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ET DANS L’ART
BYZANTIOς
Studies in Byzantine History and Civilization
10
Series Editors
Michael Altripp
Lars Martin Hoffmann
Christos Stavrakos
H
F
© 2017, Brepols Publishers n.v., Turnhout, Belgium.
All rights reserved. No part of this publication may be reproduced, stored in a re-
trieval system, or transmitted, in any form or by any means, electronic, mechanical,
photocopying, recording, or otherwise without the prior permission of the publisher.
D/2017/0095/10
ISBN 978‑2-503‑56983-3
E-ISBN 978‑2-503‑56984-0
DOI 10.1484/M.SBHC-EB.5.111903
Abréviations vii
Remerciements ix
Présentation xi
INTRODUCTION
Anca Vasiliu, Eikôn et la pensée trinitaire :
prémisses théoriques 3
Kristina Mitalaitė, Imago et la pensée latine de l’image 23
PERSPECTIVES LATINES
Kristina Mitalaitė, Éduquer le regard et construire
la visibilité chrétienne : le visible et l’image dans la période
pré- et post-nicéenne 219
Diego M. Ianiro, “Res insensata, vero ambigua aut certe
inutilis”: l’immagine artificiale nei Libri Carolini257
Francesco Paparella, Imago, Eikon, Icon: Image Theory,
Political Clash and Ontology in the Early Middle-Age World 285
Maria Bettetini, Dalla diffidenza alla passione esclusiva:
tra Carlo Magno e Gioacchino da Fiore 307
TABLE DES MATIÈRES
LE MONDE SLAVE
Aleksandra Sulikowska, Icons and Relics in Religious
Policies of the Muscovite Rus’ 337
Pierre Gonneau, L’image en Russie au siècle d’Ivan le Terrible 357
Grażyna Jurkowlaniec, Between the First and the
Third Rome: the Cult of Marian Images in the
Polish-Lithuanian Commonwealth 387
Alexei Lidov, Icon as Chora: Spatial Aspects of Iconicity in
Byzantium and Russia 423
Résumés des articles et présentation des auteurs 449
INDEX
Index des auteurs anciens 465
Index des noms propres 468
Index des auteurs modernes 471
ABRÉVIATIONS
PRÉSENTATION
PRÉSENTATION
moins dans ses débuts, illustre de manière exemplaire. À savoir que l’image
est avant tout un moyen noétique, intellectuel, qui ne se confond pas
avec l’objet produit par un art visuel spécifique, peinture ou sculpture, art
pariétal ou monumental, dessin, tissage ou modelage. La mobilisation de
la notion d’image dans la définition des points clés de la doctrine chréti-
enne, la Trinité, l’Incarnation et les statuts de l’hypostase, de la personne
et de l’individu (en l’occurrence : de l’existence, du sujet et de l’homme),
ne pouvait en effet se faire qu’en prenant appui sur ce rôle philosophique
de l’image, rôle qui avait rendu l’image appropriée pour servir aux en-
jeux des discours théologiques chrétiens. Sous l’appellation d’icône, la
réflexion grecque, puis byzantine, a associé la fonction philosophique de
l’image comme lieu et acte permettant de penser le rapport de l’identité et
de l’altérité, avec la fonction réflexive de l’image qui permet de penser le
divin sous le mode d’un rapport de l’unité ou de l’identité à l’égard d’elle-
même. Cette fonction réflexive, propre à l’image et à elle seule, est assignée
aux actes divins, la démiurgie et la révélation, actes par lesquels l’homme
lui-même devient l’objet d’une relation avec Dieu. Mais cette fonction ré-
flexive, qui permet de statuer sur la relation de similitude, sur la notion
de double et sur les dimensions performatives de la participation et de la
réciprocité, se montre mais ne se définit pas comme telle quand elle est
en mode opératoire. Cette fonction, et en somme cette dimension spéci-
fique de l’image, ne comporte pas une définition unique et ne peut qu’être
surprise à l’œuvre, dans sa dynamique de changement permanent. Il arrive
aussi qu’elle soit saisie sans en voir nécessairement les enjeux théoriques,
autrement dit, sans distance critique, et parfois qu’elle ne soit pas accep-
tée par les théologiens ou par les fidèles pour des raisons d’aniconisme bi
blique ou d’options de doctrines iconoclastes.
Ces questions sont certes abordées de manière plus détaillée dans
les textes qui suivent, textes qui montrent aussi les différentes formes
d’implication du statut de l’image et de la notion d’image divine dans
l’art et dans la pensée théologique et politique des Églises. Mais il s’agit
évidemment d’un choix censé donner, à grandes enjambées de siècles,
quelques repères et signaler aussi les moments des grandes mutations
historiques. Sur un thème pareil aucun volume ne peut prétendre à
l’exhaustivité. À la fin du volume, les résumés des articles donnent au
lecteur pressé un aperçu des approches proposées.
INTRODUCTION
Anca Vasiliu
Sur la possibilité de définir une image de Dieu qui soit elle-même une
image divine, c’est-à-dire non séparée substantiellement de ce dont elle est
l’image, la défense de la théologie trinitaire au ive siècle apporte non une
solution magique, équivalente au statut équivoque, mi-présence mi-repré-
sentation, dont jouissent les images dans les pratiques théurgiques, mais
la plus originale et peut-être la plus profonde des réflexions théoriques
jamais menées sur ce qu’est une image, ses pouvoirs et ses limites. Enten-
dons-nous cependant, le plus brièvement possible, sur deux aspects préa-
lables à toute étude sur un tel sujet : la position à l’égard de l’image dans
l’argumentation de l’Incarnation et le rôle de l’image à l’égard du statut
de personne. S’entendre ne signifie pas affirmer une position d’autorité,
avoir l’outrecuidante prétention de faire la lumière sur de tels enjeux de
la pensée, mais veut tout simplement montrer les positions théoriques de
départ et souligner qu’il s’agit, bien évidemment, d’un choix délibéré.
Incarnation
L’Incarnation est, certes, la prémisse majeure le plus souvent évoquée dans
l’attestation de possibilité, donc de vérité et de divinité conséquente, d’une
image de Dieu. D’un Dieu qui s’incarne l’image ne peut qu’être une image
qui ne ment pas ni sur ce qu’elle montre ni sur son statut, en présentant
une apparence inventée de toute pièce par un faiseur d’images. Montrant
la visibilité inhérente au corps d’un être, en l’occurrence, l’aspect sous le-
quel un vivant apparaît aux yeux des autres vivants, l’image devrait pouvoir
s’auto-légitimer comme reproduction. Dans le cas d’un dieu, si celui-ci ap-
paraît, une image de cette apparition est alors divine par son référent, bien
qu’elle soit œuvre humaine par l’art qui la produit, tout autant que par le
regard qui découvre les aspects sous lesquels un dieu lui est apparu. Par
conséquent, si contestation il y a concernant la légitimité de considérer
comme « divine » une image au titre de la divinité de celui qui s’est incar-
né, cette contestation porte nécessairement sur l’Incarnation elle-même,
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 3-21
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Anca Vasiliu
non sur l’image qui n’est qu’un effet de l’engendrement. Demeure cepen-
dant une interrogation au sujet de la légitimité de l’image elle-même, cette
image censée reproduire un être engendré. L’interrogation ne vise pas la
possibilité de l’acte de l’Incarnation mais celle de l’acte de l’image elle-
même, cet acte second, reproductif et donc sous-jacent à la possibilité qu’il
y ait une image reproductible de ce qui s’incarne, de ce qui vient au monde,
de ce qui acquiert par engendrement à la fois une image propre et une visi-
bilité immanente à son statut d’existant et à sa nature de vivant.
En considérant, comme les Anciens, que tout être vient au monde
accompagné d’une image, puisque rien ne peut subsister sans une image
et que celle-ci, ne tenant pas de la visibilité inéherente au corps ni n’étant
complètement séparée de l’aspect, est son image à vie, doit-on se ré-
soudre à considérer qu’une reproduction ne s’approprie que l’apparence,
ou est-il légitime d’envisager la possibilité que l’on prenne pour modèle
cette image de l’être lui-même dans l’espoir d’en capter un reflet ? Mais si
cette image de l’être est inséparable de l’être lui-même, comme aurait dit
Plotin en refusant que l’on gardât de lui une effigie, de quoi cette image
seconde, disons un portrait, est-elle l’image, en réalité ? Se réduit-elle au
reflet, produit-elle un double du seul corps ou propose-t-elle une vue
sur l’image de l’être dans son entier, comprenant son principe de vie ou
son principe de production selon qu’il s’agit d’un vivant ou d’une chose
inanimée ? Si elle ne se confond pas avec l’ombre, le reflet ou le double
du corps, l’image signifie alors l’étantité comme telle de l’être, outre sa
visibilité conséquente à l’existence corporelle, assortie, le cas échéant, des
traits spécifiques de l’individu qu’est censé montrer un portrait, ou de
la forme caractéristique pour une chose particulière produite. Or, en si-
gnifiant l’étantité, l’image consignerait ainsi la possibilité que l’être ne
soit autrement qu’en vue de l’étant, voire que l’étant seul accomplirait la
puissance inscrite dans l’être, et que l’image, attestant de cette possibilité
de réduction téléologique de l’être, montrerait en même temps sa par-
faite finalité, en étalant sous nos yeux des stases d’accomplissement de
l’étant particulier et individuel dans l’incessant devenir des choses. C’est
de la légitimité d’un tel acte – l’image donne la possibilité de penser que
l’être ne s’atteste que par la subsistance de l’étant et en offre un premier
moyen – qu’il convient de s’enquérir, avant de prendre en considération
l’Incarnation et le rôle qui revient à l’image à l’égard de ce cas unique.
Pour pouvoir saisir la légitimité de l’image, il est donc nécessaire de cer-
ner non ses présumés pouvoirs (puisque ceux-ci sont une conséquence de ce
que nous faisons nous-mêmes de l’image), mais le but dans lequel une image
est produite ou pour lequel elle nous est donnée à voir. Car, tel qu’il se pose
EIKÔN ET LA PENSÉE TRINITAIRE : PRÉMISSES THÉORIQUES
Anca Vasiliu
corps est le corps passe par la saisie sensible, visuelle, du corps lui-même.
Soit l’image n’est pas une conséquence de la réduction de l’être à l’étant
mais un moyen de saisir le statut de l’être dans la situation de l’étant, et
alors l’image ne donne pas à voir la visibilité immanente de l’étant et ne
produit donc pas une objectivation de celui-ci, mais présente précisément
ce qui ne se laisse pas voir dans les manifestations visibles d’une présence
corporelle. Dans ce cas, l’image n’est pas un double, une re-présentation
de ce qui est présent corporellement, mais elle rend visible, au contraire,
ce qui ne se voit pas dans la saisie du corps présent. Selon la première al-
ternative l’image présente le corps et le corps s’y identifie jusqu’à pouvoir
annuler sa présence au profit de celle de son image – selon l’exemple bien
connu de l’effigie de César qui remplace la présence de celui-ci et satisfait
tous les besoins de légitimation qui réclament la présence de l’autorité.
Contester l’image revient alors à contester la réalité du corps, donc dou-
ter de l’existence du « roi » et créditer l’auteur de l’image d’inventeur de
fictions. Selon la seconde alternative, en revanche, l’image n’est pas une
conséquence de l’existence du corps mais une condition de possibilité
pour celui-ci. Elle est alors responsable à la fois d’une désobjectivation
du corps et d’une révélation du principe qui conduit à penser que l’être
n’est pas en vue de l’étant mais que seul ce dernier permet de penser l’être
et que l’image constitue alors le moyen de saisir l’ensemble sous l’espèce
de l’universel tel qu’il se reflète dans la singularité propre à chaque étant.
L’image devient alors le moyen privilégié pour signifier l’identité de cette
image à vie, l’infracassable noyau de l’être qui comprend la possibilité
de l’étant singulier, et pour montrer en même temps les conditions de
sa connaissance. (Il va de soi que sous l’expression « image à vie » nous
n’entendons pas une métaphore de la prédestination.)
Mettre en rapport l’image avec le cas unique de l’Incarnation permet
de comprendre que l’alternative ainsi esquissée ne concerne pas exclu-
sivement le sort de l’image, mais que l’image fait partie d’un dispositif
conceptuel dans lequel le statut d’être constitue le noyau en même temps
que le « bien commun » de la métaphysique et de la théologie.
Qu’il soit pris dans le sens d’une inférence existentielle (si Incarnation
alors image) ou dans le sens d’une déduction (si image, ou du moins vi-
sibilité immanente dont témoignent les Écritures, alors Incarnation), un
lien direct entre l’Incarnation et l’image ne peut cependant que fausser
la question de fond : l’image, si elle a à voir avec Dieu, est-elle pour au-
tant une image de Dieu et est-elle à ce titre elle-même divine ? Sous son
double aspect, image de Dieu/image divine, cette question ne dépend pas
EIKÔN ET LA PENSÉE TRINITAIRE : PRÉMISSES THÉORIQUES
Anca Vasiliu
EIKÔN ET LA PENSÉE TRINITAIRE : PRÉMISSES THÉORIQUES
Anca Vasiliu
sive avec celui qui s’incarne, donc éternelle, tandis que l’image fait acte
d’une présence à elle et d’elle, une présence qui cherche à signifier le temps
présent et à montrer au nom de qui ou de quoi cette signification du temps
présent prend réellement sens. En outre, étant située ainsi, dans l’intervalle
entre l’Incarnation comme événement que l’image met en scène comme
un « passé-présent », un temps a-temporel (semblable à l’aoriste de la nar-
ration mythologique) et le futur révélé par une prophétie que cette même
image anticipe du seul fait de faire acte de sa propre présence en l’absence
de ce qu’elle montre, on est en droit de se demander si l’image est alors di-
vine puisqu’elle est l’image d’un Dieu qui s’est incarné et qu’elle tient donc
le rôle d’une « enseigne » de celui-ci (à la limite, réductible au seul nom),
ou si elle est seulement mémorielle de l’événement et de ses acteurs, étant
alors équivalente de la parole iconique et narrative du récit évangélique,
donc divine à ce titre, par emprunt et nullement par elle-même ?
En simplifiant à l’extrême pour saisir l’enjeu des paradoxes signa-
lés, on retiendra donc que l’Incarnation ne signifie pas que Dieu de-
vient visible mais que le Fils seul est/donne l’image de Dieu (eikôn tou
theou). Signifie donc que de Dieu seul Dieu peut être aussi son image,
en l’occurrence le Fils, et que rien d’autre ne peut se légitimer et se dé-
finir comme image de Dieu. Mais en même temps, l’image, dans sa réa-
lité même d’image, ne peut être qu’une altérité, et dans ce cas précis, en
tant qu’image de Dieu, elle serait même l’altérité idéale de Dieu, idéale
puisque de facto elle est aussi radicale comme altérité que la radicalité de
la transcendance même de Dieu. Or, si de Dieu seul Dieu est son image,
et que cette image de Dieu est le Fils, alors le Fils serait l’altérité idéale
et radicale de Dieu et non substantiellement son identité, Dieu en tant
que Fils de Dieu – inférence qui est absurde et du moins contraire au
Credo. Il devient alors impératif de trancher entre la contestation de la
possibilité de l’Incarnation, ce qui revient à limiter pouvoir et liberté
de Dieu, et l’acceptation d’une double signification de l’image. Dans
le cas de Dieu, l’image serait l’expression d’une identité substantielle
unique et indivisible, le Fils étant alors, nécessairement, dans un rapport
d’identité substantielle avec le Père, tandis que dans le cas de l’homme,
l’image s’identifierait au reflet de cette même identité appelée image à
vie ou image de l’être, traduisant la puissance de réflexivité universelle
de la transcendance dans la subsistance des identités singulières de cette
espèce. En revanche, dans le cas de tous les autres existants vivants ou
inanimés, l’image correspond à l’actualisation d’une réalité simultané-
ment gage d’identité et gage d’altérité, réalité qui est propre à l’image et
à elle seule au sein de la réalité immanente des choses.
EIKÔN ET LA PENSÉE TRINITAIRE : PRÉMISSES THÉORIQUES
Anca Vasiliu
EIKÔN ET LA PENSÉE TRINITAIRE : PRÉMISSES THÉORIQUES
Anca Vasiliu
Personne
Cette première mise au point théorique des positions à l’égard du statut
dont est investie l’image dans le champ de la réflexion théologique, ap-
pelle une seconde précision. Celle-ci concerne toujours la définition du
rapport entre Père et Fils, cette fois-ci non sous l’aspect de l’Incarnation
de Dieu mais sous celui conséquent du partage d’une substance unique
par deux personnes distinctes unies par un lien de parenté. On ne peut
pas réduire la compréhension de la Trinité à la manifestation différen-
ciée du partage d’une substance unique et, cependant, considérer dif-
féremment cette même communauté substantielle lorsqu’on s’intéresse
au rôle inhérent d’image qui revient au Fils à l’égard du Père dans ce
même cadre. L’image du Fils n’est pas une image de la seule personne
du Fils en tant que Fils du Père, différent du Père comme un portrait
diffère inexorablement de l’original. Cette analogie avec l’exemple clas-
sique d’homonymie construit sur le cas du « portrait » ne fonctionne
pas dans le contexte trinitaire. On peut dire que Socrate et le portrait de
Socrate sont la même chose puisque le référent (Socrate) est le même, et
ce malgré la différence substantielle entre la chair de l’un et la pierre ou
le bronze de l’autre. Mais on ne peut pas formuler une assertion simi-
laire à l’égard du Fils dont l’image est en même temps image ou icône du
Père, car dans ce cas le référent n’est pas le même sauf du point de vue de
la substance qui précisément n’est pas distincte, comme dans le cas du
portrait de Socrate, mais bien identique selon la définition théologique
de la Trinité. L’image du Fils qui est image du Père présente donc une
situation inverse à celle qui sert d’exemple pour l’homonymie : contrai-
rement au portrait de Socrate, l’image de Dieu a au moins deux référents
unis par une substance unique (l’ousia divine commune et indivisible) ;
il s’ensuit que cette image n’est pas référentielle pour la personne mais
constitue l’image de la substance (ousia) – image de l’étantité, de la réa-
lité ou de l’effectivité de celle-ci.
EIKÔN ET LA PENSÉE TRINITAIRE : PRÉMISSES THÉORIQUES
Anca Vasiliu
est image. Elle n’est pas, autrement dit, la copie de quelque chose que
l’image n’est pas. En revanche, la divinité, « réalité » ou « propre »
du référent-Dieu, fournit d’elle-même une image continue, une image
illimitée, une image qui convient à la réalité spécifique de chacune des
hypostases dans laquelle s’actualise la substance divine commune et in-
divisible, constitutive de la Trinité. En d’autres termes, la seule image
de l’image trinitaire (appelons cette dernière la structure formelle ou
plutôt l’« organisme formel » de Dieu, malgré le paradoxe compris
dans une telle expression) correspond de facto à l’acte et elle se justifie
comme image dans la mesure où l’acte est en tout état de cause perçu
comme une image de la substance, comme une sorte d’ek-stase de celle-
ci.
Peut-être faut-il encore souligner qu’une représentation de la Trinité,
quelle qu’elle soit, est une toute autre chose que cette conception trini-
taire, image et expression de l’ipséité de Dieu. Si la « divinité » ne tient
pas à la référence, car la conception trinitaire en tant qu’image adéquate
de Dieu est irreprésentable, elle provient en revanche du culte auquel
participe l’objet d’une telle représentation iconique, et ce culte, déployé
à son acmé comme une glorification, s’évertue à écarter à tout prix le
spectacle visuel de l’image-suppôt d’une référence formelle à la Trini-
té, quel que soit le modèle de figuration choisi. La médiation, en fin de
compte, ne revient pas à l’image mais englobe l’image au déploiement
des moyens proprement doxologiques (prières, rites).
Substance et relation
Tenant compte de ces deux aspects théologiques majeurs déterminants
pour la question controversée de l’image divine, voyons maintenant
à quel rôle est vouée l’image dans la définition de la Trinité et quelles
pourraient être les raisons de son usage, sachant que l’unité trinitaire
n’est ni une unité de façade (comme la ressemblance iconique pour la
parenté) ni une unité de personne (comme dans le cas du référent d’un
portrait), mais constitue une unité essentielle ou substantielle, donc une
unité proprement ontologique, fermée a priori à toute séparation réelle
ou feinte de son identité. Si à l’égard de cette unité infracassable l’image
ne peut être ni représentation ni portrait, que serait-elle alors et com-
ment se présenterait-elle : image iconique ou aniconique, figurative ou
foncièrement une non-image puisque proprement invisible, signifiant
ainsi la phénoménalité sans qualités ni attributs qui définit la nature di-
EIKÔN ET LA PENSÉE TRINITAIRE : PRÉMISSES THÉORIQUES
vine ? Le statut sine qua non référentiel de l’image – puisque l’image est
toujours image de… quelque être ou chose qui comporte en puissance
une « réalité d’image » – ne peut qu’externaliser l’unité ontologique
et transformer le fait réciproquement réfléchi des hypostases en fait re-
présentatif de ce qui s’accomplit. Cependant, l’image peut conserver le
trait fondamental de la non-séparation si elle est confinée à la tâche qui
lui revient dans la définition de la Trinité et qui correspond d’ailleurs à
sa nature la plus intime, celle de sous-tendre la puissance réflexive des
hypostases et de s’identifier à leurs rôles spécifiques non-séparés de leur
substance divine simple et unique.
Autrement dit, l’image peut garantir la non-séparation si ce qui s’ac-
complit selon le rôle assigné à chacune des hypostases est saisi en train de
s’accomplir perpétuellement comme image et non à la manière d’une en-
téléchie, comme dans le cas des substances secondes ; en bref : si l’acte en
train de s’accomplir sous le mode de l’engendrement ou de la procession
n’est de fait qu’une image de la dunamis, une image de la puissance dans
laquelle tout est compris et qui est la puissance de l’ousia divine. Il s’ensuit
que les hypostases, puisqu’elles sont propres en tant qu’entités, consti-
tuent le différentiel et donc la possibilité d’individuation à l’intérieur de
la Trinité, et qu’à leur égard l’image, si elle ne peut pas fournir l’identité
propre puisque celle-ci est inconnaissable, peut en revanche s’identifier
à leurs relations : relations réflexives des « trois » et relation réciproque
de chacune à l’égard de la substance divine unique. Or ce sont précisé-
ment ces relations qui incombent à l’image et que l’image doit rendre
opérantes à l’égard des hypostases spécifiquement. La relation étant si-
multanément réflexive et iconique, le résultat est lui aussi une image de
type iconique. Les hypostases sont donc chacune l’image de l’autre à la
fois comme participante à l’unité essentielle et comme identité formelle
de l’action propre à chacune, chacune prenant le « visage » propre à son
rôle en rapport avec le rôle de l’autre dans l’interaction continuelle des
prosôpa. Cette interaction réflexive et réciproque se traduit en termes de
reconnaissance mutuelle de l’honneur (timê) et se définit comme renvoi
perpétuel de cette reconnaissance au modèle substantiel unique (sous le
paradigme paternel ou sous celui du dieu monadique).
Précisons que ces relations réflexives et iconiques dans la danse des-
quelles les hypostases se singularisent tout en restant à l’intérieur de
l’unité trinitaire, s’articulent aussi à une autre sorte de relation déployée
sur le plan de la nature substantielle. C’est la réciprocité de l’acte et de la
puissance, telle qu’elle est illustrée par le rapport du Père et du Fils dans
l’Incarnation, qui désigne la nature des relations sur le plan substantiel,
Anca Vasiliu
EIKÔN ET LA PENSÉE TRINITAIRE : PRÉMISSES THÉORIQUES
aussi que l’on peut désigner le mode opératoire et définir ainsi les rela-
tions spécifiques entre les trois hypostases.
Preuve et argument
Dans les débats sur la Trinité qui ont suivi le premier concile de Nicée
l’image, sous les appellations eikôn ou imago selon l’idiome du débat 1,
sert à la fois de preuve et d’argument en faveur de l’unité substantielle
entre le Père, qui n’est pas réductible à une substance divine et qui ne
s’identifie donc pas à sa propre substance bien qu’il l’ait en lui comme
puissance de manière parfaite et éternelle, et le Fils qui a lui aussi la même
substance (puisque le Père et le Fils sont homoousioi ou « consubstan-
tiels »), mais l’a en acte, chacun ayant aussi une subsistence ou une exis-
tence hypostatique propre. Le Père fait preuve de cette existence en la
révélant à travers le Fils, lequel, la recevant en provenance du Père, à la
fois est et en fait acte. Cependant, à la différence du Père, le Fils, outre sa
détermination en tant que substance en acte et outre son identité d’hy-
postase propre (celle de Fils), possède avec l’existence aussi une forme
qui est la sienne et qu’il accorde au Père dans la mesure où, partageant
avec celui-ci la même substance, il est pour le Père la forme et l’acte que
le Père n’a pas. Ce dernier n’a ni forme ni effectivité d’acte non par pri-
vation, manque ou imperfection, mais par simplicité et par dépassement,
c’est-à-dire par différence ou altérité transcendantale à l’égard de l’être,
de ses déterminants et de ses manifestations. L’image, qui ne se confond
pas avec la forme, intervient dans le retour sur l’acte que le Fils opère à
l’égard du Père en accordant à celui-ci le statut d’engendrant et la pos-
sibilité conséquente d’être connu. C’est à ce titre que l’image sert d’ar-
gument sur le plan de l’unité substantielle, sans donner nécessairement
quelque chose à voir mais assurant néanmoins la condition de possibilité
1
Il est nécessaire de prendre garde à un détail lexical qui a son importance dans ce
débat théologique gréco-latin où les mots sont presque tous lestés d’un poids conceptuel
déterminant pour le débat. J’ai à dessein utilisé dans la plupart des cas le mot « subs-
tance » pour ousia, et non le terme « essence », en privilégiant ainsi l’une des traductions
latines anciennes, bien que le sens se trouve du coup quelque peu infléchi (mais ne l’est-il
pas tout autant avec le terme « essence », dans la perspective de la pensée moderne ?). De
même, pour le mot « forme » (parfois « figure » aussi) pour traduire prosôpon mais aussi
eidos ; la raison est cette fois-ci plus restreinte, car elle ne vise qu’à détourner la lecture de
toute méprise qui consisterait à « superposer » une identité visuelle en partant de cette
terminologie. Or, dans ce contexte, il s’agit précisément de se défaire de toute emprise
visuelle induite par cette terminologie.
Anca Vasiliu
EIKÔN ET LA PENSÉE TRINITAIRE : PRÉMISSES THÉORIQUES
2
Nota bene. Dans cette note introductive nous nous sommes volontairement
restreints à la perspective théorique des enjeux théologiques auxquels participe l’image
et qui sont décisifs dans la mise en place de la future notion, quasi lexicalisée, d’image
divine, appelée icône dans le monde byzantin. Les références textuelles anciennes et les
appuis modernes de ces propos se trouvent dans nombre de nos publications dont je
me permets de citer les plus récentes : A. Vasiliu, Eikôn. L’image dans le discours des
trois Cappadociens (Paris : Presses universitaires de France, 2010) ; Id., « L’argument de
l’image dans la défense de la consubstantialité par Marius Victorinus », Les Études philo-
sophiques, 101 (2012), p. 191‑216 ; Id., Images de soi dans l’antiquité tardive, Paris, Vrin,
2012 (chap. III et IV, en particulier les p. 194‑212 et 229‑259) ; Id., « Relation absolue
et relation relative : la Trinité selon Marius Victorinus et Basile de Césarée », Quaestio,
13 (2014), p. 73‑101 ; Id., « Hupostasis ou le fondement de la manifestation : Plotin, Por-
phyre, Marius Victorinus, Basile de Césarée », Philosophie, 127 (2015), p. 23‑47. Cette
introduction représente une synthèse des positions défendues dans ces publications.
Kristina Mitalaitė
1
Sur la légende et ses aspects politiques, voir C. Sode, Jerusalem-Konstanti-
nopel-Rom : die Viten des Michael Synkellos und der Brüder Theodoros und Theophanes
Graptoi (Stuttgart : F. Steiner, 2001) et M.-F. Auzépy, « De la Palestine à Constantinople
(viiie‑ixe siècles) : Etienne le Sabaïte et Jean Damascène », dans idem, L’histoire des ico-
noclastes, Bilans de recherche, 2 (Paris : Association des Amis du Centre d’Histoire et
Civilisation de Byzance, 2007), p. 221‑257 (245 sq.).
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 23-32
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Kristina Mitalaitė
2
Actes du colloque international Nicée II, tenu au Collège de France, Paris, les 2, 3,
4 Octobre 1986, éd. par F. Bœspflug et N. Lossky (Paris : Éd. du Cerf, 1987).
3
Sur l’héritage patrisitque chez les Carolingiens, cf. W. Otten, « The Texture of
Tradition : the Role of the Church Fathers in Carolingian Tradition », dans The Recep-
tion of the Church Fathers in the West : From the Carolingians to the Maurists, éd. par
I. Bakus, 2 vol. (Leiden, New York, Cologne : E. J. Brill, 1997), i, p. 3‑50 (bibliographie
sur la question : p. 44‑50).
4
Cf. notre article dans ce volume.
5
Voir l’article sur cette question de D. Ianiro dans ce volume. Je me permets d’en-
voyer également à mon étude : Philosophie et théologie de l’image dans les Libri Carolini,
Colletion des Études Augustiniennes, Série Moyen Âge et Temps Modernes, 43 (Paris :
les Études augustiniennes, 2007). Les deux études proposent une bibliographie complète
sur la question.
IMAGO ET LA PENSÉE LATINE DE L’IMAGE
6
Raban Maur, In honorem sanctae cruces, éd. par M. Perrin, CCCM 100 (Turnout :
Brepols, 1997). Sur l’iconographie de cette œuvre : idem., L’iconographie de la Gloire à la
sainte croix de Raban Maur, Répertoire iconographique de la littérature du Moyen Âge,
1 (Turnhout : Brepols, 2009). J’insiste ici sur les commentaires : Raban en a proposé deux
versions qui doivent être considérées comme faisant partie de la controverse sur les images.
Kristina Mitalaitė
7
Dungal a rédigé son traité contre Claude après 827 : Responsa contra Claudium :
A Controversy on Holy Images, éd., trad. et comm. par P. Zanna, Per Verba, Testi Me-
diolatini con traduzione, 17 (Florence : Edizioni del Galluzzo, 2002). Jonas d’Orléans a
redigé le sien après 840 : De cultu imaginum, PL, 106, col. 305‑388. Nous préparons la
réédition et la traduction en français de ce dernier.
8
Cf. l’article de F. Paparella dans ce volume.
9
Sur cette question – l’art comme un argument théologique – voir le volume
d’un recueil d’articles : The Mind’s Eye : Art and Theological Argument in the Middle
Ages, éd. par J. F. Hamburger et A.-M. Bouché (Princeton : Departement of Art and
Archaeology, 2006). Cf. en particulier J. F. Hamburger, « The Place of Theology in
Medieval Art History : Problems, Positions, Possibilities », p. 11‑31 ; K. F. Morrison,
« Anthropology and the Use of Religious Images in the Opus Caroli Regis (Libri Caroli-
ni) », p. 32‑45 ; C. Chazelle, « Christ and the Vision of God : the Biblical Diagrams of
Codex Amiatinus », p. 84‑111 ; C. Heck, « Raban Maur, Bernard de Clairvaux, Bona-
venture : expression de l’espace et topographie spirituelle dans les images médiévales »,
p. 112‑132 ; B. McGinn, « Theologians as Trinitarian Iconographers », p. 186‑207 et les
autres.
10
B. McGinn (« Theologians as Trinitarian Iconographers », dans The Mind’s
Eye…, p. 186‑207 (p. 188)) résume la théologie visuelle d’Hildegarde ainsi : « Hilde-
gard’s theology is as much visual as it is verbal – neither side can be neglected in trying
to gain an understanding of her teaching. In the case of Hildegard, as with the other
figures […] art does not so much illustrate theology in the sense of being a secondary
adjunct to it ; it is a necessary expression or manifestation of theological insight itself.
Image is not just illustration, it is argument ».
IMAGO ET LA PENSÉE LATINE DE L’IMAGE
11
Sur les figurae de Gioacchimo di Fiore : B. McGinn, « Theologians as Trinitarian
Iconographers », dans The Mind’s Eye…, p. 192‑195, et l’article de M. Bettetini dans ce
volume.
12
Il serait impossible de donner même une brève bibliographie sur cette ques-
tion. Je mentionne deux publications récentes dont les auteurs envisagent l’image latine
et son héritage dans la perspective envisagée dans cette introduction : H. Belting, La
vraie image : croire les images ?, traduit de l’allemand par J. Torrent, coll. « Le temps des
images » (Paris : Gallimard, 2007) ; G. Didi-Huberman, L’image ouverte : motifs de l’In-
carnation dans les arts visuels, coll. « Le temps des images » (Paris : Gallimard, 2007). J’ai
largement discuté ces deux monographies ainsi que plusieurs autres dans « Bulletin de
l’histoire de l’image dans l’art et la pensée chrétienne », Revue des sciences théologiques et
philosophiques, 93/3 (2009), p. 601‑657.
Kristina Mitalaitė
13
Cf. mon article dans ce volume.
IMAGO ET LA PENSÉE LATINE DE L’IMAGE
14
Le destin des images (Paris : La Fabrique éditions, 2003), p. 9‑16.
15
J. Rancière, Le destin…, p. 11.
16
Par exemple le livre de Ch. Schönborn (L’icône du Christ : fondements théolo-
giques (Paris : Ed. du Cerf, 1986)), réédité à quatre reprises, a eu une immense influence
sur cette lecture de l’icône.
17
L’anthropologie perçoit l’image matérielle par rapport à son médium, le corps,
et ceci dans la perspective historique ou encore ethnographique. J.-C. Schmitt (Le corps
des images : essais sur la culture visuelle au Moyen Âge (Paris : Gallimard, 2002), p. 26)
résume cette relation qui est devenue petit-à-petit viscérale entre le corps de l’image et
son prototype divin : « On comprend dès lors pourquoi tant d’images du Christ, de la
Vierge, des saints furent pourvues de reliques, scellées dans la tête ou dans le ventre de
certaines images : s’il importait de renforcer leur pouvoir miraculeux en les faisant béné-
ficier des vertus prêtées de longue date aux reliques et à leur culte, peut-être s’agissait-il
avant tout d’assurer pleinement la présence corporelle de ces personnes célestes parmi
les hommes. Dès lors, tout un ensemble d’interactions, faites de gestes, de mots d’ex-
Kristina Mitalaitė
périence visionnaires, pouvait s’établir entre les hommes et ces image-corps, présences
visibles et charnelles de l’invisible. » Mise en italique est par l’auteur.
18
La chambre claire : note sur la photographie (Paris : Cahiers du Cinéma, Galli-
mard, Seuil, 1980).
19
La chambre claire…, p. 22.
20
Jean-Luc Nancy saisit également l’image comme un instrument blessant, qui dé-
chire l’« intimité fermée » et l’« immanence non déclose ». Le philosophe va jusqu’à la
situer au « bord de la cruauté » : Au fond des images (Paris : Galilée, 2003), p. 52‑56.
IMAGO ET LA PENSÉE LATINE DE L’IMAGE
Kristina Mitalaitė
GRECS, SYRIAQUES ET
BYZANTINS
Anca Vasiliu
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 35-65
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Anca Vasiliu
Provenance, prééminence
En ses différentes variantes de dédoublement : eikôn eikonos, eidôlou ei‑
dôlon, eidos eidôn, katoptrou katoptron, imago imaginis, speculum speculi
− qui ne sont pas toutes strictement équivalentes mais comportent tou-
tefois une parenté forte par le choix d’un terme spécifique de la réflexi-
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
1
Les loci les plus connus pour la prééminence d’une forme sur toutes les formes :
De anima 432a1‑2, et pour la critique du principe supérieur à tous les principes ou
« principe des principes » : Métaphysique, 1075b26‑27.
Anca Vasiliu
2
Métaphysique, référence citée supra. Pro memoria : « Si d’ailleurs l’on veut qu’il
n’y ait pas d’autres êtres en dehors des êtres sensibles, il n’y aura ni premier principe, ni
ordre, ni génération, ni mouvements célestes, mais il y aura principe de principe à l’infini
(ἀλλ᾽ ἀεὶ τῆς ἀρχῆς ἀρχὴ), comme on le voit chez les théologiens et chez tous les phy-
siciens (ὥσπερ τοῖς θεολόγοις καὶ τοῖς φυσικοῖς πᾶσιν). » 1075b23‑28, La métaphysique,
trad. par J. Tricot, nouvelle éd., 2 vol. (Paris : J. Vrin, 1991), ii, p. 192.
3
Des expressions semblables, construites sur le dédoublement d’un terme et in-
duisant un rapport de prééminence ou de provenance à l’intérieur du « même », pour-
raient, davantage avec d’autres mots qu’image ou forme, préciser la signification donnée
à cette insertion implicite de l’hétérogène dans l’unité formellement homogène d’une
entité individuelle. Ainsi, pour définir l’éminence de l’intellect dont l’homme est le seul
de tous les vivants à bénéficier, intellect qui est de même nature que l’âme et néanmoins
différent, Philon d’Alexandrie utilise le syntagme : « sorte d’âme de l’âme » (ψυχῆς τινα
ψυχὴν), expression aussitôt explicitée par comparaison avec la pupille qui est « l’œil de
l’œil » (ὀφθαλμοῦ […] ὀφθαλμὸν εἶναι) ». Voici le passage entier de la fin du chapitre 66
du De opificio mundi : « Enfin, après tout le reste [des animaux que Dieu vient de créer],
comme cela a déjà été dit, il faisait l’homme, qu’il gratifiait d’un intellect éminent (τὸν
ἄνθρωπον, ᾧ νοῦν ἐξαίρετον ἐδωρεῖτο), sorte d’âme de l’âme (ψυχῆς τινα ψυχὴν), telle la
pupille dans l’œil (καθάπερ κόρην ἐν ὀφθαλμῷ) ; effectivement, ceux qui étudient avec plus
d’exactitude les propriétés des choses, disent que la pupille est l’œil de l’œil (ὀφθαλμοῦ
λέγουσιν ὀφθαλμὸν εἶναι). » Les œuvres de Philon d’Alexandrie, 36 vol. (Paris : Éd. du Cerf,
1961‑1992), i, trad. par R. Arnaldez (1961), p. 183, 185. Le passage précède l’exégèse de
la création de l’homme qui commence par la détermination de l’intellect de l’homme en
tant qu’image du Démiurge divin, puisque Philon vient d’affirmer que « la puissance ra-
tionnelle […] s’y ajoute de l’extérieur [survient], étant divine et éternelle (ἐπεισιέναι θεῖον
καὶ ἀίδιον ὄντα). » 67, ibid., p. 185. « L’image [il s’agit de εἰκόνα θεοῦ] s’applique ici à
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
l’intellect, le guide de l’âme (εἰκὼν λέλεκται κατὰ τὸν τῆς ψυχῆς ἡγεμόνα νοῦν). » 69, ibid.
p. 187. Voir infra pour d’autres occurrences de ce type d’expression de dédoublement
chez Aristote, Plotin, Porphyre, Victorinus, Grégoire de Nysse et Jean Scot.
Anca Vasiliu
4
C’est le cas de l’usage de l’expression eidolou eidôlon par Plotin (Ennéade II, 9
[33], 10) et sa « citation » par Porphyre (La Vie de Plotin, I). Voici le passage de Plotin :
« De cette illumination [de l’âme qui n’est pas descendue dans un corps mais qui est la
raison de la descente des autres âmes] est née une image dans la matière (ἐκεῖθεν εἴδωλον
ἐν τῇ ὕλῃ γεγονέναι). Puis ils [les Gnostiques, cités par Plotin] façonnent une image de
cette image (τοῦ εἰδώλου εἴδωλον πλάσαντες) qui traverse ici-bas ce qu’ils appellent la ma-
tière, ou la matérialité (ὑλότητος), quelque nom qu’ils veuillent lui donner, […] ; alors ils
engendrent l’être qu’ils appellent le démiurge ; […] puis ils font venir de lui le monde
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
Dépendance, autonomie
Entre deux items appelés du même nom en raison du partage de la même
condition s’établit donc un rapport qui qualifie ces deux items à partir de
leur condition commune tout en les distinguant à partir de cette même
condition. L’un serait ainsi déterminé par l’autre dans sa condition,
simultanément propre et commune. En allant un peu vite en besogne,
on a qualifié de dédoublement ce rapport. Pourtant, étant donné que la
condition qui en ressort n’est pas celle d’une ousia commune, comme
dans le cas du genre ou de l’espèce, ousia qui se verrait ainsi constituer
d’emblée la réalité entière de plusieurs identités, étant donnée donc qu’il
ne s’agit pas d’une ousia unique et multiple à la fois, ni même du partage
d’une qualité commune, mais bien d’une condition signifiée par la no-
tion d’image, étant donné qu’image signifie donc une condition (voire
une disposition) mais non une qualité ou une substance, la définition
de ce rapport comme dédoublement ne semble pas tout à fait justifiée.
L’image n’est pas une « chose » mais la condition d’appréhension de
la chose ainsi déterminée : image de… (quelque chose, i. e. le référent de
l’image) ou image pour… ou au lieu de… (la chose à laquelle se substi-
tue l’image). Mais que signifie alors le dédoublement d’une condition
imposée à un objet considéré lui-même à partir du second degré de ré-
alité d’un autre objet ? Le sens obvie, prenant appui sur l’exemple des
jusqu’aux dernières images (τὸν κόσμον παρ᾽ αὐτοῦ ἄγουσιν ἐπ᾽ εἰδώλων / παρ᾽ αὐτοῦ
ἕλκουσιν ἐπ᾽ ἔσχατα εἰδώλων), afin d’injurier avec violence le démiurge qui les a dessi-
nés (γράψας). » Ennéades II, éd. et trad. par E. Bréhier (Paris : les Belles lettres, 1924),
p. 126.25‑27 (traduction modifiée). J’utilise l’édition de P. Henry et H.-R. Schwyzer :
Plotini opera, Museum Lessianum series philosophica, 33‑34, 2 vol. (Paris : Desclée de
Brouwer ; Bruxelles : l’Éd. universelle, 1951‑1959), i, p. 239‑240. Une analyse des contra-
dictions lexicales et théoriques entre ce passage et sa « citation » par Porphyre, dans
A. Vasiliu, Images de soi dans l’Antiquité tardive (Paris : J. Vrin, 2012), p. 185‑194, analyse
que je ne reprends pas ici.
Anca Vasiliu
5
Hormis le Timée qui met en œuvre à l’échelle du cosmos cet acte de création
double, du monde et de son image-paradigme, le Sophiste est le dialogue platonicien le
plus éclairant à la fois pour le débat théorique sur le dédoublement par image et tech-
niques de reproduction (εἴδωλον, εἰδωλοποιηκὴ, Sophiste 266d3‑4), et pour la question
de la « réalité seconde » d’une image (εἰκὼν ὄντως, 240b10) ou d’un faux (τὸ ψεῦδος
ὄντως ὂν, 266e1). Sur ces questions, les passages les plus importants du Sophiste sont ceux
consacrés aux définitions de l’image (239d-240b) et ceux de la division et du dédouble-
ment de la réalité entre les choses œuvrées (ἔργα) et l’image de chaque chose existante
(εἴδωλον ἑκάστῳ), dédoublement conséquent aux actes de production divine et humaine
(266a sq). Dans la partie « divine » de la production des images sont citées les images qui
se produisent naturellement (comme les ombres ou les reflets) ou qui s’autoproduisent
(φαντάσματα αὐτοφυῆ, 266c1).
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
laire » 6) qu’une image de l’image ne pourrait en effet jouir que d’un sort
encore plus mauvais que celui d’une image première, l’image tout court,
l’image sensible que Platon désigne le plus souvent sous le vocable eidôlon.
Rien n’interdit par conséquent de renverser la lecture la plus courante
de l’expression, surtout si un autre usage des expressions « redondantes »
apparaît aussi dans les textes anciens, discréditant à bon escient la ten-
dance tenace d’y voir la formulation du dernier degré d’une procession.
En acceptant de quitter cette ornière, on pourrait alors y voir la possibilité
de substituer au « même » un autre « même » qui partage la condition
d’image mais ne dépend pas nécessairement du premier de la même ma-
nière que le premier terme dépend lui-même d’un terme antérieur, tels
l’ombre ou le reflet dépendants d’un corps qui projette son ombre ou
qui se reflète dans l’eau. Une image de l’image n’est pas nécessairement
moins image que celle dont elle serait l’image, mais pourrait au contraire
abstraire de l’image première d’une chose son image essentielle. À la dif-
férence de l’ombre et du reflet qui, par nature, ne sont pas détachables de
ce dont ils proviennent, et qui ne sauraient pas subsister en l’absence du
corps qui les produit (si un corps disparaît, son ombre disparaît aussi),
leur image de second degré affiche un lien, appelé similitude, mais de-
meure néanmoins séparée, autonome à l’égard du paradigme originel 7.
Sans jouer le rôle d’une forme des formes ni se substituer à un principe
de la similitude, cette image, à la fois ressemblante et essentiellement au-
tonome à l’égard de son modèle, pourrait même montrer un surcroît de
visibilité par rapport à l’image qui vient en premier, l’image naturelle ou
la copie directe, le reflet ou l’ombre de la chose initiale, supposée absente
du champ de la vision. Ainsi, le dessin d’une ombre peut être plus précis
6
Expression empruntée à J. Pépin qui l’utilise de nombreuses fois dans Théologie
cosmique et théologie chrétienne (Paris : Presses universitaires de France, 1964).
7
Rappelons deux exemples paradigmatiques de détachement ou de décrochement
entre l’ombre et ce qui produit l’ombre. Dans la « caverne » de la République les pri-
sonniers ignorent à la fois les objets et le dispositif qui leur permet de voir les ombres,
donc ne savent pas qu’ils ont affaire à des ombres tant que les ombres sont pour eux
« détachées » de tout lien causal avec ce qui les produit ; ce n’est que la saisie de la cause
(en l’occurrence, la connaissance du dispositif de production) qui permet de qualifier
d’ombre les choses qui étaient perçues. Le potier Butadès, qui passe pour l’inventeur
de la statuaire selon Pline l’Ancien, réalise une copie en glaise d’après l’ombre dessinée
par sa fille sur le mur sur lequel cette ombre se projetait quand son amant était avec elle.
Dans les deux cas, l’ombre, une fois « détachée » de son porteur ou de son dispositif de
production, est considérée comme quelque chose d’autre qu’une image : elle devient, en
tant qu’image autonome, la « réalité » de perception (ou l’expression du sensible) dans
l’exemple platonicien, et elle est censée devenir portrait modelé et donc « substitut » ou
« double » de l’individu dans l’histoire que raconte Pline l’Ancien (Histoire naturelle,
Livre 35) sur les origines de la statuaire en Grèce.
Anca Vasiliu
8
« Mais indiquons d’abord qu’il y a deux sortes de ressemblance (ὁμοίωσις διττὴ) :
la ressemblance qui exige un élément identique (ταὐτὸν) dans les êtres semblables ; elle
existe entre les êtres dont la ressemblance est réciproque parce qu’ils tirent leur ressem-
blance du même principe ; la seconde sorte de ressemblance existe entre deux choses
dont l’une est devenue semblable à une autre, qui est elle-même première (πρῶτον) et
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
dont on ne peut dire par réciprocité qu’elle est semblable (οὐκ ἀντιστρέφον πρὸς ἐκεῖνο
οὐδὲ ὅμοιον αὐτοῦ λεγόμενον) ; ce second type de ressemblance n’exige pas la présence
d’une espèce identique (ταὐτὸν εἶδος) dans les deux, mais plutôt d’une [espèce] différente
(ἕτερον), puisque la ressemblance s’est opérée de la deuxième manière (κατὰ τὸν ἕτερον
τρόπον ὡμοίωται). » Ennéades, I, 2 [19], 2, éd., trad. par É. Bréhier, vol. 1 (Paris : les Belles
lettres, 1924), p. 53.4‑10 (traduction modifiée) ; éd. de P. Henry et H.-R. Schwyzer : Plo‑
tini Opera…, p. 65. Même si Plotin n’utilise pas ici l’expression elle-même, « image de
l’image », la description des deux espèces de ressemblance l’évoque en termes suffisam-
ment clairs.
Anca Vasiliu
9
De anima, 429b5‑10 et Métaphysique, 1072b19‑25, 1074b34‑35 et 1075a1‑3.
Ces textes sont bien connus ; rappelons, pour les besoins de la démonstration, seulement
la première des références citées, un passage extrait du De anima : « La faculté sensitive,
en effet, n’est pas indépendante d’un organe corporel, tandis que l’intellect est séparé. –
Lorsque celui-ci est devenu chacun de ses objets (ἕκαστα γένηται) au sens précis où l’on
est dit savant, et cela en acte (ὡς ὁ ἐπιστήμων λέγεται ὁ κατ᾽ ενέργειαν) – ce qui arrive
lorsqu’il peut passer à l’acte de lui-même (ἐνεργεῖν δι᾽ αὐτοῦ) –, il demeure même alors,
en puissance à un certain égard, non pas toutefois de la même manière qu’avant d’avoir
appris ou d’avoir trouvé. Et il peut alors se penser lui-même (αὐτὸς δὲ αὐτὸν τότε δύναται
νοεῖν). » 429b5‑10, éd. par A. Jannone, trad. E. Barbotin (Paris : les Belles Lettres, 1989),
p. 80.
10
De anima, 429b7‑8.
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
Anca Vasiliu
11
Dans Quis rerum divinarum heres sit, 231 [Sur Gn 15, 1‑18], Les œuvres de Phi‑
lon d’Alexandrie…, xv, trad. par M. Harl (1966), p. 278‑279. On trouve aussi d’autres
occurrences et d’autres variantes de ce type d’expression structurées sur le dédoublement
de l’image mais avec un décalage lexical entre deux sortes d’images mettant en place la
tension d’une réciprocité et d’une réflexivité entre les deux. Voici un autre exemple de
même ordre : κατ᾽ εἰκόνα δὲ τετυπῶσθει θεοῦ (« [l’homme céleste] frappé à l’image de
Dieu »), dans Legum allegoriae I‑III, 31 (Les œuvres de Philon d’Alexandrie… ii, trad. par
C. Mondésert (1962), p. 54‑55).
12
La référence est celle des miroirs antiques dans lesquels le reflet s’imprime, « se
prend » à proprement parler, dans la surface de métal.
13
De anima, 430a1‑2. Dans ce contexte Aristote fait peut-être allusion aussi à
un passage du Philèbe (39a sq) où Platon définit la mémoire par la rencontre entre les
sensations et les réflexions, et compare l’âme avec un livre à la réalisation duquel coo-
pèrent simultanément un écrivain et un peintre, les images de ce dernier étant celles qui
sont pensées et formulées, non celles fournies par la vision immédiate et les autres sen-
sations (39b9-c2). Sur l’héritage platonico-aristotélicien du rapport empreinte-image
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
Anca Vasiliu
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
Anca Vasiliu
tellection cette opération n’a pas lieu, l’objet s’identifiant avec l’acte
lui-même de la pensée. Mais chez certains auteurs tardifs, comme Né-
mésius d’Émèse par exemple, la nécessité d’une telle séparation semble
balayée au profit d’une totale identification dans le cas de la vue avec les
facultés propres de l’âme. Par un prolongement quelque peu forcé de ce
qu’Aristote lui-même affirme dans De anima sur la possibilité d’avoir
deux objets sensibles, l’objet de la vision et le principe actif lui-même
de la vision, dans un acte d’auto-perception doublement adapté, Né-
mésius décrit l’acte de la faculté visuelle comme une connaissance par
laquelle l’âme se connaît elle-même dans tout ce qu’elle perçoit 17. On
pourrait dire, dans le sillage de cet exemple extrême d’interprétation où
l’héritage du Stagirite se fond dans la pensée de Plotin et de Porphyre,
que l’âme ne se voit pas elle-même comme si elle voyait quelque chose
(un objet ou un être) en s’objectivant ainsi elle-même, mais voit qu’elle
voit, connaît qu’elle connaît, saisit l’image de sa propre image, laquelle
n’est elle-même qu’une image partielle de l’intellect, en l’occurrence une
image de l’acte noétique 18.
De là résulte une inversion de la signification « platonicienne » que
revêt une lecture du rapport d’image à image sous le mode d’une produc-
tion : il ne s’agit pas d’un affaiblissement mais au contraire d’une forme
propre d’excellence, l’image seconde prenant le pas sur toutes les images
spécifiques et réalisant une sorte de synthèse qui conditionne l’accès à
la connaissance de l’objet dont elle est l’image de l’image ou l’image de
17
« Porphyre dit, dans son traité de la sensation, que la vision n’est produite ni
par un cône, ni par une image (οὔτε εἴδωλον), ni par toute autre chose, mais que l’âme,
mise en rapport avec les objets visibles, ne fait que se voir [se connaître] elle-même dans
ces objets (ἀλλὰ τὴν ψυχὴν αὐτὴν ἐντυγχάνουσαν τοῖς ὁρατοῖς ἐπιγινώσκειν ἑαυτὴν), qui
ne sont pas autre chose qu’elle, puisque l’âme renferme toutes choses, et que tout ce qui
est, n’est rien d’autre que l’âme contenant les étants de toute espèce (οὖσαν τὰ ὁρατὰ τῷ
τὴν ψυχὴν συνέχειν πάντα τὰ ὄντα). Or, puisqu’il prétend qu’il n’y a qu’une âme rai-
sonnable pour toutes choses (μίαν γὰρ βουλόμενος πάντων ψυχὴν τὴν λογικὴν), c’est avec
raison qu’il dit que l’âme se voit [connaît] en tout (γνωρίζει ἑαυτὴν ἐν πᾶσι τοῖς οὖσιν). »
Nemesii Emeseni De natura hominis, 7, 182, éd. par M. Morani (Leipzig : Teubner, 1987,
p. 59 ; je traduis). Pour la traduction anglaise voir : Nemesius. On the Nature of Man,
trans. by R. W. S harples and P. J. Van der Eijk (Liverpool : Liverpool University Press,
2008), p. 106.
18
On retrouve le mécanisme d’autoréflexion propre à la faculté visuelle, proces-
sus brièvement évoqué par Aristote dans De sensu 437a27‑29 (l’œil regardant un mi-
roir se voit lui-même en train de voir), analysé par Alexandre d’Aphrodise (In De sensu,
16.8‑16) comme possibilité qu’un acte porte sur deux choses simultanément, et repris
par Plotin (Ennéade IV, V [29], 8, 17‑23) dans l’analyse du rôle de la sympathie et de
la similitude dans la vision. Voir A. Vasiliu, « Toucher par la vue : Plotin en dialogue
avec Aristote sur la sensorialité de l’incorporel », Les Études philosophiques (4/2015),
p. 555‑580 (en particulier p. 570‑571).
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
toutes les images réunies. Comme dans l’analogie célèbre avec la main 19,
l’image apparaît tel un moyen universel qui permet l’accès à l’identité et
qui conditionne par conséquent la possibilité de connaître tout, y compris
ce qui ne comporte pas d’intelligibilité, comme le singulier ou la matière.
Son rôle à l’égard du singulier n’est pas seulement passif, puisqu’un être
singulier, étant lui-même réceptacle du sceau d’une image, peut agir avec
et à partir de l’image par abstraction ou par séparation et remonter au
principe de l’image, en l’occurrence à l’image du genre universel, afin de
connaître et de se connaître lui-même en même temps. Les deux situations
décrites plus haut, celle qui suppose comme paradigme un objet unique
et homogène et celle qui serait conséquente à la possibilité de l’objet-pa-
radigme de se séparer ou de se détacher de lui-même, se retrouvent d’ail-
leurs dans les deux types d’expressions doubles forgés par Aristote : dans
l’expression « la pensée est pensée de la pensée » (ἡ νόησις νοήσεως νόησις)
la réflexivité est inhérente à l’indivisibilité entre l’acte et l’objet de la pen-
sée 20, tandis que dans l’universalité de la forme (εἶδος εἰδῶν) 21, à laquelle est
analogue l’universalité de l’instrument, le détachement est non seulement
la condition de possibilité d’un acte conséquent à la réciprocité, mais dé-
termine aussi la nature immanente de l’objet sur lequel porte cet acte.
Or, si on prend en compte cette hypothèse de rapprochement des
expressions du dédoublement, il y aurait alors non seulement une inver-
sion du sens de la lecture du syntagme « image de l’image », mais aussi
une autre conséquence. Du parallélisme entre des formulations aristoté-
liciennes comme « instrument d’instruments » (ὄργανόν ἐστιν ὀργάνων)
ou « forme des formes » (εἶδος εἰδῶν) et le syntagme « image de l’image »
(εἰκὼν εἰκόνος ou εἰδώλου εἴδωλον) résulte que même lorsque la similitude,
la réflexivité et la puissance de l’acte (sensitif ou noétique) n’apparaissent
pas d’emblée dans le contexte de son usage, la signification de la rédupli-
cation par déclinaison n’est pas celle d’une dégradation et nécessairement
19
De anima, 432a1‑14. Citons ce passage car il en sera question aussi plus loin :
« Aussi l’âme est-elle analogue à la main : comme la main est instrument d’instruments
(ἡ χεὶρ ὄργανόν ἐστιν ὀργάνων), l’intellect à son tour est forme des formes (ὁ νοῦς δὲ εἶδος
εἰδῶν), tandis que le sens est forme des qualités sensibles (ἡ αἴσθησις εἶδος αἱσθητῶν).
Mais puisque nul objet, semble-t-il, ne peut exister en dehors des grandeurs sensibles,
c’est dans les formes sensibles que les intelligibles existent, tant ce qu’on appelle les
‘abstractions’ que toutes les qualités et attributs des objets sensibles. Voilà pourquoi si
l’on n’avait aucune sensation, on ne pourrait non plus rien apprendre ni comprendre ;
et d’autre part, lorsque l’on pense, la pensée s’accompagne nécessairement d’une image
(φάντασμά τι θεωρεῖν), car les images sont en un sens des sensations (τὰ γὰρ φαντάσματα
ὥσπερ αἰσθήματά ἐστι), sauf qu’elles sont sans matière. » Trad. par E. Barbotin…, p. 87.
20
Métaphysique, 1074b35.
21
De anima, 432a2.
Anca Vasiliu
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
22
Voir M. Harl, « Socrate-Silène. Les emplois métaphoriques d’ἄγαλμα et le verbe
ἀγαλματοφορέω : de Platon à Philon d’Alexandrie et aux Pères grecs », Semitica et classi‑
ca, 2 (2009), p. 51‑71. Je cite ici deux passages philoniens où le verbe agalmatophoreô ap-
paraît en lien étroit avec le terme eikôn et met en scène la signification d’« image divine »
assignée au terme agalma. Le premier passage cité correspond à la création de l’homme
noétique (Gn 1, 26), le second, à la création de l’homme corporel (Gn 2, 7). « L’image
s’applique ici à l’intellect, le guide de l’âme (εἰκὼν λέλεκται κατὰ τὸν τῆς ψυχῆς ἡγεμόνα
νοῦν). C’est en relation avec [pros ton], cet unique et universel [modèle] qu’a été copié [ra-
mené vers l’image, ap-eikonisthê], comme d’après un archétype, celui de chaque homme
particulier (πρὸς γὰρ ἕνα τὸν τῶν ὅλων ἐκεῖνον ὥς ἂν ἀρχέτυπον ὁ ἐν ἑκάστῳ τῶν κατὰ
μέρος ἀπεικονίσθη), [étant] dieu en quelque sorte (τρόπον τινὰ θεὸς ὢν) de qui le porte
(τοῦ φέροντος) et le tient comme une image divine (καὶ ἀγαλματοφοροῦντος αὐτὸν). »
De opificio mundi, 69, trad. par R. Arnaldez (légèrement modifiée)…, p. 186‑187. « […]
car c’est une demeure, un temple qu’il [Dieu] bâtissait pour l’âme rationnelle (οἶκος
γάρ τις ἢ νεὼς ἱερὸς ἐτεκταίνετο ψυχῆς λογικῆς), la plus ressemblante à Dieu des images
divines, que l’homme devait porter en lui (ἣν ἔμελλεν ἀγαλματοφορήσειν ἀγαλμάτων τὸ
θεοειδέστατον). » Ibid., 137. D’autres occurrences tardo-antiques et patristiques du verbe
agalmatophoreô sont citées par M. Harl. Pour une analyse de ce vocabulaire et plus large-
ment des enjeux de l’image chez Philon d’Alexandrie dans ce contexte, voir A. Vasiliu,
« Penser Dieu : la condition de la réciprocité (Noétique et théologie rationnelle à partir
d’une page de Philon d’Alexandrie) », Phantasia, revue on-line de l’Université Saint-
Louis de Bruxelles, 1 (2015), http://popups.ulg.ac.be/0774‑7136/index.php?id=357
23
Ce terme tardif, exprimant la réception intime d’une réflexion d’image
(ἐνεικονίζω), apparaît chez Porphyre, dans le commentaire du Parménide, si ce texte
anonyme est bien de lui : τὶς ἰδιότης ὑποστάσεως ἐνεικονιζομένη […] τὴν ἁπλότητα τοῦ
ἑνὸς. Commentaire sur le Parménide de Platon, XI, 15‑23, éd. par P. Hadot, Porphyre et
Victorinus, 2 vol. (Paris : Études augustiniennes, 1968), ii, p. 100, ainsi que dans la Lettre
à Marcella : ἐμψύχῳ ἀγάλματι τῷ νῷ ἐνεικονισαμένου ἀγάλλοντα τοῦ θεοῦ (« la statue du
Dieu vivant dans la belle disposition de l’intellect dans lequel celle-ci se réfléchit »).
11, éd. et trad. par E. Des Places, avec un appendice d’A.-Ph. Segonds (Paris, les Belles
lettres, 1982), p. 112. Mais, à la différence du contexte néoplatonicien où la réflexion est
une forme de dégradation par l’individualisation hypostatique qui réfléchit la simpli-
cité de l’Un et permet à celui-ci d’être saisi, chez Basile de Césarée, qui utilise la même
expression dans la description des relations intra-trinitaires pour définir à la fois la com-
munauté de l’essence divine et l’individualisation par les actes propres des hypostases,
l’acte réflexif eneikonizô est réciproque et constitue précisément l’attestation de l’unité
et de l’égalité des hypostases dans la Trinité. « Car on n’additionne pas, en allant de l’un
au multiple (ἀφ᾽ ἑνὸς εἰς πλῆθος) [afin de réaliser une synthèse par les nombres : κατὰ
σύνθεσιν ἀριθμοῦμεν] ; on ne dit pas (οὐ […] λέγοντες) : un et deux et trois, ni : premier
Anca Vasiliu
et second et troisième. Car ‘Moi, Dieu, je suis le premier (πρῶτος) et je suis le dernier
(καὶ ἐγὼ μετὰ ταῦτα)’. Or, d’un second Dieu, on n’a pas encore, jusqu’à ce jour, entendu
parler. De fait, lorsqu’on vénère un Dieu de Dieu (Θεὸν γὰρ ἐκ Θεοῦ προσκυνοῦντες), on
confesse le [caractère] propre des hypostases (τὸ ἰδιάζον τῶν ὑποστάσεων ὁμολογοῦμεν) et
l’on reste fidèle à la doctrine de la Monarchie divine [à la doctrine du Principe unique]
sans éparpiller pour autant le mystère de Dieu [la théologie ou la science divine] en plu-
sieurs [morceaux] (εἰς πλῆθος ἀπεσχισμένον τὴν θεολογίαν μὴ σκεδαννύντες), parce qu’en
Dieu le Père et en Dieu le Monogène, on ne contemple pour ainsi dire qu’une seule
forme se réfléchissant dans la déité qui ne connaît pas de différence (διὰ τὸ μίαν ἐν Θεῷ
Πατρὶ καὶ Θεῷ Μονογενεῖ τὴν οἰονεὶ μορφὴν θεωρεῖσθαι, τῷ ἀπαραλλάκτῳ τῆς θεότητος
ἐνεικονιζομένην). » Basile de Césarée, Traité sur le Saint-Esprit, XVIII, 45 [149B-C],
trad. par B. Pruche, réimpression de la 2e éd., SC, 17 bis (Paris : Éd. du Cerf, 2002) (tra-
duction avec quelques modifications). Pour une analyse des occurrences porphyriennes :
M. Chase, « La subsistence néoplatonicienne, de Porphyre à Théodore de Raithu »,
Chôra, 7‑8 (2010), p. 37‑52, et M. Harl, « Socrate-Silène… », p. 62 ; pour un commen-
taire de l’usage de ce terme chez Basile : A. Vasiliu, Eikôn : l’image dans le discours des
trois Cappadociens (Paris : Presses universitaires de France, 2010), p. 202‑204.
