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DOSSIER PÉDAGOGIQUE

Les fleurs dans la peinture


des XVe, XVIe et XVIIe siècles

Musées royaux
des Beaux-Arts
de Belgique

1
Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique
Geneviève Fettweis
Les fleurs
dans la
peinture
e
des XV ,
e
XVI et
e
XVII
siècles
DOSSIER PÉDAGOGIQUE
Musées royaux des
Beaux-Arts de Belgique

Geneviève Fettweis
Table des matières
Aperçu historique – la représentation florale 1
La place des insectes 2

 Maître de 1473 Tryptique de Jan de Witte (1473) 3


 Maître de la légende de Sainte Anne trinitaire 6
sainte Ursule (fin 15e s.)
 Maître de la légende de La Vierge parmi les Vierges 9
sainte Lucie (fin 15e s.)
 Maerten de Vos (1532- Portrait de la famille Anselme (1577) 13
1603)
 Adriaen Thomas Key Portrait de femme (1564) 17
(1544?-apr. 1589)
 Jan Massijs (1509-1575) Suzanne et les vieillards (1567) 20
Table des matières

Encadré Histoire de la rose 22


 Jan I Brueghel (1568- Nature morte avec guirlande de fleurs et 23
1625) coupe (1618 ?)
 Daniel Seghers (1590- Guirlande de fleurs (1651) 28
1661)
 Jan Philip van Thielen Salvator Mundi dans une niche garnie de 32
(1618-1667) fleurs (1650)
 Jan David de Heem Vase de fleurs 36
(1606-1683)
 Nicolaes van Veerendael Fleurs entourant un buste antique 39
(1640-1691)

Bibliographie succincte 41
Colophon et remerciements 42
Les fleurs dans la peinture
des XVe, XVIe et XVIIe siècles
Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique
APERÇU HISTORIQUE – LA REPRÉSENTATION FLORALE

La représentation florale occupe une place importante depuis la Haute Antiquité.


Les fleurs sont ainsi présentes dans les peintures murales égyptiennes, les
fresques minoennes ou les décorations des villas romaines.

Chez les Grecs et les Romains, les fleurs sont souvent associées au culte des dieux.
Elles incarnent la magnificence et la vitalité de la nature. Par exemple Flore,
déesse des fleurs chez les Romains (Chloris chez les Grecs, épouse de Zéphir, dieu
du vent d’ouest) est souvent représentée sur un char triomphal, la tête couronnée
d’une guirlande et tenant un bouquet de fleurs. Autre exemple : Vénus, déesse de
l’amour dont la rose est l’un des attributs.

Des traités comme l’Histoire des plantes de Théophraste (370 av. J-C) et l’Histoire
naturelle de Pline l’Ancien (28-79 apr. J-C), nous fournissent des renseignements
importants quant à la connaissance, la culture et les propriétés médicinales des
plantes et des fleurs.
Aperçu historique

Le mot Paradis -- qui vient du grec « Paradeisos » issu du persan « Pairidaeza » --


est utilisé par Xénophon à propos du jardin de Cyrus (424-401 av. J-C). Dans la
Bible (Genèse), il signifie « jardin clos entouré de murs où poussent toutes sortes
de plantes et de fleurs ». Il symbolise la félicité et le bonheur.

Dans Le Cantique des Cantiques, le jardin clos (Hortus conclusus) magnifie le couple,
métaphore de l’amour de Dieu. Il deviendra, au Moyen Âge, une allégorie de
l’Eglise présidée par la Vierge Marie.

L’Hortus Conclusus a son pendant profane, le Jardin d’Amour du Roman de la rose


écrit en 1237 par Guillaume de Lorris et complété par Jean de Meung en 1275 et
1280.

Au début de l’ère chrétienne, les Pères de l’Église (Clément d’Alexandrie, IIe s. apr.
J-C ; Tertullien, IIe s. apr. J-C) proscrivent la représentation des fleurs dans
l’iconographie religieuse. L’interdit sera exceptionnellement levé pour la rose par
Paulin de Nola (353-431 apr. J-C). Cette condamnation est à l’origine du déclin de la
culture florale durant près d’un millénaire. Sa réapparition dans l’Occident
chrétien s’amorce seulement après les Croisades. Elle se fait progressivement,
sous la pression populaire, les anciens dieux dépouillés de leur puissance divine ne
représentant plus de menace pour l’Eglise.

1
La plupart des fleurs représentées dans les retables et les enluminures du Moyen
Âge sont des fleurs indigènes, excepté la rose, l’iris bleu et le lys introduits par
les Romains et déjà cultivés par les Crétois dès le 2ème millénaire av. J-C. Ces trois
fleurs font partie des plantes citées dans le capitulaire de villis édicté par
Charlemagne à la fin du VIIIe s.

Les Croisés rapportent d’autres espèces du Moyen-Orient. La Renaissance et la


découverte du Nouveau Monde accroissent l’intérêt et l’étude des fleurs et des
plantes qui sont acclimatées dans les jardins botaniques récemment créés (Pise,
1544, Padoue 1545, Florence 1545, Leyde 1577).

Les fleurs, objets symboliques, possèdent de multiples sens qui dépendent du


contexte et du sujet traité. Leur splendeur éphémère est un hommage à la
richesse et à la beauté de la nature ; mais elle peut aussi exprimer la fragilité de
l’existence humaine, la vanité des biens de ce monde lorsqu’elles sont flétries ou
que leurs feuilles sont rongées par des insectes. Elles perdent progressivement
toute signification symbolique et deviendront de simples objets de délectation.

LA PLACE DES INSECTES


Sous l’influence calviniste, les insectes volants et rampants apparaissent de plus
en plus souvent dans les compositions florales. Elles revêtent alors une valeur
symbolique qui les rapproche des « vanités ».
Aperçu historique

* La mouche
Souvent opposée au papillon dans les natures mortes, elle est symbole de péché
et associée au mal, à la putréfaction (Belzébuth, seigneur des mouches, autre
nom du diable dans la Bible).

* Le papillon
Symbole de spiritualité. Le mot grec « psukhé » signifie âme mais aussi « papillon ».
L’image du papillon s’échappant de sa chrysalide symbolise l’âme quittant le corps
après la mort. C’est pourquoi Psyché, aimée de Cupidon, est parfois représentée
avec des ailes de papillon. La métamorphose du papillon évoque la transformation
spirituelle de l’homme. Pour le chrétien, le papillon est symbole de résurrection et
de salut.

* La chenille
Animal dont le double aspect larvaire et rampant symbolise le mal et la laideur.

