareils ouvrages ,
; ,

succomber à tant de peines, il se que Scholzius fit imprimer à


démit de sa chaire de professeur, Francfort en i5q8. Il y a beau- ,

sous le boa plaisir du roi entré coup d'apparence qu'Israël Spa-


,

les mains de Jean Martin hom- chius a cru que les deux livres
,

me très-capable de cette charge de Morbis muliehribus étaient


,

comme ses écrits le témoignent un ouvrage du disciple de Bris-


(B). Mais ce Jean Martin ayant sot. C'est lui sans doute qui mit
,

bien considéré qu'elle serait in- au XxXve^Marlini Akakiœ,Medi-


compatible avec ses autres affai- ci Regii, et in imiversiiale Pari-
res s'il la voulait remplir eu cou- siensi professons înedicinœ doc-
science, la rendit à Martin Aka- tissimi, etc. L'ouvrage n'avait ja-
kia. Celui-ci disposa tout aussitôt mais été imprimé il courait en ;

de cet emploi en faveur de Pierre manuscrit. Spachius savait en gé


Seguin, son beau-fils, et mourut néral que Martin Akakia l'avait
fort peu après, l'an i588, à l'âge fait et il crut bonnement que ,

d'environ quarante-neuf ans. Il cet Akakia était le même dont le


laissa deux fils dont je vais par- public avait déjà vu des livres ;

ler, et une fille qui fut mariée à ainsi , il lui donna les qualités de
Pierre Seguin l'un des plus doc- r Akakia de Châlons et non ijas
, ,

tes médecins de la faculté de Pa- celle de professeur royal que ,

ris et qui exerça la profession l'auteur se serait donnée , s'il


,

de son beau-père dans le collège avait publié lui-même son livre.


Royal, depuis l'an i58S, jusques
(A) Tristan de Rostaing et Amiot
en iSgg. Le traité de ^Morbis _^_
/'""^"^ *^* patrons.'] Oa n'en saurait
muliehribus et les CÔnsïlia
,
donner une preuve plus convenable
Medica de notre Martin, ne sont que les paroles que je vais citer d'un
presque connus de personne que panégyrique de Henri UI p^ix dùm ;

c'est Martin Akakia qui parle) igitur


sous la fausse supposition qu'ils (

, qud
in publicd professione nos Ca-
viennent de la même main que rolus rex christianissimus Tristaiido ,

les traitésde Martin Akakia de Rostagnio équité torquato forlissi-


Châlons. Je n'ai point vu de bi- mo, et Jacobo Amjoto Allissiodoren-
sium episcopo de nobis rejerentibus
bliographe qui distingue les écrits ,

cohoneslauerat quadriennium coni-


du père d'avec les écrits du fils :
plet'erarjius ,
,

ciirn tu nos inter tuos nie-


on attribue les uns et les autres dicos allegisti et conscripsisti. Ce pa-
à Mai tin Akakia Catalaunensi. négyrique fut imprime à Paris, l'an
1 578 en voici le titre Martini Aka-
J'y aurais été trompé aussi-bien
,
; :

kiœ 'egii et medici et projessoris ob


, ,
que M. Moréri si je n'eusse re-,
suant in ordinem regiorum niediconnn
couru aux lumières de quelques cooptationem panegyricus ,
Uenrico ,

amis (C). Les deux livres de Mor- f^alesio régi christianissimo dictas.
(B) Les écrits de Jean Martin té-
bis muliebribus ont été insérés
moignent sa capacité.'] Fiene' Moreau a
dans le qu'un médecin
recueil eu soin de faire imprimer deux ouvra-
nommé fit im-
Israël Spachius ges de cet auteur Prœlectiones in li-
:

primer à Strasbourg en i5g- , ,


bruni Hippocratis Coi de Mnrbis in-
ternis à Paris, en 1687 PrœlecliO'
de divers traités touchant les ma- , ;

nés in librutn Hippocratis Coi de Aë-


ladies du sexe et pour les Con-
;
re , Aquis, et Lacis, à Paris, en
silia medica on les trouve dans
, i6.|6. 11 a rais l'éloge de l'auteur à ia
,

34o A K À KÎA.
tête du pi-emier. On voit à la tète du de prendre de nouvelles lettres l'ai'?

second quelques vers latins d'Antoine 1594. En voici la raison : pendant les
Mornac, à la louange du même Mar- guerres civiles le nombre des lecteurs
tin qui fut l'un des commissaires à
,
Toyaux se multiplia beaucoup plus
la fameuse conférence de du Perron et que la fondation ne portait j plusieurs
de du Plessis. personnes avaient obtenu subreptice-
(C) J ai recouru aux lumières de ment les provisions de cette charge.
quelques amis.'] M. le professeur Dre- Henri IV cassa une partie de ces lec-
lincourt a en la bonté de m'appren- teurs en 1594, et redonna de nouvel-
dre que Martin Akakia, auteur du les lettres à ceux qui furent retenus.
Traité de Morbis niuliebribus cite ,
Pierre Seguin fut de ceus-ci. Voilà
non-seulement Feruel et Amatus Lu- pourquoi sa promotion a été marquée
sitauus, mais aussi l'ouvrage de Scali- sous l'an iSg^ par l'auteur des Anti-
s,ex contre Cardan, et la Cosmocritice quités de Paris ; mais si cet auteur
,

de Corneille Gemma. Fernel dédia ses était exact, il ne se contenterait pas


livres à Henri II qui ne commença à
,
de dire que Pierre Seguin fut mis à
régner qu'eu i547- Amatus Lusitanus la place de Martin Akakia le ao de
composa sa centurie (i) à Rome ,
11*^. septembre i594. Il craindrait de faire
l'an i55î (2); à Pvorae, dis- je, où le juger à ses lecteurs que Martin Akakia
pape Jules IJI l'avait appelé. Le livre mourut cette même année et que ,

de Scaliger contre Cardan ne fut im- Pierre Seguin commença alors d'être
primé qu'en 1557. ^elui de Corneille professeur royal. Or, quiconque di-
Gemma fut écrit à l'occasion de l'é- rait cela débiterait deux grands men-
toile de l'an i^'ji, et ne fut imprimé songes.
<ju'en 1575. 11 faut donc que ce Martin
Akakia ait été en vie l'an i575. Les AKAKIA (Marto) , fils du
xemarques de M. Dreliucourt que l'on ,
précédent , fut reçu docteur en
-vientde lire , le prouvent manifeste-
ment. Or, comme j'avais lu que Mar-
médecine à Paris le premier de
,

tin Akakia était professeur royal en sa licence, en i5g8. Il devint


médecine dès l'an 1577 et que Pierre , professeur royal en chirurgie
Seguin fut mis à sa place le 20 de sep- l'année d'après , par la démission
tembre iSq^ (3), je souhaitai de sa-
voir ce que Guillaume du Val a dit là-
de Pierre Seguin , son beau-frè-
dessus dans son Catalogue des profes- fit un voyage
re {a). Il à Rome,
seurs du collège Royal, Je l'ai su par et mourut de maladie à Paris ,
le moyen de M. Pinsson des Riolles
sans laisser postérité, l'an i6o5.
(4) ,
qui a pris la peine , plus obli-
le
geamment du momie, de ra'envoyer Il est enterré avec son pèreà ,

plusieurs particularités concernant les St. -Germain de l'Auxerrois. Son


ylkakia. Il m'a fait savoir, entre au- frère Jean Akakia, promu au doc-
tres choses, 1°. que Martin Akakia ,
torat en médecine à Paris , le
,
de Châlons, médecin de François P"". ,
mourut l'an i55i. De ce fait, et des premier de sa licence , l'an 1 6 1 2
remarques de M. Drelincourt il ré- , lut médecin de Louis XIII et ,

sulte nécessairement que l'auteur du mourut en Savoie, l'an i63o. Il


livre de Morbis niuliebribus n'est pas
laissa plusieurs enfans (A).
Mnrtin Akakia Catalaunensis ; 2°.
qu'il est bien vrai que Pierre Seguin (d) Il se démit de sa charge, ayant étéfait
fut pourvu dès l'année i588 de la lecteur royal en médecine, le lo septembre
charge de lecteur royal en cliirurgie, 1599 par la démission de Jean Durel.
,

par la démission de Martin Akakia


(A) Jean Akakia laissa plusieurs
son beau-père mais qu'il eut besoin
5
enfnns.] 1°. Martin Akakia , profes-
(i) C'est celle ou'Alalia cUe, sans la dési- seur royal en chirurgie (i) qui se dé- ,
gner; mais ce qu d ciie se trouve Ceatur. II
Curatione XXXIX mit de sa charge en faveur de Mathu-
pag. 187.
,
rin Denyau, et mourut quelques au-
(2) Il le dit lui-même pag. 236. ,

(3) Antiquités de Paris de du Breul , pag. 568.


(1) Il Ve'iail déjà lorsque Guillaume du Vol
(4) Afocat au Parlement de Paris. publia son Catalogue, en j644'
AKIBA. 341
nées aprè*, en 1677, laissant un fils (b). Il ne se contenta pas de faire
qui a été commis du contrôle général g^^.gj.^ Samuel avait
j^^j ^^
";"'"'"' 4 '"' ^^
d finances, et une fille mariée à
le Vayer do Boutigni , conseiller
*ait deux premiers rois
envers les
"
'
au parlement de "
Paris. 2".
" Roger Aka- '
des Juifs je veux dire de l'oin-
,

RiA : c\\st l'homme d'intrigue dont dre (c) il voulut de jîlus faire la
;

j'ai parlé ci-dessus dans la remarque fonction de son écuyer {d). Les
(D) du premier Akar.ia. 3°. Charles
troupes que l'empereur Adrien
Akaria ecclésiastique fort pieux at-
, ,

taché à Port-Royal, l^^. Simon Akaria ,


envoya contre les Juifs, qui sous ,

dit du Plessis agent des dames de


, la conduite de ce faux Messie y.
Port-Royal. 5°. N. Akaria, connu sous avaient commis des massacres
le nom de M. du Lac. 11 prend soin de
l'édition des livres de feu M. de Saci
épouvantables , exterminèrent
sur rÉcriture. 11 y a eu d'autres en- cette faction. Akiba fut pris, et
fans de Jean Akakia , outre ces cinq. puni du dernier supplice avec
beaucoup de cruauté (e). On lui
AKIBA, fameux rabbin, a fleu- déchira la chair avec des peignes
ri peu après que Tite eut ruiné de fer mais de telle sorte qu'on ,

la ville de Jérusalem. Il n'était faisait durer la peine, et qu'on ne


juif que du côté de sa mère et le fit mourir qu'à petit feu ,
[f).
l'on prétend que son père descen- Il vécut six vingts ans, et fut en-
dait de Sisera général d'armée terré avec sa femme dans une
,

de Jabin roi de Tyr. Akiba vé- caverne, sur une montagne qui
,

cut à la campagne jusqu'à l'âge n'est pas loin de Tibériade. Ses


de quarante ans et n'y eut pas vingt-quatre mille disciples fu-
,

un emploi fort honorable, puis- rent enterrés au-dessous de lui


qu'il
y gardait les troupeaux de sur la même montagne {g). Je
Galba Schwa , riche bourgeois de rapporte ces choses sans préten-
Jérusalem. Enfin il entreprit d'é- dre qu'on les croie toutes. On s'i-
tudier, à l'instigation de la fille magine qu'il a supposé un ou-
de son maître laquelle lui pro- vrage au patriarche Abraham (A).
,

mit de l'épouser s'il faisait de Quelques-uns lui attribuent un


,

grands progrès dans les sciences, attentat encore plus condamna-


il s'appliqua si fortement à l'é- ble que celui-là c'est d'avoir al- :

tude pendant les vingt-quatre ans téré le texte hébreu de la Bible


qu'il passa aux académies , qu'a- (B) afin de pouvoir répondre à ,

près cela il sévit environné d'une une objection des chrétiens (C).
foule de disciples, comme un des Les juifs lui donnent de grands
plus grands maîtres qui eussent éloges (D) , et le regardent com-
été en Israël. Il avait jusqu'à me celui qui leur a appris toute
vingt-quatre mille écoliers. Il se
{b) Vide Joh. àLeat, Schediasma Histori-
déclara pour l'imposteur Bar-co- de Pseudo-Mes- ro-Pliilologicum Judaeoruni
chebas {a) et soutint que c'était
, siis pag. 9.
,

(c) Ibidem png. 1^.


de lui qu'il fallait entendre ces ,

(d) Ibidem pag. 9 et l5. ,

paroles deBalaam une étoile sor- , {e) Ibidem, pag. ït\, ex Tractalu Talmu-
Eruf., yb/. 21.
tira de Jacob et qu'on avait en ,
dico .

[fj Lent, (le Pseudo-Messiis, pag. i5, ex


sa personne le véritable Messie Tractalu Taliniidico Berachos.yb/. 61.
(g) Ibidem, pag. i5, ex autore libelli
de de Cippis ab Hortingero editi et latine
(a) Ce mnt signifie en hébreu , Fils , .

l'Etoile. Iranslati.
, ,

342 AK IBA.
non écrite (E). La remar-
la loi gie de la faculté de Paris, s'est rangé au
petit nombre. a débité, entre autres
Il
que que nous faisons là -dessus
choses ,
que les Juifs ont altéré le texte
contiendra quelques particulari- hébreu dans le temps qui a coulé de-
té» de sa vie. S'il fallait juger de puis la ruine de Jérusalem sous Tite ,

ses leçons par ses préceptes de jusques à la douzième année de l'em-


pereur Adrien (3). Il le prouve par la
garde-robe (F) , on aurait lieu de
version d Aquila publiée l'an douze ,
les traiter de ridicules. de cet empereur, et assez conforme
au texte hébreu d'aujourd'hui. Or
(A) On s'imagine qu'il a supposé
comme cet Aquila , en passant du
un outrage au pntr. Abraham.'] Ce li-
christianisme au judaïsme, se mit
vre* est intitiûé Seplier Jezirah, c'est- sous la discipline d'Akiba, il paraît
à-dire, le Litre de la Création. Voyez
fort vraisemblable au père Pezron ,
la remarque (E) de l'article Abraham ,
qu'il faut imputer à ce rabbin cette
et ajoutez-y ce supplément. Lambe-
altération de l'Ecriture. Il est certain
cius ne devait pas dire que ce livre de
qu'Akiba était alors en grande estime
la Création fut imprime' à Maiitoue
parmi les JuiJ's, et surtout parmi ceux
la première tois (i) ; car l'édition de
de la Palestine ; car il fut environ
Mantoue in-4°- accompagnée du
, ,
quarante ans le maître du collège qu'ils
commentaire d'Abraham Ben-Dior avaient a Jabné , ou a Tibériade,
et de celui de plusieurs autres rabbins,
proche du lac de Genezareth (4)
dont vous trouverez les noms à la // afait beaucoup de disciples passait
page 536 de l'Histoire critique du pour le plus savant d'entre les JuiJ's ,
,

Vieux Testament avait été précédée ,


et aidait tant de créance dans leur es-
par l'édition de Paris, eu iSSa, in-S". prit, que ce fut lui qui déclara que
Le même livre a été imprimé à Bâie , Barcochebas était le Messie (5).
in-folio, l'an 1587, avec plusieurs au-
(C) Afin de pouvoir répondre à une
tres de même trempe. Il est d'un
objection des chrétiens « Jamais les ."]
grand poids chez les cabalistes ils :

» chrétiens ne disputèrent contre les


s'en servent à faire des miracles , di-
'> Juifs plus fortement qu'en
sent-ils (2). ce temps-
" là, dit le même auteur (6), etja-
(B) On
l'accuse d'avoir altéré le
" mais aussi ils ne les combattirent
texte hébreu de la Bible.'] Cette allé-
w plus efEcacement. Car ils ne fai-
ration se rapporte à l'âge qu'avaient
w saient que leur montrer d'un côté
les patriarches, lorsqu'il leur naissait
» les Evangiles et de l'autre les rui-
des enfans. Personne n'ignore qu'en ,

'> nesde Jérusalem, qui étaient devant


cette année-là ils étaient plus vieux
" leurs yeux pour les convaincre que
selon la Bible des Septante , que selon ,

la Cible Hébraïque. Adam, par exem-


» Jésus-Christ qui avait si clairement
,

» prédit sa désolation, était le pro-


ple , si nous suivons le texte hébreu ,
» phète que Moïse avait promis
avait cent trente ans , lorsque sa
femme accoucha de Seth mais, selon
•))Mais ils les pressaient vivement par
:,

» leurs propres traditions , qui por-


la version des Septante, il était alors
dans sa deux cent trentième année. )) taient que le Christ se manifesterait
» après le cours d'environ six mille
La plupart des théologiens veulent
» ans en leur montrant que ce nom-
qu'on préfère le texte hébreu au texte ,

grec. Ceux qui tiennent l'autre parti


)) bre d'années était accompli. Cela
sont en petit nombre 5 mais en récom- 5) les embarrassait étrangement et •

pense, ce ne sont pour 1 ordinaire que )) c'est sans doute la raison pour-
des savans d'élite. Le pèi'e Dom Paul » quoi il est dit dans le Talmud ,
w qu'Akiba et Samsai supputaient
Pezvon , religieux de l'étroite obser-
vance de Cîteaux, etdocteur en théolo- M les années (7) dont on tirait con- ,

» tre eux de si puissans argumens. «


* Joly reproche h Bayle de donner le titre de
Livre à un opuscule i/ui, bien t/uen cinq chapi- (3) Pezron , de l'Antiquité des Temps , chap.
tres , est reiifermr' en trois pages de f;ros ca- XVI, p. 28g. Edit, de Paris , en 1687, in-4°.
raclères ,
dans les Arlis cabalisticfe Scriptores. (4) L'a même pag. ,
290.
(i) LambeciiHistor. Litterari» Prodiom.,^fZ^. (5) Là même pag. ,
291.
5H, apud Placciiiin de Pseudonymis, pag. i34. (G) La même.
(2) Placcjus , ibid. (7) Taliniicl , in Trattatu de Synei'rio.
ALABASTER. 343
Il est certain que judaïques, la même année que Joseplie
les juifs pouvaient
répondre à l'objection des six mille acheva ses Antiquités ; qu'il occupa
ans, si la Bible était telle que nous cette place durant quarante ans; qu'il
l'avons aujourd'hui ; car il s'en faut est très-souvent cité dans le Pirhe-
bien qu'elle ne nous donne ce nombre Elitzer; et qu'il souhaitait la damna-
d'années depuis Adam jusqu'à Jésus- tion étemelle à tous ceux qui liraient
Christ. les ouvrages des chrétiens.
(D) Les juifs lui donnent de grands (F) Ses préceptes de garde-robe.^ La
cloges.'] Ils Vappelaient Sethumtaah nation judaïque a été livrée à un tel
l'Authentique. Il fau-
(8j, c'est-à-dire, esprit de puériles et de chimériques
tirait un volume tout entier, dit l'un observances, que leurs plus" graves
d'eux (9) si Ton voulaitparler digne-
,
docteurs ont étendu le Rituel jusques
ment de lui. Son nom , dit un autre, aux actions les plus machinales, com-
a parcouru tout Tunivers , et nous me est celle d'aller au privé. Malheur
avons reçu de sa bouche toute la loi à qui ne sait pas bien s'orienler; car
orale Hujiis nomen ( inquit Autor
: les quatre points cardinaux de l'hori-
Libri Zemach David ) exiit ah uno zon ne sont pas également favorables.
extrdmo mundl usque ad aliud , atque Je ne puis dire qu'en latin le reste de
lotam legem oralem ex ejus ore acce- leurs ridicules superstitions. Dixii R.
pimus (10). Akibn, ingressus sum aliquandô post
(E) Et croient qu'il leur a appris rabbi Josuani in sedis secretœ locum ,
toute la loi non écrite. 1 Voyez le pas- et tria ab eo didici. Didici 1°. qwjd
sage qu'on vient de citer, et le livre tion i^ersus orientent etoccidentem, sed
que le père Paul Pezron a publié à i^ersusseptentrionem et austrujii , con-
Paris, l'an 1691 (n)- ^° y trouve ifertere nos debeaiuus. Didici 2°. quod
(12} que Rabbi Akiba, fils de Joseph,
,
non in pedes erectum, sed jnni consi-
cst le premier compilateur des Deu- denteir se relegere liceat. Didici 3°.
teroses ou des traditions judaïques
,
,
quod podex non dextrâ sed sinislrâ
et le chef des tradilionnaires ; qu'il ra- nianu absteigendus sit. Ad hœc obje-
massa les traditions qu'Hillcl, Ben Uasas usque adeô i>erè
Siméon, cit ibi ;

et autres anciens docteurs, avaient perfricuisti fronlem erga magistrum


inventées qu'il y en ajouta d'autres tuum ut cacantern observares ? Res-
j

de son invention qu'elles eurent cours pondit ille legis hœc arcana sunt ad
;
, ,

toutes ensemble jusqu'à la fin du V^. quœ discenda id necessariô mihi agen-
siècle, auquel temps on yen joignit dumj'uit(i'j). Voilà un merveilleux
d'autres, dont le Talmud fut com- docteur, qui, même sur sa chaise
posé; qu' Akiba (i3} se servit du rab- percée expliquait sans dire mot les
,

bin Meir , le plus célèbre de tous ses mystères de la loi.


disciples, pour rédiger par écrit une ,,-„-,..,, ,„ , ^,
partie de ces traditions dont on a de- q^\ -^^^^ Lent pag. 10. "^
,

puis composé la Misne (i4),* qu il fut


assesseur du patriarche (i5j, et le maî- ALABASTER ( GUILLAUME ) ,
tredAnuila, et du rabbin José, qui est ., , • 1 . •. tt j
.

l'auteur de la Grande Chronique des


_;
tliéolcgien anglais, naquit a Had-
Juifs (16) ;
qu'il devint chef des écoles ley, dans le comté de Suffolk. Il
,„,„.. , ,T J Ti J nf •• fut un des docteurs du collège de
(8) f^iûe Jo. a Lent, de Pseudo-Messiis, p. g. -i
. „ . , , 1
-i
(9) Zacutus in jnchasiii , pag. 66, apud laTmiitc à Cambridge, et il ac-
^7-) ^ofis?mbiioib. ,
pag. ^g.
compagna le comte d'Essex en ,

(il) Intitule, Défense de l'Aniiquité des qualité de chapelain, à l'expédi-


Temps
(12) Pag. Gi. tion de Cadix sous le règne d'E- ,
(.3)P,7^.63, eaTzemacbDavid.,p«g.99.
(14^ Les Juifs prétendent i]ue le rabbin Juda
]isabeth. veut quc
_
fcs pre- Ou
_ ^

qui la compila, naquit le même jour qu'KV\h3 mièrCS pCllSeeS de cliangCr de TC-
H. Juda princeps
otirut, R.
motirut, illo die quo
pr.nceps natus est lUo qiio ^^ •
i i • * • '

obiit R. Akiba de quo ajunt, sol exortus est et


,
hgion lui soient venues, pour » e-
sol occidit. l'oyez Pezron , Défense de l'Anti-
tre laissé éblouir à la pompe des
quité des Temps pag. -o. ,

(î5) Nerva permit aux Juifs de se choisir un églises de la communion romaine


patriarche de leur nation.
(16) Ejc Hieronymo in cap. VIII Isaiae. et au respect dont il lui sembla
344 ALABASTER.
que les prêtres sont honorés et dans les remarques ce qu'ils en
;

qu'ayant paru chancelant il ait pensèrent et comment il se ti-


, ,

trouvé des personnes qui mena- rait de l'objection que l'on fait
fièrent ces dispositions, et qui sur les trois jours et les trois nuits
profitèrent de telle sorte des plain- que Jésus-Christ devait être dans
tes qu'il faisait d'avoir été peu le ventre de la terre comme Jo-
avancé en Angleterre qu'il n'hé- nas au ventre de la baleine (b)- Je
,

sita plus à passer dans le papis- ne dois point oublier qu'on fai-
me, dès qu'il eut bien considéré sait un très-grand cas de ses vers,
que l'espérance d'un meilleur II fit une tragédie latine intitu- ,

avancement ne serait pas trop lée /loxama, dont la représenta-


bien fondée. Quoi qu'il en soit tion dans un collège de Cam-
,

il s'agrégea à la communion ro- bridge fut accompagnée d'un ac-


maine et n'y trouva point ce qu'il cident très-notabie (cj. Il y eut
avait espéré. Il s'en dégoûta bien- une dame qui fut si épouvantée
tôt: il ne s'accommoda point d'u- du dernier mot de la tragédie ,
nediscipline qui ne lui passait en Seqiiar, Sequar, tant il fut pro-
compte aucun des degrés oii il nonce d'un air furieux, qu'elle
était déjà monté. Apparemment en perdit l'esprit pour toute sa
il ne s'accommodait pas mieux de vie. Alabaster vivait encore en

ce culte des créatures, que les pro- i63o. Son Apparalus in revela-
testans sont accoutumés de regar- tionem Jesit Christi fut imprimé
der avec horreur ainsi il repassa à Anvers l'an i6o;y. Quant au
;

en Angleterre, pour y reprendre Spiraculiim luharum seu Fons ,

sa première religion. Il y obtint spiritualium expositionum ex


un canonicat dans l'église de œquivocis Pentaglotti {d) signi—
Saint-Paul , et puis la cure de Jicationibus et son Eccesponsus ,

Tharfield dans la province de venit^seulubapulchritudinis^hoc


,

Hartford. Il entendait fort bien est démons Ira tio qitod non sit il-
îa langue hébraïque mais il se licitum nec impossibile compu—
,

gâta l'esprit par l'étude de la ca- tare durationem mundi et tem—


baie dont il s'entêta. On en vit pus seciindi advenlùs Christi, ils
des preuves dans le sermon qu'il sont imprimés à Londres (e). On
fit quand il fut reçu docteur en peut juger par ces seuls titres
théologie à Cambridge. Il prit quel était le goiit du personnage ;
pour texte le commencement du mais on en jugera mieux par les
premier livre des Chroniques , paroles d'André Rivet que je ci- ,

Adam, Seth Enos ; et, après terai (B). Il ne faut pas oublier
,

avoir touché le sens littéral , il se son Lexicon Hebraicum in-fo- ,

jeta dans le mystique soutint lio. Je n'ai point parlé des Mo-
,

qu'Adam signifiait là malheur et tifs de conversion , qu'il publia


misère, et ainsi des autres [a), après avoir embrassé le catholi-
Sa méthode d'expliquer l'Écri- i^b) Vojez la remar<,rce {k).
ture ne fut point au goût des ca- (c) Fuller, Wortlues of England.
tholiques romains (A; je dirai : {d) Cest ainsi que poi-ie le Catalogue
d'Oxford. IlJ'allail dire Penlateuchi.
(a) Ex libro Fulleri, ctii lilultis WortUics ie) J'ojcz le Catalogue de la Bibliothèque
of England. d'Oxford.
,
,, ,

AL AB ASTER. 345
cisme : on sait assez que c'est la "forcer la tant il ufoit d'int-
t'érité,

coutume de ceux qui chang^ent « patience de laisser ses disciples dé-


'> solez. Je dis que cette invention
de religion. Cette coutume était » faict tort à l'Escrifure sainte, d'au-
jnênie plus en vogue en ce temps- » tant qu'elle est trop contraincte et
là qu'aujourd'hui. Le public n'a- >' sophistiquée et ressemble juste-
,

vait pas encore eu le temps de se )) ment les fantaisies des rabbins ; et


') partant, ce n'est pas sans sujet que
dcgoiiter de cette sorte de livres. » le livre d'Alabaster a esté condamné
Celui d'Alabaster fut réfuté par « à Rome: mais il fut si idolastre de
Roger Fenton {f). » ses inventions, qu'il fît encores pis
)' que Héliodore pource qu'il quitta,

[f',Sa réponse est intitulée. An Answer to » sa religion pour ne quitter pas ses
,
VV.Alabasler's Molives. Zonrfon, iSgQ, in-^". » grotesques dangereuses qu'il a faits
(A) Sa méthode d expliquer l'Ecri-
)> sur l'Écriture sainte (2). » Joignons
ture ne fut point du godi des catholi-
le jugement d'un jésuite du Pays-Bas
ques romains.} François Garasse, jé- à celui de ce jésuite français. Bonfre-
rius, ayant condamné ceux ([iri par
suite après avoir rapporté une opi-
,
les machines de la cabale trouvent
nioQ assez grotesque d'Isidore de
Peluse (i), continue ainsi « L'expo- tout dans chaque passage de l'Écriture,
:

>' sitiou d'Alabaster est encores plus poursuit ainsi Quod nuper fecit in-
:

sulsè nimis et irreligiosè Guilielmus


» esloignée du sens commun ; car il
" s'en va ravaudant sur des fantaisies suo Apparatu ex
Alabaster qui in , illo

" rabbinesques, qui sont à la vérité inanibiis ne hujusmodi fundamentis ,

« plaisantes, si elles estoient aussi so- dicam quisquiliis conalus est nohis ,

" lidement fondées, comme elles sont suam mysticam theologiam, et ( ità
" subtilement controuvées. 11 dit en ipse vocat) interiorem Scripturœ sen-
" son Apparat, ch. ix, que Jonas et sum ad medullam ( re ipsd aliud nihil
» N S ont demeuré ponctuellement quam deliramenta et somnia) expri-
" trois jours et trois niiicts, l'un dans mere. Qtid ex re malè audiit et Romœ
» le ventre de la terre , et l'autre censoriam Ecclesiœ i-'irgulam merito
» dans le ventre de la baleine , en la expertus est. Quis enim ferat quem-
» façon qui s'ensuit. Jonas , dit-il piam in re tam séria, Scripturœ in-
»yii< porté jusques au centre du mon- quam interpretatione , pro probatis
» de , comme il le dépose luj-mesme niercibus uendere qiiœ ipse pariim sano
:

î> Ad extrema montium descend! , cerebro delirârit (3) ? Il rapporte en-


'> terrae vectes circumdederunt me. suite quelques exemples des explica-
» Or est-il, qu'estant en cet endroit, tions chimériques de cet homme.
)> il avoil le jour et la nuict tout a Nous entendrons bientôt un protes-
» la fois ; car regardant fers nostre tant qui reproche aux catholiques
» hémisphère, il ai'oil le jour en face romains d'avoir toléré les visions de
î> et la nuict à dos et puis le lende- cet Alabaster.
:

» maintout , au contraire ; de façon J'ai été averti par un habile homme


» que n''ayant que demeuré un jour et que les lecteurs n'aiment pas qu'on
» demi, il y a demeuré trois jours en- leur indique en général qu'un tel ou
» tiers , d'autant qu'il faut doubler un tel ont avancé une opinion chimé-
» l'espace, pource qu il ai'oit tout à la rique ; cela réveille leur curiosité : ils
•»fois ce que nous aidons successive- voudraient la contenter sur-le-champ,
)• ment. Ainsi, nostre Seigneur estant et quelquefois même
sans être obligés
» dans le ventre de la terre, a eu d'allerprendre un autre livre qu'ils
))comme Jonas le jour et la nuict ont dans leur cabinet. Cet habile hom-
» tout a la fois d'autant que son âme
; me aurait donc voulu ou que je ,

» s'en est allée jusques au centre de la n'eusse rien dit d'Isidore de Peluse
» terre, afin auoir le jour d'un coslé
d""
(2) Garasse , Doctrine curieuse , imprimée à
» et la nuict de l'autre et par ainsi ,
Paris, chez Chapelel, l'an lôîS, in-4". , pag.
» accourcir le terme de sa demeure sans 5qi, 594.
(3) Bonfrerius, danr les Prole'gomènes de son
f') yous la tramerez à la fin de celle re- Commentaire sur imprime' en
le Pentatcuque ,
marque. lO-^',. i-i-Col.
, ,

34(5 ALABASTER.
ou qu'ayant marqué en général, que tionera Christi in qno profiteUir se
,

son opinion était grotesque je l'eusse , novam admirabilem raiionem af-


et
rapportée vu principalement que
, J'erre investigandi Prophetiarum mys-
le livre de Garasse ne se trouve guère teria ex Scripturâ se ipsam interpré-
dans le cabinet des particuliers. Je tante. Ibi noi'am Cabbalain instituit,
profite de cet avis ^ j'en sais par expé- ex qud quidlibet ex quolibet educit ,

rience les fondemens et c'est pour- : et niutatis uel int^ersis mit separatis
quoi , en plusieurs autres rencontres et disjunciis Ebrœorum focabuloruin
j'ai mieux aimé joindre des queues à litterisaut syllabis , l'tl etiain in iis-
mes Commentaires qu'exciter en ,
dem l'ariorum mimerorum ratione
vain l'avidité des lecteurs. Isidore de excogitntd , noi'is eliam signijica-
Peluse pour trouver le nombre com-
,
tionibus conlra grammaticœ rationeni
plet, a supposé que les ténèbres de la assignatis , diuersis nominibus aut
passion doivent étie prises pour une omnia pen^ertit; et ipii adeb
i'erbis
nuit, et que le retour de la lumière commenluTU placet ut quanwis sœpè ,

jusques au coucher du soleil doit être , excipiat se nolle prœjudicare lalinœ


pris pour un jour. Lisez ce qui suit : uersioni , ciini tanien t'ident ex ed nul-
« Je respons qu'il est vrai que ce pas- lis fidiculis sensuni queni sibi proponit
» sage (4) a bien donné de la peine passe erui, non uerelur dicerepag. 6i,
)) pour l'accorder avec la vérité de Deum Christi et Religionis Christianse
}) l'histoire, et que c'a esté un des prin- mysteria pcr illam verborum formara
3> cipaux argumens dont Julian l'Apos- in Ebrœo legis codice expi'essisse , quœ
5) fat a tasché de renverser la yérité sensum carnalem et à divinâ mente
M de l'Evangile mais qu'il n'est point ; alienum lectori prima fronte oflérret,
» si désespéré, qu'on n'en tire bien atque ità voluisse ut in Ecclesiâ Chris-
» une vraye et naturelle exposition , tianâ nulla passîra legeretur -versio
» sans recourir aux fantaisies : ce que quàm quœ secundùni Èbrœorum ver-
3) quelques-uns ont faict à la bonne borum corticem conciperetur , ut hoc
3) foy comme nous avons veu cy-
, modo sapientia divina non esset cuivis
" dessus touchant l'heure de la resur- profano obvia. Sed postea idem, per
» rection. S. Isidore de, Peluse, au totum illud opus it'a sapientiani illam
» premier livre de ses Epistres , en dii^inam ex Scripturœ , si Deo placet
j) l'Epistre cxiv en rapporte uneexpo- , penetralibus fiaurit , ut ne ulli quidem
)) sition nouvelle , en ces termes Sic : hactenîis ex Patribus sanctissinns , t^el
j) habeto; sextâ hord Parasceues in unius loci talis inlerpretatio in mentem
3) crucem actus est Dominus , ah hdc unquam uenerit, ne ipsis quidem om-
» hord usque ad nonani tenebrœ exsti- lùsciis Ponlificibus. M. Rivet , ayant
» terunt ; has tunoctem intellige: rur- donné deux exemples des visions do
j) stis hord nond lux , hœc tu pro die ce personnage (7) , continue ainsi son
3) habe nox rursùni Parasceves tiini
: ; discours Alia hujus farinœ multa ,
;

n dies Sabbathi tîim nox Sabbathi , pag. 5"] et seqq. afferuntur à nugatore
n Dominici diei : Suyvant cette expo blasphemo , quibus syllabas unius no-
» sition, il est vray que Jésus-Christ minis et uerbi seorslm accipiens , et h
1) demeura trois jours et trois nuicts sud radiée dii'eUens , omnia sursùm
» dans les entrailles de la terre: mais deorsùm uertit. Et tarnen in regno
w ce sont des jours et des nuicts ré- Pontificio toleratur hœc noi^itas, ubi
» duictes au petit pied (5).w simplex scripturœ ex ipsâ Scripturâ
(B) On jugera de son goût par les interpretatio hœreseos insimulatur.Sed
paroles d' André Rivet, que je citerai.'] de his hacteniis. f^ideant Pontijicii
Anno 1607 , dit-il (6) , quidam Pon- an suo Alabaslro non debeant nigrum
tificius Anglus , Guilielmus Alabas- prœfigere thêta nos hominis insolen-
:

trus , edidit Anti^erpiœ librum cui tissimam audaciam deleslamur etsi ,

tituluni Jecit , Apparatus in Revela- eumjesuita Possei^inus suis Catholicis


Celui du chapitre XII de saint Matthieu,
Scriptoribus inseruerit Appar. Sacri ,
(4)
ou il est dit que Je'suS'Christ devait demeurer Tomo primo. Notez 1°. Que l'ouvrage :

ilans le ventre de la terre trois jours et trois dont ceci est tiré parut pour la })re-
nuits.
(5) Garasse , Doctrine curieuse, p. Sgz, SgS. (j) Vun est sur le verset 9 du chap. XXXVII
(6) Riveti Isagoge ad Scripturam Sacraiu , de la Genèse , Vautre-, sur le venel 8 du chap.
cap. Xy , Operum toin. Il ,
pag. 937. XL du même livre.
ALAINS. 347
mière en 1626, et que l'édition
fois sien. Ce fut alors que Vologèses ,
in-folio, dont je me sers, imprimée roi des Parlhes fit prier cet em
,
Tan 1632 avait été revue corrigée,
, ,

2°. que le
pereur de le secourir contre les
et augmentée par l'auteur :

livre d'Alabasler avait été condamné Alains , et de lui envoyer pour


à Rome, le 3o de janvier 1610; et que général un de SCS fils : sur quoi
l'auteur était revenu au giron de lé- Dnmitipn fit
Domitien fit tnnt <;r.n
tout «nssihlR
son possible
^lise anglicane depuis assez long-
pourobtenircettecommission(c).
temps, lors de la première édition du
livre de M. Rivet. Voici les termes Voilà ce qui a pu engager M. Mo-
dont se servit la congrégation de réri à nous dire en confondant ,

l'Index ; je les rapporte


parce qu'il un peu les temps , que ces bar-
,
semble que l'on en pourrait inférer
s'étaient déjà fait connaître
que l'Apparat d'Alabaster fut réim- bares
primé à Rome, avec des changemens du temps de Domitien. Mais ce
et des corrections. Apparalus in Re- défaut d'exactitude chronologi-
velatlonemJesu Christi, Auctore Gu- que est peu de chose, si on le
lielnio jiLabastro Ânglo Antuerpiae ,

1607 Et Anlithesis Benedicti a Be-


:
compare avec le reste. 11 nous
nedictis Veneti contra Gulielmum conte que les Alains se joigni-
,

Jf^ilackerum nisijuerint ex Correc- rent aux Vandales , aux Suéves ,


,

TIS AB AUCTORIBUS ET RoM.î IMHRESSIS


et puis aux Goths , au commen- ,

cum approbalione P. 3Iag. Sacri Pa-


latii. Mais peut-être n'a-t-on voulu
cement du V*. siècle qu'ils com- ;

signifier sinon qu'en cas que ces au- battirent contre les Français ,
,

teurs corrigeassent leurs ouvrages et l'an 5o5 ; qu'ils ravagèrent les


les fissent imprimer à Rome avec
Gaules qu'ils avaient pour chef ,

;
l'approbation du maître du sacré pa-
lais, alors serait permis
de lire cette
il
Gonderic, fils de Aodegigile que ;

nouvelle édition. Je crois que c'est le vers l'an Sog ils passèrent en
vrai sens. Samuel André, théologien Espagne; qu'ils s'y établirent, et
allemand a fait un livre (8) contre la
,
par Vallia,
Cabale de Henri Morus (9), où il rap-
qu'ils y furent défaits

porte quelques exemples des chimères roi des Visigoths , en 4^^- I^


d'Alabaster (10.) de comprendre que n'est pas aisé

(8) Voyez /'[ndex Libroriira probibitorura ,


de pareilles méprises puissent ne
imprimé h Rome, sous Alexandre VII, p. 206. pas sauter aux yeux du lecteur ;
(9) Il est intitule', Examen Catib. Hcnr. Mori.
(10) Andr. Examen Cabb. Mori, pag. 55. car enfin des peuples vaincus en ,

ALAINS, peuples barbares qui 4i8 dans un pays oii ils sont ,

contribuèrentbeaucoupàlaruine passés environ l'an 5oc) , de-


de l'empire romain. Pline les vraient réveiller l'attention la
place dans l'Europe au delà des plus languissante. La vérité est
,

embouchures du Danube (a) que M. Moréri a fait un anachro- ;

mais Josephe marque plus préci- nisme de cent ans. Les Alains
sément leur situation car il les s'avancèrent, en 4^6, des bords :

met proche des Marais Méoti- du Danube jusqu'au Rhin sans ,

des et du Tanaïs (b). Il décrit trouver nulle résistance; et ayant


une furieuse irruption qu'ils fi- été joints par les Vandales ré-
rent dans la Médie et dans l'Ar- chappes d'une bataille perdue
ménie sous l'empire de Yespa- contre les Francs ils entrèrent
,
,

l'a) Plinius , Hist. ÎS^atur. , lib.lV , cap. Ciim Vologcses Parihonim Rex auxilia
(<'

XII , et non pas cap. XI , comme dans Mo- adversùs Àlanos ducemque allentm ex Ves-
réri. pasiani liberis depoposcissct omni ope con- ,

{h) Joseph. . de Bello Judaïco , Ub. VII ,


tendil ut ipse polissimum milteretur- Suetonv
cap. XXIX. in D jmit. , cap. II.
,,

348 AL A INS.
dans les Gaules. Leur roi s'appe- l'antiquité avait nommés Massa-
lait Respendial celui des Vanda- gètes (A) il veut qu'ils aient ha-
: ;

les s'appelait Gunderic et était bité dans les vastes solitudes de


,

fils de Godisigile qui avait été Scythie et communiqué leur


, ,

tué dans la dernière bataille. Plu- nom aux nations voisines en les
sieurs autres nations barbares s'u- subjuguant , et répandu ce nom
nirent à ces deux-là, et causèrent jusqu'au Gange. Quoiqu'il les re-
une désolation prodigieuse dans présente cruels et sauvages (B)
toutes les Gaules. Une partie des il ne leur fait pas égaler à cet
Alains , sous la conduite d'Utace, égard la brutalité des Huns et ;

qui avait succédé à Resjiendial , il remarque qu'ils exerçaient


passa en Espagne l'an 409 et leurs brigandages jusqu'aux Pa-
, ,

s'établit dans la province de Car- lus Méotides et jusque dans la ,

thagène et dans la Lusitanie


,
Médie et dans l'Arménie. ;

l'autre partie tint bon dans les


(A) C'étaient les mêmes peuples
Gaules sous la conduite de deux
,
que l'antiquité aidait nommés Massa-
rois. Les Alains d'Espagne dé- gètes. ] Il y a deux passages sur cela
,

faits par Vallia roi des Wisi- dans Ammien 3Iarcellin (i). Le pre-
,

goths près de Merida an 4 1 8 mier estai! chapitre Vdu livre XXIII ,


, , ,
et ne souflre aucune difficulté' Lu- :

furent contraints de se soumet- cullus pe.r j4lbanos et Massagetas


tre à Honorius. Leur roi Vatace quos y4lanos nnnc appellamus hdc ,

perdit la vie dans le combat {d). quoque natione perniptâ wiilit Cas- ,

Nous trouvons encore sous l'an pios lacus. L'autre est au IP. chapitre
,
du XXXP. livre dans un endroit où ,

464 , des Alains qui secouent le les manuscrits sont si brouillés qu'il
,
,
joug des Huns , après la mort a fallu recourir aux conjectures de la
d'Attila et qui entrent dans l'I- critique, pour y trouver ce que j'at-
,

talie pour y fixer leur demeure tribue ici à Marcellin. Ce n'est donc
, ;
que suivant la conjecture du docte
mais Ricimer marchant contre M. de Valois, que cet historien a dit
,

eux avec les troupes de l'empire là, adusque Alanos pen'enit, t^eteres ,

les défait de telle sorte près de Massagetas. Or, comme le premier


Bergame qu'il ne s'en sauve que passage prouve manifestement que
,
Marcellin plaçait les Alains dans l'A-
très-peu et que leur roi même sie, il
,
me semble que l'on pourrait
Biorg est tué dans le combat. Il contester à ce savant commentateur

y avait long-temps que les Huns l'explication qu'il donne à ces paroles
,

ayant fait beaucoup de ravage du texte Hister aduenarum magni- :

tudinefluente Sauromatas prœtermeat


et de carnage dans pays des adusque atnnem Tandim pertinentes
le
Alains s'étaient associés avec qui Asiam terminât ab Europd. Hoc
,

ceux qui échappèrent à leur fu- transita in immensum extentas Scy-


reur. C'est Ammien Marcellin thice sotitudines Alani inhabitant (3).
M. de Valois veut que Hoc transita
qui nous l'apprend (e). Il fait se rapporte
au Danube, et non pas au
une assez longue description des Tanaïs et il allègue sur cela Pline ; ,

mœurs des Alains {/) : il dit que Denys Charace'nus, Orose, et Tzetzès,

c'étaient les mêmes peuples que qui placent les Alains dans la Sarma-
tie, et au delà du Danube mais il :

ne s'agit pas de ce que d'autres en ont


Cordemoi, Histoire de France, aux
(cf)
dit; il n'est question que du senti-
années que je marque.
(e) Amm. Marcell., lib. A'.YX, cap. JII. (i) Moréri cite le I" . livre, rjui est perdu.
{/) Vojei la remarqua (.B). (2) Amm. Marcfll., lib. XXXI , cap. JI^
US. 3,:i9
nient de Marcellin : et sur ce pied- ulla sunt illis tuguria , aut l'ersandi
là, il me semble que hoc transita se l'omeris cura : sed carne et copia l'ic-
doit rapporter à Tanaïs, puisque ou- tilant lactis, plaustris supersidentes...
tre que les Massai^ètes n'ont point absuinptisque pahulis velut carpentis
habite entre le Tanaïs et le Danube ,
cii'itales imposUas vehunt, moresque
nous voyons que peu après cet histo- supra cumjeminis coèunt, et nascun-
rien met les Alalns au voisinage des tur in his ei educantur infantes (6).
Amazones, et qu'il les fait courir en Ils s'accoutumaient de bonne heure à

brigands , d'un côté jusque dans la monter à cheval, et ils regardaient


Médie et dans TArme'nie et de l'au- ,
comme une bassesse de marcher à
tre jusques aux Marais Méotides et au pied. Ils aimaient tellement la guerre,
Bosphore Cimme'rien. Parte alici prope qu'il estimaient heureux ceux qui
y
^mazonum sedes Alani sunt (Jrienti perdaient la vie, et qu'ils accablaient
adclines, tlijf'usi per populosas Rentes d'injures et de reproches de lâcheté
et amplas, Asialicos i^ergentes in trac- ceux qui mouraient de vieillesse ou
tas (juos dilatari ad usque Gangeii de maladie. Il n'y avait rien de quoi
accepi JlufiunL (3)... latrocinando et ils tirassent plus de vanité que d'a-

i'enando adusque illœolica stagna et voir tué un homme. Ils coupaient la


Cirnmeriuni Bosphoruni , ilidttnque tête à ceux qu'ils tuaient ils lesécor-
,

yiriitenios discurrenteset Mediam{^\\ chaient et ils employaient cette dé-


,

Toutes ces choses témoignent qu il pouille à des ornemens de leurs che-


n'a pas suivi le sentiment des auteurs vaux. Ils n'avaient aucun temple, et
qui ont placé les Alains dans la Sar- ils ne rendaient de culte qu'à une

raatie de l'Europe ; car qui s'aviserait épée nue fichée en terre c'était leur
:

jamais de donner pour une chose no- dieu Mars, patron des pays où ils ha-
table, que des brigands, situés en ce bitaient. Ils devinaient l'avenir, par
lieu-là , ravageassent non-seulement le moyen de quelques verges choi-
la Médie et l'Arménie, mais aussi les sies avec des enchantemens Judica-:

Marais Méotides ? Marcellin ne serait tur ibi beatus qui in prœlio profu-
,

pas le seul qui mettrait ces barbares derit animam senescentes enim et :

dans l'Asie. M. de Valois ne cite-t-il J'ortuitis mortibus mundo digressos


pas Procope (5) , qui les met entre le ut dégénères et ignai^os com^iciis atro-
Caucase et les Portes Caspiennes? Au cibus insectantur nec quidquant est :

reste, que veut dire M. Moréri par quod elatiiis jactent , qua u homine
ces paroles Pline les met dans la quolibet occiso : proque exufiis glo-
:

Sarinatie de l'Europe , où. est aujour- riosis,interJectorurn auulsis capitibus


d'hui la Lilhuanie ? Il veut dire sans delractas pelles pro phaleris jumentis
tloute, en cas qu'il sache parler net- accommodant bellatoriis. Nec tem-
tement français, que la Sarmatie des plum apud eos l'isilur , aut delubrum,
anciens est la Lithuanie d'aujour- etc. (•]). C'est là la peinture qu'Am-
d'hui ; mais cela est faux ; car la Li- mien Marcellin nous fait de ces Bar-
thuanie n'est qu'une petite portion bares j et il est bon de représenter à
de l'ancienne Sarmatie européenne. ceux qui ne voient que des peuples
Kcmarquez que Ptolomée reconnaît civilisés, qu'il y en a d'autres si fé-
deux sortes d'Alains, les uns en Eu- roces, qu'on a plus de sujet de les
rope, les autres en Asie. prendre pour des bêtes brutes que ,

(B) On les représente cruels et sau- pour une partie du genre humain.
liages. ] Ils n'avaient point d'autres Cela peut fournir bien des réflexions,
maisons que leurs chariots. C'était là tant physiques que morales, et faire
qu'ils faisaient et qu'ils nourrissaient admirer les plis infinis dont notre
leurs enfans; et ils ne s'arrêtaient en nature est susceptible, et dont pour
un même lieu, qu'autant que le pâtu- un bon l'on peut compter plus de
rage y durait. La chair et le lait cent mille mauvais.
étaient leur seul aliment; ils ne la-
(G) Amm. Marcell. lib. XXXI, cap. II.
bouraient point la terre JYec enitu :
,

(;) Ibidem.

(3) Jbidem.
(4) Ibidem. ALAIS , ville de France dans
(5; Henr. Valesiiis in MirceU. , Ub. XXXI ,
cap. II. les Seveiines , au diocèse de Ni-
,,

35o ALALCO MENE.


mes , à cinq lieux d'Uzès (a), est
rempli de gens de la religion qui ,

avaient été force's par une mission


la capitale d'une ancienne sei-
dragone à signer un formulaire papis-
gneurie qui a été érigée en com- tique. On crut donc qu'il serait utile
té , et possédée par Charles de de ne tenir pas aussi éloignés de
les

Valois , duc d'Angouléme fils ,


leur prélat , qu'ils l'eussent été, s'ils
avaient été soumis au diocèse de Nî-
naturel de Charles IX. C'est sous
mes. Cette nouvelle église épiscopale
le nom de comte d'Alais qu'a été a été composée de deux éi^liscs collé-
long-temps connu Louis Emma-
giales : de celle de Psalmodi, et de
nuel de Valois {b) , colonel gé- celle de la ville d' Alez, et a aS cha-
noines et 12 prébendiers ^on premier
néral de la cavalerie légère de
.

évêque, François Chevalier de Saulx,


France , et gouverneur de Pro- abbé de Psalmodi et docteur de Sor-
vence , fils de ce duc d'Angoulé- bonne, fut sacré par M. le cardinal
me, et père de Françoise-Marie de Bonzi , archevêque de JVarbonne ,

dans l'église des religieuses de la f^i-


de Valois , femme de Louis de sitation de Montpellier, le 29 d'août
Lorraine , duc de Joyeuse. Par 1694. il est issu d'une des plus an-
ce mariage , le comté d'Alais ciennes et des plus nobles familles de
fondit dans la maison de Lorrai- Poitou {-2) .Yoyez la lettre que M. Pon-
tier lui a écrite, et qu'il a publiée à
ne établie en France car du ma- Paris, en iôgS. Le Journal
;
des Sa-
riage du duc de Joyeuse avec vans en fait mention (3).
Françoise-Marie de \alois, sor- Journal des Savans du g de mai 169?
(1) ,

tit Louis -Joseph de Lorraine, pag. 322, édit. de Hollande.


Là même, pag. 32i.
duc de Guise , qui mourut à Pa-
(3)

ris de la petite vérole , le 3o de ALALCOMÈNE, petite ville


juillet 1671 âgé de 21 ans (c).
,
On la nomma ainsi
de Béotie.
La ville d'Alais est devenue
ou à cause d'Alalcomenée qui ,
épiscopale depuis la révocation fut le père nourricier de Miner-
de redit de Nantes (A). Quel-
ve selon quelques-uns (a) ou à
, ,

ques-uns veulent qu'elle soit VA- cause d'Alalcoménie l'une des ,

lesia décrite par Jules César, au filles d'Ogygès, laquelle nourrit


VIF. livre de ses Commentaires. Minerve (A) , selon quelques au-
M. de Manda] ors qui en est mai- , autres (b). Cette déesse était née
re , a fait une dissertation sur ce en ce lieu-là (c) et y avait un
,

sujet. Voyez le Journal des Sa- temple et un simulacre d'ivoire


vans du 9 de mai lôgS à la page ,
extrêmement respectés des peu-
321 de l'édition de Hollande. Ce respect fut cause à
ples (d). ,

(a) Ex
Baudrandi Lexico Geographico. ce que dit Strabon qu'Alalco- ,

(h) C'est celui dont Gassendi parle si sou- mène quoique facile à empor-
vent, et auquel il a écrit tant de lettres, Lu-
,

dovico Valesio. ter, ne fut jamais saccagée, et


(c) Le Père Anselme Généalogie de ,
la
que tout le monde
s'abstint d'em-
Maison de France, pag. ijS ij6. ,
ployer la violencecontre ce lieu-
A
(A) La ville d' lais est ilei'enue là (e). Mais Pausanias assure que
épiscopale depuis la révocation de l'é-
dit(leJSantes{\).'\ Ce n'est pas sans {a) Steplian. Byzant. voce 'AAaAK!i//éViov.
Pausan. lib. IX, pag. 3o8.
cause que je marque cette époque j ,

{b) Pausan. lib. IX, pag. 3o8 selon Vin-


car il est certain que la suppression
, ,

tcrpre'lation de Scalig. in Eus. , num. 229.


de cetédit a donne lieu à la création (c) SliaLo, lib. IX, pas: 285.
de ce nouvel ëvêchc. Ce pays-là était (d) Pausan., lib. TX.pag. 3o8.

Van i685. (e) 'A^TQoÇilTCiC à.il (tViTihiO-iV « TOAlÇ


(0 Faite
AL AMAN DUS. 35r
la statue de Minerve en fut en- point dans l'endroit où cet auteur
parle de d'Alalcomène.
la ville
levée par Sylla et qu'ensuite le
,
(B) M. Uofman Jail encore plus
temple commença d'être négligé. (le foules. ]l{ dit,
i°., qu'Alalcomène
Il ajoute que de son temps les était une ville de Bc'otie qui avait ,

pris son nom de l'Alalcomène des Béo-


murailles s'en étaient fendues , à
tiens, Jewomùzata à £oeo£orMw^^fl/co-
cause qu'un gros tronc de lierre menœo. Il est très-certain quil prend,

;^ ^ »u •
raison: car voici ce au il dit •
^/rt/co-
AV>'>/o..£v.^qu Homère lui
.1 " I
7ie,
„,enœUsIthacœd^eno„ZatahBœo-
donne, n est pas la moins digne torum Alalcomenœo, ut Plut, in Hel-
de considération (f). Plutarque len. referlp.53']. edit. Sieph.qff'erens

mieux conserver la mémoire du


changement, il est tombé la suite sans

lieu oii sa mère dans cette double méprise c'est que


était accouchée :

d'un côté il assure qu'une ville de ,


de lui (g). Etienne de Byzance ne Béotie a pris son nom d'elle-même
,
dit rien de cela lorsqu'il parle et de l'autre, <[ue c'est Plutarque qui
d'Alalcomène , et il nomme Al- l'a dit. 2°. Il impute faussement à

comène la ville de l'île d'Itliaque. Plutarque d'avoir avancé dans la pa-


ge 537, que le sépulcre de Tirésias et
Ce que dit M. Moréri, qu'Alal- le temple de Minerve ont rendu cé-
comène était considérable par le lèbre cette ville de Béotie, d'où est
tombeau de Tirésias , et que se- venu que le poète a dit 'Ax*Âxo^ev«iç
lon Plutarque elle eut depuis le Aôn'vJi. M. Lloyd attribue toutes cc.<
mêmes choses à Plutarque , excepté
nom d'Ithaque , est faux {h). celle qui concerne le tombeau de Ti-
M. Hofman fait encore plus de résias. 3°. M. Ilofman nous donne
fautes (B). comme une autre ville celle qu'il
nomme Alalcomenium, op. Bœoliœ ,

TMV Si «Têl^OVTO
âêàv a-iCÔ/HiVOI TTStVTêî ad laciintCopaïdeni inter Haliartuni
TTùLTiiç 0!aç. Nunquàtn vastala est , ob re- et Coronœani, templo Mineruœ cla-
vcrenliain Deœ omnibus orniiem vint abslinen- rum. C'est multiplier les êtres sans
tibus. Strabo, lib. /A', p. 285.
nécessité. Je ne pense pas qu'aucun
(/) Homer. 11. A, vs. 8. Stat. Tliel.., lib. des auteurs cités par Moréri di.se que
VII, vs. 33o. le prince Alalcomène mit dans la ville
{g) Plutar. QuceslioD. Grsecarum ,
p. 3oi. de ce nom la statue de Vénus.
{h) Voyez l'article Tirésias.
Cette
(2) ville est tantôt du genre neutre
'AKa,KKttfAÎviov, tantôt dufe'minin au singulier,
(A) Alalcoménie nourrit Mi- 'A'^cthKOfAiVlA, tantôt au pluriel,' Ak!tKy.Cfji.l-
ncri'e.l Scaliger prétend, i°. que Pau- Vl*/. Voyez Bcrkelius sur Etienne de Byzance,
,

sanias avoue que quelques-uns ont at- pag. 8g. lia oublie' de dire que Pliilarq., Qiiœst.
tribué réducation de îlinerve à Alal- Grœc. p. 3oi , Ta nomme'e AXat^zo^sVêloV.
,

coménie, fille d'Ogygès mais c'est ;

plutôt deviner ce qu'on croit que ALAMANDUS , en (Louis)


Pausanias a dû, ou a voulu dire que ,
français Aleman
archevêque ,
s'attacher à la lettre de son texte ,

comme le reconnaîtront tous ceux qui d'Arles et cardinal du titre de


examineront l'original; 2°. qu'Etienne sainte Cécile , a été un des grands
de Byzance fait mention de celte iille hommes du XY". siècle. Ceux qui
d'Ogygés (i) c'est ce qui nese trouve
;
parlent des affaires où il fut mê-
(.) Scaliger in E...s€b. , num. 229, pag. 31. lé , l'appellent Ordinairement le
352 ALAMANDUS.
cardinal d'Arles. tel effet, que lorsqu'on vint
Il n'était se- point ,

Bourguignon , comme
dé— Ion la coutume à invoquer le l'ont ,

bi té quelques auteurs; mais il ne Saint-Esprit, chacun se mit à


s'en fallait guère puisque le pleurer. Il ne fit pas moins pieu-
,

pays de Bugei lui a donné la rer les assistans lorsqu'il officia


naissance. C'est ce que Guiche- le jour d'une autre session et ,

non a fait voir dans son histoire que la tète chauve toute nue il ,

de Bresse comme M. Moréri l'a distribua la communion à tous


,

remarqué. Pour ne pas répéter ceux qui se présentèrent leur ,

ce qu'il en dit je m'arrêterai à donna à tous le baiser de paix,


,

d'autres choses. Le cardinal d'Ar- et les exhorta à communier di—


les présida au concile de Bâle gnement (ci). Il fut inflexible à ,

qui déposa Eugène IV et qui tout pendant la peste qui s'éle- ,

élut l'antipape Félix V (a). Il a va dans la ville la mort d'une :

été fort loué par Enée Silvius partie de ses domestiques, et les ,

comme un hoinme tout-à-fait prières de personne ne îe purent


propre à présider à de telles com- obliger de sortir il aiiua mieux ;

pagnies ferme et vigoureux il- sauver le concile au péril de sa


, , ,

lustre par sa vertu savant, et vie, par sa présence, que sauver


,

d'une mémoire admirable pour sa vie au péril du concile par , ,

récapituler tout ce que les ora— son absence (e). II était extrême-
teurs et les disputans avaient dit ment laborieux, et si sobre, qu'il
(6). Un
jour qu'il harangua con- y eut des conclavistes qui ne pu-
tre la supériorité du pape sur le rent souffrir qu'en- diminuant
concile, il se fit admirer de telle leur ordinaire, on leur représen-
sorte que plusieurs l'allèrent bai- tât l'exemple de ce cardinal. La
ser , et que d'autres s'empresse- réponse que fit là-dessus un Fo-
rent à baiser sa robe. On élevait louais vaut la peine d'être lue
son habileté jusqu'au ciel habi- : (A). Il ne faut pas demander si
leté qui avait fait qu'encore qu'il le pape Eugène foudroya le pré-
fût Français, il avait surpassé les sidentd'un concile oii il avait été
Italiens, quelque fins qu'ils fus- déposé. Il le priva de toutes ses
sent (c). Il savait fort bien em- dignités , et le traita de fils de
ployer les machines de la dévo- la géhenne (B). Cependant Louis
tion; car un jour de session , il Alamandus ne laissa pas de mou-
fit porter par les prêtres , dans rir en odeur de sainteté (C) et ,

l'assemblée toutes les i-eliques de faire tant de miracles après sa


,

qui se purent trouver à Bâle et mort , qu'à la requête des châ- ,

les fit mettre à la place des évê- noines et des céîestins d'Avi—
ques absens. Cela produisit un gnon et sur les instances du ,

f s Ti ^ j C
'. „ et se
(a) Il était duc de Savoie
é ^^,^.„„i, cardinal de Clermont
o„ nommait /
légat à la- ,
,
ttït -i ? i , '

Ainédée. tcre de Clément vil, il fut bea-


(6) ^ueas Silvius, de Gestis Basileensis
Concilii , lib. I.
tifié par Ce ipape, l'an iSay ( /").
i 1 tu
(c) Pntdentiam e/us inagnoperc comment r l\ t /^^ /,; //
",'',.,.
dabnnt nui licèl orîeine
,
"
essel Gatlicus
^, ,
,.'
Itnliis tamen liac die summa Iwmines aslutia
, ,, ,,
ic]
y-' Idem
'""" ,
'
',.,!
ibid.
'"•
n
,
Je rapporte ses '^
"^ ,
;
paroles
.
;_
la-
- Cl- j» /• 1- „ 1 fines
""'"' dans
" la remarciue (A).
uestis r-
^ in- ,
stiperasset. jEneas Silvius, de Concil. • / \ y

Baail. Itb- I. (/) Fojez-en la Bulle dans Laun. Epis!.,


ALAMANDUS. 353
Oderic Raynaldus a prétendu Les jansénistes qui ont criti-
qu'il se repentit de tout ce qu'il que Oderic Raynaldus au sujet
avait fait dans le concile de Bâ- du prétendu repentir de notre
le mais on ne saurait donner
;
Louis Aleman se sont exposés ,

nulle preuve de ce repentir {g) , eux-mêmes à la censure (D).


ni contredire ce point de fait ,
(A) La réponse d'un Polonais
qu'un an avant sa mort (li) il fut uaut 1(1 peine d'êlre lue. ] <( Quelle
un de ceux qui , au concile de «comparaison! » s'eciia - 1- il ^lors-
Lausanne parlèrent du concile qu'on proposa l'exemple de Louis
'lui
~ " ,
'''
de Bàle comme d'une assemblée
'
Alamandus. «Vous me yiarlez d'ua
w Français, sobre qui n'a point de
sainte et sacrée (/). Il mourut à ,

w ventre, ou, pour mieux dire, qui


l'âge de soixante ans (k) , le 16 » n'est point homme je puis voir à :

de septembre i45o (/). Les uns M travers le rideau qui nous se'pare
disent que ce fut en Savoie à ,
» tout ce qu'il fait je ne Tai jamais ;

» vu encore , ni manger ni boire ;


l'abbaye de Hautecombe oii les ,
» il ne dort ni nuit ni jour j il lit per-
moines lui bâtirent une chapelle, » pétuelleraent , ou il négocie j il ne
et l'invoquèrent durant la célé- » songe à rien moins ((u'à son ventre :
bration de la messe (m) les au- ;
» ce n'est point mon homme ; je n'ai
» rien de commun avec de semblables
tres disent qu'il mourut à Salon
w gens. Quos inter ( ce sont les
))

(n). Son corps est à Arles la :


paroles d'Énee Silvius au sujet de la
bulle de Clément VII en permit nourriture de ceux qui étaient entres
la translation des lieux humides dans le conclave ) Cracoi^iensis ar-
cliidiaconus diminutioneni ( cibario-
et souterrains à tout autre plus
rum ) lidit. Cui ciini ai'es et arittinœ
commode dans la même église. Je carnes ajferrentur, substractœ aticulœ
vois des gens qui assurent , après sunt , orante in porta J'amuln ut quod
Jacques-Philippe de Bergarae (o), plus esset , id Domino dimilteretur ;
sperabat namque ex ariete partem ,
que Louis Alamandus publia plu- ex at^ibus autem non sperabat : Domi-
sieurs opuscules dignes de lui ; nustamen auiculani pi œopldsset. Ideà-
mais je ne vois personne qui mar- (fue ciim spoUum sensit , ulique con-

que le titre de ces opuscules, ni questus est publicèque testatus nun- ,

quhni se diem , postquhm Siicerdos


les bibliothèques oii ils sont *.
jfuit tulisse pejorem. Ac ciini roga-
,

XJ part. I, pag. 79 , 80. Edit. Cantabr. retur ne adniirationem haberet quo- ,


, ,

ann. l68g in-fol. ,


niani id nbligisset cardinali Arela-
(g) Launoius, ibid. , pag. 81. tensi. (t Proli ! inquit , cardinalent
(h) C'était l'an i449 » mihi œquiparas , hojninem gatli-
Sacri BasUeensis ConcHii Diploma Con-
[i'j
)> cum parcum, ei'entrem uul , ut
, ,

cilii Lausanensis apud Rayaaldi Annal.


,
» i^eriiis loquar , non hominem. Ego
Ecclesiast. ad ann. l449-
» apud eum nieo injortunio surii loca-
,

[h] Voyez la Bulle de Clément dans VU ,

Laun. Epistolar pag. 79, 80. )> tus oniniu qucefacit perlustris mihi
,
,

{l) Ex ejus Epitap/iio. » cortina indicat , nec ndhuc biberc


(m^ Petrus Monodus in Amedeo Pacifico, » eum , aut comedere i^idi ; et quod
cap. 86 ( il fallait dire 76 ) apud Laun. , » mihi molestius est , insomnes noctes
Epist. pag. 81.
,
» insomnesquedies ducit {quamqu'am
{h) Moréri.
h nulla est apud nos dies ) aut legit
{o) Jacobus PLilippus Bergom. Chronicor.
XV. » semper aut negotiatur. NuUa ci
,
Ub.
» minor quant venlris est cura : mihi
*Joly remarque qu'aucun ouvrage de ce
cardinal n'était connu a^ant lySg, que le )) nihil cum eo commune est (i). »
père Monlfaucon mit au jour sa Bibliolhcca Voilà comment sont bâtis ceux qui
J)ibliotliecarum Manuscriptorutn nova oii il ,

apprend que Von conserva à Baie unv Pièce (i) ^neas Silvius, de Gestis Basileeasis Coo-
du Cardinal. cilii, Ub. IT.

TOME I. a3
345 ALAMANDUS.
dans plus grandes affaires sont
les les et ils observent ensuite
,
qu't^ ,

capables de surmonter les obstacles a esté contraint d'avouer en deux di-


les plus forts. Cela demande des
gens vers endroits, l'an 1426, n. 26 et ,

laborieux et détaches des plaisirs des l'an i45o «. 20 que Dieu a fait re-
, ,

sens et intrépides. Donnons en latin connaître la sainteté de ce cardinal par


,

fermeté de Louis des miracles si visibles et si bien at-


le témoignage de la
Alamandus contre la crainte de la testez ,
que Clément f^H l'a mis au
peste Neque illum preces neque do-
: ,
nombre des bienheureux,... (5). La
mesticorumfuncra,flectere potuerunt, manière dont cet autheur ce se tire de

^olentem potiùs cum ^itœ periculo sal- mauvais pas continuent-ils , est tout-
,

uare concilium quant cum periculo h-J'ait horrible, « et ne peut estre fon-
,

sciebal eniin , « dée que sur une maxime très-perni-


concilii sali^are vitam ;

quoniam se recedente pauci remansu- j> cicuse qui est que des gens coupa-
,

« blés de crimes publics puissent deve-


sent ,facilèque committi fi aus in ejus
absentid potuisset (ji).
J) nir Saints , et estre reconnus pour
(B) On de fils de la ge-
le traita
j) Saints par l'Eglise, sans qu'ils ayent
Dans une bulle donnée à Flo- « donné aucun témoignage de se re-
henné.']
» pentir de leurs crimes et que tou-
rence , l'an 1442 on l'appelle iniqui-
,
,

tatisfilium , rebellionumetj'acinorum » tes choses au contraire fassent


, ,

» voir qu'ils y ont persévéré. Car si le


multorum reum et Ton y dit que les ,

conciles de Ferrare et de Florence


» cardinal d'Arles a commis des cri-

l'avaient condamné et dépouillé de » mes , et a den estre estimé un très-

toutes ses dignités Ferrariensi et : A « raeschant homme , en faisant tout


Florentino conciliis damnatum et uni- » ce qu'il a fait dans le concile de
» Basle , jamais homme n'a esté plus
i^ersis dignitatihus priratuntfuisse{3).
de constant dans ses crimes ; puisque,
(C) Cependant tl ne laissa pas
>)

mourir en odeur de sainteté. ] Cet » lors même que les pères du concile
exemple et celui de Pierre de Luxem- » de Basle , où
présidoit se réuni-
il ,

bourg, béatifié parla même bulle de » rent à Nicolas , ce ne fut point en V


Clément VII (^4) «0°* "° P^". em^ar- >
)> reconnoissant en aucune sorte qu'ils
rassans pour les controversistes du M eussent mal fait , ny de résister à
parti romain^ car enfin, si , selon M Eugène, ny de le déposer, ny d'é-
leur prétention, tout homme qui n'est )> lire Amédée ; mais ce fut au con-

point uni au pape , est hors de l'E- » traire, en protestant qu'ils n'avoient
glise , comment se peut-il faire que
)) rien fait que our le bien de l'E- '

» j s'unissoienl à Ni-
non-seulement on se soit sauvé dans glise, et qu'ils .

les deux obédiences , mais qu'on y ait


:» colas qu'en l'élisant de nouveau ,
V ,

w après la cession volontaire de Félix


aussi mérité le grade de saint ? La
:

meilleure réponse qu'on puisse faire j> et l'union se fit sans qu'on les obli-
est de dire que la distinction du vrai )) geast à rien désavouer de tout ce
,

» qu'ils avoient fait mais ce fut au


pape et du faux pape étant au-dessus ; ,

des forces des particuliers et une ,


)j contraire Nicolas V qui confirma
,

pure question de fait l'erreur était ,


)) ce qui avoit esté fait à Basle. De
)> sorte que si tout ce qu'a fait le
invincible et par conséquent ne de-
,
,

vait point préjudicier à ceux qui » cardinal d'Arles dans le concile avoit
étaient dans la bonne foi quant à la M esté criminel jamais homme n'au- ,

question de droit. Mais gare les ré- )) témoigné plus d'opiniastreté


roit
pliques et les conséquences qui nais- » dans le crime. D'où il s'ensuit que ,
sent de là en faveur d'autres erreurs! » si cela n'a pas erapesché qu'il ne
(D) Les jansénistes qui ont critiqué » devinst Saint faudroit dire que , il

Raynaldus se sont exposes eux- « la persévérance dans les plus grands


mêmes a la censure. ] Ils allèguent d'a- M crimes n'empesche pas qu'on ne soit
bord les injures dont ce continuateur III*. lome des An- XV
(5) Remarques sur le
de Baronius a chargé le cardinal d'Ar- nales Ecclésiastlque^ ,pag. 2i3. Ces Remarques
sont imprimées avec un Recueil de diverses Piè-
(2) Id. ibid. ces pour la défense des censures de la Faculté
Vide Launoium, Epist. XI partis I, num.
(3) de Théologie de Paris, contre un bref et un«;
45 pag. 80.
,
bulle d'Alexandre VII. Je me sers de l'e'dition de
Défense Ae la Réfor- Genève {on a mis au litre, à JVIunster , cheï
(4) f^qjf s M. Claude ,
tnalion , ///«. parue vers lajin. ,
Bernard Kaesfeld; en 1667 ,
in-&°.
, ,

ALA MOS. 355


Saint ce qui est horrible. Et, ce-
j
tir d'Aleraan , et ils réfutent d'une
pendant, c'est une suite nécessaire manière démonstrati%e sa prétention ;
de ce discours de Raynaldus , l'an mais ils ont tort de l'accuser de ce
i45o , n. 10. dogme horrible qu'ils étalent si pom-
Hoc annn , dit-il, Lu-
doi'icum Alamandum archiepisco- peusement il n'est point vrai qu'il :

purn Arelatenscnt vitd cessisse joigne ensemble la sainteté et l'impé-


tradunt ntquc miracufis pont mor- nitence car il suppose , au contraire,
, ;

tem coruscâsse affirmant , eumque que ce cardinal se repentit , et il re-


Clemens f^II ueluti Beatum coli connaît en cela une adorable miséri-
permisit exaialo diplomate Ponti- corde du bon Dieu.
Jicio 9. Apr. an. 1527. Itaque adn- Au reste , si je dis ici que M. Claude
randa est diuina misericordia , quœ a reproché aux jansénistes d'avoir
e.xiguo temporis Jluxu Liidovicum soufïlé le chaud et le froid touchant
ipsum nefandi el perniciosissimi Oderic Raynaldus (6) ce n'est que ,

schismatis auclorem , propagatorem pour faire voir qu'on leur attribue les
hœreseos qui ex erroned conscien- Remarques que je leur ai attribuées.
,

tid innuntera inDei Ecclesiainniala


(6) Claude Préface de la Réponse à la Per- ,

indexerai , ac tôt annoruni cursu in pétuité de la Foi défendue, pag. xxviij, xxix.
pertinacid obfirmnlus prnfanai^erat
sacramenta pœnitentem ac rei>er-
,
(Balthasar) naquit ALAMOS
suni in greitiiuni Evclesiœ ad sanctl- à Mediiia-del-Campo , dans la
talis cidrnen brei^i ei^exit. Si cet au-
Castille. Ayant étudié en droit à
theur s'esfoit contente de dire que
le grand zèle qu'avoit ce saint hom- Salamanque , il entra au service
me pour la réformation de l'Eglise d'Antoine Ferez , secrétaire d'é-
l'avoit emporté à des actions trop tat sous le roi Philippe II et il
,
violentes quoy qu'il les fist par un
eut beaucoup de part à l'estime
,

'
bon motif cela auroit esté
, suppor-
'
table , et ne seroit pas si contraire et à la confidence de son maître :
'
aux témoignages c{ue Dieu a rendus de là vint que l'on s'assura de sa
'
de sa sainteté. Mais de le faire passer personne , après la disgrâce de ce
pour méchant homme, pour un hé-
ministre. On le détint en prison
<

I
rétique et pour un schismatique
,

I
opiniastre qui auroit profané les onze ans. Philippe III, parvenu
I
sacremens par une infinité de sacri- à la couronne, le mit en liberté ,
< loges et vouloir qu'ensuite en un
,
suivant les ordres que son père
an ou deux il soit devenu Saint à
lui en donna dans son testament.
canoniser, sans avoir donné aucune
preuve de son repentir de tant de Alamos mena une vie privée ,

crimes qu'on luy impute, c'est avoir jusqu'à ce que le comte duc d'O-
une estrange idée de la sainteté, ou livarez favori de Philippe IV ,
,
plustost c'est aimer mieux allier
l'appelât aux emplois publics. Ou
,

ensemble la malice etia sainteté, que


d'avouer qu'un pape s'est trompé lui donna la charge d'avocat gé-
en déclarant un homme méchant , néral dans la cour des causes cri-
lors même que Dieu l'a déclaré saint. minelles et dans le conseil de
,
Mais la bulle de Clément VII de la ,

béatification de ce saint homme


guerre ensuite il fut conseiller
;
,

rapportée par Ciaconius, suffit pour au conseil des Indes et puis au ,

confondre cet escrivain puisque le , conseil du patrimoine royal. Il


pape luy rend témoignage non d'a- ,
était chevalier de Saint Jacques ,
voir fait une grande pénitence des
crimes qu'il auroit commis mais ,
homme d'esprit et de jugement
d'avoir rendu à Dieu son âme très- et qui avait la plume meilleure
pure après avoir veàcu soixante
, que lalangue. Il vécut quatre-
ans. » vingt-huit ans , et ne laissa que
Ces messieurs censurent très-juste-
ment Raynaldus à l'égard de la har-
des filles. Sa traduction espagno-
diesse avec laquelle il assure le repen- le de Tacite , et les aphorismes
,

356 AL A MOS.
politiques en borda les
, dont il » la délicatesse. Cela supposé , je ne
)) de dire (|ue la traduction
feins point
marges lui ont acquis beaucoup
,
» d'AJaraos est beaucoup meilleure
de réputation mais non pas sans
; » que les Aforismes^ et c'est un juge-
que les sentimens soient partagés » ment qu'a fait avant moi l'auteur
» de la Bibliografie Hislorique-Politi-
là-dessus (A). Cet ouvrage, pu-
)) que dans l'article des historiens la-

blié à Madrid l'an 1614, devait Le 7'aciie illustré


» tins. dit - il ,

être suivi d'un Commentaire (B) » ( c'est le titre de la version d'Ala-


qui n'a jamais été imprimé que ,
» mos ) est fort estimé de nos i'oya-
,

L'auteur avait composé » geurs mais a f.njuger sainement


;
je sache. ,

)> les notes n'en iraient pas mieux que


le tout pendant sa captivité , et
» les impertinentes Pensées nouvelles
il avait même travaillé en cet état i> de Louis d' Orléans sur cet auteur ,
à obtenir un privilège pour l'im- » ni que les Remarques auliques et po-
» litiques du comie Annibal Scot de
pression (C). Il laissa quelques
» Plaisance lesquelles Juste Lipse
,
autres ouvrages qui n'ont pas été )) appelle à bon droit des Notes de
imprimés Advertimientos algo-
: )) plomb. Cependant certain secré- ,

vierno , adressés au duc de Ler- n taire espagnol, nommé. /uart Onate,


n'a pas laissé de prendre la peine
me , vers le commencement du )>

)) d'arranger ces Aforismes sous des


règne de Philippe III el Con- ;
» titres particuliers par ordre alfabé-
quistador : c'étaient des conseils » tique et n'a pas fait difficulté de
,

touchant des conquêtes à faire )) les intituler Aima de Cornelio ,

» Tacilo et de plus , un Jérôme


dans le Nouveau-Monde Pimtos ;
:

» Caniui les a traduits en italien et


politicos à de Estado. Don Gar-
,

)) les a incorporez à la version ita-


sias Tellode de Sandoval cheva- , » lienne d'Adriano Politi comme, ,

lier de Calatrava gendre d'Ala- ,


)) quelque chose de biea excellent ,
témoin ce titre Opère di Corn.
raos a donné connaissance de ces
)j :
,
» Tacito , illustrate con notabilissimi
manuscrits à don Nicolas Anto- )> Aforismi del Stgnor D. Baldassor
nio {a) duquel j'ai tiré la plus
, >»Alanio (i). »
grande partie de cet article. Voilà deux auteurs qui parlent avec
méj)ris de ces Aphorismes j et deux
(a) Voyez la Bibliollieca Scriplorum His- qui en font beaucoup de cas. On s'é-
paniae , tom. /, pag. \h^v.
tonnera moins de cette diflërence de
sentimens qu'en
, si l'on se souvient ,

(A) Les sentimens sont parta^^e's tou- l'année i683 M. Amelot n'avait pas ,

chant son travail sur TacUe, ] Ce par- la même opinion là-dessus qu'il a lait ,

tage concerne beaucoup plus les Apho- paraître en 1686 et en 1690. Consul-
risraes que la traduction , comme on tons la préface de son Tibère (2). Il
le va voir par les citations suivantes : est bien urai dit-il , qu Alamos n'a ,

<c Quant aux Aforismes d'Alamos , ce pas seulement traduit Tacite mais ,
y
» rvest point ce que l'on pense car : a fait encore un grand nombre de Re-
» vous n'y trouvez presque rien qui marques qu'il appelle ytjorismes et
,
,

» sente rAfoi'israe ni qui approche


, qu Antoine de Cot^arrui^ias, son appro-
>j même de la force de ce qui est ex- bateur dit être la principale partie
,

» primé dans le texte de la version. de son ow^ruge {*) J'auoue que le


» Au lieu que l'Aforisme devroit être sien est excellent , soit pour la tra-
» plus sentencieux que le texte , les
Amelot lie la Houssaye, Disc. Critique, o
(i)
j> paroles du texte sont toujours plus la télé de sa traductioit des Annales de Tacite,
j) sentencieuses que l'Aforisme. Enfin, imprimée a Paris, l'an 1690. Ce Discours Cri-
)) pour trancher court , l'Aforisme tique avait déjà paru à la télé de sa Morale de
Tacite, en 168G. Il est un peu augmenté dans
» n'est le plus souvent qu'une version
l'édition des Annales.
» périfrasée de la version même cho- :
(2) Imprimé à Amsterdam , en i683.
j) se fade et ennuyeuse pour des lec- (*) Aun es la principal parte y de mas m9-
,

» teurs qui ont de l'intelligence et de mento, desta Obra.


.,

ÀLAMOS. 357
duction qui est aussi claire que l'o-
,
plus étrange ne parie pas même
, il
riginal est obscur snit pour Its Afo- ,
de la traduction: il dit seulement
rismes qui sont a toutes les marges ,
,
qu'Alamos fit des Aphorismes sur les
dont la plupart sont proprement des OEuvres de Tacite.
parafrases et des l'ersions des senten- (C) H
avait travaillé en prison a
ces de Tacite et les autres des con-
,
obtenir unpriuHége pour l'impression.'}
clusions morales ou politiques , tirées Je ne remarque pas cela afin d'allon-
des évenemens qu'il raconte; mais ger l'article comme quelques lecteurs
quelque applaudissement que ce lii're accoutumés à précipiter leurs \^iS,e-
ait eu dans le monde je ne laisse pas ,
mens se pourront imaginer. .Te me
d'espérer que le mien jr sera très-bien propose l'instruction d'un petit pro-
reçu de ceux qui sont capables d'être ces qu'on a intenté à Don Antonio
,
juges en cette sorte de matière, et a\ e<; beaucoup d'apparence de raison.
même d'autant mieux que ce que j'ai II prétend qu'Emanuel Sueiro tradui-

fait était beaucoup plus dijficile a sit les OEuvres de Tacite en espagnol,
faire que ce qu Alamos a fait. Car après qu'Antoine de Herrera en eut
tous ses Af'orisrnes sont autant de — traduit quelque partie et après que ,

pièces etde morceaux, et, comme dit le Balthasarde Alamos, et Carlos Coloma,
proverbe , du sable sans chaux et sans 1rs eurent traduites toutes entières;
ciment ; au lieu que dans mes chjpi- Post Antonii de Herrera aliqualem ,
très , je fais un discours continu de Balthasarisde Alamns , et Caroli Co-
toules les citations latines qui sont loma , illustrium l'irorum , integmm
aux marges , et même un corps uni- operam hujusmet Autoris interpréta-
in
forme de toutes pièces différentes. A tione positam f3). Or il reconnaît que
quoi Jiiste Lipse dit qu'il faut avoir la version de Sueiro fut imprimée à
travaillé, pour savoir combien cela Anvers en i6i3 et il est certain que;

est difficile. Voici les paroles de Lipse celle d'Alamos fut imprimée à Madrid,
telles qu'elles sont citées par M. Ame- en i6r4. C'est la date que Don Nicolas
lot IVec veto nudas aut sparsas sen-
; Antonio a donnée aux Aphorismes
tentias dedimus ne diffluerent , et
, d'Alamos (4). D'ailleurs Alamos a ex-
eiset, quod dicitur, wena sine calce : posé dans sa préface les raisons qui
sed eus aut inter se haitd indecenter ne l'avaient pas empêché de publier
finxinius , aut interdiim vcli.t cœmen- son Tacite depuis que la traduction
,

to quodamcommisimus nostrorumver- de Sueiro avait vu le jour (5). Il ne


borum , è mille aliquot particulis uni- semble donc pas qu'il soit possible de
forme hoc et cohœrens corpus J'orman- répondre pour le bibliothécaire des
les. Hoc totum qu'uni nrdiium mihi écrivains espagnols à cette objection
fuerit frustra dixerim apud non ex-
, de M. Amelot de la Houssaie Témoi- :

pertum... eb major mihi molestia quàd gnage dit-il, en citant ce que je


,

per hœc aliéna vestigia sic iverim , \iens de citer , que Don IVicotas An-
tanqu'am in liberrimo ingenii cursu{*) tonio s'est mépris quand il fait la ver-
(B) Cet ouvrage devait être suivi E
sion d' manuel Sueiro postérieure à
d'un Commentaire. ] Le privilège du «^«^''e d'Alamos (6). Je ne vois que ce

roi fait expressément mention de ce seul rayon d'excuse c'est de dire que :

Commentaire. Antoine Covarruvias peut-être Sueiro n'ignorait pas lors- ,

en parle comme d'un livre qu'il a lu ,


qu'd entreprit son ouvrage qu'Ala- ,

et il nous en apprend même la forme mos avait de_]à obtenu un privilège ,

et les principales parties : c'est dans poi'r en publier un tout semblable ,


l'approbation qu'il a donnée à l'on- qui avait été vu et approuvé par An-
vrage d'Alamos imprimée à la tête
,
loine Covarruvias. La nouvelle avait
de la traduction. Un autre approba- pu lui en venir jusqu'à Anvers ; car ,
teur parle nommément du Comraen- dès l'an 1394 le roi Philippe II avait
,

taire. Alamos dans ses préfaces en


, ,,^ v- » . • n ui n- r o
, 1 j. / 11
parle plus d une fois, et promet1 de-
/. •
,
.
1
(3) Aicol. Antomi Bibl. Hjsp., «ora. /, p. z-jS.
(l^) Jd. ibid. , yag. 1^0.
claicir là les obscurités de Tacite : (53 'ï aunque agora avia salido otro Tacilo ,
cependant Nicolas Antoine n'en dit '"'^"ciJo por Manuel Suevro, no quUe qoe

mot11.
,„, «-i dcxa^se de publicarse e\ mio elc.
pas un seulI petit ;
et ce qui est ,
1.

,o) Amebt , Dsc. Cri.iq,,;


,

nu-de^m de la
,

^ _ _
Morale de Tacite, et de la version de ses An-
( ) Lipsius, prœfatione Doclr. Civilis, nalcs.
358 ALBERT.
donné ordre à ce Covarruvias d'exa- pour les sa-
sieurs instructions
miner tout ce travail d'Alamos; et dès
ges-femmes et tant de connais- ,
l'an i6o3 , Piiilippe III avait accorde'
la permission de l'imprimer. Alamos sance de leur art , qu'il semble ,
conte tout cela dans son avis an lec- qu'afin d'y être si habile, il a
teur ce qui pour le dire en passant,
: , fallu l'exercer. Mais les apologis-
renverse la conjecture de ceux qui se tes d'Albert-le-Grand soutien-
voudraient imaginer qu'il ne borda
d'Aphorismes sa traduction qu'afin nent qu'il n'est point l'auteur de
,

d'enchérir sur celle de Sueiro (7). Les ce livre (B), non plus que de celui
Aphorismes étaient l'une des parties de Secretis Miilierum (C) oii il ,

principales son travail dès le de ,


y a bien des choses qui n'ont pu
temps qu'il fut approuvé par Antoine
Covarruvias. être exprimées qu'en termes sa-

même.
les et vilains ; ce qui a bien fait
(j) Amelot , là
crier contre celui qui a passé
ALBERT-LE-GRAND pour l'avoir écrit. Ses apologis- *', reli-

gieux dominicain, évéque de Ra- tes ne peuvent pas toujours re-


tisbonne , et l'un des plus célè- courir à la négation du fait ils :

bres docteurs du XIII*. siècle, avouent que l'on trouve dans son
naquit à Lawingen , sur le Danu- Commentaire sur le Maître des
be dans la Suabe l'an i \cp ou
, , Sentences quelques questions tou-
l'an i2o5 *^ (A). On pourra voir chant la pratique du devoir con-
dans le Dictionnaire de Moréri jugal (D) , dans lesquelles il a fal-
les diverses charges qu'on lui con- lu se servir des mots qui choquent
fera , et le succès avec lequel il le plus les chastes oreilles (c) ;

enseigna dans plusieurs villes (a), mais ils allèguent ce qu'il obser-
Je m'arrêterai principalement à va lui-même pour sa justifica-
quelques mensonges qu'on a fait tion que l'on apprenait tant de
,

courir sur ce sujet. On a dit qu'il choses monstrueuses au confessio-


exerça le métier de sage-femme ;
nal qu'il était impossible de ne
,

et l'on a trouvé fort mauvais pas toucher à ces questions. II


qu'un homme de sa profession se est certain qu'AIbert-le-Grand a
fût érigé en accoucheur {b). Le été le plus curieux de tous les
fondement de ce conte est qu'il hommes. Il a donné prise sur lui
a couru un livre sous le nom *par cet endroit à d'autres accu-
d'Albert-le-Grand oii il y a plu- sations. On a dit qu'il travaillait
,

*' Leduchat et après lui Joly


, qui ne le à la pierre philosophale (E), et
,

cite pas, remarquent que le nom de Grand, même qu'il était un insigne ma-
donné à Albert, ne lui vient pas de son sai'oir,
mais qu'il est la traduction de son nom de
gicien (F) , et qu'il avait fabri-
famille Groot qui en allemand signifie
,
qué une machine semblable à un
Grand. Mais M. Siapfcr, dans la Biographie
universelle, dit que c'est une supposition gra-
homme , laquelle lui servait d'o-
tuite ; que jamais les comtes de Bollstcsdt ,
racle , et lui expliquait toutes les
de la j'amille desquels était Albert n'ont difficultés qu'il lui proposait.
,
Je
porté le nom de Grot oii Grool.
*^ Leclerc doute qu'il fadle dire hqS et
,
croirais facilement que comme ,

est certain qu'on ne peut dire l2o5. Il serait il savait les mathématiques il ,
pour 1200 environ.
[a) Voyez aussi BuUart Académie des , (c) Idem , ibid.
Sciences, tom. II pag. i!\b , et ci-dessous la
,
* Ces mots donné prise sur lui, parais-
,

remarque (H). sent impropres à Joly puisque les choses


,

(Il) Voyez î'heophili Raynaudi Hoploth, ,


débitées contre Albert sont sans aucun Jon-
sect. II , scrm. III cap. X, pag. 36i.
, dement.
ALB ERT. 359
avait fait dont les res-
une tête phosé d'âne en philosophe , et
sorts pouvaient former quelques puis de philosophe en âne. Il se-
voix articulées mais quelle sot-: rait très-inutile que je remar-
tise n'est-ce pas que de fonder là- quasse que ce sont des fables :

dessus une accusation de magie ? ceux qui m'en croiraient n'ont


Quelques-uns prétendent qu'il y pas besoin de mes avis et en fe- ,

a un grand miracle qui a parlé raient ce jugement sans les at-


pour sa justification (G). Quoi- tendre et quant à ceux qui en
;

qu'il fût aussi capable qu'un au- jugent autrement ils ne chan- ,

tre d'inventer l'artillerie on a , geraient pas d'opinion en lisant


lieu de croire que ceux qui lui en ici que je ne suis pas de leur goût.

attribuent l'invention se trom- Notre Albert était *' fort petit


pent (H). On raconte {d) que na- (I;. Il mourut à Cologne le i5 de
turellement il avait l'esprit fort novembre 280 , âgé ou de qixa- 1

grossier , et tellement incapable tre-vingt-sept ans ou de soixante-


d'instruction qu'il était sur le quinze. Il a écrit un si prodi-
,

point de sortir du cloître , parce gieux nombre de livres , qu'ils


qu'il désespérait d'apprendre ce montent à 21 volumes in-folio
que son habit de moine deman- dans l'édition de Lyon en i65i. ,

dait de lui mais que la sainte Un jacobin de Grenoble, nommé


;

\ierge lui apparut et lui de- Pierre Jammy l'a procurée **.
, ,

manda en quoi il aimait mieux On (e) m'a communiqué deux


exceller, ou dans la philosophie , ou trois particularités que l'on
ou dans la théologie; qu'il choi- verra ci-dessous (K).
sit la philosophie que la sainte
* Leclerc rappelle que ce fait a été trouvé
;

Vierge l'assura qu'il y devien- faux par Pierre de Prusse qui en i483 avait
drait incomparable, et qu'en pu- assisté à l'ouverture du tombeau d'Albert, et
mesuré ses os,
nition de n'avoir point choisi la *^ Joly ajoute que le père de Monifaucon ,

théologie il retomberait avant dans sa Bilil. Manuscriptorum Nova cite ,

sa mort dans sa première stupi- plusieurs manuscrits d'Albert - le- Grand ,

dont quelques-uns ont été inconnus à ceux


dité. On
ajoute qu'après cette qui ont parlé de ce fameux docteur.
apparition , il eut infiniment de (e) M. de la Monnaie.

l'esprit, et qu'il profita dans tou-


tes les sciences avec une promp- fA) Il naquit l'an ïJQ3,oul'an i2o5.]
Vossius a raison de censurer Nicolas
titude qui étonna tous les maî- Reusnerus qui a mis la naissance
,

tres mais que trois ans avant sa d'Albert à l'an 1293, et la mort à l'an
;

mort , il oublia tout d'un coup ce i382 c'est avoir commence son livre :

qu'il savait et qu'étant demeuré par


une be'vue. Quce magna est aiviç-o-
;
«s-Zst. peccantis in ipso operis ingressu,
court en faisant une leçon de fl'élut canlherius in pnrid, ut dici so-
théologie à Cologne et ayant tâ- let nam ab hoc -dlberlo Icônes et
, ;

ché en vain de rappeler ses idées, Elogia sua auspicatur (i). Voilà com-
il comprit que c'était là l'accom-
ment parle Vossius, sans se souvenir
qu'ù la page 62 par une faute qui
plissement de la prédiction. On n'est pas moindre que celle-là il
,

a donc dit que, par des voies mi- avait mis l'état florissant d'Albert à
raculeuses il avait été métamor- Tan 1160, et sa mort à Tan 87 de sa
,

vie, en i2o8j et qui l'avait fait con-


{d) Voyez le I^-. volume des Annales de
B/ovius. (i) Vossius, (le Scient. MatLema!., pag. 362'
,

36o ALBERT.
tempoi-ain d'Urbain IV, et de l'empe- Ces deux preuves ne valent rien et la ^

reur Kodolphe. conséquence qu'on tire de la seconde


(B) Il n'est point l'auteur d'un livre est nulle. Cent raisons différentes obli-
touchant les accouchemens ] Cet ou- gent les gens à ne point mettre leur
.

vrage estintitule' de Naturâ Rerum, et nom au commencement d'un livre :

traite amplement, et par le menu, du il n'y a point d'auteurs qui se citent


métier des sages-femmes. L'auteur sou- plus, volontiers eux-mêmes que ceux
tient que cette matière peut très-bien qui suppriment leur nom il n'est 5

appartenir à la plume d'un religieux, rien de plus ordinaire que de citer


à cause que l'ignorance des accou- des auteurs contemporains *'. Voyez
cheuses fait périr beaucoup d'enfans, ci-dessous la remarque (R).
et les prive pour jamais de la béati- (D) *' // a traité quelques questions
tude céleste. Pierre de Prusse moine touchant la pratique du devoir con-
,

de l'ordre de saint Dominique, sou- jugal. ] Pierre de Prusse , ne pouvant


tient que ce livre de Naturâ Rerum a disputer le terrain sur le fait, se re-
été composé par Thomas de Cantopré, tranche sur le droit, et montre dans
disciple d'Albert-le-Grand ^ et il ne le XVIIP. chapitre de son livre (5),
nie pas qu'on n'y trouve plusieurs qu'il est avantageux et nécessaire de
préceptes sur la manière de procurer savoir les choses naturelles , sans ex-
un heureux accouchement qui ne ception des impudiques ; et qu'ainsi ,
,

peuvent être exprimés sans des ter- Albert-le-Grand ,. et quelques autres


mes sales mais ce n'est point la na- casuistes, ont eu raison de travailler
:

ture, c'est la sensualité humaine qui sur des sujets remplis d'ordure car, :

a sali ces objets (a) Admodù,in suc- sans cela les confesseurs ne seraient
: ,

censet in blaterones illos, qui Alberto pas en état de remédier aux désor-
imposuerunt, quod egissetobstelrivem dres de leurs pénitens Qualia item : :

fassus tamen Cantipratanum ad in- niulta ah Alberto de usu conjugii


structionem obstetricum in Opère per- in-/^°.S. d. 3i, subfinem, scripto com-
perhiii supposito prœceplori ejus Al- prehensa Jatelur illud ex ipso Al- ,

berto iradidisse inodos et vias j'elicis berto ibidem prœfalus [ dicendum.


obstetrlcntionis, cujus prœcepta cliar- primo , quod hujusmodi turpes quœs-
tis committi nec voce tradi possunt tiones nunquam tractari deberent
absque expressione multoruni quce li- nisi illa cogèrent monstra quœ his
bido non naturâ Jœdai'il (3). C'eût temporibus in confessione audiuntur 1
été quelque chose de bien singulier ne ergo ConJ'essarii rudes sint medi- ,

que de voir Albert-le-Grand entre- cinœ quam facere debent adeo fre-
prendre sur le métier des sages-fem- quenlibus morbis justum censuit Al- ,

mes et mettre la main à l'œuvre *. bertus in illud oletum stylum demit-


,

Voyez la remarque (A) de l'arlicle tere (6). 11 serait à souhaiter nous ,

HlEROPHILE. dit-on qu'il n'y eût que les confes- ,

(C) Non plus que de celui de Se- seurs qui nourrissent leur esprit de ces
cretis Mulierum.] Naudé se sert de puantes écritures mais il faut qu'il ^

ces deux preuves i°. Albert ne s'est


: y ait des livres où l'on trouve la réso-
pas nommé au commencement de cet lution des cas de conscience qui con-
ouvrage celui qui l'a commenté dé- cernent ce vilain sujet Necessarium
;
:

bite un mensonge lorsqu'il soutient est enodationem solidam atque légi-


le contraire, a". On se sert fort sou- timant dubiorum circa fœdilates illas
vent de l'autorité d'Albert dans ce emergentium prostare alicubi apud
livre il faut donc juger que l'auteur probatos doctores
:
cujusmodi fuit ,

a uescu quelque temps après lui (4). Albertus, qui proindè reprehensione
*' Ces raisonnemens de Bajle contre ceux de
(2) Petrns de Prussià , in Albeiti Magni Vjtâ,
cap. XVIII. Naudé ne sont pas du goût de Leclerc. Dans
^espèce , cependant les uns valent les autres.
(3) Tteoph. Rayoaudi Hoplolh. , secl. Il, ,

'^ Leclerc et Joly ont renvoyé h V article San-


ser. III cap. X, pag. 3Ci.
,

* LecUrc remarque 1°. que le traite àe N'aturâ


CBEz la réfutation de cette remarque,
Rerura n'eslpoinC imprime; 2°. que ce n'est iju^un (5) Le titre de ce chapitre est : Quod scirc
recueil sur toutes les matières de Physique , et naluralia etiam impudica utile sit et necessa-
non un traite' iV accouchement. rium.
(4) Naudé , Apologie des grands Hommes , (6) Tlieoph. Raynaudi Hoploth. , secl. II ,

}>ag. 534 serm. III , cap.X ,


pag. 36i,
, ,

ALBERT. 36 1
vacat etiamsi illum ueluti scriptionis
,
thème l'a voulu justifier de cette ac-
putorem suis commentariis imrniserit cusation. Cela paraît par ces paroles:
(7). Mais il serait encore plus néces- IVon surrexit post eum uir similis ei,
saire d'abolir ce qui rend nécessaires qui in omnibus litleris scientiis et ,

ces sortes d'écrits; car, quelque bonne rébus tant doctus , eruditus, et exper-
que puisse être l'intention des au- tusfuerit. Çuod autem de Necro-
teurs , c'est à des livres de cette na- mantiâaccusalur, injuriam patitur uir
ture qu'on peut appliquer mieux qu'à Deo dilectus {lï ). Naudé prétend
cent autres le peccare docentes his- qu'on ne peut fonder cette accusa-
torias (8). tion que sur deux ouvrages qui ont
(E) On a dit qu'il traînaillait à la couru sous le nom d'Albert-le-Grand,
pierre philo sr>phale.'\ Naudé nous ap- et sur FAndroïde. Voilà donc deux
prend que Mayer le grand fauteur
,
preuves j voyons ce qu'il dira de cha-
des alchimistes n'a point eu honte
,
cune :

d'asseurer en ses Symboles de la table 1°. Le premier des deux écrits est
d or des douze nations (*') , que saint celui de Mirabilibus , Pautre est le
Dominique aidait eu premièrement la Miroir d' .Astrologie , oit il est traicté
connaissance de la pierre philoso- des autheurs , licites et défendus , qui
phale ; et que ceux à qui il l'aidait ont escrit de cette science (12). Fran-
laissée la communiquèrent à ^Ibert- çois Pic {*•) , et Martin Del Rio (*')
le- Grand, qui acquitta, par le moyen conviennent que c'est faire un grand
d'icelle, en moins de trois ans, toutes tort à Albert-le-Grand de le croire
les debtes de son éi'esctié de Ratis- autheur de celuy de Mirabilibus et ;

honne (9). Mayer se fonde sur trois qu'ainsi ne soit, le dernier le descharge
livres de chimie, qu'il attribue à Al- en ces propres termes Alberto Magno :

bert-le-Grand. On lui répond qu'il a tributus liber de Mirabilibus vani- ,

tort de les lui attribuer (io)j et on le tate et superstitione refertus est sed ,

prouve , tant parce qu'il n'y en a pas magno doctori partus supposititius.
un qui soit recueilli dans ses œui^res Le Miroir d'Astrologie a esté con-
ou spécifié par Trithème que parce ,
demné par Gerson (*') et agrippa ,

que celui de la Quintessence lui a (**J, comme superstitieux au possible,


été faussement attribué par François par François Picus (*') et beau-
et ,

coup d'autres a cause que son au-


Pic {*''). Pour prouver ce dernier fait ,

on n'imite point Velcurion (*^) , et theur maintient en icelui une opinion


Guibert (*'*), qui ont soutenu qu'Al- grandement erronée en faveur des li-
bert-le-Grand se moque des alchy- vres de magie qu'il soustient sauf un ,

Ttiistes et de leur transmutation pré- meilleur advis , devoir estre conservez


tendue dans son troisième lit^re des soigneusement parce que le temps ,

minéraux (*') on n'a garde de se


: approche , que pour certaines causes,
servir de cette preuve , i^eu qu'il y lesquelles il ne spécifie , l'on sera con-
soustient une opinion du tout con- traint de les feuilleter et s'en servir ,

traire ; mais on montre que l'auteur en quelques occasions (i3). Il semble


du livre de la Quintessence se qua- donc que si notre Albert avait com-
lifie religieux de l'ordre de saint Fran- posé un tel livre il le faudrait pren- ,

çois , composé lorsqu'il


et dit qu'il l'a dre pour un magicien mais Kaudé ;

estait en prison. Ces deux circonstan- n'accorde point cette conséquence


ces se doii^ent indubitablement rap- vu (jue le jésuite Vasquez dit formel-
porter à Jean du Rupëscissa, lement (*^) que les livres de magie
(F) On a dit-, qu'il était un insigne
magicien.] Il y a long-temps que Tri- (11) Trithem. de Scriptor. Ecclesiast., p. jqS.
(12) -N'audé, Apologie des grands Hommes,
{'î'i Idem, ihid. pag 523 524. ,

(8) Horat. Od. Fil, lib. III, vs. 19. (") Lib. VII de Prœnot. , cap. VII.
(") Disquisit. M.ig. , lib. I , cap. III.
(") VI.
Lxb.
('5) Libro de Libris Astrolog. non tolerandis,
(9) Naudé , Apologie des grands Hommes , proposil. III.
yag. 519. (•*;/« Epistolis.
(10) L'a même, pag. Szo. {") Lib. VII de Prajnot. , , cap. II.
l*') Lib. III àe Auro. (i3) Naudé Apologie pour
, les grands Hom-
<*') Lib. III Physie.
XIII., cap. mes , pag. SaS.
(**) Alchym. jmpugnalae lib. Il cap. VII. , (•6) Part. I, quœst. II, art. III, dispul. XX,
(*') TractaCu I, cap. IX. cap. IV, in princip.
,

362 ALBERT.
sont nécessaires , et les magiciens images , anneaux et cachets planétai-

permis de Dieu, afin que les libertins res estant en grande vogue, l'on a
soient aucunement relirez de l'a- tousjours creu depuis... que telles fi-
théisme (i4)- D'ailleurs, Naiidé pose gures ai'oient esté faites de cuiure, ou
en fait que Roger Baccon est l'auteur de quelque autre métail, sur lequel on
de cet ouvrage , comme François Fi- ai'oit travaillé avec la faiseur du ciel
cus le soutient dans son premier livre et des planètes (18). C'est sur ce pied-
contre les astrologues (i5). Voilà là que Naudé réfute les accusateurs
pour la première preuve de l'accusa- d'Albert ; c'est-à-dire, qu'il suppose
tion. Voyons maintenant ce qu'on ré- que la prétendue Androïde était com-
pond à la seconde : posée de métal. Il montre par de très-
2°. Il y a des gens qui ont cru fortes raisons qu'elle ne pouvait
,

qu'on pouvait faire des testes d'ai- ni entendre, ni parler, ni servir d'in-
rain sous certaines constellations et , strument au diable pour la parole ;
en tirer des re'ponses qui servaient de et que si le diable avait parlé dans
guide dans toutes les affaires que l'on cette machine , il l'aurait fait sans le
avait. Un certain Yepes rapporte {^) concours des organes métalliques qui
qu'Henri de Villeine en avait fait la composaient. Il n'aurait donc pas
une à Madrid , qui fut brisée par le été nécessaire d'employer tant de
commandement de Jean II roi de , temps et tant de cérémonies pour for-
Castille.Virgile, le pape Silvestre , ger cette machine une bouteille , ou :

Robert de Lincolne, et Roger Baccon, une trompette , n'auraient pas été


ont eu de semblables têtes, si l'on en moins propres à soudre toutes les dif-
croit certains écrivains (i6). Albert- ficultés d'Albert-le-Grand. Enfin,
le-Grand a été jugé plus habile; car Naudé remarque que ceux qui par-
on prétend qu'il m'oit composé un lent de cette Androïde n'apportent
homme entier de celte sorte , ayant aucune preuve du fait. Tostat avec ,

travaillé îo ans sans discontinuation tout son esprit et toute sa science ,


a le forger sous dii^ers aspects et con- ne laissait pas d'être fort crédule :

stellations les yeux pur exemple...


: ainsi son autorité n'établit rien. Si
lorsque le soleil estoit au signe du zo- l'on veut soutenir qu'une tradition
diaque correspondant h une telle par- répandue comme celle-là doit avoir
tie, lesquels il Jondoit de métaux mes- quelque fondement , Naudé en donne
langés ensemble, et marqués des ca- un fort plausible (19) : c'est qu'Albert-
ractères des mesmes signes et planètes, le-Grand peut avoir eu dans son ca-
et de leurs aspects dwers et nécessaires: binet une tête, ou une statue d'hom-
et ainsi la leste, le col, les espaules, les me semblable à ces machines de
,

cuisses et les jambes, Jaconnez en di- Boece dont Cassiodore a dit (*)
, :

vers temps, et montez et reliez ensem- Metalla mugiunt Diomedis in cere ,

ble en forme d'homme aboient cette


, grues buccinant, œneus anguis insi-
industrie de réuéler audit Albert la bilat aves simulatœ f'ritinniunt , et
,

solution de toutes ses principales dif- quœ propnam vocem nesciunt ab cere
ficultez (17). C'est ce qu'on appelle du/.cedinem probanlur emittere can~
FAndroïde d'Albert-le-Grand. Elle fut tilence.
brisée , dit-on , par Thomas d'Aquin , (G) Un grand miracle a parlé
qui ne put supporter avec patience pour sa justification. ] Selon le père
son trop grand caquet. Henri de As- Théophile Raynauld, les accusateurs
sia et Barlhétemi Sibille asseurent d'Albert disent qu'un jour des rois
qu'elle était composée de chair et d'os ; il traita Guillaume comte de Hol- ,

Pliais par art , non par nature : ce que lande et roi des Romains , qui pas-
,

toutefois estant jugé impossible par sait par la ville de Cologne ; et que,
les aulheurs modernes, et la i^ertu des pour rendre remarquable son repas,
il changea l'hiver en un été tout
(i4) Naudé, Apologie pour les grands Hom-
plein de fleurs et de fruits. Ilorridum
mes, pag. 527.
(i5) I-à même pag. 526.
,
hyenien in florigeram fructiferamque
(*) Àpud Einanuel de Monra secl. II cap.
, ,

Xr, art.VI. (18) L'a même pag.


,
S'il , 532. Il c'Ue Pereg.,
(16) Naudé , Apologie des grands Hommes ,
Qa. III , decad. cap. II. Qu. III.
pag. 528. (iq) I.d même pag.
, 5içf , 54o.

(17) La même, pag. S29, 53o. (*) Lib. / Variarum Kpisl. XLV.
,

ALEERT. 363
œstateni i^ertit , ut scrihil Tiilhemius jésuite Radérus a fait quelques vers
in Chron. Spanh. anno 1254 (^o)- latins sur Fincorruption de ce corps
Trithème le rapporte en efl'et. On (23). Ils finissent ainsi :

ajoute à cela la tète parlante le li- ,


IlUus (i4) doctas mirentur sœcula charlas
vre de 3Iirabilibus et celui de Se- ,
Miror ego salvas posl tria iœcla manus.
,

cretis Mulierum. Le père Théophile


re s'amuse point à opposer à ces sor- M.Moréri, au lieu de trois cents
tes d'accusations les éloges que plu- ans , n'en met que deux cents. Ce
sieurs historiens donnent à la vertu n'est ni sa coutume, ni son génie,
,

de l'accuse'. Il recourt au témoignage d'amoindrir les choses de cette na-


que Dieu lui-même a rendu à la sain- ture.
teté d'Albert par diverses opérations (H) Ceux qui lui attribuent l'in-
miraculeuses en préservant de toute
,
t^ention de l'artillerie se trompent.
]
corruption son cadavre, jusque» à au- « Jean-Matthieu de Luna (*) qui vi- ,

jourd'hui Testimn/iiiim quod ejus


:
3) voit il y a plus de six-vingts ans
sanctitali Deus perlilbuit, patratis in 3) (25) soustient
, contre , l'opinion
ejus giatiam viiris plerisque operibus, i> toutesfois de Polydore , Magius
et ipsius Alberti corpore ad hune 3) Mayer Puncirole , Flurence Ri-
,

usque diein à tabe et putrefactinne 3) vault, Bezoldus, ettous les autheurs


exempta. Cet apologiste ajoute que la 33 qui ont escrit de l'invention des
métamorphose de l'hiver en été et ,
3) bastons à feu, que ce fut Albert-le-
la tête parlante sont deux grands ,
3) Grand qui trouva le premier l'u-
mensonges , et que les deux livres 3) sage du gros canon , de l'arque-
en question ont été faussement attri- 3) buse et du pistolet (26) sans néan- •

bués à Albert-le-Grand et que saint ,


3) moins que j'aye remarqué dans
Thomas n'avoue point (*) qu'il ait 3) tous ces autheurs aucune chose qui
autrefois brisé chez son maître cette 3) peust approcher de cette opinion ,
tête parlante : Hyems in feris amœni- 3) sinon que telles machines furent
talem t^ersa, et caput œneum articu- )) mises en pratique de son temps ,
lalè loquens ad Deum FabuUnum
,
3) par un moine allemand
et qu'ils ,

sunt ableganda tanquàrn conjicta et )) nomment


Berthold Schuuarfz ou ,

Jalsh jactata de tanto l'iro... Libri au- 3) par un chimiste, lequel, au juge-
tem Magicicfui Alberto njfmgebantur 33 ment de Cornazanus auteur assez ,

sunt supposititii (21.) Voyez ce que ce 3) ancien demeuroit en la ville de


,

jésuite rapporte de quelques machines 3) Cologne en laquelle il est certain


,

qui rendent des sons très-harmonieux. )3 qu'Albert-le-Grand demeura tous-


Il veut bien qu'Albert ait eu une tête 3) jours depuis qu'il eut pris l'habit de
si artistement composée, que l'air que 3)jacobiu. Voilà comment Kaudé
3)

l'on y sonfllait y ait pu prendre les réfute son Jean Matthieu de Luna. La
modifications requises pour former la dernière chose qu'il affirme est fausse;
voix humaine. Quant à l'exemption car ceux qui ont fait l'histoire d'Al-
de pouriture voici ce que j'en ai lu
,
bert le-Grand disent qu'il entra dans
dans Thevet « Nostre Albert, après
: l'ordre de saintDominiquel'an 1222* ;

3) avoir vécu
87 ans mourut l'an de ,
(23) Bullart les rapporte , Académie des
» notre salut 1280 à Cologne où il , , Scienc. , tom. II , pag. 149.
3) s'estoit retiré pour estudier et là ; (2^) C'esi-a-dire , d'Aristote.
,

3) au milieu du chœur du couvent des {*) Libro de Rerum Inventorib. , cap. XII ,
foiio 10.
3> jacobins son corps est enterré, et
,
(25) C'est Naudé qui parle , pag. 5i8 de
i) ses entrailles furent portées à Ra- TApologie des grands Hommes , imprimée à
3) tisbonne lequel du temps de l'em-
, ,
Paris , l'an lôsS , «n-S".
i> pereur Charles-le-Quint
26) Moréri , au lieu de cela , ne parle que de
;

estoit en- ,
la poudre à canon, de quoi !Vaudé ne dit rien.
)) core entier et fut déterré par son
, foici , dit Leclerc , comme il faut arran-
X commandement, et après remis en ger le tout , suivant le pire Echard , qui e^t
exact. « Jlberl prit l'habit en Italie à la fin de
3) son premier monument. (22) » Le
' 122a , ou en 1223. Après avoir demeuré dans

(20) Theophil. RaynauJi Uophlotb. , seet. II, - son couvent pendant un an , il fut envoyé' pour
lerm. I , cap. XIV, pog. 149- » étudier à Padoue ou à Boulogne. De là il

(*) /// Contra Cent., cap. CIV. - passa en Allemagne , et > fut préfet des élu-
(ai) Th Raynaudi Hopbloth. , pag. i5o. • des , à Htldesheiin , et puis successivement

(22) Thevet, Histoire Jes Hgmmes illastres, » à Fribourg en Brisgaw à Batisbonne et à ,

tom. II pag. 8^.


,
• Strasbourg. Ensuite on l'envoya a Cologn:
, 5

364 ALBRET.
qu'après que ses supérieurs l'eurent » sus ses pieds (28).» On conto la
envoyé à Cologne pour y enseigner ,
même chose de quelques autres per
la théologie et la philosophie et , sonnes. Voyez la remarque (H) de
qu'il se fut acquitté de cet emploi l'article de Jean André : et souvenez-
avec l'étonneraent de ses auditeurs ,
vous de distinction des logiciens
la
il alla se faire admirer à Hildesheim , entre quantitas ntolis , et quanlitas
à Fribourg , à Ratisbonne , et à Stras- i'irtiitis. Le petit Albert-le-Grand
y
bourg ^ qu'il retourna à Cologne, Tan fait penser (29).
1240 j qu'il y eut , entre autres dis- (K) On verra ci-dessous quelques
ciples , Thomas d'Aquin auquel il , particularités.'] k Le livre de Set-retis
laissa sa chaire *' , lorsqu'il s'en alla Mulierum, attribué mal à propos
professer dans la ville de Paris; qu'a- à Albert-le-Grand est l'ouvrage ,

près avoir enseigné trois ans dans Pa- d'un de ses disciples nommé Uenri-
ris , il retourna à Cologne 5 qu'il fut cus de Saronia sous le nom du- ,

fait provincial de son ordre , l'an quel il a été imprimé plus d'une fois.
ia54 *'; qu'il fit les visites des pro- Voici les termes de Simler Henrici :

vinces à pied; qu'il alla à Rome par de Saxonia , Alberti ma^ni discipu-
ordre d'Alexandre IV ; qu'il y exerça li , liber de Secrelis Mulierum im- ,

la charge de maître du sacré palais ; pressus .^ugustœ anno D. 1498, per


qu'il y fit des leçons en théologie; .Antonium Sors (3oj Et dans le Ca- .

qu'il retourna en Allemagne , l'an talogue de M. de Thou, vous trouve-


1260 *^; qu'il y fut élu évêque de Ra- rez Henrici de Saxonia de Secrelis
tisbonne; qu'au bout de trois ans , Mulierum, de P^irtutibus Uerbarurn,
il obtint la permission de quitter son Lapidum ,
qunrundam animalium ,

évêché; qu'il retourna dans sa cel- aliorumque , m- 12, I^rancof., 161


lule de Cologne; que le pape lui com- (3i). 11 est visibleque le nom d'Al-
manda peu après d'aller prêcher la bert, plusfameuxqueceluide Henri,
croisade *'' par toute l'Allemagne et adonné lieu à la supposition.... Jean
la Bohème qu'en 1274 > il assista au
;
Pic de la Mirande dit qu'Albert-le-
concile de Lyon ; qu'il y eut le carac- Grand condamna dans un âge plus
tère d'ambassadeur de l'empereur ''''; mûr les livres de magie qu'il avait
et qu'enfin il retourna à Cologne (27). composés étant jeune. Androïde
Comment se peut-il faire que Naudé n'est point le mot dont on se sert
qui avait tant lu, ignorât toutes ces quand on parle de l'homme artifi-
courses d'Albert-le-Grand? ciel d'Albert-le-Grand. C'est un mot
(I) Notre Albert étail fort petit. absolument inconnuet purement de
]
« Quelques-uns écrivent que bai- , l'invention deNaudé qui l'a em- ,

M sant les pieds de sa Sainteté quand , ployé hardiment comme établi. »


J) il fut arrivé à Rome, lepape lui com-
» manda de se lever , le croyant en-
(28) Là même pag. , 148.
(29) Dans un autre ordre, le non est in tanio
') core à genoux , quoiqu'il fût des- corpore mica salis contient la même distinc-
tion.
ou
il enseigna d'abord la philosophie , et
(30) Simler, Epitorae BiblioiVi. Gesneri , pag.
>•

••puis la théologie. Le père Echard croit aussi 332.


" eju'il avait été à Paris vers 12>^8 et que de
• là il vint à Cologne. * Leclerc dans iu note,
,
(3i) A la page i56 de la II'. partie du Catal;
^
Bibliotli. Tbuan. 1679.
a dit Boidogne y au lieu de Bologne ; remarque
qu'il e'tait d'autant plus ne'cessaire défaire, que
Joly, qui, suivant son usage, copie Leclerc sans
le citer, n'a pas corrige cette locution.
ALBRET
-
( famille). Elle a été
., .
, l,
Saint Thomas, dit Leclerc, n'avait alors
•; pendant (JUelqueS SlCClCS 1 Une
qu'une anne'e d'e'iude it Albert son
et il suii'
de France par
,
(jgg pj^g iîlustres
mailre à Paris. Albert commença
élu mois d'octobre iil^S , et puis retourna a Co- lesgrands hommes qu'elle a pro-
logne, à la Jin de i'i48, ayant reçu le bonnet
de docteur. Saint Thomas le suivit encore celle duits, dont le mérite a brillé
foi'.
*^
dans les dignités les plus émi-
En 1255, dit Leclerc.
*' Au plus tard en laS^, dit
Leclerc. nentes du royaume. Tout le
**
Echard n'en dit rien.
"^ Leclerc remarque que Echard a montre' monde sait qu'elle a possédé la
qu'on n'avait nulle preuve de ces faits. Navarre et le Béarn. M. Moréri
(27) P'uyei. BuUart , Acadéin. des Scienc. ,
toni. II pag. i46,
,
et suiv. parle au long de cette famille ;
, ,,

ALBU TIUS. 365


j'y renvoie mes lecteurs et je . ton qui restât de tant de héros.
n'examine pas même si tout ce Sa famille avait mérité de finir
qu'il en a dit est correct. Je re- dans une occasion plus glorieuse.
marquerai seulement une chose Le maréchal d'Albret était mort
qu'il ne dit pas c'est qu'il ne : gouverneur de Guyenne deux ans
reste plus de mâle de cette gran- auparavant. Il avait obtenu , en
de maison depuis que le mar-
, i653 le bâton de maréchal de
,

quis d'Albret (a) fut tué en Pi- France ceux qui ont dit qu'il
:

cardie maison du mar-


, dans la le mérita pour s'être assuré de la

quis de Bussi-Lamet. Il avait personne du prince de Condé


,
épousé la fille unique du maré- ne savent pas bien la chose. Ce
chal d'Albret , son oncle l'an , ne fut point lui qui l'arrêta (ce
ifi62; mais il ne vint nuls en- fut M. de Guitaud (c) ) il ne fit :

fans de ce mariage. Apparem- que conduire les princes au bois


ment le maréchal consulta plus de Vincennes. Il commandait
les intérêts de sa maison que l'in- alors les gendarmes de la garde.
clination du cousin et de la cou- Il avait appris en Hollande le

sine car on dit qu'il n'y eut


; métier de la guerre , et s'appe-
guère de bonne intelligence en- lait le comte de Miossens. C'est
tre le mari et la femme. Elle sous ce nom-là qu'il reçoit beau-
s'est remariée avec le comte de coup d'éloges dans un écrit de
Marsan , l'un des fils du comte M. de Saint-Evremont (d) Il fut
d'Harcourt. Le marquis d'Al- fait chevalier des ordres du roi
bret, son premier mari était en le i". de janvier 1662, et gou-
,

état d'ariver aux premières char- verneur de Guyenne, au mois de


ges de la guerre. Il était déjà novembre \6-^o. Il avait épousé,
maréchal de camp , et il devait en 1545, Magdeleine de Guéné-
achever la campagne de 1678 ,
gaud fille puînée de Gabriel de
,

sous le maréchal de Schomberg Guénégaud trésorier de l'épar-


,

qui fut envoyé sur les frontières gne (e). Il a été l'un des héros de
de Champagne au commence- , Scarron cela paraît clairement
:

ment du mois d'août. Pendant dans les ouvrages de cet écrivain.


que son camp volant s'approchait
(c) Voj-ez Benjaminus Priolus, de Rébus
de Charleville le marquis d'Al- , Gallicis lib. V
, cap. lll.
,

bret lui demanda congé pour {d) Voyez les OEuvres diverses de Saint-
Evremont totn. II, pag. ^i, nn et suiv.
quelques jours. On n'a point édition de
,

Hollande en lÔgS.
douté que ce ne fût pour une af- {e) Voyez le père Anselme tom.
, II, p. 285.
faire de galanterie. Quoi qu'il en
soit il fut tué chez le gentil-
, ALBUNEA, lieu célèbre pro-
homme ci-dessus nommé qui se ,
che de Tibur (o), en Italie. Voyez
tira fort bien d'affaire, en justi- la dernière remarque de l'article
fiant sou alibi {b). Voilà le lit TiBUR.
d'honneur oti périt le seul reje— (a) Aujourd'hui Tivoli.

Charles A.manieu d'Albret.


(a) Il s'appelait
ALBUTIUS SILUS ( Caius )
(b) Voyez la Lettre CXX rfe Bussi-Rabu-
orateur ceieore An-
tin , I":. partie, pag. 262 , édition de Hol-
«'^dceur OU tPTnn«
réièbrp dii a AU-
temps d'
lande. guste , était natif de r^ovarre .
,

:i(>6 ALBUTIUS.
et il avancé jusqu'à la
s'y ôtait (A) Il lui arriva quelques disgrâces
chareo "d'édile; mais il en sortit rf«'« ^e Wre«//1 II croyait un jour ne
" 1, 1. r pousser (lu un beau lieu commun, en
• \ A.
cause d une insulte qui lin fut [y^^.^^^ ^'^„ ^j^^,,^^ ^^^^5^ j^,^, ^^^
,-, •
.

faite par d<'s gens qui avaient les cendres cl par la niemnire de
ncrdii hriir procès. C'était lui qui t^otre père, et uous ffa°nercz votre
qu'il eut enlumine et ac-
avait été Irnr ium'et qui leur 'f"»e.A,„^s
-, 1 tionne celte pensée le mieux nu il put,
' .
,„,,M<.n.;ait la sentence dans ce l'avocat nui lui
était opposé se mit
:

niciMC temps, ils \c renversèrent dire ÎVous acceptnns In condition. ;, :

d(; son Irilumal en le; tirant par All>utius ré|)liqua qu'il n'avait point ,

""''f ''*' Pi"fi q»'»» n'avait dit cela


les pieds. Cet alfront l'oMii^ea à ,

-.*. 1
'.
. (luc comme une figure de rhétorique,
. ,

sortir tout aussitôt de sa patrie, ^'^ ,,^„ bannirait les figures ,|„^ si
et à s'en aller à Rome , oii il s'as- l'on prenait ainsi les choses au pied
socia avec l'orateur Munacius tlf Uaufre avocat répliqua
la lettre.
q'"'»" pouvait vivre sans ces figures ,
Vlancu». I/éinulation les avant
... -, T.-
brouilles , il dressa un auditoire
,
,
et <|u elles n avaient qu a périr si elles
^«..i^icnt. Les jugesdonnérent lieu au
à part, et eiidii il se hasarda à serment; et ainsi Albutius perdit sa
plaider des causes. Il lui arriva cause pour s'entre amusé à de faux
Ij'iUans de déclamation. Il en eut tant
(luclnues disivrAces dans le bar-
' ' .
^ I' I 1- ' . •" »'«'pit, (ju il renonça au métier (1).
reau (A),, qui obligèrent a y re- 1
y,^;^; ^^ ^^,,^,,, dit Suétone Ciim in :

nommer, l'.lant vieux et iiiconi— Itte quadam centamuirali ab adversa-


rio quemul impiumerga parentes inces-
uuulé d'un abcès, il s'en retour-
-^ebat ju-vurandum quasi per figurant
na àlNovarre, OÎl , ayantCOUVO-
, -1 j' .
*" <^"tulisset « Jura per patris ma-
:

qu.' le |)eu])le,
, I
il représenta dans „ irUque cineresquiinconditijacent, »
une bnigue harangue les raisons et alla in hune modum, arripiente eo

qui reinpècliaient de vouloir vi- condiWmcm, ncc judicibus aspemnnti-


'""' """„^'"'-' ""'A'""' suiinvidiâ ne-
vre,' et se laissa mourir de faim
.., , . ,
, . iiotium oiflixil (3). Depuis ce temps-
[^,1)..Senecpie le peie , uui lavait 1;,l^s maîtres recommandèrent à leurs
OUI quelquetois , parle de lui am- élèves de ne se point servir de ces 6-
pleiiieut , et rappcnie plusieurs gures maià propos (3).

extraits harangues (A). H de ses {i^Scneta^yrirfalionelihnlIICoMror.


