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Jean-Michel Mignot

Lestage, F. — Naissance et petite enfance dans les Andes


péruviennes. Pratiques, rites, représentations
In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 86, 2000. pp. 250-252.

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Mignot Jean-Michel. Lestage, F. — Naissance et petite enfance dans les Andes péruviennes. Pratiques, rites, représentations.
In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 86, 2000. pp. 250-252.

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jsa_0037-9174_2000_num_86_1_1827
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sur celui de leur usage social, les tule relèvent de la « tactique factionnelle » (p. 163).
Le chapitre quatre se termine par une appréciation des transformations contem
poraines de la musique wayâpi face aux musiques étrangères, créoles notamment.
Cette section est d'autant plus intéressante que l'auteur accompagne la mouvance de
ces communautés de l'Oyapock depuis 1977. Bien que les musiques créoles remplacent
partiellement la musique wayâpi dans certains contextes, il existe peu de chevauche
ment de ces musiques et il semble qu'aucune nouvelle musique ne résulte de cette
rencontre. L'auteur attribue cette « étanchéité musicale très forte [et] largement répan
dueen Amazonie » (p. 1 66) à deux facteurs qu'il juge par ailleurs lui-même insuffi
sants. Le premier étant l'isolement géographique alors que le second, de façon plus
importante, serait lié à la différence entre les systèmes musicaux amérindiens, afro-
américains et européens. Cette étanchéité musicale résulterait d'un choix à examiner à
la lumière d'exceptions bien connues en Amazonie et dans les Andes, une tâche à
laquelle devra éventuellement s'attaquer l'ethnomusicologie amazonienne.
En terminant, soulignons que ce livre offre une véritable perspective comparative
sur laquelle il serait trop long de s'étendre. Mentionnons tout de même les intéressant
es réflexions de Jean-Michel Beaudet au sujet des liens entre la prédominance des
aerophones en Amazonie et du chamanisme, des modèles animaliers associés à la
production musicale tant sur le plan de ses origines que sur le plan strictement musical,
des risques associés par les Amazoniens à une performance musicale imparfaite, d'une
distinction entre musique froide et musique chaude chez un même peuple.

[Robert R. Crépeau, département d'anthropologie, université de Montréal]

1. Racine, Luc, 1997. — « Inversion par prééminence alternée dans les classifications symboliques »,
Anthropologie et sociétés, 21 (2-3), pp. 171-191.

Lestage, Françoise — Naissance et petite enfance dans les Andes péruviennes. Prati
ques, rites, représentations, L'Harmattan, Paris, 1999, 300 pages, index thématique
(pp. 289-292), index d'auteurs (pp. 293-295), glossaire aymara, espagnol, quechua
(pp. 263-270), préface de Carmen Bernand (pp. 9-14).

« Les enfants n'ont guère attiré le regard ethnologique » (Carmen Bernand, p. 9) et