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
statue (Timée, 37c6‑7 et 90c5). Le fait de porter en soi la statue d’un être
divin, à laquelle l’homme rend honneur en faisant montre de sa vénéra-
tion à l’égard de la divinité, correspond à un double acte, de réflexivité
et de science divine, car c’est ainsi que l’homme se connaît lui-même
et connaît en même temps ce qu’il n’est pas : il connaît son altérité ra-
dicale et reconnaît en même temps en celle-ci son propre et vénérable
modèle. Cette statue, située dans l’âme ou identifiée au noûs, apparaît
comme une sorte de « statue animée », qui vit et se meut, mais qui ne se
laisse pas identifier directement et doit s’accompagner d’un reflet pour
que l’homme qui la porte puisse s’en saisir et la rendre en quelque sorte
« visible », en vue de la contemplation de l’âme. La statue n’est pas iden-
tifiable ni visible d’ailleurs séparément, puisqu’elle n’est pas de forme hu-
maine mais constitue une image des « formes divines » dont la pensée
ou l’âme humaine donnerait l’image (le reflet ou l’eikôn) la plus ressem-
blante ou, plus précisément, la plus vraisemblable en tant que réceptacle
et dépositaire simultanément de la statue et de son reflet ou image.
En utilisant à plusieurs reprises le verbe agalmatophorein et en jouant
sur la terminologie des formes (ἀνθρωποειδῆ […] ἀνδριάντα πλάττειν ; […]
άγαλματοφορήσειν ἀγαλμάτων τὸ θεοειδέστατον), Philon d’Alexandrie re-
prend à son compte le thème platonicien et l’utilise dans l’exégèse du pre-
mier livre de la Genèse 24. L’image dont l’image d’un homme porte la res-
semblance, et par laquelle un homme s’identifie aussi comme homme, est
une « statue », synonyme d’image divine, qui se reflète dans l’intellect
et se confond avec son acte, le « penser » de la pensée. La séparation de
toute nécessité d’un organe propre rend l’intellection identique à son ou‑
sia, à son identité essentielle, que Philon traduit en termes de « création
première », création d’un être noétique pur, dépourvu de corps 25. L’être
24
De opificio mundi…, 136‑137, p. 232‑233 ; outre les passages cités, on trouve plu-
sieurs occurrences ainsi que des gloses sur ce vocabulaire dans les chapitres 69, 134 et
139. D’autres occurrences dans d’autres textes philoniens sont signalées et commentées
par M. Harl, « Socrate-Silène… ». Voir aussi les expressions de dédoublement (« âme
de l’âme » ou « l’œil de l’œil », De opificio mundi, 66, citées supra no 3) qui préparent
l’exégèse de la création de l’homme « à l’image et à la ressemblance ».
25
Rappelons le contexte du passage cité plus haut (no 22) : « Après tous les autres
êtres, comme il a été dit, Moïse déclare que l’homme fut créé à l’image et à la ressemblance
de Dieu (cf. Gn 1, 26). C’est tout à fait bien dit (πάνυ καλῶς), car il n’y a rien de sorti [né]
de la terre (οὐδὲν γηγενὲς) qui ressemble plus à Dieu que l’homme (ἐμφερέστερον […]
ἀνθρώπου θεῷ). Mais cette ressemblance (δ᾽ἐμφέρειαν), que personne ne se la représente
(μηδεὶς εἰκαζέτω) par les traits du corps (σώματος χαρακτῆρι) : Dieu n’a pas la figure hu-
maine, et le corps humain n’a pas la figure de Dieu [ni Dieu anthropomorphe : οὔτε γὰρ
ἀνθρωπόμορφος ὁ θεὸς, ni corps d’homme déiforme : οὔτε θεοειδὲς τὸ ἀνθρώπειον σῶμα].
L’image s’applique ici à l’intellect […]. » De opificio mundi…, 69, p. 186‑187. Pour la
Anca Vasiliu
distinction entre cette image strictement noétique de Dieu dans l’homme et la qualifi-
cation de l’homme en tant qu’image sensible « belle » et « bonne », voici deux autres
passages philoniens qui auront des échos significatifs dans les commentaires patristiques
et théologiques consacrés à ces épisodes de la Genèse : « Moïse dit ensuite : ‘Dieu façon-
na l’homme en prenant une motte de terre et il souffla sur son visage un souffle de vie’
(Gn 2, 7). Il montre par là très clairement (ἐναργέστατα) la différence de tout au tout
(διαφορὰ παμμεγέθης) qui existe entre l’homme qui vient d’être façonné ici (πλασθέντος
ἀνθρώπου) et celui qui avait été précédemment engendré à l’image de Dieu (κατὰ τὴν
εἰκόνα θεοῦ γεγονότος πρότερον). Celui-ci, qui a été façonné, est sensible (αἰσθητὸς) ; il
participe désormais à la qualité (μετέχων ποιότητος) ; il est composé (συνεστὼς) de corps
et d’âme ; il est homme ou femme, mortel par nature. Celui-là, fait à l’image [de Dieu]
(κατὰ τὴν εἰκόνα), c’est une idée (ἰδέα τις), un genre (γένος) ou un sceau (σφραγὶς) ; il
est intelligible (νοητὸς), incorporel (ἀσώματος), ni mâle ni femelle, incorruptible de na-
ture (ἄφθαρτος φύσει). » De opificio mundi…, 134, p. 230‑231. « Mais il est évident qu’il
[l’homme fait de corps et de pneuma] était aussi le meilleur en son âme. Car Dieu semble
ne s’être servi pour le fabriquer d’aucun autre modèle pris dans le devenir (ἐν γενέσει),
mais uniquement, comme je le disais, de son propre Logos (τῷ ἑαυτοῦ λόγῳ). Aussi Moïse
dit-il que c’est une représentation [une reproduction iconique et une copie : ἀπεικόνισμα
καὶ μίμημα] de ce Logos qu’est devenu l’homme vivifié par le souffle au visage (εἰς τὸ
πρόσωπον) ; là est le lieu des sensations (τῶν αἰσθήσεων ὁ τόπος) dont le Créateur a animé
le corps ; ayant établi la royauté de la raison [du raisonnement] (βασιλέα λογισμὸν), il
donne à la partie rectrice de l’âme (τῷ ἡγεμονικῷ) d’être assistée par elles dans la per-
ception des couleurs, des sons, des saveurs, des odeurs et des autres qualités semblables,
qu’elle n’était pas capable de saisir par elle-même sans la sensation. Mais il est nécessaire
que d’un modèle de toute beauté (παγκάλου παραδείγματος), la copie soit de toute beauté
(πάγκαλον εἶναι τὸ μίμημα). Or le Logos de Dieu vaut mieux que la beauté même, qui est
beauté dans la nature (φύσει κάλλος), car il n’est pas orné par la beauté, étant lui-même,
pour dire vrai, la parure de cette beauté et la plus belle (οὐ κοσμούμενος κάλλει, κόσμος δ᾽
αὐτός, […] εὐπρεπέστατος ἐκείνου). » De opificio…, 139, p. 234‑235.
26
Quis rerum…, occurrence déjà citée et commentée supra.
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
27
Basile de Césarée, Traité sur le Saint-Esprit…, XVIII, 45 (149B), p. 406 ; le pas-
sage entier est cité supra, no 23.
Anca Vasiliu
28
Bien que l’analyse porte sur d’autres auteurs que ceux évoqués ici, et concerne
prioritairement des textes théologiques et sophistiques décrivant le pouvoir des images
de culte, les articles de J. A. Francis (« Seeing God(s) : Images and the Divine in Pagan
and Christian Thought in the Second to Fourth Centuries ad », Studia Patristica, 59,
vol. 7 (2011), p. 5‑9) et de J. Elsner (« Image and Ritual : Reflections on the Greco-Ro-
man Appreciation of Art », Classical Quaterly 46 (1996), p. 515‑531) montrent eux
aussi, avec de nombreux exemples, le rôle actif des images qui produisent elles-mêmes le
caractère divin des lieux qu’elles consacrent, au sens propre du terme, en les transformant
en lieux de culte. Mais les recherches (de nature anthropologique) des deux chercheurs
cités sont focalisées sur le rôle de l’image dans les cultes et le rituel, tandis que notre
étude est orientée vers le statut noétique et la fonction philosophique de l’image dite
« divine ». Il est cependant évident que dans les deux approches un problème commun
est posé, à savoir le mode par lequel un dieu se manifeste visuellement tout en attestant
la divinité « vraie » de l’image ou de la statue qui le représente ou qui se substitue à la
présence du dieu lui-même. Ce problème théorique est désigné par Elsner comme « vi-
sual theology » (ibid., p. 518). Voir aussi P. C. Finney, The Invisible God : The Earliest
Christians on Art (Oxford : Oxford University Press, 1994) (en particulier les chapitres 5
et 7).
29
Lettre à Marcella…, 11, p. 112. Voir aussi supra no 23. Porphyre revient dans le
chapitre 19 (p. 117) sur la « métaphore » de l’intellect-temple, appelé νεὼς cette fois-ci.
Si hieron peut signifier seulement un lieu sacré, neôs (naos) indique clairement un édifice
faisant fonction de temple.
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
30
Lettre à Marcella… La traduction de l’expression ex-ousian par « liberté » ap-
partient à Des Places.
31
Lettre à Marcella…, début du chapitre 13, p. 113. On peut y voir soit une des-
cription « réaliste » à proprement parler, telle la statue du dieu cachée dans le temple
(neôs), invisible directement, et dont la présence est attestée par la mise en scène d’un
reflet aquatique (ce type de dispositif scénographique est attesté par des textes décrivant
des œuvres et des lieux, chez Philostrate par ex.) ; soit considérer qu’il s’agit d’un moyen
de signifier le caractère sacré caché d’un lieu physique que seule la présence d’une statue
identifie comme lieu sacré (hieron).
32
Lettre à Marcella…, fin du chapitre 21, p. 118.
Anca Vasiliu
naît ainsi une identité, présentée encore sous le mode d’une répétition
par déclinaison : « l’homme serait Dieu dès lors qu’il est digne de Dieu
(ἄξιος ἄνθρωπος θεοῦ θεὸς ἄν εἴη) » 33. L’identité ne serait toutefois pas
ousiologique, mais la conséquence nécessaire de la réciprocité et de la ré-
flexivité de la condition commune d’image donnée par la statue-image
(agalma-eikôn) qui se tient dans l’homme et qui, essentiellement, n’est
pas l’homme mais la projection ou l’impression de Dieu dans celui-ci.
La conséquence est elle-même double : l’image ou l’empreinte produit
d’une part une hétérogénéité, l’image apparaissant donc comme une
« réalité » et non comme un aspect, et de l’autre, l’image constitue une
condition de possibilité pour la connaissance par la réciprocité consé-
quente à la séparation du noûs, l’image ayant dans ce cas à la fois une
fonction et un statut noétique. Nous avons donc affaire d’une part à la
réalité d’image de la réalité divine elle-même (agalma), et de l’autre, à
l’acte de penser comme étant lui-même l’image de la réalité divine et un
moyen de saisir en même temps cette image en se reportant à sa propre
condition réflexive (eneikonizô).
ὁμοίωσις θεῷ du Théétète, 176b1. Voir aussi les notes complémentaires au texte, dues à
A.-Ph. Segonds (ibid., p. 159). Certaines des assertions porphyriennes seraient en réalité
des « citations » de la tradition dite « pythagoricienne ».
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
34
Voici toutefois deux autres exemples d’usage de l’expression, particulièrement
éclairants, l’un grec, emprunté à Grégoire de Nysse, l’autre latin, dû à Marius Victori-
nus. Comme il n’y a pas de filiation entre ces deux auteurs de la seconde moitié du ive
siècle, et que les deux utilisent le syntagme dans un contexte exégétique proche de ce-
lui de Philon, mais avec une argumentation bien différente, fondée sur une réception à
chaque fois spécifique de la tradition platonicienne, on peut, en les juxtaposant, prendre
ainsi la mesure de l’étendue et de la richesse des interprétations qui se servent de cette
expression dans leurs argumentations sans la moindre répétition. Chez Grégoire la for-
mule est intégrée à une présentation analogique des facultés de l’homme et de la théorie
des formes (le Bien et le Beau) auxquelles l’homme a ou non accès. Victorinus, dans
le contexte d’une exégèse de l’Incarnation, présente le rapport entre le Père et le Fils
sous le modèle des actes conjoints de l’âme et du noûs, et des conditions communes de
la vie et de la vision, la principale fonction de cette dernière étant d’assurer le lien. Je
cite successivement ces deux auteurs du ive siècle en commençant avec Grégoire, au-
quel j’ajoute la traduction latine de Denys le Petit et celle de Jean Scot Erigène. « Si
donc l’un est réellement le Bien […], l’esprit reçoit sa beauté de la création à l’image
du Bien, et lui-même détient l’être du Beau ; et la nature, qui est par l’esprit, est comme
une image d’image (Εἰ οὖν ἓν μὲν κατὰ τὸν θεωρηθέντα λόγον τὸ ὄντως ἀγαθόν·ὁ δὲ νοῦς
τῷ κατ᾽ εἰκόνα τοῦ καλοῦ γεγενῆσθαι, καὶ αὐτὸς ἔχει τὸ καλὸς εἶναι·ἡ δὲ φύσις ἡ ὑπὸ τοῦ
νοῦ συνεχομένη, καθάπερ τις εἰκὼν εἰκόνος ἐστί·). D’où il suit que la partie matérielle de
notre être reçoit toute consistance et tout ordre de la nature qui la gouverne, mais que
sa séparation d’avec ce qui lui donne ordre et cohésion et sa rupture d’avec la tendance
naturelle qui l’unit au bien amènent sa dissolution et son retour vers le bas. » Grégoire
de Nysse, De hominis opificio, XII, 164A-B, trad. par J. Laplace, 2e éd., SC, 6 (Paris : Éd.
du Cerf, 2002), p. 132 (traduction retouchée). Dans la traduction par Jean Scot Eri-
gène du traité de Grégoire l’expression καθάπερ τις εἰκὼν εἰκόνος ἐστὶ est rendue : ueluti
Anca Vasiliu
quaedam imago imaginis est (« Le ‘De imagine’… », p. 225.7‑10), tandis que Denys le
Petit avait traduit : quasi quaedam imago esse probatur imaginis (Gregorii Nyssensis de
creatione hominis, PL, 67, col. 365A). Dans d’autres passages du même texte (PG, 44,
XII, col. 161C-D), Grégoire utilise l’expression « miroir de miroir » (οἷόν τι κατόπτρου
κάτοπτρον γινομένην), traduite par ueluti quoddam speculi speculum factam : ibid.), pour
désigner la nature administrée par l’esprit (οἰκονομουμένην ὑπ’ αὐτοῦ φύσιν ἔχεσθαι τοῦ
νοῦ λογιζόμεθα / administratam a se naturam habere animum arbitramur : ibid.). Quant
à Victorinus, il emploie l’expression imago imaginis dans une tentative de définition
noétique de la Trinité : « Après que le mouvement circulaire s’est éveillé – je dis bien,
circulaire, puisque ce mouvement, partant d’un point, revient à ce même point (cyclicam
dico quod a σημείῳ in σημεῖον), c’est-à-dire partant du Père, revient au Père – lors de la
manifestation de ce mouvement, lors de la manifestation de la totalité du divin (in ap‑
parentia istius motionis et divinitatis universae), du Logos, du Fils, à ce moment-là, par la
volonté de Dieu, s’est réalisée une image (extitit iussione dei imago), ‘selon l’image et la
ressemblance de Dieu’, une image de l’image (imago imaginis), c’est-à-dire du Fils. Car
le Fils est image du Père, comme on l’a montré. Et la raison en est que le Fils est vie (Hos
autem est, quoniam filius vita est). L’âme a donc été créée comme image de la vie (Imago
igitur vitae, anima effecta est). Et l’âme, avec son Noûs propre, qui lui vient de celui qui
est le Noûs, est puissance de vie intellectuelle (potentia vitae intellectualis est) ; elle n’est
pas le Noûs lui-même, mais quand elle regarde vers le Noûs, elle est, pour ainsi dire, elle-
même le Noûs (non νοῦς est, ad νοῦν quidem respiciens quasi νοῦς est). Car là-bas, toute
vision est union (Visio enim ibi unitio est) […]. » Marius Victorinus, Adversus Arium…, I,
61, p. 376.1‑10-377. L’expression est d’ailleurs utilisée à plusieurs reprises par Victorinus
(par exemple ibid., I, A, 20, p. 236.1‑16). Sans devenir un véritable topos de la littérature
patristique, le syntagme « image de l’image » est relativement souvent employé dans ce
type d’argumentation. M. Harl (« Socrate-Silène… ») et J. Pépin (« L’épisode du por-
trait de Plotin (VP 1.4‑9) », dans Porphyre : La Vie de Plotin, Histoire des doctrines de
l’Antiquité classique, 16, 2 vol. (Paris : J. Vrin, 1982‑1992), ii (1992), p. 301‑334) citent
d’autres auteurs de la même période qui emploient les différentes variantes de cette ex-
pression de dédoublement de l’image ou du reflet katoptrique.
35
Le passage de Grégoire de Nysse cité supra constitue une illustration tardive de la
réception de ce lieu propre de la pensée platonicienne.
L’IMAGE DIVINE ET SON REFLET
Marilena Vlad
Introduction
Dans cette étude 1, nous voulons mettre en évidence la signification et la
dynamique de l’image chez Denys l’Aréopagite 2. En nous concentrant
sur le statut paradoxal de l’image dans sa relation à l’invisible, nous allons
souligner qu’il s’agit d’une pseudo-image, qui renverse le modèle de la res-
semblance visuelle et qui, finalement, nous fait voir Dieu sans le montrer,
tout en exerçant notre regard et en l’habituant à l’invisible. Nous voulons
identifier trois sens de l’image : le symbole, l’empreinte et la statue divine.
Nous montrerons que l’image divine nous apprend à retrouver l’invisible,
suivant un schéma qui se déploie en trois étapes, en étroite correspon-
dance avec les trois niveaux du déploiement de la réalité dans la perspec-
tive néoplatonicienne – la procession (πρόοδος), la manence (μονή) et la
conversion (ἐπιστροφή) – que Denys reprend à sa propre manière.
Ainsi, le symbole (σύμβολον) correspond à la procession de la réa-
lité à partir de Dieu ; l’acte de symboliser relève de la mise en diversité
de la présence de Dieu, qui se montre par toute la pluralité des choses
qu’il fait exister. L’empreinte (τύπος) correspond à la manence de Dieu
en toute chose, car elle représente un moment d’équilibre, d’identité et
de réciprocité entre Dieu et ses images. Les choses sont vues comme des
marques que Dieu imprime dans la réalité et qui sont à leur tour appli-
quées à Dieu. De la sorte, Dieu se laisse indiquer par les empreintes qu’il
imprime dans la réalité. Le troisième sens de l’image que nous allons
analyser – la statue divine (ἄγαλμα) – correspond à l’acte de la remontée
ou de la conversion vers Dieu, qui se réalise par la suppression de toute
1
Ce travail fait partie du projet PN-II-RU-PD-2012‑3-0004 financé par l’UE-
FISCDI.
2
Nous citons le texte grec suivant : De divinis nominibus, éd. par B. R. Suchla,
Corpus Dionysiacum 1, Patristische Texte und Studien, 33 (Berlin : W. de Gruyter, 1990)
et De coelesti hierarchia etc., éd. par G. Heil et A. M. Ritter, Corpus Dionysiacum 2, Patris-
tische Texte und Studien, 36 (Berlin : W. de Gruyter, 1991). Nous utilisons la traduction
de Maurice de Gandillac : Œuvres complètes du Pseudo-Denys l’Aréopagite (Paris : Aubier,
1943).
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 67-92
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Marilena Vlad
À l’image divine
Pour Denys, « les choses visibles sont des images des choses invisibles » 3
et « tout l’univers visible rend manifestes les mystères invisibles de
Dieu » 4. Toute visibilité entraîne une certaine invisibilité : l’image vi-
sible suggère quelque chose qui n’est pas manifestement présent dans
l’image même, de sorte que le sens ultime du visible, ce qu’il montre ef-
fectivement, est ce qui échappe à la vue. Toute image entretient par rap-
port à son modèle une relation équivoque : l’image montre le modèle,
précisément parce que le modèle même est absent de l’image et, donc, il
est invisible en tant que tel. L’image ne relève pas strictement du visible,
mais elle porte en soi plus qu’elle ne montre effectivement, car autre-
ment elle ne serait même pas image de quelque chose, mais seulement
une chose visible, sans aucune signification supplémentaire, sans aucun
rapport à un modèle montré. De la sorte, bien qu’il soit visible par sa
nature, le modèle est invisible au niveau de l’image et il peut être montré
précisément dans cette relative invisibilité. L’image visible montre l’in-
visible, elle l’indique, le suggère, mais elle garantit en même temps que la
chose suggérée reste invisible, car absente de l’image même.
Pourtant, chez Denys, l’enjeu n’est pas celui de parcourir l’espace du
visible, en passant d’une image à un modèle qui, absent de l’image, est
pourtant lui-même visible, une fois trouvé en tant que tel. Au contraire,
pour Denys l’enjeu est celui de passer des images – et finalement de toute
image possible, de toute chose visible – au modèle qui, en lui-même,
reste pour toujours invisible, sans jamais passer dans l’espace du visible,
3
Ἀληθῶς ἐμφανεῖς εἰκόνες εἰσὶ τὰ ὁρατὰ τῶν ἀοράτων. Epistula X, 1 [1117A], dans
Corpus Dionysiacum 2…, p. 208.9 ; trad. : Les noms divins…, p. 360 (traduction modifiée).
4
Καὶ αὐτὴ δὲ τοῦ φαινομένου παντὸς ἡ κοσμουργία τῶν ἀοράτων τοῦ θεοῦ
προβέβληται. Epistula IX, II [1108B], p. 198.15.199.
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
Marilena Vlad
des saintes écritures mènent les saints à la contemplation des images divines (τὰς θείας
εἰκόνας), ce qui n’implique pas non plus l’idée d’une image propre à Dieu.
10
De divinis nominibus…, IX, 6 [913C], p. 212.1.
11
De divinis nominibus…, IX, 7 [916A], p. 212. 9‑10. En ce sens, Willemien Otten
insiste sur le fait que l’idée de l’humanité comme image de Dieu suggère une certaine
relation entre Dieu et l’humanité, mais aussi une radicale différence qui les sépare, ce qui
conduit finalement Denys à la théologie négative : voir « In the Shadow of the Divine :
Negative Theology and Negative Anthropology in Augustine, Pseudo-Dionysius and
Eriugena », The Heythrop Journal, 40/4 (1990), p. 438‑455 (notamment p. 440‑443).
12
Καὶ ὅμοιος ὡς ὁμοίων καὶ ὁμοιότητος ὑποστάτης. De divinis nominibus, IX, 1
[909C], p. 208.3‑4 ; trad. dans Œuvres complètes…, p. 154 (traduction modifiée).
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
IX des Noms divins, Denys discute une série de noms qui correspondent
aux attributs analysés dans les hypothèses platoniciennes sur l’Un de la
deuxième partie du Parménide. Dieu est appelé grand et petit, le même
et l’autre, semblable et dissemblable, mouvement et repos. Pourtant, les
conclusions platoniciennes prennent en compte l’aspect réciproque de la
ressemblance et, en ce sens, « l’Un absolu » de la première aporie n’est
ni semblable ni dissemblable, tandis que « l’Un qui est », de la deuxième
hypothèse, est à la fois semblable et dissemblable 13. Par contre, chez
Denys, la ressemblance n’a pas le sens de la réciprocité : elle est seulement
une manière d’être que Dieu rend aux choses, une manière dont Dieu
manifeste sa présence dans la réalité. En conséquence, Dieu est loué à
la fois comme semblable et comme dissemblable, non pas dans le sens
où il serait semblable ou dissemblable à quelque chose, mais parce qu’il
est la ressemblance en soi, qui transcende la logique de la ressemblance
réciproque. Ainsi, Dieu est semblable, mais sans être semblable à quelque
chose, car rien ne lui ressemble. En outre, bien que toute chose soit à son
image et à sa ressemblance, Dieu est dissemblable, toujours en raison du
fait qu’il est le seul donateur – et jamais récepteur – de la ressemblance.
Plus précisément, cette ressemblance que Dieu donne aux choses a
le sens de la conversion (ἐπιστροφή) des choses vers Dieu, donc, c’est
une ressemblance qui va des choses vers Dieu 14. Dieu est appelé ressem-
blance, parce qu’il crée la ressemblance (ὁμοιότης) et il l’offre aux choses,
telle une capacité des choses à imiter Dieu et à se convertir vers lui. Entre
des choses du même rang, la ressemblance implique la réciprocité. Pour-
tant, cette ressemblance réciproque s’explique précisément par la ressem-
blance en soi (αὐτοομοιότης), que Dieu seul fait exister. Autrement dit, ce
que nous appelons ressemblance, au niveau des choses qui se ressemblent
réciproquement, n’est qu’une trace de la ressemblance divine, qui a le
rôle de rassembler les choses et de les unifier 15. Dieu est la ressemblance
en soi, qui reste pourtant dissemblable à toute autre chose. De la sorte, la
ressemblance divine ne fait que se superposer sur la dissemblance divine :
dire que Dieu est semblable – parce qu’il a crée la ressemblance en soi,
13
Οὔτε ἄρα ὅμοιον οὔτε ἀνόμοιον οὐθ᾽ ἑτέρῳ οὔτε ἑαυτῷ ἂν εἴη τὸ ἕν. Platon, Parmé-
nide, 147c1 ; ὅμοιόν τε καὶ ἀνόμοιον ἑαυτῷ τε καὶ τοῖς ἄλλοις. Ibid., 140b4.
14
« […] les théologiens affirment qu’en soi-même et dans sa totale transcendance,
Dieu n’est semblable à rien (οὐδενί φασιν εἶναι ὅμοιον), et que pourtant la même ressem-
blance divine (ὁμοιότητα θείαν) se répand sur ceux qui se tournent vers lui […]. » Les
noms divins, IX, 6 [913C], p. 157‑158 (traduction modifiée) ; éd. dans De divinis nomi-
nibus…, p. 211.15‑18.
15
De divinis nominibus…, IX, 6 [916A], p. 212.7‑8.
Marilena Vlad
sans jamais devenir semblable par rapport à quoi que ce soit – c’est fina-
lement dire que Dieu est dissemblable et que rien ne lui est semblable 16.
La perspective de Denys semble ici contradictoire, car les choses pro-
duites par Dieu se montrent à la fois semblables et dissemblables à Dieu.
Pourtant, Denys explique cette perspective : par une expression paradoxale,
les choses sont semblables à Dieu « en ce qu’elles imitent l’inimitable » 17.
Bien que Dieu ne puisse pas être imité – puisqu’il n’a pas une manière
déterminée d’être qui puisse être reprise par l’imitateur – pourtant, toute
chose l’imite, parce que toute chose se dirige vers lui, dans l’effort de toute
la réalité à retrouver sa cause et à s’unifier à elle. Autrement dit, l’imitation
de Dieu – qui consiste dans la conversion de toute chose vers Dieu – est
une imitation sans image proprement dite, une imitation de celui qui reste
inimitable. Il s’agit d’une tendance des choses à imiter Dieu et à retrouver
l’image divine, mais sans qu’à la fin de cette tendance il y ait une image dé-
terminée, imitable. En conséquence, les choses sont dissemblables à Dieu,
parce que rien n’est adéquat à Dieu 18 ; pourtant, elles sont aussi semblables
à Dieu, parce qu’elles reçoivent l’imitation de Dieu, parce que Dieu lui-
même donne cette imitation grâce à laquelle toute chose retourne vers
lui. Les choses paradoxalement reçoivent de Dieu l’imitation de Dieu,
sans vraiment pouvoir l’imiter et le montrer par leur image propre. Elles
imitent Dieu plutôt par leur tendance à le retrouver, mais, en elles-mêmes,
elles restent dissemblables et, donc, inadéquates à Dieu.
Denys utilise l’image du soleil pour montrer comment les choses re-
çoivent la ressemblance par laquelle elles retournent vers leur modèle.
Ainsi, en tant que Bien, Dieu répand sa bonté sur toute chose. Comme
Dieu donne la ressemblance aux choses, en les faisant rechercher leur
16
Pourtant, dans la Théologie mystique (V, p. 149, 4), Denys dira que Dieu n’est ni
ressemblance, ni dissemblance (οὔτε ὁμοιότης ἢ ἀνομοιότης). Voir en ce sens l’analyse de
D. Turner (The Darkness of God : Negativity in Christian Mysticism (Cambridge : Cam-
bridge University Press, 2002), p. 40‑46), qui conclue qu’il s’agit ici non pas de proprié-
tés de Dieu, mais de propriétés du langage. La ressemblance et la dissemblance – telles
que nous les utilisons dans notre pensée – ne fonctionnent plus dans le cas de Dieu, et
donc, il faut les supprimer. « Therefore, the only way in which we can attest to the abso-
lute transcendence of God is by transcending the language of similarity and difference
itself. » (ibid., p. 45).
17
[…] κατὰ τὴν ἐνδεχομένην τοῦ ἀμιμήτου μίμησιν. De divinis nominibus, IX, 7
[916A], p. 212.13.
18
[…] τὸ δὲ κατὰ τὸ ἀποδέον τῶν αἰτιατῶν τοῦ αἰτίου καὶ μέτροις ἀπείροις καὶ
ἀσυγκρίτοις ἀπολειπόμενον). De divinis nominibus…, IX, 7 [916A], p. 212.14‑15 ; trad. :
« […] les effets restent inférieurs à la cause et s’éloignent d’elle dans une mesure qui
échappe à toute limite et à toute comparaison. » Les noms divins…, p. 158‑159.
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
19
De divinis nominibus…, IV, 4 [697B-C], p. 147.2‑4.
20
De divinis nominibus…, IV, 4 [700B-C], p. 149.1‑4.
21
[…] κατὰ πολλοστὸν ἀπήχημα τἀγαθοῦ. De divinis nominibus…, ibid. [697C-D],
p. 147.10‑13.
22
[…] οὕτω δὴ καὶ τἀγαθὸν ὑπὲρ ἥλιον ὡς ὑπὲρ ἀμυδρὰν εἰκόνα τὸ ἐξῃρημένως
ἀρχέτυπον. De divinis nominibus…, IV, 1 [693B], p. 144.3‑4.
23
Voir La hiérarchie céleste, I.3.
24
Damascius, Traité des premiers principes, éd. par L. G. Westerink, trad. J. Combes,
3 vol. (Paris : les Belles lettres, 1986‑1991), i : De l’ineffable et de l’un (1986), p. 91.2‑3.
Marilena Vlad
Images dissemblables
Comment donc expliquer ce côté laid et inadéquat de toute une partie
des images utilisées pour louer Dieu ? Il s’agit d’images non-représen-
tatives (ἀπεμφαινούσας) pour les ordres angéliques et, qui plus est, pour
Dieu lui-même. D’un côté, Denys nous explique qu’il n’y a pas de chose
absolument laide, de sorte que même les choses les plus indignes ont tou-
jours une certaine participation à la beauté 27. D’un autre côté, il n’y a
aucune image, ni attribut, si haut soit-il, qui puisse être adéquat à Dieu 28,
de sorte que même les plus hauts attributs sont finalement inadéquats
à la cause qui transcende tout. Il semble donc que la distinction entre
image semblable et image dissemblable s’efface.
Mais Denys va encore plus loin. Puisqu’il n’y a aucun attribut adé-
quat à Dieu, la hiérarchie des attributs se renverse : les plus adéquats et les
plus capables de nous faire remonter vers Dieu ne sont pas les plus hauts
et vénérables, mais, au contraire, les plus bas. En effet, les attributs plus
hauts risquent de nous faire croire que l’adéquation est réelle, qu’il y a des
choses qui peuvent s’appliquer à Dieu ; ils risquent de nous faire croire
que l’on a déjà acquis une certaine connaissance de Dieu, bien que Dieu
soit au-delà de toute connaissance possible. Au contraire, les attributs ina-
déquats ont l’avantage de provoquer notre esprit, puisqu’il est évident
que ces attributs n’offrent pas une description directe et qu’ils restent ma-
nifestement inadéquats. Plus ils sont inadéquats et inconvenables, plus les
attributs ont le pouvoir de nous faire dépasser la description proprement
25
La hiérarchie céleste, II.5.
26
Sur la fonction anagogique du réel chez Denys, voir P. C. Ferreira Filho, « Sym-
bolisme et métonymies du sensible au divin chez Denys l’Aréopagite », Revue des
sciences philosophiques et théologiques, 95 (2011), p. 275‑286 (« la métonymie du sensible
consiste dans l’emploi de l’effet pour désigner la cause » (p. 284)).
27
[…] μηδὲ ἓν τῶν ὄντων εἶναι καθόλου τῆς τοῦ καλοῦ μετουσίας ἐστερημένον. De
coelesti hierarchia, II, 3, [141C] p. 13.21‑22 ; trad. : « […] il n’est rien qui ne participe en
quelque manière au beau […]. » La hiérarchie céleste…, p. 192.
28
De coelesti hierarchia…, II, 3 [140C], p. 12. 9‑11.
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
29
« Que, d’autre part, des métaphores sans ressemblance soient plus aptes à élever
spirituellement notre intelligence, je ne pense pas qu’aucun homme sensé puisse en dis-
convenir […]. » La hiérarchie céleste…, II, 3 [140D], p. 191.
30
De divinis nominibus…, VII, 1 [865B-C], p. 193.10‑194.6.
31
« Elles l’appellent invisible, illimitée, insaisissable, ne signifiant pas ce qu’elle est
mais plutôt ce qu’elle n’est pas (οὐ τί ἐστιν, ἀλλὰ τί οὐκ ἔστιν σημαίνεται). » La hiérarchie
céleste, II, 3 [140D], p. 190.
Marilena Vlad
32
En ce sens, Eric Perl note : « Every symbol, precisely as an expression, as
knowable, is not God himself and thus leaves him hidden. […] God cannot be revealed,
be manifest, except by being ‘veiled’, hidden, in symbols. Only by way of symbols can
God be revealed or known without being objectified as a being. Dionysius expresses this
unity of revealing and concealing in his use of the word proballein, which means both
‘present’ and ‘shield’. Symbols are probeblemena, at once presentations and screens of God
(e.g., Epist., 9.1.1105b-c). » (« Dionysius », dans The Cambridge History of Philosophy
in Late Antiquity, éd. par L. P. Gerson, 2 vol. (Cambridge : Cambridge University Press,
2010), i, p. 785‑786). Voir aussi E. Perl, « Symbolism », dans Theophany : The Neoplato-
nic Philosophy of Dionysius the Areopagite (Albany : State University of New York Press,
2007), notamment p. 104‑107.
33
Voir Les noms divins, I, 6 ; […] ὡς αἰσθητῶν συμβόλων ἢ νοερῶν […]. De coeles-
ti hierarchia…, VII, 2, p. 29.5‑4. Sur l’arrière-plan néoplatonicien de l’idée des noms
comme symboles, voir J. Trouillard, « L’activité onomastique selon Proclus », dans De
Jamblique à Proclus (Genève : Vandœuvres, 1975), p. 239‑251 ; voir aussi S. Klitenic
Wear et J. Dillon, Dionysius the Areopagite and the Neoplatonist Tradition : Despoiling the
Hellenes (Aldershot, Burlington : Ashgate, 2007), p. 86‑88.
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
34
Voir P. Rorem (Biblical and Liturgical Symbols within the Pseudo-Dionysian Syn-
thesis, Studies and texts, 71 (Toronto : Pontifical Institute of Mediaeval Studies, 1984),
qui montre que toute l’œuvre de Denys se concentre sur l’exposition des symboles scriptu-
raires (Les noms divins et La hiérarchie céleste) et liturgiques (La hiérarchie ecclésiastique).
35
De divinis nominibus…, V, 8 [824C], p. 188.6‑10.
36
[…] τὴν ὑπερφυῆ καὶ ἀσχημάτιστον ἁπλότητα τῇ ποικιλίᾳ τῶν μεριστῶν συμβόλων
πληθυούσης τε καὶ διαπλαττούσης. De divinis nominibus…, I, 4 [592B], p. 114.4‑7 ; trad. :
Les noms divins…, p. 71 (traduction modifiée).
37
De divinis nominibus…, I, 4 [589D], p. 112.7‑10.
38
De divinis nominibus…, II, 11 [649C], p. 136.2‑5 ; trad. : Les noms divins…, p. 88
(traduction modifiée).
39
Sur les détails de ce thème central du néoplatonisme, voir par exemple Jean
Trouillard, « Procession néoplatonicienne et création judéo-chrétienne », dans Néopla-
tonisme : Mélanges offerts à Jean Trouillard, Les Cahiers de Fontenay, 19‑22 (Paris : ENS,
1981), p. 1‑30.
40
De ecclesiastica hierarchia…, III, 3 [429A-B], p. 82.22‑83.6.
Marilena Vlad
41
De divinis nominibus…, I, 4 [592C], p. 115.6‑8.
42
De divinis nominibus…, IV, 9 [705B], p. 154.4‑6 ; trad. : « [l’âme] prend appui
sur le monde extérieur comme sur un ensemble complexe de multiples symboles pour
s’élever à des contemplations simples et unifiées. » Les noms divins…, p. 103.
43
De divinis nominibus…, I, 6 [596A], p. 118.4‑6.
44
De coelesti hierarchia…, I, 2 [121A-121B], p. 7.12‑8.5.
45
Epistula IX…, 1 [1104B], p. 193.7‑8.
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
peut pas y ajouter de la foi 46, car on ne peut pas comprendre qu’elle parle
d’autre chose. Pour accéder à cette pureté et nudité des mystères divins,
il faut passer du statut objectif des choses à leur statut symbolique. Or, il
n’y a pas de symbole sans le savoir d’interprétation des symboles, ce qui
implique d’identifier le symbole en tant que tel, de voir qu’il ne montre
pas directement, que ce qu’il montre est au-delà du symbole et que, afin
de le voir, il faut mettre le symbole de côté, tout en révélant son inadé-
quation et son essentielle différence. L’interprétation est une désymboli-
sation, un dépassement du symbole. Toute image symbolique doit être
en même temps regardée, explicitée, interprétée, mais, en fin de compte,
elle nécessite d’être dépassée et supprimée 47.
Les empreintes
Pourquoi utilisons-nous alors des images symboliques, puisqu’elles ne
sont pas adéquates et que, en fin de compte, il faut les supprimer complè-
tement ? La réponse de Denys est que la divinité elle-même, grâce à son
amour pour les hommes, enveloppe sa propre simplicité dans la diversité
des symboles 48. Bien que Dieu soit inconnaissable et exempt de toute
forme, il se montre lui-même, en déposant des empreintes de ce qui est
sans forme sur les choses qui peuvent servir de support formel. Cette
précision dévoile un sens encore plus concret de l’image chez Denys.
L’image ne relève pas d’une simple similitude contingente, qui renvoie
vers un correspondant d’ordre intelligible ou sur-intelligible, elle n’est
pas un symbole qui garderait une radicale extériorité par rapport à Dieu,
mais au contraire, l’image est une empreinte (τύπος) déposée par Dieu
lui-même dans la réalité, une manière dont Dieu veut imprimer sa pré-
sence en toute chose.
La réalité a précisément ce rôle de dévoiler ce qui reste essentiellement
caché, car toute chose est une empreinte de l’inexprimable, sans forme et
sans empreinte. Ainsi, tandis que la tradition néoplatonicienne admettait
46
Epistula IX…, 1 [1104B], p. 193.8‑11.
47
Sur le côté apophatique du symbolisme, voir R. Roques (« Symbolisme et théo-
logie négative chez le Pseudo-Denys », Bulletin de l’Association Guillaume Budé (1957),
p. 97‑112 (p. 105)) : « La théologie négative apparaît ainsi comme le centre et la clé de
tout symbolisme. Sans elle, il perdrait tout son sens, puisqu’il devrait renoncer à tout ce
qui le justifie : l’Un et son exigence d’unité, d’une part, et, d’autre part, la dialectique
anagogique qui répond à cette exigence. »
48
De divinis nominibus…, I, 4 [592B], p. 113.12‑114.7.
Marilena Vlad
qu’il y a des signes particuliers laissés par les dieux dans la réalité 49, pour
Denys, toutes les choses sont finalement des empreintes de Dieu. Toutes
les choses montrent Dieu essentiellement et rien d’autre que Dieu. Les
choses sont pourtant l’empreinte de « quelque chose » qui, en soi, non
seulement ne ressemble pas à l’empreinte (car toute image est finalement
inadéquate à la divinité), mais en outre n’a même pas de forme ou d’image
propre, et ne peut donc pas être représenté par un type d’empreinte. Par
son unité, l’infinité suressentielle de Dieu dépasse les êtres et les intellects,
de même que ce qui est sans empreinte dépasse toute empreinte 50.
Dieu, qui est absolument incompréhensible, accepte pourtant de faire
de toute chose l’empreinte de ce qui est sans empreinte, couvrant son uni-
té dans la pluralité des symboles, cachant – et manifestant en même temps
– son manque de forme, dans toutes les formes possibles. Ainsi, en tant
que Bien, Dieu sans forme (τὸ ἀνείδεον) donne son empreinte à chaque
chose 51. Autrement dit, Dieu se montre, mais de manière cachée, tout en
voilant sa présence et sa lumière dans ce qui se montre 52. Pour Denys, l’em-
preinte a donc un sens paradoxal, voire même contradictoire, car elle est
une manière de manifestation qui reste secrète : par ses empreintes, Dieu
se révèle tout en restant caché. En ce sens, toute chose est une empreinte
volontaire de Dieu, une manière dont Dieu révèle sa présence inaccessible,
en l’enveloppant dans ce que nous pouvons regarder et comprendre.
Mais le sens de l’empreinte est encore plus nuancé, car celle-ci se réfère
non seulement aux choses, mais aussi à Dieu. En effet, Dieu lui-même re-
çoit les empreintes qu’il a mises dans toutes les choses. La théologie, par
laquelle Dieu parle de lui-même, lui applique les empreintes de toutes
les choses 53. Il y a donc un double sens de l’empreinte : Dieu au-delà de
tout se montre par toutes les choses comme par des empreintes ; inver-
sement, il reçoit comme des empreintes les noms de toutes les choses
– et spécialement ceux qui sont révélés par les Écritures. L’empreinte
est l’image imprimée par Dieu dans la réalité, mais aussi l’image reçue
volontairement par Dieu, comme désignation, comme dénomination,
comme louange.
49
Voir par exemple Jamblique, Mystères d’Égypte, III.15.
50
De divinis nominibus…, I, 1 [588B], p. 109.7‑11.
51
Voir De divinis nominibus…, IV, 1 [696A], p. 144.12‑17.
52
De coelesti hierarchia…, I, 2 [121B-C], p. 8.10‑13 ; trad. : « Ce Rayon théar-
chique ne saurait, en effet, nous illuminer qu’enveloppé spirituellement dans la variété
des voiles sacrés […]. » La hiérarchie céleste…, p. 186.
53
De divinis nominibus…, I, 8 [597A], p. 120.14‑121.1.
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
54
De divinis nominibus…, II, 5 [644A], p. 129.4‑9.
55
En ce sens, voir Christian Schäfer (The Philosophy of Dionysius the Areopagite :
an Introduction to the Structure and the Content of the Treatise « On The Divine Names »
(Leiden : Brill, 2006)) qui montre que Denys privilégie un ordre différent de ces trois
aspects déjà présents dans le néoplatonisme : la manence n’est pas le premier moment,
mais le deuxième, après la procession, représentant non pas l’aspect de stabilité et d’im-
muabilité de Dieu en lui-même, avant la procession, mais plutôt l’aspect de la stabilité
des choses qui procèdent de Dieu : « Dionysius re-interprets the Neoplatonic standard
terminology and canonical place of μονή, which is now used for the image of God in
creation, the constitution of worldly reality insofar as it is an entity of its own kind, and
at the same time the turning point of the procession. » Ibid., p. 74.
Marilena Vlad
56
Denys parle aussi de ce type de manence qui fait de Dieu le fondement immuable
de la réalité, qui produit toute chose sans quitter sa propre identité unitaire. Voir Les
noms divins, II, 4, p. 127, 3. Sur le sens de la manence dans le néoplatonisme, voir Jean
Trouillard, « La μονή selon Proclos », dans Le Néoplatonisme (Actes du colloque interna-
tional du Centre National de la Recherche Scientifique, Royaumont, 9‑13 juin 1969) (Paris :
CNRS, 1971), p. 229‑240.
57
De divinis nominibus…, IV, 1 [696A], p. 144.12‑17 ; trad. : Les noms divins…,
p. 95 (traduction modifiée).
58
De coelesti hierarchia…, II, 2 [140A-B], p. 11.11‑19.
59
[…] καὶ ὡς ἀνώνυμον αὐτὴν ὑμνοῦσι καὶ ἐκ παντὸς ὀνόματος. De divinis nomini-
bus…, I, 6 [596A], p. 118.2‑3 ; trad. : « […] les théologiens la louent tout ensemble de
n’avoir aucun nom et de les posséder tous. » Les noms divins…, p. 74 ; voir aussi De divi-
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
Mais l’empreinte a encore un autre sens : elle est l’image que nous
pouvons nous-mêmes recevoir de Dieu, afin d’acquérir la conscience
et la connaissance de sa présence. Denys parle de la manière dont nous
sommes imprimés par les hymnes sacrés qui louent Dieu (πρὸς τὰς ἱερὰς
ὑμνολογίας τυπούμενοι) 60. Autrement dit, nous recevons ces empreintes
par lesquelles Dieu se montre dans les Écritures, afin justement de redé-
couvrir Dieu qui, en lui-même, est sans empreinte et sans image propre.
De la sorte, ces empreintes hymnologiques nous élèvent à la connais-
sance de la divinité, sans que cela implique une forme déterminée de la
divinité et, donc, une limitation cognitive.
Plus on reçoit ces empreintes, plus on est proche de la divinité et plus
on communie avec elle. Il y a des natures plus malléables et capables de
recevoir l’empreinte (εὐτύπωτα), mais il y en a d’autres qui tout simple-
ment s’opposent à cette réception (ἀντίτυπα) 61. Ainsi, la nature la plus
à même à recevoir est l’angélique : « […] l’ange est donc image de Dieu,
reflet visible de l’invisible Lumière, miroir pur, parfaitement limpide,
intact, sans mélange, sans souillure, capable, si l’on ose dire, de refléter
dans son entière fraîcheur cette forme divine qui porte l’empreinte du
Bien (τῆς ἀγαθοτύπου θεοειδείας) […] 62. » Le Bien sans forme se trans-
met en tant qu’empreinte à l’ange, qui le reçoit comme un miroir sans
tache, qui ne perturbe nullement ce qu’il reçoit. L’ange reçoit volontai-
rement l’empreinte de Dieu et la forme divine. Pourtant, en lui-même,
il est sans empreinte (ἀτυπώτους) 63, mais il se laisse à son tour représenté
par des empreintes encore inférieures et donc inadéquates. Ainsi, dans
les Écritures, la divinité même nous révèle les ordres angéliques par des
symboles qui sont comme des empreintes (ἐν τυπωτικοῖς συμβόλοις) 64,
tandis que la hiérarchie ecclésiastique est elle-aussi une manière de re-
présenter symboliquement la hiérarchie des anges, de sorte que, à partir
des empreintes sensibles, nous puissions imiter les hiérarchies célestes et
découvrir leur splendeur sans empreinte, qui est le miroir de Dieu.
Marilena Vlad
65
De coelesti hierarchia…, III, 2 [165B], p. 18.1‑6 ; trad. : La hiérarchie céleste…,
p. 196 (traduction modifiée).
66
De coelesti hierarchia…, III, 2 [154B], p. 18.10‑17.
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
67
Voir Proclus, Théologie platonicienne, I, 29, éd. et trad. par H. D. Saffrey et L. G.
Westerink, Livre 1 (Paris : les Belles lettres, 1968), p. 123‑124 ; In Platonis Parmenidem,
IV, éd. V. Cousin, p. 851.8‑10. Pour le sens de ce terme chez Proclus et son maître, Sy-
rianus, voir H. D. Saffrey (« New Objective Links Between the Pseudo-Dionysius and
Proclus », dans Neoplatonism and Christian Thought, éd. par D. O’Meara (Albany : State
University of New York Press, 1982), p. 70) : « It is then only to the Platonists of the
generations of Syrianus and of Proclus that one must attribute this devotion to the di-
vine names as having taken the place of devotion to the statues of the gods. » Voir aussi
N. Janowitz, « Theories of the Divine Names in Origen and Pseudo-Dionysius », Histo-
ry of Religions, 30/4 (1991), p. 359‑372.
68
Epistula IX…, 1 [1108A], p. 198.8‑9 ; trad. : Lettre IX…, p. 354 (traduction mo-
difiée).
69
Sur la liaison entre les statues divines utilisées dans la théurgie et l’exégèse des
noms divins chez Proclus, voir A. Sheppard (« Proclus as Exegete », dans Interpre-
ting Proclus : From Antiquity to the Renaissance, éd. par S. Gersh (Cambridge : Cam-
bridge University Press, 2014, p. 57‑79 (p. 74‑75)) : « Several times in the Cratylus
commentary Proclus compares divine names to statues of the gods (ἀγάλματα). At In
Crat., LI.19.12‑24, it becomes clear that what Proclus has in mind are the statues used
for theurgic animation. When Proclus deals with the names of the gods he always has
Marilena Vlad
in mind the names used in particular texts. His approach to the rituals of theurgy is
also that of an exegete, seeking connections between these rituals and his authoritative
texts. »
70
De divinis nominibus…, IX, 1 [909B], p. 207.6‑9 ; trad. : Les noms divins…, p. 154
(traduction modifiée).
71
De mystica theologia…, II [1025A-B], dans Corpus Dionysiacum 2…, p. 145.1‑7 ;
trad. : La théologie mystique…, p. 180.
72
De mystica theologia…, V [1045D], p. 149.4 ; trad. : La théologie mystique…,
p. 183.
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
73
La métaphore de la sculpture de soi comme enlèvement des éléments étrangers se
trouve aussi chez Plotin, Ennéades, I.6.9.
74
Denys s’individualise par rapport à la tradition néoplatonicienne concernant les
statues divines. En effet, pour Proclus les noms divins sont des statues verbales et des
substituts des vraies statues des dieux, que l’on ne pouvait plus vénérer dans les temples,
à son époque : voir H. D. Saffrey, « New Objective… », p. 69.
75
De coelesti hierarchia…, II, 5 [145A], p. 16.2‑3.
Marilena Vlad
rôle de nous faire dépasser ce danger. Ce n’est pas le résultat qui compte,
à savoir la statue proprement dite, mais l’acte de l’enlèvement.
Il s’agit d’un travail de retranchement ou de suppression qui accom-
pagne chaque nom divin, sauf que ce travail ne s’arrête pas à une image
quelconque, comme dans le cas des statues habituelles, mais se poursuit
jusqu’au retranchement total. Denys ne retient donc pas le sens objectif
de la statue, en tant qu’image finie et définie, à laquelle on s’arrête, mais
au contraire, le sens actif et négatif de la statue, le sens de la suppression
par laquelle on cherche, bien que ce qui se cache reste toujours caché,
sans jamais prendre forme sous nos yeux. Cette activité de retranche-
ment, cette sculpture intellectuelle, qui opère à l’égard de toute chose,
y compris sur notre propre intellect 76, ne s’arrête jamais et n’aboutit ja-
mais à une forme proprement dite, puisque l’on est en train de faire la
statue de celui qui n’a pas de forme.
Ainsi, par les noms divins, on supprime tout ce qui existe, toute ma-
nière déterminée d’être, afin justement d’aboutir à la vision paradoxale
de celui qui est au-delà de l’être et qui n’a pas d’image propre : « Ici c’est
des dernières que nous partirons nécessairement pour nous élever vers
les plus originaires, en supprimant tout, afin de connaître sans voiles
cette inconnaissance que dissimule en tout être la connaissance qu’on
peut avoir de cet être, afin de voir ainsi cette Ténèbre suressentielle que
dissimule toute la lumière contenue dans les êtres 77. »
Cette suppression systématique se réalise dans le mouvement circu-
laire de l’âme, quand celle-ci se détache des choses plurielles, pour « se
convertir et se recueillir premièrement en elle-même » (ἐπιστρέφουσα
καὶ συνάγουσα πρῶτον εἰς ἑαυτήν) 78. L’âme qui retranche la pluralité se
convertit et devient unitaire en elle-même 79, pour se diriger ensuite vers
le bien unitaire au-delà de tout être. En ce sens, cette sculpture divine
– qui, dans notre discours, prend la forme de la négation et de la sup-
pression de tout nom, connaissance et vue – correspond à la conversion
(ἐπιστροφή) vers Dieu.
76
De mystica theologia…, I, 1 [997B], p. 142.6‑7 ; trad. : « […] abandonne les sensa-
tions, renonce aux opérations intellectuelles. » La théologie mystique
, p. 175.
77
De mystica theologia…, II [1025B-C], p. 145.10‑13 ; trad. : La théologie mys-
tique…, p. 180‑181 (traduction modifiée).
78
De divinis nominibus…, IV, 9 [705A], p. 153.12‑13 ; trad. : Les noms divins…,
p. 102 (traduction modifiée).
79
Voir aussi C. Steel, « Conversion vers soi et constitution de soi selon Proclus »,
dans Retour, repentir et constitution de soi, éd. par A. Charles-Saget (Paris : J. Vrin, 1998),
p. 161‑175.
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
Ce type de statue divine, que l’on pratique plus que l’on ne contemple,
nous fait découvrir une beauté tout à fait particulière, car il ne s’agit plus
d’une beauté visible, comme dans le cas des statues ordinaires. Il s’agit
plutôt d’une splendeur au-delà de la beauté, qui remplit les intellects
sans vue, qui ont supprimé toute vision déterminée :
80
De mystica theologia…, I, 1 [997A-B], p. 142.1‑4 ; trad. : La théologie mystique…,
p. 177.
81
De mystica theologia…, II, 1 [1025C], p. 145.12‑13 ; trad. : La théologie mys-
tique…, p. 180‑181.
82
De mystica theologia…, II, 1 [1025A], p. 145.1‑3.
83
« Car c’est en sortant de tout et de toi-même, de façon irrésistible et parfaite que
tu t’élèveras dans une pure extase jusqu’au rayon ténébreux de la divine Suressence [τὸν
ὑπερούσιον τοῦ θείου σκότους ἀκτῖνα], ayant tout abandonné et étant dépouillé de tout. »
De mystica theologia…, I, 1 [997B-1000A], p. 142.9‑11 ; trad. : La théologie mystique…,
p. 177‑178.
Marilena Vlad
cur à la vue qui nous conduit à la suppression de tous les noms. L’ange est
une image de Dieu 84, image qui paradoxalement montre la lumière invi-
sible. Ensuite, chaque membre de la hiérarchie peut devenir une statue
divine, à force de recevoir cette lumière invisible, cette connaissance qui
consiste à supprimer toute connaissance déterminée. Ainsi, Denys parle
du prêtre comme étant une telle statue divine 85, qui cache le sacré en soi-
même, à la façon dont Dieu lui-même reste caché. Il est semblable à un
peintre qui imite non pas la beauté sensible, mais la beauté suressentielle
et cachée de Dieu 86.
Ainsi, la statue divine – qui se réfère soit aux noms divins, soit aux
membres de la hiérarchie – a toujours le sens d’une imitation de Dieu,
qui reste caché et invisible. La statue n’imite par directement et mani-
festement, mais agit par la suppression de toute détermination et par la
préservation du secret. La statue divine n’est pas le reflet d’une image
quelconque, mais le reflet du secret de la divinité cachée, un reflet assumé
par celui qui veut recevoir ce secret en lui-même et devenir ainsi imita-
teur du Dieu caché (θεομίμητον).
En ce sens, l’image chez Denys a ainsi un double sens : comme re-
flet de Dieu, comme empreinte déposée par Dieu dans toutes les choses,
mais aussi comme image active, en tant qu’acte de se faire semblable à
Dieu. Il s’agit chez Denys non seulement de comprendre les images (et
accéder ainsi à la connaissance de Dieu), mais aussi d’assumer le statut
d’image à la ressemblance divine. L’image a ainsi une certaine circulari-
té : on reconnaît l’image de Dieu et on la comprend comme telle, afin de
l’utiliser pour se faire image, pour devenir soi-même l’image de Dieu.
Denys l’Aréopagite et l’image divine : symbole, empreinte, statue
87
Pourtant, comme le remarque Pedro Calixto Ferreira Filho, le dépassement du
visible à travers les symboles n’est pas un abandon du sensible, mais au contraire : « Ce
dépassement n’implique nullement un rejet ou une perte, mais bien plutôt l’acquisi-
tion d’un regard renouvelé sur le sensible et la sensibilité. » « Symbolisme et métony-
mies… », p. 285.
88
De mystica theologia…, I, 3 [1001A], p. 144.9‑12 ; trad. : « C’est alors seule-
ment que, dépassant le monde où l’on est vu et où l’on voit, il entre dans la Ténèbre
véritablement mystique de l’inconnaissance ; c’est là qu’il fait taire tout savoir positif,
et il se trouve dans le totalement intangible et invisible (ἐν τῷ πάμπαν ἀναφεῖ καὶ ἀοράτῳ
γίγνεται). » La théologie mystique…, p. 179 (traduction modifiée).
Marilena Vlad
Maria Zoubouli
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 93-110
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111928
Maria Zoubouli
3
Acte V, éd. par J. D. Mansi, Sacrorum Conciliorum nova et amplissima collectio,
31 vol. (Firenze : apud A. Zatta, 1759‑1798), xiii (1767), 164C-165C ; éd. par Erich
Lamberz : Acta Conciliorum oecumenicorum sub auspiciis Academiae scientiarum Bavari-
cae edita, Series secunda, volumen tertium, pars altera, Concilium Universale Nicaenum
secundum, Concilii actiones IV‑V (Berlin : W. de Gruyter, 2012), p. 542‑544.
L’icône e(s)t l’original
4
Sur la « déterminabilité » du concept de la création dans la cosmologie de
l’Orient chrétien, cf. J. F. Callahan, « Greek Philosophy and the Cappadocian Cosmo-
logy », Dumbarton Oaks Papers, 12 (1958), p. 29‑57.
5
On évoque évidemment le moto caractéristique de G. Didi-Huberman dans De-
vant l’image : question posée aux fins d’une histoire de l’art (Paris : Minuit, 1990).
6
Pour les notions d’autographe et d’allographe, cf. G. Genette, L’œuvre de l’art :
immanence et transcendance (Paris : Seuil, 1994), p. 35 sq.
7
« La vraie image » est un idéal intemporel, dont les expressions sont revues
par Hans Belting dans son ouvrage homonyme (Paris : Gallimard, 2007). Sur sa place
dans l’imagérie chrétienne, gagnée au moyen de la narration visuelle, voir H. L. Kessler,
« Pictures Fertile with Truth : How Christians Managed to Make Images of God wi-
thout Violating the Second Commandment », Journal of Walters Art Gallery, 49/50
(1991‑1992), p. 53‑65 [repris dans Studies in pictorial narrative (Londres : Pindar Press,
1994), p. 74‑96].
8
La question ne se pose ici que dans un cadre culturel très restreint ; on ne peut
contourner le celèbre essai de Jacques Derrida sur La vérité en peinture (Paris : Flamma
rion, 1978), qui part de Kant et de Heidegger avant de se servir des chaussures peintes
par Van Gogh pour enquêter sur le statut de la peinture dans la culture occidentale. Par-
Maria Zoubouli
le référent n’existe pas. Pour les chrétiens, par contre, le « vrai » résulte
de la soustraction du « réel » : leurs images possèdent un référent réel,
dont elles sont le témoin. Jean ne s’occupe pas, en fait, des représenta-
tions : il s’intéresse à ce qui est représenté par les représentations, il clame
la vérité de ce à quoi les représentations ressemblent, de ce dont elles sont
issues.
Un autre Jean, le fameux Damascène, prend cet argument à son
compte avec les mots suivants : « Il ne faut donc pas prendre prétexte de
l’utilisation absurde que les Grecs font [des images] pour réfuter la nôtre,
pieusement faite. Les incantateurs et les charlatans adjurent, et l’Église
aussi adjure les catéchumènes ; mais ceux-là invoquent les démons, tan-
dis que celle-ci invoque Dieu contre les démons. Les Grecs consacrent
les images aux démons et appellent celles-ci dieux, tandis que nous les
consacrons au vrai Dieu incarné, et aux serviteurs et amis de Dieu qui
repoussent les armées de démons 9. » L’image ne ment pas dans son
être d’image ; ce sont les faiseurs d’images qui se montrent menteurs,
quand ils s’adonnent à la re-présentation de non-êtres, confectionnant
ainsi des idoles. L’art n’y est pour rien : si le modèle existe véritablement,
l’image est vraie, si le modèle est faux, l’image est trompeuse. L’argu-
ment a une valeur universelle dans la culture byzantine, qui professe un
pragmatisme du salut, et qui installe le sacré dans le quotidien de ma-
nière incontestable. L’histoire chrétienne elle-même ne se propose pas
mi les travaux des byzantinistes sur la question, notons ceux de Ch. Barber : « The Truth
in Painting : Iconoclasm and Identity in Early-Medieval Art », Speculum, 72/4 (1997),
p. 1019‑1036 ; Figure and Likeness : On the Limits of Representation in Byzantine Icono-
clasm (Princeton, Oxford : Princeton University Press, 2002) ; A. Cameron, « The Lan-
guage of Images : the Rise of Icons and Christian Representation », dans The Church and
the Arts, éd. par D. Wood (Oxford : Blackwell Publishers, 1992), p. 1‑42 ; F. Clémentz,
« La vérité moins l’image : imitation, représentation, signification », dans L’imitation,
aliénation ou source de liberté ?, Rencontres de l’École du Louvre (Paris : la Documenta-
tion française, 1985), p. 49‑62.
