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AUTOMNE- 2013
comité d’histoire
comité
d’histoire
Pour mémoire
Conseil général de l’Environnement et
du D éveloppement durable
Comité d’Histoire
Tour Pascal B
92055 L a Défense cedex
www.developpement-durable.gouv.fr
n°12
AUTOMNE- 2013
comité
d’histoire
R e v u e d u m i n i s t è r e d e l ’ É c o l o g i e , d u Dé v e l o p p e m e n t d u r a b l e e t d e l ’ é n e r g i e
2 éditorial
Dans le numéro 12, cette orientation est illustrée par cinq articles consacrés
à la politique des déchets ménagers en France et en Allemagne et par quatre
articles relatifs aux 30 ans de la loi d’orientation sur les transports intérieurs (LOTI). La revue
comporte aussi des articles spécifiques.
Pour ce qui concerne les déchets ménagers, Stéphane Frioux (université Lumière Lyon 2)
rappelle comment les villes commencèrent à s’impliquer dans la collecte des déchets au
nom de l’hygiène à la fin du XIXe siècle, de l’invention des « poubelles » (1884) aux premières
usines d’incinération en France. Puis le traitement des déchets s’est industrialisé pendant
l’entre-deux guerres. L’État a commencé à s’impliquer dans ce domaine au début des années
1960 (pollution de l’air due aux incinérateurs, explosion du volume des emballages et du
plastique, impact de la création du ministère de l’Environnement en 1971).
Laurence Rocher (université Lumière Lyon 2) décrit l’émergence d’une politique nationale
et européenne des déchets entre les deux lois fondatrices de 1975 et de 1992 à la place
d’une gestion locale et sectorielle. Cette évolution a permis d’assurer une prise en charge
administrative, de jeter les bases d’un service public de collecte et de traitement et de se
lancer dans la valorisation afin de lutter contre le gaspillage. Après une phase de conflits
locaux (déchets dangereux, contestation de proximité et crise de confiance) la réforme
de 1992 a donné un nouvel élan (création de l’ADEME, tri et recyclage, limitation de
l’enfouissement aux déchets ultimes, planification territoriale, information et participation
du public). Au début des années 2000, le mot d’ordre était la réduction à la source.
Michel Affholder (IGPEF honoraire) a été un acteur majeur de la politique des déchets, de
la direction de l’aménagement foncier et de l’urbanisme (DAFU) à la fin des années 1960
jusqu’à la fin de son mandat de directeur de l’agence spécialisée dans la récupération et
l’élimination (ANRED) en 1984. Il témoigne de l’émergence des schémas départementaux,
des études visant à une élimination plus performante, de la préparation de la loi de 1975 et
Madame Heike Weber (professeur à l’université de Berlin) montre les différences entre les
politiques française et allemande depuis la fin du XIXe siècle : des techniques de collecte et
d’enlèvement plus précoces en Allemagne, l’effet important sur le niveau du recyclage des
deux guerres mondiales et de la volonté d’autarcie du régime nazi, l’impact de la divergence
des politiques économiques à l’Est (priorité en faveur du recyclage des matériaux dans une
économie socialiste) et à l’Ouest (miracle économique et explosion des volumes de déchets)
après la guerre et l’infléchissement de la politique ouest-allemande en faveur de la réduction
des déchets et du recyclage après la crise pétrolière des années 1970.
Le second thème du numéro 12 concerne les 30 ans de la loi d’orientation des transports
intérieurs (LOTI).