(2)Sueton. d«- t-lansUlielorib. en;». ^/.
lui donne l'éloo-e de n'avoir «U ,

ni sounrir m taire une iniure ;

et \\ appelle cela une grande pro- ALBUTIUS (Titus) philoso- ,

bilé : Horno siinirnœ pr-ohitiUis plie de la secte d'Epicure, alla de


</n/ncc fticcrc injtaiiun ncc j>a- Rome à Athènes dès sa première ,

Sénèipie le philosophe jeunesse, et prit un tel goût aux


ti scirt't.

aurait mieux delini la nature de manières grecques qu'il aimait ,

la probité. Mbutius composa une


mieux passer pour Grec que pour
ffutoriipic comme il e.»t aise de Romain y<7 ce qui donna lieu à '

le rccueiUird'unpassagedeQuin- une plaisanterie de Scévola (A),


tiheu ^l'V hupioUe I.uci!iu> tourna fort ma-
liencniont dans l'uno de ses sa—
(iil Su«ton. il>" O'avis. Rlioku-. im;'. f'T.
tires, connue nous [apprenons
.

,. ,,, ,

w Uw ;Mx«i«.. de Cicerou (6). ^ous apprenons


i^t-') Jtt»4iius . «iwi pbscurus yrcfissor lit- de ce mèuic auteur i". qu'Al- ,

irnlil ^ KA^ItutCti/n \ Quiulil. lusUt. . itC>. Il, <^a> Cieero in Bruto cap. 26 et 35.
.

ox^i» > (* Idem , Ub. l Je Finib. cap. 3. ,


, t

ALBUTIUS. 367
butius était un épicurien pas- Quem quidem locum cum multd fenus-
sionné (c) et qu'il aurait été
tate et omni sale idem Lucilius , upud
,
quem prœclarè Scœfoia:
meilleur orateur s'il avait eu
Grœcum te Àlbulî quàm Romanum atque
moins d'attachement à la secte Sabitiuin
, ,

d'Épicure {d) 2°. qu'il entendait Municipem Ponlt Trilanni , cenlurionum


,
;
Prœclarorum hominum ac primorum, signife-
bien l'érudition grecque (e) et , rdinque ,

MaluisU dici. Grœcè ergb Prœlor Jihenis


qu'il avait publié quelques Ha- ,
Id r/uodmaluKli, te, ciimad me accedt salulo
rangues {f) 3". qu'il avait été
; \U.ifi ,
inquam, TUe: lictores, turma omnC,
cohorsffue
dans les charges de la républi-
XoLÏfi. Hinc hoslis Mut! Albutius , Aine ini-
que qu'il avait gouverné la Sar-
;
tnicus (i).

daigne en qualité de propréteur


Voilà Cice'ron qui dit positivement
{g) , n'obtint point du
et qu'il qu'Albutius était alors prêteur à Athè-
sénat la procession (B) qu'il avait nes , et ne'anmoins les vers de Luci-
demandé qu'on fit en action de lius témoignent qu'Albutius faisant ,

des visites à Scévola , était salué en


grâces aux Dieux pour ses ex-
grec, et avec des airs moqueurs qui
ploits qu'il fut accusé de con-
; le piquèrent et qui le rendirent enne- ,

cussion (C) et banni (D) et qu'il mi de Scévola. N'est-il pas clair com-
;

s'en alla philosopher à Athènes me le jour que, selon Lucilius, c'é-


tait Scévola, et non pas Albutius qui
[h). La plaisanterie de Scévola fut
exerçait la preture ? Si Albutius eût
une semence d'inimitié entre eux été préteur, il eût reçu et non pas fait
deux (E). Les dictionnaires ne les visites 5 et s'il en eût fait, on n'au-
sont pas ici exempts de fautes (F). rait pas osé les recevoir avec des plai-
Je ne crois pas que notre Titus santeries piquantes. Je m'étonne donc,
ou que Cicéron ait donné la preture
Albutius soit le même
que celui à Albutius , ou que, s'il l'a donnée à
dont parle Horace (G) dans la IF. Scévola , comme il est très-apparent .

satire du IP. livre. On ne trou- on n'ait pas corrigé la faute qui s'est
glissée dans les éditions. Il faudrait
ve rien de ce médecin Albutius ,
lire lit à S cœuolâ estprœtore salutatus
,

qui est mis par Pline au nombre Athenis Albutius


(2) , et non pas , ut
des plus célèbres {i). a S cœi'old est prœtor salutatus Athenis
Albutius. M. Dacier cite ces vers de
(c) Idem, lib. /deNatiirâ Deorum, c. 33.
Lucilius, et les traduit de telle sorte,
(rf) Idem in Bruto
, cap. 26 et 35. ,
qu'il déclare que Scévola était préteur
(e) Cicero in Bruto d. 1. ,

à Athènes lorsqu'il se moquait d'Al-


(/) n,id.
ig) Tdem de Provinc. Consular. ca;?. 7, butius qui lui allait faire sa cour (3).
, ,

et in Pisonem cap. 38. , Corradus estime qu'Albutius étudiait


(h) Cicero Tusciil. y cap. 37.
, ,
à Athènes, et que Scévola y passa,
(i) Plinius, lib. XXIX, cap. I.
en faisant le voyage de Rhodes, dont
il est parlé dans le premier livre de
(A) Son goût pour les manières l'Orateur
(4).
grecques donna lieu à une plaisanterie (B) Il n'obtint point du sénat la pro-
de Scéi'ola.'] Elle consistait en ce que, cession etc.'] Cicéron parle
, de cela
quand il recevait visite d'Albutius à afin d'ôter aux amis de Gabinius et de
Athènes, il le saluait en grec, et le Pison la consolation qu'ils en tiraient.
faisait saluer en la même langue par Il leur fait voir
que les choses n'étaient
tout son monde. On ne peut sentir le point pareilles Hdc
consolationeutun' :

ridicule qu'il y avait là-dedans, si


l'on ne songe à l'action même. Voici (1) Cicer. de Finib. lib. I cap. III. , ,

(2) Corradius, in Brutum Cicer. pag. 189,


comment Cice'ron s'exprime Res verb veut :
que l'on corrige ainn. D'autres Critiques
,

bonas l'erbis electis grai'iter ornatèque sont du même sentiment. Vojez le Cicéron de
dictalas quis non légat ? nisi qui se M. Gronovius.
(3) Dacier sur Horace Satire // , liv. II
plané grœcum dici t'elit , ut a Scœfold pag , ,

121, édition de Hollande.


est prcetor salutatus Athenis Albutius (4) Corrad. ia Brutum Ciceroais pag. ,
189.
,

368 ALBUTIUS.
tur etiam T. Alhulio supplicationem vaient prié d'accuser Albutius (g). Il
hune ordinem denegdsse, qubd est pri- fut jugé que Pompée ne serait pas l'ac-
mùm dissimile : res in Sardiniâ cum cusateur. On peut donc conclure que
mastrucatis latrunculis à proprœtore ,
cette fonctio^n demeura à Caïus Julius.
unâ cohorte auxiliariiigesta , et bellum Le lecteur, qui ne le savait pas , ap-
cum marimis Syriœ gentibns ac tyran- prendra ici , en chemin faisant , qu'on
nis consulari exercitu imperioque con- n'approuvait point à Rome qu'un ma-
fectum. Deindè Albutius, quoda se- gistrat supérieur fût accusé par soq
natu petebat, ipse sibi in Sardiniâ antè subalterne JVeque ferè unquam i^enit
:

decrei^erat conslabat enim Grascum


: incontentionem de accusandoquiquœs'
hominem ac let^em in ipsd pro^>incid torfuisset, quin repudiaretur. Itaque,
quasi triumphdsse. Itaque hanc ejus neque L. Philoni in C. Seruilium no-
temerilalem senatus supplicatione de- niinis deferendi potestas est data ne- ,

negatd notai'it (5). On croit qu' Albu- que M.Aurelio Scauro in L. Flac-
tius commandait dans laSardaignel'aa cum neque Cn. Pompejo in T. Albu-
,

649 de Rome (6j. tium quorum nemo propter indignita-


:

(C) Ilfut accusé de concussion.'] On teni répudiants est sed ne libido t>io-
,

n'en peut douter après avoir lu ces landœ necessitudinis autoritate judi-
paroles : Mutins auieni augur, quod cum comprobaretur Apulée vient (10).
pro se opus erat ipse dicebat , ut de pe- troubler ce que j'ai tâché d'établir j
cuniis repetundis contra T. Albutium. car il dit dans sa seconde apologie
Is oratoruni in numéro non fuit juris ,
que C. Mutius accusa A. Albutius.
civilis inteUigentid , atque onini pru- Mais il est facile de répondre à cette
dentiœ génère prœstitit (7). Il n'est pas objection puisque, d'un côté, les per-
;

si certain que Mutius Scëvola ait été' sonnes dont parle Apulée ne s'appel-
l'accusateur ;
j'aimerais mieux dire lent point comme celles dont il s'agit
qu'il se trouva seulement mêle' dans ici , et que , de l'autre, on ne saurait
cette cause et oblige' d'e'claircir ou de
, appliquer au Scévola dont il est ici
soutenir quelque cbose qui le concer- question ce qu'Apulée remarque de
nait, et qui allait à la charge de l'ac- son C. Mutius. Il est certain que notre
cusé. Il avait assez d'éloquence pour Albutius s'appelait Titus, et non pas
un coup de cette nature mais d'ail- \
Aulus; et que notre Scévola se nom-
leurs il n'était point orateur c'est ce mait Quintus Mucius
: et, comme il :

que nous lisons clairement dans les était augure on le désignait souvent ,

paroles que j'ai citées. Quelques cri- par cette charge Quintus Mucius ,

tiques y aiment mieux cette leçon Scœvola augur. L'accusateur dont


:

Mutius autem augur, qubd opus erat, parle Apulée était un jeune homme
per se ipse dicebat (8) peu m'impor- qui faisait son coup d'essai pour se
:

te car, en lisant ainsi, on ne laisse mettre au monde pour se faire con-


^ ,

pas d'avoir lieu de conjecturer que Scé- naître dans le barreau Neque autem :

vola ne fit qu'intervenir dans cette glorhe causa nie accusai ut M. Anto-
cause, et parler sur quelque incident. nius Cn. Carboneni C. Mutius A. ,

Cette conjecture dont je parlerai en- Albutium


,
quippè homines erudi-
core dans la remarque (E), se confir- tissimi, juuenes laudis gratiâ primunt
me puissamment par une raison que hoc rudimentum forensis aperce sub-
Cicéron allégua contre celui qui lui ibant, utaliquo insigni judicio cit^ibus
disputait la charge d'accuser Verres. suis noscerentur, quimos incipientibus
Il dit que Caïus Julius ayant une sem- ,adolescentibus ad illustrandum inge-
blable dispute contre Cnéius Pompée, nii florem apud antiquos concessus
daus l'afTaire d'Albutius, se servit de diit ejcolet^it (11). C'est ce qui ne con-
deux moyens l'un que ce Pompée vient point à notre Mutius Scévola 5 il
:
,

avait été le questeur d'Albutius; l'au- fut consul l'an 636 de Rome (12) il :

tre, que les habitans de Sardaigne l'a- était vieux quand Cicéron n'avait que
dix-huit ans; c'est-à-dire, l'an de
(5) Cicero de Provinc. Coosular. d. 1. Rome 665 : et Albutius ne fut accusé
(6) Proust ,
Comraentar'io i;j usum Delphini,
in Ciceronem de Claris Oratorib.
(q) Cicero , Divinatione in Verrem, cav, iq.
(7) Ciciro in Briito, d. I. <\o) Idem, ibid.
(8) Corrad. in Brutum CiceroDÎs ,
pag. 18g. (11) Apul. Apolog. //.
Douza in Lucilium , pag. 99. (13^ Cicero , in LkUo , inil.
ALBUTILS. 36
qu'après son retour de Sardaigne où , T. ALbutius , nonne animo cequissimo
il était propréteur en Tannét; 649. ^thenisexsulpliilosophabatui?cuita-
Voyez la remarque suivante. Peut être nien illud ipsum non accidisset si
in
que les copistes d'Apulée ont peu à repubUcâquiescens Epicurilegihuspa-
Ytea , en passant de faute en faute, ruistet (i6j. M. Gassendi a
très-mal
couverti C. Julius , en C. MiUius. 11 cité ce passage, puisqu'au lieu
de si
est certain que € Julius a été l'accu- in republicd.... paruisset , il a dit nisi
sateur d'Aibutius; et si Apulée l'avait in republicd.... paruisset [i-]).
Ceux qui
nommé , il serait à cet égard dans voudront quelque preuve de ce que
l'exactitude maison ne saurait le jus-
;
j'ai ditqu'Albutius fut accusé à la
"''
titier en ce qu'il avance '
que "tous les
' '
,
' requête des habitans de Sjrdaigne
accusateurs qu'il a nommés étaient n'auront qu'à lire ceci Julius hoc sè- :

de jeunes aventuriers qui cherchaient cum autoritatis ad accusandum


nffere-
à signaler par quelque cause célèbre bat ,
quàd ut hoc tetnpore nos abSicu-
leuravénement au monde. 11 emprun- lis , sic liim ille ab Sardis rogatus
ad
te de Cicéron tous ces exemples com- ,
caussam accesserat (18). Joignez à cela
me M. Graevius l'a judicieu-
l'illustre ces paroles du chapitre XVI du 11^.
sement remarqué (î3) pourquoi donc : livre des Offices Aut patrocinio ut :
,

les réduit-il tous à une espèce puis- ,


nos pro Siculis , pro Sardis Julius.
que Cicéron en a fait diverses classes C'est ainsi qu'il faut lire avec Lam-
(i4^ ? N'est-ce point à cause qu'ils ne bin, ou pro Sardis, contra Albutium
lui eussent de rien servi, s'ils eussent Julius avec Manuce. Consultez Sué-
,

été divisés? Voilà une cause très-fé- tone (19).


conde de la falsification des faits. (E) La
plaisanterie que lui fit Scé-
Quand on ne les trouve pas tels qu'on t'ola fut une semence d inimitié entre
les souhaite , on leur donne , en les eux deux. ] C'est ce que Lucilius re-
alléguant , le pli et l'entorse dont on marqua dans ses Satires Hinc hostis :

a besoin. Mutî Aibutius hinc inimicus. Un sa- ,

(D; Il fut banni."} Nous ne trouvons vant homme a cru qu'ils étaient sou-
point cela aux mêmes endroits de Ci- vent appointés contraires, et qu'ils le
céron où il est parlé du procès d' Ai- furent nommément dans la cause de
butius , et ilne faut point s'enétonner; Graiiius accusé par Aibutius , et dé-
,

car, quand on ne fait point la vie d'un fendu par llutius. 11 dit que pour le
homme , on se contente de dire de moins Mutins eut beaucoup de joie
lui ce qui concerne le sujet présent. de l'absolution de Granius. Il prouve
Lorsque Cicéron a dit quelque chose cela par un passage de Cicéron au- ,

du procès d'Albutius, il n'avait en quel il avoue que d'autres ont donné


vue que les personnes qui avaient parlé une explication diflérente savoir , j

ou voulu parler contre l'accusé il : qu'Albutius accusa Mutius de concus-


n'était donc pas nécessaire qu'd tou- sion Sœpè inter se dissentirent et con-
:

chât à l'issue de cette cause. Lorsqu'il tenderent , ut qiàun Aibutius Gra-


a parlé de l'exil d'Albutius, il n'avait nium oppugnabat et Mucius eum de- ,

en vue que de montrer le bon usage fendebut, certè illo absolutogaudebat,


que l'on peut faire de Texil il ne fal- ut libro Secundo de Oratore scriptum
;

lait donc pas qu'il remarquiU pourquoi t'idebis quamuis aliter alii i'erba illa ,

Aibutius avait été exilé. C'est à nous sint interpretati , et putdrint ipsum
à faire un tissu de ces diflerens passa- Scœi'olain ab Albutio de pecuniis re-
ges jet, parce moyen nous trouve- pelundis accusatum fuisse , quàd ut
,

l'ons qu'Albutius, ayant été accusé de nos de uiro tali credamus adduci non
concussion, à la requête des habitans possumus (20). Je ne saurais m'accom-
deSardaigne, fut condamné et banni moder, ni du sens que ce critique re-
:

u4lbutius ccM in Sardinid triumphds- jette, ni de celui qu'il approuve. J'ai-


set,Romœ damnatus est (i5). Quid merais mieux croire que Cicéron a
(i3) Grsevios, Notis in Cicer. de Offic. , lib. (i6) Idem , lib. F^ Tnscalan. , cap. 3;.
II , cap. XI F. (ir) Gassendi, de Viiâ Epie, lih.JT, cap.
(i4) /' donne son accusation contre Ferres ri ,
pag. 188 in~fulio ou
, les Citations en
pour un exemple : il n'a donc point prétendu marge vont très-mal.
citer seulement ceux tjui avaient accuté dans (18) Cicero, Divination, in Verrera, cap. ig.
leur pretnière jeunesse.
(19) Sueton. Julio cap. 55. m ,

(i5} Cicero i>i PisOD, , cap. 38. (30) Corradns in Brutum Ciccr., p^g- iSq.

TOME I. 24
— . ,

370 ALBUTIUS.
voulu dire que Scévola fut mêle dans sunt libelli dicehat in Albano fun-
,

le procès de concussion
qui fut inten- dum situm pasiionibus semper vinci a
te à Albutitis ; et tellement raèlé que , villa agrum enim miniis dena millia
,

de sa condamnation devait résulter la reddere , villam plus t^icena (25).


iustification d'Albutius. Je suppose , Il n'est pas vrai que Lucilius se soit

selon cette conjecture , que Scévola moqué d'Albutius, comme d'un hom-
plaida sa cause à la charge d'Albutius, me qui mêlait des mots grecs avec son
et que de là est venu qu'il a passé latin Charles Etienne n'a pas pris le
:

pour l'accusateur. Je suppose qu'il se sens de ce poète il s'est imaginé que


:

tira pleinement d'affaire , ce qui ser- le ;t*'P« appartenait à Albutius j ce-


.. ;_i: j'AiK..4;„o Tû „.,„_
vit à la conviction d'Albutius. Je sup- pendant, c'est à Scévola et à ses gens
1

pose , outre cela , que ce dernier se qu'il le faut donner. Messieurs Lloyd
servit des registres du crieur Gra- et Hofman n'ont point corrigé ces
nius pour convaincre Scévola , et
,
deux fautes. Prenez bien garde que je
que sa preuve fut Jugée insuffisante. ne prétends pas nier qu' Albutius ne
Granius fut très-aise de l'absolution mêlât du grec à son latin. 3°. Ce que
de Scévola , et en fut raillé , comme Charles Etienne Lloyd et Hofman ,

s'il que les juges n'eussent


se fût réjoui supposent est très-incertain que le ,

eu aucun égard à ses livres ou à ses père de l'empoisonneuse Canidia soit


procès verbaux. Voici les paroles de le même Albutius dont il est parlé
Cicéron: Bellaetiam est familiaris re- dans la IF. satire du II*, livre d'Ho-
prehensioquasierrantiSfUtquiimobjur- race. M. Dacier croit que ce sont deux
gat'it
. _
AlbiMS Granium
ejus îabulis quiddam Albutio proba-
F I • 7j-._
,
quàd quùm
^/i.,.;„ — /.„
Albutius (36). 4°. Ces trois auteurs de
Dictionnaires se trompent lorsqu'ils
tum uideretur, et valdè absoluto Scœ- prennent l'Albulius de la II*. satire
vold gauderet neque intelligeret con-
, du II*, livre d'Horace pour un avaie
tra suas tabulas esse judicatum (-il). fiefle. Nous verrons bientôt que cela

Si l'on voulait d'autres preuves de est faux. 5°. M. Moréri se trompe


l'inimitié d'Albutius et de Scévola , auand il s'imagine que l'Albutius
je pourrais dire que Lucilius a intro- ont Cicéron parle au commencement
duit Scévola se moquant du style d'Al- du /'''". livre des Fins n'est pas le ,

butius (22). Je voudrais bien savoir même que celui dont il fait mention
d'où le père Proust a pris que la colère au 1". livre de la Nature des Dieux ,

de Lucilius contre notre Scévola ve- et au V*. livre des Questions Tuscu-
nait de l'amitié qu'il avait pour Albu- lanes. 6°. Il n'est pas vrai qu'Horace
tius contre lequel Scévola avait plai-
, dise qu'il y avait un Albutius, le plus
dé (23) ? Si Lucilius était ami d'Al- avare de tous les hommes qui avait ,

butius , il a vérifié la maxime qu'un , accoutumé de châtier ses domestiques


railleur préfère ses railleries à ses avant qu'ils entreprissent ce qu'il leur
amis (24) ; car nous avons vu com- commandait de peur disait-il, qu'il
, ,

ment ce poëte satirique se divertissait n'oubliât de le faire s'ils oubliaient


aux dépens d'Albutius. de se bien acquitter de ce qu'il leur
(F) Les Dictionnaires ne sont pas commandait. M. Moréri qui donne ,

ici exempts de fautes. ] 1°. Charles tout ce discours à Horace, a été trom-
Etienne prétend que Varron a parlé pé par Charles Etienne encore que ,

de noti'e Titus Albutius j et cela , ce dernier n'attribue pas formelle-


comme d'un poète qui avait fait des ment à Horace ce petit conte. Voici
satires à la manière de Lucilius , Lu- tout ce que dit Horace sur ce sujet :

ciliano stylo. Mais , quand on consulte


Mundus qui non offendet sordidus , atque
erit,
Varron , on trouve qu'il a parlé d'un In neulrain partein cultùs miser. Hic neque
Lucius Albutius : Nonne item L. Al- servis
butius , homo ( ut scitis ) opprimé Albutî senis exempta , dum munia didil
Sœvus eiil : neque sicut simplex Nœvius
doctus , cujus Luciliano characlere , ,

unclatn
Convivis prœbebil aquam (27).
(31) r.icero, lib. //, de Oratore, cap. 70.
(22) Voyei ci-déssous la remarque (G).
(i3) Proust. Comment, in usum Delphini ia (25) Varro de Ke Rusticâ , lib. III, cap. II
Cicéron. de Orat. lib. /, num. 72. ,

Dwnmod'o rituin (26) Dacier , Kemarq. sur la Satire /". du


(24^ II'. livre pag. l{0.
F.xcuiialsibi, non hic cuiquam parcel amico ,

Horalii Sat. IF, lib. /, vs. 34. (27) Horal. Salir. // , lib. II, vs. 65.
ALCA SAR. 37,
Il établit que la véritable propreté qu'il voulait passer pour Grec
(32) ,
n'est point outrée , et qu'elle s'éloigne, était justement taillé pour fournir
non -s uleinent de la saleté, mais l'exemple dont Horace avait besoin
5
aussi d'une exactitude trop scrupu- car tout homme qui affecte les maniè-
leuse et 'rnp recherchée (28). S'il avait res des pays étrangers
y mêle je ne ,

vu le soin excessif et servile que l'on sais quoi de forcé et d'exorbitant


qui
prend de la netteté des maisons en fait passer la chose dans le ridicule.
quelques endroits de Hollande , il au- Voyez ce que font certains provin-
rait nommé cela une fausse propreté. riaux SI souvent joués par Molière à
,
Albutiiiset Nœviussont les deux exem- l'égard des modes qu'ils ne savent ja-
ples (|u'il apporte de l'extrémité vi- mais tenir dans le milieu. J'ai de la
cieuse le premier est Texeniple du
: peine à croire qu'Horace ait amené
trop de façon ^ le dernier est l'exemple sur la scène Albutius le Grec, l'Albu-
du trop peu façon. Quelques inter-
(.le tius de Lucilius ; mais je ne trouve
prètes ont pris le cliang ils ont pris : pas si étrange que Torrent ius ait cru
Nœvius pour un prodigue et Albu- , cela. M. Dacier aimo mieux dire que
tius pour un avare (2g). Mais peut- l'Albutius d'Horace était fils de celui
être ne s'agit-il point là d'avarice et de Lucilius. Je crois que l'afiTectation
de prodigalité peut-être ne s'agit-il : d'Albutius pour le grec regardait le
que de propreté et de malpropreté. langage principalement où l'on sait ,

Ce dernier défaut est joint quelquefois d'ailleurs par les railleries de Lu-
,

avec la dépense superflue, il y a des cilius qu'il aimait un artifice trop


,

gen-i prodigues et en habits et en , , étudié Collocationis est componere


:

meubles , et en repas qui cependant , et struere verba , sic ut neue asper eo-
ne passent point pour se mettre bien , rum concursus neque hiulcus sit sed , ,

ni pour donner aux ornemens de leurs quodammodo coagmentatus et Icet^is.


chambres un arrangement bien en- In quo leptdè soceri (33) persona lu-
tendu, ni pour avoir une bonne table. sit is qui elegantissimè id facere po-
Quoi qu'il en soit, Ali)utius n'est point tuit , Lucilius ,

ici un exemple d'avarice. Je finis Quàiii le pidèlexeis composlœ , ut lesserulce


par observer que la barbarie d'Albu- onines
tius pour ses esclaves n'est pas une jltle, pavimenlo , al<]ue emblemale vermicu-
lato.
chose que M. .Moréri ait forgée il :

l'avait lue dans son patron (3n) mais :


Quœ ciim dirisset in Alhutium illu-
il n'a point su que la source en est
dens etc. (3^). Ces vers de Lucilius
,
dans un ancien scoliaste Asper in :
représentent une certaine espèce d'é-
exigendd à si'igulis impensi ratione crits qu'on pourrait nommer un ou-
castigandoque adeo ut seri^os nort- ,
vrage de marqueterie , un ouvrage à
numqu'ani castigaret prlUs et cœderet ia mosaïque.
quant peccdssent dicens uereri se ne ,

cîim peccdssent cœdere tune ci non , (32) Voyez M. Dacier , Remarques sur la
vacaret (Si). Satire I''. du II'. livre d'Horace.
(33; Mutius l'augure : d ou nous apprenant
(G) Je ne crois pas que ce soit le que Lucilius le faisait quelquefois parler dans
même que celui dont Horace parle. ] ses Satires.
(34; Cicer. de Oratore, lib. III, cap. 43.
Nous venons de voir que l'Albutius Vojez aussi son Orator. , cap. 43 et seq.
d'Horace était d'une exactitude ou-
trée qu'il ne pardonnait rien à ses
,

domestiques qu'il voulait que l'un


,
ALCASAR (Louis de) , jésuite
fît précisément ceci et l'autre cela , , espagnol («) , naquit à Séville ,
et qu'il entrait là-dessus dans un dé- l'an 1554. II entra chez les jé-
tail pédantesque. Celui dont parle
Lucilius qui afj'ectait si fort en tut
,
suites , l'an
la ré-1
569 malgré
,
,

la politesse et l'élégance des Grecs


sistance de sa famille qui possé- ,

dait de grands biens. Après avoir


(28) Voyei M. Dacier , sur ce passage. régenté la philosophie , il ensei-
(29) Le vieux Commentateur, Lambin, Cru-
•juius , elc. , d. 1.
gna la théologie à Cordoue et à
(30) Cbarles Etienne. (n) On Va fait Portugais dans /Index Je
(3i) Yelus Commenlator ia Horat. d. 1. TApocalypse de M. de Meaux. (Bos.suet.)
, ,

372 ALCA SAR.


Séville pendant plus de vingtSéville , le 16 de juin i6i5 , à
,
soixante ans (e). Vous
ans. Il s'appliqua surtout à la re- l'âge de
cherche des secrets de l'Apocalyp- trouverez l'exanaen de
quelques-

se , et il employa près de vingt unes


de ses hypothèses apocalyp-
bonnes années à ce travail (b). tiques dans l'ouvrage que M. Hei-
L'ouvrage qu'il a composé là-des- degger publia à Leide, l'an 1687,
sus est un des meilleurs que les sous le titre de Mjsterium Ba-
catholiques romains aient pro- bjlonis magnœ {f. )

duits sur l'Apocalypse (A). Il est (e) Alegambe lui avait donné soixante-trois
intitulé Vestigatio arcani sensûs ans : le pèi-e Sotuel a corrigé cette faute.
{/) A la /'^. et à la II'. Dissertation.
in Apocaljpsi , et il a été impri-
mé diverses fois (B). On prétend
(A) Son Commentaire est un des
que Grotius y a pris beaucoup meilleurs que les catholiques romains
de ses idées{c). L'auteur soutient aientproduits sur V Apocalypse.']'S oici
ce qu'en dit Nicolas Antonio Insig-
que l'Apocalypse est parfaitement
:

neni posuit opérant in adoriiando at-


accomplie usqu'au XX" chapitre
j
. ;
que illustrando Apocalypsis libro obs-
et il y trouve les deux témoins ciirissivio. Edidit nanique lucubratio-

sans parler d'Élie ni d'Enoch {d). nes suas ad ipsum , itigeniosas guident,
difficulté d'a- eruditas , elaboratasque , ut censet
Il ne fait aucune
Cornélius a Lapide. Sed quisnam
bandonner anciens pères
les et
sponsor erit telo eum quanwis acuto
;
,

comme toutes ses principales étu- etforli scopum tetigisse (1) Je suis ."*

des n'avaient pour but que l'ex- sûr qu'il n'y a point de banquerou-
tier ni de prisonnier pour dettes
plication de ce livre , l'autre ou- , ,

ne trouvât caution bourgeoise plus


vrage qu'on a de lui n'est qu'un qui
aisément que n'en trouveraient
les ex-
Commentaire des endroits du plicateurs de l'Apocalypse, s'il y avait
Vieux Testament qui ont du un tribunal sur la terre qui taxât à
,
de grosses sommes ceux qui auraient
rapport aux révélations de saint
cautionné les fausses explications.
Jean. Il fut imprimé après sa Pendant qu'on flatte ses passions en ,

mort sous ce titre In easVeteris :


croyant sans rien risquer on est cré- ,

Teslamenti partes quas respi- dule mais pour les cautions que Don
:

Kicolas Antonio demande c'est en


citApocaljpsis nempè cantica ,
,

vain que vous les demanderiez.


canticorum psalmos complu- , (B) Imprimé dii'er ses fois."] Le père
res multa Danielis aliorumque
, Alegambe ne marque que l'édition
librorum capita, libri V. Voilà d'Anvers, chez Jean Keerberge en ,

donc deux volumes in-folio qui i6i4i ettout aussitôt, il dit que l'autre
,
volume fut posthume. Si le premier n'a-
ne sont à proprement parler vait été imprimé qu'en «6i4 il aurait ,

qu'un Commentaire sur l'Apo- été posthume ; et ainsi on n'aurait ,

calypse; mais il y a un appendix pas eu raison de distinguer par-là l'un


d'avec l'autre. Il faut donc croire ,
à chacun celui du premier vo-
:
comme le remarque Nicolas Antonio ,
lume est un Traité de Sacris que le premier fut imprimé à Anvers
Ponderibus et Mensuris ; et ce- chez Jean Keerberge, l'an i6o4- Outre
lui Traité de Ma—
du second un cette édition Nicolas Antonio parle
,

lis Medicis. Alcasar mourut à


de celle de 1619 Antverpice , apud ,

JVutios et de celle de Lyon, en 1616.


,

(i) Sotuel , Biblioth. Script. Societ. Jesu, Draudius cote ces deux dernières édi-
pag. 557. tions et outre cela
,
une d'Anvers , ,
(c) M. de Mcaux , préf. de ^'Apocalypse
pag- 33, édilion de Hollande. (i) Nicol. Antonii Biblioth. Script. Hi-p, ,

(d\ Là même. loin. II ,


pag. i4-
,

AL CEE, 373
chez Keerberge en 161 1 (2). Le P., toire (e). Alcée n'oublia point
Sotuel, avec l'editioa de "6,4 ne ,
^^^^^ circonstance dans les vers
marque que les deux dernières de ,., . •
1 -

Nicolas Antonio et continue de dire


,
4"" "^ sur le malheur qui lui
que Tautre volume a été posthume, était arrivé (B).
Sa muse, à la-
Sa révision d'Alegambe n'a donc pas donnait de l'occupationquelle il
été aussi exacte qu
^ elle devait l'être. „,, ™;i,-c„ ,i„,, ^„
au „ -/
milieu des armes , soit pour
(.) Draud. Bibiiotheca cu,.ica pag. 2,. jg^ chansonsà boire,soit pour des
,

ALCÉE, natif de Mitylène , Chansons d'amour, et pour louer


dans l'île de Lesbos a été un des ^^, P^'^onne
qu il aimait (/), qui
,

plus grands poètes lyriques de " ^*'y^^"^. Vi^P ^^"^ ^'^^^ «e°^-
^'^^'^ ^, '^" ^9 \'^ ^^^«
l'antiquité. Il y en a qui veulent ^^^H^, '

point le silence sur la


qu'il ait été l'inventeur de cette "? S^»"^^
defVntedes Lesbiens.On sait d'ail-
espèce de poésie (a). Il florissait
dansla44^ olympiade (<^) en leurs quelle ne badinait pas tou- ,

même temps que Sappho , qui pui's , et quelle pouvait traiter


était de Mitylène aussi-bien que
noblement les matières les plus
lui. La chronique scandaleuse ^^^ ' ^^ ^"''t''^^ "" ^^^"
f^^^'^'
(A) dit qu' Alcée s' avisa un jour f^eu
commun contre les tyrans
de demander je ne sais quoi à Alcée suivait alors une pente for-
Sappho et que Sappho, qui n'é- tifiée par ses propres aventures
,

et par ses intérêts personnels


tait pas ce jour-là de si belle hu- ;

car il avait été aux prises avec


meur que d'ordinaire lui refusa ,
ceux qui avaient voulu emjoiéter
ce quelle lui offrit peut-être le
lendemain (c). Quoi qu'il en soit, sur la liberté de sa patrie , et
il se mêla d'autre chose que de
nommément avec Pittacus (E) ,
qui ne laissa pas ,~de devenir usur-
vers il voulut donner des preu- 1
: V : -' . ,

P^*^"*" q^oiq^iil ^it ete un des


ves de son courage à la guerre . '

sept sages de la Grèce. Il remit


et n'y fut pas tout-à-fait heu-
en liberté Alcée , qui était deve-
reux car il ne se sauva qu'en
;

fuyant et qu'en abandonnant ses


nu son prisonnier , et dit que la
rémission d'un crime vaut mieux
armes , lorsque les Athéniens ga- ti , .

châtiment (g-). Il yen a


, , , ^

gnèrent une bataille contre ceux 'l"^ ^f.


de Lesbos (J); mais il trouva dans ^^^ ^''^""^ qu Alcee fut chasse
avec beaucoup d'autres ; mais
cette disgrâce une assez douce
qu enfin il se mit à la tête de ces
consolation puisque les vain-
exilés ,jit la guerre aux tjrans
,

queurs firent appendre ses armes


et les chassa (/?). Je ne trouve
au teiBple de Minerve à Sigée :
dans Denys d'Halicarnasse si- ,
ce qu'ils n'eussent point fait avec
cette distinction , s'ils n'eussent
non que les habitans de Mitylè-
ne élurent Pittacus pour leur
jugé qu'elles seraient un monu-
chef, contre le poète Alcée et ses
ment très-glorieux de leur vie—
(a) Die Laiinum (e) Là même.
,

Barbite carmen ,
ij") Horace Je rapporte ses paroles
; ci-

Lesbio primiiin modiilale civi. dessoiis dans la rcrnarque [C].


llorat. Od. A'.VA//, lib.I , vs. 3. (g Heraclitus , apud Diogenem Laèrt. in
)

[b) Euseb. in Clirooic. Pitlaco, lib. I , num. 76.


(c) Le l'èvre. Vie des Poêles grecs, p. 27. (A) Dacier ,
sur l'Ode XIII du II', livi-e
\d) Herod. , lib. F, c-'/'. XCr. d'ilavAQi:,
2,

374 ^^^ ÉE.


qu'on avait bannis (i). etsi sa langue n'eût pas été prête à
adhérens ,
prononcer quelque malhonnêteté la
D'autres veulent qu'ayant abusé ,

honte ne lui serait point montée au


de la clémence de Pittacus , et visage et qu'il ferait une proposition
,

n'ayant point cessé de cabaler et raisonnable. Ceux à qui il est donné


d'invectiver , on cessa d'user de de juger des livres de M. le Fèvre ,
gens , comme il a dit dans sa premiè-
support à son égard (k) et que ;
re Journaline , qui ont l'âme capable
c'est ce qu'Ovide a voulu signifier de plusieurs formes , et qui sentent a
par ces paroles : demi-mot le beau et le fin des pensées
et des expressions voient bien que ,
Vtqne lyrœ vatesfertur periisse severœ.
ces paroles d'Alcée sont une de ces
Causa sit ex un dexlera Icesa lui.
déclarations d'amour qui demandent
Cela est d'autant plus vraisem- l'heure du berger, et que Sappho com-
prenait parfaitement ce qu'il voulait
blable qu'Alcée passait pour un
,
dire. Sa réponse est sage ; mais elle
homme qui s'opposait aux inno- est peut-être d'un trop grand sang-
vations , non pas parce que c'é- froid selon cette supposition.
,

taient des innovations mais par- ,


(B) // a ai'oué le malheur qui lui
était arriué de fuir (2) ] Celui de
ce que d'autres que lui les intro-
tous les poètes latins , qui ressemble
duisaient (/). C'est un défaut qui le mieux à Alcée,a confessé aussi-bien
lui est commun avec bien des que lui dans ses poésies qu'il s'était ,

gens. Il ne nous reste que des sauvé du combat en jetant ses armes
,

lambeaux de ses poésies.


comme un meuble très- inutile à des
fuyards :

(f> Dionys. Halicarn. Ant. Rom. , lib. V ,


Tecum Philippos et celerem fugam
cap. LXXXII. Sensi , rflictdnon benè parmuîd .,

Vide Dionys. Salvagnium Boessium


(A) Quum Jracta virlus et minaces
Comment, in Ibin pag. 102 et lo3. Edil.
,
Turpe solum leitgere mento (3).
in-l^°.

{[) Oùtî'' etùroç Ka,èctfiùaiv Archîlochusavaiteu la m(*meaventure


Tœv toioi/tûjv
viaiTipi(rf/.éèy , Ne ipse avant Alcée et s'en était confessé pu-
quidem punis sludii ,

ejusinodi novandarum reritm. Stiabo lib. bliquement (4). Horace n'aurait pas
,

XIII, pag.lizS. été peut-être de bonne foi jusqu'à ce


point, s'il n'avait eu ces grands exem-
(A) La Chronique scandafeuse etc ples devant les yeux. Chabot se trom-
,
.

J'ai rapporté les propres paroles de pe quand il soutient que P!utarque


M. le Fèvre, et je suis fort trompe' s'il a réfuté Hérodote sur la fuite d'Alcée
a pris ailleurs que dans la Rhétorique (5) Plutarque s'est contenté de dire
d'Arislote ce petit conte. Aristote cite qu'Hérodote a supprimé une belle ac-
ces mots d'Alcée :
tion de Pittacus mais non pas la ,

©Iàû) tIv iiTriiv. ÀXKo. y-i ncexmt mauvaise action d'Alcée (6).
AÎJœç , (C) La personne qu'il aimait n'était
que trop une aide semblable a lui. ]
et celte réponse de Sappho Horace nous apprend que la maîtresse
:

Al cT' ÎKÎ cr iThùêv «//tïf oç , h XctXœv , d'Alcée était un garçon qui se nom-
K«ti yUM Tl IITTIIV yKÔiiTa^ inuKO. kclkov , mait Lycus et qui avait les yeux et ,

AlJ'eiç K.I vv cr (jtJX ùx^v o/it/j.a.T\


les cheveux noirs :

"AXX ihiyiç TTip) TW (TtXou'û) (l).


Qui ferox bello, tamen inter arma,
Sive jactatam religdral udo
Voici sens de ces vers. Alce'e de'-
le Littore navitn ,

clare qu'il voudrait bien dire quelt|ue Musas Veneremque et


Liberitni et , iîîi
Semper hisrenlem puerum canebat
chose mais (|ue la honte l'en empê-
;
,

che. Saj)pho lui répond que s'il avait


(3) Herod. , lib. r ,
cap. XCV ; fï Strabo ,
désiré des choses bonnes et honnêtes, Uh. XIII ,png 4i2, 4i3.
Hoiat. Od.
(3) , ni
lib. II, l's. 9.

(1) Aristot. RVietoric, lib. J , cap. IX. No- (4) Voyez la remarque (H) de son article.
Ifz ijue je range et ijue f accentue ce grec comme (H) Chabor. in Horat. Od. XIII , lib. II.
Scaligcr iurJLufihK ,
png, 85, c'cUtion de iG58. {(>) Flutaic. de P-Ialign. Heiodoti , pag. 858.
, ,,

ALC
El Lrcwn nigris oculis nigroqiie
Crine décorum {•)).
,
Quintilien Alcœus in parle operis
:

aureo plectro mérita donatur qud ty-


C'est apparemment le même que celui rannos insectatur. Multtim etiam mo-
qui avait une tache au doigt, laquelle ribus confert in eloquendo brei'is et
, ,
lui servait d'une parure tout-à-fait moguificus et diligens ,pleràmque ,
charmante , selon le goût de ce poète : tiomero similis sed in lusus et amo- ,

JVcefus in articula pueri delectat Al- res descendit major ibus tamen
aptior
,

cœum , at est corporis macula nœfus (13). Joignez à cela l'épithète de me-
illi tamen hoc lumen viJebatur (8). naçantes, qui a été donnée à ses muses.
Cice'ron dit en un autre lieu qu'en- ,
Et Àlcœi MIHACES
core qu'Alce'e eût témoigné beaucoup Slesichorique graves
,

Camocnœ (i3).
de courage , il avait rempli ses vers
d'une excessive pédérastie Fortis t^ir : (E) Ilfut aux prises avec Pittacus.'\
in sud republicd cognitus , quœ de Il vomit contre lui des injures fort
jut^enum amore Alcœus (g) ?
scriptit grossières iH'appelaptetf-p/at grosse
:
,

En tant qu'amoureux, il se compare à bedaine , etc. , comme nous l'appre-


un pourceau qui mangeant un grain , nons de Suidas , sous le mot s-aciTot/s,
de gland , en dévore déjà des yeux un et de Diogene Laèrce , dans la Vie de
autre. Moi
pareillement , disait -il, Pittacus. La modération de celui-ci
pendant que je jouis d'une belle Jîlle fut fort louable , et a paru telle à Va-
j'en souhaite une autre. 'A Zç riv /îix*- lère Maxime Pittaci quoque modera-
:

tione pectus instructum , qui Alcœuin


l^ityce ttxiS'a X.XKKV t*v /aiv S/^û) , Tav poëtam et amaritudine odii et viri~
Kadri. Scipion Gentilis rap-
S' ipa.ua.1 bus ingenii adversiis se pertinacissimè
porte cela dans ses Notes sur l'Apolo- usum , tyrannidem a cwibus delatam
gie d'Apulée , page 65. adeptus tantummodà quid in oppri-
,

(D) Sa muse pout^ait traiter noble- inendo posset admonuit (i4)>


ment matières les plus grattes.
les ] (12) Qulnl. , lib. cap. I. X
,

C'est ce qui a fait dire à Horace : (li) Horat. OJ. IX, lib. , vs. 7. IV
(14) Valer. Haxim. , Ub. IV, cap.I, ext.
Et te sonantem plenius aureo ,
Alcœe, plectro dura naris ,
,

Dura fugœ inala , dura belli I ALCEE , Athénien (a) , poète


Vtrumque sacro digna silentio tragique, fut le premier, selon
MiranLur umbrœ dicere sed inagis :

Pugnas et exactos tyrannos quelques-uns ,


qui composa des
Densum hwneris bibil aure vulgus (^lo).
tragédies. Si l'on en croit Suidas,
M. Dacier remarque sur ces paroles , il est différent d'ALCÉE poète co-
i". Que d'Alcée était noble et
le style
mique cinquième de l'ancien-
, le
Jort , et qu'il traitait des matières plus
relei^ees que celles que traitait Sappho ne comédie et fils de Miccus. II ,
,

qui dit de lui dans O^ide ,


renonça ce semble , à sa patrie ,
,

Nec plus Alcœus consors palriœque Lyrœque qui était la ville de Mitylène et ,

Laudis habet, quamvis grandius illesonel.' se dit Athénien (b). Il laissa dix
2°, Qu'Horace lui donne le plectre d'or, pièces dont l'une était intitulée
parce qu'il parle de cette partie de ses Pasiphaé : ce fut celle qu'il pro-
Ouvrages, où il décrit^ait les guerres
duisit lorsqu'il disputa avec Aris-
cifiles qui étaient arrii'ées a Mitjlène,
et les diverses factions des tyrans Pit-
tophane, eula4^. année de la 97*.
tacus , Myrsilus , Megalagyrus , les olympiade (c). Athénée cite quel-
Cléanactides et de quelques autres
, ques-unes des autres. On ne sait
(i i) et que ces poésies étaient appe-
,
pas bien si l'Endymion cité par
lées <rt;toç-st3-i*ç-fità, 'TTwÀy.a.^a. ,
poésies
sur les séditions. Il cite ce passage de
Pollux appartient à Alcée le tra-
gique ou à Alcée le comique ;
(:) Horat. Orl. XXXII
lib. I, vs. 6,

(8) Cicero de Xaturâ Deoriim lib. /, cap. 28. . (a) Suidas.


(g) Idem, Tuscul. O'-se^t. If^, cap. 33.
MiTt/XJivaioç, 4;t* 'AQvivaioç. Idem,
(10) Horat. Od. XIII, lib. II, ys. 26. (fi)

* Ovid. Epist. XV, vs. 2p. (c) Scholisst. Aristophan. in Àrgiimento


(11) Strab. ,lib. XIII. va;. 4?^. Phili.
376 ALCÉE.
mais il y a die tous ces Alce'es souffrit pour ses
l'apparence que la
pièce intitulée Cœlunt était du impudicités un genre de mort
premier ,
puisque Macrobe la ci- bien singulier (B). M. Vossius ,
te tragédie {d). Je trouve à la page 42 de ses notes sur Ga-
comme
dans Plutarque un poëte Alcée tulle croit que ce fut celui qui ,

qui diffère de tous les précédens satirisa Philippe , roi de Macé-


(e), et qui est peut-être le même doine. Il le prend pour le comi-
que celui dont Porphyre a fait que , et se trompe puisque ce ,

mention comme d'un faiseur comique était contemporain d'A-


d'ïambes satiriques et d'épigram- ristophane.
mes,qui avait fait un poëme tou-
(A) Philippe se défendit contre la
chant les larcins de l'historien chanson d' Alcée par une autre chan-
Éphore {f). L' Alcée de Plutar- 50«.] Voici quelle en était la sub-
que vivait en la i45^. olympiade, stance :

l'an de Rome 555 , comme il pa- Sans feuille aucune et sans escorce aussi, ,

Ami passant on a fait ici tendre.


raît par la chanson qu'il composa
,

Sur ce costeau cette potence-ci .^

sur la bataille que Philippe , roi Expressément pour Âlcœus y pendre (i).

de Macédoine perdit dans la , (B) Un de ces Alcée s souffrit un


Thessalie. Cette chanson faisait genre de mort bien singulier M. Vos- "l

fuir Philippe plus vite qu'un sius rapporte {11 cette épitaplie tirée
d'une Anthologie qui n'est encore
cerf, et amplifiait le nombre des qu'en manuscrit :
,

morts , afin de lui faire plus de


'Axjcstioi/ Tst^oç oÛtoc OV iX.Ta.ViV 'Tt'KA-
dépit. Néanmoins Plutarque as- il

sure que Titus Flaminius ,


qui Ti^œpoç fj.fiiX'^^ y^i ôiiyÂTup pÂ-
avait gagné cette bataille se ,

trouva plus choqué des vers d' Al-


Cela signifie qu''Alcée mourut de la
cée que Philippe à cause que la ,
peine des adultères, qui consistaitdans
chanson nommait les Etoliens une certaine manière d'empaler. C'est
avant les Romains et semblait ,
qu'on leur fichait au fondement une
des plus grosses raves que l'on trouvât.
par-là donner aux Etoliens le
Au défaut de raves on prenait un ,

principal honneur de cette vic- poisson, qui avait la tète fort grosse,
toire. Philippe se défendit con- comme nous l'apprend le scoliaste
tre la chanson d' Alcée par une de Juvénal sur ces paroles de la X*^. Sa-
tire , quosdatn mœchos et mugilis in-
autre chanson (A). Il faut avouer
trat.Par-là on comprend cette me-
,
que Plutarque donne au consul nace de Catulle :

romain une sensibilité bien ou- Ah tiin te misèrum , malique fati ,


'.

trée. On parle aussi d'un Alcée Queiii aUraclis pedibus , patente porta ,
Percurrenl raphanitjue mugilesque (3)i
messénien qui vivait sous l'em-
pire de Vespasien et sous celui Lucien parle de cette sorte de puni-
de Titus (g). Il y a quelques-unes tion mais il ne décide pas si le crimi- ;

nel en mourait et n'est pas peu difie- ,


de ses épigranames dans l'Antho-
rent de son scoliaste. Ils disent tous
logie. Je ne sais point lequel de
(i) C'est ainsi iju'Amiot a traduit ce grec;
(rf) Macrol). Satura. lib. , cap.
, V XX. A^^vOfoç naît à.'^vKhoç , oé'oiTrofi, tçd «T' im
(e) Plut, in Flaminio , pag. 3^3.
vceTùD AAKatiû) ç-etupoç TrriyvuTctt tiKiCxTOç.
(y^ Porpliyr. flysKiiEuseb. Prœpar. Evang. Plutarcli. in Flarn. pfl.?. 373.
,
lib. V, cap ///, pai;. 467. CatuUiim pag.
(2) Isaac Vossius îa , t^'i.

(^) Tzelzes in Lycoplir. apiul Gyrald. de (3) Caliil. Epigr. XVI , vs. 17. Voyez sur ce
l'nct. Dial. A', pag. 5l2, edit. anni lôgô. passage Partbenius , Muret , Achille Stalius.
ALCHINDUS. 377
deux qu'on battait bien le paillard j en i52i avec les corrections
,
mais le scoliaste dit qu'on ne lui
d'Antoine de Fantis, médecin de
fichait la rave que lorsqu'il éfait près
d'expirer sous les coups qu'il avait Trévise en Italie {h). On ne sait
,

reçus. Lucien nous insinue tout le pas bien en quel temps a vécu
contraire car le rutîen dont il parle,
; Alchabitius.
ayant été' bien battu , sauta en bas du
toit, et s'enfuit avec la rave qui lui
{h) Gesner. in Biblioth. et ex po Vossius de
Scient. Mathem., pag. 354 «' ^ftg.
bouchait le derrière Ka.Tst toS Tîy-juç :

Àxo/uivo; t»v 7ruy»v


S'ii<piiyi fn<^a.viS'i (A) Il a composé une Introduction
fiiCt/a-f/Avoç (4). De tecto desiliens au- à la Connaissance des influences céles-
_fugit natibus raphano oppletis. M. Vos- tes.^ Le titre du livre dans Gesner et
sius ne devait pas conclure de ce pas- dans Simler est Isagr>ge ad mugiste-
,

sage de Lucien , que ce supplice n'é- rium jiidiciorum astrorum , l'el ad


tait pas mortel ; car il y a bien de scrutanda stellaruni magisteria. Vos-
l'apparence que , si le patient ne se sius le donne d'une aulre manière
^
fût sauvé , il lui en eût coûté la vie tôt mais qui revient au même sens Isa- :

ou tard. Les deux vers que M. Vossius gogeadscrutandaastrorumindicia(i).


cite et qu'il prend pour le discours
,
Je pense que ma traduction française
d'une adulteresse, qui disait à sa com-
y revient aussi mais M. Moréri, ayant
;

mère que si au lieu de la rave, on se


,
pris un mot pour un autre dans Vos-
servait du supplice de la croix contre sius, initia pour indicia, nous adonné
leurs galans , personne ne viendrait un titre assez incompréhensible Iln- ,
plus vers elles ces deux vers dis-je,
: ,
troduction pour connaître le commen-
-sont une meilleure preuve ([ue les pa-
cement des astres. 11 paraît que Vossius
roles de Lucien (5). Les commenta-
avait cru lire indiciorum où Gesner ,
teurs de Diogéne Lacrce ont fort bien et Simler ont mis judiciorum.
compris à quoi Menedème visait, lors Notez que le Traité d'Alcliabitius ,
qu'il dit à un adultère insolent que , de la Conjonction des planètes a été ,
le suc des raves était utile : Tlpoç <fs rov traduit eu français par Oronce Fine fa);
et que M. de la Mare dans sa préface ,

ÏX^' Aipràv > iKXai


e£///.ôvcv Kfi/z-C» /^t/Xov
sur les OEuvres des quatre frères
pA^nviJ'iç (6). Audacter exuUanti
scoLi
Guiions * cite les notes manuscrites
,
atlultero a Ignoras inquit de Pierre Saumaise, conseiller au par-
non modo brassicœ succuni inesse uti- lement de Dijon sur Alchabitius de ,
leni sed et raphano ».
,
Inimicitiis Planetarum. Je tiens cela
(.f) Lucian. de morte Peregrinî. de M. de la Monnaie.
(5) Ex Hpsychio in c*<Çstvitra'5»vai. Voyez
(i) Vossius , de Scient. !tlatbem. ,
pag. Bgp.
aussi le Scoliaste d'Aristophane >ur les Nuées.
(2) Du Verdier, 6ibtiolbéqiie française, p. 20,
(6l Diog. Laert. , lih.II nuin.
, 128. Vide * Leclerc dit qu'il fallait écrire Guyon.
ibi Âldobrandinum et Menagium.

ALCHABITIUS astrologue ALCHINDUS médecin et as-


,
,

arabe , composé une Introduc- trologue parmi les Arabes. Car-


a
tion à la Connaissance des in— dan l'a compté entre les douze
Jluences célestes (A). Il a écrit esprits sublimes qu'il regardait
aussi de la Conjonction des Pla- comme les premiers de tous ceux
nètes^ et un Traité d' Optique ^ui qui ont excellé dans les sciences
fut trouvé dans un couvent d'Al- {a). C'est renchérir sur Alboha-
lemagne et apporté à l'auteur zen Haly, et sur Haly Rodoan
, ,

du livre de Lumine animœ. Ses qui lui ont déféré le titre de


ouvrages d'astrologie traduits grand astrologue et sur Rasis et
,
;

par Jean de Séville («) furent Mesué , qui le traitent de très-


,

imprimés à Venise en 1491 ^^f c docte et très-expérijnenté méde- >

l'exposition de Jean de Saxe et (rt Cardan, de Subtilit. , Ub. XVI. >'audt',


,
darts son Apolog. des grands Hommes pag. ,

(a) Joannes Hispalensis, 35^, ampUJie trop le témoignage de Cardan.


, ,

378 ALC lAT.


cin , et sur Averroes et Wimpi- puis lui Pierre d'Apono et Pom—
na aui l'appellent subtil phi-
, ponace {h). Ces gens-là pour ,

losophe. On peut juger de son trouver leur compte supposent ,

esprit et de sou érudition par que les choses sublunaires dé-


les deux livres imprimés que l'on pendent entièrement des cieux ;

a de lui : de Temporum Muta- quelles reçoivent toutes leurs pro-


lionihus , et de Gradibiis medi- priétés les unes des autres , et
cinarimi compositarum investi- que chacune les reçoit du total
gnndis. On en trouve beaucoup par le moyen de certains rayons
d'autres cités fort souvent par les corporels qui ,
passant des plus
auteurs sous les titres de Ralione petites jusqu'aux plus grandes ,

sex Quantitatum ; de Quinqué sont la cause , à ce qu'ils disent,


Essentiis; de Motii diiirno ; de de tout ce qui se fait dans la na-
f^egetabilibus et de Theoricd , ture. Nous ne savons pas au vrai
Mogicarum Arlium. Ce dernier quand Alchindus a vécu; mais on
ouvrage a donné sujet à tous les ne peut pas mettre au-dessous
le
démonographes de parler d'Al- du XIP. siècle, puisque Averroes
chindus comme d'un pernicieux fait mention de lui. Il y a un Ja-
magicien. François Pic et Con- coBUS Alkindus que quelques-uns
rad Wimpina ont discouru am- confondent avec celui dont je
plement des hérésies , des blas- parle (A).
phèmes et des absurdités qu'on (è) Naudé, là même, etpag. suivantes.
remarque dans ce livre. Le fa-
(A) Quelques-uns confondent un
meux Jean Pic ne paraît pas en JacoDus Alkindus ai^ec celui dont je
avoir jugé si désavantageuse- parle."] Wolfgang Justus fait vivre ce
ment puisqu'il a dit qu'il n'a-
,
Jacobus Alkindus sous le pape Eu-
vait reconnu que trois hommes gène troisième en 1145, contempo-
,

rain d' Averroes et d'Avicenne il dit :

qui eussent effleuré la magie na- que c'était un médecin et un philoso-


turelle et permise : savoir , Al- phe arabe (i). Les bibliographes attri-
chindus Roger Baccon, et Guil-
,
buent les mêmes livres à Alchindus
et à Jacobus Alkindus. Vossius sem-
laume, évêque de Paris. Ce qu'il
ble les distinguer ; car, quand il parle
y a de plus certain au dire de d'Alchindus , il ne lui donne que le
Gabriel Naudé , dont j'emprunte Traite' de sex Quantitatibus , et ne
cet article , est , ï° que cet ou- marque point son âge mais il met :

vrage est rempli de superstitions Jacobus alkindus en 1 235 et il lui ,

donne entre autres livres un Traite' de


et de doctrines tout-à-fait con-
Radiis Stellarum (2). C'est sans doute
traires à notre foi et telles qu'on le même livre que Gesner allègue sous
,

le doit attendre d'un mahométan le titre de Radiis Stellicis et qu'il ,

qui écrit fort librement ce qu'il croit être de Jacques Alkindus, quoi-
que le nomde Jacques n'y soit pas joint
pense; 2°. qu'il n'y aurait nulle à celui d'Alkindus.
On jugerait par le
apparence de l'accuser de magie titre seul qu'il appartient à celui qui
uisque, bien loin de s'amuser à a été' suspect de magie.
a magie théurgique ou goétique,
r= (i) Àpud MercUiDum in Lindenio renovalo. ,

Vossius de Scient. Mathemat. pag. 6j


son dessein n'a été autre que de el (2)179.
, ,

rapporter à la nature tout ce que


l'on attribue aux anges bons ou ALCIAT (André), grand ju-
mauvais c'est ce qu'ont fait de- risconsulte, a fleuri au XVI''. siè-
;
. , ,,

ALCIAT. 379
cle*'. Il était d'unriche mar- fils sion qui avait été d'abord de six
chand de Milan (A), et il naquit cents ëcus. Alciat professa cinq
en cette ville au mois de mai ans à Bourges , et il acquit de la

1 492 *'(«). On prétend que sa mè- gloire mais il se servit d'une


:

re ne sentit presque aucune dou- ruse pour obtenir une augmen-


leur lorsqu'elle accoucha de lui tation de gages (D). Il mêlait
(b). Après avoir étudié les huma- beaucoup de littérature à l'expli-
nités sous Janus Parrhasius qui ,
cation des lois et chassait heu- ,

enseignait à Milan c) il fut étu- , reusement la barbarie de langa-


dier en droit à Pavie et à Bolo- ge qui avait régné jusque-là dans
gne (d) , et s'attacha principale- les leçons et dans les écrits des
ment aux leçons de Jason dans , jurisconsultes. M. de Thon le
la première de ces universités loue fort noblement là-dessus ;
et à celles de Charles Ruinus ,
M. de Thou , dis-je , qui d'ail-
dans la seconde (e). Après sa pro- leurs mal instruit de son
était
motion au doctorat , il s'appli- histoire (E).La harangue que ce
qua au barreau dans la ville de professeur fit sur-le-champ à
Milan {fj, jusqu'à ce qu'il se vit François V, qui était entré dans
appelé pour une chaire de droit son auditoire (F), plut beaucoup
par l'université d'Avignon (B). Il à ce monarque. François Sforce
remplit cette charge avec tant duc de Milan se crut obligé à ,

de capacité que François V" le, faire revenir dans la patrie un


crut propre à faire fleurir la ju- homme qui pouvait y tant bril-
risprudence dans l'académie de ler ;en vint à bout en lui
et il

Bourges. Il l'y attira donc *', en donnant outre de gros gages ,,

i529 (C); et dès l'année suivan- la dignité de sénateur. Alciat al-


te , il lui fit doubler *^ sa pen- la donc enseigner le droit à Pa—

*' Joly renvoie aux Mémoires de Nicéron,


vie mais il passa peu après à l'u-
;

dont cependant il corrige quelques fautes niversité de Bologne (g) et s'y ,


'^ Joly ava l d'abord adopte l'opinion de
arrêta quatre ans. Puis revint il
la Monnaie (/ni reg ardait , d'après Naudd ,

le nom d'Alciat comme un nom de patrie , à Pavie , d'oii il alla à Ferrare


tiré d'Alzato bourg du Milanais et s'ap-
, ,
(h) ; attiré par le duc Hercule
puyait sur des vers latins signés Andréas
Alzalus Victor pour croire que f^ictor était
,
d'Est qui tâchait de rendre cé-
,

le nom de J'amille. Mais, dans ses Correc- lèbre son académie. Elle reprit
tioQS et Additions , Joly déclare que cette
conjecture de la Monnaie eslfausse,
son éclat sous un professeur si
(a) Voyez la remarque (E). couru ; mais au bout de quatre
\b') Pauzir. de Claris Legum Interpret.
lib. II cap. CLXIX, pag. 353.
,
ans, Alciat la quitta pour retour-
,

(c)Minos, in Vitâ Alciati. ner à Pavie , oii enfin il trouva le


(</)M. Teissier, Elog tirés de M, de Thou, vrairemède de son humeur incon-
iom. I, p. 3â, citant Claude Minos, dit qu'Al-
stante (G), je veux dire la mort
ciat étudia à Vérone. Je n'ai point trouvé cela.
[e] Panz. de Claris Leg. Interpret., lib. II,
le 12". jour de janvier i55o(z).
cap. CLXIX.
(/) Minos Vitâ Alciati.
in doiib/c'e , mais soiilcmcnt augmentée de trois
"^ Leclerc d'après tin passage d'une
,
cents ècus.
lettre d'Alciat, dit fort bien que cène fut pas (5') ^^ J" fi^ •"' harangue inaugurale , le 3
François I"'-, mais les magistrats et les pro- de noi-embre iSSy.
fesseurs de Bourges, qui l'avaient vu en 1 52^, (//) H Y fil sa harangue inaiio-iiralc , eu
qui l'engagèrent à y revenir. 1543.
** remarque Ex
Leclerc qu'elle ne fut pas (il Panziroli de Claris Lfg. Interpirt ,
38o ALCIAT.
Il n'avait pas encore cinquante- fort éloignée (n). Ce François Al-
huit ans accomplis. Paul III lui ciat succéda et aux biens et à la
fît un accueil honorable en pas- chaire d'André , et se rendit cé-

sant par Ferrare , et lui offrit de lèbre à Pavie par ses leçons de
l'avancement dans les dignités jurisprudence. Le cardinal Bor—
ecclésiastiques. Alciat se conten- romée , qui avait été son disci-
ta de celle de protonotaire, et ne pie , le fit venir à Rome et lui ,

voulut point renoncer à la pro- servit de si bon patron auprès de


fession en droit (H). L'empereur Pie IV, qu'il lui fit avoir un évê-
le créa comte palatin et sénateur, ché , la charge de dataire , et un
Philijjpe , roi d'Espagne (*) , chapeau de cardinal (o). On a
passant par Pavie lui fit présent quelques Traités de jurispru—
,

d'une chaîne d'or. On croit que dence de ce cardinal Alciat , qui


la maladie dont Alciat mourut mourut à Rome , au mois d'avril
lui était venue d'avoir trop man- i58o, âgé d'un peu plus de cin-
gé {k); car il avait le défaut d'é- quante ans. Voyez Sicius Ery-
tre non-seulement fort avare, threus , au chapitre XLVII de sa
mais un grand mangeur (I). C'é- seconde Pinacotheca. Ceux qui
tait un gros homme et de grande disent que notre André passa
taille (/). Après que sa m.ère fut toute sa vie dans le célibat , se
morte dans un âge fort avancé , trompent (K). Il s'érigea de très-
il eut envie d'employer son bien bonne heure en auteur , comme
à la fondation d'un collège mais comme je l'ai observé dans la re-
;

ayant reçu un affront de quel- marque (B). Il a publié beaucoup


ques écoliers insolens , il aban- de livres en droit , et quelques
donna ce dessein , et choisit pour Notes sur Tacite , la latinité du-
son héritier François Alciat , quel lui paraissait d'une extrême
jeune homme de grande espé- dureté (L). Muret s'emjiortabeau-
rance, qu'il avait élevé chez lui coup contre cette délicatesse dans
{m) , quoique leur parenté fût l'une de ses harangues {p). Alciat
n'en sentit rien, car il était déjà
lib. II, cap. CLXIX.Vovez louchant le temps '^ j» . . •*• •

de sa mort la remarqie (E) à la fin.


,
^Ort maiS d autreS CritiqueS ,;

(*; Alciat, à qui on veut que Philippe et nommément Florid US Sabînus,


ait fait présent d'une chaîne d'or mourut ea
l'attaquèrent de SOU vivaut ,
l55o. Or ce prince ne parvint a la couronne 1 „ ^. . . , -,

que par 1 abdication de l'empereur son père, lui firent bien Sentir IcurS deutS
en 1 556 Si M. Bayle avait fait cette ré-
^^ Je^^S OUgleS iq). ScS Emblè-
flexion, il aurait dit prince a tspagne et , Pp ^-''
, . ,

non pas roi d'Espagne. Du reste cette pe- meS Ont ete lort estimeS , et OUt
,

tite inadvertance est proprement de Panzi- mérité OUe trois OU quatre SavaUS
rôle que M. Bayle ne fait ici que copier. ^ , ^^ . , , -, .

Rem. cRiT. les aient ornes de Commentaires


(A) Ex cibo quem largiorem sumere con- (M). On a trop loué SeS poe'sies ,
sueverat morbum contraxit. Idem ibid. ,
comiiie M. BaiUet l'a remarqué
(/,! Virfuit corpulentus procerœ stalurœ.
,

Panzir. de Claris Legum Inttrpretibus, /iô, aurait fallu d'ailleurs qu'il eût été fort
II cap. CLXIX. M. Teissier, tom. II pag.
, , vieux.
.I94 de ses Eloges lui donne pourtant une
, [n) More'ri la fait de l'oncle au nei'eit.
taille mrdiocre. (o) Panzir.de Claris Leg. Inlerprel., lib.
(;n) // n'est donc pas vrai >/u'il eut à y II cap. CLXIX.
,

Naples en l6(î6
, ,un pelit-lils du j^raud {p) C'est laXVII'. du II", tome. Voyez
Alciat. l'oYCZ Voyage du Docteur lîurnel,
/(,' aussi Bodini Meth. Hist-, cap. IV p. 85. .^

pa'^ 339 , édition de ftulltrdam en [68S. Il


.
, (y) Cl. Minos in Vilâ Alciati.
,
,

ALCIAT. 38i
finement au tome III des Ju- composé dans quatre jours : on
gemens sur les poëtes numéro ,
le trouva dans cabinet deScri-
le
vérius(v^). Il est daté du 7 de juin
Il de ceux qui ont i553 (N).
n'est pas
persisté dans leurs premiers sen- {v) Voyez l'Epître dédicatoire de M. Mat-
ttisus.
timens car on trouve dans ses
;

Parerga, qui est un ouvrage qu'il (A) // était fils d'un riche marchand
publia sur ses vieux jours la ré- de Milan.'\ J'ai suivi Panzirole, le seul
,
des auteurs que j'aie consulte's qui le
tractation de plusieurs choses que
fasse Gis d'un homme de cette profes-
le feu de la jeunesse lui avait fait sion Ex Joanne pecunioso negotia- :

débiter précipitamment ; et lors- tore Mediolaniferà nullo parentis do-


qu'on réimprima en iSag, ses lore natus et educatiis fuit (1). Les au-
,
tres font plutôt fils d'un gentil-
le
Dispunctiones il fit savoir (r) ,
homme d'ancienne famille Andréas :

qu'en retouchant ce livre-là il ,


Alciatus in pago Alciato seu Alzato
n'avait point prétendu donner Mediolanensi natus è nobili Alciato-
son approbation à tout ce qu'il rum familiâ. C'est ainsi que Claude
Minos * débute (2). On ne peut pas
y avait mis dans ses jeunes ans, m'objectcr qu'en certains lieux la qua-
ni s'ôter la liberté de changer lité de marchand et celle de gentil-
d'avis. Cette remarque a été faite homme ne sont pas incompatibles 5
par un apologiste de l'empereur car lorsquelles sont jointes un histo- ,

rien ne parle guère de la plus faible,


Justinien {s). On (f) fit imprimer
sans parler de la plus forte. Puis donc
à Leide , en 1695 , une lettre que Panzirole n'a parlé que du négoce
qu'André Alciat n'avait point du père d'Alciat , il semble qu'il n'ait
écrite pour le public , car il fai- pas été du sentiment de Claude Minos.
(B) Il s'appliqua au barreau... de
sait une description trop forte
milan, jusqu'à ce qu'il se uit appelé...
des abus de la vie monastique. par V université d' Ai'ignon,'] Pour le
Il écrivit cette lettre à Bernard coup, je me garde bien d'adopter le ré-
Mattius qui avait été son collè- cit de Panzirole. Si je l'adoptais, il fau-
,
drait que j'assurasse qu'Alciat ayant ,
gue , d'un coup et
et qui tout
étéfaitdocteuren droit civilet endroit
sans consulter ses amis , s'était canon, l'an i5i^, à l'âge d'un peu plus
fait moine dans l'ordre de saint de vingt-deux ans, enseigna premiè-
François. On lui représente doc- rement à Pavie, et ensuite à Avignon :
Primiim itaque Ticini professus pos-
tement et éloquemment son im- ,

tea Ai'enioni docuit (3). Si je disais


prudence. Cet écrit d'Alciat fut cela , je démentirais Alciat lui-même,
* La Monnaie dans ses notes sur les Ju-
qui , dfans une harangue qu'il récita à
,

gemens des Savans ( Enfaas célèbres, n. 3g)


Pavie , que lorsqu'il obtint
déclare ,

rappelle les de cinq ouvrages d'Alciat ,


titres six cents écus de gages à Avignon il ,

omis par Bayle , et qui ne sont mentionnés n'était jamais monté en chaire Ai^e- :

que par J. de Nevizan, à lajin du l"'. livre nioni ciim nunqu'ani ad eam diem ca-
de sa Sjlva nuptialis. Nevizan parle de six thedram ascendisseru slipendium sex-
ouvrages et tous les sijc sont énume'rés par
,

Leduchut. Joly , d'après le père Montfau-


centorum mererer (4). Le récit de Pan-
con , cite quelques manuscrits d'Alciat et , Pamir, de Claris Legaminterpret., lib. II,
(i)
d'après Jordan quelques lettres qui sont
,
cap. CLXIX pag. 353. ,

dans la bibliothèque publique de Sainte-Eli- * Leclfrc dit qu'il fallait écrire Mignault :

sabeth à Breslau. c''est en ejfetle vrai nom de l'auteur qui tradui'


,

sil son nom en latin par Minos.


(r) Voyez la préface du Livre.
(2) Minos in Vilâ Andreœ Alciati. Ghilini ,
(s) Gabriel Tnvorius, Observât. Apologet..
,

Lorenzo Crasse Paul Frelier , Bullart , etc. ,,


ad Inscript. Orationis ad Antecessoies, pag. le font sortir d'ancienne noblesse.
187, édit. Paris, an. l63l. (3) Panzir. deClaris Leg. Interpreljb., p. 353.
(0 M. Mattlisus Professeur en droit, à
,
(4) Voyez /«Commentaires surles Emblèmes,
Leide. pag. 612 , édit. de Padoue , en 1661 ,
in-l^".
,,

383 ÂLCIAT.
ziroleest d'ailleurs suspect de faussetej » ans après l'avoir compose' (7). »

il marque une extrême


néjiligeuce : L'ouvrage que je cite m'apprend que
on Y voit qu'Alciat n'a point encore le coup d'essai d'Alciat fut VEaptica-
vingt-trois ans en lôi^ et cepen- j
tion et la correction des termes grecs
dant son epitaphe rapportée par , qui se trouvent dans le Digeste ; que
Panzirolé trois pages après, témoigne ce livre parut d'abord en Italie, et
qu'il avait près de cinquante-neut ans quelques années après à Strasbourg,
au mois de janvier i55o il en avait : en i5i5. J'ai lu quelque pari (8;, que
donc vingt-cinq en i5i7. Ce que Pan la première c/(^</tcace qu'Alciat ait faite
ziroie assure, qu'Alciat publia ses Pa- de ses OEuvres est de l'anne'e i5i3 , et
radoxes et ses JJispunctiones , environ que c'est celle des trois derniers livres
l'an i5i7, ne peut pas être èclairci par du Code. Ce qu'il y a de bien sûr ,
Claude Mines j car jamais chaos de c'est qu'il publia ses Paradoxes dé- ,

livre ne fut plus absurde que l'en- diés au chancelier Antoine Du Prat
droit où ce dernier écrivain a parlé de environ l'an i5\-j C9 11 publii
.

l'édition des Paradoxes d'Alciat. Duo ron le même temps ses Dispuncliones
devint post annos dit-il (5) , ,
cùm ci- dédiées à Jean de Selve président du
,

l'ilis et pontijicii juris profeisoriis in- sénat de Milan et ses Prœtermissa ,


,

signibus donatus esset , Paradoxa et dédiés à Jacques de Minut conseiller ,

Dispuncliones in publicum emisit ,


au même sénat et ancien professeur
,

opus ut ipse dicit elaboratum horis


,
, en jurisprudence à Orléans. 11 était
succisivis et a candidato adhuc et
,
professeur àAvignon dès l'année i52i;
tirone. On ne saurait comprendre à car dans TEpître dédicatoire dé son
quoi se rapporte le terme duodecim * ^ Traité de l^erborujn Significatione ,
car tout ce qui précède est le récit de datée de Bourges le i*"^. mai iSag , il
diverses stations d'Alciat et de sa , dit qu'il y avait huit ans qu'il l'avait
manière d'enseigner le droit. Si l'on dicté à ses écoliers.
pouvait entendre par ces paroles de Je viens d'apprendre que Budé, dans
Minos, qu'Alciat publia ses Paradoxes une lettre écrite à Christophle Lon-
douze ans après sa promotion au doc- gueil , au mois de février 1620 (10)
torat on dissiperait tout le chaos ;
, a fait mention d'une visite qu'Alciat
mais alors, que deviendrait Panzirolé, lui avait rendue quelque temps aiipa-
qui place l'édition de ce livre environ ravant à Avignon. C'est M. de la
le temps du doctorat, c'est-à-dire en- Monnaie qui m'a fait part de cette
viron l'an i5i7? Que deviendrait Ti- particularité. J'ajoute qu'on a publié
raqueau, qui assure « qu'Alciat fit un à Utrecht quelques lettres de notre
3) ouvrage important vers l'âge de Alciat, qui témoignent qu il était pro-
qu'il
» uingt ans (6) ? C'est celui que nous fesseur en jurisprudence à Avignon
j) avons sous le titre de Paradoxes du u
dès l'an 1 5 1 8 ( ) ; que ses gages mon-
5) Droit cii'il qu'il divisa en six li-
,
taient à cinq cents écus ; et qu'il avait
1) vres, et qu'il dédia au chancelier Du sept cents auditeurs. Deux ans après,
» Prat , étant à Bourges , en iSag , il écrivit qu'on lui donnait six cents

j) douze ans après l'avoir publié dans écus, et quelques autres gratifications j
» son pays, en prenant le bonnet de et que son auditoire était composé de
« docteur y mais dix-sept ou dix-huit plus de huit cents personnes , parmi
lesquelles on pouvait compter des pré-
(5) Minos , in Viiâ Àlciati. lats , des abbés , des comtes (12^. Il
* » Si, dit Jolf,Bayle avait su que MignauU quitta cette profession , et s'en re-
« traduisit lui-même la vie d'Alciat.... il aurait
tourna à Milan vers la fin d'octobre
,
1. voir f/ue MignauU a effectivement voulu
pu
> dire qu^ Alciat mit au jour ses Paradoxes douze
i522*. Entre plusieurs choses qui l'en-
» ans après qu^U eut reçu te bonnet de docteur.-
Joly , pour discuter l' lige d^ Alciat, s^appuie en- (7) Baillet , Enfans célèbres , pag. 126.
suite siirJ. de JMevizan qui parle de cet auteur à (8; Dans les Recherclie* de Pasquier, liv. IX,
la fin du premier livre de jaSylva nuptialis, mais chap. XXXIX ,
pag. 901.
l'édition de iSig quU elle de ce livre est toul- (9) f^oyez la préface des Paradoxes , au-de-
k-fait inconnue ; la plus ancienne paraît être vaut de Ve'dilion de iSîç).
de 1^11. Alciat avait alors vingt-neuf ans. (10) Acommencer l'année au mois de janvier.
de Jur. PrimigeD., pag. i58 , cite (11) Epist. Gudii, etc., pag. 76.
(6) Tiraci-
Enfans célèbres , pag. 126, o« vous (i2j Kpist. Gudii , etc. , pag. 78.
par Baillet ,
* Leclere prouve qu'il y était dès te 5 avril
trouvera aussi cités Ghilini,Theatrum LiUerat.,
pag. I, et Pieinell. Athen. Milan., pag. a6, 28. l52I.
,

ALCTAT 383
gagèrent à cette retraite , celle-ci fut Puis donc qu'au dire de Panzirole il y
la principale qu'on ne lui payait
,
avait été appelé l'an iSaS, il faut qu'il
point ses gages assez promptement ne l'ait quittée qu'en i533. Comment
depuis que la ville d'Avignon s'était aurait-il donc pu enseigner quelfjues
endettée à cause de la maladie con- années à Pavie depuis sa sortie de
tagieuse outre qu'on lui fit entendre
:
Bourges , et aller ensuite à Bologne
que si la peste revenait
,
il faudrait ,
l'an i532 ? Sa Dissertation du Duel,
qu'il consentît à une diminution de dédiée à François F' , est datée d'A- .

gages. Il rejeta cette condition (i3). vignon le i*^"^. de mars iSag. La pré-
Il s'appliqua au barreau dans sa pa- face de ses Paradoxes est datée de
trie et trouva cet emploi plus lucratif
,
Bourges le 24 d'août iSag. Voilà qui
qu'il ne l'avait espéré (i4)' I' s'arrêta est décisif contre Panzirole. Il nous
en Italie jusqu'à ce qu'il eût accepté reste deux faussetés à relever l'une :

la profession qui lui fut offerte dans de M. Moréri , l'autre de Paul Frelier.
l'académie de Bourges (i5) *' Celui - là dit que la libéralité de
(C) François I"... l'attira a Bour- François I" attira Alciat en France ,
.

ges en iSag.] J'ai mieux aimé sui- où il enseigna à Ai^ignon : selon ce-
vre Minos et M. Catherinot (i6) que ,
lui-ci, Alciat alla enseigner dans cette
Pauzirole. Ce dernier anticipe d'un ville lorsqu'il ne faisait que de sortir
,

an cette vocation: Z)ej/2f?è, anno iSaS de l'école de Parrhasius (19). C'est


Bituriges qiib magna studiosorum mul- une fausseté absurde que de dire que
titudo ad ejus famam conjluxit artt- . la libéralité d'un roi de France fait
plo I20O aureoruni stipendia à Rege venir un professeur au pays d'autrui ^

Francisco est conductus (17). Je n'ob- et qui ne sait que depuis qu'Alciat
,

jecte point à Panzirole que la pen- ,


eut quitté l'école de Parrhasius il ,

sion ne fut d'abord que de dix-huit alla étudier à Pavie et à Bologne ,


cents francs ^* et qu en la doublant , et qu'il fut reçu docteur en i5i7 et ,

l'année suivante , on la porta à la qu'il fit imprimer des livres avant que
somme qu'il a marquée ]'ai de plus : de professer dans Avignon ?
grands repi'oches d'inexactitude à lui (D) Il se sentit d'une ruse pour ob-
faire. 11 dit 1°. qu'Alciat ne put de- tenir une augmentation de gages.'] Ce
meurer en France que peu d'années , fut de faire par ses intrigues qu'on lui
parce que François Marie duc de , adressât une vocation de la part de
Milan lui ordonna de revenir et le
, , l'académie de Padoue. Vossius qui ,

menaça de la confiscation de tous ses m'apprend cela craignait qu'en dif-,

biens en cas de désobéissance 2°, ; férant de répondre à ceux qui lui of-
qu'Alciat , étant retourné chez lui fraient une profession dans l'académie
enseigna quelques années à Pavie , de Cambrige il ne se fût rendu sus-
,

jusqu'à ce que à cause des guerres, il


, pect d'un pareil manège ; car ajoute- ,

s'en allât à Bologne l'an i532. Il , t-il, la plupart des gens en usent
est certain qu'Alciat séjourna cinq ans ainsi Quis rerum meuruni ignarus ,
:

à Bourges cela paraît par les vers


: aliud sibi persuadere possit quant diu- ,

qu'il fit en la quittant : tinarn hanc in respondendo cessation


Urbs Biturix , invilus amans te desero ainan- nem indè duntaxat aiit potissimiini ,

tein , saltem promanare


,
ut i'ocatione an-
,

Quinque per œstates terra habilata mihi (18). glicand aliquid mihi apud Batauos
lucelli acquiram ? Scinius id plerisque
(i3) Ibid., pag. 96.
(i4) Ibidem. vioris esse. Nec notant hanc ejftigit
(i5) Ibid., pag. 106. sumnius jurisconsultus Anilreas A.I- ,
*' JLeclerc prouve encore que, lorsque Alciat
ciatus Biturigibus Pata^ium
, ciim
quitta r Italie ou il se trouvait mal, il n'avait
d'autre intention que de venir à Avignon , dans i^ocarelur. El ille qiiidem callidè hoc
Vespoir d'y trouver un poste, egerat ipse , ut l'ocaretur. Mihi , ut
(16) Il dit, dans la première page de son Cal- scis , ne per somnium taie quid cogi-
vinisme de Berri o«'Alciat_/îr sa première leçon
tanti spontè apud i^ns professio obluta
,

à Bourges, te lundi 19 d'avril iSîg.


(17^ Panzirol. de Clar. Leg. Interpretibus, lib. est. lue item imniane quantiim aucto
,

II, f.ap. CLXIX. stipendia , apud Biturigias remansit.


** Leclerc remarque que les e'cus ne valant
alors que d''ux livres ou Jrancs , la pension
Ego , uti hoc nunqiiam egi , ita nec
n^e'lait d'abord que de 1200 fr..
(18} MÎBOs , in Vitâ Alciati. (19) Freheri Viror. illuslr. Theatram , p. 8?6
,

384 ALCIAT.
quicquam accessionis ( quant quidem mandée (22). Bembus lui fait voir
scio mihi minime im^ideres) consequar que pour une si petite différence il ,

remanendo nisi simul accessio Jiat ne fallait pas se dégager de sa pro-


,

forlè nopi laboris messe ^ et si t^ous wenez , ajoute-t il ,


(20). Je sentirais
quelques remords de conscience si je je prends sur moi de t^ons Jaire auoir ,

ne disais ici que M. de la Monnaie m'a en peu de temps toute la somme que
indique ce passage de Vossius. Outre t^ous auez indiquée et bien d'autres ,

cela il m'a fait savoir les particula- avantages. Il lui écrivit encore le 21
,

rités suivantes « Il paroît par la XIP.


: d'avril 1534- Alciat était alors à Pa-
3) lettre du II*, livre des lettres de Sa- vie et n'y vivait pas content. Bem- ,

3; dolet qu'Alciat
,
dès la première bus lui déclare que , quant à lui
, il ,

3) année de son séjour à Bourges, avoit acquiesce à ses excuses ^ mais que les
i> ou feignoit avoir dessein d'aller pro- curateurs de l'académie de Padoue ne
3) fesser le Droit à Bologne Deux let- s'en payaient pas , et qu'ils étaient per-
3) très italiennes du Bembe l'une du suadés que la demande d'une chaire
,

» 7 de juillet i532 et l'autre du 23 de jurisprudence au milieu d'eux avait


,

}> ae fe'vrier i533 apprennent beau- été fondée sur un motif d'intérêt 5
,

3) coup de particularités touchant le c'est-à-dire qu' Alciat n'avait voulu ,

3» dessein qti'avoit la re'publique de être professeur dans l'académie de


3) Venise d'attirer Alciat à Padoue (21). Padoue qu'afin de se servir de ce ,

3) Les professeurs de cette université' poste pour se procurer de plus gros


3) en e'toient dans une appréhension gages auprès du duc de Milan Utinam :

3) mortelle entre autres Franceschin tam œqui in te judices Prœjecti Ludi


: ,

3) da Corte en latin Franciscus Cur- Patavini essent neque sibi persuasis-


, ,

3> tins qui pour détourner la venue simunt haberent


, ,
te proptereà proji- ,

3) d'un tel collègue faisoil courir le tendijus ciwile hdc in urbe locum pos-
,

3) bruit que le duc de Milan Fran- tulavisse ut eo tradito apud ducein, ,

» cois Sforce , mal nomme François isluni tuum ulerere ad largius atque
3) Marie par Pancirole lui avoit dé- uberius ab eo slipendium promeren-'
,

3) fendu sous de très-rigoureuses pei- dum (23).


3j nés de quitter la chaire de Pavie Alciat s'était déjà servi de la même,

3) sotlo pena di confiscalione. w Pour ruse pendant qu'il était à Avignon. ,

ne pas trouver ici un peu d'embarras II chargea l'un de ses amis (24) de
il faut , ce me semble que nous sup- faire en sorte qu'on l'appelât
, ou ,

posions que le 23 de février i533 de à Bologne ou à Padoue. Il n'avait ,

la lettre de Pierre Bembus est de l'an point dessein d'accepter ces vocationsj
1534 , à commencer l'année au mois mais il s'en voulait servir pour faire
de janvier car sans cela
\
nous ne augmenter ses gages. Nous savons ce-
, ,

pourrions point comprendre qu'Alciafc la par des lettres qu'il écrivait en ce


eût été à Pavie lorsque cette lettre fut temps-là et qui ont élé imprimées à ,

datée lui qui avait professé cinq ans Utrecht, l'an 1697
:
,
Si mille mihi :

à Bourges , et qui n'avait commencé aurei Ferrnriœ constituerenlur eo ,

à y professer qu'en iSag. En consul- non irem et satis non possum non :

tant les lettres latines du même Bem- mirari qui tibi in mentem uenerit , ,

bus j'ai trouvé qu'il écrivit à notre hanc coni^entionem cuni eo tractare ;
,

Alciat, le i5 de juillet i532 pour ciim. de Patai'ino aut Bononiensi


, ,

l'exhorter à venir prendre possession Gymnasio solùm tibi mandata dede -

de la chaire qui lui avait été ofl'erte rim quamvis nec mihi displiceant :

dans l'académie de Padoue. Il lui lève tua ista consitia non quod in has ;

la difficulté qui le tenait en suspens Academias l'enturus sim sed quod , ,

et qui consistait en ce que la républi- Ai^enionenses , si sciverint ab aliis


que de Venise ne promettait pas la quoque me sollicitari, ne eos deseram,
même espèce d'écus qui avait été de- timebunt, et augebunt stipendia. Qua-
re cum eis potissimùni t^elirn hœc dis-
(20) Vossius Epist. XLVIII , pag. 91 , ç)2.
,

JEWe est datée de Leide , le i". de juin i625.


(22) C'um lu nummos aureos
solares petieris „
(21) Ces LeUres du Bcmbe sont aux pages
illa tibi lanùun aureos estpollicita. Petrus Bem-
64s et (J54 du Recueil intitulé Lcttere di XIII
tluomini illustri , imprimé à Venise^ en i56o, bus. Epl.t. , XXIX
lib. yi, pag. 634.
in-%° Voifez, aussiles XXIX', elXXX'. LcUres (23) Bembus, Epist. XXX, lib. f'I , p. 635.
du Vl". livre du Bembe. (24) 2Vb.'nme' Franciscus C»lvus.
, ,

ALCIÂT. 385
semines, quos conjectabis idoneos esse; ce que Luc Gauric marque au-dessous
ut in Avenionensem Academiam lit- de la ligure de nativité de notre ju-
teras harum rerum indices dent ("iS). risconsulte. Il le fait naîfre le 8 de
Son ami faisait des cabales à Padoue mai 1492,
à une heure 3o minutes
pour obliger les écoliers allemands à après le lever du soleil. Ne voilà-t-il
demander république de Venise
à la pas un bel art il a des règles , selon !

que Ton fît venir Alciat (26). Celui-ci lesquelles un homme devait mourir
le pria de s'abstenir de cette peine ,
plusieurs années avant sa mort. J'ai
vu qu'il s'était engagé pour deux ans lu une lettre d'Alciat datée du 3 de ,

à la ville d'Avignon. Sa lettre est datée septembre i53o où il assure qu'il ne ,

du 26 de septembre i52o. Quelles bas- fait qu'entrer dans sa trente-septième


sesses quel amour sordide du gain
! année , ou qu'il n'a guère que trente-
!

(E) M. de Thou... était mal instruit sept ans P^ix trigesimum etseptimuvt :

de son histoire.'\ Il suppose 1°. qu'Al- annum attingenti i32). Cela prouverait
ciat, après avoir enseigné long-temps qu'il naquit en i494' ou en i493.
à Bourges, fut professeur à Avignon ; (F) Il fit sur- Le-chanip une haran-
c'est tout le contraire 2°. qu' Alciat gue a François l^^ ., quittait entré dans
:

sortit de France sur le déclin de son âge^ son auditoire.] Minos rapporte ce lait :

il n'avait qu'une quarantaine d'an- Panzirole n'en dit rien ^ mais , au lieu
nées plus ou moins
,
3°. qu'Alciat , décela, il assure que le dauphin,
;

de retour en Italie lut première- ayant assisté à une leçon d'Alciat


,

ment à Bologne et puis à Ferrare ; lui fît présent d'une médaille qui va-
,

il lut à Pavie, avant que d'aller à lait quatre cents écus. C'était celle
Bologne 4°- qu'Alciat mourut l'an
:
que les habitans avaient donnée au
ï55i ^ son épitaphe marque le 12 de dauphin. Je l'ai déjà dit en d'autres
janvier i55o. Il est vrai que quelques rencontres, dès qu'un fait de la na-
auteurs rapportent qu'elle donne cin- ture de celui-ci varie dans les auteurs,
quante-huit ans , huit mois , et quatre ou ne paraît point dans la plupart
jours à Alciat
, ce qui prouverait de ceux qui font l'éloge d'une per-
:

qu'il mourut le 12 de janvier i55i sonne, il mérite de passer pour fort


:

mais d'autres rapportent qu'elle ne lui douteux. Cependant , il faut excepter


donne que cinquante-sept ans , huit celui-ci de cette règle ; car on trouve
mois et quatre jours (27). L'erreur parmi les œuvres d'Alciat (33) le dis-
,

de .M. de Thou est moindre que celle cours qu'il Ot quand François !•'. as-
de Forsterus , adoptée par M. Doujat sista à une de ses leçons.
(28) , et que celle d'Imperialis. Ce- (G) Le frai remède de son humeur
lui-ci met la mort d' Alciat à l'année inconstante. ] Sij'avais voulu me pré-
1 559 (29). Forsterus la met à l'année valoir de tout ce que j'ai rencontré
1548 (3o). Mais remarquons principa- dans les auteurs sur les divers démé-
lement la fausseté d'un astrologue nagemens d'Alciat , j'aurais pu le
qui , ayant dit qu'Alciat mourut à faire paraître encore plus inconstant
Ferrare l'an i546, ajoute que ce fut qu'il ne l'a été ; mais j'eusse fait con-
d'une blessure de Saturae et du So- science de le charger davantage. C'est
leil: Andréas Ald$flus didicit litteras bien assez que d'Avignon il se soit
grcecas a Poniponio Gaurico Patauii... transporté à Bourges de Bourges à ,

obiit Ferrariœ anno i546, ex Saturno Pavie , de Pavie à Bologne , de Bo-


in oppositione horoscopi, etSole Mar- logne à Pavie de Pavie à Ferrare , de ,

tis tetragono sauciato. In coni'ersione Ferrare à Pavie et cela avant l'âge ;

anniid non solitm directiones Apheta- de soixante ans. Thevet arrange si


runi , sed annuœ conveisiones penitiis mal ce qu'il dit de ce docte juriscon-
commaculatœ inlerimunt (3i). Voilà sulte , qu'il n'y a point de lecteur qui
n'en infère qu'Alciat retourna en
(251 Epist. Gndii etc., pag. 79. ,
France, après que le duc de Milan
Ibidem, pag. -S.
fîGi l'eut tiré de Bourges. Nous avons vu
27) Gbilioi Teatro de' LetteratI parle I
,
, ,

pag. II. que Panzirole l'envoie de Pavie à Avi-


(28) Doujat. Prtenot. Canon. pag. 619. gnon. M. Moréri l'envoie de Bourges
,

(29) Imper, in Musîeo Histor. , pag. 52.


(3o Forsteri Histor. Juris Civil. , lib. III,
Î32) Epist. Gadii , etc. , pag. 106.
cap. XLI pag. 542. , 33) Au IV^. tome, pag. 870 de Védition «fe
(3i) Lucas Gaaricas in Scbemalib- , folio ^3. Francfort., en 1617.

TOME I.
,

386 ALCIAT
à Orléans d'Orléans à Padoue.
, et son centre , et illuminer de là tous
M. Teissier le fait professeur à Milan ceux qui s'en approcheraient. II y a
bien \A\\s de gloire à faire venir où
(34). 11 cite Pasquier au
chapitre
l'on demeure un grand nombre d'é-
XXIX du IX«. livre des Recherches :

chapitre XXXIX ; coliers comme fit le philosophe Abé-


il fallait citer le
,

lard (36) qu'à se transporter soi-


mais on n'y trouve point Milan. ,

Voici les paroles de Pasquier J'ouïs :


même dans les villes où se rendent
3 ou 4 tfes leçons d'Alciat dedans la
beaucoup d'écoliers. Et, sans doute,

ville de Pairie. De la ni estant trans- si l'amour de la gloire était tout seul


porté en la de Bologne où li-
t-ille ,
dans une âme s'il n'était mêlé avec ,

soil Marianus Socinus neveu de Bar- ,


l'amour du profit, ou avec une bizar-
tholomœus , tous les escoliers italiens rerie d'humeur qui fait que l'on .se dé-

faisaient beaucoup plus de compte de goûte bientôt des mêmes choses on ,

cestui que de l'autre. Ivoire que ceux ne verrait pas tant de gens frappés
qui plaidaient, pour s'asseurerdeleurs de la maladie d'André Alciat. L'idée
causes ,
recherclwient plus le Socin , de la belle gloiie inspirerait à un
pour ceste seule considération ( di- homme la résolution , non pas d'aller

que jamais Un' avait perdu chercher les grands théâtres mais ,
soient-ils)
te temps en l'estude des lettres hu-
de convertir en un grand théâtre ce-
maines , comme A
Iciat. M. Teissier, lui où l'on se trouve placé , quelque

citant ce passage dit que Bartélemi petit qu'il soit on se souviendrait de


,
:

Socin enseignait la jurisprudence a la réponse d'Agésilaiis. On


l'avait placé

Bologne , dans le temps qu'Alciat dans un lieu indigne, un jour de céré-


était professeur a Milan. Ces deu.>L
monie "EZyi 5 dit-il, «Têt'l'û) yà-f OTt où)c :

0» tÔttoi Tûi; uySpeLç, IvTiy.ciuç , etXK 01


faits ne se trouvent point dans Pas-
à'vtfjDêç TOi/ç tÔttovç iTriS^incvCoua-i. Benè
quier. Si j'avais voulu faire une masse
habet ostendam enim non loco virum,
générale de tout cela, quelle girouette ,

sed locum firo cohonestari (3^^). On


n'aurais-je pas fait de notre incon-
verrait dans cette idée qu'il est bien
stant professeur? Mais j'aurais été
plus beau de faire gratuitement une
mille fois plus condamnable que les
chose, que de la faire à gages, et
auteurs de ces mensonges si je m'en ,

qu'ainsi plus on approche du don


étais prévalu à son préjudice. 11 n'i- ,

gratuit, c'est à dire d'une profession


gnorait pas qu'on le blâmait de tous
sans gages plus on s'approche du
ces fréqueus changemens d'académie ;
,

il voulut s'en justifier entre autres


grand et du beau: au lieu qu'on s'en
c'est que per- éloigne pour s'approcher de l'esprit
raisons par celle-ci :

à proportion de
sonne ne trouve mauvais que le so- bas et mercenaire ,

leil parcoure toute la terre afin d'a- l'augmentation de gages que l'on ex-
,

torque. C'est réduire à la nature des


nimer toutes choses par sa chaleur ,

et par ses rayons il ajoutait: que arts les plus mécaniques la profession
,

quand on loue les étoiles fixes on n'a des sciences. Un cordonnier ou un


,

plus payer de sa
pas dessein de condamner les pla- chapelier qui se fait
nètes (35). Il y avait une vanité in- besogne
qu'un autre se fait par cela ,

supportable dans ces sortes de com- même la réput|Éipn


d'un habile ou-
c'était se regarder com- vrier. Quand ^ros
prétendez que si ,
paraisons :

me une source de lumière qui devait l'on vousdonne une plus grosse pension
successivement parcourir toute la ré- pour ce que vous direz en chaire, c'est
publique des lettres, afin que par sa une preuve qu'on vous estime un plus
présence les ténèbres de la barbarie grand prédicateur ou un plus savant
fussent chassées de tous les endroits professeur, ne jugez-vous pas de votre
où elles voudraient se cantonner. métier comme l'on juge de celui d'un
Mais accordons-lui sa comparaison cordonnier ou d'un chapelier? Cela
,

et disons-lui qu'il devait faire comme est fort propre à


décrier les sciences
le soleil de Copernic se tenir dans et à faire mépriser
:
ceux qui les pro-
fessent car un faux goût de gloire j

(34) Teissier Eloges des Hommes illustre^


,
,

loin, il,pag. 395, édition de Genève, en i683. (36) Kojet la remarque (A) de Vaflicle Foul-
(35) f^oyeita Harangue qii\l récita à Ferrare, ques.
Van 1543. Operum toin. iV pag. 86a, ei , (37) Plutarch. i'n Apopbth. Laconicis, l'nit.

Claude Miaos, dans ta Vie. pag. 208.


,

ALCIAT. 387
joint à ordinairomeat
l'avarice est cours bien eloigae' de l'offre d'un
est
cause du défaut que Ton blâmait dans chapeau de cardinal.
Alciat je veux dire de cette passion
: (I) // était non-seulement
fort a^are,
de faire bientôt tout le tour des aca- mais aussi un grand mangeur.'] Panzi-
de'naies, de laquelle j'ai déjà parle en role s'exprime ainsi /U'arior habi-
:

un autre endroit (38). C'est assuré- tas est et cibi ai'idior. Il ajoute
,
qu'AI-
ment mettre son érudition à l'encan ciat ayant reçu trois cents écus
pour
, ,

et faire savoir au public qu'on ne se une consulte et su qu'on en avait ,

livrera qu'au plus offrant et dernier donné davantage à Marianus Socin


enchérisseur. pour la même affaire, s'écria qu'on
(H) H ne v'oulut point renoncer a la avait trouvé un meilleur marchand
,
•profession en droit.'] Il s'en félicite mais non pas un meilleur juriscon-
dans une lettre qu'il écrivit à Paul sulte. Prenez ceci en passant pour une
Jove, que le pape Paul III avait long- confirmation de ce qui a été cité de
temps amusé par des promesses trom- Pasquier (4i). Nous allons apprendre
peuses. Je suis bien aise, dit-il, de ne d'autres nouvelles de l'avarice d'Al-
métré pas laissé tromper par ce pon- at « De deux points est-il taxé.
:

tife, qui, sous la promesse d'une grande L'un que sa méthode ressentoit je
,

récompense m'a t'oulu attirer h Rome.


, ne sçai q^uelle ostentation docto-
Là-dessus il étale les biens solides de
, rale L autre, que l'avarice lui
sa profession et les oppose aux es-
, commandoit tellement, qu'il sem-
pérances imaginaires du cardinalat : bloit que sa langue, plume et doc-
Alihi gratulor quddab eo (inveterati
, trine fussent à gage des seigneurs
,

astûs sene principe ) me decipi non qui plus lui donnoient d'escus. Et
sim. passas, quiim me, uti scis, mag- mesme je me souviens qu'aux Parer-
nis propositis prœmiis Ticino , Fer- ges, parlant de Jason , il vueille
rarid, atque Bononid, in Urbem ac- prescher pour l'argent, le prisant
cerseret. Tum enim ex jure meo magis de ce qu'à lui ont esté augmentez
cautusjui, quant tu ex sapientiœ prœ- les gages des docteurs. D'où Alciat
ceptis prudens philosophas. Car enim a bien sceu faire son profit ayant ,

pro innni aut incertd spe purpurœ, hos tiré de l'université de Bourges douze
tantes primi suggeslàs honores relin- cens escus d'estat outre ses licences
,

querem opiinis prœsertlm firmatos


, et doctorats, qu'il faisait bien tri-
slipendiis ? Car has tanlas contemne- pler, suivant la trace du docteur Ja'
rein circumfusce jui^entutis salutatio- son lequel fut le premier qui
,

nes ? et hanc deniquètot consultoribus pour les degrez et honneurs qu'il


januam pulsanlibus , existimationem donnoit aux jurisconsultes, prenoit
magno lucro et non obscurd cum , cinquante et cent escus au lieu ,

laude quœsitam inepte stultèque de- , qu'auparavant lui on avoit accous


sererem (89)? Notez, en passant, que tumé de passer pour trois ou qua-
ceci réfute ceux qui disent qu'il refusa tre escus. A cause de ce (dit-il) que
le chapeau de cardinal que le pape lui, Décius, Ruine, et les autres
lui offrait (4o). Ce conte est le fruit docteurs peuvent s'enrichir de ces
de riiyperbole la figure favorite ,
gratieusetez que paient les écoliers
,

d'une infinité de gens. On aurait dit sans estre sujets à repréhension. De


tout ce qu'il y a de vrai dans cette là il n'est pas mal-aisé de recueillir
affaire, si l'on s'était contenté de dire qu'il se fait fort de Jason contre
que le pape, pour mieux attirer à ceux qui se forraalisoient à l'encon-
Kom^ André Alciat, lui fit entendre trede lui, de ce qu'il estoit tellement
que ce serait le moyen de se frayer le tenant à l'argent, que, pour rece-
chemin du sacré collège. Un tel dis- voir de lui la dignité de docteur,
bachelier ou licentié il falloit qu'on
,

(38) Dans la remarque (A) de Varlicle de desgaignast à foison des escus. Ce


(François) Accarisi. qui me fait persister davantage en
(ilg) Alciat. Eplstol. ad Paiilam Jovium. Elle cette opinion est qu'au dernier cha-
eu a la léle du I". volume des Histoires de
pitre du cinquième livre de ses Pa-
Paul Jove, et date'e de Pavie, le 7 d'octobre
1549. '
rerges, reprenait son propos de Ja-
(4°) Teissler, Elog. tom. II , pag. 394 , édi- (4i) Au commencement de la remargnt (f'),
tion de i683 et tom. I, pag.
;
34 , e'dit. "de i6g6. après la citation (3aj.
, ,,

388 ALCIAT.
3)son , il se plaind des princes et sei- Dulcia sunt , pwa sunt elegantia ,

» gneurs qui couchent en si petit es-


,
sunt ; sed non sine nervis : senlentiœ
» tat les doctes et sçavans hommes verb taies., ul etiam ad iisus civilis
}> au lieu qu'au tems passe, même du vilœ conférant (47). Ces Emblèmes ont
» tems de Vespasian ( au rapport de été traduits en français, en italien et
» Tranquille), cet empereur faisoit en espagnol (48). Les versions fran-
y> délivrer de ses deniers publics quin- çaises sont trois pour le moins ; celle
» ze cens escus aux orateurs et rhéto- de Darlhélemi Aneau *, celle de Jean
» riciens grecs et latins ; mesmes le Fèvre et celle de Claude Minos
,

y> adjouste-il l'authorité du rhetori- (49). Ce dernier ne se contenta pas de


« cien Euménius, qui exerçoit sa vo- les traduire il les commenta aussi.
,

3)cation à Authim auquel par Tor- , ,


Un des plus savans humanistes_ d'Es-
j)donnance des empereurs Diocletian pagne (5o) les a crus dignes d'un com-
» et Maximian on donnoit d'estat
,
mentaire de sa façon. Pignorius, sa-
quinze mil escus par an. » Ces paro-
3) vant Italien , même juge-
en a fait le
les sontde Thevet, à la page 279 du ment, eux tous, un profes-
et, après
VII*. tome de l'Histoire des Hommes seur de Fribourg (5i) les a publiés
illustres. avec leurs notes et avec les siennes
(K) Ceux qui disent qu'il passa toute et y a joint à la fin celles de Frédé-
sa l'ie dans le célibat se tronipetii.'] ric Morel. Cette édition est fort bonne j
Voici comme il parle dans une lettre c'est dommage qu'on n'y puisse pas
qu'il écrivit à son ami François Cal- distinguer ce qui appartient à chaque
vus, après s'être retire de Milan à commentateur elle est de Padoue
:

Avignon : f^ice i^ersd , et ego le rerum en 1661 , in-4°. Je ne parle point de


rtiearunt adnioneo ; mu/tis affeclum me Sébastien Stockhamerus dont le tra- ,

cerumnis patriâ excessisse , uxoreni f i- vail n'a pas été fort estimé Sebastia- :

vam et sospitem ibi reliquiase; cœleros num. Stockhamerum vix Coinmenlato-


fato functos (^7.) Jortiinis plerisque ris nnmine dignor, quia in snid Epi-
,

amissis v-irtuti soli innixiim non om-


,
grammatis resolutione occupatur, pau-
ninà concidisse. Libros et Bibliothe- cissimis iisque satis vufgatis senten- ,

cariL nmneni conservasse. In prœsentiâ tiis et fabulis additis ; ad hœc ui.r me-

Jus Civile ^i'eniowepro/îfeor(43). Cor- diam Emblematum parlem hoc suo


rigeons doncces paroles de M. Teissier, more explicat (Sa). Je ne parle point
il passa sa vie dans le célibat {^\). non plus de ce jésuite qui expliqua
(L) La latinité de Tacite lui parais- publiquement à Paris ces mêmes Em-
sait d'une extrême dureté.'] C'est en blèmes (53) ; mais je pense qu'on ne
e'crivant à Paul Jove que cette plainte sera pas fiiché de voir le titre dont
lui échappa Alcialus non dubitat Barthélemi Aneau ( Bartholomœus
:

qjffirmare àictionem ejus prœ illd Pauli j4nulus ) se servit. Le voici Les Eni- :

Jovii esse senticeta {\^) Dans une au- blesmes d'André Alciat traduits vers
. ,

tre rencontre il avait parlé bien au- pour vers jouxte la diction latine et ,

trement: Certat in Tacito sertjionis gra- ordonnez en lieux communs avec ,

vitas cum eleganlid (4^). Je renvoie la sommaires inscriptions schemes et , , ,

discussion de ceci à l'article de Tacite. briefves expositions epimylhiques se- ,

(M) Ses Emblèmes ont été fort esti- lon l'allégorie naturelle morale ou , ,

me's et ornés de divers commentai-


(47) Jul. Cssar. Scalig. de Poëtie., Ub. VI.
res.'} Scaliger le père, qui n étaitpoint
(48) Joh. Mattlixus Toscan, in Peplo Ital. ,
prodigue de louanges, comme chacun Ub. III.
* La version de le Fèvre est de i536; celle
sait parle ainsi de cet ouvrage
,
y^t- :

d'Aneauestde i558 celle de Mignault, de i584.


ciati prœter Emblemata nihil mihi vi- ;

C'était dans cet ordre qu'au jugement de Le-


dere contigil. Ea verô talia sunt ut clerc il fallait les citer.
,

cum quovis ingénia certare possint. (49) Voyei la Bibliothéq. de la Croix du


Maine.
(^2) Il dit néanmoins , dans une leure écrite (50) Sanctius, Brocens.
ran iSîa, que sa mère son oncle paternel
et (5i) Joanncs Thuilius, Maricemontanus , Ti-
étaient en vie. Epistola Gudii , etc. pag. 96. ,
rai. Phil. el Med. D. atque ohm in Archid.
^43) Ibtdem, pag. •J-'». ^
(44) Teissier, Addit. aaxïlog., tom, I, p. 34.
Friburg. Brisgoiœ Vniiersttate ffuinrtn. LUter.
Professer ordinarius.
(45) Vossiuj , de Hist. Lat. , Ub. I, p. 160. (52) Thuilius in Frcef. Claude Minos en juge
(4(>3 Fide Caaonherii Disc. Politic. in Tacit., a peu près de même dans sa préface^
pag. 3. (53) Minas, là même.
,

ALCIAT. 389
hisioriale. Les éditions de cet ouvrage baud auxquels Valentin Genti-
,
d'Alciat sont innombrables : dans i;_ ^' „„ / t • . \ •

j TU v A „t "^ s associa (a). Les précautions


Il
celle de Thuilms dont , le meco.c ;i
;„,,,<, sers, il ,, / ^ 1

V a deux cent douze Emblèmes ainsi : S["6 'on prit contre eux et les ,

surpris que Paul Freher nous


j'ai été procédures sévères que l'on exer-
assure que ce livre ne contient que ça contre ce dernier rendirent ,
cent Emblèmes * (54). lesautres plus timides, et les en-
(N) Son écrit des Abus de la Vie
Monastique est daté liu 7 de juin gagèrent même à chercher ua
i553 ] Si cette date était bonne , il autre théâtre [b). Ils choisirent
faudrait rejeter tous les auteurs qui laPologne oii Blandrata et Al- ,
mettent la mort d'Alciat au 12 de
ciat semèrent leurs hérésies avec
janvier i55oou i55i et qui allèguent ,

son épit^phe (55). Mais on s'est trom- assez de succès. Ils attirèrent
pé en datant cet écrit-là et je pense ^
Gentilis (A), qui ne manqua
qu'il fut composé avant l'année iSao, pas de les aller joindre (c). Il
et que c'est la même pièce qu'Alciat
avait l'obligation à Alciat qu'à
eut peur qu'Erasme ne fît imprimer :
,

Çuod ut facias te qunque ipse oro : sa prière le bailli de Gex l'avait


mis hors de prison (B). On pré-
nec minus ut de unsuibus Erasmi zè-
glutinesOrationem iUam meam ad tgnd que de la Pologne ils pas-
Matlhiam Minoritam cùni id quœso, ~- ,
P. - 1 -
.

sèrent en Moravie. Nous dirons


ne si in cinerariorum istorum manus
incident , parata sint mifii cum eis en son lieu quelle fut la destinée
eeterna bella (56). C'est ce qu'il écri- de Gentilis. Pour ce qui est d'Al-
vit à son ami François Calvus , le a6 ciat, il se retira à Dantzick, et y
de septembre iSao. On a publié à
Utrecht, en 1697, quelques lettres du
mourut dans , les sentimens de
„ ^.
,
même jurisconsulte qui nous appren- ûocin (Lij , car li n est pas vrai
nent bien des choses particulières et , qu'il se fit Turc (D). Il avait écrit
surtout^ les louanges qu'U se donnait deux lettres à Grégoire Pauli ,
avec une vanité de fanfaron.
l'une en 1 564 1 l'autre en 1 565
* LecUrc remarque que Gesner ^
qui n avait datées de Husterilts oii il sou- ,
vu que Ve'dition de i53i faite à Augsbourg
dit quelle contenait environ cent
,

Emblèmes i mais
,
tenait que Jésus-Christ n'a com-
Freher ne cite pas Gesner. mencé d'être qu'à sa naissance
(54) Paul. Freher. in Thealro.
f^oyez la remarque (E).
(5,^) de la sainte Vierge {d). On a
(56) EpUt. Gudii etc., pag. 80. Voyez aussi
,

pag. 81 , 82 , et la Préface de M. Barman.


donc eu raison de blâmer Mo-
réri qui l'avait fait arien , et
,

ALCIAT (Jean-Paul) gentil- ,


puis mahométan
(e). Peut-être
homme milanais fut un de ces , qu'avant que de se retirer à Dant-
Italiens qui abandonnèrent leur zick, il avait fait un tour en Tur-
patrie dans le XVP. siècle, afin quie sans avoir dessein de s'y
,

de s'unir à l'Eglise protestante ,


faire renégat mais seulement ,

et qui ensuite s'amusèrent à tant d'y être à couvert des persécu-


mystère de la Tri-
raffiner sur le tions (E) et c'est peuC-être ce
;

nité ,
formèrent un nou-
qu'ils qui donna lieu au bruit qui a
veau parti , non moins odieux tant couru et qui court encore ,
aux protestans qu'aux catholi-
* A -. I
• .

queS. Alciat avait porte les ar-


. ' 1 W ,,
Vojres Aretius
Condamaatioo de Gentilis.
.
dans /'Histoire de , la

mes il commença ses innova-


: (6) Beza, m Vitâ Calvini.
(c) id. ibid.
tions à Genève , de concert avec
"'^'•°'- ^°"*-. '"/'
un médecin nommé Blandrata ,' f-
(e) Voyez son Dictionnaire
• P^s- 28.
. ^ , _ . , au mot Al-
et avec un avocat nomme Un- coli oU on u réfute.
,
,

ûCjO ALCIAT.
Paulus Pedemontanus n'est autre
de son prétendu mahométisrae. nés
que notre Alciat. Si Calvin ne disait
Calvin et Bèze ont parlé de lui
pas expressément que tous ces hétéro-
comme d'un fou à lier (F). doxes Italiens, et nommément Jean
Paul Alciat, signèrent le formulaire,
(A) Ils atlirèrent Gentilis.'] J'ai suivi on serait fort tenté de penser que ceux
Aietius et Théodore de Bèze , qui s'ac- dont parle Pierre Martyr refusèrent
cordent à débiter que Gentilis n'alla d'y souscrire. Quoi qu'il en soit , ils
en Pologne qu'après que Blandrata et n'étaient plus à Genève peu après la
Alciaty eurent dogmatisé (i)j et j'a- signature; car elle se fit le 18 de mai
bandonne l'auteur de la Bibliothèque 1 558, et ils étaient à Zuiich le onzième

des Antitrinitaircs, qui affirme qu'Al- de juillet suivant. Gentilis ne fut mis
ciat et Gentilis allèrent ensemble en à mort qu'en i566. 11 était sorti de Ge-
Pologne, environ l'an !562 (2). Sta- nève quelques mois après la signa-
nlslaûs Lubienietzki a dit à peu près ture et s'était retiré au pays de Gex,
,

la même chose l'^alcntinus iste,el


: où il conféra avec Alciat ce qui mon- :

Paidus Alciatus Pedemontanus cùm , tre ou qu'Alciat n'alla point à Chia-


,

Genevœ ob odia Caluinl acerrima sub- venne en sortant de Zurich ou qu'il ,

sistere non passent, anno i563 in Po- y demeura peu Voyez l'article Blan-
loniam ueneranl (3). Mais ces auteurs drata où je tâche de déhrouiller l'or-
,

ne sont point assez exacts pour méri- dre des temps par rapport à ces
ter la préférence. Hornius la mérite gens-là.
encore moins lui qui a dit que Geor-
, (B) A
sa prière , le bailli de Gex
ge Blandrata et Paul Alciat tous deux , auail mis Gentilis hors de prison (5).]
médecins (il se trompe à l'égard d' Al- On ne sait si les prières suflirent. San-
ciat) , se sauvèrent de .Suisse en Polo- dius insinue qu'il fallut donner de
gne, épouvantés par le supplice de l'argent In oppido nnniine Gajum in
:

Servet et par celui de Gentilis. Dans carcerem conjicitur (Gentilis) undè


la même page de son Histoire Ecclé- ciiin ei^adere non posset qnôd esset ,

siastique, il assure qu'ils suivaient le pnuper , a socio suo Paiilo Alciato


triihéisme de Valentin Gentilis (4). redimitur, quem uipolè lociipletem
Mais il est certain que l'hérésie d'Al- prœterea uero nobili génère ortum ,
ciat était le pur sociuianisme. On ne immo et militem simili modo non ,

saurait mieux réfuter la chronologie audebanl aggredi (6).


de Hornius que par une lettre de Pierre (C) // mourut a Dantzick dans les
Martyr, écrite à Zurich le onzième , sentimens de SocinJ] C'est de quoi
de juiUet i558. On apprend à Calvin, on ne peut raisonnablement douter,
daiis celte lettre, qu'on avait vu Gré- après les preuves que JEartin Ruarus
goire le médecin accompagné de Jean
,
(^) en a données. 11 dît que cet
hom-
Paul le Piémontais; qu'on les exhorta me, aj'ant vécu quelques années à
à ne point rompre l'union de l'Eglise, Dantzick comme un bon chrétien, re-
et à se conformer au formulaire de commanda en mourant son âme à Jé-
l'église italienne de Genève; qu'on n'y sus-Christ son sauveur et puis il ,

gagna rien , et que de l'avis de Bul-


, ajoute (8) Catherine Weimera ,
: «
linger, on leur conseilla de vider la )) aïeule de ma femme qui le connais- ,

ville ;
que le médecin
qu'ils le firent ;
)) sait familièrement et qui assista à sa
dit qu'il s'en allait en Transylvanie , M mort, l'a souvent dit à David Wer-
et que Jean Paul se retira à Chiaven- » ner Buttel son mari, qui est encore
ne. 11 faut lire dans Pierre Martyr, non » en vie, et il n'y a que trois ans
pas Gregnrium medicum mais Geor- , » qu'elle est morte. Ma belle-mère me
gium niediciim, qui n'est autre que » dit encore hier qu'elle avait souvent
George Blandrata tout comme Joan-
,

(5) Hlstor. Reformat. Polon. ,pag. 107; Bi-


bliot. Antilrinitat. pa^'. 27.
(1) Aretius, dans i'Hist. He la Condamnatiou
,

(6) Bibliot. Antilrinit, pag. 26.


de Gentilis. Vojez aussi la LXXXI'. Lettre
(7) Ltsez ainsi, el non
pas Martin Bucerus ,
de Bèze.
dans la Biblioth. Anlilrinitat. , pag. 37.
(2) Bibliot. Antilrinit. , pag. 2C el 27.
(3)Lulneniec. Hist. Reformat. Polon., p. 107. (8) Pans une lettre r'crite h Caloviu.t el da- ,

(4) trouve ces fautes dans Cedilion de


On tée de Panlzicli, a. d. m.
Non. Apr. 1640- C'est
XLVll'. de lapremière t:en(uits des Lettres
iÇi%-. augmentée des Notes elde la Continuation ta
de M. Leydrcler. de Riiarus.
,

ALC lAT. 391


)) vu en cette ville la veuve d'Alciat tendu mahométisrae de Jean-Paul Al-
j) qui survécut quelques anne'es à son ciaf Ils n'ont pas été moins soigneux
.

» mari. » 11 ajoute par occasion , ,


de le débiter les uns que les autres.
qu'il a oui dire à Anilre Woidovius Iliacos intra muros peccatur et exlr'a (lo).
qu'Alciat, courant risque d'être as-
somme' à Cracovie par des e'coliers à , Sponde inséré dans ses Annales Ec-
l'a

cause qu'il passait pour arien éluda , clésiastiques ; et c'est de là sans doute
leurs mauvaises intentions en leur di- que le père Maimbourg l'avait copié
sant qu'il croyait en Jésus-Christ fils (11), quoiqu'il ne cite point cet au-
du Dieu vivant et de Marie ce nom : teur, comme M. Moréri le cite. Le fa-
de Marie le sauvaRidicido schemate
: meux Calovius Tarait débité Ruarus :

evasisse , ciim se non Arianuni, sed lui écrivit ce que l'on a vu. Il y avait
Marianum esse cliceret ,
qubd cùm deux ans que sa lettre était imprimée
illi quid sibi ^ellet qucererent, respon- lorsqu'on fît une nouvelle édition de
disse ,
Jeswn Christuni Dei
credere se l'Histoire Ecclésiastique de Micrœlius:
t'hn et 3IariœJiUum. Illi non minore cependant celui qui a pris la peine d'y
slupore quam malilid obsessi , audito ajouter beaucoup de choses n'en a pas
l'endando Mariœ nomine incolumem ôté le mensonge pour leqiiel Calovius
,

dimiserunt. Voilà un cas oii la maxi- avait été censuré. Je ne sais si Ruarus
me des dévots outrés de la sainte découvert l'origine de cette fa- a bien
Vierge se trouva véritable Que l'on qu'une lettre de Théodore
: ble. 11 croit
est quelquefois sautée afec plus de de Bèze (12) en a été le fondement.
promptitude en in^'oquant le nom de: Cette lettre rapporte que Valeutin
Marie qu'en im^oquant le nom de Jé- Gentilis interrogé sur son camarade ,

sus fo,). Alciat avait répondu Il s'est Jail , :

(Dj II n'est pas urai qu'il se fit mahomélan et il y a long-temps que ,

Turc.'] On vient d'en lire les preuves je n'ai eu aucun commerce at^ec lui. \

et, sur cela , qui peut s'empêcher de Les deux conjectures de Ruarus ne
dire qu'il serait à souhaiter que ceux sont pas mauvaises 1°. Gentilis crut :

qui soutiennent la bonne cause ne faire plaisir par-là aux juges qui lui
fussent point sujets à certains défauts faisaient son procès. Nous apprenons
qui régnent éternellement parmi les tous les jours (i3) par nos gazettes
persécuteurs de l'orthodoxie? Un excès quelque chose de semblable c'est-à- ,

de crédulité un fond de mauvaise dire que les déserteurs débitent mille


, ,

haine je veux dire une haine qui ne nouvelles très-propres à chatouiller


,

comprend pas moins la personne de ceux qui les questionnent 2°. Genti- 5

l'hérétique que son hérésie même lis, qui reconnaissait en Kotre -Sei- ,

nous font avaler tous les contes que gneur une génération ou une filialioa
l'on débite au désavantage d'uu héré- fort singulière, était bientôt disposé
siarque. Court-il quelque bruit qu'il à mettre dans la même catégorie
s'est tué, que le diable l'a emporté, les samosaténiens et les mahométans.
qu'il est mort enragé et en blasphé- Deux sectaires qui se brouillent s'en-
mant on le croit sans attendre que trehaïssent plus au commencement
,

la chose soit avérée on l'écrit à ses qu'ils ne haïssent le tronc duquel ils
,

amis partout oîi l'on a commerce on se sont séparés de sorte que Gentilis , :

l'imprime qui pis est ,


et dès là on était un mauvais témoin à l'égard
;

sème un mensonge dont la graine ne d'Alciat, après les disputes violentes


se perd jamais tant elle tombe en qui les avaient désunis dans la Polo-
,

bonne terre. Le premier qui le publie gne. Voëfius (i4) et Laetus (i5) n'ont
n'est pas long-temps le seul qui l'ait cité que cette lettre de Théodore de
publié on ne chôme pas à le faire Bèze quand ils ont dit qu'Alciat s'é-
:

passer de livre en livre, comme un tait fait raahométan. Homius n'a cité
grand motif de zèle ou comme un ob-
(10; Horat. Epist.//, lib. /, vs. 16.
jet de réflexions. (11) Maimbourg Histoire de rAri^oismC ,
,

Les protestans n'ont pas été moins toin.III , pag. .^44 . fàiiion de Hollande.
trompés que les catholiques au pré- (15) C'en la LXXXI'.
(i3) Or. écrit ceci l'an iGq^.
(9) Velocior est nonnunqu'ain salin invocalo (i4) Voet. Disputa!., tom. III. p. 7S1.
nomine Mariœ quam invocalo nomine Jesu- S. (i5) Joh. Lœtas . Corappn'.l. Rifl. univ. f p-
Anselmus de Exccllenliâ Virjiois, cap. VI.
, 436.
392 ALC lAT.
personne, quoiqu'il avance cela avec exstiterit antequàm ex Maria nascere'
la deinière confiance. Alciatus dit- , tur, et acerrimè dogmati pulgari de
il (16), transiit adTurcas ac muham- , Trinitate restitisse , ità ut mahometis-
medismum amplexus , inter eos imitant mum
primordio reforma- consilii in

jiniit. Hoornbeek ne cite non plus per- tionis sat ancipiti et


arduo ignarus ei
sonne dans l'Apparat de ses Disputes prœtulisse scribatur, sed à Caluino et
contre les Sociniens où il dit deux ou inventurum ejus œmulis odio inter-
,
,

trois fois qu'Alciat embrassa le maho- necino iri eum et alios veritalis
aman-
métisme Dignam pœnam dédit quart- tes Jlagranlibus (20).
:

do euni Deus ad muhammedanos pro- (E) Peut-être... avait-il faitun tour


labi sivit ; nempè ne alibi quàm inter en Turquie.... pour être a couuert des
infidèles istos nomen suum ultra pro- persécutions. 1 Cela me fait souvenir
fiteretur (17)- On pourrait soupçon- de Pierre Abélard qui fut sur le point ,

ner que cette fable n'a pas eu la lettre d'aller chercher un asile aux pays des
de Théodore de Bèze pour son fonde- infidèles contre les agens ou les pro- ,

naent unique si l'on ne considérait


, moteurs de l'orthodoxie. Il avait été
que légèrement l'Histoire de la réfor- battu de l'oiseau et s'alarmait plus ,

ma tion polonaise car, quand on y qu'un autre j car toutes les fois qu i!
5

voit que l'auteur, ayant parlé d'un entendait dire qu'il se ferait bientôt
certain Adam Neusserus (18), qui en- une assemblée d'ecclésiastiques il s'i- ,

fin se vit contraint de s'enfuir à Con- maginait que c'était pour le condam-
stantinople ajoute qu'Alciat avait eu ner. D'ailleurs
, il avait éprouvé le ,

une semblable destinée, on ne peut grand crédit de ces agens et il n'était ,

guère penser sinon que la chose est pas facile de leur échapper sous des
véritable, puisqu'un tel historien la princes de leur parti. Ils écrivent par-
débite. Mais, en examinant de près tout et avant que leur ennemi soit 5

les paroles de cet auteur, on


trouve arrivé dans une ville le portrait de ,

que son témoignage se réduit à rien. ses erreurs y fait déjà peur et y sou- ,

Voici comme il parle dans la page 200 lève tous les esprits. Un temps a été ,
:

Exacto trimestri necesse habebat ( Ada- que ceux qui avaient l'oreille des pa-
mus Neusserus), periculo sibi ah explo- pes pouvaient rendre la meilleure par-
raloribus Cœsaris imminente , solum tie de l'Europe un pays inhabitable ,
t^ertere et Constantinopolin {quant et à l'égai-d d'un homme qu'ils se seraient
,

Alciati fortunam fuisse supra uidi- mis fortement en tête de faire passer
mus, adeoTurcœ unie christianos œqui- pour hérétique et ce pauvre miséra- ;

tate et humanitate longà sunt ! ) con- ble pouvait en quelque façon leur ap-
fugere. Ces paroles nous renvoient à pliquer quelques endroits du psaume
un endroit précédent je crois que CXXXIX (21). 11 ne faut donc pas s'é-
:

c'est à la page 109. Or, si d'un côlé tonner que Pierre Abélard ait eu en-
l'on trouve dans cette page que quel- vie d'aller chercher du repos au rai-
ques-uns ont écrit que Gentilis s'était lieu des mahoraétans ou des païens :

fait raahométan, on y trouve aussi il espérait qu'en payant tribut il au-


,

de l'autre que ce furent ses ennemis rait la liberté de professer le chris--


,

qui forgèrent cette imposture. C'est tianisme hors de la sphère d'activité


sans doute ce qu'a voulu dire le sieur de VOdium Tkeologicum; et il crai-
Stanislas Lubienietzki. On le sent gnait, qu'à moins que d'en venir là, il
,

malgré les fautes d'impression qui dé- se trouverait toujours enfermé dans
figurent misérablement son livre. De cette sphère. Voici ses paroles Deus :

Alciato scriptum accepi dit-il (19), ipse mihi testis est quotiens aliquem
,

eum in epistolis ad Gregorium Pauli ecclesiasticarum personarum conven-


anno i564 et i565 Husterlitzii datis tum adunari noi>eram hoc in damna- .

dissuasisse sententiam qubd C'iristus tionem meam agi credebam. Stupefac-


tus illico quasi superuenientis ictum
(16) Hornius , Hist. Eccles., pag. 35i. Edil.
ann. 168";.
(i-) Hoornbeek. Apparatus, pag. 29; vide (20) Je crois qu'il faut lire, a Calvino esse
eliam pag. 23. iDventura et ejusrfmnlls, odio internecino in, etc.
(18) Il j a dam f imprime' Neusnerus; mais (21) Qub ibo a spiritu tuo et quô à facie tuS
,

ce lii're est tout plein defiiutes, et surtout quant fagiara ?.. . Si sumpsero pennas mcas diluculo
uux noms propres. rt habitavero in extremis i&ans,... , illuc lenc>

(19) Hiïlor. Reformât. Polonicae ,


pag- 109. bit me dextera tua.
, ,

ALC lAT. 393


fulguris exspectabam, ut quasi hcereli- sept ans la théologie. Après cela,
cus aut prnf'anus in Conciliis traherer il fut directeur de la pénitence
aui Synagos^is.... Scepè aulem ( Deus
scil ) in tantam lapsus suni despera-
du \atican, et sous-supérieur de
tionem , ut Chrislianorum finibus ex- la maison professe. Il assista à la
cessis ad Génies transite disponerem neuvième congrégation générale
atque ibi quielè sub qudcumque tri- des jésuites comme député de ,
buli pactione inter inimicos Chrisli
christianè uifere (22). Or, comme Al-
la province de Rome ; et lorsqu'il
ciat avait encore plus à craindre du mourut d'apoplexie le 2 de no- , 1

papisme qu'Abelard, et qu'il ne voyait vembre 65 il était sous-pro-


1 1 ,

guère de sûreté dans les pays oi!i les vincial. Il n'était pas dans une
autres chrétiens étaient les maîtres,
moindre considération hors de la
TenenlDanai qu'a déficit ignis (li),
société car outre qu'il fut long-
;

ses boutades et ses caprices auraient temps qualificateur de la congré-


bien pu lui faire naître l'envie d'es- gation du Saint OfUce et con- ,

sayer la tolérance des Turcs et l'en ,


sulteur de la congrégation des
dégoûter bientôt pour l'envoyer à
rites, il futchoisi par lepapeUr-
Dantzick. Apprenons à nous défier de
certains récits encore que des au-
,
bain VIII pour réfuter le père
,

teurs considérables les adoptent. Paul. Il préparait une édition


(F) Calfin et Bèze ont parlé de lui des actes du concile de Trente
comme d'un fou a lier. ] Le premier
dit que le jour que l'on proposa aux
qui aurait été l'apologie de cette
Italiens soupçonnés d'hétérodoxie un assemblée contre toutes sortes
formulaire à signer Alciat s'emporta , d'adversaires , et nommément
d'une manière furieuse Inter quos :
contre ce redoutable Vénitien.
princepsfuit Joannes quidam Paulus
Il avait déjà ramassé un grand
Alciatus homo non slolidi tanliim
,

ac uesani ingenii , sed plané phrene- nombre de matériaux pour cet


ticusad r/ihiemuique {t.^) l'autre dit : important ouvrage ,
et pénible
que c'était un homme à vertiges et un lorsque la mort le fit sortir de ce
frénétique Paulus quidam Alcia-
tus
;

Mediolanensis homo jani anlea


,
monde (a) mais encore qu'il eiit
;
,

plané plireneticus et i/erliginosus (aS). donné plusieurs années à ce tra-


vail il n'avait presque pas com-
,
(32) Âbxiardi Oper. ,
pag. 32.
(23) Vir'il. ^neid. , II, i-j. 5o5.
lib. mencé la forme de son ouvrage.
(2.^) C.ilvln. arlvers.
Tractât. Theolog.
Valent. Gentil. , p. GSg. Le père Sforce Palavicin qui fut ,

(25; Beza , Epistol. LXXXl. chargé du même dessein nous ,

apprend pourquoi le père Alciat


ALCIAT (Térence ) jésuite ,
était demeuré si loin de l'exécu-
italien , issu de la même famille tion (A). Si M. Moréri avait seu-
qu' Alciat le jurisconsulte, naquit lement jeté les yeux sur la pré-
à Rome, l'an 1 5^0. Il étudia cinq face du cardinal Palavicin , il
ans en droit avant que de se faire n'aurait pas mis entre les œuvres
jésuite.Ce fut au mois de mars du père Alciat les Actes du con-
ïSgi entra dans cette so- cile de Trente. Il n'y faut met-
qu'il
ciété. Les emplois qu'il y a eus tre qu'un Sermon sur la Pas-
témoignent qu'on l'y regardait sion prononcé devant le pape ,

comme un sujet important. Il Clément VIII, en 1602, et la


fut pendant treize ans préfet du /^ie dePierre Fabri, compagnon
collège de Rome il y enseigna ;
(a) Ex Bibliotliecâ Sciiploium Societalis
cinq ans la philosophie , et dix- Jesu , I^atbaaaëlis Sotuelli.
3<)4 ALCI NOÉ.
successi (t). N'en déplaise
de saint Ignace Loyola. Le père cerle dique'
à ce cardinal je ne crois pas qu'en
Alciat, déguisé sous le nom d'^-
cette rencontre ce fût assez de nier
,

minlus (b) Tacitus l'a traduite ce que le père Paul affirmait. Quand
,

eu italien du latin de Nicolas Or- on a les rieurs contre soi il faut avoir ,

landino (c). Cette traduction fut droit et demi et accumuler preuve ,

sur preuve si l'on veut gagner sa


imprimée à Rome en 162g. Le cause. Ce cardinal ajoute que le père
,

latin fut imprimé à Lyon en Alciat composait fort lentement, par-


1617. M. Moréri remarque que ce qu'il ne se pardonnait rien qui fût
éloigné de la perfection la vieillesse
le pape Urbain VIII disait que
:

et les affaires de la Compagnie fu-


le père Alciat était digne du cha-
rent de nouveaux obstacles Dapoi, la :

peau de cardinal. Nicius Ery- freddezza delV eCa decrepita, la na-


tliraeus le rapporte {d). Si l'on tura perplessa la penna altrettantn ,

demande à quoi tenait-il donc lenta quanto esquisila le occupa- ,


,

zioni de' nostri goi^erni domestici ,


que ce jésuite n'eût pas ce qu'il
'il
hanno cagionato ch'egli sia morto con
méritait? Urbain VIII n'était-il lasciar solo qualche l'estigio deW opé-
pas le distributeur de ces cha- ra conceputa in idea (2). Que ceci
peaux ? La réponse est fort aisée : nous fasse comprendre qu'il y
a des
gens qui à force de travailler à ,

il faut conférer cette dignité à auteurs demeurent tou- être de bons ,

tant de gens par des raisons de jours privés de la qualité d'auteur.


politique , qu'on ne peut toujours
(il Pallavic. Introâuiione alV Hist. del Con-
y admettre ceux que l'on croit la cilio Trident. , cap. V.
mériter. (2) L,'a même.

ib) Léon Allatius in Apibus Urbanis, pag.