9
Οὐ δεῖ τοίνυν διὰ τὴν τῶν Ἑλλήνων ἄτοπον χρῆσιν καὶ τὴν ἡμετέραν εὐσεβῶς
γινομένην ἀναιρεῖν. Ἐφορκίζουσιν ἐπαοιδοί τε καὶ γόητες, ἐφορκίζει καὶ τοὺς κατηχουμένους
ἡ ἐκκλησία, ἀλλ’ ἐκεῖνοι μὲν ἐπικαλούμενοι δαίμονας, αὕτη δὲ θεὸν κατὰ δαιμόνων· δαίμοσι
τὰς εἰκόνας ἀνατιθέασιν Ἕλληνες καὶ θεοὺς ταύτας προσαγορεύουσιν, ἡμεῖς δὲ ἀληθεῖ θεῷ
σαρκωθέντι καὶ θεοῦ δούλοις καὶ φίλοις δαιμόνων ἀπελαύνουσι στίφη. Jean Damascène,
Logos apologitikos I, 24, Die Schriften des Johannes von Damaskos, éd. par P. B. Kotter,
5 vol. (Berlin : Walter De Gruyter, 1969‑1985), iii : Contra imaginem calumniatores ora-
tiones tres, Patristische Texte und Studien, 17 (1975), p. 115 ; traduction par A.-L. Dar-
ras-Worms : Jean Damascène, Le visage de l’invisible (Discours contre ceux qui rejettent les
images saintes), Les Pères dans la foi (Paris : Migne, 1994), p. 66‑67. Sur la contribution
de Jean Damascène à la constitution d’une « philosophie de l’image », voir G. Zogra-
phidis, Βυζαντινή φιλοσοφία της εικόνας [Philosophie byzantine de l’image] (Athènes : Elli-
nika Grammata, 1997).
L’icône e(s)t l’original
10
Οὐ γὰρ τὴν ἔξω ἠθοποιΐαν μιμούμεθα καὶ προσωποποιΐαν ἀλλ’ ἐξ αὐτῶν τῶν
πραγμάτων τὰς αφορμὰς δανειζόμεθα τῶν ὑποθέσεων. Sévérien de Gabala, Sur la croix et le
larron (Εἰς τὸν τίμιον σταυρὸν καὶ τὸν λῃστήν), éd. par A. Wenger, « Le sermon LXXX
de la collection augustinienne de Mai restitué à Sévérien de Gabala », dans Augustinus
Magister, Congrès international augustinien 1 (Paris : Études augustiniennes, 1954),
p. 175‑185.
11
Cf., par exemple, Théodoret de Cyr : « Il est facile de juger l’art des maîtres de
la peinture si l’on rapproche le portrait de l’original qui a servi de modèle […] et voir
bien leur parfaite ressemblance. » Thérapeutique des maladies helléniques [Ἑλληνικῶν
θεραπευτικὴ παθημάτων], XII, 6, PG, 83, col. 1093A.
12
Le cas le plus typiquement cité est celui de C. Mango : « Antique Statuary and
the Byzantine Beholder », Dumbarton Oaks Papers, 17 (1963), p. 53‑75 ; R. S. Nelson
caractérise son commentaire comme « Mango’s paradox », et le réfute avec sa propre
lecture des sources : « To say and to see : Ekphrasis and vision in Byzantium », dans R. S.
Nelson, Visuality Before and Beyond the Renaissance : Seeing as Others Saw (Cambridge :
Cambridge University Pres, 2000), p. 143‑168. Deux autres articles traitent aussi des
limites de la convention littéraire à propos de la « réalité » des images byzantines :
R. Grigg, « Byzantine Credulity as an Impediment to Antiquarianism », Gesta,
26 (1987), p. 3‑9, et surtout H. Maguire, « Truth and Convention in Byzantine Des-
cription of Works of Art », Dumbarton Oaks Papers, 28 (1974), p. 111‑140.
Maria Zoubouli
13
Πολὺ γὰρ τὸ μέσον ἐστὶ, τοῦ τε κατὰ τὸ ἀρχέτυπον νοουμένου, καὶ τοῦ κατ’ εἰκόνα
γεγενημένου. Ἡ γὰρ εἰκὼν, εἰ μὲν ἔχει τὴν πρὸς τὸ πρωτότυπον ὁμοιότητα, κυρίως τοῦτο
κατονομάζεται. Εἰ δὲ παρενεχθείη τοῦ προκειμένου ἡ μίμησις, ἄλλο τι, καὶ οὐκ εἰκὼν ἐκείνου
τὸ τοιοῦτόν ἐστι. Grégoire de Nysse, La création de l’homme (Περὶ κατασκευῆς ἀνθρώπου),
ch. 16, PG, 44, col. 180B ; traduction par J. Laplace et par J. Daniélou : Grégoire de Nys-
se, La création de l’homme, SC, 6 (Paris : Éd. du Cerf, 1943), p. 152‑153.
14
Ἐν πᾶσι τοίνυν τῆς εἰκόνος τοῦ πρωτοτύπου κάλλους τὸν χαρακτῆρα φερούσης, εἰ
μὴ κατὰ τὶ τὴν διαφορὰν ἔχῃ, οὐκέτι ἂν εἴη πάντως ὁμοίωμα, ἀλλὰ ταὐτὸν ἐκεῖνο διὰ πάντων
ἀναδειχθήσεται, τὸ ἐν παντὶ ἀπαράλλακτον. Grégoire de Nysse, La création de l’homme
(Περὶ κατασκευῆς ἀνθρώπου), PG, 44, 184C ; traduction par R. Leys : L’image de Dieu
chez Grégoire de Nysse (Bruxelles : Desclée de Brouwer ; Paris : l’Édition Universelle,
1951), p. 26 ; Cf. aussi : Grégoire de Nysse, La création…, p. 157.
15
J. Derrida, De la grammatologie (Paris : Minuit, 1967), p. 65‑95.
L’icône e(s)t l’original
16
Πᾶσα εἰκὼν ἐκφαντορικὴ τοῦ κρυφίου ἐστὶ καὶ δεικτική. Οἷόν τι λέγω· Ἐπειδὴ ὁ
ἄνθρωπος οὔτε τοῦ ἀοράτου γυμνὴν ἔχει τὴν γνῶσιν σώματι καλυπτομένης τῆς ψυχῆς οὔτε
τῶν μετ’ αὐτὸν ἐσομένων οὔτε τῶν τόπῳ διεστηκότων καὶ ἀπεχόντων ὡς τόπῳ καὶ χρόνῳ
περιγραφόμενος, πρὸς ὁδηγίαν γνώσεως καὶ φανέρωσιν καὶ δημοσίευσιν τῶν κεκρυμμένων
ἐπενοήθη ἡ εἰκών. Jean Damascène, Logos apologitikos, III, 17, Die Schriften des Johannes
von Damaskos, iii., p. 125 ; Jean Damascène, Le visage de l’invisible…, p. 77.
17
A. H. Armstrong, « Man in the Cosmos : a Study of Some Differences between
Pagan Neoplatonism and Christianity », dans Plotinian and Christian Studies (Londres :
Variorum Reprints, 1979), p. 9.
18
Ὅταν βασιλικοὶ χαρακτῆρες καὶ εἰκόνες εἰς πόλιν καταπέμπωνται καὶ εἰσφέρωνται,
ὑπαντῶσιν ἄρχοντες καὶ δῆμοι μετ’ εὐφημίας καὶ φόβου, οὐ σανίδα τιμῶντες, οὐ τὴν κηρόχυτον
γραφήν, ἀλλὰ τὸν χαρακτῆρα τοῦ βασιλέως. Sévérien de Gabala, Sur le lavement des pieds
(Λόγος εἰς τὸν νιπτῆρα), dans A. Wenger, « Une homélie de Sévérien de Gabala sur le
lavement des pieds », Revue des études byzantines 25, 1967, p. 219‑238 (p. 226) ; cité
comme étant de Jean Chrysostome dans le Florilège de Jean Damascène : Die Schriften
des Johannes von Damaskos, iii…, p. 193.
Maria Zoubouli
S’il faut donner une définition concise, on dira que l’hypostase est
l’ensemble des instances concrètes d’une substance qui constituent un être in-
dividuel 19. C’est une conception dynamique de l’être, qui outrepasse ses
représentations statiques. La figuration de l’hypostase permet à l’image
byzantine de s’écarter des traits formels de l’eidos humain pour embras-
ser sa personne. La notion de la personne, entendue comme hypostase
concrète, déborde les traits de l’individualité. Elle ne se limite donc pas
à un « instantané » physique, mais aspire à rendre compte d’une struc-
ture existentielle globale, dans laquelle sont comprises la temporalité de
chacun, les fondements de son devenir historique, sa relation au monde
et aux autres, enfin sa manière d’être selon ses libres choix qui lui valent
toute responsabilité 20.
C’est le charactèr qui est appelé à constituer l’expression concrète et
unique d’une hypostase : « L’hypostase selon le charactèr est entendue
comme générant une personne. Je dis bien ‘selon le charactèr’ pour ne pas
supposer l’hypostase sans charactèr, selon la duperie habituelle des héré-
tiques. Car dans ce cas-là, elle revêt la signification de la substance. […] Et
l’hypostase ne diffère pas de la substance quant à son être, mais en ceci :
que l’une, j’entends la substance, est en toutes les deux de manière com-
mune, tandis que l’hypostase est de manière particulière, puisqu’elle dis-
pose de quelque chose de particulier en plus de la totalité commune 21. »
Transféré dans le domaine plastique, le charactèr d’une hypostase offre le
topos qui transcende la bipôlarité traditionnelle de la mimésis, assumant
la fusion de la réalité physique et de son fondement méta-physique.
19
Cf. la définition de Jean Damascène dans Expositio fidei : Die Schriften des
J ohannes von Damaskos…, ii (1973) ; traduction par E. Ponsoye : Jean Damascène, La foi
orthodoxe, suivi de La défense des icônes (Paris : Institut Orthodoxe Français de Théologie
de Paris, 1966), p. 28.
20
Sur la complexité sémantique de ces termes-clés, qui révèle un riche substrat
d’idées en mutation, cf. L. Turcescu, « Prosopon and Hypostasis in Basil of Caesarea’s
‘Against Eunomius’ and the Epistles », Vigiliæ Christianae, 51/4 (1997), p. 374‑395.
21
Ἡ γὰρ ὑπόστασις ἡ χαρακτηριστικὴ πρόσωπον δίδωσιν ἐννοεῖν. Ἐν χαρακτῆρι δέ
φημι, μήπως τῇ συνήθει τῶν αἱρετικῶν ἀπάτῃ δίχα χαρακτῆρος ὑπόθωνται τὴν ὑπόστασιν.
Τότε γὰρ τὴν τῆς οὐσίας σημασίαν ἀποφέρεται. […] Ἡ γὰρ ὑπόστασις πρὸς τὴν οὐσίαν τῷ
εἰναι μέν τι οὐ διαφέρει, ἀλλὰ τῷ τὴν μὲν κοινῶς εἶναι, φημὶ δὴ τὴν οὐσίαν, τὴν δὲ ὑπόστασιν
ἰδικῶς, ὅταν μετὰ τῶν καθόλου καὶ ἰδικόν τι ἔχοι. Jean de Césarée, Apologie du Concile de
Chalcédoine, dans Iohannis Caesariensis presbyteri et grammatici opera quae supersunt, éd.
par M. Richard, CCSG, 1 (Turnhout : Brepols, 1977), p. 51.73‑77, puis p. 55.189‑211 [at-
tribués par Migne à Euloge d’Alexandrie : Fragments dogmatiques [Ἐκ τῶν Συνηγοριῶν],
PG, 86 col. 2953C et col. 2945C]. Jean est prêtre et grammatikos à Césarée vers la fin du
ve siècle, mais on ignore sa vie et son œuvre ; les quelques fragments syriaques et grecs de
son Apologie du Concile de Chalcédoine dont nous disposons montrent qu’il serait un des
premiers représentants du néo-chalcédonisme.
L’icône e(s)t l’original
22
Τὸ πρωτότυπον καὶ ἡ εἰκὼν ἓν μέν ἐστι τῇ ὑποστατικῇ ὁμοιώσει, δύο δὲ τῇ φύσει.
Théodore Stoudite, Antirrhétique contre les iconomaques III [Ἀντιρρητικὸς τρίτος κατὰ
εἰκονομάχων], ch. 4, PG, 99, col. 428C.
23
Μὴ δυοϋποστάτου οὔσης εἰκόνος καὶ τοῦ πρωτοτύπου ἐμφερείας, ἀλλὰ
μονοϋποστάτου. Παρὰ γὰρ τὸ διάφορον τῆς οὐσίας, ἓν καὶ ταυτὸν τὸ ἀρχέτυπον καὶ ἡ εἰκών.
Théodore Stoudite, Sept Chapitres contre les iconomaques [Κατὰ εἰκονομάχων κεφάλαια
ἑπτά], ch. 1, PG, 99, col. 489A.
24
Ἄλλη μὲν γὰρ φύσις τῆς ξυλογραφίας, καὶ ἑτέρα τοῦ Χριστοῦ· οὐκ ἄλλη δὲ ὑπόστασις,
ἀλλὰ μία καὶ ἡ αὐτὴ τοῦ Χριστοῦ καὶ τῇ εἰκόνι γεγραμμένη. Théodore Stoudite, Lettre à
Platon sur la vénération des images [Ἐπιστολὴ πρὸς Πλάτωνα περὶ τῆς προσκυνήσεως τῶν
εἰκόνων], 57, éd. par G. Fatouros, 2 vol. Corpus Fontium Historiae Byzantinae, 31/1
(Berlin : W. de Gruyter, 1992), i, p. 165.38‑40.
25
Théodore Stoudite, Antirrhétique contre les iconomaques III [Ἀντιρρητικὸς τρίτος
κατὰ εἰκονομάχων], ch. 2, PG, 99, col. 417A.
26
Ὁμοιώσει ταυτιζομένῃ ἠλλωτρίωται τῆς οὐσίας τοῦ ἀρχετύπου. Ibid., PG, 99,
col. 417B.
27
Ἡ διαφορὰ οὐκ ἐπὶ τῆς ὑποστάσεως, ἀλλὰ κατὰ τὸν τῆς οὐσίας λόγον. Théodore
Stoudite, Lettre CCXII à Jean Grammairien [Ἐπιστολὴ ΣΙΒ´ Ἰωάννῃ Γραμματικῷ], PG,
99, col. 1640 ; cf. aussi Antirrhétique contre les iconomaques III ([Ἀντιρρητικὸς τρίτος κατὰ
εἰκονομάχων], ch. 3, PG, 99, 425B-C) : τῇ οὐσίᾳ διακέκριται ὁ Χριστὸς πρὸς τὴν ἑαυτοῦ
εἰκόνα.
Maria Zoubouli
28
C. Kintzler, « La copie et l’original », Déméter (décembre 2003), p. 2 et passim.
29
Παντὸς εἰκονιζομένου οὐχ ἡ φύσις, ἀλλ’ ἡ ὑπόστασις εἰκονίζεται· πῶς γὰρ ἂν καὶ
ἐξεικονισθείη φύσις μὴ ἐν ὑποστάσει τεθεωρημένη. Théodore Stoudite, Antirrhétique contre
les iconomaques III [Ἀντιρρητικὸς τρίτος κατὰ εἰκονομάχων], ch. 1, PG, 99, 405Α-B.
30
J.-P. Vernant, « Figuration et image », dans Entre mythe et politique (Paris : Seuil,
1996), p. 385. Voir surtout le prologue intitulé « Identité différée, réflexion, altérité »,
dans A. Vasiliu, Eikôn : l’image dans le discours des trois Cappadociens (Paris : Presses uni-
versitaires de France, 2010), p. 11‑26 ; le livre propose une approche analytique de l’on-
tologie de l’image dans l’Orient chrétien et ses conclusions s’étendent au-delà du cadre
littéraire énoncé dans son titre.
31
Pour le résumé de l’ontologie orthodoxe en la matière, cf. Ch. Yannaras, Elements
of Faith (Edinburgh : T&T Clark, 1991), p. 26‑31. Cf. aussi S. Boulgakov : « Chaque
hypostase créée, […] non pas en tant qu’un ‘individu’, c’est-à-dire que du limité, mais
en tant qu’un centre hypostatique du tout, suffit déjà ontologiquement pour contenir et
réaliser la plénitude d’être dans sa nature. Mais elle n’est pas suffisante pour elle-même,
tant qu’elle est enfermée dans son ipséité, et pour s’accomplir, pour se réaliser elle-même,
elle exige un amour personnel, les ‘yeux multiples’ de l’être d’hypostases nombreuses, la
pluri-unité hypostatique à l’image de la Sainte Trinité, dont chaque esprit créé porte la
marque. Une hypostase ne doit en tout cas pas être seule, il faut qu’il y en ait de nom-
breuses. » L’Épouse et l’agneau : la création, l’homme, l’Église et la fin, trad. du russe par
C. Andronikov (Paris : l’Âge de l’homme, 1984), p. 86‑87.
L’icône e(s)t l’original
32
Εἰ δὲ δεῖ καὶ ἡμᾶς τὸ δοκοῦν ἡμῖν ἐν βραχεῖ εἰπεῖν, ἐκεῖνο ἐροῦμεν ὅτι ὃν ἔχει λόγον
τὸ κοινὸν πρὸς τὸ ἴδιον, τοῦτον ἔχει ἡ οὐσία πρὸς τὴν ὑπόστασιν. Ἕκαστος γὰρ ἡμῶν καὶ
τῷ κοινῷ τῆς οὐσίας λόγῳ τοῦ εἶναι μετέχει καὶ τοῖς περὶ αὐτὸν ἰδιώμασιν ὁ δεῖνά ἐστι καὶ ὁ
δεῖνα. Basile de Césarée, Lettre 214, 4, éd. par Y. Courtonne, Collection des universités
de France (Paris : les Belles lettres, 1961), p. 205 ; cf. aussi idem, Sur la différence entre
essence et hypostase [Γρηγορίῳ ἀδελφῷ περὶ διαφορᾶς οὐσίας καὶ ὑποστάσεως] ; voir surtout
les paragraphes 3 et 6, PG, 32, 328B et 336C-337A.
33
M. Anastos, « The Ethical Theory of Images Formulated by the Iconoclasts in
754 and 815 », dans Studies in Byzantine Intellectual History (Londres : Variorum Re-
Maria Zoubouli
prints, 1979), XI ; S. Gero, « The Eucharistic Doctrine of the Byzantine Iconoclasts and
its Sources », Byzantinische Zeitschrift, 68/1 (1975), p. 4‑22. Cf. aussi V. Déroche, « Re-
présentations de l’Eucharistie dans la haute époque byzantine », dans Mélanges Gilbert
Dagron, Travaux et Mémoires, 14 (Paris : Association des Amis du Centre d’Histoire et
Civilisation de Byzance, 2002), p. 167‑180.
34
Ce n’est évidemment pas la seule dimension politique de l’iconoclasme, ni la
plus importante ; nous suivons simplement le fil imposé par le cadre théorique de notre
approche, sans prétendre à une interprétation catholique du phénomène.
35
Cf. G. Didi-Huberman, Devant l’image…
36
Περὶ τῶν ἁγίων καὶ ἀχράντων τοῦ κυρίου μυστηρίων. Jean Damascène, Expositio
fidei…, p. 191‑198.
L’icône e(s)t l’original
37
Τὸ γὰρ νοερῶς δι’ ἀπουσίας βλεπόμενον, καὶ αἰσθητῶς διὰ περιγραφῆς εἰ μὴ βλέποιτο,
ἀπολέσειεν ἂν καὶ τὸ νοερῶς ὁπτάνεσθαι. Théodore Stoudite, Antirrhétique contre les ico-
nomaques III [Ἀντιρρητικὸς τρίτος κατὰ εἰκονομάχων], PG, 99, col. 436Α ; il s’agit de la
phrase de conclusion de ses trois discours antirrhétiques.
38
Nicéphore, Antirrhétique I [Ἀντίρρησις πρώτη], PG, 100, col. 244D.
39
M.-J. Mondzain-Baudinet (Nicéphore, Discours contre les iconoclastes, trad., prés.
et notes (Paris : Klincksieck, 1990), p. 9‑10) voit au contraire dans cette formulation un
non-sens scandaleux, dérivant d’un cynisme philosophique et ignorant la rigueur aristo-
télicienne au profit d’une opportunité stratégique.
Maria Zoubouli
telles 40. Une fois leur contenu affirmé comme l’hypostase d’une réalité, il
se concrétise et s’objectivise pour tous ceux qui partagent la foi en cette
réalité. Plus que l’aspect utilitaire de la « Bible des illettrés », c’est ce qui
fonde le plus solidement la force médiatique des images byzantines.
Dans cette assertion, la manifestation de l’archétype, sa présence,
est propre à chacune de ses instances à titre égal ; aucune n’est plus per-
tinente qu’une autre pour le représenter, qu’elle soit la première dans
l’ordre chronologique ou bien la plus proche de son modèle – voire
acheiropoïète, qui est par définition « l’initiative iconique de dieu » 41.
On a souvent soutenu que l’acheiropoïète revendique l’origine de la
conception de toute image 42. Prenons l’exemple de l’image de Kamou-
liana, dont l’histoire nous vient d’un texte du viie siècle, autrefois attri-
bué à Grégoire de Nysse : « S’étant lavé la figure, [le Christ] essuya son
très saint et inconnaissable visage sur le drap propre ; et tout de suite se
montra, en tant qu’empreinte de sa figure théanthrope, sa forme très
sainte et très vraie, telle qu’elle est aujourd’hui montrée à tous. Exacte-
ment comme auparavant il avait démontré sa propre incarnation par sa
propre philanthropie et condescendance, ainsi maintenant il la démontre
à nouveau 43 ». Dans cette histoire, l’image du Christ se produit comme
un miracle, dont on ne peut s’empêcher de considérer la redondance per-
40
N. Bryson, Vision and Painting : the Logic of the Gaze (New Haven, Londres :
Yale University Press, 1983), p. 62 sq.
41
Expression empruntée à G. Lingua : « Le acheropite e i fondamenti della teoria
dell’imagine cristiana », dans Sacre impronte e oggetti « non fatti da mano d’uomo » nelle
religioni : Atti del Convegno Internazionale, Torino, 18‑20 maggio 2010, éd. par A. Monaci
Castagno (Alexandrie : Edizioni dell’Orso, 2011), p. 125.
42
Cf., par exemple, C. Schönborn, « Les icônes qui ne sont pas faites de main
d’homme », dans Image et signification, Rencontres de l’École du Louvre (Paris : La
Documentation Française, 1983), p. 205‑220. Sur le contexte littéraire et culturel, voir
J. Trilling, « The Image not Made by Hands and the Byzantine Way of Seeing », dans
The Holy Face and the Paradox of Representation, éd. par H. L. Kessler, G. Wolf (Bo-
logne : Nuova Alfa Editoriale, 1998), p. 109‑127. Une pléiade d’articles sur la question
est à consulter dans Sacre impronte… Enfin, une analyse très intéressante est proposée
par M. Van de Port, « (Not) Made by the Human Hand : Media Consciousness and
Immediacy in the Cultural Production of the Real », Social Anthropology, 19/1 (2011),
p. 74‑89.
43
Καὶ νιψάμενος ἀπέμαξε τῇ καθαρᾷ κίδαρι τὸ ἄχραντον αὐτοῦ καὶ ἀνεξιχνίαστον
πρόσωπον· καὶ εὐθέως ἀπεδείχθη τύπος τῆς θεανθρώπου μορφῆς αὐτοῦ ὁ πανάγιος καὶ
ἀληθέστατος χαρακτήρ, ὡς πᾶσιν ἀποδείκνυται σήμερον. Καὶ καθάπερ πρότερον οἰκείᾳ
<αὐτοῦ> φιλανθρωπίᾳ καὶ συγκαταβάσει ἐπεδείξατο τὴν ἑαυτοῦ ἐνανθρώπησιν, οὕτω καὶ
νῦν ἐπιδείκνυται ταύτην. E. Dobschütz, Christusbilder : Untersuchungen zur christlichen
Legende, Texte und Untersuchungen, 18 (Leipzig : Hinrichs, 1899), p. 16**. Cf. aussi le
commentaire de H. Belting dans : Image et culte : une histoire de l’image avant l’époque de
l’art (Paris : Éd. du Cerf, 2007), p. 79‑84.
L’icône e(s)t l’original
44
Ὄντως παράδοξον θαῦμα καὶ φοβερόν, ὅτι ἐν ἡμῖν τοῖς πηλίνοις χαρακτῆρι ἀΰλῳ
καθορᾶται ὁ κτίστης. E. Dobschütz, Christusbilder…, p. 13**.
45
Cf. M. Van De Port, « (Not) Made by the Human Hand… ».
46
Sur l’acheiropoïète comme trace, voir A. Vasiliu, « L’image-empreinte, identi-
fiant visuel du Dieu-homme (Réflexions sur la trace, le portrait antique et le Mandylion
byzantin) », dans Sacre impronte…, p. 129‑151.
47
Cf. à ce propos J. Baschet, « Inventivité et sérialité des images médiévales »,
Annales. Histoire, Sciences Sociales, 51/1 (1996), p. 93‑133 ; G. Vikan (« Ruminations
Maria Zoubouli
on Edible Icons : Originals and Copies in the Art of Byzantium », dans Retaining the
Original : Multiple Originals, Copies and Reproductions, Studies in the History of Art, 20
(Washington : National galery of art, 1989), p. 57) : « It was the business of the Byzan-
tine artist to copy – to imitate and thereby perpetuate his model ‑ and it was the business
of the Byzantine christian to do likewise. For each, mimesis was an act of value in its own
right, through which they might gain access to the sanctity and power of the archetype.
Thus by necessity theirs was a world wherein copying was normative behavior. »
48
C’est pourquoi la psychologie dévotionnelle et le besoin de diffuser le sacré ne
suffisent pas pour expliquer la fonction et le message des icônes copiées, cf. G. Babić, « Il
modello e la replica nell’arte bizantina delle icone », Arte Cristiana, 76 (1988), p. 61‑92.
49
Expression empruntée à J. M. Foley dans son Introduction du volume collec-
tif Oral Tradition in Literature : Interpretation in Context (Columbia : University of
Missouri Press, 1986), p. 1‑9.
50
Cf. W. H. Kelber, « Modalities of Communication, Cognition and Physiology
of Perception : Orality, Rhetoric, Scribality », Semeia : an Experimental Journal for Bi-
blical Criticism 65 (1995), p. 198.
L’icône e(s)t l’original
51
Οἱ ζωγραφικήν, ἢ σκυτοτομικήν, ἢ ἄλλην τινα παιδευόμενοι τέχνην, οὐχ ὅπως μόνον
ἐπιστώνται [ταῦτα] μανθάνειν σπουδάζουσιν, ἀλλ’ ἵνα καὶ χειρουργῶσι, καὶ μιμητὰς σφὰς
[αὐτοὺς] τῶν διδασκάλων τοῖς ἔργοις δεικνύωσιν. Théodoret de Cyr, Thérapeutique des
maladies helléniques [Ἑλληνικῶν θεραπευτικὴ παθημάτων], XII, 6, PG, 83, col. 1123C.
Théodoret de Cyr, Thérapeutique des maladies helléniques, éd., et trad. par P. Canivet,
vol. 2, 2e éd., SC, 57 (Paris : Éd. du Cerf, 2001), p. 419‑420.
52
H. Kessler, « The State of Medieval Art History », The Art Bulletin, 70 (1988),
p. 76 et passim.
53
J. Baschet, « Inventivité et sérialité… », p. 113.
54
« Notions of artistic originality [are] foreign to the byzantine mind » soutient
G. Vikan (« Ruminations on Edible Icons… », p. 57). D’opinion contraire sont H. Ma-
guire et E. Dauterman-Maguire (Chapitre 1 : « Novelties and Inventions in Byzantine
Art », dans Other Icons : Art and Power in Byzantine Secular Culture (Princeton, Oxford :
Princeton University Press, 2007), p. 5) : « Novelty and invention played a larger role in
Byzantium than has been recognized, in spite of an official ideology that discouraged
innovation of all kinds. » Voir aussi les contributions rassemblées par A. R. Littlewood :
Originality in Byzantine Literature, Art and Music (Oxford : Oxford University Press,
1995).
Maria Zoubouli
Izabela Jurasz
1
K. Parry, « Byzantine and Melkite Iconophiles under Iconoclasm », dans Por-
phyrogenita : Essays on the History and Literature of Byzantium and the Latin East in
Honour of Julian Chrysostomides, éd. par Ch. Dendrinos et J. Harris (Aldershot, Burling‑
ton : Ashgate, 2003), p. 137‑151 ; L. Brubaker, « On the Margins of Byzantine Icono‑
clasm », dans Byzantina-Metabyzantina : la périphérie dans le temps et l’espace, Dossiers
byzantins, 2 (Paris : Centre d’études byzantines, néo-helléniques et sud-est européennes,
École des hautes études en sciences sociales, 2003), p. 107‑117.
2
Cf. J. Tixeront, Histoire des dogmes dans l’Antiquité chrétienne, 3 vol. (Paris : Le‑
coffre, 1912), iii, p. 435‑483 ; A. Grabar, L’iconoclasme byzantin (Paris : Flammarion,
1984), p. 114 ; G. Ostrogorsky, Studien zur Geschichte des byzantinischen Bilderstreites
(Breslau : Marcus, 1929). Cette proposition a été critiquée dans les recensions par
R. Draguet (Revue belge de philologie et d’histoire, 9 (1930), p. 197‑199) et par H. Gré‑
goire (Byzantion 4 (1927/28), p. 765‑771).
3
Cf. S. Gero, Byzantine Iconoclasm during the Reign of Leo II, with Particular At-
tention to the Oriental Sources, Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, 346 ;
Subsidia 41 (Louvain : Imprimerie Orientaliste, 1973) ; L. W. Barnard, The Graeco-Ro-
man and Oriental Background of the Iconoclastic Controversy (Leiden : E. J. Brill, 1974).
4
Cf. H. Buchthal, « The Painting of the Syrian Jacobites in its Relation to By‑
zantine and Islamic Art », Syria 20 (1939), p. 136‑150 ; M. Mundell, « Monophysite
Church Decoration », dans Iconoclasm : Papers given at the Ninth Spring Symposium of
Byzantine Studies, éd. par A. Bryer et J. Herrin (Birmingham : Centre for Byzantine Stu‑
dies University of Birmingham, 1977), p. 59‑74.
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 111-152
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111929
Izabela Jurasz
Les Origines
Portrait du Christ (Doctrine d’Addaï et Actes de Mar Mari)
La légende du roi édessenien Abgar qui échange des lettres avec Jésus et
reçoit l’empreinte de son visage, est insérée dans les deux apocryphes re‑
latifs aux origines de l’Église syriaque : la Doctrine d’Addaï et les Actes de
Mar Mari. Ces documents rassemblent des traditions antérieures pour
raconter les origines apostoliques et les aspirations de l’Église d’Édesse
et celle de Perse. Les Byzantins découvrent l’image d’Edesse à l’occasion
des guerres contre les Perses, lorsque ces derniers assiègent sans succès
Édesse en 540‑544. La victoire est attribuée à la bénédiction du Christ
liée à une lettre et/ou une image considérée comme objet apotropaïque
qui devient célèbre en tant qu’image ἀχειροποιητή « non réalisée par la
5
S. Brock, « Iconoclasm and the Monophysites », dans Iconoclasm…, p. 53‑57.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
main humaine ». Par ces deux qualités, l’image édessenienne a reçu une
place privilégiée dans l’argumentation des défenseurs des icônes 6.
La Doctrine d’Addaï fut rédigée probablement au début du ve et
au vie siècle à partir de documents plus anciens 7. Elle inclut la légende
concernant le roi Abgar et Jésus, avec l’épisode du portrait :
Puisque Jésus lui parlait ainsi, l’archiviste Hannan, qui était peintre
(sira) du roi, mit en peinture (sar) l’image de Jésus (salmah) avec des
pigments de choix et l’apporta au roi Abgar son maître. Quand le roi
Abgar vit cette image (salma), il la reçut avec grande joie et la plaça avec
grand honneur dans l’une des pièces de son propre palais 8.
Le texte parle d’une image peinte de manière tout à fait ordinaire, reçue
avec les honneurs à Édesse. Cependant, la bénédiction du Christ pour
Édesse et l’assurance que cette ville ne sera jamais conquise par l’enne‑
mi est assurée par la lettre. Il y a pourtant un lien entre les deux objets,
confiés au messager Hannan qui est à la fois archiviste et peintre.
L’autre version de cette légende se trouve dans les Actes de Mari (com‑
posés au viie siècle environ) qui racontent les origines de l’Église en Perse.
Les Actes reprennent de nombreux éléments de la Doctrine d’Addaï, entre
autre l’histoire du portrait 9. Le commentaire qui l’accompagne est très
singulier : l’idée du portrait vient des peuples non-juifs qui ont obtenu des
bienfaits de la part de Jésus et qui voulaient lui rendre hommage : « Pour
6
Jean Damascène, Discours sur les images, I.33. Procope de Césarée (Bellum persi-
cum, II.12) parle de la lettre du Christ qui protège Edesse pendant le siège en 504. Sur la
légende de l’image, cf. Évagre le Scolastique (Histoire ecclésiastique, IV.27) et les Actes de
Thaddée, 3‑4) ; cf. aussi A. Cameron, « The History of the Image of Edessa : the Telling
of a Story », Harvard Ukrainian Studies, 7 (1983), p. 80‑94 ; idem, « The Mandylion
and Byzantine Iconoclasm », dans The Holy Face and the Paradox of Representation :
Papers from a Colloquium at the Bibliotheca Hertziana, Rome and the Villa Spelman, éd.
par H. Kessler et G. Wolf (Bologna : Nuova Alfa Editoriale, 1998), p. 33‑54.
7
A. Desreumaux, « La Doctrine d’Addaï, l’image du Christ et les monophysites »,
dans Nicée II, 787‑1987 : Douze siècles d’images religieuses. Actes du colloque international
Nicée II tenu au Collège de France, Paris les 2, 3, 4 octobre 1986, éd. par F. Boespflug et
N. Lossky (Paris : Éd. du Cerf, 1987), p. 73‑79 ; H. J. W. Drijvers, « The Image of Edes‑
sa in the Syriac Tradition », dans The Holy Face and the Paradox of Representation…,
p. 13‑31.
8
Doctrine d’Addai, 6, dans Histoire du roi Abgar et de Jésus, trad., introd. et notes
par A. Desreumaux, Apocryphes 1 (Turnhout : Brepols, 1993), p. 59 ; texte syriaque :
G. Howard, The Teaching of Addai, Early Christian Literature Series, 4 (Chicago : Cali‑
fornia Scholars Press, 1981), p. 8.
9
Sur le rapport entre les deux documents : Ch. et F. Jullien, Aux origines de l’Église
de Perse : les Actes de Mar Mari, Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, 604 ;
Subsidia, 114 (Louvain, Paris : E. Peeters), 2003.
Izabela Jurasz
cette raison, sous des aspects variés, ils peignirent avec réalisme, trait pour
trait, l’image (dmuta) et le portrait (yuqna) de Notre Seigneur adorable,
le montrant comme un théophore [littéralement ‘vêtu de Dieu’] 10. »
Le vocabulaire concernant l’image est différent de celui utilisé dans la
Doctrine d’Addaï. L’auteur cite en outre un fragment de l’Histoire ecclésias-
tique d’Eusèbe de Césarée qui mentionne une statue de Jésus guérissant
l’hémorroïsse 11. Il est question du « portrait (yuqna) du Christ Notre Sau‑
veur dans la chair », puis d’une « statue (salma) en bronze, ressemblant à
une suppliante […] » et d’« une autre statue (salma) en bronze : un homme
vêtu d’un manteau ». On lit aussi que « cette statue représentait (dmuteh-
wa) Notre Sauveur ». En conclusion l’auteur dit : « En maints endroits,
en peignait son portrait (salma) avec des pigments broyés qui ont subsisté
jusqu’à présent ; de ce fait, dès le commencement et de manière profane, les
païens vénéraient ainsi cette figure (tupsa) comme le Sauveur 12. »
L’auteur syriaque traduit librement le passage d’Eusèbe et pour par‑
ler de l’image du Christ il dispose d’un vocabulaire syriaque propre.
Toute image en tant qu’objet matériel, peinture ou sculpture, est appe‑
lée salma. L’image au sens de « ressemblance » c’est dmuta. Le terme
yuqana, calque du εἰκών grec, signifie plutôt « portrait », mais pas tou‑
jours. Enfin, le terme tupsa est un autre calque du grec, du τύπος. Ce vo‑
cabulaire permet des distinctions intéressantes, car si la statue du Christ
est un résidu du paganisme, l’image destinée au roi Abgar ne l’est pas :
Que fit dont le roi Abgar ? Il vit des peintres habiles, et leur ordonna
d’aller avec des émissaires peindre et rapporter en image (b-yuqna) le vi‑
sage de Notre Seigneur, pour qu’il se réjouisse par son image (b-salmah)
comme s’il le rencontrait [en personne]. Ainsi les peintres vinrent avec
10
Les Actes de Mar Mari, 1, éd. par Ch. et F. Julien, Corpus Scriptorum Chris‑
tianorum Orientalium, 602‑603 ; Scriptores Syri, 234‑235, p. 18 (traduction), p. 13
(texte syriaque).
11
Eusèbe de Césarée, Histoire ecclésiastique, VII, 18, 2‑4, éd. par G. Bardy, SC,
41 (Paris : Éd. du Cerf, 1994), p. 192. Dans le texte grec, Eusèbe emploie les termes
relevant du vocabulaire technique pour parler des statues : τρόπαιον, ἔκτυπος, σχῆμα,
στήλη, ἀνδριάς. Il affirme que « certains disent que cette statue porte les traits (images)
de Jésus » (τὸν ἀνδριάντα εἰκόνα τοῦ Ἰησοῦ φέρειν). Il mentionne les « images » (ἐικόνες)
des apôtres Pierre et Paul et du Christ lui-même, faites par le moyen des couleurs, dans
des tableaux (διὰ χρωμάτων ἐν γραφαῖς) », qu’il explique comme une coutume des an‑
ciens, vivant encore « selon l’usage païen qui existait chez eux ». Sur l’iconoclasme
d’Eusèbe : A. Chryssostalis, « L’iconoclasme et la Lettre à Constantia, attribuée à Eusèbe
de Césarée, selon le Père Georges Florovsky (1893‑1979) », Pensée orthodoxe, 9 (2012),
p. 103‑111.
12
Les Actes de Mar Mari…, 1, p. 18‑19 (traduction), p. 13‑14 (texte syriaque).
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
Izabela Jurasz
Fuyez donc les choses créées et les créatures : comme je vous l’ai dit, elles
ne sont appelées dieux (alahe) que par le nom, puisqu’elles ne sont pas
dieux de par leur nature. Approchez-vous de celui qui, par sa nature, est
Dieu depuis toujours et depuis l’éternité. Il n’est pas fabriqué comme
vos idoles (ptakre). Il n’est même pas une créature ni un ouvrage comme
les images (salme) dont vous vous glorifiez 16.
16
Doctrine d’Addaï…, 55 ; Histoire du roi Abgar…, p. 87.
17
C’est un écho des croyances populaires dans la Méditerranée orientale, chez
les Grecs et les Syriens hellénisés, en présence d’une force divine dans des représen‑
tations religieuses. En 392, Porphyre devint le premier staurophylax (gardien de la
croix). Pour combattre l’idolâtrie des habitants de Gaza, il utilise à la fois la relique
et le geste de la croix, cf. Marc le Diacre, Vie de Porphyre, évêque de Gaza, 20, 31, 77,
100, éd. par H. Grégoire, M.-A. Kruger, Collection Byzantine (Paris : les Belles lettres,
1930).
18
Cf. Athénagore, Supplique au sujet des chrétiens, 18.24.26‑27 ; Aristide, A
pologie,
3 ; Justin Martyr, Apologie, 9 ; Clément d’Alexandrie, Le Protreptique, 4 ; Lettre à
Diognète, 2 ; Tertullien, Sur l’idolâtrie.
19
Cf. E Kitzinger, « The Cult of Images in the Age Before Iconoclasm », Dumbar-
ton Oaks Papers, 8 (1954), p. 83‑150.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
20
Texte syriaque édité par W. Cureton : Spicilegium Syriacum, Containing Remains
of Bardesan, Meliton, Ambrose and Mara bar Serapion (Londres : F. and J. Rivington,
1855), p. 22‑35. Pour une traduction du grec, cf. A. Camplani, « Rivisitando Bardesane :
note sulle fonti siriache del bardesanismo e sulla sua collocazione storico-religiosa »,
Cristianesimo nella storia, 19 (1998), p. 519‑598 (p. 586). L’attribution à Méliton de
Sardes : I. Ramelli, « L’apologia siriaca di Melitone ad ‘Antonio Cesare’ : osservazioni e
traduzione », Vetera Christianorum, 36 (1999), p. 259‑286.
21
Spicilegium Syriacum…, p. 26. La traduction française est par moi.
Izabela Jurasz
22
Spicilegium Syriacum…, p. 33. La traduction française est par moi.
23
Spicilegium Syriacum…, p. 26 et 27. La traduction française est par moi.
24
Cf. Dt 5, 8 ; Ex 20, 23 ; Lv 19, 4 ; Lv 26, 1 ; Dt 27, 15. Sur l’évolution vers le
monothéisme : G. von Rad, Théologie de l’Ancien Testament, trad. par A. Goy, 2 vol.,
Nouvelle série théologique, 19 (Genève : Labor et Fides, 1963‑1967), ii : Théologie des
traditions prophétiques d’Israël (1967). Voir aussi : S. Petry, « Das Gottesbild des Bilder‑
verbots », dans Die Welt der Götterbilder, éd. par B. Groneberget, H. Spieckermann,
Beihefte zur Zeitschrift für die alttestamentliche Wissenschaft, 376 (Berlin, New York :
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
Pourquoi les images, εἰκόνον, sont-elles d’un usage interdit ? Parce qu’au
moment de les mettre en place, il est d’usage de leur offrir de l’encens (c’est
un acte d’idolâtrie). Il est permis de les regarder, dit R. Yohanan, une fois
qu’elles sont à terre (non plus debout), comme il est dit (Ps 37, 34) : tu ver-
ras le retranchement des impies. On ne devra pas regarder le samedi l’ins‑
cription courante placée au-dessous des bas-reliefs ou des images peintes,
ni même les jours de la semaine, en vertu des mots (Lv 19, 4) : ne vous
tournez pas vers les idoles : même se tourner vers elles c’est une adoration 27.
Izabela Jurasz
Le souci principal des rabbins n’était pas l’existence des images, mais le
culte qui leur était rendu. La même attention est réservée aux lieux, ob‑
jets et fêtes païennes : les Juifs doivent éviter tout contact avec le culte des
divinités étrangères. L’Avodah Zara entend en fait le culte d’abord par le
sacrifice accompli au Temple. Après la destruction du Temple, les textes
rabbiniques appellent « culte » les sacrifices et prières devant les idoles.
L’Avoda Zara n’évoque cependant pas le « culte » chrétien, car celui-ci
était différent aussi bien de l’ancien culte juif que du culte païen.
Les Perses ont, je le sais, les coutumes suivantes : ils n’élèvent aux dieux
ni statues, ni temples, ni autels et traitent d’insensés ceux qui leur en
élèvent ; c’est, je pense, qu’ils n’ont jamais attribué de forme humaine à
leurs dieux, comme le font les Grecs 28.
entre juifs et païens en Judée romaine », Revue des études juives, 158 (1999), p. 553‑567 ;
M. Halbertal, « Coexisting with the Enemy : Jews and Pagans in the Mishnah », dans
Tolerance and Intolerance in Early Judaism and Christianism, éd. par G. N. Stanton et
G. G. Stroumsa (Cambridge : Cambridge University Press, 1998), p. 159‑172.
28
Hérodote, Historia, I, 131, 1, trad. par Ph.-E. Legrand (Paris : les Belles lettres,
1962), p. 150‑151. Hérodote parle aussi des sacrifices et autels, cf. Historia, I.131.2‑132.3.
29
M. Boyce, « Iconoclasm among the Zoroastrians », dans Christianity, Judaism
and Others Greco-Romans Cults : Studies for Morton Smith at Sixty, éd. par J. Neusner,
Studies in Judaism in late antiquity, 12, 4 vol. (Leiden : E. J. Brill, 1975), iv : Judaism
after 70 : Other Greco-Roman Cults, p. 96‑97. Des statues et autels ont été retrouvés dans
les sanctuaires à Persépolis et à Suze, ainsi que dans la tombe de Darius à Pasargadas.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
30
Ahura Mazda est le père d’Asa ( Justice), de Vohu Manah (Bonne Pensée) et
d’Armaiti (Application). Il est aussi père de l’« Esprit Bienfaisant » et de son jumeau
l’« Esprit Destructeur ». Cette forme du polythéisme iranien, radicalement dualiste, est
connue sous nom de zervanisme ; cf. Plutarque, Isis et Osiris, 46‑47.
31
Cf. J. Duchesne-Guillemin, La religion de l’Iran ancien (Paris : Presses universi‑
taires de France, 1962). Sur la présence de Zoroastre dans le monde grec et aussi syriaque,
voir : J. Bidez et F. Cumont, Les mages hellénisés, 2 vol. (Paris : les Belles lettres, 1938).
32
Cf. J. Duchesne-Guillemin, La religion…, p. 77‑95.
33
J. Duchesne-Guillemin, Zoroastre : une étude critique avec une traduction com-
mentée des Gâthâ (Paris : R. Laffont, 1975), p. 136.
34
Cf. M. Boyce, « Iconoclasm among the Zoroastrians… », p. 97, 103. Sur la cos‑
mologie zoroastrienne : J. Duchesne-Guillemin, Zoroastre…, p. 96‑97.
35
Tel est le cas de la Bactriane, de la Parthie ou de l’Arménie, cf. Flavien Joseph,
Antiquités juives, XVIII.344. Sur l’Arménie voir : S. Der Nersessian, « Une apologie
des images du septième siècle », Byzantion, 17 (1944), p. 61‑63. Les éléments iraniens
à Dura Europos : C. P. Kelley, « Who did the Iconoclasm in the Dura Synagogue ? »,
Bulletin of the American Schools of Oriental Research, 295 (1994), p. 57‑72.
Izabela Jurasz
pratique commence déjà au ier siècle après J. C. Dès leur arrivée au pouvoir,
les Sassanides (266) transforment les lieux de culte en temples de feu, où
les statues sont remplacées par l’icône vivante de la divinité, le feu 36. Une
politique résolument iconoclaste est mise en œuvre au vie siècle, lorsque
l’adoration des images sculptées est interdite par la loi. Cette officialisa‑
tion tardive est peut-être une des raisons pour lesquelles l’iconoclasme zo‑
roastrien antérieur à cette date est si difficile à cerner – d’autant plus qu’il
se montre tolérant à l’égard des autres images (rois, ancêtres, etc.).
36
Cf. M. Boyce, « Iconoclasm among the Zoroastrians… », p. 104‑108. Voir aus‑
si : J. de Menasce, Feux et fondations pieuses dans le droit sassanide (Paris : Klincksieck,
1966) ; M. Boyce, « On the Sacred Fires of the Zoroastrians », Bulletin of the School of
Oriental and African Studies, 31 (1968), p. 52‑68.
37
Des heiligen Ephraem des Syrers Hymnen de Paradis und Contra Julianum, éd. et
trad. par E. Beck, Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, 174‑175 ; Scriptores
Syri, 78‑79 (Louvain : Secrétariat du Corpus SCO, 1957). Voir aussi : Claudius Mamerti-
nus, John Chrysostom, Ephrem the Syrian, The Emperor Julian : Panegyric and Polemics, éd.
par S. N. C. Lieu et J. M. Lieu (Liverpool : Liverpool University Press, 1986), p. 90‑134.
38
Cf. Ch. Shepardson, Anti-Judaism and Christian Orthodoxy : Ephrem’s Hymns
in Fourth-Century Syria, Patristic monograph series, 20 (Washington : Catholic Univer‑
sity of America Press, 2008).
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
n ce temps quand ils se sont réveillés, les sculptures (glype) ont repris vie,
E
Les idoles (ptakre) accusent les païens […]
Les païens portent leurs idoles (ptakre) et font émeute
Les circoncis sonnent les trompettes et s’agitent follement […] 41.
39
Les persécutions des chrétiens en Perse sassanide commencent à la fin du iiie
siècle, mais leur apogée a eu lieu pendant le règne de Shapur II (309‑379). On connaît 41
« passions de martyrs » pour cette période : Ch. Jullien, « Les Actes des martyrs perses :
transmettre l’histoire », dans L’hagiographie syriaque, éd. par A. Binggeli (Paris : Geuth‑
ner, 2012), p. 127‑140.
40
Il s’agit sans doute de la plus violente des polémiques chrétiennes contre Julien :
S. H. Griffith, « Ephraem the Syrian’s Hymns ‘Against Julian’ : Meditations on History
and Imperial Power », Vigiliae Christianae, 41 (1987), p. 238‑266.
41
Contra Julianum, I.4 et II.7, dans Des heiligen Ephraem des Syrers Hymnen…,
p. 72 et 77 (texte) ; la traduction française est par moi.
Izabela Jurasz
42
Contra Julianum…, I, 16‑17, p. 74. Plus loin (I, 18) se trouve encore une allusion
aux veaux-idoles du roi Jéroboam (1 R 12, 25‑33), mais elle est moins importante. Sur
l’iconographie de Julien : T. Moreau, « Julien et la Croix, un anti-Constantin », Revue
des études tardo-antiques, 2 (2012‑2013), p. 219‑272 (sur le taureau : p. 232‑236).
43
Sur l’attitude de Julien favorable aux Juifs : P. Schäfer, Histoire des Juifs dans l’An-
tiquité, Patrimoines (Paris : Éd. du Cerf, 2007), p. 210‑213.
44
Il s’agit des rois Achab, Jéroboam, Joatham et Manassé, et des reines Jézabel
et Athalie (Contra Julianum II.2). Sur Julien et Achab : Contra Julianum, IV.5. Une
liste identique des rois idolâtres est donnée par Grégoire de Nazianze (Discours, V.3),
cf. S. N. C. Lieu et J. M. Lieu, The Emperor Julian…, p. 113, no 29.
45
Nabuchodonosor détruisit le Temple de Jérusalem et conduit une partie de la
population en exil (Jr 52). À Babylone, il dressa une statue d’or et jeta dans la fournaise
les jeunes Hébreux qui lui refusèrent le culte (Dn 3, 1‑23). Le même roi est concerné par
les prophéties de Daniel, ce qu’Éphrem mentionne à plusieurs reprises (I, 20 ; II, 14 ; IV,
23).
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
Le Mage qui entra dans notre lieu, le garda sacré, à notre honte,
Il négligea son temple du feu et honora le sanctuaire,
Il abolit les autels qui furent construits à cause de notre relâchement,
Il détruisit les enceintes [sacrées], à notre honte
Car il sut de quel temple unique sortit/la grâce qui nous sauva de lui
trois fois.
Combien montra-t-il le visage de vérité dans notre ville 47 !
46
Contra Julianum…, I, 14, 20, p. 78‑80.
47
Contra Julianum…, II, 22‑23, p. 80.
48
L’hymne II s’achève par une affirmation surprenante : « Alors que notre roi fut
un prêtre païen et déshonora nos églises, le roi mage honora le sanctuaire, il augmenta
notre consolation, car il honora notre sanctuaire, il nous attrista et nous réjouit, et ne
nous bannit pas. » Contra Julianum…, II, 27, p. 81. Cette indulgence d’Éphrem est pour
le moins surprenante, cf. S. N. C. Lieu et J. M. Lieu, The Emperor Julian…, p. 116, no 53.
49
Pour les textes syriaques relatifs à Zoroastre, cf. J. Bidez et F. Cumont, Les mages
hellénisés…, i, p. 93‑135. Zoroastre est un « mage » au sens péjoratif, comme celui qui
pratique la magie. L’empereur Julien est à son tour appelé « chaldéen », qui veut dire
« astrologue », peut-être à cause de sa dévotion au Soleil.
Izabela Jurasz
dans le titre du recueil, sont précisément les oracles des mages. Ils sont un
point commun, permettant d’établir un rapport entre les différents types
du paganisme et leurs formes d’idolâtrie.
Les hymnes Contre Julien nous renseignent sur la conception éphre‑
mienne de l’image de Dieu. L’hymne III est une louange de la croix qui
protégea Nisibe contre les invasions païennes. La croix devient une par‑
faite antithèse aux idoles et une véritable image de Dieu. Sa puissance
n’est aucunement mise en cause par la conquête de la ville, car les idoles
et les fausses doctrines des mages sont détruites malgré tout (IV, 21‑22.
26).
La croix est-t-elle donc une image de Dieu ? Il semble que pour
Éphrem elle est la seule « image » possible. Inutile de chercher chez
Éphrem des informations sur les images peintes ou sculptures autres
que les idoles. Ses idées sur l’image de Dieu sont exposées par exemple
dans les Carmina Nisibena composés à la même époque que les hymnes
Contre Julien :
50
Éphrem, Carmina Nisibena, III, 2‑3, dans La descente aux enfers : Carmina Ni-
sibena, trad. et introd. par D. Cerbelaud (Mont des Cats : Éditions de Bellefontaine,
2009), p. 46‑47.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
Théologie de l’image
La conception syriaque de l’image de Dieu commence avec les légendes
du portrait de Jésus et de la découverte de la croix. Elle est forgée au cours
des confrontations avec les Juifs et les Perses. Cette même théologie se
lit également à travers d’autres écrits, moins polémiques. De manière gé‑
nérale, elle est fondée sur une interprétation rigoureuse du concept de
ressemblance, dmuta. Ce terme est utilisé par les versions syriaques du
Nouveau Testament dans des versets comme Col 1, 15 (« Il est l’image
du Dieu invisible »), 1 Co 15, 49 (« Et de même que nous avons por‑
té l’image du terrestre, nous porterons aussi l’image du céleste »), Rm
5, 14 (« Adam […] figure de celui qui devait venir ») 51. Dans Gn 2, 7,
Adam est dit être « créé à l’image (salma) et à la ressemblance (dmuta)
de Dieu ». Le second terme, salma, est habituellement employé pour
indiquer les images matérielles et les idoles (cf. Ex 20, 4 ; Ez 8, 20 ; Am
5, 26 ; Ac 19, 35 ; Rm 1, 23). Cependant, salma n’est pas forcément un
terme péjoratif, car Gn 1, 27 parle de l’homme « créé à l’image (salma)
et à la ressemblance (dmuta) » et He 1, 3 appelle le Christ « image (sal-
ma) de sa [Dieu] substance ».
Lorsque les auteurs syriaques ne parlent pas de l’idolâtrie, l’image
est toujours une ressemblance, dmuta, la plus proche de l’original. Cette
notion possède une importante connotation anthropologique, car
l’homme est le seul « matériau » capable de former une image de Dieu.
Un exemple vient du dialogue de Bardesane († 222), Le livre des lois des
pays : « Les hommes ne suivent pas les mêmes lois ; ils suivent la nature
comme les animaux en ce qui touche à leur corps, mais dans les choses de
l’esprit ils ont ce qu’ils veulent car ils sont des êtres libres, maîtres d’eux-
mêmes et images (dmute) de Dieu 52. » Bardesane parle de la dmuta, la
ressemblance avec Dieu, manifestée en êtres libres. Les hommes, bien
51
Les autres occurrences du terme dmuta : Lc 3, 22 ; Ph 3, 17 ; 2 Cor 4, 4 ; 1 Th 1, 7 ;
1 Tm 4, 12 ; He 1, 1 ; 9, 24 ; Ap 1, 13 ; 4, 3.7 ; 9, 7.10 ; 11, 1 ; 13, 2 ; 14, 14 ; 21, 11.
52
Livre des Lois des pays, 16, éd. et trad. latine par F. Nau, Patrologia Syriaca, 2
(Paris : Firmin-Didot, 1907), col. 560. Traduction française dans : Bardesane l’Astro‑
logue, Le Livre des Lois des pays, trad. par F. Nau (Paris : E. Leroux, 1899), p. 36.
Izabela Jurasz
que soumis aux lois de la nature, possèdent le libre arbitre qui les rend
« images » de Dieu.
La ressemblance d’Adam avec Dieu est abordée dans la Caverne des
trésors, un apocryphe syriaque rédigé principalement au iiie siècle (la ré‑
daction fut achevée vers le vie siècle) 53. Au chapitre 2 est décrit l’aspect
d’Adam créé par Dieu : les anges furent troublés à cause de « la beauté
de sa ressemblance » (šapra d-dmuteh) : « Ils virent alors la ressemblance
(dmuta) de son visage qui s’enflammait de lumière glorieuse comme le
vêtement du soleil, et la ressemblance (dmuta) de son corps, comme la
lumière glorieuse du cristal 54. »
La ressemblance d’Adam se manifeste aussi dans son aspect extérieur,
car il possède tous les attributs de la gloire divine. Mais cette ressemblance
réside en l’extraordinaire dignité qui lui est accordée : le pouvoir sur toute
la création (II, 23‑24), l’adoration par les anges (II, 25), le chant « saint,
saint, saint » qui accompagne l’entrée d’Adam au paradis (III, 8).
53
La Caverne des trésors est un recueil de légendes bibliques : Su-Min Ri, La Ca-
verne des trésors : les deux recensions syriaques, Corpus Scriptorum Christianorum Orien‑
talium, 486‑487 ; Scriptores Syri, 207‑208 (Louvain : E. Peeters, 1987).
54
Caverne des trésors…, II, 13, p. 9 (traduction) ; p. 17 (texte syriaque).
55
Les Odes de Salomon, trad., introd. et notes par M.-J. Pierre, Apocryphes, 4
(Turnhout : Brepols, 1994), p. 95‑96. Analyse et commentaire : Oden Salomos, texte,
éd., trad., introd. par M. Lattke, 2 vol. (Göttingen : Vandenhoeck & Ruprecht, 1999),
i, p. 247‑255. Voir aussi J. H. Charlesworth, The Anchor Bible Dictionary, vol. 6, éd. par
D. N. Freedman (New York : Doubleday, 1992), p. 114.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
Sans doute parce que, comme les vrais miroirs sont plus clairs, plus purs
et plus lumineux que le miroir de l’œil, de même dieu est plus pur et plus
lumineux que la partie la meilleure de notre âme ? […]
C’est donc le dieu qu’il faut regarder : il est le meilleur miroir des choses
humaines elles-mêmes pour qui veut juger de la qualité de l’âme, et c’est
en lui que nous pouvons le mieux nous voir et nous connaître 57.
56
Il s’agit d’enlever du visage les ornements, le maquillage ou la peinture. Sur le
mot « fard » : M. Lattke, Oden Salomos…, p. 251‑255.
57
Alcibiade, 133c1‑10, éd. et trad. par M. Croiset (Paris : les Belles lettres 1999),
p. 110. Le passage 133c1‑10 est absent des manuscrits et transmis dans la tradition
doxographique, entre autre par Eusèbe de Césarée, cf. Préparation évangélique, XI.27.5.
Il s’agit donc d’une glose platonicienne, mais bien en accord avec l’esprit du dialogue :
commentaire de la Préparation évangélique par G. Favrelle, SC, 292 (Paris : Éd. du Cerf,
1982), p. 367‑374. Sur le rapport entre Ode 13 et le passage d’Alcibiade, cf. M. Lattke,
Oden Salomos…, p. 249‑250.
58
Les Actes de Jean ont été rédigés en grec à la moitié du iie siècle, mais comportent
une partie (ch. 94‑102) provenant des milieux gnostiques. Ils ressemblent aux textes sy‑
riaques, tels les Actes de Thomas et les écrits de Bardesane : Acta Iohannis, éd. par E. Junod
et J.-D. Kaestli, Corpus Christianorum Series Apocryphorum, 1‑2 (Turnhout : Brepols,
1983) ; E. Junod et J. D. Kaestli, L’histoire des actes apocryphes des apôtres du iiie au ixe
siècle : le cas des Actes de Jean, Cahiers de la Revue de théologie et de philosophie, 7 (Ge‑
nève, Lausanne, Neuchâtel : Revue de théologie et de philosophie, 1982), p. 35‑47.
Izabela Jurasz
Lycomède, homme ressuscité par Jean, voulait avoir son portrait, qui était
pour lui l’apôtre lui-même (αὐτὸν ἔχειν). Le portrait est ensuite couronné
et entouré de lumières. La réaction de Jean est très éloquente. Il demande :
« Est-ce l’un de tes dieux qui se trouve peint ici ? Je vois en effet que tu vis
encore en païen ». Lycomède tente une explication et voici ce qui se passe :
Jean, qui n’avais jamais vu son visage, lui dit : « Tu te moques de moi,
petit enfant ! Est-ce là ma figure ? Par ton Seigneur, comment me per‑
suaderas-tu que ce portrait me ressemble ? » Alors Lycomède lui ap‑
porta un miroir. Il s’y regarda, puis considéra attentivement le portrait
et dit : « Par la vie du Seigneur Jésus-Christ, ce portrait me ressemble ;
en fait, mais pas à moi, mon enfant, mais à mon image charnelle. […]
Mais toi, Lycomède, sois un bon peintre pour moi. Tu possèdes des cou‑
leurs qui te donne par mon intermédiaire celui qui pour lui-même nous
peint tous, Jésus, lui qui connaît les figures, traits, aspects, dispositions
et formes de nos âmes. Voici les couleurs avec lesquelles je vais te dire de
peindre : la foi en Dieu, la connaissance, la crainte religieuse, l’amitié, la
communion, la douceur, la bonté, l’amour fraternel, la chasteté, la pure‑
té, l’absence de trouble, de peur, de tristesse, la sainteté ; tout ce chœur
de couleurs qui compose le portrait de ton âme […] » 59.
59
Acta Iohannis…, 28‑29, p. 178‑181. Voir aussi le commentaire : ibid., p. 446‑456.
60
Acta Iohannis…, 29, p. 180.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
61
Dans les deux cas il est question de séparation entre l’image et le personnage :
Plotin, Traité 31 [V, 8], 1, trad. par J. Laurent, dans Plotin, Traités 30‑37, sous la dir. de
L. Brisson et J.-F. Pradeau (Paris : GF Flammarion, 2006), p. 90‑91 ; Traité 44 [VI, 3], 15,
trad. par L. Brisson, dans Plotin, Traités 42‑44, sous la dir. de L. Brisson et J.-F. Pradeau
(Paris : GF Flammarion, 2008), p. 220.
62
« Supporter un peintre ou un sculpteur lui paraissait indigne au point même
qu’il répondit à Amélius le priant d’autoriser que l’on fît son portrait : ‘Il ne suffit donc
pas de porter ce reflet dont la nature nous a entourés’, mais voilà qu’on lui demande en‑
core de consentir à laisser derrière lui un reflet du reflet, plus durable celui-là, comme si
c’était vraiment l’une des œuvres dignes d’être contemplées ! » Porphyre, Vie de Plotin,
1, 4‑9, éd. par L. Brisson, M.-O. Goulet, R. Goulet et D. O’Brien, t. 2 (Paris : J. Vrin,
1982), p. 192‑193. Cf. J. Pépin, « L’épisode du portrait de Plotin (VP 1. 4‑9) », dans
Porphyre, Vie de Plotin…, p. 301‑334. Pour le rapport avec les Actes de Jean voir le com‑
mentaire dans Acta Iohannis…, éd. par E. Junod et J. D. Kaestli, p. 448‑456 (avec la bi‑
bliographie). L’autre texte où Porphyre exprime ses vues sur l’art du portrait est : Lettre
à Marcella 10, éd. et trad. par E. des Places (Paris : les Belles lettres, 1982), p. 111. Sur le
rapport avec les Actes de Jean, cf. Acta Iohannis…, p. 455 (commentaire).
63
L’Hymne de la Perle des Actes de Thomas, éd., introd., texte et commentaire par
P. H. Poirier, Homo religiosus, 8 (Louvain-la-Neuve : Centre d’histoire des religions,
1981).
64
L’Hymne de la Perle…, 9‑16, trad. par P. H. Poirier, p. 343.
Izabela Jurasz
65
L’Hymne de la Perle…, 75‑78 et 86‑94, p. 347‑348.