Lors d’un entretien le 28 mars 2012 avec Loïc Vadelorge, professeur d’histoire contemporaine
à Paris-Est Marne-la Vallée, Claude Martinand a commenté son implication personnelle dans
« pour mémoire » l n°12 automne 2013
4
Loïc Vadelorge exprime ensuite son point de vue de chercheur sur les temporalités de la
LOTI. Il analyse la LOTI comme l’expression d’un dirigisme décentralisé dans une période
où, parallèlement, le Parlement votait la loi Defferre de décentralisation. Il considère que
la LOTI peut aussi être comprise comme une réinvention de la régulation libérale des
transports, avec une approche économique inspirée des enseignements de l’économétrie
dans les années 1950-1970. Mais la LOTI peut être caractérisée comme un texte pensant en
même temps les principes de rupture et de continuité, d’où les diversités d’interprétation
auxquelles elle a donné lieu.
sommaire
La politique des déchets ménagers de la fin du XIXe siècle à
la réforme de 1992 8
Le problème des déchets ménagers de la fin du XIXe siècle aux années 1970
par Stéphane Frioux
La gestion des déchets ménagers : histoire d’une politique publique par Laurence Rocher
La naissance et les premiers développements d’une politique nationale des déchets
entre 1971 et 1984 par Michel Affholder
1982 : une année charnière de la gestion des déchets par Francis Chalot
En perspective 93
La création des offices de l’eau dans les départements d’outre-mer par la loi sur l’eau de 1992
par Jean-Pierre Rideau
Le miroir de l’Outre-mer des ingénieurs des Ponts et Chaussées par Hélène Vacher
Services publics et services d’intérêt général en Europe par Jean-Claude Boual
Lectures 168
Histoire des plages de Cannes et de La Napoule, Jean-Marie Martin
Comment Haussmann a transformé Paris ? Un documentaire de Yves Billon
État des lieux-Laboratoire Rives, Jean Langumier, Emmanuel Martinais, préface Sylvain
Maresca, photographies David Desaieux
Une protection de l’environnement à la française ? (XIXe-XXe siècles)
sous la direction de Charles-François Mathis et Jean-François Mouhot
Exposition 172
Royan – photographies de la Reconstruction (1950 – 1961) archives photographiques du MRU
par Brigitte Druenne-Prissette et Daniel Coutelier
Le problème des déchets ménagers ministère de la Protection de la nature tion des déchets. Les matières usées
est aussi ancien que le fait urbain : les et de l’Environnement (1971-1975). Dans urbaines devenaient trop volumineuses
historiens des époques médiévale et ce domaine, il vaudrait mieux, d’ailleurs, et perdaient également en vertu agro-
moderne ont montré que les pouvoirs évoquer des politiques, tant la diversité nomique. Dans le même temps, les
publics avaient déjà pris des mesures et l’autonomie des municipalités furent exigences de l’hygiène s’accroissaient,
pour éviter l’entassement des « boues et grandes. car la bactériologie révèle les causes
immondices » dans les espaces publics. microscopiques des maladies. Les arrê-
« L’Ancien Régime » tés municipaux imposaient aux entre-
Les dernières années du XIXe siècle preneurs de la collecte d’utiliser des
constituent un tournant, avec le passage des déchets tombereaux bâchés puis hermétiques,
d’une gestion des ordures ménagères et aux particuliers de mettre leurs
largement confiée à des particuliers et au XIXe siècle ordures dans des caisses ou des boîtes,
pensée comme une source de revenus les fameuses « poubelles » imposées par
pour le budget municipal à une gestion Durant cette époque d’urbanisation crois- le préfet de Paris en 1884. Le couvercle
fondée sur les préceptes hygiénistes sante de la France, à un rythme beaucoup n’a été imposé que plus tardivement,
recommandant un éloignement rapide moins rapide cependant que le Royaume- au cours de la première moitié du
des matières susceptibles d’entrer en Uni puis que l’Allemagne, un idéal de XXe siècle.
putréfaction et s’interrogeant sur la gestion du problème perdurait dans la
meilleure façon de détruire définitive- plupart des villes : celui de l’affermage Que faire des déchets qu’on
ment ces matières (incinération, mise de la collecte des « boues », « gadoues », ne peut directement épandre
en décharge, transformation en engrais, « équevilles », termes utilisés en fonction sur les champs ?
