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org/fr/ressources/fiches-pedagogiques/bdd/fiche_id/40 f interesant
partea practica!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
http://www.centreimages.fr/ressources.pdf
http://www.futuroscope.com/ressources/education/fr/education-image.pdf
http://acl.ac-creteil.fr/histoiredesarts/documents/L'Image%20en%20partage%20-%20Pr
%E9sentation%20Magnum.pdf
http://www.discip.ac-caen.fr/lettres/lettres-
modernes/IMG/doc/Progression_annuelle_5eme.doc
http://crdp.ac-clermont.fr/manifestations/carnets/carnet_2008/P_Argod.pdf
http://enssibal.enssib.fr/bibliotheque/documents/dessid/rrbardon.pdf
http://www.armyacademy.ro/biblioteca/anuare/2003/AUDIOVISUEL.pdf
http://www.ac-nancy-metz.fr/casnav/primo/docs_primo/articles/memoirecafimf.pdf
http://crdp.ac-clermont.fr/manifestations/carnets/carnet_2008/Image_pedagogie%20de
%20l'image%20dans%20les%20programmes.pdf
http://www.ac-orleans-tours.fr/lettres/textimage/decode/cadre.htm
http://www.ouvrirmonquotidien.cfwb.be/fileadmin/sites/omq/upload/omq_super_editor/o
mq_editor/documents/fondamental/Fiches_pedagogique/fiche010.pdf
http://www.kwa-project.org/stok/BD-AUXIPE_pycarlot-presentation_.pdf
http://ressources-cla.univ-fcomte.fr/gerflint/Algerie1/bendiha.pdf
http://www.primlangues.education.fr/primlangues/upload/correspondance/fiche_image_
mots.pdf
http://www.cndp.fr/ecole/dvdmaternelle/pdf/image_orientation.pdf
Le commentaire d’image
mardi 16 décembre 2003 , par Michèle Debrenne
1
L’identification de document est, elle aussi, une épreuve assez
courante : en général vous serez confrontés à des photocopies (hélas,
en noir et blanc et pas toujours d’excellente qualité) de
publicités tirées de revues, journaux,
dessins humoristiques provenant de journaux, quotidiens ou de
bandes dessinées,
petites annonces,
des photographies,
des tracts,
des dépliants touristiques ou publicitaires,
Pour vous exercer à décrire en détail une image, vous pouvez jouer à ce petit jeu : une
personne prépare une description d’image sans la montrer aux autres. Il présente son
image et les auditeurs doivent essayer de dessiner schématiquement l’image décrite. Les
résultats sont souvent surprenants !
2
Examinons, par exemple, l’image N°1 proposée effectivement au test
d’accès au Dalf en 2000 à Novossibirsk :
3
• conclusion : opinion personnelle sur le sujet.
Vous pouvez vous exercer avec n’importe quel type d’image intéressante trouvée dans
une revue, un journal ou sur les sites internet des journaux français. Choisissez une image
un peu insolite, surprenante (de nombreuses publicités sont comme ça). Pour développer
votre imagination, essayez d’imaginer tous les aspects qu’on peut développer. Ensuite,
choisissez l’interprétation qui vous semble la plus facile à développer et la plus en relation
avec l’image proposée. Faites un plan simple :
présentation de l’interprétation choisie
arguments pour et contre,
une conclusion Puis, après avoir annoncé de quoi vous allez parler, exposez votre plan
et enfin faites le commentaire.
4
Par exemple, d’après une reproduction d’une affiche du remake du
classique du cinéma d’horreur « Nosfératu le vampire » on peut
parler :
des vampires, loups-garous, méthodes pour s’en protéger ;
du cinéma d’horreur, des films d’épouvante , les différents types,
réalisateurs :
des gens qui aiment regarder les films d’horreur, du danger ou au
contraire de l’utilité de ces films ;
des acteurs qui jouent dans ce film-là ;
du film d’origine (et de la différence entre les vieux films en noir et
blanc et des films contemporains bourrés d’effets spéciaux) ;
de l’esthétique de l’affiche elle-même, stylisée dans le genre
« gothique », de la mode de ce style ... http://www.edufle.net/Le-
commentaire-d-image
Axer un projet sur l'image peut sembler en dehors de toutes préoccupations scolaires.
Cependant, il s'agit surtout d'éveiller l'imagination, la sensibilité de l'enfant, de lui donner
des repères dans le monde de la culture pour construire sa personnalité et gagner en
autonomie sociale.
Le cinéma d'animation est un art a part entière. Il serait trop long de montrer ici a quel
poin L’EDUCATION A L’IMAGE DANS UN PROJET EDUCATIF
GLOBAL
5
d’investissement d’espaces d’expression. Mais d’ailleurs, l’école doit-
elle s’intéresser à cette culture, à ces films, ces documentaires, ces
séries, ces news et ces vidéos-clip ? le « podcasting », c’est-à-dire la
mise en ligne sur internet de vidéos, mais aussi de sons ou de textes,
pour les rendre accessible au plus grand nombre, serait-il un geste
d’un intérêt pédagogique quelconque ?
6
justement parce que chacun croit l’avoir correctement compris,
comme une sorte de vérité révélée, une connaissance spontanée, une
science infuse, une intuition magnifique et évidente. Après expertise,
on se rend compte que la connaissance sociale du cinéma dépasse la
connaissance du phénomène cinématographique. Les enseignants et
les élèves ont en définitive développé un savoir vernaculaire sur la
cinématographie. Comme nous le verrons avec les dispositifs de
sensibilisation à la culture cinématographique, la dimension
spectaculaire du cinéma est souvent trop vite évacuée. La banalisation
de l’acte d’aller dans une salle de cinéma pour voir un film a fini par
occulter l’interrogation sur l’impact et la charge émotionnelle que
représente le film lorsqu’il est vu en salle3.
3
étude réalisée en 2002 par le Département des études et de la prospective du Ministère de la Culture et de
la Communication, « Impact des dispositifs nationaux de sensibilisation et d’initiation à la culture
cinématographique en direction du public scolaire sur la culture et les pratiques des élèves »
4
L’intimité surexposée, Serge Tisseron, Hachette, Paris, 2002.
7
au jugement anonyme du grand public est sans doute le signe d’une
société en manque de projet collectif.
Bref, nous pouvons dire que la culture numérique dans son ensemble
est acceptée comme outil mais encore peu utilisée en classe et in fine
laissée aux jeunes, livrés à eux-mêmes face aux sollicitations des
industries culturelles et des fabricants d’objets communicants. La
mission de l’école devrait être d’investir cette sphère nouvelle comme
étant un champ d’expressions et d’expérimentations pédagogiques
inédit. C’est un enjeu démocratique que de s’emparer des supports de
communication plutôt que de laisser toute une génération subir la
pression marketing des marchands de rêve.
8
séquence d’apprentissage. Tout l’apport sémantique et sémiotique,
mais également cognitif, qu’un enseignement à l’image ou par l’image
peut procurer fait l’objet de nombreuses publications (cf bibliographie).
Ainsi, on note depuis peu une forte poussée des usages des TIC dans
les établissements scolaire, tant dans les disciplines que dans les
dispositifs transversaux. « Soutenues par un important effort
d’investissement de la part de nombreuses collectivités territoriales,
bénéficiant jusqu’en 2006 de crédits Contrat de Plan Etat Région,
présentes au cœur de plusieurs programmes pilotés par le Ministère,
les TICE sont donc bien devenues aujourd’hui une réalité qui, comme
l’indique un récent rapport de l’IGEN et de l’IGAENR, se développent
sur un "terreau fertile". »
9
enseignants témoignent en avoir fait usage avec leurs élèves en
décembre 2005.
10
leur fournisse les contenus diversifiés et les outils conceptuels,
méthodiques et pratiques d’une re-lecture de ces images.
Les débats théoriques sont encore vifs pour savoir où placer l’acte
d’utilisation d’une image, pour évaluer l’intérêt et l’efficacité de cette
utilisation, plus encore pour les images en mouvement.
6
L’Image, Jacques Aumont, Ed. Nathan, Paris, 1994 ; Vie et mort de l’image, Régis Debray, Gallimard,
Paris, 1992.
voir également : Dominique Serre-Floersheim, Le passé réfléchi par l’image ou comment
décrypter notre histoire par l’image, Tome 1 : le Moyen-Age et le XVIème siècle, Paris : Editions
d'Organisation, 1994 ; Tome 2 : le XVIIème et le XVIIIème siècle, Paris, 1995.
11
dans sa composante morale et matérielle, ne pouvait échapper à cet
interdit7.
12
motivations personnelles, la passion pour le cinéma et les échos des
spectateurs-élèves ne contribuaient pas à normaliser ces pratiques. Le
manque d’encadrement et le manque de moyens aboutissaient
d’ailleurs à croire, qu’en contrepartie de l’autonomie, ces « passeurs »
ne pouvaient espérer propager et prolonger leurs expériences. En plus
de se croire isolés, voire méprisés, les enseignants motivés ont
renforcé cette idiosyncrasie qui a malheureusement rejeté longtemps
le développement comparé des pratiques et des méthodes.
13
vision globale des médias, sur une conscience des correspondances
des arts visuels : peinture, cinéma, télévision, photographie, publicité,
etc. A Bordeaux, le CDRP, dirigé par René La Borderie, inscrit en
priorité une action d’Introduction à la communication et aux médias
(Icom) inspirée d’approches rigoureuses de sémiologie et de science s
du langage. De même, le radio télévision scolaire, sous l’impulsion de
Henri Dieuzeide, proposera de multiples émissions de radio et de
télévision pour apprendre à décrypter les médias9.
14
établissements, la méthodologie de projet, avec des créations réalisées
par les élèves se répand, des festivals dédiés aux films éducatifs se
créent un peu partout en France et en Europe.
15
presque plus de sens. Comme pour une réaction chimique, le
numérique aura été le précipité de l’audiovisuel, en le démultipliant
quasiment à l’infini. C’est désormais d’audiovision dont il faudra parler.
Situation actuelle
16
Phase 4 : l’image comme structure. Avec l’apparition dans la
pédagogie de « la grammaire de l’image » qui déconstruit d’abord un
objet technique en prenant soin d’évacuer le plaisir et l’émotion
Les différentes approches sont donc loin d’être suspensives les unes
des autres, et se complètent finalement assez bien, pour autant qu’une
solide formation des profs ait eu lieu.
17
- outil de représentation du réel (certains phénomènes complexes ou
invisibles, notions où la visualisation offre plus de pertinence,
approches ou démarches didactiques spécifiques par discipline)
- forte mémorisation pour certains élèves
- enrichissement et diversification des approches enseignantes
18
Le but à atteindre est de donner du sens, soit en le repérant dans
l’œuvre audiovisuelle, soit en mettant l’apprenant dans un processus
d’intellection. La réactivité de l’élève ou son questionnement auront
pour but de rendre intelligible une matière assez rarement neutre voire
carrément subjective.
11
notamment, sur l’image scientifique voir La fabrique du regard (XVè–XXè siècles), Monique Sicard,
Odile Jacob, 1998 ; sur les contenus télévisuels : François Jost, Cinéma, télévision, entre réalité et fiction,
conférence UTLS, 2004, Comprendre la télévision, Armand Colin, 2005 ; Télévision du quotidien, De
Boeck, 2003 ; sur la pratique en classe : article de Geneviève Jacquinot, les élèves devant l’image
12
« Rhétorique de l’image » dans L’obvie et l’obtu, Roland Barthes, Seuil, 1982 ; Le signe, Umberto Eco,
Le Livre de poche, 1988 ; Introduction à l’analyse de l’image, Martine Joly, Paris, Nathan, 1994.
19
- ensuite, moderniser les approches en leur donnant une inflexion
nettement plus notionnelle pour favoriser la transversalité et la
pluridisciplinarité
- du même coup, diversifier les supports utilisés en favorisant les
comparaisons et les complémentarités pour répondre d’une façon
adaptée à la diversité des parcours d’élèves
- enfin, permettre l’accès aux dispositifs existants et la manipulation
des nouvelles ressources disponibles, pour accompagner
l’enseignant dans la fabrication de ses outils et l’amélioration de ses
techniques d’usage de l’audiovisuel et des médias
20
atouts respectifs selon les didactiques propres à chaque discipline. Par
exemple, le genre documentaire sous la forme d’archives a des atouts
indéniables en histoire-géographie ou sous la forme scientifique en
sciences mais la fiction demeure plus intéressante pour les lettres,
alors que l’actualité peut convaincre les enseignants de langue, le
dessin animé ceux d’arts plastiques et le multimédia les enseignants-
documentalistes, etc.
21
pour permettre une politique industrielle et un avenir scientifique
cohérent. Avec l’ère numérique dans laquelle nous entrons,
consommant de plus en plus d’images et les animant de plus en plus
vite, des pôles cinéma et audiovisuel doivent pouvoir s’emparer de
tous les aspects de cette convergence pour proposer des outils de
transformation sociale structurants.
- Ecole au cinéma
- Collège au cinéma
- Lycéens au cinéma
- les enseignements obligatoires
- les pôles régionaux d’éducation artistique et de formation au
cinéma et à l’audiovisuel
22
- les actions menées en région et fédérées dans le cadre de
dispositifs nationaux tels qu’"Un été au ciné/Cinéville", "Le Mois du
documentaire", ou "La Journée Mondiale de l’animation"
- la diffusion du catalogue "Images de la culture"
- la participation aux différentes actions du Ministère de la culture vis
à vis des publics en difficulté d’accès à la culture
23
Entre ces deux extrêmes, il existe tout un pan d’expérimentations et
d’initiatives à produire pour intégrer l’image et ses usages
pédagogiques dans le monde éducatif. Le cinéma, l’audiovisuel et le
multimédia doivent trouver la place qu’ils méritent à l’école, dans les
programmes, dans la formation des enseignants et en dehors de
l’école pour les animateurs et éducateurs.
Sitographie :
Educnet
Cinehig.clionautes.org
24
CRAC de Valence
Zéro de conduite
Quai des images
Pages CERISE du CRDP de Lyon
Telesavoirs.com
Ina
France5educ
lesite.tv
Capcanal.com
Apte.com
Tv5.org
Louvre.edu
Festivals (Carrefour des festivals)
Tv locales (voir avicca)
Développement Salles de cinéma (AFCAE ; adrc)
Financement des industries culturelles (IFCIC)
Web (AFDESI ; FING)
Introduction
• Projet global de formation des élèves puis mise au point d’une progression
pédagogique et d’un mode de fonctionnement propre à chaque établissement
(en fonction du contexte local et de l’inventivité des équipes).
25
• Travail d’équipe inscrit dans une volonté générale d’expérimentation de
contenus et de pratiques. Ce travail s’est concrétisé : au sein des établissements
par la mise en place de nouveaux modes d’organisation et d’échanges entre les
enseignants ; au sein de l’académie par l’implication concertée de différents
services et par l’ouverture à des partenaires culturels.
L’objet de cette monographie est, à partir d’une vue synthétique du travail mené
dans les établissements, d’offrir des pistes de réflexion que nous avons illustrées
d’exemples de projets et de fiches pédagogiques1. Il ne s’agit pas ici de
modéliser mais plutôt de proposer des idées, d’apporter des questionnements,
ceci dans le but d’enrichir la démarche de chacun.
26
Ces observations n'ont pas la prétention de présenter un bilan exhaustif de tout
ce qui a été fait par les enseignants tout au long de l'année. Elles sont des "
instantanés ", des "photographies " (voire des " cartes postales ") qui peuvent
éventuellement être considérés comme une série de moments retenus et qui
peuvent illustrer, au moins partiellement, les démarches pédagogiques mises en
œuvre dans le cadre de l'expérimentation.
Un premier constat : une grande diversité et une grande richesse des pratiques.
Cette diversité se vérifie aussi bien en ce qui concerne les supports, les
pratiques, les approches, les présupposés théoriques qu’en ce qui concerne les
styles et la personnalité des enseignants, les milieux socio-économiques dans
lesquels se situent les établissements scolaires et le niveau scolaire des classes.
Malgré cette diversité, nous pouvons dégager de l'ensemble des pratiques
observées un certain nombre de tendances générales.
• Nous avons observé partout un travail spécifique sur l'image et les médias, et
non pas une utilisation des médias au service d'une discipline. Dans l'un des
projets pédagogiques, cette spécificité est exprimée de la façon suivante : " Il
s'agit d'une approche de l'image et des médias qui se veut interdisciplinaire, non
rattachée au contenu d'une discipline traditionnelle. L'image est étudiée pour
elle-même, et non comme illustration d'un écrit – ce qui est son utilisation
habituelle en classe ".
• Nous avons constaté dans la plupart des sites, une sorte d'équilibre entre les
activités d'analyse (18 classes, soit 53 %)3 et les activités de production (16
classes, soit 47%). La place accordée à l'analyse permet d'affirmer que cet
aspect a été considéré comme un élément essentiel des Classes Image et
Médias. Cela différencie ces démarches des ateliers trop " audiovisualistes "
majoritairement centrés sur la production et dans lesquels la place de l'analyse
est complètement reléguée, voire inexistante.
" Maîtriser le langage de l'image animée par l'analyse de ses composantes "
" Connaître les codes de la représentation et pouvoir décoder les messages "
27
qui restent plutôt au niveau de la " description " des images et des sons et ceux
qui vont explorer, après le nécessaire travail de description, les dimensions
idéologiques des messages.
• Dans les activités de production, la situation d’imitation des " vrais " médias
est beaucoup plus fréquente que celle qui consiste à créer des modèles de
médias alternatifs. Autrement dit, le plus souvent, les enfants " doivent " faire
comme les " professionnels " , l'objectif de ces pratiques étant d'amener les
élèves à comprendre les contraintes de la production professionnelle.
Parmi les activités de production, il faut distinguer d'une part, celles qui se
présentent comme un exercice (recomposer la Une d'un journal à partir des
Unes de journaux, élaborer des commentaires journalistiques positifs ou négatifs
pour accompagner la séquence d'un JT visionnée sans le son, préparer un
message avec un " effet d'annonce " (d'une durée entre 5 et 10 secondes) pour
être filmé, présenter un objet extraordinaire à la façon de " Nulle part ailleurs ",
se présenter face à une caméra pour apprendre les notions de champs et hors-
champs, produire un bulletin radio… et d'autre part, celles qui s’intègrent dans
une situation de communication vraie, qui seront montrées dans – ou hors de –
l’établissement et qui supposent un travail de plus longue haleine qui peut
s’étendre tout au long d'un trimestre ou d'un semestre. Exemples : la préparation
d'un film de présentation du collège, la production d'un film de fiction, d'un
reportage-radio, d'un JT, etc.
Les objectifs explicites de la production dans les projets pédagogiques sont les
suivants :
" Apprendre à mieux communiquer par les images, les sons et les mots ".
28
grand groupe classe ; soit la classe est répartie et chaque enseignant prend en
charge un groupe d'élèves qui effectuent des tâches différentes.
Le travail sur la presse écrite – au sens large – l'emporte sur les autres supports.
Près d’une séance sur trois (27,9%) était consacrée à un travail sur la presse. Ce
travail sur la presse écrite a recouvert différentes activités : l'analyse de la Une
d'un journal, l'analyse des photos de presse (rapport texte/image), la composition
de la Une d'un journal à partir des Unes de journaux, l'analyse d'articles sur un
film, l'analyse d'un magasine destiné aux enfants, l'analyse de la presse-TV et la
production de la critique d'une émission TV…
Le travail sur le cinéma représente 9,3 %. Dans ces cas, il s'agit d’analyses
filmiques.