66
P. H. Poirier rapproche le vêtement de l’eschatologie iranienne : L’Hymne de la
perle…, p. 430‑433. Sur la particularité du vêtement dans L’Hymne de la perle : R. Mur‑
ray, Symbols of Church and Kingdom : Studies in Early Syriac Tradition (Cambridge :
Cambridge University Press), 1975, p. 311‑312.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
Izabela Jurasz
Jacques de Saroug
Jacques de Saroug est moins connu que Sévère et Philoxène ; il ne figure
pas non plus dans les florilèges iconoclastes. On sait très peu de sa vie :
d’origine syriaque, élève de l’école d’Édesse, chorévèque de Haura et en‑
suite évêque de Saroug, il se fait connaître surtout par des homélies pro‑
noncées au temps de l’invasion perse (502‑503). Sans s’engager dans les
débats théologiques, il ne cache pas son désaccord avec la définition de
Chalcédoine, critique les thèses de Nestorius et l’Hénotikon de l’empe‑
reur Zénon (482). Selon les témoignages, l’héritage littéraire de Jacques
de Saroug aurait compté presque huit cent homélies, dont nous connais‑
sons quatre cent environ. Ces homélies possèdent une forme poétique,
particulièrement élégante.
71
Cf. R. C. Chesnut, Three Monophysite Christologies : Severus of Antioch,
Philoxenus of Mabbug and Jacob of Serug (Oxford : Oxford University Press, 1976).
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
72
L’idée identique se trouve déjà dans l’apocryphe Caverne des trésors : « Aux jours
de Seroug, le culte des idoles (ptakre) s’introduisit sur la terre et les hommes commen‑
cèrent à fabriquer des images (salme). […] Il y en eut parmi eux qui, du fait de leur er‑
reur, se prosternaient devant le soleil, d’autres devant la lune et les étoiles, la terre et les
animaux, les oiseaux et les reptiles, ainsi que les arbres, les images (tlanyta), les eaux et le
vent. […] Aussitôt que l’un d’entre eux mouraient, ils faisaient une image à sa ressem‑
blance (salma b-dmuteh) et la plaçaient sur son tombeau, pour que (disaient-ils), son
souvenir ne se perde pas chez eux. Et cette méchante chose fut disséminée partout et la
terre fut remplie d’idoles (ptakre) sous la forme de mâles et de femelles. » Caverne des
trésors…, XXV, 7‑17, p. 76‑77 ; p. 196‑201 (le texte syriaque). À la différence d’avec l’ho‑
mélie de Jacques de Saroug, l’idolâtrie est présentée comme la cause du déluge : Caverne
des trésors
, XXVI, 11‑18.
73
« Dieu considéra toutes les époques, comme il connaît toutes choses. Il vit les
temps, où sur la terre pénétraient les idoles (ptakre). Il garda son Fils, pour que, passé
le temps de l’idolâtrie (ptakruta), il le révélât ensuite, pour chasser les images (salme)
des terres. » Jacques de Saroug, Homélies contre les Juifs…, IV, 26‑29, éd. par M. Albert,
Patrologia orientalis, 38/1 (Turnhout : Brepols, 1976), p. 114‑115.
74
Sur la chute des idoles, versets 14, 19‑24, trad. par Abbé Martin : « Discours de
Jacques de Saroug sur la chute des idoles », Zeitschrift der deutschen morgenländischen
Gesellschaft, 29 (1875), p. 109 et 130.
Izabela Jurasz
75
Sur la chute des idoles, versets 239‑243, 249, trad. par Abbé Martin…, p. 117 et
137. « De [tous] les pays il anéantit les images (salme), il enleva les représentations (sire).
Il démolit les pierres sculptées (glype), il brisa les portraits (yuqane) des déesses. Il couvrit
d’opprobre les idoles (ptakre), il effaça les noms des divinités, et il apprit à la terre à ado‑
rer le Dieu unique. » Jacques de Saroug, Homélies contre les Juifs…, iii, versets 245‑248,
p. 102‑103. Voir aussi : Jacques de Saroug, Metrical Homily on Holy Mar Ephrem, 88‑95,
éd. et trad. par J. P. Amar, Patrologia Orientalis, 47/1 (Turnhout : Brepols, 1995),
p. 46‑49.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
76
Cf. Jacques de Saroug, Quatre homélies métriques sur la Création, éd., trad. et
notes par Kh. Alwân, Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, 508‑509 ; Scrip‑
tores syri, 241‑215 (Louvain : E. Peeters, 1989), p. 2, note des versets 31‑32.
77
Quatre homélies métriques sur la Création…, I, 41‑42 et 59‑62 ; p. 3‑4 (traduction).
Izabela Jurasz
duction).
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
79
Cf. S. Brock, « Iconoclasm and the Monophysites… », p. 53. La Vie de Sévère de
Zacharie le Scolastique atteste que l’éducation chrétienne de Sévère se fait à l’aide des
images : « Tout en lui disant cela, je lui montrais Adam et Ève – ils étaient peints dans
le temple – revêtus de tuniques de peau. » Zacharie le Scholastique, Vie de Sévère, éd. et
trad. par M.-A. Kugener, Patrologia orientalis, 2/1 (Paris : Firmin-Didot, 1907) p. 49.
Un autre épisode raconte la lutte de Sévère contre la magie. Il ordonne de « brûler les
livres de magie, dans lesquels il y avaient certaines images des démons pervers » (ibid.,
p. 61‑62).
80
Sévère d’Antioche, Homélie LXXII, dans Homélies cathédrales, éd. et trad. par
M. Brière, Patrologia Orientalis, 12/1 (Paris : Firmin-Didot, 1919), p. 71‑89.
81
Origène fut accusé d’introduire le paganisme dans la lecture de la Bible par les
antiochiens, Diodore de Tarse et Théodore de Mopsueste : Traité contre les allégoristes,
dans Fragments syriaques du Commentaire des Psaumes (Ps 118 et 138‑148), éd. par L.
von Rompay, Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, 436 ; Scriptores Syri,
190 (Louvain : E. Peeters, 1982). Les critiques plus modérées de sa méthode exégétique
viennent de Didyme l’Aveugle, Épiphane de Salamine et Basile de Césarée.
82
Cf. A. Guillaumont, Les « Kephalaia gnostica » d’Évagre le Pontique et l’histoire
de l’origénisme chez les Grecs et les Syriens, Patristica Sorbonensia, 5 (Paris, Seuil : 1962).
Izabela Jurasz
Mais la main des peintres qui est insolente et qui est à elle-même sa loi,
favorisant les inventions ou les imaginations païennes relatives à l’idolâ‑
trie et disposant tout pour son avantage, revêt Michel et Gabriel, ainsi
que des princes ou des rois, d’une robe de pourpre royale, les orne d’une
couronne et met dans leur main droite la marque de l’autorité et du
pouvoir universel. […] Nous aussi, suivant ceux-ci [les canons ecclésias‑
tiques] dans leur intégrité et fermant les entrées secrètes de l’idolâtrie,
nous sanctifions donc les temples construits sous le vocable des anges
par les os et les membres sacrés des saints martyrs, […] ceux-ci sont éga‑
lement des puissances comme les anges 84.
83
« C’est d’après des sens de ce genre qu’il faut prendre diversement les faces (pro-
sopa) de Dieu, et non d’après un type (tupsa) et une image (yuqna) corporelle et d’après
une forme humaine ; ce qui est étranger à une nature ou à une essence incorporelle. C’est
ainsi que les anges sont dits voir sans cesse la face de Dieu […]. » Homélie LXXII…, p. 81.
84
Homélie LXXII…, p. 83‑84.
85
Homélie LXXII…, p. 85‑86.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
si splendide et séduisant, mais qui serait inférieure à son sujet parce que
l’art (awmanuta) ne peut reproduire exactement la beauté naturelle 86.
Dire que l’art est une imitation imparfaite de la nature est un lieu com‑
mun en philosophie 87. Cette vague opinion sur le rapport entre l’art et
la nature conduit néanmoins à des conclusions concernant l’image du
Christ. Dans une homélie contre les nestoriens Sévère dit :
Ils ont même représenté cela sur les murs par l’art des peintres (sirah
b-yed awmanuta), quand ils ont fait des images (yuqne) par manière
d’imitation (medmyana-it), ceux que les mêmes choses ont rendus fu‑
rieux […] et qui pensent tourner en dérision la faiblesse du Christ que
nous avons montrée être une disposition sage et divine 88.
86
Sévère d’Antioche, Homélie LII, dans Homiliae Cathedrales LII‑LVII, éd. et
trad. par R. Duval, Patrologia orientalis, 4/1 (Paris : Firmin-Didot, 1908), p. 7‑8.
87
On peut noter une certaine proximité avec les idées stoïciennes : « La nature
n’est jamais inférieure à l’art, car les arts imitent la nature. S’il en est ainsi, la nature la
plus parfaite et la plus compréhensible de toutes ne saurait manquer d’ingéniosité artis‑
tique. Or, c’est toujours en vue du meilleur que les arts produisent le pire ; il en est donc
ainsi de la nature universelle. » Marc Aurèle, Pensées, XI, 10, dans Les Stoïciens, t. 2, trad.
par E. Bréhier, éd. par P.-M. Schuhl, Bibliothèque de Pléiade, 156 (Paris : Gallimard,
1962), p. 1234. Sur le contexte de la réflexion de Marc Aurèle : M.-A. Zagdoun, La phi-
losophie stoïcienne de l’art (Paris : CNRS Éditions, 2000), p. 155‑157.
88
Homélie LXIV, éd. et trad. par M. Brière, Patrologia Orientalis, 8/2 (Paris : Fir‑
min-Didot, 1912) p. 320.
Izabela Jurasz
On reconnaît les termes grecs derrière les mots syriaques : θεωρία, τύπος,
εἰκών. La manne, le vase en or, l’Arche de l’Alliance sont des images du
89
Dans l’Homélie LII nous lisons que « Eléazar est le type (tupos) de la loi qui
a vieilli dans l’Écriture » et que les jeunes gens instruits par leur mère et leur maître
sont « l’image (yuqna) de l’Église qui a rassemblé les peuples. » Dans l’Homélie LXIV,
« image (yuqna) de Moïse » veut dire exemple de Moïse.
90
Cf. Homélie LXV (image comme les paroles de l’Écriture) ; Homélie XCV (les
paroles de l’Écriture sont un symbole [tupsa] et une image [yuqna] de l’adoption et de
la résurrection ; la généalogie selon Matthieu « accomplit l’image de l’adoption » bap‑
tismale) ; Homélie XCVI (les paroles du livre des Proverbes sont les images de l’Église),
Homélie XCVII (la prophétie de David est l’image de l’Église).
91
« Toi, ô mon âme, malade de ces (maladies), hâte-toi vers les médecins, (vers)
les images (yuqane) de Basile et de Grégoire qui, par oubli et négligence, sont effacées
en toi ; aujourd’hui encore représente-les (littéralement ‘peints-les’) de nouveau en toi-
même ; ne t’éloigne pas de leurs figures divines (salme allaye) ; ressemble-leur de toute ta
force autant qu’on peut atteindre à leur ressemblance (medmaynuta). » Homélie CII, éd.
et trad. par I. Guidi, Patrologia Orientalis, 22/2 (Paris : Firmin-Didot, 1930), p. 280.
92
Origène interprète la manne comme parole de Dieu (cf. Homélies sur l’Exode,
VII.5). Grégoire de Nysse suit cette voie et ajoute le lien avec l’incarnation de la Parole –
le Logos de Dieu ; cf. La vie de Moïse, II.139.
93
Homélie LXVII, trad. par M. Brière, Patrologia orientalis 8/2 (Paris : Firmin-Di‑
dot, 1912), p. 360‑361.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
Si nous prenons encore ce mot : « À l’image », non pas pour la forme
(eskma) 95 du corps – et c’est là la vérité, car Dieu n’est ni dans une image
(yuqna) humaine ni dans une forme, puisqu’il est sans forme et sans
corps – mais pour une marque de supériorité, afin qu’il soit le chef et
qu’il règne sur la terre. Lorsqu’il eut dit : « À notre image (salma) et à
notre ressemblance (dmuta) », il a ajouté après cela : « Qu’ils dominent
sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur les animaux et sur
toute la terre ». Il est de toute nécessité que le modèle à l’image duquel
l’homme devait être fait, fût d’une nature supérieure et royale, laquelle
est la Sainte Trinité, et non pas d’une nature angélique ou d’une autre
(nature) créée et soumise à la domination 96.
94
« Si celui qui disait : ‘Faisons l’homme’, n’était pas d’une seule et même essence
avec ceux auxquels il parlait, comment serait-il possible que l’homme fût une seule image
(salma) de ceux qui différaient par l’essence ? » Homélie LXX, Patrologia Orientalis,
12/1, trad. par M. Brière (Paris : Firmin-Didot, 1919), p. 305. Chez Grégoire de Nysse :
« […] si Dieu le Fils unique fit l’homme ‘à l’image de Dieu’, il n’y a pas de différence entre
la divinité du Père et celle du Fils. » La création de l’homme, XVI, 180d-181a, trad. par
J. Laplace, SC, 5 (Paris : Éd. du Cerf, 1943), p. 153‑154.
95
Calque du mot grec σχῆμα, traduit par M. Brière comme « extérieur ».
96
Homélie LXX…, p. 305‑306.
97
« Comment, dira-t-on, l’incorporel est-il semblable au corps ? » Grégoire de
Nysse, La création de l’homme…, XVI, 180b, p. 152) ; « Ce [Gn 1, 26] qui équivaut à
dire : il a rendu la nature humaine participante de tout bien. » Ibid., 184b, p. 157 ; « Car
ce n’est pas dans une partie de la nature que se trouve l’image, pas plus que la beauté
ne réside dans une qualité particulière de l’être, mais c’est sur toute la race que s’étend
également cette propriété de l’image. La preuve, c’est que l’esprit habite semblablement
chez tous et que tous peuvent exercer leur pensée, leurs décisions ou ces autres activités
par lesquelles la nature divine est représentée chez celui qui est à son image. » Ibid., 185c,
p. 169). Voir aussi : Grégoire de Nysse, Discours catéchétique, 5.
Izabela Jurasz
98
Voir aussi : Homélie LXXI (tous les hommes sont de la même boue et de la même
création, de la même image raisonnable et divine) ; Homélie LXXXIX (l’humanité qui
porte l’« image royale ») ; Homélie LXXXVII et Homélie XCII (l’homme est devenu
raisonnable par l’« image de Dieu »).
99
M. Brière utilise ici le terme « image », mais le mot syriaque tayqan possède le
sens d’« ouvrage, produit, support ».
100
Pour comparaison : « Ce n’est pas l’aspect de la gloire de l’Éternel, mais c’est
Dieu lui-même, le Fils, le Verbe, l’image (salma), l’image (yuqna) de la substance (qno-
ma) du Père. » Homélie LXVII…, p. 353.
101
Homélie LXX…, p. 297. Voir aussi : Homélie LXXXVII et Homélie LVIII.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
Paul, en effet, dit qu’il est l’image (salma) du Dieu invisible (Col 1,15),
la splendeur de sa gloire et l’image (salma) de son Hypostase (He 1, 3),
or dans l’image (salma) il y a tous les (traits) du modèle. En sorte qu’il
est à proprement parler une image, non pas une image artificielle (aw-
manya) et inanimée faite artificiellement comme les images qui (se ren‑
contrent) chez nous, ni (une image) au sens où nous sommes dits nous-
mêmes être à l’image et à la ressemblance de Dieu (Gn 1, 26), en ayant
part à la grâce qui (vient) de lui. Mais l’image de la ressemblance (yuqna
d-dmuta) et l’empreinte propre de l’hypostase du Père, ce qu’est aussi
l’image, de manière qu’il soit la vie hypostatique de la vie, la lumière de
la lumière, la force sans fin de la force infinie et illimitée 102.
102
Homélie XC, Patrologia Orientalis, 23/1, éd. et trad. par M. Brière (Paris : Fir‑
min-Didot, 1932), p. 141.
103
Cf. Grégoire de Nysse, La création de l’homme : « Or, l’image ne mérite parfaite‑
ment son nom que si elle ressemble au modèle. Si l’imitation n’est pas exacte, on a affaire
à quelque chose d’autre, mais non à une image. » XVI, 180b, p. 152‑153 ; « L’image
porte en tout l’impression de la beauté prototype ; mais si elle n’avait aucune différence
avec elle, elle ne serait plus du tout un objet à la ressemblance de l’autre, mais exactement
semblable au modèle dont rien absolument ne la séparerait. » Ibid., XVI, 184c, p. 153.
Grégoire de Nysse parle toujours de l’homme créé « à l’image », cf. XI, 156a-b, p. 122.
Cette similitude et l’altérité sont mieux exprimées dans le Contre Eunome, où le Christ
est l’image du Dieu invisible (Contre Eunome, II.49) ; cf. A. Vasiliu, Eikôn…, p. 115‑133.
Izabela Jurasz
104
Cf. A. de Halleux, Philoxène de Mabboug : sa vie, ses écrits, sa théologie (Louvain :
E. Peeters, 1963), p. 12‑101.
105
Cf. A. de Halleux, Philoxène de Mabboug…, p. 88‑90. De Halleux cite aussi Jean
Diacrinomenos qui accuse Philoxène d’avoir détruit des images des anges, caché celles
du Christ et interdit l’usage des colombes eucharistiques : ibid., p. 89, no 86. Sur l’icono‑
clasme de Philoxène : S. Brock, « Iconoclasm and the Monophysites… », p. 53‑54.
106
Ceci est la conclusion d’A. de Halleux tirée à partir de quatre passages phi‑
loxèniens ; cf. Philoxène de Mabboug…, p. 89, no 87.
107
Citation selon A. de Halleux, Philoxène de Mabboug…, p. 90, no 91.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
ment par Jean-Baptiste. Or, les iconoclastes ont rattaché à cette opinion
une mesure introduite par l’évêque de Mabboug qui interdisait l’usage
des colombes eucharistiques – des vases en forme de colombe, destinées
à préserver les hosties, parfois suspendues au-dessus de l’autel. Cepen‑
dant, les raisons de cet interdit sont expliquées de manière convaincante
par André de Halleux : la colombe était l’oiseau sacré d’Atargatis, dont
le temple se trouva à Mabboug, l’ancienne Hiérapolis païenne. Il est très
probable que Philoxène luttât contre les survivances du paganisme et que
cette mesure ne soit pas dictée par une attitude iconoclaste 108.
La manifestation de l’Esprit saint sous forme de colombe est l’une
des manifestations sensibles de Dieu. Philoxène l’explique par rapport
aux théophanies de l’Ancien Testament et à l’incarnation du Verbe 109.
Il consacre à ce sujet un discours (memra), l’un des dix discours polé‑
miques rédigés contre un moine nestorien, Habib :
108
Cf. A. de Halleux, Philoxène de Mabboug…, p. 90.
109
Sur le même sujet parle Augustin d’Hippone : « […] comment l’Esprit-Saint
s’est-il montré sous une forme corporelle ? Tout d’abord j’affirme que ce prodige s’est
opéré à l’aide d’une créature. Cependant je n’ose assurer ni que cette créature fut seule‑
ment un corps matériel, ni qu’elle n’était point mise en mouvement par cet agent spiri‑
tuel que les Grecs nomment esprit, et qui sans être une âme, serait doué d’intelligence et
de raison. Mais même en ce sens, il n’y aurait point eu unité de personne, comme dans le
Verbe né d’une Vierge. […] En toute hypothèse, il ne s’agit ici que d’une figure et d’un
signe que Dieu dirigeait selon son bon plaisir. » La Trinité, IV, 31, trad. par M. Mellet
et Th. Camelot, Bibliothèque augustinienne, 15 (Paris : Études augustiniennes, 1991),
p. 421‑423.
110
Philoxène de Mabboug, Memra contre Habib, III, 34, éd. et trad. en latin
par M. Brière et F. Graffin, Patrologia Orientalis, 38/3 (Turnhout : Brepols, 1976),
p. 504‑507. La traduction française est par moi.
Izabela Jurasz
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
connaissances par l’impureté des sens corporels. La foi qui nous est don‑
née de par sa nature n’est pas une image (sira) de quelque chose 112.
Il ne nous est pas permis de composer dans notre esprit une image (surta)
des hypostases divines, même si nous leurs parlons par les voix humaines.
Lorsque nous écoutons les Livres qui nécessairement utilisent des pa‑
roles (qale) pauvres pour exprimer les noms de Dieu ou de la nature,
dans notre intellect nous recevons [ensemble] les deux hypostases par les
voix (qale) ou par les expressions allégoriques, à cause de la faiblesse de
l’auditoire – et ce qui est véritablement écrit ne nous est pas expliqué 114.
Philoxène examine les paroles qui donnent à Dieu des traits humains
et qui lui paraissent aussi incapables de transmettre la connaissance de
Dieu que les caractéristiques de la peinture 115. Philoxène prône le mys‑
tère de l’unité du Christ, impossible à exprimer en paroles. Le récit sur
les activités humaines du Fils de Dieu ne peut donc pas être pris à la lettre
et il ne permet pas de connaître l’un de la Trinité. La supériorité du lan‑
gage sur la peinture est cependant particulièrement bien formulée dans
le Traité sur la Trinité et l’Incarnation :
112
Philoxène de Mabboug, Memra contre Habib…, III, 3, p. 510‑511.
113
La conclusion de cette partie du discours : « Le domaine de la foi est un domaine
simple, où il n’y a pas de composition des parties. Si l’âme s’élève vers la foi spirituelle,
celle qui est au-delà de la simple écoute, elle regarde la vision sans ressemblance (hazata
d-la-dmuta) et la merveille qui ne correspond à aucune image (surta). » Memra contre
Habib…, III, 42, p. 512‑513.
114
Memra contre Habib…, p. 512.
115
« Voici donc qu’il est dit dans l’Ancien [Testament] que Dieu mangeait, bu‑
vait, voyageait, dormait, était fatigué, se repentait, allait et venait, avait besoin, cherchait,
s’était trompé, demandait. Nous ne pensons pas qu’une seule de ces appellations (qale)
aurait parlé vraiment de lui, ni qu’une seule soit comprise au sens littéral. Les appella‑
tions (qale) suivantes sont écrites aussi dans le Nouveau (Testament) au sujet du Fils :
n’est pas d’un autre Fils, mais du Fils véritable, l’un de la Trinité. » Memra contre Ha-
bib…, p. 512‑513.
Izabela Jurasz
ment le nommer. Car ils ont peint ses noms et non sa nature (kyana),
ses appellations et non son essence (ituta). Il est peint alors en de nom‑
breuses ressemblances, parce que sa volonté a voulu que selon l’image
(surta) de ses noms il peigne lui-même une nature rationnelle. L’image
est inscrite dans les noms de sa volonté, celle qui par le signe de sa puis‑
sance a créé tout ce qui est fait. En fait, aucune des créatures n’est ca‑
pable de peindre celui qui a peint et orné tout 116.
Et encore il a dit : « Ces images (yuqne) indiquent ce qui n’est pas dit »
– ceci est stupide parce que dit par un sot. Son nom n’est aucune image
(yuqna), mais son image (yuqna) est la peinture (surta) qui le contient
dans les couleurs et dans les contours ou la sculpture en bois ou la dispo‑
sition d’une autre matière. Lorsqu’on a formé une image (yuqna), on dé‑
pose sur cette image (yuqna) le nom de l’hypostase (qnoma) de celui-ci :
« portrait (salma) d’un tel ». Il n’est pas correct que les noms désignent
les images (yuqne) des hypostases (qnome), mais ils sont prononcés dans
l’ignorance et justement réprimés.
Et encore il a dit : « La peinture (surta) représente celui qui veut être
représenté selon la parole et se manifester dans l’intelligence humaine. »
Est-ce qu’il y a une chose plus prétentieuse et insensée que ces paroles
là ? […] Les noms ne sont pas désignés par une image, comme tu l’as
dit, parce que l’image (surta) fait savoir par les parties à quoi ressemble
(dma) celui qui est dépeint (etsir) : s’il est noir ou blanc, roux ou foncé,
116
Philoxène de Mabboug, Tractatus tres de Trinitate et Incarnatione, éd. et trad. en
latin par A. Vaschalde, Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, 28 ; Scriptores
Syri 9‑10 (Paris : K. de Luigi, 1907), p. 12 (texte syriaque), p. 15 (traduction latine). Ici,
la traduction française est par moi.
117
Cf. A. de Halleux, Philoxène de Mabboug…, p. 228.
L’image de Dieu dans la tradition syriaque : monophysisme et iconoclasme
s’il est enfant ou homme, court ou long. Les noms, en fait, en compa‑
raison avec les hypostases, n’indiquent ni comment, ni combien, ni à
quoi, ni quand, mais seulement ils nous font savoir que les hypostases en
question existent 118.
Conclusion
La lecture des auteurs non-chalcédoniens des ve‑vie siècles s’avère essen‑
tielle pour comprendre l’originalité de la théologie syriaque de l’image
de Dieu. Il s’agit d’une théologie très conservatrice, fidèle à l’identifica‑
tion entre image et idole, caractéristique pour l’époque des apologistes.
Cette théologie est également marquée par les traditions religieuses ani‑
coniques – le judaïsme et le zoroastrisme. On ne peut cependant pas nier
que les images occupent une place très importante dans le christianisme
syriaque – l’icône édessenienne du Christ et les reliques de la croix, les
images des anges, des saints et aussi celles du Christ. On peut supposer
que les images ont joué le rôle de décoration, probablement avec une
visée catéchétique. Les icônes du Christ, de la Vierge et des saints ont
Izabela Jurasz
existé aussi, mais il est difficile de déterminer leur place dans la litur‑
gie 119. Notre étude se limite pourtant à la tradition syriaque occidentale,
concernée par l’accusation d’être iconoclaste 120.
Les opinions des iconoclastes sur les auteurs syriaques non-chalcé‑
doniens sont nées d’une profonde mécompréhension de la théologie
syriaque, réduite au refus de la définition de Chalcédoine. Les représen‑
tants de cette théologie ont des idées originales sur la question de l’image
de Dieu. Une approche « traditionaliste » comme celle de Jacques de
Saroug se manifeste dans son attachement au thème de l’idolâtrie. En
même temps, il interprète la création de l’homme « à l’image de Dieu »
par rapport au corps, et l’« image » est pour lui le gage de l’unité de
l’âme avec le corps et du divin avec l’humain. Sévère d’Antioche se dis‑
tingue par son attachement à la théologie des Cappadociens. Il fait une
relecture de la pensée de Grégoire de Nysse, en particulier, dans le sens
de la théologie non-chalcédonienne. Peu intéressé par des questions
anthropologiques, il donne à la notion d’« image » une interprétation
christologique et trinitaire, lorsqu’il parle de « l’image substantielle ».
Quant à Philoxène de Mabboug, il est probablement le plus marqué
par la mentalité orientale et aniconique. Il considère l’image comme un
moyen de communication et de connaissance de Dieu, afin d’arriver à
une réflexion sur le rapport entre l’image et le nom, sans doute l’une des
plus intéressantes. À la fin et indépendamment de la question de l’ico‑
noclasme, on découvre des approches philosophiques et théologiques
oubliées de l’image.
119
Cf. H. Teule, « The Veneration of Images in the East Syriac Tradition », dans
Die Welt der Götterbilder…, p. 346.
120
Signalons que par rapport à la tradition syriaque orientale, on parle de l’« anico‑
nisme nestorien ». Les plus anciens témoignages viennent des Portugais installés en Inde
du sud, cf. D. Menozzi, Les images : l’Église et les arts visuels (Paris : Éd. du Cerf, 1991),
p. 159‑161. Voir aussi : I.-H. Dalmais, « Un ‘aniconisme nestorien’ ? Une légende et son
interprétation », dans Nicée II, 787‑1987…, p. 63‑72. Un regard critique de H. Teule :
« The Veneration of Images in the East Syriac Tradition… », p. 324‑326.
Charles Barber
The years that followed upon the end of iconoclasm in 843 witnessed the
creation of a decorative schema for the Byzantine church interior that
would continue to echo through the remainder of Byzantium’s history
and beyond. 1 The majority of these early cycles are only known from ver-
bal accounts, with the faint traces that linger in the ninth-century mosa-
ics in Hagia Sophia perhaps being our best witness regarding the actual
appearance of these works. 2 This essay will re-visit a number of these fa-
miliar texts and, in so doing, will offer some reflections on the question
of the power of the Byzantine artist over the work of art. 3 Given the im-
portance placed on the icon itself by the protagonists in the iconoclastic
debates, there should be no surprise in finding that the precise role of
the artist in the origins and validation of the work of art was a matter of
1
This “system” of decoration is most compellingly introduced in O. Demus, Byz-
antine Mosaic Decoration (London: Kegan Paul, 1948). Its early history is variously ana-
lysed in A. Frolow, “Deux églises byzantines d’après des sermons peu connus de Léon VI
le Sage”, Études Byzantines, 3 (1945), pp. 43‑91; S. Der Nersessian, “Le décor des églises
du IXe siècle”, in Actes du VIe Congres international des études byzantines, 2 vols (Paris:
École des hautes études à la Sorbonne, 1951), II, pp. 315‑320; A. Grabar, L’iconoclasme
byzantin, 2nd ed. (Paris: Flammarion, 1984), pp. 213‑297; Robin Cormack, “Painting af-
ter Iconoclasm”, in Iconoclasm, ed. by J. Herrin and A. Bryer (University of Birmingham:
Centre for Byzantine Studies, 1977), pp. 147‑163; R. Cormack, “Patronage and New
Programs of Byzantine Iconography”, in 17th International Congress of Byzantine Studies,
Washington, 1986, Major Papers (New York: A. D. Caratzas, 1986), pp. 609‑638; T. F.
Mathews, “The Sequel to Nicaea II in Byzantine Church Decoration”, Perkins Journal,
41 (1988), pp. 11‑21; H. Maguire, “The Cycle of Images in the Church”, in Heaven on
Earth: Art and Church in Byzantium, ed. by L. Safran (University Park, PA: Pennsylva-
nia State University Press, 1998), pp. 121‑151.
2
R. Cormack, “Painting after Iconoclasm…”.
3
Recent discussions of the status of the artist in Byzantium may be found in
Originality in Byzantine Literature, Art and Music: A Collection of Essays, ed. by A. R.
Littlewood (Oxford: Oxbow Press, 1995); To portraito tou kallitechne sto Byzantio, ed.
by M. Vasilake (Heraklion: University of Crete Press, 1997); L’artista a Bisanzio e nel
mondo cristiano-orientale, ed. by M. Bacci (Pisa: Scuola Normale Superiore, 2007).
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 153-175
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111930
Charles Barber
some concern at this time. 4 As these texts will show this was a far from
settled matter, for they offer a varied set of readings concerning the rela-
tion between artists and their icons. Among other questions, these texts
will enquire into the significance of the tradition that precedes an artist’s
technical intervention in the production of a given icon; into the inspi-
ration that may lead to the making of a work of art; and into the artist’s
own capacity to invent or design a given work. Each of these proposes
a different inflection upon the relation between the artist and the icon.
Each, then, also makes a different claim upon the proper understanding
of the origins of the work and, thence, upon the relative power of the
artist over his product. As this essay touches upon these various inter-
pretations, it will try to show that it is in response to the evident novelty
identified in these new programs of decoration that our ninth-century
witnesses find themselves needing to re-visit and to re-conceptualize the
artist and thence a claim upon the origin of the work of art.
This paper will follow three specific paths to this end. The first of
these will consider the role of the notion of tradition in disempowering
the Byzantine artist. This is embodied in a well-known passage from the
Seventh Ecumenical Council held in Nicaea (Iznik), Turkey in 787. The
second will examine Patriarch Photios’s (858‑867, 877‑886) discussion
of inspiration in regard to the work of art. The third will argue that a
homily delivered by the Emperor Leo VI (886‑912) needs to be read
against both the model of tradition and that of inspiration. In so doing,
we can witness this Emperor’s remarkable return of the notion of inven-
tion to the artist.
Tradition (ἡ παράδοσις).
In some senses the familiar image found in figure 1 is an apt visualiza-
tion of both Byzantium’s and our Modernist discourse’s disempowering
4
My title obviously references Martin Heidegger’s famous essay: “The Origin of
the Work of Art”, in M. Heidegger, Pathmarks, ed. by William McNeill (Cambridge:
Cambridge University Press, 1998), pp. 1‑56. Like Heidegger, our texts are concerned
about origins (that is the question of where a thing sprang from): is the artist prior to
the work of art, or is art prior to the artist, or is art not known prior to the work of art?
Caught within this hermeneutic circle, is it perhaps impossible to speak of an origin
without reference to the question of power that is articulated through the various con-
ceptualizations brought to bear on the relation between the artist, the work of art, and
art itself ?
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
5
My use of the term Modernism in this essay is perhaps idiosyncratic. In part,
the use of the term should be understood as an echo of Vasari’s conception of an arte
moderna. My use is intended to encompass a broad period from the thirteenth to the
twentieth century and may be defined as a period in which an anthropocentric, adequate
and representational model of knowledge is predominant in western thought.
6
K. Weitzmann, The Miniatures of the Sacra Parallela, Parisinus Graecus 923
(Princeton: Princeton University Press, 1979), p. 213; R. Cormack, ‘Ho kallitechnes
sten Konstantinoupole: arithmoi, koinonike these, zetemata apodoses’, in Vasilake, To
portrait…, pp. 45‑76.
7
For example: “la qual maniera scabrosa e goffa et ordinaria avevano non medi-
ante lo studio, ma per una cotal usanza insegnato l’uno all’altro per molti e molti anni
I pittori di que’ tempi, senza pensar mai a migliorare il disegno a belleza di colorito o
invenzione alcuna che buona fusse”. G. Vasari, Le vite de’ più eccellenti architetti, pittori
e scultori: nelle redazioni del 1550 e 1568, ed. by R. Bettarini and P. Barocchi (Firenze:
Sansoni, 1966), p. 37.26‑30. Translation by G. Bull: “To be sure, their crude, stiff, and
mediocre style owed nothing to study, but came from blindly following what had been
handed on year after year by painters who never thought of trying to improve their draw-
ing and never sought after lovely colours or any creditable inventions”. In G. Vasari, Lives
of the Artists: A Selection (Harmondsworth: Penguin, 1965), pp. 50‑51. “Là dove ve-
nuto, in poco tempo, aiutato dalla natura et ammaestrato da Cimabue, non solo pareggiò
il fanciullo la maniera del maestro suo, ma divenne così buono imitatore della natura
che sbandì afatto quella goffa maniera greca, e risuscitò la moderna e buona arte della
pittura, introducendo il ritrarre bene di naturale le persone vive, il che più di dugento
anni non s’era usato Vasari”. Le vite, p. 97.4‑9. Translation by Bull: “After he had gone to
Charles Barber
the brave new world that is first ushered in with the art of Giotto is built
upon an artist who corrects tradition by observing and reflecting upon
models found in nature, thus rendering a more naturalistic account of
a given subject. For Vasari, the process of replication that we see here
would provide no means of correcting the given tradition and thereby
marking the presence of the artist himself in the production and ori-
gin of the work of art. Without such a mediated presence, we could not
have a history of art as envisaged by Vasari. Of course, this Modernist
narrative fails to recognize that the Byzantine artist’s eye was drawn to
both living and historical subjects. The artist was, in fact, consistently
expected to offer accurate and precise renderings of both contemporary
saints and subjects known only through the mediation of existing im-
ages. Nonetheless, Vasari’s shadow has done much to place the Byzantine
artist beyond normative art-historical categories, making it difficult to
recover an appropriate conceptualization of the artist’s work and leaving
this artist the victim of an assumption of a static, unoriginal, and repeti-
tive tradition.
Blame for this understanding cannot be laid on Vasari alone, for, un-
til recently, a passage from the Seventh Ecumenical Council has been
widely read to be in support of this limited view of the Byzantine paint-
er. This renowned text from the sixth session of the council finds the
Fathers at this meeting addressing the question of artists in this manner:
live there, helped by his natural talent and instructed by Cimabue, in a very short space
of time Giotto not only captured his master’s own style but also began to draw so ably
from life that he made a decisive break with the crude traditional Byzantine style and
brought to life the great art of painting as we know it today, introducing the technique
of drawing accurately from life, which had been neglected for more than two hundred
years”. G. Vasari, Lives…, p. 58. In this regard, one might note El Greco’s criticism of
Vasari’s view of the maniera greca: N. Hadjinicolaou, “La defensa del arte bizantino por
El Greco: notas sobre una paradoja”, Archivo Espanol de Arte, 81 (2008), pp. 217‑232.
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
8
G. D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio, 53 vols (Paris:
H Welter, 1902), xiii, 252BC; C. Mango, The Art of the Byzantine Empire, 312‑1453:
Sources and Documents (Englewood Cliffs: Prentice-Hall, 1972), p. 172 with additions
from J. Yiannias, “A Re-examination of the So-called Art Statute of 787”, Byzantinische
Zeitschrift, 80 (1987), p. 349.
9
I translate ἡ τέχνη as craft rather than art here in order to emphasize the distinc-
tion that is being drawn in this text.
10
J. Yiannias, “Re-examination…”, pp. 348‑359. I would disagree with the predom-
inant role given to theologians by Yiannias.
Charles Barber
11
T. Krannich, C. Schubert, C. Sode, Ikonoklastische Synode von Hiereia: Einlei-
tung, Text, Übersetzung und Kommentar ihres Horos (Tübingen: Mohr Siebeck, 2002),
p. 40; the passage can also be found at: Sacrorum Conciliorum…, xiii, col. 248E.
12
This criticism draws heavily on the Book of Wisdom. The eighth-century Nou-
thesia gerontos (The Old Man’s Admonition) text indicates that this may have been a sig-
nificant source for iconoclastic thought: A. Mitsides, He parousia tes Ekklesias Kyprou eis
ton agona hyper ton eikonon: Georgios ho Kyprios kai Konstantinos Konstantias (Nicosia:
Ekdose Hidrymatos Archiepiskopou Makarious 3’, 1989). Strong echoes of these senti-
ments are also to be found in the mid-eighth-century Peuseis (Questions) attributed to
Constantine V: H. Hennephof, Textus Byzantinos ad Iconomachiam Pertinentes (Leiden:
Brill, 1969), pp. 52‑57.
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
tion, he used the occasion to wrap this first part of a new interior decora-
tion with the implications of the restoration claimed in the inscription
that framed the Mother of God (figure 2). This inscription read: “The
images that the imposters had cast down from here, pious emperors have
again set up (Ἃς οἱ πλάνοι καθεῖλον ἐνθάδ᾽ εἰκόνας ἄνακτες ἐστήλωσαν
εὐσεβεῖς πάλιν)”. Many authorities have discussed multiple aspects of this
renowned homily at length. 13 In this essay, the focus will be upon one
small phrase from this text, which is a passage that reads: “With such ex-
actitude has the art of painting, which is a reflection of inspiration from
above, set up a lifelike imitation (Ὑπόκρισις ἄρα τῆς ἄνωθεν ἐπιπνοίας ἡ
ζωγράφος τέχνη οὕτως ἀκριβῶς εἰς φύσιν τὴν μίμησιν ἔστησε)”. 14 While
there has been some discussion of the plausibility of a claim to exacti-
tude and lifelikeness in this instance, it is also important to consider the
proposition that the art of painting is a reflection of inspiration from
above. 15 The term in play is ἡ ἐπίπνοια, which I read as inspiration. In its
use here, Photios appears to argue that exacting imitation is not simply a
demonstration of technical mastery, but can be understood as having its
origins in inspiration. This, as I while try to show in this section of the
paper, is a consistent and important strand in Photios’s thinking on art.
This notion of inspiration is already found in an earlier homily, num-
ber ten, delivered to mark the inauguration of the church of the Moth-
er of God of the Pharos in the Great Palace in 864. 16 It is first hinted
at when Photios states: “On beholding it [the church] thou mightest
say that it is not the work of human hands, but that a divine power
superior to ours has formed its beauty (Εἴποις ἂν εἰς αὐτὸν ἰδών, οὐκ
13
Recent discussions of this key text include: R. S. Nelson, “To Say and to See:
Ekphrasis and Vision in Byzantium”, in Visuality Before and Beyond the Renaissance, ed.
by R. S. Nelson (Chicago: Chicago University Press, 2000), pp. 143‑168; C. Barber, Fig-
ure and Likeness: On the Limits of Representation in Byzantine Iconoclasm (Princeton:
Princeton University Press, 2002), pp. 125‑137; L. James, “Senses and Sensibility in Byz-
antium”, Art History, 27 (2004), pp. 522‑537.
14
B. Laourdas, Photiou homiliai: ekdosis keimenou, eisagoge kai scholia (Thessaloni-
ke: Hetaireia Makedonikon Spoudon, 1959), p. 167; C. Mango, The Homilies of Photius,
Patriarch of Constantinople: Translation and Commentary (Cambridge: Harvard Uni-
versity Press, 1958), p. 290.
15
Compare the readings of the homily in N. Oikonomidès, “Some Remarks on
the Apse Mosaic of St Sophia”, Dumbarton Oaks Papers, 39 (1985), pp. 111‑115 and
R. Cormack, Writing in Gold: Byzantine Society and Its Icons (New York: Oxford Uni-
versity Press, 1985), pp. 142‑158.
16
The homily’s text can be found at B. Laourdas, Photiou homiliai…, pp. 99‑104.
An English translation and introduction to the text can be found in C. Mango, Homilies
of Photius…, pp. 177‑190.
Charles Barber
ἀνθρωπίνης χειρὸς ἔργον, ἀλλὰ θείαν τινὰ καὶ ὑπὲρ ἡμᾶς δύναμιν τὸ κάλλος
αὐτῷ ἐπιμορφώσασθαι)”. 17 This quality recurs more specifically when
Photios first introduces the Pantokrator image: “So accurately has the
painter been inspired to represent, though only in forms and in colours,
the Creator’s care for us (οὕτως ἀκριβῶς ὁ γραφεὺς κἂν τοῖς σχήμασι καὶ
τοῖς χρώμασι τὴν τοῦ δημιουργοῦ περὶ ἡμᾶς κηδεμονίαν ἐπίπνους, οἶμαι,
γενόμενος ἐνετυπώσατο)”. 18 It is notable that Photios here links accuracy,
one of the primary terms in use in the Greek tradition of writing on art,
to inspiration.
Read together, these two passages from the homilies appear to wish
to argue that the grounds for this accuracy lie not in the artist himself,
but in a prior ground that inspires this artist to accuracy. This takes us
away from the prevailing Greek model for the discussion of artistic accu-
racy, that found in the Nicomachean Ethics, in which the wisdom found
in the arts turns upon the accuracy by which one might judge an artist’s
excellence. 19 Instead, Photios appears to be searching here for a higher
and prior ground for the work of art than that of the artist’s excellence.
This search is given its fullest expression in a letter that parallels the
themes found in an image that appears on folio 165r of the Pantokra-
tor Psalter (figure 3), perhaps produced between the 840s and the 860s.
The text that the image addresses is the last section of the text block,
namely Psalm 113, 12: “The idols of the nations are silver and gold, the
works of men’s hands”. To the right of the text block is a representation
of S olomon’s Temple. This follows some common patterns. The rec-
tangular colonnade that we see here defines the precinct of the temple.
Within this colonnade we see the ark flanked by the cherubim. Below,
and beyond the bounds of the manuscript’s temple precincts, we can see
a veiled altar. Various vessels, a menorah, an incense burner, and a jug are
found on this. A conversation mediated by David is found in the lower
17
B. Laourdas, Photiou homiliai…, p. 100; C. Mango, Homilies of Photius…, p. 185.
18
B. Laourdas, Photiou homiliai…, p. 102; C. Mango, Homilies of Photius…, p. 188.
19
I have in mind the passage from Nicomachean Ethics VI.vii.1 (1141 a 9). This
reads: Τὴν δὲ σοφίαν ἔν τε ταῖς τέχναις τοῖς ἀκριβεστάτοις τὰς τέχνας ἀποδίδομεν, οἷον
Φειδίαν λιθουργὸν σοφὸν καὶ Πολύκλειτον ἀνδριαντοποιόν, ἐνταῦθα μὲν οὖν οὐδὲν ἄλλο
σημαίνοντες τὴν σοφίαν ἢ ὅτι ἀρετὴ τέχνης ἐστίν. Author’s translation: “The term wisdom
is employed in the arts to denote those men who are the most accurate masters of their
art, for instance, it is applied to Pheidias as a sculptor and to Polykleitos as a statuary. In
this use then wisdom signifies nothing other than artistic excellence”. A discussion of a
Byzantine response to this passage can be found at C. Barber, “Eustratios of Nicaea on
Art”, in Medieval Greek Commentaries on the Nicomachean Ethics, ed. by C. Barber and
D. Jenkins (Leiden: Brill, 2009), pp. 131‑143.
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
margin. To the left, with his magician’s hair, is the Patriarch John VII the
Grammarian (837‑843). He points towards a now largely faded pair of
idols: naked pagan deities standing atop their pillars. On the other side
of David is the reason for the representation of the Temple: a represen-
tation of Beseleel, the artisan sanctioned by God to build the Temple
and all the objects and textiles found therein. Unlike the Grammarian,
he does not speak (suggested by his right hand, which is raised to his
mouth). He simply holds a scroll.
As Suzy Dufrenne pointed out some forty years ago, the image of
Beseleel and the temple offers a correction to an assumed appropriation
of this Psalm verse for iconoclastic purposes. 20 John the Grammarian,
the intellectual architect of second iconoclasm, is shown in the act of
speaking. It can be presumed that he is shown using the Psalm text to
justify his rejection of the production of works of religious art. David,
the author of the verse in question, also joins John in debate. David may
be understood to be here reclaiming the intent of his own words by in-
troducing the third element in the image, namely the temple of Solomon
and Beseleel, its architect. David gestures towards the temple and thus
invites John and us to bear this example in mind. Drawn from Exodus
31, 1‑11, the image references God’s inspiration of the architect Beseleel.
God has told Moses that: “I have filled him with a divine spirit of wis-
dom, and understanding, and knowledge, to invent in every work, and
to frame works, to labour in gold, and silver, etc. (καὶ ἐνέπλησα αὐτὸν
πνεῦμα θεῖον σοφίας καὶ συνέσεως καὶ ἐπιστήμης ἐν παντὶ ἔργῳ διανοεῖσθαι
καὶ ἀρχιτεκτονῆσαι ἐργάζεσθαι τὸ χρυσίον […])”. Now inspired, Beseleel
and his fellow artisans are to make: “The tabernacle of witness, and the
ark of the covenant, and the propitiatory that is upon it, and the furni-
ture of the tabernacle, and the altars, and the table and all its furniture,
and the pure candlestick and all its furniture, and the laver and its base,
etc.”. This thread is then reiterated at Exodus 25 for the ark and then
again at Exodus 35, 20‑35. While the Pantokrator image does not at-
tempt to visualize Beseleel’s inspiration per se, it is probably reasonable
to assume that the placement of the image here is intended to evoke the
passages mentioned above and thence an iconophile argument that a
distinction ought to be drawn between the idols that are impermissible
and the icons that God has sanctioned.
20
S. Dufrenne, “Une illustration ‘historique’, inconnue, du psautier du Mont-
Athos, Pantocrator No 61”, Cahiers Archéologiques 15 (1965), pp. 83‑95.
Charles Barber
No one could ever be so insane as to suppose that shadow and truth, na-
ture and art, original and copy, cause and effect are the same in essence;
or to say that “each is in the other, or either one is in the other”. That is
what one would have to say if he supposed or asserted that Christ and
his icon are the same in essence. On the contrary, we say that Christ is
one thing and his icon is another thing by nature, although they have an
identical name. Moreover, when one considers the nature of the icon,
not only would one not say that the thing seen is Christ, but one would
not even say that it is the icon of Christ. For it is perhaps wood, or paint,
or gold, or silver, or some one of the various materials which are men-
tioned. But when one considers the likeness to the original by means
of a representation, it is both “Christ” and “of Christ”. It is “Christ” by
homonymy, “of Christ” by relation.
Οὐκ ἄν ποτε μανείη ἄν τις τοσοῦτον, σκιὰν καὶ ἀλήθειαν, φύσιν καὶ θέσιν,
ἀρχέτυπον καὶ παράγωγον, αἴτιόν τε καὶ αἰτιατόν, ταὐτὸν ὑπολαμβάνειν
κατ᾽ οὐσίαν, καὶ λέγειν ἐν ἑκατέρῳ ἑκάτερα, ἤ θάτερον· ὡς ἄν Χριστὸν
καὶ αὐτοῦ τὴν εἰκόνα ἓν κατὰ τοῦτο ὑπολήψεσθαι ἢ φράζειν˙ ἀλλὰ ἄλλα
Χριστὸν, καὶ ἄλλο εἰκόνα Χριστοῦ κατὰ φύσιν· εἰ καὶ ἡ ταυτότης κατὰ τὸ
21
B. Laourdas and L. Westerink, Photii patriarchae Constantinopolitani Epistulae
et Amphilochia (Leipzig: Teubner, 1983), pp. 117‑119.
22
P. Lemerle, Byzantine Humanism (Canberra: Australian Association for Byzan-
tine Studies, 1986), pp. 230‑233.
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
ἀμερὲς τῆς κλήσεως. Καὶ ὅτε μὲν πρὸς τὴν τῆς εἰκόνος φύσιν ἀπίδοι, οὐ
Χριστὸν μόνον, ἀλλ᾽οὐδὲ εἰκόνα Χριστοῦ εἴποι ἂν τὸ ὁρώμενον. Ἔστι γὰρ
τυχὸν ξύλον, ἢ χρῶμα, ἢ χρυσὸς, ἢ ἄργυρος, ἤ τι τῶν διαφόρων ὑλῶν ὃ καὶ
λέγεται. Ὅτε δὲ πρὸς τὴν δι᾽ ἐκτυπώματος ἐξομοίωσιν τοῦ ἀρχετύπου, καὶ
Χριστὸν καὶ Χριστοῦ. Ἀλλὰ Χριστὸν μὲν κατὰ τὸ ὁμώνυμον· Χριστοῦ δὲ
κατὰ τὸ πρός τι. 23
Here, Theodore has also sought to distinguish the material of the icon
from the portrayal that it conveys. In this case, he has argued that if we
consider the icon in terms of its material nature, then we cannot think of
it as being Christ or of Christ. But, if we contemplate the icon in terms
of the portrayal conveyed by the icon, then it can be “Christ” because of
the name that the portrait carries, and it can be “of Christ” because of
the relation that is here mediated by likeness.
Photios is not yet there in his letter. Before turning to images that
could be likenesses, he offers a validation for the shaping of the vessels
used in the Mosaic sacrifice. Even here, he argues, the shapes given to
the raw material are not the product of careless or irrational labour, but
are rather produced by a wonderful additional quality, that moves the
artisan’s hands from above and so inspires them. The passage in question
reads:
This additional quality is not the product of human hands that have
played with matter wholly apart from divine activity, giving shape to
whatever occurs to their thoughts. Therefore, on the one hand, there
is something which is none other than insulting matter itself and the
careless and irrational labor of human hands, and on the other, there
is something which is shaped upon matter and has the hand as its serv-
ant, but is moved from above. For [this latter] serves inspirations from
above and intelligent thoughts and those who have been led to pious
judgment.
Οὐ μὴν οὐδ’ ἔστιν χειρῶν ἀνθρώπων παιζόντων περὶ τὴν ὕλην χωρίς τε πάσης
ἐνεργείας θείας τὸ παρεμπῖπτον αὐτῶν ταῖς διανοίαις ἀναπλαττόντων. διὰ
τοῦτο τὰ μὲν οὐδὲν ἕτερόν ἐστιν πλὴν αὐτὴ ἡ ὕλη περιυβρισμένη καὶ ὁ τῶν
ἀνθρωπίνων χειρῶν ἀνεπίσκεπτός τε καὶ ἀλόγιστος πόνος· τὰ δὲ μορφάζεται
μὲν ἐπὶ τῇ ὕλῃ καὶ τὴν χεῖρα ὑπηρετοῦσαν ἔχει, ἀλλ’ ἄνωθεν κινουμένην·
ὑπηρετεῖται γὰρ ταῖς ἄνωθεν ἐπιπνοίαις καὶ λογισμοῖς ἔμφροσι καὶ πρὸς τὴν
εὐσεβῆ κρίσιν ἀνηγμένοις. 24
Charles Barber
For from the first the divine and infallible proclamation of the apostolic
and patristic tradition is a kind of living wisdom which receives matter
and, in accordance with its own sacred laws, works it, and by means of
art fashions an image and makes a shape, while not allowing any ma-
terial disorder or human curiosity to be in these; rather, showing and
proclaiming the entire work to be its own, it [wisdom] blessedly and by
way of sacred figures offers to us the pure and genuine appearances of
the prototypes in the holy icons.
Τῆς γὰρ ἀνέκαθεν ἀποστολικῆς τε καὶ πατρικῆς παραδόσεως τὸ θεῖον καὶ
ἀδιάπτωτον κήρυγμα· οἷόν τις ἔμπνους σοφία τὴν ὕλην ἀπολαμβάνουσα καὶ
κατὰ τοὺς ἰδίους καὶ ἱεροὺς θεσμοὺς ἐργαζομένη ταύτην καὶ τεχνιτεύουσα
εἰκονίζει τε καὶ μορφοποιεῖ, οὐδὲν τῆς ὑλικῆς ἀκοσμίας ἢ τῆς ἀνθρωπίνης
περιεργίας ἐν αὐτοῖς ἐῶσα παρρησιάζεσθαι· ὅλον δὲ τὸ ἔργον ἑαυτῆς
δεικνῦσα καὶ ἀποφαίνουσα καθαρὰς ἡμῖν καὶ ἀκιβδήλους ἐν τοῖς σεπτοῖς
εἰκονίσμασιν τὰς τῶν πρωτοτύπων ἐμφάσεις ἱεροπρεπῶς τε καὶ ἱεροτύπως
παρέχεται. 25
25
B. Laourdas and L. Westerink, Epistulae et Amphilochia…, p. 118.22‑30.
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
sulting” and “disorderly”), it is not the material itself that condemns the
thing made from it. Rather, it is “in respect to their use and denomina-
tion, to their inspiration and destination (χρήσει δὲ καὶ κλήσει ἐπιθειασμῷ
τε καὶ τελεσιουργίᾳ)” 26 that one judges the difference between things.
For this reason, some things might not be transformed into anything
better than matter or the works of men’s hands on account of their mate-
rial content or their maker or the subject after which they are named and
thereby consecrated. Neither grace nor glory, activity or re-naming can
change these first conditions of the thing’s making. On the other hand,
when a Christian vessel or image is made, it is transformed into some-
thing better thanks to its use or naming or service and the holiness of
its subjects. Thanks to these conditions these made things are “holy and
honorable and glorified and venerable”. Importantly, for Photios they
do not merit this because of some phenomenal quality, but because they
have participated in their subject. According to Photios:
For being from the activity above and with those to whom they are dedi-
cated, they bear their name and form in participation and they transport
our mind to them, bringing over to us from there both the good form
and divine favor. [These things] would not likely be named for their ma-
terial, nor for some other incongruous quality that joins by means of op-
posites, but in [terms of ] what they have participated in and from which
they have been produced and which they serve and are consecrated to;
it is for these things they are very well and rightly known and named by
those who are actually pious.
Τῆς γὰρ ἄνωθεν ἐνεργείας καὶ οἷς ἀνατέθεινται ὧν τε τὴν κλῆσιν καὶ τὸ
εἶδος φέρουσιν ἐν μετουσίᾳ γενόμενα καὶ τὸν ἡμέτερον νοῦν πρὸς ἐκεῖνα
διαβιβάζοντα διαπορθμεύοντά τε ἡμῖν τὴν ἐκεῖθεν ἀγαθοειδῆ καὶ θείαν
εὐμένειαν, οὐκ ἐκ τῆς ὕλης ἂν εἰκότως κληθείη, οὐ μὴν οὐδ’ ἀπό τινος
ἀπεμφαινούσης ἄλλης καὶ τοῖς ἀντικειμένοις ἁρμοζούσης ἰδιότητος, ἀλλ’
ὧν τε μετέσχεν καὶ πρὸς ἃ παρῆκται οἷς τε ὑπηρετεῖται καὶ ἀφιέρωται,
ἐκεῖθεν εὖ μάλα καὶ λίαν ἐνδίκως καὶ γινώσκεται τοῖς εὐσεβέσιν ὄντως καὶ
ὀνομάζεται. 27
Thus it is thanks to the activity from above, namely that which inspires,
their dedication, and the name that they bear that allows these icons
to participate in their subject, that allows the human mind to be trans-
Charles Barber
ported to this subject, and that allows blessing and divine favor to return
from this subject. 28
In underscoring the role of inspiration as the thing that moves the
artist’s hand, Photios seeks to preserve a visual economy that can imply a
presence mediated by participation. This participation, whether mediat-
ed by likeness or naming or the sacramental life of things, provides an in-
timate relation between the icon and its subject. Potentially idolatrous,
the actual origin of the work of art must here again be taken out of the
artist’s hand. It is a move that elaborates upon Nicaea’s disempowerment
of the artist, even as it pays renewed attention to the artist.
When this understanding is brought to bear on homilies ten and sev-
enteen, it is possible to suggest that Photios not only provides reason for
remarking a participatory quality in the monumental images found there,
but also to understand how in introducing the notion of inspiration he
seeks to elaborate a model for accommodating new programs of decora-
tion within a living tradition, while retaining a very limited account of the
artist’s actual role in and responsibility for the origin of the work of art.
Invention (ἡ ἐπίνοια)
It is striking to find in the next generation evidence of a decidedly dif-
ferent understanding of the artist’s role. This can be found in one of the
homilies composed by the Emperor Leo VI. This was delivered on the
occasion of the consecration of a now-lost church paid for by his then
father-in-law Stylianos Zaoutzes, an occasion that may date to around
890. Like the similar homilies written by Photios, this text presents an
evocation of a significant Constantinopolitan church that affords us a
glimpse of what might be termed a Middle Byzantine church interior.
Thanks to this, the core of this text is well known and has been much
used by art historians. Rather than following this more archaeological
use of the text, it is possible to emphasize those parts of the text that are
less familiar. These are those framing passages in which Leo attempts to
define the origins of the program found in this church. As shall be seen,
these place great emphasis upon the artist’s “invention (ἡ ἐπίνοια)”. 29
28
M.-J. Mondzain, Image, Icon, Economy: The Byzantine Origins of the Contempo-
rary Imaginary (Palo Alto: Stanford University Press, 2005), pp. 101‑107.
29
The term may readily be translated by other equally apt words: conception, de-
sign, notion.
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
30
T. Antonopoulou, Leonis VI Sapientis Imperatoris Byzantini Homiliae, CCSG,
63 (Turnhout: Brepols, 2008), homily 37, pp. 472‑74.44‑96; C. Mango, Art of Byzan-
tium…, pp. 203‑204. For a recent introduction to Leo’s homilies see: T. Antonopoulou,
The Homilies of the Emperor Leo VI (Leiden: Brill, 1997).
31
Antonopoulou, Leonis VI…, homily 37, pp. 474‑76.99‑138; C. Mango, Art of
Byzantium…, pp. 204‑205.
32
T. Antonopoulou, Leonis VI…, homily 37, p. 478.192‑194.
33
T. Antonopoulou, Leonis VI…, homily 37, pp. 476‑77.139‑166; C. Mango, Art
of Byzantium…, p. 205.
Charles Barber
the artist’s invention, namely why he excised from the image the lower
members of the body.
Ἔστι κατὰ μέσον εἰκὼν ἐν τῷ πρὸς κορυφὴν ἐπηρμένῳ σφαίρας τμήματι, τῆς
κάτω θέσεως τῶν μερῶν ἐλλειπής. Ἐμοὶ δοκεῖ διὰ τῆς τοιαύτης κατασκευῆς
τῆς εἰκόνος βεβουλῆσθαι τὸν τεχνίτην μυστηριώδη ἔμφασιν παρασχεῖν
τῆς σωζομένης ἀϊδίου τῷ εἰκονισθέντι μεγαλειότητος, καὶ ὡς ὁ κάτω τῆς
οἰκονομίας τρόπος οὐδὲν ὑφεῖλε τοῦ ὕψους, διαμεμενηκότος τοῦ διὰ τῶν
ἐσχάτων τῆς ταπεινώσεως ἐξετασθέντος ἐν ᾧ πρόσθεν σὺν τῷ γεννήτορι
διέπρεπεν μεγαλείῳ, ὥσπερ εἰ μὴ δ’ ὅλως ἐν ταῖς ἀνθρωπίναις ἐξήταστο
ταπεινότησιν. Οὕτως ἐγὼ τῆς ἐπινοίας τοῦ τεχνίτου συνίημι, δι’ ἣν τὰ
τελευταῖα τῶν μερῶν οὐκ ἔδωκε φέρειν τῷ εἰκονίσματι. 34
The appearance of the image is here clearly returned to the artist’s intent.
We hear of the artist’s wish and of the artist’s invention regarding the ‑ let
us suppose ‑ novelty of seeing a partial image of Christ in this location,
rather than ‑ perhaps ‑ the Ascension that can be found in other church-
es of this era, such as that in the dome of the church of Hagia Sophia in
Thessaloniki. 35
The listener to this homily had been prepared for this identification
of artistic invention by the preceding section of the text, in which Leo
has attempted to define the origins of the work of art in this manner:
34
T. Antonopoulou, Leonis VI…, homily 37 p. 472.44‑54; C. Mango, Art of Byzan-
tium…, p. 203 (adapted).
35
The decoration of the Virgin of the Pharos may offer a precedent (see note 16
above). Note that Mango understood the Pharos Christ to be enthroned. For discussion
of the Ascension iconography at Hagia Sophia in Thessaloniki see R. Cormack, “Paint-
ing after Iconoclasm…”, pp. 162‑163.
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
Leo has here asked about the origins of this decoration as a whole. Ask-
ing, for example, whether it derives from some existing program. He
seems to reject this when he turns to a second option, namely a desire
that resides in the artist. It is this desire that both moves the artist and
produces the artist’s inventions. It is thus that the inventions are brought
forth from within the artist himself.
This origin of the work within the artist’s desire is reiterated in the
section of the homily that follows upon Leo’s account of the church’s
decoration. There he asks:
Therefore, from what meadows are the flowers in this holy meadow of
the graces cultivated? From what revered figures do the image bearers
[derive]? Who has discovered the inventions [for the images]? It is in
this manner [we might say] that you have made an extremely revered
imitation, or rather it is thanks to that one who has fashioned the figures
that the work has been brought to completion, the figures having been
set forth by means of imitation, by means of which you have also today
set up the work. It is from that one that you have deduced the revered
designs, which now, your designs having been accomplished, you honor,
consecrating the work as a dwelling place for the one who fills all. There-
fore, they were always accustomed to apportion to the graces themselves
the more delightful parts of the whole; on account of this, the poetic
type fashioned stories that poured forth comforts, which always con-
cerned the procession of souls. But I have [spoken] about those graces.
And whatever they are, it must be completely understood that they are
reasonable and revered. I cannot exactly say whether the flowers of the
temple may pass for these [graces], but I am utterly convinced that the
heavenly graces, which raise the soul from the matter which draws it
down, and gathers it up to the divine height, these, indeed, are present
and dwell here. For even if the divine is not in need of care, it neverthe-
Charles Barber
less accepts the devout intent of those who honor it. And it is likely the
case that those who have a greater share of devotion are graced by the
greatest share of favour. As to how much more of this sacred piety is
possessed by the artist of this work, it is said that the best witness is the
witness of the eyes.