rejet à la mer ou dans les cours d’eau). des régions, lors d’adjudications pério-
diques. Dans ce système, les agriculteurs L’époque vit l’apparition d’un nouveau
Comment la collecte et le traitement acceptaient de payer pour ramasser les système : la destruction des ordures par
des ordures ménagères ont-ils progres- ordures de tel ou tel quartier, et de les le feu. Cette méthode fut d’abord mise
sivement été modernisés et fait l’objet épandre ensuite, brutes ou après fermen- au point en Angleterre dans les années
de l’attention d’un nombre croissant tation, sur des champs, en tant qu’engrais 1870, dans un pays plus urbanisé et où
d’acteurs (ingénieurs, élus locaux et naturel. les ordures contenaient une proportion
nationaux, citoyens, etc.) ? On essaiera de plus importante de cendres. Elle peina à
présenter les grands traits de l’évolution Toutefois s’opéra progressivement ce s’exporter en France avant la Première
de cette politique jusqu’à l’expérience du que Sabine Barles a qualifié d’inven- Guerre mondiale : des hygiénistes res-
19
Ibid., Lettre de la Société « Union de Services
publics » au maire de Chambéry, 20 septembre
1955
20
Archives municipales de Lyon, 423 WP 44,
rapport du service des travaux publics, 15 octobre
1963
4
Représentées notamment par l’association
AMORCE, qui regroupe des collectivités locales
et des professionnels des réseaux de chaleur, de
la gestion locale de l’énergie et de la gestion des
déchets municipaux
Six mois après la création du ministère mal tenues, le volume de déchets pro- blocages à la mise en œuvre de solutions
de la Protection de la nature et de duits augmentait fortement. Il demandait convenables de collecte et de traitement
l’Environnement en janvier 1971, Robert au GEERS d’avoir une appréhension des déchets.
Poujade, utilisant le pouvoir de coordina- globale des problèmes et de dégager, à
tion inscrit dans ses attributions, installa partir des schémas départementaux dont De la direction de
un groupe interministériel, le « Groupe l’élaboration avait été prescrite par une l’aménagement foncier et de
d’Études sur l’Élimination des Résidus circulaire interministérielle, les lignes l’urbanisme au ministère de
Solides » (GEERS), présidé par un préfet, directrices d’un réseau de collecte et de l’Environnement (1967-1971)
Pierre Aubert. traitement des résidus urbains couvrant
l’ensemble du territoire. Il lui demandait À la tête d’une petite équipe de la division
Il partait du constat que le sujet n’avait, aussi de susciter les évolutions réglemen- des équipements urbains de la Direction
jusque là, été traité que de manière très taires et législatives, d’examiner avec les de l’aménagement foncier et de l’urba-
partielle : les paysages étaient dégradés professions les problèmes particuliers nisme (DAFU), j’avais pu travailler sur le
par des dépôts d’ordures en tout genre, de certains déchets pour en réduire les sujet des ordures ménagères. Il s’agis-
les décharges « autorisées » étaient bien quantités et les pollutions, de déceler les sait, en particulier, de promouvoir, dans
Centre de tri sélectif des déchets sur le marché de Rungis (94), emballages en cartons © Laurent Mignaux/METL-MEDDE
Dix ans après l’adoption des « propo- conjuguée des moyens réglementaires et dérées dorénavant comme inacceptables.
sitions pour une politique » formulées d’incitation découlant de la loi de 1975. La La nouvelle loi avait conduit à une nette
par le GEERS, après six ans d’existence proportion de la population desservie par prise de conscience des problèmes posés
de l’ANRED, on ne pouvait prétendre un service de collecte était passée à 98%. par le volume croissant des déchets. Les
que la France était partout « propre » Celle qui était desservie par des installa- campagnes en faveur de la propreté, de
et débarrassée de dépôts sauvages de tions régulièrement autorisées atteignait la récupération et de la valorisation des
déchets. 87%. À quelques exceptions près, tous déchets avaient contribué à l’amplifier,
les départements avaient mené des opé- entraînant assez vite de sensibles
Des progrès spectaculaires avaient rations pour faire disparaître du paysage changements dans les comportements
néanmoins été enregistrés, grâce à l’action les traces de pratiques antérieures, consi-
individuels et collectifs.