2
Maître de 1473
Triptyque de Jan de Witte 1473
Maître de 1473

3
Maître de 1473 - inv. 7007

Triptyque de Jan de Witte


Retable commandé par Jan de Witte, bourgmestre de Bruges, à l’occasion de son
mariage avec Maria Hoose, en juillet 1473. Les époux sont représentés en prière
sur les panneaux latéraux du retable. Ils se situent dans un jardin clos (Hortus
conclusus) entouré de murs crénelés. Sur le panneau central trône la Vierge à
l’enfant sous une tonnelle de roses blanches, devant un drap d’honneur. Contre le
mur du fond, une banquette de verdure. Autour de la Vierge poussent le lys, le
fraisier sauvage, les pensées, les soucis.

1. La rose (Rosa)
Symbole d’amour, elle est la fleur d’Aphrodite (Vénus) née de
l’écume de la mer où pousse un rosier blanc arrosé par le nectar
des dieux. Aphrodite lui donna la beauté ; Dionysos, un parfum
capiteux ; quant aux trois Grâces, elles lui offrirent
respectivement le charme, l’éclat et la joie. C’est tout
naturellement que la rose deviendra une des fleurs associées à la
Vierge Marie; blanche, elle est symbole de pureté; rouge, elle
évoque l’amour divin et la Passion du Christ.

2. Le lys (Lilium candidum)


Dans la Rome antique, le lys est consacré à Junon (la fleur naît du
lait de Junon allaitant Hercule). Il symbolise la fécondité féminine,
la beauté et l’épanouissement spirituel. Dans l’iconographie
chrétienne, il symbolise chasteté et pureté. C’est pourquoi on le
représente souvent dans l’Annonciation.

La fleur de lys est aussi un emblème héraldique : armoiries de la


Maître de 1473

ville de Florence et celles des rois de France.

3. La pensée (Viola tricolor)

4. La violette (Viola odorata)


Elles appartiennent toutes deux à la même espèce
et ont à peu près la même signification
symbolique : modestie, humilité et soumission à la
volonté divine.
La violette au parfum fugace est très répandue et
célèbre depuis l’Antiquité (elle était cultivée en
Perse et à Constantinople).

La violette et la pensée figurent dans les adorations des bergers et des mages et
dans les représentations de la Vierge à l’enfant.

4
5. Le fraisier sauvage (Fragaria vesca)
Ses feuilles trilobées renvoient à la Sainte Trinité.
Ses tiges courtes et rampantes en font un symbole d’humilité.
Ses fleurs blanches sont signe de pureté.
La suavité de ses fruits évoque le paradis, leur couleur rouge, la
passion du Christ et parce qu’il renaît après l’hiver, il est signe de
résurrection.

6. Le pissenlit (Taraxacum officinale)


Son nom français évoque ses propriétés diurétiques. Considéré
comme une mauvaise herbe, il est assimilé aux herbes amères que
l’on devait consommer lors de la célébration de la Pâque (l’Exode,
XII, 8). En raison de ses feuilles dentelées, le pissenlit est
également appelé « dent de lion » auquel est parfois associé le
Christ (Cf. saint Jean, Apocalypse V: 5). Le pissenlit devient ainsi
l’emblème du Sauveur ressuscité et de la rédemption de
l’humanité.

7. Le souci (Calendula officinalis)


Originaire des régions du Sud et du centre de l’Europe, son nom
latin « calendae » signifiait « premier jour du mois » dans le
calendrier romain (le souci fleurit dès les premiers jours du
printemps jusqu’aux gelées). Son nom français, souci, vient du
latin « solsequia» (qui suit le soleil), tout comme le tournesol,
auquel il est apparenté ; il signifie le dévouement inconditionnel.
Maître de 1473

5
Maître de la légende de sainte Ursule
Maître de la légende de sainte Ursule
Sainte Anne trinitaire

6
Maître de la légende de sainte Ursule
Maître de la légende de sainte Ursule - inv. 6719

Sainte Anne trinitaire entourée de saint Jean-Baptiste, Saint Louis, sainte Catherine
et sainte Barbe
Maître anonyme actif à Bruges à la fin du XVe siècle.

Dans un intérieur d’église trônent sainte Anne, la Vierge et l’Enfant devant un


drap d’honneur. Derrière le mur de l’église, un jardin clos (Hortus conclusus) avec
poterne d’entrée, des plates bandes surélevées, entourées d’un treillage d’osier
ou de noisetier couvert de rosiers. Il y a aussi des arbres tuteurés en forme de
plateau.

1. La rose1

La pensée

Le fraisier sauvage

2. La fleur de lys (Lilium)


Décore la cape de Saint Louis. Ce symbole
héraldique de la royauté française est, en fait, une fleur d’iris
jaune. La légende raconte que Clovis, lors de la bataille de Vouillé
en 507, aurait franchi à gué un cours d’eau (la Loire ?) à l’endroit
où poussaient des iris jaunes, ce qui lui aurait permis de
surprendre ses adversaires, les Wisigoths, et de remporter la
victoire. Il aurait alors choisi cette fleur comme emblème. Une
autre légende se rapporterait plutôt à Louis VII (1137-1180) qui, le
premier, aurait arboré cette « Fleur de Louis ».

1
Sauf exceptions, les descriptions déjà traitées ne seront pas reprises dans les pages suivantes.

7
Maître de la légende de sainte Ursule
3. L’iris (Iris)
Vient du nom de la servante de Junon,
messagère des dieux et personnification de l’arc-en-ciel.
Communément considéré comme une des fleurs associées à la
Vierge Marie. Il symbolise la Trinité et remplace parfois le lys dans
les représentations de l’Annonciation. La confusion viendrait
peut-être aussi de son étymologie. En allemand, iris se dit
« schwertlilie », « lys en épée » (la forme de ses feuilles évoquant
l’épée qui transperce le cœur de la Vierge Marie). Dans les
anciens ouvrages d’herboristerie, l’iris est appelé « gladiolus »
(glaive).

4. L’œillet (Dianthus caryophyllus)


Une des fleurs les plus anciennes, d’origine méditerranéenne,
réintroduite dans nos régions à l’époque des Croisades. Son nom
latin, d’origine grecque « dianthus », signifie « fleur de Dieu ». Sa
ressemblance avec le clou évoque la passion du Christ. Dans les
tableaux évoquant les cinq sens, il est associé à l’odorat. Souvent
représenté dans les portraits des XVe et XVIe siècles, il y symbolise
fiançailles et fidélité.