Ποίων ἄρα λειμώνων τὰ ἄνθη φυτοκομεῖται ἐν τῷ ἱερῷ τούτῳ τῶν Χαρίτων
λειμῶνι; Ποίων δὲ σεμνῶν τύπων ἀγαλματοφορίαι; Τίνος εἰς εὕρεσιν τῶν
ἐπινοιῶν καταστήσαντος, οὕτως ὑπέρσεμνον εἰργάσω μίμημα; Ἦ παρ’
ἐκείνου τοὺς τύπους ὁ κατασκευάσας τὸ ἔργον λαμβάνεις καὶ τὴν διάρκειαν
εἰς τὸ παραστῆσαι τοὺς τύπους διὰ μιμήσεως, ᾧ καὶ τὸν κάματον σήμερον
ἀνατίθης· ἐκείνου τὰς σεμνὰς ἐπινοίας πορίζῃ, ὃν νῦν τελεσιουργηθέντων
σοι τῶν ἐπινοημάτων τιμᾷς, ἀνιερῶν τῷ πάντα πληροῦντι τὸ ἔργον εἰς
ἐνδιαίτημα. Ἀεὶ μὲν οὖν τὰ τῶν διαιτημάτων τερπνότερα εἰώθεσαν εἰς
δίαιταν ἀπονέμειν ταῖς Χάρισιν· διὰ τοῦτο ἄρα καὶ δρόσου ῥεούσας αὐτὰς τὸ
ποιητικὸν γένος μυθοπλαστοῦσιν, ὡς ἀεὶ περὶ τὰ ψυχαγωγὰ στρεφομένας.
Ἐγὼ δὲ περὶ τῶν Χαρίτων ἐκείνων – πάντως δ’ αἵτινές ποτέ εἰσι, σώφρονας
καὶ σεμνὰς ταύτας ὑποληπτέον –, εἰ μὲν καὶ αὐταῖς τὰ τοῦ ναοῦ ἄνθη βάσιμα
ἢ μή, οὐκ ἔχω ἀκριβολογεῖσθαι·τὰς δ’ οὐρανίους χάριτας, αἳ τῆς κατασπώσης
ὕλης ἐπαίρουσι τὴν ψυχὴν καὶ πρὸς θεῖον ὕψος ἀνακομίζουσι, ταύτας δὴ ὅτι
καὶ πάρεισιν ἐνταῦθα καὶ διαιτῶνται, ἀκριβῶς πεπεισμένος τυγχάνω. Καὶ
γὰρ εἰ καὶ θεραπείας τὸ θεῖον ἀπροσδεές, ἀλλ’ ὅμως τὴν εὐλαβῆ προσίεται
τῶν τιμώντων προαίρεσιν, προσιέμενος δὲ κατὰ τὸ εἰκὸς οἷς πλέον μέτεστιν
εὐλαβείας, τούτοις χαρίζεται πλεῖστον μέρος ἀποδοχῆς. Ὅσον δὲ τῷ τεχνίτῃ
τοῦ ἔργου τῆς ἱερᾶς ταύτης εὐλαβείας τὸ περιούσιον, ὀφθαλμῶν, φασί,
μαρτυρούντων, ἀκροτάτη γίνεται μαρτυρία. 37
Here Leo identifies the source of the artist’s invention as the meadow
from which his inventions have been gathered. Throughout this homily,
Leo asks his audience to be witness to the inventiveness of the artist him-
self. At the start of the first passage defining the artist we are told that
this artist carries an image of everything beautiful within himself. He has
not gathered his inventions from existing models, but has brought these
forth from within himself. This attention to the artist’s role is important
and it places him at the center of the invention of his work and at the
origin of the work of art.
This is not to say that the artist invents his subjects. Rather, as we see
in this second passage, the artist’s work is marked by the translation of
existing figures into their images by means of imitation. This act, here
identified as pious, depends upon the artist’s own relation, mediated by
desire, to the subject matter furnished by God.
37
T. Antonopoulou, Leonis VI…, homily 37, pp. 477‑78.167‑191.
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
Conclusion
Leo’s homily has brought us some way from the definition of the art-
ist’s relation to the work of art than was found in the text of the Second
Council of Nicaea. There the power over and responsibility for the icon
lay in the hands of the Church. Understood as a guardian of both tra-
dition and invention, the Church safeguarded the work of art from its
painters, leaving them as servants of an Art that preceded them.
When Photios turned to the same problem, namely the origin of the
work of art, we find him developing a consistent account of inspiration.
This allows Photios to develop a more individualized account of making
while, ultimately, presenting the artist as a vehicle for an act of making
that originates prior to the artist. The artist is thus presented to us as
one who, under the guidance of a living wisdom, receives or is given the
inspiration that moves his hands. It is this inspirational model, one that
assumes a higher power than that of the artist, that allows Photios to
develop a more participatory notion of the icon.
Leo VI continues this more individualized account, but offers a great-
er possibility for agency on the part of the artist. For Leo, it is the artist’s
desire that promotes artistic activity, it is the artist who deduces the sub-
ject matter, it is the artist who intends meaning by his visual choices, and
it is the artist who invents and designs the images that translate his sub-
jects into their representations. By these means, Leo has taken control
over the invention or design or conception or notion from the Church
and has placed this power in the hands of the artist. 38 In re-appropriating
38
In doing so, Leo perhaps echoes the sentiment found in a revaluation of the art-
ist offered by the seventh canon of the Constantinopolitan council of 869‑870, which
had declared:
“Setting up holy and venerable icons and teaching the similar disciplines of
divine and human wisdom are very beneficial. It is not good if this is done by those
who are not worthy. For this reason no one is to paint the holy churches who has been
anathematized by what has been decreed, nor to teach in a similar place, until they have
turned back from their deceit. Therefore, if anyone after our declaration were to allow
these in whatever manner to paint holy icons in the church or to teach, if he is a cleric he
will endanger his rank, if he is a layman he will be banished and deprived of the divine
mysteries”.
Τὸ τὰς ἁγίας καὶ σεπτὰς εἰκόνας ἀναστηλοῦν καὶ τοὺς πλησίον διδάσκειν τὰ μαθήματα
τῆς θείας τε καὶ ἀνθρωπίνης σοφίας, λίαν ὀνησιφόρον· οὐ καλὸν δὲ τοῦτο μὴ παρὰ τῶν ἀξίων
γίνεσθαι· τούτου χάριν μηδαμῶς εἰκονουργεῖν ἐν τοῖς ἱεροῖς ναοῖς τοὺς ἀναθεματισθέντας
θεσπίζομεν, μήτε μὴν ἐν οἱῳδήποτε τόπῳ διδάσκειν, μέχρις ἂν ἐπιστραφῶσιν ἐκ τῆς ἰδίας
ἀπάτης. Εἴ τις οὖν μετὰ τοῦτον ἡμῶν τὸν ὅρον πρὸς ζωγραφικὴν ἁγίων εἰκόνων ἐν ἐκκλησίᾳ
ἢ διδασκαλικὴν αὐτοὺς ὁπωσοῦν παραδέξοιτο πρᾶξιν, εἰ μὲν κληρικός ἐστιν, εἰς τὸν ἴδιον
κινδυνευέτω βαθμόν, εἰ δὲ λαϊκός, ἀφοριζέσθω, καὶ στερείσθω τῶν θείων μυστηρίων. Con-
ciliorum Oecumenicorum Decreta, ed. by P. Joannou (Basle: Herder, 1962), p. 148. Here,
Charles Barber
the term ἡ ἐπινοία for the artist, he has also ‑ implicitly ‑ rejected the
more passive model found in Photios’s use of ἡ ἐπιπνοία. 39 This pursuit
of invention allows Leo to return power over and responsibility for the
origin and making of the icon to his artist. Further, this re-assignment
also allows Leo to negotiate the question of innovation. When he reads
the image of the Pantokrator in terms of the artist’s intent, he implies
that this novel image is to be understood in relation to choices made by
that artist. It is this artist’s invention or design that has produced a new
visual means of conceptualizing Christ. He has not created Christ, but
he has invented a manner of seeing Christ. For Leo, it is such instances of
an artist’s invention that lie at the origin of the work of art
painting, theology and philosophy are placed on the same plane and are subject to the
same policing. It introduces a thread of responsibility for the work produced that is,
I believe, echoed in Leo’s text.
39
T. Antonopoulou, The Homilies…, p. 244 and A. Frolow, “Deux églises…”, p. 54
both introduce the conception of inspiration into their discussions of the origins of the
artist’s invention. The text of the homily does not, however, appear to support the use of
this term.
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
Charles Barber
Fig. 2. Apse mosaic, Hagia Sophia, Istanbul, Turkey 867, The Byzantine Institute
and Dumbarton Oaks, Fieldwork Records and Papers, Photograph Byzantine In-
stitute, Dumbarton Oaks, Trustees for Harvard University, Washington, D.C.
ON THE ORIGIN OF THE WORK OF ART
Henry Maguire
1
See Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection and in
the Whittemore Collection, ed. by A. F. Bellinger and P. Grierson (Washington, D.C.:
Dumbarton Oaks center for Byzantine studies, 1966‑), iii, part 1 (1973), pp. 142‑145.
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 177-216
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111931
Henry Maguire
right his son, Constantine V. 2 As seen on this seal, the basic schema for
the imperial portrait between the eighth and the ninth century consists
of a flattened face whose outline approximates to a triangle. The hair falls
straight down on each side of the face and bunches out in stylized curls
beside the neck, just below the ears. The faces and their features are simply
outlined by raised lines delineating the eyes, eyebrows, nose, mouth and
chin. The son’s portrait is very similar to that of his father, except that
the line that describes Leo’s cheeks and chin is thickened, to indicate that
the older man has a beard. A thin line in relief above Leo’s mouth shows
that he also has a moustache. These portraits can be compared with those
appearing, almost one hundred and fifty years later, on a seal depicting
Basil I and Constantine (fig. 2). 3 As on the earlier seal, both father and
son have the same flat, triangular-shaped faces, with the hair bunched out
on either side of the neck. As before, a slight thickening of the line around
the chin indicates that the older man has a short beard, while a line above
his mouth suggests his moustache. There are differences in the costumes
and attributes of the emperors in the two seals – for example, in the earlier
seal the pair hold a cross, while in the later example they hold a labarum.
But in each case the treatment of the faces and the hair is very similar.
However, if we compare the portraits of Basil and Constantine to
that of Christ, on the obverse of the seal, we can see great differences
(fig. 1). The shape of the lower part of Christ’s face is more rounded
than those of the imperial couple, while his hair falls in long straight
strands and does not bunch out to the sides. Furthermore, the arrange‑
ment of the hair is asymmetrical; on our left side it curves at the bot‑
tom, following the contour of his jaw; on the right side it falls down
in vertical strands behind the shoulder. Christ’s beard is not indicated
merely by a thickened contour line, but consists of striations that indi‑
cate a full beard of medium length. Finally, it can be observed that the
style of the portrait differs from that of the pair on the reverse of the
seal. The features of Christ’s face have a more rounded and fully modeled
appearance, whereas the imperial portraits appear more flat and two-
dimensional by comparison.
2
G. Zacos and A. Veglery, Byzantine Lead Seals (Basel: G. Zacos; Berne: Benteli,
1972‑), vol. i, part 1 (1972) pp. 325‑326, no. 246, pl. 44.
3
G. Zacos and A. Veglery, Byzantine Lead Seals…, p. 51, no. 59 a, pl. 18; Catalogue
of Byzantine Seals at Dumbarton Oaks and in the Fogg Museum of Art, ed. by J. Nesbitt
and N. Oikonomides (Washington D. C.: Dumbarton Oaks research library and col‑
lection, 1991‑2009), vi: Emperors, patriarchs of Constantinople, addenda (1999), p. 84,
no. 51.1.
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
In the tenth century we find a few seals that depart from the ste‑
reotypes of imperial portraiture, and apparently attempt to portray
the features of individual emperors, or, at least, to make distinctions
between them. A striking example is a seal of Romanos I flanked by
Constantine VII and Stephen (fig. 4). 4 Here we find that the two sons
have the conventional flat triangular faces with the bunched out locks of
hair that appeared on the earlier seals. However, the portrait of Romanos
himself has more individuality. He has a well-modeled face, whose shape
is strongly squared. His beard is long and flowing, his moustache thin
and drooping. His beard has a distinctive shape, being bifurcated at the
center. And here, again, we can note that the emperor’s portrait differs
markedly from that of Christ, which resembles the portrait on the seal
of Basil I (fig. 3). On the seal of Romanos, as on Basil’s seal, Christ’s hair
is long and asymmetrical, falling more copiously over the right shoulder
than the left. Christ’s beard, in contrast to that of the emperor, is shorter
and somewhat wavy, and his cheeks are more rounded.
Another well-known example of individual portraiture among the
imperial seals of this period is the effigy of Constantine VII. 5 The face
here has a long shape, with an exceptionally long nose. The beard is of
medium length, indicated by vertical striations, and somewhat squared
at the bottom. A very similar portrait appears on certain gold coins of
Constantine VII, which are dated to his sole reign in 945 (fig. 28). 6 The
same facial features also characterize this emperor on the famous ivory in
Moscow, which shows Constantine being crowned by Christ (fig. 5). 7 This
is one of the very few cases in Byzantine art where we can make a direct
comparison between portraits of the same secular individual appearing
in different media, coins and seals and ivories. In all three cases it can be
observed that the features of the emperor differ from those of Christ. On
the seal, Christ’s beard is distinctly shorter than that of Constantine, and
wavy rather than being formed of long vertical strands. The same features
distinguish the beards of Christ and the emperor on the ivory.
4
G. Zacos and A. Veglery, Byzantine Lead Seals…, p. 61, no. 68a, pl. 20; Catalogue
of Byzantine Seals at Dumbarton Oaks…, p. 101, no. 62.1.
5
G. Zacos and A. Veglery, Byzantine Lead Seals…, pp. 63‑64, no. 70d, pl. 20.
6
Byzance: L’art byzantin dans les collections publiques françaises. Musée du Louvre,
3 novembre 1992 ‑ 1er février 1993 (Paris: Éd. de la Réunion des musées nationaux, 1992),
pp. 402‑403, no. 312; Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks…, iii,
part 2, p. 535, pl. 36.
7
Byzantium, 330‑1453, Royal Academy of Arts, London, 25 October 2008‑22 March
2009, ed. by R. Cormack and M. Vassilaki (London: Royal Academy of Arts, 2008),
pp. 397‑398, no. 68.
Henry Maguire
8
G. Zacos and A. Veglery, Byzantine Lead Seals…, pp. 67‑68, no. 75c, pl. 21; Cata‑
logue of Byzantine Seals at Dumbarton Oaks…, vi, pp. 108‑109, no. 68.4.
9
Byzantium: an Oecumenical Empire. Exhibition catalogue. Byzantine and Chris‑
tian Museum, October 2001-january 2002 (Athens: Hellenic ministry of culture, 2001),
p. 138, fig. 34.
10
G. Zacos and A. Veglery, Byzantine Lead Seals…, p. 75, no. 83, pl. 23.
11
G. Zacos and A. Veglery, Byzantine Lead Seals…, p. 77, no. 86a.
12
Byzantium: an Oecumenical Empire…, p. 149, no. 56.
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
tury. In the late tenth and eleventh centuries the repetition of similar
portraits returns, but with a different facial type from the schema that
had been employed during the earlier centuries. In those cases where
the emperor appeared on the seal together with Christ, the artists made
sure to distinguish carefully between the features of the earthly and the
heavenly ruler, so that they could not be confused. We will now turn to
images of the saints on Byzantine seals from the same period of time,
which present a very different development. Here we find, instead of ste‑
reotyped effigies, and then more stereotyped effigies, the steady develop‑
ment of a sophisticated system of portraiture which enables us, and ena‑
bled the Byzantines, to distinguish between different individuals with
some consistency. Because of the constraints of space, it is only possible
to give a few selected examples.
Our gallery of saints begins with a tenth century seal of Theodotos,
imperial protospatharios and chartoularios of the dromos of the West,
which depicts on its obverse the bust of St John the Baptist (fig. 8). 13
There is no doubt who is portrayed here, because the saint is identi‑
fied by an inscription. He has a long face, with hair descending in long
strands that cascade down in front of his shoulders. The hair is parted
at the top of his head, and there are two small wisps at the center of
his forehead. The beard is long and somewhat pointed. An earlier ninth
century seal, which belonged to Theodore Stoudites, also shows John
with long straight strands of hair, and a central parting. 14 The features of
John’s portrait can be traced back to the mid-sixth century, when they
already appear in the mosaic in the apse of the Basilica of Eufrasius at
Poreč (fig. 9). 15 Here we find preserved the long strands of hair cascading
over the shoulders, the central part, the two wisps at the forehead, and
the long pointed beard.
An eleventh century seal has a fine portrait of the father of John
the Baptist, Zacharias (fig. 10). 16 It belonged to Theophylaktos Hagio‑
zacharites, patrikios and strategos of Samos. The features of Zacharias
13
Catalogue of Byzantine Seals at Dumbarton Oaks…, i: Italy, north of the Balkans,
north of the Black sea (1991), p. 5, no. 1.10.
14
J. Cotsonis, “The Contribution of Byzantine Lead Seals to the Study of the Cult
of the Saints (Sixth-Twelfth century)”, Byzantion 75 (2005), pp. 283‑497 (especially
p. 415).
15
A. Terry and H. Maguire, Dynamic Splendor: the Wall Mosaics in the Cathe‑
dral of Eufrasius at Poreč (University Park: Pennsylvania State University Press, 2007),
pp. 108‑109, figs. 122‑123.
16
Catalogue of Byzantine Seals at Dumbarton Oaks…, ii: South of the Balkans, the
Islands, South of Asia Minor (1994), pp. 135‑136, no. 44.13.
Henry Maguire
s omewhat resemble those of his son, except that his beard is more round‑
ed and not as long. Also, he wears on top of his forehead the tefillin,
the small box containing scriptural passages worn by Jews during prayer.
Here, too, we can trace the portrait back to the sixth century mosaics at
Poreč, where Zacharias appears with long hair, like his son, but with a
slightly more rounded beard (fig. 11). 17 At Poreč we also find the tefillin
attached to the saint’s forehead.
We turn now to John the Theologian, who appears on a seal of
Epiphanios, the abbot of a monastery on the island of Patmos. 18 The
seal has been assigned to the eighth century. Inscriptions on the obverse
and reverse of the seal identify the saint as the Theologian. His portrait
is quite different from that of Zacharias or John the Baptist. He is bald‑
ing, with a short cap of hair receding from his forehead at the sides. His
beard, however, is long and pointed. The saint is characterized by the same
features in the tenth century Gospel book, manuscript 43 in the library of
the Stauronikita Monastery on Mount Athos, where he appears as one of
the Evangelists (fig. 12). 19 Here, also, the saint is balding, with short hair
receding to the side of his high forehead and exposing his ears. As on the
seal, the saint’s beard is relatively long, though here not as sharply pointed.
Several of the military saints can be distinguished from each other
through their individualized portraits on the seals, which achieve a con‑
siderable degree of consistency. Some of these portrait types go back to
the pre-iconoclastic period, and all can be matched in works of art in
other media. St George, for example, was shown as a well-fed young man,
with a plump, beardless, rounded face, and a luxuriant head of curls. He
appears with these features on a well-preserved seal of John Komnenos,
the father of Alexios I, which dates between 1057 and 1067 (fig. 13). 20
An inscription identifies the saint. George’s portrait can be easily distin‑
guished from that of St Demetrios, who is shown on another eleventh
century seal, again accompanied by his name (fig. 14). 21 On both speci‑
mens the saint is armed with a shield and a spear, and each of them is
17
A. Terry and H. Maguire, Dynamic Splendor…, pp. 104‑107, figs. 107‑109.
18
J. Cotsonis, “The Contribution of Byzantine Lead Seals…”, pp. 422‑423, fig. 3.
19
H. Maguire, The Icons of their Bodies: Saints and their Images in Byzantium
(Princeton: Princeton University Press, 1996), p. 18, fig. 8.
20
G. Zacos and A. Veglery, Byzantine Lead Seals…, no. 2681bis (a), pl. 177;
N. Oikonomides, A Collection of Dated Byzantine Lead Seals (Washington, D. C.:
Dumbarton Oaks, 1986), pp. 88‑89, no. 90; Catalogue of Byzantine Seals at Dumbarton
Oaks…, i, p. 9, no. 1.18.
21
Catalogue of Byzantine Seals at Dumbarton Oaks…, I, pp. 93‑94, no. 29.1.
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
beardless. But the hair of St Demetrios is much shorter and less bouffant
than the locks of St George, which reach down below the level of his ears
so that they cover them. This difference in the hair styles consistently
distinguishes between the portraits of the two soldiers, whether they are
from the eleventh century or the pre-iconoclastic period. For example,
the late eleventh-century enamels that formerly decorated the frame of
an icon in the Djumati Monastery in Georgia portray George with curls
descending well below the ears and all-but concealing them, 22 while in
the case of St Demetrios the cap of hair is shorter, leaving the ears fully
exposed. 23 Similar differences can be observed between the two saints in
the seventh-century mosaics of St Demetrios in Thessaloniki. The figure
identified by a later inscription as St, George has a full head of curls, 24
which leave only the tips of the ears visible (fig. 15), while St Demetrios
in his inscribed portraits has much shorter, cap-like hair (fig. 16). 25
Also easy to recognize is the portrait of St Theodore, who is at all pe‑
riods characterized by a full beard of medium length, which is distinctly
pointed. He appears wearing such a beard on a seal of E uphemianos,
an archbishop of Euchaita who was deposed between 882 and 886;
Theodore’s name is inscribed beside him (fig. 17). 26 In this case, also, the
type goes back to pre-iconoclastic art, such as the sixth or seventh cen‑
tury icon at Mount Sinai, where Theodore, who again is identified by an
inscription, already sports an ample pointed beard (fig. 18). 27
In summary, we find in seals that the portraits of the major saints, in
contrast to those of emperors, were distinguished from each other with
22
H. C. Evans and W. D. Wixom, The Glory of Byzantium: Art and Culture of the
Middle Byzantine Era, ad 843‑1261. Exhibition catalogue (New York: the Metropolitan
Museum of Art, 1997), p. 346, no. 234.
23
K. Wessel, Byzantine Enamels from the 5th to the 13th Century, trans. from Ger‑
man by I. R. Gibbons (Shannon: Irish University Press, 1969), p. 120, fig. 40f.
24
On the identity of the saint, see A. Terry & H. Maguire, Dynamic Splendor…,
p. 143 and 206, note 94, fig. 294; C. Bakirtzis, “A pre-Iconoclastic Mosaic of St George in
Thessalonike”, in Doron: timetikos tomos ston kathegete Niko Nikonano, ed. by G. Karadedos
(Thessaloniki: 10e Ephoreia Vyzantinon Archaioteton, 2006), pp. 127‑134.
25
G. A. and M. G. Sotiriou, E Basilike tou Agiou Demetriou Thessalonikes (Athens:
Archaiologike Hetaireia, 1952), p. 193, 196, pl. 63‑64, 67.
26
Catalogue of Byzantine Seals at Dumbarton Oaks…, iv: The East (2001), p. 44,
no. 16.1.
27
K. Weitzmann, The Monastery of St Catherine at Mount Sinai: The Icons (Prince‑
ton: Princeton University Press, 1976), pp. 36‑37, no. B13, pl. 15, 59. On Theodore’s
portraits, see L. Mavrodinova, “Saint Théodore, évolution et particularités de son type
iconographique dans la peinture médiévale”, Bulletin de l’Institut des Arts, Académie Bul‑
gare des Sciences, 13 (1969), pp. 33‑52.
Henry Maguire
respect to their hair, beards, and facial features. Even within a single class
of saints, such as soldiers, the portraits were not generic. Each military
saint was carefully differentiated from his colleagues. The gallery of por‑
traits did not reach its full extend until the eleventh century, but we have
seen that several of the types can be found in Byzantine art before icono‑
clasm, and were current on seals by the ninth century.
If we turn to imperial portraits on Byzantine coins, we find that they
resemble those on the seals, except that many of the impressions are bet‑
ter preserved, so that we can see the features more clearly. Thus a coin of
Leo III and Constantine shows both emperors with triangular faces and
the hair bunched into curls either side of the neck (figs. 19, 20). 28 Here,
as in the seals, a thickening of the outline around the lower part of the
face indicates the older ruler’s beard, and a thin line suggests his mous‑
tache. In the ninth century, essentially the same portrait type was still
being used to portray Michael III and Basil I. A bronze coin with effigies
of Michael III on the obverse and his adopted co-emperor Basil I on the
reverse displays portraits of the two sovereigns that are very similar (figs.
21, 22). 29
When the portrait of Christ is introduced onto the coinage, dur‑
ing the reign of Michael III, we can observe, as in the seals, the contrast
between the characterization of Christ and that of the emperor. Christ
has an oval shaped face, and a rounded, medium-length beard formed of
vertical striations (fig. 23). 30 The style of Christ’s hair, which falls asym‑
metrically over the right shoulder, is completely different from that of
the emperor (fig. 24). The portrait type of Christ that is used for the
coinage of Michael III revives the image that had appeared before icono‑
clasm on the gold coins of the first reign of Justinian II, issued between
692 and 695 (fig. 25). 31 It may be significant that the die makers chose
to use this portrait rather than the type that appeared on the coinage
of Justinian II’s second reign, from 705 to 711 (fig. 26). 32 In the second
reign, Christ had appeared as a younger man with a more triangular-
28
Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, III, part 1,
no. 5.5, pl. 1.
29
Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, III, part 1,
no. 8.4, pl. 29.
30
Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, III, part 1,
no. 3.3, pl. 28.
31
Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, ii, part 2,
pp. 569‑570, nos 7a.3‑14.2, pl. 37.
32
On this type, see ibid., pp. 644‑645, nos 1.2‑7, pl. 43.
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
shaped face and a short beard indicated by a thickening of the jaw line.
Even though this second image of Christ lacked the bunched up curls
beside the neck that characterized the imperial portraits, it may still have
been rejected by the ninth century mint as being too similar to the tradi‑
tional portraits of the emperor.
As in the seals, we find in the tenth century a few so-called “portrait
coins”, which appear to provide more individualized characterizations of
the rulers, especially Leo VI, Romanos I, and Constantine VII. But, as
Philip Grierson pointed out, the finest of these portraits were reserved
for special issues of gold with limited circulation. 33 The earliest of these
issues is a nomisma struck towards the end of the reign of Leo VI. 34 It
departs from the flat schema of earlier imperial portraits, in favor of a
more modeled relief depicting the ruler with an elongated face and nose,
long straight hair that falls behind his shoulders, and a long softly shaped
beard. Somewhat similar features characterize the “portrait coins” of Leo’s
son, Constantine VII, except that the hair behind the neck is wavy rather
than straight, and the bottom of the beard is more squared off (fig. 28). 35
This is the same portrait that appears in the ivory in Moscow. As with all
the other coins and seals on which the emperor’s image appears together
that of with Christ, there can be no confusion between the two (fig. 27).
A striking portrait coin of Romanos I is the silver miliaresion minted
in 931, which reproduces the likeness that appears on his seal (fig. 29). 36
Here, in contradistinction to Leo and his son Constantine, the emperor
has a broad, square face, a long drooping moustache, and a clearly bifur‑
cated beard.
Alongside these more individualized portraits, the old schemata con‑
tinued. A coin of Constantine VII and Romanos II, for example, shows
both rulers with the accustomed triangular faces and bunched out hair
33
Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, iii, part 1,
pp. 143‑144.
34
Byzance: L’art byzantin dans les collections publiques françaises…, p. 401, no. 309.
35
Byzance: L’art byzantin dans les collections publiques françaises…, pp. 402‑403,
no. 312; Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks collection…, iii,
Part 2, nos 13.a.1‑13b.2, pl. 36. It cannot be verified whether these images of Leo VI
and Constantine VII reproduced the actual features of these sovereigns. The important
point is that they are clearly differentiated from each other and from other imperial por‑
traits. On the question of the “realism” of these portraits, see M Büchsel, Die Entstehung
des Christusporträts: Bildarchäologie statt Bildhypnose (Mainz: Ph. Von Zabern, 2007),
pp. 100‑107.
36
Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, iii, part 1,
pp. 144‑145, part 2, no. 19, pl. 37.
Henry Maguire
familiar from earlier reigns (fig. 31). 37 The image of Christ on this coin,
on the other hand, retains some of the fineness of the portrait coins; the
face is softly modeled, with a medium length rounded beard (fig. 30).
As in the seals, a new schema prevailed in the eleventh century. It
portrayed the emperors with a less triangular, more rounded face, with a
medium length rounded beard, indicated by striations, and without the
locks of hair beside the neck. This type of portrait characterizes, for ex‑
ample, Michael IV (fig. 33), 38 Constantine IX, 39 Michael VII (fig. 35), 40
and Nikephoros III. 41 In each case the imperial image is carefully dis‑
tinguished from that of Christ, who, as usual, has long hair descend‑
ing behind the right shoulder and, on most of these coins, a distinctly
pointed beard (figs. 32, 34). Thus, on the earlier coinage of the ninth and
tenth centuries, when the schematic outline of the emperor’s face was
triangular, suggesting a pointed beard, Christ’s beard was more rounded.
On the eleventh century coins, when the emperor’s beard became more
rounded, Christ’s own beard became pointed. We shall return to this
observation later.
When it comes to depictions of the saints, the coins are less useful
than the seals, because the saints rarely appear. However, one coin from
the early tenth century is particularly instructive. This is a rare nomisma
of the emperor Alexander, dated 912 to 913, which depicts on its re‑
verse the emperor being crowned by John the Baptist (fig. 36). 42 In a
daring way, the image makes a visual association between the baptism
of Christ in the Jordan and the anointing of the emperor. Leaving aside
the political ideology of the scene, 43 we may note the marked distinc‑
37
Byzantium: an Oecumenical Empire… pp. 94‑95, no. 24; Catalogue of the Byz‑
antine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, iii, part 1, p. 144, part 2, nos 15.9‑33,
pl. 37.
38
Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, iii, part 2,
nos 1a.3‑1f, pl. 57.
39
Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, iii, part, 2
nos 1a.1‑6.4, pl. 58‑59.
40
Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, iii, part 2,
nos 1.1‑2e, pl. 66
41
Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection…, iii, part 2,
no. El. 1.3, pl. 69.
42
Byzance: L’art byzantin dans les collections publiques françaises…, pp. 401‑402,
no. 310.
43
On which see C. Jolivet-Lévy, “L’image du pouvoir dans l’art byzantin à l’époque
de la dynastie macédonienne (867‑1056)”, Byzantion 57 (1987), pp. 441‑470 (especially
pp. 447‑448).
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
tion between the portraits of the emperor and the saint on the coin. The
face of Alexander is rendered according to the usual formula, flat and
frontal, with a triangular outline, and with the usual curls bunched at the
side. John the Baptist, on the other hand, has more carefully modeled
features, with long hair that falls along his shoulder and a long beard.
He also wears the mantle associated with this saint. Whereas Alexander
is identified by an inscription, there is no legend on the coin to identify
John the Baptist. However, we are able to identify him on the basis of
his portrait type. It would be very difficult for anyone to make such an
identification in the case of the stylized effigy of the emperor, if we did
not already have his inscription beside him.
The evidence of coins and seals, therefore, reveals fundamental dif‑
ferences between the portraits of Christ, of the emperors, and of the
saints. First, except for the few “portrait coins” of the tenth century, the
imperial portraits were highly stylized, for the most part following two
set schemata, one of which prevailed during the eighth and ninth centu‑
ries, and the other in the eleventh. By contrast, the images of the major
saints seized on particular facial features to create more or less consistent
portraits of the individuals concerned. This was true even within cat‑
egories of saints, such as soldiers. Not all holy warriors, or holy monks
or bishops, looked the same, even though they might be dressed alike.
Some of the defined portraits of the saints can be traced back to the pre-
iconoclastic period, while others were created after iconoclasm, in the
ninth and tenth centuries.
The continuing development of this system of portraiture for the
saints can be connected with the defense of icons during the iconoclastic
dispute. The proponents of images had to insist that the veneration of the
orthodox was directed not toward the material image itself, but toward
the depicted prototype. It followed that the prototype had to be correct‑
ly identified in the image, which was supposed to be a faithful copy of a
likeness taken from the saint himself while still alive, or else posthumous‑
ly from a vision. The necessity to correctly identify the subject of the icon
encouraged the creation of a system of hagiographic portraiture, such as
we see on the seals, on the walls of churches, and on painted panels. 44 It is
logical, therefore, that the one emperor who was also fully a saint, namely
Constantine I, was indeed given a recognizable portrait type. Although I
do not know of any well-preserved images of St Constantine on seals, we
do have many portraits of him in other media, which show that by the
44
H. Maguire, The Icons of their Bodies…, pp. 5‑47, 100‑145.
Henry Maguire
eleventh century a portrait type of this saint with consistent features was
well established. His visage is characterized by black hair, drawn cheeks,
and a medium length beard, which terminates in two little pointed wisps
at the bottom. We can see this portrait, for example, on an enamel me‑
dallion now incorporated into the frame of the Pala d’Oro in San Marco,
Venice. 45 It also occurs on the Byzantine enameled triptych that was in‑
corporated into the Stavelot Triptych, where St Constantine, together
with St Helena, flank the relics of the cross. 46 Here the cheeks of the holy
emperor are somewhat more sharply pinched in, but the two wisps at the
bottom of the black beard are recognizable.
Our own twenty-first century observations from Byzantine coins
and seals draw confirmation from Byzantine texts, which record the ex‑
pectations of the Byzantines themselves. From the texts we learn that a
saint who appeared to a Byzantine in a dream or a vision was likely to be
recognized, but this was not necessarily the case with an emperor who
was encountered in real life. A typical hagiographic tale of recognition
occurs in the Miracles of the shrine of the Virgin at Pege, just outside
the walls of Constantinople. It is related both in an anonymous tenth
century version, and in a fourteenth century retelling by Nikephoros
Kallistos Xanthopoulos. According to this story, a certain protospathar‑
ios, named John, had a dreadful disease, and came to the shrine of the
Pege to sleep there. While he slept, he dreamed that the Virgin and the
doctor saint Panteleimon came to cure him. He was able to recognize
Panteleimon because, in the words of the fourteenth century account,
“his right hand was equipped with a blade with a handle” and his hair
was “very raised up”. The text specifies that “in appearance and in all re‑
spects he resembled the divine Panteleimon”. 47 And, indeed, this is pre‑
cisely how the saint is characterized in Byzantine art, and also on seals. 48
45
Il tesoro di San Marco, ed. by H. R. Hahnloser and R. Polacco, 2 vols (Venice:
Canal e stamperia, 1994), i: La Pala d’oro, p. 51, no. 104, pl. 51.
46
The Stavelot Triptych: Mosan Art and the Legend of the True Cross, exhibition
catalogue (New York: The Pierpont Morgan Library, 1980), pl. 7, 38. The same portrait
type occurs in the enamel of the Esztergom Reliquary; H. C. Evans and W. D. Wixom,
The Glory of Byzantium…, p. 81, no. 40. On the portrait of Constantine in Byzantine
art, see J.-M. Spieser, “Hélène, mère de Constantin”, Micrologus, 17 (2009), pp. 129‑148
(especially pp. 142‑144).
47
Logos dialambanon ta peri tes systaseos tou sebasmiou oikou tes en Konstantinou
polei Zoodochou Peges, ed. by A. Pamperis (Leipzig, 1802), pp. 53‑54.
48
On the portrait type, see L. Hadermann-Misguich, Kurbinovo: les fresques
de Saint-Georges et la peinture byzantine du XIIe siècle, Bibliothèque de Byzantion, 6
(Brussels: Éd. du Byzantion, 1975), pp. 243‑245.
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
L. Safran, Heaven on Earth: Art and the Church in Byzantium (University Park:
49
Henry Maguire
52
Michel Psellos, Chronographia, VI, 125, in Chronographie ou Histoire d’un siècle
de Byzance (976‑1077), ed. by E. Renauld (Paris: les Belles lettres, 1926‑1928), ii (1928),
p. 30.
53
G. Dagron, Décrire et peindre: essai sur le portrait iconique (Paris: Gallimard,
2007), p. 139.
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
but Leo was, officially at least, the son of Basil, and wrote a eulogy at his
death. So the disruption in the sequence of coin types seems to come at
the wrong place: Basil resembles his vilified rival Michael, but does not
resemble his heir and son, Leo. In this case, at least, the explanation that
the s equence of portrait types on the coins expresses the notion of legiti‑
mate succession presents us with a paradox.
An explanation that can be rejected is that the effigies of the em‑
perors resembled each other because all emperors were supposed to re‑
semble Christ. Byzantine encomia hinted at the comparison between
the emperor and the supreme ruler, with varying degrees of explicit‑
ness. Modern art historians, also, have seen similarities between the
faces of Christ and the emperor in, for example, the famous mosaic of
Constantine Monomachos and Zoe in St Sophia. 54 But we have seen
from the seals and the coins that neither in the formulaic effigies nor in
the few individualized portraits, does the imperial image resemble that
of Christ. The features of Christ are nearly always carefully distinguished
from those of the sovereign. Indeed, when necessary the portrait type of
Christ seems to have been deliberately changed in order to preserve the
clarity of the distinction, as is evidenced by the introduction of a pointed
beard for the Pantocrator in the eleventh century when the emperors
acquired a rounded beard (figs. 32‑35).
On the other hand, a standardization of the imperial portraits indeed
may have been encouraged by the conventional comparison between the
image of the emperor and that of David. A late twelfth-century writer,
Michael Choniates, explicitly equated images of the emperor and of
David. Addressing Isaak II Angelos, Michael Choniates declared:
54
R. Cormack, “Interpreting the Mosaics of S. Sophia at Istanbul”, Art History, 4,
2 (1981), pp. 131‑149 (especially pp. 144‑145). See also A. Blanchet, “L’influence artis‑
tique de Constantin Porphyrogénète”, in Pagkarpeia: mélanges Henri Grégoire, Annuaire
de l’Institut de philologie et d’histoire orientales et slaves, 9 (Brussels: Secrétariat des
éditions de l’Institut, 1949), pp. 97‑104.
55
Panegyricus Isaacio Angelo post Andronicum comnenum regno pulsum, dictus
Constantinopoli, 10, ed. by T. Tafel (Tübingen: H. Laupp, 1846), p. 24.
Henry Maguire
Accordingly, we may note that the formulaic portrait type of the em‑
peror that prevailed on coins and seals in the eighth and ninth centu‑
ries was also used to represent David in ninth century manuscripts. To
take one prominent example, the illustration of David as psalmist that
opens the Khludov Psalter shows the Old Testament king with a trian‑
gle-shaped face, a short beard, and hair that bunches out each side of his
head (fig. 39). 56 Likewise, the second of the stereotyped imperial effigies,
which held sway in the eleventh century, bears a distinct resemblance to
the customary portrait type of David in that period, such as his appear‑
ance in the eleventh century mosaic of the Anastasis at Hosios Lukas
(fig. 40. Compare figs. 7, 33, 35). 57 Here, as with the emperors on coins
and seals, we find David portrayed with a rounded face, and a medium
length rounded beard. In other words, when the conventional effigy of
the emperor changed in the course of the tenth century, the portrait of
David changed with it.
Byzantine literature provides a further solution, in the stereotyped
descriptions of the emperors that adorned imperial panegyric. Emper‑
ors were constantly praised for the harmony of their proportions, 58 for
the strength of their arms and hands, 59 for the ruddiness of their com‑
plexions, and for the sun-like radiance of their countenances. 60 The re‑
petitive formulae of the visual portraits may have acted in the same way
as the topoi of the verbal portraits, both demonstrating the unchanging
nature of imperial virtues. The emperors were perfect, and therefore un‑
alterable. In this regard, Alexander Kazhdan drew attention to an inter‑
esting passage in an oration to Manuel I by Eustathios of Thessaloniki,
56
Moscow, State History Museum, MS 129D, fol. 1v; M. V. Ščepkina, Miniatjury
Khludovskoi Psaltiri (Moscow: Iskusstvo, 1977). Compare also the portraits of David
in the Milan Gregory, Biblioteca Ambrosiana, MS E 49‑50, p. 276 (K. Corrigan, Visual
Polemics in the Ninth-Century Byzantine Psalters (Cambridge: Cambridge University
Press, 1992), fig. 107) and in the Vatican Cosmas Indicopleustes, Biblioteca Vaticana
MS gr. 699, fol. 63v. (A. Kartsonis, Anastasis: the Making of an Image (Princeton: Prince‑
ton University Press, 1986), fig. 79).
57
L. Safran, Heaven on Earth…, plate IVB.
58
Psellos, Chronographia…, VI, 125, p. 30; Anna Comnena, Alexiad, III, 3, ed. by
D. R. Reinsch and A. Kambylis, Corpus fontium historiae Byzantinae, Series Berolinen‑
sis, 40, 1‑2 (Berlin, New York: W. de Gruyter, 2001), I, p. 93; anonymous Description of
the Jousts of our Mighty and Holy Lord and Emperor, ed. by P. Schreiner, in “Ritterspiele
in Byzanz”, Jahrbuch der Österreichischen Byzantinistik, 46 (1996), p. 235.
59
Psellos, Chronographia…, VI, 125, p. 30; Anna Comnena, Alexiad…, III, 3, p. 93.
60
Psellos, Chronographia…, VI, 125, p. 31; Anna Comnena, Alexiad…, III, 3, p. 93;
anonymous Description of the Jousts of our Mighty and Holy Lord and Emperor…, p. 235.
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
In other words, Eustathios says that each signet ring needs to be unique,
or else it will be useless. But the images of the Byzantine emperors should
all embody the same ideal, and should be endlessly repeated. This idea
certainly helps to account for the remarkable uniformity of the imperial
portraits on the coins and seals. However, to find a full explanation we
have to consider how the imperial images related to those of the saints.
After all, the saints also had unchanging virtues, and they all modeled
their lives on that of Christ. Yet, as we have seen, their portraits were
carefully individualized. 62
It is necessary to consider the idea that the Byzantines not only
wished to avoid a confusion between the imperial image and that of
Christ, but they also wished to distinguish between the effigies of their
emperors and the icons of their New Testament saints. For a Byzantine
image to function as a holy icon, two conditions had to be met, both
of which had their origins in the theory of images formulated during
iconoclasm. First, the icon had to be identified by a legend giving the
subject’s name and his or her status as a saint. This inscription acted as a
kind of guarantee, or hallmark, of the image’s authenticity, by binding it
61
Oratio ad Manuelem imperatorem, in Fontes rerum byzantinarum, ed. by V. E.
Regel (Leipzig: Zentralantiquariat der Deutschen Demokratischen Republik, 1982)
i, 1‑2: Rhetorum saeculi XII orationes politicae, p. 98; cited by A. Kazhdan, Studies on
Byzantine Literature of the Eleventh and Twelfth Centuries (Cambridge, London, New
York: Cambridge University Press; Paris: Éditions de la Maison des sciences de l’homme,
1984), p. 185.
62
In distinction to the visual narratives of the saints’ lives, in which they imitated
Christ; these could be very stereotyped. See H. Maguire, The Icons of their Bodies…,
pp. 169‑193.
Henry Maguire
63
K. Boston, “The Power of Inscriptions and the Trouble with Texts”, in Icon and
Word: the Power of Images in Byzantium. Studies Presented to Robin Cormack, ed. by
A. Eastmond and L. James (Aldershot: Ashgate, 2003), pp. 35‑51.
64
G. Dagron, Emperor and Priest: the Imperial Office in Byzantium (Cambridge:
Cambridge University Press, 2003), pp. 156‑157.
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
65
See the reservations expressed by P. Grierson: Catalogue of the Byzantine Coins
in the Dumbarton Oaks…, iii, part 1, p. 143, note 426; and by C. Morrisson, in Byzance:
L’art byzantin dans les collections publiques françaises…, p. 398.
66
G. Dagron, Emperor and Priest…, p. 151, 202.
67
G. Dagron, Emperor and Priest…, pp. 202‑204.
68
G. Dagron, Emperor and Priest…, pp. 151‑152.
Henry Maguire
Fig. 2. Seal of Basil I and Constantine, reverse, Basil I and Constantine, Dum‑
barton Oaks
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
Henry Maguire
Fig. 5. Moscow, State Historical Museum, ivory, Christ crowning Constan‑
tine VII, Victoria and Albert Museum Picture Library
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
Henry Maguire
Fig. 9. Poreč, Basilica of Eufrasius, mosaic in the apse, detail, St John the
Baptist, Photo by author
EARTHLy AnD SPIRITUAL AUTHORITy In THE IMPERIAL IMAGE
Fig. 11. Poreč, Basilica of Eufrasius, mosaic in the apse, detail, Zacharias, Pho‑
to by author
HEnRy MAGUIRE
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Henry Maguire
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Henry Maguire
Fig. 20. Gold coin of Leo III and Constantine V, reverse, Constantine V,
Dumbarton Oaks
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Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
Fig. 25. Gold coin of Justinian II, first reign, obverse, Christ. Dumbarton Oaks
Henry Maguire
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
Fig. 30. Gold coin of Constantine VII and Romanos II, obverse, Christ,
Dumbarton Oaks
Henry Maguire
Earthly and Spiritual Authority in the Imperial Image
Henry Maguire
Fig. 36. Gold coin of Alexander, reverse, St John the Baptist crowning the em‑
peror, Dumbarton Oaks
EARTHLy AnD SPIRITUAL AUTHORITy In THE IMPERIAL IMAGE
Henry Maguire
PERSPECTIVES LATINES
Kristina Mitalaitė
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 219-255
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111932
Kristina Mitalaitė
gard porté sur les images 2. Les offensives permanentes contre le visible
romain par Cyprien et Tertullien montrent que les premiers chrétiens
ressentaient une menace identique.
Dans un premier temps de cette étude, j’analyse la manière qu’utilisent
les premiers auteurs chrétiens, Tertullien et Cyprien de Carthage, pour créer
le nouveau visible chrétien en annonçant le crépuscule de l’ancien romain ;
la façon dont ils ont conçu un nouveau monde visible et les règles typique-
ment chrétiennes qui l’affirment et l’imposent. Dans son ampleur séman-
tique, le concept d’image est souvent subordonné aux enjeux du visible et
de la visibilité. Les deux principales définitions de l’image chrétienne dans
la Bible, celle de l’homme (Gn 1, 26) et celle de Dieu (Col 1, 15), ne sont
pas les lieux de réflexion sur l’image en soi pour ces auteurs pré-nicéens. J’ai
décidé de commencer avec Tertullien et non avec Cyprien de Carthage : il
ne s’agit pas d’un mépris pour la chronologie, mais d’une priorité de re-
cherche donnée au cadre conceptuel de l’image dans cette période dès le
début de mon analyse. Or, c’est indubitablement Tertullien qui y consacre
un effort considérable et non son illustre prédécesseur.
Dans un second temps, je montre le bouleversement qu’a subi la
conception de l’image en général et l’image artificielle en particulier
dans la première théologie nicéenne et post-nicéenne, où ses traits ve-
nant du monde romain, transmis, entre autres, par Tertullien, ont été
repensés. Si les attaques plus ou moins virulentes contre l’image arti-
ficielle ont été souvent imputées aux divers courants du platonisme, je
cherche d’autres sources philosophiques qui ont servi aux théologiens
latins à percevoir l’image matérielle dans l’opposition ou l’estrangement
ontologique à l’égard de sa substance et de son corps.
Studies in Ancient Judaism, 93, 3 vol. (Tübingen : M. Siebeck, 1998‑2002), iii (2002),
p. 411‑434.
2
Cf. H. Cancik, « Fremder Bilder : Kult und Kunst in den Talmud-Traktaten
Abodah Zarah », dans Religionsgeschichten. Römer, Juden und Christen in römischen
Reich, éd. par H. Cancik-Liedermaier, Gesammelte Aufsätze, 2 (Tübingen : M. Siebeck,
2008), p. 209‑226 (217‑218).
3
Sur la construction de l’identité chrétienne, basée sur la distinction entre le ca-
ractère vrai du message chrétien et le caractère faux des anciennes traditions et/ou des
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
traditions hérétiques aux iie‑iiie siècles, voir : F. Massa, « La guerre des vérités entre
iie‑iiie siècles : stratégies chrétiennes de représentation de la fiction païenne », Pallas,
91 (2013), p. 121‑134.
4
Sur le rôle central de la vérité dans la polémique de Tertullien, cf. F. Chapot, Vir-
tus veritatis : langage et vérité dans l’œuvre de Tertullien (Paris : les Études augustiniennes,
2009), p. 15‑27.
5
« Si homo et res et opus et imago et similitudo – et caro per terram et anima
per afflatum – creatoris est […]. » Adversus Marcionem, V, 6, 11, éd. par Ae. Kroymann,
CCEL, 47 (Vidbonae : F. Tempsky ; Lipsiae : G. Freytag, 1954), p. 591. Nous pensons
qu’en résumant les paires oppositionnelles que Tertullien conçoit dans ses controverses
avec les non croyants, F. Chapot (Virtus veritatis…, p. 21‑23) omet l’argument de l’image
sur lequel le théologien bâtit la vérité du corps christique.
6
Sur ceci voir infra.
7
Dans les textes d’inspiration du moyen stoïcisme, proche de la pensée de
Tertullien, Phidias apparaît comme l’artiste le plus parfait, capable de créer l’image de
l’invisible, de Zeus en occurrence : A. Rouveret, Histoire et imaginaire de la peinture an-
cienne (Ve siècle av. J.-C.-Ier ap. J.-C.), Bibliothèque des Écoles française d’Athènes et de
Rome, 274 (Rome : École française de Rome, 1989), p. 405‑411.
8
Histoire naturelle, Livre 36, 18‑19, éd. par J. André, trad. par R. Bloch (Paris : les
Belles lettres, 1981), p. 54. Voir aussi J. Isager, Pliny on Art and Society : The Elder Pliny’s
Chapters on the History of Art (London, New York : Routledge, 1991), p. 151‑152.
9
« […] uultum Iouis propemodum ex ipso caelo petitum eboris liniamentis esset
amplexus […]. » Faits et dits mémorables, livre 3, ex. 4, éd. et trad. par R. Combès, 2 vol.
(Paris : les Belles lettres, 1995‑1997), i (1995), p. 270‑271.
Kristina Mitalaitė
10
De carnis Resurrectione, 6, éd. par A. Kroymann, CSEL 47, 3 (Vidbonae :
Tempsky ; Lipsiae : G. Freytag, 1906), p. 35‑36. Le sarcasme de Tertullien est simple mais
efficace : Phidias a fait les mains de Zeus en ivoire, mais ce dernier n’est pas adoré comme
animal (i. e. éléphant) mais comme Dieu. Le nom de l’artiste est aussi pour quelque
chose dans sa vénération (quia Phidias tantus). Pour Sénèque, le talent de Phidias lui
permet d’utiliser les matières simples : même à partir d’une matière moins noble que
l’ivoire ou le bronze, il a pu faire des choses tout aussi remarquables (« Non ex ebore tan-
tum Phidias sciebat facere simulacra ; faciebat ex aere. Si marmor illi, si adhuc viliorem
materiam obtulisse, fecisset, quale ex illa fieri optimum posset. » Lettres à Lucilius, Livre
11, Ep. 85, 40, éd. par F. Préchac, trad. par H. Noblot, 5 vol. (Paris : les Belles lettres,
1945‑1965), iii (1958), p. 137)
11
« Nunc etsi scandalum limus, alia iam res est. » De carnis Resurrectione…, 6,
p. 34.
12
« Haec cum ita sint, habes et limum de manu dei gloriosum et carnem de adflatu
dei gloriosiorem, […] num es diligentior deo, uti ut quidem Scythiae et Indicas gemmas
et Rubentis Maris grana cadentia […]. » De carnis Resurrectione…, 7, p. 35. « Ita et deo li-
cuit carnis aureum de limi, quibus putas, sordibus excusato censu eliquasse. » Ibid., p. 34.
13
Sur le vocabulaire de la « création » chez Tertullien, cf. l’étude de R. Braun,
« Deus christianorum » : recherches sur le vocabulaire doctrinal de Tertullien, Publications
de la Faculté des lettres et sciences humaines d’Alger, 41 (Paris : Presses universitaires
de France, 1962), p. 396‑406. L’auteur latin réserve fingere pour le façonnage du corps
humain, cf. ibid., p. 400.
14
R. Braun, « Deus christianorum »…, p. 401.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
15
De carnis Resurrectione…, 7, p. 35.
16
« Quorum qui simulacra specie humanis fecerunt, hoc videri secutos, quod
mortalium animus, qui est in corpore humano simillimus est inmortalis animi ; tam-
quam si vasa ponerentur causa notandorum deorum et in Liberi aede oenophorum siste-
retur, quod significaret vinum, per id quod continet id quod continetur. » Augustin, De
civitate Dei, VII.5. Sur Varron, son système des dieux et la signification de leurs images,
voir : H. Cancik, « The Truth of Images : Cicero and Varro on Image Worship », dans
H. Cancik, Römische Religion im Kontext, éd. par H. Cancik-Liedermaier, Gesammelte
Aufsätze, 2 (Tübingen : M. Siebeck, 2008), p. 115‑133 (ici 116‑117). De carnis Resurrec-
tione…, 7, p. 35.
17
Pline transmet aussi sur l’usage des proplasmata ou modèles en argile, ou les
ébauches, dont par exemple, ceux de L. Lucullus étaient très célèbres : (Histoire naturelle,
Livre 35, XLV, 155, éd. trad. et comm. par J.-M. Croisille (Paris : les Belles lettres, 1985),
p. 103.
18
Ad nationes, I, 12, éd. par J. G. Ph. Borleffs, CCSL, 1 (Turnhout : Brepols, 1954),
p. 31.
19
Histoire naturelle…, 47 (13), 166, livre 35, p. 108.
Kristina Mitalaitė
genre. Elle sert aussi à créer les couleurs pour les peintres et les fards pour
les femmes. La sage utilisation des ressources naturelles est l’un des sou-
cis essentiels de Pline : il critique la luxuria, épuisement des richesses de
la terre pour les choses futiles, pour l’avarice, qui s’oppose à l’utilitas (par
exemple, l’usage médical ou la décoration non ostentatoire) 20. Tertullien
avance cette idée en accordant à Dieu la création des éléments, utilisés
dans les parures. En les condamnant, il déplore l’utilisation inutile et
perverse des matériaux de la nature 21.
20
Voir J. Isager, Pliny on Art…, p. 52‑57.
21
La toilette des femmes, I, 2, 1, éd. et trad. par M. Turcan, SC, 173 (Paris : les Éd.
du Cerf, 1971), p. 48‑49.
22
« […] ut qui nascibilis ac per hoc carneus adnuntiaretur […]. » Adversus Marcio-
nem…, III, 11, p. 393.
23
« Dehinc scito nec illud concedi tibi, ut putativa fuerit in angelis caro, sed
verae et solidae substantiae humanae, si enim difficile non fuit illi, putativae carni veros
sensus et actus exibere, multo facilius habuit, veris et sensibus et actibus veram dedisse
substantiam carnis, vel qua proprius auctor et artifex eius […] sufficit mihi hoc definire,
quod deo congruit veritatem scilicet eius rei, quam tribus testibus sensibus obiecit : visui
tactui auditui, difficilius deo mentiri quam carnis veritatem unde producere. » A dversus
Marcionem…, III, 9, p. 390‑391. Cf. aussi : « Sic enim et Marcion phantasma eum ma-
luit credere, totius corporis in illo dedignatus veritatem […] fidelis fuit et visus et audi-
tus in monte, fidelis et gustus vini illius, licet aquae ante, in nuptiis Galilaeae, fidelis et
tactus exinde creduli Thomae. » De anima, XVII, 14, éd. par J. H. Wasznik, CCSL, 2
(Turnhout : Brepols, 1954), p. 806.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
tout entier, c’est parce que celui-ci est vrai, et que l’image devient ain-
si une image en chair et en os. Afin de créer l’image la plus convain-
cante du corps du Christ, l’auteur se sert de l’analogie entre le monde et
l’homme 24, mais cet intérêt est aussi marqué par les détails anatomiques,
jusqu’aux entrailles du corps. Dans le développement de son argumenta-
tion de controverse, Tertullien s’enflamme parfois en montrant le corps
dans ses détails les plus crus qui, on peut l’imaginer, auraient dû effrayer
ses opposants dans leur application au Christ. Comme si le théologien
les forçait à regarder en détail la représentation de la formation du fœtus,
à commencer par les organes de la reproduction jusqu’à sa coagulation
à partir du sang et des humeurs. Il veut provoquer une abomination de
cette image de la naissance en évoquant l’anxiété ou l’insomnie du fœ-
tus, la violence que subit la Vierge en l’acceptant, les immondices que
le Christ accepte d’endurer dans l’utérus par amour en naissant en tant
qu’homme. Avec cette provocation, Tertullien brise la surface du corps
en passant de la surface brillante des statues à la profondeur des entrailles
humaines. La violence de l’image charnelle sur laquelle il oblige à poser
le regard mène à la reconnaissance de la vérité de la chair humaine dans
le Christ. Autrement dit, il contraint ses adversaires à avouer ce qu’ils se
cachent probablement : en dévoilant la vérité intérieure et charnelle, il les
met devant une évidence qu’ils ne désirent pas reconnaître 25.
24
« Considera singulas qualitates, musculos ut glebas, ossa ut saxa, etiam circum
papillas calculos quosdam ; aspice nervorum tenaces conexus ut traduces radicum, et ve-
narum ramosos discursus ut ambages rivorum, et languines ut moscos, et comam ut caes-
pitem, et ipsos medullarum in abdito thesauros ut metalla carnis. Haec omnia terrenae
originis signa et in Christo fuerunt, et haec sunt quae illum Dei filium celaverunt […]. »
De Carne Christi, IX, 3‑4, éd. par A. Kroymann, CCSL, 2…, p. 891‑892. Il s’agissait de la
chair outrageusement humaine, sur laquelle personne n’aurait hésité à cracher : De Carne
Christi, IX, 7.
25
« Ab ipsa quidem exorsus odio habita nativitate, perora, age, iam spurcitas ge-
nitalium in utero elementorum, humoris et sanguinis foeda coagula, carnis ex eodem
caeno alendae per novem menses. Describe uterum de die insolescentem, gravem,
anxium, nec somno tutum, incertum libidinibus fastidi et gulae. Invehere iam et in
ipsum m ulieris entinentis pudorem, vel pro periculo honorandum vel pro natura reli-
giosum […]. Certe Christus dilexit hominem illum in immunditiis in utero coagulatum,
illum per pudenda prolatum, illum per ludibria nutritum […]. » De Carne Christi…,
IV, 1, 3, p. 878. « Neque enim, quia ex sanguine negavit, substantiam carnis renuit,
sed materiam seminis quam constat sanguinis esse calorem, ut despumatione mutatum
in coagulum sanguinis feminae. Nam et coagulam in caseo eius est substantiae quam
medicando constringit, id est lactis. » De Carne Christi…, XIX, 3‑4, p. 907‑908. Sur la
conception du développement de l’embryon chez les Pères de l’Église et chez Tertul-
lien, voir, B. Pouderon, « L’influence d’Aristote dans la doctrine de la procréation des
premiers Pères et ses implications théologiques », dans L’embryon : formation et ani-
mation. Antiquité grecque et latine, traditions hébraïque, chrétienne et islamique, éd. par
Kristina Mitalaitė
L. Brisson, M.-H. Congourdeau et J.-L. Solère, Histoire des doctrines de l’Antiquité
classique, 38 (Paris : J. Vrin, 2008), p. 157‑182. Tertullien distingue la semence mas-
culine en deux sortes, celle qui, introduite dans la matrice féminine, fait naître l’âme
et celle qui est destinée à faire croître le corps (Ibid., p. 163). Cf. aussi M. Perrin, « Un
exemple de l’utilisation de la médecine chez les penseurs chrétiens : Tertullien et l’em-
bryologie », dans Médecine antique, éd. par P. Demont (Amiens : Faculté des lettres,
1991), p. 91‑110.
26
« Invisibilis dei imaginem ait Christum, sed nos enim invisibilem dicimus
Patrem Christi, scientes filium semper retro visum, si quibus visus est, in dei nomine,
ut imaginem ipsius ; ne quam et hinc differentiam scindat dei visibilis et invisibilis, cum
olim dei nostri sit definitio : dominum nemo videbit et vivet. » Adversus Marcionem…,
V, 19, p. 643. Cf. aussi J. Moingt, Théologie trinitaire de Tertullien, Théologie, 69 (Paris :
Aubier, 1966‑1969), ii : Substantialité et individualité (1966), p. 604.
27
« […] dum tangitur vestimentum eius, utique corpori, non phantasmati indi-
tum, corpus quoque demonstrabatur ; […] si enim non erat veritas corporis, phantasma
utique contaminari, qua res vacua, non posset. » Adversus Marcionem…, IV, 20, p. 487.
28
Adversus Marcionem…, IV, 10 ; IV, 20 ; V, 20, p. 448, 487, 647‑548.
29
Adversus Marcionem…, IV, 40, p. 559‑560. La perception du phantasma comme
res vacua est formulée par Tertullien dans : Adversus Marcionem…, IV, 20, p. 487. Le
phantasma est aussi comparé à l’ombre : Adversus Marcionem…, I, 22, p. 318‑319.
30
Adversus Marcionem…, V, 14, p. 622‑623.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
Lusus/ludus
Si le Christ n’est pas vérité mais seulement une image vaine, sa Passion
n’est pas une vérité mais un jeu (lusus/ludus), dit Tertullien, ce qui ra-
mène la Passion du côté du faux. Le mot lusus évoque le théâtre romain
que l’auteur méprise tant 34, et le phantasma vain et mensonger se rap-
proche du théâtre en tant qu’incorporation du faux 35. Le théâtre, qui
31
Adversus Marcionem…, IV, 18, p. 480.
32
« […] ut carnem gestaret sine ossibus duram, sine musculis solidam, sine san-
guine cruentam […] ut phantasma auribus fuerit sermo eius per imaginem vocis. » De
carne Christi…, V, 9, p. 882.
33
Les apparitions démoniaques, définies comme phantasmata, possèdent une cer-
taine substance spirituelle, mais ne peuvent pas prétendre au caractère concret du corps :
Apologeticum, XXII, éd. par E. Dekkers, CCSL, 1…, p. 128‑130.
34
Voir De pudicitia, VII, 13‑15, éd. par E. Dekkers, CCSL, 2…, p. 1293 ; lusus
comme l’idolâtrie : « […] ceterum a saeculo coronantur et lupanaria et latriane […] et
ludus in ipsa amphitheatra […]. » De corona, XIII, 8, éd. par A. Kroyman, CCSL, 2…,
p. 1062. Lusus et la cruauté de l’effusion du sang des gladiateurs, le rire à l’égard des
jeux cruels des dieux sont abordés dans Ad nationes, I, 10, 46, éd. par J. G. Ph. Borleffs,
CCSL, 1…, p. 29 ; De spectaculis, V, 4, éd. par E. Dekkers, CCSL, 1…, p. 232 ; « Si sae-
vitiam, si impietatem, si feritatem permissam nobis contendere possumus, eamus in
amphitheatrum. Si tales sumus quales dicimur, delectemur sanguine humano […] Certe
quidem gladiatores innocentes in ludum veniunt ut publicae voluptatis hostiae fiant. »
De spectaculis, XIX, 1‑4, p. 244. Sur la perception du théâtre chez Tertullien, voir surtout
L. Lugaresi, Il teatro di Dio : il problema degli spettacoli nel cristianesimo antico (II‑IV
secolo) (Brescia : Morcelliana, 2008), p. 377‑427 ; voir aussi F. Massa, « La guerre des
vérités… », p. 127‑129.