Si on évoque l’année 1992 à propos des déchets, beaucoup La loi fut en effet précédée par un simple
décret interministériel, signé in extremis
penseront d’abord à la seconde loi cadre du 13 juillet 1992. le 1er avril 1992, à un moment de transition
Vingt ans plus tard, c’est en fait un triple anniversaire que entre deux gouvernements mais qui a initié
nous pourrions fêter. jusqu’à aujourd’hui toute la dynamique des
dispositifs dits de « responsabilité élargie
des producteurs » (REP). Disparates de
par leur format respectif, ces deux textes
n’en ont pas moins été complémentaires
et d’un poids tout aussi important dans
la tournure nouvelle qu’ils donnaient aux
politiques publiques des déchets.
1
Qui, avec un R judicieusement placé devant
le E, priorisait de manière prémonitoire la
Déchets compactés © Laurent Mignaux/METL-MEDDE « récupération des déchets » (voir plus loin).
Point recyclage des déchets sur une aire d’autoroute © Arnaud Bouissou/METL-MEDDE
Le bon sens a fait évoluer la configura- Toutefois, la démarcation entre des Si les emballages et leurs déchets ont
tion des plans eux-mêmes par des textes recyclages de matériaux, y compris pour inauguré le recours à la responsabilité
successifs. À la place des préfets, sur la matière organique, et une valorisation élargie des producteurs (REP), c’est
une base volontaire puis de manière énergétique, ce que permet l’incinération *
Association des maires de France
générale, ce sont les conseils généraux mais en détruisant définitivement des 4
Et pour cause, il s’agit de l’Association des
qui ont assuré la maîtrise des plans ressources non renouvelables comme maîtres d’ouvrage de réseau de chaleur.
Outre ce constat et la présence décisive bien trop coûteux. S’il ne manquait pas économiques de pourvoir à l’élimina-
d’un ministre écologiste, on peut sans d’arguments logistiques objectifs, ce tion des déchets d’emballage de leurs
doute savoir gré à certains voisins euro- jugement exprimait quelques spécificités produits, l’option de la « contribution »
péens, particulièrement à l’Allemagne5 , socioculturelles, par exemple sur la a donc été privilégiée en France avec ce
d’avoir enclenché cette vague de la pratique de la consigne, encore vivante tout premier dispositif de responsabilité
responsabilité élargie des producteurs en outre-Rhin. Mais il s’expliquait aussi élargie des producteurs. Elle a influencé
s’y avançant les premiers. Nos industriels largement par le consensus noué afin de d’ailleurs largement la configuration
de l’agroalimentaire, fleuron de la balance faire aboutir le dispositif Éco-emballages et les résultats des dispositifs qui ont
commerciale française, ont compris avec d’un côté les industriels représentés suivi, qu’il s’agisse des éco-organismes
assez vite, en ce début des années 1990, par Antoine Riboud puis Jean-Louis Beffa, chargés des déchets d’équipements
l’urgence d’un modèle français à opposer respectivement dirigeants de Danone électriques et électroniques (DEEE),
au Duales System Deutschland initié et de Saint-Gobain, chargés de faire des pour lesquels les déchèteries publiques
par l’ordonnance du ministre Tœpffer, propositions et prêts à avancer, mais pas restent largement utilisées (avec le droit
sachant que la Commission européenne trop ; et de l’autre les représentants d’élus au retour « 1 pour 1 », bien peu mis en
réfléchissait déjà à une directive, qui a vu locaux, considérant qu’ils avaient surtout œuvre) ou des imprimés avec Écofolio,
le jour en 1994. intérêt à conserver la maîtrise complète petit frère d’Éco-emballages SA.