ceux des Andes péruviennes encore moins que les autres. À ma connaissance, ce livre
est le premier qui nous offre une monographie détaillée consacrée à ce moment du
cycle de vie dans cette aire géographique.
L'auteur nous présente avec précision et détails les techniques et les représenta
tions puériculturales ordinaires et rituelles qui président au bon développement du
fœtus et de l'enfant jusqu'à deux ans. Elle s'applique à nous montrer comment les
précautions sanitaires, les savoirs obstétricaux et pédiatriques, savants ou populaires,
issus de la période pré-hispanique, puis coloniale et enfin contemporaine s'entremêl
ent.
Françoise Lestage utilise des données issues de son travail de terrain qui s'est
déroulé dans le village de Laraos (département de Lima, Pérou) ; elle les compare avec
celles qu'elle a recueillies dans des travaux historiques ou sociologiques qui sont, pour
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une part, consacrés à l'Europe du xvp au xxe siècle. Parfois, elle utilise ces données
européennes parce qu'elles présentent des points communs avec ses observations
personnelles. Il me semble que cet usage de l'analogie ne renforce pas sa démonstrat
ion. En revanche, elle mêle habilement des analyses de scènes quotidiennes et des
éléments provenant d'entretiens formels ou informels pour dresser un tableau précis
des pratiques et des représentations ayant pour l'objet l'enfant qui sont actuellement
mises en œuvre par cette communauté villageoise. À l'aide des informations éparses
qu'elle a glanées dans des études consacrées à une autre thématique mais situées dans
des zones géographiques et culturelles proches, Françoise Lestage nous laisse soup
çonner que le portrait qu'elle nous trace est la déclinaison d'un modèle commun à cet
espace.
Il faut aussi noter que l'analyse du lexique utilisé pour parler des enfants et de leurs
états sert de colonne vertébrale à ce livre. Mais l'explication de termes espagnols
(langue utilisée quotidiennement) à l'aide de mots quechua (langue en voie d'extinc
tion dans ce village), ou inversement, intrigue et crée quelques difficultés pour le
lecteur étranger à cette aire culturelle.
L'ouvrage est divisé en deux parties. La première est composée de deux chapitres.
Le premier analyse les causes de la procréation, le déroulement de la grossesse et les
conduites à tenir pour la mener à bon terme, les interactions réciproques entre la mère
et son fœtus, les causes des fausses couches, l'appréciation que les membres de cette
communauté ont de la fécondité masculine ou féminine et leurs opinions à propos des
diverses techniques contraceptives. Le second chapitre analyse le déroulement de
l'accouchement (les postures possibles, le traitement de la douleur, l'entourage de la
parturiente, les soins qui lui sont apportés, les dystocies...), les divers lieux dans
lesquels il peut s'effectuer et les conséquences que cet emplacement aura sur le
nouveau-né ; il se termine sur le traitement réservé au placenta.
La seconde partie traite des soins apportés aux nouveau-nés, des dangers qui le
menacent et des divers rites qui marquent le passage d'une phase du cycle de vie à une
autre. Le premier chapitre de cette partie décrit les divers soins accordés au
nouveau-né (toilette, emmaillotement), les suites des couches (les raisons de la réclu
sionde la mère et de l'enfant, la nourriture de l'accouchée et les soins qui lui sont
prodigués pour éviter la chute ou le retournement de l'utérus et de l'estomac),
l'allaitement (fréquence et techniques, produits lactifères, produits de substitution, le
lait maternel comme substance thérapeutique, l'opposition entre le lait, le sang
menstruel et le sperme). Enfin, Françoise Lestage nous expose les diverses modalités
du prêt d'enfant qu'elle ne parvient pas à expliquer. Le second chapitre (le quatrième
du livre) expose les dangers qui menacent l'enfant (le sus to, les chutes, le mauvais œil,
les condenados — à Laraos, les âmes des ancêtres inconnus — qui emportent les
enfants dans leur sommeil, la mipa (comportement ou traits de l'enfant qui évoquent
une personne ou un animal) et les techniques curatives ou préventives qui protègent
l'enfant de ces maux ; une dizaine de pages sont consacrées à la gémellité qui
détermine ces enfants à être des médiateurs entre les hommes et les ancêtres. Le dernier
chapitre (le cinquième) est réservé aux rites qui marquent les différents moments du
cycle de vie. Le jour même de la naissance, un prénom est attribué à l'enfant. C'est une
opération complexe qui fait appel, entre autres, à des règles de transmission des
prénoms à l'intérieur d'une généalogie, à la position des paysans vis-à-vis de l'Église.
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Cette attribution d'un prénom est accompagnée d'une aspersion d'eau (l'eau de
secours) qui est une répétition du baptême. Geste qui entraîne une parenté rituelle
entre les parents, l'enfant et les marraines et parrains. Quinze jours à un mois après la
naissance, les parents peuvent décider « d'acheter leur nourrisson ». Ils le déposent
discrètement chez quelqu'un ou proposent explicitement de vendre l'enfant. Quelques
instants plus tard, ils le rachètent contre un don symbolique de nourriture ou d'argent
au propriétaire provisoire. François Lestage interprète ce rituel comme un rite de
passage destiné à protéger l'enfant. Le sevrage a lieu entre un ou deux ans, période qui
correspond à la poussée dentaire. Ce moment ne semble pas faire l'objet d'une
cérémonie particulière mais de techniques qui visent à rendre le sein effrayant ou
répugnant. Avant trois ans, le parrain coupe une mèche du petit garçon ou perce les
oreilles de la petite fille. Ces opérations sexualisent définitivement l'enfant, l'incorpo
rent dans la communauté qui exige alors de lui propreté, obéissance et travail et
marquent qu'il est maintenant hors d'atteinte des maladies infantiles si souvent létales.
Gageons que la communauté des spécialistes de l'enfance, toutes disciplines
confondues, trouvera son compte dans ce livre. L'enfant andin était un sujet délaissé
par les ethnologues et les sociologues. Françoise Lestage a commencé cette étude ;
souhaitons qu'elle se poursuive avec le souci interdisciplinaire propre à l'auteur. Les
enfants finiront par y trouver leur compte.

[Jean- Michel Mignot, Laboratoire d'ethnologie et de sociologie comparative, cnrs,


мае, Nanterre]

Estévez Escalera, J. y A. Vila Mitjá, coord., Encuentros en los conchalesfueguinos,


Treballs d'etnoarqueologia, n° 1, Departament d'Antropologia Social i e Prehis-
tôria de la Universitat Autonoma de Barcelona, Consejo Superioir de Investiga-
ciones Cientificas, Madrid, 1995, 337 pages, 88 ill., xxiv tabl., bibl.

Encuentros en los conchales fueguinos est le premier ouvrage d'une série de publi
cations concernant un programme de recherche mené depuis 1986 dans la région du
Canal Beagle en Patagonie argentine. Ce projet est le fruit d'une collaboration entre
deux équipes d'archéologues, l'une composée d'Espagnols spécialistes du paléolithi
que européen et l'autre d'Argentins étudiant les populations de nomades marins en
Patagonie depuis une vingtaine d'années.
Dans la présentation de la série, les chercheurs espagnols (Vila et Estévez) expl
iquent que ce projet est né de la réunion d'objectifs distincts aux deux équipes dans une
même dynamique de recherche. Vila et Estévez ressentant la nécessité de renouveler
leurs méthodologies de recherche en préhistoire, cherchaient un terrain propice au
développement de nouvelles méthodes. Ils ont alors rencontré les archéologues argent
ins (Orquera et Piana) qui travaillaient déjà depuis dix ans sur leur thème et dispo
saient d'une séquence chronologique s'étendant du vne millénaire av. J.-C. au xixe siè
cle apr. J.-C. Cet ouvrage est, selon les auteurs, un recueil des premiers travaux de ce
projet de recherche et ne présente donc pas de conclusions mais une étape du processus
scientifique. Par là, le lecteur se trouve averti du manque de structure que l'on peut
ressentir à la lecture.
Les trois premiers chapitres du livre nous présentent plus précisément les objectifs

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