Le travail sur la radio, 9,3 % a été centré sur la production soit d'un bulletin-radio
ou soit d'un reportage-radio de présentation du collège aux élèves de CM2.
Le travail sur la publicité (tous supports confondus -presse écrite, TV, campagne
d'affiches, publicités créées par les élèves…) occupe 16,3% des activités.
Dans plus d’un cas sur deux, les activités de production utilisent le média vidéo.
Pour la production, le support qui apparaît le plus est la vidéo. Mais il y a
également eu production de la Une d'un journal, production d'un journal, d'une
campagne d'affiches, d'une bande dessinée, d'une publicité, d'une exposition-
photo, etc.
29
Les objectifs
Le type d'objectifs est étroitement lié aux activités proposées : les objectifs
cognitifs (" savoir ") sont associés principalement aux activités d'analyse ; les
objectifs " savoir-faire ", sont associés aux activités de production.
Les pratiques
Dans les activités de production, les stratégies les plus utilisées sont :
l'expérience directe, c'est-à-dire lorsque les élèves sont en situation de produire ;
et la démonstration quand il s'agit, par exemple, d'expliquer aux élèves le
fonctionnement d'un caméscope. Même si dans la plupart des situations de
production, il y a un aspect ludique, les stratégies ludiques n'ont pas été très
nombreuses.
30
Trois stratégies de ce type ont été observées.
• La deuxième situation joue sur " l'effet de surprise ". Le professeur distribue une
photo. Les élèves n'ont pas le droit de la regarder jusqu'à ce que l'enseignant en
donne la consigne. Il s'agit de la photo d'un jeune qui lève les bras… Les élèves
doivent trouver un titre à cette photo. Plusieurs hypothèses apparaissent : " Il
vient de gagner le 100 mètres et il lève les bras ", " Il est contre une vitre", " Il a
vu quelque chose qui lui a fait peur et ce qui lui a fait peur est hors-champ "…
Pour l'avenir, ne serait-il pas utile de réfléchir à la place des activités ludiques
dans les activités Image et Médias?
La dynamique de classe
31
interventions, cela est dû à un fait remarquable : le très haut niveau de
participation des élèves et de leur implication dans les classes images et médias.
Les élèves se sentent concernés, impliqués. Dans 56,8% on a constaté une
participation de l'ensemble des élèves. La participation spontanée des élèves est
beaucoup plus importante que la participation sollicité par les enseignants (86,5
% contre 13,5 %). Dans la même proportion, l'attention des élèves centrée sur
les tâches à accomplir l'emporte sur l'inattention et les activités parallèles ou
parasites. Les consignes sont données dans un climat de silence spontané de la
part des enfants et pas imposé par les enseignants. Dans seulement 10,8% des
séances observées, les consignes sont données dans un climat de bruit et de
confusion.
Les attitudes des enseignants qui prédominent sont : bienveillantes à l'égard des
élèves (62,2 %) ; démocratiques (37,8 %). Les élèves votent et prennent des
décisions collectives au moment de choisir les informations pour le bulletin-radio,
les questions qui seront posées dans une interview, le scénario qui va être filmé,
les idées pour une campagne d'affiche ; les élèves expriment leurs points de vue,
participent aux débats, s'écoutent …
Les approches
Nous avons déjà expliqué que dans les activités d'analyse, l'approche
sémiotique-sémiologique l'emporte sur les autres approches (approche
sociologique, économie des médias, études du récepteur…). D'autres approches
ont pu être observées, en voici quelques exemples :
32
• Une approche différente est représentée par l'étude de la Une d'un journal à
partir d'une approche visuelle. On attribue une couleur à chaque type
d'information (politique, économie, sport, culture, etc.). Les élèves travaillent sur
les Unes de trois journaux datés du même jour. On compare les couleurs
attribuées à chaque type d'information et on essaie de dégager les priorités en
matière d'information pour chaque journal.
Nous avons présenté jusqu'ici des différences autour des supports, des objectifs,
des méthodologies, des approches…Comment peut-on expliquer toutes ces
différences ? Qu'est-ce qui se trouve à l'origine ou derrière cette diversité ?
Ces différences sont apparues lorsque nous avons fait l'analyse des projets
pédagogiques élaborés par les équipes d'enseignants de chaque établissement.
Ce détour par les projets pédagogiques nous a permis de mieux saisir les
différences observées dans les classes. Dans les projets, observons les
différences qui apparaissent, d'une part entre les objectifs et, d'autre part, entre
les constats.
En ce qui concerne les objectifs, dans un projet le travail autour de l'image et des
médias poursuit l'objectif d'"établir un lien entre la culture scolaire et la culture
des médias ". Dans un autre projet, il s'agit d'" amener les élèves à prendre du
recul face à l'invasion d'images ". Dans un troisième cas, l'objectif est de "
sensibiliser les élèves aux excès de tous ordres de la communication
audiovisuelle et de les aider à se prémunir contre les risques et les illusions de
l'idéologie techniciste ".
En ce qui concerne les constats, dans un projet on lit que " les techniques
modernes de diffusion accroissent considérablement leur impact. Cette
exposition [aux médias] agit sur la perception du réel et donc sur la construction
de la pensée ". Dans un autre, on part du constat que "les médias et l'image
captivent et intéressent les élèves de 6e et de 5e qui les pratiquent parfois
excessivement ". Dans un autre projet, " l'audiovisuel est considéré comme une
33
motivation importante pour fédérer une classe ". Dans un quatrième cas, on part
de " la nécessité d'utiliser et de développer les compétences et les curiosités
d'enfants élevés dans un monde d'images ".
Voici quelques exemples qui mettent en évidence les différentes conceptions "
théoriques " sous-jacentes aux actions réalisées. Il est facile d'imaginer que les
objectifs, les contenus et les activités proposées aux élèves varient sensiblement
en fonction de ces présupposés. Car toute action dans le champ de l'éducation
aux médias est le résultat d'une conception particulière de l'éducation et d'une
conception particulière des médias, même si elles sont implicites, partielles ou
inconscientes.
Force est de constater donc que ces différences ne s'expliquent pas seulement
au niveau de la diversité des supports, des méthodologies, des approches…
Elles s'expliquent avant tout par les différentes conceptions sur lesquelles se
construisent ces actions.
La manifestation la plus visible de ces différences réside dans cet objectif qu'on
trouve partout dans l'éducation aux médias, à savoir : la formation de l'esprit
critique. Geneviève Jacquinot a déjà évoqué à plusieurs reprises que cet accord
autour de la formation de l'esprit n'est qu'apparent. On laisse croire que cette
notion va de soi et qu'il ne faut pas s'attarder à y réfléchir.
[…]" si tout le monde semble d'accord pour " rendre le téléspectateur plus actif "
ou " plus critique ", personne ou presque ne prend le temps ou la peine
d'expliciter ce que cela veut dire : s'agit-il de former un téléspectateur plus
sceptique, constamment bardé de ses armes antidupes ? un téléspectateur
élitiste sachant apprécier la " vraie " culture et mépriser l'autre (entendez la
populaire) ? ou bien, pire encore, un téléspectateur " pédagogisé " selon le mot
terrible d'un journaliste de Libération…"
Pour constater à quel point on peut entendre différemment cette notion, il suffit
de voir comment cette idée a été évoquée dans les différents projets
pédagogiques pour en conclure que les présupposés théoriques ne sont pas
toujours les mêmes.
Voici comment cette notion a été présentée en tant qu'objectif dans les projets
pédagogiques :
34
• " Conduire les élèves à devenir des lecteurs et des spectateurs avertis ".
• " Apprendre à gérer ses choix… afin de devenir un citoyen zappeur ".
• " Il faut apprendre aux élèves à avoir un regard critique sur l'image ".
Tout cela pour dire que dans un projet d'éducation aux médias, les conceptions
d'éducation et les conceptions des médias ne sont pas toujours les mêmes et
qu'il nous paraît nécessaire d'y réfléchir.
Pour cette raison, nous avons porté un regard particulier sur les classes dans
lesquelles cette participation était plus frappante. Voici une série d'éléments qui
peuvent expliquer ces résultats.
• Il a été constaté que les élèves travaillent mieux quand les enseignants
explicitent les objectifs des activités proposées ; c'est-à-dire quand les élèves
savent " à quoi ça sert ". Ce rappel du sens de l'éducation aux médias -faire
savoir aux élèves ce qu'on attend d’eux- contribue à mieux saisir le " contrat "
dans lequel s'engagent aussi bien les élèves que les enseignants.
35
- les sujets et les thèmes sont choisis à partir de l’intérêt des élèves ;
" Tu as dit " la fiction du réel "…C'est une façon très élégante de le dire "… "
Vous avez tous fait des remarques intéressantes ".
Les élèves baignent dans une culture audiovisuelle et, de ce fait, ils ont
beaucoup des choses à apporter dès qu'il s'agit de l'image. Il suffit d'orienter ces
apports pour que ces savoirs deviennent des connaissances.
En résumé, ces aspects constituent des principes pédagogiques qui ne sont pas
spécifiques à l'éducation aux médias : dans n'importe quelle discipline ce sont
des principes qui fonctionnent très bien. La question que l'on peut se poser est la
suivante : jusqu'où l'objet-média favorise-t-il la présence de ces éléments ? Ou,
l'heure consacrée à Image et médias semble-t-elle plus propice pour mettre en
place ces principes ?
Nous avons observé que, dans certains cas, le fait de travailler sur les médias ne
modifie pas automatiquement la relation enseignant-élève. Autrement dit, on
peut faire un cours sur les médias de la même façon qu'on fait un cours de
français ou d'histoire-géo. Ce qui change c'est le contenu, mais pas la relation au
savoir ni la relation enseignant/élève. Lors des entretiens avec les enseignants,
quelques-uns nous ont dit qu'eux-mêmes ne modifiaient pas leur comportement
dans les classes Images et Médias: dans leurs autres cours (français, histoire-
36
géographie, arts plastiques…) ils étaient pareils : à l'écoute des enfants, attentifs
à leurs préoccupations, etc. D'autres enseignants affirment au contraire, qu'ils
sont plus à l'écoute, plus disponibles dans les classes Images et Médias.
Comment peut-on expliquer cela ?
Par exemple :
• La même photo de l'agence Reuter avec deux légendes différentes dans deux
journaux. Et si on envoyait une lettre à l'agence de presse pour savoir qui dit la
vérité ?
" parmi les sens multiples que l'on peut discerner dans l'action du Clemi, l'un
pédagogique, est sans doute à privilégier : le Clemi propose un renversement
négocié de l'acte d'apprentissage ". […]
L'actualité fait éclater cette crispation. Elle oblige à repenser le savoir en fonction
de questions ". Elle s'appuie sur "les centres d'intérêt, la motivation,
l'interrogation permanente, le doute ".
" […] Ce renversement est négocié parce que tous les acteurs sont conviés. […]
Il s'agit, en mettant l'accent sur la richesse d'idées différentes, contradictoires, de
témoigner de façon dynamique de pratiques démocratiques. L'accent est mis ici
sur des règles de jeu : chacun a le droit de présenter sa pensée, une éducation
critique à la compréhension de l'actualité passe par une affirmation de la pluralité
des sources et des points de vue ".
37
" […] Mais ce renversement négocié est aussi un renversement dynamique dans
la mesure où il procède par conviction et non par décret. Seuls les enseignants
convaincus et formés sont susceptibles de porter cette éducation au politique qui
n'est autre que la version non édulcorée de l'instruction civique ". (GONNET, J.,
De l'actualité à l'école. Pour des ateliers de démocratie, Paris, Armand Colin,
1995)
1 Si vous voulez vous procurer ces projets et fiches pédagogiques, contactez : Clotilde
Schelstraete, Mafpen, technologie de l’information et la communication, direction de l’académie
de Paris.
Téléphone : 01 44 62 40 67
Télécopie : 01 44 62 40 68.
2 Les observations réalisées après le 29 mai 1997 n'apparaissent pas dans ce bilan.
http://innovalo.scola.ac-paris.fr/PNI1/Travaux_equipes/Travaux5a.htm
3 Les pourcentages cités dans ce rapport sont utilisés à titre indicatif car ils ont été calculés sur
les 34 séances observées.
38
- s’adapter aux facilités locales en matière de support : présentation de travaux pédagogiques sur
des films disponibles à la Maison des Cinéastes, utilisation du patrimoine audiovisuel local
(historique et contemporain).
2) Ce projet doit contribuer à consolider les réseaux entre les acteurs de la communauté
éducative et de la vie culturelle en renforçant le partenariat des professeurs avec la Maison
des Cinéastes. Il s'attachera à inciter les collègues à déplacer les élèves dans un lieu culturel, au
cinéma, lors de séances de projection de films pour les élèves, l'aide de prêts aux professeurs
de vidéos, d’ouvrages et de documents pédagogiques, et de la facilitation de l'accès à
l’impression de documents issus d’Internet. L'intention est d'élaborer collectivement des
documents pédagogiques par et pour les collègues, les échanger à l’issue du stage pour se
constituer une base de séances pédagogiques en lien avec l’étude de l’image.
3) Afin d'assurer une pérennité des pratiques enseignées, ce projet doivent être l'occasion de
laisser à disposition des participants ainsi que leurs établissements en ouvrages théoriques et
dossiers pédagogiques (en fonction de la liste des films disponibles à la Maison des Cinéastes).
Cela résultera d'un travail de recherche des ressources multimédias, et de présentation
commentée d’ouvrages.
Attentes
3. Lecture de l’image
Par rapport à l’argumentation, la question concernant la lecture de l’image
paraît plus facile à comprendre. En effet, les élèves chinois ont également
l’expérience d’apprendre à s’exprimer ou rédiger un petit récit en observant une
image. Aussi dans l’enseignement de langues étrangères, le recours à l’image en
vue de motiver la pratique de l’oral chez les apprenants est pratique courante.
39
Mais dans ce sens, l’image, qui reste l’outil au service de l’apprentissage de
la langue, ne constitue pas l’objet d’études. Selon l’explication des textes
officiels français, la notion d’image est beaucoup plus riche qu’il n’y paraît.
L’image n’est pas simplement constituée d’objets immobiles : un tableau, un
portrait, un dessin ou une photo. Les documents iconographiques utilisés en
classe peuvent être très divers, et l’on peut également trouver des images
vivantes : films, dessins animés, télévision, théâtre, etc.
L’image n’est pas un domaine propre au cours de français : elle est donc abordée
à partir d’autres objets d’étude. Comme le précisent les textes officiels : « La
lecture de l’image n’a pas à faire l’objet d’une séquence spécifique en cours
d’année. Elle peut plutôt intervenir au sein de séquences consacrées à des
lectures de textes et des analyses de genres, d’histoire littéraire et culturelle,
et d’argumentation » (CNDP, 2001 : 85). C’est pourquoi toujours dans les
Instructions officielles de 2001, le programme français propose d’inclure
dans les lectures l’étude de l’image, c’est-à-dire « s’attacher à dégager les
spécificités du discours de l’image et à mettre en relation le langage verbal et
le langage visuel ». Les élèves sont ainsi sollicités sur leurs capacités d’analyse
méthodique d’une image, au contraire du contexte chinois dans lequel l’image
demeure l’outil de l’apprentissage de la langue.
Au regard des enseignants chinois, les manuels français semblent riches, denses
et luxueux. Prenons l’exemple du manuel susmentionné « Littérature 1er » des
Editions Magnard. Dans cet ouvrage, les textes de différentes écoles littéraires
sont toujours accompagnés de belles illustrations de peintures correspondant
à l’école en question. Quand il s’agit du Baroque, une copie du tableau de
Caravage Tête de Méduse est présentée ; quand le classicisme fait l’objet
d’étude, celle de Poussin L’inspiration du poète en fait un excellent témoignage.
Nous relevons aussi quatre dossiers « Lire l’image » découpés en thématiques :
Synergies Chine n° 4 - 2009 pp. 63-68
Wen Ya
67
« Les Vanités », « Libertinage et sensualité dans la peinture du XVIIIe siècle »,
« L’autoportrait en peinture » et « Modernité et avant-garde en peinture » et
regroupant plusieurs tableaux, afin de répondre à la demande des Instructions
officielles pour « la lecture de l’image ».
L’intégration de la lecture de l’image dans l’enseignement de la lecture
littéraire en Chine pourrait également représenter un point non négligeable
pour les raisons suivantes :
D’abord, l’étude de l’image permet aux étudiants de développer leurs
capacités à observer, imaginer et interpréter en tenant compte du caractère
polysémique de l’image.
D’autre part, l’image n’est pas étudiée pour elle-même : il est nécessaire
qu’elle soit envisagée dans ses relations avec le discours verbal. Pour les
étudiants chinois, c’est là un bon moyen de faire comprendre la relation
entre le langage verbal et le langage visuel.
Finalement, la lecture de l’image donne accès à différentes dimensions de
l’héritage culturel. Cela contribue ainsi à la contextualisation des oeuvres
étudiées. Par exemple, une peinture peut représenter la même histoire ou
le même contexte social d’une certaine oeuvre littéraire, car en effet, le
peintre et l’écrivain pourraient vivre une même époque ou s’influencer l’un
l’autre. Les étudiants chinois trouveront sans doute une méthode différente
de comprendre et d’apprendre la littérature à travers l’étude de l’image.si comment chaque
production est une parcelle de réalité qui ouvre le champ à
L'analyse de l'image cinématographique, dans le film de fiction, nécessite, comme pré-
requis, l'analyse de l'image fixe. Elle aussi nécessite un transcodage : il faut passer du
code iconique au code linguistique en respectant au mieux l'image. Il faut donc utiliser
40
des outils précis pour « mettre à plat » la bande image. On retrouve la notion de cadrage,
de position de caméra, de profondeur de champ ; on y adjoint celles de plan
cinématographique, de séquence, on précise ce que sont les mouvements de caméra et on
s'interroge sur le montage, ses procédés et ses effets.
Depuis les vieux abécédaires du XIXe siècle [1], les images sont
présentes à l’école primaire et intégrées plus ou moins bien dans les
pratiques d’enseignement. Sous la forme de gravures en noir et blanc,
bicolores ensuite, en quadrichromie depuis, sous la forme de
photographies, de reproductions, parfois de films [2] , de séries ou de
téléfilms [3], mais aussi de dessins et de peintures, à la gouache
surtout dans ce cas, elles y apparaissent comme illustrations des
manuels, comme documents pour les différentes disciplines, comme
produits à réaliser au cours des activités artistiques. Récemment, citée
au singulier comme c’est le cas dans les approches théoriques
d’obédience sémiologique [4], l’image devient une catégorie à part
entière des programmes de 1995 pour l’école élémentaire. Dans ce
texte, un sort lui est d’abord fait dans l’introduction des "programmes
allégés et recentrés" : l’image, dit-on, "doit faire l’objet d’une
utilisation raisonnée". Il s’agit, de fait, d "analyser ce qui, dans l’image,
produit du sens et permet la construction de savoirs". [5] C’est ensuite
à la fin de la rubrique "Education artistique", qu’on la retrouve pour les
41
deux cycles, comme l’un des "Exemples d’ouverture à d’autres
domaines artistiques". Pour les classes de CP et de CE1, on constate
d’abord que "vivant dans un monde foisonnant d’images, qu’elles
soient graphiques, photographiques, télévisuelles, cinématographiques
ou numériques, les enfants s’en montrent grands amateurs." Par suite,
"prenant en compte cette situation de fait, l’école a pour rôle de les
accompagner dans la découverte, l’exploration, la compréhension et la
production d’images." Au cycle des approfondissements, à travers elle,
"il s’agit de donner aux élèves la capacité de mieux comprendre la
construction de l’espace et du temps, de développer des outils
d’analyse, d’exercer leur esprit critique en liaison avec les autres
domaines disciplinaires." A ce niveau, par ailleurs, "le travail sur
l’image sera enrichi d’une dimension historique et de la notion de
patrimoine." Très logiquement donc, l’image s’inscrit dans la discipline
qui lui est consacrée spécifiquement depuis longtemps, même si sa
dimension transversale est prise en compte initialement.