238 , et Alegambe disent Erminius.
ALCINOÉ , fille de Polybe le

(c) Sotuellus , Bibl. Societ. Jesu. Corinthien et femme d'Amphi-


,

(d) Nicius Erjthr, Pinacotb. //, cap.


lochus, devint folle d'amour pour
XL FII.
un certain Xanthus de l'île de Sa-
(A) Le père .viciât ,
qui auait en- mos, qui était logé chez elle. Ce
trepris une Réfutation de Fra Paolo , n'est point là ce qu'il y eut de
était demeuré.... loin de l'exécution. ]
plus étrange dans son aventure :

Il s'était imposé la loi de ne rien


le grand sujet de surprise est de
nier à son .adversaire sans apporter ,

des preuves de sa négative de sorte ;


voir que ce fut Minerve qui lui
qu'il employa bien des années à cher- inspira cette maladie d'amour ,
cher des mémoires qui lui fournissent pour la punir de ce qu'elle n'a-
ces preuves. Le cardinal Palavicin
prétend que c'était une œuvre de su- vait pas payé tout ce qu'elle avait
régogation parce qu'il n'y a point de
,
promis à une femme qui avait
lois qui obUgent à la pieuve celui qui travaillé chez elle. Cette femme
nie c'est à l'accusateur à prouver
pria Minerve de la venger , et
:
;

et , s'il ne le fait point il mérite la ,

peine du talion mais la personne ac-


:
voilà comment ses prières furent
cusée peut se contenter d'un je nie le exaucées. Alcinoé , par les soins
fait cela suffit à la faire absoudre ,
; de cette déesse, devint si furieu-
pendant qu'on ne prouve rien contre
sement amoureuse de son hôte ,
elle. Lh dot>e questi s'erafatto lecitn
qu'elle maison et
abandonna sa
d'accusare senzn prouare , il che dalle
lei^gi è punito colla pena del talione , ses petits enfans et s'embarqua ,

quegli non uoUe negare senzn hai'er avec lui. Mais, pendant le voya-
la prova délia falsita dal che ogni
ge elle fit des réflexions sur sa
;

,
legge il disnbliga\'a. Quindi fu che
spese moUissimianni in cercarmeviorie conduite elle en pleura elle se
; ;
ALC I NOUS. 395
souvint avec cris et larmes de son proverbes (D) qui étaient en usa-
jeune mari et de ses enfans en- ; ge parmi les anciens. Quoiqu'il
fin, toutes les bonnes paroles de en soit le royaume d'Alcinoiis
,

Xanthus , qui promettait de l'é- vrai pays de Cocagne : était un


pouser , étant une trop faible on y aimait la bonne chère et
consolation elle se précipita les commodités de la vie (E)
, ce :

dans la mer (a). Grand exploit qui n'empêchait pas que les gens
et bien digne de la déesse Miner- n'y fussent agiles et fort bons
ve Voyez la remarque (C) de hommes de mer (c) et qu'Alci-
! ,

l'article Égialée, et la remarque noiis ne fût un prince très-juste ,


(D) de l'article Myrrha. comme cela paraît par ces paro-
les : h'kvlvooz 5tpatv£(ïz£ (îtzaiÔTaTOÇ
(«) Parllienius , Erolicorum cap. XXVII.

ALCINOUS, roi des Ph^aques, (c) Homer. Odyss. , lib.VI, vs. 270 lib. ;

dans l'île qu'on nomme aujovir- VII , i's. 35, 107 ; lib. VIII , i>s. 247, 253,
et passim alibi.
Corfou était fils de Nausitlioiis
,

(d) Orplieus.
{a), et petit-fils de Neptune et de
Péribée (A). Il épousa Arête , sa Neptune
(A) Il était petil-JUs de et
nièce, fille unique de Rhexenor, de Péribée. Britannicus nous assure
]
fils de Nausithoiis , et en eut cinq qu'Alcinoiis était fils de Phaeax , et
fils et une fille nommée Nausi—
que Phœax Tétait de Neptune et de
Corcyre (i). Je vois bien dans Etienne
caa de laquelle Homère dit beau-
,
de Byzance le dernier de ces deux
coup de bien {b). Il loue encore faits mais non pas que ce fils de
^

davantage la mère et il en fait , Neptune et de Corcyre ait été' le- père


une héroïne. 11 fait aussi de fort d'Alcinous.
(B) C'est par ses jardins qu Alci-
longues descriptions du palais et
nnûs a principalement immortalisé sa
des jardins d'Alcinoiis. A son di- mémoire. ] Tous les poètes parlent à
re , il y avait les plus excellens l'envi de ses jardins^ M. Lloyd en cito
fruits du monde dans
ces jar- plusieurs passages ; contentons - nous
de celui de Juvènal :
dins : et cela , sans vicissitude
d'hiver et d'été mais tous les ,
Illa jubehil
Poma dari ,
quorum solo pasciîris odore ,

mois de l'année. C'est sans doute Qualia perpeuius Phœncum aulummts habe-
bal (2)/
par ses jardins qu'Alcinoûs a
principalement immortalisé sa et joignons-y ce témoignage d'un au-
mémoire (B). Il reçut avec beau- teur en prose Antiquilas nihil priits :

mirata est quam Hesperidum. liortns


couji de civilité Ulysse (C) que ,

ac regum Adonis (3) et ./4lcinnï (4).


,

la tempête avait jeté sur la côte M. Lloyd cite Théophile, patriar-


des Phaeaques : il lui offrit sa che d'Antioche, qui a parlé de ces
fille, et le fit mener à Ithaque, jardins dans son troisième livre ad
Autolicum ; mais il avertit que Ton
chargé de présens. Or , comme doit corriger la leçon ./Antinous
y ,
pendant le festin où il l'admit , et substituer Alcinoûs. Il cite aussi
celui-ci fit cent contes à dormir
(1) Rritann. in Juvenal, Satir. V, vs. i5i.
debout à toute la compagnie on
,
(2) JuTen. Satir. V , vs. i/jq.
croit que cela fit naître quelques
(3) Je ne sais si Pline a bien entendu ce qu^il
avait lu louchant les jardins d'Adonis. Ils n'é-
(a) Homer. Odyssejc lib. VI et VII. Une taient pas ce qu'il s'imagine. Voyez Varticle
faut pas dire Nasiloùs, comme Moréri. Ado.ms, Remarque (E).
{bj Homer. Odysseœ lib. VI, ci. 62. (4) Plinius, Ub. XIX, cap. IV.
,

39(> ALCINOUS.
ces paroles de saint Grégoire de Na- par une interrogation il déclare sim- :

zianze :
plement qu'il ne dira point l'apologue
d'Alcinoiis C8). 11 est encore plus faux
'H Jï TpiTTêfi* )i*i i'XtTêOÇ 'Axxi-
. . .
que ce qu'il dit soit en d'autres termes
la même chose que la table d'Alcinoiis.
vàoio
TêjSTTVOTjpH (5).
Ilestcertain qu'on trouvedans l'Indice
Tua Alcinoi mensa est jucundior korlo.
des Adages d'Érasme , Alcinoi Men-
Je n'ai point remarqué que les poètes sa , et Alcinoi Apologus comme ,

aient feint que ce prince filt leeardien deux proverbes différens. Le premier
des vergers , comme M. More'ri le débi- n'est point en titre dans le corps du
te. Chai'les Etienne l'a jeté dans celte livre il n'est
: rapporté que comme
erreur^ car on voit dans son Diction- un petit accessoire de l'adage Syba-
naire un Alcinoiis difiérent du roi des ritica Mensa (9^ et il est tiré de ces ^

Phœaques , et caractérisé parla charge paroles de Grégoire de Kazianze :

de Hortorum custos ce que l'auteur :


Oûx. û)ç Aa>TO(^â.yrjii viilidi,v ÀK'K ooç Ak-
prouve parle IF- livre des Géorgiques xivôoy TpiTTêÇctv, Non ad Lotophago-
de Virgile , et par des vers d'Ovide runt inopiam sed Alcinoi mensam. ,

et de Stace , où il ne s'agit point de Hadrien Junius qui a fait un recueil ,

cela , mais uniquement des jardins de proverbes après Erasme, où il a mis


d' Alcinoiis. Apparemment cette bévue Alcinoi Horli comme un proverbe
doit sa première origine à la faule de capital , cite dans l'explication de
quelque copiste ou de quelque impri- celui-là cet autre passage du même
meur, qui aura mis custos au lieu de père touchant la table d'Alcinoiis :

culior.
(C) // reçut auec beaucoup de ci^'i-
/itéf//yssc.] Plusieurs auteurs, comme Non si inarmoreuin dederis lectum Alcinoïque
Ravisius Textor (6), et Decimatoi (7), mensam.
attribuent cette réception à Nausicaa, un autre passage où ce
Lloyd cite
fille d'Alcinoiis, sans en faire aucune
saint docteur emploie la même phra-
part au père. ne considèrent pas
Ils
se. Y Alcinoi Apologus Eras-
Quant à ,

qu'elle ne donna que des habits et des


me le rapporte deux fois. Première-
conseils à Ulysse hors de la ville et
de
,
ment il l'explique d'un conte
,
qu'elle avait père et mère, qui firent
vieille de longis et anilibus fabula-
,
tous les honneurs de l'accueil et de
mentis ; et il se fonde sur les fables
l'hospitalité. Voyez l'article Nausicaa.
Ïu'Ulysse débita à la table d'Alcinoiis :
(D j On croit que les contes d' Ulysse ^rodigiosas ac deridiculas fabulas et
chez alcinoiis firent naître quelques
portentosa mendacia de Lolophagis ,
proi'erbes. ] Moréri dit qu'Ulysse Lœstrigonibus , Circe , Cfclopibus ,
compta (je copie son orthographe ) atque id genus aliis plurimis miracu-
la fable des Ciclopes , des Lestrigons
lis frétas videlicet Phœacum insci-
et des autres , comme on dit , le coude
,

tiu barbarieque (10). Mais ailleurs


sur table. Ce qui donna occasion a ce qu'il avait trou-
(i i) , il nous apprend
proverbe des anciens, qu'Erasme n'a
vé une autre signification de ce même
pas oublié « La Table d' Icinoë n
, A ,
adage dans le IV*. livre de la Rhéto-
ou, comme l'exprime Platon « Est-ce
rique d'Aristote (12), et qu'il veut
,

>) que je vous dois raconter la fable


suspendre sa décision jusqu'à ce qu'il
» d'Alcinoiis ? » Tout cela ne vaut
rien 1°, ce des autres est une expres-
y voie plus clair ou par les Com- ,

mentaires de saint Grégoire de Na-


:

sion obscure et tout-à-fait négligée.


zianze sur ces livres d'Aristote (1 3)
En 2^. lieu le proverbe de la table
,

d'Alcinoiis ne vint point de ces con- (8) Plato, àe Republ., Ub. X.


tes d'Ulysse mais de la bonne chè-
,
(9) C'en le LXV. de la II", centurie de la
11^. chilinde.
re qu'Alcinoûs faisait ordinairement. (10)Erasm. Adagior. cenlur. If^, chil. II,
Voyez la remarque suivante. De plus, num 32 pag. 46().
il n'est pas vrai que Platon s'exprime
,

(il) Idem, ceniuria I , chiliade , num. 82, V


pag. io5t.
(5) GrCRor. Naiianz. Carm. ad Vitalian. (12) // est dans le chap. XVI du litre III ,

(6) In Epithet. dans l'e'dilion de Genève , en i6o5.


(7) In Sylva Yocabiil. el in Tbeiîauro Liogua- (i3) Je n'ai jamais ouiparler de ces Comment
ram. taires.
,,

ALCYOINIUS. 397
on par quelque autre moyer:. Je ne ALCYONIUS (PiERBE) a été un
vois prcst|ne personne qui fasse atten de ces doctes Italiens qui culti-
tion à ce dernier passage d'Erasme.
vèrent les belles-lettres dans le
On s'arrête au premier comme si c'é-
tait là que l'on trouve le vrai sens :
X\ P. siècle. Il acquit une intel-
il qu'on l'y rencontre^
s'en faut bien du grec ligence fort raisonnable*
car pour peu qu'on voie ce que dit et du latin, et
quelques /j/^ce* fit
Érasme sur les paroles d'Aristote on ,
d'éloquence qui ont mérité l'ap-
se de'fîe entièrement de l'explication
qu'il avait donne'e en un autre en- probation des connaisseurs. Il fut
droit. J'avoue que ce passage d'Aris- correcteur d'imprimerie pendant
tote est obscur qu'on le lit difié-
,
long-temps à Venise chez Aide ,
remment et qu'il n'est pas peut-être
,

sans quelque lacune mais il n'y a Manuce (A) et il doit par con-
;
;

nulle apparence que par l'apologie séquent avoir part aux éloges que
d'Alcinoiis on s'y doive figurer des
, l'on donne aux éditions de ce sa-
contes de Ma Mèi'e l'Oie. Gilbert Cou- vant imprimeur. Il a traduit en
sin qui a fait un recueil de prover-
,
latin plusieurs Traités d' Aristo-
bes depuis Érasme se figure néan- ,

moins cela quoiqu'il ne considère la


,
te (a) et n'y a guère réussi. Sé- ,

chose que selon la citation d'Aristote pulvéda écrivit contre ces ver-
(14). Il y a un passage d'Élien où sions et y remarqua tant de fau- ,
,
yllcinoi j4pnloffi 'Axxi'voou ÎTrôxo^oi ,

ne se peut prendre que pour les dis- tes, qu'Alcyonius ne trouva point
courr. qu'Ulysse fait à ce prince dans de meilleur remède à sa disgrâce
rOdyssée (i5). que d'acheter autant d'exemplai-
(E) On aimait dans son royaume la
res qu'il lui fut possible de l'é-
bonne chère et les commodités de la
,
crit de Sépulvéda pour les jeter
i'ie. ] C'est de quoi Alcinoiis ne fit ,
_

point mystère à Ulysse: Nous ai- dans le feu (B). Paul Jove l'accuse '

7rto«î lui dit-il


,
les repas la musi- d'un second défaut
, qui est plus ,
,
que, la danse, le changement d'habits ,
honteux que le premier : c'est
les bains et le Ut.
d'avoir été un impudent yjarasite
(C) ,
qui ne faisait point diffi-
culté de manger deux ou trois
Ktti iùva.1 (l6j. fois hors de chez lui dans un mê-
Semper autem nobh conviviuinque gralum ,
me jour. Je ne sais s'il en faut
cithnraqup chortque . ^

Veslesquf ad peimulnndum allernalhn , la- croire tout-à-fait Paul Jove car ;


vacraque calida, etcubilia.
il se brouilla avec Alcyonius {b)

Horace exprime cela en cette manière :


dès qu'il eut ouï dire qu'il avait
Alcinoique en lui un rival dans la commission
In cute curanddpUts œquo upprala juvenius
Cuipulchrutn fuit in niedios dorinire dies et ,
d'écrire l'histoire (D). Le Traité
Ad strepiluin cilharce cessaium ducere cu- qu'Alcyonius fit imprimer tou-
ram (^17).
chant VExil contenait tant de
il n'est pas besoin d'avertir que ,
par beaux endroits parmi d'autres as-
Alcinoï jui'entus faut entendre , il
sez chétifs qu'on crut qu'il avait
,
les jeunes gens du royaume d'Alci-
noiis. Athénée parle (|uelquefois de la
cousu à ses pensées plusieurs mor-
vie voluptueuse des Phœaques. * J. Leclerc , dans sa Bibl. choisie, troiwe
étrange cette e.r pression rf'inteliij;ence fort
(i4) Cognât, in Proverb. num. 210: il cite, raisonoable du
quand il s'agit d'un
latin .

comme Erasme, le IV^, livre de la Kbétorique homme que peu de Cicéroniens ont égalé.
d'Ari-tote.
t'oj Voyez-en la liste dans la Bibliothèque
(i.î) ^lian. Var. Histor. , lib. XIII , cap.
xni. de Gesner.
(16) Homeri Odysse» lib. VIII , vs. 248. (i) Voyet ^e«£pî(r<s de.s Princes, yb/ 92.
(17) Horat. Epist. // Ubri I , vs. i8, «177. vcrsQ.
398 ALCYONIUS.
ceaux d'un Traité de Cicéron de mourut de maladie , au bout de
Gloria et qu'ensuite , pour em-
, quelques mois (h). Sa vanité l'em-
pêcher qu'on ne le convainquît pécha de devenir plus habile (F),
de ce vol , il jeta au feu ce ma- et sa médisance lui attira beau-
iiuscrit de Cicéron (E) l'unique , coup d'ennemis (G). Le Supplé-
({ui fût au monde (c). Les deux ment de Moréri ne vaut rien sur
Marangues qu'il fit après la prise cet article (H) : ce n'est qu'une
de Rome où représenta fort copie fidèle des fautes énormes
, il

éloquemment de Char- de M. Varillas. Au reste , il y a de


l'injustice
Jes-Quint et la barbarie de ses sol- savans hommes qui ont fort loué
dats, dissipèrent un j^eu les mau- Alcyonius et ses traductions (I).
vais soupçons qu'on avait formés On trouve quelque chose qui
contre lui {d). Ce sont deux fort le concerne dans les Lettres de
bonnes pièces. On parle d'une Longolius , et qui n'est pas ho-
Harangue qu'il fit sur les che- norable (K).
valiers qui étaient morts au siège (/() PieriusValerianus, de Littéral, infeli-

de Rhodes {e). Il était professeur citat. pag. 63. ,

à Florence , sous le pontificat (A) Il fut correcteur d'imprimerie


d'Hadrien VI , et avait outre sa pendant loni^-tenips a f^cnise chez ,

pension dix ducats par mois du Aide M.anuce.'X Paul Jove n'en dit
Ciim. ddi in chalcographo'
cardinal de Médicis jîour tra- pas tant.
rum qfficinis dit-il (1), corrigendis
,
,

duire un ouvrage de Galien {f). erroribus menstrud mercede operam na-


Lorsqu'il eut su que ce cardinal rdsset, nudld obserualione ad prœcel-
avait été créé pape , il demanda lentem scribendi facuUatem per^'enit.
son congé aux Florentins et ne C'est de M. Varillas que je tire ce qui
,
concerne Aide Manuce et j'avoue que ;
l'ayant pas obtenu il ne laissa
je le fais en tremblant
,
vu le grand ,

pas d'aller à Rome plein d'espé- nombre de fautes que cet écrivain a
rance de s'y avancer (g). Il per- commises touchant les beaux-esprits
dont il a parlé dans ses Anecdotes de
dit tout son bien pendant les
Florence. Le public lui est redevable ,
troubles que les Colonnes excitè- dit-il
(2) de l'exactitude dont usait ,

rent dans Rome et quelque jild'i Manuce dans l' impression des
;

temjjs après lorsque les troupes meilleurs auteurs grecs et latins que
,

car il a
de l'empereur prirent la ville , nous admirons
aujourd'hui ;

été toute sa uie correcteur de cette fa-


l'an 1627, il reçut une blessure meuse imprimerie Cette dernière par-
en se sauvant au château Saint- ticularité est fausse; car Alcyonius
Ange. Il ne laissa pas d'y entrer, était professeur à Florence, sous le pon-
malgré les soldats qui le pour- tificat d'Hadrien VI.
(B) Il acheta ce qu'd put d'exemplai-
suivaient et d'y joiiïdre Clé- res de l'écrit deSépulwéda contre ses
,
,

ment VII. Il se rendit coupable versions d' Aristote pour les jeter ,

d'une noire ingratitude envers ce <i'ins le /eu.] Paul Jove remarque cela
perperàm
pape car dès que le siège fut ^""'" '^"''"'^ ^^ Anstotele
; ,
insolenterque uertissel, in eum Sepul-
levé , il s'alla rendre au cardinal veda i'ir Hispanus egregiè de litteris ,

Pompée Colonne chez qui il meritus edito volumine peracula jacu-


, ,

la contorsit...., tanin quidem erudito-


(c) Jovius, Elogior. cap. CXXIII.
rum applausu , ut Alcyonius ignomi-
(d) Jovius ibicl.
,

(e) Lettres des Princes folio 98. ,


(i) Paul. Jovius , Elogior. cap. CXXIII ,
(/) C'est celui de Parlibus A.nimalium. pag. 2G5.
ig] Lettres des Princes folio gS. ,
(a) Varillas, Auecdot. de Florence, f>«g. i63.
,

ALCYOJNIUS. 399
niœ dolore miserè consternntus , His- ;e<eaM^eM.] Paul Joven'eslpas le seul*
j)ani hostis llbros in labernis ul con- , qui raconte cette supercherie funeste.
cremaiet, f^rat^i pietio coëmere coge- Paul Manuce dans son Commentaire
,

returi^). Voyez jcs Epîtres des Princes sur ces paroles de Ciceron Librunitibi :

recueillies par Ruscelli , et tradui- celeriter mittarn de Gloiid (8), en ]mr\e


tes par Belleforêt, folio g3. Voyez ainsi Lihrns duos significat, quos de
:

aussi la XXVIP. et la dernière lettre Gloria scripsit qui usque ad patrum


.-

du de Longolius. Si benè te
III*. livre noslrorum œtatem peruenerunt. IVam
noi't ipse tudenunciabis ; c'est-à-dire,
, Bernardus Justinianus in indice li- ,

que l'ouvrage de Sépulve'da était im- brorurn suoruni n'uninat Ciceronem de


prime' ut honiinis ad tantœ conlume-
, Gloria, /s liber postea ciim unii-ersam
liœ nuncium i^ultuin i^ideas
,
quod : Bibtiothecam Btrnardus monacharutn
ununi sanè spectaculuni tibi magno- monasterio legdsset magnâ conquisi- ,

perè inuideo. IVunquam enini is ex tus cura, neutiqu'am est im^entus. Ne-
oculis labnrai'il, quitùm ejus jronteni mini dubiumj'uit qitin Petrus Alcyo-
spectdrit (4^- nius, cui nionachcn niedicosunejus trac-
(C) On
l'accusa.... d'avoir été un tandœ BibLiothecœ potestalem fece-
impudent parasite.'] Rapportons les raat,homo improbus furto auerierit.Et
termes de Paul Jove Cùm nulld ex : sanè in ejus Opusculo de E.rsHio as-
parle ingenuis sed plané plebeis et
, pcrsa nonnulla depi ehenduntur quœ ,

sordidis nioribus Jœdaretur , erat enini non olere Alcyoniumauctoreiu; sedali-


impudens gulœ niancipium , ita ut eo- quantà prœitanliorem artificem fi-
dem scepè die bis et ter aliéna tamen deantur. Nous apprenons de ce passage
quadrd cœnitarel ; nec in ed fœdilate qu'Alcyonius e'tait médecin de profes-
malus omninij m.edicus quod domi sion. Voyez la remarque (I). Or, puis-
,

demiim in lecti limine per i'omitum ipso qu'il l'a été d'un couvent de religieu-
crapulœ onere lei'aretur (B). M. Varillas ses il ne saurait être vrai, ce me sem- ,

ne parle que de l'ivrognerie d'Alcyo- ble, qu'il ait passé toute sa vie dans
nius il ne Taccuse que de s'être enii'ré l'imprimerie de Manuce C'est une nou-
;

toutes les J'ois qu'il en trnui^ait l'occa- velle preuve de l'erreur de Varillas.
sion. Latomus,dont Paul Jove rapporte J'ai deux choses à remarquer contre
les vers, fait mention des deux excès cet historien. La première est que,
de ce personnage, de celui de boire et dans le Fragment de son Louis XI, il
de celui de manger imputait à Philelphe le plagiat et la
(D) Paul Jove le crut son rii'al dans destructiondu Traité Je G/or/<ï, et ci-
In commission d'écrire Chisloire.'] Celui tait les petits Éloges de Paul Jove. On
qui nous apprend cela ajoute qu'il l'avertit (9) que cela n'y était point. 11
n'était point vrai qu'Alcyonius dût a profité sans doute de cet avis en pu-
composer une histoire, et qu'on ne biiantsonLouisXI; car, après avoir ob-
l'avait dit à Paul Jove qu'aOn de les servé, touchant Philelphe. les mêmes
brouiller ensemble i,6). Le cardinal de choses que dans le Fragment, il ajoute :

Me'dicis se divertissait à ces querelles // n'est pourtant pas certain qu'il ait
des savans il se faisait un plaisir des
:
été coupable de ce crime, qui passe
inquiétudes où il jetait Alcyonius en pour un des plus grands qui se com-
protégeant Se'pulve'da (7). Notez qu'Ai mettent en matière de littérature ; et il
cyonius loua magnifiquement la pre- j- a des auteurs qui l'imputent h un
njière Décade de THistoire de Paul sax'ani du même temps nommé Alcyo ,

Jove , dans la 11*. partie de son Traité nius , et soutiennent qu'il s appropria
de Exilio. ce Hure de Cicéron après en afoir
(E) On l'accusa de s'être approprié changé le titre qui était de la Gloire
,
plusieurs morceaux d'un traité de Ci- en celui de l'Exil (10). Il applique à ce
ceron, de Gloria , et ensuite de l'a^'oir
* Outre let auteurs cites par Sarle Joly en ,

(3) Paul. Jovius , Elogior. cap. CXXIII ,


nomme cinq autres qui ont aussi accusé Alcyo-
yag. 2G5. nius de s être approprié le traité de <Moriâ.
(4) Longolius, Epist. ullim. tibri III , fol. (8) Cicero, Episto a ad Atticum librt XXVI
a56, verso. XV.
(5) Paul. Jovius, Elogior. cap. CXXIII, (g) Dans
Nouvelles de la République des
les
pag. 263. Lettres, juin i685 article I, vers la fin.
,

(6) Lettres des Princes ,


folio g3. (10) Varillas , Hist. de Louis XI , Uv. I , pag.
(7) Là inéme. 3f) , édition de Hollande.
^oo ALCY ONIUS.
dernier fait la citation de Paul Jove. me je n'ai point ce Traité d'Alcyonius»
S'il avait entièrement supprimé ce qui je ne puis déterminer par moi-même
regarde Philelphe, il se serait mieux si M. Varillas en a bien marqué le su-

tiré de tout embarras; car où trouve- jet et l'occasion. Je puis dire seulement
rait-il que l'on ait aocuse' Philelphe de que le titre qu'il lui donne n'est point
cette supercherie? D'ailleurs, on n'ac- conforme à celui que Gesner a marqué,
cuse pas Alcyonius d'avoir publié le Medices Legatus ,sive de Exilio liber ;

livre de Cicéron et d'y avoir seule-


, et qu'un passage de ce livre (i5) m'a
ment changé le titre on lui pardon-
; fait connaître que Jean de Médicis,
nerait aisément sa vanité s'il n'était qui a été le pape Léon X, y parle.
coupable que de cela; la joie d'avoir Mais ce que je ne puis déterminer
l'ouvrage de Cicéron ferait oublier la par moi-même, je puis l'affirmer sur
fraude mais on l'accuse d'en avoir
: la parole d'un de mes amis, dont
tiré une riche broderie pour la mettre l'exactitude et les lumières me sont
sur ses lambeaux, et puis d'avoir brûlé très-connues (16}. Or , voici ce qu'il
tout l'ouvrage de Cicéron Ex libro : vient de me marquer « Le Legatus :

de GloridCiccionis quem nefaria ma-


,
))Medices seu de Exilio de Petrus
, ,

lignitate abolet'eral mullorum judicio "Alcyonius, bien loin d'être écrit


confectum crederetur. In eo enim tan- » pour servir de consolation au préten-
quam i'ario centone prceclara excellen' » du provéditeur Cornaro, est adressé
lis purpurœjila, languentibus cœteris » par l'auteur ad Nicolaiim Schonber-
coloribus, intertexta noiahantur {\i). )>gium, Pontificem Campanum (17) ,
Ma seconde remarque est que, quand ))et dans tout le livre il n'y a pas un
M. Varillas fait mention de François )) mot qui puisse directement ni indi-
Philelphe dans les Anecdotes de Flo- )) rectement regarder Cornaro. Cet
rence (12) , il ne lui attribue rien par 5) ouvrage, imprimé à Bâle en i546,
rapport au livre de Gloria c'est Al- : » est divisé en deux livres dont voici ,

cyonius seul qu'il accuse de ce for- » le titre de mot à mot Pétri Alcyo- :

fait. Il dit (i3) que ce misérable pla- )) nii Medices Legatus, seu de Exi-
giaire fut obligé de consoler le prové- » lio ad JVicolaiim Schonbergium ,

diteur Cornaro dans l'exil où il auait » Pontificem Campanum. Il est écrit


été condamné pour avoir été battu fai- » en dialogue dont Jean de Médicis
, ,

sant ta guerre aux Turcs , quoie/u'il » qui a été depuis Léon X, Jules de
rCy eût point de sa faute. Jilgionus j) Médicis , et Laurent de Médicis ,
(i4) lui eni^oja le iwre intitulé De ;> sont les interlocuteurs. Voilà pour-
foriiter tolerandâ Exilii fortunâ : et » quoi on a mis Medices au titre
j

comme ce traité n'était composé que » et parce que l'auteur suppose que

de sentences fort mal ajustées du lii^re )) ces interlocuteurs s'entretinrent peu


de la Gloire de Cicéron , il ne laissa X de temps après que le pape Jules II
pas d'être beaucoup estimé, quoique )»eut envoyé Jean de Médicis comme
les plus judicieux remarquassent bien » son légat à la tête de l'armée qui
qu'il n'j avait aucune liaison. Algio- » devait reprendre Bologne , on a
nus , ravi du succès de son ouvrage, M joint le mot Legatus à celui de Me-
changea le dessein qu'il avait eu de ))dices. )) Voici , à coup sûr, une lourde
faire imprimer la pièce de Cicéron. Et faute. Il s'en repentit néanmoins sur
comme il savait bien que personne n'en la fin de sa vie (savoir Alcyonius ) et,
avait de copie, il le jeta dans le feu , fit une espèce d'amende honorable à
de peur qu'on ne trouvât un jour par- la tête des deux harangues qu'il avait
mi ses papiers de quoi le convaincre composées a f^enise, sur la désolation
de larcin. Si l'on compare ce narré de Rome par les luthériens (18}. 11
avec celui qui se trouve dans la Vie de ne faut point douter que l'on n'ait
Louis XI , on y admirera qu'un même voulu traduire là ces paroles de Paul
homme puisse rapporter un fait avtc Jove P^erùm non multà post con-
:

tant de variétés incompatibles. Com-


(i5) Il est curieux : liset-le dans les Opus-
(11) Jovius, Elogior. cap, CXXIII,p. 266. cules de r.olomiés , chap. XV^.
(12) Page 169. (16) M. de Larroqufi.
(i3) Page 168. (!;) Il fuL depuis cardinal: je parle de lui
(i4) C'est ainsi qu'on a mis toujours dans sous (Xicol.TS j SCBOMBERC.
l'e'diticn des Anecdotes. (18) Varillas , Anecdot. de Florence, j9 (68.
,

ALCYON lus. 4oi


firmatœ suspicionls iru'idiani Juabus cet ouvrage. ne contient rien qui se
Il
s/fltndiJissiriiis Orationibus pertfgie- rapporte à rexll d'un provéditeur véni-
giè mitiiçai-'il quant in clade urùis ve-
tien. Les trois interlocuteurs
ne consi-
hementissimc itwcctus in Cœsnrcni , dèrent que leur propre état Ils
étaient
populi Roniani injurias et Bai barorum tous de la maison de Médicis,
et souf-
inimanilatum suntnid perfecli oralnris fraient encore le malheur du bannis-
elnquentid deplord^set. Y a-t-il dans sement. Jean de Médicis se console
et
ce passagf la moindre ombre de lu les console :c'e.t lui qui
,
,-. ,„ ,., ^
est le princi-
theriens .'1 a-t il quelque trace de re- pal personnage de la j)ièce et qui
,

de'-
peutir quelque vestige d'amende ho- bite les raisons et les exemples-
,
c'est
norable au sujet du iiwre de Gloiid? à lui, en un mot, que l'auteur iirê'teson
PaulJove a-t-ii quelque autre dessein érudition et son style assezéléi^ant No-
qu'de faire voir que les harangues tez qu'on réimprima cet ouvrage d' Al-
d'Alcyoniusfurent trouvées si bonnes, cyonius à Genève l'an iGa4 *'in-8" ,
'
qu on crut Deaucoup
u'on qu'aupa- avec deus traités de Cardan (22).
beaucoup moins qu'aupa faa)
ravant qu'il fût incapable d'avoir pro- (F) Sa Inanité l'empêcha de dt
venir
duit de sa tête ce que le livre de Exi- plus habile.'] C'est le sentiment de
lio contenait de beau ? Il me paraît Pierius Valerianus Non displicuisset :

très-faus que ces harangues aient été mihi, dit-il [l'i] Alcjonius, si quan- ,

composées à Venise. tum stflo profcceral timicorum consi- ,

Au reste je m'étonne que Pierius lium de rtbus adliibere woluisset, qui


,

Valerianiis qui a regretté la suppres- nisi ipsimet sibi tantum armgdsset


,

sion d'un ouvrage, de laquelle il a futuius oinninô fuerat è primonbus[


tasé Alcyonius, n'ait rien dit du traité niuUam enim Grœcis Latinisque litle- ,

de Gtorid. Ayant rapporté que Pierre ris opérant impendtrat et diiciplinis


Martellus n'avait pu achever quelques ^ariis oblectatus eral.
ouvrages à cause de ses maladies il (G) Sa médisance lui attira beaucoup
,

ajoute Quatuor lamen Ubros exaclis- d'ennemis.] Ecoutons encore le même


:

simce interpretatinnis in Malhemati- témoin Is eo primitm injclicitnlis in- :

cas disciplinas Braccius ejus filius ab coiumodnflagellatus est, quôd diintde


interitu l'endicdral , wel ipsius auctoris lilteratis omnibus inalè sentit dica-
de se testimonio absolutos , atque ii cissimd omnes obtrectatione lacera-
Barbarnrum (19^ inanus effugeranl , undè omnium tant doctorum quant
biit,
Brnccii ipsius diUgentid in Arctni imperitorum in se odium concildrat.
JEfium asporlati. Sed enim in Pétri Voyez ci-dessous la remarque (K;,
AlcyoniL manus ciiin incidissent , ità (H^ Le supplément de Moreruie faut
suppressi sunt, ut nusqu'am ampliiis ap- rien sur cet article ] 1°. On n'a
pas
paruerint (20). pris garde que ï'Algmnus des Anec-
Depuis la première édition de ce dotes de M. Varillas est une chimère
Dictionnaire, M. Bourdelot, médecin des copistes. 11 y avait sans doute Al-
du roi et de madame la duchesse de cionius dans l'original de ces Anec-
Bourgogne , m'a fait la faveur dem'en- dotes , et par conséqut-nt il ne fallait
Toyer son exemplaire du traité d'Al- pas distinguer de Pierre t cyonius A
cyonius C'est un petit in-4'', imprimé que Moréri a\ait fort bien placé au
à Venise, l'an iSaa, in œdibus Aldi XVl^. siècle, le prétendu Algionius.
et Andreœ Asulani Soceri. Il a pour Cela me fait souvenir que Claude du
titre : Pelri A cyonii Medices Lega- Verdier, page 73 de sa Censura in
tus de Exsilin , et contient deux par- omnes penè auctores , dit que Petras
ties (21) , qui sont dédiées l'une et Avionius a marqué beaucoup de fau-
l'autre a<l JVirnlauni Schnnbergiurn, tes dans le livre d'Apulée de Itlundo.
Pontifîceni Canipanuni. J'ai trouvé L'errata corrige AAonius par Alcio-
tout- à-fait juste l'instiiuction que niiis. Néanmoins on a cité Ai^ionius
M. de Laroque m'avait écrite touchant dans la page 56 du Plngiariorum Srl-
(if)) Il pari» des soldais de Chartes-Quint,
/aèwi, imprimé à Amsterdam, en i^g^,
qui ptllèreni Boine , Van iSî-. avec lesAmœnitates Theologico-P/ii-
(20) Pier. Valerian. de Littéral. lafelicit. ,
p. 76. (22) Celui de Sapieatiâ , et celui de Consola-
(21) .4 la i". . on met au haut des pages tioiie.
Medicps Legatns prior , et à la 2'. , Medices (l'i) Pier. Valerian. de Liuerat. Infelicii. ,

Legalus posterior. p. 63.

TOME I. a6
,

402 ALCYONIUS.
lologicœ de M. Almeloveen. 2°. Il de se souvenir de lui quand il com-
fullait considérer que selon M. Va-
, posa les dialogues de Interpretalionc.
rillas, ce prétendu Algionus, ayant Joignons aujourd'hui à Léon de Noie
déploré les ravages que l'armée de un autre témoin. Je trouve que Ga-
Charles-Quint fît à Rome sous Clément briel Naudé loue beaucoup les versions
VII , devait être donné au XVI*^. siè- d' Alcyonius. dans son traité de
C'est
cle. 3°. Ce qu'on a tiré des Anecdotes Fato et Kitœ Termina. Il dit que ce
n'a été purgé d'aucune faute. traducteur, ajant discuté trois objec-
(I) De sai'ans Immmes ont fort loué tions que l'on pein faire contre ceux
Alcyonius et ses traductions. ] Je me qui disent que le traité de 3Iundo est
contenterai de rapporter ce qui fut un ouvrage d'Aristote, se tourne en-
écrit à Erasme par Ambroise Léon suite de toutes parts pour n'être pas
de Noie l'an i5i8. Cet ami , qui était
,
obligé de convenir que c'est un ou-
un fort habile médecin , lui apprit vrage supposé Dijficultates ejusmodi:

que le sénat de Venise avait fait pu- amoliri ientet ; alque ne supposititium
blier, à son de trompe, que tous ceux hune J'œtum queni una cum legitimis
,

qui aspireraient à la profession des aliis elegantissimè de grceco latinum


lettres grecques, vacante par la mort J'eceral, agnoscere cogeretur, verlil se
de Marc Musurus eussent à se présen- in omnes partes, tandemque lus i^eibi
,

ter, et qu'on destinait deux mois à concludit sed morositatem ejus geue- :

prendre leurs noms et à voir ce qu'ils ris quœstionum grammaticis relinqua-


étaient capables de faire sur les au- mus (26).
teurs grecs Statutuni est tempus duo-
: (K) On trouue quelque chose qui le
runimensiurn, quo competitores et no- concerne dans les lettres de Longolius .

mina dent et Legendo et aperiendo et qui n'est pas honorable.^ On a déjà


•^rœcos aulores osléndant qui i^iri sint vu (27) qu'au sentiment deLongueil.
et quantum lingud et ingénia polleant le visage d' Alcyonius , à la nouvelle de
/./\ A 1 :,„T„'^ „: t_ „!.. 1.^ „..ui;„„i: I- i'„' -i .]_ c i-.'j„ .

(34)- Ambroise Léon ajoute que plu


'
la publication de l'écrit de Sépulvéda
sieurs des disciples de JVIusurus se pré- serait un objet divertissant. Voici quel
paraient à disputer sa succession, et que chose de pis. Alcyonius, ayant sou-
qu'Alcyonius , l'un des plus polis d'en- haité passionnément de porter une let-
tre eux s'était fait connaître par des tre de Longueil à Marc-Antoine Flami-
,

traductions admirables. Il vaut mieux nius, partit sans la prendre; sur quoi
exprimer la chose selon l'oiùginal In- l'on fît cette réflexion JVôsti hominis
: :

ter eorum elegantiores anus Petrus Al- ingenium ille enim et cœnœ quam ei :

cyonius mu/ta c grœco in romanum opiparam hic dederamus , et laudum


sermaneni elegantissimè l'ertit. JYam quibus a nabis ornatissimus discesse-
oratianes plerasque Isocratis ac Demos- rat et litterarum quas sunimâ conten- ,

thenis tanld Arpinitate expressit ut , tione ut J'estinanter scriberem peri'ice-


Ciceronera ipsum nihilominùs légère rat , oblitus profeclus esse dicitur.
videaris. AristotelisfjfMe mulla uerlil \)uod i/os idcircà scire i'olui , ut meis
tant candide , ut Liitium gloriabundum verbis hdc de inhumanilnte cum eo ex-
dicere possil en Aristotelem nos-
: postuletis (28). On ajoute qu'il y avait
trum habemus. Idem ipse juuenis ut ,
l.'i un coup de bonheur, parce qu'on
est litterarum oplimaruni utrarumque avait coulé dans cette lettre certaines
viaxiuius aluninus ità tui quoque
, choses que l'on souhaitait quil igno-
amantissimus ac studiorum tuorujn
, rait autant que tout autre. N'est-ce
laudalor summus (25). Erasme , ré- pas insinuer qu'on le croyait fort ca-
pondant à cette lettre le i5 du mois pable d'ouvrir une lettre ? Quanquhm
d'octobre de l'année suivante, lit faiie id ipsum de quo queror non omnino
des complimens à Pierre Alcyonius incommodé nabis cecidisse uideri pos-
et avoua qu'il n'avait jamais ouï par- sit , ea eniiThiis litteris incautè commi-
ler de lui. Il serait à souhaiter, dans serain , quœ illum in primis celatum
ce partage de sentimens sur la qualité essecupiebam. Perfecerat scilicet pris-
des traductions d'Alcyonius que le ,

savant M. Huet lui eiU fait l'honneur (26) Gabriel IVaudaïas , de FatO et Vila; Ter-
mino ,
pag. 82.

(24) Eiasml Episiol. XXFIIl lib. X, pag. (2'^) Dans la remarque (B).
S3o. (28) Chrislopl). Longolius, Epistol. XXI lil/ii
(25) Idem, pag. 53i. II, foUa 2o3, verso.
,

ALC -AI AN. 4o3


tinœ nostrœ co/tsuetudinis usus ut nia- ancien auteur. Il était d'un tem-
gis c/uibuscum agereni in mentem mihi
^eniret,quain eut. litleras daturus es-
pérament fort amoureux, et il
sem satis meminissem passe pour le père de la poésie
(29). S'il est
le personnage designé dans une autre galante (C). Il semble même que
lettre de Longolius (3o), comme un l'on ait dit
qu'il fut le premier
habile homme le conjecture (3i), quel
qui introduisit la coutume de
{)ortrait faisait-on de lui! quelle mal-
honnêteté, quelle rage de médire, ne chanter des vers d'amour dans
lui attribuait-on pas quel mépris n'a- les compagnies (6). On nous
!
a
vait-on pas pour sa personne ! Ce qui
pourrait taire douter que Longolius
conservé le nom de l'une de ses
maîtresses (c) : elle s'appelait Mé-
parle de lui en cet endroit-là , est que
peu après il nomme Alcyonius, sans galostrata , et se mêlait de versi-
aucun signe de mauvaise disposition j fier. S'il s'en fût tenu là
on
,
mais ce sujet de douter n'est pas une n'aurait pas eu tant de sujet de
preuve convaincante ,
puisque d'ail-
se plaindre ; mais on parle aussi
conforme à ce-
leurs ce portrait-là est
luiqu'un autre auteur du même siècle d'un Chaeeron , duquel il fut
a donné d'Alcyonius. On venait de amoureux Alcman a été l'un
(d).
dire que Pierius Valerianus était un des grands mangeurs de son siè-
homme sincère, et tout aussitôt on
remarque Dii/ersœ naturœ est Petrus
:
eu de cle (e). Cette qualité aurait
Alcyonius f^enetus mordax et male-, fâcheux inconvéniens, si la poé-
tltcus nec pudens magis quarn pru-
, sie avait été en ce temps-là sur
dens rnitlo de hoc nebulone plura
le pied qu'on l'a vue souvent
qui bellum bonis omnibus indixit fia-
gris et Juste coèrcendus (Sa). Notez
peu propre à faire vivre son maî-
-,

qu'on avoue qu'il avait fait de bons tre. Il mourut d'une maladie as-
vers lyriques et ïambiques , et qu'il se sez singulière; car il fut mangé
vantait d'avoir composé une tragé- des poux (/). Il ne faut pas le
die excellente sur la mort de Jésus-
distinguer du poëte Alcmœon
Christ 1,33).
(D) et je ne vois point la néces-
;
(29) Idem, ibid. folio 2o4-
(30) C'est la XX'. du II'. livre. sité de reconnaître deux Alc-
(3i) M. de la Monnoie c'est lui qui m'a in-
:

dique' ces passag»"^ de Longolius, ou Longueil.


mans l'un de Lacédémone l'au-
, ,

(32) Lilius Greg rius GyraIJus de Poët. sai ,


tre de Messène (E).
temporis Dia/0^0 /, pag. 5^2 , eiiit. 1696.
(33j Idem, ibid. (b) Atiien. , hb. XIII, pag. 600.
(c) Id. ibid.
ALCMAN ,
poëte lyrique , flo- {d) Idem. lib. X, pag. 416.
{ei Id. ibid et Mliaa. Var. Histor., lib.
rissaitdans la 2^^. olympiade (a). ,

I, cap. XX yII
Les uns disent qu'il était de La- (yj Aristotel. de Histor. Anim. , lib. V
cap. XXXI; Ptin., lib. XI, cap. XXXIII
cédémone , les autres qu'il était Plutarch. in Sjllâ pag. 474-
;

né à Sardes , ville capitale de la


Lydie. Ce qu'il y a de bien svir (A) Il a eu droit de bourgeoisie dans
,
Sparte. ] Cela paraît par une épigram-
c'est qu'il a eu droit de bourgeoi-
me que Plutarque a inséi'ée dans son
sie dans Sparte (A), et que les La- Traité de l'Exil (i). On y fait dire à
cédénioniens se sont fait honneur Alcman que s'il avait été élevé dans ,

Sai'des la patrie de ses ancêtres


d'avoir fourni à la Grèce un bel- il , ,

serait un pauvre prêtre de la déesse


esprit comme celui-là (B). Il avait Cybèle destitué de ses parties viri-
,

fait quantité de vers dont il ne les mais qu'il se voit à présent


nous reste que peu de chose, cité citoyen de Lacédémone, bien instruit
par Athénée, oupar quelque autre aux lettres grecques ce qui le reiid ,

supérieur aux rois de Lydie. L'inter-


'.'j) Suidas, m 'A?.;:.uav (i) Op«r. Morallnm p.ig. Sut).
. , ,

4o4 ALCMAN.
premier ment; mais il s'est fondé sur une
prête latin a mal traduit le
epigramme mauvaise raison. Ei^n dit -il (8), .,

vers de cette
Laconeni fuisse aibitror, quùm Laco-
,

. ^âpiTêiÇ àifX.a.W Trcfrépaii vô//oç. nicd dialecto usus sit. S'il se fût sou-
Ol mea majorumque meorum palria
Sardes
venu de l'épigramme que Plutarque a
il n'eût pas manqué de
;
rapportée,
car il faudrait conclure de cette
ver- voir la fausseté de cette raison. Alc-
sion qu'Alcman était né à Sardes man n'ayant pas été élevé dans la
,
conclure des Lydie mais en Grèce et demeurant
(2) ce que l'on ne peut , ,

de
paroles grecques et voilà comment dû
: à Lacédémone , a se servir la
qui était celle de
un traducteur est quelquefois un se- dialecte dorique ,

meur de zizanie lorsqu'il y pense le Sparte. Quelque rude qu'elle fût ,


il

ne laissa pas de s'en servir à faire de


moins. Celui qui a mis en latm Tépi-
gramme grecque , ne songeait pas bons poèmes. "^H iroiYia-a.vTi a.Ty.ct.ra.y

<{u'en ajoutant le mot ?nea qu d ,

croyait être sans conséquence il se- ,

rait cause que plusieurs


s'opiniâtre- To iû<fai\'iv (9). Cui in Canticis pan-
raienl à soutenir qu'Alcman n'est
point gendis nihil omnino Laconica lingua
né à Lacédémone. Combien y a-t-il ohfuit, etsi mhtl ea in i-ocibus appet-
<l'auteurs qui ne consultent que les landis habet suai'itatis.
versions , et qui prennent dans les (B) Les Lacédémoniens se sont fait
livres grecs toutes les preuves que
les honneur d'auoir fourni à la Grèce un
versions leur fournissent soit que , bel-esprit comme celui-là- ] Le pas-
l'original le souffre , soitqu'ilne le
souf- sage de Paterculus que j'ai ,
cité , le

fre pas! M. de Saumaise a


savamment prouve; ces paroles de Stace :

corrigé cette epigramme (3) ;


mais je
Et letricis Alcman cantatus AmycUs (10),
dire
Tievois pas trop ce que veulent
ceux qni nous renvoient à lui , comme le prouvent Joignez à cela le aussi.
à un juge qui a terminé le procès
de la sépulcre qu'ils dressèrent à Alcman ,
patrie d'Alcman. Il s'agit dans ce pro- proche du temple d'Hélène (11).
cès , si ce poète est né â Lacédémone (C) Il passe pour le père de la poésie
ou à Sardes dans la Lydie. Suidas sou- galante. ] Cela paraît par ce passage
tient le premier parti (4) ; Cratès sou- d'Athénée (la) ,
'Ap;^''''"*? ^^ ô'Apy.o-
tient le second (5) ; Velleius Patercu- VKtKOÇ, (£ç ^intri Xa^aiXêûJV , 'Akk/hava
lus ( 6 ) et Élien ( 7 ) nient ce que •vê'vovévAi T6CV ifim'riKcèv y.i'km «•ys/z-ovct

Suidas affirme. A quoi sert l'épigram- xcLi ix.é'auvan TrpœTov /rnhoç , à-KiiKcLçnv ov-

me pour terminer ce procès puis- , TO, KCtt TTift T*Ç yUVeLÏKCLÇ KCtl TilV TOlCtV-
qu'elle ne nous apprend pas oii est né THv Moi/3-5tv êiç Tctç (TistTfiCstç. Anhy-
Alcman , mais seulement qu'il n'a pas tasHarmoniacus scribil ut ait Chu- ,

été élevé dans Sardes , la patrie de ses mœleon amatoriis ç'ersibus condendis
,

ancêtres; qu'il a été élevé à la ma- omnium principem et ducem Alcma-


nière des Grecs et qu'il jouit de la nem fuisse
, erga mulieres pelulanlis- ,

bourgeoisie de Lacédémone? Cela peut simum et anle omnes in t'ulgus eam ,

signifier également ces deux choses :


inusnm et ea carmina edidissc ,
qui in
ou qu' Alcman fut transporté en Grè- hominum congressu ac coni'enticulis
ce pendant son enfance ou que son , canerentur.
père s'y fut établir avant que ce gar- (D) // ne faut pas le distinguer du
çon lui fût né. En ce dernier cas , poêle Alcmœon.'\ Saint Jérôme, dans
rien n'empêcherait qu' Alcman n'eût la Chronique d'Eusébe , après avoir
reçu le jour dans la ville de Lacédé- parlé d'Alcmœou sousla 3o*. olympia-
mone. Scaliger a été dans ce senti- de, parle d'Alcman sous la 4^*., et se
sert de cette circonspection , ut qui-
(2) Amiot a fait la même faute.
(3) Salmas. Exercitat. Plinian. ,pag. SSS.
busdam videtur. Scaliger a corrigé au
(4) Il le fait naître à Messoa , qui était un
(3) Scalig.Animadv. in Euseb. , num. i36o.
quartier de Lacédémone , selon Strabon, corrigé
, lib. III pag- 96.
pnr Saumaise, Ext-rcit. Plinian., pag. 885. (g) Paiisan. ,

SuiHam in' Ah.x.y.iv (10) Stal. Sylv. ///, lib- F, vs. i53.
(5) //;)U(i ,

(iij Pausan. hh- III , pag- 96.


(6) Alcmana Lacones Jalsb stbi vindicant. ,

(i2j Athcn., lib- XIII, pag. 600. Fide etiam


Paterciil., Uh. I, subfin.
(7) ;Eliani Var. Hist. , lib.
XII , cap. T.. Siiidam , in Akh/A-cLV.
,

ALCMENE. 4o5
premier passage Alcmœon
mari d'AIcmène(B), fut ad- par Me- tre le
ma/i. Il est visible, par le
1
dys roi de Lydie
, sous
111*
lequelir»'
Crates
„^- „„„, „,i ^„
^^^^ sans nul scrupule
,
i--""- ""^
r
aux ^"u»-
lonc-
I
reene a Ar-
. .
i

a placé Alcman que ce poète floris-


*'0"S matrimoniales. Le jeu lui
,

sait environ la 3o*. olympiade temps plut de telle sorte qu'il fit durer ,
,

auquel on niet Alcmaeon dansla Chro- cette nuit-là trois fois plus qu'à
nique dEusèbe. Si cette raison ne suf- Tordinaire (C). Voilà d'où sortit
fit pas pour montrer qu'il faut ré-

duire ces deux noms à une même pei'- Hercule. La plupart des auteurs
sonne on vous prouvera invincible-
, modernesdisentqu'Alcmène était
ment qu'AIcmaeon AK>if/.a.ia>v et , '
, du fait d'Amphitryon
déj à grosse ,-

Alcman 'AKKy.iv ne diÙèrent que


, ,
mais Apollodore insinue assez
de dialecte et que le premier se doit
^

convertir au second pai" les règles


clairement qu'elle était encore
,

de la dialecte dorique. Voyez le Com- fille(D) et c'est tourner mieux


;

mentaire de Saumaise sur Solin , à la chose à l'honneur de Jupiter,


la page 885. L'Alcman de la ^i^.
Quoi qu'il en soit , Amphitryon
olympiade est une chimère. On le
place là parce qu'on avait lu des au-
,
revint chez lui le jour même qui
teurs qui s'e'taient trompés sur Tâge succéda à la longue nuit que ce
d' Alcman. Dieu avait passée avec Alcmène.
(E) Je ne t^ois point de nécessité
Il ne trouva point que sa femme
de reconnaître deux Alcmans l'un ,

de Lacédémone l'autre de Messène. ] le reçût avec les empressemens


,

Suidas est , je pense le seul qui le , qui accompagnent la première


fait. Or , son autorite' n'est pas fort vue après une absence et il en ,
grande , lorsqu'il ne cite personne ,
sut bientôt la raison par l'his-
et qu'il ne marque point de cir-
constances. Voilà le cas de son Alc- toire qu'elle lui fit de la nuit der-
man de Messène , il n'en dit rien. nière. Ceux qui se mettront à sa
Souvenons-nous que le ve'-
qu'il a dit place pourront nous dire les pen-
ritable Alcman né à Messoa était ,
sées qu'il eut là -dessus. Il alla
3tT5 Mss-j-caç. Ce lieu n'est pas autre-
ment célèbre et c'est ce qui aura d^abord au devin et il sut de Ti- ,
;

fait juger à quelques copistes qu'il ,


résias que Jupiter déguisé ea ,

fallait lire o-tto Mês-j-iîviiç dans les au- ,


Amphitryon , avait eu affaire
teurs qui avaient débité la même cho-
avec Alcmène. Ce fut à lui à se
se que Suidas. Leur prétendue correc-
tion aura forgé un nouvel Alcman , consoler et il ne paraît pas que
;

que aura cousu aux centons de


l'on son chagrin ait été fort long ,
Suidas. Cette conjecture me paraît puisque dès la nuit suivante il fit
plus vraisemblable que celle de Lilius
un enfant à safemine,déjà grosse
Gyraldu.s. Il ne reconnaît qu'un Alc-
man mais il le veut na' if de Messène,
j
du fait d'un Dieu \a). Juuon, par
et il corrige dans Suidas i-rl Mss-s-ôstç un effet de sa jalousie ordinaire ,

par Ù.TO Mss-s-h'vmç. Scaliger rejette avec traversa le plus qu'elle put les
raison cette conjecture (i3j.
couches de cette femme ; et ce
(i3J Scalig. Animadv. in Euseb. num. i36o.
,
ne fut que par l'adresse d'une
ALCMÈNE , fille d'Électryon servante que l'on éluda les mau-
(A) , roi de Mycènes , fut femme vaises intentions de Lucine (E)
d'Amphitryon, et mère d'Hercu- qui empêchait Alcmène de se
le. Elle accoucha de ce fils pen- délivrer. Elle accoucha de deux
dant la vie de son mari et ce- ;
garçons celui dont Jupiter était
:

pendant Hercule n'était point (a) Ex ApoUoilori Biljliolhec. , lib- II , p.


fils d'Amphitryon mais de Ju- ,
97 et seçtient. Hygin , c/iap. XXIX, dit qu'il
ne coucha plus ai'ec elle , et ne parle çitn
piter ,
qui , faisant st^niblaut d'c- d'Hercule.
4o6 ALCM È N E.
père fut nommé Hercule ; ce- le portaient l'ayant senti fort pe-
lui qui était fils d'Amphitryon fut sant , l'ouvrirent et y trouvè- ,

.ippelé Iphiclus(6). Onditqu'elle rent au lieu du cadavre , une pier-


épousa Rhadamanthe , après la re qu'ils déposèrent dans le bois
mort d'Amphitryon et que son , sacré oii fut ensuite la chapelle
tombeau se voyait auprès de ce- d'Alcmène à Thèbes {h). Diodo-
lui de Rhadamanthe proche re de Sicile marque simplement ,

d'Halirate dans la Béotie (c). qu'elle disparut et que les Thé-


, ,

D'autres disent qu'elle fut enter- bains lui rendirent les honneurs
rée à Mégare et que l'oracle l'or- , divins (/). Ils montraient encore
donna ainsi lorsque les enfans , sa chambre du temps de Pausa-
d'Hercule le consultèrent sur le nias {k). On voyait son autel à
différent oii ils étaient : les uns Athènes en ce même temps (/).
voulant qu'elle fût portée à Ar- Le présent qu'elle reçut de Ju-
gos , les autres soutenant qu'il piter pour la longue nuit qu'elle
fallait la porter à Thèbes {d). Elle avait passée avec lui, était mon-
mourut en chemin sur les fron- tré dans Lacédémone plusieurs
tières de Mégare comme elle siècles , , après comme une rareté
s'en retournait d'Argos à Thè- singulière {j7i). On a raconté des
bes (e). Hercule était déjà mort choses bien merveilleuses tou- :

elle avait eu le chagrin de lui chant son tombeau (G). Consul-


survivre mais, d'autre côté, elle tez l'article d' Amphitryon.
;

avait eu la satisfaction de tenir {h) Antonini Liberalis Metamorpbos., cap.


entre ses mains la tête du persé- XXXIII ex Pberecyd. ,

(() Diod. Sic. Ub. r cap. IV,


cuteur d'Hercule , et de lui arra- , ,

(A) Pausan. Ub. IX pag. 290. // vif ait ,

cher les yeux (F). On a conté enuiron i5o ans après la naissance de Jéstis-
,

que son cadavre disparut pen- Chrisl.


(/) Idem, lib. I pag. 17. ,

dant la cérémonie des funérail- (m) Voyez la remarque (D) de Vartich


les , et qu'on trouva une pierre Teleboes.

dans son lit {/) C'est ce qui fait (A) Fille d' Electryon. ] Le poète
dire à Pausanias qu'elle fut con- Asius la fait naître d'Amphiaraùs et
vertie en pierre {g). Antonin Li- d'Eriphyle (i). D'autres disent bien
qu'Electryon était son père mais ils
beralis raconte que, pendant que ^

lui donnent pour mère Anaxo fille ,


les Héraclides travaillaient aux
d'Alcée fils de Persee (2) et non pas , ,

funérailles d'Alcmène , Jupiter Lysidice fille de Pëlpps et d'Hippo- ,

commanda à Mercure de la dé- daraie, que Chai'les Etienne, Lloyd,


rober , et de la transporter aux Hofman etc. lui donnent (3). Le sco- ,

liaste de Pindare tient pourLysidice(4).


îles des Bienheureux afin de la (B) Jupiter faisant semblant d'être
,
,

marier avec Rhadamanthe. On le mari d'Alcmène, etc. ] Diodore de


exécuta cet ordre, et l'on mit une Sicile remarque que Jupiter prit ce
pierre dans le cercueil. Ceux qui parti parce qu'il ne voulait point ,

user de force que par la voie de


j et ,

[h) Apollod. Biblioth.,


la persuasionn'espérait rien d'une
, il
pag. io3.
(c) Plutarc. in Lysandro
personne aussi sage que l'était Alc-
pag. 4^9 An- , ;

loniniLiberalis Metamorplios., cap. XXXIII.


(i) Apud Pausaniam , lib. V ,
pag. i65.
{d) Pausan. lih. /, pag. Sg.
,
(2) Apollodor. Bibllolh. , lih. Il pag.
, Ç)6.
Id. ibid.
(c-) Scboliasl.Homeri in Ui.-id. XIV, v.'. 323-
{/) Plul. jHRomulo ,
pag. 35 (3 Vorez leurs Dictionnaiie.s.
{g) Pausan, ,
lib. AV, pag. ap^- (4) Inblymp. Od. Vif. ,
,

ALCMÈNE. 407
mène (5). Le même historien observe en repos pendant trois jours , afin
que Jupiter , en cette rencontre ne , que Jupiter eût le temps qui lui' était
fut point agité de cette passion las- nécessaire pour produire Hercule
cive qu'il avait tant de fois sentie
,
une nuit ne sufBsant pas à la produc-
pour d'autres femmes , et qu'il n'eut tion d'un si grand guerrier.
euerri Towtov
pour but que de procréer un illustre OC/V êV //li Vt/;cTi à7roTï>.€3-6»vsti àcfyv«T0V.

moqueraient de cette raison. Je ne fant pensa faire crever la


saispourquoi Plante fit parler ainsi
Tendebat gravila! uterum mihi,
Jupiter à Amphitryon quodmie fe-
:
rebam ' •'

Tu cum Alcuineniî uxore anliquam in gra- Tanlum eral , ut passes auctorem


dicere tecti
tiam ronderis esse Jovein (11).
Redi : haud promeruil tfuamobrnm vitio ver-
teres , Ily a bien des auteurs qui assurent que
Med vi subacta est facere (6) ; cette nuit ne fut pas triplée mais ,

car , puisque Jupiter avait pris la fi doublée seulement (12). D'autres di-
gure du mari, il n'était pas néces- sent qu'elle dura neuf fois plus que de
"
saire d'user de force et nous v enons :
coutume. Saint Jérôme, qui avait pu
lire cela dans les écrits de deux pères
d'entendre qu'il ne prit cette figure
f(ue parce qu'il ne voulait point em- de l'Église (i3) ne s'en servit point,

ployer la force. Un auteur moderne pourtant il s'en tint à la tradition


:

s'est servi de cet exemple d'Alcmènè,'


de la double nuit In Alcmenœ adul- :

terio duas noctes Jupiter copulai^it.


pour prouver que l'ignorance de bon-
ne foi disculpe; et il a cité de très- Jupiter prit alors congé des femmes :

beaux vers de Molière (5). Il y a mille Alcmène fut la dernière des mortelles
choses à dire sur cela c'est un grand :
avec laquelle il coucha. Niobé avait
été la* première il y avait eu seize
sujet de réflexions. Notez qu'il y a des ^

gens qui veulent que la pensée de générations de l'une à l'autre (i4) :

telle fut la durée des amours de Ju-


Plaute soit celle-ci Alcrnène a été :

contrainte de nie laisser jouir d'elle , piter pour les femmes. Or , comme le
parce que j'ai eu la force de prendre divertissement avec Alcmène était en
i^otre figure. Si cela est, il faut dire que
ce genre-là le dernier qu'il devait
l'intention de ce poète a été beaucoup
prendre dans ce monde n'était-il pas ,

meilleure que son expression. raisonnable qu'il le fît durer long-


(C) Cette nuit -là dura trois J'ois
temps ? Alcmène admira la longueur
plus qu'à l'ordinaire. ] On lira peut- de cette nuit (i5) elle lui parut donc :

être sans dégoût ce vieux gaulois :


longue cela lui fait honneur. Aussi
;

était -elle une très - honnête femme


Jupiter trouva une telle saueur en la
(16) , et qui n'aurait pas mérité, si
dame ,
qu'il prolongea cette nuit du
jour et de l'autre nuit en suit'ant ce elleeût perdu la vue , qu'on eût fait
,

qui aurait mu Lycnphron d'appeler contre elle un distique tel que celui-ci :

Hercule Tfurî^Tîp'jç Km'/ de , le lion Cum longas nocles MoreUi {\-) ab amore ro-
trois nuits comme fait aussi Lucien
, garet ,
(8). On a eu peut-être en vue ces pa- Favit ainor vous, perpeUiasque dédit.

roles d'Hygin Qui tani libens cum eâ :

(10) Lucianus , Dialog. Merc. et Solis. Vo


'oyez
concubuit ut unum diem usurparet
, aussi Diodore de Sicile liv. V
, chap. II. ,

duas noctes congeminaret (g). Le Dia- (11) Ovid. Metam. lib. IX, vs. 28-.
,

logue de Lucien où il est parlé de la , (12) Idem , Amor. lib. I Eleg. Xlîl .
; Pro-
longue nuit que Jupiter eut d'Alc- pr-rt.. lib. Il, Eleg. XXII; Capella, lib. II, cap.
mènc nous apprend que Mercure
,
(i3)_ Clem. Alpxandr. in Prolrepl.
, pag. 10
alla porter au soleil l'ordre de se tenir Arnobius, Vib. IV
pag. i45 cu\us hœc sunl
;

, ,

lerba : Quis lUnm in Alcmenà novem noclibus


r.ï)Diod. Sicul. Itb. V, cap. II. ,
fecit pervigilâsse continais ?
(G) Plant, in Amptiitr. , ad. V, .ce. //.
(7) Voyez les y. Lettres contre le Calvin, de
(i4) Diodor. Sicnl. , Uh. V, cap. II,
Maîmb. , pag 280, etc. (i5) HygLn., cap. XXIX.
(8) Vigenère, sur Philostr tom. II , folio 17, , (16) Voyez la remarque (B).
édil. in-4. (17) La comtesse de Morel , maîtresse de
>9) !'yii'° t
c^p. xxtx. Henii-lc-Graml.
, ,

4o8 ALCMÈNE.
Sosie , valet d'Amphitryon , s'avisa d'Amphitryon (i-î). Dans la comédie
«î'une remarque digne de lui quand , de Plante, les choses vont autrement.
il s'aperçut que la nuit durait plus Amphitryon y laisse sa femme grosse
qu'à l'ordinaire. 11 félicita les palans en s'en allant à la guerre [l'i]. Grand
qui n'avaient pas eu bon marché de ragoût pour Jupiter ! Ce serait bien
leur proie. pis si Plaute avait observé l'unité de
,

Vbi sunt isti scortatores, qui soli inviti cubant? temps comme le veut mademoiselle
Hœc nox scitasl exercendo scorto conducto le Fèvre II faudrait dire , en ce cas-
maté (i8J. là , qu'en arrêtant le soleil Jupiter

(D) EUe était encore fille. ] Apol- interrompit tout le cours de la nature,
lodore raconte qu'Electryon , allant afin de se divertir plus long -temps
venger la mort de ses fils , mit soq avec une femme grnsse de deux en-
royaume et sa fîUe Alcmène entre les fans , et si proche de son terme , que
mains d'Amphitryon , après l'avoir pour peu qu'il eût difléré sa retraite ,

fait jurer qu'il se contiendrait envers la sage femme


aurait été obligée de
Alcmène jusqu'à son retour (19). lui dire, cédez-nini la pince. C'est une

Amphitryon l'ayant tué par mégarde ,


fAcheuse alternative pour Plaute il :

peu après fut obligé de chercher une


,
faut , ou que sa pièce dure plusieurs
retraite. 11 se retira dans la Béotie mois , ou qu'il fasse d'une femme
avec Alcmène ; et , parce qu'elle dé- toute prête d'accoucher de deux ju-
clara qu'elle épouserait celui qui ven- meaux , un des plus friands morceaux
gerait la mort de ses frères il s'en- ,
du monde pour le plus grand de tous
gagea à poursuivre cette vengeance • les monarques et cela, en supposant ;

et, s'associant avec d'autres, il porta que ce maître des Dieux et des hom-
la guerre chez les Téléboes qui avaient
mes a déjà produit l'un de ces ju-
tué les frères d' Alcmène (20). De re- meaux. Prenez bien garde que ce poè-
tour à Thèbes victorieux et triom- te ne feint pas que Jupiter se déguisa
,

phant , il apprit qu'un autre lui-même en Amphitryon pour venir en bon ,

avait couché avec cette dame. Il est mari au secours d'Alcmène pendant
visible que ce ne fut point lui qui eut le travail d'enfant : c'était la visite
la première faveur Alcmène avait :
d'unhomme bien amoureux. Voici
difléré sans doute la cérémonie des comme parle Mercure dans le prologue :

noces, la consommation pour le moins Et mew paler nunc intut cum


cubai
hic illa ;
de son mariage jusqu'à ce qu'Amphi- ,
El hœc ob eam rem nox est fada longior

tryon eût vaincu les Téléboes. Jupiter Dhm ille qud cum volt voluplalem capil.

sachant qu'Amphitryon revenait , et Et pour ce qui est deces paroles de Sosie,


que , pour cueillir cette fleur de vir- Hœ.i nox .'cita'xl exercendo scorlo conduclo
ginité il n'y avait point d'autre temps maie (24)1
à prendre que celui qu'Amphitryon
emploierait à son voyage le prima
voici comme il les relève :

et fit avant l'arrivée du mari ce qu'il Meus paier nunc pro hujus verbis rectè et sa-
pienler facil
y avait à faire. ApoUodore ajoute Qui complexus cum Àlcumend cubai amans
,

qu'Amphitryon, ayant couché avec animo obsequens.


Alcmène lui fit un enfant qui fut
,
,
félirite d'avoir écarté tout ce qui
11 se
plus jeune d'une nuit qu'Hercule.
' AkufAiwti Si Sôo îyhvitTi Tra.lj'xç. Aii juhv
pouvait interrompre la joie de Jupi-
ter et il se prépare à continuer ses
,
HpctKKÎa. /UlS. VUKTI 7rpS3-ft/TîpOV , 'A^^i-
bons oflices , jusqu'à ce que le galant
rpiaivi (21). Alcmena vtirà
"I^iKAÉ*
duos peperit fiHos Jofi qiiidem Her- n'en veuille plus.
:

culem unâ nocte grandinrem atque ,


Béni elprospère hoc hodiè operis processit
Amphitijoni Iphidem. Nouvelle con- mihi ;
firmation de ce que j'ai à prouver. Le (22) Sctiol. Homeri in Iliad. XIV, vs. ZiZ.
scoliaste d'Homère est plus précis (23) Oravidam e^o illam hic reliqui ciim aheo.
qu'ApoHodore il dit nettement que :
Plaulus, Ampliitr. ,
acl. Il , se. H , va. 35.

le mariage ne se lit qu'après le retour El cum te gravidam , cum pulchrè plenam


adspicio ,
gaudeo.
(18) Plauli Amptiitr., act. I, <c.J,vers. i3i Ibid. vs- 49-
(19) Apnllod. Bibliot. lib. II,j>as. 99- Mercure avait assure'
(20) Ihidz-m
,
le même fait dans le
pai;. loi. ,
P'OloguP.
!,ai) Idem, ya^. io3.
(24^ Plant. Ampliitr., acl. /, se- I, vs. lîs.
. ,

ALCMÈNE. 409
Amovi à foribui maximnm molestiam , femmes grosses, ou quand l'on médica-
Palri ut licerel lulo illam amplexaner.
mente quelqu'un les doit^ls enlrelassez
Errons ambo ego illos et demenliœ en jormsile pigne, c'est un charme nui-
Complebo aique omnem Ainphiliuonis fami-
, sible et dit-nn que décela L'expé-
,

liam rience s'en put voir lors qu'Alcmène


Àdeb , usque saliftaUin d'iim capiei paler
Illius tjuain anial (25
enjanla Hercule : pire encore est-il,
si l <^n tient les tnains accouplées con-
(E) L'adresse cTune Je ses sentan- tre l'un de ses genniU ou les deux.
tes éluda (es maut^aises intentions C'est ainsi que Vigénère (3i) traduit
de Lucine Je rue suis règle sur y7,Q.) ] ces paroles de Pline: Adsidere graci-
Ja narration d'Ovide. Il y avait sept ais , vel ciim remedium alicui adhibe-
jours qu'Alcmène était en tiav ail d'en- tur , digitis peclinathn intt-r se im-
fant , avec des douleurs horribles. plexis, fenejicium est: idque com-
Galanthis, Tune de ses femmes, entrait pertum iradunt Alcmend hcrculem
et sortait et, se doutant d'un malé-
\ parienle, Pejus si circa umim ambofe
fice en voyant une femme qui mar- genua, item pnphtes allernis genibus
mottait assise à la porte , les mains imp'ini (Sa). Kous verrons ailleurs
,

jointes sur ses genoux (^) elle lui (33) la liberté que Piaule a prise de
,

alla dire qu'Alcmène était accouchée. supposer qu'Alcmène accoucha sans


Lucine (car c'était elle qui se tenait nulle douleur.
en cette posture) n'eut pas plus tôt oui (F) On lui liiTa la télé du persécu-
ces mots , qu'elle sépaia ses mains et teur d'Hercule et elle lui arracha les ,

se leva ce qui fit accoucher Alcmène


; yeux'] Apollodore nous apprend que :

Sub redit in illd les fils de ce héros trouvèrent un bon


j4nte fores ara, dexlroqiie à poplite lœ^'um asile dans Athènes contre Eurysthéej
Pressa genu diiiitif inier se pec-ltne jutictis, et qu'Hyllus, l'un d'eux, ra)ant
,
tué
SusUnuit partus. Tacitd quoque cannina voce ,

Dixtt et incœplos leiiuerunl cannina partus. lui coupa la fête, et la donna à Alc-
,

mène K*< T))v //sv HS<fa.X))V ÀTrcrijutiv :

Vna minislrarum mediâ de plèbe Galanthis A^JtyUHVH {TieTaiî-IV. » (Ts KilKlTl TOt/Ç ô.^Ôa>.-
Flava contas, aderat Jaciendis slrenua jussis,
O0ictts dUecia suis. sensit iniqua Ea /jLiùi 'i^cefu^iv cLÙ^'Âi (34j. /^jusque ca-
JPfescto quidJu'iOne geri, duinque exil et inirat put aniputatum Alcmenœ dedit. Hœc
Scepè fores , Divatn residentem vidu in ard, autein illitexloriis radiis oculos ejfudit.
Brac/tiaque in genibus dtgiiis connexa le~
nentein ;
, ,
(G) On
a raconté des choses bien
Et quœcunque es , ait , domina gralare : le- meri'eilleuses touchant son tombeau.']
,
i-aia est Agésilaiis , roi de Sparte , voulant
Ar§oUs Alcmene politurque puerpera ,
voto.
faire transporter les reliques d' Alc-
Exsiluit , junctasque inanus patejncta remisit
Diva potens uieri; vinclis ievor ipsa remis- mène à Lacédémone envoya des gens ,

s,s (27). à Haliarte, qui ouvrirent le tombeau


de cette femme. On y trouva deux
Pausanias ne raconte point la chose vases de terre un brasselet d'airain ,
,

avec les mêmes circonstances. II dit et une table de cuivre sur laquelle il
qu'on voyait à Thèbesia figure de cer-
y avait des lettres gravées, que per-
taines femmes (28; que Junon avait , sonne ne connaissait. Comme elles
envovées empêcher les couches d'Alc- étaient semblables à l'écriture des
méne. LafilledeTirésias (29) les trom- Egyptiens, Agésilaiis les fit copier, et
pa en criant (ju'Alcmène était déli-
,
envoya cette copie au roi d'Egypte^
vrée (3o). Du temps de Pline, on pre- et le pria de faire expliquer à ses prê-
nait encore pour un maléfice la posture tres ce que c'était, s'ils le savaient (35).
dont j'ai parlé. S'asseoir aupiès des Plularque ajoute qu'Agétoridas , dé-
(25) Plaut. Amphit., act. T, se. II, vs- i,
puté d'Agésilaiis, alla à Mensphis, où
2,
3 , 5 et seq. le prophète Chonuphis déchiffra cette
(26J Ce'init la déesse des accouchemens inscription. Elle contenait un ordre
(*) Rabehis,
I. 3, cb. 48, a fort bien rendu
le texte d'Ovide et de Pline. Si M. Bayle l'avait (3i) Vigénère sur Philostrale, tom.II,fol. 17.
su , un pa.^sa^^e à alléguer ici. Rem. crit.
c^êtait
(il Plinius, /ifr. XXriII .cap. VI, p. 579.
(27) Ovid. Metam. , Itb. IX, vs. 298 et seqq^ (33) Dans la remarque (E) de l'article Tele-
(28 On les appelait tlitfy.a.x.ii'i;. Nous les BOES.
appellpiions aujourd'hui sorcières. (34 Apollodoii Bibliolh. , lib. II, pag. i5i.
129) Elle s'appelait Hi.storis. (?5) Plutarch. in libro de Socratis Genio, p.
(io) Païuan. , l:b. IX, png. 290. 571» et seqq.
4'0 ALCMÉON.
adressé aux Grecs, qu'ils eussent à vi- nie que Pisistrate et ses fils tâ-
vre en paix, à honorer les Muscs, et
chèrent en vain de perpétuer. Je
à terminer leurs difTérens selon les
règles de Téquité. Les lettres de l'in- crois que cet Alcméon est le mê-
scription étaient conformes à l'écriture me que celui qui fut général des
qu'Hercule apprit sous le règne du roi Athéniens dans la guerre qu'on
Protée. Ce qu'il y a de plus singulier,
entreprit pour la protection du
c'est que les habitans d'Haliarte, ayant
eu une très-mauvaise récolte temple de Delphes , à la sollici-
et de ,

tation de Solon (c). Je trouve


grandes inondations, crurent que ces
mauxétaient venus de ce qu'ils avaient
dans Plutarque un Alcméon qui
souflert que l'on remuât le tombeau
fut grand ennemi de Thémisto-
d'Alcmène. On lit de semblables ré-
cle [d). Il y a dans le Dictionnaire
flexions dans plusieurs légendes par ,

rapport au démembrement ou à la de Moréri plusieurs fautes con-


translation des corps saints. cernant le mot Alcméon (A). Je
ALCMÉON. Plusieurs person- vais parler à part de deux per-
soiines ont été ainsi appelées. Le sonnes qui ont porté ce nom-là.
dernier archonte perpétuel d'A- (c) Plut, in Solone . pag. 84-
thènes ce nommait Alcméon. {d)Id. in Vitâ Arislid. subjin. , p. 334, E.

Après lui , on créa d'autres ar- (A) Ily a dans Dictionnaire de


le
chontes dont la charge ne durait Moréri plusieurs fautes touchant le
'"ot Alcméon.-] i». Il n'est pas vrai
que
' dix ans. Ce changement ar-
/-e
-, 11 1

M^^ Alcméon , dernier archonte perpe-
riva pendant la 6 olympiade,un .
t^^i ^-^^ ^^^u vers Tan 3oi ou 3oo
peu avant que Romulus bâtit la de Rome- Eusèbe, qu'on cite, met
ville de Rome (a). Hérodote parle avant la fondation de Rome la fin des
d'un Alc3IÉox qui vivait à Athè- archontes perpétuels. 2°. D'ailleurs,
l'année 3oi de Rome ne répond pas à
nes du temps de Crésus et qui ,
l'année 33oo du monde mais envi- :

rendit mille bons offices aux am- ron à l'année 353o selon le père Pé-
,

bassadeurs que ce roi envoya à tau , ou à l'année 3498, selon Sethus


Calvisius. 3°. Alcméon, l'archonte per-
Delphes (6). Crésus l'ayant ap-
pétuel , n'est ])as le même Alcméon
pris le fit venir à sa cour, et lui
qui reçut tant de présens de Crésus(i).
permit de prendre dans ses tré- Il précéda d'environ 190 ans la pre-

sors tout autant d'or qu'il pour- mière année du règne de ce monar-
rait porter. On jieutlire dans Hé- que. 4°- La dernière année de ce règne
répond à l'an 206 de Rome. 5°. Héro-
rodote les expédiens dont Alc- dote , que l'on cite , ne dit point
méon se servit pour se donner qu'Alcméon ait succédé à Megaclès
une charge bien pesante. Crésus son père en la charge d'archonte an-
lui fit encore d'autres présens nuel; nique les ambassadeurs de Cré-
;
sus aient demandé à Alcméon s'il ,
de sorte qu'il le mit en état de voulait se joindre ai'ec leur maître
donner un très-grand lustre à sa pour aller h Delphes; ni qu'après leur
famille dans Athènes. Elle y a ai'oir promis de le faire , ceroiUùJit

été une des plus considérables, présent d'autant d'or qu'il en pourrait
TA
Les Alcmeonides
-

cest amsi que


/

(
, - - porter ; mnu ayant aperçu qu Aie-
^^^^^ s'était chargé d'or au delà de
l'on appelait les descendansd'Alc- ses forces, il le fit porter auec ce far -
méon ) s'y distinguèrent en plu— deau dans sa maison , parce qu'il ne
sieurs rencontres et surtout en /^""^"'^ P«^ marcher à cause do sa
,
c7i«ri/e. Je ne saurais deviner par quel
opposant^r
, . , 1
s rortement a la tyran-
{\)Onle dilpourlantdansl'e'dil.delTollnnde.
[a) Euselni Chronicon. x^ Supplém. de Moréri n'avait dit , .<inon qur
{b) llerod. lib. VI, cap.
, CXXF. cet Alcméon availôlé archonle annueld' Alhines.
.

ALCMÉON. 4ii
esprit on Hérodote lorsqu'on a
cite , avant que les ennemis entrassent dans
falsifie si étrangement ce qu'il raconte cette ville, la". Ils ne firent pas un
6°. Alcméon, fils d'Amphiaraiis n'é- , grand butin ,
pour venger te déshon-
pousa point Caliirhoé après la mort neur de leurs pères. 11 fallait dire
d'AlpIiésibée sa première femme : que , pour venger le déshonneur de
celle-ci était en vie pendant le second leurs pères ils entreprirent une se-
,

mariage (a). 7". Plutarque ne dit point conde expédition. i3°. Il n'est pas
que la fable d'Alcmèon signifie c/u'il vrai que le philosophe Alcméon ait
tua sa mère , c'est-à-dire ia partie , fait voir que la lune a une pro-
pour aller iàvre a la campagne , qui priété particulière, qui nefinit jamais :

nous estexprimée par lejieu^e de son il a supposé l'éternité de cet astre.


beau-père. Ne dirait-on pas que M. Mo- C'est une chose que l'on ne peut que
réri a lu dans Plutarque qu'Alcmëon supposer j et c'est une négligence plus
se châtra c'est à quoi conduisent na-
: impardonnable à un prêtre qu'à un
turellement ces paroles, tua sa mère, autre auteur, que de dire qu'on a
il
c'est-à-dire sa partie. Je veux croire fait voir que la lune est éternelle , et
qu'au lieu de partie, l'auteur avait dit que l'âme immortelle tourne toujours
patrie : mais cela ne le lire point d'af- comme le soleil. 14°. Eusèbe ne parle
faire :car Plutarque ne dit point point d'Alcméon le philosophe: c'est
qu'Alcme'on tua sa patrie , ou qu'il sans doute le poète qu'il a prétendu
la maltraita il dit , au contraire ,
: désigner lorsqu'il a dit Alcmœon :

qu' Alcméon fuyant les magistratures , clarus habetur , et Lesches Leshius


les séditions , les factions et les ca- qui parvam fecil Iliadem. i5°. 11 l'a
lomnies, se choisit une petite retraite dit sous la 3i*. olympiade, et non pas
pour y vivre dans le repos ; et que sous la 69^. 16". Il n'est pas vrai que
c'est ainsi <|u'il fuit les Furies (3). Plutarque , en la f^ie de Solon , cite
8°. La Chronique d'Eusèbe est citée un historien nommé Alcméon. Voici
encore plus mal a propos , pour expli- les paroles de Plutarque elles sei'vi- :

quer ce que la fable a dit d'Alcméon j ront à montrer comment les copistes
car à quoi peut servir, pour l'explica- précipités s'abîment dans les bévues
tion de cette fable, de dire que la les plus grossières Où //.«'vtoi ç-çxTuyo; :

ville de Thèbes fut pillée, que Tiré- iTTl TO^/TOV àiTriiii'xfiVt T5V TTOXêMOV , ffiÇ
sias fut fait prisonnier , que sa fille Xê'j.êiv <Ç/)5-iv 'Efy.iTTToç 'EfivQn tÔv 2«-
Manto fut consacrée au service d'Apol- //»ov. OÙTi-^HLf hio-^itïii i f «Tap toI/t' iif»-
lon ? 9°. Il n'est pas vrai qu'Eusèbe jtsv , 'evTi TOK TûJv AsÂt^Mv ÙTTr.y.x i\y.a.<n\
rapporte ces choses en l'an 817 d'A- AKic//.xia!v , où Sôxaiv , 'AÔhvaiûiv ç-fitTH-
braham. Il ne dit rien de ce pillage de yoç àva.yîypa.:TTa.t (5j. JYonJuit ille ta-
Thèbes il parle en général des sept men ad bellum hoc designalus dux ,
:

capitaines qui attaquèrent cette ville, ut tradere Samiuni Euanthem Her-


et de leurs descendans qui renouve- mippus ait. Neque enim id orator
lèrent la guerre ; il parle, dis-ie,de prodidit jEschines, et in Delphorum
la première de ces deux expéditions Comnientariis Alcmœon , non Solon ,
sous l'an 784 et de la dernière sous est Atheniensium dux. MM. Lloyd et
,

l'an 823. En dixième lieu, ni Eusèbe, Hofman ont trouvé le prétendu histo-
ni aucun autre historien , ne remar- rien Alcméon dans et endroit de <

que que l'expédition d'Alcméon contre Plutarque. In Delphorum Comnienta-


Thèbes ait été malheureuse (4) ; car riis , disent-ils, cilatur à Plutarcho in
ce fut alors que les Epigones pillèrent Solone- 11 est visible que ces Commen-
la ville, etc. 1 1°. l's ne menèrent point taires de Delphes sont l'ouvrage qu'ils
le paui^re aveugle Tiresias : il avait attribuent à Alcméon et qu'ils pré- ,

pris la fuite, avec les autres Thébains, tendent avoir été cité par Plutarque.

(2) Outre Apolloilore , voici un autre te'moin,


Je m'étonne que Vossius ait donné
savoir, Ovid. de Remed. Amor., vs. 455. dans une telle bévue. Alcmœon, dit-
Ainphilochi frater nePhegida semperamaret, il (6j , in Delphorum Commenlariis,
Caliirhoé fecit parle recepla lori. ' AKx.//.a.icev êv tok Tœv Asx^iûjv ÔTTo/ut-vn-
Ci) Plutarcli. de Exilio ,
pag. 602. y.ot.s-1 , citatur à Plutarcho in Solone.
(4) ^oici comme parle M. Àloréri , tant dam
l' édition de Lyon, en 1688 que dans celle de
,

flollande : Après sa malheureuse expc.lition de (5) Plntarch. in Solone ,


pag. 84, A-
Tlièbes. (fi) Vosïius, de Histor. Graîc. pag. Soi.
,
4ia ALCM ÉON.
ALCMÉON d'Ampbiaraiis d'Adraste , périrent dans cette
, fils

et d'Eriphyle sœur d'Adraste , guerre. Leurs fils résolurent dix


,

tua sa mère pour obéir au coin— ans après d'aller venger cet af-
mandement de son père. Vous front et ils choisirent Alcméon ,

allez voir la raison d'un com- pour leur généralissime. Eriphy-


mandement si étrange. Amphia- le gagnée encore par des pré— ,

raiis regardait Eriphyle comme sens les sollicita à cette guerre.


,

la cause de sa mort. Il ne voulait Thersandre fille de Polynice , ,

point aller à la guerre contre les lui avait donné un collier (c) et une
Tliébains car, comme il était robe {d). Alcméon, quelque envie
;

grand devin , il avait prévu que qu'il eût de tuer sa mère avant
s'il y allait il
y périrait. D'ail- d'accepter le généralat , marcha
,

leurs il avait promis avec ser- contre Thèbes sans avoir exé-
,

ment que pour ce qui regarde- cuté l'ordre d' Amphiaraiis. Cette
,

rait les disputes qu'il pourrait expédition fut très-heureuse les :

avoir avec Adraste il s'en re- Thébains, par le conseil de Tiré-


,

mettrait â tout ce que sa femme sias , abandonnèrent leur ville ;

en ordonnerait. Ils eurent un on la pilla et on la ruina. Alc-


différent sur l'expédition de Thè- méon , transporté d'une nouvelle
bes. Adraste voulait qu'Amphia- colère après avoir su au'Eri— ,

raiis s'y engageât. Amphiaraiis phyle s'était laissé corrompre


n'en voulait rien faire et en dé- par des présens contre lui aussi ,
,

tournait les autres. Eriphyle dé- ne balança plus à la tuer lorsqu'il


cida selon les désirs d'Adraste eut consulté l'oracle. Quelques-
,

après avoir été gagnée par le beau uns soutiennent que son frère
collier (a) que Polynice lui offrit Amphilochus l'assista dans ce par-
(b) , et qu'elle accepta sans avoir ricide; mais le plus grand nombre
égard aux défenses que son mari des auteurs nient cela. Alcméon,
lui avait faites de rien prendre persécuté par les furies à cause
de Polynice. Elle est devenue par- de cette action se retira à Pso— ,

là un grand fonds de lieux com- phis dans l'Arcadie où il expia ,

muns et de pensées morales entre son crime entre les mains de Phé-
les mains des censeurs du sexe. On géus , selon les cérémonies ordi-
sait qu'Ampliiaraùs , ayant pris naires en pareils cas et se maria ,

la fuite lors de la déroute de l'ar- avec Arsinoé (e) fille du même ,

mée fut englouti par un abîme Phégéus à laquelle il fit présent


, ,

qu'un coup de foudre avait ou- du collier et de l'habit qui avaient


vert sur son chemin. Il avait don- été donnés à Eriphyle. Une gran-
né ordre à ses fils , avant que do de famine s'étant élevée on eut ,

marcher contre Thèbes qu'aus- recours à l'oracle qui ordonna, ,

sitôt que l'âge le leur perniet- à Alcméon de se réfugier chez


trait ils tuassent Eriphyle. Tous
,

(c^ Fie z-fou s plutôt à Diodore de Sicile,


les autres généraux à la réserve ,
rjui dit que Thersandre donna seulement le
PepI um II ne pouvait pas donner le collier,
{a) Voyez touchant ce colliei-, les remar-
.

puisque Eriphyle Valait déjà.


ques de l'article Callirhof..
chap. JiXXllI dit qu' Adraste (f/l Nommée en grec FIsTAoç.
{b Hygin , ,

donna le collier , et iju'Eriphyle découvrit le {e) Pausan. lii'. VIll P"S- 255,
, ^
la-
lieu oii Amphiaraiis s^étail caché. nomme Alpliésibee.
,

ALCM EON. /,i3


Acliélous. Il s'y rendit après plu- à mettre Amphiaraiis au rang des
sieurs courses vagabondes il
y : Dieux exclurent AIcméon des ,

reçut de nouveau les cérémonies honneurs divins qu'ils conférè-


de l'expiation ; il s'y maria avec rent à son père et à son frère :
Callirhoé , fille d'Achéloiis , et il ils l'en exclurent, dis-je , à cause
s'établit dans un coin de terre
de son parricide {h). On remar-
que cette rivière avait formé (A) que qu'un Perse nommé Oronte,
en accumulant des sables. Calli- lui ressemblait parfaitement [i).
rhoé lui déclara qu'elle ne cou- Il y a des historiens qui disent

cherait point avec lui s'il ne lui qu'Alcméon , après la seconde ,

faisait présent du collier et de la guerre de Thèbes s'en alla en ,

robe d'Eriphyle. Cela le contrai- Étolie, attiré par Diomède qu'il ,

gnit de retourner chez Phégéus l'aida à conquérir ce pays et l'A-


dont il obtint le collier après lui carnanie et qu'ayant été som- ,

avoir fait accroire qu'il avait ap- més de se trouver à l'expédition


pris de l'oracle que la persécu- de Troie Diomède s'y rendit ,
;

tion des furies ne cesserait que mais qu'Alcméon s'arrêta dans


lorsqu'il aurait offert ce collier l'Acarnanie , et, pour faire hon-
à Apollon. Phégée sut ensuite neur à son frère (k) , qu'il bâtit
qu'Alcméon avait destiné ce pré- une ville qu'il nomma Argos
sent à Callirhoé c'est pourquoi
; d'Amphilochus (/). Notez qu'il
il donna ordre à ses deux fils de prophétisa dans l'Acarnanie {in).
le poursuivre et de le tuer ce ;
(h) Pausan. , lib, I . pag. 33.
qu'ils firent et parce que Arsinoé
: (i) Plutarcli. in Arato, pag 1028.
s'en formalisa , ils la transportè- (A) Il s'appelait Amphilochus : t'oyez les
remarques de son ariicle.
rent à Tégée , dans un coffre , et
(0 Strabo, lib. VII, pag. 225. Voyez
lui imputèrent ce meurtre. Quel- aussi lib. X ,
pag. 3l8.
ques-uns disent qu'Alcméon , im) Clam. Alex.aadr. Slromat., lib. I, v.
334.
pendant fureur se divertit
sa ,

avec la prophétesse Manto fille , un coin de terre


(A) Il s'établit dans
de Tirésias et qu'il en eut que la ylchéloûs aidait for-
rivière d''
,
mé,'] Il ne sera pas mal d'éclaircir
deux enfans {/)• Voyez la suite Apollodore par un passage de Pau-
de tout ceci dans l'article de Cal- sanias, qui porte qu'Alcméon, après
lirhoé. Les furies d'Alcméon ont avoir tué sa mère, s'enfuit d'Argos à
fait un grand bruit sur le théâ- Psophis, où il épousa Alphésibée, tille
de Phégéus (i). Le mariage ne le gué-
tre de l'ancienne Grèce {g) mais ;
rit pas de sa fureur; ainsi il recourut
il ne nous reste aucune de ces à l'oracle, qui lui ordonna de se reti-
tragédies (B). Ce qu'on a dit de rer sur une terre toute neuve et ,

son tombeau mérite d'être consi- faite depuis le meurtre d'Eriphyle.


On l'assura que les furies ne l'y pour-
déré (C). Les Oropiens qui de- ,
suivraient point. Ayant donc rencon-
vancèrent tous les autres peuples tré aux embouchures de la rivière
d'Achéloiis une terre que les flots
(_/)Tiré de la BiblioUiéque d'Apollodore, avaient charriée, il y prit poste et ,

liv.III , pag i8" et suiyjantes. Voyez aussi se maria avec Callirhoé.


Diodore de Sicile, liv. V
chap. VI, ,
(B) // ne nous reste aucune des Va-
'g'^ Alcmœon oliin tragicoruin ptilpita gédies faites sur son sujet.'] Je ne doute
furore suo nunc nullain sui
lœisavit citm .
point que les deux vers que Plutarque
nominisfabulam habet. Barihius ia Statium,
lom II pag. 4^9.
,
(i) Pousaa. , /j7'. VIII ,
pag, 255.
, , ,

4i4 ALCMÉON.
d rapportes dans l'un de ses livres ne , opinions très-hétérodoxes COm- ,

soient pris de quelqu'une de ces piè- ^^^ g j^ lune était éternelle ,


rps Le commun
i^c lieu i. que Plutarque ^ * •4-4
.„ ^
ces. *
""" ame tournait tou-
..
j -. ^, , aue notre
et 4"""
rouche en cet endroit est plus impor- f- .,

tant qu'on ne pense il reearde un : lours


V a la manière du soleil.
défaut qu'on trouve partout. C'est ce- Voilà ce qu'en dit Laërce. Cicé-
lui de ceuK qui reprochent à leur pro- ^.^^ représente mieux le système
Chain un vice qu'ils ont eu^-memes
4nosophe
r car, quelle né-
^ , ;
ou qui est plus petit que le leur. Aie- '-'^ '^ 1 '
,
' •

méon reproche à Adraste qu'il est gligence n est-ce pas que de choi-
frère d'une femme qui ajtuë son mari: gir entre tous les astres auxquels
Adraste lui répond Et t^ous ^'ous : ,
Alcméon attribuait une nature
ai'ez tué votre propre mère. 11 ne faut
éternelle , celui dont les altéra-
point faire le Caton et le censeur
lorsqu'on est tout plein de défauts. tions paraissent le plus , je veux
dire la lune? Il fallait donc dire,
Mme' aa-aiTov àutoç œv Àvi- Cicéron a fait {b) que ce
7raiiSc/uia,vȍ.
comme ,
MÔèipOÇ,
philosophe attribue la divinité à
i^m
tous les astres , et même à notre
'
'AvS'coKTQVn^ yuva.Moç oi/.oyiv»i

Tov"Aé'[,a.çov 'AKKjucticev. T/ oi>v îx-tivoç-, âme. Mais comme c'est le propre


oÙK ÀKhorpiov ÀKKti. «(Tiov la.u'vZ ^|)oir<Çêfiû)V des méchaus systèmes de n'avoir
rien de lié , nous voyons que no-
Eù cT' âuT'oXitf yi yi^tfOi n <T iyilvet- treAlcméon raisonnait peu con-
TO (2). séquemment lorsqu'il faisait une
IVon itaque adulterium ohjice alteri, grande distinction entre les con-
ipse insano puerorum amore flagrans , naissances des Dieux et celles des
neque prodigalitatem sordidiis ipse. hommes. Il disait que les Dieux
Alcmœon Adrastuni hoc malediclo
incessit
savaient manifestement les cho-
suum interfecU est soror.
ses , et que les hommes ne fai-
Tibi qnce marilum
saient que conjecturer (c). Voilà
Quid Adrastus ? Non alienum , sed ce que peuvent dire ceux qui re-
proprium ei repoiiit opprobrium ,
connaissent un seul et vrai Dieu ;

Malrem necasli lu manu tud luam.


mais ceux qui prennent les astres
(C) Ce qu'on a dit de son tombeau et les âmes humaines pour au-
mérite d'être considéré "l- Ce tombeau tant de Dieux se rendent ensui-
était à Psophis dans l'Arcadie il n'a- :

te ridicules s'ils prétendent que


vait guère d'éclat ni d'ornemens j
mais il entouré de cyprès si
était la science humaine et la science
hauts ,
pouvaient couvrir de
qu'ils divine différent autrement que
leur ombre le coteau qui dominait
du plus au moins. Il n'est pas
sur la ville. Ou ne les coupait point,
vrai que cet Alcméon soit mort
parce qu'on les croyait consacrés à
Alcméon et on les appelait les pu-
,
d'une maladie pédiculaire (A).
celles (3).
Laert. in Alcmaione , lib. VIII ; Clemens
(2) Plutarch. de Capiendà ex iniruic. iitilitate , Alcxand., Stromat. , liv. I; Theodoret,
Serm. I.
(3) Idem ibid. Pausan. hh. rill, p. 255.
,
Cicero, de Nalurâ
[b) Deorum ,
lih. I ,

cap. XI.
ALCMÉON , natif de Crotone, (c) Laert. in Alcmaeon. , lib. VIII.
et disciple dePythagore. On croit
qu'il fut le premier qui écrivit (A) // n'est pas vrai qu'il soit mort
physique [a). Il avait des
dune maladie pédiculaird .] Antigonus
sur la
pris l'ua pouf l'autre Cavystius a
(a) Phavorin. in onininiodâ Histor. apud quand il a dit qu' Alcméon le physi-
ALDRINGER. ^,5
clen a\ait eu cette maladie; ii a pns, p^t
ij le parti des armes,
dis-ie , A cmeoii
gori,pourlepoëteAlcman(O.Char-
le disciple de Pytlia- c'on^AU
«

ii ^
enrôla simple soldat. i
11 devint
ni- et
les Etienne ne se contente pas de dire sergent peu après et comjue il ;

que le philosophe Alcme'on est mort fit connaître qu'il


savait très-bien
d'une maladie pediculaire, il dit aussi manier la plume on l'employa
,
quecest le premier qui en soit mort, J^pseo,. tous
i «^esseï +^ i
r'^J"
^ les comptes de la
et il se munit de l'autorité d'Elien. Ce
sont deux mensonges Élien ne parle :
compagnie , et à écrire les ré-
pas de notre Alcméon^ c'est d'Alcmau ponses que le capitaine avait à
le poète qu'il observe plusieurs cho- faire. Il donna des lumières à cf
ses mais ayant dit que le philosophe
: „„^:.„;„„ ,

T>i -
1 V . mort
'
\ Ade la maladie
j- 1 I
capitaine, qui ilui ouvrirent
>>'icin, itt
la
l'herccydes était ^
J' i

dont il s'agit ici (2), il lui aurait sans P»'"^^ ^ "'^ P'^i^ grand emploi,
doute accordé la primauté sur vVlc- Cet avancement fut cause que le
raéon s"il avait parlé de ce dernier,
, lieutenant de la compagnie de-
par rapport à cette sorte de maladie.
^'"* ramtnino
*•
ot a J
et /,.,'

Les erreurs de Charles Etienne se trou-


capitaine qu Aldringer i

vent dans le père Lescalopier (3). monta a la place de lieutenant.


(OAn.ig. Caryst.Hislor.mirab.,c«;,.XCr. ^^ ^e défendit si bien aVCC cin-
Meursius, dans ses Notes, lui a marqué cette quantehommeS dailS Unméchaut
"(îf vEiian. Var. Histor. , Ub. iv , cap. poste , conscrva malgré
qu'il le

^^^V^r j V n
• / î^s rudes attaques de l'ennemi
^m^iy.xjj.i.
(3) In Cicer. de .
Natnra Deorum , pag. ^i. T.,
Des lors , la réputation de son
ALDRINGER , fameux gêné- courage ne fut pas moins répan-
ral d'armée sous l'empereur Fer- due que celle de son habileté :
dinand II , s'était poussé par la plusieurs colonels lui offrirent
seule recommandation de son mé- une compagnie ; le neveu de l'ar-
rite. Il était du pays de Luxem- chevêque de Saltzbourg fut de ce
bourg, et d'une naissance tout-à- nombre. Il avait besoin à cause ,

fait obscure (A). Dès sa première de sa jeunesse , d'avoir un tel


jeunesse, il se mit au service de homme dans son régiment; il le
quelques gentilshommes qui al- rechercha , il l'obtint et il s'ac- ,

laient en France il s'appliqua : quit tant de gloire par les bons


avec eux à l'étude , et se rendit conseils d' Aldringer que pour , ,

fort habile. Étant jjassé en Ita- lui en témoigner sa reconnais-


lie, devint chancelier du comte
il sance il le fit son sergent-ma-
,

Madrucci. Il alla ensuite à Tren- jor. Aldringer fut ensuite lieute-


te et y eut un emploi honora-
, nant colonel puis colonel ; et il
,

ble dans la chancellerie mais la ; fit tellement paraître qu'il enten-

jalousie de ses collègues, et leur dait à fond le métier , qu'on le


conduite lui causèrent un si
, jugea digne de commander en
grand dépit qu'il abandonna sa , chef à l'expédition de Mantoue
charge rempli d'un esprit mu-
, (a). Il joignit fort à propos aux
tin contre la fortune et résolu , débris de la bataille de Leipsick
de s'attacher à la profession du les troupes qu'il ramena d'Italie
premier homme qu'il rencontre- (b) ; et peut être que si le comte
rait sur sou chemin. Il prit la
route d'inspruck et comme il ;
(") ^" '63o. Tiré du comte Galeazzo
i 1 I Giialdo Prioralo au livre IX de /'Histoire
rencontra proche du pont un sol-
1 4. ,

^^^ ^^„^^^ .l'.\iiemagnc


dat qui s'en retournait en Italie, (b)En i63!
,,

4i6 ALDRINGER.
de Tilli avait attendu à donner motif secret pourquoi Aldringer
bataille que ces troupes fussent ne voulait jamais consentir à li—
arrivées, comme on le lui conseil- vrerbataille. Il ne faut pas croire
lait, l'événement n'eiit pas été si néanmoins qu'il entrât dans tous
funeste aux Impériaux. Aldrin- les complots de Wallestein il :

ger se sépara de Tilli quelque n'avait pour lui que certaines


temps après pour se retirer en complaisances qui , sans ruiner
BoIiëiBC , à cause des défiances les affaires du maître commun ,
que le mauvais état des affaires avançaient beaucoup les intérêts
semait entre les Impériaux et les particuliers de ce généralissiine.
Bavarois (c); mais cette désunion Il y a de semblables intelligences
ne dura pas. Il était, dès le mois dans presque toutes les armées.
de mars i63i avec Tilli sur les Il fut tué l'an i634, à Landshut,
,

bords du Leck pour en disputer ville de Bavière et l'on n'a ja-


, ,

le passage au roi de Suède. Il mais bien su si ce furent ses pro-


était alors grand-maître de l'ar- pres soldats ou les Suédois qui fi-
tillerie {d). La blessure qu'il re- rent ce coup. Il avait été élevé
çut à la tête ne contribua pas à la dignité de comte (e). C'était
peu à l'avantage que les ennemis un homme qui avait d'excellen—
eurent de ^ -x.- ..•..'„
passer cette nviere -
^gg qualités (C) — c'est dommage :

mais elle ne l'empêcha pas de qu'elles aient été accompagnées


servir la même campagne: il alla d'une avarice et d'une cruauté
joindre en Bohème Wallestein excessives (D). Tel est presque
,

malgré les efforts que firent les toujours le destin de l'homme.


Suédois pour empêcher cette Il ressemble à ces terroirs qui
jonction il fallut bientôt rêve- produisent pêle-mêle de bonnes
:

nir dans la Bavière pour s'oppo- herbes et de mauvaises.


ser aux troupes du général Horn. Là même pag- 436.(fi)
,

Les succès varièrent de part et


d'autre dans ces quartiers-là tout (A) // était d'une naissance tout-a-
obscure. ] tiumi/i apud Lncen-
le reste de l'année et au com- f'^^^
j T bursicos locn nrtus, dit M. de Futen-
.

mencement de suivante. Le
la suivante,
,

^J-^ ^^j ^-^^^^ ^^,.^1 f^,j ^.^bord


plus glorieux exploit d' Aldringer laquais de quelques barons français ,

pendant ce temps-là fut d'avoir et ensuite secrétaire (i). Un autre his-


contribué, en i633, à faire le- torien ne lui donne pas
une condition
si che'tive il le fait d'abord étudier,
:

ver le siège de la ville de Con- puis aller à la guerre puis servir de


,

stance. Il fut joindre ensuite le secrétaire, ensuite reprendre les ar-


duc de Feria qui avait amené ,
mes Lureniburgi tenui seti honesto
:

d'Italiequelques troupes espa- loco éditas primant


œtatent litleris
dédit (2). Il boileau * de son na-
le fait
gnoles. On a cru que Wallestein
turel, Ingénia pronipto atque ncri, et
avait donné des ordres secret* à nalurn i^ini abstinens (3) , ce qui était
Aldringer de rendre inutiles tous une très-mauvaise et très-nuisible qua-
les desseins de ce duc (B) et que ,
(i) Pufendorf , Rerum Saecicar. tib. FI
ce fut la véritable raison et le pag. 157.
(2) Joti. Cluverius, Epit. Histor. , lib. XT
jippend.
(c) Priorato , à l'an ib'3l.
liv, IX , * Combien de gen.t dit Leclerc
, ne com- ,
'

(rf) Le Blanc, llùtoire de Bavière, lom. prendront pas que cela veut dire, buvear d'eau
ir, pag. 374. (S) 1,1. ibid.
, ,

ALDROVANDUS. 417
llte en Allemagne dans un homme de (Dj II était d'une avarice et d'une
guerre. cruauté excessives. ] il était sans mi-
(B) On croit que Wallestein lui séricorde pour les peuples, et il exi-
auait donné des ordres secrets de ren - geait les contributions a\ec la der-
dre inutiles les desseins du duc de Fé- nière rigueur il n'avait nul égard :

na] L'iiistoriea de Bavière , que j'ai auj^ nécessités du soldat


; de sorte
cilé (4) convient que les Sue'dois ne
, qu'il n'était aimé, ni des peuples , ni
demandaient pas mieux que de l'enir des années. Il fit bien sa main au sac
à un combat général quoiqu'ils ne se ,
de Mantoue et il n'y eut point d'of-,_
trouvassent pas si at^anta^eusement ficier dans l'arme'e impériale qui sor-
postés que les catholiques. Le duc de tît de là avec autant de butia
que
Féria, poarsiùt-il fojrant l'occasion , lui (6;. On a cru que ses propres
belle , fit pour obli-
d'inutiles efforts gensl'avaienttue' sur le pont de Lands-
ger Aldringer a fenir aux mains at^ec hut l'occasion de le faire sans être
,

l'ennemi ; mais jamais il ne put rien connu étant fort bonne. Fu colpilo e
obtenir d'un homme qui était sous la fatto coder morto non senza sospetlo ,

férule de ff^allestein et les Suédois ; cio dit^enisse dalla parte de' suoi per ,

s'élant retirés comme en triomphe sur , vendetta d'alcune ingiurie faite loro ,
la fin d'octobre le mauvais procédé , essendo egli per la sua severith piu te-
d'-Aldringer, qui coûta bon 'a l'union mulo che amato dalla militia (7).
caûiolique déplut tant au duc de Fé-
,
(6) Là
ria que bientôt après il en mourut
,

de douleur. Cet historien avait dit


h Là même ,
pag. 289-

dans la page précédente qu'Aldrin- ALDROVANDUS (a) (Ulysse),


ger aflidé à Wallestein
, n'agissait ,
professeur en philosophie et ea
guère que par ses ordres et quen ce ^ t-j ^
médecine a r>
, i

temps-là on publia un écrit qui assu- bologne ,


sa patrie ,

rait que tandis que fFalleslein man- a ete un des plus Curieux hoiU-
da'it à l'empereur qu'il envoyait Al- rnes du monde par rapport à l'his-
dringer au duc de Bavière pour en
t^j^e naturelle. Ses soins, ses tra-
aisposer entièrement il lui don- , .. j ' .

nait des ordres secrets de ne léser-


vaux dépenses sur ce sujet
et ses
vir que pour la défensive du petit sont incroyables. Il voyagea dans
secours qu'il commandait ce qu'Ai- : les pays les plus éloignés sans au-
dringer n'ayant pas ponctuellement j^e motif que de s'instruire des
exécute Galas lui tenioicrna de la
, , ^ ^ -. i r. «

part de Wallestein qu'Une lui par-


^hoses que la nature y fait parai-
,

donnerait jamais cette désobéissance, tre :minéraux, les métaux ,


les
(C) // avait d'excellentes qualités. ] les , plantes les animaux, étaient
Ilavait l'esprit fort vif et fort pêne- l'objet de ses recherches
et de sa
trant, beaucoup d acquis , une mtei- •. -i » .^ i -^ • '

ligence raffinée, un grand courage:


CUriOSlte mais il S attachait prin- ;

il se faisait admirer dans un conseil cipaleilientaux oiseaux; et, pour


de guerre par la force de ses raisons , en avoir des figures bien exactes
et par la vraisemblance de ses conjec-
ç^ ^u vif , il employa pendant ^
tures c était d ailleurs une bonne
: i j ^ ' "^ . . ,

trente année. , a ses pro-


plume , il savait plusieurs langues P^^^ ^f
il avait su tirer la quintessence des près frais , les plus excellens ar-
maxiraes de divers pays. La politique tistes de l'Europe (A). Ces dé-
d'un Espagnol italianisé ne surpassait penses l'abîmèrent : il se vit
enfin
pas la sienne Le da lui praticate ^
réduit à la dernière nécessité *
:

uarie nationi , l'osservate diverse mas-


sime , e gli investigati genii e inclina- et l'on prétend qu'il mourut à
tioni di molti popoli , lo resero cosi
(a) Tssii des comtes de ce nom à ce que dit
accorto nelle attioni, che alcuno Spa- Aubert. Mirœus de Scriptorib. Saec. -VK/
,

gnuolo Italianato non lo avanzava 5). pa°'. 154. :

* Cette circonstance est révoquée en doute


Le Blanc, HIsl. de Bavière, tom. iy,p. ^^t^.
(4)
(5} Priorato, Histoire lies Coerre$ d Alicuiùg , par Joljy tjui rem'oie aux Méiuoireô do Hi-
liv. IX, pag. 291, éiiU. in-^". cérou.

TOME t. 27
^,g ALDROVANDUS.
l'hôpital de Boulogne , chargé (/) , et qu'il n'ait point su beau-
d'années (b) et aveugle , l'an coup de grec (g). Un
poëte qui a
i6o5 (c). C'est un exemple bien été pape l'a loué d'une manière
parlant contre l'ingratitude du très-bien tournée (E).
public (B) , et contre l'ex- même ^y, Vossius de Origine Idololatr., lib. Tir,
cap. XCl, pag. 1227.
cessive curiosité des particuliers Spanhem. apud Konig. Bi-
{g) Ezecli.
Il y aurait raille réflexions et bliotii. ,
png. 24-
mille beaux lieux communs à
(A) U employa pour auoir des fi- ,

pousser sur cette aventure je


gures exactes des animaux
:
les plus ,

les laisse à quiconque s'en voudra excellens artistes de l' Europe, Voici "l

saisir , et me contente de cette ce qu'Aubert-le-Mire


avait recueilli
sur ce sujet Pictori cuidam eà in
petite observation c'est que l'an-
: ,
;
arte unico triginta et amplius annos ,

tiquité ne nous fournit point


annuuin aureorum ducentorum stipen-
d'exerapled'un dessein aussi éten dium persoluit. Delineatores celeber-
du et aussi laborieux que celui de rimos, Laurentium Benninum Floren-
«' Cornelium Sumtum F,««-
"""^
notre Ulysse l'égard de l'histoi- ''«"^
à„,.o .

•^,, „ cofurtensem œre sur» conduxit nec


. , ,

naturelle. Pline ]e i avoue ,


re ^^^^ j^^^^-^ Ligotii, Serenissimi Eiru-
,

s'est répandu surplus de sortes de TÏ?e Ducis pictoris eximii opéra in ,

sujets mais il ne fait qu'effleu- hdc eddem prouincid FLorentiœ quan-


maximo
rer 11 ne u^
ICI .: i'i dit que peu de mots 'ioquè ususest ut quo fieri ,

T 1,. ,., posset artificio aues eœ destgnarenlur.


sur chaque chose , au heu qu AI- y^^f/e»» sculptoreni habuit - insignem ' . . •

drovandus ramassait tout ce qui Christophorum Coriolanum Norim-


se pouvait rencontrer {d) Sa bergensen atque ejus nepotem qui
. , ,

eus adeo l'enuitè adeàque eleganler


compilation comprend plusieurs
exsculpserat ut non in ,
ligno sed in
gros volumes in-folio mais il ne œre faclœ wideanlur {\).
;

faut pas lui en attribuer toute la (B) C'est un exemple bien parlant

gloire (C) car il y a tel volume contre l'ingratitude du public. ] 11 ne


;

faut pas s'imaginer que personne n'ait


qui a paru après sa mort , dans
secouru ce naturaliste dans les dé-
lequel on ne croit pas qu'il ait
penses qu'il faisait. Le sénat de Bo-
autre part que celle d'avoir four- logne te cardinal Montalte Fran- , ,

ni le modèle (D), ou tout au plus çois Marie duc d'Urbin, et quelques


quelques mémoires informes. autres des principaux de l'Italie , y
contribuèrent a^'ecjoie , en fournissant
J'explique cela dans les remar- de leurs deniers à l'entretien des pein-
ques. Il ne paraît pas possible tres et des grai-eurs qu'Aldronand
prodigieux nom-
qu'il ait fait le aunit sous lui ylprès a^olr dédié
''« l' Omuholngie ou
bre de livres dont Impérialis a '^««=«.
1 , ,^ N X -i .5 ^,
Histoire''"f"
des oiseaux au pape Cle- ,

donne catalogue (e) et il n est ment F'III et quelques autres à ceux


le ;
,

pas étrange qu'occupé à tant de qui aidaient fouorisé son trai'ail de


recherches qui emportent toute leurs libéralités il consigna le reste ,

testament au magnifique sénat


l'attention il ait donné souvent par son
de Bologne.,.., qui assigna une somme
,

pour des vers ce qui était très- d'argent considérable à Jean Corneille
contraire aux règles de la poésie Uter\^erius, natif de Delft enHollande,
profosseur en cette unit^ersilc , et de-
{b) Bullart, Académie des Scienc, tom. II
puis encore à Thomas Demster , gen-
,

pag. Iio, lui donne (juatre-vingts ans.


tiltiomme écossais aussi professeur ,
(c) Mercklinus, Lindenii renovali p. 1047.
(rf) Voyez la remarque (D).
au même lieu, pour recueillir et mettre
(e) In Musaeo Historico. Voyez aussi le (i) AuberlMirseus.clc Scrlptorib. Ssec. XVI ,

Théâtre de Paul Frelierus, pag. i3i7. pag. 154.


.

ALDROVANDUS. 4,q
sous la presse des livres si dignes de ') livre (8),non plus que de beaucoup
voir le jour (2). » d'autres qui ont néanmoins été pu-
(C) // ne faut pas lui attribuer » bliés sous son nom mais il est ar- :

toute la qloire due a sa compilation. ] » rivé au recueil de l'Histoire natu-


11 paraît par la Bibliotlicquetles li\res » relie dont ces livres font partie
,

de médecine , que la plupart des vo- » comme à ces grands fleuves qui con-,
lumes de l'Histoire naturelle d'Aldro- » servent pendant tout leur cours le
vandus ont e'te imprimes après sa » noni qu'ils avaient à leur source
,
mnrl (3). L'Ornithologie (4) en trois , » quoiqu'à la fin la plus grande partie
volumes in-folio et les sept livres , » des eaux qu'ils portent à la mer ne
des Insectes en un volume de même
,
w leur appartienne pas mais ;\ dau- ,

taille ,sont les seuls qu'il ait donnes » très rivières qu'ils Car, reçoivent.
au public. Le volume des Serpens les , » comme les six premiers volumes de
trois volumes des Bêtes à quatre pieds, » ce grand ouvrage étaient d'Aldro-'
le volume des Poissons, celui des Ani- » yandus quoique les autres aient
,

maux qui n'ont point de sang, THis- ') été composés depuis sa mort par
toire des Jlonstres avec les Supple'- , » dilTérens auteurs, on n'a pas laissé
mens de celle des Animaux, en douze M de les lui attribuer, soit parce que
volumes , le Traité des Métaux , la » c'était la continuation de son des-
Dendrologie (5) ont paru en divers ,
M sein ou parce qu'on s'était servi
,

temps par les soins de différentes


,
» de ses Mémoires ou parce qu'on ,

personnes , depuis la mort d'Aldro- » avait suivi sa méthode ou peut- ,

vandus. En efî'et , le volume des Ser- » être afin que ces derniers volumes
pens a été mis en ordre, et sous la w fussent mieux reçus sous un nom si
presse, par Barthélerai Ambrosin (6). )> célèbre (9). » Ceux qui voudront
Celui des Quadrupèdes au pied four- savoir le plan de cette compilation
,
chu fut mis en ordre premièrement ,
n'auront qu'à jeter les yeux sur les
par Jean Corneille Uterverius et puis , paroles suivantes j c'est M. l'abbé
par Thomas Demsterus et publié par , Gallois qui continue de parler « On :

Mai'c- Antoine Bernia et par Je'rùme y>n'a presque rien écrit de ces ar-
Taraburin. Celui des Quadrupèdes au » bres, qu'il ne se trouve ramassé dans
pied continu et celui des Poissons
, ,
)jce volume. Car cet auteur ne se
ont été mis en état par Utei-verius , » contente pas de rapporter tout ce
et publiés par Tamburin. Celui des » qu'il en a lu dans les naturalistes ,
Quadrupèdes à doigts ou à grifl'es a » il remarque encore, suivant la mé-
été compilé par Ambrosin. L'Histoire ))thode d'AIdrovandu» ce que les ,

des Monstres et les Supplémens ont


, , » historiens en ont écrit ce que les ,

été rassemblés par le même et pu- , î)législateurs en ont ordonné, et ce


bliés aux dépens de Marc -Antoine » que les poètes en ont feint. De plus,
Bernia. La Dendrologie est l'ouvrage » il explique les difiéreus usages aux-
d'Ovide Montalbanus (7). » quels on emploie ces arbres dans
(D) Il y a tel l'olume de sa com- l'œconomique dans la médecine ,
)) ,

pilation dont il n'a fourni que le mo-


, » dans l'architecture et dans les au-
dèle. ] M. l'abbé Gallois a si bien re- » très arts. Enfin , il parle des mora~
présenté le jugement qu'il faut faire » lités , des proverbes , des devises ,
sur ce gros ouvrage que j'ai cru ,
»des énigmes des hiéroglyphes , et
,

<{u'on me saurait plus de gré de la j)de quantité d'autres choses qui re-
copie que de l'abrégé de ce qu'il a dit. n gardent ce sujet (10). » 11 n'avait
Voici donc ses propres termes « Al- : pas négligé de consulter les médailles,
j) drovandus n'est pas l'auteur de ce et d'en tirer ce qui pouvait lui ser-
vir (11).
(2) Bnllart, Académie des Scienc. , tom. II , (E) t/n poète qui a été pape , l'a
,
pag. iio.
(3) MercWinns , in Lindenio renovato, }>ag. loué d'une manière bien tournée. ] Je

(4) Cest-a-dire , /'Histoire des Oiseaux. (8) De la Dendrologie.