35
Comme le montre L. Lugaresis (Il teatro di Dio…, p. 379), dans le De spectaculis,
premier ouvrage chrétien théorique sur le théâtre, le raisonnement antithéâtral de l’au-
Kristina Mitalaitė
veut plaire aux yeux et aux oreilles d’un point de vue extérieur (extrinse-
cus) 36, est une concentration de passions, dévalorisées par les Stoïciens,
théoriciens de l’apatheia 37 : en les suivant, Tertullien affirme que la pas-
sion n’existe pas sans désir (voluptas) 38. Le désir se situe à la racine des
vices : il mène vers la possession des biens qui s’exprime dans l’apparence
exagérée des vêtements, des ornements corporels ou des fards, sur les-
quels je reviendrai. Les mensonges, dans le jeu théâtral, véhiculent les
passions vides et les émotions feintes : ainsi, par exemple, l’amour ou la
haine ne sont pas vraies 39. Le théâtre est donc condamnable pour deux
raisons : d’une part, il valorise les passions qui sont blâmables et, d’autre
part, ses passions sont imaginaires, feintes. Le théologien n’hésite pas à
opposer ces phantasmata des passions à la réalité radicale du supplice de
la Passion. T ertullien renvoie donc au vrai spectacle en lieu et place d’un
spectacle vain, se complaisant dans les phantasmes vides, auxquels les ac-
teurs prêtent leurs corps 40.
teur s’étaye sur trois points : status fidei, ratio veritatis et praescriptum disciplinae.
36
De spectaculis, I, 3, éd. par M. Turcan, SC, 332 (Paris : les Éd. du Cerf, 1986),
p. 76‑79.
37
J.-C. Fredouille interprète la patientia tertullinienne comme une reprise du
schéma de la pensée de l’apatheia stoïcienne, mais, contrairement à ce que prétend
Emmanuel Jaffelin, la patience, chez notre auteur, selon Fredouille, devient « profondé-
ment et authentiquement chrétienne » : Tertullien et la conversion de la culture antique
(Paris : les Études augustiniennes, 1972), p. 387‑389. Jaffelin tente de montrer l’origina-
lité proprement chrétienne de la vertu de Tertullien, chez qui, selon l’auteur, le temps
devient la souffrance dans la patience : « Le temps de l’exemple », Revue des sciences re-
ligieuses, 74/4 (2000), p. 437‑465. Néanmoins, nous pensons que dans la condamnation
des fausses passions du spectacle, Tertullien agit comme stoïcien.
38
Dans une analyse très fine, L. Lugaresi (Il teatro di Dio…, p. 401) remarque que,
pour Tertullien, le théâtre est conçu pour provoquer les passions (le théâtre est « le plein
de l’affectus »), qui perturbent le spectateur chrétien dans sa pax intérieure. Néanmoins,
si le spectateur est capable de restreindre et contrôler ses passions, il retombe dans le vide
de la vanité. C’est dans ce second cas que le caractère vain du théâtre ressort comme un
phantasma. Le théologien latin verrouille donc toutes les entrées possibles du théâtre au
monde chrétien.
39
De spectaculis…, 16, 5‑6, SC, 332, p. 236‑239.
40
« […] et in similitudine hominis, non in homine, et figura inventus homo, non
substantia, id est non carne, quasi non et figura et similitudo et effigies substantiae
quoque accedant. Bene autem, quod et alibi Christum imaginem Dei invisibilis appellat,
numquid ergo et hic, qua in effigie eum dei collocat, aeque non erit deus Christus vere,
si nec homo vere fuit in effigie hominis constitutus ? Utrobique enim veritas necesse
habebit excludi, si effigies et similitudo et figura phantasmati vindicabuntur, quodsi in
effigie et in imagine dei, qua filius patris, vere deus, praeiudicatum est etiam in effigie et
imagine hominis, qua filius hominis, vere hominem inventum […] et mortem crucis, non
enim exaggeraret atrocitatem extollendo virtutem colluctionis, quam imaginariam in
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
phantasmatae scisset, frustrato potius eam quam experto nec virtute functo in passione
sed lusu. » Adversus Marcionem…, V, 20, p. 647‑648.
41
Tusculanes, Liber 2, 20‑25, éd. par G. Fohlen, trad. par J. Humbert (Paris : les
Belles lettres, 1931), i, p. 87‑91.
42
Tusculanes…, 21, p. 89.
43
Ad nationes, 2, I, 7, éd. par J. G. Ph. Borleffs, CCSL, 1…, p. 21‑22.
Kristina Mitalaitė
rien créer ; ainsi, il faut croire, en voyant les os, à la résurrection à venir 44.
La résurrection est aussi une grande vision vivante dans l’imagination
chrétienne 45. Le théologien ouvre un large paysage de ce nouveau spec-
tacle (latitudo spectaculis) à venir. Il admire et rit devant les futures souf-
frances des incroyants. Contrairement à certains auteurs qui voulaient le
disculper de cette jouissance cruelle 46, je pense qu’elle est sincère : cette
vision, qu’il décrit, est vraie car tout simplement elle ne ment pas comme
celle qu’on observe sur les gradins romains ; il ne s’agit plus des phantas-
mata des passions jouées par les acteurs, mais des passions qui sont celles
des corps réels. La réaction de Tertullien face à ce spectacle de la vérité
totale ne peut qu’être perçue comme la plus sincère, car sinon elle retom-
berait dans les passions vaines des spectateurs romains. Si nous remettons
en cause la sincérité du ressentiment de Tertullien sur ce point, nous de-
vrions remettre en question toute la théorie du spectacle proposée par lui.
Dans un autre endroit, en décrivant cette vision, Tertullien recourt aussi à
une métaphore théâtrale, plus précisément au tomber du rideau, après la-
quelle la vision de ce monde disparaît et la nouvelle, la vraie, commence 47.
44
« Non enim posset de ossibus figura componi, si non id ipsum ossibus eventu-
rum esset. Nam etsi figmentum veritatis in imagine est, imago ipsa in veritate est sui :
necesse est esse prius sibi id quod alii confinguretur. De vacuo similitudo non compe-
tit, de nullo parabola non convenit. Ita oportebit ossuum quoque credi reviscerationem
et respirationem, qualis dicitur […]. » De resurrectione mortuorum, XXX, éd. par J. G.
Ph. Borleffs, CCSL, 2…, p. 959.
45
De Spectaculis, XXX, 1, CCSL, 1…, p. 252‑253.
46
J.-C. Fredouille (Tertullien et la conversion…, p. 149 sq.) tente d’expliquer qu’il
s’agit ici de ce qu’on appelle le rire rhétorique ; cependant Tertullien ne se contente pas
de rire, il dit qu’il admire (admiror), qu’il se réjouit (gaudeo), qu’il jubile (exulteo) devant
cette image.
47
« Cum ergo finis et limes, medius qui interhiat, affuerit, ut etiam ipsius mun
di species transferatur aeque temporalis, quae illi dispositioni aeternitatis aulaei vice
oppansa est, tunc restituetur omne humanum genus ad expungendum, quod in isto aevo
boni seu mali meruit, et exinde pendendum in immensam aeternitatis perpetuitatem. »
Apologeticum…, 48, p. 167‑168.
48
« La couleur de chair, ou le paradoxe de Tertullien », dans L’image ouverte :
motifs de l’Incarnation dans les arts visuels, Le temps des images (Paris : Gallimard, 2007),
p. 97‑152 (article initialement écrit en 1987).
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
49
Le visible et l’invisible, Bibliothèque des idées (Paris : Gallimard, 1967), p. 26
(note marginale).
50
La toilette des femmes…, II, 5, 2, II, 7, 3, p. 110‑111, 129. Sur le maquillage et les
canons de la beauté féminine romaine : A. Dubourdieu et E. Lemirre, « Le maquillage à
Rome », dans Corps romains, textes réunis par P. Moreau (Grenoble : J. Million, 2002),
p. 89‑114. Selon les autrices, « Le maquillage romain ne cherche pas les effets d’estom-
page, mais vise au contraire à accentuer fortement le chromatisme naturel du visage et
use de couleurs vives et violemment contrastées. », Ibid. p. 104. Par ailleurs, les fards et
les teintes du maquillage étaient des produits très coûteux (voir par exemple, Pline l’An-
cien, Histoire naturelle, Livre 33, éd., trad. et comm. par H. Zehnacker (Paris : les Belles
lettres, 1983), p. 111 : le rouge minium est une couleur prestigieuse et très chère ; c’est la
raison pour laquelle il sert de maquillage au triomphateur (ibid., 108, p. 91‑92)), la mise
en place de l’appareil demandait à la femme beaucoup de temps. Les autrices remarquent
que le maquillage est aussi un masque (persona), c’est un artifice qui s’oppose au naturel ;
il dissimule, donne à voir quelque chose qui n’existe pas (ibid. p. 110). Ovide, Ars amato-
ria, III. 209 sq. : le maquillage ne concerne que l’apparence et en lui-même (la texture, la
composition, l’odeur, etc. des fards) cet art est répugnant.
51
La toilette des femmes…, II, 7, 1‑2, p. 122‑129.
52
La toilette des femmes…, II, 8, 2 sq., p. 134 sq.
53
La toilette des femmes…, I, 5, p. 62‑69.
Kristina Mitalaitė
54
De oratore, II.20‑21 (sur l’endroit approprié de la discussion chez les Grecs).
55
De oratore, III.18.
56
Ad Donatum, 1, éd. par H. Hartel, CSEL, 3/1 (Vienne : C. Gerold, 1868),
p. 3‑4.
57
Ad Donatum…, 2, p. 4. La mauvaise couleur, parfois définie comme fucus, celle
de la cosmétique, qui vient du mensonge de la tricherie, de l’artifice, est condamnée par
les rhétoriciens romains : M. Pierre, « Couleur, mensonge et rhétorique : la cosmétique
de l’orateur chez Cicéron et Quintilien », dans L’Antiquité en couleurs : catégories, pra-
tiques, représentations, textes réunis par M. Carastro, Atelier « Antiquité et sciences
sociales » (Grenoble : J. Millon, 2009), p. 179‑187. Chez Cicéron, comme chez Quinti-
lien, le fucus mensonger et efféminé s’opposerait au color : C. Lévy, « La notion de color
dans la rhétorique latine : Cicéron, Sénèque le Rhéteur, Quintilien », dans Couleurs et
matières dans l’Antiquité : textes, techniques et pratiques, études réunies par A. Rouveret,
S. Dubel et V. Nas, Études de littérature ancienne, 17 (Paris : Éditions rue d’Ulm, 2006),
p. 185‑199.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
58
Ad Donatum…, 6, p. 8.
59
« […] speculare inde rerum infra te iacentium facies et oculis in diversa porrectis
ipse a terenis contactibus liber fluctuantis mundi turbines intuere […]. » Ad Donatum…,
6, p. 8.
60
En ce qui concerne la dialectique du regard parmi les premiers chrétiens, le cas
de Jean Chrysostome est l’un des plus significatifs. Voir B. Leyerle, « John Chrysostom
on the Gaze », Journal of Early Christian Studies, 1 (1993), p. 159‑174.
61
Sur Donat, cf. « L’introduction » par J. Molager, dans Cyprien de Carthage, À
Donat et La vertu de patience, introd., trad. et notes par J. Molager, SC, 291 (Paris : les Éd.
du Cerf, 1982), p. 9‑11.
62
« Et in tam impiis spectaculis tamque diris esse se non putant oculis parrici-
das. » Ad Donatum…, 7, p. 9.
Kristina Mitalaitė
aussi agir dans une autre direction, comme des visions ou des images
nocives, car elles mènent les spectateurs passifs au mimétisme : elles les
pervertissent en donnant l’exemple de méfaits ou bien elles justifient
l’impunité de l’indécence 63. L’impact de la représentation sur le regard
du spectateur possède une force quasi-physique, comme un poison qui
pénètre un corps. Il est possible que Cyprien pense à une théorie de
la vision telle que celle de Démocrite, quand les eidola ou les effluves,
les atomes se détachent de l’objet vu, reproduisent ses caractéristiques
atomiques et entre dans les « pores » (Empédocle) ou frappent (Dé-
mocrite) l’organe de vision 64. Ces effluves saturent le visible du monde
romain qui, selon Cyprien, dégage du poison, des souillures qui sont
nocives 65. La perception de ce visible peut être comparée à la vision de
la Gorgone, face à laquelle seul le miroir chrétien, sublima specula, est
capable de s’opposer.
En faisant défiler des images dont il continue de peindre scrupuleu-
sement les détails, Cyprien tente de les capter sur cette specula nouvelle
et efficace. Il fait voir à Donat la brillance fausse 66 perverse de l’Empire
romain en décomposition. Dans l’ouverture progressive des yeux, le
théâtre n’est qu’une partie d’un vaste panorama, qu’il développe par la
suite. Rien n’est épargné au regard de Cyprien, pas même l’intimité des
chambres : il invite Donat, à partir de son point de vue, à se glisser, à ou-
63
Ad Donatum…, 8, p. 9‑10.
64
Sur la théorie de la vision et de la couleur, cf. M. M. Sassi, « Entre corps et
lumière : réflexions antiques sur la nature de la couleur », dans L’Antiquité en cou-
leurs…, p. 277‑300. Selon J. Salem (« Perception et connaissance chez Démocrite »,
dans Democritus : Science, the Arts, and the Care of the Soul. Proceedings of the Inter-
national Colloquium on Democritus, Paris, 18‑20 september 2003, éd. par A. Brancacci,
P.-M. Morel, Philosophia Antiqua, 102, p. 125‑142 (ici 126)) il s’agirait de ce que l’on
appelle une première version des simulacres possédant une fonction active : en arrivant
devant les yeux, récepteur passif, ils les pénètrent. Dans une seconde théorie, Démo-
crite affirmerait que l’œil est aussi un agent actif : il projette un faisceau lumineux et
dans le point de rencontre entre les effluves émanant de l’objet et la lumière émanant
des yeux naissent les simulacres. Les simulacres s’impriment dans l’air comme le sceau
dans la cire.
65
« Res illic geritur nec videtur : occulta plaga et poena manifesta. Ita quod esse
iam coepimus, acceptus spiritus licentia sua potitur : quod necdum corpus ac membra
mutavimus, adhuc carnalis aspectus saeculi nube caecatur. » Ad Donatum…, 5, p. 7‑8.
66
La brillance des statues faites de métaux précieux sert pour Minucius Félix, un
autre auteur chrétien, à définir le visible romain dans sa corruptibilité négative : « Quis
ergo dubitat horum imagines consecratas vulgus orare et publice colere, dum opinio et
mens imperitorum artis concinnitate decipitur, auri fulgore praestringitur, argenti nitore
et candore eboris habetatur ? » Octavius, XXIV, 5, éd. et trad. par J. Beaujeu (Paris : les
Belles lettres, 1964), p. 38.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
vrir par les yeux l’intérieur des autres du point de vue où ils se trouvent
à ce moment précis 67.
Le monde romain, auquel Cyprien appartient avant son baptême, est
rempli de choses voyantes ou criardes. Sa couleur symbolique, la pourpre
éclatante 68, est détestable pour l’auteur. Dans l’explication de la gloire
des principats, il met en scène leur apparence. Le visible du monde de ces
derniers, la pourpre, est comparée au breuvage qui trompe par sa cou-
leur, qui ressemble au remède mais qui empoisonne 69. Ce poison que
le riche et puissant magistrat avale est la brillance à l’éclat sordide de sa
robe pourpre 70, ce même pourpre dont sera revêtue la prostituée dans
l’Apocalypse 71. Le visible du monde romain est donc une souillure, qui
se résume au danger, à l’anxiété, à la cruauté.
La visibilité païenne polluée est aussi largement envisagée à travers
la toilette des femmes. La femme pompeusement habillée est une re-
présentation ou un spectacle que nous avons observé déjà chez Tertul-
lien ; elle attise les passions vaines, les désirs indécents ; l’apparence de la
femme est comparable au venin, à une épée qui risque de tuer un jeune
homme 72. Par ailleurs, c’est en condamnant les artifices, les fards colorés
que Cyprien se rabat sur l’explication de l’image de Dieu en l’homme
(Gn 1, 26) et son intégrité 73. Selon lui, les femmes païennes et certaines
67
« O si et possis in illa sublimi specula constitutus oculos tuos inserere secre-
tis […]. » Ad Donatum…, 9, p. 10.
68
« Quippe illum vides, qui amictu clariore conspicuus fulgere sibi videtur in pur-
pura : quibus hoc sordibus emit, ut fulgeat, quos adrogantium fastus prius pertulit, quas
superbas fores matutinus salvator obsedit. » Ad Donatum…, 11, p. 13. Sur la pourpre
comme « brillant » et « étincelant », voir J. André, Étude sur les termes de couleur dans
la langue latine, Études et commentaires, 7 (Paris : Klincksieck, 1949), p. 97‑98.
69
« […] in magistratus purpura speciem […] Instar quoddam veneni, ubi in letales
sucos dulcedine aspersa calliditate fallendi sapore medicato poculum videtur esse. » Ad
Donatum…, 11, p. 12‑13.
70
Ad Donatum…, p. 13.
71
Ad Quirinum (Testimoniorum libre tres), III, 59, éd. par R. Weber, CCSL, 3/1
(Turnhout : Brepols, 1972), p. 148.
72
« Ceterum si tu te sumptuosius comas et per publicum notabiliter incedas, ocu-
los in te iuventutis inlicias, suspiria adulescentium post te trahas, concupiscendi libidi-
nem nutrias, sperandi fomenta succendas, ut etsi ipsa non pereas, alios tamen perdas et
velut gladium te et venenum videntibus praebeas, excusari non potes, quasi mente casta
sis et pudica. » De habitu virginum, 9, éd. par J. G. Krabinger, CSEL, 3 (Tübingen :
H. Laupp, 1853), p. 194.
73
De habitu virginum…, 15, p. 198. Si, lors du jugement dernier, Dieu reconnaîtra
son œuvre dans les femmes qui ont abusés de maquillage, Il refusera d’y voir sa propre
image (De habitu virginum…, 17, p. 199) : « Cutem falso medicamine polluisti, crinem
adultero colore mutasti, expugnata est mendacio facies, figura corrupta est, vultus alienus
Kristina Mitalaitė
est. Deum videre non poteris […]. » Sur l’intégrité de l’image, cf. De habitu virginum…,
23, p. 204.
74
Les fards des femmes oblitèrent l’image de Dieu : « Si quis pingendi artifex vul-
tum alicuius et speciem et corporis qualitatem aemulo colore signasset et signato iam
consummatoque simulacro manus alius adferret, iam formata, iam picta quasi peritior
reformaret, gravis prioris artificis iniuria et iusta indignatio videretur : tu te existimas
inpune laturam tam inprobae temeritatis audacium, Dei artificis offensam ? » De habitu
virginum…, 15, p. 198. Voir aussi supra la citation sur la pourpre de la prostituée qui
s’insère par ailleurs dans le chapitre 36 intitulé Mulierem ornari saeculariter non debere.
75
« Num sinceritas perseverat et veritas, quando quae sincera sunt polluuntur co-
lorum adulteriis, medicaminum fucis in mendacium vera mutantur ? » De habitu virgi-
num…, 16, p. 199.
76
Livre 26, II (2), § 4‑10, p. 23‑25, éd. par A. Ernout (Paris : les Belles lettres,
1959).
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
77
Faits et dits mémorables…, livre 2, 5, 3, p. 175‑176.
78
Mémorables, Livre 1, 3, 13, éd. par M. Bandini, trad. par L.-A. Dorion (Paris : les
Belles lettres, 2000), p. 32.
79
Recherches sur les Plantes, livre IX, 18, éd. et trad. par S. Amigues (Paris : les
Belles lettres, 2006), p. 51.
80
Recherches sur les Plantes…, no 7, p. 217‑218. Sur la ressemblance entre la racine
et le scorpion : note 8, p. 218.
Kristina Mitalaitė
81
Sur la signification de la persona-facies, voir R. Braun, « Deus christianorum »…,
p. 216‑223. J’ai aussi analysé cette question dans les chapitres non publiés de ma thèse de
doctorat La philosophie et la théologie de l’image artificielle dans les Libri Carolini (École
Pratique des Hautes Études, 2004), p. 193‑207.
82
« Denique non vidit occurentem sibi clausulam sensus : quoniam deus, qui dixit
ex tenebris lucem lucescere, reluxit in cordibus nostris ad inluminationem agnitionis glo-
riae suae in persona Christi (2 Co 4, 6). Quis dixit : fiat lux ? Et de inluminatione mundi
quis Christo ait : posui te in lumen nationum, sedentium scilicet in tenebris et in umbra
mortis ? Cui respondent spiritus in psalmo ex providentia futuri : significatum est super
nos lumen personae tuae, domine (Ps 4, 7). Persona autem dei Christus dominus, unde
et apostolus supra, qui est imago, inquit dei (2 Co 4, 4). » Adversus Marcionem…, V, 11,
p. 698.
83
Les recherches et les études d’A. Vasiliu démontrent que le concept de l’eikôn,
du côté grec, est formulé et fixé lors des débats trinitaires, dans lesquels les Cappadociens
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
jouent un rôle déterminant : cf. surtout à Eikôn : l’image dans le discours des trois Cap-
padociens, Épiméthée (Paris : Presses universitaires de France, 2010). Dans la patristique
grecque, l’eikôn acquiert une signification bien précise et importante : l’image propre de
la relation hypostatique (ibid., p. 191, en ital. dans le texte).
84
Les chapitres non publiés de ma thèse de doctorat La philosophie et la théologie…,
p. 208‑246.
85
« Omnia enim Filius accepit a Patre, et est Dei forma et imago substantiae eius.
Eum enim qui est ab eo qui est substantiae imago tantum ad subsistendi fidem, non
etiam ad aliquam naturae dissimilitudinem intellegendam discernit. Patrem autem in Fi-
lio et Filium in Patre esse, plenitudo in utroque divinitatis perfecta est. Non enim demi-
nutio Patris est Filius, nec Filius imperfectus a Patre est. Imago sola non est, et similitudo
non sibi est. Deo autem simile aliquid esse nisi quod ex se erit non potest. Non enim
Kristina Mitalaitė
dans la Trinité chez Hilaire, la transmet déjà sous une forme simplifiée,
presque lapidaire : « Mais je lis [dans Gn 1, 26] que le Père et le Fils
détiennent une seule image, une seule ressemblance : cette ressemblance
n’est pas celle de la diversité, mais celle de l’unité 86. »
La conception de l’image, que j’appellerais unitaire, est reprise par
plusieurs théologiens latins activement engagés dans la lutte contre
l’arianisme. Elle devient l’argumentation courante chez Eusèbe de Ver-
ceil (345‑371) 87, Phébade d’Agen 88 ou encore chez Faustin 89. Chez Eu-
sèbe, l’image vient à affirmer l’unité de la déité dans la Trinité : « Pour-
quoi l’image invisible de la Trinité est une ? Car une et même déité se
trouve dans l’image de la vérité 90. » Faustin lit pareillement l’image de
Gn 1, 26 comme signifiant l’unité de la déité et de la puissance des Trois
dans la Trinité 91. L’unité de l’image désigne l’égalité du Fils au Père ainsi
aliunde est quod in omnibus simile est, neque diversitatem duobus admisceri alterius
ad alterum similitudo permittit. » De Trinitate, I, 23, éd. par P. Smulders, CCSL, 62
(Turnhout : Brepols, 1970), p. 95‑96. Pour Hilaire, nature est le synonyme du genre et de
la substance : « Cum ergo essentiam dicimus significare naturam vel genus vel substan-
tiam, intelligimus ejus ei quae in his omnibus semper esse subsistat. » Liber de synodis seu
Fide orientalium, 12, PL, 10, col. 490A.
86
« Sed et Patris et Filii unam imaginem, unam similitudinem lego : similitu-
do haec non diversitatis, sed unitatis. » De fide, I, 7, 53, éd. par O. Faller, CSEL, 78
(Hoelder : Pichler, Tempsky, 1962), p. 23. Passage cité par Théodulphe d’Orléans, qui
s’oppose à l’interprétation de Gn 1, 26 par les participants de Nicée II, comme étayant le
caractère sacré de l’icône : Opus Caroli Magni contra synodum (Libri Carolini), I, 7, éd.
par A. Freeman, collab. P. Meyvaert, MGH, t. 2, Supplementum 1 (Hanovre : Leipzig,
1998), p. 138.
87
L’évêque de Verceil, Eusèbe a été un défenseur convaincu d’Athanase. Lors
du concile de Milan (355), il a refusé, ensemble avec Lucifer de Cagliari et Denis de
Milan, de signer la condamnation d’Athanase, en conséquent de quoi ils ont été envoyés
en exil. Sur le déroulement du concile, voir H. C. Brennecke, Hilarius von Poitiers und
die Bischofsopposition gegen Konstantius II, Patristische Texte und Studien, 26 (Berlin,
New York : W. de Gruyter, 1984), p. 164‑192. Sur Eusèbe, voir V. C. De Clercq, Dic-
tionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques, t. 15 (Paris : Letouzey & Ané, 1963),
col. 1473‑1478, E. Milano, « Eusebio di Vercelli, vescovo metropolita : leggenda o realtà
storica ? », Italia Medioevale e umanistica, 30 (1987), p. 313‑322.
88
Sur Phébade d’Agen, voir G. Fritz, Dictionnaire de théologie catholique, t. 12, par-
tie 1 (Paris : Letouzey & Ané, 1933), col. 1370‑1374. Il devient évêque d’Agen après le
concile de Sardique (343).
89
Sur la théologie et sur la confession de la foi de Faustin luciférien, voir
M. Simonetti, « Note su Faustino », Sacris erudiri, 14 (1963), p. 50‑98.
90
« Cur una imago invisibilis est trinitatis ? Quia una eademaque deitas est in ima-
gine veritatis. » De trinitate libelli septem, I, 13, éd. par V. Bulhart, CCSL, 9 (Turnhout :
Brepols, 1957), p. 6. L’attribution de cette œuvre à Eusèbe est toujours discutée.
91
De Trinitate, 7 (I, 6), 15 (I, 14), éd. par M. Simonetti, CCSL, 69, p. 300‑301,
p. 310.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
que la forme divine dans le Christ (Ph 2, 7) 92, autrement dit, parler de
l’unité de la substance revient à parler de l’unité de l’image 93.
La nouvelle lecture du concept biblique de l’image radicalement op-
posée à celle de la période pré-nicéenne n’empêche pas les théologiens
d’incorporer l’argumentation des premiers théologiens latins, mais à
leur guise. Ainsi, par exemple, Phébade d’Agen qui synthétise les sources
latines pre-nicéennes et nicéennes n’a aucun mal à juxtaposer le nou-
veau discours rigoureusement trinitaire sur l’image à la perception de la
substance provenant de Tertullien 94.
92
De Trinitate…, 8 (I, 7), p. 302.
93
De Trinitate…, 9 (I, 8), p. 302‑303.
94
« Videtur enim Patris Filius imago vera et figura expressa substantiae eius, hoc
est Dei Sermo, non sonus vocis, sed res substantiua […]. » Contra Arrianos, XXV, 4, éd.
par R. Demeulenaere, CCSL, 64, p. 48. Le verbe comme une chose de la substance vient
de Tertullien.
95
« Ait enim Dominus et Deus, cum de Patre loqueretur, nulli Patris imaginem
visam. Qui si imago Patris ipse est Filius, ut Apostolus, probat, negat visibilem fuisse,
dicendo nulli Patris imaginem visam. » Contra Arrianos…, XIX, 4, CCSL, 64, p. 45.
96
« Christus semper in forma dei erat, quia imago est invisibilis Dei. » Ad Filip-
penses, 2, 5, éd. par H. J. Vogels, CSEL, 83/1 (Viena : Hoelder, Pichler, Tempsky, 1969),
p. 139.
97
Évêque espagnol (deuxième moitié du ive siècle), très proche de Lucifer de Ca-
gliari, il était un antiarien intransigeant. Cf. J. Collantes Lozano, Dictionnaire de Spiri-
tualité, t. 6 (Paris : Beauchesne, 1967), col. 923‑927.
Kristina Mitalaitė
Celui qui veut croire que Dieu doit être compris comme corporel – alors
que rien de ce qui est corporel n’est fait selon l’image et la ressemblance
divines – affirme Dieu comme étant composé (composita) de la nature
la plus puissante et de la nature inférieure, car c’est ainsi qu’il voit que
les hommes sont faits. Tout ce qui est composé n’est pas éternel, car la
composition connaît son début, etc. 99
[…] comme les peintures ont l’habitude de voler (rapere) les visages
des autres et les peindre ressemblants à l’aide des différentes couleurs,
comme quand l’ombre vaine déçoit dans la contemplation en faisant
croire en ce qu’elle n’est pas, ou encore, de même, comme il est suffi-
samment d émontré, que le regard des yeux est écarté de la vérité par
l’imitation qui trompe (fallere), de même ce qui est vu dans l’Ancien
Testament, ce n’est que l’image de la vérité et non la vérité elle-même 103.
98
Tractatus Origenis, I, 9‑12, éd. par V. Bulhart, CCSL, 69…, p. 7.
99
Ibid.
100
Tractatus Origenis…, I, 19, p. 9. Voir aussi Tractatus Origenis…, 21, p. 10.
101
Tractatus Origenis…, XIII, 2, p. 99.
102
Tractatus Origenis…, V, 2, p. 35.
103
Tractatus Origenis…, IV, 13, p. 30.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
L’image matérielle est un corps, qui rend visible un autre corps, mais
dans une substance étrangère au prototype. Toujours enveloppée dans le
visible, elle ne peut pas percer le divin, qui s’exclut de toute participation
dans la visibilité. Dans cette dialectique particulièrement latine de la né-
gation, l’Imago se définit comme l’Invisible dans sa propre essence. Eusèbe
de Verceil, qui perçoit l’invisibilité de l’Imago comme étant l’un des traits
de l’unité de la substance, l’exprime très clairement : « Ce qui est parti-
culièrement évident c’est que s’il n’existait en eux [les trois Personnes]
l’image invisible de la vérité de la nature, jamais, absolument jamais, Il
[Fils] n’aurait affirmé : celui qui m’a vu, a vu mon père » 105. La vérité subs-
tantielle de l’Imago rejoint donc Invisibilité abyssale et l’impossibilité de
sa vision par les yeux corporels dans le discours de la transcendance trini-
taire rigide, discours qui évite toute ouverture de l’image 106.
Dans l’argumentation des théologiens latins, l’image artificielle est
un corps sans vie, insensible et vide ; elle est morte, peinte ou rassemblée
à partir de divers matériaux (composita). En termes théologiques trini-
taires, l’image artificielle devient clairement anti-image. Tous ses traits
104
Ambrosiaster, Ad Colosenses, 1, 15, CSEL, 83/1…, p. 170‑171.
105
« Qui utique evidenter, si non esset in eos una invisibilis imago naturae veritatis,
numquam prorsus praesumens indicasset : qui me vidit, vidit et patrem meum. » De Tri-
nitate…, III, p. 32.
106
Comme le démontre A. Vasiliu, cela se passe autrement chez les Pères Grecs,
tout particulièrement chez Basile de Césarée, qui repense l’eikôn et la visibilité, qu’elle
dispense, au cœur même de la Trinité : l’eikôn rend visible dans l’hypostase non ses traits
distinctifs, mais la communauté essentielle et la réciprocité des Trois : A. Vasiliu, Eikôn…,
(surtout p. 202‑203), étant en même temps capable de révéler dans l’hypostase dans sa
corrélation au prosôpon, la réalité propre de l’hypostase (ibid., p. 204‑205).
Kristina Mitalaitė
107
A. Vasiliu, Eikôn…
108
De carne Christi…, III, 7, p. 877.
109
De carne Christi…, I, p. 874.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
110
« […] Marcion phantasma eum maluit credere, totius corporis in illo dedigna-
tus veritatem. » De anima…, 17, p. 806. « […] et phantasma praestatur, quia et corpus
affingitur […]. » Ibid., p. 866. Voir aussi : « Porro si et magi phantasmata edunt et iam
defunctorum infamant animas […]. » Apologeticum…, XXIII, p. 130.
111
Chez Aristote, le phantasma est une image créée par la phantasia indépendam-
ment de la réalité ; elle est exclusivement liée à l’activité de l’âme intellectuelle. Le noûs
transforme les phantasmata en noemata : G. Watson, « ΦΑΝΤΑΣΙΑ in Aristotle, De
Anima 3.3 », The Classical Quarterly, 32/1 (1982), p. 100‑113 (surtout p. 108‑110).
112
« Igitur perquam velim scire, esse phantasmata et habere propriam figuram
numenque aliquod putes, an inania et vana ex metu nostro imaginem accipere. » Pline le
Jeune, Lettres, Livre VII, Ep. 27, éd. par A.-M. Guillemin, 3 vol. (Paris : les Belles lettres,
1927‑1928), iii (1928), p. 39.
113
Il semblerait qu’elle soit vraie, car elle est désignée par le nom de figura lors
de la deuxième description de l’apparition : il est difficile de dire s’il s’agit toujours de
l’Afrique. Les autres mots utilisés pour nommer ces fantômes sont idolon et monstrum
(pour le spectre plutôt antipathique qui a fini par chasser les habitants d’une maison
athénienne) : ibid., p. 39.
114
« Gnosticum vero falsae scientiae nomine gloriantem et omnem perversae men-
tis intellectum in aëria quaedam phantasmata velut spiritali corporalium rerum imagina-
tione vertentem ad fidem carnis in Christo cogit […]. » Ep. 21, 4, éd. par G. de Hartel,
2e éd. par M. Kamptner, CSEL, 29 (Vienne : Verlag der Österreichischen Akademie der
Wissenschaften, 1999), p. 152.
115
J. Dross, « Du bon usage de l’imagination : l’importance du regard intérieur
dans l’œuvre de Sénèque », Pallas, 92 (2013), p. 225‑235 (p. 227).
116
Libri Academici (Les Académiques), I, (XI) 40, II (Lucullus), (VI) 18, trad.,
notes par J. Kany-Turpin, introd. par P. Pellegrin (Paris : Gallimard, 2010), p. 104‑107,
138‑141 (cité par J. Dross, Ibid.).
Kristina Mitalaitė
117
« […] anguis eximiae magnitudinis uisus e conspectu abiit. » Faits et dits mémo-
rables
, livre 1, VI, 7, p. 120.
118
« Quae eum conceptum utero haberet, parere uisa est Satyriscum […]. » Faits et
dits mémorables…, livre 1, VII, ext. 7, p. 137.
119
Faits et dits mémorables…, VII, p. 127.
120
Faits et dits mémorables…, 7, 1, p. 127.
121
Faits et dits mémorables…, VII, 3, p. 129.
122
Faits et dits mémorables…, VII, ext. 1, p. 132‑133.
123
Faits et dits mémorables…, VII, 6‑7, p. 131.
124
Faits et dits mémorables…, VII, ext. 2, p. 133.
125
Faits et dits mémorables…, ext. 9, p. 137.
126
Faits et dits mémorables…, VII, ext. 6, p. 136.
127
M. Armisen-Marchetti, Sapientiae facies : étude sur les images de Sénèque (Paris :
les Belles lettres, 1989), p. 30 sq. Idem, « La notion d’imagination chez les Anciens. I, les
philosophes », Pallas, 26 (1979), p. 11‑51 et J. Dross, « Du bon usage… ».
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
pathos (phantaston), qui lui vient de l’objet. Le phantasma est une af-
fectation qui se produit dans l’âme sans un objet extérieur qu’elle peut
percevoir, et l’agent, cette fois-ci, est l’âme elle-même 128.
Comment, dans cette théorie de la perception, se définit le travail de
l’artiste qui produit ou crée l’image de quelqu’un ou de quelque chose ?
En réfléchissant sur l’habileté de chaque artisan, Sénèque affirme que
celle du peintre s’exprime par la manière de rendre la ressemblance par
les couleurs 129. Dans ses deux références au travail du peintre, Sénèque
pose une exigence de l’existence d’un modèle ou d’un objet qu’il repro-
duit à travers la ressemblance dans l’image : c’est donc la ressemblance
qui ressort comme élément déterminant dans le travail (reproduction,
dit Sénèque) du peintre. Autrement dit, le philosophe pense dans le
cadre de la théorie de la perception stoïcienne : le peintre reproduit
l’affection ressentie par son propre hégémonikon au cours de la vision.
Il serait imprudent de conclure à partir de ces deux citations sur la ma-
nière dont Sénèque juge la peinture : comme une reproduction du phan-
taston ? Qu’en est-il des phantasmata ? Mettons ces questions de côté.
Nous sommes plutôt intéressés ici par une autre question : le statut on-
tologique de ces images qui apparaissent, discutées par le philosophe.
La théorie de la représentation a été un sujet débattu entre les Stoï-
ciens : elle a été tantôt comparée à la cire qui reçoit les empreintes-im-
pressions dans l’âme (Zénon), tantôt perçue comme l’altération de l’air
par le son (Chrysippe) 130. Les spéculations stoïciennes sur la perception
établissent donc l’existence instable, passagère de ces ressemblances qui
utilisent comme médium les substances semblables à l’air, à l’eau, à la
cire. Les Stoïciens créent en quelque sorte une ontologie de la brièveté de
128
Aetius ou Pseudo-Plutarque a distingué quatre mouvements autour de la phan-
tasia : phantasia, phantaston, phantastikon et phantasma. Voir J.-P. Dumont, Le scepti-
cisme et le phénomène (Paris : J. Vrin, 1972), p. 118‑120.
129
« Nemo, quamvis paratos habeat colores, similitudinem reddet, nisi iam constat,
quid velit pingere. Itidem eo peccamus, quia de partibus vitae omnes deliberamus, de
tota nemo deliberat. » Traduction de H. Noblot : « Jamais peintre, eût-il ses couleurs
toutes prêtes, n’attrapera la ressemblance, s’il n’est pas fixé à l’avance sur ce qu’il veut
représenter. Semblablement le principe de nos fautes, c’est que nos délibérations portent
toujours sur des éléments partiels de la vie, jamais sur la vie entière. » Livre 8, Ep. 71, 1,
t. 3, éd. par F. Préchac (Paris : les Belles lettres, 1957), p. 17. « […] pictor colores quos
ad reddendam similitudinem multos variosque ante se posuit, celerrime denotat et inter
ceram opusque facilei vultu ac manu commeat […]. » Livres 19‑20, Ep. 121, 5, éd. par
F. Préchac, trad. H. Noblot, t. 5 (Paris : les Belles lettres, 1971), p. 75.
130
Cf. J.-B. Gourinat, Les stoïciens et l’âme, Philosophies, 75 (Paris : Presses univer-
sitaires de France, 1996), p. 36‑40.
Kristina Mitalaitė
131
J.-P. Dumont, Le scepticisme…, p. 122 sq.
132
Je prépare un article sur cette question.
133
J.-P. Dumont, Le scepticisme…, p. 124. Je reprends ici l’exemple et l’interpréta-
tion de la ressemblance dans la perception donnés par J.-P. Dumont, Ibid. Traduction par
R. G. Bury : « For just as the man who does not know Socrates but has seen a picture of
him does not know whether the picture is like Socrates, so also the intellect when it gazes
on the affections of the senses but does not behold the external objects will not so much
as know whether the affections of the senses are similar to the external realities. » Out-
lines of Pyrrhonism, II, 75, dans Sextus Empiricus, Works, 4 vol. (Cambridge, London :
Harvard University press, 1939-), i (1939), p. 9. Voir aussi Contre les logiciens, I.358.
134
Histoire naturelle…, Livre 35, II, 2, p. 37 : la dégradation de la culture de l’image
selon Pline s’exprime dans la mise en valeur de la matière.
135
Voir supra.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
dans l’or ou dans l’argent, qui différent dans leurs valeurs économiques
ou naturelles : « ‘Façonne ton être ; rends-le, lui aussi, digne de Dieu’.
Mais tu ne façonneras pas l’ouvrage dans l’or ou dans l’argent, matière
inapte à reproduire en traits ressemblants l’image de la divinité » 136. Ce
qui nous intéresse dans cette réflexion de Sénèque est le détachement
de l’image de la matière dont elle est faite. Pour expliquer cette manière
de dresser l’image contre son propre corps, il faut revenir à la distinc-
tion stoïcienne de la phantasia/phantasma et l’envisager à la lumière de
la théorie de l’être de cette école. Sans entrer ici dans une exposition
détaillée, voyons comment elle est abordée par Sénèque. Dans l’explica-
tion du quid (quelque chose), ou tout simplement de la nature de toutes
les choses sans exception, Sénèque dit que ce second groupe « embrasse
les visions de l’esprit comme les Centaures, les Géants, produits de faux
concepts, affectant déjà forme d’image, et cependant dépourvus de
substance » 137. La question du statut métaphysique et ontologique de
ces existants très particuliers est devenue l’un des sujets les plus débattus
dans la philosophie médiévale 138. Il apparaît clairement dans ce passage
bien connu par les historiens de la philosophie que Sénèque rattache
le phantasma à la question de la substance 139. Or, l’image de l’esprit
dépourvue de support réel dans l’existence apparaît chez Sextus Empi-
ricus qui, en commentant la vision des Furies par Oreste, dit qu’il est
vrai qu’elles existent, parce que les sens ont aperçu leurs images, mais
ce qui n’est pas vrai, c’est qu’elles ont un corps solide, erreur due à la
raison d’Oreste 140. Quand Plutarque transmet la théorie stoïcienne du
phantasma, défini par lui aussi comme « une attraction vide de contenu
136
« Exurge modo et te quoque dignum finge Deo. Finges autem non auro vel
argento : non potest ex hac materia imago dei exprimi similis ; cogita illos, cum propitii
essent, fictiles fuisse. » Lettres à Lucilius, Livre 4, Ep. 31, 11, éd. par F. Préchac, trad. par
H. Noblot, t. 1 (Paris : les Belles lettres, 1945), p. 141.
137
Lettres à Lucilius, Livre 6, Ep. 58, 15, éd. par F. Préchac, trad. par H. Noblot
(Paris : les Belles lettres, 1947), p. 75.
138
Cf. A. de Libera, « Introduction », dans Porphyre, Isagoge, éd. et trad. par
A. de Libera et A.-Ph. Segonds, Sic et non (Paris : J. Vrin, 1998), p. xlv‑lvi.
139
Il faut retenir que, dans cette lettre, Sénèque est particulièrement sensible à la
notion d’ousia (« Quid enim fiet, mi Lucili ? Quomodo dicetur ousia res necessaria,
natura continens fundamentum omnium ? » Ep. 58, 6, p. 72). Autrement dit, l’utilisa-
tion de substantia est tout sauf gratuite et accidentelle dans la réflexion concernant ce
type d’existants.
140
« Thus in the case of Orestes, when he fancied he saw the Furies, his sense, ex-
cited by images was true (for the images really existed), but his mind, in thinking that
the Furies were solid, formed a false opinion. » Sextus Empiricus, Adversus Mathema-
ticos [Against Logicians], II, 63, trad. R. G. Bury, dans Works…, ii (1957), p. 269. La
Kristina Mitalaitė
folie d’Oreste était l’exemple d’une hallucination souvent discutée par les stoïciens.
Cf. J.-B. Gourinat, Les stoïciens…, p. 40‑42.
141
Opinions philosophiques, 12, p. 153. Voir aussi Sextus Empiricus (Adversus
Mathematicos [Against Logicians] (VII, 245 sq.), qui, dans le cas d’Oreste, parle de la
non-existence de la Furie et non de la substance.
142
« Nobis non placet in arcu aut corona subesse aliquid corporis certi […]. » Livre
1, XV, 7, p. 44.
143
Ibid.
144
Sur le miroir comme objet philosophique dans le cas d’Apulée, voir A. Vasiliu,
Images de soi dans l’antiquité tardive, Histoire de la philosophie (Paris : J. Vrin, 2012),
p. 21‑104.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
145
Histoire naturelle, Livre 35…, 2, p. 38.
146
« Etiam si cuius in te comparebit similitudo, quem admiratio tibi altius fixerit,
similem esse te volo quomodo filium, non quomodo imaginem : imago res mortua est.
‘Quid ergo ? non intellegetur, cuius imiteris orationem ? cuius argumentationem ? cuius
sententias ?’ Puto aliquando ne intellegi quidem posse, si magni vir ingenii omnibus,
quae ex quo velut exemplari traxit, formam suam inpressit, ut in unitatem illa conpe-
tant. » Livre 11, Ep. 84, 8, p. 123‑124.
Kristina Mitalaitė
et phantasma, que nous avons observé chez les auteurs latins, tant chré-
tiens que non-chrétiens, comme si n’importe quelle mise en image im-
pliquait fatalement une contamination par le phantasma ou par l’incar-
nation condamnable d’un autre corps ?
L’exemple de Sénèque montre que la dépréciation de l’image artifi-
cielle dans l’Occident latin ne trouve pas sa source nécessairement dans le
platonisme ou le néoplatonisme des Pères latins. Il a été proposé comme
une possibilité négligée parmi d’autres inspirations conceptuelles − stoï-
ciennes ou encore sceptiques – pour le développement postérieur de
l’image dans la théologie latine chrétienne. Une étude plus approfon-
die et plus élargie pourrait vérifier notre supposition. Néanmoins, par
cet exemple déjà, l’explication de l’apparition de l’image sur les surfaces
lisses dans la nature par Sénèque est reprise par Marius Victorinus, lors-
qu’il rejette l’explication de Candide sur l’Image-Christ. Sa définition
du Fils-Image se construit en opposition à l’imago imaginalis in sensi-
libus, celle qui ne possède ni corps, ni sens, ni intelligence. Par opposi-
tion à cette image naturelle, Victorinus établit la « substantialité » de
l’Image-Fils, qui s’établit solidement dans la théologie latine 147.
Quand Ambroise insiste de son côté sur les caractères « mort »,
« vide », « corporel » et donc non substantiel de l’image artificielle
dans l’un de ses passages clés concernant l’image, nous pouvons conclure
après notre analyse des sources que son choix des traits n’est pas acciden-
tel, mais résume bien les traits de l’image conçus par les sources philo
sophiques latines non-chrétiennes :
Donc l’image n’est pas un visage corporel, elle n’est pas composée de
fards, de cires, mais elle est simple de Dieu, « sorti du Père », exprimée
de sa source. C’est à travers cette image que le Seigneur a montré le Père
en disant à Philippe : « Philippe, celui qui m’a vu, a vu mon Père. Com-
ment dis-tu ‘montre nous le père’ ? » Ne crois-tu pas que je suis dans le père
et le père est en moi ? Donc, celui qui a vu dans l’image le Père L’a vu
dans le Fils. Vois-tu de quelle image il est question ? Cette image est la
Vérité de Dieu, cette image est la justice, cette image est la « puissance de
147
« Sed non sic intellegimus ibi imaginem, sicuti in sensibilibus. Hic enim nec
substantiam intellegimus imaginem. Umbra enim quaedam est in aere aut in aqua per
quoddam corporale lumen, corporalis effluentiae per reflexionem figurata, ipsa per
semet nihil, nec proprii motus – imaginalis solum substantia – neque corpus neque sen-
sum neque intellegentiam habens […]. » Adversus Arium, I, 19, dans Traités théologiques
sur la Trinité, éd. et trad. par P. Hadot, SC, 68‑69, 2 vol. (Paris : les Éd. du Cerf, 1960), i,
p. 232‑234. P. Hadot (ibid., II, p. 761) renvoie aux Questions naturelles, I, 3, 7, mais seule-
ment pour l’idée de la réflexion de la lumière sur les surfaces. Je pense que l’influence de
Sénèque est plus significative.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
Dieu », elle n’est pas muette, parce qu’elle est le verbe, elle n’est pas sans
les sens, parce qu’elle est la sagesse, elle n’est pas vide, parce qu’elle est la
puissance, elle n’est pas vide, parce qu’elle est la vie, elle n’est pas morte
parce qu’elle est la résurrection 148.
En guise de conclusion
Que peut-on conclure des trois parties essentielles de l’image matérielle –
visibilité, caractère matériel et ressemblance − dans la pensée latine ? Les
théologiens nicéens latins reconsidèrent radicalement l’un des trois traits
essentiels de l’image : la visibilité. L’image la plus parfaite est poussée
dans le retranchement de l’invisible. Contrairement à Cyprien ou à Ter-
tullien, chez lesquels il s’agissait de la vision contrôlée et de ses nouvelles
règles, ici c’est l’acte de voir lui-même avec les yeux corporels qui devient
digne de soupçon. Revenons de nouveau à Ambroise pour quelques ins-
tants. Il serait intéressant de rappeler que les ariens latins, contre lesquels
se bat Ambroise, ont interprété la visibilité du Christ comme son infério-
rité par rapport au Père, qui reste toujours invisible 150. Ambroise examine
148
« Imago itaque non vultus est corporalis, non fucis conposita, non ceris, sed
simplex de deo, ‘egressa de patre’, expressa de fonte. Per hanc imaginem Filippo patrem
dominus demonstravit dicens : Filippe, qui me vidit, vidit et patrem. Et quomodo tu dicis
‘ostende nobis patrem’ ? Non credis quia ego in patre et pater in me est ? Vidit enim in ima
gine patrem, qui vidit in filio. Vides quam imaginem dicat ? Imago ista veritas est, imago
ista iustitia est, imago ista ‘dei virtus’ est, non muta, quia verbum est, non insensibilis,
quia sapientia est, non inanis, quia virtus est, non vacua, quia vita est, non mortua, quia
resurrectio est. » Ambroise, De Fide…, I, 7, p. 22.
149
« Sic ait atque animum pictura pascit inani multa gemens, largoque umectat
flumine uoltum. » Aeneidos, Liber I.464‑465 sq.
150
J’ai analysé en détail cette question dans les chapitres non publiés de ma thèse de
doctorat La théologie et la philosophie…, p. 225‑246. Il s’agit de fragments de la réfutation
du De fide d’Ambroise : Scholia in concilium Aquileiense, fr. 71, 340v, éd. par R. Gryson,
CCSL, 87 (Turnhout : Brepols, 1982), p. 182. Palladius se réfère à la vision de Dieu par
Kristina Mitalaitė
deux sortes de visions : la vision du Christ avec les yeux corporels, qui est
fausse, et la vision ou la perception intérieures du Fils dans le Père, de leur
unité et de la Puissance divine dans le Christ, qui elle seule est vraie 151.
Cette vision n’est pas eikônique, comme c’est le cas chez les Pères Cappa-
dociens. Chez les théologiens latins, il n’est pas question de la vision, telle
que nous pouvons la percevoir dans un sens théologique ou dans un sens
anthropologique ; il s’agit tout simplement d’un argument supplémen-
taire pour l’égalité substantielle du Fils avec le Père.
Ce changement radical envers l’image n’est pas sans influence sur le
régime général de la vision. Dans son traité sur la Pénitence, Ambroise
discute les dangers qui guettent les chrétiens dans la visibilité du monde :
le visage de la femme doit être voilé afin de protéger le regard masculin
(la blessure [vulnus] guette le regardant et le regardé). Le commerce du
regard est un piège du diable. La vision doit être surveillée par le discer-
nement du cœur et de l’esprit 152. Ambroise ne s’intéresse plus aux détails
de la toilette comme Tertullien ou Cyprien : la visibilité proprement chré-
tienne n’a plus de sens pour lui ; le visible est dangereux dans son essence.
Pline déplorait au début de son livre 35 la disparition de la ressem-
blance de l’image à l’égard de son prototype. L’auteur latin dressait
l’état des lieux dégradés de l’art des images de son époque comme si la
ressemblance du portrait n’atteignait plus son degré maximal (maxime
similis) 153. Il s’alarmait de ce que les traits individuels souffrent au profit
Abraham (Gen 18, 1) : ibid., fr. 83, 346v, p. 190. La discussion de la visibilité du Fils dans
l’exemple de la vision de Dieu par Abraham apparaît aussi dans le Contra Maximinum
d’Augustin, 2, 5, PL, 42, col. 806 et surtout 2, 7, PL, 42, col. 808 sq.
151
Ambroise, qui affronte le même argument, parle de la vision par les yeux du
cœur : « Quid est ergo deum videre ? Nolo me interroges : evangelium interroga, ipsum
dominum interroga, immo dicentem audi : Philippe, qui me vidit vidit et patrem […]
(Jn 14, 9). Utique non corpus videtur in corpore nec spiritus videtur in spiritu, sed
solus ille Pater videtur in Filio aut iste filius videtur in Patre ; non enim dissimiles in
dissimilibus videntur, sed ubi unitas operationis est atque virtutis, et filius in patre et
pater videtur in Filio. » Expositio evangelii Lucae, I, 7, éd. par C. Schenkl, CSEL, 32/3
(Prague, V ienne, Leipzig : F. Tempsky, 1902), p. 14. C’est de la même manière qu’Augus-
tin explique Jn 14, 9 dans le Contra Maximinum : « Ubi autem ait Qui me vidit, vidit et
Patrem (Jn 14, 9) ; quis nesciat ideo dictum, quoniam quisquis per intelligentiam videt
Filium, Patri utique videt aequalem ? Quod vos ideo non vultis, quia per oculos cordis,
quantum in hac vita videri potest, Filium non videtis. » Contra Maximinum, 2, 24, PL,
42, col. 802.
152
De penitentia, I.68‑73.
153
Histoire naturelle, II, 2, Livre 35…, p. 37. Dans son commentaire, Croisille
s’étonne de l’« étrangeté des propos » de Pline, car le vérisme du portrait prospérait à
l’époque de l’auteur : ibid., p. 133. Il se peut que Pline ruse pour valoriser la ressemblance
comme le trait le plus ancien et le plus noble de l’image.
ÉDUQUER LE REGARD ET CONSTRUIRE LA VISIBILITÉ CHRÉTIENNE
154
« Adeo materiam conspici malunt omnes quam se nosci. » Histoire naturelle, II,
2, Livre 35…, p. 37.
155
The Corporal Imagination : Signifying the Holy in Late Ancient Christianity (Phi-
ladelphia : University of Pennsylvania Press, 2009).
156
A. Vasiliu, Eikôn…
Diego M. Ianiro
1
Anche se notoriamente già dai tempi di Jean-Jacques Ampère il concetto stesso
di renaissance carolingienne è stato più volte messo in discussione (e quasi mai accettato
nella sua accezione originaria). Non è però oggi più possibile, come chi scrive spera emer-
ga con chiarezza anche dalla lettura del presente testo, sostenere la celebre valutazione
tranchant, espressa quasi sessanta anni fa da Jacques Le Goff, di una rinascita che “au lieu
de semer, thésaurise”: J. Le Goff, Les intellectuels au Moyen Âge (Paris: Éditions du Seuil,
1957), p. 14.
2
Cfr. J. Marenbon, The Emergence of Medieval Latin Philosophy, in The Cambrid-
ge History of Medieval Philosophy, 2 vols, ed. di R. Pasnau (Cambridge: Cambridge Uni-
versity Press, 2010), i, pp. 26‑38 (p. 26).
3
Limitando il campo d’indagine esclusivamente alla prima generazione di intel-
lettuali carolingi, la sproporzione nell’utilizzo delle opere dei due autori è chiaramente
evidente. Di Boezio, come si vedrà, circolavano certamente alcuni dei suoi commentari
all’Organon, ma la fortuna degli Opuscula sacra ha inizio solo a partire dalla prima metà
del nono secolo, cfr. C. Erismann, The Medieval Fortunes of the Opuscula Sacra, in The
Cambridge Companion to Boethius, ed. di J. Marenbon (Cambridge: Cambridige Uni-
versity Press, 2009), pp. 155‑178 (p. 157). Lo stesso discorso vale per il De nuptiis di
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 257-284
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Diego M. Ianiro
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
7
Così Alcuino, sul calco di Isidoro (Etymologiae II.24.8), definisce l’ars dialectica
nel suo manuale, cfr. Alcuino di York: “Dialectica est disciplina rationalis quaerendi,
diffiniendi et disserendi, etiam et vera a falsis discernendi potens”. De dialectica, PL, 101,
cols 949‑975 (cols 952D-953A).
8
Sul tema della presunta mancata diffusione del testo la letteratura è sostanzial-
mente ferma a un articolo di Ann Freeman del 1985 (le cui conclusioni sono ribadite nel-
la “Einleitung” alla sua edizione dell’Opus), cfr. “Carolingian Orthodoxy and the Fate of
the Libri Carolini”, Viator, 16 (1985), pp. 65‑108. Come integrazione condotta al fine di
confermare il discorso della studiosa cfr. P. Meyvaert, “Medieval Notions of Publication:
the ‘Unpublished’ Opus Caroli regis contra synodum and the Council of Frankfort (794)”,
Journal of Medieval Latin, 12 (2002), pp. 78‑89. In questi pur validi – e ormai classici –
lavori viene però sottostimata la conoscenza diretta del testo da parte di un autore della
generazione di Giovanni Scoto, Incmaro di Reims, e la presenza di una serie di testimoni
che provano l’esistenza di almeno altri due manoscritti andati perduti. Per una recente
sintesi del problema della redazione/ricezione dei Libri, cfr. T. F. X. Noble, Images, Ico-
noclasm, and the Carolingians (Philadelphia: University of Pennsylvania Press, 2009),
pp. 162‑180.
9
Il terminus post quem fissato al 790 dipende da un preciso – ma non necessaria-
mente degno di fede – riferimento temporale al Niceno Secondo contenuto nell’Opus
stesso: “Gesta praeterea est ferme ante triennium et altera synodus illis in partibus [scil.
Bythinia]”. OC, Praefatio, p. 100.1.
Diego M. Ianiro
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
ma sezione del codice di Leidrado (vedi sopra, nota 11), cfr. MS Pages 1, fol. 2r‑30r. Nel
capitolo OC, IV, 23 si riscontrano invece gli unici riferimenti ad altre due opere legate
all’Organon: il Periermeneias attribuito ad Apuleio e l’editio prima dei Commentarii in
librum Aristotelis Periermeneias di Boezio, cfr. L. Wallach, Diplomatic Studies in Latin
and Greek Documents from the Carolingian Age (Ithaca NY, London: Cornell Univeristy
Pres, 1977), pp. 70‑77; anche questi due testi sono inclusi, separati dalla parte precedente
con una pagina bianca, nella sezione dialettica del manoscritto di Leidrado, cfr. MS Pages
1, fol. 31r‑106r. È opportuno qui ricordare che il codice, con i suoi fol. 2r‑106r, costituisce
il più antico testimone delle versioni integrali di queste opere di dialettica, tutte utilizza-
te nell’Opus, cfr. B. Bischoff, “Die Hofbibliothek Karls des Grossen”, in Karl der Große:
Lebenswerk und Nachleben, ed. di W. Braunfels (Düsseldorf: L. Schwann, 1965‑1968),
ii (1965): Das geistige Leben, ed. di B. Bischoff e W. Braunfels, pp. 42‑62 (p. 48). Allo
stesso capitolo OC, IV, 23 appartiene l’unico prestito, modellato sulla quadrata formula
del suddetto Periermeneias pseudo-apuleiano, dall’Ars maior di Donato (cfr. OC, IV, 23,
p. 547.7‑19). L’ordine degli argomenti dell’ars dialectica indicato nei Libri (cfr. OC, II,
30, p. 314.18‑30) segue con precisione sia la disposizione dei capitoli del De dialectica
di Alcuino che quella dei testi raccolti nel MS Pages 1; tale ordine dispone le parti della
dialettica nel modo seguente: isagogae – vale a dire i predicabili, le introductiones alla
dialettica secondo Isidoro, cfr. Isidoro di Siviglia, Etymologiarum sive Originum libri,
II, 25, 1, ed. di W. M. Lindsay (Oxford: Clarendon, 1911), ad locum e cfr. Alcuino, De
dialectica, II, PL, 101, col. 953B – e categoriae, modi diffinitionum e topica (equivalenti
ai capitoli XII‑XV del De dialectica), infine periermeneiae. Le Etymologiae non possono
comunque essere la fonte esclusiva di questa costante organizzazione della disciplina in
quanto l’ordine disposto da Isidoro è leggermente diverso: alle Categoriae segue infat-
ti il Perihermeneias, mentre i capitoli della divisio definitionum et topicorum sono posti
alla fine, cfr. Isidoro, Etymologiae, II, 26‑30, ed. di W. M. Lindsay…, ad locum (com’è
noto la sequenza di Isidoro ricalca quella presentata da Cassiodoro nelle Institutiones).
Un altro testo probabilmente utilizzato in OC, I, 2 è, come suggeriscono sia Luitpold
Wallach che Ann Freeman, il De dialectica di Agostino, cfr. OC, I, 2, p. 117.12‑15 (e nota
1 dell’edizione): si tratterebbe del primo testimone a noi noto di un prestito da quest’o-
pera, cfr. B. Darrell Jackson, “Intoduction”, in Agostino d’Ippona, De dialectica, ed. di
B. Darrell Jackson e J. Pinborg (Dordrecht: D. Reidel, 1975), pp. 1‑75, (p. 6). Tuttavia il
trattato agostiniano, nonostante il titolo, presenta una disciplina molto meno rigorosa e
tecnica rispetto agli altri lavori del corpus logico a disposizione dei filosofi di Carlo. Un
discorso a parte andrebbe fatto per l’uso del classico strumento della dialettica, il sillogi-
smo: l’Opus ne presenta diversi, distribuiti senza evidenti discontinuità nei quattro libri,
cfr. A. Freeman, “Einleitung”, in OC, pp. 1‑93 (pp. 55‑56).
14
Alcuino – e con lui tutti i filosofi carolingi – riteneva che il Categoriae decem fos-
se opera di Agostino, cfr. Alcuino, Carmen 73, Versus Alchuini ad Karolum regem Fran-
corum, in Poetae…, i, pp. 160‑351 (p. 295.7‑8); inoltre cfr. Categoriae, ed. di L. Minio-Pa-
luello, in Aristoteles latinus, ed. di L. Minio-Paluello e G. Verbeke (Bruges, Paris: Desclée
de Brouwer, 1957-), i, 1‑5: Categoriae vel praedicamenta (1961), p. lxxxvii.7‑8. Il carmen
alcuiniano introduttivo al Categoriae decem è riportato integralmente nel MS Pages 1,
fol. 28r, in coda all’estratto dal De arithmetica (vedi sotto, nota 16).
Diego M. Ianiro
15
Cfr. L. Minio-Paluello, Nuovi impulsi allo studio della logica: la seconda fase
della riscoperta di Aristotele e di Boezio, in La scuola nell’Occidente latino dell’alto me-
dioevo. XIX Settimana di Studio del Centro italiano di Studi sull’Alto Medioevo, Spoleto,
15‑21 Aprile 1971, Settimane della Fondazione CISAM, 19, 2 vols (Spoleto: Centro ita-
liano di studi sull’alto medioevo, 1972), II, pp. 743‑766 (p. 765).
16
K. Mitalaité, Philosophie et théologie de l’image dans les Libri Carolini, Colletion
des Études Augustiniennes, Série Moyen Âge et Temps Modernes, 43 (Paris: les Études
augustiniennes, 2007), p. 186. A questo titolo l’autrice nota che nel codice di Leidrado
si trova, incastonato tra il Categoriae decem e i frammenti alcuiniani, un periodo tratto
dal De arithmetica di Boezio che sembra confermare, nell’enfasi posta sul ruolo delle
‘sostanze immutabili’ per la comprensione della verità delle res, il proposito gnoseologico
della prima parte della dialectica: “Est autem sapientia rerum quae sunt suique inmotabi-
lem substantiam sortiuntur comprehensione veritatis. Esse autem illa dicimus quae nec
intentione crescunt nec retractatione minuuntur nec variationibus permotantur sed in
propria semper vi suae se naturae subsidiis nixa custodiunt […]”. MS Pages 1, fol. 28r. Le
poche righe incluse nel MS Pages 1 sono la più antica testimonianza manoscritta del De
arithmetica che ci è giunta, e differiscono leggermente dalla versione riportata nell’edi-
zione critica di riferimento (per la cui compilazione il frammento in oggetto non è stato
collazionato), cfr. Boezio, Anicio Manlio Severino, De arithmetica, I, 1‑2, ed. di H. Oost
hout e J. Schilling, in Anicii Manlii Severini Boethii Opera, 2, CCSL, 94A (Turnhout:
Brepols, 1999), p. 9.8‑14.