Du 9 avril 1999.
42
langage. Une telle évolution tend à inscrire plus nettement l’étude des
images dans la perspective qui est actuellement celle de
l’enseignement secondaire. Dès la sixième, en effet, l’image fait aussi
partie des programmes de Français depuis les instructions de 1987,
sur ce point reprises par les textes de 1996. Plus spécifiquement, c’est
à l’intérieur des activités de lecture que l’on situe l’image au collège.
Pour la 6e, la rubrique qui lui est consacrée est placée sous le signe de
la dualité, puisqu’elle concerne "le texte et l’image" ; pour le cycle
central, c’est la formule consacrée de "lecture de l’image" que l’on voit
apparaître.
43
langues européennes, l’on introduit aussi les langues régionales) font
revenir l’image à une situation antérieure. Bien entendu, ce texte est
en consultation pour l’instant et l’on ne peut préjuger de ce qu’il
deviendra. On notera seulement cette rupture qui s’inscrit fortement à
contre-courant de l’ensemble des textes précédents.
Ainsi, même si elles ne sont pas toujours très belles (mais, on le sait,
les images coûtent toujours plus cher que les textes quand il s’agit de
les reproduire), les images sont nombreuses et variées dans ce
manuel. Dans les quatre parties qui organisent l’ensemble des
documents proposés à la lecture dans une perspective qui est, de
manière dominante, celle de la typologie des textes ("Raconter", "Se
documenter", "Agir", "Dire"), on ne trouve, de fait, aucun texte seul. En
revanche, il y a bien cinq images sans texte (dont deux belles
photographies noir et blanc en pleine page), deux images
accompagnées d’un peu de texte (dont une page de bande dessinée),
deux textes que leur mise en page organise en images (deux
calligrammes d’Apollinaire), six documents où le texte et l’image sont
44
présents à égalité (pages de documentaires, notices de fabrication ou
règles de jeux). Dans la première partie, vingt et un récits sont illustrés
d’images d’albums ou de plusieurs vignettes successives qui hésitent,
pour leur statut, entre l’illustration et la bande dessinée. Pour cet
ensemble de documents donnés à lire, des questionnaires sont
proposés. Qu’ils concernent des textes illustrés, des documents mêlant
textes et images à égalité, ou des images seules, les trois ou quatre
premières questions sont toujours de compréhension. On trouve
ensuite sur le même plan des "ateliers images", des "ateliers forme du
texte" et des "ateliers détails du texte".
45
esthétisante, en soulignant la petite scène scolaire que l’organisation
des plans et l’utilisation de la lumière a dramatisée. De ce fait, en
mettant sur un même pied d’égalité textes et images par l’emploi de
questionnaires identiques, le manuel considère par principe que
certaines images n’ont pas une signification immédiate, comme c’est
le cas des textes. Elles exigent donc une véritable découverte guidée,
même si, de fait, la compréhension de l’image est différente de celle
des textes. L’analogie visuelle avec les objets représentés rend plus
immédiate, en effet, notre relation à l’image, alors que la double
articulation du langage écrit (et parlé) nécessite la maîtrise de la
combinatoire pour comprendre les textes.
Non, de fait. Dès le deuxième document écrit donné à lire (il s’agit d’un
conte en vers libres intitulé "L’éléphant et l’oiseau"), une question va,
en effet, mettre en relief une particularité des illustrations : "que
signifient les traits le long du corps de l’éléphant sur l’image 4 ?" Pour
la cinquième image illustrant un autre conte, intitulé "Le coq", une
question de "l’atelier images" attire l’attention sur un petit signe gris,
comme un minuscule tourbillon, surmontant la tête de deux
46
personnages représentés : "qu’est-ce qui montre la colère du coq et de
la poule ?". Ces questions et d’autres du même genre amènent les
élèves à s’intéresser ponctuellement au code graphique de la bande
dessinée et du dessin d’humour. De ce fait, une technique graphique
se trouve soulignée, ce qui signifie encore que l’image a perdu de sa
transparence et de son immédiateté : des formes spécifiques
l’organisent, dont on découvre quelques-unes au gré des activités.
Mais la mise en valeur de ces techniques reste limitée : utilisant
implicitement dans son questionnement les notions de premier et
deuxième plan à propos de la photographie, le manuel ne nomme pas
cet important élément d’organisation des images. De plus, des
éléments graphiques signalés, jamais, n’est proposée une reprise
synthétique, un exercice de réemploi ou l’exigence d’une utilisation
dans les consignes qui sont données pour la création d’images.
Dans le manuel dont j’ai ici retenu l’exemple, il est clair que l’image se
trouve promue nettement. A plusieurs niveaux même, elle se trouve
mise sur le même plan que le texte, même si la lecture-écriture de la
langue nationale domine en définitive. Tout cela est, certes, bel et bon
et, de ce fait, on tient, avec cet ouvrage, un exemple tout à fait
intéressant, puisque des pistes très utiles s’y trouvent proposées dans
une perspective systématique.
Reste que l’on peut d’abord s’interroger sur le statut inférieur qui est
encore réservé à l’image à travers les choix qui sont faits. Dans son
aspect novateur, par exemple, une telle approche ne mériterait-elle
pas d’être mieux reliée aux activités artistiques ? Dans quel but ? Mais
pour que la production d’images qui est demandée soit également
prise dans une perspective de progression et que la découverte des
codes iconiques ne reste pas aussi limitée. En bref, la première
question générale qui se trouve posée est celle-ci : faut-il instaurer des
limites à la lecture de l’image récemment promue ?
47
choses en effet. D’une part, parallèlement à l’apprentissage de
l’ensemble des codes nécessaires à la lecture des textes, un
enseignement-apprentissage des codes spécifiques de l’image devrait
être prévu dans une perspective de progression de l’école élémentaire
aux classes de l’enseignement secondaire. Et cet enseignement
devrait viser la variété, en s’intéressant aussi bien au dessin et à la
peinture (la perspective en particulier) qu’à la photographie ou au
cinéma. Un important effort de repérage et de classement des
différents codes devrait donc être fait pour cela. D’autre part, certains
domaines devraient faire l’objet d’apprentissages communs : il en est
ainsi, en particulier, de l’analyse du récit puisque les études
narratologiques qui ont initialement porté sur les textes (C. Brémond,
T. Todorov, G. Genette [9]...) ont été largement reprises dans l’analyse
du "récit filmique" (F. Vanoye [10], A. Gardies [11], J. Aumont, A. Bergala,
M. Marie, M. Vernet [12] ). Enfin, cet élargissement du travail sur l’image
devrait être mené dans le cadre d’une réflexion sur les relations à
ménager entre le Français et les Arts plastiques, puisque c’est de ceux-
ci seulement que relève la production des images. On voit qu’il y a
déjà là une importante réflexion à mener. Cela n’est pourtant pas tout.
48
seulement ou seulement technicienne) peut apparaître comme un
"jeu" entre l’emportement dans les plaisirs de l’imaginaire et le respect
des règles. Dès lors, l’enseignement de la lecture ne peut se centrer
uniquement sur la dimension raisonnée de l’activité comme c’est le
cas depuis longtemps, surtout quand la défense de la lecture est un
objectif même de son enseignement.
49
qui est très net et que j’ai essayé de mettre en évidence, cette
perspective vaut aussi pour les images. Mais, étant donné la plus
grande immédiateté dans le décodage qui leur est généralement
reconnue et leur très grand pouvoir de fascination, pour les images
peut-être plus encore que pour les textes un travail d’interprétation et
une parole personnelle sont nécessaires. C’est d’ailleurs ce que montre
une étude récente menée par le psychanalyste S. Tisseron, spécialiste
de l’image depuis ses beaux travaux sur les secrets de famille
d’Hergé [17] .
50
parler des états corporels, des émotions et des représentations
d’actes. La parole revient donc au spectateur des images, afin qu’il soit
conduit à donner du sens aux vécus d’images qui sont les siens.
L’essentiel consistealors à encourager chacun à développer ses
moyens privilégiés d’appropriation du monde (dessin, écriture,
danse...).
Onle voit, si elle peut évoluer dans les pratiques ainsi que le suggère
l’essai judicieux du manuel Lire des textes et des images, la lecture
des images peut encore prendre et parcourir bien des chemins à
l’école primaire. En même temps, bien sûr, que la lecture des textes. A
l’aide d’un effort important de réflexion qui pourra mieux relier entre
elles deux activités que l’on définit désormais comme très proches.
Jean-François Massol
IUFM de Grenoble
[1] Le Men, Ségolène, Les Abécédaires français illustrés du XIXe siècle, Promodis, 1984.
[2] Qu’on se rappelle, par exemple, les films passés grâce à la fameuse Pathé Baby par les instituteurs
qui pratiquaient les méthodes Freinet.
[3] Cf. Chailley, Marguerite, Le "petit écran" et l’école, Colin-Bourrelier, 1986.
[4] On en trouve une bonne présentation dans le livre de Martine Joly, L’Image et les signes, Nathan,
1994.
[5] C. N. D. P., p. 42.
[6] Circulaire n° 98-153 du 22-7-1998.
[7] Texte du 27 août 2001.
[8] Hachette, 2000.
[9] En particulier Figures III, Le Seuil, 1972.
[10] Récit écrit, récit filmique, Nathan, 1989.
[11] Le Récit filmique, Hachette, 1993.
[12] Pour les chapitres 3 et 4 de leur très riche Esthétique du film, Nathan, 1983, éd. revue, 1989.
[13] Lector in fabula, Grasset, 1985.
[14] La Lecture comme jeu, éditions de Minuit, 1986.
[15] L’Effet-personnage dans le roman, P. U. F., 1992
[16] "Pour une lecture littéraire du littéraire à l’école", in Amrein, Michel, coordination, Lire des textes
littéraires au cycle III, C. N. D. P. et C. R. D. P. d’Auvergne, 1998, p. 62.
[17] Tintin chez le psychanalyste, Aubier, 1985 ; Tintin et les secrets de famille, Séguier, 1990 ; Tintin
et le secret d’Hergé, Presses de la cité, 1993.
[18] Le Bonheur dans l’image, Institut synthélabo pour le progrès de la connaissance, 1996, p. 9.
[19] Enfants sous influence, Les écrans rendent-ils les jeunes violents ?, Colin, 2000.
51
Evolution des programmes et transformation du statut de
l’image à l’école élémentaire
Depuis les vieux abécédaires du XIXe siècle [1] , les images sont
présentes à l’école primaire et intégrées plus ou moins bien dans les
pratiques d’enseignement. Sous la forme de gravures en noir et blanc,
bicolores ensuite, en quadrichromie depuis, sous la forme de
photographies, de reproductions, parfois de films [2] , de séries ou de
téléfilms [3] , mais aussi de dessins et de peintures, à la gouache
surtout dans ce cas, elles y apparaissent comme illustrations des
manuels, comme documents pour les différentes disciplines, comme
produits à réaliser au cours des activités artistiques. Récemment, citée
au singulier comme c’est le cas dans les approches théoriques
d’obédience sémiologique [4] , l’image devient une catégorie à part
entière des programmes de 1995 pour l’école élémentaire. Dans ce
texte, un sort lui est d’abord fait dans l’introduction des "programmes
allégés et recentrés" : l’image, dit-on, "doit faire l’objet d’une
utilisation raisonnée". Il s’agit, de fait, d’"analyser ce qui, dans l’image,
produit du sens et permet la construction de savoirs". [5] C’est ensuite
à la fin de la rubrique "Education artistique", qu’on la retrouve pour les
deux cycles, comme l’un des "Exemples d’ouverture à d’autres
domaines artistiques". Pour les classes de CP et de CE1, on constate
d’abord que "vivant dans un monde foisonnant d’images, qu’elles
soient graphiques, photographiques, télévisuelles, cinématographiques
ou numériques, les enfants s’en montrent grands amateurs." Par suite,
"prenant en compte cette situation de fait, l’école a pour rôle de les
accompagner dans la découverte, l’exploration, la compréhension et la
production d’images." Au cycle des approfondissements, à travers elle,
"il s’agit de donner aux élèves la capacité de mieux comprendre la
construction de l’espace et du temps, de développer des outils
d’analyse, d’exercer leur esprit critique en liaison avec les autres
domaines disciplinaires." A ce niveau, par ailleurs, "le travail sur
l’image sera enrichi d’une dimension historique et de la notion de
patrimoine." Très logiquement donc, l’image s’inscrit dans la discipline
qui lui est consacrée spécifiquement depuis longtemps, même si sa
dimension transversale est prise en compte initialement.
52
démarche de choix et de réflexion esthétique." En ce qui concerne
l’école élémentaire plus précisément, il est décidé "d’encourager...
l’introduction (...) d’une éducation progressive à la pratique et à
l’analyse des principales formes d’images." Plus récemment encore,
dans le dossier de presse "Partenariats Education-Culture" [7] ,
"l’éducation à l’image" est la première des "nouvelles actions
prioritaires" ; on y note que "l’éducation à l’image s’inscrira dès le plus
jeune âge dans le cadre de la maîtrise du langage et de la
sensibilisation aux arts."
53
N’apparaissant pas non plus dans cette partie nouvelle intitulée
"éducation littéraire et humaine", elle n’existe plus que dans la partie
consacrée aux arts plastiques, comme c’était le cas dans les
programmes de 1995. Si elle est surprenante, une telle rupture dans la
progression sur les deux cycles et dans l’évolution constatée
précédemment ne doit pas trop étonner puisqu’une mutation identique
concerne également le Français comme discipline séculaire. Au cycle
3, celle-ci est nettement scindée en deux : "la maîtrise du langage oral
et écrit" est posée initialement, dans une perspective transdisciplinaire
et sans référence à une langue particulière, clairement distinguée,
dans le dispositif programmatique, de la présentation de "l’éducation
littéraire et humaine" qui comprend aussi "l’observation réfléchie de la
langue française", ici finalement nommée. Si, sur le modèle de
l’enseignement secondaire, le Français de l’école élémentaire s’est
d’abord partiellement enrichi de la lecture de l’image, les propositions
récentes qui cassent en deux la discipline bâtie depuis un siècle pour
l’enseignement de la langue nationale, (au moment où, à côté des
langues européennes, l’on introduit aussi les langues régionales) font
revenir l’image à une situation antérieure. Bien entendu, ce texte est
en consultation pour l’instant et l’on ne peut préjuger de ce qu’il
deviendra. On notera seulement cette rupture qui s’inscrit fortement à
contre-courant de l’ensemble des textes précédents.
54
aujourd’hui indispensable, rappellent-ils, d’apprendre à analyser
l’image qui tient un rôle essentiel dans nos sociétés. Les programmes
officiels insistent sur cette nécessité, tout en continuant à encourager
la lecture des textes".
Ainsi, même si elles ne sont pas toujours très belles (mais, on le sait,
les images coûtent toujours plus cher que les textes quand il s’agit de
les reproduire), les images sont nombreuses et variées dans ce
manuel. Dans les quatre parties qui organisent l’ensemble des
documents proposés à la lecture dans une perspective qui est, de
manière dominante, celle de la typologie des textes ("Raconter", "Se
documenter", "Agir", "Dire"), on ne trouve, de fait, aucun texte seul. En
revanche, il y a bien cinq images sans texte (dont deux belles
photographies noir et blanc en pleine page), deux images
accompagnées d’un peu de texte (dont une page de bande dessinée),
deux textes que leur mise en page organise en images (deux
calligrammes d’Apollinaire), six documents où le texte et l’image sont
présents à égalité (pages de documentaires, notices de fabrication ou
règles de jeux). Dans la première partie, vingt et un récits sont illustrés
d’images d’albums ou de plusieurs vignettes successives qui hésitent,
pour leur statut, entre l’illustration et la bande dessinée. Pour cet
ensemble de documents donnés à lire, des questionnaires sont
proposés. Qu’ils concernent des textes illustrés, des documents mêlant
textes et images à égalité, ou des images seules, les trois ou quatre
premières questions sont toujours de compréhension. On trouve
ensuite sur le même plan des "ateliers images", des "ateliers forme du
texte" et des "ateliers détails du texte".
55
consigne suivante : "Choisis une illustration du texte et écris un
paragraphe où tu expliqueras la règle de ce jeu.".
56
On observera pourtant que c’est quand même la lecture des textes
dans la perspective disciplinaire du Français qui domine de fait et pour
deux raisons. D’une part, les exercices qui précèdent les "ateliers"
portent seulement sur l’enseignement de la langue ("Pour t’aider/Les
majuscules et la ponctuation/Mets les majuscules et la ponctuation qui
conviennent...") ; d’autre part, des consignes de relecture ("je reviens
sur mon écrit") suivent les exercices d’écriture, alors que rien n’est
prévu pour qu’un deuxième regard permette d’améliorer les images
produites par les élèves. Serait-ce parce que les codes graphiques ne
sont pas mis en évidence ?
Non, de fait. Dès le deuxième document écrit donné à lire (il s’agit d’un
conte en vers libres intitulé "L’éléphant et l’oiseau"), une question va,
en effet, mettre en relief une particularité des illustrations : "que
signifient les traits le long du corps de l’éléphant sur l’image 4 ?" Pour
la cinquième image illustrant un autre conte, intitulé "Le coq", une
question de "l’atelier images" attire l’attention sur un petit signe gris,
comme un minuscule tourbillon, surmontant la tête de deux
personnages représentés : "qu’est-ce qui montre la colère du coq et de
la poule ?". Ces questions et d’autres du même genre amènent les
élèves à s’intéresser ponctuellement au code graphique de la bande
dessinée et du dessin d’humour. De ce fait, une technique graphique
se trouve soulignée, ce qui signifie encore que l’image a perdu de sa
transparence et de son immédiateté : des formes spécifiques
l’organisent, dont on découvre quelques-unes au gré des activités.
Mais la mise en valeur de ces techniques reste limitée : utilisant
implicitement dans son questionnement les notions de premier et
deuxième plan à propos de la photographie, le manuel ne nomme pas
cet important élément d’organisation des images. De plus, des
éléments graphiques signalés, jamais, n’est proposée une reprise
synthétique, un exercice de réemploi ou l’exigence d’une utilisation
dans les consignes qui sont données pour la création d’images.
Dans le manuel dont j’ai ici retenu l’exemple, il est clair que l’image se
trouve promue nettement. A plusieurs niveaux même, elle se trouve
57
mise sur le même plan que le texte, même si la lecture-écriture de la
langue nationale domine en définitive. Tout cela est, certes, bel et bon
et, de ce fait, on tient, avec cet ouvrage, un exemple tout à fait
intéressant, puisque des pistes très utiles s’y trouvent proposées dans
une perspective systématique.