(5) C'ext-à-dire , /'Histoire des Arbres. (9) Journal des Sarans, du 12 de novemlre
(6) Inpatrio Bononiœ Archigrinnasio Simpl. 16C8 ,
pag. 423.
Med. j Professor ordinanux Mw^œi illuiti-iss (10) Là même.
Senatdt Bonon., el Horli publia Prtpfecliis. (ti) Voyez Spanliem. de Prast. N'unijsai ,

(j) Ex Lindenio renovato ;'(i^. io\'^. ,


Diiiert, JII . iub fit. pag. ïôï.
: ,

420 ALÉANDRE.
parle <ie Mapbée Barberin ou d'Ur- , secrétaire î il eut ensuite la
bain VIII. Voici l'une des épigrammes charge de bibliothécaire du Va-
qu'il a faites à la louange d'Aldro-
tican *' , après la mort d Ac-
vandus
ciaioli. Mais le grand théâtre oii
Multipliées reruin formas quas ponlus et ,

œlher il commença de paraître avec


Exhibet, et quidquid promit etabdithumus.
Mens haurit, speclant oculi , d'um cuncta sa-
éclat fut l'Allemagne au com- ,

gaci , mencement des troubles que la


Aldobrandc , tuus digerit arle liber ;
Miratur proprios solers industria fœtus , réformation j excita. Il y fut en-
Çuainque lulil inoli se negat esse parem !

Obstupet ipsa simul rerumfecund a creatrix,


voyé nonce du pape, l'an iSig
El cupit esse suuin quod videt artis opus(it)- *^. Il y fit le personnage d'ani-

Lorenzo Crasso en rapporte une autre bassadeur et le personnage de


avec celle-là. docteur , selon les rencontres. Il
(u) Lorenio Crasso, Eiogii d'Huom. Lette- parla trois heurcs de suitc de-
raii , lom. I
tom. ,
pag- li^ ,
i38. yrjjj|-
de Worms , contre
\^ diète
la doctrine de Luther (b) mais
ALÉANDRE (Jérôme) , arche- ;

au on prétend qu'il ne la rapporta


vêque de Brindes , et cardinal
point fidèlement (c). Il ne put
XVr. siècle *\ Alexandre VI
point empêcher que Luther ne
souhaita de l'avoir à son service
fût ouï dans cette diète , et il re-
(A) , et le voulut donner pour
fusa de disputer avec lui; mais il
secrétaire à son fils. Il changea
obtint que l'on brûlerait ses li-
peu après de résolution , et ai-
vres , et qu'on proscrirait sa
ma mieux l'envoyer négocier en
personne : il dressa même l'édit
Hongrie mais Aléandre se trou-
;
qui le proscrivait (d). Il était
va malade en ce temps-là, et ne
nonce auprès de François P''. ,
put partir de Venise oii il de-
devant Pavie , l'an iSaS et il
meurait. Louis XII le fit venir ,

tomba entre les mains de quel-


en France l'an i5o8 (B), pour la
ques soldats qui le maltraitèrent
Ïirofession des belles-lettres dans
(C). Il fut envoyé une seconde
'université de Paris **. Aléandre
fois en Allemagne, l'an i53i, et
était alors âgé de vingt-huit ans.
trouva un changement consi-
Il se fit fort estimer dans cette y
dérable , s'il en faut croire ce
charge. Il passa au service d'E-
qu'on dit qu'il écrivit. Le peu-
verard de la Mark , évêque de
ple dans les villes protestantes
Liège qui l'envoya à Rome pour
,
,

n'était plus si animé contre le


faciliter sa promotion au cardi-
nalat contre les oppositions de pape
mais dans les villes catho- ;
,
liques il témoignait une envie
la France. Léon X le trouva as- ,

sez habile pour souhaiter de le


extrême de secouer le joug de
•' C'est à tort dit Joly
retenir, à quoi l'évêque de Liè- , que Ciaconnius
,

rapporte qu' Aléandre conserva cette place


ge donna les mains. Aléandre fut après être pan'enu au cardinalat.
d'abord placé chez le cardinal de * " Ce
fut en 1 52o, dit Leclerc ; et il y porta
Médicis (a) auquel il servit de la bulle de Léon X contre Luther qui est
,
,
de judlet i52o.'
*' Leclerc le dit né à
\i fé- La Motte , le (b) Ex Pallavicini Hist. Conc. Trid. Ce fut
vrier 1480. Bajrle l'avait dit dans sa note B. l'an l52l-
*' Joljr , d'après Chevillier lui Seckendorf Historia Lulheraoisaii
fait, avec , (c) , ,

Tissard l'honneur d'avoir établi l'impri-


, lib. I pair. 149.
.

merie grecque à Paris. {d^ Pallavic. Hist. Conc. Trid., lib. I, cap.
{a) Qui fut. le pape Clément VU* XXria, nuin. 5.
ALEANDRE. 421
Rome , et de s'enrichir des biens l'en a accusé. Érasme fait sou-
d'Église , comme
vent mention de lui dans ses let-
avaient fait les
protestans. Le changement de
tres et presque toujours en mal ,

ceux-ci venait de ce qu'ayant es- (I). Il s'est plaint , entre autres


péré une grande liberté, pourvu choses des mauvais offices qu'il ,

qu'ils secouassent le joug papal en avait reçus auprès de l'évéque


ils éprouvaient que le joug de la de Liège, chez qui Aléandre avait

puissance séculière sous lequel il un frère qui était beaucoup plus


leur fallait vivre n'était pas plus grand maître que lui en l'art de
doux. Aléandre fit tout ce qu'il dissimuler (K).
put mais sans succès pour em-
,
(A) Alexandre VI souhaita de l'a-
,

pêcher que Charles-Quint ne fît voir a son service. Je ] me sers de


une trêve avec les protestans cette expression , parce que l'auteur
d'Allemagne. Il fut créé cardi- que i"ai suivi réduit la chose à un
nal par Paul III *, et destiné à pur dessein qui ne fut jamais exécu-
té *. De la manière qu'il en parle
la présidence du concile , avec ,
Aléandre ne fut jamais actuellement
deux autres légats (e). En atten- au service de ce méchant pape. Si
dant il alla en Allemagne lé-
, ,
cela est , il faut compter pour per-

gat du pape l'an 53b. Cette lé- dues toutes les réflexions qu'on a fai-
, 1
tes au désavantage d'Aléandre en ,
gation dura un an. Sa mort vertu de la pernicieuse école d'A- ,

arrivée le premier jour de fé- lexandre VI et de César Borgia où , ,

vrier 1542, l'empêcha de prési- l^n prétend qu'il a été élevé. Je ne


der au concile. Quelques-uns di- décide rien je laisse au lecteur la ;

VI , peine d approfondir un peu la chose:


. 1 1 A •

sent quil mourut par la betise Aleandrum qui paulà antè Cancel- {
de son médecin (D). Je n'ai point larius Leodiensis et olim jamosissimi ,

parlé de toutes ses nonciatures. Çœsaris iUius Borgiae seu ducis Fa-
M. Moréri fournira ce que j'ai lenlini secretarius fuerat famulus ,

hero dignus et pars aulœ Romance ,


omis. Aléandre avait publié quel- sub Alexaiidro VI pessiinè descri- , )
ques ouvrages (E). Il entendait bit Lutlierus (i).
fort bien l'hébreu et le grec , et (B) Louis XII lejît venir en France,
i5o8. ] Pallavicini ne marque l'an
on lui une mémoire
attribue
point cette année mais comme 11 dit ;
surprenante (F). Je ne crois pas qu'Aléandre, âgé de vingt-huit ans
,
qu'on ait eu raison de dire que fut appelé à Paris je n'ai pas cru me ,

l'hébreu était sa langue mater- tromper en la marquant puisque ,

d'ailleurs l'épitaphe d'Aléandre porte


nelle, ou, pour m'exprimer plus
i543, qu'il mourut l'an âgé de soixan-
clairement né juif te-deux ans moins treize jours (a). II
,
qu'il était
(G). On a eu plus de raison de était donc né le 1 3 de février 1480 ;
l'accuser d'emportement car ceux qui marquent le jour de sa
{f). Il mort la mettent au premier
fit lui-même son épitaphequi té-
jour de ,

février (3). Je suis surpris de la né-


moigne qu'il ne se dépitait point
*
contre son destin (H), comme on par leLeclerc explique qu\4le'andre envoyé
pape en Hongrie étant tombé malade
,

en route fut obligé de revenir à Venise, et ne


,

* Lechrc dit que cette promotion eut liuu


parut jamais il In cour d'Alexandre VI
qui
mourut au mois d'août i.So3.
le 20 décembre l53(). Paul
III m'ait, depuis
(1) Seckendorf, de Lutheran. lib. I , pag.
le mois de mai de Vannée précédente rap- ,
,

133 num. 3-
,
pelé auprès de lui Aléandre cjui était nonce
lie Venise depuis i533.
(2) In Nomenclatore Cardinaliom pag- ifiz, ,

et in Istoria de' Poeti Gra^ci de Lorenzo Crasso ,


(c) Les cardinaux Campegc et Simoneto. pag. 278.
{/") Voyez la remarque (G}, à la fin. (3) Oldoioas, in Atnena;o Romano, pag. 3i7-
,

45'-i ÂLÉANDRE.
gligence des auteurs de son epitaphe. (D) Quelques-uns disent qu'il mou-
ils y metteut qu'il naquit à La Hotte, rut par la bêtise de son médecin (5). '\
dans la Carnlole , l'an 1479 et rtfil , Cela ne s'accorde guère avec son epi-
mourut à home , l'an i543 âge de , taphe , qui témoigne qu'une maladie
soixante deux ans moins treize jours. de langueur , contractée par les tra-
Cela ne peut être vrai que dans la vaux de ses ambassades, le fit mourir:
supposition que l'année i479 ne com- Mox , Legationibus pro sum-
dii'ersis
mença pas au mois de janvier, et que mis Pontificibus ad omnes Jerè chris-
l'année 1642 y commença or il est : tianos Principes fideliter et diligenter
ri<liciile de supposer dans une epita- perjiincto, et ideÔ intaeem delapso. Un
phe une manièi'e de marquer le temps passage de Paul Jove mal compris ,

si destituée (l'uniformité. Je m'étonne d'abord et puis métamorphosé de


,

que l'auteur du Nnmenclalor wc se soit main en main en différens sens aura ,

point aperçu de cette fausse supposi- peut-être donné lieu à cette bêtise du
tion Ji dit une chose incompatiblea vec médecin d'Aléandre. Quoi qu'il en
le prre Pallavicini savoir, qu'Aléan- : soit , nous apprenons de Paul Jove ,
dre n'avait que vingt ans lorsqu'il en- qu'Aléandre ruina lui-même sa santé
seignait dans l'université de Paris. par le trop de soin qu'il en prit , et
(C) // tomba entre les mains de quel- lui-même un très-méchant
qu'il fut à
ques soldats qui le maltraitèrent. ] médecin pour s'être servi de trop de
,

Voici ce qu'on trouve là-dessus dans remèdes non nécessaires Lœtatus est :

une lettre d'Iliérome Négro à Marc- ed purpura per annos quinque (6) ,
Antoine Michieii datée de Rome le , pen^asurus Jiaud dubiè ad exactam
ao de mars iSaS « L'archevesque de : œtateni nisi nimiâ tuendœ valetudi-
,

}> Capue nous a racompté un cas es- nis sollicitudine intempestiris medica-
i>trange d'Aléandre , évesque esleu mentis , sibi herclè insanus et inj'elix
j)de Brindes , et nonce de sa Sainteté medicus , l'iscera corrupisset (7).
» près le roy très-Chrestien c'est qu'en : (E) Il ai'ait publié quelques ouvra-
M la plus grande fureur du combat , ges, ] M. de la Rochepozai ( 8 ) me
3> et en celle confusion telle que la donne encore un petit sujet de me
» pouvez imaginer le pauvre gentil- , plaindre de son manque d'exactitude.
V homme s'etifuj'ant vestu d'accous- Il dit r|u'Aléandre , quoique très-ca-
3> trement digne de son estât d'éves- pable de traiter les plus sublimes ma-
)> que , il tomba es mains de trois tières , n'avait pas dédaigné d'écrire
j) Espagnols lesquels le prenans et
, , sur les humanités et de publier quel-
,

3) sans autrement le cognoistre le , ques petits opuscules dont le sujet,

» con'raignirent par menaces et bra- était fort mince Dere... litterarid li-
:

« vades ,de se tailler à trois mille cet infcriori benè mereri non dedigna-
i> ducats de rançon , et le menèrent tus est, exilis argutnentioperulis editis
» en cest équipage par le camp se quœ tamen autoris nomen et J'amam
,

M tournans souvent en arrière , et nec eleuant neque iniuiinutuni eunt(g).


)' l'importunans avec très-rigoureuses Il n'y a point, d'homme qui lisant ,

» paroles de les suy vre. L'eff'royé éves- cela, ne se prépare à ne voir que de
» que couroit après eux comme un forts petits livrets dans le catalogue des
J> laquay sans oser dire qu'il fust OEuvres d'Aléandre qui est à la suite
,
,

» nonce apostolique. Mais estant de- de ces paroles du Nomenclator. Ce-


,

w dans Pavie il fut recogneu par le pendant, voici le début de cette suite
, :

» viceroy de Naples et par le mar- Scripsit l'aslum opus adversiis singu-


,

') quis de Pesrare qui avec grande los disciplinarum prnj essores, in quos
, ,

M peine et difficulté, le délivrèrent de censuram acerbiùs et Jelicem exercuit


» ceste prison et servitude : néanmoins
w fallut-il [)our estre (juitte (5) Voyezles Jugem. des Savans sur les Poet.
de son ser-
tom. III, num. ii-^i, pag. i()4-
» ment, qu'il donnast aux soldats sus-
(6) // faudrait conclure de là qu'il obtint le
» dits deux cents ducats pour homme
cardinalat en iSSy.
» afin de les contenter. J'entends qu'il (7) Paulns Jovius, Elog. , cap. XCVIII, p.
» va à Venise il vous fera le compte de
, 23l.
» ses disgrâces et mésavantures (4). » (8) Évrque de Poitiers , auteur du Nomen-
clator Cardinalium.

(4) Lettres des Princes , traduites parBeUe- (g) Nomenclator Cardinalium ,


pag. i3i ,

forêt, folio 96. edit: i6i4--


ALÉANDRE. 423
calamum ; Tabulas in grammuticam surprenante. ] Je ne saurais prendre
grœcam *', seu potiUs grammaticam ce que Paul Jove en a dit que pour
ad Hueras grœcas Dialngos iluosfes- une saillie poétique quoiqu'il l'ait
; ,

tifissintns quorum aller Cicero lele- assuré en prose. C'est qu'Aléandre re-
,

gatus inscribitur, aller i^erà Cicero re- tenait tout ce qu'il lisait , et qu'il le
l'ocatus (lo); Carmina quœJam illus- pouvait réciter long- temps après sans
triuni poëlarum Italoruin carminibus se méprendre en rien , ni quant aux
imlila ; Epiilolas multas quarum 4 ,
choses ni quant aux paroles Delur :

habes inter epistolas Federici Nauseœ, hoc incomparubili inusitatœ memorice


et alias in quibus de Rébus eci Lsias- felicilali quœ in Hieronymo Aleandro
ticis agit ; Annotationes iteniquasdam supra cujusque wel antiqui seculi cap-
in bibliolhecd cardinnlis Sirleti asser- tiim admiranter excellait ut ejus ex ,

t^alas. Si Ton est choqué de voir un vero depici a faciès uel in pudendâ in-
grand et immense oinrage où l'on genii sterilitate inter Jecuiulissimas
,

ne devait rencontrer qu'une petite imagines conspiciatur quando nihil ,

dissertation on ne revient pas de ce eum ciincta volumina cupide perlegen-


,

de'goût en ne trouvant dans le cata- tem uel rerum wel i'erborum omnino
,

logue des écrits d'un bouiaie aucune sublerfiigerit , quin singula memori-
marque qui fasse la distinction de ce ter uel a mullis annis longo sepulta
qui a été imprimé et de ce qui ne silt-ntio recitaret (i3;. On a de la peine
,

l'est point. Voilà un défaut (jui règne à croire cela si Ton ne le voit; mais
dans le N^nmenclalor dans Vylthe- comme une mémoire ne laisse pas
,

nœum d'Okloïni et dans |>lusieurs d'être très -heureuse , encore qu'elle


,

autres bibliographes. Le giand ou- ne le soit point au degré que Paul


vrage d'Aléandre où il faisait la Jove vient de décrire je ne doute
, ,

censure de toutes sortes de profes- point de la connaissance parfaite de


seurs n'a jamais été imprimé. 11 y plusieurs langues que l'épitaphe d'A-
mettait, dit- on, la dernière main léandre lui attribue: Hebraïcœ, Grce-
lorsqu'il mourut Menlre andava com- cœ
; Latince aliquotque aliarum lin-, ,

piendo una faslissinia opéra contra i guarum exoticarum ita exacte dodo ,
projessori di lutte le scienze ,Ju assa- ut eas rectè et apte loqueretur et scri-
lito in Rnma dalla morte ( ii). C'est beret.
ce que M. .Moréri a voulu dire par ces (G) Je ne crois pas qu'on ait eu rai-
paroles // mourut le i'^''. février i543, son de dire
: qu'il était né juif. ]
dans le temps qu'il allait publier un Luther et ses disciples donnèrent cela
cuivrage considérable. Paul Jove a été pour un fait certain *^ pendant la ,

sur cela l'original de beaucoup de première nonciature d'Aléandre en


gens. Quiim l'ustum opus dit-il (12), Allemagne , et voici ce que nous li- ;

t'astd illd memorid ad^ersiis singulos sons dans les œuvres de Luther (i.'j) :

disciplinarum proj'tsiores agitaret, Ro- f^enit his diebus Hieronymus yllean-


niœ interdl. Les continuateurs de Ges- der, uir sud opinione longé maximus ,
ner et Konig n'ont connu de tous les non soliim propter linguas quas exi-
ouvrages d'Aléandre que les tables miè callet siquidem IUbrcea illi i^er- ,

de la grammaire grecque. Drasjdius nacula est Grœca h ptiero illi coa- ,

n a pas même connu cela. Le catalo- luit Latinam autem didicit diutind. ,

gue d'Oxford ne contient qu'un petit proj'essione sed etiam mirabilis suis ,

poème de cet auteur *'. l'idelur ob antiquitatem generis. Nam


(F) On lui attribue une mémoire Judœus natus est, quœ gens immodicè
gloriatur de Abraham wetustissimo se
*' Imprimées selon Simlei; en i5i7, in-S°
,

Je ne sais ajoute Leclerc si cet ouvrai^e originem ducere. An t-'ero baptisatus


, , est
dijférent du (VAléandre sur la gram-
travail sit nescitur. Certum est eum non esse
maire de Chrrsoloras. Pharisœum quia non crédit resurrec-
,
(10) Je fais voir dans Varlicle d' (Horleasio)
tionem mortuorum quoniani i'ii'it pe-
Làndo , que cela etl faux. ,

(il) Lor. Crasso, Islor. de' Poeti Greci , p. rindc atque eum corpore sit tolus pe-
277.
(12) Jovias in Elogiis, cap. XCVIII, p. aSi. {i3) Id. ibid. , pag. aSo.
*^ C^esl dit Leclerc , une pièce de 22 vers^ *' leclerc combat longuement cette opinion
^

inlitule'ePoèma ad Juliam rt N'ejeram impri- ,


de Luther.
me'e a la page 'iG du tome I", des Delicia: poé- (i4) Tome I ,
folio 496 apud SerVendorf de
,

tarum Italorum de GriUer. Lulhemn. , lib- I , pjg- laS , nuni. 4-


.

424 ALÉANDRE.
ritums , adeo nullum a se prauum » immortalem ! dixit , multi hic sunt
affectum abstinens. U sque ad insaniam » boni quibus notas sum ego et
l'iri ,

iracundus est, quduis occasionefurens » familia niea , et asserere ego uerè


Impotentis arrogantiœ afaritiœ inex-,
)) possum majores meos marchiones
,

plebilis , nejandœ libidinis et immo- » in Istrid fuisse (17) quod vero pa- :

dicœ , summum gloriœ mancipium ,


» rentes niei ad inopiam redacti sunt ,
quanquam moUior quam qui possit >) fato iribui débet. Natales meos ith
elaboratn stylo ( 1 5) glorinm parure , » legitiniai'i ut in Canonicum Leo- ,

et pejnr quam qui uel conelur in argu- )» diensem receptus sim, quod Jactum
menlo hontsto. At ne nesciamus , ces- » non foret , nisi orlus essem ex fa-
sit felicissimè simulata defectio ad 5) jjiilid illustre i'el spectabili. « Ce qui
Chriitianns. Voilà un portrait qui me fait croire que ce reproche de
nous représente Ale'andre non-seule- ,
naissance judaïque était injuste n'est ,

ment comnae un juif qui faisait sem- pas une petite raison. Hulric Hutten
blant d'être chrétien , et dont le bap- publia contre Aléandre une invective,
tême était une chose douteuse ; mais où il se mit si en colère qu'il le me-
aussi comme un homme qui ne
croyait naça de le tuer Omnem advertam :

point l'immortalité de l'âme, et qui se diligentiam omne adhibebo studium ,


,

plongeait dans les plus infâmes vo- omnia tentabo conaborque ul quifu- ,

luptés , emporté jusqu'à la fureur , rore amentid et iniquitate grafis


, ,

avare et superbe au touverain point. accessisti , vitd inanis hinc ejfferaris.


II répondit à l'accusation d être né JYeque enim exspectanduni adhuc tibi
juif, et déclara devant la diète de est ut stylos doctoriim hic firorum seu'
Worms , que ses ancêtres avaient eu lias sed fulurum crede ut fortiutn
,

la di};nité de marquis dans l'istrie, et gladiis conjodiare (18). Il n'ignorait


uil a>ait fourni de bonnes preuves pas que ce nonce avait réfuté devant
ïe sa noble et illustre extraction lors- la diète le reproche du judaïsme et ,

qu'il était devenu chanoine de Liège. s'était vanté de descendre d'une mai-
Il prit à témoin plusieurs personnes son très-illustre mais tant s'en faut ;

de probité qui l'entendaient et qui , qu'il s'engage à soutenir ce reproche,


connaissaient sa famille. C'est M. de qu'il nie qu'on le lui eût fait. Peu
Seckendorf qui nous apprend cette m'importe qu'il ait eu tort de le nier ;
particularité. Il l'a trouvée dans les la preuve que je tire de son silence
archives des ducs de Weimar, oh l'on n'en est pas moins bonne car s'il ;

garde , entre plusieurs manuscrits de avait vu quelque fondement dans l'ac-


ce temps- là les actes de la diète de
, cusation, il eût pour le moins soutenu
Worms. La longue Harangue d'A- qu'Aléander niait faussement son ex-
léandre est en abrégé dans ces actes ,
traction juive. Ne lui soutint-il pas
et c'est de là que cet illustre luthé- que comtes qu'il se donnait pour
les
rien a tiré ce que l'on va lire tel qu'il parens ne le reconnaissaient pas pour
l'a traduit en latin (i6) Tandem : tel ? IVihil intellexisti proximd audi-
questUs est a Luthero spargi quasi tione ctim niullis qiiidem exciisares
Aleander génie Judœus esset aDeum ; judaïcam originem , nemo objiceret.
JYam inalum qudcunque etiam
esse
(i5) Paul Jove témoigne i)uj4le'andre ne gente editum sciebant omnes. Itaque
s'exerça qu'à parler j et que, lorsquil voulut
écrire , il sentit trop tard son faible. [Sur cela
nemo magnoperè putabat generis pra-
Leclerc dit qu'' Ale'andre , au contraire , a f^itatem tibi objiciendam adversîini :

composé un grand nombre d'ouvrages dès sa mores fremebant infensè mnlti. Et po-
jeiineise mais qu^il en est peu d'imprimés ;
,

savoir ; l". la seconde édition de la grammaire


jam manifeste quœ esset
terat sentiri
de Chrysoloras a laquelle il avait travaillé ; animorum commotio tu tamen quasi :
,

3°. la Gnomologia qu'il fit imprimer en i5i2 illïcpotissimiim expurgalione opus es-
;
3°. la Préface du dictionnaire grec et latin
, set, mullis tractabas locum eum ad
i5i2 ; 4°- 'O" épiinphe en deux vers grecs, rap'
portés parBai le, remarque(ff), etlepetit Poème fastidium usque audientium ; sed lan-
Inlin dont Bai le a parlé remarque (£);5°. quatre tâ cumjîducid ut plané certns tibi esse
Lettres dans le recueilde Nauséa, en i55o , ain- l'idereris neminem intelligere quam
,
sique Bajle Va encore dit remarque(E); 6°. les
Tabiilaein grammaticani gra:cam , citées par
(17) On
assure dans son épilaphe qu^il étaU
Barle au même endroit.^
issu e comitibus Landri iu Carniâ Petra:piIos;ti
(i6) Seckendorf, de Lulheran., pag. i4g, in Istriâ.
!((. h. (i8j Hulricus HuHenius in Alcindrum,
.

ALEANDRE. 4^5
impudenter ibi mentireris omnia. Illo riox^ûv, Svirif Ut7y àx^iov >iv 6a-
enimpost multa erupisti,ut ad nobiliss. v«.Tot/.
comitum, qui te penitùs ignorant et ,
i- j • •

guof tu haud satis nôsti gtnus ori- ,


Voila quelle serait la disposition de
,

ginem tuam referres {iç)\ Or, comme *«"« les hommes, si la réflexion , si
en pas- la raison , si le bon sens , étaient ca-
il n'y a si petite chose qui ,

jnt débouche en bouche, ne devienne pables de surmonter les impressions

nonce n aii eu pour louueinem i:c


,
étrange que Paul Jove ait produit
VT t
— -i" •- — v .

que dit Paul Jove que les Juifs ad- ,

miraient l'habileté d'Aléandre en fait contre soi-même un témoin aussi for-


d'hébreu et qu'ils n'avaient nulle
,
mel que cette épitaphe. Il avait dit
peine à croire qu'il était de leur na- qu'Aléandre indigne contre son des- ,

tion Latinœ grœcœque litlerœ quiim


:
tin, qui l'emportait un an avant l'an-

sœpè alacriter jactabundo pro verna- née chmacterique, rendit 1 ;ime , en


cutis haberentur, Hebraïcas admiran- se plaignant de cette anticipation In- :

tibus Judceis et suœ stirpis eum faciletenUjato suo vehementer indignatus,


credentibus solertissimè didicit (20). Ç""'" *e prœreptum anno uno ante cli-
,

Ceux qui chercheront à me critiquer rnactencum inler anxia supremaque


sont avertis que \e ne prétends point suspina quercrelur^ (22) et tout aus- ;

que le livre de Paul Jove ait donné sitôt il ajoute qu Aleandre ordonna
lieu à la médisance ma pensée est par «on testament qu'on mit dans
:
,

que, longtemps avant que PaulJove «on épitaphe un distique grec de sa


eût dit cela , d'autres pouvaient l'a- façon contenant cette pensée ,
:

voir Cilt. ExcessievilœœrumnisJ'acilisquelubensque,


« Ce que dit Luther, qu'Aléander Nepejoraipsd mone dehincvideam*.
3> était fort colère, est très-véritable n j-^ 1 « »
Crasso di a peu près la même
: < •

^«'^^"^,"
.> on en peut croire Josse Gentin se- ,
<=h°^,« ^e cïepit d Aleandre contre
^ crétaire de ce cardinal, dans une ^^.
son destin Fu assalito in Roma dalla :
5) lettre à Nauséa évêque de Vienne ,
morte , conlro la quale mostrossi an-
5) (*). 11 meilleure
lui dit foi du de la
che negli ultimi snspiri sdegnato (23).
3) monde, après lui avoir mandé la
Paul Jove est tombé dans une autre
«mort d'Aléandre, qu'il ne sait où
j) prendre parti , après la mort de son
erreur à l'égard d'Aléandre. 11 l'ac-
cuse d'avoir présagé de nouveaux
3' maître
, dans l'appréhension où il
» est d'en trouver encore un plus em-
malheurs prêts à foudre sur nos têtes :

noi^as cladesimminerenobis ominatur ;


3) porté. Hacteniis , dit-il, alium Me-

3) cenatem Jiomœ non quœsiui , eo mais rien n'est plus faux que cela.
y> quod immodestia etfuror hujus mei
Aleandre ne regardait à l'avenir que
par accident toutes ses vues se por-,
3) dejuncti inculcat mihi timoreni ne ,
taient sur le passé il s'imaginait
iijaciam Glauci cum Diomede per- ;

3) niutationem (21). »
seulement que l'avenir ne vaudrait
pas mieux en ce monde. Voilà donc
(H) Il fit lui-même son épitaphe ,
une seconde erreur de Paul Jove.
qui témoigne qu'il ne se dépitait pas

j^.,^ vers
deux
'i-;t
^».;t
était
j „. 1 tUe
J,«_<„„ son destin.
contre
^„„ grecs

„„," J„
mort de ù„„
j„ bon
u -!
en consiste

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ère,
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qui signaient qu il
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,,

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une uoiriuie
première, on ne saurait
première
'

uieuisance C est
x- ai- j
Aleandre comme
,
1
qn on ne le charge
c
,

d'ail-
1

-j-
.

^^.c„^r.^ d
cesserait j'*t-
être 1témoin de J • 1 •

plusieurs r •
*^
-l j j •

A
«u«o.„o dont i„ 't 4- \ un fourbe moribond qui
^ „.
ordonnait ..

choses Ja vue était plus insup- i. ,


.'

par son testament qu'on fît accroire


portable que la mort :
un grand mensonge à toute la posté-
K«.T9atV0V oÙk àÀKlfi , OTI 7ra.Ô9-6fAAl rité savoir qu'il n'était pas mort à
j

liv iTTIf/.a.fiTVÇ
(32) Jovias Elogior , cap. XCVIII , p. 281.
(i^) Idem, ibid. * Joiy , dans i« Additions et Correciions ,
(20) Jovius, Elogiorum cap. XCVIII, p. aSi. rapporte une autre traduction latine , sans doute
(*) Lib. VIII , Epist. ad Nau5eain à variis de sa façon et qu'il donne comme meilleure que
,

srriptarum , pag. 353. celle de Bayle.


(21) Ce Supple'ment [ c'est-à-dire , ce dernier (23) Lor. Crasso, Istor. de' Poeti Greci, p.
alinéa'^ vient de M. de la Monnaie. 297-
,,

43.6 ALÉANDRE.
regret. Lorenzo Crasso rapporte que tereacjucitndissimdnecessitudinecon-
Scraderus a insère dans ses 3Ionu- juncliirn, miris mendaciis in me co-
mens d'Italie l'inscription sépulcrale nati sunt irritare... Quid multis ? per-
d'Ale'andre , avec la version latine suaserant homini, ut acri siniplicique
des deux vers jurées (24). Cette ver- in^enio prœdito , ita credulo, me pa-
sion est la même que Paul Jove a rùm
ainicè de ipso et sentire el loqui.
rapporte'e elle n'est guère moins
: IVec dejuerunt, qui coatescenlem ami-
mauvaise que celle-ci: /Vo/i itifitus citiam nouis iubindè delationibusdis-
obii ; quia quiei>co , testis mullorum cinderent ("iG). C^est parler bien fai-
quœ i'idere pejus est morte ( 25 ). blement des mauvaises dispositions
Voilà ce qu'on gagne quand on se d'Aléandre, s'il est vrai, comme on
sert d'une langue peu connue toute n'en peut guère douter, que ce soit
:

la force et toute la grâce du distique lui que l'on ait désigné ailleurs (27)
grec ont échappé aux traducteurs. par le titre de porteur de bulles ,
Mettons ici une remarque qui m'a Aittacb/zato^Ô/ioç ; car ce porteur de
cte communiquée par un habile hom- bulles fît tout ce qu'il put pour per-
rae Josse Qentin
: dans sa lettre à dre Erasme ; et bien en prit à ce der-
,

JVauséa , dit qu'Alénndre , trois jours nier , que l'empereur ne voulut pas
ai'ant sa mort , ayant mis ordre à faire tout ce qu'on lui demandait :

toutes choses servitoribus et aliis -/^/e quoniinus oppresseril par illuni


,

prœsentibus, pronunciavit suum quod non stetit : perierat Erasmus, sipronas


fieri cupieliat epitaphiuni, quod hoc aures principum reperisset. Une let-
disliclio clausit, KotTâavov, e/c. Cela tre qu'Erasme avait écrite à Luther ,
fait voir que l'épitaphe ne consistait et que les amis de celui-ci rendirent
pas entièrement dans ces deux i>ers ; publique, irrita si fort Aléandre ,
mais que ces deux l'ers étaient seu- qu'il tâcha de ruiner son ancien ami
lement la clôture de l'épitaphe. Je ne tant auprès du pape qu'auprès de l'é-
suis point de ce sentiment je crois vêque de Liège //(^c (epistola) dédit
: :

que Gentin a voulu dire que son mai- ansam Aie andro jampr idem iniquo in
tre renferma dans ce distique toute nie animo ut me perditum iret , co-
l'inscription qu'il ordonna que l'on nalus Leonis aninium irritare in me
mît sur son tombeau. simul Leodiensis episcopi qui priiis
(I) Erasme fait soutient mention de penè deperibat ut ita loquar , in ,

lui dans ses lettres et presque tou- Erasmum.


,
ipse Leodiensis os- Nam
jours en mal.'] Aléandre, bouillant tendit mihi litteras quas ad eum è
de son naturel , et intéressé d'ailleurs Româ scripserat Aleander salis odiosè
à la ruine du luthéranisme par sa ^^^ altingentcs (28). Il afi'ecta de dire
,

qualité de nonce envoyé en Alleraa- que les hérétiques avaient trouvé dans
gne pour étouffer ce parti dans le les ouvrages d'Érasrae le fondement
berceau .n'avait pu soufirir la mode- de toutes leurs fausses doctrines Jant :

ration d'Erasme*. Ce ne fut pas tout audio multis persuasum ex meis scrip-
:

les ennemis d'Erasme ne cessèrent de *'* exstitisse totam hanc ecclesiœ pro-
ie diffamer, comme fauteur du lu- cellam. Cujus l'anissimi rumoris prœ-
théranisme 5 ainsi l'amitié et l'estime cipuus aMto/y«j7 Hieronymus Alean-
réciproques qui avaient été entre lui der, homo, ut nihil aliud dicam, non
,

et le nonce, souffrirent une grande superstitiosè i^erax (29J. il ne se con-


diminution au premier voyage d'A- tentait pas de mordre sur la religion
léandre en Allemagne Hieronymum d'Erasme , il médisait aussi de l'éru-
:

Alearulrum , nuncium apostolicum , dition et des ouvrages de ce grand


homineni opprimé doctum mihique we- homme. Cela paraît par une lettre
qu'Erasme lui écrivit en l'année 1624
(24) Lor. Crasso , Istor. de' Poeli Grfci , p.

(î5) Chytraeus, lib. XVII folio 458, la


,
(26) Erasmî Epistola XXIV libri XVII , p.
rapporte, ^o^ej Seckendorl , liv. I, pag. 128, -fil-
tel. h. (27) Dans la XXIV. Lettre du XXF'. livre,
* Le clerc a fait en réponse a Bajle l'apolo-
gie d'^le'andre; mais c'est à l'article Erasme (28) Erasmi Epistola CXI II lihri XIX , p.
tju'il avait renvoyé et quil a inséré ses longues 9H9-
el nombreuses notes. Sans citer Leclerc Joly (29) Idem, Epistola LXXXIV Ubri XX, p.
les a, transposées el reproduites ici.
,

A LÉ ANDRE. 427
(3o) , où il lui décharge son cœur. Il En un autre endroit désigne , il le
le regardait comme un ennemi si ir- sous le nom de Vtiipns (36) ; ce qui
rite ,
pour Tun des prin-
qu'il le prit témoigne qu'il n'était point desabusé
cipaux promoteurs des censures que delà médisance qui avait couru que ,

la Sorbonne avait publiées contre ses cet homme-là était né juif. Si Aléan-
livres, et pour lauteiir véritable de dre avait fait ce livre, il avait eu des
l'invective qui avait couru sous le liaisons très -étroites avec Érasme:
nom de Jules-César Scaliger Non ta- :
même table, même chambre et même
nien erant proditurœ censurée, nisi qui- avec lui, et il en avait reçu de lit
dam oleum camino addidissent. Lu- bons offices ; car voici ce qu'Érasme
îetiœ fuit Eccnis, etut suspicor Alean- nous apprend Cum aliero fuit mihi :

der, tjuem suspicor hdc de causd prœ- oiim non leclum modo ac mensa l'e- ,

cipuè t'cnisse ut Erasmo moliatur riim etiavi cubiculum et lectus commu-


,

exiiium. Julii Scaligeri Libellum tum nis (3^), adeoque a me nulld lœsus est
scio illius esse quant sein me l'iuere. injuria , ut quiim illi res essent anaus-
,

Id tamen dissimulandum est ne ma- tiares commendalricibus litteris meis ,

gis insaniat prodito fuco ,(3i). J'ai nonnihiletiani adjutus sit, nec usquhni
montré ailleurs (32) qu'Érasme se illius in scriplis meis nisi honorifica
,

trompe sur ce dernier fait la ha- menlio (38). On ne peut s'empêcher :

rangue de Scaliger était l'ouvrage de de reconnaître là Aleandre lorsqu'on


celui dont elle portait le nom ; et dire se souvient d'une autre lettre (Sgi, où
qu'en i53i Aleandre allait à Paris l'on trouve ces paroles Ut iddeo , :

principalement pour machiner la rui- tihipropemodiim persuasit (Aleander):


ne d'Erasme est se croire trop im- at ego, qui è domeslico convictu ac
,

portant, et ignorer la nature des em- lectuli quoquè contubernio totuni intiis
plois que le pape donnait à ce nonce, et in cule noi^i , tam scio esse ovum
Kous verrons ailleurs (33) si Érasme illius [^o), quam scio me uii^ere.Ymi-
a eu raison d'attribuer à Aleandre un sons la relation désavantageuse par un
livre qui portait le nom de Dolet. Il passage qui concerne les mœurs d'A-
veut parler de ce nonce dans la lettre léandie. Il vivait en épicurien à Ve-
XXIV du XXV*. livre. Il faut donc que nise Tau i533 si nous en croyons , ,

la passion d'Aléandre ait été extrême; Érasme Nunc f^tnetiœ plane t'ii^it ;

car celui dont Erasme se plaint avait epicureum non sine dignitale tamen ,

fait ourir à la cour de Rome un (4i)- ^^"s doute par cette dignité, il
écrit (34) où il disait au pape qu'il entend la double mitre dont il avait
, , ,

s'étonnaitque,tant de milliers de per- faitmention dansla lettre LX: Alean-


sonnes ayant péri en Allemagne dans der, gemind mitrd insignitus nam ,

la guerre des Paysans Érasme, l'a u- Brundunnus et Oretinus est, apud


,

teur et le chef de ce furieux tumulte, Cœsarem agit legatumAnglicum (À'i).


véci^t encore. On ne peut pas igno- Ce dernier mot est équivoque , et
rer quel est l'auteur qu'Érasme dési- peut-être Érasme n'avait point écrit
gne puisqu'on trouve ces paroles Anglicum, vaàïs Angelicutu, afin de
,

dans une autre lettre /// me inipu- signifier l'emploi de nonce apostoli-
:

dentissimis argumenlis causam agit que qu'Aléandre avait alors en Al-


( Albertus Pius) et a^it hosti/iter lemagne. En tout cas, on n'eût point
,

docere laborans me fuisse nccasiu- mal fait d'avertir dans une note mar-
,

nem, causam autoreni et principem , ginale


, qu'il n'était point ambassa- ,

tolius hujus negoiii. Quod idem agit deur du roi d'Angleterre auprès de
Aleander in suo Kacha demirans me ,

adhuc spirare quitm in Germani.1 tôt '"^^ -^"^ "' datée dn Bdle, le aï de décembre
,

hominum millia sint trucidata (35). '^(1é) DanWa Lettre XLIV rf„XAX<. W., p.
,, , ,,,, ..-,., , . .
'9^'- f^ojez aussi ta LXXiy. LtUre du même
LJJI^. du WlII'. livre.
^
(3o)La li^re.
(3i)Erasmus, Epistola LVl Wri AAX, po^. (3-) Ce fui apparemment à Venise lors- ,

'P*!'' tjve Erasme iravadlail chez Àlde Manuce.


,(32) Dans la remarque (31) de VarUele (38) Epist. XXIV /,é,j XXr, p«.ç. iS-g.
E«/"'E. .39) La LVIII». Lettre du XXSC*. livre
(33) Dans la même remarque. ^"Érasrae , pag. 1945.
(34) In quo docebat quid tigniCcel Hebr.^is (^o) Ilparle de /a Harangne de Scaliger.
Bâcha. (4,) Epislol. LXII libri XXX
pag. lO^O- ,

(35) Erasm. Epist. XCIX libri XX. pag. (42) Erasm. Episi. LX XXX
libri
/aS ALEA NDRE.
l'empereur Charles-Quint car c'est car s'étant agrégé des pre-
; Rome ;

à quoi l'esprit du lecteur se porte miers à l'académie naissante des


tout droit. M. de la Monnaie a deviné
Humoristes il avait toujours
très - heureusement qvi AngUcum a
,

été' mis à cause qu'Erasme avait écrit


quelque composition à y faire
en abrégé aplicum pour apostoli- voir et il fit même en langue ;

cum. italienne un Traité fort docte


Il faut pour le moins qu'on voie ici
sur la devise de cette assemblée.
un passage d'Erasme à l'avantage d'A-
léandre Etlamsi nomindsses istum
:
La fécondité de son génie et de
,

qui Aleandrum Érasmo prœfert in ses études se montra par divers


omnibus, nihil erat periculi. JVam et écrits sur différentes matières. Il
ipse plurimùm tribuere soleo Aleandro, expliqua des antiques (A) il écri- :

prœsertïm in lilteris nihilnque maii^is ,


vit sur la question des églises
me lœdi puto si doctior est quhni ,

qubd dilior est aut J'ormosinr (43). La suburbicaires , et publia un ou-


lettre où Erasme parle ainsi est , vrage contre celui qu'un anony-
datée du 3i d'août i524. me {b) avait composé là-dessus
(K) // at>ail un frère.... plus grand
en faveur des protestans *. Un
maître que lui en l'art de dissimuler. ]
Erasme qui nous apprend cette par-
,
volume de ses vers sortit de des-
ticularité ajoute que ce frère était
,
sous la presse , et fut suivi d'une
en cela beaucoup plus dangereux qu'A- apologie de l'Adonis du cavalier
léandre, qui ne savait pas si bien ca-
Marin contre les rudes atta-
,
cher ses desseins. Rapportons ses pro-
pres termes Uabet J'ralrem apud Leo-
:
ques du cavalier Stiliani. Ur-
diens. hoc perniciosiorem, quod omnia bain VIII lui témoigna avanta-
potest dissimulare, id quod non potest geusement son estime car il tra- ;

Aleander (44)-
vailla lui-même à le tirer du ser-
(43) Epistola IV libri XXI ,
pag. io65. Vitle vice du cardinal Bandini , pour
eliam pag. 8i4.
(44) Erasmi Epistola LI libri XX, pag. loii. l'attacher à celui des Barberins ;

de sorte qu'AIéandre devint secré-


ALÉANDRE (Jérôme), de la taire du cardinal François Bar-
même famille que le précédent berin neveu de ce pape. Il fut
,

(a) , et petit-fils maternel de Jé- du voyage de France lorsque ce ,

rôme Amalthée, a été un des sa- cardinal y alla avec le caractère


vans du XVI P. siècle. Dès qu'il de légat à lalere. Il ne succom-
eut quitté leFrioul, son pays na- ba point aux fatigues de ce long
tal jîour aller à Rome , il trou-
,
voyage il les soutint courageu-
:

va chez le cardinal Octave Ban- sement il s'en tira fort bien ,


;

dini un emploi de secrétaire , malgré la délicatesse de son tem-


qu'il remplit avec honneur pen- pérament et sa petite santé. Il
dant près de vingt ans. Il avait n'eut pas la même force à l'égard
commence de fort bonne heure à de la bonne chère. Il était con-
subir les hasards de l'impression ;
venu quelques-uns de ses
a'.ec
car à peine avait-il reçu ses de- intimes amis qu'ils se régale-
grés de jurisconsulte, qu'il avait raient tour à tour de trois en
mis au jour un Comnienlaire .lur trois jours il ne pouvait s'em-
:

les Instiliites de Caïus. Il ne lais- pêcher en présence de tant de


,

sa point engourdir sa plume à (6) C'étaitSaumaise.


* Joly remarque que cet anonyme n'était
{a\ On en appelant l'autre
les distingue, point Saumaise mais Jacques Godefroj ,
,

Aleander Senior, et celui-ci Aleandcr Junior. dont l'oiH'ragc parut en i()i^.


.

ALÉANDRE. 429
bons mets de manger plus qu'il
,
5e piquent d'éloquence, je trouve me
tres-ignorant ; car je n'y entends rien.
ne fallait eu égard à un estomac
,
Qu il y a peu il'auteurs latins aujour-
aussi débile que le sien c'est ; d'hui auxquels on puisse faire ce com-
pourquoi il tomba malade et ne pliment Je ne parle point de ceux
!

qui écrivent en style de chancellerie,


put guérir de sa maladie (c). Le
ou de scolastique je parle de ceu.x :
cardinal son maître lui fit faire qui écrivent en orateurs, et qui tra-
de magnifiques funérailles à l'a- vaillent leiirs phrases. Ils ne sont pro-
cadémie des Humoristes et les ,
pres la plnpart du temps qu'à morti-
académiciens ses confrères por- présomption de leurs lecteurs ,
tier la
qui se trouvent à tout moment ac-
tèrent son corps au sépulcre {d). crochés par quelque allusion ou par ,

Gaspar de Siméonibus y pronon- quelque métaphore exprimée si con-


ça l'oraison funèbre, le 3i de dé- fusément, qu'ils n'y voient goutte. Le
cembre i63i. Elle fut imprimée mal est qu on ne mortifie guère les
lecteurs par ce moyen vu que l'a- ,
à Paris , l'an i636. Aléandre avait mour-propre les engage à
rejeter la
une manière d'écrire si nette et cause de ces ténèbres non pas sur ,

si dégagée que le compliment ,


leur ignorance mais sur le galima-
,

qu'un de ses amis lui en fit mé- tias de l'auteur. Quoi qu'il en soit ,
je m'imagine qu'on sera bien aise de
rite une réflexion (B). voir ici la jolie pensée de Nicius Ery-
(c) M. Jugem. sur les Poët., niim.
Bailltt, thrœus en original Scnbendi ejusdem :

I ^20, et Witte, dans son Diarium Biograph., ratio tuni in soluld oralione tum in
II'. part. pag. l\o , mettent sa mort à l'an
, versibus adeô erat pura, adeb elegans,
l63l. Witte le nomme Alexander. adeà perspicua, ut sœpèex meaudiret,
id) Tiré de Nicius Erythnrus Pinacoth. ,
tum deniîim me mihimet doclum eru-
/. f^o_/ez aussi Allalius in Apibus Urbanis,
ditumque videri , ciim sua legerem ;
pag. 123, 124 '25. 1
ciim aiiteni in alioruni scripta qui se ,

expliqua des Antiques. éloquentes dici ve lient incurrereni


fA) // ]
,

C'étaient deux marbres, une table, tum plané me inJoctuin omniumque


et une statue. La table contenait la
rerum rudem agnosccre , eo quod vcr-
figure et les symboles du soleil la
biim prorsiis in illis nuUum inlelli-
;

statue e'tait entoure'e d'une ceinture gerem (2). Cela devait lui être un
toute pleine de gravures. Voici le motif puissant, pour ne laisser nulle
titre de l'ouvrage d'Aléandre Expli- :
obscurité dans ses éloges, et néan-
cettioantiquœ tabulœ niarmoreœ snlis moins on y en trouve. Quelques-uns
effigie symbolisque exsculptœ : Ex- ne voient pas qu'il ait exprimé clai-
plicatio sigitlorum zonce i^eterent sta- rement, si ce fut à Rome ou à Paris
tuant Tiiarnioreani cingentis. C'est un 3ue la bonne chère fut fatale à Aléan-
re ils croient que ce fut à Çaris (3)
in-quarto iraprimii à Rome, l'an 1616, :

et à Paris, l'an 1617 *. Je n° doute Pour moi, je ne doute point du con-


point qu'il ne soit entre' par-là dans traire * les conventions de se régaler
:

le commerce du père Morin. 11 paraît tour à tour deux ou trois fois la se-
par le livre intitulé, Ecc/esiœ Orie/i- maine sentent mieux des gens qui
talis Antiquitates (i) qu'ils s'écri- sont en repos chez eux, que des voya-
,

vaient quelquefois. geurs. Outre que le voyage que le ,

(B) Sa
nianièred' écrire lui attira un légat François Barberiu tit en France
compliment. ..quime'rite une reyiexion.}
{2) Nicii Erythrœt Pinacolt. / pag. 46.
Nicius Erythraeus lui disait souvent :
,

(3) forei les Jugemens des Savans sur


Lorsque je lis vos ouvrages , je me Poêles , tom. IV ,num. 1420 pag. 54-
les

trouve un habile homme ; mais quand


,

* Baillée crorait que c'était de la tropbonne


je lis ceux des autres écrivains , qui chère faite aPans qu Aléandre mourut à
Rome. La Monnaie dans une note sur le
,
* Jofy explique que l'oputcule de 3 Aléaw .
n°. 1420 des Jugemens des Sav.iiis appuie ,

die est réimprimé dans le lom. IV des oeuvres l'opinion de Baillet contre celle de Bayle. C'est
du père Sirmond colonne 597 à 600. , aussi l'avis de Leclerc- et de Joty qui n'a pas
(i) Imprimé à Londres, l'an 1682, et à manqué cette occasion de relever le philosophe
Francfort, Van 163 j, iH-12. dfi lioUerdam.
,

43o ALEGAMBE.
Tan 1623, ne dura que peu de mois, dans ses voyages fut nommé par'
etqu'Aléandre ne mourul qu'en i63i *. l'empereur Ferdinand III à l'am-
* L,e Crescim Béni mft la mort de J. Aléan- bassade d'obédience auprès du
dre au 11 mars 1629. Celle date conte':te'e par
,

Xïicéron , esl confinnée , dit Jolr par Victo-


,
pape Urbain VIII. Il voulut
relli, à lafin^de son e'ioge du cardinal Ale'an-
avoir avec lui le père Alegambe.
dre , imprimé dès i63o.
Ainsi ce jésuite fit le voyage de
ALEGAMBE (Philippe), jé- Rome en qualité de confesseur
suite flamand naquit à'Bruxel-
, de l'ambassadeur. Quand cette
les le 11 de janvier iSpa. II étu-
, fonction fut finie , le généi-al des
dia les humanités dans son pays jésuites le retint auprès de lui
après quoi il s'en alla en Espa- pour son secrétaire des dépêches
pagne et entra chez le duc d'Os-
, latines qui regardaient l'Alle-
sune. Il le suivit en Sicile, lors- magne. Alegambe, ayant rempli
que ce duc y alla exercer la char- quatre ans de suite les devoirs de
ge de vice-roi. Se sentant une cette pénible fonction , fut con-
vocation à la vie religieuse , il traint de la quitter , à cause que
Palerme
prit l'habit de jésuite à l'application continuelle à écrire
le 7*. jour de septembre i6i3. Il lui affaiblissait trop la vue. On
fît son noviciat et son cours de lui donna alors la préfecture des
philosophie dans la même ville , choses spirituelles dans la maison
et ses études de théologie à Ro- professe , et la charge de confes-
me d'oîi il fut envoyé en Autri-
,
ser dans l'église , de quoi l'on as-
che , pour enseigner la philoso- sure qu'il s'acquitta admirable-
phie dans l'académie de Gratz. ment. Il mourut d'hj^dropisie à
Ayant rempli les devoirs de cette Rome, le 6*. jour de septembre
fonction au contentement de ses i652 {a). Il n'a pas fait beaucoup
maîtres , il fut avancé à la pro- de livres (A); niais il ne laisse -cas
fession en théologie scolastique ,de mériter l'éloge d'un très-bon
et promu solennellement au doc- auteur car la Bibliothèque des ;

torat l'an 162g. Sur ces entrefai-écrivains de son ordre est en son
tes , le prince d'Eggemberg , fa- genre un bon livre , et surpasse
vori de l'empereur Ferdinand II, de beaucoup tout ce qui avait
voulut faire voyager son fils et paru d'ouvrages de cette nature
,

lui donna un jésuite prudent et jusqu'à ce temps-là. Il fallut qu'il


docte pour confesseur dans ses employât une grande peine à ra-
voyages. Le père Alegambe fut masser les matériaux cela de- :

jugé propre à cet emploi : ainsi mande deux talens qui ne se


on le tira des écoles pour le faire trouvent guère ensemble beau- ,

voyager avec ce jeune seigneur. coup de patience et beaucoup


Il fut avec lui pendant cinq ans ,
d'ardeur. Il fallut ensuite met-
et vit l'Allemagne , la France , tre en ordre les mémoires ramas-
l'Espagne , le Portugal et l'Ita- sés et c'est ce qu'il y a de plus ;

lie. Etant de retour à Gratz , il pénible dans cette sorte d'ouvra-


y enseigna la théologie morale , ges, parce que l'on n'est plus sou-
et y fut le père spirituel de la
(«) Tiré de Sotuel Bibliotheca Scripto-
jeunesse. L'an i638 le jeune ,
,

rum Societalis Jesu Romœ i6j5, in-folio , ,


prince qu'il avait accompagné pag. 706, 707.
,,

ALEGAMBE. 43 1
tenu de l'avidité ardente avec la- Sotuel lui donne BihlioOieca Scrip~ :

toriim Socielatis Jesu , Ant\jerpiœ


quelle on recherche les matériaux
1643, in-folio; P'ita P. Joannis Car-
tju'on n'a pas encore. C'est à Ro- din Lusilani ex Societate Jesu Ro- , , ,

me qu'Alegambe travailla à dres- ritœ 1649, "1-12 IJeroës et f^icliniœ


, •

ser la Bibliothèque pour laquelle charitatis Societatis Jesu, Jioutœ.iG^S,


in-4° Mottes illustres et Gesta eorum ;
il avait recueilli tant de mémoi-
de Societate Jesu qui odiuni , in fidei
res (J)).
Elle fut imprimée à An- ab Uœreticis uel aliis occisi sunt Ro- ,

vers , l'an 1643. Il augmenta de niœ 1667, in-folio.


,

telle sorte ceque le jésuite Riba- (B) Il augmenta beaucoup la Biblio-


de son ordre, que le jésuite Ri-
deneira avait commencé (B) sur thèque
badeneira aidait commencée.^ Atin que
ce sujet , qu'au lieu que l'ouvra- le lecteur qui voudra savoir l'histoire
ge de ce dernier n'est qu'un fort de la Bibliothèque dont nous parlons
petit in-octavo le sien est un in- n'ait point la peine de passer d'un tome
,

à l'autre je dirai ici que Pierre Fiiba-


foliod'une raisonnable grandeur. ,

deneira commença en l'anne'e 1602 le


Nous rapporterons dans les re- Catalogue des Ecrii>ains jésuites. Son
marques le bien et le mal qu'on e'crit ne contenait que peu de feuilles j

en a dit (C). Il songeait à une il l'augmenta depuis il lui donna la j

forme de livre et le publia l'an 1608 ,


nouvelle édition et, pendant les
à Anvers. On le réimprima à Lyon ,
;

neuf années qu'il survécut à la l'année suivante avec quelques addi- ,

première , il recueillit beaucoup tions et corrections sur certaines cho-


de choses qui pouvaient servir ou ses qui n'avaient pas été bien con-
nues à l'auteur, touchant les jésuites
de corrections ou d'additions. Le
français. Le père Jules Nigroni s'a-
père Sotuel en a profité lui qui , perçut que cet ouvrage avait besoin
publia à Rome, l'an i6y5, une d'être retouché en beaucoup d'autres
nouvelle édition de cette Biblio- endroits , principalement à l'égard des
jésuites italiens : on lit donc une nou-
thèque (c). à An-
velle édition en l'année 161 3,
On ne peut nier qu'il n'y ait vers. Le père André Schott en prit
dans ce livre-là beaucoup d'au- soin elle fut notablement augmentée
:

teurs médiocres et beaucoup d'au- (i);mais c'était encore un ouvrage


bien défectueux et de là vint qu'A- :

teurs de la première volée mais ;


legambe s'engagea à le mettre en meil-
il y a des gens qui prétendent leur état, et à le rendre plus propre à
que, si l'on continue, il s'y trou- donner une idée avantageuse de l'é-
rudition de la compagnie. Il le publia
vera tme très-sensible dispropor-
l'année i643. 11 a été encore fort aug-
tion , c'est-à-dire que les grands menté par le jésuite Sotuel, dont l'é-
hommes seront incomparable- dition parut à Rome, Tan iG^Sj et il
ment plus rares dans la conti- faudra sans doute qu'on l'augmente
nuation que dans ce qiii a paru tout de nouveau , tant parce que la
société des jésuites fournit incessam-
jusqu'ici. Cela me donne lieu de
ment de nouveaux auteurs, que par-
communiquer au public ce qui ce qu'il est échappé plusieurs choses
se passa dans un entretien de au dernier continuateur qui pourront
quelques personnes de lettres rendre plus parfaite la Bibliothèque
,
de l'ordre. Le second tome de la Bi-
l'an 1697 (D). bliothèque romaine (2) nous apprend
que le jésuite Bonanni travaille au
(b) Sotuel ibid^
Catalogue desEcrii'ains de sa compa-
,

(c) Sotuel , ibid.

ti) Ex priefatione Mcgamhe.


(A) // n'a pas fait beaucoup de li- (2) Imprime à Borne Can i(x)2 , ;
fauteur
t'res.^ Voici tous ceux qne le jésuite s'npyelle Prosper Mandosio.
,

432 ALEGAMBE.
snie qui ont publié quelque chose
,
tromper avec lui , parce que non-seulc'
* sans confusion, et qu'il ne
depuis Tan 1675 nient il est

L'exactitude d'Alegambe est sans prend jamais un auteur pour un autre;


doute merveilleuse mais il ne laisse
j
mais encore en ce qu'il n'attribue point
pas d'y avoir encore dans son livre aux jésuites des li^'res qu'ils n'ont point
quelques péchés d'omission et de faits , et qu'il est exact et fidèle a re-
commission. Il n'a pas toujours mar- présenter ceux qui l'iennent féritable-
qué la première édition des livres ;
ment de la société. M. Baillet ajoute ,
ce qui est un défaut important, et que ce n'est pas tmemet/j'ocre/oua/zge...
qui rèo'ne dans toutes les compilations d'avoir eVite at/ec tant de soin un fice
qu'on a vues jusqu'ici. Personne ne s'est dans lequel on a uu tomber la pluspart
encore avisé de publier un recueil des autres réguliers qui ont écrit des
exact de toutes les éditions , et de Hommes illustres de leur ordre, et qui
marquer soigneusement la première, croyans faire honneur a leurs commu-
Gesner et ses continuateurs ont eu nautez en grossissant indifféremment
là-dessus une extrême négligence. Le et sans choix le nombre de leurs sa-

père Sotuel, voulant éviter le détail l'ans et de leurs saints, ont mis au

où Alegambe descend quelquefois un rang de leurs confrères quantité d'au-


peu trop, est tombé dans une trop leurs qui n'en furent jamais ; au lieu
grande sécheresse. H s'en faut bien qu'on n' en uoit presque pas un dans la
qu'il ne fût né pour ce travail autant Bibliothéquede la Société, qui n'ait été
qu'Alegambe. Les curieux, je parle jésuite ; qu^on n'y voit pas même les
même de ceux qui l'excusent sur les écrivains qui sont sortis de leur com-
ordres qu'il peut avoir reçus de ses pagnie ; comme Pa/y^re iWasion Gfls- ,

supérieurs par rapport aux écrivains par Scioppius*, Marc Antoine de Do~
anonymes ou pseudonymes, mettent minis Chrestien Franchen, etc.; on
,

en cela son ouvrage fort au-dessous que, si on les y voit, c'est seulement
du précédent, où l'on trouve la dé- par rapport aux livres qui ont précédé
couverte de tant d'écrivains cachés, leur sortie: que c'est ainsi qiie l'on y
(C) Nous rapporterons le bien et le iroave François de Macédo, Portugais,
mal qu'on a dit de sa Bibliothèque qui de jésuite sefit cordelier, et Claude
Jes;esMtte5.] M. Baillet nous fournira Dausquey Flamand , qui quitta la
,

de quoi commenter le texte de cette re- société pour prendre l'aumuse à Tour-
marque.Commençons parle beau côté. nai. Enfin, M. Baillet remarque que.

Il dit (3) que /a Bibliothèque des


selon l'auteur des Nouvelles de la Ké-
écriuains de la société.... est un grand publique des Lettres (5), Aleg^ambe a
recueil qui a surpassé de beaucoup Jort bien obseri^é le goût de notre siè-
tous ceux de cette nature , et qu'on le de, c' est-a-dire , de toutes les person-
doit considérer comme un des plus nés de bon sens ; que ce goût consiste à
achei^ez en ce genre que, selon Nicolas
: woir régner l'exactitude chronologique
Antoine (4) les jésuites ont fait voir
, dans tout ce qui a du rapport a l'his-
par ce travail combien ils sont curieux toire; que c'est ce qui a fait donner
et combien ils ont d'industrie pour les C approbation aux éloges d' Alegambe
choses qui les regardent et qu'ayant , qui marque partout le temps et le lieu
Idti sur les fondemens de Ribadeneira de la naissance des auteurs, Idge où
ils ont élevé ce grand édifice dont la , Us se sontfaits jésuites, leurs emplois,
beauté consiste particulièrement dans leurs principales actions , selon la suite
la justesse et la proportion de ses par- des temps , et que cet ordre a je ne
lies , et la gloire est due à
dont toute * Leclerc dit que jamais Scioppius n'a été
Alegambe écrivain si sûr et si juste ,
, jésuite.
qu'il ne faut point appréhender de se (5, Au mois de juillet 1684, "rt. F, ou il

condamne indirectement ceux qui se contentent


* JoIy du afoir vu le catalogue des manu- d'exprimer en belles phrases les qualite's d^un
scrits du père Bonanni, et qu'il n'y a pas un mot homme , sans faire connaître ni sa patrie , ni
sur cette continuation. En rex'anche , il parle sa famille ni ses dijfe'rens emplois; et oii d dit
,

d^un noui'eau continuateur qu'il ne nomme pas, nettement. Qu'on ne saurait lire sans dépit, et
et dont Vouvrage n'a pas paru. Barle , nu sans se plaindre de la négligence de Tliislorien ,

surplus , avait cite' son autorité. la Vie de plusieurs empereurs de Rome ; qui ne
(3) Baillel , Jugerarns des Savans , tom. II , nous apprend ni le lieu de leur naissance , ni
num. 112 pa)^. i3o. . leur famille, ni leur âge ni la maniire dont ils
,

(4) Piafat. Biblioth. Scriptor. Hispanic. s'élaient avancés.


ALEGAMBE. 433
sais quoi qui rei^iant extrêmement à de faux me'moires, que des personnes
l'esprit, ytu reste ,
poursuit Al. Baillet mal intentionnées lui envoyaient, a
{6) , comme la compagnie des jésuites traité d'hérétiques M. Alarion et
a été jusqu'à présent la plus suivante M. Servin et quelques autres magis-
,

de toutes les socitités régulières c'est- , trats illustres et bons catholiques. Le


à-dire, pour le moins la plus abondante second est qu'il a été trop indiscret de
,

en toutes sortes d'écrii^ains (^hors sur révéler certaines choses qu'il était très-
la médecine) ,
on doit juger par-là important à la société de tenir cachées
de l'ai'antage qu'on peut tirer de celte et assoupies, comme, par exemple,
lors-
riche Bibliothèque , qui est assez bien qu'il assure (7MerAmi)hithéâtre d'hon-
écrite, sans affectation de style parti- neur {'^),fait contre l'autorité royale
culier et sans ornement trop recher- par un nommé Bonarscius, est d'un
chés.... disposée dans une très-belle célèbre jésuite , contre l'assurance que
méthode et embellie d'un très-grand
, le père Colon avait donme du con-
nombre de tables très-laborieuses et traire au roi Henri-le-Grand ; et que
très-utiles. Voilà pour le bien pas- ;
d'autres livres , faits contre l'épis-
sons au mal. copat et la hiérarchie en général et
M. Baillet dit (7) que commeles corps contre le clergé de France et la
les mieux jaits ne sont pas toujours Sorbonne en particulier, ont été com-
exempts de taches et de défauts ,
posés par des pères de la société
quand leur beauté ne consiste que dans quoique les principaux d'entre les
la tadle et dans la proportion des par- jésuites de France , qui gouvernaient
ties, on ne sera pas surpris d'ap- les maisons de Pari> , ayant été
prendre que cette belle Bibliothèque a appelés pour cet effet , eussent pro-
rencontré ses censeurs comme les au- ,
testé, même par écrit signé de leur
tres que les uns ont cru y trouver un
: main, que les jésuites n'étaient pas
peu de cet amour de société qui fait ,
les auteurs de ces libelles. M. Baillet
qu'on ne repre'sente presque jamais ajoute, que Sotuel a été plus discret
les e'crivains que par le bel endroit; qu' Alegambe en ce point : car on ne
qu'ils ajoutent qu'en effet on n'a- lit pas dans son édition lef écrits du

perçoit dans tout ce gros i'olume que faux Smith, et du faux Of-Jesu, qui
des éloges, et que, parmi une si ont causé tant de scandale non plus ;

grande multitude d'auteurs et de que les livres de Guimenius de Ver- ,

lii^res, on ne uoit pas que l'A'e- nant*c?e /'Apologiste des casuistes :


gambe et le Sotuel y en recon- et il a eu soin même de nous avertir par
naissent un seul qui soit mauvais si ,
avance que son silence à l'égard de ces
ce n'est peut-être ceux qui ont été mis sortes de livres devait passer pour un
à l'inquisition ou à /'Index que désaveu et une secrète condamnation
;

d'autres ont encore remarqué qu'il qu'en fait la société. Mais on ne


n'y a presque pas un écrivain dans peut nier d'ailleurs qu'il n'y ait
toute cette Bibliothèque , qu'on ne laissé les fautes d' Alegambe en beau-
nous dépeigne comme un saint. H est coup d'autres endroits , et que son
vrai que les personnes raisonnables édition ne soit moins exacte et moins
doivent être satisfaites de voir à la belle que celle d' Alegambe. Voyez
tête et à la fin du livre une solen- la remarque précédente, à la fin. Je
nelle protestation qu'on ne prétend
,
toucherai ci-dessous, à la fin de la
pas être garant de ce qu'on avance remarque (C) de l'article Annat, un
sur la sainteté et les vertus que ion petit défaut de cette Bibliothèque.
attribue à ses confrères , non plus (Z)) Je remarquerai, au sujet de
que sur les autres élogrs qu'on leur a cette Bibliothèque, ce qui se passa
donnés. Il est plus difficile selon , (*) Ce livre est attribué au jésuite Carolus
M. Baillet (8) de bien répondre à
, Scriboniu' d'Anvers dans le catalogue de Riba»
deneira, Lyon in-S" , chez Piltehotte et An-
deux autres points d'accusation. Le , ;

vers, exOJjîcmd Planùniand, it>i3. /n-8°. Re»«


premier, est qu Alegambe, trompe' par CRIT.
* Si, Leclerc, Sotuel n'a point parle du
du
(6) Baillet Jugemens des Savans , tom. II
,
, livre publié sous le faux nom de Sieur de Ver-
num. 112, pag. iB^.
nant , cesi que ce livre n'est pas d'un jésuite ,
(7) L'a même, pag. i33. mais d'un carme de la re'forme de Bretagne ,
(8) Baillet, Jugemens des Savans , tom. II ,
appelé' dans le monde Bonaventure d'Hérédie,
pag. j35. el dans la religion Bonaventure de Sainte-Anne

TOME I. 28
,, ,,,

434 ALEGAMBE.
dans un entretien de quelques per- qui est le sujet unique de ce que
sonnes de lettres , l'an 1697.] Quelques vous appelez décadence de l'érudi-
messieurs, qui étaient venus à Delft, i)
tion. L'étude de la critique est
avec les plénipotentiaires de France » tombée 5 on s'est tourné vers la
se trouvèrent un jour avec des Fran- > justesse du raisonnement (9) ; on a
çais réfugiés et avec des eens du
, ) cultivé l'esprit beaucoup plus qiie
pays; et, selon la coutume des gens > la mémoire j on a voulu penser dé-
de lettres, ils parlèrent fort de livres licatement et s'exprimer poliment.
,

et de savans. Ils convinrent presque > Cette application ne fait pas pro-
tous de la décadence de l'érudition , duire de ces gros volumes qui im-
et ils remarquèrent plus d'une fois posent au public , et qui élèvent
avec un grand air de joie, que la aux grandes réputations mais ;

société des jésuites n'a presque plus réellement , elle fait naître plus de
aujourd'hui d'habiles gens. Les Bel- lumières et une habileté plus
,

larmins les Sirmonds


, les Petaus , ,
estimable que le grand savoir des
ajoutaient-ils, n'ont point laissé de suc- grammairiens ou des philologues.
cesseurs leurs places et celles de plu-
: , Les jésuites ont suivi ce nouveau
sieurs autres sujets moins illustres, sont goût, et voilà pourquoi leurs savans
encore traçantes. M.*** fut presque le ne sont pas de la même trempe que
seul qui n'applaudit pas à ce reproche, ceux d'autrefois. Avez-vous pris
et qui pria la compagnie déconsidérer garde comme moi, continua-l-il
que ceux qui se plaisent à semer par- > au nombre considérable de gens
tout de tels discoui's pèchent double- illustres qui se trouvent présente-
ment « car, en premier lieu, dit-il,
;
ment dans leur collège de Paris ?
') on touche en deux mots ce qui Le père Benier est si consommé
» concerne les autres ordres et les , dans les langues que tous les étran-
» autres communautés , et on s'arrête gers d'Europe et d'Asie vont le
y> beaucoup sur celle-là. Cette accep- chercher, et converser avec lui,
j) tion de personnes est très-inique. comme s'il était de leur nation.
» Les universités de France ont-elles Peut-on voir une plus vaste litté-
» des professeurs en médecine qui rature que celle du père Hardouin ?
» fassent autant de bruit que les Fer- Le père Commire n'est-il pas un
» nels , et les Sylvius ? ou des pro- des plus grands poètes latins qui
» fesseurs en jurisprudence qui ap- soient aujourd'hui au monde ? Où
» prochent des Doneaux,des Duarens, est l'homme qui pour le français ,

» des Hotmans, et des Cujas ? Mon- et pour le bon goût de la compo-


» trez-nous, si vous pouvez, dans le sition , surpasse le père Bouhours j
M parti protestant un Casaubon , un
, ou, en fait d'humanités, le père
3) Scaliger, un Saumaise. Montrez- Jouvency; ou, en beau latin, le
5) nous en Hollande un Grotius, un père de la Beaune qui vient de ,

» Heinsius, un Vossius. Ces gens-là donner les œuvres du père Sir-


5) ne sont-ils point morts sans laisser mond ? Y
en France de meil- a-t-il
3) de successeurs ? Ont-ils laissé des plumes que
le père le Tellier,
leures
3' places qui soient remplies ? Disons le père Daniel, le père Doucin, etc. ?
)) donc que le défaut que vous af- Je vous en nomme quelques-uns;
» fectez d'approprier aux jésuites , mais c'est sans prétendre faire tort
3> est commun à tous les partis, et à à plusieui's autres que je ne vous ,

» toutes les communautés de l'Eu- nomme pas. » Voilà quel fut le dis-
5) rope c'est le défaut du siècle, et cours de M.***, si la personne à qui
:

» non pas celui de leur compagnie, j ai ouï parler de cette conversation


M N'allez pas croire », continua-t-il, me l'a rapporté fidèlement. Que l'on
et ce fut sa seconde réflexion « que y fasse telles réflexions que l'on
,

)> je prétende que la portion du


XVII*. voudra.
)) siècle , dans laquelle nous avons
i> vécu (9) F^uj'ei ta remarque ( D ) de Varlicle
soit inférieure à l'autre por-
,
ÂconCE.
)) tion, ou au siècle précédent. Je
j> crois au contraire que , tout bien
5) compté, elle doit avoir l'avantage. ALES ( Alexandre ) , en latin
i> et que c'est le changement de goût Alesius , théologien célèbre de
. ,

A LES. 4'.5

laconfession d'Augsbourg, et au- de ceux qui paraissaient les moins


teur de plusieurs livres (a), était orthodoxes. C'est ainsi qu'en 56o 1

né à Edimbourg , en Ecosse , le il soutint le dogme de George

23 d'avril i5oo. 11 des progrès


fit Major touchant la nécessité des
admirables dans bonnes œuvres (C). J'oubliais de
la théologie sco-
lasticpie mit de bonne dire que le changement qui se fit
, et il se
heure sur les rangs, afin de rom- en Angleterre par rapport à la
pre une lance avec Luther. C'é- religion en suite du mariage de
tait alors la controverse à la mo- Henri \'III avec Anne de Bou-
de, et le grand champ de bataille len, fut cause qu'Aies alla à Lon-
oix les auteurs jeunes et vieux dres en i535. Il y fut fort con-
cherchaient à donner des preu- sidéré par Crammer, archevêque
ves de leur mérite. Il eut sa part de Cantorbéri par Latimer et ;

peu après à la dispute verbale que par Thomas Cromwel qui étaient ,

Patricius Hamilton eut à soute- alors en grand crédit auprès du


nir contre les ecclésiastiques (A), roi, et il enseigna même publi-
pour la nouvelle créance qu'on quement. La chute de ces favoris
lui avait fait goûter à Marpourg. l'obligea de retourner en Alle-
Il tâcha de le ramener au catho- magne oii l'électeur de Brande- ,

licisme mais il ne put rien ga- bourg le fit professeur en théo-


;

gner sur lui et il ne fit qu'en- logie à Francfort sur l'Oder, l'an
,

trer en doute lui-même sur sa 1540. Aies y eut une querelle


propre religion par les discours deux ans après sur la question ,
, ,

de ce gentilhomme et plus en- si le magistral peut et doit pu-


,

core par la constance qu'il le vit nir la paillardise (D) ? Il était


faire paraître sur le bûcher oii pour l'affirmative avec Mélanch- ,

David Béton, archevêque de Saint- thon. Je ne sais s'il trouva mau-


André le fit mourir. Les doutes vais qu'on différât à prononcer
,

de notre Aies n'auraient eu peut- sur cette dispute et si ce mécon- ,

être aucune suite si on l'eût lais- tentement fut cause qu'il sortit
,

sé jouir en repos du canonicat de Francfort d'une manière pré-


qu'il possédait dans l'église mé— cipitée mais il est certain que la ;

tropolitainede Saint-André mais cour de Brandebourg se plaignit ;

on le persécuta avec tant de vio- de lui et qu'elle écrivit à l'uni- ,

lence ,
qu'il fut contraint de se versité de Wittemberg pour le ,

retirer en Allemagne (B) où il faire châtier. L'attachement qu'il


,

acquit enfin une plénitude de lu- avait pour Mélanchthon avait fait
mière. Il flotta d'abord un peu croire qu'il s'était retiré à Wit-
entre les deux religions comme temberg (E) cependant il avait
, ;

on le peut voir par ses réponses mieux aimé se rendre à Leipsick,


à Cochleus : mais au bout du d'où il i-efusa en i543
,
une , ,

compte il embrassa le luthéra- chaire de professeur dans l'aca-


,

nisme et il y persévéra jusqu'à démie qu'Albert duc de Prusse,


, ,

sa mort. II est vrai que dans les voulait ériger à Konisberg, et qui
divers partis qui s'y formèrent fut érigée l'année suivante. On
il se rangea quelquefois du côté ne sait pas bien si dès lors il avait
(a) Voyez la remarque 'C" une profession dans l'université
, ,,

436 AL ES.
de Leipsick ,
seulement on de cet aveu, le traita de méchant
ou si

espérer celle de théo-


homme quand il le vit son accu- ,
lui faisait et le cita devant le sateur, trône de
logie, qu'il exerça ensuite jusqu'à Dieu. Ces mots le troublèrent de telle
sa mort ,arrivée le 1 7 mars 1 565 sorte, qu'il en perdit le jugement et

Il avait été préservé de la qu'il mourut fou quelque temps


(F).
(3). (4), après Aies rapporte touchant
mort par miracle dans sa jeu- le supplice de Patricius Hamilton
nesse (G). L'estime et l'autorité bien des choses, que Rabus a insérées
où il était se peuvent connaître dans son Histoire allemande des mar-
par le grand nombre de confé- tyrs.
(B) On le persécuta ai^ec tant de
rences où il assista (H). Il s'était t'iolence qu'il fut contraint
de se re-
,

marié avec une Anglaise, dont il tirer en Allemagne.'] Cette persécu-


eut deux filles et un fils. Il ne tion lui fut suscitée à cause qu'il avait
quand fortetnent prêché devant un synode
lui restait qu'une fille il
provincial, en iSag, contre les prê-
mourut. Ceci a été extrait d'une tres fornicateurs. Le prévôt de Saint-
harangue de Jacques Thomasius André, dont les commerces impudi-
professeur à Leipsick imprimée ,
ques étaient connus de tout le monde,
se reconnut à ce sermon, et s'ima-
avec plusieurs autres à Leipsick ,
gina qu'on l'avait voulu mettre en
l'an i683 , Tout ce qu'il
in-8". spectacle à tout l'auditoire. 11 résolut
dit est accompagné de citations. première occasion j
de s'en venger à la

Je n'ai pas cru devoir les copier : et comme


d'un tempérament il était
mille fois plus propre à un soldat qu'à
ceux qui voudront aller aux sour- un chanoine, il ne choisit
que des ma-
ces trouveront très-facilement la nières violentes. Ayaat su que tout
harangue qui les indique. le chapitre s'était assemblé pour en-
voyer porter des plaintes contre lui
(A) Il eut part à la dispute de au roi Jacques V il se rendit à l'as- ,

Patricius Hatiiilton ai^ec les ecclé- semblée avec des gens bien armés
siastiques.} Bèze a fait en peu de et ordonna qu'on lui saisît Aies qui ,

mots l'éloge de ce martyr protestant, lui représentait de modérer sa colère :

qui était d'une famille alliée aux rois il mit même l'épée à la main pour
d'Ecosse. Il met son martyre à l'an répondre à cette juste remontrance.
i53o (1). Buchanan le met à Tannée Ce pauvre chanoine fut saisi de tant
iSaS (2), et lui donne pour père le de peur qu'il se jeta aux pieds du ,

frère du comte d'Aran et pour mère prévôt, et lui demanda la vie fort
,

la sœur du duc d'Albigni. Il re- humblement. Il en fut quitte pour


marque que peu après son supplice , un coup de pied sur la poitrine , dont
,

la mort d'un dominicain qui avait il demeura quelque temps évanoui j


,

été son délateur consterna fort les après quoi il fut conduit en prison.
,

esprits. Ce dominicain s'appelait Tous les autres chanoines y furent


Alexandre Cambel. C'était un jeune aussi conduits ^ mais le roi ayant su ,

homme qui avait beaucoup de la chose les fît mettre en liberté. Il ,

génie, et beaucoup d'érudition. Il n'y eut qu'Aies qui ne fut point


avait souvent discouru avec Ha- élargi car au contraire, on le mit
, j ,

milton sur l'interprétation de l'Ecri- dans un cachot épouvantable où il ,

ture, et lui avait avoué qu'il recon- demeura vingt jours. Sa liberté ne fut
naissait pour vraies la plupart des pas de longue durée. 11 n'avait pas
doctrines qui passaient alors pour cru devoir taire aux magistrats le
paradoxes. Hamilton se souvenant mal qu'il avait souffert là-dessus , le
, :

prévôt, qui lui avait défendu de le leur


(i) Beza in Iconibiis.
dire le fait remettre en prison
,
, et ,

(2) Louis Rabus au livre


, IV de Z'Hisloire
représente à l'archevêque que c'é-
des Martyrs; Budœus, 6«,Vot.TO^. pag. 38; Hon-
dorf, Prompt, paj. 64; Ju5tu5, de Academiis, p. (3) Buchanan. Ker. Scolicarum lib. XIV.
45, le meiteni comme Buchanan. ^ores Jacobi (4) Exposit. in Psalm. XXXFII, folio 1G4.
SrUomasii Oratiou. de Alexandre Âlesio , p. 307. F'ojei aussi sa Réponse à Cochleus, pag. t).
, ,

ALES. 437
lait im homme
qui avait fait éclater dit Thomasius (6) inler ipsum et
,

son herësie dans le sermon synodal alium quendam exorla esset contro-
et qui méritait cette peine. Il se fiicha l'ersiade quœstlone , possilne ac de-
tellement de ce que pendant un ,
beat magistratus polilicus scortalio-
voyage qu'il avait fait , on avait mis nem piinire? l'eramque Melancliihonis
Aies hors de prison , qu'il voulait à calcula approbalam (*') , defendente
toute force l'y renvoyer, sans lui pei-- ^lesio, ndiilominùs hujus dUpiitatio-
mettre d'achever une messe com- nis decisio juberetur dijjerri
offensas,
:

mencée. Mais enfin les prières des , ut apparet, liâc bonce causœ pi ocrasli-
chanoines le fléchirent il attendit : natione Alesius, non exspectato Prin-
jusqu'à la fin de la messe à le ren- cipis adi'entu , discessit {*'). L'indi-
Aoyer en prison. Or, comme on sa- gnation ne sied pas mal dans un tel
vait qu'il le ferait mettre au cachot cas à un professeur en théologie qui
dès le lendemain, on conseilla au pri- avait vu la naissance de la réforma-
sonnier de prendre la fuite toute la tion , et qui devait naturellement es-
nuit, et d'abandonner rÉcosse. 11 crut pérer qu'il ne vivrait pas assez pour-
ce conseil et s'en alla en Allemagne
, voir revenir la morale au premier re-
,

l'an i532 (5). lâchement. Rien ne pouvait faire plus


(C) // soutint le dogme de George d'honneur à la religion protestante
Major touchant la nécessité des bon- que la sévérité des maximes qui se
nés oeuvres. ] Le titre de son écrit est: rapportent à la chasteté ; car Tobser-
De IVecessitate et Merito bonorum vation de ces maximes est le triomnhe
Operum Dispulatio proposita in celé- le plus malaisé à obtenir sur la nature,
bri Academid Lipsicâ ad xxix diem , et celui qui peut le mieux témoigner
nofeinb. i56o. Cette dispute est la que l'on tient à Dieu par les liaisons
cinquième inter Anti - Tapperianas ; réciproques de sa protection et de son
et voilà un Antl à ajouter au recueil amour. C'était donc un grand sujet de
de M. Baillet. Pour n'en faire pas à scandale que, dès l'an ih^i, un théo-
deux fois rapportons ici les titres de
, logien protestant, quisoutenaitqueles
ses principaux ouvrages Commenta- : magistrats peuvent et doivent punir
rii in Ei^angeliuni Johannis , et in les fornicateurs , trouvât des opposi-
utramque Epistolam ad Tiniotheum ; tions , et y succombât en quelque ma-
Expositio in Psalmos Dauidis De ; nière. Aujourd'hui que l'on est tout
Justificatinne contra Osiandrum De
, ; accoutumé de ce crime,
à la tolérance
Sanctd Trinitate cum Confutatione, personne presque ne s'en offense. Un
erroris f^alentini Gentilis ; Responsio fort honnête homme m'a assuré depuis
ad triginta et duos Articulas Theo- peu, que les magistrats de Strasbourg
logorum Louaniensium etc. , ont une telle indulgence pour une
(D) // eut une querelle sur la ques- fille qui s'est laissé faire un enfant
tion si le magistrat peut et doit punir que, pourvu qu'elle leur vienne payer
la paillardise ? ] On entend assez que l amende à quoi ces sortes de fautes
cette dispute ne roulait point sur l'a- sont taxées ils lui donnent la réinté-
,

dultère mais sur la simple fornica-


, , grande ils la réhabilitent dans sa
tion ^ car encore que la punition de , première réputation ils établissent
l'adultère soit une chose aussi rare des peines contre tous ceux qui ose-
que ce crime-là est fréquent , elle raient à l'avenir lui faire le moindre
passe néanmoins pour légitime entre reproche. VoUà sans doute un privi-
les docteurs chrétiens. Aies n'avait lège plus singulier que celui de don-
donc à combattre qu'un antagoniste ner des lettres de réhabilitation aux ,

qui lui soutint que le magistrat ne familles qui ont dérogé à leur no-
peut ni ne doit punir la fornication. blesse; et s'il était permis de rire dans
On différa de prononcer sur cette dis- une matière de cette importance , on
pute ; et il y a beaucoup d'apparence dirait que les magistrats de Stras-
({u'Ales, indigné de ce délai , ne vou-
lut plus demeurer parmi des gtnis qui (6) Ibidem png. 3i8. ,

se déclaraient si favorables à l'impu- (*'} In Epist. Kesponsoriâ ad Academiam


Francofordianam, quatn leges part. I. Consii.
nité des fornicateurs. Cum A. iS^a ,
Tbeol. PhiL Melanchlhon., 5ii. pag.
;*=) Phil. MeLiDcl.. Fpisl. ?d Camerat., pas.
(5} Jaccb. Thomasius , in Orationc de Alesio.
,,

438 ALES.
bourg ont dû nommément penser vu que l'avantage de se pro-
stipuler la ,

sans la crainte d'aucun


conservation de ce privilège, lors- duire partout,
(fu'ils ont capitulé avec la
France et reproche ni d'aucune médisance, est
,

lorsqu'après la paix de Ryswyck ils


unbienquisurpassedebraucouplepré-
l'amende que on a payée ,
ont demandé le renouvellement de judice de
I

leur capitulation (7). Je sais bien que


qui n'est pas quelquefois la moitié du
l'on a fait en s'abandonnant.
par leur prérogative ils ne croient gain que
J'ai oui dire à des personnes bien
point faire mentir cet axiome certain
judicieuses, que l'usage d'une infinité
et incontestable de l'antiquité :

de pays est plutôt une récompense


Nulla reparabilii arte
qu'une peine de la fornication. Cet
Lœsa pudicilia est ; deperit Ma semel.
usage est que ceux qui se reconnais-
Ils ne prétendent point rétablir , sent les pères d'un bâtard soient con-
physiquement parlant; virginité per-
la damnés à le nourrir et à donner à la ,

due ce serait
: combattre le vrai sens de mère quelque somme de deniers. L'or-
mais, moralement parlant,
l'axiome 5 dre de pourvoir à la nourriture de
puisqu'ils
ils prétendent la restituer , l'enfant ne peut point passer pour une
prennent sous leur protection la renom- peine , puisque le droit naturel a éta-
mée d'une malhonnête fille, et qu'ils la bli clairement cette obligation. On ne
mettent à couvert de la médisance, ,de peut donc compter pour peine que
sorte qu'elle peut aller partout la tête l'^rgent qui est donné à la fille mais :

levée aussi sûrement qu'une honnête Q^fj-e que c'est un châtiment fort lé-
,

fdle. On dit même que l'efficace de ^^^ ^ l'égard du père c'est à propre- ,

leur sentence est telle que les filles mgj,t parler une récompense à l'égard
,

qui ont eu des enfans, et qui en payant de la mère. « Or, c'est une chose bien
l'amende ont obtenu la réhabilitation, » étrange disaient ces messieurs-là , ,

trouvent un mari aussi aisément et » que des tribunaux chrétiens adju-


,

presque aussi avantageusement , que gent des récompenses à des filles


)) ,

si elles n'avaient point fait cette faute. )) pour avoir perdu leur honneur en
Mais j'attribuerais plutôt cela au peu » scandalisant le public. » Quelqu'un
de délicatesse des hommes qui les
leur répliqua que la perte qu'elles ,
épousent , qu'à leur persuasion de avaient faite , qui leur rendait à l'a-
l'efficace de la sentence (8). Quoi qu'il
venir plus difficile la rencontre d'un
en soit nous pourrions dire à ceux mari demandait comme un acte de
,
,

qui supposent que le paiement d'une justice qu'on leur procurât quelque
amende répare les crimes de cette dédommagement « Non répondirent- . ,

nature ce que l'on a dit à ceux qui


, ils, ce n'est point un acte de justice,
))

s'imaginaient qu'un peu d'eau claire c'est une faveur c'est une grâce :
)) ,

effaçait la tache d'un homicide » la justice ne demande pas que des


:

Ah nimiuin faciles, qui tristia crimina cœdis » personnes qui ont souflért du dom-
!

Flumtned tolli passe puiatis aijud (9). » mage par la transgression volon-
» laire des lois de Dieu et des lois de
Ce même honnête homme m'assura w l'honneur humain clairement con-
que ce qu'il savait très-certainement des » nues obtiennent un dédommage- ,

coutumes de Strasbourg, ill'avait aussi » ment 5 et si le souverain voulait


oui dire touchant plusieurs autres en- » répandre des grâces , il devrait
droits de l'Allemagne. De telles lois eus- choisir des sujets plus dignes. Obli-
>)

sent mis bien en colère le théologien gerait-on les hommes à récompen-


))

dont je fais ici l'article; car tant s'en w ser une fille qui en commettant ,
,
faut que ce soit punir la fornication , un vol pour l'amour d'eux et à
)> ,

que c'est en quelque manière la récom- » leur instigation se serait estropiée, ,

(-) Voyez le Mercure liistoricjue du mois de » ou d'un bras ou d'une jambe ? Tant
,

juin 1698. w s'en faut qu'un juge lui fît obtenir


(8) On m'a assuré qu'ils sont les premiers h » quelque gratification qui réparât le
plaisanter , et h dire que ces sortes d'injures
n'emportent point la pièce. Ils croient appa-
)) dommage aurait souffert
qu'elle
ri-minent imiter ceux qui se raillent eux-mêmes i> qu'il la à des peines
condamnerait
pour énerver la raillerie des autres. Voyez le j) corporelles. Il arriverait la même
commencement de la remarque (B) de l'article
AgLsilads II.
» chose dans tous les cas punissables
(9) Ovltlius , Fastor. lib. II , vs. 45. j) où elle perdrait quelque membre
,

A LE S. 439
» en exécutant d'un hotn- les conseils fortifieraient la crainte de l'infamie
» nie. Il n'y a que la fornication qui au lieu de la faire évanouir : ils fe-
» soit exceptée de cette règle appe- : raient payer de grosses amendes ap-
» lons-la donc le délict commun et le plicables, non pas aux filles qui au-
1) cas prifiléffié , termes consacrez sé- raient forfait mais aux hôpitaux
, ils :

» parement à d'autres choses (lo) , et imprimeraient une flétrissure tant à ,

3> sur quoi il parut un livre à Paris , celui ({ui aurait été le tentateur qu'à
,

» l'an 1611 (11) ». (Quelqu'un alle'gua celle qui aurait mal résisté à la ten-
là-dessus ,
que les magistrats d'Am- tation et comme le déshonneur par
:

sterdam , fatigués de la multitude de mi les personnes de basse naissance


servantes qui accusaient de leur n'est pas un frein assez fort pour ar-
grossesse quelqu'un des fils de la mai- rêter une certaine coquetterie qui ,

son , avaient fait un règlement , que anime le tentateur, qui le prévient,


désormais on ne donnerait à ces qui lui assure le triomphe avec la der-
sortes de créatures que 25 florins , nière facilité, ils emploieraient une
moyennant quoi elles seraient obli- peine plus réelle et dont ils trouve-
,

gées de nourrir l'enfant qu ils avaient : raient aisément de bons moyens.


cru par-là mettre un frein à la dé- La discipline ecclésiastique est tom-
bauche car ils voyaient que le profit
]
bée à peu près dans le même relâche-
qu'elles retiraient de leur mauvaise ment. Il n y a que peu d'années (12)
conduite les engageait ou à faire des
, , que le précepteur d'un gentilhomme
avances, ou à succomber à la sollicita- s'attacha dans une ville de. à une . .

tion, et qu'en un mot, leur lasciveté jeune coquette , et qu'il en obtint


devait être privée de toute espérance bientôt tout ce qu'il voulut. Dès que
de gain et non pas encouragée par
, les parens eurent connu qu'elle était
l'espérance des sommes que les tribu- grosse , ils travaillèrent à lui faire
naux leur adjugeaient. Mais il y eut avoir pour mari ce galant-là. 11 fit le
des gens qui répondirent qu'il n'est rétif j car, outre que la facilité de sa
pas certain qu'on ait fait de telles lois conquête n'était pas un grand attrait
à Amsterdam, quoique le bruit s'en à aimer pour le sacrement , il ne
soit répandu dans les autres villes du croyait point être le seul qui eût
pays. Que cela soit vrai ou faux , il eu part au gâteau ni que l'enfant fût ,

est toujours certain que cela prouve son ouvrage plutôt que celui d'un
qu'on n'ignore pas que la conduite autre. Le seul moyen de venir à bout
ordinaire des tribunaux est trop fa- de lui fut la menace que s'il n'épou- ,

vorable à la fornication et qu'elle sait cette fille, il perdrait le bénéfice


,

excite beaucoup plus les filles à se dé- 3u'il avait en Angleterre. Il l'épousa
baucher qu'à se contenir ; et il pa- onc ; et , par ce moyen il conserva ,

raît clairement que les souverains , son bénéfice. Voilà comment la co-
qui font punir les transgresseurs du quetterie fut récompensée la coquet- :

Décalogue , ne se règlent point sur ce terie dis-je qui avait été poussée , ,

que Dieu est oflensé , mais sur le jusqu'à l'excès le plus scandaleux.
préjudice temporel de létat. C'est Que diraient les anciens pères , s'ils
pour cela qu'ils punissent les voleurs revenaient aujourd'hui au monde ?
et les homicides ; mais , parce que la Quel sujet n'auraient-ils pas de s'é-
fornication semble plus utile que pré- crier en jetant les yeux sur la face de
judiciable au bien temporel de l'état, l'église domus antiqua quant dis- : O ,

ils ne se soucient point de la punir, pari dominaris Domino 1 C'est la des-


et ils se conduisent d'une manière à tinée de toutes les religions , aussi
faire juger qu'ils ne sont pas fâchés bien que celle de tous les corps poli-
qu'on peuple leurs villes per fas et tiques , de se gâter en Aieillissant. Les
nefas. S'ils avaient à cœur la pratique hommes sont plus corrompus dans
de la loi de Dieu sur ce point-là , ils leur jeunesse que dans leur âge avan-
cé. Il en va tout autrement des répu-
(10) On appelle Délicî commua les fautes
i-Vun ecclésiastique qui soitt jugées par les tri- bliques. 11 n'est rien tel que les lois
^

bunaux de l'Eglise ; et Cas piivilégié les fautes naissantes et toutes neuves (i3). Les
d'un ecclésiastique ,
qui sont soumises à la ju-
ridiction se'culière. (12) On écrit ceci l'an i6g8.
(11) Il est compose' par Bénigne Mlllelot, (tS) f'oyez la remarquf (M) de l'article XïS-
conseiller au parlement de Dijon. TOBius, nu commencement.
44o ^^ ES.
lois sont comme pain et les œufs , vrir les nouvelles brèches les fautes
le
,

et le péché quotidien.
pan d'un di, owo d'un hora. L'ëtat courantes ,

florissant d'un code ( j'entends ici la


(E) L'attacliement qu'il avait pour
Melanchthon avait fait croire qu'il
pratique et l'observation ) est celui
Voyez la plainte d'un s'était retiré à Wiltemberi^.'] Mélanch-
de l'enfance.
dans sa CCXC*. lettre à Camera-
poète qui avait décrit quelques abus thon,
sait si Aies se défiait de son
du siècle d'Auguste; elle ressemble à rius ne
amit'ié. Dans la lettre CCLXXXVIII^ il
celle de Jésus-Cbrist, Du commence-
il n^ était pas ainsi (i4)
avoue qu'il avait remarqué en lui des
ment =

saillies et des boutades , TrcifctCôxouç


, ^on ità Bomuli
KOLi TTitpa.'Koyriu; op//*ç.
Prœscriplum, et inlonsi Catonis
Auspiciis ,
(F) Il mourut le \'] de mars i565.]
velerumque normd (i5).
Le Calendrier de Paul Eber marque
Par cet endroit-là les sectes et les qu'Aies mourut le 18 de mars i565,
, ,

communautés , etc. ressemblent à âgé de soixante-quinze ans. La pre-


,

l'homme qui n'est innocent qu'au


, mière faute est fort légère puisqu'elle ,

berceau et un peu après.


, n'est que d'un jour mais la seconde;

Notons qu'il y a encore quelques est de dix ans et ainsi elle est plus
;

pays protestans (i6) où l'on a gardé considérable. Aies écrivit lui -même,
quelques restes de sévérité contre la sur la matricule de l'université de
fornication , tant à l'égard des tilles Leipsick, qu'il était né l'an i5oo.
qu'à l'égard des hommes. Mais je suis Bucholcer (18; et Reusnerus (19) lui
sûr que notre Alexandre Aies en de- donnent tout autant de vie que Paul
manderait davantage. Que dirait -il Eber. Toute cette remarque a été
des autres pays ? prise de Thomasius. On eût pu re-
Ke finissons pas sans dire que les prendre Bucholcer en une autre chose ;
tribunaux , qui adjugent un profit c'est qu'il a dit qu'Aies vécut et en-
pécuniaire aux fornicatrices, ou qui seigna en Allemagne depuis son arri-
condamnent même à les épouser ceux vée à Wittemberg, c'est-à-dire, de-
qui les ont débauchées font cela pour ,
puis l'an i533.
éviter plusieurs inconvéniens; mais, (G) Il avait été préservé de la mort
quoi qu'il en soit ils fomentent par ,
par miracle dans sa jeunesse.^ Il dit
cette conduite les désordres de l'im- dans l'un de ses livres (20) qu'il se ,

pureté car chaque sentence qu'ils


; remet souvent en mémoire, mais non
prononcent sur ce point-là est un bien pas sans de grands frissons par tout le
réel pour une personne et un motif ,
corps , que, comme il roulait vers un.
d'espérance pour vingt autres. Chaque précipice, sur le sommet d'une très-
fille qui parvient au mariage par haute montagne , et qu'il était déjà
cette route, fait naître l'envie à plu- fort près de ce précipice , il se sentit
sieurs autres de tenter le même transporté dans un autre lieu, sans
moyen. On a compris cet abus en savoir par qui, ni comment ; ce qu'il
France : le nouveau Code n'y est pas attribue à la foi de ses parens * , et
aussi favorable que le vieux à cette non pas aux billets qu'il portait sur
espèce de filles qui profitent trop des soi , contenant quelques versets de
privilèges du mariage. C'est un sacre- saint Jean , selon la coutume des en-
ment qui a des vertus rétroactives, fans en ce temps-là.
et qui, comme celui de la pénitence, (H) // assisla a un grand nombre de
estune planche après le naufrage. Il conférences. ] Lorsque Mélanchthon
faitrentrer au port de l'honneur, il fut prié, en i555 par ceux de Nu-
,

répare les vieilles brèches il donne ,


renberg, de venir terminer les dis-
la qualitéde légitimes à des enfans qui
(18) Chronolog. , pag. 6i3.
ne la possédaient pas (17). Je ne dis
(19) Isagog. Hist. , pag. 636.
rien du voile épais dont il peut cou- (20) Epistola dediraloria Commentar. in Joan-
nem. Fide et prœfat. in alteram ad Tiino-
(i4) Evang. de S. Matthieu , chap. XïX ,
theum, apud Jacobum Thomasium , in Oratione
V. 8. de Alesio pag. 3o5.
,

(i5) Horat. Od. XV, lib. II, vs. lo. * Il e'iail important , dit Leclerc , de faire
(16) A Genève, et plus encore au canton de remarquer que le.r parens d' Aies e'iaient catho-
Berne, liques. Quel argument en faveur de VEglise
(17) Voyez la remarque { h ) de l'article romaine qu'un protestant reconnaissant le pou-
ASIOST». voir de la foi'.
,

ALEXANDER AB ALEXANDRO. 441


sensions disciples d'Andië
que les fut à cause de l'ignorance ou de
Osiander causaient daus leur ville(2 1 ), laméchanceté de ceux qui ren-
il amena avec lui Aies, qui tint fort
daient la justice , et qu'il aima
bien sa partie dans les disputes où Ton
entra {21). Mëlanchthon le connais- mieux vivre en repos que de
sait bien par cet endroit ; car il l'a- prendre beaucoup de peine à bien
vait déjà eu pour assesseur , en i554 , étudier la jurisprudence puis-
,
dans la conférence de Naumbourg ,
que cette peine ne servait de rien
où il s'agissait d'assoupir les troubles
tbëologiques de la Prusse. Caraera- contre la témérité d'un mauvais
rius à ce sujet donne un fort grand juge {b). Il avait vu à Rome bien
, ,

éloge à Aies Alexander Alesius pa- des exemples de ce désordre, le-


: ,

trid Scotus i^aldè caïus Phllippo ,


quel il cita à Raphaël Volater-
Melanchthoni thenlogicœ intelli- , rei
genlissimus , et arlijex excellens con- ran qui lui avait demandé la
,

gruentium disputationum , et fir dig- cause de sa retraite. Jl est un


nitate atque dnclrind exquisitâ pires- peu étrange que de ce grand
tans (23). 11 avait remarqué en un au-
tre lieu qui présidait
que Granvelle nombre d'hommes doctes qui vé-
,

à la conférence de de la part Worms ,


curent de sou temps ou qui ,

de Charles-Quint, en i54i ne voulut , ont fait l'éloge des savans de ce


point qu'Aies que l'électeur de Bran- , temps-là , il n'y en ait presque
debourg y avait envoyé, parlât Qui :

quldern et paratus erat et cupidus con- aucun qui fasse mention de lui
jflictùs sed huic obstitit jussum prœ-
• (D). Nous saurions très-peu de
sidis qui et Alesiuni ad pugnam in-
, chose de sa vie s'il n'en avait ,

structum sciret et talem adniinislra- ,


touché lui-même quelques parti-
tionem rei t^iciosani esse anlmadver-
cularités dans son ouvrage (c).
teret.
C'est là que nous appi-enons qu'il
(21) Camerar. in Vitâ Melancbtlionis. Thoma-
sius , Oratione de k\esio, pag. 32i. a été logé à Rome dans une mai-
(22) Beza, in Iconibus.
son où il revenait des esprits {d);
(28) Camerarius , in Vilâ Melancbth.
et ainsi voilà un témoin à citer
ALEXANDER AB ALEXAN- à nos incrédules un témoin
; ,

DRO (A) jurisconsulte napoli- ,


dis-je, qui se vante d'avoir vu, et
tain ,
qui avait beaucoup d'éru- qui raconte des singularités éton-
dition,a fleurivers la finduX\ ". nantes du spectre qui tourmen-
siècle au commencement du
, et tait cette maison. Il dit aussi
XVF(B). s'attacha au barreau Il qu'étant fort jeune il allait aux
avec ardeur premièreiuent à ,
leçons de Philelphe qui expli— ,

Naples , et puis à Rome {a) ;


quait à Rome les Questions Tuscu-
mais tout le temps qu'il pouvait lanes de Cicéron (e). On peut re-
dérober aux embarras des pro- cueillir du chapitre XXI du IV.
cès , il le consacrait à l'étude des livre qu'il était à Rome lorsque
,

belles-lettres et enfin il aban- ; Nicolas Perot et Domitius Calde-


donna entièrement le barreau rinus y faisaient des leçons pvi-
afin de mener avec les Muses une bliques sur Martial (E). Je ne
vie plus tranquille et plus agréa-
(ij Ibid. , lih. ri , cap. VII.
ble. Voici la raison qu'il allègue
(c) Genialium Dierum libii VI.
Intitulé
pourquoi il renonça à la profes- {d) Alex, ab Alex. Gen. Dier. lib. V,
sion d'avocat (C). Il dit que ce cap. XXIII.
(c) Eum ego adolescent ulus senein inter
(a) Alex. ab Alex- Gea. Dier. lib. II .
ca;teros coœvos meos colui el observavi. Ibid.
'ap. I. Itb. I, cap. XXIII.
,

442 ALEXANDEK AB ALEXANDRO.


sache point qu'il ait parlé de la que la traduction française que
charge de protonotaire du royau- Bernard de la Roche * en fit (k)
me de Naples, qu'on prétend qu'il ait été jamais imprimée. L'au-
a glorieusement exercée {f)- Je teur de la Bibliothèque Napoli-
ne sais point quand il mourut taine n'a nullement réussi dans ;

mais je sais qu'on l'enterra dans l'article de notre Alexander ^G) ;

le monastère des Olivets {g). Tout mais les additions de Léonard


le monde l'a blâmé de l'affecta- Nicodème sont très-curieuses sur
tion qu'il a témoignée de ne point ce sujet (H).
citer les auteurs qui lui fournis- Alciat croyait qu'Alexander
saient ce qu'il débite (h). Tira— ab Alexandro vivait encore l'an
queau a remédié à ce désordre iSai. Je donnerai ses paroles ,

par un docte Commentaire qui parce qu'elles contiennent le ju-


lut imprimé à Lyon en i587 (/'). gement qu'il faisait de cet écri-
On l'a réimprimé à Leide en deux vain (I).
volumes in-8°. l'an 1678 avec ,
* Ce personnage est ,
dit Joly le prési- ,
,

les notes de Denis Godefroi de dent de la Roche-Flavin. ,

Christophe Colérus et de Nico- {h) La Croix, du Maine pag. 476. ,

las Mercérus sur le même texte. ,


(A) Alexander ab Alexandro.^ Je
J'apprends de la Bibliothèque de lui donne son nom latin coname l'or- ,

Gesner que l'édition qu'on fit donnent nos grammairiens. Ceux


,

à Paris de cet ouvrage dJ Alexan- qui traduisent Alexandre d'Alexan-


drie (z) s'abusent. Notre auteur e'tait
der ab Alexandre l'an 1 532 d'une famille napolitaine dont le nom
, ,
,

était plus exacte que les autres était Alexandre. On prétend qu'elle ,

et que Gérard Morrhius de Cam- avait déjà produit des gens illustres,
pen qui la corrigea avait colla- comme M. Moréri le rapporte après
, ,
,

Lorenzo Crasso. Chacun sait la plai-


tionné aux originaux les endroits
santerie * de Balzac JV'y a-t-il pas :

que l'auteur avait pris d'autrui. eu dit-il (2), au royaume de Naples ,

Il avait donc collationné bien des un grammairien jurisconsulte qui ,

choses car è^esjours


les six livres appeler Ah^xAffOER ab Alexan-
s'est fait
;

dro ? £t se peut-il rien imaginer de


Géniaux ne sont presque que des
plus magnijique et de plus superbe
pièces de rapport. C'est un mé- que d'être deux fois Alexandre ,
que
lange d'une infinité de recueils d'afoir Alexandre pour son nom , et
concernant l'histoire et les cou- de l'auoir encore pour sa seigneu-
rie (3) ?
tumes des anciens Grecs et Ro- du XV^. siè-
(B) Il afleuri vers lafin
mains on y trouve aussi plu-
:
cle, etau commencement du Xf^l''. ]
sieurs questions de grammaire. Ce qui me fait parler ainsi est que ,

L'exactitude n'y est point dans notre auteur , en parlant des calami-
tés du royaume de Naples les a con- ,
sa perfection (F). Je ne crois pas
duites jusqu'à la mort de Frédéric ,
if) Panzir. de Claris Leg. Inlerp., lib. II,
cap. CXXII. (i) Simon Goulart l'a fait dans la version de
Philip. Camerarius.
{g) Leand. Albert. Descript. Ital,, p- 277.
* Leclcrc pense que ce n^est point plaisante-
(A) Barclaius, de RegDO , lib. VI cap. ; , V mais fausse idée, c'est-à-dire , ignorance
rie ,
CyprsEus, de Sponsal. , cap. XIII nuin. 61 ,
;
de Balzac.
Vossius, de Hist. Lat., pag. fiog Meilio- ;
Clirétieo.
(1) Bihac ,pre'face du Socrate
mius , de Vitâ Mœccnatis , pag. i38. , il eût fallu dire
(?,) Pour parler exactement
(() Soits le titre de Semestria in Gcnialiiiin
qu'Alexandre e'tait son nom de baptême et son
Dierum Alexandri ab Alexandre libros VI. nom de f'timdle. Une pareille chose .t'est lue era
C'est lin in-folio. On le reimprima à Franc- d'auiri-s personnes. Voyez Mollerns au Traite
Jort , en iSg^, in-folio. De Scriploribus Homonymis.
,. ,
,

ALEXANDER AB ALEXANDRO. 443


filsde Ferdinand P'. (4^ c'est-à-dire, , Alexandro qui marque la droiture ,

jusqu'à Tan i5o4i outre qu'il parle de son cœur (8). Un de ses amis,
de Jovien Pontan comme d'une per- , voyant qu'il ne poussait point sa for-
sonne qui n'est plus (5). Or Jovien , tune lui conseilla de se servir des
,

Pontan n'est mort qu'en l'année 1 5o5*' expédiens qui avaient si bien réussi
C'est à quoi n'ont pas pris garde ceux à tels et à tels qu'il lui nommait ^ c'é-
qui ont placé la mort de notre Alexan- taient toutes personnes que la faveur
der à l'an i494 en quoi M. More'ri ;
avait élevées aux honneurs et aux pré-
leur donne beaucoup plus de témoi- latures , malgré le mérite de leurs
gnages de son approbation , que de concurrens et qui étaient parvenues ,

son incertitude *'. à la faveur par des voies illégitimes.


(C) P^oici la raison qu'il allègue Notre auteur n'ignorait pas ces exem-
pourquoi il renonça à la proj'ession ples , et il en savait de pires. Il avait
d'at^ocat. ] Je crois que pour en mon- vu dans sa jeunesse un fort hon- , ,

trer toute la force je suis obligé de nête homme ,


savant et en latin et ,

la rapporter dans les propres termes en grec, qui n'ayant fait que lutter ,

de l'auteur. Quce cùm viderem dit- contre une extrême pauvreté pendant ,

il (6) palromsque contra t^im poten- qu'il se fiait à sa vertu et à sa science,


,

tiorum aut grattant nihil prœsidiiesse se résolut de tenter une autre voie :

nihil npis frustra nos in leguni con- il se jeta dans un si vilain métier
,

trofersiis et ediscendis tôt casuum i^a- qu'on n'oserait le nommer j et peu


rietatibusiam pensiculatè editis tan- , après , le voilà riche et puissant, et
tum laboris et l'igiliarum suscipere ,
pourvu de bons bénéfices : Eb vesaniœ
tantoque nos studio fatigari dicebam ,
processit ut coactus inopiâ obsccenis,

cùm ad ignai'issimi inipurissimique et libero homine indignis artihus vaca-


cujusque temerilateni , qui juri di- ret ( artihus non libet
quibus verb
cendo prœsideret queni leges i'irum ,
dicere piidendœ sunt, )
: itafœdœ et
bonum esse folunt , non cequo jure sed confectaque fuit sibi res ex sententid
ad gratiani et libidinem judicia Jerri , namque haud multo post et sacerdotio
decretaque legum tanto consilio édita et opibus auctus ajffluens et heatus ,

coni^elli et labefactari uiderem. Il fît tranquillissimè vitamegit(g). Mais ces


beaucoup mieux d'abandonner le bar- exemples n'ébranlèrent point notre
reau que d'imiter quelques autres avocat il aima mieux se contenter
:

avocats qui ayant perdu plusieurs


, , de sa médiocrité que de risquer sa ,

bonnes causes prennent le parti de ,


conscience : Longé igilur niulliimque
se charger des plus mauvaises. Je li- prœstat satihsque fuit uti ingénia ,

sais l'un de ces jours qu'un avocat meo vacuumque his molestiis modico
, ,

des plus fameux de ce siècle *' à civilique cultu contentum esse neque , ,

qui ses confrères demandaient pour- in ambitionem non necessariam in-


quoi il se chargeait de méchantes cau- currere qu'am bona animi si qua , ,

ses , leur répondit en riant que c'é- sibi homo studio et labore paravit ea
, ,

tait qu'il en aidait perdu quantité de turpi quœsiu pessimo exemplo


fœ-
bonnes. C'est une mauvaise excuse dare (lo). Le conseil qu'on lui don- ,

poursuit l'auteur un avocat qui , nait ressemble fort à celui-ci


:
,
:

après avoir examiné une cause la


Aude allquid brevibus Gjaris et carcere di~ ,

trouve insoutenable est obligé de l'a- gnum. ,

bandonner (7). J'ai trouvé un autre Si vis esse aliquis. Probitas laudalur et al-
endroit dans le livre â^Alexander ab get(ii).

C4) Alex, ab Alex. Gen. Dier. lib. III, cap. Il dédia son livre au duc d'Atri. Ce
-V^, subjîn. ,
png. '•j'iQ. duc était fort savant, comme nous le
C5) Id. ibid. , lib. I , cap. I.
dirons sous Aqcaviva.
' Leclerc , d'aprèx Paul Jove , Jtxe au mois
d'août i5o3 la mort de ce personnage. (Q) Ilnya presque aucun auteur de
*^ Le Duchat, diaprés la Bibl. latina de Fa- son temps qui fasse mention de lui. J
bricius , dit qu Alexander mourut à Home le 2
octobre i523, à soixante-deux ans. (8) Alex, ab Alex. Gen. Dier. lib. FI, cao.
(6) Id. ibid., Ub. VI, cap. VII. XVI.
*' Cet avocat était, dit Leclerc Bonaven-
, (9) Id. ibid.
tnre Fourcror. (10) Alex. ab. Alex. Gen. Dier. lib- VI ,
cap,
(7) Journal des Savans, 1690, pag. 3oi, édil. XVI.
ds Hollande. (11) Juven. Sat. / , vs. ^3.
,

444 ALEXANDER AB ALEXANDRO


Cependant, si nous en croyons M. Mo- donnent des fariorum re tranchent
rëri , tous les grands hommes de ce les Epîtres dedicatoires et les Pré-
siècle-là un George de Trebizonde
, faces (19). lis devraient tous faire ce ,

vm Théodore de Gaze un Domitius qu'on a fait dans la dernière édition


,

Calderinus un Ilermolaiis Barbarus


, de Diogène Laérce (20). Si on l'avait ,

un Philelphe un Pontanus etc. fait dans celle d^^Alexander ab ^lexan-


, ,

étaient ses amis et ses admirateurs. dro j'aurais pu donner plus de lu- ,

Tout ce que l'on peut recueillir du mière sur cet auteur et sur son livre.
livre même diAlexander ab ^lexan- (G) L'auteur de la Bibliothèque Na-
dro , est qu'il ouït en sa jeunesse les politaine n'a nullement réussi dans
leçons que Philelphe, déjà vieux , fai- l'articlede notre Alexander. ] Il s'est
sait à Rome (i'2J, et qu'il mangeait contenté de renvoyer ses lecteurs à
quelquefois avec plusieurs person- trois ou quatre autres livres (21)^ et
nes de lettres chez Jovianus Pontanus il n'a point su qu Alexander juris-
,

(i3), chez Hermolaiis Barbarus (i4j consultus Neapolitanus , auteur des


chez Sannazar (i5), chez Gabriel Alti- quatre Dissertations desquelles il don-
lius (16) , etc. 11 faut un fondement ne le titre (22) , n'est point différent
plus solide que celui-ci pour affirmer ,
à'' Alexander ab Alexandro ; de sorte

que certaines gens admirent certaines qu'il parle deux fois du même homme,
gens. Voyez la remarque suivante. sans savoir que ce ne sont pas deux
(E) // était a Rome lorsque IVicolas écrivains. Voici le titre des quatre
Pérot et Domitius Calderinus fai- Dissertations Alexandri,jurisconsulti
y :

JVeapolilani , Disserlaliones quatuor


saient des leçons publiques sur Mar-
tial. ] Voilà tout ce que l'on peut de rébus admirandis quœ in Italiâ nu-
recueillir de ce qu'il rapporte lou- per contigêre: id est, de Somniis quœ
chant Nicolas Pérot et Domitius Cal- à i>iris spectatœ Jidei prodita sunt ,
derinus j car pour cette grande fa- inibique de Laudibus Juniani Mail
miliarité, que Panzirole prétend qu'il Somniorum conjectoris ; de Umbra-
eut avec eux (17) , il la faut chercher rumjiguris etfalsis Imaginibus de :

quelque autre part et je ne sais s'il :


lllusionibus malorum dœmonum , qui
est possible d'en trouver les preuves. imaginibus homines delusére;
dit/ersis
Je ne ponte point que Panzirole n'ait de quibusdam jEdibus quœ Romce ,

dit cela à vue de pays , et sur la foi infâmes sunt , oh frequentissimos lé-
de sa mémoire , sans prendre garde mures et terrificas imagines quas
,
,

que la mémoire est un moule où les ob- aulhor ipse singulis ferè noctibus in
jets changent de forme très-aisément. urbe expertus est ; Romœ , in-l^°. ,

(F) L'exactitude de son ouvrage absque anno , nec apud quem. On n'a
n'est point dans sa perfection,'] J'aime marqué , ni le nom de 1 imprimeur ,
mieux le dire par le témoignage de ^^i l'année de l'impression. Nous vex-
" ^^ commentateurs , que de
l'un des
'
mon rons dans la remarque suivante que ,

chef. Voici donc ce que dit Nicolas ce sont des pièces qui ont été incor-
Mercerus Est profecto , mi Lino-
:
porées au volume des Jours Géniaux.
ceri (18) , uerum quod aïunt. Fuit (H) Les additions de Léonard I\i-
Alexander eruditus et multce lec-
v'ir codème , sont très-curieuses sur son
tionis : multa ad utilitatem publicani sujet. ] On y prouve qu' Alexander ab
scripsit eleganter , multa tamen , ut Alexandro est l'auteur des quatre Dis-
hominum est infirmitas , minîis ac- sertations ,
parce que la plupart des
curatè i^el menioriœ uitio t^el impru- ,
choses qu'elles contiennent se lisent
dentiâ lapsus. Quœ
lectoribus indicari dans les Jours Géniaux par exemple , :

magni interfuit. Je ne suis pas le seul ce qui concerne les louanges de Ju-
qui ti'ouve mauvais que ceux qui nous nianus Majus, elles présages des soa-

(12) Alex. abAlex. , l,b. I, cap. XXIII. (19) Voyez M. Crenius , au chapitre I'". de
(i3) Id. ibid , lib. I cap. I. Voyez aussi la I^^. partie des Anîmadversiones Philologie»
liv. III , chap. rill. et Historica; , et la remarque (R) de l'article
(i4) Ibid. , t,b. III , cap. I. Marot , à lajin.
(i5) Ibid., lib. II, cap. I. (20) Celle d' Amsterdam , en 1692 : on y
ri6) Ibid. , cap. I.
lib. V , trouve la plupart des Préfaces , etc. , des e'di-
(l'j) Admodiim familiaris fuit. Panzirol. de tions précédentes.
f.lai is Lfg. Inlerpr. lib. II, cap. CXXI I p. 6»
, .
(21) N'icolo Toppi , Biblioth. Napolet. ,
(jS) C'est celui à qui il dc'die ses Noies. (22) Là même pag. 7.
,
, ,

ALEXIS. 445
ges (23) voit au chapitre XI du
, se sisti d'digenter legi. f^ir est doctus
,

1*"^. livre
, où ce Junianus est repre'- et diligent , et non pariirn studiosos
sentë comme im homme qui avait adjufabil suspicor tumen eum quan-
:

tous les jours chez lui une foule de doquefalli Si is altquâ lecum fa-
songeurs , auxquels il donnait l'expli- miliaritate junctus est velim ab eo ,

cation de leurs songes j et cela d'une ,


erquiras ut Alpheni jurisconsiilti
,

manière très-intelligible et qui fai- ,


l'etuslissima scripta, Commentariosque
sait que plusieurs évitaient la mort senatûs consulloruni ,
quœ vidisse se ,
ou de grands chagrins. Lisez le cha- emisseqiie Romœ ait , commodato det.
pitre XXIII du V*. livre (24) , vous y Eorum autem mcntioneni facit ca-
trouverez ce qui regarde les spectres pite quarto et septinio prinii libri
sus- :

et les lutins qui tourmentaient le lo- picor enim nescio quid Parrhasianum
gis même de l'auteur. On nous donne quem sois eos authores plernmque ad~
dans les additions de Nicodème Je ducere solitum, quos nunqukm viderai.
titre d'une e'dition in-folio des Jours
Géniaux, que je prendrais pour la pre- ALEXANDRE-LE-GR.iND ,
mière si un passage d'Alciat
, (25) roi de Macédoine. Cherchez Ma-
ne m'en empêchait. Voici ce titre :

cédoine.
Alexandrl de Alexandro Dies Génia-
les. IVe quis opus excudat denuo infra ALEXANDRE VII , pape.
ieptenniuni siib diris imprecationibus
,
Cherchez Chigi.
Apostolicd autoritate interdictum est.
On lit à la fin Romœ, in œdibiis Ja-
:
ALEXANDRE VIII , pape.
cobi IMazQchii Rom. Academiœ bi- , Cherchez Ottoboni.
bliopolœ. Anno P'irginei partus i522,
Kalend. April. Pontif. S. D. IV. de
ALEXIS
Piémontais. Il y a ,

cujus noniine pontijicali adhuc non un


de secrets qui court de-
livre
constat , anno primo. Nicodème rap- puis assez long-temps sous le nom
porte nn fragment de lettre de Jé- de cet Alexis. Il fut imprimé à
rôme Niger (26) qui n'est guère obli- ,
Bàle in-8°., l'an i563, traduit ,
geant ni pour les Napolitains en ge'-
,

ne'ral ni pour notre Alexandre en


,
d'italien en latin par Wecker {a).
particulier. Quel libro d' Alessandro Il a été aussi traduit en fran-
de gli Alessnndri è iniitolato Dies Gé- çais *, et imprimé plusieurs fois
niales, a simitiludine délie Notli Aui-
avec des augmentations. On y
che d'Aulo Gellio , e de' Saturnnli di
Macrobio , cose cat'ate di qu'a e di l'a.
voit une préface où le seigneur
Ed in vero ha inolto del Napoletano ,
Alexis apprend au public qu'il
con sopportazion del Sannazaro par- est né de maison noble que dès ;

lando. f^endesi sei carlini al parer ,


son enfance il s'est appliqué à
viio troppo caro. Je ferai un article
touchant Jdni.\ncs Majus , l'Artémi- l'étude ;
qu'il a appris le latin y
dore de son siècle. le grecl'hébreu , le chaldéen ,
,

(I) Je donnerai les paroles d'Al- l'arabe , et plusieurs autres lan-


ciat parce qu'elles contiennent le ju-
,

gement qu'il faisait d'Alexander ab


gues qu'ayant eu surtout une ex-
;

Alexandro. ] Je les tire d'une lettre trême passion pour les secrets de
qu'il écrivit de Milan le 6 de Mai eu a rathassé autant la nature, il

i52i et qui a été imprimée l'an


,
ses voyages qu'il a pu pendant ,
1697 (27) Alexandri jurisconsulli
:

duré cinquante-sept ans


qui ont
IVeapolitani librum quem ad nos mi- ,
;

qu'il s'était piqué de ne commu-


(23) Il a pour titre, Miracnla de Somniis niquer à personne ses secrets ;
apud nonnullos cognita et comperta et quse ipse ,

expertas fui. mais qu'à l'âge de quatre-vingt-


(2^) Il _r a dam Léonard Nicodème le IX'.
livre ;c'est une faute.
deux ans et sept mois ayant vu ,

(23) Je le cite dans la remarque {\).