de la gestion des déchets malgré la charge
Organisation privée de la collecte, en qu’elle représentait et n’ayant pas encore
doublon du service public (système dual), tous, contrairement à Jacques Pélissard,
avec un retour prioritaire au magasin et leur chef de file, levé leurs doutes sur la
5
l’affichage d’une prépondérance accor- collecte sélective. ou les Danois, qui tentent sans succès une
consignation obligatoire des canettes de bière
dée au recyclage, d’emblée le dispositif Par rapport à l’article 6 de la loi de 1975, vendues sur leur sol, mêlant un protectionnisme
à peine voilé au souci revendiqué de protéger
allemand était suspecté, chez nous, d’être plutôt que de demander aux acteurs l’environnement.
La loi d’orientation
des transports intérieurs (Loti)
a 30 ans
Loïc Vadelorge,
professeur d’histoire
contemporaine à
l’Université Paris-Est,
Marne-la-Vallée. Claude Martinand © Bernard Suard - METL/MEDDE
Loïc Vadelorge ©Gérard Crossay - METL/MEDDE
Laboratoire d’analyse
comparée des pouvoirs,
EA 3350
4
il définit les grands principes de la coordination
des transports en refondant le rapport entre
transport routier et transport ferroviaire.
« Il n’est pas question de se priver de 1982 ou par celui de la loi sur la décen- Nous souhaiterions proposer ici une
toutes les ressources d’intelligibilité tralisation du 2 mars 1982. Elle partage autre lecture historique de la LOTI,
apportées par la reconnaissance de la avec une autre loi d’orientation, celle insistant sur l’une de ses spécificités,
pluralité du temps social »1 du 15 juillet 1982 pour la recherche et à savoir le télescopage de différentes
le développement technologique (loi temporalités qui président à sa rédac-
La loi 82-1153 d’orientation des transports Chevènement) le défaut d’avoir été tion, son adoption et sa portée à moyen
intérieurs (LOTI), publiée le 30 décembre adoptée dans le contexte de la frénésie terme. Comment en effet rendre compte
1982, forme un texte de référence qui a législative du début du septennat de d’une loi qui peut s’interpréter à la fois
paradoxalement peu retenu l’attention François Mitterrand. comme une tentative de libéralisation
des historiens. Le dernier volume de la des transports intérieurs et comme la
Nouvelle histoire de la France contem- En dépit de son caractère prospectif, volonté d’affirmer l’existence d’un « ser-
poraine 2 , qui consacre quelques lignes qui lui a garanti une portée de près de vice public des transports » en France ?
au rôle politique de Charles Fiterman, trente ans jusqu’à sa refonte partielle par Comment par ailleurs trier entre ce que
ministre d’État, chargé des Transports l’ordonnance 2010-1307 du 28 octobre
dans le second gouvernement Mauroy 2010 3 , en dépit aussi de l’étendue des 1
François Hartog, Régimes d’historicité.