8
Maître de la légende de sainte Lucie
Maître de la légende de sainte Lucie

La Vierge parmi les Vierges

9
Maître de la légende de sainte Ursule
Maître de la légende de sainte Lucie - inv. 2576

La Vierge parmi les Vierges


Maître anonyme actif à Bruges à la fin du XVe siècle.
Ce retable a été commandé pour décorer l’autel de la Chambre de
Rhétorique « De drie Sanctinnen » de l’église Notre-Dame de Bruges.

Dans cette vision du paradis, la Vierge et l’Enfant trônent devant un drap


d’honneur de brocart sous une treille où poussent une vigne et un rosier rouge.

Les saintes qui les entourent sont identifiables grâce à leurs attributs : sainte
Catherine (la roue), sainte Apolline (la dent), sainte Lucie (les yeux), sainte Barbe
(la tour), sainte Marguerite (associée à saint Georges et au dragon), sainte Agathe
(un sein dans une tenaille), sainte Cunera (la flèche et le berceau), sainte Agnès
(l’agneau), Marie-Madeleine (le pot à onguent), sainte Ursule (les flèches) et une
sainte non identifiée (la couronne et la cloche).

Au loin la Jérusalem céleste et le combat du bien et du mal, représenté par saint


Georges et le dragon. Aux pieds de la Vierge poussent de nombreuses plantes et
fleurs qui lui sont associées.

1. La vigne (Vitis vinifera)


Dans l’Antiquité, attribut de Bacchus et des Ménades. Elle est très
fréquemment associée à l’image du Christ. Le cep de la vigne et le
raisin sont cités dans les évangiles, symbolisant le sacrifice du
Christ (Évangile de saint Jean XV I-18). Le pain, le raisin et le vin
évoquent la dernière Cène et l’Eucharistie.

2. L’ancolie (Aquilegia vulgaris)


Son nom latin donne lieu à différentes interprétations. Pour
certains « aquilegia évoquerait le bec ou les serres de l’aigle.

Pour d’autres, son nom renvoie au mot « aquilegium » qui signifie


« réservoir » ou « récipient d’eau ». Le nom anglais « colombine »
évoque la colombe du Saint-Esprit, dont elle symbolise les sept
dons (intelligence, conseil, sagesse, connaissance, piété, force et
crainte). Ou encore les sept douleurs de la Vierge Marie (la
prophétie de Siméon, la fuite en Egypte, la disparition de Jésus au
Temple, la rencontre sur la via Dolorosa, la crucifixion, la déposition de la Croix, la
mise au tombeau).

10
Maître de la légende de sainte Ursule
3. L’aspérule odorante (Galium odoratum)
Plante de mi-ombre qui fleurit au mois de mai (le mois consacré à la
Vierge Marie) et dont les fleurs servent à confectionner le fameux
maitrank (boisson de mai). En néerlandais elle porte le nom de
« onze lieve vrouw bedstro », la paille du lit de la Vierge. Une
légende nous raconte que cette fleur poussait aux abords de la
crèche et que Dieu lui conféra sa délicate odeur de vanille pour la
remercier de sa discrétion.

4. La rose rouge (Rosa sp)


Fait allusion au sacrifice du Christ.

5. La violette (Viola)

6. Le pissenlit (Taraxacum officinale)

7. Le plantain (Plantago)

Plante médicinale aux multiples propriétés qui pousse le long des


chemins, elle pourrait nous inciter à “mieux voir”, à suivre la bonne
direction.

11
Maître de la légende de sainte Ursule
8. Le fraisier sauvage (Fragaria Vesca)

12
Maerten de Vos
(Anvers 1532 – 1603)
Portrait de la famille Anselme
1577
Maerten de Vos

13
Maerten de Vos - inv. 3689

Portrait de la famille Anselme

Maerten de Vos est le plus célèbre représentant d’une dynastie de peintres


anversois. Élève de son père Pieter le vieux et de Frans Floris, il se rend en Italie en
1552, à Rome, Florence et surtout Venise où il travaille dans l’atelier du Tintoret.
De retour à Anvers, il est nommé doyen de la guilde des peintres en 1572. Il est un
des peintres les plus prisés et productifs de son temps.

« L’entente familiale est source de prospérité et de bonheur » : c’est ce qu’affirme


le cartouche où sont repris les noms des membres de cette famille, ainsi que
certaines dates.

Les objets représentés sont signes d’opulence : riches vêtements ornés de


dentelle, mobilier sculpté, encrier d’argent, hochet tenu par la petite fille.
L’harmonie familiale est ici symbolisée par le grillon. L’oiseau sur l’épaule de l’aîné
est une métaphore de l’éducation réussie.

L’amour est évoqué par les gants de mariage ; le bouquet, d’où se détache une
rose rouge, signifie vitalité et amour.

Les fleurs représentées dans le bouquet sont toutes des fleurs printanières
exprimant la diversité, la richesse et la vivacité de la nature.

Ce tableau, date de la 2e moitié du XVIe siècle, période où la botanique devient une


science à part entière (auparavant elle faisait partie de la médecine). C’est aussi
l’époque où l’on importe de nouvelles variétés venant du Nouveau Monde.
Maerten de Vos

Dans ce tableau apparaît pour la première fois la tulipe.

1. La tulipe (Tulipa)
Du perse « toulipan » (désigne le
turban). Elle est importée de
Constantinople, et devient au XVIe
siècle une des fleurs les plus
représentées, symbolisant luxe,
puissance et richesse. On la
retrouvera dans les tableaux appelés
“Vanités”.

14
La tulipe est introduite en Europe vers 1560 par Ogier Ghislain de Busbecq (Comines
1522-1592), ambassadeur d’Autriche à Constantinople auprès de Soliman le
Magnifique dont la tulipe était la fleur préférée. C’est Charles de l’Écluse (Arras 1526-
Leyde 1609), célèbre botaniste, conservateur du jardin botanique de Leyde qui
l’acclimate dans nos régions.

L’engouement pour la tulipe va en s’amplifiant, tant et si bien que le bulbe de


tulipe devient objet de spéculation. Ce phénomène prit une telle ampleur, de 1634
à 1637, qu’on parle de « tulipomanie ». Ainsi, en 1637 on offre 30.000 florins pour 3
bulbes alors que les maisons les plus chères en bordure des canaux d’Amsterdam
coûtaient 10.000 florins et que le salaire annuel d’un artisan ne dépassait pas 300
florins. L’effondrement du marché provoque de nombreuses faillites, mais ne
signifie pas pour autant la fin du commerce et de la culture de la tulipe.