Mercklin. in Lindenio renovato, p. 28.
(«>
(2(i)Cette LeUre est datée de Rome , le 26 de
* Leclerc croit que la première édition de
juin i522.
(2-) Epiit. Gudii, etc., pag. gi. la traduction /rançaise est de Lyon , i5d5.
,

446 AL F É NU S VARUS.
à Milan un pauvre malade qui fait l'abrégé des livres d' Alfénus
était mort lequel il eût pu gué- (c). S'il était vrai que jjarmi les
,
,

rir s'il eût communiqué son se- conseillers de l'empereur Alexan-


cret au chirurgien il fut touché dre Sévère il y eût un Alfénus
, ,

d'un si grand remords de conscien- (D) disciple de Papinien com- , ,

ce qu'il se fit presque hermite me quelques -vms le disent en :

et ce fut dans cette solitude qu'il s'appuyant sur im passage fort


mit en état d'être don- embrouillé de Lampridius il au-
ses secrets ,

nés au public. Les colporteurs les rait pu être de la postérité de


promènent par les foires de vil- l'autre, quoiqu'il faille confesser
lage avec leurs autres petits li- qu'il y a eu des Alfénus différens
vres couverts de bleu. Il est vrai du disciple de Sulpitius. U y a
qu'ils n'ont que l'élite des remè- un Alfénus dont Cicéron parle
des du seigneur Alexis Piémon- dans son oraison pour Quinctius,
tais le recueil entier serait un et un Alfénus Varus
:
général ,

volume trop gros pour eux. d'armée sous Vitellius et préfet ,

ALFÉNUS VARUS (Plblius), du prétoire qui ne témoigna pas ,

la résolution d'un brave homme,


natif de Crémone, premièrement
cordonnier et puis disciple du lorsque son parti eut été vaincu
,
par celui de Vespasien (d). Do-
célèbre jurisconsulte Servius Sul-
nat, dans la vie de Virgile, parle
pitius («), et enfin consul a été ,

un fort habile homme en ma- d'un Alfénus (E) qui , avec quel-
tière de jurisprudence (A). Ses
quelques autres , exempta les ter-
res de ce poète du sort oii celles
funérailles furent faites aux dé-
pens du public. Voilà tout ce que du voisinage furent exposées ,
nous dit de lui l'un des vieux lorsqu'après la défaite de Brutus
elles furent assignées aux sol-
scoliastes d'Horace, dans ses no-
dats. De fort habiles gens croient
tes sur un passage qui regarde
notre Alfénus (B) dont on veut que celui qui rendit ce bon office
,

que le consulat tombe sur l'an à Virgile est le même Alfénus ,

754 de Rome [b). Je n'en voudrais qui avait été cordonnier et le ,

pas jurer. Alfénus avait écrit qua- même Alfénus dont parle Catulle
rante livres de Digestes (e). Cela n'est pas sans difficulté
, dont il

est fait mention dens l'indice des


(F). Voyez nos remarques , oii
Pandectes quelques livres de M. Moréri est quelquefois mis
, et,
Recueils, Collectaneorum. Aulu- dans son tort.
Gelle cite l'un et l'autre de ces (c) Guill. Grolii Vitée Juriscons. p. 86. ,

deux ouvrages; et, quoiqu'il ré- (d) Tacit. Histoiiar. lib. Il, cap. XXTX
et XLItl lib. ///, cap. XXXVI, LV et
fute ce qu'il en cite il ne laisse ,
;

LXI; lib. IV, cap. XI.


pas d'attribuer à l'auteur un es- (e) Dacier sur Horace Sat. III, li^. I. ,

prit qui recherchait les antiqui-


tés (C). Le jurisconsulte Paulus a (A) Il a été un fort habile homme
en matière de jurisprudence. ] Ce pas-
^«) Acron le nomme Marc inais il faut
Servius, selon Guill. Grolius, Vil. Jurisc.
;
sage d'Ammien Marcellin contre les
pag- 86. Voyez Aulu-Gelle, lib, VI, cap. avocats de son temps Ui ut altiiis vi-
:

F,
et Pomponius in I. 2, D. de Orig. Juris. deanlurjura callere, Trcbntium.loquun-
(b) Voyez Cruquius in Horat. , Sat. /// tur, et Cuscellium, et .Alfenum, et Au-
libri T. runcorum Sicanonuntjue jamdiii leges
,

ALFÉNUS VARUS. 447


ignotas (i), sufHt pour nous convain- préférer par cette raison le dernier
cre de la grande autorité où était le titre à celui que Henri Etienne a gar-
nom d'Aliénus en fait de jurispru- dé. Bertrand fait dire à Aulu-Gelle ce
dence. Joignez à ceci les témoignages qu il ne dit pasj savoir, que l'ouvrage
allégués par Bertrand au i*^ livre de intitulé Collectanea comprenait qua-
ses ]urisconsultes (a). tre livres. Voici les paroles d'Auhi-
(B) passage d'Horace regarde
Un Gelle In libro Digestorum trigesimo
:

notre Alfénus. ] Les paroles d'Horace et quarto , Conjectaneorum autem se-


sont dignes d'être rapportées : cundo fœdere , inquit etc. (5).
, in ,

Je ne doute pas que , puisque Bertrand


• Alfenus vafer , oinni
jibjeclo instrumenlo unis clausdque tabemd,
,
a dit qu'Aulu-Gelle a cité le XXX *=. li-
Sulor eral: sapiens operis sic oplimus omnis vre des Digestes , il n'ait cru que et
Est opifex soins , sic rex (3). quarto se rapportait au mot suivant
j
et que, sans prendre garde à la suite,
(C) Aulu-Gelle qui le réfute... ne
,
il n'ait conclu qu'on avait cité le IV^.
laisse pas de louer ses soins pour les
livre des Collectanées : d'où néan-
antiquités. ] Cela regarde la significa-
moins il n'avait pas lieu de conclure
tion de ces paroles , argentum purum
putum , qui étaient dans le traité de que l'ouvrage ne contenait que qua-
tre livres, et que c'était Aulu-Gelle qui
paix conclu entre la République Ro-
le disait. Les remarques critiques sur
maine et celle de Carthage. Les Ro-
cet ouvrage de Bertrand, insérées dans
mains devaient recevoir tous les ans
l'édition de Leide ni Guillaume Gro-
un certain tribut en argent purum ,

tius , ne nous ont pas avertis de ces


putunt , c'est-à-dire , de bon aloi.
petites méprises. Je mets en note le
M. Moréri s'imagine que le nom pro-
pre de ce tribut était purum putum ; bien qu'Aulu-Gelle a dit d'Alfénus (6;.
ce qui est une imagination fort plai- (D) // n'est pas sûr que , parmi les
sante. Aulu-Gelle ne méprise pas sans conseillers de l'empereur Alexandre
raison le sens qu' Alfénus a donné à Sévère , il y
ait eu un Alfénus. ] Le

ces paroles (4) ; et, s'il fallait juger passage de Lampridius, de la manière
par-là des lumières de ce jurisconsulte qu'il est imprimé , est si faux à cer-

on le ferait bien descendre des premiers tains égards , qu'on ne peut en rien
rangs. Il croyait que purum putum conclure pour l'existence d'un Alfé-
avait été formé de purus, comme no- nus sous Alexandre Sévère. Voyez Ca-
i^icius et propicius ont été formés de saubon sur ce passage. Mais , en tout
noi'us et de proprius , afin de donner cas , M. Moréri ne devait point nous
plus de force à la signiûcation du citer Horace, ni Aulu-Gelle, pour son
mot primitif. Aulu-Gelle le réfute so- Alfénius surnommé le jeune , qui t'j-
lidement et montre que putum si- l'flit , dit-il sous le règne de l'em-
,
,

gnifie ce de quoi on a retranché toutes pereur Alexandre Séuère.


les supertluités. Il ne cite point le li- (E) Donat.... parle d'un Alfénus. ]
vre que Jloréri cote savoir le IV*^. , ,
M. Moréri, faisant un article de celui'
et le XXX''. des Digestes ni celui que j
ci .dans la page 170 , le nomme Al-
Bertrand allègue , savoir le XXX*. ,
phénius f^arus chei'alier romain et , ,

des mêmes Digestes il en cite le


:
cite Donat in i^itd P^irgilii ; mais Do-
XXXIV^. Quant ouvrage qu'il
à l'autre nat ne qualifie point cet homme che-
cite il Conjectaneorum
est intitulé valier romain : et d'ailleurs , les meil-
, ,

dans l'édition de Henri Etienne; mais leures éditions (7) portent Alphénus ,
je vois que Bertrand et Guillaume f^arius comme deux personnes , et
,

Grotius ont lu Collectaneorum. Ce non pas Alphénius Varus comme ,

dernier titre semble se rapporter une. Il faut néanmoins avouer que ,

mieux aux passages des Pandectes ces vers de la IX*. Eglogue de Vir-
,
gile, V. 26
où Servius est cité sur le témoignage :

d' Alfénus : apud Aljenum no-


Seri^ius Immb hœc quœ Varo nec d'uin perjecla cane-
tât, putat; mais on ferait fort mal de bal ,

(i) Amm. Marcellin. , lib. XX.X , cap. IV, (3) Aulas Gellius , lib. VI , cap. V.
pas- 594. Alfenus jurisconsullus , Servie Sulpicii
(6)
(2) fag. 56, 57 , edit. Lugd. Bal. ann. 1675. disciputus , rerunique antiquaruin non incurio.-
(3 Horat. Sat. /// libri I vs. i3o. ,
sus. Aulus Gellius lib. VI , cap. V, ,

(4; Aulus GelUus, lib. FI , cap. V. C:; CeUe d'Hackius à Leide , en 1680.
, ,

448 ALYPIUS.
Vare, tuum nomen ( superet modo Manlua l'on a fondé la censure sur ce qu'il
nobis
y
^
a pour le moins Sy ans entre la dé-
jManiua vue misera! nimium vicina Cremonœ)
Cantantes sublime Jerenl ad sidéra cjgni; faite des trois légions de Varus et la
visite dont parle Catulle (11). Je me
sont appliques par le grammairien sers de cette raison. Il y aurait entre
Servius à un Alfénus Variis qui fut , cettemême visite et le consulat d' Al-
envoyé par Auguste au-delà du Pô fénus (i2j 5o ans plus ou moins il :

pour y commander après que Pol- ,


n'y a donc guère d'apparence que ,
lion eut perdu ce gouvernement. Le si cordonnier de Crémone a été
le
même grammairien remarque qu'il y consul l'an de Rome 754 il ait eu ,

a eu des gens qui ont applique' au ju- une si étioite liaison de plaisirs et de
risconsulte Alfénus Varus successeur ,
débauche avec Catulle 5o ans aupa-
de Servius Sulpitius ces autres vers ,
ravant car un cordonnier de pro-
;

de Virgile :
vince, qui renonce à son métier, pour
Wam neque adhuc Varo videor , nec dicere aller étudier dans la capitale n'est ,

Cinnd point un jeune garçon lorsqu'il est ,


Digna sed argulos,
inter strepere anser olo-
res (8).
ami intime des gens importans. Joi-
gnez à cela , que celui qui rendit un
Leur raison était qu' Alfénus Varus le si bon office à Virgile commandait
jurisconsulte avait composé quelques au-delà du Pô 4o ans avant le con-
,

vers. Servius les réfute , en montrant sulat en question (i3). 11 y a donc


qu'il faut appliquer cet éloge au poète lieu de douter que l'Alfénus qui a
Varius qu'Horace a tant encensé.
, été consul l'an ^54 de Rome , soit le
(F) On croit que l'Alfénvs de f^ir- même que le bieiifaiteur de Virgile :

gile , celui de Catulle et le cordon- car il est rare qu'un homme parvienne
nier , sont le même. Cela n'est pas aux grandes dignités , lorsque la sai-
sans difficulté. ] homme qui Un son ordinaire de les obtenir est pas-
s'applique au droit avec tant d'ar- sée depuis fort long-temps. Voilà le
deur que non - seulement il efface
,
cas où étaient à Rome ceux qui
par ses progrès la honte du métier après un gouvernement de province,
mécanique qu'il avait exercé au pays passaient quarante ans sans obtenir
natal mais qu'il succède aussi au
, la dignité consulaire.
plus grand maître de jurisprudence
qui fftt alors dans la république de (11) Scalig. in Catalli Epigr. X.
Kome, est selon toutes les apparences (12) On le met a Van 754 de Rome.
(i3) Servius in Ecl. IX, vs. 29.
assez grave pour ne point entrer dans
,

les plus étroites liaisons de débauche


avec un Catulle et tels autres ga- ,
ALFONSE. Cherchez les rois
lans de même volée , fort efféminés. de ce nom sous celui de leur
Or l'Alfénus dont parle Catulle
, , , royaume *.
était de la bande de ces impudiques,
* Cesl-à-dire , aux mots Castille Na- ,

Alphene immemor , atque unanimis J'alse so- PLES et Portugal.


dalibus (9) ;

il menait Catulle chez sa gai'ce :


ALYPIUS , d'Antioche , vivait
sous l'empire de Julien l'Apostat.
Varus me meus ad suos amores
Visuin duxerai è furo oliosum , Il avait déjà commandé dans
Scorlillum ul mihi ùim repente visum est
Non sanè iUepidum nec invenus tum (10). l'Angleterre , lorsque ce prince
eut la fantaisie de faire rebâtir
11 n'y a donc pas beaucoup d'appa-
le temple de Jérusalem et le ,
rence qu'il fût le disciple de Sulpitius.
On a censuré Muret, qui avait dit que préposa à ce travail Alypius hâ- .

le Varus qui avait mené Catulle chez tait l'ouvrage avec une grande
son amie était Quintilius Varus ; et
force , et se trouvait secondé par
(8) Virgil. Eclog. IX, vs. 35. le gouverneur de la province («).
(9) Catiill. Eplj;ramm. XXVIII. M. Dacier
suj Horat. , Sat. /// , liv. I , cite i'Épieramrae Il fallut néanmoins qu'il aban-
XXVII de Catulle.
(10) Catul. Epigr. X. (a) Voyez la remarque (A).
ALYPIUS. 449
donnât l'entreprise ;
les feux qui mieuxfait d'oublier entièrement
sortaient de dessous la terre ren- cet article (C^. Voyez ses fautes
dirent le lieu impraticable. Huit dans la première édition de mon
ans après il se trouva enveloppé dictionnaire (e).

dans l'horrible persécution qui (e) On a cru qu'on ferait mieux de les

fit périr une infinité de person- remettre ci-dessous dans la remarque [C).

nes et qui fut excitée au commen-


,
(A) L'auteur d'une Géographie, qui
cement contre ceux qui avaient plut a Julien i ^postal , ne diffère
cherché par la luagie quel serait point de notre Alypius. ] Cet auteur
le successeur de Valens. Quand vivait sons Julien TAposfat. On a
deux lettres que ce prince lui c'crivit,
ceux qui reçurent la commission
qui témoignent qu'Alypius était frère
d'informer contre les coupables de Césarius , et qu'il exerçait une
eurent mis les choses en train , charge considérable (1). Ce dernier
ou ne vit que personnes accusées caractère convient admirablement à
Alypius d'Antioclie qui , après avoir
et tout aussitôt condamnées et
été lieutenant de gouverneur en An-
punies. Alypius qui s'était ré- , gleterre , fut envoyé dans la Judée,
duit à une vie privée pour y jouir pour y avoir l'intendauce de la con-
des agrémens du repos y fut at- struction du temple. Ammien Marcel-
,
lin nous apprend toutes ces choses :
taqué par des délateurs. On l'ac-
yîmbitiosunt quondarn apud Hieroso-
cusa d'empoisonnement {b). Il lymam templum.... instaurare iump-
fut banni tous ses biens furent
: tibus cogitabat imniodicis nego- :

Son fils Hiéroclès


confisqués. ,
tiumque maturandum yi/rpio dederat
Antiochensi, qui nllni Rrilannias cu-
condamné à mort pour la même rai'erat pro prœfectis. C'uni ilaque rei
accusation fut sauvé heureuse-
,
idem fortiter instaret Alypius jufa- ,

ment lorsqu'on le menait au sup- retque proi'inciœ rector , metuendi


plice (c). La nouvelle de cette globi flammarufit prope jundnntenta
crebris assultibus erunipentes frctre
heureuse rencontre adoucit l'af-
locurti erustis aliquoties operantibus
fliction d' Alypius dans son exil. inaccessuni (2). Voici comme il parle
Il y a beaucoup d'apparence que dans le XXIX^. livre : Ecce autsnt
l'auteur d'un om-rage de géogra- Alypius quoque ex i^icario Britannia-
runi, placiditatis homo jocundœ post
phie qui plut beaucoup à .Tulien ,

aliusain et reposilani uitani ( quoniam


l'Apostat, ne diffère point de no- hue usque injustitia letenderat tuanus )
tre Alypius (A) mais je ne crois; in squalore niaximo l'olutatus ut l'cne-
point que cet ouvrage soit la Des- Jîcii l'eus citatus est cuin Hierocle Jî-
lio (3).
cription du vieux monde que
(B) Je ne Cl ois pas que cette Géogra-
Jacques Godefroi a traduite de
phie soit la Description du i^ieux
grec en latin (B). Je ne connais monde que Jacques Godefroi a tra- ,

pas bien cet Alypius qui fit un duite de grec en latin. ] Cette Des-
'Traité de Musique intitulé Ei- cription est un ouvrage anonyme ,

composé sous les empereurs Constan-


(jys/<ji'^lh ao-jfjLy.r;, Iiitroduclio inusi-
tius et Constans.On en avait une an-
ca, dontCassiodore parle. Meur- cienne traduction latine fort barbare ,
sius est le premier qui l'a publié que Saumaise communiqua au docte
en grec (d). M. Hofman eût Jacques Godefroi. Celui-ci la fit sor-

(i) Vojrex la remarque (B).


(6) yoyez la remarque (A.).
(2) Amm. Marcelliii. , lib. XXIII , cap. I ,

{c\ Voyez comment , dans l'article d'HiÉ- pag. 35o ad ann. 363.
,

liOCLÈS.
(3) Idem, lib. XXIX , cap. I^pag. 55G, ad
{d) Vossius, de Scient. Malhem., j)ag. 9^. ann. i'i.

TOJIE I. 29
A5ù ALYPIUS.
tir de dessous la presse , avec le texte douceur, et tantôt de fermeté, riifî Si
grec et avec une nouvelle version
, THV «fioJXJKTiv Tû)V TrpoLyy.ArcDy , sti /iaç-Ji-
accompagnée de notes (4). Vossius ne plonç ky-ct Ktti Trpctcoç enrctVTa. TnpoLtvnv
s'éloigne pas de croire que l'auteur 7rpo9u//>ï truvKSoy.ièa. , /ui^cti yà.p TrpçtoTH-

de cette Description est le même Aly- Tst ncti trcetfpda-uvtlV OLvépiia. xsLi pûjuK ,

pius qui envoya à Julien TApostat aa.!TM f/.h Xfn<rbct.i TTfoç Tot/ç tTrtîtKiç â.~

un ouvrage de géogiapliie mais si : , TÙUÇ, TH cTê iTTl Tû)V TTIJVtlpùOV ÀTrO.pO.tTKrti;

cela est ajoute-t-il, il faut rlire


,
se- ,
Trpoi 'iTTdvôpSoDtny où jmittpâiç îçi (^{lo-iuç ,

lon la remarque de Jacques Godefroi, oy<r' ÀpiTiiç ïpyat. De reipublicœ autem


qu'u4lypius la composa avant que de administratione qubd diligenter et
commander en Angleterre ; car on n'y hunianiter Iransigere omnia sludes gra-
parle de celle île que sur la foi d' au- tum est. Etenim lenilatem ac modera-
trui: « Britannia, proi'incia, sicut qui tionem cum Jbrtiludine et robore ita
)> fuerunt narrant , faldè maxima- » teniperare ut illâ erga bonos viras
Pour moi ,
je conclurais volontiers de utare, hanc ad pravos severècorrigcn-
ce passage , qu'Alypius n'a point fait dns adhibeas , non mediocris ingenii
cette Description 5 voici sur quoi je ac virtutis est.
me fonde Il avait été lieutenant en
: (C) M. Hofman eût mieux fait
Angleterre depuis long-temps , lors- d'oublier entièrement cet article. ]
que Julien lui donna la commission 1°. En premier lieu, il écrit Alipius;

de faire bâtir le temple de Jérusalem :


2°. il dit qu'Alipius d'Antioche est
JVegotiumque maturandumyilfpio de- l'auteur de la Description du vieux
derat Antiochensi , qui olim Britan- monde j 3°. que cette Description fut
nias cura^'crat pro prtefectis (5j. Il publiée en latin , sous Constantius
envoya sa Géographie à cet empereur, et Constans ; 4°* qu'il y a un au-
pendant qu'il commandait sous lui tre Alipius d'Antioche qui a com- ,

dans quelque province. Il était donc posé quelque Traité de Géographie;


en état de parler de l'Angleterre 5°. quec'est Ammien Marcellin qui l'as-

comme témoin oculaire. Il n'est donc sure.M. Hofman ne dit que cela il :

point l'auteur de la Description du tombe donc dans plusieurs fautes d'o-


vieux monde , dans laquelle on ne mission mais le pis est que le peu
;

parle de cette île que sur la foi de ceux qu'il dit est tout plein de fautes de
qui y avaient voyagé. Qu'on ne me commission.
dise point qu'il a fait deux livres ,
l'un avant que d'aller en Angleterre, ALYPIUS, philosophe d'A-
l'autre sous Julien l'Apostat ; et cpie lexandrie contemporain de Jam-
,

le premier est la Description publiée blique , et l'un des plus subtils


par Godefroi car il y a beaucoup :

d'apparence que s'il eût fait cette Des- dialecticiens de son temps était ,

cription il l'eût insérée dans l'ou-


,
petit comme un nain mais son
;

vrage qu'il envoya à Julien^ et qu'ainsi, esprit réparait ce défaut-là. Il


l'on ne se fût plus soucié du premier
eut beaucoup de sectateurs aux-
ouvrage. Il se serait donc perdu et ,

Ton n'aurait pas aujourd'hui le livre quels il se contentait de donner


que Godefroi a traduit et orné de no- des instructions de vive voix, sans
tes. Au reste nous apprenons de Ju- leur rien dicter. Cela fit qu'on le
,

lien qu'Alypius était poète "Tè-Xu


,
quitta pour s'attacher à Jambli-:

"j/àp dit-il (6), ka) to. (ftciypâ./ji/ijia.'Tsi.


,
que , sous qui l'on pouvait pro-
ttÙTd wp&s-âêic TO!/c lâfASovç. Sunt cnlm fiter en plus de manières par des
in ed (tabula) tum descriptiones prio-
leçons et par des écrits. Jambli-
ribus meliores, tum iambi quibus eam
exorndsti. Il approuve ensuite la ma-
que, ayant eu quelques entretiens
nière dont Alypius traitait les peu- avec notre Alypius , fit grand cas
ples, et le loue de se servir tantôt de de son jugement et de son gé-

(4) Vossios , de Scient. MatViem. j>ag. 248.


nie , et composa même sa vie ,
,

(5) Amm. Marcellin. , lih. XXIII l , cap. I.


oii loua de plus sa vertu et la
il

(6) Juliani Epislola XXX. fermeté de son âme. Alypius


,

ALYPIUS 45t
mourut fort âgé , dans la ville tés à lui faire cette violence.
Dès
d'Alexandrie (a). le lendemain il sortit d'Hippone
,

(a) £unapiu3 in Vitâ Jamblic. et s'en retourna à Tagaste. II ne


se crut point obligé par une pro-
ALYPirS évêque de Tagaste,
, messe aussi forcée que l'avait été
sa patrie (n) , fut un des bons la sienne. Alypius fut l'un des
amis de saint Augustin. Il fut sept prélats catholiques qui dis-
baptisé à Milan avec lui , l'an putèrent en 41 avec sept évé- 1

388. II fit un voyage dans la Pa- ques donatistes dans la fameuse ,

lestine cinq ans après ; et si d'un conférence de Carthage. Il fut


côté le grand bien qu'il dit de député en 41g
, à Honorius , ,

saint Augustin à saint Jérôme par les églises d'Afrique. Le pa-


servit de ciment à l'amitié de ces pe Boniface le reçut avec mille
deux pères , il semble de l'autre marques d'amitié et le chargea ,

qu'à son retour en Afrique il


d'envoyer à saint Augustin quel-
,

refroidit un peu le cœur de saint ques lettres artificieuses que les


Augustin. On croit que ce fut en pélagiens répandaient par les
lui rapportant le mal que di- églises. On souhaitait que saint
saient de saint Jérôme les adver- Augustin , meilleure plume
la
saires qu'il avait à Jérusalem. du temps les réfutât. Il n'y
,

Alypius ne parvint à l'épiscopat manqua point il employa tou- :

de Tagaste qu'en Sg-j un an , tes ses forces {h) mais Alypius ;

après son voyage de Palestine. Il réfuta encore plus fortement


assista l'an 4^3 au concile de cette hérésie par les arrêts sé-
,

Carthage , où l'on chercha les vères qu'il obtint à la cour d'Ho-


moyens de faire rentrer les do- norius contre les pélagiens (A).
natistes dans l'unité. Les grands Nous connaîtrions mieux ses ac-
biens que fit Pinianus à l'église tions et son mérite si nous ,

deTagaste lorsqu'il y alla en 409, avions l'ouvrage que saint Au-


accompagné des deuxMélanies et gustin promet là-dessus dans une
d'Albine sa belle-mère exposè- ,
lettre qu'il écrit à saint Paulin
rent Alypius à la médisance (B). Au reste , il s'en fallut peu ;

comme si , par ses beaux dis- qu'AK^Dius ne se mariât. ^ oyez


cours et par son adresse, il avait la remarque (B) de l'article de
trop extorqué de ces bonnes et saint Algustix
chari tables personnes. Les habi-
(^) Tiré des Annales de Baronius aux ,

tans d'Hippone murmurèrent fu- années qu'on a marquées.


rieusement contre lui parce qu'i Is
(A) H obtint
,

le regardèrent comme la cause contre les pélagiens


des arrêts sévères —
] Baronius naf-
qui leur avait fait manquer la fîrtne point que les éghses d'Afrique
proie qu'ils croyaient avoir entre aient envoyé Alypius à l'empereur
les mains. Ils avaient obligé Pi-
pour lui demander l'usage du bras
séculier contre les sectateurs de Pe-
nianus , bon gré malgré qu'il en lage il se contente de le conjecturer,
:

eût à promettre qu'il embras-


, et de fonder sa conjecture sur les or-
serait la prêtrise dans leur ville : dres qui furent espe'die's en la même
ses grands biens les avaient por-
année par l'empereur Honorius contre
les pélagiens d'Afrique. Mais Ai. Maim-
{oj Cest une ^/ille d'Afrique. bourg ne parle point de ceci comme
452 ALYPIUS.
d'une chose douteuse puis qu'après , tur, et tu qui nosti quomodo hcec le-
avoir comparé odieusement la con- gas 5 propter alinriim cauendam infir-
duite des ministres avec celle des pe- viitalent , fratci'nœ notiliœ deblto J'ruu-
ïagiens il ajoute (i) « Ce qui a com-
, : dareris.
» blé de joie toute la France , est
>' qu'une ordonnance si juste a été ALYPIUS ( Faltonius Probus),
î> bientôt après suivie de ce grand Edit
frère de Q. Clodius Hermogénia-
V d'octobre, qui a donné le dernier /-ii^ \ r i •
'7-
J) coup fatal à l'hérésie en défendant ,
»"* Ulybrius {a) , lut préfet de
» l'exercice public de la prétendue ré- Rome, sous l'empereurThéodose.
« formée , renversant tous ses tem- Baronius l'a prouvé par des in-
3> pies et bannissant ceux d'entre
,
scriptions {b). Il ajoute qu'on a
3) ses ministres qui ne voudraient pas

}) renoncer à leurs erreurs. Et c'est plusieurs lettres de Symmaque à


i> là justement ce que l'empereur Ho- cet Alypius (A) il cite le Marty- ;

3' norius fît contre les péiagiens à la ,


rologe romain qui témoigne que ,
» requête du clergé d'Afrique pré- ,
saint Almachius fut tué par les
^> sentée par Alypius. Car par Tédit ,

3) que ce prince lui accorda pour le gladiateurs sous la préfecture d'A-


y bien de toute l'église celte hérésie , lypius (B) : enfin il conjecture ,
» fut exterminée de l'empire on dé- :
1°. qu'Alypius, gouverneur d'E-
J) fendit à tous ceux qui pouvaient en-
gypte avec lequel Jean l'Ana-
,
31 core en être suspects de s'assem-
» hier et l'on chassa de leurs sièges
,
chorète eut une conversation (C),
î) ces faux évêques, quine voulurent est le même que celui dont je
« pas souscrire à sa condamnation. » parle dans cet article 2°. que cet ;

(B) Saint yliigustin avait promis la


entretien de l'anachorète con-
fie d' /Hypins dans une lettre écrite a
saint Paulin. Comme ce qu'il dit
'\
vertit Alypius. Un savant An-
dans cette lettre (2) peut donner une glais* a conjecturé que le mar-
idée générale du mérite d'Aljpius il ,
tyr saint Almachius est un saint
est uon
esi bon ae rapporter ici
de le lapporiei ii:i Est eiiarn
j:.sc etiarn :
; •
, _ •
_ •
j . 1 .•.
"^^ginaire et que le t.tre de
aliudquoistu7nfratreman,pliùsdUi- ,

gas nam est cognatus l'enerabilis et


,
^ airaanach a produit cette mer-

^erè beau episcopi Aljpii queni toto veilleuse canonisation (D).


pectore amplecteris et mérita : nam
quisquis de illo i^iro bénigne cogitât , {a) Saille Dé/nelriade est fort louée par
les pères.
de magna Dei misericordiâ et de mira-
bilibus Dei muneribus cogitât. Itaque (6) Baronius , ad ann. SgS , num. 18.

ciim legisset petitionem tuain qud de- * Jolj- nomme ff^afier, auteur de /'Enthou-

siderare te indicâsti ut historiam suam siasme de l'Eglise Romaine, et prétend (jue


tibi scnberct , et i^olebat Jacere prop- Bajle n'a composé cet article Alvpius, que.
pour essayer de prouver que saint Almachius
ter benefolentiani tuain , et nolebat
est un saint irnaf> inaire. Il combat en consé-
propter t'erecundiam suam quem ciim , quence Buj-le Waker et la Croze qui avait
,

fiderim inter ainorein pudorenupie rendu compte de Vouvrage de JFaker dans


Jluctuantem anus ab illo in humeros
, le tome XI de la Bibl. Universelle.
meos transtuli nam hoc mihi etiani
:

per epistolam jussit. Cita ergà si , (A) Baronius dit qu'on a plusieurs
Dominas adjui^erit, totum Atypium lettresde Symmaque à cet Alypius.^
inserayn prœcordiis tuis nam hoc sum : Voici ses paroles eundem quoque : Ad
ego maxime ueritus , ne ille t'ereretur Alypium complures extant epistolœ
aperire omnia quœ in eum Dominus Sjmmachi deque eo meminit in epis-
,

contulit , ne alicubi miniis intelligenti toldad FLn'ianum (i). Il cite la


(non enim abs te solo illa legerentur) LXXXIF. leltre du II", livre de Sym-
non diuina munera concessa homini- maque. Dans mon édition je trouve à
bus sed seipsum prœdicare fidere-
, la LXXXIIF. ces mots Jamprident :

(i)Maimbonrg, Histoire du Pontificat desaint domino etjratri meo Alipio comita-


Léon lif. I png. 35 édu. de Hollande.
, , ,

(a) C'en la XXXJI^. (i) Baronius , ad ann, 3r)5 , num. 18.


,

ALLATIUS. 453
Uim sacrum visere atque adiré cu- homme, et un talent tout particulier
pienti. de devinerlespensees.il attenditdonc
(B) Saint Alniachiusfut tué par les jusqu'à ce que le gouverneur se re-
gladiateurs sous la préfecture d'Aly- tirât, après quoi l'anachorète fit ses
pius.'\ Il avait voulu faire cesser le excuses.
culte des fausses divinités le jour de (D) Saint A
Imachius est un saint
l'octave de Noël (c'est le premier jour imaginaire, et le litre de lalmanack
de l'an), et il lui en coûta la vie. a produit celte men'eilleuse canonisa-
Voici les paroles du martyrologe, sous tion.'\ Ceux qui ne pourront pas se ser-
le i^''. de janvier: Romœ sancti Al- vir du livre anglais, imprimé à Londres
machii martyris, qui, juhente Alvpio en 1688, et intitulé The Enthusiani
,

urbis prœfecto , ciim diceret « Hodie of'lhe Church of Borne, c'est-à-dire,


,

i) octat'œ Dominici diei sunt , cessate L'Enthousiasme de l'Église Romaine,


3) h superstilionibus idolorum et à sa- pourront consulter le onzième volume
» crificiis pollulis » a gladiatoribus de la Bibliothèque Universelle , à la
,

occisus est (2). Théodoret , au chapi- page iSg. Ils y verront que, suivant
tre XXVI du V^. livre de son Histoire les conjectures de l'auteur anglais ,
Ecclésiastique, parle d'un moine nom- quelque moine ignorant du f^Il''. ou
mé Télémachus, qui , du fond de l'O- T'^lll'^. siècle, voyant au haut du calen-
rient , vint à Rome , pour travailler à drier S. Almanachum, écrit par ahré-
l'abolition des jeux des gladiateurs. Il l'iation, selon la coutume de ce temps-
eut le courage d'aller catéchiser ces là, S, Almâchum, pi'it ce mot peu usité
gens-là, au plus fort de leurs exer- alors pour le nom de quelque saint ,
cices sanguinaires; mais les specta- lui donna une terminaison en us et le ,

teurs lui en surent si mauvais gré plaça au premier jour de l'année.


qu'ils le lapidèrent. Honorius, l'ayant L'ignorance et le hasard n'eurent pas
su le fit mettre au rang des martyrs, plustôtmis au monde ce noui'eau saint,
,

et commanda qu'on abolît ces sortes qu'il trouwa des martymlogistes qui
de jeux. On (3) voudrait réduire à un lejirent tuer dans l'amphithéâtre de
seul fait ce que vous venez de lire, et Rome sous le préfet Alypius, par les
ce que j'ai cité du martyrologe. On se- gladiateurs qu'il voulait empêcher de
rait bien aise que nous crussions que combattre. Aucun ancien auteur ne
Théodoret a nommé Télémachus ce- fait mention de celte sainte hardiesse
lui qu'il fallait nommer Alinachius ; (5). Alcuin {*) est le premier qui en a
qu'il a transporté à l'empire d'Hono- parlé d'une manière assez douteuse.
rius ce qui s'était fait sous celui de
(5) Il est pourtant vrai que Théodoret la
Théodose; et qu'il a imputé aux spec- donne au moine Télémachus : voyez la remar-
tateurs l'action des gladiateurs. Sur que (B).
ce pied-là , il se tromperait en trois (*) De divin. Oflic. , cap. ÏF.

choses.
(C) Baronius prétend que ce fut ALKINDE, ou ALKINDUS.
ai'ec Alypîits , que Jean l Anachorète Cherchez Alchivdus.
eut une cont^ersation.'] Baronius cite
sur cela un long passage (4) où l'on ,
ALLATIUS ( Léon) garde de ,

apprend que le bon Palladius trouva la hibhothéque du Vatican na- ,

fort mauvais que l'anachorète l'eût tif de l'île de Chic est un des
,
quitté, pour aller entretenir Alypius,
plus fameux écrivains du XVIF.
gouverneur de la province. Le dépit
qu'il en conçut lui donna quelque mé- siècle. Il était laborieux et infa-
pris pour l'anachorète, et lui inspira tigable , avide de manuscrits ,
la résolution de se retirer. Il aurait doué d'une grande mémoire ,
exécuté celte pensée si l'anachoi^ète
,
très-propre à rassembler des ma-
ne lui eût fait dire d'attendre encore.
Palladius connut alors qu'il y avait un tériaux et digue par conséquent
,

grand fonds de spiritualité dans cet du poste qu'il occupait quoique ,

d'ailleurs il n'eût pas une fort


(2) Baronias , ad ann. 3g5 , num. ig.
(3) Baronius , ibid. , nutn. 20. grande pénétration ni une ma-
,
(4) Pallad. in Lausiac. , cap- XXJf apud
;
Lipoic. , loin. III. nière de raisonner qui sentit un
,

454 A LL ATI US.


bon Je ne paile point
logicien lecture et d'érudition que d'es-
des emplois qu'il eut avant que prit et de jugement. Il décou-

de devenir bibliothécaire du pa- vrait assez bien les fautes de ceux


pe; et je n'ai pas même examiné contre qui il écrivait mais il mê- ;

si M. Moréri qui en a fait men-


,
laità sa découverte trop d'ai-
tion assez amplement a eu toute , greur et trop d'insulte. C'est ce
l'exactitude qu'il qu'on peut voir principalement
fallait. Si j'ai
quelque chose à dire là-dessus dans les Dissertations qu'il a pu-
ce ne sera que dans les remar- bliées contre M. Creygthon , au
ques (A). M'abstenant donc de sujet du concile de Florence (a).
dire ici ce qu'on peut trouver On peut connaître son génie et
dans son Dictionnaire, je ne tou- celui de sa mémoire , par les
cherai que certaines choses qui sauts qu'il faisait d'une matière
n'y sont point. Allatius a été d'un à une autre dans un même vo-
grand secours à MM. de Port- lume. M. de Sallo n'a été rien
Royal dans la dispute qu'ils ont moins que son admirateur en
eue avec M. Claude, sur la créan- cela (F). Allatius mourut à Ro-
ce des Grecs à l'égard de l'Eucha- me , au mois de janvier 1669,
ristie. M. Claude le nomme sou- âgé de quatre-vingt-trois ans {b).
vent le grand auteur de M. Ar- Il avait fait souvent des poèmes
naud et nous en fait une pein- grecs. Il en fit un sur la nais-
.,

ture très — peu honorable ( B ). sance de Louis XIV, où il faisait


M. Simon ne lui donne guère parler la Grèce. Il le fit réim-
de bonne foi(C). Jamais Latin de primer à la tête de son livre de
naissance n'a été plus emporté Perpétua Conseiisione etc.., qui ,

contre les Grecs schismatiques , est dédié à ce monarque. J'ou-


qu'Allatius , ni plus dévoué au bliais de dire que MM. de Port-
siège de Rome. Il ne s'engagea Royal n'ont pas manqué de ré-
ni au mariage ni aux ordres ec- pondre quelque chose à M. Clau-
clésiastiques il ;en donna une de , en faveur d'Allatius (G),
raison qui mérite d'être sue (Dj.
(a) Voyez le Journal des Savans, du i5 de
Tl serait difficile de trouver dans novembre 1666.
l'histoire des auteurs une singu- {b) Henn. Witte Diarium Biograpli. ad
,

ann. 1669. Moréri met sa mort en 1670.


larité plus notable que celle qui
concerne une plume dont il se (A) Si j'ai que/que chose à dire de
servait (E). Il adonné au public ses premiers emplois ce ne sera que ,

quantité de livres soit en fai- dans les remarque s, Je trouve dans


,
'\

Lorenzo Crasso (i) que Leone AUacci


sant imprimer des manuscrits ,

(c'est ainsi qu'il le nomme) n'avait


,

soit en traduisant des auteurs que neuf ans lorsqu'il fut porte de
grecs , soit en composant de son l'île de Chio dans la Calahre, où il
propre fonds. La liste qu'on trouva la protection d'une puissante
famille (2). Au bout d'un certain temps
voit dans le Dictionnaire de Mo-
, . j. . il fut envoyé à Rome
. où il étudia ,

reri ne distingue point ces trois les humanités la philosophie et la ,


,

espèces d'ouvrage , et ne com- théologie dans le collège des Grecs.


,

prend pas tout ce qu'Allatius a ^.^ Lorenz» Crasso Istorla de- Poe.i Greci
, .

publie. On peut remarquer dans p"»- ^°^- ^ojez aussi ses Eiogii d'Huomiin
j -• 1 , Letlerati, tom. I, pas. 3q7 el suiv.
,
ses productions beaucoup plus de (,) cdu des Spindu.
, ,,

ALLATIUS. 455
Ilfut élu à Naples grand-vicaire de Quand poudrait errer, il ne le
il
Bernard Justiniani ëvêque d'An- , peut ; car il n'y a ni infidélité
glona. Il retourna dans sa patrie ; et ni illusion , qui puisse aller jusqu'à
n^ trouvant rien à faire selon ses dé- lui ; et quand un ange dirait autre-
sirs, revint à Rome où il étudia en
il ment , étant muni comme il est de
médecine sous Jules César Lagalla l'autorité de Jésus -Christ il ne ,

et voulut recevoir le doctorat en cette peut changer. L'aigreur avec la-


science. Il tourna ensuite ses études auelle il traite ceux contre qui il
du côté des belles-lettres, et enseigna ispute , comme Chytréus , Creyg-
le grec dans le collège de sa nation. thon l'archevêque de Corfou
, et ,

La mort de Grégoire XV lui fit perdre quelques autres qu'il attaque de ,

la récompense de la commissiou qu'il gaieté de cœur se découvre par ,

avait eue, de faire transporter à Rome la simple lecture de ses écrits cha- :

la bibliothèque de l'électeur palatin 3ue période les honore de quelqu'un


(3). li entra quelque temps après chez e ces beaux titre sots menteurs , , ,

le cardinal Bichi^ puis chez le cardi- ;


hébétés , champignons pouris bou- ,

nal François Barberiu enfin il reçut : ches infernales , garnemens impu- ,

du pape Alexandre VII la garde de dens , et autres termes sembla-


la hibliofhéq'ie du Vatican. Lorenzo bles (*') qui ne marquent pas un
,

Crasso ne dit que cela dans le livre esprit extrêmement modéré. Pour
que j'ai ajoute qu'Allatius
cité, j'y nous prouver la conformité de l'É-
avait été long-temps bibliothécaire du glise grecque avec la romaine dans
cardinal Barberiu. les choses essentielles, il prend pour
(Bj M. Claude enfait une peinture principe de ne reconnaître pour la
très-peu honorable. ] Allatius « était véritable église grecque , que le
» un Grec qui avait quitté sa religion parti soumis au siège de Rome ; et
« pour embrasser la Romaine ; un à l'égard des autres Grecs qu'il ap- ,

j> Grec que le pape avait fait son bi-


,
pelle hérétiques et schismatiques , il
» bliothécaire l'homme du monde j
soutient fièrement qu'on fait bien ,
« le plus attaché aux intérêts de la i
((uand on peut , de les réduire à
31 cour de Romej l'homme du monde '
l'obéissance par le fer et par le feu j
)' plus malin , et le plus outrageux
le •
qu'il faut proscrire exterminer , ,

« contre les personnes ; l'homme du i


punir les hérétiques et s'ils sont , ,

» monde le plus animé contie les '


opiniâtres les mettre h mort et les
,

» Grecs , qu'on appelle schismati- I


brûler (*') ce sont ses termes. »
:

» ques , et en particulier contre Cy- M. Moréri n'avait-il pas beaucoup de


» rille 5 et au reste , un vrai vendeur raison de le traiter de bon homme ?
» de fumée (4) Son attachement à — Cet éloge méprisant est-il dû à ceux
» la cour «le Rome paraît dès l'entrée qui ne parlent que de lois pénales ,
» de son livre de Perpétua Consen- que d'extirpation , que de droit du
ti iione
; car voici comme il parle en glaive , que de fer et que de feu ,
)' faveur du pape (*) Le pontife ro- : quand il s'agit de savoir ce qu'il faut
5) tnain , dit-il , ne relève de personne; faire aux hérétiques ?
•» il juge tout le monde , et n'est jugé (C) 31. Simon ne lui donne guère
» de qui que ce soit il lui faut rendre ;
de bonne foi. ] Tout le premier cha-
j) obéissance . encore qu'il goui'erne pitre de l'Histoire Critique du Levant
» iniquement ; il donne les lois sans a pour but de faire voir que Léon
» en recci'oir ; il les change com- emporté sans raison con-
Allatius s'est
» me il lui plaît crée les magis-
; il tre Caucus archevêque de Corfou ^,

» trats , il détermine les choses de la que Caucus n'a point imputé aux
1) Joi , ordonne comme bon lui sem-
il Grecs des opinions ou des pratiques ,

n ble des grandes affaires de l'Eglise, qu'ils n'aient pas ; et qu'Allatius ,


pour être agréable au pape Urbain
(3) Moréri met cela à l'an i6ii ; mais Hei-
delberg ne fut pris qu'en 1621. f^lll , qui ai'ait alors formé le des-
* Leduchal remarque qu'il fallait écrire
Biscia au lieu de Bichi. (*') Vide Allât. d<- Perpettin Cons., lib. III,
(4) Claude Réponse au livre de M. ArnauJ ,
,
cap. Xr, XVI XVII XVIII, , ,
fiadvers.
/il'. /// chap. XII toin. I pag. 452
, édit.
, ,
Creygtli. passhn.
,

H1-80. ('^) Allât, de Perpet. Tons. , Ub. II, eaj>-


(*) Allât, de Perpet. Cous., lib, I , cap, II. XI JI , et Ub. III cap XI. ,
,

456 ALLATIUS.
sein de réunir les Grecs afec l'église une plainte de Ja Vierge. « Celfe
romaine , par des voies d'adoucisse- w plainte , composée
dit-il (9) , a été
ment a adouci beaucoup de choses
,
)) par Métaphraste d'où Léo Alla- ,

danslessentimensdes Grecs. C'estdire » tins a pris sujet de nous donner un


assez clairement qu'il a été de mau- j; éloge de Métaphraste écrit par ,

vaise foi ; car si Caucus a raison , ,


V Psellus. Et comme Métaphraste
,

on n'a pu le contredire par complai- » s'appelait Siméon , il a aussi pris


sance pour le pape, sans sacrifier la 1) de de faire une très-longue
là sujet
bonne foi à la maxime d'état. » dissertation sur la vie et les ouvra-
(D) La raison qu'il donna pour- ,
))ges des grands hommes qui ont eu
quoi il ne s'engagea , ni au mariage ,
» le nom tle Siméon. Des Siméons il ,

ni aux ordres ecclesiaiiiques , mérite » a passé aux Simons de ceux-ci :

d'être sue. ] Le pape Alexandre VII M aux Simonides 5 entin de ces der- ,

lui demanda un jour pourcpioi il n'em- w niers il est venu aux Simonacti-
,

brassait pas le sacerdoce. Cest afin , » des. Ce genre d'écrire est du goût de
lui rcpondit-il, d'être toujours prêt a » Léo Allatius car il a déjà fait d'au-
;

me mnner. Mais pourquoi donc , re- i> très dissertations sur la vie et les
prit le pape ne uous mariez-uous
,
» ouvrages de quelques auteurs qui
pas ? Cest afin répondit Allatius , ,
)) ont porté des noms équivoques ,
d ai'oir toujours pleine liberté de me » commecelui de George , celui de
faire prêtre passa ainsi toute
(5) . Il » Méthodius
, celui de Nicetas , celui
sa vie à délibérer entre une paroisse » de Philon,
et celui de Psellus , sur
et une femme il se repentit peut-être :
» tous lesquels il a fait divers écrits.
en mourant de n'avoir choisi ni l'une » Ces sortes de desseins sont d'une in-
ni l'aulie ; mais il se serait peut-être ))vention nouvelle au moins, ne nous :

repenti trente ou quarante ans de ))reste-t-il rien de semblable dans les


suite d'avoir choisi ou l'une ou l'au- » ouvrages des anciens, w Diogène
tre *. Laërce n'oublie guère de marquer,
(E) C'est quelque chose de très-sin- à la fin de chaque Vie des Philoso-
gulier que ce qu'on dit d'une plume phes ceux qui ont porté le même
,
,

dont il se servait. ^ Cette particularité nom qu'eux , et il cite Démétrius


vient du même lieu que la précédente, Magnés qui avait écrit un livre Tjfi
,

savoir de Jean Pastricius, bon ami C/./OVl'//CCV CTOIHTûlV T{ KCLt ci/yy fa.<fîa>v y

d'Aliatius héritier de ses livres


,
et ,
de Uomonjmis pnètts ac scriptori-
principal du collège de propagnndd bus (loj. Voyez la remarque (H) de
fide. 11 raconta à dom Mabillon (6) l'article Apoilonics de Tyane. Allatius
qu'AUatius s'étant servi d'une même
,
n'est pas même le restaurateur de ces
plume (7) , pendant quarante ans desseins Meursius avant lui avait
: , ,
,

pour écrire en grec , et l'ayant en- publié divers traités de cette nature.
tin perdue en pensa pleurer de dou-
,
Voyez M. Teissier, dans sa Bibliothè-
leur. 11 écrivait avec une extrême vi- que des bibliothèques où il donne la ,

tesse car il copia dans une nuit le liste des auteurs qui ont exercé leur
5

Diariuni Romanorum Pontificum , plume sur ce sujet (i •)• i' '^'' appelle
qu'Hilarion Fiancalus moine de Ci- ,
Scriplores de Uomonymis. Selon M. de
teaux lui avait prêté (8> On ne vou-
,
Sallo, il faudrait traduire Homonjmi
lut point permettre à Allatius de le par ceux qui portent des noms équi-
donner au public. l'oques ; mais , ne lui en déplaise , ce
serait mal traduire. On n'a jamais dit
(F) // sautait d'une matière à une
autre... On ne l'a pas admiré en cela.'] que les princes de même nom , les
Voici comme M. de Sallo eu parle Charles, les Louis les Henris , aient
,
,

après avoir observé que la principale eu des noms équivoques. Les noms de
pièce d'un ouvrage d'Aliatius était cette nature sont ceux qui se peuvent
prendre en diflerens sens 5 c'est là
(5) Mabillon, Musœum liai. , tom. /, p. 61. leur espèce et leur usage tant en lo- ,

* Joly du quAllalius avait pris les ordres gique que dans le langage ordinaire.
tnineurs.
(6) Ibidem. (g) Journal des Savans , du ig janvier i665.
(') Voyez ce qui sera dit dans l'article de'Ljm- (10) Diog. Laërt. in Epimenide, Lib. I , nuin.
ttioT, muine Olivelan. [Cet article n'existe pas.] 112.
(8j Mabillon, Musa;uai liai. ,
pag. 7-. (11) Teisserii Calai, catalogor. , p.^g. 35j.
ALMAIN. 457
Mais ,
pour revenir à Léon Allatius ,
" gens peuvent être emportes vio- ,

je dois dire qu'il était fort propre à » lens , intéresses , sans


flatteurs ,

dresser des listes ou des catalogues. Il » qu'oQ ait droit pour cela de croire
le fit paraître lorsqu'il publia ses « que les passages qu'ils citent soient
u!4pes urbanœ c'est un livre qui de-
: » supposés. L'on a mohis encore de
vient rare , et qui est déjà bien cher » sujet de le croire d'Ailatius que
en Hollande (12). Il contient une liste » d'un autre parce que des livres ,

de tous les hommes de lettres qui pa- » qu'il a cittjs , lorsqu'ils n'étaieut
rurent à Rome depuis l'an i63o »,
encore que manuscrits , ayant été
jusqu'à i63i , et une liste de leurs )) imprimés depuis ont justifié sa fi- ,

ouvrages. La raison du titre est tirée » délité ; et que d'ailleurs il paraît


des abeilles que le pape Urbain VIII » qu'il s'est toujours extrêmement pi-
portait dans ses armes '•'. Il y a une » que de la réputation de savant cri-
autre liste d'Ailatius , qui est moins » tique , et que l'on sait que les
connue que celle-là , et qui a pour » gens de cette sorte sont fort éloignés
titre Dramaturgia. Elle regarde les » de falsifier les auteurs (lij). » Il est
pièces de théâtre et leurs auteurs, certain que M. Drelincourt cite ho-
Le livre qu'il publia à Rome l'an 1 636, norablement Allatius, et sn prévaut
De Erroribus magnorum virorunt in de sa doctrine louchant la pytho-
dicenJo , contient plusieurs remar- nisse qui fit voir l'ombie de Samuel.
<(ues dérobées à Claude du Verdier. Il cite son Traité de JEngaslrimyiho,

M. Morhof le lui reproche (i3). publié l'an i63o.


(G) Messieurs de Port- Royal nont ^.^^ R.p„„,, g.„.„lg ^ m. Claude chap.
,

pas manqué de répondre quelque chose XIII ,


pag. 212.
à M. Claude , enfai-'eur d'Ailatius. ]
Ils rapportent premièrement une par- ( JaCQUES ) , profes- ALMAIN
tie de ce que M. Claude dit de lui
5^^^ en théoloeie à Paris , dans
et puis, il continuent de cette ma- 1 ,, iv n < -,

collège de Navarre , a fleuri au


nière « Mais outre que ces repro- ^^
: ,

3> ches en l'air sont toujours de mau- commencement du XVr. siècle.


}> vaise grâce, que les écrits d'Ailatius II était de Sens , et il s'acquit la
5. donnent tout une autre idée de lui,
réputation d'un des plus subtils
3> et que ses confrères () en ont parle i- .• j •"-n , • .

« tout d'une autre sorte en le citant dialecticiens et des meilleurs sco-


,

M avec éloge ils sont encore contre


;
lastiquesde ce temps-lk. Le grand
j) le bon sens car il y a si loin d'ê-
: attachement qu'il eut pour la doc-
" tre intéressé ou aigre contre les au- ^^ine de Scot et pour celle d'Oc-
i> teurs que Ion reiute, a être tourbe j . 1 d- c /•> • 1 1 .

'^^^'^ ^t de Gabriel Biel peut faire


.> et capable de supposer de faux pas- ,

3) sages et de fausses histoires qu'il ,


foi du caractère de son génie. Il
3) n'y a nulle conséquence de l'un à enseigna la logique et la pliysi-
l'autre. n'en est pas des vices
Il
>.
^^^ ^vant que d'être agrégé en ^ ,
3j comme des vertus des hommes ils :

3) n'ont nulle liaison entre eux ^ ils sont l'année i5o8 , à la maison de Na-
3; même souvent contraires et des varre , et il publia des Traités
:

sur ces deux parties de la philo-


(12) On ne l'y trouve point chez les libraires;
tnais on ly trouve quelquefois dans ce qu'on sophie en i5o5 et en i5ob. Il fut
appelle Auctions en strie valon. Ce sont les
ventes publiques des bibliothèque. reçu docteur en théologie l'an ,

* Jolj note que Us Apes urbauae ont été


reimprirne'es
^.
..,.'.. par
fj.^r les soins de J.-A. rabricius en
....n.. J
i^n
,.
et, l'année d'après, il ex-
..-^
;
-. ,
i a^
i-^ii II donne aussi i". te titre de deux écrits pliqua , dailS leCOlIegC dC JN 3-
d'Jllalius omis par le père Nue'ron, aux mé- .,„„_„
,

moires desquels il renvoie; 2°. la liste


IpTTT"
^ ^r^^ , 16 111 livrp dp* SpTltpn-
llVrC Oes OentCn- .
des ou-
vragges promis par Allatius , et non imprime's. CBS. Il futCmplové en 06 même
( i3) Morh. de Patavin. vag. 8G. Polyliist. , ^ t '' "
, , , . , -

pag. 179. temps a écrire pour le roi Louis


(•) Drelincourt, Dialog de la Descente aux
r.nlert, pag. 290 et siiiv. Notez que dans mon
XlIcOUtre le ^lpape
l
JulcS II et ,'
_

édition , qui est la deuxième, il faut chercher pOUr l'autOrite dcS COnCllcS COll-
à la page â^ el aux suivantes et qui concerne , j- '<^ ;,,i,^,, . -i 1

Allatius. tre uu ecnt du cardinal La]elau.


.

458 ALPAIDE.
Le concile de Pise avait envoyé à soit parle d'Almain. J'y ai bien trouve
la facultéde théologie de Paris un Deneaictin nomme
"° bénédictin nommé Almannus .•

mais on lui assigne pour le temps où


le livre de ce cardinal ** , afin
il a vécu l'an 890. Quant à Simler il ,

qu'elle le fit réfuter. Elle choisit est fort vrai qu'il a dit que Jacques
Almain pour cette corvée *'*, et Almain moine a fait un livre contre
, ,

le cardinal Cajetan, Au reste, M. Mo-


n'eut pas sujet de se repentir de
réri n'a pas bien su l'^ge de cet écri-
son choix. Ce docteur mourut as- vain iljlnrisscdt encore, dit-il au : ,

sez jeune, l'an i5i5. On fit une commencement du Xf^l^ siècle. Dites
édition de toutes ses OEuvres (A) plutôt qu'il ne commença à fleurir
à Paris deux ans ajirès {a). Ceux qu'en ce temps -là.
,

qui ont dit qu'il était moine se


ALPAIDE , concubine de Pé-
trompent (B). pin , et mère de Charles Martel.
"Leclerc reproche à Bayle d'appeler Car- Quelques auteurs assurent sans ,

dinal, à l'occasion d'un livre publié en i5l2,


Ciijetan qui n'eul la pourpre qu'en iSiy.
beaucoup de fondement , que
*^ Leclerc assuré qu' Almain entreprit Pépin se maria avec elle , après
cette réfutation uniquement de son chef.
avoir répudié Plectrude (A). C'est
{a) Launoius Hislor. Gycun. Navarr. p.
,

une opinion assez générale , que


,

6ii.
Lambert , évêquede Liège, n'eut
(A) On fit une édition de toutes
ses OEuures. ] Ce fut Olivier Lugdu-
jamais la lâcheté d'approuver les
neus qui prit cette peine et qui y amours de Pépin pour cette maî-
,

Joignit une Préface, où Alraain est tresse et qu'Alpaïde indignée , ,

oué très-amplement. Les principaux de la liberté qu'il prenait de les


de ses Ouvrages sont quatre Traités
de Morale. Expositio circa decisinnes
censurer , fit consentir Pépin au
quœstionum mngislri Gulllelmi Oc- dessein qu'elle fomia contre la
cant de pntestate siimmi Pontificis. vie de ce prélat (B). On ajoute
De auctoritate Ecclesiœ et concilio-
que Dodon , frère d'Alpaïde , fut
rum. Dlctata super sententias ma-
gislri Rnberli H'dcot (i).
l'exécuteur de cet abominable
(B) Ceux qui ont dit qu'il était dessein ; et qu'après avoir fait ce
moine se trompent. ] Le père Labbe meurtre , il tomba dans une ma-
(i) accuse Gesner et son abréviateur
ladie qui fit naître une infinité
Simler d'avoir avancé faussement ce
,

fait M. Moréri n'a point manqué de


:
de vers sur son corps , et qui
copier en cela le père Labbe. M. de l'obligea à se jeter dans la Meuse
Launoi intente cette accusation à {a). Lambert a été canonisé : il
Gesner , mais un peu mieux circon-
fut dit-on , le seul prélat qui
,
stanciée ; car il le blîime d'avoir dit
dans sa Bibliothèque, qu' Almain avait osa dire ses vérités à Pépin (C),
été de l'ordre des franciscains il : et il éprouva le même sort que
ajoute que Possevin dans son Ap- , saint Jean-Baptiste. Sa morale
parat s'est contenté de le faire moine
,
était pure qu'il ne voulut pas
si
(3). Le père Labbe n'a pas employé
,

cette distinction il a dit qu'Almain :


même donner la bénédiction
a été moine seTon Gesner , mais ^
qu'on lui demandait à table pour
que, selon d'antres, il a été de l'or- le verre d'Alpaïde (D). Cette
dre de saint François. Je ne crois
femme se retira enfin dans un
point que Gesner ait dit ce qu'on lui
impute; car je n'ai pu lencontrer au- monastère {b) , et y mourut. Un
cun lieu dans sa Bibliothèque où il ,
{a) Mézerai, Abrégé Chron., tom. I, pag.
(i) Laanoliis, Hist. Gymnas. Navar. 171 à l'année 707. Cordemoi Hist. de
, p. 6ii , ,

(2) De
Script. Eccl., (cm. /, pag. 488. Fiance, tom. /, pag. 38 1.
(3) Launoii Kist. Gymnas. Pfavar. , pag. 6i\. {b) Moréri dit que ce monastère a^'oit e'îe
,
,

ALPÂ IDE 459


cloître est ordinairement aux per- quelque chose nous pourrions con-
,

naître les conséquence de son silence-


sonnes de cette espèce ce qu'était
M. de Cordemoi ajoute, qu'il ne paraît
autrefois Ligourue aux banque- Yoint par aucun mémoire du temps ni ,

routiers. que ce Dodon fût frère d Alpaïde ni ,

quelle L'eût eorcUéa tuer saint Lam-


fondé par Alpaïde à Orp-le.Grand dans , le
bert qu'il Y a véritablement quelques
;
Brabant,
mots dans les martyrologes faits vers
(A) Quelques auteurs assurent , ce temps qui font connaître que cette
,

sans beaucoup de fondement , que violence avait été faite par ordre de
Pépin l'épousa , après ai^oir répudié la cour, et que comme Pépin en était
Plectrude.l M. de Cordemoi (i) re- le maître ceux qui ont écrit depuis
,

marque qu'ils ne s'appuient que sur ont cru devoir expliquer au désavan-
le second continuateur de Fredegaire, tage de ce prince et d' Alpaïde ce
qui dit que Pépin épousa Alpaïde. qui est en paroles couvertes dans ces
a Mais outre que cet auteur, qui e'cri- martyrologes (4) Le plus sûr, à mon .

»vait (comme tout le monde sait) avis, e>t de renvoyer ceci au nombre
» par les ordres du frère et du neveu des faits douteux. Ceux qui disent
3) de Charles Martel , n'avait garde de que le seul Lambert, évêque de Liège,
» parler des amours de Pépin et d'Al- osa 'reprendre Pépin et parler hau- ,

» jiaïde autrement que comme d'un tement de sa bigamie comme d'un


1) mariage il ne dit pas que Plec-
,
adultère public sans se laisser ébran-
,

» trudeaitété répudiée. Il reste même ler ni par les promesses ni par les ,

"plusieurs actes, qui font voir que menaces de Dodon, frère d'Alpaïde(5),
3) Plectrude n'a jamais vécu séparée n'ont écrit que long-temps depuis (6) :
)) d'avec Pépin de sorte que ni se-
; ,
cela les éloigne un peu de la qualité
))Ion les lois ecclésiastiques, ni selon d'un témoin certain. D'ailleurs le fils
« les lois civiles Alpaïde n'a pu être ,
d'Alpaide était un sujet si redoutable ,
» regardée comme sa femme légitime :
qu on ne peut rieu inférer du silence
w et s'il l'a épousée
, il a eu deux ,
des auteurs contemporains.
3' femmes à la fois. » (C) Lambert fut le seul prélat qui
(B) Indignée contre Lambert, éuê- osa dire ses vérités a Pépin."} L'au-
que de Liège,... qui censurait ses teur d'un dictionnaire historique au-
amours, elle forma un dessein contre rait raille et mille occasions de re-
la i'ie de ce prélat. ] Il ne faut pas marquer qu'il n'y a point de plus
s'étonner que le second continuateur grands flatteurs des puissances que
de Fredegaire ne dise rien de cette les gens d'église. Leurs prédications
conduite de Lambert ni des suites , leurs prières leurs harangues
, leurs ,

funestes qu'on prétend qu'elle eut j il épîtres dédicatoires, sont si remplies


ne pouvait toucher à cela .sans en- , d'éloges outrés, qu'on ne saurait mieux
courir la disgrâce des parens de Char- représenter l'état où ils mettent un
les Martel , qui se servaient de sa auditeur et un lecteur bien honnête
plume ainsi son silence n'est d au-
: homme, que par le proverbe date ,

cune force 5 mais l'auteur des Gestes rnihi pelvim. Pépin me dira-t-on ,

n'en dit rien non plus (2:. Un auteur, n'était point roi. Pépin, répondrai-je,
qui vivait alors, dit seulement , Que avait en sa main la clef des bouches
saint Lambert fut tué par un seigneur et des plumes les peines et les ré-
,

appelé Dodon qui voulut venger la


,
compenses il ne lui manquait que le
:

mort de deux de ses parens , que les titre de souverain il en avait la réa- j

gens de ce saint évéque cwaient tués lité, il en faisait les fonctions. Les
sans qu'il le sût {i). Si nous savions de flatteurs ne s'arrêtent pas à un vain
quel parti était cet auteur , s'il tenait titre ils adorent plus dévotement
:

pour Charles Martel ou pour Plec-


trude, sïl espérait ou s'il craignait (4) Cordemoi , Hist. de France , vol. I , p.
382.

(i) Cordemoi , Hist. de France , vol. I p. (5) Anselm. Laodicem. Canonicus , Si^iber-
,

38i. tus Monachus Genblacensis , Nicolaus Laodic.


(2) Cordemoi la même. Canonic. Vener. et alii , cités par Cordemoi
,

(3) Godescalc. in Vitâ S. Lamberti, cap. Vil pa$. 38i.


,

cilé par Cofdemoi , là même. (6) Cordemoi, pag- 38i.


,,

46o ALSTE DIUS.


celui qui a le pouvoir sans le titre, que débit en France. Quelques-uns
celui qui a le titre sans le pouvoir. tiennent qu'un de ses meil-
(D) Lambert refusa la htnédiction un Trésor de
leurs ouvrages est
qu'on lui demandait h table pour le
verre à
Alpdide.\ Voici comment un Chronologie, dont il y a plu-
historien moderne raconte le fait : sieurs éditions : d'autres en par-
Ad epulas invitutur (^^. Laudebertus) lent avec mépris. Yossius n'en
il principe, Pippinus cœterique illus-
dit rien il se contente de mar-
:
tres uiri qui aderant, scyphutn quisque
suum ab anlistite benedici, aut ut ,
quer en général V Encjclopédie
alii dicunt , de manu cjus pnculum ac- et en particulier le Traité de
cipeie, piâ ambilïone cupiebant. Càm V Arithmétique {d). Il reconnaît
jilpais (nant et ipsa pleno cont'iuio
inlererat) scyphurn suuin a Lnndcherto
que cet auteur avait beaucoup de
signari optaret, indignabundus epis- lecture , que son érudition
et
copus palaiio excesiil conuii'arurn ,
Ceux qui
était fort diversifiée.
hUnritnte vonfusd (7). Conférez avec jugent de lui avec le moins de
ceci les histoires rapportées dans les
flatterie conviennent qu'il y a
Nouvelles Lettres contre le calvinisme
de M. Maimbourg (8j.
du bon dans ses Méthodes et
dans ses Systèmes (B). Il n'a
(-) Harlrian. Valesii Rerum Francicaruiu
Uh. XXXIII. pas persuadé à beaucoup de gens
(8) Pag. 614 et suiv.
ce qu'il a tâché d'établir dans son
Triumphus Biblicus , qu'il faut
ALSTEDIUS ( Jean Henri ) ,
chercher dans l'Écriture les ma-
théologien allemand de la reli- tériaux et les principes de toutes
gion réformée a été l'une des ,
les sciences et de tous les arts. Il
plus fertiles plurnes du XVI T. un
était impossible qu'il publiât
siècle. C'était un écrivain infati-
livres *
si grand nombre de , sans
gable et qui soutenait merveil-
,
se servir du travail d'autrui ;
mais
leusement son anagramme («). copiait sans
il s'en servait trop : il
11 fut long-temps professeur en
scrupule les autres auteurs (^C)
]>îiilosophie et en théologie à
et en prenait à toutes mains.
Herborn dans le comté de Nas-
,
Jean Himmelius, théologien de la
sau d'oii il passa en Transylva-
,
confession d'Augsbourg et pro- ,

nie , pour professer à Albe-Jule


fesseur en théologie à lëne est ,

(b). Il y mourut, l'an |638 à ,


un de ceux qui ont écrit contre
Yà^e de cinquante ans. Il avait
lui (D). M. Moréri n'a point su
été l'un des pères du synode de
l'annéedela mortd'Alstedius(E),
Dordrecht. L'une de ses princi-
et il eût mieux fait de n'en rien
pales occupations était de com-
dire.
poser des méthodes, et de réduire
Je ne devais pas oublier qu'il
en certains systèmes toutes les
fut millénaire. Il publia en 1627
parties des arts et des sciences.
un Traité de mille Annis , oix il
Son Encyclopédie [c) trouva
débita que les fidèles régneraient
grâce devant les catholiques ro-
avec Jésus-Christsur la terre pen-
mains (A) car elle fut réimpri-
;
, après quoi
dant mille ans arri-
mée à Lyon et a eu assez de ,
résurrection de tous
verait la
[(i) Le mof Sedulitas 5e troiife précisément
dans Aistedius. {d) Vossius, de Scient. Mathem. p. 32^. ,

(b) Wilte Diar. Biograph.


, , /om. T. * On en troiwe la liste dans le tome l\ l des

{ji, Elle est io-foiio ,


di'.-tsee en 4 tomes. Mémoires de Nicérvn,
,

ALSTEDIUS. 46 r
les hommesjugement der- «sues; mais il donne les principes
, et le
» des sciences et des arts avec beau-
nier. 11 prétendit que ce règne ,

» coup d'ordre il lAche même d'être :

commencerait l'an i6g4. Nous » uniforme partout <juoiqu'il ait


'
,
y
savons très -certainement qn' » des pièces meilleures les unes que

s'est trompé. Son gendre Bister- «les autres, et qu'il s'en trouve même
^*'^"t rien, comme son His-
feldius suivit la opinion
r même
(e).
^ ^
"
» f'}°''
toire, sa Chronologie etc.. Il faut ,

(c) Heidegger! Dissertalio de Cliiliasmo, » avouer qu'il s'est souvent trop em-
pag". 652. « barrasse , pour avoir voulu se ren-
» dre trop clair qu'il est trop charge'
(A) Son Encyclope'die iroui'a grdcc » de divisions et de
sous-divisions , et
devant les callioltques roniftinsjho- qu'il affecte une méthode trop >'
gê-
renzo Crasso a mis Alstedius eatre les » née (3j. » Lorenzo
Crasso rapporte
pporie
grands hommes dont il a publié l'é- aue quoiqu il
y ait plus de sueur que
loge. C'est de là très -apparemment de géuie dans les ouvrages
d'Alstedius,
que M. Moréri a tiré l'encens qu'il on n'a pas laissé de les estimer,
et
donne à Alstedius. Je vois qu'on ren- d'avoir pour ses fatigues une
admira-
voie les lecteurs à un ouvrage de Sorel tion qui le fait entrer au
temple de
(t) pour apprendre des nouvelles de la gloire
, Cnn gloria dpi suo nome :

ce savant Allemand. Il fallait qu'il fût s'è ammiruta la


Jatica falla nulle
plus connu et plus estimé que bien Slorie, e nella Cronntogia
de Tenipi :
d'autres parmi les catholiques ro- le quali cose quaritunque
in Libri ,
mains. Le père Lami , de l'Oratoire , dii'ersi di Scrittori illustri
sacri g
juge qu'Alstedius al presque le seul proj'ani truoi'ansi
e t^t concorra in ,
d'entre tous tes faiseurs d' Encyclo- taie
raccoghniento pih sudore che in-
pédies et de Systèmes de Sciences , gegno tuttayia Vordine dato da Gio- ,
qui mérite d'être lu et de tenir son l'anni Errico aile
,
sudette faliche sto-
rang dans une bibliothèque choisie (a). riche è stalo da gli uomini
amatori
Voyez la remarque suivante. délia antichita , e dell erudiziuni as-
(B) On confient qu'il y
a du bon sai commendato{\).
dans ses Méthodes et dans ses Sys- (C) // copiait suns scrupule les au-
tèmes. Voici ce que M. Baillet a tiré
] tres auteurs. ] Voici ce que remarque
de l'Allemand anonyme qui a fait la
Bibliographia curiosa hiUorico-philo-
Thomasius (5). Hune ParalUlis m
Theologicis quicquid de silentio sa-
logica. <( Alstedius renferme à la vé- crnrum ajfert (*') observa propè de
,
» rite beaucoup de bonnes choses j t'erbo descripsisse è Casauhone (*') ,
» mais il n'est pas assez exact en plu- queni nominari lamen etiam lectoris
» sieurs endroits néanmoins il n'a :
intererat , ut sciret undè plura siii
j) point laissé d'être reçu du public
haurienda forent. F^creor autem ne
w avec de grands applaudissemens ,
quercuin eandeni alibi quoque excus-
î) quand il parut pour la première fois :
serit, ciint in ipso ad lectorem prin"
3) et il inutile à ceux qui
n'est pas cipio reperiani periodum unani alle-
» étant d'ailleurs destitués des autres
ramque dedicationis Casaubonianœ.
» secours et n'ayant pas les auteurs,
,
(Dj Himmelius... est un de ceux qui
)) veulent acquérir quelque connais- ont écrit contre lui.\ Son ouvrage est
»
»
sauce des termes de chaf|ue profes-
sion et de chaque science. Au reste,
intitulé A
nti- Alstedius, sive Examen
Theologiœ Polemicœ Joannis Henrici
» on ne saurait trop louer sa patience Alstedii. Quand cette remarque ne
» et son travail , le discernement et
servirait qu'à marquer le titre d'un
w le choix des bons auteurs quil a
des principaux ouvrages d'Alstedius ,
» fait pour en tirer ses abrégés car :
elle ne serait pas entièrement inutile.
M ce ne sont pas de simples lam-
i> beaux et des rapsodies mal cou- (3) Baillet , Jugemens des Savans , tom. II
pag. 328.
(i) De la Perfection da Cbrétien , pa§. 5gi , (4; Lor. Crasso , Elogii d'Huomini Lelterati
cité par Konig , Bibliotheca: veter. et nov.-e p. pa^. 2i4-
,

(5) Dans son Traite' de Plagio Literario, num.


(i) Entret. sur les Sciences , cite par Baillet, 354, pa^. i55.
Jugemeaâ des Savam , tom. II , nuin. 26g , p,
'^ ("') TU. Initial!, pa^. 166, 167, 168.
328. ("^) Exerc. X.P^I ad Baron,, num. 4^1
P- 39g-
.

462 ALTAEMPS.
(E) Moréri n'a point su Vannée de coup à ce cardinal. Il fut d'avis
la mortd'Alstedius.'] Alstedius, dit-il, qu'on y fit une réponse vigou-
mourut fers tan i645 ou 46; d'au-
tres disent l'an 1 6/^n âge de cinquante-
,
reuse ; et il dit même qu il fal-
,

deux. Des trois auteurs qu'il cite il y ,


lait réprimer l'insolence de ce
en a deux (6) qui ne disent rien de légiste qui n^ avait accoutumé de
cela. Lorenzo Crasso , qui est le troi- traiter qu'avec de petites gens
sième, dit seulement qu'Alstedius pu-
(c). Il fut promu à la pourpre
blia les IV tomes de son Encyclopédie
à rage de cinquante-deux ans (7). l'an i56i et, peu avant sa léga-
;

tion les chanoines de Constance


,
(6) Vossius et Zeiller.
(7) LoreDz'i Crasso , Elogii d'Hoomiiii Lelle- l'avaient choisi pour leur évê—
rali , tom. II pag. 212.
,
que. Il n'avait ni la science ni

l'expérience nécessaires pour pré-


ALTAEMPS (Marc) , fils d'une
sider à un concile ; mais Pie IV,
sœur de Pie IV , fut l'un des
son oncle , n'ignorait pas que les
cardinaux qui présidèrent au *
autres présidens suppléeraient ce
concile de Trente. Wolfgang
qui manquerait à celui-ci {d) , et
Altaemps son père était comte
, ,
lui apprendraient le manège des
de l'empire , au diocèse de Con-
conciles œcuméniques. Lorsque
stance. Quelque belle que fût la
ce pape l'envoya nonce auprès de
dignité de légat du pape dans ce
l'empereur Ferdinand , l'année
concile ce cardinal
, ne l'obtint
1 56o il lui donna pour péda-
que par les souplesses des gens
,

gogue le fameux Cornelio Musso,


malintentionnés. Les Borromées,
évêque de Bitonte (e). Altaemps
parens du pape au même degré
possédait alors l'évêché de Cas-
que lui ,voulant l'éloigner de la
sane. Cette famille augmenta
cour , firent en sorte qu'il fût
dans la suite ses dignités car
envoyé à Trente {a). II y de- ;

novis trouvons un duc d' Altaemps


meura depuis le mois de janvier
156?. jusque vers le commence- qui mourut l'an \^io{f). Il était

ment du printemps de i563 (A).


savant ; et c'est lui , si je ne me
trompe qui ramassa la biblio-
Le pape rappela pour lever des
le ,

thèque qui a été si long-temps


troupes; car ayant appris que les
célèbre à Rome sous ce nom , et
ducs de Saxe et de Wirtemberg
qui n'était pas encore tout-à-fait
et le landgrave de Hesse en le-
vendue lorsque dom Mabillon fit
vaient , et que les Allemands
son voyage d'Italie {g). Ce duc
avaient envie de saccager Rome ,
d' Altaemps se nommait Jean
cil ils avaient trouvé un si grand
ne voulut
Ange, et a publié la J^ie du pape
butin l'an iSsy , il
Anicet. Un autre duc d' Altaemps,
pas se laisser surprendre {b). La
harangue de Pibrac déplut beau-
nommé Gaudentius , mort l'an
j6'^7 , n'a pas été moins curieux
* Leclerc et Joljr remarquent qu'il fallait
de livres , ni moins docte. Il a
dire : aux huit dernières sessions <lu Concile
de Trente.
la Houssaie dans
(c) Là même pag. 494-
(u) Voyez Atnelot de ,

marginales de la version de l'Hist. Id) Pallavic. Hist. Couc. Trident., lib.Xf',


ses Noies
de Fra-Paolo cap. Xtll, num. 10.
du Concile de Trente p. 445, ,

où il cite une lettre de M


de l Ile an roi da- ,
(e)Ihid.,lib XJV cap. XIII. ,

tée du 9 de décembre l56i if) Wilte, Diar. Biogr. tom. IT , , p. 2.6.

(b] Fra-Paolo, Hist. du Concile de Trente, (g) Eh 635 Voyez son Musieum
1 Italicuni,
pag 648 de la version t/'Araelot.
.
tom. I . uag. 78 , 79.
, ,,

ALTHAMÉRUS. 463
publié la Vie de saint Chrj'sos- {a) publia non-seulement quel-
,

tonie et la Sainteté persécutée


, ques ouvrages de théologie (A)
triotnjj liante {h). mais aussi des notes sur le Traité
pag. Il6.
de Tacite de Situ , Moribus et
(h) Wilte , Diar. Biogr. ,

Populis Germaniœ. Elles furent


(A) Il demeura à Trente depuis imprimées à Nuremberg , l'an
jani'ier \562, jusqu'en i563.] Palla-
vicin a n-pris le père Paul , d'avoir
1629 et Fan i536, in-4° {b) ,
dit (jue le cardinal Simonette et le et à Amberg,
l'an 1609, in-8°.
cardiual Altaemps , furent nommes (<?) ; ont été insérées par
et elles
le'gats du pape en même temps ,
pour Simon Schardius , au \" tome
être ajoutes aux le'^als qui avaient
des écrivains d'Allemagne. Il fut
déjà êtê nommes. C'est n'avoir point
su que Simonette avait êlê honore' de si ardent à rejeter la doctrine du

la légaHon du concile en même temps mérite des œuvres , qu'il s'em-


qu'Osius et Seripande plusieurs mois ,
porta contre l'apôtre saint Jac-
avant qu'on leur donnât pour col-
ques avec la dernière brutalité
lègue le cardinal Altaemps (ij. Il le
censure d'une autre chose c'est de :
[d). Cela nous donne l'occasion
n'avoir fait mention d'Osius et de Se- d'examiner un endroit des dis-
ripande ,' qu'en parlant des choses putes de Grotius et d'André Ri-
qui suivirent d'assez loin leur léga-
tion. Ces sortes de fautes ne sont pas
vet (B). On verra dans cet exa-
bien importantes et néanmoins on : ,
men que notre Althamérus assis-
ne peut justement trouver mauvais ta en iSaS aux conférences de
qu'un censeur les porte en compte; Berne , qui furent le précurseur
car d est du devoir d'un historien de
les éviter.
de la réforme ecclésiastique de ce
canton-là.
(i) Pallavic. Hist. Concil. Trid. , lib. XF,
cap. X{II num.
^ II.
{à) Micrœlii Hist. Ecclesiast. ,png. •j3i.
(6) Gesneri Piljlioth., /o/;o 38, t^erso.
ALTENSTAIG Jean ) doc-
( ,
(c) Hertzil Bil)lioth. German.
{d) Voyez la remarque (B).
teur en théologie a vécu au
,

XVr. siècle. Il était de Mindel- (A) // publia quelques ouvrages de


heini en Allemagne , et il com-
,
théologie. ] En voici les titres Con- :

cilialiones Locorum Scripturœ qui


posa un Lexicon Tlieologicum , specie teniis inter se pugnare uidentur.
,

qui est assez bon (A), ylnnotationes in D. Jacobi Episto-


lam. De Peccato Originis. De Sacra-
(A) Il composa un Lexicon Theolo- mento Altaris.
Il fit aussi un diction-
gicum, qui est assez bon.'] Il le dédia naire des noms propres que
l'on trouve
à l'évêque d'Augsbourg, If i*''. d'oc-
dans la Bible Sjlfa Biblicorum No- ,
tobre iSi^. Konig en a mis la pre- minum etc. Cet
ouvrage fut imprimé ,
mière édition à l'an iSig (i). Je ne
à Bâle l'an i535. Les Cnnciliationes ,
l'ai point vue; mais j'ai vu la seconde,
Locorum Scripturœ furent imprimées
qui est d'Anvers, chez Pierre Bellerus,
à Nuremberg la même année et à , ,
en iS^ô, in-folio sous ce titre, Wittemberg
,
l'an i582. , L'Epitorae
I^exicon Tlieologicum conlinens f^oca-
de Gesner ne marque que ces deux
bulorum /Jescriptiones, Deûniliones
éditions mais il est certain qu'elles
;
et Iiiterpetationes peruliles Tlieolo-
,
avaient été précédées d'une autre
giœ Studiosis concinnatum. qui avait paru avant l'année i528(i).
(i) Konigii Bibliotheca pag. (B) Nous examinerons un endroit
, 2g.
des disputes de Grotius et d'André
ALTHAMÉRUS (André), mi- Jiit^et. ] La première pièce de cette
partie de leur procès contient ces
nistre luthérien à Nuremberg ,

avant le milieu du XVF. siècle (0 Hosploiam Hist Sacram, ;,«,/.//,;,«,..


84
, ,

m
paroles (a) :
ALTHAMERUS.
» Scriptura ? Credidit Abraham Deo^
Gaudeo D. Riuetum non
accedere iis qui Jacobi Epislolam re- )) fidelicet promissioni dii'inœ de se-
jecerunt , quorum quidam hoc am- 1) mine ; et reputatum, scilicet quia
pliiis dixére n Menliris Jacobe in ca-
: » credidit, illi ad justitiam. JYon quod
put tuum ; » cVst-à-dire, a Je suis bien )) exJiUi ititmolatione justificalum di-
5> aise que M. Rivet ne suive pas ceux )) cit, rectè mentitus est in caput suuvi.
» qui rejettent l'Epître de saint Jac- » Quindecim enim annos anlè immola-
j)ques, parmi lescjuels quelques-uns tum IsaachumjustiJicatusfuilAbra-
it

» ont dit de plus, Jacques, tu mens par ham , etiam nondiim nato Isaacho ;
i>

i> ïaté'îe.)) Voici la secondepièce. Rivet )» non ex circumcisione , neque filii


demanda (3) , qui sont ceux qui ont n imniolatione, sed ex solâ fide. Dicit
parlé de la sorte? combien sont-ils ? " eniin Scriptura , Credidit , etc. ut
et i! ajouta qu'ayant cherche dans )) nihil habeat Jacobus ad quod rej'u-
les e'crits des je'snites, et des autres " giat. Nos Jidei magiurutn consli-
controversistes, qui recueillent avi- » tuimus ; et jat. suis ip'^issimis wer-
dement de pareils faits , si Ton avait » bis scimus nesn j'issi. quid sitjides. ,

reprochéaux protestans un blasphème » Et in fine liiiri, ne igilur succenseas


de cette nature, il n'avait rien dé- "» tiobis , lector, si duriiis et wehcmen-
couvert. La troisième pièce est que » tiiis calamo qnandbque in autorent
Grotius ne nomma personne , lors- » ini'ecti suvius. Meretur enim hoc
qu'il re'pliqua à son adversaire (4) , » odiumet hanc spiritùs uehementiam,
qui l'avait somme' si expressément et si )) diinialiam perfectionem atque jusli-
vivement. Ce silence fît conclure à )) tiam. à nobis contendit, quam fidei.v
André Rivet, que Grotius n'avait nul La dernière pièce sera que Rivet
auteur à alléguer. Quôd nutic autores voyant enlin une citation formelle
non indicel harum contumeliarum , répondit (7) qu'elle ne suffisait pas ^
dit-il (5) , ostendit se nullos habere. que Grotius s'était servi du nombre
La quatrième pièce est que Grotius , pluriel; et qu'un ne fait pas plusieurs:
l'épliqiianf tout de nouveau, cita les unus non siint multi. 11 condamna les
paroles d'André Althamérus « Is , : paroles d'Althamérus mais il se plai- ;

)) qui Jacobum accusavit mendacii , gnit que Grotius n'eût pas déclaré
3) fuit Andréas Althamérus (6j. Liber que ce n'était pas un calviniste. Il
» editus est Argentorati , anno ciD prouve que c'était un luthérien ; et il
» lOxxvu.Verba ejusinter caetera sunt : lui attribue de s'être chargé aux con-
}) f^uU nunc probaresuam sentenliam, férences de Berne de parler pour le
V sed directe contra Scripturani agit. parti des papistes, et de soutenir le
» Non possunius hïc dejendere Jaco- dogme de la présence réelle Qui ciun :

» bum. Citât enim Scripturas Jalso ; in diputatione Bernensi (8), quam se-
)) et solus Spiritui Sancto , Legi
, quuta est Rcformatio anni i528, /i-
» Prophelis , Cliristo ytpnstoliique , bcra eijacta esset dispuîandi copia,
» omnibus, conlradicit. Testimonium wolens passus est se à parte pontificid
5) ipsius vanum est. Uni ipsi tesli non deligi ut oratoris munere in sug- ,

i) esse credendum, supra annntai^imus, gcstu Jungeretur, camalenique Christi


)) prœsertlni cum quo ipse Spiritua prœsentiam in cœnd dej'enderet. L'in- <(

I) Sanctus et tôt testes ueritatis dissen- jure qu'il fait à saint Jacques con-
;> ,

3) liant. Credendum multiiudini. Pau- » dut Rivet ne nous touche nulle- ,

i) lus mullà digniiis sanctiùsque rem ment. Toute l'ignominie en rejaillit


))

j) tractât. Si.Airahamex operihus jus- ). sur les Y)apistes , et sur les luthé-
» tijîcatus habe.t quod glorietur, sed
, )) dont il a plaidé la cause.
riens , 3)

>i non apud Deuni quid enim dicit ; Sur ces productions il est aisé de ,

juger 1°. que Rivet s'engagea sans


:

(2) Grotii Animadvers. in Notas Riveti, pag.


1029 , III Operura Kiveti.
loin.
aucune nécessité dans un incident. Il
(3) Biveli Kxamen Animadv. Grotii pag. ,
pouvait laisser passer celte remarque
1029, tom. III Operum ejus. de Grotius, sans faire nul préjudice à
(4) Grotii Votum pro Pace Ecclesiasticâ ibi- ,

dem ,
png. 1054. (;) Riveti Grotianœ Discnssionis AfaXl/iriç ,
(5) Riveti Apologet. ibidem, pag. 1100. pag. 1201 tomi III Operum ejus.
(6) Grotii Discussio Apoloset. Kivrtiaiii , p. (8) Il .'e teil, sans le citer des propres pa- ,

^22 Opusculoruni Grotii , editionis Amsiploda- roles fi'Hospinien, liistoria: S.icramenl.Tr., pari.
niensis , apud DIaeu , anno 1679 , in-Jvlio, II ,
pag. 84.
, ,
,

ALTHUSIUS. 465
sa cause; et de lui deman-
il suffisait premières éditions ,
qu'il était de
der le nom de ceux qui avaient eu y^ religionprotestante ; qu'après
>^>^«j^ic>
1 audace de traiter un apôtre SI itidi-
^^ „ S ,

gnement. a°. Qu'il se trompa lors- ^^^^ ^^^ professeur en droit à


qu'il crut que son adversaire ne pou- Herborn , il eut à Brème la di-
rait nommer personne.
3°. Qu'à force gnité de syndic , et que les lésui-
de le presser, Use
convaincre d'à-
fit
t^^ ^^ répondant à l'Anti-Co-
voir Ignore un point de fait dont la , -^ xiim vju
connaissance pouvait faire honneur à ^^^ '^ mirent dans le catalogue
'

sa lecture et à sa bibliolhétiue. 4° des protestaus qui ont mal parlé


Qu'il se réfugia dans de petites chica- de la puissance royale (B).
neries, qui ne servaient qu'à allonger
les disputes, et qu'à multiplier les (A) Quelques jurisconsultes... s'em-
accessoires inutiles. Il est sûr que, portent étrangement contre lui
parce
dans l'usage ordinaire, l'on a droit qu'il donne la souveraineté des
états
de dire, lorsqu'on sait ou'un écrivain aux peuples. ] Boeder soutient que le
a de'bite' quelque chose, qu'il y a des principe d'Althusius n'est propre qu'à
gens qui l'ont débitée- L'on n'est rompre tous les liens de la société ci-
obHgé à citer plus d'un témoin, que vile et que son ouvrage, bien loin
;
de
lorsqu'on a dit que beaucoup de gens, mériter qu'on le recommande aux
que plusieurs personnes, la rappor- étudians, comme font plusieurs est
tent. Mais Grotius n'avait point parlé digne du feu Omnes reges nihil aliud
:

ainsi; son expression était vague : esse quammagistratus... A\[.h.ws\o in-


quidani dixêre , il y
en a qui ont dit ter solennia cannina place t ; cuius
ou quelques-uns ont dit. Il se tirait Politica non tradit sanè qui ciuitalis ,

pleinement d'affaire ,
quoique l'au- finis et félicitas et tranquitlilas obti-
teur qu'il citait ne fût pas calviniste, neri debeat , sed quibus viodis omne
mais luthérien ; et c'est vainement l'inculum societatis ac salutis ciuilis
que Rivet allègue ce qui se passa aux dissoif i ac ei'erti possit. Demai^ogica
conférences de Berne. Cela ne prouve appelles merito; et tamen quia juris- ,

point qu' Althamérus fût papiste on : consulti nomen prœjert , et quœdam


en peut seulement conclure , qu'il subindè in ostentationem ejus scien-
était si opposé aux Zuingliens , sur tiœ jacit, commendari juventuti aca-
le chapitre de la réalité qu'il ne fai- ,
demicœ audimus librum orco dam-
sait point scrupule de la soutenir , nandum judicio eorum qui venena a
même en faveur du papisme. SiRivet cibis distinguere didicerunt (i). Voici
a été content de lui-même dans cette le jugement qu'en fait le docte Con-
partiede sa dispute, c'est une marque ringius Fundamentuni. doctrince suce
:

que les controversistes ne discernent politicœ collocat in eo quod summa


guèrel'essentield'aveclespointilleries. Beip. cujusi^is jure sit pênes solum
populum : qui errer pestilens est et
ALTHUSIUS (Jean), iuris- ««'-^''«'^o or^^ (^)- Un autre
«^''"f
1. j>Aii a •*. écrivain allemand s est exprimé avec
consulte d Allemagne flonssait
,
j,j^, ^^ f^^ce. In dassem istam , dit-il
vers la fin du XVP. siècle. Il a (3), referendi sunt illi polaicorum
fait unde politique. Quel-
livre qui majestatis ^TpâTov cTêijcTixov popu-
ques iurisconsultes de son pays ^''«/«ti«««, ""/è politici populares
, i 'i .
* / j^ et quia iusuluni omnium principum
S emportent étrangement contre «/..^^^^^ petunt , monarchomachi
lui parce qu il a soutenu que la
, dicti. Horum hominum nefanda dog-
souveraineté des états appartient ynata rejèrthn habet Althusius in sud
aux peuples (A). Il a fait un Trai- ^"'^«''« publico edicto con-
^^^^"^^'
té de Jurisprudentiâ romand ,
'^"l^? Les jésuites... le mirent dans le
un autre dtCivili ConversaUone., catalogue des protestons qui ont mal
un autre qu'il
'
intitule Dicœolo- ,
(i)
. „
Boeder, in r
i

Urotium
. i
de i
Jure ^ u ,i
Ub. i
Belli , /,
gia etc. cap. III, num. 8, pag- «35.
,

J' oubliai
11- -11-
de dire, dans
1 11deux
les
(2) Conring. de Civ. Prudent.
(3) Mfver. m AnaWs., m. m , cap.
Poi.i
Xlf.
ArUt.

TOME r. 3o
,

466 ALTILIUS.
parlé de la puissance royale.] Voici les pour précepteur du jeune prince
paroles de celui qui présenta à la reine Ferdinand (A). Il paraît même
mère une réponse apologétique à l'An-
qu'il fut employé à des affaires
ti-Coton « Après Hotoman , dit-il
:

)) (4), adjoustons les enseignemens et d'état , et qu'il accompagna Jo—


» propres paroles de Jean Arthusius vien Pontanus à Rome, pour une
» (5), docteur es droits, en sa Politi- négociation de paix entre le roi
3) que méthodiquement digérée , im-
au Ferdinand et le pape Innocent
» primée à Herborn l'an i6o3 , ,

» chapitre des Ephores, où, pour ne VIII (6). Il eut beaucoup de part
)) rien dire du surplus , il escrit en- à l'amitié et à l'estime du même
)) tre autres choses , qu'il est loisible Pontanus : on en a des marques
» (l'oster le tyran de sa charge , le
publiques dans les écrits de ce
qui lui a
)> prii^er de l'administration

M esté commise , voire mesme le mettredernier fc). Sannazar ne lui a pas


3) a mort, si autre remède ne se donné de moindres marques de
trouve,
n et en substituer un autre a sa place. ^>
son estime dans ses poésies {d) :
Voici les propres termes d'Althusius
ab et ces deux-là ne sont pas les
(6) Ejusmodi
:
iyrannum ojfficio

removere administratione demandatd seuls qui l'aient loué (B). L'un


,

privare , imo etiain , si aliter contra des plus beaux poèmes de Ga-
uim se defendere non possunt , inter-
briel Altilius est celui qu'il com-
ficere , et alium in ejus locum substi-
le mariage d'Isabelleposa sur
tuere possunt.
d'Aragon (C). On ne croirait pas
(4'» Réponse Apologétique à l'Anli-Coton
pas. i85, i86.
aisément que des vers latins l'eus-
(5) Il fallait dire Althusius.^ ,
sent élevé à la prélature mais il ;
(6/ Allhusii Politica melhodicè
digesta cap. ,

XI y. est sûr qu'ils lui servirent beau-


coup à obtenir l'évêché de Poli-
ALTIÉRI. On a parlé de deux castro. Quelques-uns ont trouvé
cardinaux de ce nom dans le Dic- mauvais que depuis cette éléva-
tionnaire de Moréri. L'un mou- tion il ait négligé les
, Muses , qui
rut l'an i654; l'autre fut le pape lui avaient été si utiles (D). Ils
Clément X. On eût pu joindre à ont trouvé de l'ingratitude et de
ces deux-là le cardinal Altiéri , l'impudence
(e) dans la manière
qui mourut à Rome le 29 de précipitée dont il les abandonna:
juin 1698. et sa faute leur paraîtrait irré-
ALTILIUS (Gabriel), natif du inissible, s'ils n'avaient égard aux
royaume de Naples , a fleuri vers excuses qu'il pouvait faire sur ce
la fin du XV'. siècle (a). Il se fit que l'épiscopat exigeait de lui
principalement estimer par ses qu'il s'appliquât promptement à
vers latins , qui montrèrent qu'il l'étude des saintes lettres. Je tâ-
cultivait la belle littérature , et cherai de rectifier ce qu'on a dit
qu'il lisait les anciens avec touchant le temps de sa mort [f).
beau-
coup de profit. Cela lui fut avan- On n'a inséré dans le recueil de
tageux pour se pousser à la cour {b) Pontanus prœj". Tractatûs de Magni- ,

de Ferdinand roi de Naples la- ficL'Dtiâ.


, ,
l'épitaphe (TAllilius , et il lui dé-
(c) Il Jil
quelle se ressentait encore du
dia le ÏVaiïe de Magnificenliâ, f^oyez aussi
bon goût qu'on avait acquis sous son Dialogue ^gidius , pag. i47l-
le roi Alphonse. Il fut choisi {d) Eleg. A7, vers. XVII et Epigram. VU.
(e) Voyez ci-dessous le commencetnenl de
(rt) Et non pas du XIV^. comme dit Mo- la reinarijtie (Dj.
réi-i. (y) Voyez la remarque (D) , à la fin.
,

ALTILIUS. 467
Gruterus et dans celui de Jean- premier état qu'à la dignité episco-
Matthieu Toscan , que l'épitha— pale dont il était alors revêtu
il n'a- :

vait pas encore répudié les


lame d'Isabelle d'Aragon (E). Il premières maîtresses (supposé
Jluses, ses
qu'il
y a beaucoup d'apparence que la les ait jamais répudiées)
ainsi l'en- j

plupart des autres vers d'Atilius tretien roula sur quelques vers de
sont péris. Martial qui avaient été chantés
,
par
un jeune musicien.
(A) Il fut choisi p'yur précepteur
j>^^} F^"' ^^^ P^^^ beaux poèmes
du jeune prince Ferdinand, ] C'est ce d Altilius eu celui qu'il composa sur
qu'a voulu dire Paul Jove, en se ser- le mariage d Isabelle
d'Aragon. '\Ç.' est
vant de cette expression, yiiniom Fer- par-la , et par ses élégies,
qu'il acquit
dinandi re^is(i): Ughelli s'en sert aussi sa réputation Usque adeo :
molUterac
(2).LeToppi est d'un autre sentiment: admirandè in elegis et heroïco car-
Fu maestro, dit-il, di Rè Ferdinando I mine excelluit, sicuti ex
Epiihalamio
d'Aragona , e P^escoi'o di Policas- Isabellœ Aragomœ pcrspici potest
tro, nel \\-ji (3). Je crois qu'il se ut Pontani atque Actu testimnnlo ari-
trompe. Ferdinand F'', mourut l'an tiquis i'atibus œquaretur (8;. Iules
Sca-
i494t âge' de plus de soixante-dix ans : liger a trouvé trop de profusion
dans
donc né environ l'an 1424 il
il e'tait j
l'épithalame voici le jugement qu'il
:

faudrait donc qu'Altilius eût été son en a fait Gabriel Aliilius epithala-
:

précepteur en^^ron l'an 144"' Le pré- mium cecinit longé optimum excel- ,

cepteur d'un ûls de roi n'est pas or- lentissimum verà futurum , si sibi ille
dinairement fort jeune il faut qu'il : temperdsset. Diim enim uult omnia
ait eu le temps de faire paraître son dicere, ajflcit auditorem aliquandàfas-
érudition et sans doute le roi Al- tidio tanto quanta in aliis ^oluptate.
: , ,

fonse qui était savant


, et envi- Est enim nimius
, quod uitium illi ,

ronné de savans n'aurait pas choisi genti est peculiare. Est enim lotis illis
,

Altilius, sans avoir examiné les preu- Italiœ tractibus perpétua loque ndi
fa-
ves de sa noblesse littéraire. On peut més (9). Cela n'est guère obligeant
donc supposer qu'en 1 44» , Altilius pour ceux de Naples (10).
,

aurait eu trente ans. Or, à peine était- (D) On lui a reproché d'ai^oir né-
il né :il ne vécut qu'un peu plus de gligé les Muses, qui lui avaient été
soixante ans ;4) ^t il mourut l'an SI utiles. 2 On a de la peine à digérer
>

i5oi (5). qu'un évêque soit l'auteur de ce re-


(B) Pontanus et Sannazar ne sont proche , et qu'il l'ait exprimé en ter-
pas les seuls qui l'aient loué. ] Le Gi- mes si durs Is virtutis merito Poli, :

raldi en parle très-avantageusement. castri ( ea urbs olim Buxentum fuit


)
Basile Zanchius a fait plusieurs vers antistes faclus , à Musis perquas pro~
à la louange d' Altilius qui se trou- fecerat, celeriter imipddesterque dis-
,

vent dans les Délices des poètes d'I- cessit , MAGNo herclè ingrati animi pu-
talie. Jean-Matthieu Toscan dit beau- CCLO nisi ad spem non injustes ueniœ ,

coup de bien de lui , tant en vers ob id cu/pa tegeretur, quàd ad sacras


qu'en prose (6; j mais ceux qui vou- litteras nequaqu'am ordlnis oblitus tem-
dront voir l'éloge de son esprit et de pestifè confugisset (ii)- Voyez sur
son cœur en même temps doivent cela les réflexions judicieuses de
lire Alexander ab Alexandro qui a M. Baillet (laj.Ces quatre vers de La-
,

décrit assez amplement la manière tomus ne sont pas mauvais :

dont lui et quelques autres furent ré-


Audiil Altilius desertis liansfuga Musis
galés par Altilius, quand ils le furent In quarum labulis nobile nomen eral.
,

de sa prélature (7). Il leur


féliciter Sed quid pecca^il si detnereatur , ut olim
donna un souper plus conforme à son Carminibus Phœbum, nunc pietate Deuin ?

(1) Pauli Jovii Elog. cap. CXXV., (8 Jovius , Elogior. cap. CXXV.
(2) Ughelli Italia sacra , lom. VII p. 'ifi. , (9) Jul. Cssar. Scalig. Poëtices lib. VI , p.
(3) Toppi , Bibliotheca Napoletana pas. lOi. . 736.
(4) Jovius , in Elogiis cap. CXXV. , (10) f'oret la remarque (H) de l'article
(5) Voyez ci-dessous , citation Çj"^). Alexandek ab Alexasdeo, vers lafin.
(6; /n'Peplo llaliae. (11) Paul JoTius Elogiorum ta/>- CYX'J''".
,

(;) Alex, ab Alex.


rttp. I.
Génial. Dieram lib. ,
V (12) Baillai, Jugem. sur les Poètes, lom. 1
pag. i3S. Fojei aussi lom- III pag- 82. ,
468 ALT IN G.
Altilius aurait été plus blâmable , si, niUio Ghero. Le recueil de Jean-Mat-
après avoir obtenu la mitre à force de thieu Toscan est intitulé , Carmina
prêcher, il eût fait comme bien d'au- illustrium Poëtarum Ilalorum, Cet
tres , qui ne prêchent plus dés qu'ils auteur dit dans son Péplum , qu'il
se voieat au rang d'évêque. Ils savent, n'a lu que I'Epithalame , et quelque
qu'afin de conserver cette sorte de peu d'épigrammes d'Altilius. Celui qui
domination , il n'est pas besoin d'em- a procuré en 1689 ^^^ nouvelle édi-
ployer les mêmes expédiens dont on tion des poésies latines de Sannazar
s'est servi pour y parvenir (i3). (*) , et qui les a ornées de quelques
Paul Jove n'a guère été plus heu- notes, observe qu'il ne se souvient
reux quant à la question de fait. Il point d'avoir vu d'auti*es pièces im-
prétend qu' Altilius ne fit plus de vers primées d'Altilius, que I'Épithalame
depuis son élévation à l'épiscopat, et et une épigramme; d'où il infère qu'il
que le plus beau de ses poèmes est s'en estperdu beaucoup, puisque Paul
i'Épithalame d'Isabelle d'Aragon (i4)- Jove parle des élégies de ce poète,
Je ne doute pas que cette Isabelle ne et que Sannazar lui attribue des odes
soit celle qui fut accordée le i ". de (i8^. Pour réparer en quelque façon
novembre i^"]^ avec Jean Galeas cette perte , on nous a donné dans
Sforce , duc de Milan. Je ne saurais les notes sur Sannazar trois ou quatre
donc me persuader qu'Altilius soit pièces d'Altilius qu'on avait en ma-
,

coupable de la désertion qu'on lui nuscrit *. Le Toppi fait mention de


impute. Il devint évêque l'an 1471 : trois pièces d'Altilius, insérées ne'F'iorl
le plus beau de ses poèmes fut com- délie Rime de' Poeti illuslri raccolll
ed ordinali da Girolamo Ruscelli ,
stampati in f^enetia nel 1 558, tn-8".
,

(19). Ces trois pièces sont Gabrielis :

Épithalame, non pas au temps des Lamenlatio ejusdem Epilha-


uiltilii ,

fiançailles mais au temps des noces


, lamium, ejusdem Elegia.
d'Isabelle d'Aragon, c'est-à-dire, l'an
(*) C'est feu M. Broeckhusins. Rem. cru
1489 (i5). Cela se prouve par les pre- (18) Notae in Sannaz ,
pag. 184.
miers vers : * La Monnaie sur les Jugemens des Savans ,
n°. 1234, et Leclerc après lui et Joly après
Purpureos jam sinus Tiihonia conjux
Icela ,

Extiilerat, roseoque diem paLefeceral orlu,


euXj remarquent que ces pièces avaient paru cl
la suite des poésies de Bazilius Zanchius , Baie,
Cceriileum tremulo percurrens lumine pontum.
chei Oporin , i555, in-S°.
Qui cupido sua vola viro desponsaque dudum
Connubia, ovri.ros<ivs. locos et gaudia Jerret. (ig) Toppi , Bibliotheca Napoletana , p. 102.

Par-là , nous convainquons d'une ALTING (Henri) professeur ,


grosse faute l'abbé Ughelli , qui a
en théologie à Heidelljerg et à
dit qu'Altilius mourut dans son évê-
ché de Policastro , l'an 1484 (16). On Groningue , naquit à Embden ,
peut prouver qu'il ne mourut qu'en- le l'j de février i583. Sa famille
viron l'an i5oi ; car Jovien Pontanus était dejDuis long-temps fort con-
observe, en parlant de la nouvelle de
sidérable dans la Frise. Dès le
sa mort, que Sannazar s'en allait en
France avec le roi Frideric (17). berceau , il fut destiné à une
(E) On n'a insère dans les recueils charge oii son père s'était signa-
de jGruterus et de J.-M. Toscan que , lé je veux dire au saint minis-
;
r Epithalame d'Isabelle d' Aragon. ]
J'entends par le recueil de Gruterus
Pour cet effet on l'en-
tère (A). ,

l'ouvrage qu'on intitule Deliciœ CC. voya de fort bonne heure aux
Ilalorum PoëLarum , collectore Ra- écoles ; et après qu'il eut fait à
(i3) Salluste a dit que , Imperium facile iis Groningue ses humanités et son
arlibiis relinetur , quibus initio partiim est.
(i4)Jovius, Elogiorum cap. CXXV.
cours de philosophie, on le fit al-
{iS) M. de la Monnaie m'a communiqué celle ler en Allemagne , l'an 1602. Il
remarque.
(16) Uglielli Ital. Sacra, tom. VII, pag. 796. s'arrêta trois ans à Herborn, et y
(17) Jovian. Pontanus, in Dialogo cui tilu- fit de grands progrès sous le cé-
si
lus jÉgidius, pag. 1471, i^^"]. M. delà Mounaie
nCa indiqué cela. lèbre Piscator, sous Matthias Mar-
, 3

ALT IN G. 469
tinius et sous Guillaume Zeppe- eut même
l'honneur de parler
rus , qu'il obtint la permission avec le roi Jacques. Les noces de
d'enseigner la philosophie et la l'électeur et de la princesse d' An-
théologie. Il se préparait à voya- gleterre ayant été célébrées à
ger en Suisse et en France lors- , Londres au mois de février 161
qu'il fut choisi pour être précep- (b) Alting prit les devans avec
,

teur de trois jeunes comtes (a]qai ses anciens disciples, et arriva à


étudiaient à Sedan avec le prince Heidelberg le i*""". d'avril. Au
électoral palatin. Il prit posses- mois d'août suivant, on lui don-
sion de cet emploi au commen- na la profession des lieux com—
cernent de septembre i6o5. L'o- muns de théologie; et, comme il
rage qui menaça le duc de Bouil- n'aurait pas pu présider à des
Ion de la part de Henri IV, et qui disputes s'il n'eut été docteur en
n'eut aucune suite, fut cause que théologie, il fallut qu'au mois

le prince électoral sortit de Se— de novembre il reçût le doctorat


dan avec ces autres jeunes sei- selon les cérémonies ordinaires,
gneurs , en l'année 1606. Alting En i6i6 , on lui conféra une
les suivit à Heidelberg oiiilcon- , charge qui n'était jîas peu péni-
tinua d'instruire les trois jeunes ble ce fut la direction du sémi-
:

comtes. Il fut même admis à naire , s'il m'est permis d'appe-


donner quelques leçons de géo- 1er ainsi le collège de la Sapien-
graphie et d'histoire au prince ce qui était à Heidelberg. On
,

électoral , et il devint tout-à-fait voulait lui donner la profession


son précepteur, l'an 1608. Ou en que la mort de Coppenius rendit
peut trouver des preuves dans la vacante l'an 1618 c'était la se—:

Bibliothèque Yaticane(B). Ill'ac- conde chaire dans la faculté de


compagna à Sedan en cette qua- théologie mais il s'en excusa et
; ,

lité, et il l'instruisit d'une si bon- fit qu'elle fût donnée à Sculteti


ne manière, que ce jeune prince, Il donna des preuves éclatantes

après son retour à Heidelberg de son savoir dans le synode de


en 161 o étant interrogé sur tous
, Dordrecht , ou il fut envoyé avec
les points de la religion devant le deux autres députés du Palati—
duc de Deux-Ponts, administra— nat (c). Ce fut alors que l'acadé-
teur de l'électorat et devant plu-
, mie de Leide fut réhabilitée par
sieurs autres personnes d'impor- rapport au doctorat qu'elle avait
tance , répondit fort pertinem- laissé éteindre. Alting y créa so-
ment , et en latin. Il fut l'une lennellement licencié en théolo-
des personnes d'élite qui accom- gie le professeur Jean Polyander,
pagnèrent en Angleterre le jeune qui ensuite reçut de Scultet le
électeur, l'an 161 2. Il y acquit la caractère de docteur, et se vit
connaissance de George Abbot ,
par-là revêtu de l'autorité re-
archevêque de Cantorbéri celle ; quise pour conférer le doctorat à
de King évêque de Londres et
, ; , „
Il 1 1 TT
. 11 ' {") Koni" ne lui donne pas un temps con-
celle du docteur Hacquell pre- , ^enablc,en disant, yi^a anno i6i3 : «n'é-
Cepteur du prince de Galles. Il tait point encore son état le plus florissant.
(c) Abraham Scultet et Paul Tossan. Ce
,

{d] Le comte de Nassau , le comte de Solms dernier fut député du sénat ecclésiusiique y
el le comte d'Isenberg. les deux autres, de l'académie.
, ,

4^0 ALT IN G.
ses collègues. Alting conçut sans or c'est ce qu'ils ne fi-
tiraient ; ,

doute bien des espérances peu rent pas. Il est vrai encore qu'il
après son retour à Heidelberg. Les avait prêté l'oreille aux proposi-
troubles de Bohème valurent une tions que le prince Louis Phi-
couronne à l'électeur palatin lippe (e) lui fit faire en i634, de
;

mais ces beaux commencemens venir rétablir l'académie d'Hei-


furent suivis d'une affreuse rui- delberg et les églises du Palati-
ne. Tilli prit d'assaut Heidel- nat et qu'il s'était déjà avancé ;

berg au mois de septembre 1622, jusqu'à Francfort , au travers de


et y laissa commettre tous les mille périls mais la bataille de ;

désordres qu'on se peut imagi- Norlingen , gagnée par les Im-


ner (C). Alting, échappé comme périaux fit évanouir cette en- ,

par miracle à la fureur du soldat treprise. Il fallut qu'il s'en re-


(D) , alla trouver sa famille qu'il tournât à Groningue par des
avait envoyée depuis quelque chemins détournés. Il ne paraît
temps à Heilbron. Il la rejoignit dans son histoire aucune autre
à Schorndorf et eut de la peine envie de transmigration. Les der-
,

à y pouvoir séjourner durant nières années de sa vie furent


quelques mois les ministres lu- un temps très-fâcheux les cha-
: ;

thériens exerçaient contre lui le grins et les maladies le persécu-


dogme de l'intolérance (E). Il se tèrent cruellement. Il eut tant
retira avec sa famille à Embden de regret de la mort de sa fille
l'an 167.3, et fut d'abord saluer aînée, en i63g, qu'il en tomba
le roi de Bohème à la Haie. Ce dans une opiniâtre mélancolie
prince le retint auprès de lui qui lui causa une fièvre quarte ,
pour l'instruction de son fils aî- dont il ne guérit qu'avec mille
né (d) , et ne voulut point con- peines , et encore n'en guérit-il
sentir qu'il s'engageât à servir qu'imparfaitement; car les restes
l'église d'Embden qui le deman- de la maladie dégénérèrent l'an
,

dait pour ministre , ni l'acadé- 164 en une fâcheuse léthargie. 1 ,

mie de Franeker , qui , en 1625, Cent combats livrés par les mé-
lui offrit la place de professeur decins à ce mal l'avaient à peine
en théologie , que la mort de Si- chassé qu'il survint une afflic- ,

brant Lubbert avait fait vaquer. tion domestique qui ramena plus
Ce prince consentit avec peine , que jamais l'infirmité corporelle.
l'année suivante , qu'il acceptât Altingperdit sa femme l'an i643,
une profession en théologie à et en conçut tant de chagrin ,
Groningue. Alting en prit pos- qu'il ne fut plus capable de sur-
session le 16 de juin 1627 et ne monter la mélancolie. Il ne fit
,

la quitta qu'avec la vie. Il est presque, depuis cette solitude


vrai qu'il était parfaitement ré- jusqu'au jour de sa mort que ,

solu, en i633 de changer Gro- passer d'infirmité en infirmité.


,

ningue contre Leide mais il s'é- Il mourut chrétiennement et dé-


;

tait réservé cette condition que ,

les états de Groningue y consen- Ce) du Palatinal


// e'tait adminisiraleur
en i633 à Alting une place de pro-
et il offrit
{d) Qui périt sur la mer de Hacrlem , le
7 fesseur en théologie, et de sénateur ecclésias-
de /finfier 1629, tique.
,

ALTI NG. 471


votement 25 d'août i644-, le lespersonnes de sa profession de-
C'était un homme de beaucoup vraient régler leur domestique
de mérite. Les livres qu'il a com- comme le sien était réglé (H). On
posés (F) font foi de sa science et n'en parlait que pour dire en gé-
de son application au travail aca- néral que tout y était dans l'or-
démique et on sait d'ailleurs
;
dre il ne fournissait point d'au-
:

qu'il mêlait d'autres choses


se tre matière aux conversations. Il
pour le service du prochain. Il s'était marié à Heidelberg l'an ,

allait voir tous les ans le roi de 1614 et avait eu sept enfans. Il ,

Bohème et faisait la revue des y en eut trois qui lui survécu-


,

études de la famille royale. Il rent une fille et deux garçons. ,

travailla puissamment aux col- L'aîné a été professeur en droit à


lectes qui furent faites dans tout Deventer [g). L'article suivant
le monde protestant pour les traite de l'autre.
églises d'Allemagne , et princi- nonnuUi-i ac nasittis Palœmonibiis traduci
palement pour celles du Palati- tanguàmTkeologum scripturarium et Bibli-
cum. Vita Alting.
nat. fut l'un des trois écono-
Il
(g) Tiré de la Vie de Jacques Alting, par-
mes des collectes d'Angleterre mi celles des professeurs de Groningue, im-
primées in-Jolio , l'an l65!^.
et il présida aux aumônes de
Louis de Geer. Je ne parle point (A) Son père s'était signalé dan9 le
de deux commissions importan- saint ministère.'] 11 s'appelait Menso
tes dont il fut chargé , dont l'une Alting
d'un autre , et était petit fils

Menso qui avait été donné en otage


regarde la revue qui se fit à Lei- au duc de Gueidre par les états de
,

de de la nouvelle version flaman- Drente l'an i523. Un autre Menso ,

de de l'Ecriture et l'autre re-


,
Alting, bisaïeul de celui qui fut donné
garde la visite de la comté de en otage avait été conseiller de Kei- ,

nold-le-Gras duc de Gueidre et s'é- , ,


Steinfurt. II eut des collègues
tait retiré au pays de Drente l'an ,

dans la première mais il fut le i36i (i). Menso Alting , le ministre ,


;

seul inspecteur général dans la fut le premier, qui avec deux autres, ,

seconde , le comte de Bentheim prêcha la réformation dans le ter-


ritoire de Groningue environ l'an ,

l'ayant fait venir pour informer i566, pendant les violences du duc
contre le socinianisme qui mena- d'Albe sub ipsâ Alhani ducis gras- ,

çait le pays , et pour mettre un sanle tyrannide (2). Il fut aussi le


bon ordre dans les églises. Al- premier ministre qui prêcha dans
la grande église de Groningue après ,
ting, à ce que dit son Eloge, n'é-
la réduction de la place au pouvoir
tait point un théologien querel- des états-généraux, l'an 1594. 11 servit
leux (G) il ne s'amusait point
: fidèlement l'église d'Embden 38 ans ,
à la vétille des faux scrupules il et s'opposa avec un courage fenne
;
aux fureurs des anabaptistes et aux ,

n'aimait point les nouveautés; il machinations des ubiquitaires. Il mou-


était zélateur de l'ancienne tra- rut le 7 d'octobre 1612, le jour mêuie
ditive ennemi des subtilités de que son fils et Abraham Scultet
,

l'école et il ne voulait puiser pensèrent périr sur le lac


de Haer-
,
lem Subitd acprocellosd coortd teni- :

que dans l'Ecriture {/)• Toutes pestate naitjragio ac subniersione ,

(_/) Theo/ogiani probabal ac luebatur so- (i) Viu Jacobi Alting.


lidam ac inasculam non ex lacunis scholas-
,
le lecteur que le duc d'Albe n ar-
Taverlis
(2)
ticorinn etsi illanim inexpeftus non esset,
.
riva dans le Pars-Bas qu'en i56j ainsi l'au- :

sed ex Jontibus Siloë et Scripturanim dcii.- teur de la Vie de Henri Alling na pas été ici.
i-iitam ; ut glorice sibi diiccrel se ab imreritis af<cz exact.
472 ALTING.
proximi (Scultetus œgrè dres que les maux qui suivent néces-
et Altingius),
tandem totn corpore madentes salui sairement une rupture. Nous aurons
,

tamen dwinâ cleme.ntid in proximam lieu de rapporter plus d'une fois les
ripam evaserunl (3). Sa vie ample- angoisses où de grands capitaines se
,

menl écrite par Ubbo Emmiiis , est sont vus réduits , lorsque leur con-
entre les papiers de ses héritiers f4)- scienceleur reprochait les ravages dont
(B) // a étii précepteur du prince ils ovaient été cause.
électoral palatin on en peut trouver
: (D) Il échappa comme par miracle
des preuves dans la Bibliothèque Va- à la fureur du soldat.] Les circonstan-
ticane?^ On y conserve les thèmes du ces de son évasion méritent d'être
roi de Bohème , corriges de la main rapportées. 11 était dans son cabinet
d'Alting j et on les montre aux voya- lorsqu'il apprit que l'ennemi maître ,

geurs, à ce que dit l'auteur de la Vie de la ville , commençait à la saccager.


de ce professeur. Il ajoute, que ces 11 ferma le verrou de sa porte , et
monumens ne sont pas moins dignes n'eut recours qu'à l'oraison. Un de ses
d'être montre's aux curieux, que la amis accompagné de deux soldats ,
,

plupart des reliques qu'on leur mon- fut l'avertir de se retirer par la porte
tre Hujus magisterii ejus ne unquani de derrière chez le chancelier dont
:
,

apud posteras intestala queat esse in- la maison^ avait été mise sous une
dustria , i^el Roma , quod niiremur, bonne sauvegarde , parce que le comte
faciet, quœ in Bibliothecâ f^aticand de Tilli voulait avoir en leur entier
inter Heidelbergensia cimelia , dicani tous les papiers qui y étaient. Le
an spolia ostentat themata et exerci- lieutenant colonel du régiment de Ho-
,

tla slyli régis Bohemiœ , Altingii ma- ht'nzollern gardait cette maison, yivec
nu emendala , eruditis peregrinatori- cette hache disait-il j'ai tue aujour-
, ,

bus niinimèque superstitiosis uisenda , dhui dix hommes le docteur alting


atque non miniis credo , quàni plerœ- serait bientôt le onzième, si je sa^'ais
que ipsorum reliquice *|(oâê«.T*, digna où il est caché. Qui êtes t^ous ? pour-
spectatu (5). suivit-il , en adressant la parole à ce
(C) On commit , dans la prise docteur. Alting ne fut pas si troublé,
d'Heidelberg , tous les désordres qu'on qu'il n'inventât sur-le-champ une ré-
se peut imaginer] On pilla , on tua, ponse, qui n'était pas la plus fausse
on viola , on gêna j en un mot , on qu'il pouvait faire. J'ai été régent,
n'oublia rien de tout ce que la fureur répondit-il dans le collège de la Sa-
,

du soldat , anime'e par le faux zèle de pience. L'auteur de son Eloge compare
religion , est capable de commettre : cette réponse à celle que fît saint
Urbs. . .impetu et ui capta , omnia- Athanase Sanè, dit-il, ille vultus y
. :

que dira exempla passa direptionis ille hahitus , ille sermo^ is rerum ar-
,
lanienœ , libidinis, quce militaris li- ticulas quemuis alium percellere pote-
centia , uictoris insolentia , odium re- rat : at nosler iniperterritus , solerti
ligionis, barbarorum Croatarum feri- tamen usus responso , nec aperlè se
tas comminisci potuére aut patrare.... negai^it Altingium nec tamen intem-
,

Ed nocte imomni et mœstn inter la- pestii'è se prodidit, eâdem ferè quâ
menta et ejulatus quibus omnia undi- olim in casu simili sanclus y4thanasius
qtie perstrepebant , aut sequioris sexûs dexteritale usus, « Ego inquit , lu-
,

fim patienlis , aut uirorum equuleis )) dimagister fui in collegio Sapien-


subditorum , ac per t^aria tomienta ac » tiœ. j) Le lieutenant colonel lui pro-
i'ulnera lentd citâve morte afj'ecto- mit de le sauver. Le lendemain les ,

rum , etc. (6). Voilà les fruits ordinai- jésuites prirent possession de la mai-
res de la guerre voilà de quoi faire son, et eu firent décamper si vite
:

trembler ceux qui l'entreprennent, cet officier, qu'il n'eut pas le temps
ou qui la conseillent, pour remédier de s'informer de son régent du col-
à des maux qui peut-être n'arrive- lège de la Sapience. Alting se trou-
raient jamais, et qui, au pis aller, va donc entre les mains des jésuites
j
seraient quelquefois beaucoup moin- mais il s'était sauvé dans un galetas
j
et, par bonheur, un cuisinier delà
(3) Vita Hcnr. Alting.
cour électorale fut employé par le
(4) Vita Jacobi Alting.
(5) Vita Henr. Alting. comte de Tilli , dont la cuisine fut
(6) Ex Vitâ Heur. Alling. logée dans la maison du chancelier.
, ,,

ALTING. 4^3
€et homme nourrit en secret Alting le duc lui avait donne'e le fondement :

dans le galetas et lui fournit même de leur chagrin e'tait qu'Alting était
,

le moyen d'aller voir ce qui se passait un professeur d'Heidelberg. Ibi ad


chez lui. Il lui donna pour escorte februarium usqiie hœsit facultate ,

trois soldats de l'armée bavaroise, hdc per serenisiimam Electiicem im-


Altrng trouva sa maison dans un grand petratâ a duce Jf^irtembergico cujus ,

désordre et son cabinet au pouvoir aliàs ministri lutherani quasi Ponli


,

d'un capitaine, qui lui dit, ou par Axeni accolœ, aut aves Dioruedœ
moquerie, ou par courtoisie qu'il lui c/uœ solos sncios gratenter eyclpiunt
,

permettait d'emporter tel livre que id ferebant œgcnbnè, non alla de


bon lui semblerait. Ou ne voulut causa quant quàd Altingius projessor
point accepter son ofire et l'on se essel Heidelbergensis (8,1. Je crois en
,

contenta de lui répondre , que si ces efl'et qu'ils eussent mieux observé les
,

choses lui appartenaient, on souhaitait droits d'hospitalité envers un mar-


que Dieu lui en accordât une plus chand du Palatmat, ou même envers
longue possession qu'à leur premier un professeur calviniste d'im pays
maître. Alting essuya mille périls en très éloigné , qu'envers un professeur
s'en retournant et au bout de trois d'Heidelberg. Le Palatiiiat était voisin
5 ,

jours Tilli lui permit de se retirer. du Wirtemberg


, les professeurs de :

J'ai lu quelque part que si Alting Tubingue et ceux d'Heidelberg , se ,

n'avait pas craint d'exposer son pro- choquaient de temps en temps par des
pre bien et de passer pour plagiaire
, thèses et par des écrits polémiques.
,

il aurait pu sauver plusieurs livres de Voilà ime source de haine théologique


la bibliothèque électorale , et qu'il en et professorale. Mais après tout il , ,

avait transporté plusieurs au collège n'est pas possible d'excuser l'intolé-


de la Sapience ; mais j'avoue que je rance qu'on eut pour Alting. Il était
n'entends rien à tout cela j'y trouve échappé du milieu des flammes papa-
:

de la contradiction. Si de peur de les , l'injure que l'ennemi commun


:

passer pour plagiaire, il ne transporta lui avait faite lui devait servir d'une
point dans son cabinet aucun livre de puissante recommandation; sa foi
la bibliothèque électorale pourquoi ne différait de celle de Wirtemberg
,

dites-vous qu'il en avait retiré plu- qu'en deschoses non essentielles. Si l'on
sieurs au collège de la Sapience , et avait à se haïr et à se persécuter pour
qu'il aurait pu en sauver plusieurs ? la religion, on devrait attendre que
Outre que, selon l'auteur de sa Vie l'on flit, comme les peuples d'Egypte,
,

il n'eut permission que d'emporter un les uns au service d'un dieu et les ,

volume. Lisez pourtant ce qui suit autres au service d'un tout autre dieu :
:

Hune (Quintilianum ) et alios illius Inlerjinilimos vêtus alque anliqua simullan ,


hibliothecœ libros sud manu in collc- Iinmorlale odium el nunqu'am sanabde vul- ,

gio Sapientice exceperat Henricus Al- nus


Ardet adhuc Ombos et Tentyra summus
tingius atque ex commuta illo incen-
,
, ,

uirinque
dia bauarico eripuisset , nisi suis recu- Inde furor vulgo qubd nitmina vicinorum
,

lis timuisset, et ne plagiarius habere- Odit uterque locus quitm solos credat ha-
,

tnr ,si antiquus liber in ejus supellec- bendos


Esse deos , quos ipse colil (9).
tile reperiretur , ueritus fuisset (•]).
(E) Les ministres luthériens exer- Aussi voit -on que les promoteurs des
çaient contre lui le dogme de l'intolé- guerres ecclésiastiques supposent tou-
rance.'] A la prière de l'électrice , il jours que les diffèrens sont d'une ex-
obtint du duc de Wirtemberg la per trême conséquence. C'est une gan-
missiondesejourDeraSchorudorf.il grène disent-ils; c'est la sape des
.,

s'y arrêta jusqu'au mois de février Jbndemens de la religion.


qui suivit la désolation du Palatinat. (F) Les liures qu'il a composés."]
Les ministres luthériens murmuraient Voici ceux qui ont été donnés au pu-
de ce séjour, et de la permission que blic ': JYotœ in decadem problenialunt
Johannis Belim de glorioso Dei et bea-
(7) Lomeier de Bibliolli. pag. 378. Je ne toruni coelo Heidelberga? 1618.
, ,
, Loci ,
homme qui dérobe,
sais si plagiaire se dit d'un
non pensées d'un auteur, mais un livre ou
les (8) Vita Ahingii.
un volume en espèce , sans le publier sous son (9) Jiivenal. Sat. XF , vs. 33.
nom. * Celle Une esl (rès-incomplète, dit 3L Stap.
,
,

474 ALT IN G.
communes , cum didactici, tum
dent à leurs disciples de s'éloigner de
elenc-
tici:Problemnta, tant theoretica, quant cet esprit d'innovation. Il ne faut pas
practica : Ex plicalio catecheseos Pala- se rebuter sous prétexte qu'en re- ,

tinœ cum P^indiciis ab .'Jrminianis et commandant fortement l'observation


Socinianis Amstelodami , 1646, en de l'ancienne et commune traditive ,
,

trois volumes. Exegesis ^uguslance il semble qu'on suppose le principe ou


confessionis unà cum syllabo contro- la voie de l'autorité que l'on a .reje-
,
,

t^ersiariim lutlieranarum Amsteloda- tée quand on a eu à combattre l'Église


,

rai, 1 647 Metlindus theologiœ didac-


. romaine il ne faut point, dis-je, se :

ticœ et catecheticœ Amstelodami, décourager pour tout celaj car si l'on


,

i65o. Ceux qu'on n'a point pub'ie's attendait à se servir d'une raison jus-
sonten plus grand nombre :1a dernière qu'à ce qu'elle fût à couvert de
main manque à quelques-uns. On en toute difliculté on serait trop long- ,

voit la liste à la fin delà Vie de l'auteur. temps sans rien faire.
J'y ai vu que la Medulla historiée pro- (H) Les minisires deiraient régler
Jianœ, publie'e par Daniel Pareiis est leur domestique comme le sien était
,

un ouvrage de notre Alting c'est un réglé. ] On savait seulement que per-


:

plagiat qui n'a pas éle remarque par sonne ne savait ce qui s'y passait
Thomasius, ni yar M. Almeloveen (i o). hormis qu'on n'ignorait pas que toutes
\J Histoire ecclésiastique du Palatinat, choses y étaient dans la bienséance
depuis la réformation, jusqu'aVadmi- et selon la crainte de Dieu Hinc in :

niitrateur Jean Casimir, est parmi les familiâ ejus omnia semper pacata ,
ouvrages manuscrits d'Alting l'un des omnia ordinata de qud hnc solum. ,

plus considérables. sciretur quod à nemine sciretur quid ,

(G) // n'était point un théologien in illdjîeret , nisi quôd piè, compo-


querelleux.^ Rapportons les propres site aecenter omnia Jieri neminem
,

termes de son historien Alienus ajur- :


lateret (i3). Cela est cent fois plus
giis et l'itilitigiis cuininisectorum ; ab beau que si le monde s'entretenait de
lis distinctiunculis et ineptiis sophis- ce qui se dit, et de ce qui se passe
tarum , quibus mysteria salulis potiiis chez un ministre. On a débité une y
implicantur quam ea plicantur ; à scm- telle nouvelle ce matin {\^), dit l'un.
pulositatibui prœcisistarum , qui no- On disputa hier au soir sur une telle
y
dum qucerunt in scirpo , calant culi- réflexion de nouvelliste , dira l'autre.
cem , camelum deglutientes (ti). La // peut s'excuser comme Adam , dit
secte des précisistes faisait du bruit un troisième , et dire , la femme que
en Hollande , il y a quarante ans (12), tu m'as donnée me l'a fait faire.
plus ou moins la voilà fort bien ca-
: Quoi , dit un quatrième , vous n'a-
racte'rise'e ^ on y coule moucheron
le ,
vez appris cette circonstance qu'en ce
on y engloutit le chameau j on y ou- lieu-là ? je m'en déjie. C'est un mau-
vre la porte à des disputes qui ne ser- vais bureau d'adresse , etc. : la Nyra-
vent qu'à l'armement des profanes et pha loquax , qui y
préside , ajoute et
des libertins. Poursuivons ab omni : Jait ajouter ce que bon lui semble aux
deniquè nciivcei^tivid, et noi'atione in theo- relations. Je ne veux point de ses
logicis , quasi illud semper Tertul- gloses , ni de ses commentaires ; j'en
liani lenens , « primum quodque i^eris- appelle au texte , quelque incertain
simum. de doute que
» 11 n'y a point qu'il puisse être. Il ne faut pas s'éton-
l'amour des nouveautés ne soit une ner qu'Alting ait été inconsolable
peste qui après avoir mis en feu les
, après la mort de son épouse , s'il est
académies et les synodes ébranle et , vrai , comme son historien le débite ,
secoue les états , et les bouleverse qu'il ait vécu avec elle près de trente
quelquefois ainsi l'on ne saurait trop
: ans, sans aucune plainte ni contesta-
louer les professeurs qui recomman- tion Cum eâ per annos propè triginta
:

sine rixâ, sine quereld conjunctissimè


derdans la Biographie universelle mais les ;

nombreux ouvrages d'Alling n'ont plus qu'un vixit (i5). Peu de gens se peuvent
intérêt historique. vanter d'une telle chose , et se plain-
(10) // a publie' un Catalogue des Plagiaires
h lajin de ses Amœnitales Tlieologico-Philolo- {i3) Vita Jacobi AUiag.
gicœ, Amstelod. 1694 , in-8°. (i4) Conférez avec ceci la remarque {\) de
(11) Vita Jacobl Alling. l'article de Grutercs.
( \;j On écrit ceci en 169S. (i5) Vila Jacobi AUinjii.
,

ALT Ils G. 475


dre d'ignorer de la récon-
si les effets qui le sollicita plusieurs fois
ciliation sont aussi doux dans le ma- rme chaire de théo-
d'accepter là
riage, que dans la galanterie :

logie de quoi il s'excusa honnê- ,

Amanlium irte amoris integralio est (i6). tement. Il se brouilla dans peu
(ifi) Terenl. Andr., acU III, se. III vs. î4- de temps avec son collègue Sa-
,

muel Des-Marets et il était dif- ;

ALTING (Jacques), fils du ficile que cela n'avînt vu que ,

pi-écédent a été professeur en leur méthode d'enseigner n'était


,

théologie à Groningue. Il naquit pas la même et que sur divers ,

à Heidelberg le 27 de septem- points ils n'avaient pas les mê-


,

bre 1618, pendant la députation mes principes. Alting s'attachait


de son père au synode de Dor- à l'Écriture sans aucun mélan- ,

drecht. Toute son enfance fut un ge de théologie scolastique. II


perpétuel changementde lieu (A). entrait dans la carrière de la
Il fit ses études à Groningue avec gloire il se hâtait de s'y avan- ;

beaucoup de succès et comme sa cer il ne manquait ni d'esprit


; , :

grande passion était pour les lan- ni d'érudition pour soutenir ses
gues orientales , il s'en alla à sentimens. Les premières leçons
Embden , l'an de pro- i638 , afin qu'il fit chez lui sur le catéchis-
fiter des lumières du rabbin Gum- me attirèrent tant d'auditeurs ,
precht Ben-Abraham. Il alla en que, faute de place dans sa cham-
Angleterre l'an 1640 , s'y fit con- bre ,il fallut qu'il se servît de
naître aux plus grands liommes , l'auditoire académique. Il avait
y prêcha et y fut reçu prêtre de
, plupart des étudians pour lui la
l'église anglicane par le docte étrangers. Son collègue était ha-
Jean Prideaux , évêque de Wor- bitué à se servir des distinctions
cester. Il avait résolu d'y passer et de la méthode des scolasti-
toute sa vie mais il accepta la ques son nom faisait du bi'uit
; :

profession en hébreu , que la depuis long-temps il publiait ;

mort de Gomarus rendit vacante quantité de livres il avait un ;

à Groningue. Il y fut installé le grand feu d'esprit , beaucoup de


i3 de janvier 164 3, le même jour savoir les proposans du pays ;

que Samuel Des-Marets fut in- s'attachaient à lui comme au che-


stallé à la profession de théolo- min le plus sûr d'avoir une
gie que le même Gomarus avait église car toutes les paroisses ;

exercée. Les titres et les charges étaient servies par des ministres
d'Alting augmentèrent avec le qui avaient étudié selon sa mé-
temps il fut reçu docteur en thode. En voilà plus qu'il n'en
:

philosophie le 21 d'octobre faut pour allumer et pour entre-


,

1 645
;
prédicateur académique , tenir la division quand même ,

l'an 1647 docteur et professeur le tempérament ne se mettrait


;

en théologie l'an 1667. Il avait pas de la partie. Alting avait à


,

fait deux voyages à Heidelberg combattre des obstacles très-puis- ,

l'un en l'année i65i , l'autre en sans la pluralité des voix et l'au- :

l'année 1662 et il avait reçu torité de l'âge étaient du côté de


:

mille témoignages d'estime de son adversaire, qui d'ailleurs avait


l'électeur palatin Charles Louis pour lui une batterie capable do
,
,

476 ALTING.
gendamier tout le monde
de mourut à Groningue (c) avant
, et
réveiller les préjugés les plus vé- que de prendre possession de cet
nérables c'était de dire qu'Al- emploi. Il se fit une manière de
;

ting était vin innovateur , un réconciliation au lit de mort


liomme qui remuait les bornes (C) j'en parlerai dans les re-
:

sacrées que nos pères avaient si marques. Alting fut obligé de se


sagement mises sur les confins de plaindre qu'on l'avait joué (D)
la vérité et du mensonge. Il de- et ne fut point en repos après
vint accusateur public seulement avoir été délivré d'un adversaire
sur XXXI propositions erronées si terrible : le clergé grondait
qu'il imputait à Jacques Alting. éternellement contre ce qu'il ap-
Les curateurs de l'académie en- pelait innovations (E) ; mais le
voyèrent aux théologiens de Lei- bras séculier arrêtait par sa pru-
de l'écrit de l'accusateur et la ré- dence les tempêtes synodales ou
ponse de l'accusé, sans en avertir consistoriales , et menaça d'in-
les parties, et les prièrent de pro- terdiction ceux qui dans quel- ,

noncer là-dessus. On rendit un que assemblée ecclésiastique re- ,

jugement digne de remarque (B): mueraient la querelle de ces deux


on trouva Alting exempt d'héré- athlètes. Alting n'eut guère de
sie on blâma seulement sou im- santé les trois dernières années
;

prudence à forger de nouvelles de sa vie et enfin , une fièvre ;

hypothèses d'autre côté , on continue qui n'avait duré que


;

trouva que Des-Marets avait man- neuf jours , l'ôta de ce monde ,


qué de modestie et de charité (à). le 20 d'août «679. Il mourut
Ce dernier n'acquiesça point à ce pieusement , résigné aux ordres
jugement, et n'accepta pas l'of- de Dieu et recommanda plu- ;

fre du silence il voulut que la


: sieurs fois à Menso Alting son ,

cause fut examinée par les con- cousin , bourgmaître de Gronin-


sistoires par les classes et par les gue l'édition de toutes ses OEu-
, ,

synodes mais les supérieurs n'y vres. On a satisfait à ce désir


;

voulurent pas consentir , et dé- quelques années après sa mort


fendirent d'écrire ni pour ni par l'impression de cinq volumes
contre le jugement des théolo- in-folio (F). Il avait vécu hors du
giens de Leide : ainsi l'ouvrage mariage jusqu'à l'âge de près de
de Des-Marets, y4udi et alteram trente ans enfin il s'ennuya de : ,

partent, fut supprimé. Cette que- cet état et se maria (G). S'il
,

relle fit un grand bruit , et eût avait encore vécu quelque temps,
pu avoir de fâcheuses suites par il aurait composé deux livres ,
,

la vocation de Des-Marets à l'a- l'un en latin l'autre en flamand. ,

cadémie de Leide (b) mais il Le premier eût été une Apolo-


;

(a) Cum Allinginm ab omni hœreseos nota


gie de sa doctrine, et l'autre une
absolverent in ipso aitlem prudentiam in
,
Histoire de sa J^ie depuis son
procudendis noi'è im-entis in Maresio modes-
.
professorat; et l'on aurait vu par
liam et ckaritalem reçuirerent. Vita Jacobi
Alting. ce moyen l'injustice qu'on lui
[b] Et res miram kabitiira calastrophen avait faite , en lui suscitant une
,

Maresio qiiamquam sens ad thcologiœ pro-


fessionem Liigdunum in Batayis vocato. Vita
Jacobi AUinsii. [ç] Au mois de mai 1673.
5

ALTING. i177
longue suite de chagrins {d) (H). faire particulière dont il s'agit en cette
rencontre je me contente de dire
Voilà cequei'ai extrait de sa Vie,
:

que, dans le général, on ne saurait


qui est à la tête du premier vo- s'empêcher sur de pareilles contes-
,

lume de ses OEuvres. Si quel- tations de juger comme firent les


,

théologiens de Leide. Ceux qui avan-


qu'un trouve des faussetés dans
cent de nouvelles hypothèses, se pi-
cet article, je le prie de ne s'en quent trop de les soutenir au préju-
prendre pas à moi qui n'ai fait , dice de la paix et de la tranquillité
que rapporter fidèlement ce que ecclésiastique et académique. Ils se-
ront donc orthodoxes tant qu'il leur
m'a fourni l'ouvrage que j'ai cité.
plaira mais ils n'auront pas assez de
;
J'avertis ime fois pour toutes ,
prudence il y aura de la témérité
:

que je ne me rends point caution dans leur fait car c'est être téméraire
j

de ces sortes de récits. Je con- que de troubler le repos public sans


une grande et urgente nécessite. Ceux
dus par cette remarque c'est :

qui S opposcnt 3 uuc nouvclle méthodc


qu 'AU-
Alting
'.
était
-t
un \\.Àr^\^„\an
,
théologien
-[.gnseigner témoignent trop de pas-
fort attache au texte de 1 Jicri- sion je veux croire que quelquefois
:

ture , au coccéianisme et au rab- il n'y a rien de personnel qui conduise

leurs démarches mais ils outrent les


binisme. Cette dernière applica- ^
-
choses alarment toute lEclise
^. ,, ir/
.

tion 1 exposa a une terrible


.
m- ils ,

^^^^ ^^^ bagatelles j ils font craindre


jure (I). Il prêchait bien en trois la dépravation totale de la confession
langues , en allemand , en fla— de foi , lorsqu'on n'y donne encore
m.and et en anglais. aucune atteinte. Ils seront donc zélés
tant qu'il leur plaira mais ils ne se- :

{d) Ex Vità Jacobi Altiagii in limine ront ni modérés ni charitables , ni ,

Operum, edUor. Àinslelodami , an. 1687. équitables. Ils seront même aussi im-
prudens que leurs adversaires ils ne :

(A) Toute son enfance fut un per- prennent pas garde qu'une nouvelle
pétuel changement de lieu^ Car, à méthode dont on ne fait pas semblant
l'âge de deux ans, on l'envoya chez
de s'apercevoir tombe d'elle-même ;
Chrétien Chytrœus ministre de Bret- ,
au lieu que, si on la choque de droit
ten. L'année suivante , sa mère , non- front, elle dégénère en parti. Le nou-
obstant sa grossesse , fui obligée de veau méthodiste aura des parens dans
se retirer à Heilbron, où elle le mena la régence qui le soutiendront de
et de là, au bout d'un an il fallut se
,
tous leurs cliens j et ainsi , vous ver-
retirer à Schorndorf : Sequente mox rez bientôt la combinaison du droit
anno propter iniminenleni Heidelbergœ civil et du droit canon , les factions
obsidionem niatre eliani comité eâ-
, ,
d'état et les factions d'église , appa-
que tum gravidd Hailbronnam , in-
,
riées ensemble. Que n'a-t-on point à
dequè exacto anno Schorndorfium craindre de ce conflit ? Qu'on épar-
niissus est (i). Henri Alting son ,
gnerait de maux à la religion et à l'é-
père, l'amena ensuite, avec toute sa tat si on se contentait
de s'opposer
,
famille à Embden par des chemins
, ,
aux innovations fondamentales !

détournés. D'Embden il se trans- (C) lise fit entre lui et Des-Marets


porta à Leide où il fut précepteur
,
une manière de réconciliation au lit
des fils du roi de Bohème. La peste de mort.l Un ministre de Groningue ,
l'obligea d'aller de Leide à Houslaer-
voyant M. Des-Marets hors d'état de
dijk j enfin il passa de Honslaerdijk guérison , lui proposa de se réconcilier
à Groningne lorsqu'il y fut appelé avec son collègue; et, ensuite de son
pour la profession en théologie , l'an acquiescement, alla proposer la même
i6']i. Jacques Alting était alors âgé de
chose à M. Alting. Celui-ci fit réponse
neuf ans. que le silence qu'il avait gardé au
(B) On rendit à son sujet un juge-
milieu des clameurs et des livres de
ment digne de remorque.'] Je ne pré- son adversaire répondait de son hu-
tends point prendre partie dans l'af-
meur pacifique ; qu'il était toujours
(1} Yiu Jacobi Altingii. prêt d'accepter la paix sous des con-
, , ,

4^8 ALÏING.
ditions raisonnables ; maistegrari expetiit. Etenim quotiescun-
qu'il de-
mandait réparation des injures qui que uei'unt illud est ac sincerum ^'o-
avaient été publiées contre s^ n hon- tum non tantùin uerbis pax inilur ,

neur et qu'il ne voyait pas qu'on pût sedetiam aboltnlur onmia monunienta
;

souhaiter aucune liaison avec lui prions inimicitiœ. Tenera nanique


pendant qu'on le croirait tel qu'on conscientia ad suam ipsius injamiam
l'avait dépeint. Le médiateur se re- spectare retur si quod ipsamet dam- ,

tira sans proposer autre chose. Peu nauit atque ex sud memorid abolitum
après , il se l'épandit un bruit par uoluit unii^ersorum notitiœ ac memo- ,

toute la ville , que M. Alting avait eu rice infixum dederit , editis conlume-
la dureté de refuser tout à plat la paix liosis charlis per unb^ersum orbem dis-
à un collègue mourant tant il est vrai seuiinalis. S'il m'est permis dédire un
:

que les bruits de ville sont peu con- peu franchement ma pensée , il ne me
formes à l'état naturel des faits Le ! semble pas qu'on ait eu raison de pré-
médiateur, accompagné d'un autre tendre que Des-Marets supprimât tout
ministre retourna chez M. Alling ,
,
un gros livre il eût fallu dédomma-
^

et tira de lui un formulaire de salis- ger le libraire et ainsi les frais de la:

faction. Ce formulaire ne plut point au réunion n'eussent pas été un simple


malade, et celui que le malade dicta dédit, un nollenijactum ; ils eussent
ne plut point à M- Alting il fallut : été une perte pécuniaire à la famille.
emplo^'er plus d'allées et de venues H ne s'agissait pas de trois ou quatre
que pour la capitulation d'une forte- carions il s'agissait de l'ouvrage tout
:

resse. Enfin, le changement que entier comme le reconnaît Alling


,

M. Alting inséra au formulaire de lui-même Ciim in ipsius esset potes-


:

M. Des-Marets ayant été accepté à , îate totum opus suppressisse, quce


condition que M. Alting accepterait unica supererat in opère usquequaque
ce que M. Des-Marets y ajouta
aOn , sibi conjormi emendatio (4). C'était

que les conditions fussent égales de assez qu'il déclarât dans un écrit si-
part et d'autre on en vint aux signa-
,
gné de sa main , qu'il rétractait tout
tures; et ce fut là toute la réconcilia- ce qu'il pourrait avoir dit ou publié
tion. Notez que les parties ne révo- contre la réputation de son adversaire.
quèrent que les injures personnelles ; Ilà ut indicta i'elit Cl, D. Maresius
car pour ce qui est des accusations siquce in dictis et scriplis ipsius in
doctrinales, l'accusateur en remit le Jamam Cl- D. Altingii incurrere fi-
jugement à l'église (2). deantur (5). Avec cela seul , il a pi
(D) Alting fut obligé de se plaindre mourir dans les formes è niorto cano- ,

qu'on l'ai^aitioué'i Ilfondaitsaplainte nicamente comme on dit au delà des


,

sur la dernière édition du Système de monts.