17
Alcuino, De dialectica, PL, 101, cols 952A-B.
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
18
OC, Praefatio, p. 99.9‑10.
19
Sul concilio di Hieria si rimanda a una recente monografia in italiano, cfr. E. Fo-
gliandini, L’immagine negata: il concilio di Hieria e la formalizzazione ecclesiale dell’ico-
noclasmo (Milano: Jaca Book, 2013).
20
Nel Levitico l’interdizione è infatti valida solo per gli idola, cfr. Levitico 26, 1
(ma anche Esodo 20, 4, ampiamente utilizzato nel De initio Decalogi di Origene, vedi
nota successiva).
21
OC, Praefatio, p. 99.12‑18 (corsivo mio). Non è azzardato riscontrare in que-
sto passo l’influenza diretta dell’ottava omelia di Origene sull’Esodo: “Longe aliud sunt
idola et aliud dii, sicut ipse nos nihilominus Apostolus docet […]. Aliud ergo est facere
‘idolum’, aliud ‘similitudinem’ […]. Idolum vero fecit ille, qui secundum Apostolum di-
centem quia: ‘idolum nihil est’ (1Corinzi 8, 5), facit quod non est. Quid est autem, quod
non est? Species, quam non vidit oculus, sed ipse sibi animus fingit”. Rufino di Aquile-
ia, De initio Decalogi, 3, Origenis in Exodum homiliae, VIII, ed. di W. A. Baehrens, in
Origenes Werke, 38 vols (Leipzig: J. C. Hinrichs’she Buchhandlung, 1899‑1933), vi, 1:
Homilien zum Hexateuch (1920), Die griechischen christlichen Schriftsteller der ersten
drei Jahrhunderte, 29, pp. 217‑234 (p. 221.16‑17 e 23‑24, p. 222.6‑8). I teologi carolingi
conoscevano certamente questa parte del testo origeniano: sotto Ludovico il Pio il De
initio Decalogi viene infatti lungamente citato proprio in merito alla nuova controversia
sulle immagini dell’825, cfr. Libellus synodalis Parisiensis, XXI, in Concilia aevi Karo-
lini 742‑842, ed. di A. Weminghoff, 2 vols, MGH, Legum sectio (Hannover, Leipzig:
Hahn, 1906‑1908), ii (1908), pp. 480‑532 (pp. 490.27‑491.2). Sul brano di Origene è
imprescindibile la lettura di un saggio di Carlo Ginzburg pubblicato per la prima volta
nel 1994, cfr. C. Ginzburg, “Idoli e immagini: un passo di Origene e la sua fortuna”, in
Occhiacci di legno: nove riflessioni sulla distanza (Milano: Feltrinelli, 1998), pp. 118‑135.
Diego M. Ianiro
22
Cfr. Boezio, Porphyrii Isagoge, IX, 3‑5, in Aristoteles latinus, ed. di L. Minio-
Paluello…, i, 6‑7: Categoriarum supplementa (1966), pp. 1‑31 (p. 15.12‑14); si tratta del
passo in cui Porfirio parafrasa Topica, VI, 6 143b.7‑8 e Metaphysica Z, 12 1037b.29‑30.
Probabilmente contribuisce alla redazione del brano dell’Opus anche il Categoriae de-
cem: l’ambiguità dell’ad aliquid descritta da questa fonte (vedi sotto, nota 71) può aver
consentito la declinazione di una relatio ad seipsum grazie a quella che Giulio d’Onofrio
definisce come una “imprevista compatibilità della relazione con una sostanza unica”:
G. d’Onofrio, Fons scientiae: la dialettica nell’Occidente tardo-antico, Biblioteca Nuovo
Medioevo, 31, 2. ed (Napoli: Liguori, 1986), p. 152. Curiosamente la relazione ad seip-
sum è esattamente il tipo di relatio che secondo il De Trinitate di Boezio si instaura tra le
persone della Trinità; tale prossimità semantica può indurre a considerare due opzioni in
antitesi tra loro: a) è possibile rilevare qui l’influenza di uno degli Opuscula sacra (vedi
sopra, nota 3), evidentemente mal interpretato e distorto, oppure b) è proprio questa la
prova indiretta di come fossero ancora sconosciute, nella primissima fase della specula-
zione carolingia, le questioni sulle diverse possibilità di predicazione poste da Boezio.
23
R. Assunto, La critica d’arte nel pensiero medievale (Milano: il Saggiotore, 1961),
p. 61. Assunto trae una simile conclusione dalle parole stesse del brano citato, in cui si
legge che gli idoli sono fatti esclusivamente “ad miserorum animas sacrilego ritu et vana
superstitione inliciendas” (OC, Praefatio, p. 99.16‑17). Nella riflessione filosofica degli
ultimi anni del secolo scorso il tema dell’assenza nell’idolo di un rimando a un invisi-
bile altro, che si traduce nel brutale imporsi della propria visibilità, è riemerso proprio
a partire dalla differenza dialettica tra eidolon ed eikon proposta nel 1982 da Jean-Luc
Marion nei primi due capitoli della sua opera più celebre, cfr. J.-L. Marion, Dieu sans
l’être, Quadrige, 4. ed (Paris: Presses universitaires de France, 2013). Nonostante la sor-
prendente analogia tra la prospettiva dei teologi carolingi e quella di Marion non è chiaro
se il filosofo francese, che non cita mai i Libri nel testo, abbia potuto trarre ispirazione da
una conoscenza diretta del brano della Praefatio.
24
Cfr. Agostino, Contra Cresconium grammaticum donatistam, II, 16, 19, ed. di
M. Petschening, CSEL, 52 (Leipzig: F. Tempsky, 1909), pp. 325‑582 (p. 378), e cfr. Lei-
drado di Lione, De sacramento baptismi, III, PL, 99, cols 853‑872 (col. 859). La specifica
differentia individuata nell’ad seipsum è una caratteristica intrinsecamente negativa se-
condo il De doctrina christiana, opera largamente utilizzata nei Libri Carolini: l’uomo
che si rivolge solo a se stesso non potrà partecipare, in quanto creatura mutevole, al bene
immutabile della divinità, cfr. Agostino, De doctrina christiana, I, 26‑27, ed. di I. Martin,
Aurelii Augustini Opera (Turnhout: Brepols, 1951-), iv, 1, CCSL, 32 (1962), pp. 1‑167
(p. 17.21‑25).
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
25
OC, I, 2, p. 117.1.
26
Ibid., p. 117.7‑8. La fonte è quasi certamente Isidoro, cfr. Isidoro, Etymologiae,
XIX, 16, 1, ed. di W. M. Lindsay…, ad locum.
27
OC, I, 2, p. 117, 9. Inoltre cfr. K. Mitalaité, “Entre persona et natura: la notion
de personne durant le Haut Moyen Âge”, Revue des sciences philosophiques et théologiques,
89/3‑4 (2005), pp. 459‑484 (p. 482).
28
Cicerone, Marco Tullio, De natura deorum, II, 11, 29, ed. e trad. di M. van
den Bruwaene, 4 vols (Bruxelles: Latomus, 1970‑1986), ii (1978), Collection “Lato-
mus”, 154, pp. 51.30‑55.1. Oltre che da questo brano, il passo dei Libri potrebbe essere
stato influenzato da Agostino, cfr. Agostino, Sermo XLIII, 3, ed. di C. Lambot, Aure-
lii Augustini Opera…, xi, 1: Sermones de vetere testamento (1‑50), CCSL, 41 (1961),
pp. 508‑509.
29
Da un punto di vista disciplinare, in questa prima fase del pensiero carolingio le
quattro arti liberali della physica (quadrivium) hanno come àmbito esclusivo di studio le
res naturae intese come fenomeni sensibili la cui ratio non è oggetto di indagine in quan-
to già implicitamente riconosciuta. Si veda per esempio il testo riportato in uno degli
scholia anonimi all’Ars Poetica di Orazio che gli studiosi fanno risalire all’inizio del nono
secolo: “Et etiam docebo […] quid sit illud quod informat poetam, ut est […] physica,
quae de naturis rerum tractat, in qua continetur quadruvium”. Scholia Vindobonensia ad
Horatii Artem Poeticam, ed. di J. Zechmeister (Wien: apud C. Geroldum filium, 1879),
Diego M. Ianiro
un simile compito solo l’ars dialectica può venire in aiuto grazie agli in-
strumenta categoriarum chiamati aequivoca. 30 L’esempio della distinzione
dell’homo pictus dall’homo verus è la chiave utilizzata nei Libri per spiegare
come sia possibile discernere secundum aequivocorum rationem 31 la falsi-
tà delle realtà rappresentate nelle immagini dalla verità delle res presenti
realmente nella natura: ciò che è pictus non è definibile secondo le stesse
regole che valgono per il suo omonimo reale e verus in quanto tale. 32
Da questo discorso l’immagine esce divisa in due: se quello che rap-
presenta è sempre falso, allora l’unica verità esperibile in essa è la sua real-
tà materiale, il supporto sul quale l’immagine stessa è impressa o i colori
e gli elementi di cui è fatta. 33 Al modo degli ambigua verba della dialetti-
ca agostiniana, le immagini cominciano a mostrare, da res artificiali quali
sono, una curiosa ambiguitas ontologica che le rende false per un verso e
vere per un altro. In entrambi i casi non è possibile attribuire loro alcuna
santità, giacché ciò che è falso non può essere santo, 34 né può esservi san-
tità nella materia inerte modellata dall’arbitrio umano. 35 Dal punto di
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
nelle Scritture, come accade di norma per le res sacratae, cfr. C. Chazelle, “Matter, Spirit,
and Image in the Libri Carolini”, Recherches augustiniennes, 21 (1986), pp. 163‑184.
36
OC, I, 7, p. 138.2‑3, sul calco di ad imaginem et similitudinem nostram (Genesi
1, 26) e et creavit Deus hominem ad imaginem suam (Genesi 1, 27). L’utilizzo dell’ada-
gio biblico fu ovviamente uno dei cavalli di battaglia delle fazioni iconodule: a Nicea
lo si usò per sottolineare come l’immagine fosse il medium privilegiato da Dio per con-
ferire all’uomo una dignitas speciale, cfr. Synodus Nicaena Secunda Generalis Septima,
Actio VI, ed. di J. D. Mansi, Sacrorum Conciliorum nova et amplissima collectio, 53 vols
(Firenze: apud A. Zatta, 1767), xiii, col. 214 E.
37
Cfr. OC, I, 7, p. 138.11‑13.
38
OC, I, 7, p. 138.13‑14.
39
Il concetto di homo interior nel contesto di Genesi 1, 26 è tratto da una quaestio
di Agostino intitolata De homine facto ad imaginem et similitudinem Dei (vedi anche sot-
to, nota 44), cfr. Agostino, De diversis quaestionibus LXXXIII, LI, 1, ed. di A. Mutzen
becher, Aurelii Augustini Opera…, xii, 2 (1975), CCSL, 44 A, pp. 11‑249 (p. 78.2‑7)
(riportato interamente, con alcune varianti, nel capitolo in questione, cfr. OC, I, 7,
p. 140.17‑26).
40
Cfr. OC, I, 7, p. 144.18‑24. Se non fosse così, Dio stesso si ridurrebbe a qualcosa
di corporeo, cfr. ibid., p. 145, 5‑11.
Diego M. Ianiro
la similitudo con Dio, dal momento che quanto più si procede sulla stra-
da della dottrina cristiana tanto più si può accrescere tale somiglianza. 41
Questa traslazione spirituale del livello d’indagine disposta nel settimo
capitolo del primo libro dell’opera – che a sua volta costituisce la parte
più rilevante del testo conosciuto come Dicta Albini de imagine Dei 42 – è
una rielaborazione sintetica di temi e concetti tratti dal De statu animae
di Claudiano Mamerto e dal De immortalitate animae di Agostino nel
contesto trinitario di matrice agostiniana che informava l’intera cultura
teologica dei dotti di corte. 43 Con essa i filosofi di Carlo hanno aggirato
un ostacolo di ordine metafisico senza dover alterare le conclusioni rag-
giunte dalla dialettica in merito alla natura dell’immagine come res.
Tuttavia si pone un problema ulteriore: l’imago e la similtudo di Genesi
1, 26 sono in rapporto tra loro anche nell’ordine delle res corporeae. La
questione è piuttosto delicata e viene affrontata nel capitolo successivo
ricorrendo nuovamente all’indagatio rationalis. Per esaminarla nel detta-
glio occorre soffermarsi su alcune osservazioni preliminari: il capitolo che
include l’indagatio spiritalis appena illustrata (OC, I, 7) è in realtà, nelle
intenzioni del suo autore, la prima parte di un dittico che si conclude nel
capitolo successivo (OC, I, 8) portando a compimento la determinazione
ontologica dell’imago. La struttura stessa dei due capitoli sembra infatti
suggerire una certa omogeneità: entrambi sono edificati quasi interamen-
te su una quaestio tratta dal De diversis quaestionibus LXXXIII di Agostino
ed entrambi affrontano il problema del rapporto tra similitudo e imago. 44
Ma il modo di procedere del primo (indagatio spiritalis/res incorporeae) è
speculare a quello del secondo (indagatio rationalis/res corporeae), come se
l’intera sezione OC, I, 7‑8 fosse stata progettata per costituire un unicum
volto a dirimere ogni dubbio sull’imago sia sul piano delle realtà invisibili
41
OC, I, 7, p. 140.3‑5.
42
Vedi sopra, nota 11.
43
Le stesse tematiche sono riscontrabili nel De animae ratione di Alcuino.
44
In OC, I, 7 un lungo estratto della Quaestio LI è agganciato al Dicta Albini pro-
seguendone il discorso senza soluzione di continuità; tale excerptum occupa la metà
dell’intero capitolo: 121 righe su un totale di 224 nell’edizione di riferimento, cfr. ibid.,
pp. 140‑144. Si riscontra esattamente la stessa cosa nel capitolo I, 8: l’estratto della Qua-
estio LXXIV occupa 41 righe su un totale di 92, e prosegue l’indagatio rationalis allo
stesso modo in cui la Quaestio LI succede all’indagatio spiritalis in OC, I, 7, cfr. ibid., I, 8,
pp. 146‑148. La fortuna del De diversis quaestionibus in età carolingia è riscontrabile nel-
la sua frequenza d’uso: nei Libri è il lavoro agostiniano più direttamente citato e Alcuino
stesso se ne serve a più riprese nelle sue opere, cfr. L. Wallach, Diplomatic Studies…, p. 62.
Ciò è probabilmente dovuto alla natura stessa del testo, che compendia una serie di solu-
zioni a problemi specifici di argomento filosofico.
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
45
Su quest’aspetto della relazione tra i due capitoli cfr. K. Mitalaité, Philosophie et
théologie…, p. 116.
46
OC, I, 8, pp. 145.17‑146.2.
Diego M. Ianiro
Haec ergo tria distinguenda sunt, quia omne, quod imago est, similitudo
est, non tamen omne, quod similitudo, imago est, et cum imago num-
quam similitudine careat, similitudo vero multoties imagine careat, ple-
rumque et similitudo et imago aequalitate carere noscuntur. Quae etiam
aequalitas nonnumquam et imagini et similitudini copulari potest. 50
47
A questo titolo è interessante la notazione marginale a OC, I, 8 che si trova nel
manoscritto più antico: l’anonimo commentatore segna syllogistice (avverbio che non
occorre mai nell’Opus) proprio in corrispondenza dell’inizio dell’indagatio rationalis
che scompone e ricombina i termini della Quaestio LXXIV di Agostino, cfr. MS Città
del Vaticano, Biblioteca Apostolica Vaticana, Vat. Lat. 7207, fol. 22v. È un dettaglio che
potrebbe indicare l’avvenuta comprensione, da parte del revisore del testo, della raffinata
manipolazione condotta sull’auctoritas grazie a un uso sperimentale e innovativo della
dialettica. Se per Freeman si tratterebbe di note d’approvazione la cui origine andreb-
be rintracciata nella volontà dello stesso Carlo (cfr. A. Freeman, “Einleitung”, in OC,
pp. 49‑50), non è escluso che esse possano esprimere un altro tipo di valutazione, quella
dell’eventuale destinatario diretto del testo. Per esempio lo stesso Adriano, che pure sem-
bra avere un certo “goût pour la dialectique” (cfr. K. Mitalaité, Philosophie et théologie…,
p. 116, nota 109), si accorse della novitas rappresentata da OC, I, 8: lo si può dedurre dal
modo in cui ne biasima la presunta utilità e ne denuncia il danno citando dal De fide di
Ambrogio, cfr. Papa Adriano I, Responsum [sectio prima], 49, in MGH, Epistolae aevi
Karolini, ed. di W. Gundlach, E. Dümmler, E. Perels, 5 vols (Berlin: Weidmann, 1892-),
v, ed. di K. Hampe (1899), pp. 5‑57 (p. 37.16‑25). Va ricordato che solo pochi anni pri-
ma (785) fu proprio Adriano, nella lettera inviata al patriarca Tarasio per confermare la
sua partecipazione al nuovo concilio ecumenico, a ordinare di ricusare il sinodo di Hieria
perché insyllogistice factus est: Epistula ad Tarasium, ed. di E. Lambertz, Concilium Uni-
versale Nicaenum Secundum, in ACO, Series secunda, III, 3 vols (Berlin: W. de Gruyter,
2008‑2016), pars 1: Concilii actiones I‑III, pp. 174‑221 (p. 183.10‑11).
48
Mitalaité ha il grande merito di essere stata la prima studiosa ad accorgersi delle
finalità per cui sono state apportate delle modifiche sostanziali al testo agostiniano, se-
gnalandone puntualmente le modalità in una delle parti più dense della sua monografia,
cfr. K. Mitalaité, Philosophie et théologie…, pp. 116‑120 (vedi anche sotto, nota 84).
49
Cfr. Agostino, De diversis quaestionibus LXXXIII, LXXIV, ed. di A. Mutzen
becher…, p. 213.5‑23. La tecnica con cui viene sviluppata, da parte dell’autore di OC, I,
8, la scomposizione e ricombinazione di questo testo è tanto affascinante quanto laborio-
sa e merita una trattazione dettagliata che esula dagli scopi del presente contributo.
50
OC, I, 8, p. 146.2‑10.
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
51
Agostino, De diversis quaestionibus LXXXIII, LXXIV, ed. di A. Mutzen
becher…, p. 213.5‑6 e 14‑17.
52
OC, I, 8, p. 146, 10‑13. Il nome relatio dato alla quarta categoria, resa con ad
aliquid sia nel Categoriae decem che nel De dialectica di Alcuino, è tratto da Isidoro: “Re-
latio est, quae refertur ad aliquid”. Isidoro, Etymologiae, II, 26, 7, ed. di W. M. Lindsay…,
ad locum.
53
Per il Categoriae decem: “‘Ad-aliquid’ ergo categoriam vocamus eam quae id
quod est dicitur ex altero sine cuius societate esse non possit et cuius vis omnis ex alterius
coniunctione descendit […]. Claret igitur ad-aliquid non sua vi sed alterius coniunctione
consistere”. Paraphrasis Themistiana, 95, ed. di L. Minio-Paluello…, p. 154.16‑21.
54
Al rapporto genere/specie di similitudo e imago ha accennato di recente anche
Francesco Paparella: F. Paparella, Imago et verbum: filosofia dell’immagine nell’alto me-
dioevo (Milano: Mimesis, 2011), p. 125.
55
Dal momento che, come dice Agostino, a) dove c’è uguaglianza non c’è imma-
gne, b) ciò che è simile non per forza è uguale mentre ciò che è uguale è necessariamente
anche simile: “Ubi aequalitas, continuo similitudo, non continuo imago, velut in duobus
ovis paribus, quia inest aequalitas, inest et similitudo”. Agostino, De diversis quaestionibus
LXXXIII, LXXIV, ed. di A. Mutzenbecher…, p. 213.14‑16, e OC, I, 8, p. 147.7‑9.
Diego M. Ianiro
56
Vedi sopra, nota 30.
57
Nel manoscritto di Leidrado – che come si è detto ospita il testimone più antico
del Categoriae decem – eikon è traslitterato con Icon, cfr. MS Pages 1, fol. 12v. La stessa forma
icon si trova nella più antica tradizione manoscritta del De dialectica di Alcuino, per esem-
pio cfr. MS Clm 6407, fol. 48v. In realtà tale traslitterazione non presenta alcuna partico-
larità degna di nota, eppure è difficile credere che i filosofi di Carlo non fossero al corrente
della corrispondenza latina di eikon con il termine imago: nella versione latina degli atti
del Niceno Secondo, infatti, imago e icon sono utilizzati indistintamente. Sulle traduzioni
latine di eikon cfr. A. Vasiliu, Eikôn: l’image dans le discours des trois Cappadociens (Paris:
Presses universitaires de France, 2010), p. 172 (e relativa bibliografia, cfr. ibid., nota 3).
58
Paraphrasis Themistiana, 17‑18, ed. di L. Minio-Paluello…, pp. 136.30‑137.4. Il
passo è riportato con pochissime varianti nel De dialectica, cfr. Alcuino, De dialectica, III,
PL, 101, col. 955D.
59
Ciò è in qualche modo coerente con quanto detto nell’Isagoge a proposito delle
caratteristiche comuni e delle differenze tra propria e differentiae, cfr. Boezio, Porphyrii
Isagoge, XIX, 5‑15, ed. di L. Minio-Paluello…, pp. 28.10‑29.2.
60
OC, I, 8, p. 146, 13‑20.
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
61
La monografia di Mitalaité è il primo (e allo stato attuale unico) contributo pub-
blicato nel quale il brano in questione viene dettagliatamente esaminato, cfr. K. Mitalaité,
Philosophie et théologie…, p. 117 (vedi anche sopra, nota 48). Precedentemente questo pe-
riodo è stato trattato con il dovuto rilievo in poche altre occasioni: per esempio è preso
come indicatore privilegiato della riflessione dell’Opus relativa alle immagini in un saggio
di Pierre Drogi, cfr. P. Drogi, Le Cantique déguisé: image et folie dans Aucassin et Nicolette
(Orléans: P. Drogi, 1997), pp. 154‑156. Tuttavia il contesto in cui esso è inserito nel testo
di Drogi non riguarda i Libri Carolini in modo specifico: la citazione è infatti funzionale a
un discorso più ampio relativo ai presupposti ideologici di un’opera letteraria (cosiddetta
chantefable) di almeno quattro secoli posteriore all’Opus. Un lavoro più recente, opera
dell’archimandrita rumeno Cornel Dârle, pone in evidenza il passo come esempio concre-
to dell’applicazione dell’ars dialectica nella filosofia cristiana altomedievale, cfr. C. Dârle,
“Sacramentalitatea între neoplatonism şi dialecticǎ: de la Origen la Ioan Scot Eriugena”,
Studia Universitatis Babeş-Bolyai: theologia graeco-catholica Varadiensis, 48/1 (2003),
pp. 11‑24 (p. 17). Wallach se ne è occupato in un articolo del 1966, ma con l’acribia del
filologo volto esclusivamente a rilevare le parti di OC, I, 8 debitrici del Categoriae decem
e dell’operato di Alcuino, cfr. L. Wallach, Diplomatic Studies…, pp. 65‑66. L’ultimo con-
tributo, in ordine di tempo, in cui è stato individuato il valore fondativo del brano per
la definizione ontologica dell’immagine nei Libri è quello di Paparella, cfr. F. Paparella,
Imago et verbum…, p. 125; l’autore aveva già illustrato tale riflessione in un intervento del
2007, pubblicato solo successivamente, cfr. “Natura e valore dell’immagine: la relazione
tra segno iconico e significazione traslata nella cultura carolingia: il caso dei Libri Caroli-
ni”, in Universalità della ragione: pluralità delle filosofie nel Medioevo. Atti del XII Congresso
Internazionale di Filosofia Medievale, Palermo, 16‑22 settembre 2007, ed. di G. Musco et al.,
3 vols (Palermo: Officina di studi medievali, 2012), iii, pp. 309‑315 (p. 312).
62
Il termine subsistentia è infatti piuttosto raro nell’Opus: ricorre solo altre due vol-
te e sempre nel contesto delle formulazioni trinitarie, cfr. OC, III, 1, e III, 5, p. 337.6 e
p. 354.6 e 21‑22; su questo aspetto particolare cfr. K. Mitalaité, “Mutations et développ-
ement de la notion de natura dans la théologie et la philosophie carolingiennes (VIIIe‑IXe
siècles)”, in Natura: XII Colloquio Internazionale. Atti del colloquio, Roma, 4‑6 gennaio
2007, ed. di D. Giovannozzi, M. Veneziani (Firenze: L. Olschki, 2008), pp. 61‑82 (p. 67 e
nota 40). Le occorrenze di substantia sono invece molto numerose in tutti e quattro i libri.
Diego M. Ianiro
in tale forma il termine è stato tràdito fino al 1924, 63 anno della prima
edizione critica moderna. Da allora la lectio scelta per il testo è quella del
testimone più antico, conservato in Vaticano e ritenuto la working copy
dell’opera, in cui è scritto subsistentia; sia Hubert Bastgen che Ann Free-
man hanno adottato questa forma, ritenendola più corretta. 64 Confron-
tando i folia dei due manoscritti (figg. 1 e 2) appare infatti chiaro che nel
secondo, derivato direttamente dal primo o da una ipotetica copia di es-
so, 65 substantia sostituisce l’originale subsistentia verosimilmente perché
ritenuto più corretto dal copista della generazione di Carlo il Calvo.
Per capire cosa può aver portato l’autore del brano in oggetto a uti-
lizzare subsistentia occorre provare a individuare le fonti che sono state
presumibilmente adoperate: una di queste – come già accennato sopra
– è senza dubbio il Categoriae decem, che informa anche altre parti di
OC, I, 8. 66 In particolare è proprio il passo in cui si definisce la substan-
tia (usia) 67 che non muta rispetto agli accidenti separabili e mutevoli a
richiamare il tema di ciò che è in sua subsistentia permanens: 68
63
Vale a dire dall’editio princeps del 1549 all’edizione Goldast (1608) riportata
integralmente in Patrologia Latina nel 1851, dove infatti si legge substantia, cfr. Libri
Carolini-Capitulare de imaginibus, PL, 98, cols 941‑1350 (col. 1026A).
64
Cfr. Libri Carolini sive Caroli Magni Capitulare de imaginibus, ed. di H. Bastgen,
MGH, Legum sectio, 3, Concilia, 2, Supplementum (Hannover: Hahn, 1924), p. 25.20.
L’edizione Freeman, condotta con criteri diplomatici, riporta s[ubsisten-]tia, segnalan-
dolo in nota come una svista del copista (schreiberversehen), cfr. OC, I, 8, p. 146.15‑16 e
nota d.
65
Il MS Arsenal 663 è della seconda metà del nono secolo, mentre il MS Vat. lat.
7207, sul quale Freeman ha condotto approfondite ricerche codicologiche, non può esse-
re successivo al 794. Entrambi sono gli unici testimoni manoscritti dell’Opus giunti fino
a noi, oltre a un singolo folium appartenente a un terzo codice andato perduto.
66
Si confrontino per esempio le due frasi immediatamente successive con la fine
della sezione sui relativi del Categoriae decem, cfr. OC, I, 8, p. 146.20‑24, e cfr. Paraphra-
sis Themistiana, VII, 104 e 110, ed. di L. Minio-Paluello…, p. 157.6‑9 e p. 158.24‑29.
67
Alcuino, nell’includere il passaggio del Categoriae decem nel suo De dialectica,
traduce ousia con substantia, inserendosi in una tradizione già consolidata, nell’Occidente
latino, da Isidoro e dai dibattiti trinitari, cfr. Alcuino, De dialectica, III, PL, 101, 956C-D.
68
Si vedano in proposito anche le glosse al Categoriae decem pubblicate da
Marenbon: “In permanente usia, id est quae permanent dum mutantur eius accidentia”.
In permanente usia, in J. Marenbon, From the Circle…, p. 187.
69
Paraphrasis Themistiana, 29, ed. di L. Minio-Paluello…, p. 140.1‑6 (corsivo mio).
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
Usia autem substantia est, id est proprium, quae ceteris subiacet; reliqua
novem accidentia sunt. Substantia autem dicitur ab eo, quod omnis res
ad se ipsam subsistit. Corpus enim subsistit, et ideo substantia est. Illa
vero accidentia, quae in subsistente atque subiecto sunt, substantiae non
sunt, quia non subsistunt, sed mutantur; sicut color vel forma. De su-
biecto autem et in subiecto quasi de ipso et in ipso. Ubi enim dicitur de
subiecto, substantia est, quasi dicatur de substantia. […] Ex his novem
accidentibus […] intra et extra usiam sunt relatio, facere et pati. 70
70
Isidoro, Etymologiae, II, 26, 11‑13, ed. di W. M. Lindsay…, ad locum.
71
Oltre al capitolo sulle categorie delle Etymologiae solo un altro testo, nell’intero
corpus dialettico medievale, mostra lo stesso raggruppamento intercategoriale di relatio,
facere et pati, ovvero di ciò che può essere predicato et intra et extra usian: il Categoriae de-
cem, cfr. Paraphrasis Themistiana, 52‑54, ed. di L. Minio-Paluello…, p. 144.21‑30. In tale
sede i tre accidenti vengono etichettati come communia; la trattazione più dettagliata
presente nel Categorie decem induce a credere che proprio quest’ultimo – direttamente o
indirettamente – sia la fonte della sintesi di Isidoro, cfr. G. d’Onofrio, Fons scientiae…,
pp. 173‑174.
Diego M. Ianiro
per sé come nomina. 72 Ciò non vale a dire che il concetto di subsistentia
sia stato direttamente inferito dall’uso isidoriano del verbo subsistere nel
contesto delle Categorie, tuttavia è innegabile che le Etymologiae poteva-
no fornire uno strumento adeguato per precisare, fuori dalla substantia,
la specifica dimensione ontologica di similitudo e aequalitas.
Il termine subsistentia era comunque noto agli autori della prima ge-
nerazione carolingia: le sue occorrenze sono piuttosto numerose nelle
opere di Alcuino, in particolare in una lettera ad Arnone di Salisburgo
scritta proprio per chiarire la differenza tra substantia, essentia e subsi-
stentia. Come si legge nella lettera: “Quod vero me interrogare vestram
sanctitatem placuit, quid sit inter substantiam, essentiam et subsisten-
tiam?” 73 Il quadro di riferimento entro il quale vengono definiti i tre ter-
mini è però sempre vincolato ai dibattiti di teologia trinitaria, e Alcuino
sembra limitarsi, per ciò che riguarda la subsistentia, a riportare quanto
detto da Girolamo in una lettera a papa Damaso: meglio tradurre hypo-
stasis con persona e non con subsistentia. 74 Quelle di Alcuino non sono
72
Qualche anno dopo la redazione del De dialectica, Alcuino scrive, sul calco di
Prisciano (Institutiones grammaticae, II.18), che i nomina possono solo significare la sub-
stantia: “Proprium nominis est substantiam […] significare”. Alcuino, De grammatica,
PL, 101, cols 849‑902 (col. 858D).
73
Alcuino, Epistolae, 268, Epistolae Karolini aevi…, ii, ed. di E. Dümmler (1895),
p. 426.30‑31).
74
Cfr. ibid., p. 427, 3‑4. Su questo punto si è espressa in modo approfondito Mita-
laité, cfr. K. Mitalaité, “Mutations et développement…”, pp. 65‑68. L’autrice nota inoltre
che Teodulfo, al contrario di Alcuino, non utilizza mai il termine, scartandolo con co-
gnizione di causa: per esempio, nell’utilizzare alcune citazioni di Giovanni Crisostomo,
sostituisce subsistentia con persona, cfr. ibid., pp. 68‑69 sulla scorta di quanto rilevato
da Raffaele Savigni, cfr. R. Savigni, “Le commentaire d’Alcuin sur l’Épître aux Hébreux
et le thème du sacrifice”, in Alcuin: De York à Tours. Écriture, pouvoir et réseaux dans
l’Europe du Haut Moyen Âge, ed. di P. Depreux e B. Judic, Annales de Bretagne et des
Pays de l’Ouest, 111/3 (Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2004), pp. 245‑267
(p. 254). È importante precisare che Mitalaité, non mettendo in alcun modo in dubbio
l’attribuzione a Teodulfo dei Libri, segue in parte Freeman nel considerare le occorrenze
di subsistentia nell’opera come l’esito di una correzione successiva. A conferma di un’as-
senza del termine non dettata dal caso ma da una scelta consapevole e ben meditata del
vescovo d’Orléans è sufficiente confrontare le citazioni di alcuni passaggi di Cirillo di
Alessandria, provenienti da una traduzione latina nota sia a Teodulfo che ad Alcuino,
in cui è presente il termine subsistentia. In un testo redatto nel contesto del Concilio di
Aquisgrana (809) e un tempo attribuito al maestro di York come Libellus de processione
spiritus sancti tali passaggi sono riportati come segue, mantenendo inalterato il termine:
“Beatus igitur Cyrillus in praedicta canonica epistola, quam ad Nestorium conscripsit,
Spiritum sanctum a Patre et Filio procedere testatur dicens: ‘Quamvis est in subsistentia
Spiritus speciali – nam et intelligitur per se secundum quod Spiritus est et non Filius –
sed tamen non est alienus ab eo […] Quamvis enim est in subsistentia specialis Spiritus
– et intelligitur separatim secundum quod Spiritus est et non est Filius – sed tamen non
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
Substantia vero commune est nomen omnium rerum quae sunt: cae-
lum, sol, luna, terra, arbores, herbae, animalia viventa quaeque, homines
etiam, substantiae dicuntur: nam, quod nulla substantia est, nihil omni-
no est, substantia ergo aliquid esse est. 75
Diego M. Ianiro
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
Diego M. Ianiro
Omnis imago similis est ei cuius imago est; nec tamen omne quod simile
est alicui, etiam imago est eius: sicut in speculo et pictura, quia imagines
sunt, etiam similes sunt; tamen si alter ex altero natus non est, nullus
eorum imago alterius dici potest. Imago enim tunc est, cum de aliquo
exprimitur. 83
cuilibet et magis simile et minus simile possumus dicere. Sed hoc non in omnibus, ut
dixi, quae sunt ad-aliquid poterit inveniri; namque nec magis pater nec minus pater dici
potest, nec minus filius aut magis filius, nec minus duplum aut magis duplum”. Paraphra-
sis Themistiana, VII, 110, ed. di L. Minio-Paluello…, p. 158.24‑30.
81
Agostino, De diversis quaestionibus LXXXIII, LXXIV, ed. di A. Mutzenbe-
cher…, p. 213.12.
82
“Ut in speculo est imago hominis; quia de illo expressa est […] imago tamen non
est, quia neutrum de altero expressum est […] nec imago tamen eius est, quia non de illo
expressum est”. Ibid., pp. 213‑214.15‑20.
83
Agostino, De Genesi ad litteram imperfectus liber, 16, 57, ed. di J. Zycha, Aure-
lii Augustini opera…, 3,1, CSEL, 28,1 (Wien, Leipzig: F. Tempsky, 1894), pp. 457‑503
(p. 498.4‑5). Su questo punto cfr. F. Paparella, Imago et verbum…, p. 124, nota 18. La
peculiare caratteristica dell’immagine descritta nel Liber imperfectus è affermata più vol-
te da Agostino anche nel contesto ermeneutico del dodicesimo libro del De Genesi ad
litteram.
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
stesse res a tutti gli effetti, sono expressae da altro nella loro substan-
tia. Vale a dire, nel vocabolario concettuale del Categoriae decem, che
nelle immagini ousia e ad aliquid, sostanza e relazione, aderiscono e
combaciano in maniera completa. La distanza ontologica tra la species
immagine, la species uguaglianza e il genus somiglianza, edificata por-
tando al limite della contraddizione logica il valore euristico di quelle
sezioni dell’ars dialectica disponibili negli armaria di corte, è ciò che ha
reso necessario al redattore di OC, I, 8 la manipolazione consapevole
delle parole dell’auctoritas agostiniana al termine dell’indagatio ratio-
nalis. Come accadeva nel capitolo precedente (OC, I, 7), il testo della
Quaestio di Agostino viene ricopiato verbatim al fine di delucidare e
integrare le argomentazioni appena esposte: tuttavia, laddove la Qua-
estio recita “ubi imago continuo similitudo, non continuo aequalitas”,
nei Libri Carolini si legge “ubi imago non continuo similitudo, non
continuo aequalitas”. 84 L’aggiunta del non è senza dubbio intenzionale;
con essa i redattori dell’opera contro il Niceno Secondo marcano un
confine netto tra la substantia dell’immagine e la subsistentia di simili-
tudo e aequalitas.
Grazie all’ottavo capitolo del primo libro si è infine giunti, attra-
verso una serrata strategia di individuazione condotta nell’àmbito
delle Categoriae, alla determinazione ontologica dell’immagine: la sua
ousia non solo dipende integralmente dalla relazione che instaura con
ciò da cui prende forma, ma è essa stessa tale relazione. In riferimento
a siffatto esito speculativo Ioan Pânzaru scrisse “l’image est un objet
relatif ”, 85 centrando in pieno il concetto sul quale si fonda e dal quale
dipende la riflessione sull’imago negli altri capitoli dei Libri Caroli-
ni. Le immagini riprodotte nelle opere degli artisti, le immagini arti-
ficiali, sono res creatae dalla natura imperfetta in quanto dipendono
ontologicamente da ciò che rappresentano, pur non mantenendo con
84
OC, I, 8, p. 146, 29‑30. Come già accennato in precedenza (vedi sopra, nota 48)
Mitalaité ha il primato di aver valutato questa modifica nel quadro di una manipolazione
intenzionale, senza quindi ridurla a svista involontaria, cfr. K. Mitalaité, Philosophie et
théologie…, pp. 120‑121. Tale passaggio è in effetti un efficace indicatore di come sia stata
scarsamente, o per nulla, compresa la facoltà poietica e inventiva dei filosofi della prima
generazione carolingia: nell’edizione critica dell’Opus curata da Bastgen, per esempio,
sono riportate nel testo le esatte parole di Agostino (“ubi imago continuo similitudo,
non continuo aequalitas”), indicando solo in nota l’aggiunta del non, evidentemen-
te ritenuto come un banale errore del copista, cfr. Libri Carolini, ed. di H. Bastgen…,
p. 25.27 (e nota d).
85
I. Pânzaru, “Sémiotique et eicastique médiévales”, S: European Journal for Semi-
otic Studies, 2.2 (1990), pp. 275‑285 (p. 279).
Diego M. Ianiro
86
Infatti la correlazione è a senso unico: come insegna Agostino è l’immagine a
raffigurare qualcosa, mentre è inconcepibile il contrario, cfr. Agostino, De Trinitate, VI,
10, 11, ed di W. J. Mountain e F. Glorie, Aurelii Augustini Opera…, xvi: De Trinitate
Libri XV, 1, Libri I‑XII, CCSL, 50 (1968), p. 241.
87
Se ne parla in alcuni tra i momenti più celebri dei Libri Carolini, per esempio
cfr. OC, IV, 16, pp. 528.41‑529.8. Sull’impossibilità di utilizzare le immagini al posto
della scrittura per la trasmissione di conoscenze, cfr. OC, II, 30, p. 304.13‑16.
88
Questi tre aggettivi ricorrono continuamente, nel corso dell’Opus, a qualificare
la res immagine, per esempio: “res insensatas […] res vero ambiguas aut certe inutiles”.
OC, III, 11 e 12, pp. 377.13 e 380.8‑9
89
Inutilità a più riprese ribadita nel corso dell’Opus, per esempio: “[…] cum sit
inutile, inutiliter ad rem inutilem, ad imaginum videlicet adorationem”. OC, III, 19,
p. 423.3‑5, e: “[…] sed ad nescio quam adorandarum imaginum picturam, quae nimirum
tanto inutilis est, quanto minus suae utilitatis efficaciam potest loquendo edicere”. OC,
I, 14, p. 167.20‑23. È fondamentale qui ribadire che tale inutilitas non impedisce alle
immagini, accompagnate da oppurtune didascalie, non solo di essere un supporto alla
memoria del credente per le res gestae – scritturali e non – a lui già note, ma anche di
servire ad abbellire le pareti dei luoghi di culto: “Nos nihil in imaginibus spernamus
praeter adorationem, quippe qui in basilicis sanctorum imagines non ad adorandum, sed
ad memoriam rerum gestarum et venustatem parietum habere permittimus”. OC, III, 16,
p. 411.3‑7. I redattori dei Libri riconoscono quindi alle immagini anche una valenza e
una funzione estetica, argomento molto battuto in letteratura che però esula dagli scopi
del presente contributo.
L’IMMAGINE ARTIFICALE NEI LIBRI CAROLINI
90
Per Rabano l’utilità e la sensatezza della scrittura emergono proprio dal con-
fronto con le immagini, come viene esplicitamente teorizzato in un carmen dedicato
ad Attone, suo successore all’abbazia di Fulda: “Nam pictura tibi cum omni sit gratior
arte,/scribendi ingrate non spernas posco laborem. /Psallendi nisum, studium curam-
que legendi,/plus quia gramma valet quam vana in imagine forma,/plusque animae
decoris praestat quam falsa colorum/pictura ostentans rerum non rite figuras./Nam
scriptura pia norma est perfecta salutis,/et magis in rebus valet, et magis utilis omni est,/
promptior est gustu, sensu perfectior atque/sensibus humanis, facilis magis arte tenenda.
[…]/Haec facie verum monstrat, et famine verum,/et sensu verum, iucunda et tempore
multo est,/illa […]/deficiet propere veri et non fide sequestra est”. Rabano Mauro, Car-
mina, 38, ed. di E. Dümmler, in Poetae Latini aevi Carolini…, ii, ed. di E. Dümmler
(1884), pp. 154‑213 (p. 196.1‑16); per i dettagli del testo qui riportato cfr. F. Stella,
“Mito del libro e poesia libraria in età carolingia”, CentoPagine, 4 (2010), pp. 147‑165
(p. 154).
91
Nei toni utilizzati contra le immagini, Agobardo e Claudio si pongono rispet-
tivamente ai due estremi dell’Opus: il primo è più moderato mentre il secondo arriva a
spingersi – unico nella storia della teologia cristiana – verso una forma radicale di inter-
dizione che propone persino la stauroclastia. In comune con i Libri Carolini hanno en-
trambi la percezione dell’imperfezione sostanziale delle immagini, cfr. Agobardo di Lio-
ne: “Certe si adorandi fuissent homines, vivi magis quam picti, id est ubi similitudinem
habent Dei, non ubi peccorum, vel, quod verius est, lapidum sive lignorum, vita, sensu et
ratione carentium”. De picturis et imaginibus, 28, ed. di L. van Acker, Agobardi Lugdunen-
sis Opera Omnia, CCCM, 52 (Turnhout: Brepols, 1981), pp. 151‑181 (p. 177.12‑14) e:
“Quid te in lapsum mortis cum insensata imagine quam colis sternit?” Claudio di Tori-
no, Apologeticum atque rescriptum adversus Theutmirum abbatem, in Epistolae Karolini
aevi…, iv, ed. di E. Dümmler, pp. 610‑613 (p. 611.24).
Diego M. Ianiro
Francesco Paparella
1
John Scotus Eriugena, Periphyseon, Liber primus, ed. by E. Jeauneau, CCCM
161 (Turnhout: Brepols, 1996), p. 9.170.
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 285-306
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111934
Francesco Paparella
IMAGE THEORY, POLITICAL CLASH AND ONTOLOGY
realities; only superior causes truly exist, while material realities, such as
the bodies in their spatio-temporal determination, are not authentic res
substantiales with ontological consistency (vere que existens). Such reali-
ties, therefore, have to be considered in the same way as an echo or as an
image of the voice (vox eius que imago), or as shadows of the bodies that
can be created on the water or in the air.
The imagines, as an ontological condition of determined realities,
have a diminished and imperfect ontological status; the physical world
as an image of the spiritual one is just a similitudo of the true being and
does not exist by itself, while all time and space determinations, individ-
ual species and concrete attributes are destined to disappear, in a return
to God and to a condition of authentic spirituality. The physical reality,
however, as a weakened imago of the celestial substantiae, represents the
instrument through which these realities can be known. Images appear
as the conceptual tools defining the relationship between different lev-
els of the whole: the material world is an echo and a reflection of the
superior one, comparable to reflected images, even if no bond of iconic
nature exists between Cause and effect. A passage of Periphyseon’s third
book is exemplary in this respect. 4 The Palatine master, discussing the
nature of primordial causes and of the highest created realities, notes
that they do not possess any ordo specialis per se; such a doctrine entails
that the supreme principles of reality are not organized in any particular
hierarchical order and cannot be divided from one another according to
a number, even if they are the spring of all ordines and all numbers and
even if they maintain a close relationships among themselves as well as
with inferior realities.
Such a characteristic condition of primordial causes is a direct conse-
quence of the ontological status of that reality. Being a part of the highest
levels of nature implies that such a principium rerum is characterized by
the utmost simplicity and a lack of difference, close to the absolute unity
of the divine Cause of the Whole; the distinction between determina-
tion and determination and the organization of differences in a hierar-
chical system (numerare, discernere, multiplicare, ordinare) implies the
existence of a multiplicity that contradicts the simplicity of such causes.
The articulation of prime principles according to a hierarchical sys-
tem is only possible within the theophanic manifestations where the
inexpressible res comes into dialogue with the cognitive operation of
Francesco Paparella
the subject; only in this way can primordial causes be divided and mul-
tiplied. Therefore, the introduction of an organized distinction among
superior realities depends upon two clearly identifiable factors: the
cognitive act of the created mind with its necessity for articulation ac-
cording to ordo and numerus and the organization of original dynamis
in an inferior henological condition, both effects of the same unfolding
movement of the Divine One resulting in the appearance of differences.
The created thought (theoricus animus), with an intellectual operation,
introduces diversos atque multiplices ordines in what was formerly com-
pletely simple.
However, according to Eriugena, this transformation and articula-
tion process becomes possible, per quasdam imaginationes verisimiles, in
other words, because images are endowed with a degree of authenticity;
the theophanic manifestation and its organization secundum ordinem et
numerum, is thus achieved through morphopoietic activity, that is to say
through the creation of an imago as “translation” of the being and power
of superior transcendent realities into a henological status of major frag-
mentation and difference. Imaginatio and imago, therefore, define the
condition of res in the inferior stages of cosmic hierarchy; every reality
that descends from and depends upon a superior cause is its imago, that
is to say, a re-organization of its dynamis into a condition of greater dif-
ferentiation.
IMAGE THEORY, POLITICAL CLASH AND ONTOLOGY
5
This paper does not aim to provide a complete analysis of these two terms. As
regards the notion of mimesis it would suffice to refer to Plato’s Respublica, V.471c-473b;
VI.484a-485a: mimesis is the ability to reproduce some characteristic parts (generally
materially made) of a reality. “Iconic” is a term borrowed from Peirce’s lexicon and indi-
cates that sign category in which signifier and signified are joined through a similarity
relation (cf. note 34). It is, therefore, clear that the two terms have converging meanings.
6
Cf. John Scotus Eriugena, Expositiones in Ierarchiam coelestem, I, ed. by J. Barbet,
CCCM, 31 (Turnhout: Brepols, 1977), p. 14.
7
“Siquidem sol iste uisibilis ipsius solis inuisibilis iustitie imago est, et stella ma-
tutina mox in animo fidelium orientis sancte illuminationis per fidem. Prima siquidem
Francesco Paparella
rationabilis anime ad creatorem suum redeuntis illuminatio est donum fidei, quod, per
sacramenta baptismatis, et datur et significatur”. Expositiones…, II, p. 45.941‑946.
8
It is enough to see, for instance: “Et hoc est quod ait: angelicam pulchritudinem,
quantum in imaginibus habebit; habet enim nunc celestium similitudinem in diuinis
symbolis […]”. Expositiones…, VIII, p. 133.551‑553 or Expositiones…, II, p. 23.118.
9
The non-mimetic nature of these approaches to the knowledge of the divine
is evidenced in Eriugenia’s use of the term visio in the Expositiones. In Expositiones (I,
p. 12.436), for instance, visio is employed as a synonym for allegory and symbol: the
visiones are velamina, veils and material theophanies with which divine light becomes
undisguised to man, losing its simplicity (per connaturalia nobis velamina multiplicat),
and through which the believers community can return to the One where nulla diver‑
sitas est. The Palatine master seems to identify such a visio with sacraments and with the
hierarchical structure of the earthly Church itself as an image of virtutes and of the celes-
tial hierarchy. An analogous use of visio can be found, then, in Expositiones…, II, p. 22.86,
where visiones are divine nature being revealed to prophets through dissimilia symbola, in
order to lift up the human mind to the knowledge of celestial essences in their pureness,
devoid of any phantastica plasmatio. The same meaning is expressed in a different passage
from the third chapter of Expositiones: “In hac diffinitione, pro [eo] quod est interpre-
tatio, skopos in greco scribitur, pro quo nos Macrobium Theothosium sequentes, inter-
pretationem posuimus; ipse quidem uisionum interpretationem skopon a Grecis uocari
dicit. Possumus tamen pro eo quod est skopos speculationem uel theoriam ponere, ac
dicere: speculatio itaque uel contemplatio ierarchie est ad Deum quantum licet simili-
tudo et unitas”. Expositiones…, III, p. 58.94‑101. In this instance the visio is subjected to
an interpretation process, as a symbolic revelation that needs adequate deciphering in or-
der to be rightly understood. The knowledge secundum visionem, therefore, is a symbolic
and allegoristic understanding, that is a prophetic revelation based on mystic images that
needs to be adequately comprehended through a knowledge in spiritu (cf. Expositiones…,
IV, p. 75.412); thus “seeing” according to Eriugena becomes not a physical and bodily
experience, but an intellectual and interior one, connected to a cognitive process rooted
in the deciphering of the symbolic revelation.
IMAGE THEORY, POLITICAL CLASH AND ONTOLOGY
10
“Ne igitur talis imaginatio tam inanis et proterua nostris subrepserit intellectibus,
super omnia visibilia, ueritati rerum intelligibilium dissimilia symbola, ne pro ipsis intel-
lectibus quorum symbola sunt, quasi ipsi sint, accipiantur, oportet ascendere fictaque
ex veris segregare. Sequitur: ETENIM, VALDE ARTIFICIALITER THEOLOGIA
FACTITIIS SACRIS FORMATIONIBUS IN NON FIGVRATIS INTELLECTI-
BUS VSA EST, NOSTRVM, VT DICTVM EST, ANIMVM REVELANS, ET IPSI
PROPRIA ET CONNATVRALI REDVCTIONE PROVIDENS, ET AD IPSVM
REFORMANS ANAGOGICAS SANCTAS SCRIPTURAS. Siquidem, inquit, mul-
tum artificiose theologia, illa videlicet uirtus que naturaliter humanis inest mentibus
ad diuinas rationes querendas, inuestigandas, contemplandas, amandas, factitiis, hoc
est fictis sanctis imaginationibus, ad significandos diuinos intellectus, qui omni figura
et forma circumscripta et sensibili carent, usa est; tali namque arte fictarum imaginum
animum nostrum reuelans uel, ut expressius transferri potest, animo nostro consulens,
ipsique animo propria et connaturali reductione, que uidelicet ingeniose in imaginibus
rerum sensibilium formatur, que nobis adhuc in carne constitutis connaturales propter
delicta nostra sunt prouidens, ad ipsum, hoc est ad ipsius animi reductionem, sanctas
scripturas anagogicas, sursum scilicet animum ducentes, conformauit”. Expositiones…, II,
p. 23.118‑141.
Francesco Paparella
IMAGE THEORY, POLITICAL CLASH AND ONTOLOGY
14
“Resonantias autem dico uel resultationes, quas Greci apêchêmata uocant, re-
rum intelligibilium imaginationes. Sicut enim imago uocis ex rupe quadam seu aliqua
concauitate, uel sicut imago corporis ex specilla resultat, ita intellectualis pulchritudinis
celestium uirtutum imaginationes ex omni terrena uilissimaque materia respondent. Ide-
oque possibile est nostrum animum reduci per eas resonantias ad immateriales primas
formas, quas Greci archetupias appellant, quarum resultantes imagines sunt, ita tamen
ut dissimiliter ipse similitudines accipiantur in materialibus unde resultant et in immate-
rialibus quibus resultant. Aliter enim furor in leone diffinitur, aliter in angelo. Et eisdem
similitudinibus non eodem modo consideratis, sed iuxta differentias materialium rerum
et altitudines immaterialium, compacte autem et pulchre proprietas diffinitur uniuscui-
usque in intellectualibus uirtutibus et sensibilibus materiis. Verbi gratia, irrationabilitas
defectus rationis est in animalibus ratione carentibus, in celestibus uero essentiis super-
eminentia rationis et superrationabilitas, qua superant omnem rationem nostram et sen-
sum”. Expositiones…, II, pp. 44.899‑45.918.
15
“Si, inquit, non prouideremus de longitudine sermonis ne modum excederet,
fortassis etiam, quemadmodum de humani corporis membris fecimus, ita etiam de pre-
dictorum animalium, leonis sane, bouis, aquile, proprietatibus, membris, conforma-
Francesco Paparella
tionibus fecerimus, hoc est adunassemus eorum uirtutes naturales imaginatim uirtutibus
celestibus, quantum dissimiles similitudines fingi ab hominibus possunt. Ubi posuimus
conspicaremur, ibi in greco katestochazometha pro quo possumus dicere et conspicare-
mur et argumentaremur. […]. Ac si diceret: cum reduceremus, hoc est referremus furorem
leonis in ipsarum celestium uirtutum intellectualem fortitudinem, ut leoninus furor in-
tellectualis fortitudinis angelice typum gestaret, cuius fortitudinis nouissimus sonus est
furor, hoc est cuius nouissima imago est furor. Sonum posuit pro imagine: ut enim uox
imago est intellectus, uox quippe articulata eorum que intellectus concipit index est, ita
furor irrationabilis sonus est et imago fortitudinis intellectualis; nouissima tamen imago,
quoniam aduersantur sibi furor et fortitudo”. Expositiones…, XV, pp. 210.905‑211.930.
IMAGE THEORY, POLITICAL CLASH AND ONTOLOGY
16
Expositiones…, II, p. 44.900 sq. and XV, p. 44.905 sq.
17
Ibid.
18
Expositiones…, VIII, p. 133.550.
19
Expositiones…, I, 618, p. 18.4 sq. and IV, 135, p. 69.120 sq.
Francesco Paparella
20
Expositiones…, VII, pp. 105‑106.546‑550.
21
The ontological mechanism that makes this kind of symbolic speech possible
operates, as Eco notices in his analysis of Dionysian symbolism, starting from the prius of
created world qualities and deducing per posterius the properties of divine nature (from
the goodness that can be found in the creature to the goodness of God as causal princi-
ple); such a mechanism is the same that allows the creation of the representation of cause
through effect per causalitas causae and not quantum ad similitudinem formae, that is
because of a morphological-formal similarity between the Cause and its effect (this is the
case of the relationship that exists between a statue and the model it reproduces). The
representation per causalitas causae is compared by Eco to the representatio per vestigium
based on the relationship between effect and cause as well, as in the case, considered
by Thomas Aquinas, of footprints that refer to the man who impressed them or of the
smokes that calls to mind the fire. Cf. U. Eco, “Metafora e semiotica interpretative”, in
Metafora e conoscenza, ed. by A. M. Lorusso (Milano: Bompiani, 2005), pp. 149‑203
(p. 191).
IMAGE THEORY, POLITICAL CLASH AND ONTOLOGY
22
Candidus of Fulda, whose true name was Bruun, turned later in Candidus, was
a Carolingian theologian and philosopher, whose ideas flourished in the first decades of
the ninth century. A disciple of Rabanus, he succeeded Rabanus himself at the head of
Fulda monastery. He is the author of the Opusculum in passione Domini and of a Epis‑
tula whose main topic was whether once resurrected, Christ could see God Father with
corporeal eyes or not. He was also supposed to be the author of the Dicta Candidi (a
text about the condition of humankind in its relationship with divinity according to the
idea of imago as stated in Genesis); the critical debate, however, prefers not to recognize
him as the true compiler of this text. He probably died around the middle of the ninth
century.
Francesco Paparella
23
Aurelius Augustinus, In Iohannis Evangelium tractatus CXXIV, III, 17, ed. by
D. R. Willems, in Aurelii Augustini Opera (Turnhout: Brepols, 1951-), viii, CSEL, 36,
1990, pp. 27‑28.
24
Pseudo-Dionysius, De coelesti hierarchia, IV, 3, ed. by G. Heil, A. Martin Ritter,
in Corpus dionysiacum 2, Patristische Texte und Studien, 36 (Berlin: W. de Gruyter,
1991), p. 161.
25
John Scotus Eriugena, Commentarius in Evangelium Iohannis, I, XXV, 45, ed. by
E. Jeauneau, CCCM, 166 (Turnhout: Brepols, 2008), p. 54.
26
In Iohannis Evangelium, I…, XXV, pp. 53‑56.27‑93.
27
In Iohannis Evangelium, XXV, pp. 55‑56.80‑93.
28
In an analogous way Eriugena affirms, commenting on John 3, 1‑3, that visio
veritatis, the Good’s kingdom which coincides with Christ, cannot be seen in a complete
way: In Iohannis Evangelium…, III, I, pp. 79.88‑93.
IMAGE THEORY, POLITICAL CLASH AND ONTOLOGY
objects of carnal vision can act as theophaniae of the divine, able to offer
the creature a revelation of the Trinitarian substance. Candidus of Fulda,
on the other hand, answering a disciple of his who had asked whether
Christ saw God with corporeal eyes after his resurrection, affirms the
clear separation between the spiritual and the physical. The monk from
Fulda, in fact, points out that only when man has a corpus incorruptibilis
according to the evangelical promise will he be able to physically con-
template God through it. 29 With the exception of this extreme situation,
however, the visio of spiritual realities has to be of a spiritual nature as
well, because of a correspondence between the status of the known ob-
ject and of knowing subject. The corporeal dimension can only be seen
through the body. The spirit itself knows the material dimension by way
of the physical substance. Matter and spirit thus appear clearly distinct,
while the superiority of the spiritual reality, able to control the body and
use it as its instrument, is reinforced.
The metaphysical doctrine that emerges from these first reflections
is confirmed in the ultimate answer offered by Candidus to the problem
discussed in the letter. Since man neither wants nor is able to see spiritual
truth with the eyes of the body, Christ will neither want nor be able to
contemplate God with corporeal eyes. In God, will and power are not
separated as opposite faculties but are joined in the divine simplicity.
Candidus, in fact, affirms that God has to be known only through the
spirit and the pure heart (mundus cor) and not through the flesh, be-
cause the divine essence is a spiritual reality that must be contemplated
in an equally spiritual way. 30 The knowledge gained through corporeal
eyes is considered inferior by Candidus, and similar to the light of a lan-
tern in the daylight. 31
In the Incarnated and Risen Christ as well, though his human body is
superior to that of other creatures because he was born without sin and
in a miraculous way without compromising the virginity of his mother
(an echo to the debate about the partus Virginis between Ratramnus and
Pascasius and of the Pascasian solution), 32 the hierarchy of the forms of
knowledge does not fail: the Son, as God become visible to the eyes of
the flesh and therefore the instrument with which man can overcome
29
Candidus of Fulda, Num Christus corporeis oculis Deum videre potuerit, III, PL,
106, cols 103B-108D (col. 104C) (from now on quoted as Num Christus).
30
Num Christus…, III, col. 104B.
31
Num Christus…, IV, col. 105A.
32
Num Christus…, V, col. 105C
Francesco Paparella
his weakness in the quest for Truth, will know the Father spiritually and
not physically. 33
Candidus then states that it is the pureness of one’s heart and, there-
fore, a right moral behaviour that opens for men, through the spirit, the
visio Dei. Candidus distinguishes three levels of knowledge of God: the
first one through the pure heart that cannot be compared with the self-
awareness of God Himself, the second one through the pure body that
does not allow for the comprehension of the divine nature and the last
one through the impurity of the body and of the spirit where there is
the utmost distance between God and the creature (Candidus explains
that God eludes the visio of such people). So there are two conditions
necessary in order to see God: contemplating Him with the spirit and
seeking Him with a pure heart. The theme of charity and pureness of
heart (broadly discussed in the last four chapters of the Num Christus),
becomes the fulcrum of Candidus’ reflection.
Against the hierarchical Dionysian universe, where every element is
not devoid of supra-sensible beauty (as a passage of De divinis nominibus
states), 34 the Candidus’ cosmos establishes a clear separation between
inferior and superior, body and soul, and with the clear perception of
a sinfulness that, because it is bound to the corporeal dimension, is an
obstacle to the knowledge of Truth and divine.
Material reality and the knowledge, mainly accessed through images,
that originates in it must appear deceptive and inferior, within Candi-
dus’ metaphysical coordinates, if compared to the light of interior visio.
It is from this metaphysical horizon that it becomes possible to under-
stand the substantially negative judgement about images and their theo-
logical value by the majority of Frankish masters.
33
Num Christus…, IV, col. 105B.
34
Pseudo-Dionysius, De divinis nominibus, IV, 7, in Corpus dionysiacum, 2…,
1991, col. 704B.
IMAGE THEORY, POLITICAL CLASH AND ONTOLOGY
35
The problem of the nature of iconic signs and of the exact definition of “similar-
ity” between signs and referents, or between the functions of signs, represents a remark-
ably complex semiotic and philosophical issue, the discussion of which extends beyond
the scope of this article. Regarding the issue of iconic signs cf. C. S. Peirce, Collected
papers, § 5.554 and § 2.276 (Bristol: Thoemmes Press, 1998) (just to quote two passages
among many others; Peirce identifies three typologies of sign: symbols in which signifier
and signified have an arbitrary relationship, indices where signifier and signified are con-
nected by a physical relation and icons in which the two parts of the segnic function are
joined through a similarity relation); U. Eco, Le forme del contenuto (Milano: Bompiani,
1971); idem, Trattato di semiotica generale (Milano: Bompiani, 1975); T. Maldonado,
Appunti sull’iconicità, in idem, Avanguardia e razionalità (Torino: Einaudi, 1974); F. Co-
lombo, R. Eugeni, Il testo visibile (Roma: La Nuova Italia Scientifica, 1996).
36
W. Beierwaltes, Eriugena: Grundzüge seines Denkens (Frankfurt am Main:
Klostermann, 1994), pp. 146, 290‑291; W. Beierwaltes, Denken des Einen: Studien zur
neuplatonischen Philosophie und ihrer Wirkungsgechichte (Frankfurt am Main: Kloster-
mann, 1985), pp. 73‑113, pp. 368‑384.
Francesco Paparella
37
G. B. Ladner, Origin and Significance of the Byzantine Iconoclastic Controversy, in
idem, Images and Ideas in the Middle Ages: Selected Studies in History and Art, Storia e
Letteratura. Raccolta di studi e testi 155 (Roma: Edizioni di Storia e Letteratura, 1983),
p. 65 sq.
IMAGE THEORY, POLITICAL CLASH AND ONTOLOGY
Francesco Paparella
41
Contra imaginum calumniatores orations…, I, 13, pp. 86‑87.