Reste que l’on peut d’abord s’interroger sur le statut inférieur qui est
encore réservé à l’image à travers les choix qui sont faits. Dans son
aspect novateur, par exemple, une telle approche ne mériterait-elle
pas d’être mieux reliée aux activités artistiques ? Dans quel but ? Mais
pour que la production d’images qui est demandée soit également
prise dans une perspective de progression et que la découverte des
codes iconiques ne reste pas aussi limitée. En bref, la première
question générale qui se trouve posée est celle-ci : faut-il instaurer des
limites à la lecture de l’image récemment promue ?
58
Dans le cadre des recherches récentes centrées sur le pôle du lecteur
que l’on distinguera du pôle de l’auteur et du pôle du texte, à côté
d’importants travaux qui définissent le lecteur comme un pur effet
textuel (c’est le cas chez U. Eco [14] , par exemple), M. Picard a élaboré
un modèle théorique de la lecture littéraire qui donne toute leur place
aux investissements personnels du lecteur dans l’activité qu’il pratique
[15] . Pour lui, loin d’être unifié, tout lecteur se partage en trois
instances. Celui qui a conscience de rester présent en chair et en os
dans son monde familier (il est appelé "le lisant") se trouve toujours
accompagné de deux autres ; le premier est celui que sa lecture
replonge aussi en lui-même et qui utilise des souvenirs et des
fantasmes très personnels pour dynamiser ce qu’il lit (on l’appelle "le
lu") ; plus rationnel, le second (il est nommé "le lectant") élabore
rationnellement la signification du texte lu à partir de ce qu’il sait du
fonctionnement des textes en général, mais aussi de ses
connaissances du monde. Repris et adapté par V. Jouve [16] , ce
modèle a le grand mérite de souligner d’une part l’importance des
investissements personnels dans la lecture, d’autre part de montrer
qu’une lecture harmonieuse ne se déporte pas sur un seul des pôles
ainsi mis en évidence, mais combine les trois de la manière la plus
équilibrée possible. C’est ainsi qu’une lecture réussie (et non fascinée
seulement ou seulement technicienne) peut apparaître comme un
"jeu" entre l’emportement dans les plaisirs de l’imaginaire et le respect
des règles. Dès lors, l’enseignement de la lecture ne peut se centrer
uniquement sur la dimension raisonnée de l’activité comme c’est le
cas depuis longtemps, surtout quand la défense de la lecture est un
objectif même de son enseignement.
59
demandent à être comblés...), et le travail d’interprétation (travail
conscient de recherche de significations) apparaît comme une
nécessité ; ou bien le lecteur lui-même décide que le texte, qui semble
ne pas lui résister naturellement, doit lui résister néanmoins, qu’il peut
dire plus et mieux qu’il ne dit dans une lecture de surface et le travail
d’interprétation apparaît alors comme un acte délibéré de
franchissement des apparences." [17] . Découle bien entendu de cet a
priori une tout autre approche de la lecture et de son enseignement.
60
"un espace à explorer, un espace qui suscite notre désir de le
transformer autant que d’être transformé par lui."
On le voit, si elle peut évoluer dans les pratiques ainsi que le suggère
l’essai judicieux du manuel Lire des textes et des images, la lecture
des images peut encore prendre et parcourir bien des chemins à
l’école primaire. En même temps, bien sûr, que la lecture des textes. A
l’aide d’un effort important de réflexion qui pourra mieux relier entre
elles deux activités que l’on définit désormais comme très proches.
[1] Le Men, Ségolène, Les Abécédaires français illustrés du XIXe siècle, Promodis, 1984.
[2] Qu’on se rappelle, par exemple, les films passés grâce à la fameuse Pathé Baby par les instituteurs
qui pratiquaient les méthodes Freinet.
[3] Cf. Chailley, Marguerite, Le "petit écran" et l’école, Colin-Bourrelier, 1986.
[4] On en trouve une bonne présentation dans le livre de Martine Joly, L’Image et les signes, Nathan,
1994.
[5] C. N. D. P., p. 42.
61
[6] Circulaire n° 98-153 du 22-7-1998.
[7] Du 9 avril 1999.
[8] Texte du 27 août 2001.
[9] Hachette, 2000.
[10] En particulier Figures III, Le Seuil, 1972.
[11] Récit écrit, récit filmique, Nathan, 1989.
[12] Le Récit filmique, Hachette, 1993.
[13] Pour les chapitres 3 et 4 de leur très riche Esthétique du film, Nathan, 1983, éd. revue, 1989.
[14] Lector in fabula, Grasset, 1985.
[15] La Lecture comme jeu, éditions de Minuit, 1986.
[16] L’Effet-personnage dans le roman, P. U. F., 1992.
[17] "Pour une lecture littéraire du littéraire à l’école", in Amrein, Michel, coordination, Lire des textes
littéraires au cycle III, C. N. D. P. et C. R. D. P. d’Auvergne, 1998, p. 62.
[18] Tintin chez le psychanalyste, Aubier, 1985 ; Tintin et les secrets de famille, Séguier, 1990 ; Tintin et
le secret d’Hergé, Presses de la cité, 1993.
[19] Le Bonheur dans l’image, Institut synthélabo pour le progrès de la connaissance, 1996, p. 9
[20] Enfants sous influence, Les écrans rendent-ils les jeunes violents ?, Colin, 2000.
62
l'enfant avec la bénédiction des parents qui croient se délivrer ainsi de leur charge
éducative.
- identification du sujet,
- situation dans le temps
- contexte historique, socio-économique, culturel, biographique,…
1. COMMUNICATION ET LANGAGE
2. L’IMAGE ARTISTIQUE AU SERVICE DE LA FORMATION EN LANGUE
3. IMAGES, NOUVELLES IMAGES LE FORMATEUR EN LANGUES,
MAGICIEN OU PEDAGOGUE?
4. LES NOUVELLES FORMES DE TRANSMISSION D’IMAGES AU SERVICE
DE L’ENSEIGNANT
63
1. L’IMAGE DANS UN COURS DE LANGUE
2. CONCLUSION
3. BIBLIOGRAPHIE
4. ANNEXES:
1. Objectifs linguistiques dans l’analyse d’une oeuvre d’art
2. Posibles démarches pédagogiques d’analyse de l’image
3. Images du projet de téléenseignement Syntagma 3
RÉSUMÉ
Notre intervention s’efforce de distinguer quelques unes des directions dans lesquelles le
spécialiste de didactique des langues sera contraint de s’orienter face aux défis des
nouvelles modalités de transmission, de diffusion et de captation des savoirs. Il convient,
en tout premier lieu, de se situer par rapport à des problématiques globales nouvellement
formulées (processus de communication, rapport texte/image). Mais l’enjeu majeur réside
dans l’utilisation potentielle de "nouvelles images": images de synthèse et environements
virtuels certes, mais surtout images numérisées dont la mise en évidence de l’agencement
peut aujourd’hui aider grandement à mettre en valeur les articulations de la langue.
Enfin, l’image transmise par réseaux, se doit d’être pleinement réévalué, notament dans
le cas d’Internet, même si les images transmises par visioconférence ne sont pas encore
pleinement satisfaisantes. Notre société de l’image n’épargne donc guère l’enseignement
de langues en lui imposant des choix ausi nombreux que décisifs; jusqu’à ce jour
néanmoins, on ne lui en fournit que rarement les moyens, comme le montrent à l’envie
les CD-Rom d’apprentissage de langues, où des "manuels", réalisés à peu de frais, ont
simplement été transposés sur de nouveaux supports (le constat est particulièrement clair
pour les CD-ROM d’apprentissage en espagnol). Heureusement, il est des CD-ROM d’art
plurilingues qui permettent aux enseignants de réellement travailler les champs
linguistiques. Heureusement, il y a le modèle NARCISSE.
COMMUNICATION ET LANGAGE
L’analyse comparée des signes linguistiques et des images s’inscrit pleinement dans
l’histoire intellectuelle du XXème siècle.. On se rappelera que c’est en 1931 que Peirce
systématisa ses réflexions sur le nom de sémiotique en étudiant, en même temps les
systèmes non linguistiques tout comme les données perçues par les sens, notament sur le
visuel.. Au moment où s’ébauchèrent les recherches fondatrices annonçant l’informatique
et l’hypertexte, Peirce rédéploie ce que Saussure au début du siècle avait désigné sur le
concept de sémiologie..
L’image peut révéler dans un instant sa signification au récepteur, mais les systèmes
sémiotiques visuels sont déficients car ils ne possèdent pas la capacité du système
linguistique pour représenter ce qui se déroule en parlant, ou les processus mentaux
complexes et l’infinitude de choses que nous ne pouvons pas voir. Si le langage et
64
l’image se combinent déjà dans le cas du cinéma qu’en est-il du multimédia? Citons
Pierre Levy et son très bel ouvrage Les Technologies de l’intelligence: "L’informatique
de simulation et de visualisation est aussi une technologie intellectuelle" .. Et Bernadette
Goldstein nous dit dans Interactifs une technique de l’intention: "La communication entre
la machine et l’utilisateur est conçue comme transmission de la communication.
L’interactivité peut s’incarner dans une situation de communication dont les
caractéristiques sont très proches des pratiques discursives" .
"La mission de l’art n’est pas de copier la nature mais de l’exprimer" proclame Balzac
dans Le Chef-d’oeuvre inconnu.. Nous ne sommes pas d’avantage éloignés de l’image
platonicienne du mythe de la caverne, qui veut donner le change sur la réalité.
L’enseignant de langue aime à l’appréhender comme symbole, c’est-à-dire comme
devant être décryptée et comme renvoyant à un sens qu’elle évoque, mais qu’elle ne
contient pas en elle-même. Le langage artistique permet donc une lecture vaste et riche
du monde, du signe, il est pour l’apprenant un instrument clef de cognition de la réalité..
Ainsi, "La femme qui pleure" de Picasso (1937), que symbolise la forme comme parole,
nous transmet un sentiment de douleur que l’artiste expérimente comme conséquence de
la Guerre Civile espagnole. A travers l’image, nous pouvons donc enseigner la langue et
tout la culture qui gravite autour de l’oeuvre d’art dans la mesure où nous pouvons non
65
seulement réaliser des activités pédagogiques, mais, en même temps, l’étudiant peut-être
initié à une sensibilité artistique et au savoir culturel qui entoure l’oeuvre d’art. Nous
pouvons, aussi, enseigner la langue de spécialité (l’Histoire, la politique, l’architecture, la
médicine, le vocabulaire spécifique à un métier…). L’agrandissement que permet l’image
numérique, le fait de "pénétrer" dans l’oeuvre d’art, permet à l’enseignant d’atteindre
pleinement ces objetifs. Voyons ensemble quelques exemples pratiques: (voir annexe 1)
Pierre LEVY, dans son ouvrage déjà évoqué, souligne comment "la simulation prenant le
pas sur la théorie, l’efficience gagnant sur la vérité, la connaissance par les modèles
numériques sonne comme une revanche de Protagoras sur l’idéalisme et l’universalisme
platonicien".
Par ailleurs, si le formateur en langue doit jouer sur la charge émotionnelle de l’image, il
doit aussi faire appel au raisonnement, à la théorie sur le discours. Pour lui ces deux
points de vue peuvent trouver un terrain d’entente et se relier pour être appliqués dans le
cadre d’une formation de langues. Tout bon pédagogue sait qu’il n’y a pas de recettes
miracles et qu’il est aussi important d’être magicien que théoricien. Il doit être magicien
tout en restant pédagogue, argumentant à l’apprenant tout son savoir et son acquis. Il doit
maîtriser son cours, dans tous les sens du mot, et transmettre une réalité, une théorie sur
la structure de la langue.. N’est-ce pas justement ce que nous permettent les "nouvelles
images".
66
Philippe QUÉAU le dit clairement: "Aujourd’hui, l’image peut donner virtuellement lieu
au réel alors que jadis, c’était le contraire. Le réel était virtuellement image; il donnait
virtuellement lieu à des images. La simulation et les techniques du virtuel favorisent un
regard plus acéré sur le réel car elles imposent une mise entre parenthèse du monde; non
pas pour le nier, pour le refuser, mais pour objectiver notre propre conscience de ce
monde" .;
Ce qui pourrait servir de base à une utilisation vraiment pédagogique de l’image. L’image
est sur le point de changer de statut: celui qui la regarde participe à l’action qu’elle
présente. Elle est un outil dans lequel l’enseignant peut calculer ce qu’il veut montrer.
Elle est aussi une initiation au concept et donc un moyen de penser le réel et de le
maîtriser. Dominer l’image pour en faire un moyen d’interpréter le réel doit faire partie
des compétences inhérentes à la didactique des langues.. Cela ne veut pas dire, pour
autant, que l’enseignant doit devenir un spécialiste de l’image, mais, bien plus tôt, cela
signifie que le rôle des enseignants est de contrôler l’activité des professionels de
l’image, afin d’obtenir des produits qui répondent exclusivement à leurs besoins et à leurs
objectifs.. Et c’est là la raison d’être majeure de ma présence parmi vous aujourd’hui. Les
enseignants utiliseront, évidement, ce qu’il est convenu d’appeler les NT multimédia
dans une perspective différente de celle qui prédomine aujourd’hui parmi les
professionnels actuels de l’audiovisuel.. Il ne s’agit pas de copier l’usage domestique ou
grand public et d’appliquer les règles de production actuellement proposées par les
professionnels, mais d’inventer des produits spécifiques obéissant aux objectifs de
formation. Le pédagogue devra mettre au point ses propres produits, d’où la nécessité de
développer les systèmes auteurs.
Sur les réseaux de télécommunications, les règles économiques sont évidement bien
differéntes de celles qui se rencontrent dans l’organisation actuelle de l’audivisuel. Il ne
s’agit pas de diffuser des documents élaborés, mais de communiquer grâce à l’image..
Dans ce contexte l’image n’est pas produite par une chaîne ou un producteur au terme
d’un financement spécifique, mais il s’agit d’un outil simple n’exigeant pas pour être
maîtrisé une compétence technique très forte.. Cette image recrée une relation immédiate:
le personnage central est celui qui détient l’information.
67
Chacun devient ainsi acteur et réalisateur de ses propres prestations. Dans ces systèmes
de communication, ce qui s’impose, c’est la préeminance du contenu sur la forme.. Ces
nouveaux supports pour l’audivisuel sont susceptibles de remplir de multiples fonctions
pédagogiques. Ils offrent à l’enseignement toute une série de moyens faciles à maîtriser
par les enseignants eux-mêmes.
L’image qu’ils apportent n’a pas le même statut que celui qui leur a été attribué jusqu’ici;
le rôle des enseignants est aussi de savoir identifier ces différences de nature afin de
former leurs étudiants à tous les usages possibles.
Toutes sortes d’images serviront dans un cours de langue. L’enseignant n’aura que
l’embarras du choix.
Il est évident, que ce qui doit apporter une image à un cours de langue dépendra, aussi, du
type d’exercice au d’activité proposée ou choisi. Car chaque technique pédagogique
nécessite des compétences différentes selon qu’il s’agisse de la CO ou E, de l’EO au E,
de la culture et la civilisation.. Il est possible que l’enseignant préfère se passer d’images
pour qu’il puisse les raconter, que l’apprenant puisse se les représenter, les recréer. Il
serait, aussi, utile de penser à l’élaboration des logiciels d’aide à la création pour raconter
cette image.. Il est nécessaire de réfléchir sur la façon dont l’enseignant arrivera à motiver
l’apprenant pour qu’il exprime le désir de faire apparaître l’image.. Il n’est pas moins
important de souligner qu’une image et une séquence vidéo d’une minute, peuvent
représenter un enseignement de langue de trois heures de cours avec l’enseignant, en
semi-autonomie et en autonomie. (Voir annexe 2 et 3)
CONCLUSION
Vous connaissez le proverbe "une image vaut mille mots". En tout cas, il ne fait aucun
doute que l’image est un des meilleurs outils, dont le formateur dispose pour enseigner
une langue. Il est donc nécessaire de mettre toute notre imagination de pédagogue au
service à la fois de la langue et de l’image. Il est probable que ce que nous nommerons la
médiaconférence devienne bientôt l’outil par excellence de la formation à distance.
68
Néanmoins, il convient de se poser les questions suivantes pour une approche globale du
sujet à l’étude: - celle du type d’images nécessaires au formateur et à la formation - celle
d’outils à utiliser dans les cours, à quel moment du cursus de la formation et pour quelle
type de formation. - celles des outils indispensables (ou d’appoint) aux différents types
d’enseignement : magistraux, par petits groupes, à distance, in situ, en autonomie, en
semi-autonomie, et aux différentes méthodologies existantes. Dernière question: quel
système choisir pour quel type d’enseignement, dans quelle circonstance et dans quel
cadre: institutionnel, familial, privé, ludique.
Pour conclure, on peut affirmer qu’un formateur ne peut plus aujourd’hui se servir de
n’importe quel image, dans n’importe quel contexte, ni support.. Il sera, par ailleurs, utile
d’étudier dans quel mesure l’interactivité avec la machine affecte le comportement de
l’apprenant et le développement de l’enseignement des langues.. il faudra tenir compte du
fait que l’expression non verbale est très importante dans la didactique d’une langue, dans
l’élaboration et la compréhension du discours.. De même, nous pouvons nous questionner
sur les éventuelles nouvelles possibilités offertes, sur les apports des formateurs et
apprenants à la création et au développement de ces images
COLLOQUE IRIS/CEAQ
UNIVERSITÀ LA SAPIENZA ROMA
L'image en sociologie. Le développement de la sociologie visuelle.
Fabio La Rocca et Amal Bou Hachem
GRIS - CEAQ
Amal Bou Hachem : L'homme de tout temps a utilisé divers médiums pour créer et recréer ses
images. Lorsque nous évoquons une photographie, un tableau ou un film, c'est aussi d'images dont
nous parlons : il s'agit davantage alors des médiums clés dans lesquels les images s'incarnent et
apparaissent. Les médiums confèrent la visibilité des images. La fabrication des images est elle
même un acte symbolique, puisqu'elle influe et façonne en retour notre regard et notre perception
iconique.
À travers elles, l'homme représente la conception qu'il se fait du monde et qu'il veut donner à voir à
ses contemporains. Il y a une relation qui lie d'un coté l'image à un corps - spectateur, de l'autre au
médium - support qui la véhicule. Une corrélation étroite se tisse entre un corps regardant et un
médium regardé.
Avec le cinéma, la photographie est le médium le plus discuté dans les théories des productions
visuelles. Ils sont analysé soit comme une trace de ce qui existe dans le monde, soit comme un
produit d'une technique. Il est rare qu'on développe à leur propos un discours sociologique ou
anthropologique. Ce qui montre bien le peu d'attention qu'on a accordé aux images mentales, à
l'imagination et à la mémoire qui hantent ces médiums et qui en constituent l'imaginaire collectif ou
privé.
Nous vivons avec des images et nous comprenons le monde en image. La matérialité des images
leur conférait non seulement une visibilité, mais aussi une présence officielle dans l'espace social.
Représenter une image, cela signifie d'abord la fabriquer physiquement. Les images sont apparues
dans des corps-images concrets, immédiatement dotés d'efficacité du seul fait de leur matérialité et
de leur dimension physique. Si les images réclamaient une visibilité corporelle, c'est d'abord, ne
l'oublions pas, qu'elles accueillaient dans l'espace public les rituels nécessaires à la fondation d'une
communauté.