Des-Marets où il se voyait fort mal-
, (E) Le clergé grondait éternelle-
traité. Il prétendait que son adver- ment contre.... ses innoi'ations.'^ Les
saire devait abolir tous les monumens paroles que je m'en vais rapporter
de la discorde ; et que , puisqu'il n'a-apprendront ce que c'était : Qualis
vait pas supprimé un ouvrage si ou- J'uerit utriusque ante morlem mutua
trageux , sa réconciliation n'avait pas conciliatio ipsiusmet autoris Epistola
été exempte de supercherie Postea initia Mantissœ tomi quinti posita tes-
:

quàm autem ad plures abiit ( Mare- tatur. Quiescente Maresio , non sic ta-
sius).... monitus fui ego (3) de Sjrs- ,„e„ quiescendum sibi du.rerunt qui
iematis nofi perpetuis annotalioni- ipsius parlium fuerant. Niliil autem
bus , quce infandis malediclis cùm in adeo dédisse opérant widentur , quam
alios tum in me consiarenl. Liber ut i'iâ quasi ecclesiasticâ per synodos ,
ille paucis ante morlem ipsius diebus classes, et quas dicimus correspon-
uendi quidem cœperat , sed nondiim dentias , Altingii opinionibus obsiste-
in meas œdesfuerat Hiatus.... Curavi rent. Ilà i^ariis quidem fluctibus pos-
ergo afferri , atque indè didici quan- tea jactntus i'ir optimus , suœ autem
toperè D. Maresius mihi illusisset sententice tenacissimus tandem ferè
quando in speciem concordiam redin- enatui'it ; siquidem quotiescunque ali-
(2) Tiré d'une LeUre de Jacques Alting ,
Idem ibidem.
inséréeau V^. volume de ses OEuvres. (4) ,

(3) Mting. , tom. V


Manlisste, pag. 425
. (5) Idem , ibidem.
, ,

ALTING. 479
quid jjroponerel ecclesiasticorum ordo, médecin, un autre était avocat
, et
illud rnox procertim edicto vel con- l'autre avait pris le parti des armes.
sulta rejectum est. Imo exauctoralio- Le premier et le dernier moururent
nis etiam pœna in eos constituta qui ,
peu d'années après leur père.
de conlroversiis Maresio- Altingianis (HJ On
lui ajait injustice, en lui
in cœtu aliquo paslorum quidquam suscitant une longue suite de cha-
mo^'erent. Ita J'aclum sœpiùs est ut grins. ] Ceux qui aimeront mieux les
generalibus etiam i>erbis conceptagra- paroles de l'original que mon abrégé
vamina de pei'iculosis novitatibus in trouveront ici de quoi satisfaire leur
spongiam incubuerint (6). D'où paraît envie Dixit inter alia (Altingius) si
:
,

que Jacques Alting eût eu tout à crain- Deui sibi vivim viresque concederet ,
dre de la part des théologiens, s'il slare sibi animuni duos libellos in lu-
n'eût été' protégé par les magistrats. cem mittendi alterum quidem quem
,

Il est sûr que la puissance séculière orsus etiam est quo se purgaret co-
,

et la puissance ecclésiastique ont be- ram ecclesiâ ab hétérodoxies et hœre-


soin l'une de l'autre. 11 faut quelque- seoê criminesibi inlentato; alterum vero
fois que celle-ci serve d'éperon à celle- quo Historiam vitce suce publicœ pan-
là, et que celle-là serve de bride à deret ab eo tempore quando in aca-
,

celle-ci : demid doctre cœpisset ; undè cuivis


Aherius sic
judicandum relinqueret quo jure , ,

Altéra poscit opem res, et conjurai amicè (7). quâ injuria tantiim ipsi molestiarum
creatum fuissel Prce cœteris au-
(F) Ses œuvres ont été imprimées tem conquerebatur a malevolorum in-
en cinq volumes in-folio.'] Feu M. Bek- sidiis atque inimicitiis stetisse quo ,
ker , alors ministre d'Amsterdam minus ut vellet publico inservire po-
qui avait été disciple et bon ami de tuisset (lo). C'est assurément une
l'auteur , prit un soin particulier de chose bien déplorable que par des ,
cette édition. Elle parut à Amsterdam, guerres civiles, on empêche plusieurs
en l'année 1687 et contient plusieurs
,
excellens ouvriers de faire valoir leur
sortes de Traites analytiques exégé- ,
talent au service de leur communion
tiques pratiques problématiques et
, , ,
et contre les ennemis de dehors
philosophiques , qui font foi non- ,
gens contre lesquels il faudrait tou-
seulement de la vie laborieuse de jours tenir toutes les forces du parti
Jacques Alting, mais aussi de son bien réunies. Je ne parle point du
grand savoir. On peut connaître sa scandale que cela cause; car, au con-
diligence par un autre endroit. La traire, il faut être scandalisé du peu
plupart des gens d'étude deviennent de scandale que cela cause. Est-ce
enfin paresseux à écrire des lettres il :
que pour se scandaliser à propos il
n'a jamais connu ce défaut. Il en avait faut un degré d'esprit à quoi peu de
écrit cinq mille mais on n'a pu en
;
gens parviennent ? Est-ce que la cou-
publier qu'un petit nombre Loquun- :
tume endurcit enfin à tout et que ab , ,
tur epistolœ quorum tant paucas ex
, assuetis non Jit passio ? D'où que cela
5ooo publicari potuisse, id equidem do- vienne, il est certain que les peuples
lenduni. Erat autem ad scribendas ont une indulgence excessive pour
litteras impiger (8) Le nom seul des ceux qui entretiennent la discorde par
théologiens à qui elles sont écrites des écrits violens, injurieux, remplis
montre qu'il n'était point P^oetien. de chicaneries sous le faux prétexte ,

(G) // vécut près de trente ans hors


de zèle. Rien ne serait plus capable
du mariage, et enfin se maria.] Imi- de corrigerla démangeaison rongeante
tant cœlibem ad annum œtatis trige-
que l'on voit en certaines gens d'en-
sinium foré perduxil cujus tandem tasser livre sur livre , avec un
,
fiel
perlœsus junxit sibi tori sociam (9). très-amer contre leurs cotifrères
que ,
De huit enfans que Dieu lui avait si les peuples se scandalisaient tout de
donnés il n'y en avait que trois en bon de cette conduite, et donnaient
,

vie lorsqu'il mourut dont l'un était des marques éclatantes de


,
leur mé-
pris, et de leur mécontentement.
(6J In Vitâ Jacobi Alting.
(7) Horat. de Arte Poët. ys. 4t9.
Mais , pendant qu'on les verra suivre
(8) Vita Jacobi Altingii.
(gj Ibidem. (i») Ibidem.
, ,

48o AMA BLE.


le parti qui sait faire plus de va- comme un homme admirable eu
carmes et plus de fracas , il faut te-
,
sainteté , et qui faisait beaucoup
nir la maladie pour incurable.
(I) Son application au rabbinisme de miracles (a). // commandoity
l'exposa a une terrible injure.^ Il se à ce quon dit aux strpens : ,

vit ti-aite' de demi-juif, d'homme qui c'est ainsi que cet historien s'ex-
ne différait presque d'un juif que
par le prépuce ; enfin d'homme qui
prime mais il dépose sur un
;

se plaignait quelquefois de n'être pas autre fait comme témoin ocu-


circoncis , et à qui le prépuce pesait. laire. J'ai vu à son sépulcre ,
L'occasion de ces injures fut qu'il dit-il un énergumene délivré :
,
avait soutenu que les points du nom
j'jr ai vu un parjure devenu aussi
tetragrainms ne sont point propres à
ce nom ; et qu'ainsi l'on n'en connaît roide qu'une barre de fer ; et
pas la véritable prononciation , et après avoir confessé son crime ,
qu'il ne faut point accuser de super- devenir libre comme il éloit au-
stition judaïque ceux qui le lisent
^donaï. Voici le jugement que l'on
paravant (b). Quand un homme
fit de cette pensée Iinpudentia est
:
comme Grégoire de Tours se sert
grammalicorum nonnullorum et fi- d'un Ofi dit c'est un signe que,

lioruni Bicri negare ex superstitione la chose n'est pas fort certaine ;


judaïcâ oriri qubd in nomen aliter
néanmoins l'empire sur les ser-
pronuncietur quhm legilur.... Sed per
nos fiomines senti -judœi doctrind , pens * est ce qui passe pour le
studio ,affecta commercio
, et qui , plus certain de tout ce que l'on
solo ferè pondère prœputii, et quo attribue à saint Amable. On dirait
inlerdiini se gravari dolent distant à
insaniant ut libuerit
que c'a été son apanage et son
recutitis,

f^estrœ est impudentice, petulantice lot; ou, pour parler en Malle-


et superbiœ in primo gradu quod branchiste (c) que Dieu l'a éta-
, ,

ausitis dicam scribere iniperiliœ et bli cause occasionelle de la gué-


ignoranliœ tôt illustribus Ecclesiœ
rison de ceux que les serpens ont
i'iris i'obis etiam longé doctioribus
quod id nominis enuncient et pronun- blessés. Un auteur moderne qui
,

cient uti scribitur (ii). Etait-ce un tout chanoine qu'il est dans la
sujet légitime de se mettre si fort en ville dont saint Amable est pa-
colère, et ne voit-on pas bien ici un
tron (d) , ne laisse pas d'avouer,
exemple de ce qu'un philosophe
païen a remarqué judicieusement? qu'il ne croit pas tous les mira-
Crede niihi, leuia sunt propter quce cles qui sont rajjportés de lui
non lei'iler excandescimus
qualia ,
dans la Vie des Saints (î Au-
quce pueros in rixam et jurgiuni con-
vergne , ni dans plusieurs autres
cilant. Nihil ex his quce tant tristes
agimus serium est nihil magnum.
,
{a) Grégoire de Tours , de la Gloire des
Indè, inquam, uobis ira et inj'unlia Confess. chap. XXXIII.
,

est, quod exigua magno œslimaiis. ib Je me sers de la version de l'abbé ie


(12), One pourrait-on dire de plus Villeloio.
fort contre un homme qui marchan- * Sur
cela Jolj rapporte un conte qu'il
,

derait son apostasie et qui n'atten- , donne comme un fait , sur le pouvoir qu'a-
drait à se faire juif que la solution vait contre les serpens un ruban de saint

de trois ou quatre petites difficultés ? Amable, c'est-à-dire, qui avait touché à ses
ossemens sacrés. Il a extrait cela d'une
(II) Oper. Altingii , tom. V, in Mantissa , p. traduction de la Vie de saint Amable par ,

426. l'arcliiprêtre Juste traduction qui parut


,

(12) Senec.de Ira , lib. III, cap. XXXIV. en 1702, et qu'il reproche à Saj-le de n'a-
voir pas connue.
AMABLE ,
prêtre de Riom eu (c ! Voyez l'abbé Faydit , Supple'ment ù
la Dissertât, sur le Serm. de saint Polycarpe,
Auvergne, clans le V^. siècle, est pag. 3o.
loué par Grégoire de Tours , {d) Rioni
AMAMA. 48,
légendes (e) cet auteur , dis-je, : il est assez évident qu'elles signifient
déclare d'autre côté, qu'il croit JI"''I '-'^^it parvenu à l'âge d'homme

fermement que ce saiut a unpou- ,JT''^ ^ avait cinquante ou soixan-


•^ .
^. ,
r te ans que saint Amable était mort.
i'Oir soui^erain sur les serjjens , Selon cela, la mort de ce saint tom-
parce que tout le monde depuis ,
berait sur le commencement du VI*.
^i^^le , car Grégoire de Tours n'a
1 3oo ans {A) , assure en avoir
vu des effets merveilleux.... ; '^^'^-7.'!^^" ""''
.jj .j^ j j
et que d ailleurs il a eu le bon-
'
la
''"^'^/^"^n'"^
et 11 est mort 1 an
594 (i). Or SI vers
fm du XVII«. siècle il y avait
heur d'en voir aussi lui-mëme{f). i3oo ans que l'on voyait les miracles
Il doute beaucoup de la vérité ^u saint de Riom il faudrait qu'il eût
j-^- fleuri vers la fin du IV^. *"-çic,eien
dj» une certaine
^ ^
tradition qui
2

court
X
„„ ^..^ u «„.,„..„
ce cas-la
siècle et en
on ne peut^ pas dire qu un
,

a tiiom sur ce grand saint, a homme âgé de vingt ans, en 562 ,

savoir, que, quand il alla à Rome ait vécu cinquante ou soixante ans

à pied le soleil lui servit de


,
^P'^^s lui.

valet , et lui porta en l'air ses (0 Labbe, de Scriptor. Ecdeslast, lom I


.
'

^^- ^«P'"'"'^' '-«-' ^- """' - '«« 596.


gants et son manteau , en guise '''

de parasol pendant la grande AMAMA (Sixtinus), professeur


chaleur, et de parapluie pen- en langue hébraïque dans l'aca-
danl le mauvais temps (g). Cette demie de Franeker a été un fort ,

tradition passe pour si certaine savant homme. Il était de


Frise ,
en ce pajs-là, qu'on ne dépeint et il avait été disciple de
Dru-
presque jamais saint Amable sius (A). L'université de Leide
,
dans aucuntableau, sans sesgants qui enlève autant qu'elle lîeut
et son manteau soutenus en l'air aux académies voisines
leurs plus
par un rajon du soleil. Credat célèbres professeurs en leur of- ,

Judœus Apelles [h) dit-il no« frant des avantages plus consi-
, ,

ego. Cela suffit, sans aucune ré- dérables que ceux qu'ils
possè-
flexion de ma part pour donner dent , tâcha de l'ôler à
, l'académie
à cet article la forme que ce dic- de Franeker {a). C'était pour
tionnaire semble demander. Un remplir la place d'Erpenius
qui ,
simple récit de semblables choses avait été l'un des jilus habiles
est un recueil d'erreurs. hommes de son siècle dans les
(e)Faydit, Suppl. à la Dissertât, sur le langues orientales. Amama ne
Sermon de saiat Polycarpe pag. 102. , refusa point cette vocation mais ;

if) Là même, pag. ,01. d'autre côté ne l'accepta pas


il
yg) Lameme .pag, \o5. ^ ^ ^
il uj
-l 1 >

{h)C'estamsi<,ii'aorihographie.-aor^ce, absolument donna les


:

dans la Satire V du iiv. /, vs. 100, dit mains quc pourvu que SCS supé-
''' ^^'" '''"" ''' "'^'^ '^^ '"
9^1;/"' rieurs de Frise lui accordassent
son congé. Or c'est ce qu'ils ne
{k) Son pouvoir som'erain sur les
firent pas :^') et sans doute ils
;
..erpe/is connu depuis ijoo ans.]
est n- j•
11
Ce calcul ne s'accorde pas exactement améliorèrent de telle sorte sa con-
avec ce qu'on dit dans la page sui- dition ,
qu'il n'eut pas sujet de se
vante , que saint Grégoire de Tours repentir de n'être pas professeur
n'a uecu qu'environ cinquante ou soi-
^ j^^j^^ Le *premier livre qu'il'
xante ans après saint Amable. 11 n est
pas besoin de prouver que ces paroles (a) En 1626.
ne veulent pas dire qu'il est né cin- «(i) royez l'Épître dédicatoire de l'Anû-
quante ou soixante ans après ce saint : Barbarns BiMicn^.
,,

ASy. AMAMA.
publia fut un
d'un très-beau
essai seur. Sa réponse est une de»
dessein qu'il avait conçu. Il avait pièces dont X Anti-Barb ar us Bi-
entrepris de censurer la version bliciis
,
qu'il publia l'an 1628,
Vulgate que le concile de Trente
,
est composé. Les autres pièces
a déclarée authentique; et sans sont la Critique de la Vulgate
attendre que tout sou dessein fut sur les livres historiques duVieux
exécuté il publia la Critique de la
, Testament , sur Job sur les ,

version du Pentateuque (c). Voilà Psaumes sur les Livres de Sa-


,

par oii il débuta pour s'agréger lonion , quelques Dissertations


et
au corps des auteurs (d). H pré- particulières. 11 y en a une sur

parait la suite de cette Critique, le célèbre passage des Proverbes


lorsqu'il se vit obligé de travailler Le Seigneur m'a créée au corn,—
à une autre chose; je veux dire à mencement de toutes ses vqyes ,

conférer la version flamande de oii Amama montre que ceux qui


l'Écriture avec les originaux et , accusaient Drusius de favoriser
avec les plus exactes versions. l'arianisme étaient d'insignes
Cette traduction flamande avait calomniateurs \] Anti-Barbarus
.

été faite sur la version allemande Biblicus devait contenir deux


de liUlher. Il rendit compte de parties chacune de trois livres.
,

son travail au public par l'ouvrage L'auteur ne donna que la pre-


qui parut (e) à Amsterdam, eu mière. On la réimprima après sa
langue vulgaire , intitulé Bj-bels- mort (D) ; et l'on y joignit le
che Conferentie. On a parlé de quatrième livre, qui contient la
cet ouvrage dans le Supplément censure de la Vulgate sur Esaïe
de Moréri (B). Ce soin de colla- et sur Jérémie. Il est impossible
tionner occupa beaucoup Ama- de parer les coups qu'il a portés
ma, de sorte que la publication à la Vulgate, et de satisfaire aux
de ce livre , et celle de quelques raisons par lesquelles il a établi
écrits de grammaire l'empêchè- la nécessité de consulter les origi-
rent assez long-temps de s'ap- naux. Aussi voit-on peu d'habiles
pliquer à la censure de la Vul- Wens de la communion romaine
gate {/) Il se remettait à ce qui nient cela ils se retranchent :

travail , lorsqu'il sut que Marin à soutenir, pour sauver l'hon-


Mersenne l'avait réfuté quant aux neur du dernier concile , qu'il
six premiers chapitres de la Ge- n'a point prétendu soumettre le.-?
nèse (C). Quittant donc toute originaux à l'autorité de la Vul-
autre besogne il s'attacha à jus- gate. Il n'est pas ici question
,

tifier sa Critique contre ce cen- d'exaininer si l'on peut dire cela


dans la bonne foi. Notre Sixtinus
(c) Censura Vulgatae latin» editionis Pen-
tateucbi; Franekerœ, 1620, in.^. exhorta si fortement à l'étude
(d) Te obsfctricanle dit-il à Gomanis
(
des langues originales de la Bible,
)
primus ille adolescentiœ nieœ fœtus in dias
luminis oras prodiii. Sixt. Amama, Anti- qu'il y eut des synodes qui , étant
Barb. Bibl. pag. 295. Je crois qu'il avait frappés de ses raisons , ordonnè-
,

déjà publié en 1618 un petit Traité de De-


ciniis Mosaïcis (jui contient pages in-à",
rent que désormais on ne rece-
,
9
et qui a été réimprimé à Londres, l'an 1660. vrait aucun ministre qui n'eût
(e) L'an 1623.
pour le luoins une médiocre in-
(/) Sixt. Amama , Anti-Barb. Biblici , p.
160. telligence de l'hébreu et du grec
, ,,
,

AMAMA. 483
de l'Écriture (E). Il ne faut pas Uuduclion. Sixtinus Amama composn
pour ce sujet en flamand un livre inti^
oublier parmi ses éloges le zèle
lulë Bybelsche Conlerentie, où il fait
qu'iltémoigna pour faire cesser voir fort au long les raisons qu'on
dans l'académie de Franeker un avait de publier une nouvelle Bible
désordre qui n'y régnait pas avec P""»" '«* églises flamandes. Il assure
- -
- """
que la
'-
'
moins de débordement qu'aux 7 . ,
versie>n
,
flamande qu'ils
-. j»»ii
'
T 1^ ii^a^ent dans leur église, et qui avait
universités d Allemagne. Je parle ^^é prise de celle de Luther contenait
,

de l'ivrognerie (F). 11 harangua en de certains lieux plus de fautes


fortement sur cette matière en 9"^ '^^ versets, et il en donne dans
1621. On fut si content de lui en ',f
««7"g« «« gr^nd nombre
, , . .
d exemples. Dans ]a nasc 11, M. Si-
Frise, qu après samort, qui arriva ^00 rapporte ceci.... // est vrai que
:

le mois de décembre 1629 (g) , les calvinistes des Pays-Bas reje-

on usa de beaucoup de libéralité tèrent leur ancienne version et en ,

"ne nouvelle. Mais s'ils


enverssesenfans, comme Nicolas ^""'P^^^^'^"'
ont suivi dans leur nouvelle traduction
Amama, l'un d'eux, le témoigne lu méthode que Sixtinus Amama pro-
avec bien de la reconnaissance , pose dans iaBjbeIsche Conferentie,
dans l'épître dédicatoire d'un elle ne peut pas être exacte uar, pour :

faire sa réjormation il ne suit que ,


livre (G).
Pagnin , Junius et Tremellius , la
(^) Konig qui le fait vivre en i63o
,
et Bible de Zurich , la française de
,

le père Morin qui suppose dans ses Exer-


,
Genève l'allemande de Piscator
,

cilat. Biblicae part. I, pag. 61


,
qu'il en-
, l'espagnole de Çyprien de fraiera
seignait à Franeker, l'an l633 se sont donc l'italienne de
,
Diodati (^), l'an-
trompés.
glaise de Genève, et d'autres nou-
velles traductions.... défectueuses.
(A) // avait été disciple de Drusius.']
(C) Il sut que Maiin Mersenne
Cela est certain par divers passages
l'avait réfuté quant aux six premiers
de \' Anti-Barbarus Biblicus. Pour ce
chapitres de la Genèse.^ Ce fut M. Ri-
qui est de Sinesius, dont on le fait
vet qui le lui apprit; car sans cela,
disciple dans le Supplément de Mo-
il courait risque de ne le savoir de
réri j'avoue qu'il m'est absolument
,
long-temps : il n'avait jamais ouï
inconnu, et je doute fort qu'on le
dire qu'il y eût un père ûlersenne au
connaisse dans les Provinces-Unies.
monde. Voici comme il parle dans

qui f^ i priorum Lreneseos capitunt


selon M. Simon, le dessein tle Sixtinus adversiis meas stricturas
susccpit patro-
Amama dans ce livre est défaire voir cinium , etiamnùm juxta cum ignaris-
que la Bible flamande, qu'on lisait simis ignorassent. Tu primus mihi
in-
parmi les protestons des Pays-Bas dicium, tu voluminis copiant fecisti
et qui avait été traduite sur l'alle- tu ad modestam
et mansuelam repli-
mande de Luther., était remplie de cationem hortamentis tuis me ani-
fautes : et c'est ce qu'il montre foi t mdsli. Je m'étonne qu'il n'ait pas in-
bien, ajoute-t-on. Pour donner une séré dans son
Anti-Barbarus l'avant-
instruction plus complète là-dessus , coureur de sa
réponse ; il l'avait
il faut rapporter en propres termes
publié en l'année 1627 , sous le titre
ce qu'a dit l'auteur que l'on cite. Les de Epistula
TrfiôJ'fo/iAoç ad Marinum
protestans di's Pays-Bas , c'est M. Si- Marsennum
(2). M. Crenius l'a inséré
mon qui parle dans sa Lettre à M. P.
touchant 1 inspiration des livres sa- (*) Elle n'a paru que bien des années après
cei ouvrage d' Amama. Voyez iH. AnciUon, à la
cres , page 10 , n'ont appuyé leur page 2 3o du JI'. tome
de son Mélange criti-
reformation que sur une version fla- que de lUtérature.
mande , qui avait été Jaite sur celle (\) Elle est datée du 27 de décembre 1626.
(2; Voyei le Cat.ilog. Bibliotheca; Oxodiensis,
de Lutiier; mais enfln ils réso-
ou, au lieu de Marsennum, on a mis Mamea-
lurent de travailler a une nouvelle naoïi
484 AMAMA.
dans la III". partie de ses Animad- reuses résolutions qui fux'ent prises
versiones (3). contre ce désordre ne doivent pas
(D) On réimprima son Anti-Bar- être principalement attribuées à Six-
harus après sa mort.'] Ce fut à Fra- tinus Araama il suflit de dire qu'il
:
y
neker, l'an i656, in-4°. C'est de cette contribua pour sa part et quand :
,

e'dition que M. Baillet a parle' dans il n'aurait fait que haranguer cl


ses Anli, à la page 3i5 du 11'=. tome. que féliciter publiquement ceux qui
// ne faut pas oublier, dit-il, I'Anti- avaient réformé l'académie sur ce
Barbare, qu'un professeur en hébreu chef, il mériterait bien des louanges
de l'unluersilé de Franeker en Frise, H reconnaît qu'Amesius professeur
nommé Sixlinus mania, publia sur A en théologie, et Hachting, professeur
,

le texte de l'Ecriture Sainte, l'an en logique, ayant été agrégés au


i656, i/2-4.° dans la i^ille où il en-
, se'nat académique , et se trouvant
seignait.... L'ouvrage est farci de bien soutenus par le recteur de l'uni-
di\^erses petites dissertations et dis- versité, entreprirent courageusement,
cours qui ne rendent pas son économie avec un heureux succès la réforma- ,

fort agréable. Notez qu'on a inséré tion de ce désordre. Il les en félicite,


dans la nouvelle édition des Grands et leur dédie à cause de cela sa
Critiques (4) sa Censure de la Vul- harangue de Barbarie Moriim. On ne
gate du Pentateuque, et ses Notes in sera pas fâché de voir ici comment il
Libros Historicos , Psalmos , Pro- s'exprime et les difficultés qu'essuyè-
t^erbia et Ecclesiasten , qui n'avaient
, rent ces réformateurs. Ad primant
jamais été imprimées. occasionem.... intrepidis et commascu-
(E) Ses raisons portèrent des sy- latis aninûs horrendas illas et féroces
nodes.... à ordonner qu'on ne receifrait beliuas ebrielatem et licentiam, quœ
aucun ministre qui n'eût au moins hic stabulabantur ex academid eje- ,

une légère intelligence des langues cistis ac christianam disciplinant


,

originales de V Ecriture.'] Voici les jam desperalam, Deo supra quant


termes de l'acte qui fut dressé sur il quoquam sperari potuisset benedi-
cela par le synode de Frise tenu à cente academiœ redonâstis. Cujus
, ,

Harlingcn l'an 1624 Decretum est ut prœclari et œternd gratitudine dignis-


:

in poster um
'
theologiœ ...
candidat i simi facinoris sicuti inuidiam apud
• ,

quotquot ad examen ministerii Eccles. dissolutam et harbaram juvenlutent


admitli desiderabiint, prœter tesli- susiinuistis et quasi prœpilatis hastis ,

monia senatus academici et theo- objecti fuistis soli, iià et œqiiissimiini


logiœ professorum exliibeant etiam censeo, ut i.-obis quoque prœ aliis tara
testimonia professorum ebrœœ et egregii operis gloria transe ribatur (6).
Qrœcœ linguce quibiis doceant se in H dit des choses allreuses touchant la
,

prœdiclis linguis eos saltem progressas débauche qui régnait dans quelques
fecisse ut originalem f^eteris JVo
,
académies. Tous les nouveaux venus
uique Testamenli textuni mediocriter s'y enrôlaient au service de Bacchus
,
possint intelligere utqiie in classe avec certaines cérémonies solennelles^
,

istd, cujus examini se offerunt, ejus et on les faisait jurer par un saint.
quoque rei spécimen edere leneantur. Etienne de bois qu'ils dépenseraient ,

11 paraît par le même acte, que ce '^^"'^ 1^"/" argent. Si quelqu'un avait

fut la Supplex Parœnesis d'Amama P'i^s d'égard au serment qu'il avait


(5), dont on avait distribué des exem- prêté au recteur de l'académie qu'à ,

plaires à la compagnie qui fit «^ prétendu serment bachique, les


prendre cette bonne résolution. écohers débauchés le harcelaient de
(F) // témoigna beaucoup de zèle ^^lle manière, qu'ils le contraignaient,
pour purger l'académie de Franekcr î'" "^ ^'^° '^^^^^ \ ^u de faire comme
du vice de l'i^-rognerie.] Les vigou- autres. 11 a joint à sa harangue
quelques fragmens des complaintes
(3) Imprimée à Leide , l'an ifgg. d'Alstedius sur le même sujet. Bel-
(4) C'e.ttcelln de Hollande, en 1698. Vore
larmin déplore avec beaucoup de
la Bibliotlieca novorum Librorum au mois , d véhémence, dans son XX*^. sermon ,
ftiillrl et d'août 1698 ,
pag. 453.
(5) Elle/ait partie de Z'Anti-Barbarus Bibli
eus , el avait déjà c'tc imprinie'e deux
(6) Sixiln. Àmama m Prceliminar. ATiti-Bar-
fois. bari Biblici.
,

AMASEUS. 485
^«"« l'"°i- l^elle que V italienne
î'^'f^^Tf 'i'^'-'iT^
versite de Louvain -^ «^ ,
>
ils
^'^ n uml
n'ont
(7). , , . .

(G) Un de ses fils a témoigné sa J^'"^'^ ete imprimes {d). Quel-


recnnnaissance dans L'épître Jédica- 4"^*"'^'^S disent qu'il mourut l'an
toire d'un
^it-re.] Il fut imprime l'an l558, à de soixanle-neuf
l'âge
id5i. Lest un in-8°. deôoo paces, ansfR) «i
un nls, ^' laites
Tl »«'^sa ,,„ »

intitule D.ssarlanonum Marinarum ^"' ^^ qu. S ap-


f I'ompilius et qui
Decas où il y a beaucoup de lec-
, ^,, ne dé- ,

luré, et où sans s'attacher à la nou- gênera point; car ce fut


,
uu
velle philosophie, on s'éloigne très- homme qui sut du erec et oui
souvent des opinions d'Anstote. 11 semêla d'en traduireç-inuimtme
II fJt même
n est pas lusciua lorthosraphe «ne c
° professeur en cette langue à
l'auteur n'ait innovée. ^ * Eou-
(n) ^mam3
Am,n, le ,'.., °^"^ ^^^ ^^ ^"""'^ <ï"^ ses traduc-
{•:) i remarque dans
,
Vepitre dedica-
toire de sa harangue de Ebrietatu. HOUS Se
tinns SP Kr»rnPi-o.-,t
DOrnereUt a OeuxA r ;
frag—
mens du sixième livre de Po
AMASEUS (RoMULUs),profes- lybe (C) : il y fit paraître
plul
seur en grec et en latm, à Bou- de capacité
que Perot et Muscu
logne,auXVr. siècle (A) , et lus n'en ont témoigné en
tradui-
secretaire du sénat (a) , se ren- sant cet auteur
(/). Un habile
dit célèbre par son érudition * et homme
ne laissa joas de l'accuser
par ses emplois. Il était origi- d'avoir passé
tous les endroits
naire de Boulogne et natif d'U- difficiles , se
,
contentant d'avertir
dîne dans le Frioul. Le pape qu'on en pouvait
trouver ailleurs
Paul IJJ 1 attira auprès de soi l'interprétation (g). Quant à son
pour le taire precepteurd'Alexan- père, l'on convient
qu'il s'atta-
dre Farnese son petit-fils (b\ On chait extrêmement
à l'élégance
I employa ensuite à des affaires et à la clarté : il étendait
ce qui
plus importantes : on le députa était trop
concis, et serrait ce
al empereur et aux princes de qui était trop diffus;
il éclaircis-
lempire,et à la cour de Pologne, sait les endroits obscurs
(h). Sa
II n'y avait point de savans à
Traduction de Pausanias a eu
Rome , sous le pontificat de .Tu- besoin de la révision de Sylbur-
les III , qui brillassent plus que
gius.
lui. II fut secrétaire de ce pape. ,j 7. ,
^vr, lwredeAI.de
Tl
11 ht ^
/-,. A, . ,,. 11,
paraître son intelligence de
,
(a,
-

Ttre du XXT'.
.
Thoa, p.
432 , etdes Additions de m. Tei^sier.
]a langue grecque par la Tra- ,
i^^' ^""="l''"s, Wte>flr Baillet, Jugemens
duCllOnde Pausanias, et par if) c'est le jugement de C^s^nUa. Voyez
celle d un ouvrage de Xéno- Kaillet, /« /«emc.

phon{c). Il a fait aussi un vo- Jf Jl":!!"' '*'^''"'^°'"P"'-' ^- '""'


lume de Harangues et Scholas , (J')
^'^^^ i<^ jugement de m. Huet , l<;
'"^'"^'
duas de Ratione inslituendi. Pour
ce qui est des deux livres qu'il (A) AMASEUS
(Romulcs) pro-
avait écrits , oii il faisait voir f^sseur en grec et en latm uiunit
que la langue latine est plus "" ^^''^ "^
" ^ i pas trompe T^"^ f ^t''''
dans cette f^^-^^^
chronologie :

(a) Voyez la remarque (B). '' "^ fallait donc pas la changer
* Lederc dit qu'd
avait quelque rcpxUa- ^^^'^^^ O" » fait dans l'édition "de
iiun à Borne dès i3i3. Hollande, où, au lieu du seizième
b; El non par son neveu comme Du siècle, on a mis le quatorzième. Il y
,

Rier a traduit le mot nepos de M. deTliou. avait trois choses à Corriger dans cet
{c)i'E.xpë-Jiiion du jeune Cvrus. article, que l'on n'aurait pas dA
.

486 AMBOISE.
laisser en rtpos : trop sec
i°. 11 clait Vous y trouverez aussi la ville
et trop décharné. 2°. 11 devait être d'ÀMASTRis , fondée par celte
sous Amaseus , et non pas sous Ro-
non pas princesse.
mulus. 3°. Il fallait dire ,

((U^Amaseus à traduit les oeuvres de AMBOISE (François d') Pa-


,
Xénophon ; mais qu'il a traduit les
risien mérite une place parmi
sept livres que Xénophon a composes ,

de l'expédition de Cyrus le jeune. les personnes que la profession


(B) Quelques-uns disent qu'il mou- des lettres a élevées aux hon-
rut l'an i558, à l'âge île soixanle-neuf
neurs du monde. Il était fils d'un
ans-l M. de Thou s'est trompé en
mettant la mort de Romulus Amaseus
chirurgien de Charles IX et il ,

à l'an i558. Car ce Romulus était fut entretenu, par la libéralité


mort dès l'an i55a *. JYous en auons de ce prince au collège de Na-
,

la preuve dans une lettre de Gioi'an


varre , pendant ses études de
yintonio Seroiie, intime ami de Romu-
lus datée du 20 octobre de cette an-
rhétorique, et pendant celles de
,

née-la, et insérée dans le recueil du philosophie. 11 enseigna ensuite


Turchi, pag. m. aSy. Voilà ce que dans ce collège car on trouve , ;

M. de la Monnaie m'a fait la faveur qu'en 1672, il avait déjà régenté


de m'ccrire. Au reste, si Amaseus était
mort l'an i558, on aurait raison de la seconde classe pendant quatre
dire qu'il vécut soixante-neuf ans ,
ans. On le fit alors procureur de
car le jour de sa naissance est marqué la nation de France. Il s'attacha
dans les figures de Luc Gauric au 24 depuis au droit , et devint fort
de juin 1489 (i). J'ai trouvé dans cet
ouvrage de Gauric trois ou quatre par- bon avocat au parlement de
ticularités que j'insérerai ici. Amaseus Paris après quoi
; il eut une ,

était maigre, de grande taille, chau- charge de conseiller au parle-


ve, et avait la tête petite. Il fut se-
crétaire du sénat à Boulogne et il en-
ment de Bretagne et enfin il ; ,
,

seignait l'éloquence dans la même fut maîtres des requêtes (a) et


ville, aux gages de trois cents écus par conseiller d'état {b). Il voyagea
an. Il enseigna ensuite dans Rome , en divers pois loingtains (A). Il
sous Paul 111 , et eut pour cela une
publia pendant sa jeunesse ,
pension de six cents écus Wulu Pan- :
,

li III y ex lecturd in urbe, habcbat quantité de vers français et ,

600 aureos. M. de Thou ignorait cela. quelques p/èce^' latines , qui sans
(C) Les traductions de Pompilius doute ne lui semblaient pas des
Amaseus se bornèrent a deux fragmens
endroits fort honorables*, quand
du f^I^. litre de Pofybe.] Pompilius
Amaseus, ayant traduit ces fragineus il se vit élevé aux dignités; car
qui traitent de la discipline miiilaire ces sortes d'ouvrages sentent un
des Romains, les éclaircit par un Com- homme qui court après les ma-
vienlaire qui est parmi les manuscrits
tières du temps , et qui envoie
de la Bibliothèque de M. de Thou (2).
Ce manuscrit est en italien. L'auteur ses muses à la quête de part et
a traduit tant en latin qu'eu sa lan- d'autre tantôt par des compli—
,

gue maternelle ces fragmensTà. mens de condoléance tantôt par ,

* Le Duchal confirme celle date de i552.


(i) Koyei le folio .ja, verso, e'dition de f^e- (a) Ex Micbael. Thirioti Laudalione Ha-
nise en iSSî
, de ces Figures de Gauric.
,
Jriani Amboesii. Vide pag. 356, 799 et 800,
12) Voyez lu pag. 453 du Catalogue de celle
Historise Gymnasii Navarrfe Joao. Launoii
Bibliothèque.
{b) Dans L'édition des OEiivres d'Aliélard,
i7 a le litre f/'Eqiiilis, Régis in sanctiore Con-
AMASTRÏS nièce du dernier
,
sistorio Cotisiliarii, Ba rouis Charirae, etc.
Darius et femme de Denys ,
,
* Leclerc dit, au contraire qxic Fr. d'Am-
,

boise sejît toujours honneur de sa profession


tyran d'HéracIée. Cherchez son
d'homme de lulirc: : et c'est ce que cnnfirnn
histoire dansl'article dece Deinys. Jvlj.
,, ,

AMBOISE, 48^
des félicitations ; un homme , en marque que François d'Amboise/ett à
un mot, qui aurait été pourvu ^j'j^^'^'^'^^oe Descriptionduroyaume
en titre d'office de la charge de '!:'^''Ml^,^Jorsquemonse
rr,fluc d Anjou, a présent my de
1
porteur des compUmens r J
du D.„
Far- France, fut esleu roy de PoLn'-ne
nasse chez les grands seigneurs. (2). Voilà l'un de ses voyages. Oifne

On verra ci-dessous les titres de ??'?''^.^t^eterminer par les paroles que

quelques ouvrages de François ^^' ''^ ''"^^


ieàu
y*^^" rof .M setrouvaen S",°°""
j'i
dAmboise(B;. 1 /D^ •
Ti J
Ils doivent ce
• *^^ ^°i' on
o» sil
lorsqu'on y fit Feiection du
Polocne
, duc din-
me semble moins contribuer à
,
jou. Ce dernier sens serait le
seul
l'immortalité de son nom que T' donner à ces paroles si
!il^**j^'"^iî ,

h peme
1 •

qu »i j w
il a prise de recueillir
,
**"^^™ier Vau-Privas eût PU la r-nn
...^^
, 1 ^ ^ 1 r>- il '
^ 'ïcrire t..v
"^""^ rl'pVrirp .
très-exactement,
les manuscrits de Pierre Abe- Voyez le TVajie rfe^ Z>eMjse5 de Fran-
lard (C, et d'y joindre une Pré-
, cois d'Amboise , où l'on trouve (3)
<ï"'''" ^^i^PS *le cette élection
face Apologétique qui se voit ,
il était
P^^'"^^ chez l'ëvêque de Va-
à la tête de l'édition de l'an
f,°„^^,'
1616 (D). Cette préface m'ap- Ce Traité des Devises est posthume.
prend une chose que je n'avais II fut imprimé
à Paris, l'an 1620 "^
point trouvée dans l'histoire du P^i" Adrien d'Amboise , fils de l'auteur,
^.^ ^'^ publia l'année suivante , à Pa-
collège de Navarre savoir qu'il :

p ?. • . ,
,
"S, un petit Traite de sa façon , mti-
a publie un petit /ra//e du ton- tulé Devises morales,
*'
cile et une Préface
, sur l'His- (B) On verra ci-dessous les titres de
toire de Grégoire de Tours (E) , quelques-uns de ses ouvrages.] Les
^oic.-El^S^e sur le trespas d'Anne
dans laquelle il justifie cet histo-
^ > ,
J "^ ^riontniorency pair et connétable
. ,

rien contre les accusations de de France avec un panégyrique latin ,

Flacius Illyricus, et l'abandonne et ode francoise sur le désastre de la

sur le sujet des deux Denys , l'A- Fiance en i568 (4). Panégyrique sur
de monsieur le duc de Guise,
réopagite et celui de Corinthe*\ ^^"'«'"'«f
,
i. O,
'
c Henry de Lorraine, et de madame 1

11 tient son rang, sous le taux Catherine de Clèves comtesse d Eu, ,

nom de Thieny de Timophile en 1370 (5).Ze Tombeau de Messirc


dans la liste des auteurs déguisés GrMes Bourdin procureur général du ,

roi en sa cour de parlement d Paris


que M. Baillet a publiée. tant en trois sonnets
,
une élégie tra- ,

J'ai une addition à donner tou- duite du latin d'Antoine f^alel qu'en
,

chant l'édition des OEuvres de hendecasyllabes latins, en 1670 [Q),


Pierre Abélard , ordinairement Les Amours de Clion, où se voit un
ppè'me intitulé, les Désespérades, ou
attribuée à notre François d'Am-
Eglogues amoureuses, en 1572 (7).
boise (F). Amours Comiques, contenant plusieurs
" Cet opuscule est dit Leclerc intitulé: histoires facétieuses et entre autres
, ,
,

l'Impossibilité du Concile , tel qu'il a e'ie'


celle qu'il nomme lesJYéap^litaines en
demaadé par requête au roi, et des Inconvé- i584- Ces Néapoiitaines étaient la tra-
niens qui en pourraient arriver. Par/.s fibo8),
in-8°. de 63 pages, réimprimé à Lyon, 1608, (2) Du Vcrdier, Bibiioth. Française, p. 365,
in- 12. (3) A la page t\i.
"^ Leclerc dit qu'au lieu de Corinlhe 1/ * Jolr remarque que c'est par faute d'im-
fallait mettre Paris ; et que d'Amboise sou- pression que les Mémoires de \icéron disent
tientque le premier évêque de Paris est saint ,626.
Denis l'aréopagite. (4) DuVerdiej-, Bibliotb. Franc. ,
pag. 365.
(5) La Croix du Maine, Bibliolh. Française,
(A) H
voyagea en divers pats loing- pag- 87.
tains (i).] Du Verdier Vau-Privas re- (6) Du Verdier , Bibliotbéque Française , p.
365.
(1) La Croix ilu 3Iainc, Bi!4iotli. Fr?n<"a'se ,
(') La frciixdu IMoine, Eibliotb. Frrirr:.ii.-ft^

/jflj. 8G.
488 AMB OISE.
duction d'une comédie italienne. Il se OEuures de Abajelard, ayants été
cet
nomme à la tête de celte version, Thier- imprimez ,auraient passé par l'in-
ils
ry de Timophile, G
Picard ; et il prit dice expurgatnire de Rome , je crois
aussi le même masque à la tête desife- quelajaulte n'en doïht tant eslre im-
grets funèbres de quelques animaux, putée a l'auteur qu'à celui qui aurait
qu'il traduisit de l'italien en iS^ô, et à fait la préface ; en laquelle , au lieu
la tête du Dialogue et Dei^isdes ûamoi- d'auertir le lecteur d'eslre snbre en la
selles qu'il publia l'an i583. La Croix
, lecture de tels et tels passages d'Aba-
du Maine, qui m'apprend cela, dit jelaFlD , il se serait ingéré de le uou~
que cet auteur auoit connaissance de loir deffendre : et de là le désordre.
beaucoup de langues et qu'il auoit , C'est ainsi que parle l'auteur des Anti-
publié plusieurs ouvrages en langue 3uités de Melun , avocat au parlement
latine.Son recueil de Devises fut e Paris (9). On ne peut pas dire dans
publié à Paris après sa mort, l'an la bonne exactitude qu'il ait fait la
1620. Vie de Pierre Abélard (10) il n'a
:

(C) Il a recueilli les manuscrits de donné qu'un court l'écit des principa-
Pierre Abélard.'] Il fit ses diligences les aventures de ce personnage. Ce
là-dessus d'une manière à mériter la récit contient un assez bon nombre
gratitude du public c'est à ses soins : d'erreurs ce n'est pas ici le lieu de
:

que nous devons une fort bonne édi- les critiquer ; mais, sans sortir du vé-
tion des écrits de ce fameux dialecti- ritable sujet de cette remarque , je
cien. Elle comprend , i"^. les lettres puis fort bien dire que François d'Am-
qu' Abélard et Héloïse s'écrivirent, qui boise n'a pas procuré à Pierre Abélard
sont précédées de la relation qu'il fit toute la gloire qu'il croyait lui procu-
lui-même de ses infortunes; 2°. les rer par l'édition de ses OEuvres. Le
lettres qu'il écrivit à quelques autres public n'a point trouvé dans les écrits
personnes, et celles que saint Bernard, de cet auteur cette grande subtilité ,
l'abbé de Clugni, etc. , écrivii'ent au cette grande force qui le rendirent si
sujet de ses erreurs , ou de sa condam- célèbre durant sa vie. Ecoutons en-
nation , ou de sa mort , avec quelques
core une fois Sébastien Roulliard :

traités qu'un de ses disciples publia Quant aux escripts de cet Abajelard ,
pour lui ;
3°. quelques traités dog- dit-il (i 1) certainement ils ne m'ont
,

matiques d' Abélard , comme l'Exposi- semblé remplir fa capacité ni corres-


tion de la Prière Dominicale , celle pondre à la grandeur des titres et élo-
du Symbole des apôtres , celle du ges h lui donnez par tant d'insignes
S^'mbole de saint Athanase, la Ré- autheurs. Et parlant me suis-je per-
ponse à quelques questions d'Héloïse ,
suadé que l'excellence de cet homme
un Commentaire sur l'Epître de saint gisait en un esprit prœsent, en un dis-
Paul aux Romains; 4°' plusieurs Ser- cours facond et f'œcond, et en la force
mons sur les principales fêtes ; 5°. une d'un génie philosophique qui le ren-
Introduction à la Théologie où se ,
dait redoutable et invincible en toutes
trouve son livre sur la Trinité; 6°. de sortes de disputes. Comme on ha ueu
savantes notes d'André du Chesne sur de nos jours deux ou trois personnages
l'histoire des calamités d' Abélard. Il avoir aquis grande estime par aucu-
y a encore quelques ouvrages de cet nes de ces perfections ; et néanmoins
auteur, qui ne sont pas imprimés. On ce qu'ils ont fait imprimer de leurs
en peut voir les titres dans le Supplé- escripts s'est trouvé beaucoup infé-
ment du père Oudin (8), avec les bi- rieur à ce que chascun en aurait at-
bliothèques où ils se trouvent. Fran- tendu.
çois d'Amboise a fait traduire en no- (D) // a mis une préface apologéti-
tre langue les règles qu'Abélard avait que aux OEuvres d' Abélard de l'édi-
marquées aux religieuses du Paraclet. tion de l'an 1616. ] La commodité des
Sa préface apologétique a déplu à cliillres a ses incommodités. Lesimpri-
bien des gens et quelques-uns ont
,

débité qu'elle fut cause de ce que l'on (9) Sebast. Roulliard,;)»^. 35o. Son livre fut
imprimu à Paris, Van 1628, in-!\''.
fit à Rome contre l'ouvrage qu'il pu-
(10) On le dit pourtant dans le Calalugiis
blia. Et ce que depuis naguères les Aulorura Calalogoium, etc. de M. Tei.'sier
, p.
290.
(S) Pag- 4i3. (11} liist. de Melun, png. 318.
,,

AMBOISE. 489
meurs y font mille fautes que les cor- avec ce titrePétri Abœlardi, Sanc-
:

recteurs n'aperçoivent pas , et cela ti Gildasii in Brittannid Abbatis, et

multiplie furieusement les êtres sans Hclo'issœ conjuqis ejus , quœ post-
nécessite. Nous en avons ici un exem- mnduTu prima Cœnobii Paruclitensis
j)le. Quelques-uns mettent cette ëdi- Abbatissa fuit, opéra, nunc priiniim
«iition d'Abélard en Tannée 1606(12), eruta ex MM^\ Codd et in lucern
L't quelques autres en Tan 1626 (i3). édita studio ac diligentid Andreœ
Ne doutez point que cela ne fasse dire Quercetani , Tiirone/isis. Parisiis ,

à plusieurs auteurs que les OEuvres


,
Nic.Bunn, 1616, in-^°. Il ya beau-
d'Abëlard ont ëtë imprimées trois fois coup d'apparence que c'est vérita-
dans l'espace de vingt ans; et comme blement à ce célèbre Tourangeau
quelques-uns'disent qu'on les imprima que nous devons cette édition. Dans
in-folio l'an 1616 (i4) c'est un nou-, Fabrégé du privilège qui est au com-
veau moyen de multiplier les éditions mencement de l'exemplaire qui por-
sans nécessité. te le nom de du Chesne on n'a pas ,

(E) // a publié une préface sur V His- manqué d'y dire que ces OEuvres
toire de Grégoire de Tours. ] Je ne étaient imprimées par les soins d'An-
doute point que ce ne soit celle dont dré du Chesne, édita studio Andreœ
M. l'abbé de Marolles a parlé ainsi Quercetani; au lieu que dans l'exem-
(i5) Son Histoire des François (il
: plaire qui a le nom d'Amboise le ,

s'agit de Grégoire de Tours) qui est ,


privilège ne dit pas un mot de celui
le plus beau de ses ouurages fut au- ,
qui a pris soin de recueillir ces OEu-
trefois traduite par Claude Bonnet ,
vres. Ainsi s'il était permis de con-
,

gentilhomme du Dauphiné (16), qui jecturer, on pourrait croire que par


se qualifiait docteur en droit cit'il et quelcjue motif secret et qu'on n'a pas
canon sur laquelle M. Hcmery d' Am-
, jugé à propos de transmettre à la
boise, maistre des requestes a fait une , postérité, du Chesne aurait cédé la
assez longue Préface adressée à ma- gloire de son ouvrage à M. d'Am-
dame Henriette de Balzac marquise , boise qui était alors en état de re-
,

de f^erneuil et fut imprimée à Paris


j '
connaître un sacrifice de cette na-
in-8°. , chez Claude de la Tour en , ture. Quoi qu'il en soit les deux ,

1610 ^. exemplaires de du Chesne et d'Am-


(F) J'ai une addition a donner tou- boise que j'ai vus ne sont pas sem-
chant l'édition des OEwres de Pierre blables en tout par exemple celui
: ,

Abélard ordinairement attribuée h


, de du Chesne commence par une
notre F. d'Amboise. ] Cette remarque épître dédicatoire adressée à M. Ben-
n'est point de mon crû et je la donne , jamin de Brichanteau évêque de ,

dans les propres termes de celui qui Laon et abbé de Sainte -Geneviève.
,

me l'a fournie (17). « Il y a des exem- Cette épître manque dans la préten-
)) plaires des OEuvres d'Abélard qui due édition de M. d'Amboise, aussi-
>j portent à la tête le nom de M. d'Am- bien que la Préface que du Chesne
» boise ^ mais on en trouve d'autres ajouta où après avoir dit en géné-
, ,

« où l'onvoit celui d'André duChesne , ral qui étaient Abélard et Héloïse, il


rend compte de ce qu'il a fait pour
(12) Launoius , Hist. Gymnasii ÎS'avarra; p. ,

801. rendre l'édition de ce célèbre dia-


(i3) Le P. Oudin , Supplemenli de Script. lecticien la meilleure qu'il a pu il :

Ecclesiast. , pag. l^\'i.


parle honorablement de tous ceux
(i4) Spiielius, Specim. Bibliolli. univers Ko-
nig. Bibl. vet. et nova; Christoph. Hendreicli qui l'ont aidé de leurs manuscrits ,

dans les premières Jeuilles de Pandectar. Bran- et avoue devoir à M. d'Amboise les
Jenburg.
lettres et quelques autres petites piè-
(lâ) Préface sur Grégoire de Tours.
ces. Après cette préface suivent les
(16) Il n'est point dans la Bibliotbéqae de ,

Dauphiaé du sieur Allard. [ Chalvet qui a ,


Tcstimnnia f^eterum de Abœlardo et
donne' en 1797 une nouvelle édition de ceUe Bi- Helo'issd, qui manquent aussi dans
bliothèque, n^a consacré que deux lignes à ce
Bonnet. ] l'exemplaire de M d'Amboise. De
Réimprimé dit Leclerc sous le titre de
, ,
son côté l'édition de ce conseiller
,

Traité ou Discours sur l'Histoire Sacrée de saint d'état a une préface apologétique
Grégoire 1614. ,
pour Abélard qui mantjue dans l'é-
(17) Mémoire manuscrit, communiqué par
,

M. Laocelot , l'un des sous-bibliothécaires de la dition de du Chesue. Pour le reste,


bibliothèque Mazarine h Paris. tout est semblable , et ces deux
,

49"^ AMBOISE.
V exemplaires se repondent page pour St. -André à Paris et enfin eu ; ,

» page. Il ne sera peut-être pas iuufile


l'année i6o4 , on le fit évêque de
>} d'avertir le public de ce double ti-

)> tre , de peur qu'un jour il ne soit


Treguier. Il mourut le 28 de
» cause qu'on augmente encore le juillet 1616, et fut enterré dans
« nombre des éditions d'Abélard , sa cathédrale , oii son épithaphe
» comme on l'a déjà remarqué *. »
lui donne de grands éloges (B).
* r> Il n'j a peut-être , dit Jolr , aucun fait Je ne sache point qu'il ait com-
» littéraire plus difficile à débrouiller que ce-
" lui-ci —
J'avoue que je ne comprends pas posé d'autres écrits qu'une tra-
" pourquoi une partie des exemplaires porte le gédie française , intitulée Holo-
» nom d'Amboise, et l'autre celui de du Chesne.
>' Peut-être chacun d'eux se persuadait-il que ferne * , qui fut imprimée l'an
» TAbélarJ i'errait le jour sous son nom seul,*.,
» L'e'dition étant prête h paraître , ils ne purent
i58o (c).
•• apparemment s^ accorder ; et^ au lieu de con-
» fenir qu'elle porterait le nom de l'un et de
* La
Bibliothèque des Théâtres (par Malt-
»• l'autre » ils convinrent mal à propos qu'une poin ou Maupoint l jSS , (n-8°., attribue à
,

» partie des exemplaires porterait le nom d^Am- Adrien les ]Napoli(aiuKs comédie qui est de
,

» boise, et l'autre celui de du Chesne. » François , ainsi que le remarque Joly.


(c) Launoii Hist. Gymnas. Wavarr. ,
pag-
AMBOISE (Adrien d') , frère 800.
puîné du précédent ne s'avan- (A) Thiriot lui a Jonnéla louange d'ê-
,

ça pas moins que lui puisqu'il tre soiti d'une très-noblefamille.']. Néan-
,

parvint jusqu'à la prélature. Il moins cet auteur fait expressément


mention de la chirurgie du père dans
«ut part comme lui aux libéra-
cet éloge du fils. J'emprunte de M. de
lités de Charles IX qui l'entre- Launoi ce néantnoins car voici com-
, ;

tint assez long-temps au collège me parle


il » Attanien Thiriotus ait
:

de Navarre. Il trouva la même •» Hadi'ianurafundatissimâetnobilissi-

» simâ satum esse familiil. His enini


grâce auprès du roi Henri III. » yerbis utitur : Franciscus primùm
11 était de la maison de Navar- )) in duorum inferiorum Navarrae so-
re (a), lorsqu'en iS^g on l'élut » dalitiorum disciplinamieceptusest,
recteur de l'université de Paris. M et Caroli IX liberalitate ad rhetori-
)) cas ac philosophicas institutiones
Pendant son rectorat , l'univer- 3) eruditus. Deindè , humaniores litte-
sité demanda au roi la confir- » ras ibidem docuit, etc. (i). » Un
mation de ses privilèges et il , très-bon moyen de tirer d'affaire ces
porta la parole , suivi d'un grand deux auteurs serait de dire que nobi-
lissimafamilia ne signifie point ce que
nombre de docteurs. Il reçut ses les Français appellent _/àmt//eIrè5-/io-
licences en théologie l'an i552 , ble , famille de gentilhomme ; car si
et fut préconisé en cette rencon- Thiriot avait ainsi entendu son latin,
tre par Michel Thiriot il eût parlé peu exactement la chi- :
qui , ,
rurgie n'est point en France la profes-
entre autres louanges lui donna ,
sion d'un gentilhomme. Si M. de
celle d'être sorti d'une très-noble Launoi avait pris la chose en ce même
famille (A). Il était prédicateur sens il eût apporté des preuves sans
et aumônier du nécessité, et ses preuves n'auraient eu
roi , et grand
aucune force. Il n'est pas nécessaire
maître du collège de Navarre {b)
de prouver que l'on a donné la qua-
lorsqu'en 1694 l'université de lité de gentilhomme à quelqu'un lors-
Paris prêta serment de fidélité à qu'en propres termes on a dit qu'il
Henri -le -Grand. Environ ce est né d'une famille très-noble, au
sens que les Français entendeiit ce
lemps-là, il obtint la cure de
mot et si pour prouver un fait de ; ,

(a^SociusNavarricus. Launoius, Historiœ cette évidence on alléguait la qna-


Gy"iiia5'> Navarrœ pag 36o. .
(i) Launoius, Hist. Gyranasil Navarr. , pag.
\b) Ibid. ,
pag. 371 , 373. 7(19, 800.
, ,

AMBOISE. 49^
lité tieboursier et celle de régent de qu'ilne faudrait pas nier absolument
seconde que ce quelqu'un aurait eue
,
que quelque branche de l'illustre mai-
dans le collège de Navarre , il est sûr
qu'on ne songerait pas à ce qu'on di- °»>'é Hu nom qu'elle est une branche de l'illus-
,

•t n ,1„ „kl„-,.„ »,« '"'^ maison J'Amboise ; mais on peut assurer


rait. Pareilles preuves ne noblesse ne
-Il
très-po,iiivemcnt
furent jamais de mise. 11 pourrait 1°. Que Jein d'Amboise, pire de François

donc que non-seulement Michel


être d'Amboise, était nalif de la ville de Douai en
Flandre; qu'.l f,,i .ucces.ivemen. chirurgien des
Thiriot, mais aussi M. de Launoi ont ,
,,. ... f .. ro'5 rrançois l^r. Fienri II Franroi- ll,Cbar-
\MlsnobltSSimaJamilia, pour une ta- les IX et Henri m
qu'il tul naturalisé par
;

lettres du ag de janvier de l'an i,îfi6, en qualité


,

mille considérable et qui faisait belle


,^«'^' de ch.-imbre et chirurgien .i,, roi
figure, et non pas pour une famille de
" •-.' ^-. ' .. „ .
f,'°",'''=
Charle- lA qu il mourut le i3 de décembre de
gentilhomme. C'est à quoi il faut pren
;

l'an i584, et qu'il fut enterré dans l'église de


dre garde dans les éloges latins des Saint-Gervais à Paris, avec Marie Fromager,
,

sa femme, fille de Jean Fromager, aussi chirur-


hommes de tromperait
lettres : on se
gien juté au châtelctde Paris, et chirurgien du
si l'on prenait pour des gentilshommes
roi.
tous ceux dont on dit iiobiU ioco no- , Que François d'Amboise, fils de Jean,
°.

bili génère , nobili prosapiâ oriundi fut baron de la Chartre-sur-Loire , et seigneur


*'. Je saisbien que François d'Amboise et de Vezeul en Toiiraine, etc.; con-
^g||fg™*"puis préi^ident au parlement de Bre-
se qualifie ëcuyer dans l'édition d'A- tagne; avocat général au grand conseil l'on i58G;
bélard 5 mais cela prouve tout au plus maîlrc des requêtes en 1697 et conseiller au ;

conseil privé, et eniin conseiller d'état en i6o4;


(jue son père ou lui avaient été ano-
qu'il épousa le i5 de janvier 151)4 Marguerite
blis, et nullement que son père eût Cousinel, Clle d'un notaire de la ville de Meaux,
été chirurgien et gentilhomme tout vivante encore l'an i6'i^ qu'au mois de juillet;

ensemble. 11 me vient une pensée que de l'an 1S89 , le roi Henri III le créa cbevalier,
en considération des services que son père avait
je donnerai pour ce qu'elle me coûte :
rendus à quatre des prédécesseurs de ce prince:
c'est que peut-être les prédécesseurs et voici la copie de ces lettres de cbevalerle.
de François d'Amboise ayant dérogé ,
Lettres de chevalerie , donnr'es par le roi Hen-
il obtint la réhabilitation de sa fa-
ri III , an mois de juillet i58[) à François
,

mille. Que sait-on même si, du côté d'Amboise ,


président au parlement de Bre-
gauche, il ne descendait pas de l'illus- tagne.
tre maison d'Amboise ^'^ ? C'est ce qui " Henri, par la grâce de Dieu roi de France
paraît le plus vraisemblable; car il ra- - et de Pologne, à tons présens et à venir,
conte qu'il alla au couvent du Para- " salut. Comme il soit chose honnestt- et raison-
>' nable que les personnes ornées et décorées de
clet pour y ramasser tout ce qu'il >• vertus soient élevées en titre et degré d'hon-
pourrait des OEuvres de Pierre Abé- " ncur convenable à leur môvile afin de donner ,

lai'd , et qu'il y fut très-bien reçu par » courage et désir aux autres de parvenir par
•>vertu à telle ou plus grande dignité ou su-
l'abbesse , Marie de la Rochefoucaut > blimalion ; savoir faisons que nous, dûment
sa parente, donl l'aïeule paternelle ' acertenés des notables, louables , et vertueuses
dit-il , Anloiiiette d'ylniboi'se J'cninie » œuvres, actions et coraportemens de notre cher
,
« et bien araé M. François d'Amboise , sieur de
du seigneur de Barbesieux chei'aHer ,
» Vezeul, notre conseiller et avocat général en
de l'ordre, était Jille unique de Guy i>notre grand eon-eil, et président au parlement
d' Arnboise , et petite-Jille et héritière " de Bretaigne remémorant les services que feu
,

de Charles, seigneur de Chaumont ••son père a faits aux quatre rois nos predéces- ,
,
» seurs , et à nous, et considérant les grands ,
r.iaréchal de France de sorte qu'elle
agréables et fidèles services que le lit d'Am-
:
>'

recueillit toute la succession de celte » boise nous a faits tant en plusieurs charges
,

très-ancienne famille, et qu'elle trans- » et commissions qu'il a eues en celui notre


» royaume, et voyage qu'il a fait lors de notre
|)orta lesbiens de la branche aînée " élection en Pologne , qu'en l'exercice de ses
dans la maison de la Rochefoucaut : » doux en ileux de nos cours souveraines ,
états
Totnm l'eluslissimam familiam crenit •>
et lesquels services ledit d'Amboise continue

primogenita KosxR.i. ordinairement près et alentour oc notre per-


et ad Rupifocaldos ••

»' sonne en plusieurs et maintes manières , et


iranslulii une chose assez
(2). C'est >' tvpérans que de bien en mieux il fera le temps
singulière que le fils d'un chirurgien » à venir, voulant aneuiicment l'en récompenser
de Charles IX ait parlé ainsi (*). Notez » et extoller au litre et degré d'honneur , comme
»' sesdites vertus et oauvres le méritent , afin qu à,
*' Chevalier non e'cuyer dit Jolr.
et " son exemple, tant sa postérité que les autres
, ,
*^ Cette conjecture de Bayle semble probable - personnes d'honneur et vertu soient induites a.
àJoly^ mali^re l'avis du ge'ne'alogiste d^f/ozier. » faire le semblable , à nous cl celle couronne;
(ï) Franc. Ambocsius Pra:falione Apologet.
,
•• icelui pour ces causes et autres a ce nous mou-
in Opéra Aba?lardi. " vans, avons fait et créé chevalier, et du titre
(*) La poslérilé de cet homme supivise pré- >• d'icelui décoré et décorons en présence ne
seutrment , mais trcs-raussemciit, sur la confcr- > plusieurs princes et ^îcigneurs de notre san--
: ,

49^ AMB0I8E.
son d'Amhoise ne soit demeurée ou chirurgien de Charles ÏX était peut-
ne soit tombée dans l'obscurité. Le être de cette branche.
(B) Son épitaphe lui donne de grands
" et antres grands et notables personnages étant
éloi^es. ] je ne crois pas que l'on soit
" près de nous pour par lui jouir et doresnc-
;

" vant user dudit titre de chevalier, en tous fâché de la voir ici. Je la copie sur
" droits de noblesse , honneurs , autorités , pri- M. de Launoi
' viléges , exemptions , prérogatives et préénii-
'• nences en toutes et honorables assemblées , j4mboesi ,
paler erudilionum ,

» tant en jugement qu'ailleurs, ou besoin sera, Argivd et Lalid madens Minerfd,


" comme au semblable ont accoutumé d'user les Paulind in Calhedrd diserte prceco ,

" autres clievaliers créés , tant de notre main Idemque hcereseos severe censor ,

» que de nos prédécesseurs rois. Si donnons en Priscorwn nova nonna Episcoporuin ,

• mandement à nos amez et féaux les gens tenans AnUstes pie pauperum palrone,
,

»» nos cours de parlement bailtifs sénéciiaux, ,


Cuslos virginiiatii alque ainator
,

» prévôts juges ou leurs lieutenans et à tous ,


Tu quocimqu'e ieris, sequeiis agnum.
,

« nos amés justiciers officiers et sujets , cha-


,
que celui qui reste aujourd'hui le seul de la pos-
,

« cun en droit soi si comme il appartiendra ,


,
térité de François d'Amboise usurpe les armes ,
" que ledit d'Amboisesouffrent et ils fassent ,
pleines de cette puissante maison.
laissent jouir et user pleinement et paisible-
»•

i> ment desdits droits de chevalerie , honneurs , Lorsque feu M


Bayle commença à travaillera
» prérogatives, privilèges, franchises et libertés
son Dictionnaire Historique s'il m'avait consul- ,

té il aurait traité plus exactement et plus sûre-


y appartiennent ainsi que dessus est dit , et
,
'> qui

>• qu'en tel cas est accoutumé. Car tel et notre ment qu'il ne 1 a fait beaucoup de faits généalo-
» plaisir. Et afin que notre présent don et octroi
giques qu'il a av;;ncésdans son ouvrage, et qu'on
n'a pas recliliés depuis , et qui resteront contre
» soit et demeure à jamais valable à la décora-
la vérité dans toutes les éditions que l'on fera de
'•tion dudit d'Amboise et de ses successeurs et
cet excellent livre. [ Tire d^un Mémoire commu-
,

• qu'il en soit mémoire perpétuelle, nous avons


nique' par M. d'Hozier, en l'jiB. ] Rem. crit.
> fait mettre notre fcel à ces présentes. Donné à
Ponloise, au mois de juillet l'an de grâce iSSg,
>•et de notre règne le seizième. Signé Henri ,
» et sur le repli , par le roi , Potier , et à costé
AMBOISE (Jacques d'), frère
" est écrit , visa conlentor. signé Combauo , et cadet du précédent , s'attacha à
» scellé du grand sceau de cire verte en lacs
" la profession de son père , et il
• de soie verte et rouge.
Qu'Antoine d'Amboise son fils baron
3°. , ,
devint très -habile mais après ;

d'Hémeri, etc épousa le 20 d'octobre de l'an


,
qu'il eut assez fait connaître sa
i632 Anne de la Hilière fîUe de Jean Gabriel ,

de la Hilière , gouverneur d'Amboise et de , capacité dans la chirurgie , il


Louise du Gast; et qu'après avoir été lieutenant
de l'artillerie en i634 , puis mestre de camp du monta plus haut de quelques de-
régiment de Touraine , et gouverneur de la ville grés il devint docteur en méde-
:

et citadelle de Trin en Piedmont, il mourut


lieutenant-général des armées du roi. cine (A). Cette promotion se fit
4°. Que Charles-Joles d'Amboise , son Cls,
aussi mestre de camp du régiment de Touraine,
entre l'an 1682 et l'an 1697 car ;

épousa le 22 septembre de l'an lôra Charlotte PineaU témOlgUe danS UU llVrC


du Gast , sa cousine. --

Et 5°. que de ce mariage est sorti Giles-An- composé en 'Sgy touchant les
TOINE d'Amboisf vivant et demeurant dans la
,
marques de virginité , qu'alors
ville d'Amboise en Touraine, ou il épousa le l'J
de janvier 1700 Paule Guichard fille du maire , Jacques d'Amboise était docteur
de ladite ville, de laquelle il a un fils et deux
lilles vivans en 1716.
,
en médecine mais qu'il n'était ;

On .suppose dans un petit livre, intitulé /n- ^.^q maître ès-arts et bachcHer
dex fuiiereus Chirurgorum Parisiensium ab J-
, .
,
.irmo iBiSfliidiuiKm 1714, imprimé à Trévoux, en chiTurgie , lorsqu avec Deau-
chez Estienne Ganeaii , en I7i4i ui-12 que
.François, Adrien et Jacques d'Amboise (*') fils
,

coup de dextérité et en présence ,

de Jean , étaient sortis de l'illustre maison d'Am- de plusieurs grands maîtres , il


boise (*^) ; et c'est sur celte fausse supposition
fit la dissection d'une femme qui
,

{" ) Jacqties d'Amboise frère de François, ,

vpousa Marie Longis fille de Joseph Longis, ,


avait été pendue l'an 1^79, pour
procureur au Parlement , mourut le 5 d'août
i6o5 , et fut enterre' dans le cimetière de Saint- avoir tué son fruit (a). î^ious sa-
Nicolas-des-Champs a Paris. 1 1 fut père d^ Anne vons d'ailleurs qu'il n'était en-
d\-imboise, fille unique mariée avec David de ,

Mondeiir, gouverneur de la Fère en Picardie, core que chirurgien , l'an 1682


puis lieutenant au gouvernement de J'^erdun. en mé-
(b), et qu'il était licencié
C^) M. JoANNNES d'Amboise paler, Castel- ,

lelli Chirurgus Regius , ex Nobdis.'imd Am-


{n) Vnyez ci-dessoiis la remarque (A).
hoesianorum gente oriundus 1res kabuttfilios,

,

in suo quisque statu percelebres Franciscus, Mich. Tliirioli Laudat. Hadr. Amlioc-
[b]

.<ci7i(e£, Adriaxus et Jacobus. Index fiintreus


,
sii l532, apud Launoium Hisloiiie Gyui-
, ,

Chiturgovum Paiisiensium p. 22 3o, 22 , etc. ,


nasii J^avantc pag. 799.
,
,

AMBOISE. 493
deciiie et médecin du roi , l'an tju'avec le grand nombre de ses
lorsqu'il fut élu recteur poésies, il ne soit tombé dans les
1
594 ,

de l'université de Paris (c). Le ténèbres de l'oubli. Il ne paraît


serment que cette université prê- pas plus que François d'Amboise
ta à Henri-le-Grand, et le procès dans le vaste Recueil de M. Bail-
qu'elle intenta aux jésuites tom- ,
let cependant il y a quelque
:

bent sous ce rectorat. Ou a deux apparence qu'il espéra que le ti-


Harangues latines que Jacques tre de ses ouvrages entretiendrait

d'Amboise prononça au parle- long-temps la curiosité des lec-


ment en qualité de recteur le ,
teurs. L'un de ses livres intitulé ,
,

12 de mai et le 1 3 de juillet iSg^ : les Epistres vénériennes Fanta' ,

elles sont sanglantes contre les s l'es Complaintes, Épilayhes ,


,

jésuites. Il avait été membre du trente-quatre Rondeaux et trois


collège de Navarre , avant que Ballades fut imprimé à Paris
,

d'être recteur {d). en i556. Un autre s'appelle Le


Blason de la de/it {b). Les Contre-
{c\ Launoii Historia Gymnasii Navarrae
pag. 368. Voyez aussi ^'Apologie pour
,
Epistres (ï Ovide (c), c'est-à-dire,
J. Cbastel pag. ig!\.
,
les lettres qu'il composa pour
\d) Launoius , ibid. réponse à celles que les béroïnes
d'Ovide écrivirent à leurs maris
(A) Il i' attacha a la chirurgie, où

il dei'int fort habile et devint doc-


,
ou à leurs galans semblaient de- ,

teur en médecine.^ Cela paraît par ces voir être un grand attrait ; et
deux passages l'un est de Thiriot ( i )
: :
néanmoins ont subi la des-
elles
IValu minimus paternam, hoc est ulce-
tinée des autres poésies de Michel
ribus medendi artemamplexatus niul-
d'Amboise. On ne sait plus ce que
,

tissalutarem manum felicissimè prœ-


bet ; et Tautre de Pineau Jacobus :
c'est. Il se mêla de traduire il :

ylnibosianus in artibus magister et in miit en vers français IV satires


chirurgid baccalaureus {nunc autem in
de Juvénal {d) le X". livre des ;
utrdque medicind doctor et medicus
regius ) (2). M. de Launoi entend par- Métamorphoses d'Ovide les ,

là le chirurgien de Charles IX , et se Églogues de Baptiste Mantouan


trompe. (e), et le Traité italien d'Anto-

(1) Àpud Launoium, Hist. Gymnas. Navarr., nio Phileremo Fregoso, intitulé
Ris de Démocrite et Pleur d'He-
(2) Pinaas , de Virginit. N'otis , Ub. Il , cap.
VIII. raclite (y). Il a écrit en vers héroï-
ques la Défloration de la mort
AMBOISE (Michel écuyer de mes s ire Guillaume du Bellai^
d' ),

et seigneur de Chevillon
seigneur de Langey (g) et en *, vivait ;

au X\ P. siècle. Il se donna dans prose, le Guidon des gens de


ses ouvrages un nom de guerre guerre [h), \oyez la Bibliothèque ,

ou plutôt un nom poétique (a) de du Verdier Vau-Privas.


qui ne leur a point servi de grand
(i) Imprimé à Lyon en 1 53^.
relief, et qui n'a pas empêché (ci Imprimées à Paris en i5il.
,

(d) Imprimées à Paris en iS^S. ,


*
Chaufepié qui a consacré un petit arti-
,
(e) Imprimées à Paris, en l53o.
cle à Michel d' Imboise a pris tout ce qu'il
(y") Impr. à Paris en iS^J-
,

en dit de Nicéron. H présume que M. d'Am-


,

(^) Impr. à Paris en i5^3. La Croix


,
boise ,/rère naturel de Georges, né en i5ot),
du Maine, BiUiolhéque Française, pag.
Tnourut en 154".
322.
(a) L'Esclave fortuoé. {h} Imprimé à Paris ,
en 1 5!^3.
49Î AMÉLIUS.
AIVIBROISE, général de l'ordre aussi 5 4"- ^'^s paroles de Virgile :

de Camaldoli. Cherchez Camal— Atque Amerina parant lenlœ retinacula firliÇi),

DOLI. ne prouvent point que de son temps


on estimât les uignes d'Amelia. Ce
AMÉLIA, ville d'Italie. On vers ne signifie autre chose sinon ,

l'appelait anciennementy^meWa. qu'on trouvait au territoire de cette


Elle est située entre le Tibre et ville, quantité de branches souples

la Néra. Caton débite qu'elle fut


comme l'osier, desquelles on se ser-
vait dans la culture des vignes: P^ir-
fondée neuf cent soixante-quatre gas de quitus imites religantur ; quœ
ans avant la guerre de Persée(a) : l'irgre abundant circa Amerinuni op-

si bien que cette guerre ayant


pidum. . alii genus salicis dicunt
.
,

dispari colore à cœterâ salice : natn


commencé l'an 56 1 de Rome , il est ruhra et ad connectendum aptior
,
s'ensuivrait qu'Améria aurait été quia prœter nioreni lenta est (2).
plus ancienne que Rome de trois (Bj Léandre Albert a besoin aussi

cent quatre-vingt-trois ans. Fes- d'être corrigé. ] Il impute à Catoa


d'avoir dit qu'Améria fut rétablie
tus donne le nom d'Arnirus au
^ , , .,, Ti '^ 1""" de 900 ans avant la
plus "^ la guerre de
fondateur de cette ville. 11 parait Persée , et qu'elle fut bdtie premiè-
par des inscriptions qu'elle de- ,
rament par ceux de Veies peuple de ,

vint une de ces villes que les Ro- Joscane sous la conduite d'Améroe ,
,

t 71// • • • "'le d Atlas l'Italien, et de Pleione.


mains appelaient
Il
Municipium.
1 •

ti <,„„„„,„
Il suppose que ni- jf quelle
Plme a dit n cfutl -^

_,. , ^ , / ,
Liceron le conhrme dans le beau bâtie 964 ans avant la guerre de Per-
plaidoyer qu'il fit pour Roscius sée et il fait de Caton et de Plin
,

Amérinus. Elle acquit le droit deux chefs d'opinion. Ensuite, il tra-


vaille à les accorder et voici la ma-
de colonie romaine sous Auguste nière dont il s'y ,

prend. La chrono-
(6). Elle est située dans un ter- logie de l'un comnent assez ai'ec la
roir fertile , et les coteaux qui chronologie de l'autre dit-il (3). Ca- ,

l'environnent ont de beaux vi- ton parle de plus de 900 ans a^ant la
guerre de Persée Pline en marque :
gnobles [c). Il n'est pas certain
964 aidant cette même guerre. Il est
qu'anciennement on estimât les donc aisé de les mettre d'accord en-
vignes d'Améria. Comme je ne semble. Que si l'un d'eux emploie le
fais cet article que pour rectifier terme de rebâtir et l'autre le terme ,

simple de bâtir , il ne faut pas s'ima-


celui de Moréri (A), je ne le fais
giner pour cela qu'ils assurent choses
pas fort long. Léandre Albert a contraires ; car le mot coudere dont
besoin aussi d'être corrigé (B). se sert Pline, se prend indifférem-
ment , et pour fonder , et pour répa-
(a) Apud Pliaium , lib. III, cap. XIV.
rer. Ces vaines et chimériques dispu-
(*)Cluverii Ital. Antiq., lib. II, cap. VIL
tes tombent par terre , à la honte de
(c) Leandri Alberti Descriptio Italix p.
,
Cet auteur , dès que Ton consulte
344.
Pline j car on voit qu'il ne forme pas
(A) Je ne fais cet article que pour de sentiment , et qu'il se contente de
rectifier celaide Moréri. 1°. Il n'y a '\
dire Ame riam... Cato ante Persei bel-
point d'auteurs qui aient écrit qu'Avaé- luni conditam annis 964 prodidit (4)
Tinjut bdlie du temps de la guerre de (i) Virgll. Gcorgicor., lib. I, vs. 265. Ce verf
Persée ; 2°. Pline ne soutient point a e'ie tris-mal t apporte par Moréri.
qu'elle était bâtie 964 ans aidant cette Atque Amerina parent lenta retinacula viti.

guerre. Il rapporte simplement que


(2) SerYius in Virgil. , ibidem.
Caton avait dit cela ^ 3". Cicéron n'a \'i) Leandri Albeiti Descript. Ilalise, p. i44-

point plaide' pour un comédien ne en (4) Pllnius, Ub. III, cap. , in fine. XIV
cette ville le Roscius Amérinus pour
qui il plaida
:

était difféi'ent du Ros-


,
,
AMÉLIUS ,
philosophe plato-
cius comédien , pour qui il plaida nicien , au IIP. siècle , était de
AME LÎUS. 4ç,5
Toscane. Son vraî uom était religion qui faisaient un si hor-
,

Gentilianus et il aimait mieux,


rible mélange des doctrines de

le surnom à^ Amérius que celui l'Evangile et de celles des philo-


à'Amélius. Il fut disciple de Plo- sophes. Il s'éleva un grand nom-
tin à vingt-qua- bre de ces hérétiques au temps
Rome pendant ,

tre ans après quoi il se retira de Plotin et c'est ce qui l'obli-


;
;

dans Apamée ville de Syrie. Il gea d'armer contre eux. Il prit


,

y était quand Plotin mourut. Il sur lui la défaite desgnostiques,


adopta un certain Justin Hésy- pendant qu'Amélius combattrait
cliius natif de la même ville {a).
,
contre Zostrianus et que Por- ,

Voilà sans doute les sources du phyre attaquerait les prétendues


mensonge que Suidas a débité , révélations de Zoroastre. Après
quand il a dit qu'Amélius était cela , Amélius ayant ouï dire que

d' Apamée. Il ne se trompe guère l'on accusait Plotin de s'être paré


moins quand il assure que Por- des dépouilles de Numénius, prit
phyre fut disciple d'Amélius (A}. la plume pour justifier son maî-
Ce qu'il y a de certain est qu'A- tre et dans trois jours il com-
;

méhus fut fort estimé de son posa un ouvrage qu'il dédia à


maître et qu'il répondit à cette
,
Porphyre, et auquel celui-ci don-
estime par une singulière vénéra- na pour titre De la différence ,

tion pour Plotin. Lorsqu'il com- qui se trouve entre la doctrine de


mença d'étudier sous ce fameux Numénius et celle de Plotin. Ce
philosophe il ne savait que ce que je vais dire suffit à faire con-
,

qu'il avait appris d'un certain naître l'estime que Plotin avait
Lysimachus'^6); mais, par son ap- pour Amélius. Comme Plotin se
plication au travail il devança souciait peu d'étaler ses forces
,
,

tous ses condisciples. Il savait par il des doutes dans l'esprit


laissait
cœur une partie des lA:ons de de ses auditeurs , et il avait en
Numénius. Il les avait ramassées quelque façon besoin d'être forcé
et copiées presque toutes. Il fai- à montrer le meilleur de sa doc-
sait aussi de gros recueils de tout trine. C'est ce qui fit que Por-
ce qu'il entendait dans les confé- phyre proposa par écrit plu-
lui
rences de philosophie et il com- ;
sieurs objections pour prouver ,

posa de ces recueils une centaine que nos idées sont hors de notre
de Traités qu'il donna à son fils entendement {d). Voilà ce que le
adoptif. Il n'avait encore osé pro- père Mallebranche a renouvelé
duire que cela , lorsque Porphyre de nos jours. Plotin ayaut lu ces
vint à Rome (c) c'est-à-dire ,
,
objections les donna à réfuter
après avoir profité des instruc- à Amélius. L'opposant répliqua :
tions de Plotin pendant l'espace Amélius dupliqua; et enfin Por-
de dix-huit ans. Depuis il com- phyre comprenant la doctrine de
posa XL livres contre Zostria- Plotin y donna les mains et lut
, ,

nus l'un de ces anciens héréti-


.
KXi
id)^ Aïo ÀvTiypéi-^xç Trp'js-Âyxycr
tiques tant en philosophie qu'en
, (Têixvc/vai 7riipcé/u.ivoç on î^te Tad vou
,

TO vonuct. Qitapropter eiirn contra


iKfsç-Ji/ts
{a) Porphyrius in Vitâ Plotini. scr-ibendo proi'ocare tentavi conalus osten- ,

(6; Celait un philosophe sioicie.'i-. clere en quœ inlelligunluv ex Ira intelteclurn


(t) En a63. esse. Porphyr. in Vitii Plotini.
496 AMÉLIUS.
sa rétractation en plein auditoi- fin le silence de Porphyre , de quelle
re. Lonein
o goût était î°''*^'^, n'est-il point contre Suidas ?
, dont le
.o
4 'j Porphyre rait mention d Amehus a
. .

SI sur et la critique si redouta- ^^^^ moment dans la Vie de Plotin


,

ble , trouvait à la vérité trop de et il n'aurait jamais dit un mot des


verbiage dans les écrits d'Ame- études qu'il aurait faites sous la dis-
i- „• :i i„ „,ûtt„;* „ûo^ cipline d'un tel maître. Suidas pour-
lius; mais il le mettait nean—
,
,. '.. • . .. t^i -
.'
i_-
.
1 j rait bien avoir ete trompe par 1 heo-
moms au petit nombre des phi- ^oj-et qui appelle Amelius ,
le chef
losophes dont les ouvrages lui de l'école de Porphyre (3) , v'est-a

semblaient dignes de considéra- dire , selon l'interprétation de M. de


Tillemont , de l'école de Plotin où
tion (B). Il écrivit une longue Porphyre éludiait (4). Ausii Suidas
lettre contre celle qu'il avait re- le fait maître de Porphyre :
( c'est
çue d'Amélius , touchant les ma- M. de Tillemont qui parle. ) peut On
nières de la philosophie de Plo- mettre encore entre ses disciples Cas-
tricius Firmus homme.... qui rendait ,

tin. Amélius était un dévot du


toutes sortes de serfices à .Amélius.
paganisme , grand observateur Voilà donc un auteur moderne qui
des nouvelles lunes et des fêtes donne dans l'erreur de Suidas et qui ,

(e) (C). Il avait cité dans l'un de va même plus loin ; car il est visible
par la Vie de Plotin à laquelle il ,
ses livres le commencement de nous renvoie touchant Castricius ,

l'évangile de Jean pour saint , que c'était du vivant de Plotin que


confirmer la doctrine de Platon. Castricius avait à Rome un si grand
ce passage (/) attachement pour Amélius. Or il est
Eusèbe a rapporté
^^ ;
P incontestable que, pendant que ce

4.
mais non pas aussi amplement ^^^.^j^^. ^ .^.\ r^^, jj ^^^^ ^^i^j
que Théodoret {g) et que saint eu de disciples. 11 était disciple de
Cyrille {h). Plotin et ne dressait point autel
,

contre autel.
(e^ Tiré de la Vie de Plotin composée
par Porphyre.
,
(B) Longin le mettait au petit —
nombre des philosophes dont les ou-
(_/) Dans sa Ptseparat. Evangel., lib, XI,
eap. XIX. trages lui semblaient dignes de con-
(g) Graec. Affection. , lib. II p. 5oo. ,
sidération. ] Ce nombre était si petit
(h) In Julian. lib. FUI., qu'ilne comprenait que deux auteurs,
Plotin et Amélius. La gloire de ce der-
(A) Suidas assure que Porphyre nier en était d'autant plus grande :

fut disciple d'Amélius. ] Porphyre dit cependant cela ne fit pas que ses écrits
lui-même que lorsqu'il commença ne déchussent assez tôt de leur pre-
d'être disciple de Plotin, il y avait dix- mière réputation. Eunapius les met
huit ans qu'Améliu3 étudiait sous ce dans la même catégorie que ceux
philosophe (i). Il ajoute qu'il fut le de deux autres condisciples de Por-
condiscipled'Amélius pendant six ans; phyre et prononce cet arrêt contre
,

après quoi ils partirent de Rome


, , tous 'Suyyfâ.f/.f/.a.ri yi o-ùrm TSfis-œ-
:

lui pour aller en Sicile et l'autre , ÇêTai' ?.ô').oç Si mÙTùëv ouSs l'iç (5). Quo-
pour aller à Apamée. Ils demeurèrent rum extanl quidem i^olumina, sed exis-
pour le moins jusqu'à la mort de timatio prnpè nulla est (6). Il en donne
Plotin au lieu où ils s'étaient retirés. pour raison qu'ils étaient destitués des
Or, comme Porphyre avait alors envi- ornemens du langage , et purement
ron trente-huit ans, et qu'il avait eu à dogmatiques.
Rome plus de réputation qu' Amélius, (C) Jl était grand observateur des
il n'y a nulle apparence qu'il soit de-
nouvelles lunes et des fêles. ] Je n'i-
venu son disciple. Joignez à cela
qu'Amélius en lui dédiant son Apo-
, (3) Theodor. Grsecar. Affect. , fag. 5oo.
logie de Plotin le prie d'en excuser (4) Tillemonl, llist. des
Emper., tom. III,
,
pag. 1084, édition de Bruxelles.
et d'en corriger les défauts {•?.). En-
(5) Eunap. in Vitis Sopbislarum , pag. 20-
''i) Porpbyr. in Vilâ Piolini. (6 Je rapporte la version (i'Hadrianns Juiiin^,
(2) Ibidem. où il me semble que propè est supeijlu.
AMÉSIUS. 497
gnore pas qu'au lieu des noui^elles
, Henning Witte l'assure dans son
lune-' il serait plus sûr de tlire ties
, ,
Diarium biographicum. L'épî-
premiers jours du mois , comme a
tre dédicatoire de ses Leçons sur
fait Marsile Ficia ^7) j mais j'ai cru
que mon expression serait plus faci- les psaumes , en i635 témoi- ,"

lement entendue. Voici les termes de gne qu'il était déjà mort. On voit
Porphyre <fiXo8iiTou (Tj yiyovrjro; tou
:
dans cette même épitre qu'après
xa/ Ta. lê^ot xatT-à vo:/jM«v<*v ,
'A//êAi'ot/ , ,

avoir été douze ans professeur à


xa,/ tÀç êopràç iuTTipiiovroç (8). Qu'on
aille dire après cela que les philoso- Franeker il avait obtenu son
phes sont des impies Tavaient
! S'ils congé pour aller être professeur
e'te', ils n'auraient pas tant écrit en fa-
à Rotterdam.
veur du paganisme ils n'auraient:

pas e'té les seules plumes que les chré-


(A) Il écrivit dii'ers ouvrages contre
tiens eurent à combattre ; car poiu-
lesArminiens. ] il avait commencé à
les prêtres sacrificateurs
et les ils ,
disputer de vive voix avec Grevincho-
ne se mêlèrent pas de cela leur igno- :
vius ministre de Rotterdam
rance les en dispensait.
,
et :

n'ayant pu dire tout ce qu'il avait


(7) Per Calendas sacra faceret , dit-il. sur le cœur , parce qu'on les inter-
(s) Porphyr. in Viîâ Plotini. rompit , il continua par Iftires cette
dispute , et publia ce qu'il avait ob-
AMÉSIUS (Guillaume), An- jecté et ce qu'on lui avait répondu. 11
glais de nation fut fait profes- s'agissait de deux choses du rachat :
,
de l'homme par la mort de Jésus-
seur en théologie à Franeker,
Christ , et de l'élection fondée sur la
l'an 1622. Il se mêla beaucoup prévision de la foi. Grevinchovius fit
dans les disputes des Arminiens , une autre édition de leur dispute , à
et il écrivit divers ouvrages con- Rotterdam, l'an i6i5 , in-4°. Amé-
sius répliqua par un écrit intitulé
tre eux (A). C'est un des théolo- Rescriptio scholaslica et brefis , etc.
giens réformés qui ont traité avec Ilfit aussi un livre intitulé Coronis
le plus d'exactitude et de métho- ad Collalionem Hagienseni où il ,

réfuta les réponses que les Arminiens


de les cas de conscience. Il est
avaient faites aux objections des minis-
presque inutile de remarquer tres de Hollande. Son ouvrage, inti-
qu'il écrivit contre Bellarmin (a), tulé Anti-synodalia , contient des re-
car personne n'ignore qu'en ce marques sur les Scripta syn'>daHa des
temps-là les ouvrages de ce jé- Remontrans. Il fut imprimé à Frane-
ker ,l'an 1629 ; à Amsterdam , en
suite étaient la butte de presque
1646 , in-i2 etc. ,

tous les controversistes proies- (B) Il écrivit pour le puritanisme ,


tans. Amésius fit un livre inti- dont il était sectateur rigide. ] Vous
tulé Medulla theologiœ. Il écri- trouverez dans la préface que je
cite (1) quelques extraits de l'ouvrage
vit aussi quelque chose contre les qu'il publia contre les épiscopaux ,

sociniens et contre la métapliysi- l'an 1610 et vous connaîtrez par-là ,


j

que^ et pour lepuritanisme, dont que, selon lui il n'y avait pas d'au-
,

tres gens de bien en Angleterre que


il était sectateur rigide (B). Il pu-
les Puritains. Ceux-ci se faisaient con-
blia ce dernier ouvrage en An- naître par l'aversion pour la comédie,
gleterre, l'an ibio. Je ne dis rien pour les sermens pour la danse, pour
,

de ses Leçons sur les psaumes ,


le jeupour les collations le resie
, :

ni de son Explication des épt- n'étaitque des joueurs des buveurs , ,

des jureurs des enfans de Béiial. Il


,
tres de saint Pierre. Il ne mou-
n'y avait point de milieu entre ces
rut pas l'an lôBg, comme le sieur deux extrémités , ou d'abolir l'épis-
(n) Son livre s'appelle Bellarminus encr- (1) Grevincbovii prœfat. Dissertationis Tbeo-
vatus. loj' dr dviabus QaKstiouibus , etc.

TOME I. 32
, ,

498 AMYOT.
copat ou de faire revenir de l'enfer ce , et Oronce Fine qui ensei-
,
,
l'église romaine Ui scilicet soli inter
:

gnait les mathématiques. Il sor-


yinslos viri boni, simplices,quadrali :

tit de Paris à l'âge de vingt-trois


quos ex scelerifugio sit cognoscere ,

quibus ex repuJio spectaculorum ju- ,


ans *', pour
Bourges avec aller à
ramentorum , chorearum , alearum , le sieur Colin (a)
qui possédait ,
et commessationum inditum sit no- ,
dans cette ville *^ l'abbaye de
rnen puritanorum reliqui verà in- :

signes aleatores , potatoies , religio-


Saint-Ambroise (B). A la recom-
nis officia susque deque habentes , mandation de cet abbé il y eut ,

fersati institores papistaruvi , anibitio- un secrétaire d'état {b) qui prit


nibus prauis corrupli , juratores im-
homines denique inini injusti
Amyot chez lui , pour le faire
pii , ,

turpes, et omnes Jilii Belial Adeà- précepteur de ses enfans *-^. Les
queuel è medio tollenduni ementitum progrès qu'ils firent sous ce pré-
nunc episcoporura ordinera Tel de- ,
cepteur engagèrent leur père à
nuô papam revocandum ab orco (2).
le recommander fortement à la
(2) Grevincliovii prœf. Dissert, de duabas princesse Marguerite , duchesse
*"*' iij-
Qusest. , fol.
de Berry, sœur unique de Fran-
AMESTRIS, femme de Xerxès, çois I*"^. Cette recommandation
roi de Perse. premiè- fut cause qu' Amyot obtint une
Voyez la

re remarque de l'article Ma- chaire de lecteur public en grec


SISTES *. et en latin dans l'université de

• L'article Masistes n'existe pas.


Bourges. Il fit pendant dix ans
deux leçons par jour une leçon ,

AMYOT (Jacques), évêque latine le matin et une leçon ,

d'Auxerre , et grand -aumônier grecque l'après-midi. Ce fut pen-


de France a été l'un des plus dant ce temps-là qu'il traduisit *4
,

illustres savans du XVF. siècle. en français \esy4moiirs deThéa-


Il était ué à Melun , le 3o d'oc- gène et de Chariclée (c). Cette
tobre i5i4 *'• Son père et sa traduction *^ plut si fort à Fran-
mère gens de bien à la vérité , çois \" qu'il ne tarda guère à
,
.
,

mais de fort petite condition (A), pourvoir d'un bénéfice celui qui
employèrent toute leur industrie "' Tl n'en avait quevingt-deux, ditLeclcrc;
pour le faire subsister à Paris et c'était en i535.
a été lecteur de François 7"".
cil il humanités et son
fit ses (a) //
*'
Ce ne fut pas avec Colin remarqtie ,

cours de philosophie au collège Lelerc, mais avec Canaj-e depuis avocat ,

du cardinal le Moine. Il avait célèbre.


Guillaume Bouchetel, sieur deSassy.
l'esprit pesant *" de son naturel (J))
*'
;
Ce fui après avoir pr(fessé publique-
ïnais le travail et l'application ment , Leclerc, qu' Amyot entra chez
dit

remédièrent à ce défaut. Ayant Bouchetel, à dire en i5/J5. La réputa-


c'est ,

tion qu'il se fît dans sa chaire lui mérita


été reçu maître es arts à l'âge de cette place chez un particulier.
*^ Ce ne fut que depuis qu'il fut chez
dix-neuf ans il continua ses étu-
,
Bouchetel qu'il s'occupa , dit Leclerc de ,

des sous les professeurs royaux traductions II avait d'abord traduit en vers
que François F', avait établis. quelques tragédies d'Euripide. Elles n'onl
jamais paru.
Il ouït Jacques Tusan qui ex-
,
(c; On appelle ordinairement ce livre /'His-
pliquait les poètes grecs , Pierre toire Etliiopique d Héliodore.
*' Ce ne fut pas pour cette traduction
Uanès , qui professait l'éloquen- ,

mais pour l'essai de celle des Vies de Plu-


•' En l5i3 , dit Leclerc. tarqiic, qu' Amyot obtint l'abbaye vacante
"* i«c/«rc soutient le contiaire.
par la mort d« yatable.
,, ,

AMY OT. 4y9


l'avaitcomposée. Il lui donna puînés (d). Ce fut environ l'an
l'abbaye de Bellosane que la i558 *'. Voilà donc Amyot pré-
,

mort de François Vatable venait cepteur de deux fils de Henri II.


de faire vaquer (C). Ce prince Pendant cet emploi il acheva la ,

mourut peu après ; et cela fit traduction des Hommes illustres


croire à Amyot qu'il ferait mieux de Pliitarqite et la dédia a ce ,

de chercher de l'avancement en prince après cela , il entre-


{e) :

Italie que d'attendre quelque


,
prit celle des OEuvres morales
,

chose de la cour de France. Il et l'acheva sous le règne deCIiar-


suivit donc à Venise Morvillier les IX, auquel il la dédia. Char-
que Henri II y envoyait en am- les IX lui fit de grands biens- il :

bassade. Morvillier se servit de lui donna l'abbaye de Saint-


lui dans quelque» affaires, et l'en- Corneille de Compiègne *^, et le
voya porter à Trente les lettres fit grand-aumônier de France
et
du roi au concile en i55i (D). , évêque d'Auxerre (E) et parce ;

Lorsqu'on le rappela de son am- que la dignité de grand-aumô-


bassade, Amyot ne voulut point nier et la charge de curateur de
repasser les monts avec lui : il l'université de Paris furent va-
aima mieux aller à Rome , oii il cantes en même temps *^, il les
fut accueilli avec beaucoup d'af- lui donna toutes deux. M. de
fection par l'évêque deMirepoix. Thou se plaint fort de cette
Il logea chez lui environ deux jonction (/). Henri III aurait
ans. Ce fut alors qu'en exami- succombé peut-être aux sollici-
nant avec ardeur les manuscrits tations importunes de l'évêque
du Vatican ou Romulus Ama-, de Saint-Flour, qui l'avait suivi
seiis qui était le garde de cette
, en Pologne et qui demandait ,

fameuse bibliothèque lui don- , instamment la dignité de grand-


nait un libre accès , il apprit amBÔnier mais la duchesse de
;

qu'Héliodore évêque de Trica , Savoie, tante de ce monarque, lui


était l'auteur des Amours de recommanda de si bonne sorte
Théagène. Il trouva un manu- quand il passa par Turin en re-
scrit de cet ouvrage beaucoup venant de Pologne les intérêts ,

plus correct et plus entier que d' Amyot que non-seulement sa


,

celui qu'il avait traduit, et il ne


(d) fis ont régné l'un après l'autre sous
manqua pas de faire tout ce qu'il nom de Char/es IX et de Henri III. ,
le

fallaitpour être en état de don- " En 554 dit Leclerc. 1 ,

ner une meilleure édition. Les (e) Il l'avait commencée du vivant de


auquel il présenta quelques-
occupations savantes ne l'empê- François
I'". ,

unes de ces fies écrites à la main par maître


chèrent pas de songer aux inté- Adam Charles, ecrii'ain de Pans. Roulliârd,
rêts de sa fortune. II fit sa cour ADliquit. de Melua pag. 6o5. ,

'^ En 1567 dit Leclerc. Mais vers i56^, , ,

bien adroitement au cardinal de ce roi lui avait donné l'abhaje de la Roche.


Tournon , et il s'insinua si bien "^ // n'est pas vrai dit Leclerc, que ces ,

dans bonnes grâces , que ce


ses deux places aient vaqué en même temps et ,

/Imyot n'eut jamais celle de curateur de


cardinal le nomxna au roi lors- l'Université. Ce que de Thou appelle Arade-

que ce prince l'ayant rappelé en


,
mia; Parisiensis cura avait ete donné en i55a
au cardinal de Chdtillon t/ui le conser.'U ,

France le pria de lui indiquer


,
jusqu'en I ù6i.
uu bon précepteur pour ses deux [/} Tliuaa. de Vilâ suâ, hh. y, p. laaz.
,

5oo AMY ox.


charge lui fut , mais
conservée Ses traductions ont été son plus
qu'on y ajouta aussi un nouvel bel endroit (K) , quoique les sen-
éclat en sa faveur car quand: timens de tous les critiques ne
Henri III fit Amyot comman- lui soient pas favorables (L) à cet
deur de l'ordre du Saint-Esprit égard , et qu'on ait même voulu
qu'en sa considéra- a été plagiaire (M).
dire qu'il y
(g) , il voulut
tion tous les grands-aumôniers Quelques-uns l'ont accusé d'ava-
de France fussent à l'avenir com- rice(N).L'abbéde Saint-Réal a su
mandeurs nés de cet ordre (F). mille particularités curieuses qui
Amyot , au milieu de ses digni- ne sont point dans la Vie d'A—
tés , n'oublia point ses études : il myot (i). On les peut voir dans
revit exactement toutes ses ver- le Dictionnaire de Moréri : c'est
sions, et les compara au texte ce qui aurait fait que je ne m'en
grec il y fit bien des change-
;
serais pas servi , quand même je

mens : en un mot , il songeait à n'aurais pas douté qu'elles fus-


une édition plus parfaite , oii il sent véritables. Si j'ai quelques
voulait ajouter les diverses le- supplémens ou quelques éclair—
çons des manuscrits ; mais il ne cissemens à joindre à ce que l'on
vécut pas assez pour mettre la vient de lire je les mettrai dans ,

dernière main à ce travail. Les les remar ques

guerres civiles et l'esprit rebelle 6o5 et suif. C'est de son Extrait que j'ai tiré
de ses diocésains lui causèrent cet article. [Cette Vie avait été imprimée ,
mille chagrins (G) : il fut volé en comme le dit Leclerc , dans la Nova BiLlio-
lliecadu pèremaiiuscriptorum Li))rorum
revenant des de Blois , l'an Labbe 165^, in-J'olio pag.b7.l et suif.
états ,
,

i58g. Il mourut le 6 de février (i) Voyez son Traité de l'Usage de l'His-

iSqi * , courant sa soixante- toire. M. Teissier en a pris en le citant ( ) ,

tout ce qui concerne Amyot et l'a mis dans ,

dix-neuvième année (H). II avait ses Additions aux Eloges tirés deM. deïhou,
prêché quelquefois le jour des tom. II, pag. i52.
* Bayle comme tous ceux qui ont
fêtes solennelles. Il employait la
« ,

• parlé d' Amyot, a oublié, dit Jolj- un ,

langue latine en composant ses • ouvrage de ce Prélat: in Caroli noni régis


germons , quoiqu'il les pronon- • christianiss. ininiatururn obituni Kpice-
• dium.... Cette pièce est insérée dans un re-
çât en français. Il avait une cou- » cueil imprimé sous ce titre : Jnvictiss.

tume fort particulière en prê- » Galliarum régis, Caroli noni, piissimi, jus-
• tissimiquepnncipis tumiilus Paris, iHerel,
chant : il tournait du côté du • iSj^i in-l{°. ' Cette pièce, mentionnée
peuple l'ouverture de la chaire , dans la Biblioth. bistor. de la France, (e'ilit.
de Fontette a io8 fers. Nicéron parle d'un
et se tenait assis au milieu sur un
)

volume d'OEafi-es mêle'es {d' Amyot), Lyon,


fauteuil. Il se mêla de poésie, et Frellon i6i i in-8°. M. Barbier ( Examen , ,

n'y réussit pas (I). Voilà ce que critique et Complément des Dict. bistori-
ques pense que ce volume, que personne n'a
J'ai extrait d'une Vie d' Amyot , pu voir ne peut être que les OEuvres mo-
)

commencée par lui-même , et rales et mêlées de Plutarque de la traduc- ,

tion d' Amyot imprimées à Lyon ches , ,

achevée par sou secrétaire (h). Paul Frellon, 1611, 2 vo/. in-è°. qui ont
(g-) A la première institution de cet ordre pu un vol. in-8°. mais dont lo
être reliés en ;

le 3l de décembre iSjS. titre abrégé et dénaturé par quelque li-


,

* // afait, dit Jo/j', soixante et dix-neiif braire, aura induit en erreur le père Niceron.
ans, trois mois et huit jours. On a. il y a quinze ans, imprimé pour la
(h) Elle est en latin, et n'a pas été impri- première/ois un ouvrage d' Amyot, intitule:
mée ; mais Sebastien RouUiard
avocat au, Projet de l'Éloquence royale, composé pour
parlement de Paris qui l'a lue, en a publié
,
Heuri III, roi d^France, Paris, l8o5, in 4».
nn extrait dans les Aatiiuiles de Melua p. ,
,,

AMYOT. Soi
Les choses que M. Varillas rap- » geast de
viande qu'il avoit veu
la

porte touchant Amyot sont plei- » appresterà son père: osté cette ava-
)) rice c'était un grand et savant
,
nes de faussetés (0). Il en faudra » personnage en grec et latin tes- ,

faire la critique cela peut servir : » moin les belles et éloquentes tra-
à débrouiller le chaos. » ductions qu'il a faites de Plutarque,
)' qu'aucuns pourtant ses envieux ont
(A) Son père et sa mère.... étaient » voulu dire qu'il ne les avoit pas
de fort petite condition. ] Quelques- )) faites mais un certain grand per-
,

nns disent que le père d'Amyot était » sonnage et fort savant en grec, qui
vn courrojreur de Melun (i) selon : » se trouva , par bon cas pour lui
d'autres , il fnisoil et vendoil des » prisonnier dans la conciergerie du
bourses et aiguillettes (2) ] enfin, selon » palais de Paris , et en nécessité ;
d'autres , il était boucher. Je trouve » il le sceut-là , le retira et le prit à
trois bons auteurs pour cette dernière » son service et eux deux en ca-
, ,

opinion M. de Thou (3)


, Papyre , » chette , firent ces livres , et puis
Masson /4) et Brantôme. On ne sera
^
» lui les mit en lumière en son nom :

iias fîiché je m'assure


,
de voir ici ,
» mais c'est une pure menterie di- ,

es paroles du dernier un peu au )»soit-on , que les envieux lui ont


long car elles contiennent une autre
^ " preslée , car c'est lui seul qui les a
particularité qui ne doit pas être,
» faits ; et qui l'a connu sondé son ,

ignorée ,
quand même elle serait )'savoir et discouru avec lui dira ,

fausse. Brantôme avant rapporté que ,


i>bien qu'il n'a rien emprunté d'ail-
Charles IX , haranguant le parlement, » leurs que du
Pour fin il nour-sien. ,

dit d'une audace brave et menaçante : » rit très-bien cebrave roi , et surtout
« C'est à vous autres d'obéir à mes » fort catholiquement. m Si j'avais à
i» ordonnances
, sans disputer ni con- mettre en doute les trois basses pro-
» tester quelles; elles sont 5 car je sai fessions qu'on attribue au père de no-
5' mieus que vous ce qui est propre tre Amyot ce ne serait point par
,

" et convenable pour le bien et profit la raison que son fils n'en a désigné
» de mon royaume; » ajoute: «N'ayant aucune dans le manuscrit de sa vie :

'> point encore de barbe au menton ,


il s'est contenté de marquer qu'il
>» il tint ces propos devant ces viens était sorti d'un père et d'une mèro
>) et sages personnages, qui tous s'es- qui avaient plus de vertu que de bien,
5) merveillèrent d'un si brave et grave parentibus fionestis magis quam co-
» langage , qui sentoit plus son gé- piosis (6). Cette raison - là ne me
» néreus courage , que les leçons de frappe point car il y a peu de grands
;

" M. Amiot son précepteur qui l'a- ,


hommes issus de bas lieu , qui ne
i>voit pourtant bien instruit , et qu il soient bien aises de passer légèrement
« aimoit fort et lui avoit donné , sur l'obscurité de leur naissance le :

" de bons et beaux bénéfices , et fait détail les importune sur ce sujet.
» évêque de Lizieux (5j , et l'appeloit Ils vous avoueront en général , tant
5)toujours son maître et se jouant : qu'ilvous plaira qu'ils n'étaient pas ,

>'quelquefois avec lui , reprochoit d'une condition relevée mais n'at- ;

« son avarice , et qu'il ne se nour- tendez pas qu'ils vous donnent des
» rissoit que de langues de bœuf 5 mémoires où vous puissiez lire que
» aussi étoit-il fils d'un boucher de leur père était boucher savetier , ,

î> Melun , et falloit bien qu'il man- vendeur ou d'allumettes ,


d'aiguilles
qu'ils ont demandé l'aumône dans
(i) Saint-Réal , de l'Usage de l'Histoire, p.
leur enfance , etc. Ceux qui avouent
(a) Boulliard , Antiquités de Melun p. ,
6o5. de semblables faits et qui veulent ,

(3) Thuanus , Histor. lib. C, ad ann. iSgi, bien qu'on les place dans leur éloge,
pag. 4o5.
Meloduno oppido sont si rares qu'encore qu'il fût vrai
(4) Laniijilius eral, orlus, ,

vtr excellenli in^enio^ latine grcecè doctis' que et qu'Amyot gueusa quelque temps par
simus. Carolu! Magistrwn eum appellabal, inter les rues de Paris je ne m'étonnerais ,
jocos (ivaritiain objtciens et sordes , qubd lin-
pas qu'il n'eût point chargé de cela
guis bubulis ulerelur. Papyr. Masso, in Hislor.
\itaE Caroli IX.
(5) // se trompe ; il fallait dire Auierre , et {&) Roulliard , Hist. de l'Aniiijuil. de Melnii
«on Lisieax. pas- ^"^-
,

502 AMYOT.
les Mémoires de sa vie. Ainsi je ne gie chez un gentilhomme de ses amis ,
re'fiife point par son silence ce que et que M. de l'Hôpital, qui ne le con-
l'on conte de sa gueuserie , et de sa naissait point, l'ait uniquement re-
condition de laquais , et de son séjour commandé à cause d'une épigramrae
à l'hôpital d'Orléans (7). Il est vrai grecque qui avait été présentée à
que je ne saurais accorder avec ce si- ce monarque (js). Cela ne saurait
lence , l'endroit de son testament , n'être point faux , s'il est vrai , comme
où lègue douze cents ecus à cet hô-
il porte manuscrit de la Vie d'Amyot,
le
pital * , en reconnaissance de la cha- que ce docte personnage avait été
rité qu'il y avait éprouve'e (8). On a plusieurs années professeur à Bourges,
observe que , dans ses OEmies, il avant la mort de François 1*^"". et que ,

ne s'est jamais qualifié du titre de ses ouvrages présentés à ce monar» ,

son pays, et que, pendant son bon- que, avaient valu à leur auteur une
heur il a eujbrt peu d'habitude avec
, fort bonne abbaye. Serait-il possible
sa patrie (9). 11 avait sans doute la que M. de l'Hôpital n'eût pas connu
faiblesse de regarder cette ville comme un Français dont le public avait ,

un rabat-joie , et de s'imaginer que vu en i549 pour le plus tard (i3) ,

ses relations avec Melun ne serviraient une traduction de 1 Histoire Elhiopi-


qu'à faire causer le monde sur la bas- que d'Héliodore ? Qui nous a dit que
sesse de sa naissance. J'ai lu ne'an- le voj'age de Henri II Bourges ait été :\

moins , qu'il avança quelques per- fait avant la première édition des
sonnes de sa famille. // est mort ho- Amours de Théagène ? Ajoutons que
noré de grands estais, et riche de plus la Vie maïuiscrite d'Amyot le fait al-
de deux cent mille escus , sans infinis ler en Italie peu après Ja mort de
autres moyens qu'il aucit d'ai^aucer François F'. Accordez cela si vous ,

ses parens aucuns desquels se sentent


, pouvez avec l'abbé de Saint-Réal
, ,

de ses lihéralilez (10). qui le fait précepteur à Bourges, pen-


(B) // quitta Paris , pour aller à dant le voyage de Henri H à cette-
Bourges , auec le sieur Colin , qui ville.
possédait dans cette uille l'abbaye de (D) Morfillier l'envoya porter a
Saint-^mbroise.^ Bullart, qui a suivi Trente les lettres durai au concile,
presque partout les Antiquités de Me- en i55i.] Il faut nécessairement re-
lun s'en écarte ici pour nous ap-
, , dresser ici l'auteur qui me fournit cet
prendre un fait assez inconnu c'est artidre (i4)» quoiqu'il assure qu'il a
:

qu^Amyoi embrassa la proj'ession reli- puisé dans une Vied'Amyot, commen-


gieuse dans l'abbaye de Saint-Am- cée par lui-même et achevée par son ,

broise de la l'ille de Bourges mais secrétaire. Nous avons une lettre


:

que l'abbé le jugeant digne d'une vie d'Amyot qui contient la relation de ,

plus éclatante que celte du cloistre son voyage de Trente. Il écrivit peu
,

le fil connoistre au sieur de SacyBou- de jours après ce voyage à M. de


chetel (11). C'est dommage que l'on Morvillier maître des requêtes. Or , ,

ne cite personne qui ait laisse' par bien loin de dire que M. de Morvil-
écrit une particularité si peu connue. lier ambassadeur de France à Ve- ,

(C) François I^''. lui donna l'(dj- nise l'eût envoyé porter les lettres ,

baye de Bellosane , que la mort de du roi au concile qu'il déclare ex- ,

François J^atable t^enait défaire t>a- pressément qu'il fut choisi pour cette
quer. ~\ Ceci est entièrement incom- affaire par le cardinal de Tournon,
patible avec le narré de M. de Saint- et par l'ambassadeur de Selve. C'est
Réal. Cet auteur veut que sous le ré- une preuve convaincante que Mor-
,

gne de Henri II Amyot ait été encore villier n'était pas alors ambassadeur
,

dans l'obscurité d'une petite pédago- à Venise et cela paraît encore plus :

évidemment par la lettre d'Amyot f


{7) Saint-Béal, de l'Usage de l'Histoire, p. '6.
* " Je doute de ce legs
, dit Leclerc , Uns
» pourtant le nier expresse'menl. » (12) Saint-Réal, de l'Usage de l'Histoire , p.
(8) Là même, pag. ^S. 80.
(Ç)) Roulliard , Antiquil. de Melun , p. 6o5. (i3) Je parle ainsi ,
parce que du VerJier
(lo) C'est la Popelinière qui dit ctla , p. aSg
,
Vau-Prîvas marque une édition de x549' Or cela
de /'Idée de l'Histoire. ne prouve point qu'il n'y en ail point eu d'anté-
(il) Bullart , Académie des Scienc. , tom. I, rieure •

(i4) Sébastien Roulliard, Anticjuit. de Ulelua.