(juin 1981 - mars 1983) ne mentionne secteurs concernés par son titre II Présentisme et expériences du temps, Paris, Le
Seuil, 2003, édition Points 2012, p. 38
pas la LOTI qui n’apparaît même pas dans (transports ferroviaires de personnes et 2
Jean-Jacques Becker, et Pascal Ory, Crises et
la chronologie fournie en annexe de fret, transport routier de marchandises alternances. 1974-1995, Paris, Le Seuil, NHFC,
tome 19, 1998
l’ouvrage. et de personnes, transports urbains, 3 Sur le texte originel de la LOTI et ses
navigation intérieure, aviation civile) modifications jusqu’à nos jours,
voir www.legifrance.gouv.fr
Dans la longue liste des « lois d’orien- la LOTI apparaît encore aujourd’hui 4
Premier ministre, ministre de l’Intérieur et
tation » votées sous la Ve République, la comme une loi très technique, relevant de la décentralisation, ministre du Commerce
extérieur, ministre des Transports, ministre du Plan
LOTI est loin d’atteindre la notoriété de de l’histoire exclusive des transports et de l’Aménagement du Territoire, ministre de la
Recherche et de l’Industrie, ministre des Affaires
la loi d’orientation agricole (LOA) du 5 alors même qu’elle fut signée par 17 sociales et de la solidarité nationale, Garde des
août 1960, de la loi d’orientation foncière ministres4 ! C’est en ce sens que l’histo- Sceaux, ministre délégué, chargé des Relations
extérieures et des Affaires européennes, ministre
(LOF) du 30 décembre 1967 (loi Pisani) rien Nicolas Neiertz put faire de la LOTI de l’Économie et des Finances, ministre délégué au
Budget, ministre de l’Éducation nationale, ministre
ou de la loi d’orientation de l’enseigne- une étape maîtresse de son histoire de délégué aux Affaires sociales, chargé du Travail,
ment supérieur du 12 novembre 1968 la coordination des transports en France ministre du Temps libre, ministre de l’Urbanisme
et du Logement, ministre de la Mer, ministre de
(loi Faure). À l’échelle plus restreinte du dans le cadre d’une thèse, soutenue la Consommation. Source : fac-similé de la loi
consulté sur le site légifrance
gouvernement Mauroy, la LOTI semble en décembre 1995 sous la direction de 5
Nicolas Neiertz, La coordination des transports
« écrasée » par l’impact historique de François Caron et qui demeure l’une des en France de 1918 à nos jours, Paris, Imprimerie
nationale, Comité pour l’histoire économique et
la loi de nationalisation du 11 février analyses de référence sur le sujet 5 . financière de la France, 1999
34
Béatrice Gelbman, « Schémas régionaux et
départementaux : bilan » in Métropolis, volume
VIII, 60/61, 1er trimestre 1984, p. 18-21
35
Lucette Le Van Lemesle, Le Juste ou le Riche.
L’enseignement de l’économie politique 1815-
1950, Paris, Comité pour l’histoire économique et
financière de la France, 2004
36
Brice Le Gall, « Un soubresaut de 1968, la
parenthèse critique de l’économie politique à
Vincennes » in Soulié, Charles (dir.), Un mythe
à détruire ? Origines et destin du Centre
universitaire expérimental de Vincennes, Paris,
Presses Universitaires de Vincennes, 2012, p. 359
et pp. 386-387
37
Nicolas Neiertz, « Coordination des transports
et rationalité économique en France de 1918 à nos
jours » in Dominique Barjot et Michèle Merger,
(dir.), Les entreprises et leurs réseaux, op. cit., p.
316
38
Archives de l’Assemblée nationale, 1e séance du
12 octobre 1982, intervention d’Alain Chénard, p.
5636
39
Michel Frénois, « Liberté des prix et services
public des transports », Transport public, 812,
janvier 1984, p. 13-15
Sur ces bases fondatrices, se sont déve- Après la Deuxième Guerre mondiale, en
loppées depuis 150 ans des méthodes France, les travaux de Marcel Boiteux, Loi n°82-1153 du 30 décembre 1982 d’orienta-
de plus en plus élaborées d’analyse Claude Abraham et Émile Quinet (pour tion des transports intérieurs. Source : JO du 31
décembre 1982
« coûts-avantages » des investissements ne citer que les principaux auteurs),
publics, particulièrement ceux qui sont contribuèrent à diffuser des méthodes 1
Dans l’introduction de cet article, Jules Dupuit
relatifs aux grandes infrastructures de au sein de l’administration des Ponts et pose la question dans des termes suivants : « Le
transport. Chaussées, du ministère de l’Économie législateur a prescrit les formalités nécessaires
pour que certains travaux puissent être déclarés
La plupart des pays développés, l’Union et des Finances (direction de la Prévision) d’utilité publique ; l’économie politique n’a
pas encore défini d’une manière précise les
européenne ou la Banque mondiale ou des grands établissement publics conditions que ces travaux doivent remplir pour
être réellement utiles ; du moins les idées qui ont
utilisent aujourd’hui de telles démarches (SNCF puis RFF*) alors que se déve- été émises à ce sujet nous paraissent vagues,
d’évaluation qui permettent de comparer, loppaient des programmes de grands incomplètes et souvent inexactes. Cependant
cette dernière question est plus importante que la
sur une base monétaire commune, investissements de modernisation et de première; des enquêtes plus ou moins multipliées,
des lois, des ordonnances ne feront pas qu’une
différents projets ou leurs variantes développement des infrastructures de route, un chemin de fer, un canal soient utiles, s’ils
possibles, en analysant les bénéfices et transport. ne le sont pas réellement. La loi ne devrait, pour
ainsi dire, que consacrer les faits démontrés par
les coûts économiques occasionnés par l’économie politique. Comment doit se faire cette
démonstration? Sur quelles données, sur quelle
chacun d’eux, en vue d’établir celui qui formule repose-t-elle ? Comment, en un mot, doit
se mesurer l’utilité publique? Tel sera l’objet de nos
sera le plus rentable économiquement recherches dans ce chapitre ».