L'expérience du monde s'effectue à travers l'expérience des images. Mais l'expérience des images
se rattache à son tour à une expérience de leurs médiums. Ceux-ci ont une forme dynamique qu'ils
69
acquièrent dans les cycles historiques de leur développement. Chaque médium possède une forme
temporelle qui en signale la marque à un moment donné. Dans la terminologie des médiums visuels
nous ne disposons pas d'une distinction élémentaire équivalente à celle qui sépare l'écriture du
langage. A l'heure actuelle, aucune argumentation analogue à celle qui a été développée pour le
langage n'existe à l'usage des images. Images intérieures et images extérieures proviennent sans
distinction de la même notion « d'Image ». Mais on voit clairement que les médiums sont aux
images ce que l'écrit est au langage. La fonction des médiums est de rendre les images visibles et
de nous faire communiquer avec elles. L'analyse du triangle image- corps- médiums est primordiale.
A l'heure actuelle il n'existe pas d'études qui sont parvenues à donner une représentation commune
de la production de l'imaginaire collectif (les mythes et les symboles d'une époque) et de la
production physique et artistique des images dans laquelle apparaîtrait l'influence des aspects
culturels et techniques.
L'image existe à travers la double histoire de sa production matérielle et mentale.
Peut être pourrait-on dire que les images ressemblent à des nomades qui auraient changé de mode
de vie au gré des cultures traversées dans leur histoire, en utilisant les médiums des diverses
époques comme des étapes dans le temps. Dans la succession des médiums, le théâtre des images
n'a jamais cessé d'être réaménagé, en obligeant les spectateurs à développer de nouvelle technique
de perception pour réagir à de nouvelle technique de représentation.
La lutte pour la maîtrise des images, le rapport entre image et médiums atteints toujours une
dimension critique. Les débats que les images ont suscités aux diverses époques de leur histoire,
ont toujours réagi avec sensibilité à ce rapport. Lorsqu'il fut reproché aux images de n'être que des
surfaces aveugles, les mouvements iconoclastes ne tardèrent pas à accuser les médiums d'être des
matériaux dépourvues de vie. Quand c'étaient au contraire des intérêts politiques qui les animaient,
ils reprochaient alors à leurs adversaires idéologiques de mesurer des images à leur propre
avantage ou d'utiliser les médiums pour diffuser des fausses images. Ré enchantement versus dé
enchantement. Ces images, après avoir été chassées par le début de la science et de la technique,
reviennent en force, se diffusent dans l'ensemble du corps social ... la technique n'est plus
iconoclaste mais iconophile. (M.Maffesoli)
L'écran est le médium prépondérant par lequel se produisent les images. Ce désir, étant satisfait de
façon toujours neuve, nous pensons assister chaque fois à la naissance d'images inconnues. Une
distinction entre ce qui est image et ce qui ne l'est pas s'établit d'emblée dans notre mémoire
visuelle et dans notre imagination. Un processus de sélection s'y opère, d'où résultent des images
d'une concentration et d'une intensité singulière.
Dans l'énigme de l'image, présence et absence sont inextricablement mêlées. L'image est présente
à travers son médium (sinon nous ne pourrions la voir), mais elle renvoie immédiatement à une
absence dont elle est l'image. L'image a toujours une dimensions mentale et le médium un
caractère matériel, même si dans notre impression sensorielle ces deux aspects se conjuguent pour
former un tout. Quand nous la regardons, l'image apparaît toujours à travers son médium.
Au Moyen-Âge la figure de la vierge continuait d'exister puisque son corps de statue lui donnait
toujours une place dans le présent de ceux qui la contemplaient et qui étaient nés après elle.
Aujourd'hui, à l'inverse nous sommes fascinés par l'annulation de l'espace qu'opèrent les images
télévisuelles : ce qu'elles nous montrent en image, c'est une autre lieu situé là-bas, quelque part,
pourtant notre façon de regarder une émission en direct n'est pas différente de la manière dont
nous avons toujours regardé les images. L'émission de télévision comporte une absence qui ne
s'inscrit pas dans le temps mais dans l'espace. Par l'imagination, nous substituons notre perception
du lieu à cet autre lieu dans lequel les images nous emmènent. L'ici et le maintenant se
transforment, en l'occurrence, en un là- bas et un maintenant où nous ne saurions toutefois être
présents sans sortir mentalement de notre corps. Présence et absence se mêlent donc ici sur un
mode inédit que seul l'image, une fois encore, rend possible.
L'image cinématographique fournit la meilleur démonstration à caractère anthropologique de
l'image, car elle ne se forme ni sur l'écran ni dans l'espace filmique, mais chez le spectateur, par
association et réminiscence. Aussi la fascination qu'exerce, dans leur étrangeté, les images d'une
autre époque ou d'une culture étrangère ne peut se comprendre sans cette étonnante disposition de
notre imagination. Il est assez légitime de considérer la salle de cinéma comme un lieu public
d'images. On ne s'y rend que pour voir les images que sont projetées sur l'écran et on y reste
seulement le temps déterminé par la durée du film. En tant que médium le film n'existe qu'à
condition d'être vu, et seulement pendant la durée de cette perception socialement réglée. Le
spectateur s'identifie à une situation imaginaire, la projection elle même brouille les limites entre
médium et perception.
Au cinéma, une relation imaginaire s'établit entre l'auteur et son public du fait que des imaginaires
personnels sont mis en contact et qu'ils finissent par se superposer dans l'autosuggestion du
spectateur.
Nos corps représentent et constituent eux-mêmes un lieu où les images que nous recevons laissent
derrière elle une trace invisible. Les médiums de l'image sont parti prenante de sa perception, non
seulement parce qu'ils gouvernent notre attention d'un point de vue technique, mais aussi parce
70
qu'ils modèlent la forme des souvenirs qu'ils adoptent en nous. Notre corps naturel est aussi un
corps collectif et c'est donc à ce titre, également, un lieu d'images où les cultures sont constituées.
Seulement la personne contemporaine n'est plus rattachée comme autrefois à une culture
déterminée qui lui donne un cadre fixe en même temps qu'elle établit les limites de sa liberté
d'imagination. La vie, elle même, est une réserve personnelle d'images. Comme dit Maffesoli : « la
vie de nos société intègre de plus en plus le sensible, les sensations dans sa structure d'ensemble.
Les diverses modulations de l'image en sont l'expressions privilégiée ».
Fabio La Rocca : L'attention aux dimensions visuelles du monde social est de plus en plus au
centre de l'attention des scientistes sociales. Apprendre à travers le regard avec l'aide du medium
visuel (photo et vidéo) : une fusion entre l'observation participante (les yeux) et la sociologie
visuelle (les images) constitue la structure principale pour un naturel et attentif moyen de
compréhension et faire recherche.
Dès 1925, Marcel Mauss introduisait dans ses leçons d'ethnologie l'idée que le procédé
photographique permet de collecter des données visuels et mémoriser des détails relatifs aux fait
observées, information que l'œil nu seul ne pourrant retenir.
Aux Etat Unis, l'utilisation de la caméra a été toujours considérée comme un des instruments
fondamentaux pour la recherche. Si on trace un parcours historique, nous pouvons voir comme dans
l'American Journal of Sociology pendant les années 1896-1916 les sociologues ont utilisé la photo
pour étudier certains aspects de la condition et de l'industrialisation des villes. Se développe ainsi,
une vraie tradition de la photographie sociale américaine dont on peut citer divers exemples,
comme le travail de Jacob Riis sur les slums de Little Italy, ou le travail du sociologue - photographe
Lewis H. Hine, ou encore les reportages urbains à New York conduit par les Byrons, ou encore les
photos urbaines de Talbot, sans oublier notamment en ethnologie Gregory Bateson et Margaret
Mead avec leur recherche sur la culture balinaise (1942). D'ici la divulgation de l'utilisation de
l'image en sociologie qui voit dans H.S. Becker le premier sociologue moderne qui met ensemble
sociologie et photographie. Becker est de l'idée que la sociologie visuelle peut émerger de la
pratique documentaire « engagé » avec la théorie sociologique.
La sociologie visuelle offre un moyen d'étudier et utiliser les images dans la recherche et
l'enseignement, le processus d'étude, d'interprétation et de réalisation des images à travers photo,
films, vidéo et autre formes, enrichi l'expérience d'apprentissage. Les outils, photo et vidéo, ont une
valeur sociologique grâce à la capacité descriptive et sont, comme le souligne Mattioli dans
Sociologia Visuale (1991), un instrument de connaissance et de réflexion. L'image apparaît comme
une irruption d'un monde nouveau de visibilité, et la sociologie visuelle alors, est une réponse à
cette explosion de l'imaginaire visuel. On est ici dans un contexte de ré enchantement à travers
l'imaginaire.
Les sociologues doivent développer une nouvelle manière de comprendre comme les images
affectent nos consciences et donc, apprendre l'utilisation de photo, film et vidéo comme outils de
recherche.
L'utilisation pédagogique de l'image (film, vidéo, photo) est importante pour permettre une
communication riche entre le domaine de la sociologie et du public. John Grady illustre le processus
de la pratique de « doing the work of visual analysis » qui inclue :
• Producing narratives (comme le documentaire et le photojournalisme);
• Etudier le rôle que la production et l'utilisation de l'imaginaire visuel jouent dans notre vie;
• Visualization: visualisation des concepts ou des informations;
• Researching: production et utilisation des images comme donnée d'analyse;
• Interpretingand Explicating : identification et évaluation de la signification symbolique des
images.
L'objectif de la sociologie visuelle est d'impliquer l'utilisation de la photo, film et vidéo pour étudier
la société, cette combinaison entre l'image et la sociologie sert pour une compréhension du monde
social. Pour utiliser les mots de John Berger : "we are going to explore another way of telling", donc
une nouvelle façon de raconter. Dans cette méthodologie l'utilisation d'une caméra et d'un appareil
photo, est comme un « complément » au régulier procès de recherche. Le sociologue américain
Douglas Harper explique que le champ est divisé entre Visual Methods qui inclue chaque projet où le
chercheur prend les photos dans l'ordre d'étudier le monde social et Visual Studies où le chercheur
analyse les images. Alors, la photo et la vidéo doivent être insérait à l'intérieur d'un programme de
recherche spécifique. Et, en faisant encore référence à l'analyse de Mattioli, la photo et la vidéo ont
une valeur sociologique quand s'en vérifie la capacité descriptive, la représentativité, la crédibilité
par des procédures théoriquement et méthodologiquement fondées et quand, au-delà de leur
fonction socio graphique, ils devient instruments d'enquêtes, de connaissance et de réflexion. Les
images doivent être utilisé comme une donnée et comme un medium dans la recherche et
l'expression de William I. Thomas « faites et recueillez les photos » me semble important pour
expliquer l'importance et la croissance du rôle du ce medium visuel. Travailler avec les images a
71
beaucoup à offrir au champ sociologique et permet une plus exhaustive interprétation de la réalité
sociale.
La sociologie et la méthode visuelle doivent alors travailler ensemble, pour construire un système de
connaissance et d'enquête scientifique, interdisciplinaire, pour alimenter la connaissance du monde
social. Avec les images, on peut construire un sens qui aide à décrypter le monde dans lequel nous
vivons.
Pensons par exemple, à l'importance du documentaire un texte d'image qui favorise la connaissance
du réel à travers l'objectivation des mouvements.
Une image « réfléchi » comme l'a définit Canetti, pour faire prendre conscience de la pluralité du
réel. L'utilisation de l'image comme véhicule d'interprétation du quotidien devient de cette manière,
une préoccupation partagée par les sociologues. Il y a, comme dit Jameson, une intensification du
besoin d'images et d'une forme culturelle de dépendance de l'image dans cet époque postmoderne ;
postmodernisme qui est fondée, selon Michael Dear (dans The postmodern urban condition), sur la
sensibilité à la différence et à la remise en question de la façon dont nous interprétons et
représentons les choses.
L'image, le symbolisme, l'imaginaire selon Maffesoli, reviennent sur le devant de la scène et sont
amenés à jouer un rôle de premier plan.
La sociologie visuelle va dans cette direction comme une nouvelle manière d'interprétation et
représentation : on parle alors de postmodern research method.
Les images pour cette raison, comme montré dans l'analyse de Patrizia Faccioli et Giuseppe Losacco
dans « Manuale di sociologia visuale » (2003), peuvent être utilisé comme instrument de recueil des
informations pendant le processus de recherche sur le terrain, comme donnée pour interpréter les
produits culturels visuels qui existent dans le monde sociale, comme production de vidéo
sociologiques pour l'enseignement ou pour la restitution des résultats de la recherche.
Pour conclure, je suis de l'idée qu'il faut habituer le monde académique à réveiller l'intérêt sur
l'utilisation de cette méthodologie ; je trouve que l'image doit être partie intégrante de la recherche,
car elle représente une richesse pour une interprétation plus complète de la réalité sociale.
72
la forme, l’ancrage, le relais. Il est évident que le texte, bien qu’il permet d’accéder à un
sens
plus précis, réduit considérablement la polysémie de l’image.
.1 Introduction
Avec la parole, l’image constitue l’un des moyens les plus importants qu’utilise
l’homme pour communiquer avec autrui. C’est un moyen de communication universel
dont la richesse du contenu permet aux êtres humains de tout âge et de toute culture de se
comprendre.
C’est aussi le moyen le plus efficace pour communiquer, chacun peut analyser l’image à
sa manière, pour en dégager une impression et d’en extraire des informations précises.
De ce fait, le traitement d’images est l’ensemble des méthodes et techniques opérant sur
celles-ci, dans le but de rendre cette opération possible, plus simple, plus efficace et plus
agréable, d’améliorer l’aspect visuel de l’image et d’en extraire des informations jugées
pertinentes.
L’image est une représentation d’une personne ou d’un objet par la peinture, la sculpture,
le dessin, la photographie, le film, etc.
C’est aussi un ensemble structuré d’informations qui, après affichage sur l’écran, ont une
signification pour l’œil humain.
On a compris que ce sont les images poétiques qui, finalement, ont apporté
l'essentiel des connaissances disponibles pour approcher la communication imagique. Et ce
n'est déjà pas mince bagage! Mais il reste tant à faire pour connaître en profondeur le
fonctionnement du langage proprement iconique. Pourtant, et malgré l'absence de modèles
théoriques, chaque jour, trois grands champs sont envahis par l'image fonctionnelle. Ce sont
la pédagogie, la publicité et le journalisme. Ces disciplines utilisent les images pour
communiquer des messages précis. Les images qu'on y voit sont donc des images
fonctionnelles, c'est-à-dire des images conçues selon un code (conscient ou intuitif) dans le
but de communiquer un message déterminé.
73
Mais les images fonctionnelles peuvent
l'être à un degré plus ou moins prononcé
selon le but poursuivi par l'iconicien. La
pédagogie veut transmettre des
connaissances; c'est donc une fonction
cognitive qu'exerce l'image pédagogique.
La publicité a pour but de persuader;
ultimement, c'est un effet conatif qu'elle
poursuit. Le journalisme cherche avant
tout à informer; les images qu'il diffuse ont
pour effet de décrire. Mais voyons ce qu'on
sait de l'emploi des images dans ces
champs d'application respectifs.
Tout message qui a pour but de changer des attitudes ou des comportements est un message
persuasif. Les images pédagogiques constituent donc d'une certaine manière un type
particulier d'images persuasives. On laisse entendre souvent que les images pédagogiques
visent simplement à faire acquérir de nouvelles connaissances. En un sens, cela est vrai. Mais
en dépit de cette affirmation, les images d'histoire, de religion, d'art ou de sexologie
transforment, sciemment ou pas, les attitudes des étudiants qui les regardent. Cela est dû au
fait que certains aspects connotatifs de ces messages-images prennent souvent le pas sur le
contenu avoué. Si on pense plus précisément aux images qui servent à l'enseignement des
technologies, on constatera à l'évidence qu'elles ont clairement pour but de façonner des
comportements efficaces chez les étudiants techniciens. Comme c'est le cas habituel de toute
image fonctionnelle donc, l'image pédagogique est communication informative et persuasive,
n'en déplaise aux puristes et aux critiques du "système". Mais cela ne semble pas évident pour
tous. Si certains pédagogues reconnaissent à l'image des vertus civiques, la plupart lui dénient
cette qualité. On la considère davantage comme un outil bêtement matériel que comme un
langage hautement culturel. Comme l'exprimait si bien le pédagogue français Michel Tardy
(1966): "Le statut culturel de l'image se caractérise par sa précarité. Dans le domaine
scientifique et technique, photographie, cinéma et télévision donnent lieu à des applications
étonnantes. En tant qu'instruments, ils ont acquis droit de cité; ils sont irremplaçables comme
le furent en leur temps le microscope de Leeuwenhœk et la lunette de Galilée. On ne pourra
désormais se dispenser de leur consacrer un chapitre important dans l'histoire des techniques.
Mais il y a loin de la reconnaissance technique à la dignité culturelle. L'unanimité ne se fait que
pour décerner aux images une carte d'identité instrumentale". On peut le déplorer, mais c'est
un fait.
Bien sûr, sur le plan philosophique et théorique, la question n'est pas si simple. Certains
voient les images comme des créatures du démon de la paresse, l'exutoire des analphabètes,
l'antre de l'imagination délirante. En un mot, les images constitueraient un langage primitif.
D'autres perçoivent les images comme le révélateur privilégié de mondes enfouis, le seul
langage concret, l'instrument de self-expression par excellence. Pour tout dire, les images
constitueraient le seul langage adapté au monde contemporain. En réalité, les deux parties ont
raison. D'un côté, s'alignent les partisans du raisonnement analytique et linéaire, du mot; de
l'autre, les défenseurs de la culture foisonnante et mosaïque, de la réflexion synthétique, de
l'image.
74
ajouté à 40. Puisque dans une heure il n'y a que 60 minutes, le reste de 10 minutes sera
reporté sur l'heure suivante. Cela lui donne la solution: 4h 10. Pour Paul, l'heure est
représentée par la face circulaire de l'horloge, et une demi-heure est la moitié de ce disque. A
3h 40, l'aiguille des minutes est placée obliquement à deux unités de cinq minutes à gauche
de la verticale. Utilisant l'aiguille comme base, Paul coupe le disque en deux et arrive à deux
unités à droite de la verticale de l'autre côté. Cela lui donne la solution qu'il traduit en chiffres:
4h 10. Aussi bien Pierre que Paul ont résolu le problème par la réflexion. Pierre l'a traduit en
quantités sans faire appel à une expérience sensorielle. Il a manié les chiffres au moyen de
rapports qu'il avait appris par cœur, enfant: 40 + 30 = 70; 70 - 60 = 10. Il a pensé
'intellectuellement'. Paul, en revanche, a abordé le problème à l'aide d'une image visuelle
appropriée. Pour lui, un tout est une forme simple, complète; une moitié est la moitié de cette
forme, et la progression du temps n'est pas une augmentation en quantité arithmétique mais
un voyage circulaire dans l'espace. Paul a pensé 'visuellement'". Deux formes d'intelligence qui
fonctionnent différemment à résoudre des problèmes similaires. Chacune provoque des
jugements sévères chez les adeptes de l'autre forme de pensée.