Les tulipes chamarrées (perroquet) étaient les plus recherchées et les plus
coûteuses. En fait, les variations de couleurs étaient dues à un virus, phénomène
encore inconnu à l’époque.

Outre la tulipe, Charles de l’Écluse introduit dans nos régions la jacinthe,


l’amaryllis, le lilas, et la fritillaire impériale, qui connaîtra elle aussi un succès
retentissant.

2. La fritillaire méléagre ou pintade (Fritillaria Meleagris)


Fleur étrange, rose violacé moucheté de blanc, qui provient d’Europe méridionale
et apparaît chez nous à cette époque. Une autre fritillaire, la fritillaire impériale,
connaîtra la même fortune que la tulipe et symbolisera elle aussi orgueil et vanité.

3. Le narcisse (Narcissus)
Fleur printanière dont le nom évoque l’amour de soi, s’inspirant du récit
Maerten de Vos

mythologique d’Ovide racontant l’histoire de ce beau jeune homme qui s’éprit de


son reflet dans l’eau, se noya et fut changé en fleur.

4. La primevère (Primula veris)


Ici, primevère officinale ou coucou ; elle apparaît à la fin de l’hiver, annonciatrice
du printemps. Au Moyen Âge, elle symbolise les clefs de Notre-Dame. Petites
fleurs des jardins médiévaux, la primevère est liée à l’amour. Symbole de jeunesse,
offerte à un premier amour.

Ce sont les Anglais qui, dès le XVIIe siècle, donnent aux primevères leurs lettres de
noblesse, en en créant d’innombrables variétés.

5. L’œillet (Dianthus)

15
6. La rose (Rosa)
La rose et l’œillet repris dans le bouquet symbolisent amour et mariage.

7. La pivoine (Paeonia)
Selon Homère, dans l’Iliade, ce
sont des graines de pivoines qui
auraient guéri Hadès, dieu des
Enfers, blessé par des flèches.

La pivoine, originaire de Chine,


apparaît au Moyen Age dans nos
régions. Tout comme l’anémone,
la primevère, l’ancolie et le
muguet, elle figure dans les listes
de plantes d’Hildegarde von
Bingen (1098-1179), mystique et
e
religieuse bénédictine allemande. Au XVI siècle, dans l’herbier du botaniste
Rembert Dodoens, on retrouve une représentation fidèle de la pivoine. On sait
qu’elle avait une place de choix dans le jardin botanique de Leyde.
Maerten de Vos

16
Adriaen Thomas Key
( Anvers ? vers 1544 - Anvers ? après 1589)
Portrait de femme
1564
Adriaen Thomas Key

17
Adriaen Thomas Key - inv. 2609

Portrait de femme
L’inscription dans le haut du tableau nous dit que
cette jeune femme est âgée de 27 ans et que le
tableau date de 1564.

Elle tient dans la main droite un bézoard, une


sorte d’amulette (du persan pâdzahr, qui signifie
antidote) employée pour traiter divers maux dont
la mélancolie.

A côté d’elle, un magnifique bouquet dans un vase


« à la façon de Venise… ». Un œillet blanc et une
rose gisent sur la table évoquant la brièveté de la
vie sur terre et nous rappellent que beauté et
jeunesse sont éphémères.

1. L’oeillet (Dianthus = fleur de Dieu)


Est dédié à Jupiter. Les Romains y virent le
symbole de courage et de fidélité. Les Croisés le
Adriaen Thomas Key

réintroduisirent chez nous. Sa forme évoque un


clou, c’est pourquoi il deviendra une des fleurs
associées à la Passion du Christ.

Dans les pays du Nord, cette fleur est symbole de


mariage ou de fiançailles. Elle figure souvent dans
certains portraits de nos régions.

2. La rose (Rosa)

3. L’ancolie (Aquilegia vulgaris)

4. La julienne des dames (Hesperis matronalis)


Hesperis est l’heure du soir dans la mythologie
grecque, car c’est le soir que cette fleur exhale
son parfum. Elle est originaire d’Europe
méridionale et connue depuis l’Antiquité. Dans le
langage des fleurs elle symbolise l’attente.

18
5. Le souci (Calendula officinalis) Cf. p.8
Sa symbolique est à rapprocher de celle du tournesol (de l’italien « tornasole », qui
se tourne vers le soleil).

6. Le genêt (Genista)
Symbole dans certaines régions du Nord des points cardinaux et de la fonction
royale. Cette fleur fut choisie comme emblème par Geoffroy V (1128-1151) comte
d’Anjou et du Maine, dont les successeurs, les Plantagenêt, régnèrent sur
l’Angleterre.

Les branches fleuries de genêt étaient parfois utilisées lors des funérailles. On en
couvrait le corps des défunts.

Tout dans le bouquet évoque l’éphémère. Il est donc à rapprocher des tableaux
de vanités, qui connaîtront un succès considérable au XVIIe siècle, surtout en
Hollande, sous l’influence calviniste.
Adriaen Thomas Key

19
Jan Massijs
(Anvers 1509 - 1575)
Suzanne et les vieillards
1567
Jan Massijs

20
Jan Massijs (1509-1575)- inv. 2548

Suzanne et les vieillards


Fils de Quentin Metsijs, Jan Massijs est un des initiateurs de la Renaissance aux
Pays-Bas. Accusé d’hérésie, il est banni de la ville d’Anvers et se rend en Italie.

Ce tableau, dont le thème est l’érotisme, a pour pendant un autre tableau de Jan
Massijs, « Loth et ses filles ».

La composition évoque un passage de la Bible (Livre de Daniel). La chaste


Suzanne est l’objet de convoitise de deux vieillards qui la surprennent au bain.
Face à ses refus, ils l’accusent d’adultère. Le prophète Daniel les confond et les
convainc de faux témoignage.

L’action se situe dans un jardin italien. Suzanne, telle Vénus et les Grâces, est
accompagnée de ses servantes qui s’enfuient à l’arrivée des vieillards.

Le corps de Suzanne, typiquement maniériste, incarne la beauté chaste opposée à


l’ambiguïté des sentiments des deux vieillards, symbolisée par la tête de bouc
sculptée sur la fontaine. (La biche et les lapins dans le jardin sont également
symboles de luxure).