,

AMYOT. 5o3
car elle est adresse'e à M. de Morvil- fait avéré. Or on fait tomber par-là
lier en cour. Remarquez bien ces pa- plus de la moitié de l'iiistoire que l'ab-
roles d'Arnyot : Ha
pieu a M. le car- bé de Saint-Réal raconte touchant la
dinal de T'jurnon et a M. l'ambas- fortune de ceprélat. Ildit qu'Amyot,
,

sadeur de Sel^e, de m
élire pour faire sous le règne de ses disciples François
cesle commission , sans que je pen- II et Charles IX, n'avait que l'abbaye
sasse à rien moins qu'a cela njr à de Bellosane , avec la gloire d'avoir
,

chose semblable.... (l5). Il faut noter prononcé dei^ant tout le concile l3i judi-
que non'- seulement je n estais point cieuse et hardie Protestation de Henri
nommé en celle lettre (i6) ni près ni II et que sa fortune était apparem- ,

loin ; mais qui pis est, on n'en afoit ment pour en demeurer là , sans une
pas seulement envoyé la coppie par rencontre fortuite qui le porta plus , ,

laquelle nous peussions scafoir ce qu'il haut qu'il n'aidait jamais espéré et ,

y ai'oit dedans. De sorte que je ne qui marque admirablement l'esprit de


reis jamais chose si mal cousue que Licour. Ce cas fortuit fut qu'un jour, ,

cela (17). Ce ne fut donc point le roi à la table de ce prince on loua ,

qui l'envoya faire ses protestations Charles-Quiut de plusieurs choses ,


contre le concile ce fut le cardinal mais surtout d'afoir Jait son précep~

:

de Touruon , et l'ambassadeur de leur pape Cela fit impression sur


France à Venise , qui le choisirent l'esprit de Charles IX, jusque -l'a
pour porter la lettre au roi et pour même qu'il dit que, si l'occasion s'en
,

lire mot à mot, devant rassemblée, la présentait , il en ferait bien autant


protestation de sa Majesté. Il s'acquitta pour le sien. Et défait peu de temps ,

tout-à-fait bien de la commission. après, la grande-aumôiterie de France


Voici où j'en veux venir. M. l'abbé ayant vaqué, le roi la donna à
de Saint-Pvéal pose en fait qu'Amyot Amyot. Tout cela tomba par-terre,
était précepteur des enfans de France, dès qu'on consulte les registres de
avant la négociation qui vient d'être cette grande - aumônerie , où l'on
rapportée ^ et il suppose qu'Henri II trouve la charge de grand-aumônier
l'employa à cette affaire parce qu'il conférée à Amjot le second jour du
,

avait reconnu la vérité du bon témoi- règne de Charles IX. D'ailleurs Fran- ,

gnage que M. de l'Hôpital avait rendu, çois II ne fut pas disciple d'Amyot
quand il avait dit au roi qu'Amyot mais de Pierre Danès, Poursuivons :
mt^rilait d'être précepteur des enfans M. deSaint-Kéal suppose que la reine-
de France. Tout cela est réfuté invin- mère ayant su bientôt ce que Char- ,

ciblement par la lettre d'Amyot à les IX avait fait pour son précepteur,
Morvillier. Corrigez sans crainte ce fit appeler celui-ci dans son cabinet,
mensonge dans du Saussai Cœterùm, où, elle le reçut d'abord avec ces ef-
.•

Amiotus adhuc abbas ad conciliumTri- froyables paroles: «J'ay fait bouquer


ilentinuni ab Henrico II missus fuit , » les Guises et les Chatillons les Con- ,

ncgotiorum mai^ni momenti causa [18). » nétables et les Chanceliers , les


Henri II n'eut aucune part à cela. » Rois de Navarre et les Princes de
(E) Charles IX
le fit grand-aumô- Condé ; et je vous ay en tète , petit
))

nier de France , etéi^éque d'Auxerre. ] » prestolé. » Amyot eut beau protes-


La première de ces deux dignités fut ter de ses refus, la conclusion fut que,
conférée à Amyot le 6 de décembre s'il avait la charge il ne vivrait pas ,

i56o, par Charles IX , à Orléans. Du vingt-quatre heures. L'abbé dit ensuite,


Peyrat qui avait lu les registres des qu'Amyot s'alla cacher, et que Charles
,

grands-aumoniers de France , rap- IX s'avisant aussitôt de ce que ce pou-


porte cette date comme extraite du vait être.... entra dans une telle fu-
registre d'Amyot (19). C'est donc un reur...., que la reine, qui avait assez
de peine h le gouverner , et qui le
(i5) InstracUons et Missives des rois très-
clirestiens, et antres Pièces
craignait autant qu'elle l'aimait n'eut ,
concernant le Concile
de Trente pag. \!^ e'dil. de 1608.
, ,
rien de plus pressé que défaire trou-
(16) Cesl celle que le roi e'crivail aux pires ver Amyot. C'estsupposer que Charles
de Trente.
IX était roi depuis long-temps , lors-
(17) Instructions , Missives, etc. ,
pag. 23.
(18) Andr. Saossaias, de Scriplor. Ecclesiast., siastiqaede la Cour ou les Antiquités et Re-
,

num. 02. cherches de la chapelle et oratoire du loi tl£


(19) GuiUaiimc Du Pejrat, Histoire Ecclé- Trance , pag. 102
,, ,,

5o4 AMYOÏ.
qu'il donna
cette charge à son précep- élèves l'avaient comblé , et d'avoir eu
teur^ mais rien n'est plus faux il la : trop de complaisance pour la fureur
lui donna le lendemain de son ave'- séditieuse et ligueuse de ceux d'Auxer-
neraent à la couronne avant que , re. L'amour de l'étude et la vieil-
Catuerine de Me'dicis eût goûte de la lesse luiavaient fait prendre le parti
re'gence , et qu'elle eût fait bmiquer de résidence , et il n'eut pas la force
la
bien des gens. Tout le monde sait que de résister au torrent de la rébellion
sou pouvoir fut assez petit sous Fran- (24)- Sébastien Roulliard n'en parle
çois 11. Je ne laisse pas de dire que pas de la sorte il insinue qu'on le :

les reflexions de M. de Saint-Keal sur maltraita, à cause de sa fidélité. Les


ces faits considérées en elles-mêmes
, afflictions dit- i\ (25j l'accueillirent , ,

sont belles et bonnes. Quant à Tévê- à la sortie des estais de Bloisl'an 1 689,
ché d'Auxerre il fut donné à Amyot, pource que par la fureur des troubles
, ,

non Tan i568, comme l'assure Du qui pour lors s' echaiiff èrent il fut ,

Peyrat (20), mais l'an iSyo (21; tout volé et destrousse a my-cheviin re-
après la mort du cardinal Philibert tournant a yluxerre, et qu'estant arrivé
Babou qui le possédait. lui fut baillé beaucoup de peine
(F; Henri
,

m l'a

\jouIuI qu'en saconsi- par les habitans voire par son clergé
Jératinn tous les aumôniers de France pour les causes du temps Enfin pe-
,

fussent a l'avenir commandeurs nés de tit a petit les affaires s'apaisèrent :


L'ordre du Hainl-Esprit, ] Voici ce que tellement qu'il ne bougea d'icelui
je trouve sur cela dans un autre au- lieu, se plaignant toutesj ois journelle-
teur //e«r( ///
: en l'année i5j8, ment de ce que la privation de ses
,

instituant iordie du Saint-Esprit, or- biens et commoditez du passé lui ostoit


donna (^) en Joueur d'Amiot que son le plaisir de l'eslude. Sainte - Marthe
,

grand aumosnier serait associé au avoue bien les mauvais bruits qui
mesme ordre en titre de commandeur avaient couru mais il ne les croit pas ,

et ses successeurs audit estât lesquels véritables (26J. :

toutes Jois (dit-il) ne seront tenus J aire (H) Il mourut en iSgS, courant sa
preuve de noblesse ce qu'il adjousta soixante-dix -neuvième année. ^ M. de
,

pour gratifier ledit Amiot lequel Thou s'était adressé à des gens bien
,

n'estoit pas de noble extraction mais mal instruits sur le chapitre d'Amyot ,

qui entroit au temple de l'honneur par puisqu'ils ne surent lui apprendre, ni


celui de la vertu (aa). Voyez dans du quand il mourut ni à quel âge. Il ,

Saussai (aSj la réponse de Henri 111 dit en général cju'Arayot dont il , ,

aux courtisans qui murmurèrent de met la mort au mois de juillet iSgi ,


la promotion d'un homme de si basse avait passé soixante ans. Sainte-Marthe
naissance. Le même auteur assure la met à l'an i Sgï Triennio post Henri' :

qu'Amyot dressa les statuts et les li- cum tertium detestabili parricidarum
tanies , ou plutôt l'oflice de l'Ordre coitione sublatum è vii'is excessitip.']]. :

Hujus statula et horarias preces scitè (Ij 11 se mêla de poésie, et n'y réus-
et scienter composuit. sit pas.'} Sébastien Roulliard, son
(G) L' esprit rebelle de ses diocésains compatriote, l'épargnerait sans doute
lui causa mille chagrins. ] M. de sur ce sujet, si cela était possible.
Thou fait une remarque bien flétris- Voici ce qu'il en dit Quant au poème :

sante pour la mémoire de notre latin qu'il fit sur le sacre du roi
''

Amyot; car il l'accuse d'avoir oublié Charles IX on reconnoist par icelui ,

les bienfaits dont les deux princes ses qu'il s' estait fort addonnéh la lecture
il' Horace mais auroit esté peu adroit ;
(20) Hist. Ecoles, de la Coar, etc. p. 48 1.
(21) On s''est donc trompé dans la table de la
en son génie poétique (28). La version
,

Version de Fra-Paolo où Von a dit çu'Arayot des vers grecs en vers français, à la-
,

alla ambassadeur à Rome sous le nom d'évêque quelle Amyot se voulut assujettir dans
,

•l'Auxerre en i5G2. 1,'éveque d^Auxerre dont ^


,

Fra-Paolo par/»", n'était point Jacques Amyot. son Plutarque est affreuse. Charles ,

(*) L'ordonnance est rapportée au li^reXy'III IX la trouvait grossière , en quoi


du Code Henri, lit. Xf du , Saint-Esprit.
(22) Guill. Du Peyrat, Hist. de la Cour, etc., (24) Thuanus, de Vitâ siiâ , Itb. V, p. 1222.
pag. 385. (2.'5) Roulliard, Aniiquit. de Melun , p. 6o5.
(2^) De Scriptor. Ecclesiast. ,
num. 52. (26) Sammarth. in tlogiis, pag. 96.
* Leclerc trouve la remarque de de Thou (27) Ibidem.
/aniJoiulemeiU. (28) Roulliard , Antiquit. de Melun, p. Ci4,-
,, ,,

AMYOT. 5o5
son opinion ha esté suivie de beau- du magasin d'un libraire. On s'en
coup d'aulires (29). Roulliard apporte consolera aisément, dit-il pendant ,

une excuse pitoyable Oesl un ramas, : qu'on aura la traduction d'Amyot.


dit-il de d^ers autheurs, et de style
, On Y troui'e les plus beaux tours de
différent. Ajoutons son jugement sur notre langue, et la plus heureuse éco-
la prose d'Àmyot. Tant y ha dit-il ,
nomie de nos périodes. M. Baillet n'a
(jue, selon mon advis il estoit plus , pas recueilli avec moins de soin les ju-
heureux en la traduction qu'en sa feraens désavantageux il n'a pas ou- :

composition, soit française ou latine ; lié que M. de Thou loue beaucoup


car ce que j'en ay veu me semble plus l'élégance que la tidélité de ce
estrangement pesant et traisnassier. traducteur Diodnro ac prœcipuè
:

(Kj Ses traductions ont été son plus Plutarcho licet majore plerumquè ele-
bel endroit.^ La première de toutes a gantid quamfide gallicè redditis (34).
c'te' celle des amours de Théagène et de il a oublié un autre passage de M. de

Chariclée ; mais celle de PlularqueWi Thou que .M. de Girac rapporte.


,

a procure sa principale réputation II M. de Girac sera le seul dont j'allé-


a traduit aussi les Pastorales de Lon- guerai les paroles, comme une espèce
gus{3o), plusieurs Lii>res de Diodore de supplément au beau recueil de
de Sicile *, et quelques Tragédies grec- M. P>ailîet. « Pour ce qui est d'Epiti-
ques. La duchesse de Savoie ne trou- , » mius, » dit-il (35) « qui est tué ,

vant point dans Plutarque la Vie d'E- » dans Amyot, au lieu que dans le
paminondas ni celle de Scipion le, , '>texte grec ce n'est que son cheval,
pria de les composer. Il le fit mais j
» j'aime mieux croire que ce fameux
elles n'ont pas été publiées. La pre'- J> s'est servi d'exemplaires
interprète
face était déjà toute prêle Pierre : w différens de ceux que nous avons
Mathieu l'a vue '3ij;ilfautdonccroire » que de dire avec .M. de Thou que
, ,

qu'Amyot avait mis la dernière main » ses versions sont bien plus polies
à cet ouvrage. Il n'osa dit-on (Sa) , )) quefidèies, et qu'il ne recherchait
entreprendre la traduction de Phi- )) pas tant la vérité qu'il affectait de ,

lostrate, quoique le Roi Henri III la » plaire aux oreilles délicates (*'). Je
lui eiit souvent demandée il s'en ex- : » sais qu'un savant et sage juriscon-
cusa sur l'impossibilité et quand ce ; » suite (*^) l'accuse de n'avoir pas sea
prince, ayant vu la version de Vigé- M comprendre une belle antiquité
nère dit à Amyot Hé bien , i^ous di-
, : » touchant une loi de Solon ; car au
siez que Philostrate estoit hors de )> lieu d'écrire que ce législateur s'é-
traduction? Amyot lui répondit qu'il » toit vanté quelque part dans ses
l'avait cru jusqu'à celte heure. » poésies qu'il avoil délivré les Athé-
(L) Tous les critiques ne lui sont » niens de toutes les dettes qu'ils
pas favorables. ] M. Bailleta Irès-heu- » avoient contractées, et osté les
reusement recueilli les éloges que l'on » brandons ou pannonceaux qui étaient
a donnés au Plutarque d'Amyot (33). » posez en beaucoup de lieux sur les
Ils sont beaux et glorieux. J'y ajoute » terres hypothéqiuies , il avoil tra-
ce que j'entendis dire à M. Conrart, ') duit d'avoir asté les bornes qui
,

en l'année 1675, lorsque quelqu'un » paravant faisaient les séparations


lui eut appris que presque tous les » des héritages de tout le territoire
exemplaires du Plutarque de M. l'abbé » attique. Je pourrois ajouter plu-
Tallemant avaient péri dans l'incendie » sieurs remarques sur quantité d'en-

(2Ç)) JLh même. (34) Thnan. Hist. , lib. C, pag. 4o5.


(3o) Cest ainsi qu'il fallait traduire /? Longi L[
(35) Girac, Réplique à Costar, section
Pœmenica de M. de Tboo et non pas, comme ,
pag. 438 e'dition de Hollande.
,
du Kyer par les Pœmeoiqucs de Longus.
,

* Ce sont, du Leclerc, let libres XI à XVII,


{")Aniiotus hic Pœmenica Longi, Heliodori
.^ihiopica Diodori Siculi Hislorica , ac pos-
,
imprimés en j554 in-folio, a Pans chez, Vas-
, ,
tremb Plutarchum m linguatn nustram gallt~
cosan.
cani de Grœcis verleral sed hune majore ele—
,
\i\) Bollart le rapporte dans son Académie
gantid quàm fide, dum auribus nosiris ptacere,
de» Scienc. pag. i6S. ,
quîjm de sensus veritate laborare. poilus exisii-
(32) Du Verdier Vau-Privas , Prosopogr. , mat. Tbaan. de Vitâ suà lib. V.
, ,
loin. III , pag. iâ'/i.
C^J L'Oiseau, de l'Action hypoiliéq., liv. lll.
(33)Baillel, Jogem. des Savans tom. IV, , ,

pag. Sîi. Vojez aussi Pope Blouat Ceosur. ,

celebr. Àutor. pag, 52i.


,
,

5o6 AMYOT.
» droits où le bon Amyot a pris le à son précepteur. Un autre livre m'ap-
,

» change mais je ne s;,U''ois apj»rou- prend qu'un jour qu'Arayot deman-


j

j) ver M. de Meziriac lequel (*) dait un bénéfice de grand revenu ce


,
,

)) dans un discours qu'il a fait de la prince lui dit lih quoi mon maistre , : ,

» traduction après avoir loué l'es- t>ous disiez que si vous aviez mille
,

i> prit le travail


, et le style de cet écus de rente
, vous seriez entent je , :

» éloquent traducteur en sa l'ersion de crois que vous les avez et plus. Sire ,
)) Plutarc/ue, prétend montrer qu'en repondit-il, l'appétit vient en mangeant;
i> dii^ers passages qu'il a remarquez , et loutejois obtint ce qu'il désiroit {^o).
3'jusques au nombre de deux mille, On prendra veut pour une
si l'on
» il a fait des fautes très-grnsiières. » preuve équivoque de son avarice les
(M) On veut qu'il ait été plagiaire.'] deux cent raille écus de bien qu'il
On a vu (36) ce que dit Brantôme sur amassa (4<)>
ce sujet. Voyons maintenant ce que (()) Les choses que M. de f^arillas
d'autres en ont dit. J'ai ouï dire rapporte touchant Amyot sont pleines
c'est M. Colomiés qui parle (87) h , de faussetés. ] 11 dit que la cour de
M. Patin quil avait appris du bon
,
François V^. s'étant arrêtée durant
homme Laurens Bochel (qui ajail quelques heures dans le chdleau d'un
imprimer les Décrets de l'Eglise Gal- gentilhomme de Berry Amyot, qui ,

licane , etc. ) ,
qu Amyot avoil traduit était précepteur chez ce gentilhomme,
les f^ies de P lutarque sur une vieille en prit occasion de présenter a sa ma-
t'ersion italienne de la bibliothèque jesté une épigramme de quatre vers
du roi , cause des fau-
et qu'elle était grecs qu'il venait de composer. Les
,

tes qu'il avait faites. Je ne sai si celte savons ,qui suivaient samajesté, trou-
t-'ersion n'est point celle que fit sur le vèrent l'epigramme si belle, que l'on
latin l'an \^%i Baptiste Alexandre
, , ne jugea pas à propos de laisser plus
Jaconel de Itielé qui est dans la ,
long-temps son auteur dans une pro-
même bibliothtquc * La Popelinicre . vince trop éloignée de Paris. Le roi
accuse Amyot de n'avoir pas rendu à l'attacha à son service par une pen-
Turnebe l'honneur qui lui était dû, sion considérable (42) Tout ceci est
puisqu'il n'a point publié les secours plein de transpositions de circon-
qu'il avait tirés de lui pour l'intelli- stances; car nous avons vu (43) que
gence des passages difficiles (38;. Il pré- l'on attribue à Michel de l'Hôpital le
tend que Turnebe lui envoyai! les bon eflét que produisirent quelques
passages tout entiers tournez en Fran- vers grecs d'Amyot présentés à Hen-
çois sur lesquels Amyot était en peine, ri II. M. Varillas raconte dans un autre
et que plusieurs autres gens doctes livre (44)? qu'Amyot , professeur en
l'aidèrent de leurs bons avis (Sg). grec à Bourges , se fit connaître à la
(N) Quelques-uns l'ont accuse d'a- cour par sa politesse a écrire en fran-
varice. ] J'ai cité dans la remarque (A) çais et qu'alors Bouchetel et Morvil-
,

un long passage de Brantôme où , lier, secrétaire d'état le rappelèrent à


,

Charles IX fait la guerre de ce défaut Paris; et après l'avoir ramenée la


communion de l'église catholique le ,
(*1 M. Pélibson, dans THistoire d« l'Acadé-
mie, pag. lii.
recommandé/ ent au cardinal de Tour-
(36) Ci-dessus , "Remarque (A). non , qui lui fit donner l'abbaye de
(37) Colomiés, Opuscules , pag. 124, f'dit- Bellosane, et la commission de secré-
d'ihrechl.
taire d'ambassadeur à f^enise d'où ,
* Vi->ici comment , dans Ve'dition de la Bi-
bliolhéque choisie de Colomiés, i^Si , La Mon- il partit pour aller a Trente exécuter
naie parle de cette circonstance : « // est vrai^ les ordres du roi, l'an i55i. Voilà
» dii-il, (jue cette traduction italienne a e'te' re'im-
» primée plusieurs fois in-l\° et in-&° ; mais
comment cet historien réfute dans un
» comme elle n^a élp faite que sur de tres-inau- ouvrage ce qu'il avait dit dans un au-
• vaises versions latines que ce traducteur a tre. Il ajoute qu'Amyot fit un discours
» rendues encore pires , il ne faut pas s'ima-
• gner qu Amyot , qui , nonobstant les fautes (4o) ProsopograpKiede Du Verdier, tom. III ,
» quon lui reproche ne laissait pas d''être un
, pag. ^S-'i.
• fort habile homme fut capable de s^attacher,
(4i) la remarque (A) , a lafin
Voyez
A', pag.
»* à une si misérable copie. >»
(42) Varillas , Hist. de l'Hérésie, liv-
(|8) La Popelin., Idée de l'Histoire accom- 3io , édition de Hollande.
plie liv. III
,
pag. i5c). ,
(43) Dans la remarque (C).
(39) La Popelinière , Hisloire des Histoires , (44) Varillas, Hisloire de
Henri II , liv. II,
pag. iSg. pag. 204.
,

A M Y R AUX 5oj
devant les pères du concile ilen donne :
(5o) :, par conséquent, ce ne fut
et
le pre'cis cl il cite la Harangue d'A-
, point lui qui le fît connaître à cet
myot. Mais cette harangue est une chi- abbé. On trouve dans les mêmes Mé-
mère Amyot ne fit que lire la protes-
: moires, qu'Amyot remplit la charge
tation du roi. Quelle hardiesse n'est- de professeur l'espace de dix ans et ,

ce pas de citer des manuscrits qui que soiii'enles fois on lui ha ouï dire
n existèrent jamais ? M. Varillas as- entre ses amis qu'il a^'oit un honneste
,

sure qu'Amyot , âge' de dix ans , fut appoinclement que jamais en sa i'ie
;

trouvé malade , sur le chemin de Pa- n'eut meilleur temps que celui - là ,
ris , au bord d'un fosse , et qu'«« gen- et ai'oit pris un fort grand plaisir à
tilliomme passant.... le mit sur son , faire cet exercice à cause qu'il jouis-
cheval, et le conduisit en le soute- , soitd'un extrême repns {5i).l\nes'en-
nant , dans une maison proche , où il nuya donc pas Ijientôt d'enseigner pu-
guérit , et reçut charitablement pour bliquement. M. Varillas observe que
passer chemin seize sous , qu'il rendit Bouchetel et Morvillier lui représen-
depuis avec usure en laissant aux hé- tèrent l'obstacle que son hérésie ap-
ritiers de son bienfaiteur seize cents porlnit h son salut et à sa fortune et ,

écus de rente (45). La Vie d'A myot qu il profita de leur aduis. Bouchetel
orte qu'il légua douze cents écus à le connaissait donc pour calviniste
;
F'hôpital d'Orléans (46). C'était là mais en ce cas-là, aurait-il voulu le
qu'il avait été mené par le gentil- faire précepteur de ses enfans, comme
homme c'était là qu'il avait été gué- il avait fait (Sî) ?
:

ri , et qu il reçut seize sous ; ce fut à


rr-marqué que ce fut en i535 qu'Àinjol alla à
cet hôpital c^yCilflt depuis un legs de Bourges.
douze cents écus , selon le narré de (5o)Melcb. AdaminVilisPhilosoplior., p. 233.
M. de Saint-Réal. (47)- D'où vient que (5i) Roulliard, Antiquités de Meluo p. 60^. ,

M. Varillas altère ces circonstances , (52) Là même.

et amplifie la gratitude ? Pourquoi par


ses hyperboles convertit-il un simple
A:\n'RAUT ( Moïse ) ministre
legs de trois mille six cents francs en et professeur en théologie à Sau—
une rente annuelle de six mille deux , a été un des plus illustresmur
cents livres (48) ? 11 assure qu'Amyot, théologiens *
qu'on ait vus en
« en étudiant , changea de religion, et
}> servit d'instrument pour séduire ses
France dans le XVI P. siècle. Il
» compagnons, jusqu'à ce qu'étant dé était d'une bonne et ancienne
)> couvert il se réfugia à Bourges, où famille, originaire d'Orléans (A),
V le même Volmar, qui avait instruit
et il naquit à Bourgueil , petite
3> Calvin et Beze 1 introduisit chez
, «n j t
de Tourame, au mois de ville
i •

jM'abbédeSaint-Ambroise,enqua-
3) lité de précepteur de ses neveux, septembre 1596. Ayant fait son
» et le choisit depuis pour son suc- cours de philosophie il fut ,

« cesseur à montrer le grec. Amyot


envoyé à Poitiers pour y étudier ,
3) S ennuia bientôt d enseigner pubu- j' •. -i i- » •

3) quement. » On ne peut arcorder en droit il s'appliqua à cette :

rien de tout cela avec les Mémoires science , avec tant d'assiduité ,

de la Vie d'Amyot publiés par Sébas- qu'il y employait 14 heures cha-


tien Roulliard. On y trouve qu'il avait
que jour. Il prit ses licences au
environ vingt-trois ans lorsqu'il s'en
alla à Bourges , avec l'abbé de Saint- bout d'un an (a) mais il en de- ;

Ambroise qui lui avait persuadé ce


,
meura là. M. Bouchereau, son
voyage (49) 11 y alla donc l'an i537*.

compatriote , et ministre de Sau-
Or Volmar sortit de Bourges l'an i535 mur, lui conseilla d'étudier en
(45) VariUas, Hisl. de Henri II /iV, II, p.
3o3.
,
théologie : la lecture de l'Insti-
C46) f^oyet la remarque (\). * Leclerc trouve cet article trop Jlattettr ;
(47I Saint-Réal, de l'Usage de l'Histolre^p. '5.
il reproche à Baj-le la source oit il a puisé
(48) Varillas, Hist. de Henri II , lu'. II , p.
204. et dont dit-il, il devait se défier. Vojez la
,

(49) Roulliard , Antiquités de Melun,^. G07. note (j)) sur le texte.


' Leclerc, dans une note .<w le texte, a de'jk {à) En 1616.
5o8 AMYR ALT.
tution de Calvin lui donna un produit une concorde pleine d'é-
grand goût pour ce conseil. Ainsi dification et de bonheur, et d'au-
ayant témoigné à son père , qui tant plus digne de louange ,
avait ses vues en le destinant au qu'elle est une rareté fort dijffi-
barreau (B) , qu'il souhaitait pas- cile à trouver en jîays académi-
sionnément d'être ministre , il que. M. Amyraut fut député au
obtint , quoique avec peine , le synode national de Charenton ,
consentement qu'il demandait. l'an 163 1. Cette compagnie le
Il alla étudier à Saumur , sous députa pour aller haranguer le
Cameron qui Taima et qui l'es-
,
roi , et pour présenter à sa ma-
tima d'une façon particulière , et jesté le cahier des plaintes con-
il fut assez long-temps proposant. cernant les infractions des édits.
Lorsqu'il fut reçu ministre on le , On le chargea en particulier de
donna à l'église de Saint-Aignan, faire en sorte qu'il ne parlât point
au pays du Maine , oii ayant de- à genoux (C) comme avaient
,

meuré dix-huit mois, il fut appelé fait les députés du dernier synode
à Saumur pour y succéder à M.
,
national; et il ménagea cette af-
Daillé qui sortait de ce poste ,
,
faire avec tant d'adresse et de
afin d'aller être ministre de Cha- fermeté , qu'il fut enfin admis à
renton {b). En même temps que l'audience selon l'ancien usage ,
de Saïunur le souhaita
l'église et selon le désir de la compa-
pour ministre, le conseil acadé- gnie (c). Cette députation le fit
mique jeta les yeux sur lui pour connaître au cardinal de Riche-
la profession en théologie. C'est lieu , qui s'étonna de lui trouver
pour cela que l'église de Rouen , tant de qualités qui ne sentaient
et celle de Tours, qui le deman- point son homme d'étude. Quel-
dèrent en même temjjs au synode, que temps après il publia un écrit,
ne l'obtinrent pas car les syno- ; oii il expliqua le mystère de la
des nationaux avaient réglé que prédestination et de la grâce, selou
les intérêts des académies seraient les hypothèses de Cameron (D).
préférés à ceux des églises. Sa Cet écrit excita une espèce de
réception au professorat en i633, guerre civile parmi les théolo-
l'examen qui la précéda, et la giens protestans de France (E).
thèse inaugurale de Sacerdolio Ceux qui n'étaient point dans ces
Chris ti , lui attirèrent beaucoup hypothèses crièrent à la nou-
d'applaudissemens. On reçut avec veauté , et surtout lorsqu'ils vi-
lui deux autres excellens profes- rent le grand du Moulin en cam-
seurs Louis Cappel et Josué de
, , pagne , qui ne cessait d'accuser
la Place si bien que l'on donna
: M. Amyraut de contravention
tout à la fois à l'académie de Sau- au synode de Dordrecht et de ,

mur les trois personnes qui étaient favoriser l'arminianisrae. L'auto-


les plus capables de la rendre rité de ce célèbre théologien qui ,

florissante; puisque outre leur , s'était acquis dans son parti la


grand savoir, il y avait entre eux vénération des peuples par quan-
ime sympathie merveilleuse qui a tité de livres de controverse, fi*

[b) La Vie de M. Daillé tious apprend (c) La Harangue qu'ilfit au roi esUnsèrée

qu'il fut appelé à Paris L'an 1626. d'ins lu M<.TCure frauçaii de l'an. l63l.
AMYRAUT. 509
une telle impression surplusieurs livres (g). Pendant
synode na- le
iDinistres,qu'encorequeM. Aray- tionalde l'année i645,M. Aniy-
raut eût publié un écrit (<f), oii il raut fut prié par la compa-
soutenait que Calvin avait ensei- gaie d'entrer en conférence avec
gné la grâce universelle , on vit M. de la Milletière afiu de tâ- ,

au synode national d'Alençon (e) cher de le ramener. La confé-


un bon nombre de députés char- rence dura plusieurs jours mais ;

gés d'instructions contreM. Amy- ils ne s'accordèrent pas mieux

raut ; et il y en eut de si ardens , en disputant de vive voix que ,

qu'ils ne parlaient que de dépo- dans les livres qu'ils avaient déjà
ser (F). Les députés des provinces publiés l'un contre l'autre. La
de delà la Loire furent ceux qui doctrine de M. de la Place sur le
témoignèrent le plus de chaleur, péché originel fut attaquée dans
INéanmoins la compagnie ayant ce synode. M. Amy raut , en
,

oui en plusieurs séances M. Amy- ayant été averti , se présenta à


raut qui exposa son sentiment la compagnie, pour plaider la,

et qui satisfit aux difficultés qui cause de son collègue et montra ,

lui étaient proposées , le renvoya par un long discours , que le sen-


avec honneur à l'exercice de sa timent dont on se plaignait n'a—
charge , et imposa sur ces ques- vait rien de dangereux. Cette ac-
tions un silence qui ne fut pas lion ne fut pas seulement louée ,
trop bien gardé. On {f) porta à cause de l'habileté avec laquelle
plainte au synode national de la doctrine de M. de la Place fut
Charenton en i645 , contre M. soutenue mais aussi à cause que
, ; ,

Amyraut comme ayant contre- M. Amyraut n'avait en vue que


,

venu aux reglemens qui concer- l'intérêt de son collègue : car son
naient ce silence et il se plai- sentiment là-dessus n'était point
;

gnit à son tour de quelques con- celui de M. de la Place. Si j'ajoute


traventions faites contre les me- que M. Cajipel ne suivait pas la
mes reglemens. La compagnie route ordinaire des protestaus sur
ensevelit ^«rM«e sainte amnistie l'antiquitédes points de l'Ecriture
toutes ces plaintes réciproques , hébraïque , j'aurai dit tous les
renouvela les reglemens du si- chefs de plainte que l'on faisait
lence, renvoya M. Amyraut avec contre l'académie de Saumur ;

honneur à l'exercice de sa charge, mais ces plaintes n'empêchaient


et lui permit de faire contre les pas que l'on n'y vît un grand con-
étrangers qui l'attaqueraient ce cours de proposans qui diminua ,

que le synode d'Anjou trouve- à vue d'oeil après la mort de ces il-
rait bon. Ce synode lui permit lustres professeurs (h). M. Amy-
de publier une réponse aux trois rautsurvécutà ses deux collègues,
volumes de M. Spanheim sur la etaeule temps de publier un très-
grâce universelle (G); ce qui fut grand nombre de livres (H). Il
la source de quantité d'autres avait autant de facilité pour la
plume
»
que pour la langue
o et c'est :

(f/) //î<i7«/e, Echaotillon de la Doctrine Je * *


Calvin. T même, pag.
> /
/
(g)
\
La • /
1^0,1^1.
^ ' ' (A '
auteurs de ce qu'on appell*
Ils sont les
{J") Blondel , Actes aullteatiq. ,
pa^. 36. TUeses Salmurieuses , ouvrage très-eslimé.
fiio AMYRAUT.
beaucoup dire; car il avait un dinal Mazaria fut si ballottée et, ;

flux de bouche merveilleux tant en plusieurs autres occasions


, il ,

en latin qu'en français, tantpour témoigna que c'était son dogme


les leçons de théologie que pour favori (Q), jusqu'à s'en quereller
les sermons. Il savait le monde, avecunministredelaRochellef/):
et pouvait fournir en conver-
il mais cela n'empêcha point qu'en ,

sations cent sortes de choses qui ce qui regardait la conscience


étaient hors de son métier et : il n'exhortât à désobéir (R). Il
c'est sans doute ce qui contribua n'est pas besoin de dire en quelle
autant ou plus que la réputation considération il était chez les
de sa science au bonheur qu'il grands seigneurs protestans : cela
eut toute sa vie d'être considéré s'entend assez de soi-même. Il
et honoré des grands seigneurs fut brouillé avec un ministre de
de contraire religion. J'ai déjà Saumur, nomméM. d'Huisseau,
dit que le cardinal de Riche- et il n'eut pas toute la satisfaction
lieu eut de l'estime pour lui : qu'il attendait de cette affaire au
je n'ajoute point qu'il lui fit par- synode national de Loudun (k).
lerde son grand dessein de réunir On a cru que la gloire dont il
les églises(I) car ce ne serait pas
; jouissait lui avait été contraire en
une preuve de considération assez cette rencontre comme s'il eût ;

distinguée , ce cardinal ayant été un grand arbre , qui faisait


sondé là-dessus plusieurs minis- ombre aux petits , et qu'il fallait
très, qui étaient bien inférieurs à abaisser. Outre que les parens
celui-ci.Le maréchal de Brezé(K) de ceux qui s'étaient déclarés
et le maréchal de la Meilleraie(L) chefs de parti contre le dogme
doivent être mis au nombre des de la grâce universelle favori-
grands seigneurs qui firent un cas sèrent son ennemi le plus qu'ils
tout particulier de notre Amy— purent. Il aurait apparemment
raut. M. le Goux de
Ber- été de la table dans ce synode (S),
la
chère (M) premier président au oii il assista de la part de sa pro-
,

parlement de Bourgogne, et les vince si l'on ne l'eut cru per- ,

intendans de la province d'An- sonnellement intéressé aux affai-


jou (N) sont de ce nombre; et res que M. d'Huisseau avait avec
,

nous y pouvons même joindre l'église de Saumur. Il mourut fort


des évêquesetdes archevêques (0), chrétiennement le huitième jour
etpar-dessus tous le cardinal Ma- de janvier 1664 (/), et fut enterré
zarin (P) dont les honnêteté? selon toutes les cérémonies aca-
,

pour ce professeur furent extraoi'- démiques. Il eutpendant sa der-


dinaires. Il y a beaucoup d'appa- nière maladie une grande liberté
rence qu'il trouva grâce auprès d'esprit, qui lui donna lieu de
de ce cardinal entre autres rai— tenir plusieurs discours très-edi-
,

sons parce qu'il se déclara hau- fians et de donner de beaux té-


, ,

tement pour la doctrine de l'o- moignages de sa foi en présence


béissance des sujets. Il le fit uti- ^.^ p^.^ ^.„^^„^
lement pour la cour de France , (k) En loâp.
désordres de la (D^ioni^dans saKMioihé^^e, et Wiue
pendant
r^
les '
dans son DtSLViam metUnt mal sa mort en
,

Fronde, ou la fortune du car- iggj.


AMYR AUT. 5tt
d'un bon nofïibre de personnes On trouve quelques particula-
de diiicrente religion. Entre ses rités touchant M. Amyraut dans
autres vertus , on doit remarquer un ouvrage intitulé Mélange cri'
sa charité pour les pauvres. Il tique de littérature recueilli des
,

leur donna les gages de son mi- conversations de feu M. Ancil'


nistère pendant les dix dernières Ion {q) on y voit entre autres
: ,

années de sa donnait l'au-


vie. Il choses que c'est de lui qu'il faut
,

mône sans distinction de catho- entendre un passage d'une lettre


liques et de »éformés les reli- : de Balzac (r) oti l'auteur d'une
,

gieux mendians qui allaient à apologie est bien loué. On y voit


la quête chez lui ne s'en retour- aussi que Patin l'estimait beau-
naient jamais à vide et il com- ,
coup mais prenez garde que ce
;

manda à M. Hervart (m) les ré- qu'il y a de désobligeant dans la


collets de Saumur, lorsqu'ils lettre de Patin ne concerne pas
recoururent à l'épargne, pour le ministre de Saumur. Je parle-
faire rebâtir leur cloître qui avait rai de cela dans une remarque ,
été brûlé. Ils le remercièrent du et de quelque autre petite mé-
bon de sa recommandation.
effet prise (T).
Il ne laissa qu'un fils qui a été , nera point de preu^-es publiques dans les
vm fort habile avocat au parle- remarques de cet article, est tiré de ces Mé-
moires.
ment de Paris, et qui s'est réfugié {q Imprimé à Bâle , l'an 1698.
à la Haie depuis la révocation de (r) La premièreà M. Conrart.
l'édit de Nantes. Il avait eu une
(A) // était d'une bonne et ancienne
fille, qui mourut en i645, dix-
, originaire d' Orléans
famille '\ Etien-

huit mois après avoir été ma- ne TAmyrault *, son bisaïeul, e'tait
riée («). La douleur oii cette échevin â'Orléans lorsqu'on y reforma
la coutume, en iSog. Le |irocès verbal
perte plongea sa femme fut cause
de la coutume en fait foi. On prétend
qu'il composa un Traité de l'état que le chef de la famille est un l'Amy-
des Fidèles après la Mort et , rault dont le touibeau est de Tannée
,

qu'il le lui dédia. On l'imprima 1870, et se voit dans l'église de Saint-


Pierre-en-Pont. 11 était venu d'Hage-
l'année suivante. On ne sera pas
naw, ville d'Alsace , capitaine d'une
fâché de voir le distique que M. du compagnie de reîtres à ce que porte
,

Bosc écrivit de sa propre main au son épitaphe. Cette famille est bien-
bas de l'estampe de Amyraut: M faitrice du couvent et de l'église des
Minimes d'Orléans , et en cette qua-
,

AMose ad Mosem par Mosi non fuit iillus:


lité, ses armes se trouvent dans les
More ore , et calaino miriis utertjue
vitreaus de l'église, .le remarquerai
, ,
,
fuit (o,.
par occasion qu'un Anglais de la
,

Ce fut quelques années après la communion romaine a très-mal lati-


nisé le nom d' Amyraut puisqu'au
mort de ce professeur , que l'on ,

lieu A^Amyraldus il a dit Amuralh.


grava son portrait par les soins Cette faute serait petite si, par une
de monsieur son fils {p). froide et basse allusion, il ne l'avait
accompagnée d'un doute fort ridicule.
(m^ Il était alors contrôleur des finances.
(/i> A
Bernard de Haumont qui fut depuis Moses quidam Amurath , dit-il (i) ,
avocat du roi à Saumur. * Leclerc remarque que la différence det deux
(o Cest une allusion à ce que les Juifs
nom' aurait dû frapper Barle , et indiquait
ont dit à la. louange de Moses Ma'imunides , a^sez qu'Etienne V Amjraull n'était pas bisaïeul
J'ameu.r rabhin. de yioYse Amyraut.
ip) Tire' des Mémoires communiqués par (i) Dans ses Xoles snr quelques Extraits de»
3f. Amjrraut le fils. Tout ce dont on ne don- Harangues d'Edouard Deriog. Cela fui imprimé
, ,,

5l2 AMYilAUT.
minister salmuriemis , homo saltem et la cour ayant trouve à propos de
nomine (nescio an et progenie) judœo- ne pas accorder cette demande, M. de
turca. Dans les pages suivantes il l'ap- la Vrillière eut ordre de le déclarer
pelle Amyrath. aux députés. M. Amyraut lui repré-
Ces paroles du père Bartolocci sont senta fort adroitement et fort respec- ,

fort surprenantes Moses Amyraldus, : tueusement tout ensemble, les raisons


dit-il (aj, i'idetur Judœus corn'ersus de la compagnie, et il se passa plus
adjidem, scripsitque erudilissimam et de quinze jours sans que de part ni
catholicam Disserlationem de Mys- d'autre on relâchât quelque chose.
terio Trinitatis deque f^ocibus, ac, Le cardinal de Richelieu informé de ,

Phrasibus quitus tant in Scripluid


, ,
la vigueur de ce ministre voulut ,

quant apud Patres, expllcatur. Pars conférer avec lui sur ce sujet et ,

IP^ quœ est de Primordiis Rei^ela-


,
tâcha de l'induire à n'insister pas
tionis Mysterii 'Trinitatis in Veleri davantage. On répondit, et on ré-
Testavienlo , habelur in Libro }Va- pliqua sur tout ce que cette éminence
genseilii inscripto Tela ignea Sa- , put alléguer de plus plausible ; et
tanée pag. i4o- Voilà comment les
,
, l'audience fut accordée sur
enfin
auteurs les plus illustres sont incon- pied que M. Amyraut la deman-
le
nus quelquefois les uns aux autres Le cardinal s'entretint avec lui
dait.
Le père Bartolocci n'ayant connu diverses fois touchant le cahier des
,

M. Amyraut que par une pièce adop plaintes, et goûta extrêmement l'es-
tive de M. Wagenseil Ta pris bonne- prit et les manières de ce ministre.
,

ment pour un ex-juif. (D) // publia un écrit , où il ex-


( B ) Son père avait ses
f^ues en le pliqua tes mystères de la prédesti-
destinant au barreau.'] 11 le destinait nation et de la grâce selon les hypo- ,

à remplir la charge de sénéchal, thèses de Cameron.] Un catholique


occupée par son oncle, qui n'avait romain de qualité fut l'occasion de
point d'enfans. cet écrit. Il avait dîné à Bourgueil
„ .
avec M. Amyraut
,, ,- ,-
chez M, 1 eveque
,

(C) On le chargea défaire en sorte ,

de\e parler point à genoux.] M. Amy- tle Chartres de qui ce ministre était
ne par ,

fort connu (3). Après le repas, il ht


raut fut celui qui représenta au sy-
node l'état de cette question , et il tomber la conversation sur une ma-
tière de controverse il accusa les
firomit en même temps de faire toutes
:

protestans d'enseigner des choses tout-


es instances possibles, en cas que la
compagnie lui donnât des instruc- à-fait dures sur la prédestination.
M. Amyraut prit la parole et il se
tions là-dessus. Il fut donc chargé de
,

demander le rétablissement du pri- noua entre lui et M. l'évêque de


Chartres une espèce de dispute, mais
vilège dont les ministres avaient joui,
douce et honnête sur celte question
de parler debout à sa majesté comme ,
,

épineuse. Le soir étant venu, on se


font les ecclésiastiques du royaume.
sépara le lendemain M. Amyraut
partit, accompagné de deux an-
: ,
Il
s'en retournant à Saumur, passa chez
ciens, pour Monceaux, où était la
cour et s'étant adressé à M. de la
l'homme de qualité (4) comme il le ,
;
lui avait promis , et lui trouva de
"Vrillière, secrétaire d'état, il apprit
le roi n'entendait point que les
bons sentimens pour la religion pro-
aue testante, avec divers scrupules sur le
éputés du synode lui parlassent au-
trement que ceux du synode précé- dogme de la prédestination , tel que
Calvin l'a expliqué. 11 lui leva tous
dent. Comme il y avait toujours un
commissaire de la part du roi dans ces scrupules le mieux qu^il lui fut
possible , et acquiesçant à la prière
nos synodes celui qui assistait alors
,

au synode national de Charenton que lui fit ce gentilhomme de com-


poser un traité où la chose fût beau-
avait fait savoir au roi ce que l'on
avait chargé les députés de demander^
coup mieux approfondie que dans
une simple conversation il écrivit et ,

à Londres l'an i65f)


,
avec une Pièce intitulée^
, il publia (5) le livre dont je parle.
Nuncius a raortuis ,
qui est un
Dialogue sup-
pose' tntre Vdme de Henri VIII et celle de (3) // e'iait de la maison (V Élampes-Valen-
Charles I". çai , et fut depuis archevêque de Beirns.

(a) Bartulocci Bibliotlieca Rabbin. ,parl- IV, (4) y^u PIcssià-Rideau,


pag- CfJ. (5) En 1634.
, ,

AMYRAUT. 13
Voilà ce que portent mes ine'moires milles, ou qu'il se forme deux paviis.
manuscrits. JI. Amyraut ne débite N'achevez pas de réveiller mille mau-
point ce sujet de son ouvrage, mais vaises passions, qu'il faut tenir en-
un autre assez diflërent (6). chaînées comme autant de bctes fé-
(E) Son écrit excita une espèce de roces et malheur à vous , si vous êtes
5

suene civile parmi les théologiens cause qu'elles brisent leurs fers. Grâ-
protcslans de France.l Cette dispute ce à Dieu la guerre civile de la grâce
,

a été assez considérable pour devoir universelle, et quelques autres encore,


faire un bon morceau des Annales n'ont pas été dignes (il s'en faut beau-
ecclésiastiques des profestans. Celui coup) de l'application que j'ai ouï faire
qui a publié en anglais un histoire de quelques vers aux disputes schisma-
très-curieuse de nos synodes de Fran- tiqucs. On comparait les préparatifs
ce (7) peut nous instruire des diflférens et troupes auxiliaires des deux
les
que le dogmi de la grâce universelle chefs à cette décoration de théâtre :

y a excités. Ce serait médire , je /tilles, vautours , serpens ,


griffons ,
pense bien cruellement de ceux qui
,
Hippocentaure! et Trphons ,

ont les premiers remué cette question, Des taureaux furieux dont la gueule béante
Elit transi de Jrajeur le grand cheval d'Al-
r(ue de soutenir qu'ils n'auraient pas lante j

laissé de le faire, encore qu'ils eussent Un char que des dragons étincelans d'e'clairs
prévu tous les maux qui en devaient Promenaient en sifflant par le vide des a,rs
De'mogorgon encore à la trine figure
résulter car où est l'utilité et le oui
:
,

Et l'Horreur et la Mort, s'y voyaient en '^


pein-
bono de ces disputes ? ne reste-t-il ture (8).
plus de difficultés , pourvu qu'on se
serve de l'hypothèse de Cameron ?
M Amyraut eut la joie de se récon-
cilier avec ses plus ardens adver-
N'est-il pas vrai , au contraire , que
jamais remède ne fut aussi palliatif
saires , et il ne fallut pas que les
que celui-là ? On a bien besoin d'autre
grands du monde se mêlassent tou-
jours de la pacification. M. le prince
chose, pour contenter la raison j et si
de Tarente s'en était mêlé en i64g :
vous n'allez pas plus loin , autant
je ne sais pas si les parties lui don-
vaut-il ne bouger de votre place :
nèrent plus de peine que n'en donnent
tenez-vous en repos daus le particu-
aux maréchaux de France les diflfé-
larisme. Mais je veux que l'universa-
rens qui relèvent de leur ressort
lisme ait quelque avantage, et qu'il ;
mais, quoi qu'il en soit , il vint à bout
réponde mieux à certaines objections.
de son entreprise et mieux peut-être
Cela est-il capable de balancer tant ,

que n'aurait fait un synode (g). Pour


de crimes spirituels, que les factions
ce qiii est de la réconciliation avec
traînent après elles, tant de mauvais
M. du Moulin, ce fut M. de Langle,
soupçons, tant de sinistres interpré-
ministre de Rouen, qui la procura.
tations, tant de fausses imputations ,
Dès qu'il en eut fait la proposition
tant de haines, tant d'injures, tant de
M. Amyraut y donna les mains avec
libelles , tant d'autres désordres , qui
joie, et offrit toutes les avances. Il
viennent en foule à la suite d'un tel con-
écrivit une lettre le premier et M. du ,
flit théologique ? Si vous croyez que le
Moulin lui répondit fort honnête-
particularisme damne les gens, vous
ment. On publia ces lettres pour
faites bien de le réfuter quoi qu'il en
l'éditication de l'Eglise. Elles sont
coûte. Je dis la même chose à ceux qui
datées de l'an i655. M. Daillé a in-
j)rendraient l'universalisme pour une
séré la réponse de M. du Moulin dans
hérésie mortelle mais puisque de
:

l'un de ses livres (lo). La raison et la


part ni d'autre vous ne croyez pas
charité nous portent à croire que
réfuter une opinion pernicieuse ne
,
ceux qui avaient tant crié, et tant.
disputez qu'autant que vous le pouvez
faire sans troubler le repos public , (8) yorez la Vie d'Escbyle de M. Le Fèvre.
(ij) // accorda, dans le château de Thouars,
et taisez - vous dès que l'événement
le iG d'octobre 1G49, M. Amyraut avec M. de
vous montre que vous divisez les fa- Champvernou ministre de Taillehourg et
, ,

avec M. Vincent ministre de la Rochelle.


,

(G) Prœfat. Speciminis Animadvers. de Gra- Voyez les Actes authentiques de David Blondel,
tiâ Ùniversali. pag. 85. Ce M. de Champvernou s^appetait
(7) Joannes Qiiick , ministre a Londres : son Guillaume Rivet et e'titit frère d'A.Bdrè Uivet,
,

lii-re intitule Synodicon m Galliâ veformalâ,


, professeur en théologie à Leide.
a été imprime en 1692 , in-folio. (10) Vindicise Apoloq a: elc. , pag. 4i8. ,

TOME I. 33
,, , ,

Dl/i AMYRAUT.
excité de tempêtes contre un dogme et que les livres coup sur coup volent
qu'ils ont reconnu enfin innocent, et en foule de lieu en lieu laissez-les :

dont enfin le défenseur leur a paru faire ils s'accorderont bien , et à


:

un tidèle serviteur de Dieu , ne sont peu de frais :

point morts sans s'être couverts de Hi motus animorum , atque hœc cerlamina
confusion pour le moins au pied
, lanla ,
du trône de la Majesté divine à la , Pulveris exiguijaclu compressa quieseent( 1 3) •

vue de cette prévention mortifiante


ui leur avait montré comme un Mais on ne peut pas le dii'e toujours.
Les choses sont quelquefois poussées
ïogme affreux une hypothèse où il
à l'extrémité Res in nervuni erumpit.
n'y a nul venin. Voyez ce qui suit.
:

(G) Le synode d' Anjou lui permit


(F) Il y
eut au synode J'Alencon
des députés si ardens contre son hypo- de publier une réponse aux trois un-
thèse , qu'ils ne parlaient que de dé- lumes de M. Spanheim sur la Grâce
universelle.'] Elle est intitulée iS'jyectwew
posera] S'ils ont vécu encore trente
ou quarante ans, je ne vois pas de Anunaduersionum in Exercitaliones
de Gratiâ uniuersali, et fut imprimée
quelle manière ils osaient regarder
le monde 5 car enfin , cette doctrine ,
à Saumuren 1648, in-4°. 11 n'est pas
qu'ils jugeaient digne des anathèmes vrai comme on l'assure dans le Mé-
,

les plus "foudroyans se trouva êti-e


,
lange critique, tome 1, page 129,
celle des plus grands hommes qui
que M. Amyraut ait attaqué M. Span-
servissent les églises réformées de heim ni que son volume soit contre
,

les thèses de M. Spanheim. 11 est


France. Ce fut celle de M. Mestrezat
contre les trois volumes de celui-ci
celle de M. le Faucheur, celle de
qui fut l'agresseur. Voyez les Lettres
M. Blondel celle de M, Daillé celle
, ,

de M. Claude, celle de M. du Bosc. 11 de Sarrau, pages 83 , gS, 108, édition


fallut que les particularistes recon-
d'Utrecht , en 1697.
nussent bientôt pour leurs frères , et (H) llapuhliéun très-grand nombre
pour de fidèles ministres de Jésus- de Hures.] Il publia en i63i son
Christ, les partisans de la grâce uni- Traité des Religions. Cinq ans après ,
verselle ; et l'on a vu que les mi- il publia six sermons sur la nature , ,

nistres réfugiés, qui ont signé un l'étendue., etc. de l'Ei>angile. Il en a


formulaire au synode de Rotteidam publié plusieurs autres en divers ,

en l'année 1686, n'ont point été sou- temps. Son livre de l' Elévation de la
mis à quelque déclaration qui donnât J'oi et l'Abaissement de la raison ,

la moindre atteinte au système de parut en 164 1 La Défense de Calcin


M. Amyraut (11). D'où venaient sur la doctrine de la réprobation ab-
donc les vacarmes que l'on fit au solue parut en latin la même année :

commencement contre ce système ? et l'an i644 ^^ français. Il commença


D'où vint que la même doctrine passa ses Paraphrases sur l'Ecriture en 1644 :

d'abord pour un monstre, et puis l'Épître aux Romains fut paraphrasée


pour une chose innocente ? Ne faut-il la première il continua par les autres
j

pas reconnaître là doigt du péché


le épîtres, et finit par les Evangiles:
originel, et l'influence de mille pas- mais il eut la même sagesse que
sions ténébreuses, qui doivent enfin Calvin, de ne toucher pas à l'Apoca-
produire, si l'on est du nombre des lypse. De peur que son nom n'em-
prédestinés , une salutaire et morti- pêchât les catholiques romains de lire
fiante humiliation ? Le pis est qu'on ses paraphrases, il ne l'y mit pas. 11
ne profite pas du passé chaque géné- publia , en 1647 , une Apologie pour
;

ration fournit les mêmes symptômes, ceux de la religion, un Traité du


tantôt plus grands , tantôt plus petits ; franc Arbitre, et un autre de Seces-
car on peut bien dire très-souvent sione ah Ecclesiâ Romand, deque
lorsque l'on voit en campagne lés fac- Pace inter Evangelicos in negotio
tums, les dénonciations les apolo- Religionis constituendd. Il traita de-
,

gistes les thèses


, , puis plus amplement cette matière de
la réunion des calvinistes et des luthé-
Jamque faces et saxa volant (12)
riens dans ITrenicon qu'il fit impri-
,
,

(11) Vorezlaremarque (M.) de V arlicleXi ki\,\.îi.


(12) Virgil. jEn. , Ub. /, vs. i5o. (i3) Virgil. Georg. , lib. IV , c» 8C.
, ,

AMYRAUT. 5i5
raer l'an 1662. Son livre de la f^oca- » cette mauvaise opinion , et peut-
tion des paUeurs , parut en 1649. Il » être même que vous vous éfoune-
avait proche sur cette matière devant » riezde l'illusion que les préjugés
M. le prince de Tarente, pendant la » de votre passion ont causée dans
tenue d'un synode provincial dont il » votre esprit, lui faisant prendre,
fut modérateur. Ce prince souliaita » comme contre votre trans-
dites ,

que ce sermon ft\t imprime, et que la » substantiation des choses qui n'a-
,

matière fût traitée plus amplement ; » vaient été écrites que contre les
car c'était un grand lieu commun en- » extravagances de l'idolâtrie des
tre les mains des missionnaires. C'est » païens (i6j. i>
pourquoi .M. Amyraut ne se contenta (I) Ze cardinal de Richelieu lui
fit
pas de faire imprimer son sermon, il parler de son grand dessein de réunir
publia aussi un Traité complet sur les deux Eglises. ] Le jésuite qui
cette importante controverse, et dédia s'entretint là-dessus avec .\I. Amyraut
le tout à M. le prince de Tarente. Sa s'appelait le père Audebert *. M. de
Morale Chrétienne en six volumes , Villeneuve, qui était alors lieutenant
in-8°. dont le premier fut imprimé
, de roi à Saumur les ayant fait dîner ,

l'an i652, est le fruit des conversa- ensemble et cela avec tant de com-
, ,

tions qu'il avait souvent avec M. de plaisance pour le ministre qu'il lui ,

Villarnoul , seigneur d'un mérite ex- donna le haut bout sur le jésuite, et
traordinaire , et l'un des plus savans qu'il n'y eut point pour le coup de
gentilshommes de l'Europe, héritier, Benedicite à sa table fit en sorte que ,

en cela aussi, de son aïeul maternel l'après-dînée ils se pussent entretenir


M. du Plessis-Mornai. Il y a peu de en particulier. Il est vrai que M. Amy-
matières sur quoi M. Amyraut n'ait raut déclara qu'il ne pourrait s'em-
écrit. Il a publié un Traité des Son- pêcher de communiquer à ses col-
ges deux volumes sur le règne de
; lègues tout ce qui se passerait. Le
mille ans, où il réfute un avocat de jésuite débuta par avouer que le roi
Paris , nommé .M. de Launai, qui était et son éminence l'envoyaient faire
un grand chiliaste (i4)i la f^ie du des propositions d'accommodement
braire ta lYoue , surnommé Bras-de- sur le fait de la religion ; et puis , étant
fer; et plusieurs autres ouvrages, dont entré en matière , il fit entendre qu'on
je ne parle pas, ou dont je parle dans sacrifierait au bien de la paix l'invo-
le reste de cet article. Il monta même cation des créatures, le purgatoire et
sur le Parnasse ; car il fît uri poème le mérite des œuvres j qu'on limiterait
in\\\.w\é L' Ap'dogie de saint Etienne a le pouvoir du pape , et que, si la cour
ses juges. On a'taqua cet ouvrage du de Rome refusait d'y consentir, on en
coté qui donnait le moins à craindre à prendrait occasion de créer un pa-
certains égards , puisque ce ne furent triarche ; qu'on donnerait la coupe aux
point les poètes qui s'élevèrent contre, laïques , et qu'on pourrait même se
etque ce furent les missionnaires. On relâclier sur d'autres choses , si l'on
prétendit que l'auteur avait parlé du remarquait dans les protestans un vé-
Saint-Sacrement de l'autel avec la der- ritable désir de paix et de réunion.
nière irrévérence ^ mais il publia un Mais il déclara , lorsque M. Amyraut
Ecrit poursajustiûcation, duquel je ne le mit sur les dogmes de l'eucharistie,
puis riendii'e de plusà propos que ce qu'on ne prétendait pas y rien chan-
que M. Daillé en a dit. Ecoutons-le donc: ger ; sur quoi l'autre lui répondit
« Quant à V Apologie de saint Etienne qu'il n'y avait donc rien à faire. Leur
V.a ses juges, que vous (i5) employez conversation dura environ quatre
» ensuite pour nous convaincre d'avoir heures. Le jésuite voulut exiger le
» maltraité votre sacrement, si vous,
))et ceux <jui s'en sont si fort offensés, (16) Daillé Répliqae aux denx livres d'Adam
,

cl de CoHiby, //«. pari. chap. Xyil,p. 108.


» aviez daigné lire la lettre que l'au-
,

' Leclerc prétend que cetti' conférence pre'ten-


» teur a fait imprimer pour se justi- due n'a pas même de vraisemblance. L'abbé
» fier, vous et eux n'en auriez pas Renaudoi ayant qualifié de fausseté ce projet
de réunion Bar h dant le n<>.
',
(,
II de sa XXV
(i4) foyez M. Anclllon , aux pag. 129, j3o Suite des Kéliexioos sur le prétendu Jugement du
.'lu premier tome de son Mélange critique de ïjit- public , pag. 748 du tant, iv des auvres diver-
liratare. ses , 1727-1'; 3i), se couvre du Mémoire, qu'il a
'i5) // s'adresse au père Adam. cité, d' Amyraut fils.
AMYRAUT.
secret. M. Arayraut lui protesta que, tonner que le ministre ait pu fournir
selon la déclaration qu'il en avait faite des mémoires pour la Vie du prési-
d'abord à M. de Villeneuve , il com- dent. Il n'est pas besoin de dire ici
muniquerait à ses collègues l'entre- que M. de la Berchère mourut pre-
tien qu'ils venaient d'avoir ; mais , mier président au parlement de Gre-
qu'il lui répondait de leur discrétion. noble , et que M. son frère lui suc-
Dès le soir même il leur rendit
, céda ^ mais il est bon de dire que ce
compte de conférence , et il ne fit
la dernier voulant faire écrire la vie
,

point scrupule d'en parler dans l'oc- de l'autrepria M. Amyraut de lui


,

casion, après que le cardinal de Riche- communiquer des mémoires touchant


lieu et le père Audebert furent morts. ce qui s'était passé entre eux de par-
(K) Il fut très estimé du maréchal envoya, en-
ticulier. M. Amyraut lui
iâe Brezé/] 11 était gouverneur de Sau- tre autres choses
de la con- , le récit
mur , et il n'y allait jamais sans en- férence qu'il avait eue avec le père
voyer prier M. Amyraut de le venir Audebert^ car dès que le bruit se fut
Toir. Il le priait même fort souvent répandu dans Saumur qu'il s'était en-
d'aller à son château de Milly, où il tretenu secrètement a\ ec ce jésuite ,
demeurait ordinairement 5 et lorsqu'il M. de la Berchère voulut savoir de lui-
reçut la nouvelle de la mort du duc même ce qui en était. JM. Amyraut
de Fronsac son fils, amiral de France, lui en récita une bonne partie eu ,

il voulut avoir toujours auprès de lui lui recommandant le silence. Cet en-
M. Amyraut. Il en reçut plusieurs droit de ses Mémoires n'a pas été em-
visites durant sa dernière maladie , et ployé dans la vie de M. de la Ber-
il se recommanda même à ses prières , chèi-e qui a été donnée au public. ,

et vouhit que l'on priât Dieu pour lui Il dédia en 1648 son livre des Droits , ,

dans le temple de Saumur. Il mourut du mariage à cet illustre magistrat ,


dans le château de Milly, en i65o. qui était alors premier président de
(L) Du maréchal de la Mellleraie.'] Grenoble.
Du temps qu'il était de la leligion il (N) Des intendnns de la province
,

avait étudié à Saumur avec M. Amy- d'Anjou. ] Il ne manquait jamais de


raut. Il s'était toujours souvenu de les aller saluer et ils lui rendaient ,

cette ancienne connaissance et, dès tous sa visite, et lui marquaient une
,

le lendemain de son arrivée à Saumur, grande considération. Lorsqu'en i658


lorsque la cour y était en i652 il en- il alla prendre les eaux de Bourbon
,
,
voya faire un compliment à ce mi- il reçut mille honnêtetés à Bourges ,

nistre qui ne manqua pas de lui al- de M. Mandat, intendant de la pro-


,

ler faire la révérence tout aussitôt , et vince. Il ne tint qu'à lui d'aller loger
d'en être reçu comme à l'ordinaire chez cet intendant qui l'en pria et
,
, ,

avec mille marques de considération. chez qui il dîna avec l'archidiacre do


Ce maréchal ayant appris la dernière Bourges et avec quelques autres ec- ,

maladie de M. Amyraut, le fit visiter clésiastiques.


par un gentilhomme et lui témoigna ,
(0) Des éi'êques et des archevê-
que si sa goutte lui eût permis de sup- ques. ] Voyez ce qui a été dit ci-des-
porter le carrosse il serait venu le
,
sus (17) concernant M. l'évêque de
voir. 11 était alors à son château de Chartres. J'ajoute ici, qu'en Tannée
Montreuil-Bellai à quatre lieues de
,
1662 M. l'archevêque de Paris Hai- ,

Saumur. douïn de Péréfixe, étant allé à Saumur


(M) De M. le Goux de la Ber- pour un vœu que la reine mère avait
chère. ] Il fut relégué à Saumur, l'an
fait à Notre-Dame des Ardilliers (18),
1687 , ety demeura jusqu'en i644-
il
fit dire à M. Amyraut , qu'il serait
Comme avait beaucoup de mérite
il
bien aise de le voir. M. Amyraut fut
et beaucoup d'érudition , il aimait les
très-disposé à lui rendre une visite :

gens de lettres , de quelque religion entendre qu'il ne lui don-


mais il fit
qu'ils fussent. Il voulut d'abord con-
nerait point le titre de monseigneur.
naître M. Amyraut, et il le trouva si
L'archevêque y ayant donné les mains,
digne de son amitié qu'il se forma ,

entre eux une gi-ande liaison. Ils se (17) Dans la remarque (D).
voyaient ordinairement deux fois la (18) Elle en dans l'église des pères de l'Ora-
semaine ; ainsi l'on ne doit pas s'é- toire , au bout d'un faubourg de Saumur.
,

AMYRAUT.
reçut deus visites de ce ministre il lui parla d'affaires d'etal , il lui
s'entretint avec lui près de deux heu- elala tous les efforts que Ton faisait
res chaque fois , et le traita fort ci- en Xainton{;e pour entraîner ceux de
vilement. On parla entre autres cho- la religion au parti des princes et le ,

ses des livres de .M. Daillé dont le


, pria de travailler à rendre inutile toute
prélat dit beaucoup de bien par rap- cette machination. M. Amyraut l'as-
port à rcrudilion. sura qu'il n'y avait rien à craindre de
(P) Et par-dtssus tous le cardinal la part des protestans de France et ,

Mazarin. J II arriva à Saumur en ,


qu'il écrirait à plusieurs ministres de
i652 , quelques jours après que le roi Xaintonge , afin que le synode qu'ils
et la reine mère y furent arrivés : devaient tenir bientôt témoignât au-
et comme il apprit qu'à la table de thentiquement sa fidélités La chose
la reine on avait parlé amplement fut exécutée. Deux jours après cette
d'un sermon du sieur Amyraut il ,
audience cardinal le
sous prétexte
, ,

pria le comte de Comminges de té- de voir le collège de ceux de la re-


moigner à ce ministre qu'il serait bien ligion et la bibliothèque de Jl. da
,

aise de le connaître. Ce comte était Plessis-llornai , eut un autre tête-à-


gouverneur de Saumur et avait beau- , tète avec M. Amyraut, dans le ca-
coup d'amitié pour M. Amyraut il : binet de ce dernier. Ils parlèrent de
lui avait promis que ceux de la reli- l'édit de Nantes, et sur ce que M. Amy-
gion pourraient s'assembler à l'ordi- raut , interrogé si Henri IV avait été
naire le dimanche, quoique le roi fût dans l'obligation dele donner, avait
dans la ville •
mais il lui déclara en répondu que oui mais que quand ; ,

même temps qu'il fallait qu'ils inter- même c'aurait été une grâce au com-
rompissent leurs assemblées les trois mencement l'observation en serait,

premiers jours après l'arrivée du roi. aujourd'hui une chose nécessaire , le


Onlintcequiavaitétépromis.M. Amy- cardinal lui dit qu'il avait raison et ,

raut prêcha le dimanche sur ces pa- lui cita cette maxime du droit Quod :

rôles, Cruisfnez Dieu, honorez le roi, initio fuit voluntatis , ex post-facto


et fut ouï de beaucoup de personnes Jil necessitatis. On sera peut-être bien
de la cour, qui en furent très-satis- aise de voir ici ce que M. de Gui-
faites et qui parlèrent de son ser- taut (19) dit à madame de la Tri-
,

mon avec éloge non-seulement au mouille, en présence de la reine Son


, :

roi , dès qu'ils furent sortis du tem- Eminence est chez le minisire Amy-
ple, mais aussi le soir pendant le sou- raut ce sont deux ecclésiastiques en~
:

per de la reine. Ce fut alors que le semble ; mais je suis sûr qu'ils ne par-
cardinal .Mazarin ouït parler de ce leront point de religion ; son Emi-
sermon , et qu'il apprit de la bouche nence n'y trouverait pas son compte.
de M. de Comminges le zèle que Pendant les cinq semaines que le roi
M. Amyraut et tous ceux de la re-
, fut à Saumur , 51. Amyraut fit plu-
ligion de ces quartiers-là avaient té- ,
sieurs visites au cardinal et en fut ,

moigné pour le service du roi dans les toujours bien reçu ; et lorsqu'il prit
derniers troubles. L'envie qu'eut le congé de son Eminence, elle lui dit
cardinal de voir ce ministre fut si de lui écrire directement foutes les
grande qu'il la lui fit témoigner dès
,
fois qu'il aurait à demander quelque
le lendemain matin par le juge de la chose soit pour le parti en général,
,

prévôté de sorte que M. de Commin-


: soit pour ses intérêts particuliers. Il
ges ayant vu qu'il n'avait pas été le
, ne se servit d'une telle permission
premier porteur de la nouvelle dit à ,
qu'après le voyage qu'il fit à Paris ,
M. Amyraut en riant Je wois bien :
,
sur la fin de l'année i658. Il vit trois
monsieur qu'au premier jour nous au-
,
ou quatre fois son Eminence qui lui ,

rons besoin df_ i'olre intercession au- fit beaucoup de civilités. 11 lui parla

près de son Eminence ce qui uous : du synode national dont on deman- ,

proui'era l'utilité de l'invocation des dait la convocation depuis tant d'an-


saints. La première visite fut assez nées. Le cardinal répondit que les
courte ; mais on pria M. Amyraut de raisons qui avaient empêché de l'ac-
revenir le lendemain à huit heures. corder subsistaient encore , et vou-
Le cardinal lui fit toute sorte d'hon- (ir)) Il était capitaine des gardes de la reine,
nêtetés; il le lit asseoir atiprès du feu. et c .c'-.' de 31. de Cciitniinses.
,

5i8 AMYRAUT.
lut qtieM. Amyraut lui en écrivît. On toujours aux peuples , par ses prédi-
se donna l'honneur de lui en écrire cations le parti de l'obéissance ; et ,

deux fois il répondit de sa propre lorsqu'on le consulta sur la manière


:

main ^ et depuis toutes les fois qu'il dont on se devait conduire il ré-
, ,

lui réponse
fit il se servit à la vé-
,
pondit qu'il n'y avait pas d'autre
rité de la main d'un secrétaire , mais parti a prendre que de se tenir au gros
il signa proprio pugno. de l'arbre. Apparemment , les person-
{Q) IL témoigna en diverses occa- nes qui le de consultèrent y allaient
sions que l'obéissance des sujets était bonne
ne pénétraient pas l'ar-
foi , et
son dogme favori. ] Dans V Apologie tifice perpétuel qui règne dans ces
qu'il Y>vih\Ï3. pour ceux de la religion, sortes de confusions. Les rebelles ne
l'an 1647 '' excuse le mieux qu'il
)
manquent jamais de soutenir qu'ils
peut leurs guerres civiles de France j ne veulent que remédier aux abus
mais il déclare néanmoins qu'il ne et chasser d'auprès du maître les mau-
,

veut nullement entreprendre la dé- vais conseillers qui l'environnent. 11


fense de la prise des arfnes contre faut être bien simple pour donner
son prince , pour quelque cause que dans ce panneau , et pour avoir be-
ce puisse être... et qu'il a toujours soin de consulter son directeur de
:

cru qu'il convient beaucoup mieux a conscience. La distinction du pape


la nature de l'Evangile et a la pra- et du saint siège n'est pas un sophis-
,

tique de l'Eglise ancienne de n'avoir me si grossier. Enfin M. Amyraut dé-


,

recours à autres armes qu'à la pa- chargea pleinement son cœur dans
tience aux larmes et aux priè- l'épître dédicatoire de sa Paraphrase
,

res.... (20). Et à toutes les fois dit- latine des Psaumes. C'est là qu'il sou-
,

il (ai) , que je repasse les yeux de tient et qu'il établit que par les vé- ,

l'esprit sur l'histoire de nos pères , ritables principes du christianisme ,


je ne puis que je ne regrette très-sen- les sujets ne doivent point prendre
siblement qu'ils n'ayent couronné tant les armes contre leurs souverains. Il
d'autres belles vertus ,dont il nous se déclara hautement pour ce qu'on
ont laissé les exemples, de l'imitation nomme l'obéissance passive Cet ou-
des premiers chrétiens , en cette invin- vrage fut dédié au roi d'Angleterre
cible patience qu'ils montrèrent sous Charles II , peu après que ce prince
les persécutions des empereurs. Un fut remonté sur le trône. L'auteur
écrit latin (22) , qu'il publia deux avait fait connaissance, à Paris avec ,

ans après fait voir comment il sou- un chapelain de ce même prince, l'an
,

tint cette cause contre les plaintes i658. Deux ans après, il lui témoigna
d'un ministre de la Rochelle qui au- sa joie du rétablissement du roi
,
et ,

rait bien mieux fait de ne se pas re- le félicita de l'évêché de Durham. On


connaître au livre de M. Amyraut , lui fit réponse que le roi le remerciait.
que de s'en formaliser. Le livre De la C'est ce qui encouragea M. Amyraut
Souveraineté des rois, publié en i65o, à lui dédier sa Paraphrase des Psau-
à l'occasion de la mort tragique de mes mais il ne le fit qu'après avoir
:,

Charles 1^^. , roi d'Angleterre té- su de l'évêque de Durham que ce


,

moigne encore avec plus de force les monarque en serait bien aise.
sentimens de notre M. Amyraut sur (R) En ce qui regardait la con-
,

la prise d'armes des sujets contre leurs science il exhortait a désobéir.'^ Cela,

princes. Il n'y avait pas moyen de se parut lorsque le sénéchal de Saumur


taire car on ne cessait d'imputer lui communiqua un arrêt du conseil
,

Cette tragédie au parti presbytérien d'état, qui ordonnait à ceux de la re-


,

et d'en tirer mille conséquences odieu- ligion de tendre devant leurs maisons
ses contre les protestans de France. le jour de la Fêle-Dieu. 11 le lui com-
31. Amyraut ne crut pas devoir laisser muniqua la veille de cette fête , et le
sans réponse l'injustice de ces repro- pria de donner ordre qu'on s'y con-
ches. Pendant les troubles de la der- forraAt , de peur que la désobéissance
nière minorité , ce ministre inspira ne fît soulever le peuple contre ceux
de la religion. M. Amyraut lui répon-
(20) Apologie pour ceux de la Religion p. rS.
dit qu'au contraire il s'en allait ex-
,

(21) Pag. -fi.


(22) Intitule, Adversùs Epistolic HisloricK horter ses ouailles à ne point tendre ,
Criminaliones Mosis AœjTaldi UefeDsio. et qu'il serait le premier à ne tendre
AMYRUTZES.
point ; qu'il avait toujours prêche qu'il » ques-unes, dit-il, et entre autres,
faut obéir aux puissances supérieures, » de beaux passages et de bonnes au-
mais qu'il n'avait jamais entendu cela )' thoritez; mais il n'en a pas fait cas. »
à l'égard de semblables choses , qui Cela L'awoit apparemment fiche ; car
intéressent la conscience. En sortant l'oicy comme il parle ensuite : « Aussi
du logis du sénéchal , il alla de mai- M est-ildans une province qui n'est
son en maison exhorter ses parois- M pas loin du pays d'Adieu-Sias , où
siens à tout souffrir plutôt que d'exé- » on est ordinairement plus glorieux
cuter cet arrêt. Le sénéchal le fit pu- » que sçavant, etc.» Je ne copie point
blier à son de trompe le consistoire : toute la suite de ce passage que li. ,

s'assembla remercia M. Amyraut de


. Ancillon a rapportée et qui est fort ,

sa conduite et chargea les anciens


,
désobligeante mais j'avertis mes lec-
j

de tenir la main à ce que personne ne teurs qne la personne si mal traitée


tendît. Le lieutenant de roi refusa de par Patin est le médecin de Niort
,
,
prêter main forte au sénéchal et em- , et non pas le théologien dont je donne
pêcha le tumulte qui commençait à ici l'article. Je les avertis aussi ,
que
se former. L'arrêt fut révoqué quel- le Traité des Religiom contre ceux qui
que temps après. les estiment indifférentes
, n'est pas le
(S) Dans le synode de Loudun il , seul livre de M. Amyraut dont il se
aurait cté de la table etc. ] Si tous , soit fait deux éditions (aS) je suis :

ceux qui liront ce livre étaient des bien certain que l'Apologie pour les
Français de la religion, cette remar- protestans a été mise sous la presse
que serait superflue mais elle ne le ; plus d'une fois ; que le Traité de la
sera pas à l'égard des autres lecteurs. Prédestination , imprimé eu i634 ,
Il y avait ordinairement dans nos sy- fut réimprimé à Saumur, l'an i658,
nodes de France quatre personnes avec l'échantillon de la doctrine de
qui formaient ce qu'on appelait la Calvin et avec la réplique à M. de
,

table. L'une de ces quatre personnes la Milletière sur son offre d'une con-
était le président de la compagnie férence amiable pour l'examen de ses
( on l'appelait le modérateur ) les ;
moyens de réunion que ces deux ;

trois autres étaient l'adjoint au mo- derniers traités avaient paru l'an
dérateur le secrétaire , et celui qui , i638 et que le libraire t|ui les réim-
,

recueillait les actes. prima en i658, avec le Traité delà


(T) Je parlerai... dans une remar- Prédestination déclare (26) qu'il
, ,

que et de quelque autre petite méprise.^ redonne ces trois livres au public ,
Patin dans sa Lettre CXIII de la pre-
, parce que l'on ne les trouvait plus.
mière édition, dit (28) qu'il y ai' oit Je sais aussi qu'on réimprima onze
en i663 un médecin de Niort, nommé Sermons d'Amyraut sur divers textes
jM. Lussand qui vouloit faire impri- , de l'Ecriture l'an i653 ; que la Vie
,

mer une Apologie pour les J\Iedecins ,


de la Noue a été réimprimée à Leide ;
contre ceux qui les accusent de trop que les thèses de ce professeur et cel-
déférer g la nature il dit que ce mé- : les de ses collègues ont été réim- ,

decin entendait parler et ai'oil princi- primées à Genève ; et que son 1 raité
palement en l'eue ISl. Amyraud , mi- de l'état des fidèles après la mort a
nistre de Saumur , qui en a ainsi parlé été imprimé à Londres en anglais ,

dans le dernier tome de sa 3Iorale et à Utrecht en flamand.


Chrestienne. .. témoigne {1^) n'être H On r affirme dans le Mélange Critique ,
(iS)
pas fort content de M. Amyraud dans pag. i32. La \",. esl de i63i , et la i^.de ifiSz.
cette occasion ; car l'oici ce qu'il (26) Dans l'ÉpUie de'dicaloire aux étudions
en théologie.
ajoute « Si M. Amyraud daigne se
:

» donner la peine de répondre à ce


j> livre , il est homme à dii'e là-dessus
Am'RUTZES (a) ,
philosophe
)) de belles choses que Lussand ne péripatéticien , natif de Trébi-
,

i> sait point et qui ne sont point dans


, zonde , s'était acquis une grande
j) son livre. Je luy enay suggéré quel- considération à la cour de l'em-
(23) Mélange Critique de Litlérature, loni. I, pereur David , son maître , et
pag. i33 , i34-
(24) Palin , Lettre CXIf de la première (a) Dans /eSupplément de Moréri on le

édition. nomme ?nal AuiMUla.


.

520 AMYRUTZES.
avait signalé sa plume en faveur lui-même (f). C'est dans la re-
des Grecs contre les décisions du lation qu'il composa de ce qui
concile de Florence {b) mais il ; s'était passéau concile de Flo-
ternit toute sa gloire par l'apos- rence , Dénié—
et qu'il adressa à
tasieou il tomba. Il fut un de trius gouverneur de Napoli de
,

ceux qui accompagnèrent l'em— Remanie. Il y assure , entre au-


pereur David à Constantinople ,
très choses que le patriarche de ,

lorsque Mahomet II l'y fit trans- Constantinople fut étranglé pen-


porter, après la prise de Trébi- dant la tenue du concile et que ,

zonde, en l'année t^'oi. Ce phi- les médecins attestèrent ce fait-


losophe , se laissant gagner aux là {g).
promesses du sultan, abjura son {/) Apud Allât, de Perp. Cons. p. 886.
,

christianisme et se fit turc avec , (g) Id. , ibid. ,


pag-. 908.

ses enfans l'un desquels , sous le


,
lieu de le pren- (A) ylllatius donne
nom de Mehemet-Beg, traduisit dre
pour le protovestiaire de l'empe-
en arabe plusieurs livres des reur de Trébizonde. ] AUatius à la ,

chrétiens par ordre de Maho- T^A^eCf'iQ AuPerpetuus Consensus, n'si-


met II. Ce prince donna des em- "^^^it parle que par conjecture du livre
cet Amyrutzes composa contre
plois considérables dans le sérail ^^
f , .le concile de rlorence mais dans les
,
:

a Amyrutzes et s entretenait additions il nous apprend qu'on lui


,

quelquefois sur les sciences et sur avait envo3'ë de Tile de Chio l'ou-
des matières de religion avec lui, même puis il dit que Doro-
Y^^^ ^«"embase
;

'*'"*=,'?^^'%\"? ^^
ou avec Mehemet-fceg {c). De la JT ' ,

j ^ Ail ,- ^, -
lait connaître (*) la condition de cet
manière dont Allatius s est expri- homme , cujusnnm condainnis uir
mé on prendrait ce philosophe
, i^te fuerit. Il rapporte le passage de

pour le protovestiaire de l'empe- Doï'"*liee en grec et en latin. Le grec


P^^te que Mahomet lit embarquer
reur de Trébizonde (A). N'ou-
,,. , T P""'^ Constantinople 1 empereur Da-
qu »iArny-
.

bhons point de dire vid , et quelques autres personnes et ,

rutzes ne commença point à être entre autres tôv ^iKÔo-o<^oy 'Afxufo

estimé des princes lorsque l'em- '^°'' 'rf'»'^*^ sç-'ap'ov ,


philosophum.^niy-
- ~
d'rr -
1
e Trébizonde
•-
'1 •
-
A.-
"i»i rutzium prolnvestiarium.
vrotni'estiarium. C'est ainsi
^^'^^i-^insi
'- -
1 honora
onora qu'AHatius
,„.'Anat;..e
qu Allatius f..o i
traduit*
et ponctue, il ne r
de son affection car 11 il
y avait ; faut donc point douter qu'il n'ait cru
long- temps qu'il s'était vu très- qu'Amyrutzes et le protovestiaire n'e'-
considéré à la cour de Constan- î-^^*:"* '
^^ '{"'Jl "^ lui ait attri
"^l"!""
i;,,«,o« Tl A,+ „ , J„-, „ ou^ l'i • suite dti passage de Dorothe'e,
fut un des principaux

tmople. Il
^^, y^^ ^^-^ ^J^^
p^ersonnage étaii
savans avec lesquels 1 empereur cousin germain de Machomet Ëassa
;
Jean Paléologue délibéra sur son qu'il avait trahi l'empereur David, et

voyage d'Italie {d) et il ac- qi''«'près la prise de Trébizonde, il


,
reçut de grands honneurs de son cou-
compagna cet empereur dans ce sin et du sultan Mahomet qu'il était
voyage (e) , comme il le raconte
;

ruse , grand , bien fait , bon tireur


d'arc et propre à toutes choses. Sa
(b) Léo Allatius
de Perp. Consensione ,
,

lib. ni, cap. III,


pag. gSS et iSyg. parenté avec Machomet était fondée
(c) Guiilot, Histoire de Mahomet II, lom. sur ce que sa mère était sœur de la
I pag-. (\!\\ ,et lom. II pag. i36.
, ,
mère de Machomet : ces deux soeurs
[d i'Histoire Polit, de Constantinople le étaient de Jagarus. Je n'ajoute
filles
nomme ai>ant Bessarion cl Gemiste. Kojez pas I>eaucoup de foi à ce discours :

Allât, de Perpétua Consens., pag. 883.


car ;e vois que M. Guillet en citant ,
(e) Ccl empereur arriva à Fcnisc , le?) de
fc.rier i '|38. (*) In Synopsl lîistoiiariira.
,

AMIMONIUS. 521
la TurcoGrœcia de Crusius dit que , impossible que le même Ammo-
le protovestiaire de Tempereur de nius ait abjuré la foi chrétienne
Trébizonde s'appelait George j
qu'il
et qu'il ait succédé à Aristarque
était d'une raine avantageuse , et
d'une si grande adresse à tirer de dans l'école d'Alexandrie avant ,

l'arc, qu'il y surpassait tous les Grecs l'empire d'Auguste. Voilà lesdeux
et tous les Turcs; qu'il était tils d'une choses que l'on trouve dans Sui-
ûUe d'un prince chrétien appelé la-
das sur le chapitre d'Ammonius.
grus qui avait marié son autre fille
,

en Servie où elle eut un fils qui fut


,
Aurait-il été assez ignorant pour
le renégat Machmut (i). Très-volon- les croire compatibles ? Je n'y
tiers je mettrais une virgule dans le
vois point d'apparence. Quel-
p,assage de Dorothée, aprèsA^ufoi/T^nv,
afin de faire deux personnes de ce
qu'un (c) a conjecturé qu'il faut
philosophe et du protovestiaire, qu'Al- supposer une lacune dans ce pas-
latius confond ensemble. sage {d) , et que Suidas pourrait
(i) Guillet , Histoir. de Mahomet II, loin. I, bien avoir parlé de l'Ammonius
pas- 4-'9- d'Athénée dans cette lacune. Si
celaétaitvéritable,ilfaudraitdire
AMMIEN-MARCELLIN.
Voyez Marcellix. que le Traité des Sacrifices et des
Autels , ou celui des Courtisanes
AMMONIUS. Plusieurs écri- d'Athènes , ou tous les deux ont ,

vains ont porté ce nom. Athénée été écrits par un grammairien


cite deux ouvrages de très-diffé- qui fut successeur d'Aristarque.
rente nature , composés par un Le second Ammonius dont je veux
auteur qu'il appelle Ammomus. parler est un philosophe d'Egyp-
L'un traite des autels et des sa- te (e). Plutarque dont il avait ,

crifices (a) l'autre traite des été précepteur, fait souvent men-
;

courtisanes d'Athènes (A). Il ne tion de lui. \ oyez en particulier


dit point jîositivement que ces la page 70 et la SSS*^^ de ses OEu-
deux livres soient du même Am- vres morales, à l'édition de Franc-
raonius ; mais d'autre côté il ne fort en 1620. Mais on avance
,

dit rien qui insinue le contraire ; très-faussement dans le Moréri ,


et quant au reste il ne touche qu'il en a parlé avec éloge sur- ,

rien ni sur la patrie ni sur le siè- tout sur lajin de la Vie d'Aris-
cle de cet auteur. On sait par tote (C). M. Moréri n'est pas plus
ime autre voie la patrie de celui heureux par rapport à Ammo-
qui a composé l'ouvrage des au- nius, fils d'Herméas (D), auquel il
tels et des sacrifices (B). 11 était donne entre autres livres un , ,

de Lampria (b). Le Suidas que ouvrage composé sous l'empire


nous avons aujourd'hui ne parle de i'^alentinien. Cet Ammonius
que d'Ammonius Saccas mais il était fils et frère de philosophe ;

ne faut point douter que le vé- qu'il a


{f). Les savans croient
ritable Suidas n'ait fait mention
d'un Ammonius différent de ce- (c) Jousius, de Scriplor. Hist. Philos. ,

j>ag. 169 et dans l'Index.


,

lui-là ; car ce qu'on trouve dans


{d) Gesner le cite dans sa Bibliothèque ,

sou Dictionnaire nepeut pas avoir sans faire paraître (ju^il en ait senti l'absur-
été dit d'un seul homme. Il est dité.
((' Euaapius , Procemio Vitar. Sophist.
(al Atlieu., lib. XI pag. 476.
,
(^f) Suidas, in 'Ecfjiiixç. Voyez ci-dcssouS
(p) C'était une \>illc de VAUique. l'aiti.'.:- IlEnjIlAS.
,

522 AMMO NIUS.


fleuri sous l'empire d'Anastase parler était un poète qui vivait
au commencement du VF. siè- au V^. siècle. Il composa un poè-
cle et que c'est lui qui a com- me sur la guerre qu'on avait
,

posé les Commentaires que nous faite à Gainas roi des Goths et , ;

avons sous le nom d'Ammonius l'ayant récité devant l'empereur


sur quelques Traités d'Aristote, Théodose le jeune, il en fut fort
et en particulier sur le livre de applaudi faut mettre dans
(o). Il
Jnterpretatione (g). L'auteur de des articles séparés , non-seule-
ce dernier Commentaire dit, dès ment quelques luodernes qui ont
l'entrée qu'il a été disciple de
,
eu le nom d'Ammonius mais ,

Pi'oclus. C'est à lui que quelques- aussi un ancien philosophe qui


uns attribuent cette f^ie d'Aris" lui a donné plus d'éclat que tous
tote qui court sous le nom d'Am- les autres.
m^onius (h). C'est lui sans doute (0) Socrates, Histor. Ecclesiast., lib. VI ,
qui a été réfuté par Zacharie de cap. VI, et ex eo INicephorus, lib. XIII, cap»
VI.
Mitylène. Voyez la remarque (H)
de l'article suivant. C'est de lui (A) On a , sous le nom d'un Am-
aussi que l'on entend (/) un pas- monius un Traité des courtisanes
,

d Athènes'\ (1). Ceux qui dans ces ,


sage de Photius oii il est parlé ,
derniers temps ont fait des livres in-
,

d'un Ammonius qui se plaisait ex- Putanisme de Rome , ou de


titules le
trêmement à expliquer les vieux quelque autre grande ville n'ont pas ,

ëte des auteurs originaux. L'antiquité


poètes et à faire des remarques
avait vu quantité d'ouvrages de cette
critiques sur la langue grecque nature qui heureusement sont de-
,

{k). Cela fait croire à quelques- meures par les chemins. 11 n'en est
uns qu'il lui faut attribuer le parvenu aucun jusqu'à nous.
Traité qu'on a de la Différence (B) On sait par une autre foi'e la
patrie de celui qui a composé i'oufrage
des mots grecs (Z) mais M. Mé- :
des Autels et des Sacrijices.^ On ne la
nage le donne à Hérennius Phi- sait point par la voie d'Harpocration ,
Ion (m). Le même Ammonius du- comme M. Lloyd l'assure mais par 5

quel Photius a dit ce qu'on vient la voie de celui qui a composé le livre
Vossius, et plu-
de rapporter avait un âne d'un de Differentiis ^ocmwi.
sieurs autres l'appellent Ammonius.
goût merveilleux pour la poésie Si M. Lloyd avait bien copié Vossius , ;

car il aimait mieux ne point tou- il n'aurait pas dit Ammonius histori-
cher à la nourriture qu'il avait de- CUS iV TU TTlfl ^CDfAWV Hetl ât/JTICDV citOtUr
Harpocratione in 'A//st(^ôviov , uti et
vant lui, et souffrir la faim , que ab
in uoce "EiT-xâ-fo.. Ex quo etiam dis-
d'interrompre son attention à la cimus Lampriensem fuisse ut Gesne- ,

lecture d'un poème {n). Le troi- rus falsb Alexandrinum vocet. Voilà
sième Ammonius dont je veux de ces fautes d'abréviateur , dont je
parle souvent. Vossius après avoir
si ,

ig) Vossius, de Philosoph. Sectis , pag. 90 dit jusqu'au mot "Ea-X^f!*- t-Ç que je
et Il3. Labbe , de Script. Ecclesiast. , tom. viens de citer de Lloyd , ajoute h
TTCcircf) Tsp/ ùua-iùëv ab Ammonio lib. de
{h) Joasius , Hist. Pbilos. ,
pag. 3oo. Di^èr, Voc. in fia>/j.U.Ubi et A*^7rp(sz/ç
(i) Id. ibicl.
fuisse dicilurGesnerus falsb
, ut
(A-) Pliolii Biblioth., mon. 2,^2, p. io4o. alexandrinum (2). Parce que
l'oce.t
(/) JoDsius Hist. Philos. , pag. 3oo.
,
Lloyd n'a pas voulu rapporter tout le
(m) Menagius in Diogenem Laërtiiim , lib.
passage de Vossius , et qu'il en a sauté
II , nnm. 5.
(n) Pliolius , Biblioth. , niini. 2^2 , ex Da- (1) Atlien., lib. XIII, pag- 5G7.
uiascio ,
in Vitâ Isidori Pliilosophi. (2) Vossius, de Histor. Grœcis, pag. 5o2.
AMMONIUS. 523
une ligne il est tombe dans un grand après ^ car, s'il l'avait su, aurait-il
,

mensonge car il n'est pas vrai qu'Har- dit qii'Aramonius


j
disciple de Pro- ,

pocration nous apprenne que l'Ammo- clus fit un livre sous l'empire de ,

nius qu'il cite fût de Lampria. Si l'on y^alentinien? Aurait-il été un copiste
voulait sauter quelque chose c'est à si fidèle des erreurs du père Rapin (6)?
,

la dernière ligne que l'on devait s'a- 2°. Quelle manière de marquer les em-
dresser dans laquelle Vossius a
, dit pereurs? Ily en a eu trois de ce nom j
un mensonge. Gesner ne dit pas et c'est le premier que l'on entend ,

qu'Ammoniiis l'auteur du livre ,


des lorsqu'on dit tout court P'alentinien.
sacrifices fût Alexandrin. Il y a
,
un Ce premier Valentinien mourut l'an
troisième passage d'Harpocration (3) 875 jugez si le disciple de Procliis a

:

««(^Q Ammonius
^.\ notre
où A,»,™ ;.,,. „o» ^;f„' .' 4 .,.,,.'„,,,
est cité 'Ay.y.mvioç : py écrire sous cet empereur. 3". Si
iv TiTcLfrij TTift fia)y.oùi yfa.i^n tcluto. j M. lloréri avait entendu l'aUteur dont
Ammonius libre quarto de aris ista il se servait , je veux dire le père
scribit. C'est ainsi que le docte Maus- Labbe , il aurait appris qu'Ammo-
sac a corrigé le texte d'Barpocration : nius , disciple de Proclus et fils d'Her-
il met fiaijuéiv au lieu de K.âiy.001 , per- méas , a fleuri sous l'empereur Anas-
sonne qu'on sache n'ayant jamais tase , qui ne commença de régner que
dit que cet auteur ait fait un livre de plus de 35 ans après la mort de Va-
oppidis l'el pagis. M. de Valois ap- lentinien troisième. 4° Le père Labbe
prouve cette correction (4). On aurait a observé qu'il est souvent fait men-
pu soupçonner que puisque Ammonius tion d'un Ammonius dans les Chaîner
fit tm livre touchant les courtisanes des pères grecs sur l'Évangile de saint
d'Athènes , il en fit un aussi sur les Jean et sur d'autres livres de l'Ecri-
,

festins de débauche , T^pi kÛ/uchv et ; ture ; et il croit qu'Ammonius fils ,

ainsi il ne serait pas nécessaire de d'Herméas est différent de celui-là.


prétendre que selon la leçon ordi- , Au lieu de ces choses, M Moréri nous
naire d'Harpocration , le livre d'Am- conte que quelques auteurs attribuent
monius concernait ^"
bourgs ou les '
les '
à Ammonius fils d'Herméas TE'ipli-
, ,

peuples d'Attique cependant je ne : cation des pères grecs sur TEvaiigilc


trouve rien de plus vraisemblable que de saint-Jean.
la correction de Maussac. Elle a paru
telle à Vossius qui la débite comme (6) Proclus sous Julien; le second Ammonius,
son disciple , qui a si bien écrit sur le livre de
,

si elle venait de lui. M. de Valois cite sous Valenlinien.


l'interpre'talion d' ArisloLe ,

un passage du scoliaste d'Hermo- Rapin. Compar. de Plalon et d'Arislole p. Sgi. ,

gène , où l'auteur du livre des Autels


est appelé Ammonius Lamprien (5) AMMONIUS surnommé Soc- ,

(Ç.) On avance
très-faussement dans ,^. ^ ,^.
y^^ ^^^ .^^ ^^1^.
le mnreri , que Plutarque a parle , ^ /., , ,
^
ti
d' Ammonius ai^ec éloge a la fin de ,
bres philosophes de son temps. Il

la f^ie d'Aristote.'\ Cette Vie d'Aris- florissait vers le commencement


tote est une chimère. Il fallait dire du troisième siècle. Il était d'A-
Thémistocle , et non pas ristote. Or , A lexandrie et aj^ant sucé avec le
;
il est bien vrai que Plutarque , à la

lin de Vie de Thémistocle


la fait ,
lait la foi chrétienne , il y per-
rnention d'Ammonius mais il est très- sévéra jusqu'à la fin , comme ses
;

faux qu'il le loue il n'en dit là ni ouvrages le témoignaient. Eusè-


:

bien ni mal.
be , rapportant cela , accuse Por-
(D) Moréri n'est pas plus heureux
évidente
par rapport h Ammonius ,fils d'Her- phyre d'une fausseté
méas. ] Il s'y embarrasse dans trois (a), pour avoir dit qu'Amnionius
ou quatre grosses fautes pour le moins. abandonna le christianisme au-
1°. 11 ignore que Proclus a fleuri sous
quel on l'avait élevé , et passa
Théodose le jeune, et long -temps
dans la religion publique dèsque
(3) Au mol QoXoç. l'âge lui permit de philosopher
(4) Heur. Valesius , Nolis in Notas Maussaci
nU Harpocration, pcig. m. lib. VI, cap.
(ô) H. Valcs.us, ^^otis iu Notas Maussaci ad (a^ Euseb., Hist. Eccles. ,

Harpocrat. ,
pfij. m. XIX
524 AMMONIUS.
(B). Ce grand philosophe donna trompé lorsqu'on a dit qu'Am-
merveilleux éclat à l'école monius enseignait à ses disciples
d'Alexandrie, et mit sur un pied les mystères de l'Évangile sous
honorable la science dont il fai- le sceau du secret (Fj. 11 y a des
sait profession. Il la trouva mi- gens qui ont confondu ses ou-
sérablement dépravée par les vai- vrages de théologie avec ceux de
nes subtilités des disputeurs. On quelques autres auteurs (G) mais ;

a vu dans le christianisme ce enfin on a su rendre à chacun le


qu'ils sont capables de faire on sien. Il eut, entre autres disci-
;

l'a vu dis-je, par les controver- ples , Plotin et Origène. Il mou-


,

ses des thomistes et des scotistes, rut environ l'an 280 [b). Je crois
des réaux et des nominaux. Ils qu'on le doit distinguer du péri-
faisaient tous profession de sui- patéticien Ammomus (H)qui était,
vre Aristote , et néanmoins ils selon Philostrate plus savant , le
multiplièrent les disputes à l'in- homme de son siècle, et celui qui
fini. Quelle idée ne doit-on pas avait le plus de lecture.
donc se former des disputes qui J'ai trouvé une grosse faute
régnaient anciennement , lors- dans l'un des commentateurs de
que les philosophes , partagés en Eoëce. Il impute à notre Ammo-
plusieurs sectes sous difîerens nius d'avoir été le principal cor-
chefs , condamnaient les uns Pla- rupteur de la doctrine de Platon
ton , et les autres Aristote , etc. ? sur l'éternité du monde (I). Rien
C'était un chaos de chicaneries n'est plus faux que cela
qui déshonorait la profession. Le [b] Selon Cave, Histor. Litterar, , p. 72.
véritable moyen de réhabiliter
cette science était de bannir les Ammonius iu/rto/w/we Sarcas.]
(A) ,

Ammien Marcellin (i) et Suidas (2)


disputes inutiles et de s'attacher témoignent qu'il avait ce surnom. On
aux dogmes en quoi Platon et son croit assez commune'ment que de son
disciple s'étaient accordés. C'é- premier métier il était porteur de sacs,
et l'on se fonde sur le même Suidas.
taient sans doute les doctrines
Voici les paroles du docte Henri de
les plus certaines , et par consé-
Valois Saccas uidelur ex eo dictus
:

quent les plus importantes. Voi- Ammonius quod mercibus ex porta


,

là pourquoi Ammonius se fit un Alexandrino comportandis uictum sibi


devoir capital de concilier ces cjuœsifisset cujusmodi homines sac-
,

carios anliqui wocabant ut uidere est ,


deux chefs de secte (C) et d'é-
,
in codice Th. tit. de Saccariis portûs
claircir le malentendu sur lequel urhis Roniœ. Suidas, rixan-rvoç, in-
on bâtissait leurs prétendues op- quit, fAstQytrhç Afjijuaiv'iùu
' toS 7rp£)iv yi-
vo/ji.êvoii
(3). a-cLKX.o<pôpau
positions et l'onne saurait dire
(B) Porphyre dit faussement qu' Am-
;

la gloire qvi'il s'acquit par cette monius abandonna le christianisme...


manière de philosopher. On lui dès qu'il fut en âge de philosopher.']
donna l'éloge d'un inspiré d'un
,
Voyons les paroles originales "O te :

M^CtTO
homme enseigné de Dieu (D) ,
Ttjl/

iilbuç
(^povaiv KO.)
TTpOÇ TilV
TtiÇ

KOLTO.
<^lKOiTO<^la.ç

vÔ//Ot/Ç •TTOMTêfCtH
,

d'un homme qu'un instinct cé- pi-iTiC â.Ki'To (4). Simul atque per œta-
leste avait mis dans cette route.
(t) Amm. Marcellin. lib. XXII circafin.
M. Moréri et bien d'autres ont (2) Suidas in P.ftyhnÇ. '
, ,

ignoré le fondement de cette Ci Ilenr. Vales. in Ammian. Marcellin. lib. ,

XX II.
louange (E). On ue s'est pas moins (')) Porph. Itb. advcTSiis Oiristianos,
, m ,
AMMO^MUS. )25
iem sûpere potitit, philosophiœ li-
et philosophique pénétra le fond des
, il

nien attingere ,
stallni ad vivendi ra- deux sectes et les accorda enseml)le,
,

tionem legibus consent ieritem descii'U. et donna à ses auditeurs un système


Porphyre, en disant cela, était animé de philosophie affranchi des brouil-
de l'esprit dont j'ai fait mention dans leries de la dispute "Eajç 'Ay//.a)v»ow :

la remarque (E) de l'article d'AsoL- Tot/ SêotTuTsixToi/* oÙToç


yà.f irfÛToç ivBou-
PHARAGE. a-n/,<ra.ç cTf oç to tÎÏç <^)l^clO•o<fl«lç ixnôivàl' ,
(C» // 4e Jît un deuoir de concilier KO.! TctÇ TÛJV TrOXXœv éi^CLÇ ÙTTipicet , tÀç
Platon et ylristole.'\ Nous apprenons TTKitçrjl bvêlJ'oÇ tSjWrtTdi^'nL 'Wf Oa-Tp(f 0//«V4tf,

cela d'Hiéroclès auteur d'un ouvrage


,
sîtTê xatxaiç Ta. ê^ctTêpot/ , KO.! Tuviiyityiv
sur la Providence dont on trouve , S/ç 'êVO. K^l TOV OLÙtOV VOl/V X.a.1 Àç"5t!7-('stç-OV

des extraits dans la Bibliothèque de T*iv <f iXoff-oi^ia.v TTttpa.iiS'otix.i TstJ-i Torc ctô-

Photius. 11 n'y avait selon cet au- , Tau yioùftf/.oiç, [/.eLhiça. Si tîuç Àplçoiç tSv
teur, que des gens dominés par l'en- O-ÙtSi <7-vyyiy':jvâ'ro6i TlKeeTivai x.a.i 'Viùiyi-
vie de contredire par la manie de ,
v«( K.dLi Toiç Usque
s^«ç aiTo t'jÔtcov (^).
disputer, ou par la force des préjugés ad difinilùs edoctum Ammonium, nie
et par les ténèbres de leur esprit, qui enim primus œstu quodam raplus ad
trouvassent de la discorde entre les philosophiœ feritalein multorumque ,

dogmes de Platon et ceux d'Aristote : opiniones, qui magnum dedccus phi-


Toi/ç /-tsv înovrctç 'ipiS'i koli ot/TOvoiot (r<fxç losophiœ altulerunt , coiitemncns ,
CtÛToÙc ;Tp03-StVo(,9sVTStÇ , TOyç «Tê KHI TTfd- utramque scctam probe calluit, et in
?.n^u mit ày-stÔi'i «TêiTouAajyJvoî/ç (5). concordiam adduxit , et h conlentio-
-Alios sud sponte contendendi studio nibus liberam philosophiam tradidit
nique wesanice sese addicentes , alios omnibus suis auditoribus , et maxime
prœoccupatd opinione atque iinperitid doctissimis œqualibus suis Plotino et
subactos. De ces deux sortes de dispu- Origeni et successoribus.
teurs , la première avait été fort nom- (Ej Moréri et bien d'autres ont Igno-
breuse avant que les lumières d'Am- ré le fondement de cette louange.} Am-
monius vinssent éclairer le monde :
monius, selon M. Moréri , « s'attacha
Animonii aliquando sapientia orbi il- » plus particulièrement à la divine
luxit quem etiam divinitùs edoctum
,
)) philosophie de Jésus-Christ. 11 y ac-
appellari prœdicat. Hune enim uete- )) quiten effet une telle estime, qu'on
rum philosophorum opinionibus per- » le regarda comme un homme qui
purgatis , et resectis quœ utrimque » avait été particulièrement instruit
excrei^erant nugis, in prœcipuis qui- M de Dieu et on lui donna pour cette
,

busqué et maxime necessariis dogma- » raison le nom de Théodidacte. » Il


tlbus concordem esse Platonis et Aris- se trompe je ne veux point contester
:

totelissentenliam demonstrdsse (6). à Ammonius son savoir théologique :


(D) On lui donna l'éloge d'un inspi- il en aura tant qu'on voudra ; mais
ré , d'un homme enseigné de Dieu.'} sûrement ce n'est point par cet en-
Nous venons de rapporter un passage droit qu'il acquit l'éloge de Théodi-
d'Hiéroclès où se trouvent ces paroles: dacte. 11 l'acquit par ses leçons de
CV KSLl BioJiS'a.K'TO}! iTnKXKil^a.^ ÙfÀ.VH , philosophie, qui ne parlaient que de
quem etiam divinitùs edoctum appel- Platon et d'Aristote , et nullement de
lari prœdicat. En voici un autre où ce Jésus-Christ et de l'Evangile. Ses audi-
même auteur raconte que les disciples teurs étaient partagés j les uns profes-
de Platon et ceux d'Aristote se plai- saient le paganisme , les autres le
saient tellement à immortaliser leurs christianisme il fallait donc qu'il
:

querelles, qu'ils corrompaient le texte laissât à part les matières de religion ,


de ces deux chefs de parti, afin de et principalement celles de piété. Hié-
montrer plus facilement que l'un était roclès, qui était un philosophe païen,
opposé à l'autre Ce désordre dura , aurait-il parlé comme il a fait si la
poursuit-il jusqu'au temps d'Ammo-
, science de l'Évangile avait procuré à
nius le disciple du grand Dieu car,
, 5 Ammonius l'éloge dont il s'agit? Je
enlevé par enthousiasme vers la vérité croirais sans peine qu'Ammonius ne
passait point pour chrétien parmi les
avud Euseb. Hist. Ecclesiast. lib. VI, cap.
païens , et que c'est la raison qui a mu
,

XI \
(5) Photius, Bibliott. num. 2i4 pig- , , Sijg.

ifi) Hierocles apud Photium ibidem. , (9) Ibidem , num. aSi, pag- i3Si.
.

526 AMMONIUS.
Porphyre à débiterqu'Amraonius était vi'û) (9). Ciim uerb Erennius et Orige-

sorti du christianisme dès qu'il avait nés et Plotinus olim inter se consti-
pu manier la philosophie. 11 était con- tuissenl ne Ammonii dogmata ede-
nu pour chrétien parmi ses frères, et rent quœ audila ab eo tanquam in
,

il témoigna sa foi par des écrits qui primis purgata prœcipuè coniproba^'e-
apparemment ne furent guère connus rant; Plotinus quidem stetitpromissis,
aux païens. Plotin se serait-il attaché J'amiliariter quidem nonnuLlos exci-
pendant si long-temps à la discipline piens salutantes, instituta uerô Am-
d'Ammonius, s'il l'eût cru ennemi de monii sécréta inlegraque conseruans
la religion dominante ? Les chrétiens Erennius aulem primus pacta dissot-
n'étaient pas encore si considérés. uit , et Origenes anticipantem Eran-
(F) On s'est trompé en disant qu'il nium est deindè sequutus. Autre sujet
enseii^nait h ses disciples les mystères d'étonnement: les deux fautes du père
de Evangile sons te sceau du secret.']
l' Labbe se trouvent dans Luc d'HoI-
J'ai étéétonné de trouver ici le père stein (10).
Labbe en flagrant délit. Idem Porphy- (G) On a confondu ses ouvrages de
rius dit-il (8), in f^itd Plotini Pla-
, , théologie ai^ec ceux de quelques autres
tonicce sectœ philosophi , narrât Am- auteurs.'] Saint Jérôme met Ammonius
monium religionis christianœ arcana au nombre des écrivains ecclésiasti-
discipuUs suis sub silentii religione ques, et lui attribue, entre autres ou-
communicdsse et Hercnnium Orige-, , vrages, l'invention des canons évangé-
nem atque Plolinum obstrinxisse ;
, liques(ii). 11 ajoute qu'Eusèbe s'est
cùmque Herennius primus eam fregis- servi de ce modèle en faisant un pa-
set , nec Origenetn nec Plotinum pro- reil ouvrage. Si cela était vrai , Eu-
missis stetisse. Il y a là deux très- sèbe serait un grand fourbe, puisque,
grandes fautes premièrement il: , dans une lettre (12) où il explique la
n'est pas vrai qu'Ammonius ait fait nature et les usages de ses dix canons
jurer ses disciples qu'ils ne communi- sur la concorde des Évangiles, il as-
queraient à personne ce qu'ils appren- sure qu'il les a inventés à l'occasion
draient de lui. En second lieu, il est d'un ouvrage d'Ammonius. Cet ou-
faux que Porphyre parle d'autre chose vrage est intitulé Manotessaron , ou
que des dogmes de philosophie. Tout Dialessaron. Voici comment il diffère
ce qu'il dit se peut réduiie à ceci. des canons évangéliques. Ces canons
Erennius, Origène et Plotin étaient ne sont que des indices des endroits
convenus de ne point rendre publi- des Et^angiles qui sont contenus dans
»[ues les choses qu'ils avaient ouï dire un deux trois ou quatre éuangélis-
, ,

à Ammonius et qui leur avaient paru


, tes, au lieu que l'Harmonie ou la Con-
d'un travail exquis et d'un raffinement corde d'Ammonius ( c'est la même
singulier. Plotin garda sa parole ; chose que le Dialessaron, ou Monotes-
mais Erennius, n'ayant pas gardé la saron) contenait le texte entier des
sienne fut bientôt imité par Origène.
, quatre éwangélistes dont Eusèbe s'était
Ce n'est pas ici le lieu de montrer que serui pour J'aire ses canons qui se ,

cet Origène n'est pas celui qui a tant rapportaient à cette Concorde et qui ,

écrit et tant allégori«é l'Ecriture ; en étaient comme la table (i3). C'est


mais, comme la plupart de mes lec- donc une faute que de dire, comme
teurs seront hors d'état d'avoir un Plo- fait M. Moréri, que les Canons Evan-
tin à consulter, je rapporte ici ses pro- géliques et l'Harmonie de l'Évangile
pres paroles 'E/iêwiço «Ts no.) 'ilpiyhti
: sont la même chose. Victor, évêque
KCll nXCDTfVO) O-UvÔMKÛIV ^ê'VOVt/IWV /unSh]/
(g) Porphyriiis , ira Vitâ Plotini.
iK.KctKt/Tr'Titv Tû)v AfAumviou Soy/ut-oLTrev oi
(10) Lucas Holslen. de Vitâ et Scriptis Por-
«f» êv Tctiç a.xpciat3-j3-iv ttùroiç à,tiKi>ixBa.p~ phyrii , pag. 28.
TO , ifAiVi KCLI n^œTIVOÇ, iTUVIJÙ't fJ.'iV TKTt (11) Hieronym.de Scriptor. Ecclesiast. , cap.
TffiV TrpOTIOVTCeV TUpCOV es à.vîy.TTVÇ'CL T* LV.
(12) Ad Carpianuin -
elle est imprimée avec
TTcLpa. Toû 'AfAfxùùvioii iiyixa.Tc».. 'Eptvvtof les dix canons de Consonaaliâ quatuor Evange-
«Tê TTfûû'vou Tstç 0-i/vâtixàç TOtpa.Ê'âvTOÇ liorum, à la télé du Nouveau Testament ^tcc de
,
ri/ll'vévitÇ jMêV «KOXO^/Ssi TÇO CfÔsiïrstVTf 'Ef êV- Foberl Etienne , édition de Paris , en i55o.
Voyez lepère Labbe, de Script. Eccles., tom. I .

pag. 3o8 , et pag. 58.


(8) Labbe, de Script. Ecclesiastie. iom. I (i3) Du Pin, Bibliotfa. des Auteurs Ecclé-
p. 58. siast. , tom. /, pag. 120 , édition d'.4mslerd.
AMMONIUS. 527
<ieCapoue Zacharic evcque de Chi y- gilcs insérée dans la Bibliothér[ue
-, , ,

sople; Trithème, et plusieurs moder- des Pères ou croyait-il qu'elle n'est ,

nes, s'appuyant sur l'autorité de saint pas d'Ammonius ? Hadrien de Valois ,


Jérôme et ne faisant aucune atten- n'ayant point fait de remarque sur
,

tion à la lettre d'Eusèbe que j'ai citée cela dans la seconde édition a fait ,
,

font Am
nonius l'inventeur des Ca- assez connaître sa conformité avec son
nons Evangéliques. Voici une autre frère.
confusion. 11 y a dans la Bibliothèque (H) Je crois qu'on le doit distinguer
des Pères deux Harmonies des quatre du peripatciicicn Ammonius.'] Un fort
Evangiles. L'une fut attribuée à Ta- savant homme ne penche pas à l'en
tien par Victor, évêque de Capoue distinguer. Hic esse i>idctur , dit-il ,

qui, vers l'an 545, la traduisit en la- (20) Ammonius peripateticus phi- ,

tin (i4), et y joignit une préface (i5). losophus queiii Tr'jKuyçcty./ut.-XTÛ'ra.Tov ,

De là est venu que l'autre Harmonie a fuisie sœculi sui testatur PhUnstialus
été donnée à Ammonius. Mais on a fait in Sophistœ Hipptdromi f^ilâ, quo
tout le contraire de ce qu'il fallait. qui plura legisset neminem se t^idisse.
L'Harmonie que l'évêque de Capoue
,
Mais, s'il avait pris garde aux paroles
a donnée à Tatien ne peut pas être de Longin rapportées dans la Vie de
,

de cet auteur , puisqu'elle contient Plotin, il n'aurait pas balancé à dis-


toutes les généalogies de Jésus-Christ tinguer ces deux philosophes l'un de
que les évaugélistes ont rapportées j l'autre. Longin remarque qu'il y a eu
au lieu que Tatien avait oté de son des philosophes qui ont composé des
Harmonie tous les passages des Evan- livres mais qu'il y en a eu d'autres
;

giles qui prouvent que Jésus-Christ est qui n'ont instruit que de vive voix. 11
issu de David (16). D'autre côté , en nomme quelques-uns de chacune
l'Harmonie qu'on attribue à Ammo- de ces deux espèces les uns sont pla- ;

nius est mutilée de ces passages (17). toniciens, les autres sont stoïciens ou
Sixte de Sienne George Ederus et plu- , péripatéticiens. la seconde Il met dans
sieurs autres, ont suivi l'erreur de classe Ammonius
Origène et il les et ,

Victor. Mais il y a plus de cinq cents donne pour des sectateurs de Platon.
ans que Zacharie , évèque de Chryso- 11 dit qu'il les a connus, et qu'ils ont
pie, a fait voir qu'Ammonius est l'au- surpassé en intelligence tous les phi-
teur de cette Harmonie (18). Baro- losophes de leur siècle "Oic >iy,iiç to :

niusa suivi ce sentiment. Remarquons TrkilçOV TOU /^pOVOÎ/ 7rfÔ5-ê4)0ITJ)5-a,y.5V , cL'I-

bien une chose dont le père Oudin «rpis-iv ot/x. akiyce Tûë]/ v-aJi êstfTouç tiç a-u-

nous avertit, c'est que l'Harmonie, vês-iv <r(êvï").)cot/î-i (21). Ç)uibuscum nos
qui est sous le nom d'Ammonius dans diù uersali sumus , finis projecto in-
la Bibliothèque des Pères imprimée , ten'allo non pari'o sui sœculi philoso-
l'an 1575, laquelle Harmonie a été plms intelligentiâ superantibus. Après
traduite en latin par Ottomarus Lus- cela il nomme quelques stoïciens qui
cinius, n'est ni ni de d'Ammonius, ont été aussi de cette seconde classe
Tatien (19). On
perdu l'ouvrage a de philosophes je veux dire de ceux :

d'Ammonius de Consensu Mnsis et qui n'ont point écrit ou qui ont peu
Jesu. Si l'on s'en rapporte à Henri écrit. Enlin il nomme deux péripaté-
de Valois, on a aussi perdu tous les ticiens de la même classe, qui sont
autres Hujus Animonii quod sciam
:
, , Ammonius qu'en et Ptolomée. 11 dit
hodiè nihil exstat, dit-il dans son Com- matière de philologie ils ont surpassé
mentaire sur le dernier chapitre du tous les savans de leur siècle il :

XXll*. livre d'Amraien Marcellin. Se dit cela principalement d'Ammonius :


souvenait-il de l'Harmonie des Évan- ' A/uy.civioç xa.1 nToX5//a(oç (fiXoXCiyeera.TOt
/JLly Tmv KH-V ix'JToÙç à./X(^(l> yiV<>jUt.iVOl ,
(i4) Bellarmin. de Script. Eccleslast. , pag.
226. Oudin , Supplein. de Scriplor. Ecclesiast. , KAI /U.SiKlç-SL o'Am^oivioç" (jÔ yttp (ÇIV oçn
pag. i5. t/iêlVû) y'iyoviv IIÇ TT'iWfJ.oAÙa.^ irxpiLTTKtl-
(i5) Labbe
de Script. Ecclesiast. pair- S?-
,
, <noç(22j. Ammonius atque Plolemœus,
(16) Eusèbe eC Tbéodoret l'assurent, f^ojez disciplinarum ambo projecto maxime
Labbc de Scriptor. Ecclcs., loin. I pag. 07.
, ,

(17J Cave, Hist. Litlerar. , pag. 72. (20) Hadr. Vale>iiis in Ammlau Marcellin. ,
(18^ Commentar. in eam Harmoniam apud lib.XXII , pag. 344 1 édition m- folio.
T^abbe de Script. Ecclesiast.
, ,
pag. r. (il) Loa^inas , apud Porpbyr. in Vitâ Plolia.

(19) Oudin , de Script. Ecclesiast- ,


pag- i5. (22) Idem , ibidem.
,

128 AMMONIUS.
omnium suo temporepleni, prœsertim seraient toujours coe'terneîs. Cet oir-
^mmonius nullus enim ad discipli-
:
vrage de Zacharie a été traduit de
naruui illius copiant propè accessisse grec en latin par Génebrard,et in-
fidelur. Voilà donc l'Anamoniiis dont séré dans la Bibliothèque des Pèrea
Philoslrate a parlé; il est donc très- (24). Possevin remarque que Canisius
diffërent de celui qui philosophait à censure Gesner , d'avoir dit que l'ou-
Alexandrie , et qui a été le maître de vrage de Zacharie de Mundi ceterni-
Plotin et d'Origène. Nous apprenons tate était différent de celui qui a pour
dans de Longin que ces péri-
la lettre titre Ammoniwi (îS). Cette censure
,
patéticiens si savans n'ont écrit que qui serait très-bien fondée à l'égard
des poèmes et des harangues. Ce grand de Simler, abréviateur de Gesner .

critique suppose qu'ils n'avaient point est injuste par rapport à Gesner
prétendu que ces ouvrages fussent même, qui a déclaré expressément
conservés; car, s'ils avaient eu ce qu'il lui semblait que le Dialogue in-
dessein , dit-il ils auraient écrit avec
, titulé Ainmonius ne diitërait point du
plus d'exactitude. Traité Je Rerum œlernitale. Je ne pas-
(I) On l'a accusé a tort d'être leprin serai point sous silence la surprise où
cipal comipteur de la doctrine; de Pla- j'ai étéen remarquant que l'on souf-
ton sur l'éternité du monde,] Afin frait au Vl*^. siècle qu'un philosophe
qu'on voie clairement toute la faute païen fût professeur dans Alexandrie, et
je rapporterai un peu au long les ter- qu'ildogmatisât hautement sur l'éter-
mes du commentateur lYulla autem : nité du monde, contre l'opinion des
Platonis sententia est quam fœdihs ,
chrétiens. Ilcachaitsipeu sa croyance,
corruperint et obstinatiùs defenderint
,
qu'il la soutenait publiquement dans
t'élèves Platonis interprètes seu quia : ses leçons, et l'onne pouvait pas igno-
eorum alii ita sentirent , seu ut cfiris- rer qu'il ne la persuadât à plusieurs
tianamjidem impugnarent. Eorum sii^- de ses disciples. L'un d'eux (26), étant
nifer Amnionius fuit, Jîdus alioquin devenu le principal professeur en mé-
ac illustris doctrince platonicœ asser- decine dans la même ville disputait ,

tor; queni Zacharias dialogo cui Am- avec chaleur pour le même sentiment.
monius titulus est confutni'it. Mox,
Tout cela paraît par le Traité de Za-
ejus discipuli , Plotinus passïni libris charie de ftlitylène.
suis ; et quod mirum est , ne à magis-
(24) Il ^sl dans le onzième volume de la Bi-
tro dissentiret fax illa fidei , (Jri- bliothèque des Pères, pag^, 33i
, et suiv. de l'édi-
genes;cujus errorem sanctus Methodius tion de Paris ^ en i644-
lib. TTift TON "j/ïvHTœv, Ut cst apud Pho- (20) Possevin. Appar. lom. Il pag 552. , ,

tium, redarguit (23). Vous voyez clai- C26) Il s'appelait Gessius. Voyez \a Biblio-
rement qu'il parle de l'Ammonius thèque des Pères lom. XI pag. 33g. , ,

qui a été le précepteur d'Origène. Se-


rait-il tombé dans cette bévue, s'il AMMONIUS
( A\DRÉ ) , natif
eût eu recours aux originaux et s'il de Lacques , alla chercher fortu-
,

n'eût point cité sur la foi d'autrui le ne en Angleterre , vers le com-


Traité de Zacharie ? Car, dés l'entrée
de ce Traité, nous apprenons que
mencement du XVF. siècle et ,

l'Ammonius contre qui on le com- s'y serait apparemment avancé ,


,

posa, vivait encore, et enseignait dans s'il eût vécu plus long-temps (A).
Alexandrie avec un grand faste, après Il cultivait les belles-lettres et la
avoir été à Athènes disciple de Pro-
poésie latine. C'est par ses vers
clus. L'auteur, je veux dire Zacharie
,

évéque de Mitylène a vécu au VF. latins qu'il mérite principale-


,

siècle; car il assista au concile de ment d'être mis au rana; des au-
Constantinople l'an 536. 11 est donc teurs (B). Il
,

faux qu'il ait réfuté le précepteur d'O-


y eut entre Erasme
et lui beaucoup d'amitié , et un
rigène. Mais il est vrai que le philo-
sophe Ammonius qu'il réfuta ensei- grand commerce de lettres. Am-
gnait que Dieu et le monde étaient et monius logea quelque temps chez
Thomas Morus (a) , et puis au
(23) Renatus Vailinus , Nol. ad lib. V. Boètii
de Consolât. Philosopb. ,
pag. 96. [a) Erasmi Epistgl. // lil/ri FUI, p. l^dii.
,.