Le pédagogue dropout québécois Yves Doré (1973) explique le fossé des générations par la
prééminence de l'une ou l'autre forme d'intelligence qui sont, selon lui, diamétralement
opposées. Les jeunes de la nouvelle culture sont intellectuellement dévalorisés par les adeptes
de la culture classique. C'est que chacun s'acharne à défendre en toute exclusivité les vertus
de son école de pensée. Arnheim (1965) aussi a constaté le fait et le déplore en ces mots: "Et
pourtant, maints éducateurs et psychologues hésitent encore à admettre que les processus de
la pensée perceptive sont aussi astreignants et inventifs et requièrent autant d'intelligence que
le maniement de concepts intellectuels. Nous sommes victimes d'une tradition enracinée selon
laquelle la pensée se produit loin de l'expérience perceptive."
Prenons un domaine de la pédagogie où l'image et les mots jouent un rôle respectif mal connu
dans l'apprentissage, celui des manuels scolaires. En effet, on ne sait pas par exemple, si les
images répètent ou complètent l'information transmise par les mots. D'ailleurs, la méthode
même de sélection de ces images est
le plus souvent arbitraire. C'est la
plupart du temps le maquettiste qui
choisit ces images selon des critères
d'ordre esthétique, de qualité
technique, d'espace à combler, de
disponibilité. Tout cela n'est pas très
rationnel. Même le livre que vous êtes
en train de lire qui prétend prouver
combien l'image est indispensable
pour communiquer utilisera à la fin
fort peu d'images pour la
démonstration; c'est que la résistance
sociale est forte: un livre où il y aurait
beaucoup d'images ne ferait pas
sérieux et l'édition demeure
convaincue à tort que les images Richaudeau (1979) faisait remarquer: « Parmi tous les facteurs
coûtent cher à produire. Malgré cela, ayant concouru depuis une trentaine d'années à l'évolution du
l'ingénieur et théoricien de la livre scolaire, le plus important a été -incontestablement-
communication écrite français l'utilisation intensive de l'illustration et de la couleur.»
François Richaudeau (1979) faisait
remarquer: "Parmi tous les facteurs En réalité, les images conçues pour les manuels scolaires du
niveau primaire affichent un style commun où la couleur, le
ayant concouru depuis une trentaine
dessin schématique (style bande dessinée) jouent un rôle
d'années à l'évolution du livre prépondérant. Ce type d'images est plus facilement "lu" par les
scolaire, le plus important a été jeunes enfants.
-incontestablement- l'utilisation
intensive de l'illustration et de la couleur. La comparaison d'ouvrages issus de deux
"générations" éditoriales est frappante. Les produits de la nouvelle génération nous
paraissent, oh! combien, plus séduisants et plus efficaces, et plus aptes à éveiller l'intérêt du
75
jeune lecteur et à susciter un meilleur apprentissage." Donc, d'une part, résistance, de l'autre,
engouement; situation ambiguë! Aussi serait-il bon de faire le point sur ce que l'on sait
scientifiquement du fonctionnement des images pédagogiques. D'abord, connaît-on la sorte
d'image la plus pertinente pour la transmission des connaissances en pédagogie? La photo
est-elle supérieure au dessin, l'image illustrative au dessin schématique? Myatt & Carter
(1979) ont montré que les étudiants expriment une préférence pour les images les plus
analogiques, c'est-à-dire les plus ressemblantes à ce qu'elles représentent: photos plutôt que
dessins, couleur plutôt que noir et blanc, illustrations plutôt que schémas, etc. Mais cela ne
prouve pas que les images analogiques soient plus efficaces: le degré d'iconicité n'est pas
garant de leur capacité à transmettre de l'information. Ainsi, les auteurs Cossette & Boisvert
(1978) ont comparé quatre traitements plus ou moins analogiques d'une même image: photo
couleur, photo noir et blanc, illustrations polychromes et dessin linéaire noir et blanc. On a
évalué leur saturation sémantique respective et leur différence sémantique. Ils ont montré à
l'évidence que c'est la couleur qui est le paramètre qui influence le plus la saturation
sémantique, en photo comme en dessin. Quant à la valeur sémantique (selon le différentiel
sémantique d'Osgood), c'est la photo couleur qui est perçue comme la plus positive; le noir et
blanc est cependant perçu comme plus simple, plus austère, plus sérieux. Tout cela est vrai,
mais c'est encore bien peu; tant de choses demeurent encore vagues. Les recherches
éclairantes et convaincantes manquent encore gravement. Comme le faisait remarquer le
pédagogue américain Philip-J. Brody (1981), le nombre de recherches vraiment bien
structurées sur cette question du rôle de l'image dans l'apprentissage est par trop clairsemé.
Heureusement, dit-il, "la venue du mouvement de visual literacy et une plus grande
emphase accordée à l'image mentale ont suscité déjà un plus grand nombre de recherches sur
l'image. Bien que cette augmentation générale de la recherche iconique n'ait pas encore
marqué la recherche sur le problème de la relation image/texte, elle suscite des espoirs en ce
qu'elle peut influencer les projets futurs." Et il ajoute avec clairvoyance: "Les conditions
économiques présentes et les cris venant de l'école incitent à une recherche davantage
centrée sur les problèmes d'enseignement ordinaires et quotidiens. Il semble que si on réussit
à préciser comment les images affectent l'apprentissage à partir des manuels techniques, cela
constituerait une réponse à ces attentes." Sans compter que , selon Richaudeau (1979) dans
un document publié sous l'égide de l'Unesco, le manuel scolaire "absorbe à ce jour 85% des
dépenses mondiales de matériel pédagogique." Et maintenant ?
Mais il faut bien avouer que le problème -essentiel à nos yeux- de la relation texte/image en
est un très complexe. En réalité, le nombre des éléments à étudier est si grand que la tâche
d'isoler les variables significatives devient difficile et onéreuse. Le nombre de questions
irrésolues est grand et celles-ci s'enlignent les unes derrière les autres : Hartley (1979) a
montré que même la seule mise en page influence l'efficacité d'une image donnée; Brody &
Legenza (1980) indiquent que les images placées après un texte incitent à revenir vérifier le
contenu textuel; mais Knowlton (1966) prétend que tout dépend du but poursuivi. Le nombre
d'images, leur densité, sont sans doute aussi des facteurs non négligeables. Et combien
d'autres questions demeurent toujours sans réponse. Et pourtant il faudra bien un jour arriver
à maîtriser le langage iconique utilisé à des fins pédagogiques. Cela est impératif. Car déjà les
messages scripto-iconiques papillotent chaque jour par centaines, voire par milliers, devant les
yeux ébahis de nos "apprenants". Cela suscite donc des questions insistantes dans le monde
de l'éducation. Le graphiste et pédagogue français Bernard Planque (1977) écrivait que cela
devient un problème de société: "L'omniprésence de l'image est un phénomène dont
l'importance n'échappe plus ni aux parents ni aux éducateurs. Il faut encore souhaiter que
ceux qui produisent ces images prennent conscience de leurs responsabilités dans le
développement affectif, culturel, intellectuel, moral des enfants auxquels ils les destinent."
Certains amoureux du texte perçoivent dans une espèce de "vision apocalyptique", la montée
envahissante des images. Le philosophe de la communication français Jacques Ellul (1981)
voit cela clairement, lui qu'on ne peut pourtant pas taxer d'imagiste inconditionnel: "Partout, il
y a régression progressive du texte. Il suffit de considérer les livres de classe ou les
magazines. Le retournement s'est effectué entre 1950-1960: jusque-là, l'image était une
simple illustration d'un texte dominant, le discours était la partie de loin la plus importante, et
accessoirement il y avait des images pour rendre plus concret le contenu du discours et fixer
76
l'attention. C'était leur seul intérêt. Mais la situation est inverse: l'image contient tout. Et nous
suivons au fil des pages une succession d'images, selon un processus mental totalement
différent. Le texte n'est là que pour combler les vides, les lacunes, et aussi pour expliquer
éventuellement ce qui pourrait ne pas être clair dans les images: parfois en effet, si elles sont
évidentes, elles ne disent pas nettement ce qu'il faut y comprendre. Le rapport s'est donc
inversé: l'image était illustration d'un texte. Maintenant le texte est devenu explication des
images." Sous une forme incisive, voire un peu excessive, il y là un fond de vérité à méditer.
Mais il est trop facile d'opposer les partisans du texte et de l'image en une interminable
polémique. Le graphiste québécois Luc Saint-Hilaire (1982) situe le problème en ces termes:
"D'un côté, les tenants du texte. De l'autre, les tenants de l'image. Tant que les deux groupes
tenteront de prouver la supériorité de leurs arguments, la situation risque de faire le
mouvement du balancier de l'un à l'autre sans jamais s'arrêter à l'endroit idéal: au centre.
Texte et image sont complémentaires, chacun ayant leurs avantages et leurs limites. Prenons
par exemple l'enseignement de la géographie politique. Quelques images suffisent à nous faire
découvrir l'aspect d'un pays étranger, l'allure des habitants (leurs vêtements, etc.) alors qu'il
faudrait un texte incroyablement dense et minutieux pour l'exprimer. Allez décrire une girafe à
quiconque n'en a jamais vu! Sans le recours à l'image, la tâche sera difficile, sans avoir de
certitudes quant au résultat chez le lecteur. Par contre, essayez de décrire en images la
mentalité des habitants, les idéaux nationaux, l'influence économique du commerce entre les
différents groupes. A quoi servirait une image pour exprimer: 'Dans tel village, seuls les
propriétaires terriens mâles dont la famille est établie depuis au moins cinq générations ont
droit de parole au conseil municipal'!!! Par leurs rôles complémentaires, textes et images
seront vraiment utilisés de façon fonctionnelle lorsque l'accent sera mis sur l'information à
présenter et le choix du texte et/ou de l'image, fait en fonction de la capacité du médium à
véhiculer le plus efficacement le contenu souhaité. Une telle attitude rend le débat texte vs
image complètement désuet".
Encore une fois, le problème n'est pas facile. Les messages pédagogiques seront certainement
de plus en plus des messages bi-codés, image + texte. Alors que le texte est mis au point par
des spécialistes œuvrant chacun dans leur champ, l'image est par trop souvent une œuvre
d'expression, une image d'art. Mais il faut remettre en question cette façon de faire.
Heureusement, certaines tentatives sont réussies. C'est le cas quand un auteur comprend que
c'est concurremment l'image et le texte qui pourront traduire sa pensée. Le spécialiste
britanno-américain des organisations Charles Hampden-Turner (1982) faisait cette mise en
garde: "Nous faisons des représentations avec des mots aussi bien qu'avec des images mais
parce que les mots arrivent par petites bouchées, plusieurs personnes en ont déduit que le
monde est constitué aussi de petites bouchées, les bouchées correspondant aux mots. Non,
dit Korzybsky, la représentation (map) n'est pas la chose. Les représentations-mots ont une
structure fragmentaire qui tient du langage lui-même mais pas nécessairement de la chose
représentée. L'idée de l'enchaînement linéaire de cause à effet, par exemple, est inhérente à
la structure d'une phrase où un sujet agit grâce à un verbe sur un objet, mais cela peut bien
être inadéquat pour rendre ce qui se produit quand il y a une influence réciproque
particulièrement. Une façon de corriger ce biais causé par la langue, c'est de compléter les
mots par des représentations visuelles. Si on doit considérer l'esprit comme entité aussi bien
que parties, nous n'avons pas besoin seulement de mots pour exprimer les parties mais aussi
de modèles, d'images, de schémas pour exprimer l'entité." Hampden-Turner, passant aux
actes, publie en 1982 un livre de plus de deux cents pages sur le fonctionnement de l'esprit
humain tel que conçu par divers auteurs à travers l'histoire. Dans ce livre, il consacre la moitié
de l'espace disponible au texte et la moitié à des images. Ces images (graphiques, illustrations
fonctionnelles, etc.) exigent une lecture en profondeur car elles révèlent quantité
d'informations que le texte seul ne communique pas. CQFD!
Les images pédagogiques sont (devraient être) des images fonctionnelles. Le pédagogue
audiovisualiste français René LaBorderie (1972) insistait là-dessus: "Lorsqu'il s'agit d'utiliser
l'image en éducation, c'est-à-dire dans un cadre institutionnel où la création de message ne
relève pas de l'art ou du génie, mais d'une hypothèse didactique assez étroitement définie, où
les créateurs doivent tenir compte essentiellement du comportement final que l'on veut induire
chez l'élève pour déterminer les différents items de leurs messages et la forme qu'ils leur
77
donneront, 'l'œuvre ouverte' (U. Eco) tient une place relativement moins importante que dans
le contexte général de la communication culturelle."
Les recherches poursuivies sur les images pédagogiques commencent à monopoliser des
ressources importantes. On constate, malheureusement, deux tendances de recherche qui
s'ignorent et qui mériteraient de se rejoindre. Dans la Vieille Europe, on philosophe sur les
images, on en parle, on sociologise, on psychanalyse. Dans les Amériques, on fait du
laboratoire, de la statistique, de la psychologie du comportement. Le pédagogue américain
Howard-W. Levie (1978) avait relevé cette faiblesse de la recherche américaine: "Ce sont les
comportements symboliques et non les comportements sensitifs qui intéressent le plus ceux
qui sont engagés dans le 'mouvement du savoir-lire-et-écrire iconique' (visual literacy
movement)." La pédagogue américaine Lida-M. Cochran et ses collègues (1980)
renchérissent: "Parce que le processus de la perception visuelle est dynamique, les recherches
qui mettent de l'avant une approche réductionniste (c'est-à-dire celle qui tente de réduire les
systèmes complexes à des états physiques) sont dans l'erreur. Parce que le processus de la
vision en est un de génération ou qu'il est basé sur le principe de la production et de la
combinatoire, les recherches syncrétiques sont inappropriées (parce que le synchrétisme
rejette dans l'ombre la complexité interne nécessaire pour créer du nouveau avec des moyens
finis)." Les Américains cherchent si "scientifiquement" qu'ils trouvent des réponses sûres mais
inutiles; les Européens font des exposés passionnés et passionnants mais qui apprennent peu
de choses de sûr. En résumé, les uns et les autres se posent de sérieuses questions sur les
modes de compréhension du monde de la communication iconique. Tous participent cependant
à créer cet engouement incontrôlé pour "l'audiovisuel" -que le pédagogue de la communication
québécois Jean Cloutier (1973) nomme mieux "audio-scripto-visuel" et que LaBorderie (1972)
nomme encore plus heureusement le "verbo-iconique". Ce dernier précise sa position en ces
mots: "Les moyens- machines optiques ou électroniques qui présentent des messages
s'adressant à la vue et à l'ouïe à la fois sont bien nommés audio-visuels; il convient donc de
distinguer les moyens audio-visuels et les messages verbaux, iconiques ou verbo-iconiques
qu'ils transmettent (mais qu'ils ne sont pas les seuls à transmettre)." Ceci étant dit, le premier
engouement étant passé pour cette panacée miracle que semblait être l'audio-visuel au dire
des fabricants de hardware, le désenchantement atteint chaque jour plus d'enseignants. On a
vite compris à l'usage qu'il ne suffit pas de connaître le maniement de boutons d'appareil.
C'est un langage hybride nouveau (verbo-iconique) qu'il faut maîtriser.
Heureusement, l'avènement de la sémiologie dans les années soixante permet une réflexion
plus logique, ce qui constitue un apport non négligeable dans la compréhension de
"l'enseignement à l'image" selon l'expression de LaBorderie. A partir d'ici, tous les espoirs sont
permis. L'image pédagogique a des chances de se faire de plus en plus fonctionnelle. La
pédagogue américaine Donis-A. Dondis (1973) faisait cette remarque optimiste à propos de
l'enseignement à l'image: "Il existe une syntaxe visuelle. Il existe des paramètres pour faire
des compositions. Il y a des éléments de base que tout étudiant en moyens visuels peut
apprendre et comprendre, qu'il soit artiste ou pas; couplés avec des techniques de
manipulation, ces éléments peuvent servir à créer des messages visuels clairs. La
connaissance de tous ces facteurs conduira à une compréhension claire des messages visuels."
C'est ce que nous croyons aussi. Mais nous n'en sommes encore qu'au début. Songeons
qu'avant 1960, les manuels scolaires "sérieux" n'étaient pratiquement pas illustrés: à peine
quelques gravures en noir et blanc et le cas échéant, un hors-texte en couleur. Prenons un
atlas; s'il est un manuel qui est bien au premier chef un livre d'images, c'est bien un atlas. Les
pédagogues québécois citent comme exemple d'ouvrage didactique réussi dans le genre
l'Atlas des jeunes de l'Alberta; comparé à la présentation de plaquettes publicitaires
pourtant ordinaires, le langage iconique utilisé apparaît comme un balbutiement. Tout reste
encore à découvrir en cette matière, du moins en ce qui a trait à l'efficacité pédagogique des
images. Quant à leur nécessité sur le plan scientifique, cela leur est reconnu depuis
longtemps.
Au siècle dernier déjà, moins de quarante ans après l'invention de la photographie, celle-ci fit
son intrusion dans les sciences. L'américain Edward Muybridge (1830-1904) fit la
démonstration imagique en 1877 que le seul moment où les quatre pattes d'un cheval au
78
galop quittent la terre, est celui où elles sont rassemblées sous son ventre -contrecarrant ainsi
l'idée diffusée par les peintres que c'est le moment où les pattes sont étirées par paires.
La publicité utilise largement les images. Photographiques ou dessinées, elles jouent un rôle
important que le texte ne peut jouer. Comme le faisait remarquer Wright et coll. (1977):
"Nous n'achetons pas un produit; nous achetons l'image d'un produit ou ce que le produit
pourra faire pour nous." Aussi, l'image joue-t-elle le plus souvent un rôle prépondérant pour
atteindre cette fin.
L'image publicitaire est avant tout un attrape-regard. On a démontré à satiété les vertus
persuasives des images en publicité, surtout quand elles représentent des personnages.
L'auteur d'un classique manuel de publicité, le français C.-R. Haas (1965) a relevé des
personnages dans 78% des images publicitaires aux Etats-Unis. C'est dire! Le spécialiste de la
recherche publicitaire et sémiologue français Georges Péninou (1970) rapporte une étude
corollaire qui démontre que les annonces-à-dominante-mot sont moins fréquentes (de 35%)
par rapport aux annonces-à-dominante-image. En fait, il est notoire dans le monde publicitaire
que l'image joue un rôle capital. Tous les rapports Starch le révèlent: approximativement le
tiers des lecteurs d'un périodique se rappellent avoir vu l'image d'une annonce donnée mais
seulement le tiers de ceux-ci auront commencé à en lire le texte. Le publicitaire-rédacteur
français Henri Joannis (1965) cite des chiffres similaires: 40% des cibles auront vu l'annonce,
35% auront identifié le commanditaire, 10% auront commencé de lire le texte et 5% l'auront
lu entièrement. Cela souligne bien l'attention qu'il faut porter à la fabrication de ces images.
Elles doivent non seulement attirer l'attention comme on se plaît à le mentionner souvent,
elles doivent au surplus transmettre l'essentiel de l'argumentation. Il ne suffit pas d'attirer
l'attention du regardeur comme on le croit; il faut déjà le convaincre par ce message -l'image-
sur lequel il porte son regard quelques instants. Joannis (1965) cite trois circonstances dans
lesquelles l'image pourrait être absente ou être reléguée au second plan: 1. lorsqu'on veut
jouer la carte du "super-sérieux"; 2. lorsque la morale sociale empêche d'illustrer le sujet de la
communication; 3. lorsque l'intérêt exceptionnel d'un produit garantit d'attirer l'attention par
une simple affirmation textuelle (cas rarissime!). Soyons réalistes: la communication
79
publicitaire commande habituellement l'emploi de messages-images. D'ailleurs, une des
formes de publicité les plus vieilles, l'affiche, est en elle-même une image, essentiellement.