1. Les roses blanches


Attributs de Vénus, les roses sont ici
symboles de pureté, idée renforcée par la
transparence du vase posé sur le bassin.
Jan Massijs

21
L’histoire de la Rose

L'histoire de la rose remonte à la nuit des temps. On la rencontre à l'état sauvage


dans tout l'hémisphère nord; c'est l'églantier (rosa canina) qui est utilisé comme
porte greffe pour certains rosiers cultivés. Tout au long des siècles, l'importation
de variétés venues d'Orient et le travail des botanistes vont donner une multitude
de variétés de rosiers cultivés. On sait que « la reine des fleurs » était déjà
appréciée durant l'Antiquité chez les Egyptiens, les Grecs, les Romains mais aussi
en Chine, à Sumer, à Babylone.

C'est Pline l'Ancien, le célèbre naturaliste romain disparu sous les cendres du
Vésuve, qui nous donnera le plus de renseignements sur la rose dans le monde de
l'Antiquité. Il énumère et décrit les roses préférées des Romains.

Au Moyen Âge le Roi Childebert 1er (511-558), un des fils de Clovis, avait créé un
jardin de roses dans son palais situé entre la Seine et Saint-Germain-des-Prés.
Charlemagne (742-814) dans son fameux capitulaire de villis recommande la
culture de roses. Le Moyen Âge chrétien a consacré la rose à la Vierge Marie. La
rose mystique devient une figuration spirituelle de Marie. Hildegarde von Bingen
(1098-1179), mystique et religieuse bénédictine allemande, recommande la rose
parmi les plantes curatives. En 1250, Thibault IV de Champagne rapporte de la
L’histoire de la Rose

septième croisade en Terre Sainte la rose gallique (la rose de Milet décrite par
Pline). A l'époque on cultivait la rose pour ses vertus thérapeutiques et son
parfum.

Ce n'est qu'à la Renaissance qu'apparaissent les roses d'ornement. La Quintinie,


jardinier de Louis XIV, décrit 14 variétés de roses. Dans l'histoire de la rose, deux
grandes divisions s'imposent : jusqu'au milieu du XVIIIe siècle, la plupart des roses
cultivées étaient issues de la rose gallique au parfum suave mais qui ne fleurissait
qu'un mois en été. Vers 1700, aux variétés connues viennent s'ajouter des variétés
venues d'Inde, du Japon et de Chine à floraison continue. En 1752, le naturaliste
suédois Peter Osbeck (1723-1805), ami de Linné, rapporte de Chine un rosier à
fleurs doubles qui fleurit tout l'été, ce qui fut une véritable révolution.

Au XIXe siècle, on acclimate en Angleterre des rosiers venant de Chine. La


prédominance des Anglais en matière de roses est définitivement acquise. Vers
1800, l'Impératrice Joséphine (l'épouse déchue de Napoléon) réunit 250 espèces
et variétés de roses dans son jardin de la Malmaison. Et depuis lors, l'amour pour
la rose ne s'est jamais démenti.

22
Jan I Brueghel
(Bruxelles 1568 – Anvers 1625)
Nature morte avec guirlande de fleurs et coupe
1618 ?
Jan I Brueghel

23
Jan I Brueghel

24
Jan I Brueghel (Bruxelles 1568 – Anvers 1625) - inv. 5013

Nature morte avec guirlande de fleurs


Fils cadet de Pierre Bruegel l’Ancien, Jan Brueghel2 est l’un des plus célèbres
peintres de fleurs du XVIIe siècle. C’est lui qui introduit aux Pays-Bas le thème de la
guirlande de fleurs autour d’un sujet souvent religieux.

Il fait un long séjour en Italie et travaille à Milan pour le cardinal Federico


Borromeo. De retour à Anvers, il devient doyen de la guilde de Saint-Luc. Peintre à
la cour des archiducs Albert et Isabelle, il collabore avec Rubens, son ami, à la
réalisation de guirlandes autour de sujets religieux.

Les guirlandes peintes par Brueghel sont ornées de fleurs indigènes de différentes
saisons agrémentées de fleurs cultivées.

Outre de très beaux paysages, le peintre a composé de magnifiques bouquets de


fleurs amoncelées dans une corbeille d’osier, une coupe de faïence ou
d’orfèvrerie.

Son art, d’une extrême minutie, d’une grande délicatesse, lui vaut le surnom de
Brueghel de Velours.

Le courrier échangé avec le cardinal Borromée nous fournit de nombreuses


informations : entre autres que les tulipes peintes pour le vase de fleurs conservé
à la pinacothèque de Milan avaient été peintes d’après nature au mois de mai
précédent ; que la réalisation d’un tableau aurait été interrompue durant l’hiver
1606, faute de fleurs fraîches.

Dans une autre lettre datée du 22 avril 1611, il mentionne qu’il « a fait des fleurs
seul, sans aide, que les fleurs s’épanouissent pendant 4 mois et qu’il faut se
Jan I Brueghel

hâter… ». Ces fleurs, il pouvait les contempler à loisir dans le jardin botanique des
archiducs au palais du Coudenberg à Bruxelles.

Ici, la guirlande est probablement une couronne de mariée déposée contre une
coupe de vermeil. A côté, un coffret à bijoux contenant un anneau d’or, des
monnaies, un collier de perles, etc. Sur la table, une épingle à cheveux, des
anneaux entrelacés qui, comme le collier de perles, sont symboles de mariage.

La couronne (de mariée) se compose de fleurs printanières et estivales : l’œillet, la


rose, l’anémone, la pervenche, le muguet, le myosotis, l’aubépine, la tulipe, le
tagète et la renoncule, le jasmin, la violette et la santoline.

2
Conformément au manuel de référence des Musées royaux, nous écrirons Bruegel pour Pierre
(Pieter) Bruegel dit l’Ancien, et Brueghel pour ses fils Pieter II (dit le Jeune) et Jan I (dit aussi Jan
l’Ancien, ou Brueghel de Velours), ainsi que pour son petit-fils Jan II (dit aussi Jan le Jeune, fils de
Jan I). Ces graphies sont celles sous lesquelles ces peintres signaient leurs œuvres.

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1. L’anémone (Anemone coronaria) et (Anemone hepatica)
Fleur du vent, elle symbolise l’éphémère, le printemps qui renaît, la beauté fragile.
Elle est née du sang d’Adonis, amoureux de Vénus et mortellement blessé par son
rival Mars. Des pleurs de Vénus naquit l’anémone. Cette fleur, très répandue dans
le bassin méditerranéen et au Proche-Orient, est introduite dans nos régions au
XVIe siècle via Constantinople.

2. L’œillet (Dianthus)

3. Myosotis (Myosotis sylvatica)


Cette jolie fleur bleue, originaire des régions tempérées, est associée au souvenir,
à la mémoire. Son surnom est « ne-m’oubliez-pas » (son nom anglais est forget-me-
not).