pour la société. *
RFF : Réseau Ferré de France
Les modalités
l’élaboration des
grands projets et
le débat public
ou la complexité d’un
processus de décision
de plus en plus difficile
à gérer
Au cours des vingt à trente dernières
années, le processus d’élaboration-
instruction-décision relatif aux grands
projets d’infrastructures est devenu
10
Travaux de Bent Flyvbjerg. Megaprojects and
Risk. An anatomy of an ambition, Cambridge,
Cambridge University Press, 2010
11
Transport et dette publique : des membres du
Cercle des transports alertent sur la dérive des
déficits publics résultant des transports, avril 2012
Le miroir de l’Outre-mer
des ingénieurs des Ponts
et Chaussées
par Hélène Vacher, professeur, directrice du Laboratoire d’histoire de l’architecture
contemporaine à l’École nationale supérieure d’architecture de Nancy
45
Voir 60 ans au service du développement,
Histoire de BCEOM, Paris, édition 3A, 2009
46
Idem.
47
Au début des années 1960, ce sont 820
ingénieurs et adjoints techniques des Ponts
et Chaussées et des Travaux publics (corps
autonomes compris) qui sont en service au titre
de la coopération technique. Voir R. Bonnal,
« Coopération technique et travaux publics »,
Bulletin du P.C.M, n° 12, 1964, pp. 38-42, et n°1,
1965, pp. 23-26
5
La bataille pour une d’une base juridique pour fonder une telle
directive. Dans une deuxième communi-
directive cadre sur
Article 16 « Sans préjudice des articles 73,
86 et 87, et eu égard à la place qu’occupent
les services d’intérêt économique général cation sur les « services d’intérêt général
Entretien avec
Florian Charvolin
Conduit par Stève Bernardin,
chargé de mission au comité d’Histoire
S. Bernardin
Pensez-vous adopter un rôle similaire
auprès du comité d’Histoire du minis-
Zaradoc Films
63 Rue Ménilmontant - 75020 Paris
www.zaradoc.com
Éditions Libel
9 Rue Franklin
69002 Lyon
www.editions-libel.fr
Royan – photographies
de la Reconstruction (1950–1961)
archives photographiques du MRU
Brigitte Druenne-Prissette et Daniel Coutelier, commissaires de l’exposition
Devant l’ampleur des destructions subies par la France pendant la Seconde Guerre
mondiale le gouvernement provisoire de la République française a créé en 1944
le ministère de l’Urbanisme et de la Reconstruction (MRU) chargé de diriger la
reconstruction du pays en le modernisant. Créé en 1945 pour accompagner et
promouvoir la politique du ministère, le service photographique du MRU a joué un
rôle déterminant dans l’élaboration et la promotion des décisions ministérielles.
De nombreux reportages ont été réalisés pour soutenir et éclairer son action et
témoigner de l’avancement des travaux entrepris.