RAPPORTS STARCH
Les rapports Starch sont des documents relatant les résultats de recherches menées selon la méthode mise
au point par le psychologue de la publicité, l'américain Daniel Starch (1966) qui fonda sa propre entreprise
spécialisée en recherches publicitaires. L'échantillon des interviewés se réduit à une centaine de personnes. On
procède par interviews individuelles en tête-à-tête quelques semaines après la parution d'une publication donnée.
On montre l'annonce à évaluer et on questionne les sujets:
Par comparaison d'une enquête à l'autre (compte tenu des conditions d'enquête similaires), on peut évaluer la
valeur d'impact relative d'une annonce donnée.
Un des modèles les plus répandus exprimant la communication publicitaire fut mis de l'avant
par le psychologue Edward-K. Strong (1925); c'est le modèle dit AIDA. Aida est un sigle: il
tient lieu pour attirer l'Attention, faire naître l'Intérêt, susciter le Désir et inciter à l'Action.
Dans ce modèle, le rôle d'attirer l'attention est dévolu à l'image. C'est sur la présomption que
l'image la plus provocante sera encore la meilleure que certains commerçants utilisent des
images farfelues (originales?), horribles ("la laideur se vend mal" affirmait pourtant dans un
best-seller le designer industriel américain Paul Rand) ou provocantes. Effectivement, de telles
images attireront peut-être l'attention, mais persuaderont-elles? Cela est une autre question.
Or le but d'un message-image publicitaire est de convaincre-persuader; il ne suffit donc pas
d'attirer l'attention.
En réalité, l'image transmet en un instant une "image de marque"; c'est là sa force. Elle n'est
pas lue en séquence au niveau conscient; elle dit instantanément. C'est pour cette raison
qu'on doit s'efforcer de réaliser des images publicitaires qui soient vraiment fonctionnelles. Les
grands succès de la publicité américaine ou européenne sont construits sur des concepts, c'est
vrai; mais ce qui est ancré dans la tête du public, ce sont des images.
MARQUE IMAGE
LE TÉLÉPHONE CELLULAIRE MICROCELL LE CHIEN FIDO
LES CÉRÉALES RICE KRISPIES DE KELLOGG LES TRIPLETS CRIC, CRAC ET CROC
LA CIGARETTE MARLBORO LE COWBOY VIRIL
LE RÉCUREUR SPIC'N SPAN MME BLANCHEVILLE
LES CHEMISES HATHAWAY LE BARON BORGNE
LE WHISKY BLACK VELVET LES SURFACES NOIRES
LA BIÈRE 50 OLIVIER GUIMOND
L'ESSENCE ESSO LE TIGRE
LES PNEUS MICHELIN BIBENDUM
LE CHOCOLAT MEUNIER LA "PETITE FILLE"
LA BOISSON BANANIA LE "NÈGRE"
LES VINS NICOLAS LE "LIVREUR"
BELL CANADA MONSIEUR B
80
Evidemment, on adjoint la plupart du temps des textes (titres, thèmes, slogans, signatures,
argumentations textuelles) aux images publicitaires. Le sémiologue français Rolland Barthes
(1964) croit que cela est nécessaire pour préciser l'interprétation qu'on doit faire de l'image
(qui est polysémique, affirme-t-il; mais l'est-elle plus que le mot?); c'est ce que l'on appelle la
fonction "ancrage" du texte. Cela l'est aussi pour que l'image puisse jouer pleinement son rôle
dans les messages bi-codés; c'est ce que l'on appellera la fonction "relais" du texte justifiée
par Barthes (qui, incidemment est un littéraire) comme nécessaire pour que l'image puisse
dire clairement. Pourtant, pour Peninou (1972) (qui, lui, est publicitaire de métier), il est
évident que "l'évolution historique du genre a conduit la publicité à envisager une contribution
de plus en plus déterminante de l'image, par rapport à laquelle le texte assume une fonction
relative et subordonnée propre." D'ailleurs, l'auteur fait valoir les rôles imposants que joue
l'image dans les messages publicitaires. L'image publicitaire est "implicative", elle interpelle le
regardeur: ses personnages regardent le plus souvent droit dans les yeux, ils jouent de
l'index. L'image publicitaire est concurremment "référentielle": elle parle du produit (souvent,
elle le montre qui se tient bêtement là). Mieux, elle est "prédicative", elle décrit une façon
d'être associée au produit sur un mode allégorique, poétique, enlevé sans qu'elle ne perde en
rien ses qualités terre-à-terre.
Au surplus, on ne saurait arriver à persuader si la densité d'information est trop grande, ce qui
risque d'arriver quand l'information textuelle diffère de l'information imagique. Trop
d'originalité (au sens de la théorie de l'information) débordera la capacité d'absorption des
destinataires. Dans une image, le décodage effectif se fait à partir d'une petite surface: celle
qui est la plus facilement décodable par le regardeur. Dans une image plus complexe, le
regardeur réduit encore la plage de la première lecture pour pouvoir s'y retrouver. Cela, au
détriment des autres informations réparties ailleurs dans l'image. Le théoricien de la publicité
américain Léo Bogart (1971) explique: "L'attention sera plus probablement attirée vers un
champ visuel dont l'appréhension exige la dépense d'énergie minimum. Cette situation
économique est réalisée quand le cadrage est adéquat, que le dessin et la mise en page sont
bons, et lorsqu'un fort contraste existe entre le noir et le blanc." Parler fort, simple et clair.
En fait, les publicitaires rivalisent de trucs pour arriver à persuader. Convenons pour un
moment avec les "argumentationnels" que la première étape, c'est d'attirer l'attention. Même
si une image réussit très bien à attirer l'attention, cela ne veut pas dire que cette image est
une bonne image publicitaire. Le publicitaire-rédacteur américain John Caples (1957) donne
un exemple de pré-test de visuels réalisés pour les ampoules General Electric (GE). On pré-
testa deux illustrations pour ce même titre d'annonce: "Pourquoi les ampoules G.E. fournissent
plus de lumière cette année." Dans un premier cas l'image est celle d'un bébé souriant
(considéré comme un des sujets les plus attractifs); dans le deuxième cas, l'image représente
81
une femme en train de visser une ampoule dans une lampe. Résultat: la deuxième image se
montre de beaucoup supérieure à la première. C'est qu'il ne suffit effectivement pas
seulement d'attirer l'attention (ce que réussit très bien à faire l'image du bébé souriant) mais
surtout qu'il fallait encore convaincre les bonnes cibles, les consommateurs potentiels (en
l'occurrence, les personnes intéressées aux ampoules électriques).
Caples, qui devint vice-président de la grande agence américaine BBDO, affirme qu'il y a trois
sortes d'images efficaces: celle qui montre le produit lui-même, celle qui montre l'usage qu'on
fait du produit, celle qui montre la satisfaction qu'on obtient à utiliser le produit. On rejoint en
cela les "huit formes de concepts d'évocation" de Joannis (1965): a) Concepts d'évocation
directe: forme a: description directe de la satisfaction, constituée par l'effet du résultat du
produit sur une tierce personne; forme b: description directe de la satisfaction constituée par
l'effet sur l'utilisateur du résultat du produit; forme c: description directe de la satisfaction
apportée par l'emploi du produit. b) Concepts d'évocation indirecte: forme d: induction de
la satisfaction par la description du résultat de l'action du produit; forme e: induction de la
satisfaction par la description de l'action du produit; forme f: induction de la satisfaction par
les caractéristiques techniques du produit; forme g: induction de la satisfaction par les
caractéristiques de l'image de marque; forme h: induction de la satisfaction par les
caractéristiques du fabricant. Et, de manière générale, la meilleure "évocation" est encore
réalisée par l'image.
L'illustration joue, encore une fois, un rôle capital en communication persuasive. Mais quelle
illustration? Encore une fois, bien qu'il ne suffise pas d'attirer l'attention, encore faut-il dans
un premier temps attirer cette attention pour pouvoir convaincre ensuite. Pourtant, même
pour attirer l'attention, le contenu de l'image, et contrairement à ce que pensent trop de
graphistes publicitaires, est plus important que l'aspect plastico-graphique de cette image. Le
publicitaire britanno-américain David Ogilvy (1977) le réaffirme péremptoirement en ces
mots: "Le sujet de votre illustration est plus important que sa technique. Dans tous les
domaines de la publicité, le fond est plus important que la forme. Si vous avez une idée
remarquable pour une photo, il n'est pas besoin d'un génie pour déclencher l'appareil. Si l'idée
n'est pas remarquable, Irving Penn lui-même ne vous sauvera pas. Le Dr Gallup a découvert
que le genre de photo qui gagne des prix dans les clubs de photographie -sensibles, subtiles et
merveilleusement composées- ne donne rien en publicité. Ce qui donne quelque chose, ce sont
les photos qui éveillent la curiosité du lecteur. Il regarde la photo et se demande: 'Que se
passe-t-il donc ici?' Il lit le texte pour savoir. Voilà le piège qu'il faut tendre." Prenons garde de
prendre cette affirmation comme une déclaration qu'une image attrape- regard sera
suffisante. Il faut -si on s'en tient au modèle A.I.D.A.- faire naître l'intérêt, susciter le désir et
surtout, inciter à l'action, c'est-à-dire convertir cette attention en intention ou mieux, en
comportement d'achat. Pour cela, les images doivent affirmer quelque chose de simple et le
dire clairement.
C'est pour cette raison que la bonne publicité, la publicité efficace, utilise
souvent sinon toujours, un genre d'image considéré avec dédain par les
artistes. Les points de vue du publicitaire et de l'artiste sont souvent
contradictoires; ils sont diamétralement opposés quand on considère les
visualistes européens et les visualistes nord-américains. Les affichistes, par
exemple, ont perpétué longtemps en Europe une tradition de belle publicité:
ils ne font qu'allusion au produit, procèdent par allégorie, mettent en scène
une situation dramatique, jouent de la métaphore. En réalité, ils réalisent
encore trop souvent des images poétiques. En Amérique, le sujet de l'image
est le produit lui-même, on fait valoir ses qualités, le style est direct, on procède par
métonymie; le but est de fabriquer une image vraiment fonctionnelle. Il se peut que les
consommateurs aiment mieux les annonces de "style européen"; mais on sait avec preuves à
l'appui que celles de "style américain" les persuaderont davantage. Deux philosophies, deux
résultats. De telle sorte que les entreprises européennes sérieuses font appel aux agences
américaines. Ou bien les agences européennes se reconvertissent aux méthodes américaines.
82
Une bonne image publicitaire n'a rien (ou si peu !) à voir avec une belle image. S'il arrive
qu'une image efficace soit belle, ce sera par surcroît. Evidemment, la situation est différente si
on réussit à faire visualiser la bonne idée par Jean-Loup Sieff... Mais il arrivera plus souvent
qu'on devra recourir à un jeune graphiste peu expérimenté. Ogilvy (1977) n'y va pas de main
morte quand il exprime clairement son avis sur les écoles où on enseigne le graphisme: "La
plupart des écoles de dessin qui préparent de naïfs étudiants à des carrières dans la publicité
sont encore pénétrées de la mystique de la Bauhaus. On y estime que le succès d'une annonce
dépend de facteurs tels que son 'équilibre', son 'rythme', sa 'composition'. Mais peuvent-ils le
prouver? Mes recherches indiquent que ces impondérables de l'esthétique ne font pas
augmenter les ventes et je ne peux dissimuler mon hostilité à la vieille école des maquettistes
qui prennent au sérieux de tels prônes. Imaginez mon horreur lorsque leur 'Sacré Collège', le
vénérable Art Directors Club, me décerna en même temps qu'à Henry Luce, Frank Stanton et
Henry Ford un prix spécial pour avoir 'encouragé les maquettistes à travailler dans le meilleur
climat possible'. Ignoraient-ils donc que je fais la guerre à la 'maquettite', cette maladie qui
réduit les campagnes de publicité à l'impuissance? Je ne présente plus les maquettes de mon
agence dans les concours organisés par les associations de maquettistes, de peur que l'une
d'elles ne se déshonore en remportant un prix. Leurs dieux ne sont pas les miens." Il ajoute:
"En Europe, la mode a été longtemps de critiquer le caractère primaire des affiches
américaines. Personne ne prétendra que les affiches américaines puissent rivaliser sur le plan
esthétique avec celles des Cassandre, Leupin, Savignac et McKnight Kauffer. Mais hélas, il y a
tout lieu de croire que le style primaire des Américains est mieux compris et reste mieux en
mémoire que les œuvres plus distinguées des artistes européens." Ogilvy n'y va pas par
quatre chemins. Sans aller jusque-là, je dirais quelques mots sur ce qu'est à mes yeux une
bonne image publicitaire.
Nonobstant ce que l'on vient de dire, le contenu compte plus que la forme dans les images
fonctionnelles. Par exemple, si on s'adresse à des hommes, et contrairement à la croyance
populaire qui imagine que le sex appeal est le plus efficace stimulant de l'attention mâle, les
images représentant des hommes solliciteront davantage les hommes. Au contraire, par un
effet de projection, les hommes auront davantage tendance à s'identifier aux protagonistes
mâles. Il est possible qu'une image érotique attire davantage l'attention des mâles, mais il est
loin d'être sûr qu'elle pourra mieux leur transmettre un message sur le produit annoncé.
Prenons l'exemple bien connu des pièces mécaniques genre amortisseurs d'automobiles que
l'on voit annoncées dans les garages "à l'aide" de plantureuses jeunes filles en bikini;
demandez à un client de décrire l'affiche qu'il a vue: il y a bien des chances qu'il puisse décrire
la fille sans qu'il puisse nommer la marque du produit annoncé. Il existe certaines règles de
grammaire élémentaires de l'image publicitaire. Précisons, dans un premier temps, que
l'image joue trois fonctions: 1. elle identifie le genre "publicité" comme tel: par la mise en
page, par l'association d'éléments visuels secondaires (genre de caractères typographiques,
encadrés, dimensions, etc.), par la qualité graphémique des images utilisées, etc.; 2. elle
fournit une information objective sur le sujet du message: elle montre le produit, son
emballage, son utilisation, etc.; 3. elle ajoute des considérations affectives à la
communication: par l'intérêt de la mise en scène, par la fougue de la forme et de la couleur,
etc. On comprendra que l'image publicitaire joue de la persuasion à plusieurs niveaux:
économique mais aussi culturel, esthétique, voire moral.
Les messages publicitaires sont le plus souvent des messages bi-codés: image + texte. Le rôle
de l'image dans ce travail d'équipe peut varier selon les circonstances, les problèmes à
83
résoudre, le talent des communicateurs. Comme le suggère la théorie -et surtout la pratique-
publicitaire américaine, l'image et le texte jouent un rôle redondant l'un par rapport à l'autre.
L'image illustre alors ce que le texte dit déjà, et vice versa; c'est en quelque sorte un jeu de
paraphrase. Mais l'image peut aussi apporter un complément d'information: montrer ce que le
texte peut difficilement décrire, exprimer des qualités différentes du texte, ajouter des
éléments suggestifs. Elle peut indiquer, mine de rien, des bénéfices annexes (mais souvent les
plus importants pour le monde instinctif du regardeur) dont on ne peut parler ouvertement
dans un texte par trop rationnel. Enfin, l'image peut jouer un rôle poétique; l'image participe
alors de la communication de l'envoûtement. De toute évidence, elle outrepasse dans ce cas
sa fonction informative; c'est là qu'elle devient vraiment persuasive. Elle constitue, en jouant
sur le mode rhétorique (métaphore, hyperbole, accumulation) le lieu du rêve, de l'espoir: elle
bouleverse alors les naïfs, les crédules "chasseurs de bonheur" que nous sommes tous.
L'image s'élève au rang de l'œuvre lyrique, de l'épopée (matérialiste, il est vrai). De plus,
l'image publicitaire produit un double effet grammatical: elle montre, affirme l'existence
(actant); elle qualifie, simule des caractères (prédicat). Peninou (1975) résume bien ces deux
fonctions quand il parle des régimes de dénotation et de connotation. Il expose dans un
tableau les caractéristiques de ces deux grands régimes de communication imagique.
LA REPRÉSENTATION L'ÉMOTION
L'ANALYTIQUE LE SYNTHÉTIQUE
L'OBJET LE SIGNE
LE PRODUIT LA VALEUR
LA CONNAISSANCE LA CONNIVENCE
L'INSTRUCTION L'EMPATHIE
LE NOM LE CARACTÈRE
LA PRATIQUE LE MYTHIQUE
LA MIMÉTIQUE LA POÉTIQUE
La dénotation, c'est, d'une certaine manière, dire avec des substantifs; la connotation, c'est
plutôt affirmer par des qualificatifs. C'est par cette dernière fonction que l'imagerie publicitaire
peut devenir subversive parce qu'elle joue à des niveaux inconscients, occultes.
Sous le couvert d'apparences anodines, l'image publicitaire véhicule des valeurs souvent
indicibles. C'est là sa force et d'ailleurs son emploi quotidien. Au fond, l'image, même
fonctionnelle, utilise toujours un niveau de langage qui s'adresse à l'inconscient. Le psycho-
sociologue français David Victoroff (1973) résume cela: "C'est ainsi, notamment, que la nature
infralinguistique du symbolisme de l'image rend compte de l'une des caractéristiques majeures
de l'image publicitaire, dont les motivationnistes se plaisent davantage à souligner les mérites
qu'à expliciter les raisons. Ayant sa source dans la région profonde du psychisme, la
symbolique de l'image échappe nécessairement aux contraintes d'ordre logique et moral que
la société impose au langage: elle parvient ainsi sans difficulté à traduire des désirs et des
sentiments dont l'expression ne serait pas tolérée au niveau verbal. Tout se passe, d'ailleurs,
comme si les créateurs publicitaires, se trouvant dans l'obligation d'exprimer visuellement des
désirs prohibés, faisaient appel d'instinct aux procédés le mieux adaptés à cet objectif: les
procédés de figuration onirique." Mais peut-être que ces derniers commentaires donneront
trop d'emphase à la croyance populaire déjà trop répandue que nous sommes manipulés
comme des marionnettes par l'imagerie publicitaire. C'est sans doute donner trop de poids à
un langage encore bien mal contrôlé, trop souvent entre les mains d'amateurs qui prétendent
plus qu'ils ne prouvent. Les messages-images, surtout s'ils nous parviennent par les moyens
de diffusion de masse, sont bien peu efficients sur nos comportements effectifs en
comparaison avec les stimuli perçus directement.