4. La pervenche (Vinca minor)


Aussi surnommée violette des sorcières ou herbe de fidélité car son nom latin,
vincere, signifie : lier, s’attacher. Ses rhizomes rampants forment comme une
corde, elle exprime donc la fidélité et l’amitié. Sa délicatesse, sa couleur bleue, en
font un symbole de modestie et de douceur. Elle est parfois associée au culte de la
Vierge Marie.

5. Le muguet (Convallaria majalis)


Le nom latin signifie « des vallées du mois de mai ». En anglais, lily of the valley ou
lys des vallées. Son nom français vient de musc, substance parfumée. Fleur
naturellement associée à Marie à cause de sa blancheur et de la suavité de son
parfum (cf. Le Cantique des Cantiques : «Je suis le narcisse de Sharon, le lys des
vallées»). Cette fleur est également associée à l’idée d’humilité (sa corolle est
tournée vers le bas). Vivace de nos sous-bois, elle annonce le printemps.

Le 1er mai, la tradition veut que l’on offre un brin de muguet « porte-bonheur » aux
Jan I Brueghel

personnes aimées. Cette coutume remonte au XVIe siècle : Charles IX en aurait


offert à son entourage comme porte-bonheur. Ce n’est qu’au XXe siècle qu’il sera
associé à la fête du travail. La vente du muguet dans les rues remonte à 1936 (le
Front Populaire en France).

6. La nigelle de Damas (Nigella damascena)

7. La santoline (Santolina chamaecyparissus)


Appelée aussi « petit cyprès ». Plante originaire du pourtour méditerranéen, qui
pousse en terrain pauvre. Elle se caractérise par un feuillage gris et des petites
fleurs jaunes. Utilisée comme plante médicinale.

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8. Le tagète (Tagetes patula)
Fleur originaire d’Amérique centrale, récemment introduite dans nos régions. Son
nom proviendrait de Tages, dieu étrusque adopté par les Romains (La légende
raconte qu’il aurait surgi de terre). Autre nom de cette fleur : œillet d’Inde.

9. La rose (Rosa)

10. La renoncule (Ranunculus arvensis)


Fleur indigène dont le nom dérive du latin, rana, « petite grenouille », car certaines
de ses variétés aquatiques ont un fruit qui rappelle la forme du têtard. Le nom de
« bouton d’or » est couramment donné à certaines de ses espèces à fleurs jaunes.

Les renoncules cultivées proviennent d’Asie et sont introduites en Europe au


Moyen Age. En raison de ses belles couleurs, la renoncule évoque le luxe et la
séduction.

11. Le jasmin (Jasminum officinale)


Fleur originaire des Indes, très appréciée en Orient, et connue depuis l’Antiquité.
Le jasmin officinal, qui fleurit au mois de mai, est consacré à la Vierge Marie. Sa
blancheur évoque la pureté mais aussi la grâce, l’élégance et l’amour divin.
Associé à la rose, il symbolise l’amour. On le retrouve tressé en couronne sur la
tête des anges et des saints.
Jan I Brueghel

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Daniel Seghers
(Anvers 1590-1661)
Guirlande de fleurs
1651
Daniel Seghers

28
Daniel Seghers (Anvers 1590-1661) - inv. 183

Guirlande de fleurs
Sa famille est obligée de quitter Anvers pour les Provinces-Unies, pour raisons
religieuses. De retour à Anvers, il est admis dans l’atelier de Jan Brueghel l’Ancien,
se convertit au catholicisme et entre au noviciat chez les Jésuites. Il séjourne
ensuite en Italie avant de rentrer au couvent d’Anvers où il reçoit des hôtes
célèbres tels que Ferdinand d’Autriche, Léopold Guillaume d’Autriche et le roi
Charles II d’Angleterre, à qui il offre certaines de ses œuvres.

Seghers reprend certains thèmes de Jan Brueghel, mais dans un style différent de
celui de son maître. Par exemple, ses guirlandes sont faites d’une succession de
petits bouquets de fleurs cultivées, réunies par un lien de lierre. Elles ne sont pas
étoffées de multiples fleurettes. De même, ses roses sont serrées, ses tulipes
entrouvertes, jamais elles ne sont épanouies.

Les cartouches en trompe-l’œil, à sujets religieux, sont souvent réalisés par


d’autres artistes tels Érasme Quellin.

Ici, guirlande est un simple feston de fleurs suspendu à un ruban bleu. S’y mêlent
des fleurs printanières, estivales ou hivernales comme l’hellébore.

1. La fleur d’oranger (Citrus bigaradia)


L’oranger, arbre toujours vert, et sa fleur symbolisent le
paradis. Selon la mythologie, Jupiter offre à Junon des fleurs
d’oranger lorsqu’il la prend pour épouse. Cette fleur deviendra
un ornement traditionnel des cérémonies nuptiales.
Délicieusement parfumée, elle symbolise pureté et chasteté.
Daniel Seghers

Elle est l’attribut de Marie. Dans certains tableaux, l’orange, à


l’instar de la pomme, est un symbole de rédemption.

2. Le liseron tricolore (Convolvulus tricolor)


Symbole d’amour divin, comme le lierre, il relie et attache.

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3. Haricot d’Espagne (Phaseolus vulgaris)
Plante américaine importée dans nos régions via l’Espagne à la
fin du XVe siècle.

4. L’hellébore ou ellébore (Helleborus niger)


On l’appelle aussi « rose de Noël », rose de carême, ou herbe
aux fous. C’est une des plus belles fleurs de l’hiver. Originaire du
bassin méditerranéen, elle fleurit de novembre à avril. Elle est
connue depuis l’Antiquité. La légende raconte qu’un jeune
berger grec, Mélampe, guérit de la folie la fille du roi d’Argos en
lui faisant absorber un breuvage composé de lait et de graines
d’hellébore. Cette plante deviendra au Moyen Âge l’auxiliaire
des sorciers et des apothicaires qui l’employaient pour soigner
les troubles psychiques.

5. L’anémone des fleuristes (anemone coronaria)


Daniel Seghers

30
6. La rose

7. L’œillet

8. L’ancolie

9. La tulipe

10. La nivéole
Daniel Seghers

31
Jan Philip van Thielen
(Malines 1618 – 1667)
Salvator Mundi dans une niche garnie de fleurs
1650
Jan Philip van Thielen

32
Jan Philip van Thielen (Malines 1618 – 1667) - inv. 154

Salvator Mundi dans une niche garnie de fleurs


Seul élève de Daniel Seghers, dont il reprend le genre de la guirlande de fleurs
autour d’un cartouche. Né à Malines, il devient maître de la guilde de Saint-Luc à
Anvers, et ensuite à celle de Malines. Il est le beau-frère d’Erasme Quellin, avec qui
il collabore souvent.