A M MO NI US. 529
collège de Saint-Thomas {b) envoyer de
; car dit à Érasme fut de lui
il n'avait pas assez d'argent pour temps en temps à Cambridge, pro-
louer une maison et tenir ména- vision du meilleur vin (F). U y a
ge. Il témoignait à Érasme qu'il de l'hyperbole dans la lettre oiiil
se repentait d'avoir quitté Ro- lui marque qu'on brûlait tous les
me , peu content de jours tant d'hérétiques que cela
et qu'il était ,

l'état oii il se voyait en Angle- avait enchéri le bois (G).


terre (c). Les conseils qu'Érasme
(A) Use serait apparemment avancé
lui donna sont très-conformes
en .Angleterre, s'il eût fécupliis long-
aux manières frauduleuses dont temps.'] Ce ne sont pas mes conjectu-
il faut se servir pour se pousser res, c'est le sentiinenl d'Érasme Pe- :

dans le monde (C) : il


apud Gallns Faus-
faut croire riit , cUt-il (1), et
tiis, et apud Britannos Andréas Am-
qu'Érasme ne le faisait que pour monius quorum a ter diii regnai'it
,
plaisanter. Il fit des ïambes à sa Lutettœ aller ad swnniam dignita- ,

louange qui sont très-beaux lein emersurus erat si l'ita diuturnior ,


, ,
conligisset. 11 eu jugeait de la sorte ,
et qui témoignent qu'Ammonius
non-seulement lorsque la plaie était
avait mille perfections de corps l'raîche, c'est-à-dire, lorsque peu après
et d'esprit [d). Mais il ne faut la mort d' Ammonius l'afiliction le pous-
pas compter beaucoup sur les sait à le louer mais aussi lorsqu'au j

éloges poétiques la prose d'É- bon


:
nombre d annÛLS avait efl'acé les
premières impressions du regret et de
rasme établira plus solidement la douleur. Qu'ani mullos ccrivait- ,

dans nos remarques la gloire de il en raiinèe i524 (2) lue ex l'etere so-
son ami. La fortune diminua ses d.ililio desidfrn Primwn Andreani !

Ammonium Lucensem. Deum ininior-


rigueurs pour Ammonius il de- ;
talem quanta in^enii dcxleritnte
,
vint secrétaire de Henri VIII (e), quhui fideli memorid prœdituml Tiiin
et il eut même un caractère pu- animtis quam erat excelsus quhm ,

blic auprès de lui de la part de , alicnus a livore quhm aliénas a sordi- ,

bus ! Hune et suis dolibus et omni prin-


Léon X
(y). S'il ne fût pas mort
cipum applausu Jlirentem maximis ré-
avant l'âge de quarante ans il ,
bus destinatuvi, subila mors inleicepit
aurait pu monter davantage. Il natu niinorem annis quadraginta Cu' .

était à l'armée l'an 1 5 1 3 (^), lors- jus equidem decrssum non possurn non
dolere quolies in mentem venit quant
que les Anglais gagnèrent la ba- ,

mifii f'ueritjucunda ejus familiaritas


taille des Éperons et prirent Té-
(B) C'est par ses fers latins qu'il
,

rouenne et Tournai. Il ne man- mente principalement d'être mis au


qua pas de faire des vers sur ces rang des anteuis.l L'abrège de la Bi-
bliothèque de Gesuer nous donne ce
victoires et sur celle qu'ils rem-
catalogue des poésies d'Ammonius :
portèrent colore Jacques I\, roi Scotici ConJUciûs Historia , Lb. /;
d'Ecosse. Il mourut de la sueur BucoUca scu Eclo^œ lib. 1 ; de, ,

anglaise (D) , l'an i5i7 (E). L'un Rébus nihili, lib. I; Panegyricus qui-
dam lib. I ; Epigrammata, lib. I;
des principaux services qu'il ren- ,

Poëmatn diversa, lib. /. On cite Ba-


(6) Idem, Epistolâ XXIII , pag. 1^2^. Iffius. Ce qu'on nomme Panei:Yrtcus

(c) Idem, Epistolâ XXV, pag. l\2S Epist. ;


quidam est un poème sur les victoires
XI pag.
,
4l3. que les Anglais remportèrent Tan i5i3,
{d; Idem Epist. XXII pag. 422.
, , à la journée des Éperons à la prise de .

(«jB.ilaeus, ay^-ui/Simlerum, Epist. Gesneri. Tèrouenne à la prise de Tournai etc. ,


,

(f) Andréas AmmODius tiice .Sanctitatis


mpud Anglos Nuncias litleiis significabit. (1) Erasml EpistoU XXIV, lib. II, p. i33,
trasmus Epist. f'I libri II pag. 104. ,
scripla anno i5i8.

(gj Idem, Epist. XL Ubri yill p. 434- ,


(ï) /.iem, Epist. V , lit. XXIII, p. Uio-

TOJIE I. H
,

53o AMMONIUS.
Érasme donne son jugement sur ce (D) Il mourut de la sueur anglaise.^
poème dans une lettre ("3) qu'on a da- Consultez l'Histoire du divorce de
tée du jour de Saint-Thomas i5io. Henri VllI, composée par M. le Grand,
C'est une preuve incontestable qu'on a vous y trouverez ce que c'est que cette
quelquefois ajoute la date à ses lettres sorte de maladie. On la nommait « la
sans nulle attention on les a d'ail-
:
)) suée ou le sutin
,
parce qu'on mou-
)) rait en suant. Cette espèce de peste
leurs mal rangées. La réponse précède
quelquefois de plusieurs pages la let- 3) commença à se faire sentir pour la

tre qui est le sujet de la réponse (4). 3) première fois en i486. Auparavant,
(C) Les conseils qu' Erasme lui don- 3) on ne la connaissait point. Tous les
33 remèdes y étaient inutiles
na sont très-conformes aux manières et elle ,

frauduleuses dont ilfautse servir pour 3) emporta beaucoup de monde avant


se pousser dans le mortJe.]((N'ayez hon- » que les médecins sussent de quelle

w te de rien, lui dit-il; intriguez-vous 3) manière il la fallait traiter. C'était


3) dans les affaires de tout le monde
;
33 un fléau dont Dieu ne voulait d'a-
3) bord punir que les Anglais. En quel-
» Coudoyez un chacun,point du tout de quar-
33 que lieu qu'ils fussent, ils en étaient
- lier {5);
33 attaqués, sans que les étrangers avec

» débusquez qui vous pourrez ; re'- 3) qui ils vivaient en fussent incom-
» glez votre haine et votre amitié 3) modes (8). 33 Parmi les preuves que
j) sur votre profit ; ne donnez qu'à M. le Grand a produites (9), il y a des
)> ceux qui vous le rendront avec lettres de l'évêque de Bayonne am- ,

)) usure ; soyez complaisant envers bassadeur de France en Angleterre ,


» tout le monde en toutes choses ; qui parlent de ce mal. Anne deBoulen
3) ayez deux cordes à votre arc ; apos- en fut attaquée cet ambassadeur en :

» tez des gens qui vous recherchent fut attaqué aussi. Il y avait déjà quel-

M menacez de quitter, et préparez- que temps que ce mal tombait sur


)) vous au départ ; montrez des lettres d'autres que sur des Anglais j car no-
3) où l'on vous promette mille avanta- tre Italien Ammonius en était mort
» ges ailleurs. •» Principio perfrica l'an i5i7, nonobstant l'espérance qu'il
fronteni , ne quid usquam pudeat. avait eue de s'en préserver par sa gran-
Deindè omnibus omnium negotiis te de sobriété. Voiri ce que Thomas Mo-
misce protrude quemcunque potes
,
rus en écrivit à Erasme /n his c'est- : ,

cubito. Dfendnem nec anies nec ode- à-dire parmi le grand nombre de gens
ris ex animo sed omnia tuo com-
, qui étaient morts { qund tibi quoque
pendio metiare. Ad hune scopum om- dolori esse doleo ) Andréa nostro Ani-
nis uitœ ratio spectet. iVe quid des nisi monio in quo et litterœ et omnes boni
,

unde speres fœnus : assentare omnibus magnamfecêre jacturam. Is i'aldè sibi


omnia. At vulgaria sunt, inquis.
ista i^idebatur adi^ersiiscontagionem l'ictus
Age , quando ita i^is , accipe peculiare moderatione munitus qudfactum pu- :

consilium , sed heus in aurem. IVosli tai'it ut quiini in nullum penè incide-
,

T/iv BfiT«vviJcî)V i^rixoTUTrlcLv, hdc in tuum ret cujus non tnta familia laboraue-
bonum abutere. Duabus sedeto sellis. rat , neniinem adhuc è suis id nialuni
Suborna procos qui te am-
dii^ersos attigerit, id quodet mihi et multis prce-
biant. Minare etappara discessum. Os- tere'a jactawit non admodùm multis
tende litteras quibus magnis polUcitis horis antequam exstinclus est; nam hoc
ai'ocaris. Subducito te nunnunquani ,
sudore nemo nisi primo die périt. Ego
ut subtracta copia desiderium acuat(ô). uxorque ac liberi adhuc intacti reli- ,

Alciat se servait de cette ruse (7). qua familia tola rei'aluit. Hoc tibi af-
firmo miniis periculi in acie quant in
,
(3) C'est la XX'. du rill'. livre.
(4) Voye^ Varticle Carmilianus.
urbe esse (10).
(5) C'est un vers de Molière , dans son Re- mourut l'an iSi^. ] La lettre
(E) //
mercîment au roi. V^oici tout le passage :
de Thomas Morus dont je viens de ci-
Jelez-vousdans la foule, et tranctiez du notable;
Coudoyez un chacun , point iln tout de quartier
(8) Le Grand, du Divorce de Hen-
Histoir.
Pressez, poussez, faites le diable,
ri VIII , c)4 il cite Godewin.
ioin. /, pag. ;
Pour vous mettre le premier.
(9) Voyez tome de son Histoire du
le III'' .
(6) Erasmi Epist. XIII libri VIII , -p. ^14. Divorce de Henri VIII, pag. i37, i52.
(7) Vanei. la remarque (D) de Varticle Al- (10) Mori Epist. ir Ub. VII, inler Erat-
,

ciat. miaiias pag. i!86. ,


^

AMMONIUS. 53 1

ter un grand du 19
passaj;e , est datée ducem Jeserere noluerls {\f\). C'est ce
d'aoiU i52o. Il semble donc qu'Am- qu'Ammonius lui écrivit,
monius ne soit point mort l'an \^\']\ {^) Hy a de l'hyperbole dans ce
car quelle apparence que Morus ait qu'il a dit qu'on biûlail tous les jours
laissé passer trois années sans en rien tnnl d'hérétiques (*) , que cela at'ail
dire à Erasme? Je réponds que cette enchéri le bois. ] Ces gens-là n'étaient
ne balance point les lettres
difficulté ni de ces papistes ni de ces protestaiis
où Erasme même a parlé de la mort qui couraient également risque d'être
d'Am monius. 11 remarque dans la let- punis en Angleterre sons Henri VIII, de-
tre XXIV*. du 11*^. livre, et dans la puis (p^il eut renoncé à la primatie du
XX®. du IIF. livre, toutes deux datées pape. C'étaient d'autres gens, puisque
de l'an i5i8, que cette année-là fut la lettre qui fait mention de ces sup-
fatale aux hommes doctes, à Musurus, plices est datée du mois de novembre
à Paleottus , à Faustus Andrelinus , à i5i I. Les bûchers n'extirpaient point
Ammonius. Dans XXXl". lettre du la ces dévoyés. Lisez ceci Lignoruiu pre- :

III''. livre, datée du 9 de septembre liant auctujn esse non miror , jnulti
1017, il parle de la mort d'Ammonius quotidiè hœrelici holocuustum nohis
(n). Cette lettre est bien datée ^ car prœbent , plures tamen succrescunl.
Erasme y fait mention du départ du Quln eljraler ^erriianus niei Thoinœ,
roi d'Espagne comme d'une chose nou- stipes feriùs quant homo , sectatn ( si
velle. Or, on sait que ce monarque fit diis placet ) et ipss instiluit et discipu-
voile au commencement de septembre los habet (i5).
iSi^. Disons donc que Baleus se trom- Ci4) [ AmmoTiiiis , Kpist. ail Erasm. inter
pe d'un an lorsqu'il met la mort
, Erasmian.
] Epist. libri VIÎI. XL
d'Ammonius à l'année i5i8 (12). Eras- (*) C'étaient des reites des Wiclejîles Voyez
Burnet , Hist. de la Kéf. d'Anal. Rem. crit.
me a pu dire en 1 5 8 qu'on avait perdu
1
(i5) Ammonius, Epist. Fl'll libri VIII, in-
cette année-là plusieurs grands hom- ler Etasmianas , pat;. 410.
mes. L'une des lettres où il le dit est
du mois de mars: il entendait par cet/e AMMONIUS ( Livmus ) (a) se
année les dix ou douze mois précédens. distingua parmi chartreux tle les
Ceci se confirme par une lettre de Bom-
Flandre , non-seulement par le
basius («3), bien datée du 6 de dérem-
bre i5i7, où l'on trouve que Musurus caractère de dom procureur, dont
était mort a Rome pendant le dernier honore a Gand
„.,*
automne, „i.
et
n„i i..,.-
que Paleottus
1'
l'avait pré-
:« — il se Vit
. -

niais aussi par son savoir et


, sa patrie,
-, par
cédé de huit mois.
(F) // envoyait à Erasme a Cam- ,
sa piété {b). Érasme Testimait
bridge proiJLsion du meilleur uin. ]
,
beaucoup , et il paraît par deux

Les lettres réciproques de ces deux lettres (c) qu'il lui écrivit, qu'il
amis font souvent mention de l'envoi le tenait pour bien guéri despré-
du vin ; mais voici un endroit bien
.^^«^r.. „o„,^ »,o et des mauvaises 1passions
ii'ffés
propre a prouver qu 'c u.,v~ o
'
..
Erasme ne nais- j

sait pas cette liqueur, et qu'il aimait despersonnesdeson rang(A). Am-


mieux être dans un lieu pestiféré que mouius lui avait fait confidence
boire de l'eau Simid alque angUcum
:
^^^ chagrins qu'il endurait , et de
solumtetisi ubi locoriim. esses roi^are
, , ,".•/ ' ,.1 •. 1

cœpi, siquideru Cantabrt^iensempes- la résolution qu il avait prise de se

temfugere te scripsisti. Unus tandem soumettre à la dureté de sa condi-


Sixtinus mihi dixit te quideni Canta- tion. Il n'est pas malaisé de devi-
brigiani ob pestem reliquisse et con- ,
n^,- qu'il eût souhaité plus de loisir
cessissenescio quo , ubi ciiin uini penu-
riâlaborares, et eo carere grai^ius peste
pour cultiver sou esprit et pour
duceres, Cantabrigiam repetiisse atque
(a) C'est ainsi t/n'Èrasme le nomme. Va-
inibi te nunc esse, fortevi Bassarei O lèie André dit Lœvinus.
comniilitonem , qui in sununo pericuLo (b) Ammonius, vir eruditîone jiixlh
Livinus
ac pietale insignis. Erasmi Epistola XXIII
(îi) Amraonii inorlem aceihirsiini- fera. E ras-
libri XXriII, pag. 170^.
mi Epistola ,\ XXI libri III ,
;jrt^:,-. içjS.
(c) La XCIV. du XX". livre el la XX'.
(12J À^iid S mlerum , in Epitom. Gesaeri. ,

(i3J La XXII'. du II'. /are. du XXF'.


,

532 AMPHARÈS.
faire de bonnes éludes ses supé- quand il retoui'nait au temple,
:

rieurs ne s'accommodaient point Un jour en leramenantdu bain, ,

de cela ils aimaient mieux qu'il Arapharès mit la main sur lui
;

fût ignorant et qu'il s'attachât pour l'obliger à comparaître de-


,

aux observances extérieures de vaut les épliores et à leur rendre ,

l'institut. Il ne laissa pas de parve- compte de sa conduite. Il le fit en-


nir à la qualité d'auteur. On peut trer par force dans la prison les :

voir le titre de ses ouvrages dans éphores et leurs assesseurs s'y


Moréri mais il ne faut pas se fier transportèrent tout aussitôt pour
;

à la citation deVanderLinden(B). faire le procès au roi Il leur décla- .

ra qu'il n'avait eu autre dessein


(A) Érasme le tenait pour bien guéri
que de remettre les choses sur le
des préjugés et des passions des per- -. , _ ,
. .

sonnes de son rang.] Sans cela il n'eût pied queLycurgue les avait mises,
,

pas pris la liberté de lui dire qne l'en- et qu'il ne se repentirait jamais
nemi du genre humain avait eu part d'un si beau dessein. Là-dessus on
à Tinstitution des cloîtres; mais il au-
bien pu lui avouer que les i;^uo-
lecondamna à la mort et l'on or- ,
rait
rans y acquièrent pîiis de considéra- donna aux sergens de le conduire
tion en ëtal)lissant le vrai mérite dans au lieu du supplice {b). Les sergens
l'observation e?:acte du cérémoniel :
trouvèrent si étrange et si inouï
Quiim interdùni mtcuni rtpiilo Am- ,
que l'on mît les mains sur la per-
nioni charissime cnjusmodi ingénia ,

preniantur ac sepeliantur in islis ccre- sonne d'un roi qu'ils témoignè- ,

mnniis interdiini subit animum ogi-


, rent de l'aversion pour cet ordre
tatio fort assis luunana, istiusniodi fi- (c) il fallut queDemocharès, l'un
:

tœ ergaslula non sine instinctu salanœ


fuisse inducta.... ferè fit Ac ut quo des amis d'Ampharès fit lui- ,

quisquc indoctior stupidiorque est même cette fonction. Agésis—


hoc in isto l'itœ instituto pluris habea- trata, mèred'Agis accompagnée ,

tur , tunndus fîducid ceremoniarum , d'Archidamia sa mère , était ac-


et alieni spiritds iniquus œslimalor(\).
courue aux portes de la prison et
(B) // ne faut point se fier à la cita- ,

tion de Vander Linden. ] Cet auteur demandait qu'il fût permis à ce


n'a point fait la Bibliothèque Belgi- prince de plaider sa cause devant
que on l'a mis là pour Valère André.
:
le peuple. Cela fut cause que l'on
C'est la Bibliothèque des médecins
composée.
hâta l'exécution. Dès qu'Agis eut
qu'il a
XX libri XXV été étranglé, Ampharès vint as-
(i) Erasm. , Epist. , p. i36i.
surer Agésistrata, qu'on ne ferait
AMPHARLS , l'un des éphores point de mal à son fils , et qu'elle
de Lacédémone, fut le principal pouvait entrer pour le voir, si
instrument de la mort tragique elle le souhaitait. La même per-
du roi Agis. Nous avons dit ail-
mission fut accordée à la grand'-
leurs (a) , comment , après le
mère ainsi elles entrèrent toutes :

rétablissenrent de Léonidas son deux dans la prison. Ampharès


collègue ce prince se réfugia
,
{h) Il était dans la prison même, et s'ap-
dans un temple. Ampharès fut pelait Decas.
Un de ceux qui l'y visitèrent fa- (c) A/Toç-pê^io^êVot/c x.a.) <^iuyavTAç Ta
tîç ou di/MTOV tlÙSi VêV0j«/,l5-/^£V£)V jioL-
milièrement et qui lui tinrent ipyOV, ,
c-iKÎûùC <rai^a,T( Tctç ^^eipstç 7rpocr<fiîpitv.
compagnie , quand il sortait de Ave.rtimles se et refugienles facinus ut ne- ,

cet asile pour aller au bain , et fariinn et insoleiis ut corpori régis fjitis ad- ,

moi'cret manus. Plul.ircluis ,


in Agide ,
pag.
(a) Dans l'arlicle Afiis. Soi , 804.
, ,

AMPHIARAUS. ;33

fitd'abord pendre Arcliidamia ,


((u'il eu cxlrêmemcnt afflige et
ctail ,

qu'il haïssait Leonidas et Ampharés.


et puis fît entrer Agésistrata ou
On ne croyait pas que dejniis que les
l'exécution s'était faite. La pre- Doriens e'taient venus habiter au Pé-
mière chose , qui se présenta loponnèse, il se fût rien fait de plus
à la vue de cette dame, fut le atroce ni de plus abominable à Lace'-
corps mort de son fils étendu par
demone car les ennemis même ^

avaient beaucoup d'égard dans les ba-


terre , et celui de sa mère qui
tailles poiir la personne des rois de
était encore pendu. Elle aida les Sparte ils se de'tournaient par la ve- :

bourreaux à le dépendre , et re- néiation de leur majesté quand ils les ,

voyaient venir à eux ^ et de là vint


tendit auprès du corps d'Agis ; et
qu'en tant de bal ai lies que les Spar-
baisant sou fils , s'écria quil s'é- tiates avaient données aux autres
tait perdu , et quil les avait aï— peuples de la Grèce avant le règne de
tirées dans ce précipice par sa Più^ippc pèred'Alesundre-le-Grand, ,

7 j,j
trop srande debonnairete.
\
r
, Am-
il n'y eut (|u un seul roi de Sparte qui
,.{ n„
^
^ p ,
lut {tue (i). On n ' accordait
.,^

phares, a fouie de ces poroies , Messéniens qu'Aristodème eût oté la


i i .

pas aus
<

luidit que puisqu'elle approuvait vie à Théopovnpus on avouait seule- :

la conduite d'Agis, elle serait ment qu'il l'avait blessé. Agis est le
iÀ^ tout premier roi de Lacédémone (lui ait
'

4 .
traitée 4 t
comme 1lui. Aeesis-
A
K.. ,
^^^ "^i^ ^ mort dans la ville
•,, * ,•
prince„ . . -,

:
, j 1
trata , sans s étonner, tendit le qi,; ^vait eu un très-beau dessein et
cou au bourreau, pour être pen- très-digne de son pays dans un iige ,

due , et se contenta de dire qu'elle q"'i t'i'it que l'on excuse ceux qui f^nt
1 •. •. ^ ^1 . des fautes. Ses amis le blâmaient plus
souhaitait que toutes ces cho.es
j,,^,,^,^^ ^^e ,,3 ennemis ses amis, :

tournassent au bien et à 1 avan- dis-je, qui lui reprochaient d'avoir eu


tage de la patrie {d). Le peuple trop de bonté et trop de douceur, et
fut fort indigné d'une violence d'avoir sauvé Leonidas et de s'être
lie a d autres. Les paroles de sa mure
si extraordinaire il en murmura; :
sont remaraualiles "H /rcxxi! o-ê , as ts-i.
mais il n'en fut autre chose. On
vit alors la vérité d'une maxime à.TûùKio-i /xs9' tinSiv . Nimia tua te,Jiti

qui a lieu en cent sortes d'occa- modestia lenitas et humanilas no-


, , ,

biscum peididit. Voilà ce que nous ap-


sions On fait du bruit, et puis
:
prend Plutarque dans la \ ie d'Agis.
on se console. Rien ne poussa tant Je l'ai rapporté sans diminution et
impharès à ce crime que l'envie sans addition; mais j'y joins à prés
resent
cette remarque pareou-
qu'en par.-
c'tst ipi'en
c'est
de noint rendre ce qu'Agé-
le ne point ciu'Aeé- :

•. *,' i)i„f„., rant bien histoire, on trouverait ap-


sistrata ^ilui
- 1
'
avait prête, rlutar-
'

paremment plus de princes renversés


que , de qui j'emprunte cet arti- du trône parce qu'ils étaient trop
,

cle , nous apprend ce qui fut dit bons et trop faibles, que parce qu'ils
surle sujjplice du roi Agis (A). Je étaient trop méchans. Ceux-ci trouvent
plus de ressources dans leur propre
m'en vais le rapporter, comme je rac'chancelé contre les machinations
m'y suis engagé (e). de leurs ennemis, que ceux-là dans la
tm justice de leur cause et dans la fidélité
(d) Alôvov, i^ii , truvivîyKtti Tttwrit,
'XttÂp'TYi' Tanlum sint hac, inquit, ex iisu rei. de leurs peuples.. Voyez la remarque
publicaspartanœ. PIutarcli.!/i kgiàe,p.^!\. (F) de l'article d'ÉnouASD IV.
(e) Ci-dessus à lajin. de l'article Agis.
, (i) Savoir : CU'ombrotus à la bataille de
Leuclres.
(A) Plutarque nous apprend ce qui
fut dit sur le supplice qu'A nipharès fit AMPHIARAUS , l'un dc.^ plus
fniijfrir au rui yîgis. ] Ces trois exécu-
grands prophètes du paganisme ,
tions ne consternèrent pas tellement
était filsd'Oiclès etarrière-petit-
le peupU- , qu'il n'osât faire paraître ,
534 A M PHI ARAUS.
de Mélampus (A) qui avait
fiis ,
lui arriva le jour inêiue que l'ar-
reçu en don une partie du royau- mée s'approcha de Thèbes {f) se
me d'Argos pour avoir rendu ,
trompent : il ne mourut que le
un grand service aux femmes de jour de la retraite; et le siège avait
ce pays-là {a). Ce partage du duré quelque temps. Cette fu-
royaume fut une semence de neste aventure a servi de thème
discorde dont on remarqua les
, à quantité d'écrivains; d'oii il est
grands effets au temps d'Adraste, venu que les circonstances n'en
roi d'Argos qui se vit contraint ,
ont pas été rapportées uniformé-
d'abandonner ses états , ne se pou- ment. Il y a eu des réflexions
vant maintenir contre la faction assez mauvaises sur cette espèce
d'AmphiaraïiS {b). Celui-ci avait de mort (C). On a cru qu'Am-
faitmourirTalaiis, père d'Adras- phiaraïis sortit des enfers (D) , et
te , de la couronne
et s'était saisi l'on a marqué la scène de sa résur-
(c) On jiacifia cette querelle par le
. rection {g). Il fut mis au nom-
mariage d'Ampluaraiis avec Eri- bre des dieux on lui consacra :

phyle, sœur d'Adraste; de sorte des temples son oracle fut très-
:

que ce dernier fut rétabli. J'en célèbre (E) : les jeux qu'on in-
parle ailleurs {d) et cela sans ou- ;
stitua en son honneur {h) firent
blier les nouvelles brouilleries oii du bruit. On croit qu'il excella
Eripliyle qui fut choisie pour ar-
,
principalement à deviner par les
bitre, décida en faveur d'Adras- songes (F); mais il ne se borna
te, au préjudice de son mari. Le point à cela il fut l'inventeur
:

tour qu'elle fit à son époux pen- des divinations qu'on fait par le
dant les préparatifs de l'expédi- feu. Il conçut un ressentiment
tion deThèbes fut une vilaine ac- si vif contre sa femme qu'il or- ,

tion. Amphiaraiis , averti par son donna aux enfans qu'il avait eus
esprit prophétique qu'il périrait d'elle de la tuer dès que l'âge le ,

dans cette guerre , ne voulait pas leur permettrait {{). On lui a


y aller, et se cacha mais sa fem- : donné de grands éloges , et entre
me, gagnée par un présent, dé- autres celui-ci ,
qu'il travaillait à
couvrit oii il étai t (e). Il fallut donc être honnête homme et non j)as ,

que malgré , lui , il accompagnât à le paraître (G). Grand sujet à


les autres princes à l'expédition réflexions (H). Apoliodore , si je
de Thèbes. Elle fut très-malheu- ne me trompe qui l'ait, est le seul
reuse et il inséré dans le catalogue des Ar-
y périt d'une façon
,

étonnante, car la terre ayant été gonautes (k); car Apollonius, ni


entr'ouverte par un coup défen- Hyginus ni Valérius Flaccus
,
,

dre , il fut englouti dans cet ne l'ont point fait. On le compte


abîme avec son chariot (B).
, parmi les gens sages qui ont eu
Ceux qui disent que ce malheur
{f) Charles Etienne, et Lloyd dans leurs ,

(") ^ojez l'article r?c"MÉLAMPUS. Dictionnaires: Olivier sur Val. Max., lii>.
(ù) Od. IX Nemcor. p. 608.
Pindarus ,
P'JII vers lajîn et plusieurs autres.
,
,

(c) f^oyez le Commentaire de Benoît


sur (g) Voyez dans la citation (^5).
Pindare, là même pag. 608, 609. , (h) Vojez Benoît sur Pindare Ode VII ,

idj Dans la remarque (F) de l'article Olymp. pag. i[^3.


,
Adraste. {i) Cela Jiit exécuté par AlcmÉON, son^ls.
(e) Vojez d'A.ZcnioN ,^ls d'Am-
l'article Voyez son article.
phiaraiis, yk) Apollodorus, lib. I,pag. 53.
t ,

AMPHIARAUS. 535
le malheur d'être engagés à des chyle que Créthéus e'tait llls d'yole
,

entreprises dirigées par des étour- (7). Il était donc frère de Salmonée,
de Sisyphe etc. Avant qu'il épousât
,
dis (I). C'est sansdoute un sort Tyro sa nièce elle avait eu de Nep-
,

déplorable , et qui n'est que trop tune deux jumeaux Pélias et Néleiis ,

commun. La manière dont il (8;. Ileut d'elle trois fils ylvson, Amy- :

thaon et Phères (9). L'aîné fut père


consola une femme qui pleurait
de Jason. Consultez Apollodore , qui
la mort de son fils (R) demande vous apprendra qu'Amphiaraiis était
une note. Je voudrais savoir le parent de presque toutes les personnes
détail du procès que les partisans illustres de la Grèce.
(B) // fut englouti dans un aLînie,
firentà ses prêtres (L). J'ai mon-
ai^ec son chariot. ] Pindare et Apol-
tré ailleurs (/) la nullité d'un lodore sont de ceux qui disent qu'un
raisonnement par lequel on vou- caup de foudre entr'ouvrit la terre ,
lait prouver la certitude de ses et que ce fut un coup de grâce de Ju-
piter j car, sans cela, Amphiaraiis eût
prophéties. Il laissa bien des en-
eu la honte d'être tué par Péricly-
fans fM) dont l'un fut le fon- mène qui le poursuivait
,
:
,

dateur de Tibur en Italie. Pline


<r A^<^iàpMÏ
fait cette remarque , en rappor- <rXÎ3-iv KipaLuvû 7ra.y.Qnt.
tant des choses fort singulières Zêl/Ç Toè.V /SatâwÇ"êpVOV X^'''^"'-
KpI/^j,£v <r' i^a' ITTTrOlÇ
touchant la longue vie des arbres. ,

(Toc/fi Tlifix.Kvy.'iy^u TTf/v


(1) Dans la remarque (F) de l'article MÉ- ySto. TVTrîvTtt fj.a.'X^a.'và.i
LÀMFUS. 6f//tc)v <tiV/^i/vSî)//têv (10).
Amphiarao auletu.
(A) // était arrière-petit-fils de Mé- diffidilfulmine advers'as omnia violenta
lanipus. 3 Voici la généalogie d'Am- Jupiter lalo peciore ierram,
occulla'.'itque illum cuni eqitis ^
phiaraiis. Son père Oïciès était fils
hastd Periclvment priusquàni
a Antiphates , fils de Mélampus , fils terga percussus pugnacem ,

d'Amythaon, fils de Créthéus et de aniinutn pudejieret.


Tyro qui était fille de Salmonée qui
, ,

comptait Deucalion pour son bisaïeul Vous voyez là et dans un autre passa-
,

ge du même poète (1 i), qu'Amphiaraiis


paternel (i). C'est ce (jue vous trouve-
et son chariot tombent tout à la fois
rez dans Diodore de Sicile. Si vous
dans le précipice. C'est la tradition la
consultez Homère (2) , il ne vous mè-
plus commune (12); mais quelques-uns
nera que jusqu'à Mélampus père
ne laissèrent pas de dire qu'il tomba
,

d' Antiphates , père d'Oïclès , père


d'Amphiaraiis. Chacun de ces deux au- de son chariot pendant le combat
et qu'ensuite le chariot fut transporté
teurs donne Mélampus pour le bisaïeul
vide dans un autre lieu (i3). Ils se
d'Amphiaraiis ; mais il n'est que son
fondaient sur ce que le temple d'Am-
aïeul dans le scoliaste d'Eschyle , qui
phiaraiis était un peu éloigné d'un
range ainsi Àraphia-
les filiations :

certain village qui se nommait


raijs fils de Mélampus
d'Oïclès fils
,

fils d'Amythaon fils de Créthéus, fils


, ,
Harma , et qui ne portait ce nom
,

d\Eole fils d'Hellcn , fils de Jupiter qu'à cause de son chariot. Ils pré-
,
tendaient que le temple fut bâti où le
(3) Souvenons-nous qu'Hypermnestra
.

prophète mourut et que le village ,

(4), fille de Thestius (5), était la mère


d'Amphiaraiis et qu'il y a des auteurs
Harma fut bâti où le chariot fut
,
transporté (i4)- Pausanias lui donne
qui disent qu'il était fils d'Apollon (6;.
Notez qu'on trouve dans Apollodore , (-) Apollod. , lib. I, pag. 27, 43.
aussi-bien que dans le scoliaste d'Es- (8) Id. ibid.
(9) Id. ibid., pag. 45.
Ct) Tiré de Diodore de Sicile, ZiV. IV, ckap. (io Pindari Nemeor. Od. IX, pag.Git, 6iî.
I.XX, pag. 25r 258. , Vorei Apollodore, /iV. ///, pag. igS.
(2) Homerns, Odyss. , lib. XV, p. tfio, Ifii. ("11) Pind. Od. FI Oly.np. pa^. <|8. ,

(S) Scliol. ^scli. in Septem ad Thebas, vs. 5^5. («21 Voyez, Diodore de Sicile , /iV- IV, chofi.
(^) Pausan., lib. II, pag. 63. Lxviir
(5) Hygio , cap. LXX. (i3) Sirabo, lib. IX ,
pag. 2:8.
(6) /./. ibid. (i4) Id. Cbid.
,

536 AMPHIARAUS.
^e nom cle ville , et marque preci- //*vTt7ov , éVro^ ^r/^ôvr* tôv 'A^<fiat/i««v,

sèment qu'on la bâtit où Ton préten-


ce; <f>)o-< 2G<fiiK>.>iç

dait que la terre avait englouti Am- 'eJ^J^t^o f *y{(Vat 0»?ai('* xôv»ç,
phiaraiis et son chariot (i5). C était .
- .

fa prétention des Tanagriens ; car <ff.ce (22).

ceux de Thèbes indiquaient un autre


lieu situé sur le
,
grand chemin de Circa quem lociim oraculumfuit Ain-

Potnies à Thèbes et environné de phiaraï olïm cultum


,
iibi Jus^ientem , :

colonnes , et dont on contait deux


Aniphiaraùm ut ait Sop/iocles , ,

beaux miracles l'un que les oiseaux: u Thehanus hausil pulvis hialu prapele
, ,

• Arma et quadrigas absorbens siinul et vi-


ne se reposaient jamais sur ces co- rum. »
lonnes l'autre
;
qu'aucune bête ne ,

touchait à l'herbe qui croissait en Strabon veut prouver que l'oracle


cet endroit-là (i6). Etienne de By- d'Amphiaraiis, au territoire d'Orope
zance, faisant mention de la ville de au même lieu où ce devin était situé
Harma, dit une chosa entièrement fut englouti par la terre et il ap- ;

opposée à la tradition et à l'auteur porte en preuve deux vers de So-


,

même qu'il cite (17); car il assure phocle, qui témoignent que la terre
que cette ville fut ainsi nommée, se fendit dans le territoire de Thèbes ,
parce qu'on disait qu'Amphiaraùs pour engloutir Amphiaraiis et son ,

monté sur son chariot s'y retira et chariot. Saumaise critique cela avec
, ,

que les habitans ne voulurent pas le beaucoup de raison (aB). Isaac Vossius
livrer à ceux qui le poursuivaient a pris le parti de Strabon mais en 5 ,

(18). N'est-ce point


prétendre qu'il cette rencontre, il a fait voir qu'une
sauva sa vie, et démentir une infi- envie trop ardente de trouver des
nité d'auteurs, qui content qu'il fut fautes dans les écrits d'un adversaire
abîmé dans les entrailles de la terre ? est un guide dangereux. Desinat
Le grand Saumaise s'est imaginé qu'il qiioque mirari , dit-il ( 24 ) , quôd
manque deux ou trois mots à cet multi Ompuni urbem in rei^ione sire
article d'Etienne c'est à-dire , qu'a- : asro Thebano collocârint. Rectè enirn
prés avoir fait mention du chariot hoc ab illis factuvi ciiin Oropus non ,

d'Amphiaraiis on avait parlé de sui juris ied propria J'uerit Theba-


,

celui d'Adraste; de sorte qu'il faut norum. Hoc manifeste Dicœarchus


rapporter à ce dernier ce qui con- docet, « (fê ToXH Tiâv 'ClpuTrltev oiKUit
cerne le refus des habitans (19). Cette ©hCûjv sri En premier lieu la propo-
. ,

conjecture est ingénieuse , et on la sition de Dicéarque prise générale- ,

peut confirmer par un passage de ment, et pour tous les temps, n'est
Strabon, où il est dit que les habi- point vraie. Orope fut un long sujet

— —
tans de Harma, dans la Béotie, sau-
vèrent1 Adraste
• ^ .1\„
1_ après ^
que son -,i,„,.:^f
chariot
,
— de dispute entre les Athéniens et les
Xhébains. Ceux-là en acquirent enfin
eut été brisé en ce lieu-là (20). On ne pleinement la possession après que ,

peut point faire une semblable con- Phihppe de Macédoine eut pris la
jecture en faveur d'Eustathius. On ville de Thèbes (25). En second lieu,
doit dire sans hésiter, qu'il a écrit de ce qu'Orope apparteuait aux Thé-
(21) que celui que les habitans de bains, il ne s'ensuit pas qu'elle fût
Harma sauvèrent était Amphiaraiis, au territoire de Thèbes in agro ,

et non pas Adraste. Thebano. Un auteur, cité par Plu-


Notez que Strabon est tombé dans tarque , assure que la ville de Harma
une bévue que Saumaise n'a pas fut bâtie où se donna le combat entre
manqué de censurer 'EvTatt/ôçt (Ts toi/, : lesArgiens et les Thébains, et ou
K*/ TO 'A^^IIStfâêlOV Èç-i TET»jM>l/*SVOV TTOTê Amphiaraiis fut englouti (26). C'est
(22) Strabo, Ub. IX, pag. 275.
(i5) Pausan. lib.IX pag. 296.
(23) Salmas. Ejercit. Plin. in Solin., p. 167.
, ,

(16) Id. ibid. pag. 288.


(24; Isaac Vossiui in Pompon. Melam., p.
, i52.
(17) Il cite le IX^. livre de Pansanias. (25) Pausan. , lib. I , pag- 3i. ^orez
dans les
(18) Stepli. Byzantin, yoce Apy.a.. Notes de Pinedo sur Etienne de Byzance , au
(19) Fo/ei les Notes de Berkelius sur cet en- mot^f<i*7rÔç, quelques passages qui prouvent
droit de Steph. Byzantin. que cette ville appartenait aux Athéniens.
condilis Ur-
(20) Strabo , lib. IX , pag. 278. (26) Trisimuchus , lib- III de ,

(21) Eastalliius in Iliad., Ub. II, pag- 26G. bibus, opuA Plutarch. iv. PartiUglis pag. la'. ,
, 3
,

AMPRTARAUS. 537
une faute de géographie mais l>c;ui- dam conjectnrani {etciis aânotatoris
,

coup moins ritlicule (jue ce que conte propnnere per hune casiiui altudi à ,

le nit-me auteur, que le jour qui pré- paganis scriptoribus ad uiridiclam di


céda le combat, un aij^le enleva la vinam in sacerdotes hebrœi populi ,
lance dWmphiaraiis pendant que les Datamum nimirUm et Abiramum
généraux dînaient ensemble Tayant quns non riic rébus sacris miniilrantcs :

portée bien haut il la laissa re- Deus omnipntens coram onini illu
,

tomber elle se ticha dans la terre et gente wii'os ad injeros per hiatum terra:
: ,

Ae\ int un arbre. To (Ts tta-j sv £v 7 « Jâ<|)- subitum deje.ceril. Ei rei respondere
TJi iyîviTa. En terra injixa in lauruni nonnihil etiam posleriiis dicti woca-
estmutata (27). Voici des paroles du bulum ; facile enim ex Abirarao gen-

scoliaste de Stace qui ont été criti- ,


tilium dtUria Amphiaraum Jecisse ,
quées Civiias in illo l^co pott est
: quem , IsraèUld génie jani eo loco
condita, in quo hiatus terrœ Amphia- reniotd , quo loco ista absorptio acci-
raum recepU, quœ yimphinrma i'O- dent, consecrâsse postmodum, Satana
catur , ut Homerus ait , c/uôd illic instituente oraculum. El indè cultum
currus queni Grœci ôify.a. wocant déci- impii hominis aliorsiim longé latèque
dent, in quo etiam oraculum est propagatum (32).
quod grœcè Aniphiaraon t'ocatur. (C) ii y a eu des réflexions assez
Barfhius (28) prétend que ce sco- mauvaises sur cette espèce de mort.
liaste allègue mal à propos le témoi- On a cru que l'ordre de la nature y
gnage d'Homère, puisqu'on ne trouve avait été renversé cet ordre dis je , : ,

rien de semblable dans le livre de selon lequel les parties d'un composé
l'Odyssée où il est parlé d'Amphia- qui se dissipe doivent retourner cha-
raiis (39). Il ajoute, que peut-être le cune en son lieu: par exemple, quand
nom d'Homère est entre Jà par !a l'homme meurt son âme doit s'en- ,

faute des copistes, et que si l'on ne voler vers le ciel, d'où elle a été tirée,
suppose point cela il faut dire que et son corps pris de la terre, y doit
, ,

le scoliaste a fait un péché de mé- retourner. Amphiaraiis n'avait point


moire qui lui est assez familier, et à joui de ce bénétice; la terre l'avait
beaucoup d'autres f^el alium erf^b englouti en corps et en iàme elle ne
: :

auctorem nominat'it intiuso nunc Uo- s'était pas contentée de reprendre ce


Ttieri titulo Lutatius , i>el errorem er- qui lui appartenait, elle avait aussi
rai'it nec
insolituni, nec aliis
ipsi retenu ce qui ne lui appartenait pas.
paris momenti auctoribiis infrequen- Le devin Thiodaraas lui en fait une
tem ( 3o ). Cette critique n'est pas espèce de reproche
juste : il la fallait diriger ailleurs. 11 Liceat,precor, ord.nebM
...
tallait dire premièrement, que la ville "
Pugnaces ej/lare animas et reddere cœlo. ,

qui fut bâtie où Amphiaraiis périt iVc râpe tain subilis spiranlia. coipora bustis.
s appelait Uarma, et non Amphiarma.
Ne propera: veniemus enim qtto limite cuncU
Qud licet ire vid (33).
Secondement, qu'Homère s'est con-
tenté de la nommer, .sans faire au- Un commentateur dit là-dessus Ini- :

cune remarque étymologique "Oit quitas manijesla Telluri hic erpro-


ifjie^ âp//.at êVê//ovTO, quique circum bratur , qud animam. Auiphiaruï cuni
Uarma habitabant (Si). En troisième corpore egeril deorsiim (34J. Il venait
lieu ,
l'oracie de ce prophète n'é-
que de rapporter une doctrine d'Epi-
tait point à Harma. tharme qui est très-belle L'homme
,
:

Finissons cette remarque par un avait été fait par l'assemblage de deux
passage de Barfhius , qui nous ap- parties elles se séparent, et chacune
:

prendra qu'on prétend que les païens retourne d'où elle était l'enue , la terre
ont fait allusion à l'aventure de Coré a la terre , et l'esprit en haut il n'y a .

et d'Abiram Placet non plané absur-


: rien l'a de mau^'ais. Kct>,wç oùv E^ri-
X<t-fiy-^C C-U'»iKfl9», CfllS-i , X.SlI iTlSXfl'S)! ,

(27) Id. ibid. KoLi ÀTTtiKBi]/ oSiv nhbi TrÂKty, yx f/.iv ik


(28) Barthius in Sut. Theb. , Ub. VIII , vs.
tÛv
i07 , lom. II pag. 83i.
yxv , ;rviûfite(, Se àvaT»" ii X.a.\i7roi 5
,

(29) OJyss. XV, w. 245. (32)Bartli. in VU lib. Tbel>aid. Sutii , vs.


(30) Bartliius in Slatii Theb. , Ub. VIU , -84 ,
pag. '-3, lom. III.
tout. II , pag. 83i. '
(33;Siatius, Theb. lib. VIU, fs. 333.
i3j) Homer. lli»d. , Ub. II ,
vs. 49y. (34) Bartbius in Suiium, tom. III p. 8G2. ,
,

538 AMPHIARAUS.
tùéih. Prœclarè igitur Epiclmnnus ,
un })eu avant que d'être englouti ,
concretum inquit, fuit et discretuin
, rendit à Phœbus les enseignes pro-
est , reditquc undè i-'enerat , terra deor- phétiques , comme une chose qui ne
sitm , spiritus sursiim. Qidd ex hls pouvait pas être portée au royaume
omnibus iniquum est ? JVihiL (35). On de Plu ton :

trouve cette pensée dans les écrits de Àccipe commissum capiti decus, accipe laurus
plusieurs païens (36) et même d.ms , Quas Erebo dejerre nefas (4o).
les poésies de Lucrèce, comme je Tai
dit ailleurs (37). C'était pour le moins Ailleurs, il suppose que Phœbus avoue
connaître en gros la vérité : mais ceux que son prophète descendit dans les
qui s'imaginaient que l'âme d'Am- enfers avec toutes les enseignes de sa
pliiaraiis n'avait pas joui de la liberté charge :

de se réunir à son principe, se trom- , Utinam indulgere precanti


paient grossièrement. Quand même Fala darenl ! en ipse mei ( pudel ) irritut
elle n'aurait pas été immatérielle, arma
Cultorit, frondesque sacras , ad inania vidi
mais de la nature des astres, elle au- Tarlara , el in mernel versos descendere vul-
rait trouvé aisément une bonne issue tus (4i).
pour remonter. Les poètes qui dirent
qu'il vivait encore quand il arriva Barthius qui a relevé cette faute
,

dans les enfers, mettaient plus d'ob- observe qu'il y en a plusieurs do


stacles an retour de son esprit vers les même nature dans la Thébaïde de ce
régions célestes ^ car il semble qu'il poète Hoc genus plurlma conrd^'et
:

soit plus facile de gagner le haut, si Ttiagnanlmus hic unies et duodecint ,

l'on commence à y tendre un peu au tamen annorurti limani rejerre i'ult


dessous de la surface de la terre , que suani Thebaïdent (4^).
si l'on senfonce jusqu'au centre, (D; On a cru qu Amphiaraûs sortit
avant que de commencer son vol vers des enfers.'] Quelques auteurs aflectent
le ciel mais ces fantaisies poétiques
:
de dire qu'il disparut 'Ajw^iâ.pa.aç et :

sont trop éloignées du sérieux , pour ;t*V!)i/3->tç T«ç yviç îjUTriiTôov To X^'^y-'*-
i'iç

mériter que l'on s'y arrête , et je IJ.iTo. Tw ap^stTûç at^iîiVJK syîviTo (43).
crains que mes lecteurs ne trouvent Amphiar.ms wero déhiscente terrd ca-
mauvais que je copie ceci : dens in hiatum cum curru inconspi-
cuus euasit. ApoUodore ajoute cette
. . Eece
allé prœceps humut, ore profundo
DissilU inque vicein tiinuerunt sidéra , et
,
raison c'est que Jupiter lui donna
:

unibrœ. l'immortalité 'O é% a-ùt toi ci.pjua.Ti....


:

Illuin inger.s haurit specus , et transire pa-


i>ipù(p^ti x.aù Z«t/c 'à9âva.Tov ctoTov iTT^În-
rantes
Mergit equos , non arma manu, nonjrena re-
o-iv (44)- absnrptus est et posteà
^•s «^erô
misit : nunquàin visus : illuni enini Jupiter
Sicut eral, reclos defert in Tarlara currus (38). immortalitate donauit. Voilà qui peut
obliger les hébraïsans à dire, que les
A la vue des Parques il vivait en- ,
païens ont fait allusion à l'histoire
core elles ne rompirent le lil de sa
:
d'Enoch. Il y a d'autres auteurs qui
vie qu'après avoir eu bien peur de
ne biaisent point ils supposent :

voir ce prophète en chariot dans les


qu'Amphiaraiis mourut, et qu'il des-
Ça3's infernaux :
cendit actuellement au royaume de
Quin comin'us ipsa Pluton \ mais qu'ensuite il remonta
Falorum deprensa colus : visoque paventet
Augure , lune demiim rumpebanL slamina
aux régions supérieures. Ils indi-
Parcœ quaient même le iieu par où fut faite
(3g).
son ascension. C'était une fontaine ,
On trouvera moins étrange que j'ob- proche du temple que ceux d'Orope ''45)
serve la contradiction où ce poète lui bâtirent. Le culte de cette fontaine
s'est jeté. II suppose qu'Amphiaraiis, était singulier on n'y faisait point de
:

sacrifices j l'eau n'en était employée ,


OU) Plutarcli. de Consolât.
, pag. 110.
(36) yorec. Barlhius , qui en cUe plusieurs (4o) Id. ibid. , lib. vu, vs. 784.
dans son Commentaire sur Stace tom. II , p.
,
(40 Id. ibid. , Itb. IX, vs. 652.
2S4.
Dans remarque (E) de (42) Barth. in Statium , tom. III pag. 773.
(87) la l'article Pru- ,

dence. (43; Diotl. Sictilus, lib. IV .

(iS) Statiiis , Thebaïd.. lib. VU vs. 81G. (441 Apollocloni'i lib. III pag. iç)3.

nu ,
, ,

(3yj Id. ibid., lib. ,vs. XI. (4'i) Vdle silw'e entre V jtllique el la Be'otie»
AMPHIARAUS.
ni aux purifications , ni à se laver C'était lui donner beaucoup de reliefj
les mains seulf ment ceux qui £;ue'ris-
: car Ton était prévenu de cette opi-
saient d'une maladif par le moyen de nion qu'anciennement il n'y avait
,

roracle jetaient une pièce de monnaie que les personnes inspirées d'Apollon
d'or ou d'argent dans cette fontaine. qui répondissent de vive voix aux
°Eç-» cTs flfCDTr/oiç TTinyii TrKna-iov tov vxoû , consultans je veux dire en forme
,

«V ' hy.<^ia.^tt.rju xa,A.oi/9-iv , oùVe St/ovTeç d'oracle. Les autres devins ne s'oc-
ot/tTtV êç cii/Tiiv , où <r' iTTiKet^a-ptrlotç « X.h~ cupaient qu'à expliquer , ou les pré-
riSi Xf'*'"'^^' vo//i^ovTêc. Nôa-ou ifs «Kas-- sages des oiseaux et des victimes, ou
8Ù3->iç À^S'fi y.a.vTiùfj.dLTdçytvnfjii'iov , kcl- les songes. Mais quelque avantage
âsç-M^êV Àpyufoi tki^itveti x.a.1 ;^pï/î-iv S/T/- que cela donnât à notre Amphiaraiis
0-i)//OV êÇ T/IV OTH'JiJV TotUTM •} *p ÀVÈ?.9{?V sur ses confrères, on ne demeura
•riv 'A//t<f)âf5iov xé^oj/a-iv mJ"» 6êôv (4(»)- point persuadé que sa véritable fonc-
jFif etiam apuil Ompios jons teniplo tion dût être semblable à celle de la
proxintus qiiem Ampliinraï nuncu-
, divinité de Delphes ; car on ne le con-
panl ad quevi nequa diuinarn remj'a~
: sulta que pour recevoir en songe
ciunltipque aut ad
, lustrttndiini , aitt la réponse qu'il avait à faire. C'est une
nd manus lavandas aqiid ed uti jas
, marque que, pendant sa vie, il s'a-
putant : solùm ,
qui tiiorbo oraculi tno- donna principalement à l'explication
nilti lei^ati fueririt , signatum aurum des songes. Voilà , ce me semble, le
(irgentunwe more niajorum in fonteni précis de la narration de Pausanias
abjicmnl. Hinc enimjam deum Arn- (5i). Je ne trouve point que Pvomulus
phiaraum adscendisse tradiint. Notez Àmasaeus l'ait bien traduite, et j'ai-
que tout le monde ne croyait pas la merais mieux m'en fier à la version
résurrection d'Amphiaraiis, et qu'on de Vigénère quoi qu'elle ne soif pas
osait la nier en plein the'âtre j témoin assez exacte. La voici Jophon Cno- :

ce vers allégué par Cicéron sien, l'un des interpréteurs des oracles,
:

publia ceux d'Amphiaraiis en vers


Audisne hœc , Aivphiaraë sub terram ab-
dite (47) ? hexamètres ce qui attira tellement ;

les peuples, que tout soudain ils


y
(E) On lui consacra des temples accoururent de toutes parts. Car pas :

son oracle fut très-celèhre-'] Les habi- un des det'ins hors mis ceux qu'an- ,

tans d'Orope furent les premiers qui ciennement la J'ureurd' Apollon esmou-
déifièrent Amphiaraits. Ils lui bâti- uoit ne rendait les oracles ; mais ,

rent un temple à douze stades de leur estoient tous, ou interprètes de songes,


ville dans l'endroit où la terre s'en- ou jugeaient les choses advenir par le
,

tr'ouvrit et l'engloutit et lui et son fol des ojseaux ou par les entrailles
, ,

chariot (48)- Nous avons vu ci-dessus des Lestes sacrifiées. Au moyen de


(49) qu'il y avait divers sentimens quoy il semble qu' Amphiaraiis se soit
sur la véritable situation du lieu oià il principaltmnnt addonné a la prédic-
tomba dans un abîme. Quoi qu'il en tion par les songes. Ce qu'on collige
soit, toute la Grèce se conforma au de cecy ; qu'après qu'il evst esté déijié,
goût des Oropiens sur l'apothéose de il institua cette manière de devinemens.
ce prophète elle convint que c'était Et faut en premier lieu que ceux qui
:

au temple qu'ils lui bâtirent qu'il l'ont a L'oracle a lui soient bien et ,

fallait consulter l'oracle de ce nouveau deucinent purgez; laquelle purgation


dieu (5o). Pau«anias nous apprend ou netloyement consiste a sacrifier
qu'un Recueil d'oracles en vers hexa- comme il faut h ce dieu et accomplir ,

mètres contribua fort à donner aux les cérémonies requises tant envers lui
peuples une grande idée d'Ami>hia- que tous les autres dont les noms
raiis parce que l'auteur de ce Recueil sont là escrits. Cela fait, et ayant
,

y inséra la réponse que ce devin avait immolé un mouton , ils eslendcnt


donnée touchant la guerre de Thèbes. sa peau en terre , et s' endorment
dessus attendans l'esclaircis sèment ,

(46) Pausan. lib. I, pag. 33. ,


de leur fait qui leur doibt appa- ,

(47) Cicero, Tuscal. Quxslion. lib. II, cap.


roistre en songe ( Sa ). Philostrate
,

xxy.
(48) Paiisanias, lib. I , pag. 33- (51) Idem , ibidem.
(49) Dans la reman/ue (B). (52) Vigénère surl'Ampliiaraùs de Philosirate,
(50) Pansan. , Itb. I ,
pa^. 33. pag. 400 du /". tome.
,,

54o AMPHIARAUS.
va Jions apprendre quelques autres me'ment de celui d'Amphiaraiis (07) :

< ëreinonies que l'on observait en ce voilà donc un second témoin contre le
!icu-ià. Les dieux dit-il (53), sont héros de Philostrate. Disons en passant
,

coustumiers d'nctrojer les oracles a qu'il en fait mention dans un autre


ceux qui sont sobres. Car il se trouva lieu que son traducteur a perverti. Le ,

une fois en Gière un prophète appelle voici "H Tov 'A^<|)iotpeov tÔv crùv toiçctt- :

^mphiaraiis. J'estime (interrompt le TO. TOfç tvn 0/fé'a.ç ç^a.Ti'ja-a.a-t ptiâ. yiviS
rny ) que uous voulez dire celuy qui
J ut fils d'Ioclée et en s'en retournant Aut jiniphiaraiim qui cuni septem
,
,

de Thèbesjut englouty dedans la terre. quiadversiis Thebas bellum gesserunt,


Celui-là sans autre respondit Apol- Jèrtur Trojd capta unâ generatione
,

lonius lequel jusqu'au) ourd'huj rend fuisse posterior il fallait dire wrtor
, :

des oracles au territoire athénien et (58).^ ,

eni^oye a ceux qui l'en requièrent des Hérodote nous peut apprendre com-
,

songes sur ce qu'ils luy demandent. bien cet oracle était estimé car il dit j

Mais les près très du lieu enjoignent à que de tons ceux que Crœsus roi de ,

ceux qui viennent là se conseiller , de Lydie, fit consulter, il n'y eut que
s'abstenir un jour entier de toute celui-là et celui de Delphes qui firent
fiande et trois jours de fin; à celle de bonnes réponses, et qui recurent
,

Jin qu'ils puissent mieux en leur pen- des dons maf;nifi(jues de la part de ce
sées pures et nelt<]yéc.s concevoir et monarque (5q). Je m'étonne de ce
l'accueillir les raisons des choses qui qu'il observe que les dons envoyés
leur seront manifestées en songe. L'a par Crœsiis à l'oracle d'Amphiaraiis
oh si le l'in estoit un médicament furent mis au temple d'Apollon Ismé-
propre a dormir ce sage Amphiaraiis nien , dans la ville de Thèbes (60). ,

sans double l'auroit ordonne aux son- Pourquoi ne furent-ils pas consacrés
geurs ,et que remplis jusqu'au re- dans le temple même d'Amphiaraiis ?
,

gorger de mangeaille et de ce breu- Pourquoi au défaut de cela ne fu-


, , ,

l'age comme une bouteille, ils des- rent-ils pas portés dans toute autre
cendissent en la plus secrette partie du ville, plutôt qu'à Thèbes, dont les
temple où se rendaient de tels oracles. habitans avaient encouru une note
Prenez garde que Pliiloslrate assure désavantageuse par rapport à cet
qu'au temps d'ApoHonius l'oracle oracle ? Car il leur était défendu de
d'Amphiariiùs conservait encore sa s'endormir dans le temple d'Amphia-
réputation cependant Plutarque con- raiis et c'était le seul moyen de con-
:
;

fesse que tous les oracles de la Beotie sulter l'avenir en ce lieu-là. La raison
(54) entre lesquels il met celui-là
, pourquoi cette défense leur fut faite
,

avaient cesse (55). Ne faisons point était qu'Amphiaraiis ayant offert aux
d'incident sur ce qu'Apollonius met Thébains, ou de leur servir de devin,
cet oracle dans l'Attique et non pas ou d'être leur compagnon d'armes
,

dans la Beotie, comme Plutarque. Ils ils choisirent le dernier parti. Vous
parlent du niéme lieu mais comme trouvez toutes ces choses dans Héro-
5

ie territoire d'Orope fut un sujet de dote (61), et avec une distinction si


contestation entre les Athe'niens et les claire entre le temple d'Apollon Ismé-
Thébains ceux-là prétendant qu'il nien et celui d'Amphiaraiis
, qu'il
, ,

appartenait à la Beotie , et ceux-ci est fort étrange que Barthius ait pu


qu'il appartenait à l'Attique (56) de dire qu'ils n'étaient pas diflérens (63).
:

là est venu que certains auteurs ont Au reste, Hérodote raconte cela en
pu dire que le temple d'Amphiaraiis parlant d'un Européen qui fut em-
était dans la Beotie et les autres qu'il ployé par Mardonius pour consulter
,

était dans l'Attique. Clément d'A- les oracles de la Grèce. Il n'a point su
lexandrie reprochant aux païens la
,

cessation de leurs oracles parle nom- (57) Clemens Alexandrin. inProtreptico, ;>. g.
(58) Idem, Stromat.
,
,l,b. I, pag. 334 , CT-

(53) Pliilostrate , Vie d'Apollonius, liv. II , Bailhius sur Stace , tom. II pag. liS, adopte
,

chap. XI , pag. 476. Je me sers de la traduc- la faute du tiaducleur, et l'impute à Clément


tion de Vigénère. d'Alexandrie.
(54) Plularcb. de Oraciilor defeclu , p. 4 11. (Sg) Herodot., lib. I, cap. XLVI
et seqq.
(^5) // excepte celui de Lebadie. (60) Id. ibid. , cap. LU.
(5()) f^oyez Pausaiiias , lib. I , paj;. 33 ; et ((m) Idem, lib. VIII, cap. CXXXIV.
Slrabon, lib. IX, pag. 'i-<5. (62} Barthius in Statium, tom. II pag.
,
iZ'j.
,

AMPHIARAUS. 54 I
par quel songe Amphiaraiis fit con- avium Tireiias Thebanus inlerpreCa- ,

naître à ce gênerai du roi des Perses tionem ostentorumct somniorum Ain-


la mauvaise destinée qui rattcndalt. phictyon (70}. Stace ne parle \t<nnt
Plutarque était mieux instruit l;>- de cela , quoiqu'il se plaise à parltr
dessusj car il rapporte ce songe (63). souvent de Thabileté d'Amphiaraiis à
Il y a des auteurs qui disent qu'Am- deviner par plusieurs moyens :

phiaraiis s'apparai^sait aux consul-


Quis mihi siJereot lapsus, menlemque sinislri
tans 'A^^iioaoç //tsv •ya.f: x.a.1 Tpoi^avioc
:
Fulguris , aul cœsis saliat quud numen in
fv BoiccTist. K-xi ' Afji.^i?,oX,oç 6V AiTœAi'ot. exlis ,
Quaiidu lier, undè mora quœ sœfis uulit
Pl^ùnTfAùùJi-jTl Te TSLt CfstIVOVTStI' OWTOI é'i ,
arinis
7ra.tT<*.X^f THC <fia,TJt.TTOÎ/3-(V iùTTTif Qute pacem rnagis kora velu, quis
-J.»? jamomne
iç'ifii 5rêpiVo>.ot (64)- Je crois qu'ils futurutn
veulent dire qu'il se faisait voir en Proferel , aul cum quo volucres mea faUi lo-
quenlur (';i) ?
songe. Quoi c(u'ii en soit son oracle ,

n'était pas moins révère que celui de C'est ainsi qu'il exprime les regrets
Delphes, ou que celui de Dodone, ou de toute l'armée sur la mort de ce
que celui de Jupiter Hamraon ^ c'est devin. Il dit dans un autre lieu :
Valère Maxime qui le dit Eadem gens :

.... Quanùim subilà diversus ab illj


sumnio comensu ad ^4.inphiarauin de- Qui tripodas laurusque sequi , qui dodus in
corandum incnbuit lociini in qiio , omni
humatus est in formam condiiio- ,
Nube salutato volucrem cognoscere Phccbo
nemque lempli redigendo aUjue indè ,

oracula capi instiluendo.Oujus cineres Je laisse plusieurs autres passages de


idem honoris posiide/it , quod Py- la même force , et j'aime mieux ob-
quod aherio Dodonœ
thicce C'irlinœ, , server que ce poète n'insiste pas sur
quod Hnmmonis fond dalur (65). Ci- la principale propriété de ce devin :

céron n'en a pas dit tout-à-fait au- c'était de prédire par


les songes, com-
tant ; mais néanmoins
en a parlé il me je déjà dit f-S). Il fut le pre-
l'ai
avec éloge yintphiaraûni sic hono-
:
mier qui s'abstint des fèves comme
rafit Jama Grœciœ deus ut habe- ,
d'une chose qui nuisait à cette science
retur, atque ut ab ejus solo in quo ,
(71). UfcèToç ii drÎT^iTo nuxuav'AfjL-
est humatus, oracula peterenlur (66). <|>ia.:aoç, «TictTuv Si 'aviipmv f^a.iTiia.v
('j5).
Notez qu'il y avait à Corintlis un 11ne sera pas inutile d'indiquer ici de
temple d'Araphiaraiis (67); mais n'a- quelle manière il devint prophète. H
joutez point de foi, ni a Pompanius entra dans une maison aussi ignorant
Mêla (68), ni à Solin (69) qui disent , qu'un autre des choses futures mais ;
qu'il y en avait im à Rhamnus. Ils se lelendemain il en sortit bien capable
trompent. Il n'était point là mais ; de les prédire. Cette maison demeura
proche d'Orope, comme je l'aidéjà dit, fermée depuis ce temps-là et fut ap- ,
et comme on le peut prouver par Di- peUe fatidique. Elle avait, à l'égard
céarque, par Strabon, par Pausanias, tlesdivinations, la môme vertu que
etc. Voyez Isaac Vossius à la page ,
les poètes attribuaient au Parnasse à
i5i de son Commentaiie sur Pompo- l'égard des vers :
nius Mêla.
Tfpc in bicipiti soninidsse Parnafso
(F) // excella principalement a de- JUemini , ul repente sic poêla prodii-em
(76).
i'iner parles songes; mais il fut
l'ini'enteur des divinations qu'on J'ait On y devenait prophète dans une nuit
;
par le fou.'] A
l'égard de cette inven- et c'était alorsque l'on pouvait dire
tion je ne puis citer que ces paroles
,
que le bien venait en dormant. Vous
de Pline Aruspicium Dclphus (inve-
: verrez dans le passage que je vais ci-
nit), ignispicia Amphiaraiis, auspicia ter que ce changement d'Amphia-

(63) Plotarcb. de Oraciilorum defecta , pag. (70) Plin. ,;,*. Fil, cap. LVÎ.
(71) Statlus, Tlieb., lib. , l's. FUI
177,
(64) Arislides , Orat. in Asclepiadas , apud (72) Id. , ibid, lib. Fil, vs. 706.
Bartbîum in Statium , tom. II, pag. i38. Dans la remarque
(73) (E).
(65) Valer. Maximus , lib. yill , sub fin. (74 ^oyet la remarque (l) de l'article P»-
(66) Cicero, de Divinat. , lib. I , cap. XL. TBACORAS.
(6-) Paiisan. Ub II pag. G5.
, , (75 Geoponicor. lib. II apud Barlliioqt in
,

(68) Pomponius Mrla Ub. Il cap. lit. ,


,
Statium tom. II , pag. i3".
,

(og) Soliaua, cap. Kll. (76) Peraitij , in Prolojo us. a. ,


,
,

542 AMPHIARAUS.
raiis se fit à Phthie (97). "Oots-Ssv <r« l'avenir. Stace le nomme le roi pro-
phète :

Jamque erit ille aies , quo le quoque conscia


Vt/XTSt È'J/KitTAKOl/^Dâê/î fali
èxSàv , JtStl T>IV ,
Tempta cotant^ reddalque luus responsa sa-
MstVTêysa-ÔAf ToTe Trpûrov , ri^ 01 *Ma.- cerdos ,

o-ioj 4)«,s-iv , Mp|*TO' Tsa)Ç <f'« »v 'hy.^iu.- Talia f/ltidico peragunlsolennia Rf.oi(82).
oatoç Tcù ïxêivœv XÔ'J.û) , kTiûitmc Tê KSti ow
Pour ce qui est de l'adresse dans les
/xivTiC x*i TO oltcKf/.a, Àtto toutou cruy-
exercices où les Grecs se piquaient
KÎK\nça.i Tov TTAvro. ««Jji ;tpôvûv (78).
tant de remporter la victoire, il me
/rt posticaf'ori parle domus est , quant
sullira de remarquer que notre Am-
Phllasil Fatidlcamnuncupant. In eam
enim ingressus Amphiarnus ( queniad- phiaraùs gagna le prix de la course et
modiim ipsi narrant Pfdiasii) cùm celui du disque aux jeux Néniéens ,
noctem unam obdnrniisset staûm di- que les généraux célébrèrent pendant ,

qu'ils marchaient contre la ville de


vinare cœpit ciim antè indoctus plane
.

Thèbes (83), Prenez garde à ces paro-


fuisset; id cùm ita ei'enisset in reli- ,

quum omne tempus occlusœ illœ œdes les de Stésichore :

jfuerunt. ©piéc-xûjv fJih yùp 'A^^iiapstoç ,

(G) On
lui a donné.... entre autres "Ajcovt; (Tr vlK-cta-iv MiXia,yf)OÇ (84)-
éloges, qu'il travaillait à être honnête Saltu quidem me Amphiaraiis ,
Jaculo ver'o superat Meleager.
homme, et non pas à le paraître.']
Adraste, dans ses complaintes pour Quant aux
belles qualités de son âme ,
la mort d' Amphiaraûs déclara qu'il voyez le VIII*. livre de la Tbébaïde
,

avait perdu l'œil de son armée, un ,


et la tragédie d'Eschyle intitulée'ETT-
homme également propre à prophéti- na. i7r) ©n'^aç Septein contra Thebas , ,

ser et à se battre dont je citerai un passage dans la re-


:

marque (I) et trois beaux vers dans ,


Tloôs'a) çpxTtaiç
la remarque suivante. Voyez aussi les
'O<f9A>~fA0v i/uâiç â//<|iÔTfpcv , ,
éloges que l'on donne à sa modestie
MctvTf'v T ÀyaiBov
dans un fragment de l'empereur Ju-
Ksi/ J'oupl [/.ÔLfvaLO-bcu (79)-
lien (85).
Deiidero exercitùs
Oculum mei ulrumque, (H) Sa maxime de trai'ailler plus à
Valent bonum , éire honnête homme qu'à le paraître
El ad pugnanduin hastd.
est un grand sujet à réflexions.'] Rap-

En effet, ce n'était pas un devin qui portons d'abord le fait Aristide « ja- :

n'agît que de l'esprit : son bras était « mais pour honneur qu'on lui iîst ,

redoutable , et il excellait dans les


» ne s'esleva, ni pour rebut ou refus
» qu'il aussi ne s'abaissa
souflrist
exercices du corps. On prétend qu'il ,

» ni ne se troubla , ayant opinion


fit un carnage horrible des ennemis le
jour qu'il mourut :
3) qu'un bon citoyen se doit tousjours
» également tenir prest, et offrir corps
jirdel inexplelo .ttevi Mavorlis amore, w et esprit à servir la chose publique
El fruilur dexlrd aique anima Jlagranle
,
i> sans en espérer ou atendre aucun
superbit.
Hic hominum casus lenire et demere falis » loyer mercenaire, ni d'argent, ni
Jurafrequens, quantum subito diversus ab illo » d'honneur et de gloire. Et pourtant,
(80) » un jour que l'on prononçoit au théâ-
I nnumeram Jerro plebem ceu lelhifer annuf ,

jiul jubar adversi grave sideris immolât um- « tre certains vers de l'une des tragé-
brii )) dies d'jEschylus faits en la louange ,

Ipse suis (81). j) de l'ancien devin Amphiaraiis , dont


« la substance estoit (elle :

En un mot un prophète bra-


, c'était
ve , et tel que
devait être celui qui le » // ne veut point sembler juste, mais l'eslre,
n Aimant vertu en pensée profonde
joignait la royauté avec la science de ,

i> Dont nous voyons ordinairement naistre


n Sages conseils , o« tout le inonde abonde ;
(77) ^'''« '^" Péloponnèse.
(78) Pansanias lih. Il , pag. 56. ,
lib. VIII , vs. 206.
{Si) Id. ibid. ,

(79) PinHar. Od. f^/ Olympion. , l'S. sfi.


(83) ApoUddor. Bibliothec. , lih. III p. 189. ,

(80) Ce qui manque ici a été cité dans la re- (84) Aihen., lib. IF, cap. XXI, pap. 172,
viarque précédente ^ citation ("tï). (85) A
la page 3o3 des Olîuvres de Julien^
(Si) Stalius , Theb. ,
lib. Fil , vs. 703. édition de Leipsick , en j6g(î.
,, ,

AMPIIIARAUS. 543
y> tout le monde jeta incontinent les ne le seront point. Voici la morale
» yeux sur Aristiues , comme sur ce- de ce philosophe il répond à celle j

» lui à qui véritablement , plus qu'à objection « Quoi! celui à qui j'aurai
:

» nul autre appartenoit la louange )> lait du bien ne saura pas de qui il
» d'une si grande vertu car il n'es- : » l'aura reçu ? » Quid ergà! ille ne-
3» toit pas seulemeat ainsi ferme et sciet à quo acceperil ? Priniuin ntscitit
w roide pour résister à faveur et à si hoc ipium beneficii pars est ihindè :

}> grâce seulement, mais aussi à ire et multa aliaj'nciam, muUa tribuam, per
» à haine semblablement ; pour ce qiiœ intp-llti^al ctillius auclnrem. De-
)» que là où il estoit question de jus- nique ille ntscial ticccpisse se e^o :

» tice , amitié ne lui eust sceu rien sciam me dédisse. Parum est, inquis,
» faire pour ses amis , ni inimitié Parum si j'œnerare cogitas ; sed si
,

» contre ses ennemis (S6). "Voilà le dare quo génère accipienti maxime
plus bel éloge du monde. Ampbiaraiis prnfutunim erit, dahis ; contenlus eris
était digne d'admiration s'il le méri- te teste, y-llioqiiin non benefacere dé-
tait Aristide qui a paru le mériter,
:
,
lectât , sed videri benef'ecisse. ^nlo ,
est un homme incomparable. Voici inquis, sciât: debitoremquceris. P^olo
les paroles d'Eschyle à la louange utique sciât : quid, si illi util iiis est
d'Amphiaraiis , dans la tragédie mli- nescire ? si honestius, si gralius ? non
tulée"E7rT* ÎTri QôCctç, Septeiu contra in ntiam partent abibis ? f^'olo sciai :
Thebas , uers. 544 • it'a lu honnnem non seri'abis in tene-

bris? JVon nego quoties patitur res


Où yàLp iTox-siv Afiçoç , À\K sivai Ôèàsi. ,

percipiendum gaudium ex accipienlis


'Eç Àç Ta, xêJvst /Sx*ç-*v«i jiuuKiuy.dLTdi. uoluntate sin adjuuitri illum et opor-
;

Tfon enim opliinus videvi , sed esse volet. tet , et pudet ; si quod prœslamus of-
P rofundo mentis sulco fruens , J'endit nisi abscomlilur
, beneficium
Ex quo sana germinant consilia. inacla non milto. Quidni? ego illinon
Faisons quelques réflexions sur un sum indicaturus me dédisse : ciini inter

sujet qui en peut fournir une inûnité,


prima prœcepta ac ninximè neces-
que, si les païens n'ont saria sit ne unquant cxprnbrcm imo
et disons, i°. , ,

point pratiqué la véritable vertu , ils


ne admoneam quideui ? Hœc enim be-
neficii inter duos lex est aller statlni
l'ont du moins bien connue
:
car ils :

oblii'isci débet dati aller accepli nun'


ont loué ceux qui, en faisant une belle ,

action, ne se proposent pour récom- quant (87).


pense ni un intérêt pécuniaire, ni
,
Ma deuxième réflexion est qu'il ar-
l'approbation publique ; et ils ont mé- rive rarement que le but d'être loué
prisé ceux qui ont pour but , dans Soit la fin unique de ceux qui ne se
l'exercice de la vertu , la réputation contentent pas du témoignage de leur
la gloire , l'applaudissement de leur
conscience. Observez bien les person-
prochain. Soyez désintéressé tant qu'il nes qui aspirent à ces deux choses,
vous plaira quant au profit , à l'acqui- l'une d'être honnêtes gens, l'autre de
sition des richesses ou des charges le paraître vous verrez que leur am-
,

si vous ne l'êtes point quant à la


bition ne se borne pas à joindre en-
louange vous ne faites que ramper
,
semble la réalité et les apparences de
;

vous n'êtes point guéri de la maladie la \ertu. La vapeur subtile de l'en-

de l'amour-propre , vous n'êtes sorti cens ne leur pas ils souiiaitentsullit :

qu'il s'y mêle quelque chose de plus


que des pièges les plus grossiers vous ,

ne faites que porter une chaîne plus grossier. La réputation toute seule

déliée en un mot, vous vous trou-


:
leur paraît une récompense trop spiri-
verez dépeint dans le traité de M. Es- tuelle ; ils travaillent à l'incorporer
prit sur la Fausseté des vertus humai-
,
avec les commodités de la vie, et ils

nes. Appliquez à toutes les vertus la font bientôt servir la louange et l'ap-
belle règle que Sénèque vous a pres- probation à s'acquérir du crédit auj>rés
crite par rapport à la libéralité; elles de ceux qui distribuent les charges, et
seront véritables maissanscela elles :
puis ils se servent de ce crédit pour
s'enrichir ou pour contenter toutes
(86) Plutarchus m
Vitâ Arislidis , pag. iio.
leurs passions. Ainsi la pljis sûre voie
3*' me sers de la version (i'Amyot. ^o>"es le même

Plularque dans srs Apopbtliegmes, ptig. iS(J, et


de Âuditndi^ Poëlis, pan- i2. (87) Seneca, de BeneCc. ,
lib. II ,
cap. X.
544 AMPIIIARAUS.
pour conserver la pureté de son âme , point sans l'autre, et que, puisqu'avee
c'est de faire ce que Ton a dit d'Am- de fausses vertus, c'est-à-dire, avec
phiaraiis et d'Aristide. Travaillez à l'adresse de couvrir d'une apparence
être honnête honjoie^ que ce soit vo- d'honnête homme une mauvaise âme,
tre grand but ne cherchez pas à le
: ou vient à bout d'obtenir une belle
paraître j car cette recherche a des réputatiou , on l'obtient encore plus
suites plus dangereuses que vous ne sûrement avec des vertus réelles. Vous
pensez. conclurez de là qu'Amphiaraus et ses
On attribue à Socrate d'avoir
3°. semblables se faisaient honneur de
dit qu'il n'y a point de plus court mépriser une chose qu'ils savaient bien
chemin pour parvenir à la vertu que qui ne leur manquerait pas. Et moi
de travailler à être tout tel que 1 on je vous répoudrai qu'assez souvent
veut paraître Seniper id egisli ut
: il est beaucoup plus facile d'être hon-

qualis haberi uelles talis esses quam : nête homme que de passer pour hon-
fiant ad gloriam proximam et cfuasi nête homme, et qu'il n'y a point de
cfinipendiariam Socfalcs esse dicebat conséquence nécessaire de l'une de ces
(88). Voici les paroles mêmes de So- deux choses à l'autre, par quelque
crate 2l/VTÛ^a)T«.T« Tê KO.) à.!r<^U.\tçi.'TV\
: bout que vous commenciez. Vous n'a-
Kcù jc«,\M's->t ôJoc , ce KfiTÔCot/Xe , Ôti «!v vez besoin, pour être honnête hom-
jioùxii (Toxîfv à.ya.boç sivai, touto hcjli yi- me, que de vaincre vos passions 5
vîtÔai oLyndov 7riipû.ça,i (89). f^elim , ô mais, pour le paraître , il faut com-
Crilobuîe , scias hanc esse bret^issi- battre les passions d'autrui , et en
mam securissimani , oplimamcjue ad
, triompher. Vous avez des ennemis
hœc omnia fiant, in quocunqae vn- artificieux et vlolens qui répandent
lueris bonus apparere, in eodcin effici contre vous cent sortes de médisances.
quoque bonus conari. Ce conseil est Ceux qui les écoutent sont crédules,
fort sensë; car la passion de jouir et deviennent de nouveaux distribu-
d'une glorieuse apparence et d'obtenir teurs de calomnies s'ils sont incrédu-
:

l'applaudissement public est si forte les , ils forment des difficultés , et ils
et si commune parmi les gens même apprennent par-là à vos ennemis com-
qui n'ont pas beaucoup d'envie d'être ment il faut proposer les calomnies ,
vertueux inte'rieurement qu'on peut , afin de les rendre plus vraisemblables.
promettre de grands progrès dans la Vous ignorez quelquefois toutes ces
vertu à toute personne qui s'efforcera machinations ^ et quand vous les sau-
de mettre une parfaite conformité' riez, ou en tout, ou en partie , pour-
entre l'état réel de son âme et l'opi- riez-vous aller de lieu en lieu vou»
nion qu'elle veut que l'on ait d'elle. justifier? Étant honnête homme, com-
Mais il faut avouer qu'il y a moins me je suppose que vous l'êtes , pouvez-
de désintéressement dans cette route vous savoir les fourberies de vos en-
que dans celle d'Amphiaraiis: Parais- nemis , et les biais obliques par où il
sez honnête homme, soyez-le ; jouissez faut prendre les esprits vulgaires ?
d'une belle réputation , mais soyez-en N'aimez-vous pas mieux laisser une
digne n'usurpez point l'estime de vo-
: populace dans l'erreur que d'employer
tre prochain, Voiià ce que conseillait tout votre loisir à disputer le terrain
Socrate il ne voulait point priver de
: à des calomniateurs ? Votre vigilance
la fumée des éloges. Amphiaraiis vous su dirait-elle jamais à renverser ce que
aurait dit Soyez honnête homme et
: , leur malignité biitit sur des cœurs cré-
ne fous mettez point en peine si on le dules, mal tournés, et infiniment plus
saura , si on vous en louera. flexibles au procédé de ces gens -là
4°. Vous me direz que l'un ne va qu'à toute vot:e éloquence et à tou-
tes vos raisons ?
(88) Pelnis Alcyonius in Medice Legato
priore , circajinein.
,
On verra dans la remarque (L) de
l'article de César, que la même louante
(89) Xenophontis Memorab., lib. II, p. 474i
et de la traduction de Charpentier, jiag. i6o. qu'Eschyle donne à notre Amphiaraiis
Voyez aussi Plalon Epîtrc IV, pag. ii';!\; les
, a été donnée par Salluste à Catoa
Offices de Cicéron liv. II , cliap. XII p. -it-i;
,_ ,
d'Utique.
ce qu'a dit Postal dans l'Epîlre dedicaluire de
ses Histoires Orientales sur ce vers de la XVI', (1) On le compte parmi les gens sa-
ïpîlre du I'^. litre «i'Horace : ges qui ont eu le malheur d^éire enga-
Tu reclè vivis, si curas ess: quod audis. gés à des entreprises dirigées par des
,,

AMPHIAllAUS. 545
étourdis.] Peu importe que ce soit » tout sens et entendement , qui s'ef-
moi ou ua autre (jiii fournisse les pa- ^' forcent de t'enir contre nous h tout
rolesdu comnaenlaire de ce texte, il » un grand équippage ( Jupiter le
ne de style , mais de
s'agit point ici » permettant ainsi) sera attiré quand et
faitsou de pensées. Employons donc
, V eux aune finale perdition et ruine. »
hardiment le vieux gaulois d'un com- Voilà co que Vigénère dit. Il ne faut
mentateur de Philostrate (90) Iiy pas s'imaginer qu'Amphiaraùs espé-
:

jjoui'nns nous remarquer et aoperce- rât que les fautes des directeurs se-
volr l'un des eschaniiUons de nostre raient reparées par la justice de la
paui'retéet misère, qu'ilj'ai/le que les cause (91) il e»ait trop' habile hom- :

prudens et bons personnages portent me pour croire cela j il savait ciu'une


ainsi, la Jolie enchère pour les insensez guerre juste n"a pas moins de besoin
et pervers qu'un fol estourdy de Ty- qu'ime guerre injuste de tous les se-
:

deus accariastre querelleux et es- cours humains qui font réussir (92) ,
, ,
,

ceruellé perturbateur du repos public et que, ne les ayant pas au même point ,

nonobstant qu'il snit estranger non- à peu près que les défenseurs de l'in-
,

obstant toutes les belles remonstrances, justice, on succombe presque toujours.


toutes les prédictions et admonestemens On le donne donc très-justement pour
du plus sage homme de la Grèce et , un exemple du saciifice qu'il faut faire
tenu mesme pour prophète., ait ainsi de sa vie ou de sa prudence à d'au-
, ,

i^oix en chapitre et soit creu pour faire tres considérations , en quelques ren-
entreprendre une guerre non aucune- contres. Lisez ces paroles de Ciccron :

ment nécessaire et qui leur retourne


, F'aluit apud nie plus pudor meus quam
a perdition et ruine pour tous. Et si timor. f^eritus sum déesse Pompeii
faut encore que ceux qui y contredi- saluti , ciim ille aliquando non de-
sent avec de très-apparentes et plus que fuisset meœ. Itaqiie vel ojfficio, uel ,

légitimes raisons , communiquent au famd bonorum vel pudore victus , ut ,

péril et danger des esi^entez qui l'ont infabulis Amphiaraiis , sic ego pru-
suscitée, l'oire en ayent leur première dens et sciens ad pestem ante oculos
part tant a tousjours accoustumé d'a- positam sum profectus (gS) A u reste
: .

voir de crédit le maui^ais conseil des- on a quelque sujet de reprocher à ce


bauché par dessus celui qui est sain. prophète la disproportion de ses lu-
jIu moyen de quoi , non sans cause , mières, et de l'en railler. Il prévit
ny à la i^ollée , s'exclame le poète Es- que, s'il allait à la guerre , il y serait
chyle en la tragédie des Sept à Thèbes, tué; mais il ne prévit pas qu'il y
desplorant, soubs la personne d'Ethéo- irait, et qu'en dépit de ses précautions
clés , le bon et sage Amphiaraiis , en on le contraindrait de s'engager à
cette sorte : l'entreprise (94)-
(K) La manière dont il consola une
^iu T'iZ '^vvtt.Kkâ.TTOii'TOi opviSoç yS/:oTo7ç
femme.... demande une note.'\ Plu-
AlZilOV â,vé'ptt TOJS-I J'UTTlClÇ'îpOIÇ.
tarque ayant parlé des raisons qui
'Ev ttclit] Trfiyu «T' ÏtÔ' '0/j.iKia.ç x-iLunç
doivent être employées pour consoler
ia.etX.liV, CiÙJ'iV Kctf^OÇ où K'jjuiçioç :

ceux qui s'affligent de la mort pré-


Et ce qui suit après. maturée de leurs enfans ajoute fgS) , :

« Et pour ce me semble-il qu'Amphia-


« O le malheur, dit-il ,
qui associe •»raiis en un poème ne reconforte et
)> un homme de bien h des mortels im- ))console pas impertinemment la mère
)) pies et détestables ! Il n'y a certes ))d'Archimorus laquelle estoit mer-
,

» rien pire en tous les affaires du mon- ))veilleuseraent affligée et désolée pour
)> de , que la nieschante compagnie
j) dont l on ne peut jamais rappor- (91) Les Thébains avaient tout le torl dans
celleguerre ,et néanmoins ils eurent tout l'a-
» ter aucunfruict... Ce defin-cy (/e
vantage dans le combat.
» fils d' Oïcleiis , dis -je,} prudent (92) y^orei la remarque (C) de l'article Bro-
1) juste , sincère , et déi^ot personna- TCS (Marc)-
("93) Cicero, Epist. fl , lib. VI aA Famlli.i/.
)> ge grand annonciateur des choses
,
(Ô4) f^orez tf Commentaire iur la Vie tl'A-
3) adfenir, pour s'estre meslé auec des pollonius tradiite en francaii par Vigéuère ,
,

}> médians présomptueux privez de /iV. // . chap. XI , pag. 4SS.


,
(t)j) Plutaicli. de t'.onsolalione , ad Apollo-
(go) Vigéncre , sur l'Amphlaraiis de Philo- niuin , pag. 110 , m. Je me sers Je la version
strate ,
pag. 4o 3, 404 'iu !" yct. , édition in-4'' d'Kuxvot, tcm. I. pag. 7S(;.

TOME I. 35
,, ,

>46 AMPHIARAUS.
» la mort de son qui lui estoit fils ,
nulli in mœrore
,
quiim de hâc com-
3> décède en son enfance fort loin de Ttiuni omnium
conditione audii^issent,
» maturité j car il dit : eâ lege nos esse nalos , ut nenio in
perpeluum esse posset expers niali ,
» Il ne fui onc homme de mère ne
» Qui n ail esté en ses jours fortuné grai'iùs etiam tulisse. Quocircà Car-
1. Diversement : il met ores sur terre neades , ut video noslrum scribere
» De ses enfans ores il en enterre
,
yintiochum. , reprehendere , Chrysip-
» Lui-mesme après enfin s'en va mourant :
i> Et toutes/ois les hommes vonlplorant pum solebat laudantem Euripidewn
» Ceux que dedans la bière en terre ils portent, Carmen illud :

>. Combien qu ainsi comme les espics sortent


.. D'elle , qui sont puis après moissonnez , Nemo mortalis est , quem non attingat dolor ,
» Aussi faut-il que les uns nouveaux nez Morbusque multi sunt Iiumandi liberi
:
;

j. V^iennent en estre , et les autres en issent, Rursus creandi moi'sque est finita omnibus.
:

» Qu est-il besoin que tes hommes gémissent Qua; generi bumano angorem nequicquam af-
» Pour tout cela , qui doit , selon le cours feriint.
.. De la nature , ainsi passer lousjours ? Reddenda est terrae terra (97). Tum vita om-
» Il n'j a rien griefà soiiffrir ou faire , , nibus
• De ce qui est à l'homme nécessaire. Metenda ut fruges : sic jtibet nécessitas.

5) Brief il faut qu'un chacun soit en


, JYegahat genushoc oraiionis quicquam
3> pensant en soi-mesme soit en dis- , omninô ad leuandani œgritudinem per-
3) courant avec autrui, tienne pour cer- tinere. Id enim ipsuvi dolendum esse
:»tain,quelapluslongueviederhomme dicebat ,
qubd in tam crudelem ne-
))n'est pas la meilleure. » 11 me semble cessitateni incidissemus. JVam illant
que PluSarque a mal placé ces verslà , quidem orationem ex conimemoratione
puis qu'ils ne contiennent rien qui alienorunimalorum admalet^olos con-
ait plus de relation à la mort des solandos esse accommodatam (98).
jeunes gens qu'à celle des autres. Je Rapportons aussi la réponse qui a été
puis même dire que la comparaison faite à cette critique de Carnéade ;

tles épis serait absurde , s'il s'agissait Mihi p-ero longé v'idetur seciis. JVam
d'apaiser une affliction fondée sur et nécessitas fet endœ conditionis hu-
la jeunesse de la personne que l'on nianœ, quasi cuniDeopugnarecohibet,
pleurerait ; car, selon le train ordi- admonetque esse hominem co- ,
quœ
naire, la moisson des grains ne se gilaiiomagnoperè luctum et leuat :

fait que quand ils sont mûrs. Il vau- enumeralio exeniplorum , non ut
drait mieux faire faire de l'attention animuni nialet^olum oblectet, ajfertur,
à la destinée du fruit des arbres. sed ut ille qui mœret , ferendum sibi id
Comptez les pommes quand elles sont censeat, quod l'idéal riiultos moderalè
en bouton, comptez-les ensuite chaque et tranquille tulisse (99).
semaine vous trouverez que leur
, (L) Les partisans firent un procès
nombre va toujours en diminuant. h ses prêtres. ] Qu'il me soit permis
C'est beaucoup si la moitié se con- d'appeler ainsi ceux qui levaient les
serve jusqu'au temps de la cueillette. tributs de la république romaine dans
Quant au i-este les raisons d'Am- , les provinces. 11 y avait une loi qui
phiaraiis sont assez bonnes ; mais elles exemptait de la taille les biens con-
n'ont rien que de commun il con- :
sacrés aux dieux immortels. Sur cela,
clut même par une maxime qui, dans les prêtres d' Amphiaraiis prétendirent
un certain sens , est plus capable d'ir- à l'exemption, et soutinrent que les
riter le guérir (9G). Nous
mal que de le terres qui appartenaient à cette divi-
verrons bientôt de quelle manière le nité n'étaient soumises à aucune taxe.
philosophe Carnéade les critiquait. Le texte de la loi est clair et précis en
Amyot n'a pas bien traduit ce grec
de Plutarque o Tretpà. tm toihtî! 'A/x-
, (97) Le vers grec rapporté par Plutarque, de
iÇiâpêteç, par Aniphiaraiis en un poème. Consoiatione ^ p.
iio . et qui répond à ceci , est

Cette version insinue manifestement 'Eiç ywv cpsfovTêç" riiv f'Àvct.yKcLiuç s^êf.

qu'A mphiara lis a fait un poème mais ;


Bartbius in Statium , tom. III pag. i'jS, con-
,
le sens de Plutarque est qu'il y a jecture qu'il faut lire ,

un poète qui a introduit Amphiaraiis 'EjÇ J.HV «fêpOVTêf^îlV, K à.Vlfy>iCLIOùÇ "iX.^1.


se servant de ces raisons. Nous allons
(98) Cicero Tuswilan. Quœslion. lit- ITI
voir que c'est Euripide Dicuntur non- :

cap- 25.
,

(96) yoj'ei l'arUcleYQVL<iX}zs, remarque (E). (99) Idem, ibid.


AMPHILOCnUS 547
notre faiseur, cîirent-ils sans doute. Les inauguralus tradiliir. Fuisse aiitcin
partisans repontlirent que ces terres etim Irndunt filiiim Amphiaraï qui
^
n'étaient nullement dans le cas de la apud Thebas obierit und relate ante
loi, puisqu'elles e'taient consacrées à Iliacum bellum (io3;. Je crois <jue Pline
un homme mort , et qu'il est visible nous conte là un mensonge les trois :

qu'une personne qui est morte n'est chênes .sous lesquels Tiburtus, fonda-
pas du nombre des dieux immortels. teurde Tibur et fils d'Amphiaraiis, au-
Quoique ce raisonnement leur l'i^t sug- rait été inauguré, eussent-ils pu vi-
géré par l'avarice et non par le zèle de vre jusqu'au temps de Vespasicn ? No-
la religion chose que des partisans ne
, tez que Solin prétend que Tiburtus
consultent guère quand il s'agit de était petit-fils , et non pas fils d'Am-
leurs intérêts , il était pourtant si phiaraiis. Je rapporterai ses paroles
démonstratif, qu'il devait faire gagner dans l'article Tibck.
leur cause. Je crois néanmoins qu'ils (io3) Plinius, lib. Xri, cap. XLIV.
la perdirent. C'est dommage que toutes
les pièces ne s'en soient pas conservées.
Nous n'en connaissons que ceci yin :
AMPHILOCHUS , fils d'Am-
y4mphiaraûs deus erit,et Trophonius ? phiaraiis d'Ériphyle (a) , fut
et
JVostri guident publicani , cùm essent un célèbre devin. 11 accompagna
agri in Bœotid deorum immorlalium Alcméon son frère à la seconde
excepti les;e censorid , negabant ini-
guerre de Thèbes(Z'), et quelques-
mortales esse ullos , qui , aliqiiandô
homine s fuissent (100). Si on lesavait uns disent qu'il l'aida à se dé-
laissés faire, ils auraient mis à la taille faire d'Eriphyle (c) mais la plu- ;

la plupart des dieux , et en roture part des auteurs sont d'un autre
une infinité de terres sacrées ; car sentiment. L'autel qu'on lui ,
quels titres de divinité , ou d'im-
mortalité , eût-on pu produire à l'é- consacra dans Athènes {d) con- ,

preuve de leurs exceptions ? Que n'eus- tribua beaucoup moins à la gloire


sent-ils pas obtenu au tribunal d'un de son nom que l'oracle qu'il
,
intendant qui aurait eu ordre de fa-
avait àMallus, dans la Cilicie(A).
voriser leurs poursuites? 11 ne faudrait
3ue mettre en parti la recherche Lui et Mopsus furent les fon-
es faux cultes , pour y voir bientôt dateurs de cette ville après la ,

une bonne réduction. Mais de tels guerre de Troie (e). Ils se que-
partisans , où pourraient-ils être en
rellèrent, et s'entre-tuèrent en
sûreté ? Nous verrons ailleurs (101)
combien a paru solide à plusieurs duel , comme je l'ai dit ailleurs (f)
païens ce raisonnement // est mort ; :
Quelques-uns assurent qu'Am—
donc il ne doit pas être adoré comme philochus fut tué par Apollon [g).
un dieu.
II joignit ensemble la royauté et
(M) // laissa bien des enfans. ] J'ai
fait l'article d'Alcméon et d'Amphilo- la prophétie (h) ; car il fut roi
chus, qtii étaient ses fils. Je ne trouve d'Argos. Il est vrai qu'il ne put
pas que les auteurs grecs qui nous res- pas se maintenir dans ce royau-
tent aient parlé de Tiburtus qui était
me. Il en sortit mécontent , et
,

aussi son fils; mais ils font mention


d'Eurydice de Demonassa et d'Alcmè- alla fonder une ville dans le golfe
,

ne, filles d'Amphiaraiis et d'Eriphylc d'Ambracie (B). Tite-Live a pris


(loa). Voyons ce que Pline conte de le change dans un passage que je
Tiburlus Tihurtes originem multo an-
:

te urbeni liontam habent. ^pud eos (a) Pausanias lib. V pag, l65. , ,

(b) Apollodorus, lib. III, pag. igS.


cxstant ilices 1res eliam Tiburto con-
,
(c) Apollodor. lib. III pag. 197.
ditore eorum i^elustiores
,

apud quas ,
(rf) Pausanias, lib. I pag. 33. ,
,

(100) Ciceio , de Natarà Dcoram, lib, III, Sirabo


(e) lib. XIV
, pag. t^6!^. l'oyez.

cap. 19. aussi Cicéron de Divinat., lib. I cap. XL. ,

(loij Dans la remarque (A) de l'article Tao- yf) Dans l'article Mopsis.
Ig) Strabo, lib. XIV pag 465.
pHOMif s, [Cet article n'existe pas.^ ,

(102) Pausania? , !ib. V ,


pag. i6î. {h\ Cicero , de Divinat., lib. l. cap. XL
, ,

548 AMPHILOCHUS.
citerai (C). On aura quelque chose
dare ,
ut ad ve rhum respondeat Us ,

'«"'/«« prophelœ qulsplam msche-


censurer "
à ccuauici à M. Moréri (D). Il ne
d ^ ^ . 9«f
dulani inscripta tradident recte me :

faut point confondre notre devin facturum putain , si dùm prcelemaui-


avec cet AmphiLOCHUS , dont une gabam deum- ,
experirer oraculum ,

oie fut amoureuse (E). Je rap- quedcfuturisquidquamconsulciem.


j A^„^ ,.^r^ ^o
• Notez bien la circonstance que Lucien
norterai ci-dessous dans une re-

|juiiciai^i
r.
, i , ^ » „ . •>

r>,
1 a rapportée c est qu on proposait par
:

marque ce que Pline et quelques ^^^^^ jgg choses sur lesquelles on de-
autres anciens auteurs en ont dit. mandait la réponse d'Amphilochus.
Qu'on ne dise pas que Lucien a forgé
(A) // aidait un oracle à Mallus , lui-même les contes qu'il a débites
dans la CUicie.'] Pausanias assure que tlans cet ouvrage car cela n'affaiblit :

de son temps il n'y avait point d'ora- point notre preuve puisqu'il est sûr ,

cle aussi fidèle que celui-là. D'où nous qu'il n'eût pas feint que cet oracle
pouvons inférer, que tous les oracles ^tait célèbre, cent ans si depuis
du paganisme ne cessèrent point par personne consulter.
n'avait été le
l'établissement de la foi chrétienne :
C'est ainsi que M. Van Dale satisfait à
TçÔ «Tê ' «*' 'J'i^P 'AÔnvctioiç fç-iv
A/ui<fthoXff cette objection (5). il cite un autre
IvTMÎTClAêl Ca>[MÇ, KUt KiMJCiaÇ êV MstÂÂfi) passage tiré de l'Histoire du faux de-
jMotVTêî'ov À'~\,iv<S'îg-a.'rov twv stt' ifxou {l). vin Alexandre, dans laquelle Lucien
Amphilocho in ipsâ urbe apud Alhe- témoigne que l'oracle de Mallus était
nienses ara sua est : in Ciliciœ l'ère fameux. On eût pu citer un troisième
urbe Mallo ejusdem oraculum quod endroit ;
je le trouve si favorable à
omnium œtate med exstunt
est ,
quœ cette remarque que je le rapporterai ,

minime jnllax. Les réponses de cet tout au long Tiv Tpo<|ii»viov , à Zî:/ ,
:

oracle se donnaient en songe: 'Eç-zv h KO.) i/.k\\çct y.i a.TrQWtyn , tov 'A/n^i-
iAcLXKm TrUti TÎtç KiXtxiAC ' AfA.<^tKoX.'^u ?iO^(<V* OÇ SVaf).Ot/Ç ÀvSpéicTrOl/, KCLI [XïlTftt.-
_;^;pi)ç-«piov Kct) Xf^ ^' ôvêipaTœv. Est AOIOW VIK t£v , èia-TTiaié'il ^svv«.ioç àv K(-
Malli, quod est oppidum Ciliciœ, oia-
culum ÂmpliUochi quod per somnia , TiVOOV TOIV cTj/oVv ûfoXOlV 4VêH* (6j. Dc
consulentibus respondet (2). Les con- Troplionio , Jupiter, quodquc me po-
sultans passaient la nuit dans 1h tem tissimiim angit, de Amphilocho qui :

pie et ce qu'ils songeaient devait être


, quanquam scelesii hominis et matrici
l'éclaircissement de la question. Dion dœ estjilius, in Cilicid prœclarus ille
Cassius a parlé d'une peinture où Sex- falicinatur, multa mentiens , et pro
tus Condianus avait fait représenter duobus oholis prcestigiatorem agens.
la réponse qu'il avait reçue de cet Nous examinerons ci -dessous la pré-
oracle sous l'empire de Commode (3). tention de Lucien qu'Amphilochus ,

Voici un passage de Lucien qui nous n'titait pas le fils , mais le petit-fils
persuadera qu'Amphilochus passait d'Amphiaraùs. Disons en attendant ,

alors pour un grand prophète i'Ottots qu'au temps de Plutarque l'oracle


yÀt. ê£ htyîiTrTQu iTrcivïniv aïKit^i, ânovaiv d'Amphilochus florissait encore 'Et» :

To âv M.a.h.Kûù TovTO //.ttiiTitov , i7n(^a.vîç-a.- cT' »K./^a,^«v ê/xciû crapévToç, Ktti to Ml-\w

TOV Tê , Jta.» «AMÔêç-stTov iîvcti, >ca.)^Xp^v KO.) To' A[ji<ifiKhX''^ [^"'^'^^^^''^


(7) Cùmau-
iva.pyùûç Tfoç sVoç à,Tû;cpivô^êvc.v , oic Àv tem essem in patrid, Jlorebant adhuc
lyypa.'^.a.ç aiç ùc to ypAf^/j.xTiiov TTxpA- 3Jopsi et Amphilochi oracula.
/œ Tçc Trpot^MTVi, KO-Kcë; âv ÏX^'^ «T-ns-a/yHV (B) llsortit mécontenta' kr^os, et alla
êv TTO.pâ.Tr'Kai TrufU.^ma.i tov ;(^f«ç-nf't"' fonder une rillc dans le golfe d'Am-
ncLi Ti TTift p.iKKÔvTa>v o-u[/.ÇwKiutTa.a-^cii brade.'] C'est d'un historien grave que
Tffi Ôêâ (4j- Ciim ex JEgypto redirent nous apprenons cela. "Apyoç tô 'A//^ixo-
domum, audiremque illud in Mallo X'X-'ov Keti ' AfAi^iXoX'^V T))V aXAtlv iKTia-l
oraculum aperlissimum simulque esse fAiTÀ TO. Tpaimà. oiza,(f'ê aivcLXf>p»i^a.ç-, «ou
verissimum , et sic euidenter respcnsa oi>x. etpicTKOf/.itoç TM 5V "Apyn y.a.Tctç-a.Tii
' '
AfAif'iKtiX'ii ô Ay.<^iâ.pia>, sv tu '
Ay.Ç.pa.% v.tu
(1) Pausanias , lib. I , pag. 33.
(2) Xiphilin. in Epitome Dionis ,
pag. 285,
286. (5) Van Dale, de Oraculis , pag. t)S.

(6_) Lucian. in Deorum


Concilie png-. 967,
(3) Idem, ibidem. ,

(4) Liician. in Philopscude ,


pag. 5oo ,
lom. lom. II.
(-) Plut, de Oraculor. defectu ,
pag. 434, C.
,

AMPHILOCHUS.
AOKTTW , 'ofilcévVfJl.tiV Tij iXUToÛ TTIt'Tfli'l "Ap- après la prise de Troie , revint à Ar-
^oc ôvo//ta3-«.ç. K*( «v « îrÔA-iç «i/t» /Myi^)i gos , et s y chagrina de l'état des cho-
T«c 'A((/.<|)i^.o;i^i*ç , X.st/ TOi)f J'wvatTûiTiTouç ses , et s'en retourna en Cilicie , où il
si;têv Argos Aniphilo-
oiKyiTfjfiiti; \^). fut tué et enterré (i5). Voici d'autres
chicuni reliquam Amphilochiam
et brouilleries. Euripidedit qu'Alcméon,
Amphilochus Aniphiarai filius post ,
devenu furieux, coucha avec Manto ,
bellum Trojanum doinum reuersus , fille de Tirésias, et en eut un fils et
cùm reruni status ,
qui Argis erat , ei une fille ; celui-là nommé Amphilo-
nonplaceret condidit in sinu Ambra-
, chus, et celle-ci Tisiphone (16). Cet
cico , urbem de eodem palriœ suce no- Amphilochus, obéissant à un oracle ,
mine Argos nommans tt erat hœc , fut s'établir dans Argos Amphilo-
urbs omnium Amphilochiœ regionis chium. Nous avons vu (17) que Lu-
maxima et potentissimos habebat in-
, cien prétendait que l'Amphilochus
colas. Straboa allègue ce te'moignage dont l'oracle était si célèbre à Mallus,
de Thucydide mais il ajoute quelque ;
était fils d'Alcméon. Les autres disent
chose c'est qu'Amphilochus
: mal , qu'il étaitfils d'Ampliiaraiis. 11
y a
satisfait du gouvernement établi dans deux partis à prendre parmi toutes
Argos, s'en alla en Acarnanie où il , ces confusions. L'un est de dire qu'il
recueillit succession de son frère
la n'y a eu qu'un Amphilochus , dont
(9). Thucydide ne dit point ceci \ et l'histoire n'a été rapportée que par
par conse'quent Strabon a tort de le morceaux; c'est-à-dire que par des
lui attribuer. Ceux qui pre'tendent auteurs qui ont omis une partie de ses
qu'il adopte l'opinion de Thucydide aventures. L'autre est de prétendre
(10) se trompent; car il paraît lui qu'il y a eu deux Amphilochus, l'un
préférer l'historien Ephorus qui a dit ,
fils d' Amphiaraùs , et l'autre fils d Alc-
que d'Argos Amphilochiura
la ville méon que, auteurs ont quel-
et les
fut bâtie par Alcme'on et que son ,
quefois donné à l'un ce qui convenait
fondateur lui ût porter le nom de son à l'autre. On me persuaderait facile-
frère. Mstô. tTs tJiv A/L'.Cpa.Kia.v to Apyoc ment que l'Amphilochus qui eut un
ici To 'Ay.^iXo;;t^ixàv nTio-fAX 'A^x//a.i'a)voç oracle dans la Cilicie est fils d'Araphia-
KAi Tffiv Trai'ïTsDv (il). Post Ambraciani raiis ,et que celui qui fut s'établir dans
Argos sequitur Ainphilochium urbs l'Acarnanie est fils d'Alcméon. Lu ville
ab Atcmœone ejusque liberis conditn. d'Argos de ce pays-là fut bAtie par
11 ne faut pas dire qu'Apollodore n'a Alcméon et par ses fils To "Ap-)/!)?
, :

suivi ni Thucydide, ni aucun autre TO 'AjM<|)lXo;\^i;tOV KTIT-jUX 'AXX^MSt/ûJVCÇ xsti


écrivain en assurant qu'Amphilo-
,
Argos AniphiLncki-
T-œv o-aitTa-v (18).
chus était le fils d'Alcméon (12); car cum urbs ab Alcmœone ejusipie libe-
il ne conte cela que sur la foi d'Euri- ris condita.Cest ma première preuve.
pide (i3). Notez qu'il observe que cet Amphilochus fils d'Alcméon fut averti
Amphilochus alla demeurer à Argos par l'oracle d'aller demeurer dans
Amphilochium par le conseil d'A- cette ville d'Argos (ig). Voilà ma se-
pollon. conde preuve. Pausanias observe que
Observons une grande différence la postérité de Mélampus régna dans
entre Thucydide et Strabon. L'un dit Argos jusqu'à ce qu'Amphilochus ,
,

qu'Amphiloclius , étant retourné à après la prise de Troie se retira au ,

Argos après la prise de Troie et n'y , pav» qu'on nomma à cause de lui Am-
trouvant pas les chose? dans l'état philochie (20). C'est l'Argos Amphi-
qu'il aurait voulu, se retira vers le lochium et le voisinage. Or, il y a six
golfe d'Arabracie, et y bâtit une ville générations depuis Mélampus jusqu'à
( f 4) L'autre raconte qu' Amphilochus,
• cet Amphilochus : 'Atto «Tï MsAi/^^roîTof
ayaut bâti ilallus dans la Cilicie ,
yiVieti Ts i^ X.XI kyS'fiiç ictri /-ts/^aiç Aju.-
<ftxôX.'jii TijO ' Afji!fta.pci.ou (31). A Alelam-
(8) Tbiicydides Ub. II. ,

(9) Strabo, lib. f^II pag- 225. , (i.î) Strabo, lih. Xir,
pag. 484, 485.
(10) Bcrkelius , in Stepli. Byzant. , J>ag. \i!^. (16) Euripides, apud Apollodorum lib. III, ,

(il) Ephorus, apud Slraboncin , lib. f^II , pa^. 201.


faf;. 225. {i-) Dans la remarque précédente, cilatton[6) .

(12) Berlelius le dit pourtanc dans ses Notes (iSj Strabo, Itb. VII pag. 225. ,

sur Etienne de Cyunce, ptig 124. (igj Apollodorus, hb. III , png. loi.
(l'ij Apoilodoi-. , li!>. III ,
pag. 201. (20) Pausan. lib. II, pag. do.
,

(i4) Thucjdid. , Ub. II. (2i) Idem, ibid.


,

ô5o AMPHILOCHUS.
pnde sex per toUdem œtates usque ad a dit seulement qu'Alcme'on et Amphi-
Amphilochuvt Amphiaraï Jilium. Il lochus furent fils d'Amphiaraiis (^5).
faut donc que celui-ci ne soit pas fils 2°. Cela étant il ne fallait pas s'ex- ,

d'Amphiaraiis, comme Pausanias l'as- primer ainsi On dit qu'il était Jils :

sure, maisd'Alcmëon. Eneflet Mélam- d'Amphiaraë et d'Eriphyle. Il fallait


faire plus d'honneur à l'autorité d'Ho-
mère et jamais auteur tant soit peu ^

versé dans la lecture des anciens n'au-


chus. Si vous finissez par Amphilochus, rait employé ici un Ondit. 3°. L'Am-

second fils d'Amphiaraiis, vous ne trou- philochus dont Plutarque fait men-
,

verez point les six degrés dont parle tion ne diffère point de celui d'Ho-
,

Pausanias. C'est ma troisième preuve. mère; il ne fallait donc pas le débiter


(C) Tite-Live a pris le change a son pour un autre. C'était celui dont on
sujet, dans un passage que je citerai.2 consultait l'oracle à Mallus dans la Ci-
Il a pris le fils pour le père dans ces licie. 4°' ïl De fallait point dire qu'il
paroles du XLV^. livre Jnde Oropum : apporta l'oracle a un certain Thespe-
Alticœ uentum est , ubi pro deo ua- sius de Solos (26). C'est changer un
tes Amphilochus coliiur , templumque dieu en messager. 5°. On a omis une
veluslum est fontibus riuisque circa circonstance qui devait être exprimée
amœnum (22). Il est sûr que la prin- nécessairement c'est que Thespesius :

cipale divinité du temple dont cet mena une bonne vie après sa résur-
historien fait mention était Amphia- rection- Voyez Plutarque (2;j).
laiis il devait donc dire , ubi pro
: (E) // ne faut pas le conjondre ai'ec
deo tuâtes Amphiaraûs et non pas , cet Amphilochus dont une oiej'ut amou-
Amphilochus coliiur. Pausanias qni , reuse.'] Voici ce que Pline dit de cela :

s'était faitune étude particulière de Quin et j'ama amoris (anseri) , J^gii


ces choses et qui avait beaucoup de
, dilecta forma pueri Olenii (28). C'est
talent pour y réussir, est beaucoup ainsi que le père Hardouin a corrigé
plus digne de foi que Tite-Live. Or , ce passage il y avait dans les autres
:

non-seulement il assure que les habi- éditions , Argis dilecta J'orma pueri
tans d'Orope bâtirent un temple au nomine Oleni. On avait donc inséré
devin Araphiaraiis; mais aussi il sem- deux fautes dans le texte de Pline: l'une
ble dire qu'Amphilochus n'eut point touchant le lieu où l'oie fut amoureuse j
de part à l'autel qui fut divisé en cinq l'autre touchant le nom du garçon
portions, chacune desquelles appar- aimé. Ceci arriva, non dans Argos ,
tenait à quelque héros ou à quelque , mais dans la ville d'.'Egium (29). Ce-
dieu (aS). Nous trouvons bien dans ce lui qu'une oie aimait s'appelait Am-
partage les enfans d'Ampliilochus philochus, et non pas Olenus mais ;

mais non pas Amphilochus. J'avoue parce qu'il était natif d'Olène on lui ,

que la suite du raisonnement est pro- a dounéle surnom d'Olenius. Un pas-


pre à persuader que Pausanias ne l'a sage d'Elien a fourni au père Har-
point omis je ferais volontiers une
:
douin tous ces éclaircissemens. E»
correction dans le texte grec de cet 'Acj/ê/û) T>)ç 'A;^siia.ç îto-kToç 'nxsv/oi/ y'^voç,
auteur: je lirais ko} toi/ crctiJôc'A^sfi-
>.'oX,'^u , et Jîlio Amphilocho , et non xîya Toi/To (3o) . Apud j¥lgium Achaice
pas KOLt rôèv TotiJûJV ' Ay.^iKÔX'''^ 3 etjiiiis oppidum anser amauit puerunt Ole- ,

Amphilochi voyez la note (24) ^


; nium sente Amphilochum nomine.,

mais, après tout, ce ne sera pas don- Theophrastus hœc narrât. Athénée
ner Amphilochus pour le dieu du raconte la même histoire, et cite
temple d'Orope. Cléarque et Tliëophraste ; mais cor-
(D) On aura quelque chose à cen-
(25) Homer. Odyss., lib. XF, vs. 248.
surer à son sujet à M. Moréri.'] On a corrige' cette faute dans les éditions
(26^
1°. Amphilochus un certain
n'est pas de Hollande.
capitaine grec dont Homère fasse
, (27) Pliitarch. de sera Numinis Vindiclâ ,
p.
563 et seq.
mention dans l'Odyssée; car Homère cap. X XXII.
(28) Plin. , lib. ,

(25) Titus Livius, lib. XLF, C. 27. (2g) Situés dans l'jchdieproche de Sicjone. ,

(2j) Pausan., lib. I , pai;. 33. Voyez Pausanias pag. 23o. , liv. Vil ,

(24) Peut-être faut- il traduire les paroles de (3o) ;Eli,inus , lib.


,
V, cap.
Hislor. Animal.
Pausanias par ,el ex flliis ( Amphiaraï ) Am- XXIX. Voyez le père Ilaidouio , Emendat.
philocho. XXI, in lib. X Plinii, pag. 4:4.
AMPHITRYON. 55i
rigez une faute qui s'est glissée dans Thèbes et reçut de lui les céré-
,
son livre lisez èv 'Ai'j/êi'û) , et non pas
:

monies de l'expiation. Après quoi


jv 'Af,ytlcç. Sans cela l'on pourrait
,

dire que le père Hardouin s'avance trop il se prépara à faire la guerre


dans ces paroles: Neque enim u4rgis, aux Téléboes (D) , afin de venger
sed .^gii prope Sicyonem resgesta nar- la mort des frères d'Alcmène ;
ratur {3}). Ne voyons-nous pas dans
condition qu'elle exigeait de ce-
la version d'Athénée apud Argiuos
,

puerum amai'it anser , et dans le ^rec, lui qui voudrait être son mari
sv 'Af,yila> S^i ^akToc «fsts-Sêv X^v (Sa) ? (E). Il fallut que pour engager ,

(3i) Hard. in Plin. lib. , pag- 4-4. X ,


Créon à le suivre il le délivrât ,

(32) Athen., lib. XIII , cap. yili,p.6o6.


d'un renard qui faisait de gros
AlVIPHITRYON fils d'Alcée ravages. Il l'en délivra par le
,

(A), fils de Persée , est moins con- moyen de Céphale qui lui prêta ,

le chien que Procris avait amené


nu par ses exploits que par l'aven-
ture d'Alcmène sa femme, qui a de l'île de Crète. Amphitryon ,
servi de sujet aux poètes comiques assisté de divers peuples entra ,

(B). Alcmène était fille d'Elec-


sur les terres de Ptérélaiis et les ,

tryon roi de Mycènes. Les fils de


,
ravagea mais il fut redevable
;

Ptérélaiis avaient fait une irrup- du grand succès de cette guerre


tion sur les terres de ce prince, qui à la perfidie de Comèthe , fille
leur avait été fatale ils y étaient :
de Ptérélaiis. Cette fille devint
tous péris (a) , mais ils y avaient amoureuse d'Amphitryon , et ar-
aussi fait périr tous les fils d'E- racha pour l'amour de lui , le
,

lectryon {b). Celui-ci , se prépa- cheveu d'or que Ptérélaiis avait


rant à venger la mort de ses fils sur la tête , et d'oii dépendait sa
,

laissa son royaume et sa fille vie. Ce malheureux père mourut


Alcmène entre les mains d'Am- aussitôt ; et alors Amphitryon
phitryon et lui fit promettre s'empara universellement de tous
,

avec serment de ne point jouir ses états. Il fit mourir Comèthe,


de cette fille. Ceux qui avaient et s'en retourna à Thèbes chargé
accompagné les enfans de Ptéré- de dépouilles. La première nou-
laiis avaient amené au pays d'É-
velle dont on l'y régala fut qu'il

lide les troupeaux d'Electryon. avait


passé la nuit précédente au-

Ces troupeaux furent rachetés près d'Alcmène. Il était fort con-


par Amphitryon mais en les vaincu que cela était très-faux.
; ,

remettant entre les mains de leur Enfin on sut que Jupiter avait
maître, il eut le malheur d'être joué ce tour-là en prenant la fi-
la cause innocente de la mort
gure d'Amphitryon. Celui—ci ,
de ce pauvre prince (C). Comme sans se rebuter, s'approcha d'Alc-
on profita de cette occasion pour mène, et la rendit un exemple
le faire sortir du pays des Ar-
de superfétalion qui a été mille
giens (c) , il se retira avec Alc- fois cité. Elle avait déjà conçu
mène auprès de Créon , roi de Hercule , et il lui fit concevoir
un autre fils. Pour discerner ce-
(«) Exceptez-en un qui était demeuré à la
garde des vaisseaux. Apollodor. , lib. II, lui qui était à lui d'avec celui qui
P^S- 97- était à Jupiter , il jeta deux ser-
{b) Exceptez-en le bâtard Licymnius. Apol-
lodorus , ibid. pag. 99. dans le Supplément de Moréri, qii' Amphi-
,

(c) // ncsl donc pas vrai comme on le dit ,


tryon succéda à Electryon.
,

552 AMPHI TRYON.


pens sur leur lit. Hercule n'en l'autre, pour décider la dispute qui
s'est élevée depuis quelque temps sur
eut point de peur, l'autre prit la
la supériorité ou l'infériorité des an-
fuite; il n'en fallut pas davan- ciens, je crois que M. Perrault gagnerait
tage pour connaître qu'Hercule bientôt sa cause. 11 y a des finesses et des
n'était point fils d'Amphitryon. tours dans l'Amphitryon de Molière,
surpassent de beaucoup les raille-
On prétend qu'Alcmène mit sur qui ries de l'Amphitryon latin. Combien de
sa tête un ornement qui faisait choses n'a-t-il pas fallu retrancher de la
connaître au Jupitermonde que comédie de Plaute qui n'eussent point ,

avait triplé la durée de la nuit réussi sur le théâtre français Com- !

bien d'ornemens et de traits d'une nou •

pour la caresser plus long-temps velle invention n'a-t-il pas fallu que
(F). Il n'est pas vrai qu'Amphi- Molière ait insérés dans son ouvrage,
tryon ait appris aux hommes à pour le mettre en état d'être applau-
mettre de l'eau dans le vin (G). di comme il l'a été ! Par la seule com-
paraison des Prologues on peut con-
Alcmène survécut à son mari naître que l'avantage est du côté de
,

(d). Les débris de leur maison se l'auteur moderne. Lucien a fourni le


voyaient encore à Thèbes du fait sur quoi le Prologue de Molière

temps de Pausanias (e). H faut se roule; mais il n'en a point fourni les
pensées. Jamais un bon connaisseur
souvenir qu'Amphitryon était né ne dira ici :

à Argos (f). Il y a des auteurs


Oui benè verlendo,el eas describendo malè,ex
qui l'appellent roi de Thèbes (g). ùrœcis bonis lalinas fecit non bonus (4).

{d) Pausan., lib. T, j)cig. Sg. Qu'on ne prenne pas ceci de travers
(e) Idem lih. IX pag. 290.
, ,
j'en supplie tout le monde je tombe
(/) Plauli Amph. Prol.
;

d'accord non-seulement que l'Amphi-


(g)Setyius, in jEneid., lib. VIII,
,
vs. lo3.
tryon de Plaute est une de ses meil-
(A) Fils d'Alcée.'\ Apollodore dit leures pièces j mais aussi que c'est une
qu'Hipponome, fîlle de Menœcée, était pièce très-excellente à certains égards.
la mère d'Amphitryon (i). D'autres le Il semble qu'on la jouait encore du

font fdsde Lysidice, fille de Pe'lops : temps d'Arnobe. Ponit animas Jupi-
d'autres lui donnent pour mère Lao- ter si jlmphitryo juerit actus pronun-
nome, tille de Guneus (2). Notez qu'il ciatusque Plautinus (5). Je voudrais
était oncle de sa femme car Anaxo ; ,
bien que nous eussions l'Amphitryon
sa sœur, était la mère d'Âlcraéne (3). d'Euripide, et les deux Amphitryons
(B) // est moins connu par ses ex- d'Ai'chippus.
vlnits , que par l'ai'eniure de sa fem- {C) En
remettant a Eleclryonsestrou-
me qui a scri^i de sujet aux poètes
,
peaux., il eut le malheur d'être la cause
comiques.} Une des plus belles come'- innoce/ite de la mort de cepaui^reprince.'}
dies de Plaute est l'Amphitryon. C'est Voici comment Cùm bas una aujuge-
:

le jugement qu'en fait mademoiselle ret, in ipsam Atnphitryo tum quam ma-
le Fèvre
* qui l'a traduite en fran- nibus J'ortè clai^am geslabat immisit,
,

çais, avec d'excellentes notes. Voyez quœ de bouis comibus repuisa inElec-
les dernières remarques de l'article tryonis caput resiliens ipsum uitd priva-
Téléboks. Molière a fait une corae'die uil (6). Dans le Supplément deMoréri,
du même titre. C'est une de ses meil- au lieu de massue l'on a dit pierre.
,

leures pièces. Il a pris beaucoup de (D) // se prépara a faire la guerre


choses de Plante mais il leur donne
; aux Téléboes.] Nous disons ailleurs
un autre tour et s'il n'y avait qu'à
:
(7) quel peuple c'était ,
et nous mar-
comparer ces deux pièces l'une avec quons les différences qui se trouvent
entre Apollodore ,
que nous avons sui-
(i) ApoUodor. , lib- II, J>ag. 97.
FUI pag. 248. vi et le scoliaste d'Apollonius.
(2) Pausan. lib. .
,
,

(3j Idem, ibid.


(4) Tcrenl. Prol. Eunuch.,
es. 7.
' Depuis madame Daciey. Jolr a fait , a
(5) Aniob. , Ub. VII pag-
23«-
l'occasion de ce passage une remarque qui ne
, ,

porte pas sur Bajle , mais sur le Supple'menl (6) Apollod. , lib. II ,
p'ig- 99.
«r» Bloréri de i';35. (7) Dans l'article TtLiEOES.
, . ,

AMPHITRYON. 553
(E) Alcniène exigeait cette condi- El d'une et d'aulreparl pour un tel compliment
Les phrases sont embarrassantes
tion (le celui qui voudrait être son
Le grand dieu Jupiter nous fait beaucoup
mari.'] Nous verrons dans Tarticle au- d'honneur ,
quel la remarque précédente a ren- Et sa bonté sans doute est pour nous sans se-
conde.
voyé le lecteur, qu'Alcmène deman-
H non < promet l'infaillible bonheur
dait principalement qu'on vengeât la D^une fortune en mille biens féconde
mort de son père. Et chez nous il doit naître unjils d'un Ira-
(F) Sa femme portait sur sa télé un srand caur ;
Tout cela va le mieux du monde :
ornement qui tcmoignait que Jupiter Mais enfin coupons aux discours,
avait triple la nuit pour ta caresser , Et que chacun chez sot doucement se retire ,-

plus long-temps. (8)] Voilà qui est sin- Sur telles affaires toujours
Le meilleur est de ne rien dire ".
gulier. Il lui devait sufiire que la tête
de son mari fût chargée du panache, Amphitryon trouve cela si judicieux,
et fortifiée d'ouvrages à cornes et à qu il y donne par son silence un en-
demi-lunes capables de l'emporter sur tier consentement.
les tours de la déesse Cybèle: (G) Il n'est pas vrai qu'il ait appris
: . Qualis Berecinthia mater
. .
aux hommes à mettre de l eau dans
InvehiluTCurru Phrygias turrita per urbes o). le vin.] Cette invention est d'un au-

Qu'était-il besoin qu'elle portât trois tre, si l'on en croit Athénée (11);
lunes entières sur son front ?
mais comme cet autre se nommait
Amphictyon , il est arrivé à un très-
Parvoque Alcmena siiperbit
Hercule
docte critique de confondre avec le le
, lergemtnd crinetn circunidata
Lund (loj. mari d'Alcmène. Je ne doute point
cpie de semblables méprises ne soient
Plusieurs interprètes veulent que ces
souvent cause de la diversité d'opi-
trois lunes aient été le monument des
nions que l'on trouve dans les au-
trois nuits que Jupiter passa avec elle.
teurs. Lisez Athénée vous direz ,
Beau tropliée portatif pour le pauvre qu'Amphiclyon roi d'Athènes, a in-,
Amphitryon Quel monument de son
!
venté le mélange de l'eau et du vin.
honneur sain et sauf! Voulait-elle que Lisez Casaubon vous attribuerez ce
,
tous ceux qui jetteraient Tœil sur sa
secret à Amphitryon roi de Thèbes 5 .

coiffure se souvinssent de la triple


d'où il arrivera que d'assez bons com-
nuit que ses charmes avaient fait pro-
pilateurs formeront deux senti mens :

duire ? Encore un coup son mari ne ,


(Quelques-uns, diront-ils, attribuent
devait pas trop s'accommoder de cet cette invention il .Amphictyon ; d'au-
ornement. Je m'en rapporte à Molière, tres l'attribuent à Amphitryon. Voici
qui le fait acquiescer à la réflexion de
les paroles de Casaubon Quod mnx :

son valet. Les amis d'Amphitryon de ylmphyirionis (je rapporte l'ortho-


ayant su que Jupiter promettait monts graphe comme je la trouve ) inventa
et merveilles pour la réparation de
temperandi vinunt sequitur quo perti-
commençaient à lui en
l'injure, té- neat subobscitrum est. Spectat auteni
moigner leur joie mais Sosie les \ in- eo ne quis miretur quod posteà dicit,
terrompit :
Uomerumvarin temperamenla vini ha-
Messieurs voulez'Vous bien suivre
^ mon sen- baisse nota. Car enim hoc miremur ,
timent ? ciim Tïlç ToD oïvoi/ Kpifia; inventor sit
JVi?vous embarquer nullement
Dans ces douceurs congratulantes : y4niphitryo, quem ante Iliaca tempora
C'est un mauvais embarquement Thebis régnasse nemn dubitat (la)-

(8) Apo'Iodorns , lib. II , pag. 97 , etc. * Molière , AmpbitrjoD , acte III , scène XI.

(9) Virgil. ^neia., lib. Vl, vs. 785. (11) Athen. , lib. l'y, cap. XXVII, p. 179.
(10) Stat. Tbebaïdos lib. VI , vs. 288. (12) Casaub. in Àthen., pag. 373, 324.

FIN DU PREMIER VOLUME.


University of California
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