84
c) LES IMAGES JOURNALISTIQUES
Mais, contrairement à ce que l'on croit trop souvent, cette lecture des "faits" ne peut être
réalisée le plus souvent que par l'œil exercé d'un photojournaliste bien documenté. La célèbre
Farm Security Administration des Etats-Unis avait permis en 1935 à Roy Stryker (qui
incidemment n'était pas lui-même photographe) de monter une équipe de photojournalistes
qui devint célèbre pour la force de ses images. Le journaliste américain Werner-J. Severin
(1959) raconte comment Stryker obligeait son personnel à se documenter avant de partir en
mission; cette histoire lui a été rapportée par Carl Mydans qui faisait partie de l'équipe de la
FSA et qui devint plus tard photographe à Life. Mydans raconte que Stryker voulait lui faire
réaliser un reportage sur la "ceinture de coton" du Sud. Il fut convoqué dans le bureau du
patron de la photo qui lui demanda ce qu'il connaissait de la culture du coton; Mydans, surpris,
resta bouche bée ou marmonna une réponse qui ne put satisfaire Stryker. Et le reportage fut
remis. Alors Stryker, en vieux prof qu'il était, prit Mydans en charge: il lui parla de la culture
du coton tout l'avant-midi, sur l'heure du lunch, tout l'après-midi, pendant le souper et encore
toute la soirée... Mydans affirme que l'exposé couvrait toute l'histoire du coton, du système de
la récolte unique et de la civilisation qu'elle suscita. Il avoue que quand il partit le lendemain
pour le Sud, il était poussé non seulement par une tâche à exécuter, mais animé par une
véritable mission à accomplir. Voilà ce qui fera sans doute la différence entre une photo
"décorative" et une photo fonctionnelle. En effet, trop souvent encore les journalistes de
presse quotidienne fignolent un article -un dossier!- pour réaliser subitement la veille de la
publication que quelques images amélioreraient peut-être l'intérêt de leur papier. Ils font
appel en dernière minute au photographe de service et lui commandent des photos en
précisant vaguement le sujet. Et le photographe se précipite: clic! clic! Tirage. On choisit les
photos pour leurs qualités de "reproductibilité" évidemment: sont-elles contrastées, le cadrage
est-il original, le format s'adapte-t-il à la mise en page? Et on réalise trop souvent après coup,
que la photo disait autre chose, voire le contraire, de ce qu'on s'évertuait à exposer dans le
texte. Et, comme le démontrent les recherches, trois fois plus de personnes auront déchiffré
les photos que de personnes qui auront lu ne serait-ce qu'une partie du texte! L'américain
John-R. Whiting (1946), pourtant, avait mis en garde les faiseurs d'images il y a déjà trente-
cinq ans. Photography is a Language était le titre donné à son ouvrage. Mais il y a toujours
tellement d'images journalistiques qui sont silencieuses... ou qui provoquent un dialogue de
sourds.
Pourtant, l'image journalistique s'appuie sur une longue tradition, celle de la photographie
documentaire que le photographe et historien britannique Michæl Langford (1980) définit
ainsi: "Par photographie documentaire, on entend la représentation de situations réelles et
d'événements même si le photographe peut utiliser la composition, le choix de l'instant, etc.
pour faire valoir son point de vue. Cela comprend, on l'espère, qu'il aura réfléchi sur le sujet
de son image, et qu'il aura identifié les éléments signifiants, ce qu'il convient de faire
ressortir...". En ce sens, le britannique Roger Fenton était photojournaliste: envoyé par un
éditeur d'images avec l'approbation du gouvernement britannique, il couvrit la Guerre de
Crimée en une série de trois-cent-soixante photos. L'américain Mathew Brady (1823-1876)
aussi: homme d'affaire propriétaire de plusieurs studios de daguerréotypie, il constitua des
équipes de photographes qui parcoururent les différents champs de bataille de la Guerre civile
américaine (1861-1865) dite Guerre de Sécession; on réalisa 7000 collodions qui furent acquis
par la suite par le Gouvernement américain. Mais leurs images ne constituaient pas à
proprement parler du photojournalisme puisque, dans la presse, elles étaient refaites en bois
gravé à la main pour fins de parution. A la fin du siècle, certains de leurs auteurs étaient
d'ailleurs de simples documentalistes de la vie quotidienne (comme le franco-anglais Paul
Martin et sa "caméra cachée", l'écossais John Thomson ou le canadien-français J.-E.
Livernois); d'autres étaient de véritables propagandistes sociaux (comme le dano-américain
Jacob Riis, le sociologue Lewis Hine qui fit connaître la misère des enfants de sept ou huit ans
85
exploités vers 1910 dans les filatures de coton du Sud). La brillante équipe de Stryker au FSA
réunissait des gens comme Dorothea Lange (dont les photos inspirèrent à John Steinbeck Les
Raisins de la colère), Walker Evans, Arthur Rohstein, etc.
Le véritable photojournalisme prit naissance avec le premier quotidien à images qui apparut à
Londres en 1904, le Daily Mirror. Les agences de presse purent même envoyer leurs images
par télégraphe à partir de 1907 avec la mise au point par le français Edouard Bélin (1876-
1963) du bélinographe encore en usage aujourd'hui. Les magazines firent leur apparition en
1928 en Allemagne, alors le centre mondial des arts graphiques, avec le Berliner Illustrierte
Zeitung. Aux Etats-Unis, Life apparut en 1936, Look en 1937; en Angleterre, le Picture
Post en 1938; en France, l'Illustration avant la Guerre et Paris Match en 1949. Tout cela
constitue un milieu de culture idéal pour une nouvelle génération de photojournalistes: Erich
Salomon, Henri Cartier-Bresson, Robert Doisneau, Robert Capa, David Seymour, Bill Brandt.
Par exemple, Erich Salomon (1886-1944), un juif allemand (mort dans le camp nazi
d'Auschwitz), était docteur en droit et parlait sept langues; il fournit un grand nombre
d'instantanés de personnalités célèbres "à leur naturel". Cartier-Bresson, un Français, a
parcouru le monde où il a relevé nombre de scènes où il nous montre les gens ordinaires en
choisissant ce qu'il appelle "le moment décisif"; nombre de galeries d'art ont acquis ses
photos. Robert Capa, un hongro-américain, fonda (avec Cartier-Bresson et Seymour) l'Agence
Magnum de photos de presse; il fut le photographe des guerres (civile d'Espagne, 1939-45,
Israélo-Arabe, Viet-Nam où il trouva la mort); Seymour aussi mourut à l'action en Egypte. Les
photos des grands reporters ou des grands documentalistes sont aujourd'hui recherchées par
certains collectionneurs. Le journaliste Patrick Séry (1982) mentionne que Lever de lune sur
le Nouveau-Mexique d'Ansel Adams, pourtant tiré à plus d'une centaine d'exemplaires et
réalisé en 1941, fut payé le plus haut prix jamais atteint pour une photographie: $38,000.
86
La documentation photographique fut très importante pendant la deuxième Guerre Mondiale:
des équipes de photographes militaires suivaient les armées sur les champs de bataille.
L'armée britannique colligea ainsi
137,000 photos, l'armée allemande,
l'armée américaine, l'armée
canadienne et les autres en
produisirent des centaines de mille
autres. Ces photos devaient
constituer des documents historiques,
des images qui diraient la vérité à la
face du monde.
87
Bien sûr, faire une image journalistique, ce
n'est pas seulement appuyer sur un bouton.
C'est déjà concevoir une image, la
"visualiser". Le photographe américain Minor
White (1968) définit cette faculté comme "la
capacité d'apprendre à regarder un paysage,
une personne, un lieu ou une situation et de
la 'voir' au même moment sur le fond de ses
paupières, ou de 'ressentir' en profondeur
dans son esprit et dans son corps les diverses
manières dont une photo pourrait rendre le
sujet." Le pédagogue américain Robert-L.
Kerns (1980) expose cela d'une façon plus
didactique; il affirme que le bon
photojournalisme repose sur un trépied: la
La levée du drapeau à Iwo-Jima par Joe Rosenthal. En connaissance du sujet, la prévisualisation et
passant sur l'image avec la souris, découvrez le cadrage la maîtrise technologique. C'est, quant à lui,
du Los Angeles Times. la coordination harmonieuse de ces trois
En cliquant, vous en saurez plus sur Joe Rosenthal ingrédients qui permet de réaliser des images
qui parlent. Car les images de photojournalisme sont aussi des images fabriquées; elles n'ont
pas d'existence préalable. D'une certaine manière, l'image journalistique n'est pas plus vraie
qu'une image publicitaire: il faut choisir l'instant ("saisir le moment révélateur de l'histoire",
disait Eisenstædt) et élire un cadrage. Autrement dit, découper à vif une tranche de l'espace-
temps. Dans le cas de l'image publicitaire, le photographe fait artificiellement parader le
monde devant l'objectif; pour l'image journalistique, c'est le photographe qui parade dans le
monde pour y découvrir l'image fugitive correspondant à l'idée qu'il s'en fait. De toute
manière, cette image ne sera toujours qu'une image -jamais le réel.
Résumé :
S'il n'y a jamais eu de civilisation sans images, c'est la première fois que nous vivons dans une civilisation
de l'image . Il importe donc plus que jamais, pour mieux les lire, mieux les aimer, mieux pénétrer leurs
artifices, de savoir que les images ne sont pas naturelles, qu'elles réclament la complicité active et éclairée
de ceux qui les regardent. Dessin, peinture, publicité, photographie, cinéma, télévision, numérique, tous les
aspects de l'image sont évoqués dans cet ouvrage, destiné en priorité aux professeurs et aux étudiants,
mais où toute personne désireuse de perfectionner ses connaissances en ce domaine pourra trouver son
compte.
A propos de l'auteur :
L'auteur, Paule Baisnée, agrégée de lettres modernes, a consacré une partie de ses études au cinéma.
Actuellement professeur au lycée René Char d'Avignon, après avoir enseigné dans diverses universités
étrangères - Rome, Cracovie, Tunis - elle a toujours réservé, dans son travail, une place importante à
l'enseignement de l'image.
Sommaire :
88
L’article décrit l’utilisation de la photographie comme support d’enseignement pour susciter des
interactions en classe de langue. Un corpus de séquences de classe a été recueilli dans lequel des
apprenants de français langue étrangère commentent des photographies d’art. Les mêmes images
ont été montrées à différents groupes. L’analyse de ce corpus révèle l’importance des constructions
fictionnelles. Ce discours des apprenants est caractérisé par une instabilité énonciative : les voix ne
sont pas clairement identifiées. Cela correspond à la notion de fiction en classe de langue
développée par F. Cicurel. Le phénomène de polyphonie énonciative, tel que mis en évidence par O.
Ducrot, apparaît dans le corpus. Des exemples de virtualité et de pseudo-références seront analysés
à travers l’étude des références des pronoms personnels. Les marques de l’irréel, le discours direct
rapporté, l’attribution de titres aux photographies sont autant d’éléments qui favorisent l’entrée
dans la fiction. Si la fiction apparaît couramment dans les discours de la classe de langue, il semble
ici que la présence de l’image déclenche les créations fictionnelles de façon spécifique. La
photographie amène les apprenants à faire parler les personnages. Les perspectives didactiques
seront mises en évidence. En encourageant la création de mondes imaginaires, la photographie
favorise l’expression et la créativité des apprenants.
89
Organisation :
Varier les modalités de regroupement. En situation collective, pour la convivialité du
groupe classe, les rituels (image du jour). Et en ateliers dirigés et libres sous contrôle.
Travailler en petits groupes (atelier intégré au dispositif apprentissages) pour favoriser les
prises de paroles, le questionnement et stimuler « les petits parleurs » (A. Florin).
Capacités à développer prioritairement :
Trier, associer, comparer des images en fonction de différents critères énoncés par
l’enseignant et aussi par l’E, nommer, définir, poser (et se) des questions, décrire, justifier
ses choix, chercher des indices, catégoriser, faire des hypothèses, redire, raconter, avant
après, transposer un récit en dialogue, se repérer et préciser l’espace du support, s’initier
à la prise de vue avec l’œil avec les mots (indicateurs spatiaux), mettre en relation,
expliquer, argumenter.
MS : Mettre l’accent sur les pronoms je tu, sortir du système présent, passé-composé,
futur avec aller (PS) pour favoriser imparfait, futur, conditionnel. Installer et renforcer
les complexités. Et à minima pour les prépositions : devant, derrière, avant, après, à côté
de, loin de, près de, au-dessus de, au-dessous de, en haut de, en bas de.
Eléments de bibliographie :
Quelques titres porteurs :
Albums sans textes, Bonjour / Milan - Il pleut EDL - L’arbre, le loir et les oiseaux / EDL
- Histoire d’une petite souris qui rencontre le vent / Gallimard jeunesse - Bonsoir / Milan
BD : Le génie et la boîte de raviolis / La joie de Lire - Les réflexions d’une grenouille /
Autrement jeunesse - Les nouvelles réflexions d’une grenouille / ID - Hyper L’Hyppo /
Delcourt /
90
Arts : Chats en art et en poésie / Gautier Languereau - Animaginettes / Grandir - Les
silhouettes / Nathan (pour la manière originale et ludique d’aborder les # œuvres d’art à
travers les époques) - l’Abécédire / Rue du Monde - Un bleu si bleu / Flammarion (pour
la couleur) -
Aliocha l’épouvantail / Seuil (pour l’illustration qui rappelle Chagall) - Roule ma poule /
Th. Magnier (pour les illustrations chatoyantes sur le thème du cirque) - La petite boîte
jaune / Magnard (pour les compositions colorées à partir de pâte à sel et de textile et le
texte redondant, bourré d’onomatopées ) - Une voiture pour miss Spider / Casterman
(pour le traitement fluo de l’image) - Ohé petite fourmi / La Martinière (pour les
différences de taille) - Fast Food / Rouergue (pour comprendre les subtilités de la pub) -
Attention à la marche / Rouergue et Cocorico poulet Piga / Points de suspension (pour les
dessins naïfs et enfantins)...
Références pédagogiques :
« Enseigner la langue orale en maternelle » Philippe Boisseau / Retz & CRDP Versailles
(conférence du 15 février 06 La Verpillière)
« Pédagogie du langage pour les 4ans » et « Pédagogie pour les 5ans » ID / CRDP Rouen
« Images et langage en maternelle » Catherine Bon & Denise Chauvel / Retz 2004
« Activités graphiques et créatives » les ateliers Marie-Thérèse Zerbato-Poudou / Retz
« L’Art en main » cycle 1 S. Malaisé / Celda
« Contes à imaginer » Yannick Mauffrey &Isdey Cohen / Nathan
Christiane Herth
91
privilégié pour l’aborder dans sa globalité consiste à faire coexister le
regard sur l’image et la production personnelle.
92
INTRODUCTION
La présence des images, souvent fortes et « parlantes », dans les méthodes de
langue constitue un outil à utilisation multiple pour aider les enseignants dans la
construction de leurs cours. Ces images ne constituent pas seulement un moment du
repos pour la vue, gavée d’écriture, ni une récompense associée aux bons points de
l’école primaire traditionnelle. Tout d’abord, les images attirent, sont intéressantes
par leur effet de dépaysement, de charme exotique de ce qui est différent, mais
aussi elles constituent un déclencheur de parole par la lecture propre de la réalité
peinte, dessinée, ou photographiée qu’elles nous proposent. Leur mise en valeur par
le cadrage dans les pages, la place importante de ces supports particuliers dans les
livres et dans les cours de langue est pleinement justifiée non seulement comme
élément motivant, mais comme document à part entière qui permet comme les
autres supports d’enseignement l’accès au sens et à la connaissance de l’autre.
Très vite les futurs enseignants lors de leur stage professionnel ont compris les
qualités et les limites de ces documents qui s’étendent sur une vaste palette qui va
du tableau de maître à la caricature humoristique, de l’affiche et de la publicité sur
papier glacé au graffiti protestataire, de l’image photographique au logo ou signe de
plus en plus utilisé comme signature iconographique pour toute sorte de messages
des institutions ou des marques commerciales.
L’invention d’outils pédagogiques variés pour mener à bien cette tâche, l’utilisation
des modes de travail divers (classe entière, petits groupes ou binômes), les pratiques
professionnelles en prise avec l’image et son rapport avec l’enseignement de la
civilisation hispanique sont présentés dans les mémoires. Et ceci avec le souci de
diversifier les supports et de travailler de façon équilibrée les quatre compétences :
car pendant le cours, ce que le professeur et les autres élèves disent sur les
documents iconographiques doit être écouté et compris ; de plus, un travail écrit -à la
maison ou en cours- de reprise de ce qui a été dit ou d’expression personnelle peut
être envisagé, ainsi que la réponse rédigée à des questions écrites sur les images
présentées en cours peuvent compléter l’aspect linguistique de compréhension et
production de l’écrit et de l’oral.
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La présence de documents iconographiques en cours d’espagnol et son importance
dans les manuels n’est pas une nouveauté en France. Ceci est dû d’une part à
l’importance des images dans le monde hispanique comme moyen culturel très
répandu et d’autre en raison de l’intérêt que cette culture iconographique, voire
plastique a toujours suscité chez les hispanistes et professeurs d’espagnol français,
souvent connaisseurs et passionnés des peintres et artistes plastiques autant que
des auteurs littéraires. Les liens culturels très forts entretenus par des artistes
plastiques espagnols de premier plan et la France au cours du XX siècle nous
facilitent l’étude en direct des ces ouvres picturales extraordinaires, visibles dans des
collections, des expositions et des musées proches de l’Académie de Créteil. C’est un
atout pour l’enseignement des langues vivantes et pour le travail de connaissance de
la civilisation qui sous-tende la langue enseignée. Cependant, comme certains
professeurs stagiaires l’indiquent, avant de pouvoir proposer une démarche
cohérente, logique et intéressante d’étude d’une image picturale aux élèves, il
faudrait décrypter d’abord les documents iconographiques et acquérir une certaine
compétence dans la lecture de ces messages.
Certes, dans d’autres supports visuels les objectifs sont moins ambitieux et plus
qu’une réponse linguistique articulée et construite à un message picturale,
l’enseignant attend de la production plus simple : mettre en paroles une image pour
la décrire, compléter des bulles de bandes dessinés, terminer une histoire amorcée
ou d’autres exercices de repérage ou travail de compréhension de l’écrit par rapport
au support visuel qui est décrit ou commenté, c'est-à-dire, des exercices de langue –
très formateurs également pour l’accès au sens- comme le remplissage de fiches ou
la réponse rédigée à des questions posées sur une image.
Les stagiaires dont nous présentons ici les travaux ont conçu des séquences et des
séances qui semblent être un excellent point de départ pour leur métier d’enseignant
en ce qu’elles ont été expérimentées dans les classes et parce qu’elles ont méritée
une réflexion postérieure aux faits.
Parfois l’excès d’ambition étant aussi nocif que son absence, les stagiaires ont vu
leurs préparations bien cadrées ne pas intéresser leur public, tandis qu’à d’autres
reprises ce sont les remarques et le bien fondé des réflexions des élèves qui les ont
surpris. C’est là tout l’intérêt de l’échange, du questionnement entre l’enseignant et
ses élèves, sans oublier les échanges entre les élèves eux-mêmes. Ce dialogue
ouvert dans la classe en quête de sens devient souvent plus facile et aisé quand il se
produit autour d’un document iconographique. Sur ce point les textes officiels sont
clairs :
« Quant à l’image fixe inscrite dans l’environnement quotidien des élèves et très
prisée par eux, elle contribue à l’entraînement de l’expression orale dont elle est un
bon déclencheur tout en permettant la formation de l’oeil et de l’esprit » (Espagnol,
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classes de seconde, première et terminale, programmes et instructions du Ministère
de l’Education Nationale).
Les travaux qui suivent parlent d’eux-mêmes, malgré la mutilation nécessaire, faute
de droits pour reproduire les annexes (les oeuvres picturales évoquées sont bien
référencées et de vision aisée sur un manuel ou un site d’accès facile). Ils seront sans
doute utiles aux enseignants désireux de réfléchir sur leurs pratiques et attirés par
l’emploi des documents iconographiques dans leurs cours. Les résultats sont souvent
très encourageants.
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