Cette guirlande est composée de trois bouquets de fleurs (évoquant la Trinité)


reliés par du lierre, entourant un cartouche sculpté représentant le « Salvator
Mundi » qui est l’œuvre d’Erasme Quellin. Dans cette guirlande s’entremêlent de
multiples fleurs indigènes et cultivées de différentes saisons. Des papillons qui
symbolisent la spiritualité virevoltent dans la composition.

Outre les roses, tulipes, lys et narcisses, ce tableau foisonne de fleurs :

1. La rose trémière (Althea officinalis)


Déformation de « rose d’outremer ». Fleur aux multiples coloris, importée d’Orient
par les Croisés.

2. La buglosse (Anchusa azurea)


Jan Philip van Thielen

Plante au bleu intense, originaire du bassin méditerranéen.

3. L’anémone (Anemone species)

4. L’anémone (Anemone hepatica)

5. La bourrache (Borago officinalis)


Plante commune des régions tempérées et méridionales, employée pour ses
propriétés médicinales depuis le Moyen Âge.

6. La campanule (Campanula persicifolia)


Fleur originaire d’Europe dont il existe de nombreuses variétés.

7. Le perce-neige (Galanthus nivalis)


Cette fleur, qui apparaît en hiver, symbolise le renouveau.

8. Le lierre (Hedera helix)


Avec la vigne, il est un des attributs de Dionysos. Vert en toutes saisons, il
symbolise la permanence végétative, le cycle éternel de la mort et de la
renaissance, le mythe de l’éternel retour. Cette plante grimpante, qui s’accroche à
son support, est devenue symbole d’amour et d’amitié. Le caractère persistant de
son feuillage en a fait l’un des emblèmes de l’immortalité. Le lierre évoque donc
aussi l’image symbolique du Christ.

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9. Le liseron tricolore (Convolvulus tricolor)
Symbole de l’amour divin.

10. L’œillet (Dianthus)

11. La digitale (Digitalis purpurea)

Son nom provient du latin « digitus » : doigt et rappelle la forme de la fleur. Elle
pousse à la lisière de nos forêts. Sa tige peut atteindre 2 mètres de haut. Cette
plante, utilisée pour ses propriétés médicinales, peut être très toxique.

12. Le jasmin (Jasminum officinale)


Fleur originaire des Indes, très appréciée en Orient, et connue depuis l’Antiquité.
Le jasmin officinal, qui fleurit au mois de mai, est consacré à la Vierge Marie. Sa
blancheur évoque la pureté mais aussi la grâce, l’élégance et l’amour divin.
Associé à la rose, il symbolise l’amour. On le retrouve tressé en couronnes sur la
tête des anges et des saints.

13. L’hellébore (Helleborus niger).

14. La jacinthe (Hyacinthus orientalis)


Jan Philip van Thielen

Comme l’anémone et le narcisse, la jacinthe est une fleur dont la mythologie


grecque attribue la naissance à la mort d’un héros, Huakinthos. Symbole de
prudence et de sagesse, cette fleur, qui répand un parfum suave, évoque le Christ
dans la culture chrétienne. Originaire de Méditerranée orientale, cette plante à
bulbe fut introduite et acclimatée dans nos régions par Charles de l’Ecluse, à la
même époque que la tulipe.

15. La nivéole d’été (Leucojum aestivum)

16. Le lys blanc (Lilium candidum)


Lys de la Madone, rose de Junon. Le mot latin « Lilium » vient du grec « Leirion ».
Originaire d’Orient, ce sont les Phéniciens qui l’auraient introduit en zone
méditerranéenne.

Symbole de pureté, il est une des fleurs associées à la Vierge Marie.

17. Le narcisse (Narcissus tazetta)

18. La pivoine (Paeonia)

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19. La capucine (Tropaoelum minus)
Originaire du Pérou, cette plante grimpante aux couleurs flamboyantes fleurit
dans les zones tempérées de mai à octobre. Elle symbolise la flamme et la passion
amoureuse.

Elle est introduite dans nos régions au XVIIe siècle et c’est d’ailleurs à cette époque
qu’elle apparaît dans nos tableaux. Son nom lui vient de la ressemblance de son
inflorescence avec la capuche des frères Capucins. La mode de la capucine est
lancée par Louis XIV qui, séduit par cette fleur, en offre un bouquet à Madame de
Maintenon.

20. La rose (Rosa)

21. La tulipe (Tulipa)


Jan Philip van Thielen

35
Jan David de Heem
(Utrecht 1606-Anvers 1683)
Vase de fleurs
Jan David de Heem

36
Jan David de Heem (Utrecht 1606-Anvers 1683) - inv. 105

Vase de fleurs
Bien qu’appartenant à l’école hollandaise, c’est à Anvers que se situe la plus
grande partie de son activité. Connu surtout comme peintre de natures mortes.
C’est par son intermédiaire que le thème de la « vanité » (Vanitas) rénové par la
Hollande calviniste, parviendra à Anvers. Héritier de Daniel Seghers, dont il
reprend le thème des guirlandes et vases de fleurs, qu’il allège d’épis de blé, de
ronces aux longues tiges sinueuses. Son sujet favori est le bouquet de fleurs dans
un vase où se reflète une fenêtre.

Cette composition relève de la « Vanité ». Le vase de fleurs, qui repose sur un


socle de pierre, est envahi par des mouches, chenilles et escargots, qui désignent
le monde terrestre voué à la putréfaction et à la décomposition et qui s’opposent
aux papillons, symboles de résurrection et de salut. L’opposition est renforcée par
la présence de ronces et de blé, symbolisant respectivement la mort du Christ et
l’Eucharistie.

1. La tulipe (Tulipa)
La tulipe panachée attire le regard par ses coloris contrastés, symbolisant orgueil
et vanité.
Jan David de Heem

2. La pivoine (Paeonia officinalis)


Venue de Chine où elle est cultivée depuis des siècles, elle incarne la beauté.
La pivoine figure dans les jardins du Paradis. Elle fait partie de la liste des plantes
d’Hildegarde von Bingen (vers 1150).

3. Le chèvrefeuille (Lonicera caprifolium)


Il noue ses rameaux aux autres plantes. Il est signe de lien, d’attachement.
Déjà dans l’Antiquité, les Egyptiens, les Grecs et les Romains appréciaient son
essence qui entrait dans la composition de nombreux cosmétiques.