De 1950 à 1961 quatre reportages ont été consacrés par les photographes salariés
du ministère à la reconstruction de Royan. Une cinquième campagne photogra-
phique conduite pour le MRU en janvier 1953 par Lucien Hervé, photographe
officiel de Le Corbusier complète ces séries d’images. Toutes témoignent de la
renaissance de la ville.
Une large sélection de ces photographies est présentée dans le catalogue de
l’exposition organisée du 30 septembre 2013 au 20 janvier 2014 au musée de
Royan1 en collaboration avec la direction de la Communication des ministères du
Logement et de l’Écologie. Elles illustrent un moment essentiel de l’histoire urbaine
1
et architecturale de la ville. Trois historiens apportent leur expertise : Danièle Musée de Royan : 31 avenue de Paris, 17200
2
Royan
Voldman rappelle le rôle essentiel joué par l’État dans le processus de recons- 2
Danièle Voldman, La reconstruction des
villes françaises de 1940 à 1974. Histoire d’une
truction des villes sinistrées, Gilles Ragot3 décrit les circonstances du passage politique - Paris, l’Harmattan, 1997
3
du « souffle brésilien » qui a permis à Royan, aujourd’hui ville d’art et d’histoire, Gilles Ragot (dir.), Thierry Jeanmonod,
Nicolas Nogue, L’invention d’une ville -
de devenir « la ville le plus cinquante de France »4 , Didier Mouchel5 analyse les Monum, Éditions du Patrimoine, 2003
4
Jacques Lucan in AMC n°11, 1986, p.16
photographies proposées en rappelant les circonstances de la redécouverte de 5
Didier Mouchel, Henri Salesse, Enquêtes
cette production « grise ». photographiques, Rouen 1951 et Le Petit-
Quevilly 1952 – GwinZegal, 2008
C’est une nouvelle occasion de prendre toute la mesure de la richesse de ce Didier Mouchel (dir), Danièle Voldman,
Photographies à l’œuvre. Enquêtes et
« fonds MRU » reconnu aujourd’hui aussi riche du point de vue historique que du chantiers de la Reconstruction. 1945-1958
- Jeu de Paume - Le Point du Jour centre d’art -
point de vue artistique. éditeur, 2011
ROYAN :
PHOTOGRAPHIES DE LA RECONSTRUCTION
(1950-1961) ARCHIVES PHOTOGRAPHIQUES DU MRU
Le conseil
scientifique
Dominique BARJOT Florence CONTENAY Geneviève MASSARD-GUILBAUD
Professeur d’histoire contemporaine Inspectrice générale de l’Équipement Directrice d’études à l’EHESS
à l’Université Paris IV honoraire
Alain MONFERRAND
Bernard BARRAQUÉ Gabriel DUPUY Ancien secrétaire-délégué du comité
Directeur de recherche au CNRS, Professeur émérite à l’Université d’Histoire
CIRED-AgroParisTech de Paris I
Antoine PICON
Alain BILLON Philippe GENESTIER Professeur à l’Université de Harvard,
Ancien secrétaire délégué du comité Professeur à l’ENTPE, chercheur enseignant-chercheur à l’École des Ponts
d’Histoire au laboratoire RIVES-CNRS ParisTech, LATTS
rédaction
Tour Pascal B 20.20
92 055 La Défense Cedex
téléphone : 01 40 81 15 38 ou 36 83
télécopie : 01 40 81 23 24
comite.histoire@developpement-durable.gouv.fr
fondateurs de la publication
Pierre Chantereau et Alain Billon
directeur de la publication
Louis-Michel Sanche
rédacteur en chef
Patrick Février
suivi de fabrication
Marie-Thèrese Rieu
réalisation graphique
Annick Samy
impression
couverture Étoile imprim/PNK Graphic
Intérieur SG/SPSSI/ATL 2
ISSN
1955-9550
comité d’histoire
comité
d’histoire
Pour mémoire
Conseil général de l’Environnement et
du D éveloppement durable
Comité d’Histoire
Tour Pascal B
92055 L a Défense cedex
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