4. Le mouron rouge (Anagallis arvensis)

5. Le cumin des prés (Carum carvi)

6. Le souci (Calendula officinalis)

7. Le liseron tricolore (Convolvulus tricolor)

8. La camomille (Chamaelum nobile)

9. La rose (Rosa)

10. Le tagète (Tagetes erecta)

11. Le haricot d’Espagne (Phaseolus collineus)

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12. La ronce (Rubus)
Arbrisseau très commun de nos régions tempérées, dont le fruit est comestible (la
mûre). Ses épines redoutables évoquent la couronne du Christ.

Le médecin grec Dioscoride (40 apr. J.C.), dont l’œuvre a été la source principale
de connaissance en matière de plantes médicinales, la préconisait pour soigner de
multiples maux. Au Moyen Âge, elle fait partie de la pharmacopée traditionnelle
(cf. Hildegarde von Bingen).

13. Le blé, le froment (Triticum aestivum)


Depuis la plus haute Antiquité, le blé est symbole de fertilité et d’abondance. Il est
l’attribut de Déméter (Cérès chez les Romains), divinité primitive de la fertilité et
de la fécondité, évoquant la pérennité des saisons, l’alternance de la mort et de la
vie. Le culte de la déesse était la garantie de cette permanence cyclique.

C’est tout naturellement que le blé deviendra un symbole du Christ, de sa mort et


de sa résurrection. L’image du pain, et donc du blé, est étroitement liée à
l’Eucharistie.

14. Le pavot (Papaver somniferum)


Ses propriétés somnifères sont connues depuis la plus haute Antiquité. Il est
l’attribut d’Hypnos, dieu du sommeil, des rêves et de la nuit.
Jan David de Heem

L’iconographie chrétienne s’approprie son image. Son rouge intense fait


référence à la Passion du Christ. Le pavot sauvage, coquelicot, qui pousse dans les
champs de blé évoque l’Eucharistie. Coquelicot, « cocorico », renvoie au coq dont
la crête écarlate est évoquée par la fleur.

38
Nicolaes van Veerendael
(Anvers 1640-1691)
Fleurs entourant un buste antique
Nicolaes van Veerendael

39
Nicolaes van Veerendael (Anvers 1640-1691) - inv.4628

Fleurs entourant un buste antique


Né et formé par son père (Willem van Veerendael) à Anvers, où il est inscrit en
qualité de maître. On connaît de lui des guirlandes, corbeilles de fleurs et
bouquets. Il collabore avec David Teniers II. Dix-neuf de ses tableaux sont datés
(1662-1690). Dans certaines de ses œuvres, il emprunte les épis et les ronces à
J. David de Heem.

Dans ce tableau, l’opposition entre l’antiquité païenne et le christianisme est


évidente : le buste de Flore (Flora), déesse romaine des fleurs (identifiée à la
nymphe grecque Chloris, épouse de Zéphir), entouré d’une multitude de fleurs
épanouies, est confronté à droite au chardon et à l’épi de blé, respectivement
symboles de la Passion du Christ et de l’Eucharistie. Des insectes rampants et des
mollusques nous rappellent la fragilité de la vie sur terre. Les papillons qui
Nicolaes van Veerendael

virevoltent sont signe de la Résurrection du Christ et de la Rédemption.

1. La pâquerette (Bellis perennis)


Son nom latin signifie « qui fleurit toute l’année ». Fleur vivace de nos prairies, elle est
associée à la fête de la Résurrection (Pâques). Elle est également une des fleurs de la
Vierge Marie. Elle symbolise innocence et attachement.

2. L’anémone (Anemone hepatica)

3. L’anémone (Anemone coronaria)

4. L’aneth, le fenouil (Anethum perennis)

5. Le souci (Calendula officinalis)


6. Le chardon (Carduus crispus)
7. Le liseron tricolore (Convonvulus tricolor)

8. L’œillet (Dianthus)
9. Le myosotis (Myosotis sylvatica)
10. La rose (Rosa)

11. Le blé (Triticum aestivum)


12. La capucine (Tropaeolum minus)
13. La tulipe (Tulipa)

14. Le tagète (Tagetes)


15. Le céraiste des champs (Cerastium arvense)
Jolie fleur indigène à la corolle blanche veinée de gris.

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BIBLIOGRAPHIE SUCCINCTE
Livres

 L. IMPELLUSO, La nature et ses symboles, Paris 2004, Ed. Hazan.

 R. DE AYALA, M. AYCARD, Une histoire de fleurs, Paris 2001, Ed. Perrin.

 M. BARIDON, Les jardins, Paris 1998, Ed. Robert Laffont.


BIBLIOGRAPHIE SUCCINCTE

 Sous la direction de S. VAN SPRANG, L’empire de Flore, Bruxelles 1996, Ed. La


Renaissance du Livre.

 JAMES HALL, Dictionnaire des Mythes et des Symboles, Paris 1994, Ed. Robert
Laffont.

 Ch. STERLING, La nature morte de l’Antiquité au XXe siècle, nouvelle édition


révisée, Paris 1985, Ed. Macula.

 J. CHEVALIER, A. GHEERBRANT, Dictionnaire des Symboles, Paris 1969, Ed.


Robert Laffont.

 M-L. HAIRS, Les peintres flamands de fleurs au XVIIe siècle, Bruxelles 1965, Ed.
Meddens.

Catalogues d’expositions

 La peinture florale du XVIe au XXe siècle, Bruxelles, Crédit Communal, 1996.

 Tableaux de fleurs du XVIIe siècle – Peinture et botanique, Bruxelles, Musées


royaux des Beaux-Arts, 1989.

 Symbolique et Botanique, Le sens caché des fleurs dans la peinture du XVIIe siècle,
Caen 1987.

41
COLOPHON
Ce dossier a été réalisé par Geneviève Fettweis en collaboration avec l’Educateam
des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique.

Rédaction : Geneviève Fettweis


COLOPHON - REMERCIEMENTS

REMERCIEMENTS
Merci à Isabelle Vanhoonacker (responsable Educateam).

Merci à Jacqueline Sandron, Hugo De Fraye, Pierre de Menten de Horne, Géraldine


Barbery, Jean-Philippe Theyskens, Manu Chantraine, Hélène Monréal, Hélène
Robic et Jean Pasquero pour leur aide précieuse.

© EDUCATEAM / Musées royaux des Beaux-Arts – 2011

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