42
W. Beierwaltes, Denken des Einen…, pp. 368‑384.
IMAGE THEORY, POLITICAL CLASH AND ONTOLOGY
Francesco Paparella
Maria Bettetini
1
“È come se i carolingi avessero letto Barthes, che teorizzava l’ancoraggio verbale
delle immagini (non per la celebrazione di Dio ma per la vendita dei nuovi idoli commer-
ciali), e avessero anticipato la teoria di una cultura verbo-visiva, come è appunto quella
attuale, in cui semplicemente la televisione (immagine più parola) ha sostituito la catte-
drale”, U. Eco, “Idolatria e iconoclastia leggera”. L’espresso, 11 gennaio (2007). Una prima
versione di questo saggio è stata pubblicata in Ontologia dell’immagine, a cura di G. Can-
tillo, C. Ciancio, A. Trione, F. Vercellone (Roma: Aracne editrice, 2012), pp. 45‑73.
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 307-334
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111935
Maria Bettetini
quindi due: se il divino (Dio e ciò che lo riguarda) possa dirsi corretta-
mente rappresentato da un oggetto e se, in ogni caso, questo oggetto non
corra il rischio di diventare un idolo, un piccolo Dio, una imitazione di
Dio. Nelle tre grandi religioni monoteiste si hanno pareri discordi, che
però hanno in comune la difesa dall’idolatria sotto qualunque forma e di
conseguenza la differenziazione tra il proprio popolo e quelli ritenuti, a
torto o a ragione, “idolatri”. Così la religione ebraica, mossa soprattutto
nei primi secoli a distinguersi per la sua fede in un Dio unico, non si
discosterà mai dalle precise indicazioni contenute nel libro dell’Esodo e
riprese nel Deuteronomio (5,7‑10). In Esodo 20, 3‑4 si legge che il primo
comandamento (“parola”) ricevuto da Mosè sul Sinai è quello che di
solito è tradotto con “non avrai altri dei davanti a me”, 2 ma che alla let-
tera è “non ci sarà per te altri elohim sulla mia faccia” o “in faccia a me”.
Il testo prosegue “non ti farai sculture né immagini di quello che è su in
cielo nè di quello che è quaggiù sulla terra, nè di quello che è nelle acque
sotto terra” (alla lettera “non farai per te idolo o ogni immagine che nei
cieli da sopra e che nella terra da basso o che nelle acque da sotto alla
terra”) e conclude con la proibizione a prostrarsi e a servire tali idoli e im-
magini. Il comando è chiaro ed è sempre stato interpretato dalla cultura
ebraica come una dichiarazione di non liceità del farsi “creatori” di cose
copiate dalla realtà, per allontanare la tentazione dell’idolatria, ma anche
certamente per non pretendere di imitare l’unico vero Creatore.
2
Per la Bibbia si utilizza la traduzione riconosciuta dalla Cei, cfr. E Dio disse…
La Bibbia, nuovissima versione dai testi originali (Cinisello Balsamo: Ed. San Paolo,
1997). Per il Corano, Il Corano, introd, trad. e comm. di A. Bausani, 6. ed. (Milano:
Bur, 1996). Per i detti del Profeta: El-Bokhāri, Les traditions islamiques, trad. di O. Hou-
das e W. Marçais (Paris: Maisonneuve, 1977) (Detti e fatti del Profeta dell’Islām, dir. di
V. Vacca, S. Noja, M. Vallaro (Torino: Utet, 2003)). Le traduzioni dei testi dei concilii,
ove non diversamente specificato, sono tratte da Conciliorum Oecumenicorum Decreta,
dir. di G. Alberigo, G. L. Dossetti, P.-P. Joannou, C. Leonardi, P. Prodi, consulenza di
H. Jedin (Bologna: EDB, Ed. Dehoniane, 1962), 3. ed. (2002); I concili ecumenici, ed. di
A. Zani (Brescia: Queriniana, 2001); trad. fr. da P.-Th. Camelot e P. Maraval, Les conciles
œcuméniques (Paris: Desclée, 1988), i: Le premier millénaire; e, per Nicea II, cfr. Vedere
l’invisibile: Nicea e lo statuto dell’immagine, ed. di L. Russo, trad. degli Atti del II Con-
cilio di Nicea di C. Gerbino (Palermo: Aesthetica, 1997). Sono tuttavia state riviste ed
è stato volontariamente sempre espunto il termine “icona” sia per tradurre il greco eikōn
che per il latino imago, a causa della polivalenza assunta storicamente dal termine. I testi
originali sono in Concilium universale Nicaenum secundum, in Sacrorum conciliorum
nova et amplissima collectio, ed. di J. D. Mansi, 53 vols (Parisiis: H. Welter, 1901‑1927),
xii‑xiii (1901). Per i Libri Carolini l’edizione di riferimento è Opus Caroli regis contra
synodum (Libri Carolini), ed. di A. Freeman, collab. di P. Meyvaert, MGH, Concilia, 2;
Supplementum 2 (Hannover: Hahnsche Buchhandlung, 1998). La traduzione dei brani
tratti dai Libri Carolini è a cura mia.
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
Maria Bettetini
3
Fr. 33, in K. Holl, “Die Schriften des Epiphanius gegen die Bilderverehrung”, in
Gesammelte Aufsätze zur Kirchengeschichte (Tübingen: J. C. B. Mohr, 1928‑1932), ii:
Der Osten (1928), pp. 351‑387 (p. 384).
4
Fr. 12, in K. Holl, “Die Schriften des Epiphanius…”, p. 377.
5
Fr. 6, in K. Holl, “Die Schriften des Epiphanius…”, p. 356.
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
Maria Bettetini
costretto i Bizantini a ricorrere alle immagini per educare alla fede e per
spiegare le cose sacre. 7
Tra i dati e le date da ricordare è da menzionare il Concilio di Cal-
cedonia che nel 451 definì Cristo come vero Dio e vero uomo (con due
nature) in una sola persona (prosopon) 8 e ipostasi, “non diviso o separato
in due prosopa”: “consostanziale al Padre per la divinità, e consostanziale
a noi per l’umanità, simile in tutto a noi, fuorché nel peccato (Lettera
agli Ebrei 4,15)”. 9 Tale definizione incoraggia la rappresentazione della
figura umana di Cristo, che non va letta come apparenza (secondo la teo-
ria del docetismo nelle sue varie forme) o diminuzione della divinità, ma
come una delle due nature presenti nella medesima persona, che quindi
è pienamente rappresentata quando viene dipinta o scolpita con le sem-
bianze di un uomo. E infatti a questa idea si rifaranno tutti i sostenitori
della liceità delle immagini: i partecipanti al Concilio di Nicea, certo, ma
prima di loro quelli del Concilio detto Quinisesto (691‑692) o In Trullo,
perché considerato un completamento del quinto e del sesto concilio
(Costantinopoli II, nel 553 e III, nel 680‑681) e perché celebrato nella
stessa sala del palazzo imperiale (trullos). Questo curioso concilio “quin-
to e sesto” (penthektes) si occupa delle questioni disciplinari non trattate
dal quinto e dal sesto, che erano stati dedicati ad argomenti dogmatici,
ma i suoi atti non furono riconosciuti dal papa Sergio I: si tratta infatti
di un concilio convocato dall’imperatore Giustiniano II, che stabilisce
canoni distanti dai parametri romani. Tra tutti basti ricordare la dichi-
arazione di pari dignità tra Costantinopoli e Roma, oppure le norme
riguardanti la vita coniugale dei chierici. Uno tra questi canoni è tuttavia
notevole, quello in cui si incoraggia la rappresentazione di Cristo, che
può addirittura rafforzare la fede del credente nel mostrare l’umiliazione
di un Dio che si è reso visibile: “Affinché, quindi, anche con l’espressione
7
Cfr. C. Chazelle, “Not in Painting But in Writing: Augustine and the Supremacy
of the Word in the Libri Carolini”, in Reading and Wisdom: The De doctrina Christi-
ana of Augustine in the Middle Ages, ed. di E. D. English (Notre Dame: University of
Notre Dame Press, 1995), pp. 1‑22; A. Freeman, “Scripture and Images in the Libri
Carolini”, in Testo e immagine nell’alto medioevo, Settimane di Studi del Centro Italiano
di Studi sull’Alto Medioevo, 41 (Spoleto: Centro italiano di studi sull’alto medioevo,
1994), pp. 163‑188; Å. Ommundsen, “The Liberal Arts and the Polemic strategy of the
Opus Caroli Regis Contra Synodum (Libri Carolini)”, Symbolae Osloenses, 77 (2002),
pp. 175‑200.
8
Sul termine prosopon mi permetto di rimandare a M. Bettetini, Figure di verità:
la finzione nel Medioevo occidentale (Torino: Einaudi, 2004), pp. 108‑113.
9
Conciliorum Oecumenicorum Decreta…, pp. 86‑87 (che riporta per il latino e il
greco l’edizione di E. Schwarz: Acta Conciliorum Oecumenicorum (Berolini, Lipsiae: W.
de Gruyter, 1914‑1940), i‑vi: Concilium universale Chalcedonense (1927‑1932)).
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
dei colori sia posto sotto gli occhi di tutti ciò che è perfetto, coman-
diamo che d’ora innanzi, invece dell’antico agnello, il carattere di colui
che toglie i peccati del mondo, cioè Cristo nostro Dio, sia raffigurato e
dipinto sotto forma umana, affinché per suo mezzo, comprendendo con
la mente la grandezza dell’umiliazione del Verbo di Dio, siamo condotti
anche alla memoria della sua vita, della sua passione e della sua morte
salvifica, e della redenzione del mondo che egli operò”. 10
10
Concilium universale Quinisextus in Trullo, in Sacrorum conciliorum…, xi
(1901), pp. 977‑980.
11
Cfr. H. Maguire, Art and Eloquence in Byzantium (Princeton: Princeton Uni-
versity Press, 1981).
12
Sulla lettura ad alta voce in aerea bizantina cfr. H. Hunger, Schreiben und Lesen
in Byzanz: die byzantinische Buchkultur (München: C. Beck, 1989); M. Mullett, Writ-
ing in Early Mediaeval Byzantium, in The Uses of Literacy in Early Mediaeval Europe,
ed. di R. McKitterick (Cambridge: Cambridge University Press, 1990), pp. 159‑173;
G. Cavallo, “Testo e immagine: una frontiera ambigua”, in Testo e immagine nell’alto me-
dioevo…, pp. 31‑62; idem, “Scrivere, leggere, memorizzare le Sacre Scritture”, in Morfo
logie sociali e culturali in Europa fra tarda antichità e alto medioevo, Settimane di Studi
del Centro Italiano di Studi sull’Alto Medioevo, 45 (Spoleto: Centro italiano di studi
sull’alto medioevo, 1998), pp. 987‑1008.
Maria Bettetini
teriale, che potrebbe solo mostrarne il corpo. Nicea sostiene infatti che
l’immagine rimanda sempre al “prototipo”: “tanto più quelli che le con-
templano sono portati al ricordo e al desiderio dei modelli originali (pro-
totypoi)”, si legge sempre nell’horos, dove si spiega che “secondo il pio cos-
tume degli antichi, l’onore tributato all’immagine passa al suo modello”.
L’immagine non ha dunque la pretesa di significare tutto il suo modello,
ma semplicemente di rimandare ad esso, che viene ricordato, desiderato,
onorato. Così l’immagine di Cristo rappresenta il suo corpo, ma non per
questo cancella la sua divinità: si tratta infatti di un corpo che Cristo
stesso ha scelto di possedere e che è l’unico aspetto del Figlio che si possa
raffigurare. Quindi da una parte “il Verbo di Dio ha circoscritto se stesso
venendo tra noi nella carne”, e di conseguenza chi lo “circoscrive” dipin-
gendone il corpo lo fa in modo “assolutamente giusto e buono”, perché si
adegua a ciò che Cristo ha fatto di sé; d’altro lato “nessuno ha mai pen-
sato di dipingere la sua divinità, giacché, come dice la Scrittura, ‘Dio non
l’ha mai visto nessuno’: per questo egli non può essere dipinto, né visto,
né compreso – tranne che nella sua umanità”. 13 L’immagine è simile al
suo modello “non nella sostanza ma soltanto nel nome e nella dispo-
sizione delle membra che vengono dipinte”. Anche quando si dipinge un
uomo non si ha certo la pretesa di ritrarne l’anima, eppure, conclude il
passo degli atti, “nessuno che sia dotato di senso, al vedere l’immagine di
un uomo ha pensato che, attraverso l’arte del pittore, l’uomo venga sepa-
rato dalla sua anima”. 14 L’immagine dunque rimanda al modello, come le
opere d’arte di Plotino, ed è di sostanza differente da questo, gli è simile
solo nel nome. Tuttavia l’immagine ricorda il modello e nel mostrare ciò
che si può raffigurare, il corpo, richiama ciò che non si può raffigurare,
ossia l’anima per l’uomo, la natura divina per Cristo, lo stato glorioso per
i santi e la Vergine.
Nei Libri carolini si riconoscerà all’immagine invece solo il ruolo di
portare alla memoria la materialità di ciò che è rappresentato, ossia le si
negherà la capacità di rimandare al soprasensibile: un affresco di Cristo
in croce ricorderà l’evento storico della morte di Cristo, senza aggiungere
nulla riguardo alla sua persona e alle due nature. L’immagine sarà detta
essere della stessa sostanza di ciò che rappresenta, condannata quindi a
trascinare nella materia ogni soggetto rappresentato.
L’altro punto degli atti del concilio di Nicea che è opportuno qui
ricordare riguarda il valore delle Scritture rapportato a quello delle immag-
13
Concilium universale Nicaenum Secundum…, xiii, col. 668.
14
Ibid.
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
Maria Bettetini
18
Sulla funzione del linguaggio nell’alto medioevo rimane fondamentale M. L.
Colish, The Mirror of Language: a Study in the Medieval Theory of Knowledge, revisited
ed. (Lincoln, Nebraska: University of Nebraska Press, 1983).
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
19
In piazza san Giovanni a Roma: il mosaico, del 795, rappresentava Cristo che
consegna il vessillo imperiale a Costantino e le chiavi a Pietro, il quale a sua volta con-
segna il simbolo del potere spirituale Leone III e quello del potere temporale a Carlo
Magno.
20
Tutti i titoli sono tradotti in M. Bettetini, I Libri Carolini: da un errore di tra-
duzione nuovi sensi per l’immagine, in Versus: Quaderni di studi semiotici, 102 (2006),
pp. 65‑112.
21
“It seems that he [the author of the Libri carolini] only knew the brief extracts
now embodied in the chapter headings of the Libri carolini”. S. Gero, “The Libri Caro-
lini…”, p. 13. “This is not to say that he did not have a certain amount of additional
information about the Council”. Ibid., p. 28.
Maria Bettetini
A una prima lettura di questi brevi titoli emerge subito il tono can-
zonatorio e ironico dei carolingi nei confronti dei Greci. Costoro, in-
dicati con illi ‑ pronome che dice lontananza e disprezzo ‑, delirano,
vaneggiano, mentono, impazziscono, usurpano, sognano, cianciano gar-
ruli (garriunt). Gli avverbi che accompagnano le loro espressioni sono
stolide, minus docte, absurdissime, incaute, praesuntive, indocte, desidiose,
ovvero oziosamente. Parlano con temerarietà, sono creduli e non cre-
denti, parlano così a lungo e vanamente da far diventare marcio il loro
discorso (obstitus tanta ignavia), che comunque è falsissimum e risu dig-
num. Il loro più grave errore è quello di non saper leggere le Scritture,
ma sono anche creduloni (si veda l’ironia nei confronti dei racconti mi-
racolosi) e osano paragonare le immagini alle res sacratae, alle cose sacre,
ossia alla croce, ai vasi sacri, alle reliquie. Ma soprattutto, e per questo
non vanno perdonati, parlano con arroganza, credendosi pari a Dio sia
nel regno che nel concilio: parlano superciliose (Libri carolini, IV,23), ov-
vero con il sopracciglio alzato dell’arrogante, secondo un’immagine che
fa ben comprendere la concretezza della scrittura carolingia. Ecco alcuni
esempi [tra parentesi quadre interventi redazionali]:
Libro primo
I. A proposito di quanto dicono Costantino [VI] e Irene nei loro
scritti: “in nome di Dio che regna con noi” [conregnat].
XVIII. Quanto sia la vana la speranza di coloro che ripongono la loro
salvezza nelle immagini e dicono: “Come il popolo israelita è stato sal-
vato dalla vista del serpente di bronzo” (Numeri 21,9), così noi ci salver-
emo guardando i ritratti dei santi.
XVIIII. Quanto grande sia la temerarietà di chi dice: Come ai Giu
dei sono stati donati i due cherubini e le tavole della legge, così a noi
cristiani sono stati donati la croce e le immagini dei santi, per scriverne
e per adorarli.
XXVIIII. Come sia da intendere ciò che è scritto: “Signore, ho amato
la bellezza [decus] della tua casa” (Salmi 25,8). Costoro infatti intendono
“bellezza” come immagini.
XXX. Quanto detto dal salmista: “Come abbiamo udito, così ab-
biamo visto” (Salmi 47,9), non è da intendersi a favore delle immagini
fatte da mano d’uomo.
Libro secondo
XXII. Non hanno una buona memoria coloro che innalzano im-
magini per non dimenticarsi dei santi o addirittura dello stesso Signore.
XXIII. Contro le disposizioni del beato Gregorio, vescovo della città
di Roma, si è disposto di adorare o distruggere le immagini.
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
22
C. Chazelle, “Not in Painting But in Writing…”, p. 2.
Maria Bettetini
23
Cfr. C. Chazelle, “Images, Scripture, the Church, and the Libri Carolini”, Pro-
ceedings of the Patristic, Medieval, and Renaissance Studies Conference, 16/17 (1993),
pp. 53‑76 e D. Appleby, “Instruction and Inspiration through Images in the Carolingian
Period”, in Word, Image, Number: Communication in the Middle Ages, ed. di J. J. Con-
treni, S. Casciani (Firenze: Sismel-Edizioni del Galluzzo, 2002), pp. 85‑111.
24
Sulla più significativa delle res sacratae, la croce, cfr. C. Chazelle, The Crucified
God in the Carolingian Era: Theology and Art of Christ’s Passion (Cambridge: Cambridge
University Press, 2001).
25
“Dio onnipotente istituì molti segni per i mortali, e li rese, con l’aiuto di alcuni
oggetti, visibili e tangibili, poiché intendeva aiutare mediante l’aiuto delle cose sensibili
la poca finezza e l’imperfezione degli uomini mortali e visibili, ma non con lo scopo di
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
stabilire l’adorazione di alcune cose materiali; infatti proclamò che lui solo dovesse essere
adorato, lui solo venerato”. Libri carolini…, III, 25, p. 452.
26
Ethymologiarum libri viginti, 436, 16, PL, 82, col. 676.
Maria Bettetini
false”. Se vero è tutto ciò che è (come si legge anche nel Sofista e nell’Ippia
Minore di Platone), il falsum è ciò che appare diversamente da come è,
ma che in quanto tale è privo di esistenza, perché esiste solo il vero, che
è appunto vero in quanto è. Non esistono dunque realtà false, ma gi-
udizi sbagliati su cose vere: “Pertanto la falsità non è nelle cose, ma nella
conoscenza sensibile e s’inganna soltanto chi presta l’assenso al falso”. 27
Questo consente di dire che una stessa cosa può essere insieme vera e
falsa: un legno può essere vero legno, ma essere percepito come pietra,
quindi può essere falsa pietra. Riprendendo una distinzione che è già nel
Sofista (235a-243a; 265b-276d), il falsum diventa così “ciò che appare”,
mimesis del vero secondo gradi diversi. Si ha una similitudine di grado
uguale quando la somiglianza è reciproca, come nel caso di due uova, di
grado invece diverso quando l’inferiore è simile al superiore, come nel
caso del sogno o dell’immagine allo specchio. Solo quest’ultimo è un
caso di falsità, di apparire come vero di ciò che al vero è solo simile. Falso
è dunque ciò che “se fingit esse quod non est, aut omnino esse tendit et
non est”: nel primo caso il falso si propone come vero, ha la pretesa di
essere ciò cui solo somiglia, ma non è; nel secondo appare come qualcosa
verso cui “tende”, perché gli somiglia. Il primo è il caso del mendacium,
dell’intentio fallendi, dell’intenzione di trarre in inganno. Il secondo
è invece il caso che riguarda le immagini: una res che “tende” al vero e
che al vero somiglia, ma che è vera solo del suo essere immagine, e non
dell’essere ciò che rappresenta. Hanno questa condizione le immagini
allo specchio, i sogni, le allucinazioni, le ombre, le illusioni ottiche e
infine “omnis pictura vel cuiuscemodi simulacrum et id genus omnia
opificum”: 28 anche le pitture.
L’immagine è falsa
E proprio la falsità dell’immagine che somiglia al modello implica altri
pericoli, perché l’apparire viene confuso con l’essere. Quindi non solo
l’immagine può divenire “vera” quanto l’oggetto raffigurato, ma può ac-
quisire indipendenza dalla realtà del rappresentato. L’immagine come
rappresentazione dell’inesistente può generare la credenza nel fruitore
27
Soliloquia, 2, 3, 3, in Soliloquia, De inmortalitate animae, De quantitate animae,
ed. di W. Hörmann, CSEL, 89 (Vindobonae, 1986), p. 77 e sotto 2, 6, 10 e Soliloquia, 2,
9, 16, pp. 89 e 91.
28
Soliloquia…, 2, 9, 17, p. 91.
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
29
Cfr. Confessiones, I, 13, 22, ed. di M. Simonetti, trad. di G. Chiarini, 5 vols
(Roma: Mediolani; Milano: Fondazione L. Valla, A. Mondadori Editore, 1996), i,
pp. 34‑36.
30
Cfr. A. Freeman, “Scripture and Images in the Libri Carolini…”, p. 166.
Maria Bettetini
nel resto del suo lavoro il traduttore ha sempre utilizzato adorare e ado-
ratio per latreia e proskynesis.
Il capitolo poi prosegue ribadendo la priorità della scrittura sulla
pittura nella trasmissione della fede: le leggi furono infatti consegnate
per scritto a Mosè sul Sinai; Cristo nel suo scontro con Satana citò le
Scritture, e non dei dipinti; gli apostoli portarono la salvezza nel mondo
attraverso delle lettere e non con delle pitture. E nella parola di Dio mes-
sa per iscritto, nelle sacre Scritture, si trovano secondo i Libri carolini
anche i fondamenti delle arti della parola, le arti liberali. Sempre nel cap-
itolo 30 del II libro infatti, utilizzando passi di Isidoro e di Cassiodoro,
si dimostra che tutte le arti retoriche e grammaticali, anche se non in
maniera esplicita, sono già presenti nelle Scritture. E, come in un gioco
di rimandi, le stesse arti sono utili alla comprensione delle Scritture: pro-
prio l’ignoranza è all’origine degli errori dei Greci. Secondo Chazelle, 31
a garanzia di questa sicurezza dei carolingi c’è il De doctrina christiana
agostiniano, soprattutto nelle pagine in cui si spiega come evitare errori
nel lavoro di esegesi. Nel secondo libro Agostino divide le istituzioni
umane in superflue e utili o addirittura necessarie. 32 La danza e il mimo
sono così superflue da aver bisogno di una spiegazione orale perché se
ne colga il significato (come il titulus dei Libri carolini), mentre pictu-
rae, statuae e altre opere di questo genere lasciano comprendere, se ben
fatte, a cosa sono simili. Tuttavia anche queste sono superflue, a meno
che abbiano uno scopo ben definito, e superflue sono anche le favole e
le menzogne poetiche. Utili sono le istituzioni umane come la moneta,
le misurazioni, l’igiene, gli abiti, e, in vista dell’esegesi, utilissima si rivela
la storia. Quanto alle discipline, quelle matematiche come l’astronomia
possono addirittura essere una distrazione, mentre tra quelle letterarie
alcune sono fondamentali: saper leggere, conoscere le lingue, saper usare
delle arti del trivium. Il quarto libro del De doctrina christiana, infatti,
nel definire il corso di studi dell’esegeta torna a ricordare la necessità di
studiare la storia, le lingue, la retorica, senza lasciarsi distrarre da altro.
I Libri carolini riprendono la supremazia degli studi intorno alla parola
al fine di una corretta comprensione della Scrittura, invitando a evitare la
confusione prodotta da altri strumenti, quali le immagini.
31
Cfr. C. Chazelle (“Not in Painting but in Writing…”, pp. 11‑12) che sottolinea
comunque una notevole distinzione: i Libri carolini non trattano, a differenza di Agos-
tino nel De doctrina christiana, l’importanza delle regole per stabilire quali siano da con-
siderarsi scritture “sacre”, perché per l’autore dei Libri carolini lo stesso Agostino e tutti i
Padri sono da considerarsi testi “sacri” come le Scritture, auctoritates.
32
Cfr. De doctrina christiana…, 2, 25, 39‑39, 58, pp. 62‑75.
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
Maria Bettetini
33
Registrum epistularum XI, 10, 15‑19, ed. di D. Norberg, 2 vols (Turnhout:
Brepols, 1982), ii, CCCM, 140A, p. 873.
34
Ibid. p. 874.22‑26. Sull’uso delle lettere di Gregorio nei Libri carolini, e di queste
righe in particolare, cfr. A. Freeman, “Scripture and Images in the Libri Carolini…”,
pp. 170‑173.
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
Dicono infatti che l’arte dei pittori sia pia, come se non godesse con le
altre arti mondane della comunione della pietà o dell’empietà. Infatti
che cosa l’arte del pittore ha di più pio dell’arte di fabbri, scultori, fon-
ditori, cesellatori, scalpellini, falegnami, agricoltori o di altri artigiani?
Tutte le arti di cui abbiamo detto prima, che non possono essere apprese
se non con l’esercizio, possono essere gestite in modo pio ed empio da
parte di coloro da cui sono esercitate, e non dipende da queste la pietà o
l’empietà, ma dagli uomini che ne sono seguaci (Libri Carolini, III, 22).
35
Cfr. A. Freeman, “Scripture and Images in the Libri Carolini…”, p. 163.
Maria Bettetini
Posto che il valore morale dipende dall’uso e dai contenuti della pittura,
ma non dalla pittura in sé, i Libri carolini possono indicare le caratter-
istiche del buon pittore: innanzitutto deve comprendere (intelligere) la
propria arte nella sua globalità; deve avere esperienza (experientia) del
suo lavoro, perché solo tramite la pratica può ambire a comporre belle
opere; deve avere talento nella disposizione dei colori (conficiendorum
colorum peritia) e conoscere i materiali con cui lavora (cognoscere vim
materiae); inoltre, per essere un buon pittore, “deve cercare luoghi op-
portuni per l’esecuzione della propria opera e nella composizione di
questa occuparsi soltanto della bellezza dei colori e del riempimento
dei contorni dell’opera” (Libri carolini II, 27). Il pittore deve saper fare
bene il suo lavoro, occuparsi dei colori e della composizione della sua
opera. Spetterà invece all’uomo colto, al chierico che sa leggere e scri-
vere, il compito di scegliere i soggetti e di indicare le scritte da aggiungere
all’opera, per evitare le cattive interpretazioni.
I Libri carolini rappresentano in definitiva il manifesto culturale del
regno carolingio, la vittoria dell’esegesi della parola scritta, scritta a sua
volta oppure orale, contro il presupposto valore delle immagini, il con-
ferimento di un potere assoluto ai litterati, ossia agli uomini della corte
di Carlo e a coloro che, in suo nome, per tutta Europa incominciavano
a organizzare scuole dove si studiavano il trivium e il quadrivium. Al-
cuino, promotore di questo programma culturale, non mancò mai di
sottolineare la funzione delle arti liberali nella ricerca della verità, quindi
nella comprensione delle Scritture. Cassiodoro, Marziano Cappella, Isi-
doro da Siviglia divennero autori di riferimento, anche se fra tutti ebbe
sempre un ruolo privilegiato Agostino d’Ippona, che garantì al Medio
Evo una chiave di lettura per il mondo materiale: questo ha valore e va
studiato perché anch’esso è indispensabile alla comprensione delle Scrit-
ture. È vero che nel De Trinitate Agostino sottolineò anche un rapporto
di somiglianza tra Dio e il mondo, rintracciando in questo le vestigia
divine lasciate al momento della creazione (nella costituzione ternaria
dell’interiorità dell’uomo ma anche nella struttura numerica delle leggi
naturali), ma i carolingi, come abbiamo ribadito, preferirono limitarsi
alla somiglianza tra verbum umano e Verbum divino, lasciando alla mate-
ria solo il ruolo di promemoria e di decoro. Paradossalmente, da qui de-
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
36
Cfr. M. Rainini, Disegni dei tempi: il “Liber figurarum” e la teologia figurativa
di Gioacchino da Fiore (Roma: Viella, 2006); e idem, Gli alberi di Gioacchino da Fiore
fra diagramma e simbolo, in Le monde végétal: médecine, botanique, symbolique, a cura di
Maria Bettetini
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
quella del drago dalle sette teste dell’Apocalisse: a ogni testa corrisponde
un persecutore e un gruppo di buoni perseguitati, fino alla persecuzione
finale di Gog contro i fedeli: Erode in nome dei Giudei perseguitò gli
Apostoli, Nerone in nome dei Pagani i Martiri, fino al Saladino che in
epoca contemporanea perseguitava gli uomini spirituali.
Il Libro delle figure è la più significativa raccolta di teologia figurale
e simbolica del Medio Evo. Le Figurae, concepite e disegnate da Gioac-
chino da Fiore in tempi diversi, vennero esemplate e radunate nel Liber
Figurarum nel periodo immediatamente successivo alla sua morte, avve-
nuta nel 1202. In esse è perfettamente illustrato il complesso e originale
pensiero profetico dell’abate florense, basato sulla teologia trinitaria
della storia e sulla esegesi concordistica della Bibbia. Di questa opera ab-
biamo oggi tre esemplari ben conservati: il codice di Oxford, il codice
di Reggio Emilia e il codice di Dresda. 38 Il più antico è il manoscritto
di Oxford, prodotto dall’Officina scrittoria di un monastero calabrese,
forse la stessa abbazia di San Giovanni in Fiore, tra il 1200 e il 1230. Ma
chi è Gioacchino da Fiore, anzi “il calavrese abate Giovacchino/di spirito
profetico dotato” (Paradiso XII, 140‑141)?
38
Oxford, Corpus Christi College, MS 255 A, fol. 4v‑17v; Reggio Emilia, Bibliote-
ca del Seminario Vescovile, MS R1, fol. 1r‑20v; Dresden, Sächsische Landesbibliothek,
MS A 121, fol. 87r‑96v.
39
Molte informazioni sul sito del Centro Internazionale di Studi Gioachimiti,
<http://www.centrostudigioachimiti.it.>
Maria Bettetini
40
Cfr. L. Tondelli, Il libro delle figure dell’abate Gioachino da Fiore, in collaborazi-
one con M. E. Reeves e B. Hirsch-Reich, 2 vols, 2. ed. (Torino: S.E.I., 1953).
41
M. Reeves e B. Hirsch-Reich, The Figurae of Joachim of Fiore (Oxford: Claren-
don Press, 1972).
DALLA DIFFIDENZA ALLA PASSIONE ESCLUSIVA
che questa teologia figurale ebbe sulla posterità, in particolare sugli au-
tori dei secoli XIII‑XIV.
Si è così pervenuti a due opere recenti e significative opere, che hanno
portato nuova luce a proposito dei diagrammi e della teologia figurale
gioachimita: il volume collettaneo curato da Alexander Patschovsky,
Die Bildwelt der Diagramme Joachims von Fiore, 42 e il già citato stu-
dio monografico di Rainini, Disegni dei tempi. Il “Liber Figurarum” e
la teologia figurativa di Gioacchino da Fiore, dove si legge che “il Liber
figurarum rappresenta il vertice del metodo di elaborazione per figuras
dell’abate calabrese: tutte le figure presenti negli altri scritti trovano una
corrispondenza in questa raccolta, che appare come una ricapitolazione
non solo dei diagrammi e dei disegni realizzati da Gioacchino, ma anche
della sua elaborazione teologica. Si tratta, insomma, di una vera e propria
summa figurarum”. 43
Le figure
Si tratta di figure che dicono più di quello che si può apprendere dalle
Scritture – l’opposto dei Libri carolini. Di immagini per chi sa già – ed
ecco ancora una volta il vantaggio del sapiente, come nei Libri carolini.
Ma il sapiente attraverso le figure potrà imparare in maniera nuova e più
profonda quanto ha già studiato attraverso le parole. Scegliamo alcune
immagini tra le più note: il salterio, i cerchi, gli alberi, il drago.
L’albero dei due avventi rappresenta – andando dal basso verso l’alto
– la storia della salvezza. L’Antico Testamento, ovvero l’Età del Padre,
si protrae da Adamo a Gesù Cristo. Il Nuovo si sviluppa invece dall’Età
del Figlio a quella finale, dello Spirito Santo. La figura di Cristo domina
l’albero della storia, quindi anche il suo culmine, il secondo avvento con
la resurrezione dei morti e il giudizio universale. I rami in basso rappre-
sentano le dodici tribù di Israele, e più in alto le dodici chiese cristiane.
Le sessantatré generazioni dell’Età del Figlio sono divise in gruppi di
ventuno, e tra Ozia e Cristo si svolgono ventuno generazioni che com-
prendono la parte finale dell’Età del Padre e quella iniziale del Figlio.
L’Età dello Spirito è appena accennata in cima all’albero, con la seconda
42
Die Bildwelt der Diagramme Joachims von Fiore: zur Medialität religiös-politisch-
er Programme im Mittelalter, ed. di A. Patschovsky (Ostfildern: J. Thorbecke Verlag,
2003).
43
M. Rainini, Disegni dei tempi…, p. 18.
Maria Bettetini
LE MONDE SLAVE
Aleksandra Sulikowska
1
Cf. D. Obolensky, Byzantium and the Slavs (New York: Variorum Reprints,
1994), pp. 186‑188.
2
М. Веретенников, Московский митрополит Макарий и его время (Москва:
Издательство Спасо-Преображенского Валаамского Монастыра, 1996), pp. 12‑17;
Памятники литературы Древней Руси. Конец XV – первая половина XVI века,
eds Л. А. Дмитриев, Д. С. Лихачев (Москва: Художественная литература, 1984),
pp. 437‑441.
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 337-355
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111936
Aleksandra Sulikowska
“hallelujah”), except local ones, were wrong, thus declaring the Russian
Orthodox Church superior to the Greek. 3
According to the popular Russian belief, Moscow, as the last earthly
Eastern Orthodox Empire, was to become the “new Constantinople”
and “new Jerusalem”. Sources often described it as the “new” land. Philo-
teus, in The Message to Grand Duke Vasili III, called the Moscow church
a “holy, apostolic and common Orthodox Church of the new Rome”
which “shines at the edge of the world […] with its righteous Christian
faith”. 4 Ivan Peresvetov, sixteenth century author of multiple polemics,
in his Great Complaint compared Ivan IV to Alexander the Great and to
the Roman emperor Augustus, and Ivan’s rule to that of Constantine XI:
the last Byzantine emperor whose place was to be taken by Ivan IV. 5
Canonizations of “new Russian miracle workers” at the Moscow coun-
cils of 1547 and 1549 were the next in a series of initiatives, undertaken
by the Orthodox Church in the sixteenth century, aimed at boosting the
authority of the two main ideological foundations of the “Third Rome”:
the emperor’s and the Orthodox Church’s power. The canonization of
many Russian dukes, founders of large monasteries, bishops and Mos-
cow metropolitans 6 proved certainly to be a means towards this end. 7
Referring to the fall of the Byzantine Empire as well as to the loss
of its authority, in the Story of Sultan Mehmed, Ivan Peresvetov wrote:
“God was filled with his unquenched wrath towards you, Greeks, just
like towards Jews. Therefore, he turned you into Turkish slaves as pun-
ishment for your stubbornness and iniquity”. Later, he explained: “We
have a free empire and free tsar here, the rightful ruler, grand duke of the
whole Rus’ Ivan Vasilevich. In this empire, the mercy of the great God
can be seen through God’s signs: manifestation of the new holy miracle
3
Стоглав (Санкт Петербург: Изд. Кожанчикова, 1863), pp. 22‑23, 58;
cf. P. Bushkovitch, Religion and Society in Russia: the Sixteenth and Seventeenth Centu‑
ries (New York, Oxford: Oxford University Press, 1992), p. 22.
4
Памятники литературы Древней Руси. Конец XV – первая половина XVI
века…, pp. 439‑441; Mnich Fiłotej, “Posłanie do wielkiego księcia Wasyla III”, in Słowo
o Bogu i człowieku: Myśl religijna Słowian Wschodnich doby staroruskiej, selec., transl., ed.
by R. Łużny (Kraków: Nakł. Polskiej Akademii Umiejętności, 1995), p. 171.
5
Памятники литературы Древней Руси. Конец XV – первая половина XVI
века…, pp. 606‑611.
6
Е. Голубинский, История канонизации святых в русской Церкви (Москва:
Университетская типография, 1903), pp. 100‑108.
7
P. Bushkovitch, Religion and Society in Russia…, pp. 101‑102.
ICONS AND RELICS IN RELIGIOUS POLICIES OF THE MUSCOVITE RUS’
workers, and God loves them just as he loved his first saints”. 8 Russian
saints were held in similarly high esteem and regarded as equally efficient
as the older-generation of saints from the heroic period of early Chris-
tianity or the Byzantine era. In urgent crises and under military threats,
the holy metropolitans Peter and Alexius 9 (fig. 1) as well as Sergius of
Radonezh (fig. 2), Cyril of Belozersk or Blessed Basil of Moscow 10 were
addressed as supporters of the Russian land. In the sixteenth century
they were undoubtedly as popular as the major saints of the Orthodox
tradition.
In many writings from that period, Rus’ was declared “luminous”,
“the brightest”, “beautified” and especially endowed by God. 11 We may
also assume that the majority of decisions taken within Metropolitan
Macarius’ milieu in the mid-sixteenth century were aimed at establish-
ing the perception of the Russian land as “holy” by reinforcing its au-
thority and cultural “relocation” from “the edge of the world” to its cen-
tre. On the other hand, these activities may be interpreted in the context
of the relationships with Kiev as the successor to Constantinople that
was geographically nearest to Moscow. In sources dating from the period
of Kievan Rus’, the city of Kiev was compared to the Byzantine Empire
on many levels, for example by referring to Vladimir the Great as the
“New Constantine” and to Kiev as “the great Rome” in comparison to
Constantinople’s title. 12 Moscow could also refer to the Balkan capitals
which, as in the case of Bulgarian Tarnovo, were perceived as follow-
ers of Constantinople’s tradition. For example, Tarnovo was called the
“second Rome” and the title: “The Emperor’s Town” (Цариград) 13 was
applied (figs. 4, 5).
8
В. Ф. Ржига, И. С. Пересветов, публицист XVI века (С приложением
сборника его сочинений) (Москва: Издание Императорскoго Общества Истории и
Древностей Российских при Московском Университетe, 1908), pp. 77‑78.
9
Реликвии в Византии и Древней Руси. Письменные источники, ed. by А. М.
Лидов (Москва: “Прогресс-Традиция”, 2006), pp. 355‑357, 360, 362.
10
Реликвии в Византии и Древней Руси…, p. 357.
11
В. В. Бычков, Русская средневековая эстетика XI‑XVII века (Москва:
Мысль, 1992), pp. 353‑354; Г. Федотов, Святые Древней Руси (Москва: Московский
рабочий, 1990), p. 105.
12
Полное Собрание Русских Лeтописей, 2 vols, 2nd ed. (С.-Петербург:
Типография М. А. Александрова, 1908), ii: Ипатьевская лeтопись, pp. 115‑116.
13
Ат. Попов, “Търновград”, in Д. Овчаров, Т. Тотев, Ат. Попов, Стари
български столици: Плиска, Велики Преслав, Търновград (София: Септември, 1980),
p. 139.
Aleksandra Sulikowska
14
Реликвии в Византии и Древней Руси…, pp. 393‑394.
15
Л. А. Щенникова, “Чудотворная икона Богоматерь Владимирская как
Одигитрия евангелиста Луки”, in Чудотворная икона в Византии и древней Руси, ed.
by A. Лидов (Москва: Мартис, 1996), pp. 266‑267.
16
Н. С. Серегина, “Отражение исторических событий в стихире о Темир-
Аксаке и в других песнопениях Владимирской иконе и проблема автоства Ивана
Грозного”, in Памятники культуры: Новые открытия (Ленинград: Наука, 1985),
pp. 150‑153; cf. P. Bushkovitch, Religion and Society in Russia…, p. 103.
17
Реликвии в Византии и Древней Руси…, p. 403.
18
О. И. Подобедова, Московская школа живописи при Иване IV: Работы в
Московском Кремле 40-х – 70-х годов XVI в. (Москва: Наука, 1972), p. 15; A. Sulikow
ska, The Icon Debate. Religious Images in Russia in the 15th and 16th Centuries (Frankfurt
am Main: Peter Lang), pp. 80‑81.
ICONS AND RELICS IN RELIGIOUS POLICIES OF THE MUSCOVITE RUS’
Aleksandra Sulikowska
scribing the lives of saints happening in the fifteenth and sixteenth cen-
turies, such as the clear separation of stories regarding what happened to
the saint after his or her death as well as his or her relics and the miracles
performed by the icons. 23
Icon-related activities undertaken in the sixteenth century in Mos-
cow within Metropolitan Macarius’ circle seem like attempts to repeat
the events connected with the establishment of the Kiev Orthodox
Church. The part of Kiev Pechersk Patericon devoted to the beginnings
of the Pechersk monastery in Kiev in the eleventh century features a rich
story about Greek workers sent to the Dnieper River by the Theotokos
herself. According to accounts she appeared in one of the biggest sanctu-
aries of Constantinople: Blachernae. She told them she wanted “to have
the church built” for her “in Rus’ in Kiev” and that she wanted to arrive
there to “see the church and live […] in it”. She gave them gold and the
relics of martyrs required to start the construction as well as the “pa-
tronal” icon for the temple. 24 The legend illustrates the belief that Old
Rus’ took over appropriated Byzantine traditions and thus that these
two entities should be treated equally. It also points to the role played
by the cult of Theotokos developed in Old Rus’ after Christianization.
Similar in significance for the Grand Duchy of Moscow was The Tale
about Miracles Surrounding the Icon of Theotokos of Tikhvin from the first
half of the sixteenth century (fig. 3). According to the same source, as
early as 1383 Theotokos decided that her image should be moved from
Constantinople, where she did not wish to stay, to Old Rus’, where she
made an appearance at the Ladoga Lake. Despite the Byzantines’ best
efforts she would not return to the emperor’s city and chose Rus’ as her
new “fatherland”. 25 In this context, one legend among several popular
Russian stories about icons is particularly interesting: the one popular-
ized by Ivan Peresvetov who wrote in The Books Story that God spoke
to patriarch Athanasius and explained to him the conquest of Constan-
tinople by the Turks by saying that “I did not give them temples to sneer
at: you saw my shining mark in the sky because I took all the holy objects
23
В. О. Ключевский, Древнерусские жития святых как исторический источник
(Москва: Типография Грачева, 1871), p. 417.
24
Древнерусские патерики, ed. Л. А. Ольшевская, С. Н. Травников (Москва:
Наука), pp. 12‑13 (English translation: M. Happel, The Paterik of the Kievan Caves Mon‑
astery (Cambridge, MA: Harvard University Press, 1989)).
25
И. А. Иванова, “Икона Тихвинской Богоматери и ее связь со Сказанием о
чудесах иконы Тихвинской Богоматери”, Труды Отдела Древнерусской Литературы,
22 (1966), pp. 419‑436.
ICONS AND RELICS IN RELIGIOUS POLICIES OF THE MUSCOVITE RUS’
Aleksandra Sulikowska
31
“Żywot i czyny czcigodnej matki naszej świętej Petki, a także rzecz o przenosin-
ach jej świętych szczątków do sławnego grodu Tyrnowa: spisane przez wielebnego Eu-
tymiusza, patriarchę tyrnowskiego”, in Siedem niebios i ziemia: antologia dawnej prozy
bułgarskiej, selec., transl., foreword by T. Dąbek-Wirgowa (Warsaw: Państwowy Instytut
Wydawniczy, 1983), pp. 199, 203.
32
G. K. Holum, G. Vikan, “The Trier Ivory, Adventus, Ceremonial, and the Relics
of St Stephen”, Dumbarton Oaks Papers, 33 (1979), p. 117.
33
“Летописецъ Новгородский Церквамъ Божимъ”, in Новгородские
летописи, 2 vols, ed. А. И. Цепков (Рязань: “Александрия”, 2002), i, p. 305; Полное
Собрание Русских Лeтописей, 43 vols (Moscow, 1846-), ii, 3: Ипатевская лeтопись
(Санктпетербург: Типография Эдуарда Праца, 1843), pp. 233‑373; Реликвии в
Византии и Древней Руси…, pp. 359, 392, 420;; cf. M. Vassilaki, “Bleeding Icons”, in
Icon and Word: the Power of Images in Byzantium, ed. by A. Eastmond, L. James (Burl-
ington: Ashgate, 2003), pp. 121‑134.
ICONS AND RELICS IN RELIGIOUS POLICIES OF THE MUSCOVITE RUS’
34
Московский Патерик: Древнейшие Святые Московской земли, ed. by С. В.
Завадская (Москва: “Православная энциклопедия”, 2003), pp. 122‑123.
35
Московский Патерик…, pp. 170‑171.
36
Е. Голубинский, История канонизации святых…, p. 45.
37
Московский Патерик…, pp. 170‑173.
Aleksandra Sulikowska
38
“Летописецъ Новгородский Церквамъ Божимъ…”, pp. 306‑307.
39
“Летописецъ Новгородский Церквамъ Божимъ…”, p. 307.
40
“Летопись по сборнику архивскому, или Малиновскаго”, in Новгородские
летописи…, i, p. 89.
ICONS AND RELICS IN RELIGIOUS POLICIES OF THE MUSCOVITE RUS’
the gates of Korsun’ where a table was set with a goblet and “water and
relics of many saints”: “And the bishop began to bless the water and place
the saints’ relics in the water and the water boiled in the chalice”. Later
the bishop went on to make a sign of a cross and bless everyone with
water (“водою кропилъ”), including the tsar and the tsar’s son Ivan, as
well as the faithful and icons. 41
One of the crucial problems involved in the research of Moscow’s
culture of the fifteenth and sixteenth centuries has been the issue of the
development of its identity on the basis of the idea of tradition and its
different sources. On the one hand, there is no doubt that the basic mean-
ing of the term resulted from continued attitudes and beliefs shaped in
Byzantine times. On the other hand, in the Old Russian culture of the
period there are clear attempts at establishing its own authority, largely
independent from external sources. The Korsunian icons and other cult
objects were mentioned in many texts in this respect.
In sixteenth century sources the Korsunian objects (корсунские
письма) usually referred to icons also called “old” or “Greek”. It was
probably a synonym indicating their ancient origins. Possibly, the term
Korsunian icons was used to describe sacred objects believed to have ar-
rived in Kievan Rus’ right after the baptism of Duke Vladimir the Great
in 988. 42 According to the Primary Chronicle, this took place in Kor-
sun’ (Chersonesos). The chronicle states that the duke “took the tsar’s
daughter and Anastasius and Korsunian priests with the relics of saint
Clement and Teb, his disciple, he also took the church utensils and icons
to provide him with blessings”. 43 The connection between the Korsunian
icons and the Christianization of Kievan Rus’ is confirmed by the speech
of metropolitan Macarius at the Council of Moscow in 1553‑1554
about “icons which ought to be a model for iconographers”. The met-
ropolitan mentioned The Annunciation of Ustyug that had been trans-
ferred by Ivan IV from Novgorod to Moscow, and had been brought to
the Yuryevsky Monastery in Novgorod “from Korsun’ over five hundred
years ago”. 44 The term of Korsun’ is undoubtedly used to describe items
41
“Летопись по сборнику архивскому…”, p. 103.
42
A. Poppe, “On the So-Called Chersonian Antiquities”, in Medieval Russian Cul‑
ture, ed. by H. Birnbaum, M. S. Flier (Berkeley: University of California Press, 1984),
pp. 71‑72.
43
Ипатьевская лeтопись (Санктпетербург: Типографія М. А. Александрова,
1908), p. 101.
44
М. Веретенников, Московский митрополит Макарий…, p. 238; cf. A. Poppe,
“On the So-Called Chersonian Antiquities…”, p. 99.
Aleksandra Sulikowska
from Greece but it could also have been used to describe Balkan and Old
Russian works perceived as “ancient”. 45 The word “blessing”, that is used
in The Primary Chronicle, is also important: in Moscow, the Korsunian
icons may have been considered as having come from an ancient and
holy past, and being connected to the Christianization of Rus’ as well as
bearing a special blessing, i.e. carrying God’s grace.
Pointing out the sources of canonical Eastern Orthodox art at the
council of 1553‑1554, Macarius did not speak only about “all the holy
churches” of the mount Athos where, according to the metropolitan,
models of Old Russian paintings were kept, but also about icons and
mural paintings in Moscow, Novgorod, Pskov and Tver. 46 Protopope
Silvester said in his speech that “great dukes” of Rus’ “sent for Greek
iconographers to paint churches and icons” and stressed the continuity
of this tradition at the time of Ivan the Terrible: “In the whole Russian
state of the tsar […] Ivan Vasilevich, local masters painted the walls and
icons according to the Greek and Korsunian tradition”. 47 Although we
should not forget that the purpose of these statements was to secure the
Eastern Orthodox character from canonically doubtful icons (which
were painted as a response to the speech of dyak Ivan Viskovatyi who
denied their status), they were in fact a reflection of the Moscow church
hierarchy’s belief that Rus’ was maintaining and protecting the ancient
Orthodox traditions.
The continuity of the Eastern Orthodox tradition and customs was
made possible by replacing, in the eschatological view of history, Con-
stantinople with Moscow and through Moscow’s takeover of the title
and rank of the emperor’s city and, in consequence, the leadership within
the Eastern Orthodox world. 48 Moscow’s ambitions are made obvious in
one of the parts of the Life of Metropolitan Peter that mentions the met-
ropolitan’s voyage to Constantinople. When he arrived for a meeting in
the Hagia Sophia with patriarch Atanasius and walked through the door
“the room filled with a beautiful smell” 49 and when the patriarch agreed
that Peter was the metropolitan of Rus’ “his face was filled with light”. 50
45
A. Poppe, “On the So-Called Chersonian Antiquities…”, p. 100.
46
М. Веретенников, Московский митрополит Макарий…, pp. 238‑239, 242.
47
М. Веретенников, Московский митрополит Макарий…, p. 271.
48
О. И. Подобедова, Московская школа живописи…, pp. 18‑20.
49
Московский Патерик…, pp. 98‑101.
50
Московский Патерик…, pp. 100‑101.
ICONS AND RELICS IN RELIGIOUS POLICIES OF THE MUSCOVITE RUS’
This story can be compared with certain other texts from the Ortho-
dox tradition, such as the legend about Saint Nicholas leaving for Myra
saying that “his face and hands were filled with light and holy myrrh
emanated from his face, hands and legs [so that] the whole town was
filled with a wonderful scent of myrrh and all the sick were healed, the
blind could see, the deaf regained their hearing, the disabled could walk,
lepers were purified and [those] possessed by evil spirits were abandoned
by demons”. 51 That description of Nicholas was indeed unusual. It men-
tions that the saint’s face and hands were shining as if they were a source
of light, which brings to mind ancient icons. On the other hand, if we
interpreted the text literally, the light coming from the face and hands of
the saint could have been caused by myrrh pouring out. It is noteworthy
that the myrrh was pouring out of the visible body parts, which resem-
bles the miracle-working icons where different substances pour out of
the face or hands of the characters. The story describes the bishop’s ar-
rival into town as if he was an icon or relic and perhaps this was the idea
of the authors. On the other hand, the style of the text is ceremonial,
which is typical of Orthodox literature. The “iconic” description of an
immobile figure of the saint is contrasted with a dynamic description of
the results of his presence, such as the healing of the sick and of the suf-
fering and the release from demons. Therefore, the above description can
be interpreted as the arrival of an icon or relic in town.
Also, the story of metropolitan Peter reveals his status as saint by de-
picting him as an icon or relic which emits a pleasant smell and is filled
with light or as a person deceased – sources often similarly describe
saints on their deathbed. 52 The text can also be understood as a kind
of political manifesto: God himself reveals the hierarchical rank of the
Russian metropolitan in the most important temple in Constantinople.
His selection as metropolitan was thus legitimized not by way of a deci-
sion made by Constantinople’s patriarch according to the rules of the
Eastern Church, but by a higher power that the Byzantines could not
dispute. At the same time, we are dealing here with a reversal of the first
51
“Świętego ojca naszego Mikołaja, arcybiskupa mir licyjskiego żywot i [słowo] o
wędrówkach i pogrzebie jego”, in Kult świętego Mikołaja w tradycji prawosławnej, ed. by
A. Dejnowicz, transl. by J. Stradomski, M. Skowronek, A. Dejnowicz, R. Łużny, A. Nau-
mow, J. Pietrow (Gniezno: Wydawnictwo Fundacji Collegium Europaeum Gnesnense,
2004), p. 30; text in Old Church Slavonic: М. С. Крутова, Святитель Николай
Чудотворец в древнерусской письменности (Москва: “Мартис”, 1997), pp. 100‑112.
52
V. MacDermot, The Cult of the Seer In the Ancient Middle East: a Contribution to
Current Research on Hallucinations Drawn from Coptic and Other Texts (London: Well-
come Institute of the History of Medicine, 1971), p. 352.
Aleksandra Sulikowska
religious encounter between the Russians and the Byzantines in the 980s
when, according to the Primary Chronicle, envoys of Vladimir the Great
arrived in Constantinople in pursuit of the finest of religions. In Hagia
Sophia the Orthodox liturgy was presented to them. The Russians had
been so moved by it that they later said they did not know whether they
had gone to heaven or remained still on earth. To them “there could be
no such event or beauty on Earth”. Vladimir’s envoys realized and re-
ported to the duke of Kiev that in the Byzantine Church “God is with
men and their religious service is the best in all the lands”. 53 In the quot-
ed passage from The Life of Metropolitan Peter, the Russians turn again to
Constantinople, but not as disciples looking for knowledge and enlight-
enment from their Byzantine masters. This time, all signs pointed to the
fact that it was the Russian Orthodox Church which was the true carrier
of tradition and unchanging orthodoxy. This church became an heir to
the Byzantine Church, equal in its authority and grace.
53
Ипатьевская лeтопись…, 2nd ed., p. 95.
ICONS AND RELICS IN RELIGIOUS POLICIES OF THE MUSCOVITE RUS’
Aleksandra Sulikowska
ICONS AND RELICS IN RELIGIOUS POLICIES OF THE MUSCOVITE RUS’
Fig. 5. Welcome of Paraskeve’s relics at the gates of Tarnovo, Border scene of saint
Paraskeve icon, Fifteenth century, Sanok, Historical Museum
Aleksandra Sulikowska
ICONS AND RELICS IN RELIGIOUS POLICIES OF THE MUSCOVITE RUS’
Pierre Gonneau
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 357-386
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111937
Pierre Gonneau
1
P. Gonneau, « L’Étape de ‘Troitza’ dans la découverte de la Russie par les voya-
geurs français », dans L’influence française en Russie au xviiie siècle, Actes du colloque,
éd. par J.-P. Poussou, A. Mezin, Y. Perret-Gentil (Paris : Institut d’études slaves, 2004),
p. 337‑358 (p. 358).
2
Cf. P. Gonneau, « L’Odyssée religieuse de Vasilij Grigorovič Barskij à travers les
chrétientés latine et grecque », Revue des études slaves, 70 (1998), p. 399‑409 (p. 402).
3
Pamjatniki literatury Drevnej Rusi, 12 vol. (Moscou : Xudožestvennaja literatu-
ra, 1978‑1994), i (1978), p. 122.
4
D. Rowland, « Two Cultures, One Throne Room : Secular Courtiers and Or-
thodox Culture in the Golden Hall of the Moscow Kremlin », dans Orthodox Russia :
Belief and Practice Under the Tsars, éd. par V. Kivelson, R. H. Greene (University Park :
Pennsylvania State University Press, 2003).
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
Il n’y a aucune différence entre [l’Évangile et l’icône], car tous deux nous
annoncent la même Bonne Nouvelle. En effet, l’évangéliste (slovopisec) a
5
D. Rowland, « Moscow – the Third Rome or the New Israel ? », Russian Review,
55 (1996), p. 591‑614.
6
P. Gonneau, La Maison de la Sainte Trinité : un grand monastère russe du moyen-
âge tardif (Paris : Klincksieck, 1993), p. 230‑246.
Pierre Gonneau
Les ouvrages sur les icônes dont nous disposons sont de trois types : mo-
nographies, consacrées à une école régionale, à une période, ou à un ar-
tiste, inventaire des collections d’un musée, et catalogue d’exposition.
Associée à la peinture on trouve aussi la broderie liturgique, destinée à
être exposée dans les églises, au pied des icônes, sur les tombeaux, ou
ornant les vêtements des desservants du culte. Selon Joseph de Voloko-
lamsk : « Si le tisserand et le peintre sont habiles, ils accomplissent tous
deux la même tâche, l’un, avec ses multiples fils, l’autre avec ses couleurs
variées fabriquent la même image et il n’y a aucune différence 9. » Les
broderies témoignant d’une dévotion particulière sont parées de perles
et parfois de pierres précieuses, ce qui les apparente à un autre art de
l’image, celui de la joaillerie. Les principales œuvres en ce domaine sont
les objets du culte, les reliquaires, les reliures ornées en métal précieux et
les revêtements d’icône (oklady).
L’architecture et l’iconographie russes se sont définies avant tout en
adaptant des modèles byzantins, mais elles se sont ouvertes aussi à des
influences orientales (venues des khanats tatars et du monde sino-mon-
gol) méridionales (Empire ottoman, Perse, Géorgie, Arménie) et occi-
dentales (germaniques au sens large et italiennes). La Pologne-Lituanie
est aussi une zone de transfert d’idées vers le monde russe, en particulier
quand s’y installent des transfuges russes, comme ce fut plus particuliè-
rement le cas dans la seconde moitié du xvie siècle.
Du point de vue géographique, Moscou est la capitale des images, le
lieu par excellence où elles sont rassemblées et produites. Dès le règne
de Vassili I (1389‑1425), le souverain moscovite commence à se poser
en protecteur des Églises orthodoxes du monde grec. C’est ainsi qu’en
1398, il envoie de larges aumônes à Constantinople assiégée par « les
païens musulmans, les maudits Turcs ». En reconnaissance, l’empereur et
7
Le terme Smotrenie désigne le dessein de Dieu, la Providence divine, mais évoque
aussi l’idée de ressemblance. L’Évangéliste et le peintre nous peignent le Christ tel qu’il
était en tant que Verbe incarné.
8
N. A. Kazakova, Ja. S. Lur’e, Antifeodal’nye eretičeskie dviženija na Rusi
XIV-načala XVI veka (Moscou, Léningrad : Izdatel’stvo Akademii nauk SSSR, 1955),
p. 338.
9
Cf. N. A. Kazakova, Ja. S. Lur’e, Antifeodal’nye eretičeskie dviženija…, p. 333.
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
le patriarche lui offrent « un cadeau, une icône miraculeuse sur laquelle
sont peints le Sauveur, les anges, les apôtres et les justes, tous en vêtements
blancs » 10. Il est vrai que le grand-prince de Tver’ est lui aussi gratifié d’une
icône du Jugement Dernier. Un siècle plus tard, sous les règnes de Vassi-
li III (1505‑1533) et de son fils Ivan le Terrible (1533‑1584) les échanges
avec l’orthodoxie grecque captive des Turcs sont plus intenses que jamais.
Ivan le Terrible, descendant du côté maternel de la lignée royale de Serbie,
a la volonté de reprendre à son compte le patronage qu’exerçaient les Ne-
manides sur les lieux saints de l’Athos. Le fils d’Ivan, Fedor I (1584‑1598),
puis son successeur Boris Godounov (1598‑1605) poursuivent dans cette
voie. Un courant se développe, attirant à Moscou des ecclésiastiques du
monde balkanique, de Grèce et de l’Orient, venus quêter auprès de « l’au-
tocrate » russe. Ils apportent avec eux des icônes réputées miraculeuses et
de nombreuses reliques. Leur afflux peut être comparé à celui qu’a connu
l’Occident plus tôt, par exemple la France à l’époque de saint Louis.
Il existe toutefois encore d’importantes écoles locales. À l’ouest,
Novgorod et Pskov étaient réputées pour leurs architectes et leurs
peintres. L’annexion de ces cités par Moscou (respectivement en 1478 et
1510) s’accompagne de la suppression de leurs anciennes libertés et de la
déportation d’une grande partie de leurs élites. Toutefois, les traditions
artistiques se perpétuent encore au xvie siècle. Les « écoles » d’icônes
de Tver’, Rostov et Jaroslavl’, trois villes situées sur la Volga, sont égale-
ment reconnaissables. On voit aussi naître l’école des Stroganov, qui doit
son nom à une famille de commanditaires, en pleine ascension sociale
à l’époque d’Ivan le Terrible 11. En ce qui concerne la documentation
écrite, on observe la même dialectique entre centralisation moscovite et
développement de nouveaux centres régionaux.
Questions de terminologie
Le corpus des documents qui nous informent sur les images, leur fabri-
cation et leur usage, ainsi que sur les artistes est à la fois peu abondant et
plus varié qu’on ne l’imagine. Avant de le passer en revue, il convient de
10
Troickaja letopis’ : rekonstrukcija teksta, éd. par M. D. Priselkov (Moscou, Lénin-
grad : Izdatel’stvo Akademii nauk SSSR, 1950), p. 448.
11
A. A. Vvedenskij, Dom Stroganovyx v XVI‑XVII vekax (Moscou : Izd. so-
cial’no-èkonomičeskoj literatury, 1962) ; Sainte Russie : l’art russe des origines à Pierre
Le Grand, sous la dir. de J. Durand, D. Giovanonni, I. Rapti (Paris : Musée du Louvre ;
Somogy, 2010), p. 592‑598.
Pierre Gonneau
12
Slovar’ russkogo jazyka XI‑XVII vv., 28 vol. (Moscou : Nauka, 1975-), iv (1977),
p. 79‑80.
13
Slovar’ drevnerusskogo jazyka XI‑XIV vv., 10 vol. (Moscou : Russkij jazyk, 1988),
iv (1991), p. 22‑23.
14
Slovar’ russkogo jazyka XI‑XVII vv…, vi (1979), p. 266.
15
Slovar’ russkogo jazyka XI‑XVII vv., t. 12, M., 1987, p. 133‑135.
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
dès le Récit des temps passés 16), 2) maître d’un ordre militaire allemand
(en particulier des chevaliers de Livonie, 3) chef, superviseur (seule-
ment dans la Bible compilée par l’archevêque Guennadi de Novgorod
en 1499, sous forte influence latine), 4) enseignant, maître, docteur, 5)
médecin, guérisseur 17.
Enfin, un mot nouveau, emprunté au latin persona, fait son appari-
tion au début du xvie siècle et se propage sous de nombreuses variantes :
parsiona, parsona, parsuna, personja, persuna, porsuna 18. Ses signifi-
cations sont assez proches les unes des autres et quatre d’entre elles ne
concernent pas notre sujet : 1) personne, individu, 2) hypostase, 3) vi-
sage, aspect extérieur, 4) personnage de théâtre (dernier tiers du xviie
siècle). Mais le terme a aussi un sens plus particulier : 5) portrait au sens
plein du terme. Par là il faut entendre, une image peinte, le plus souvent
sur un support (la toile) et suivant des techniques (l’huile) empruntées à
l’Occident, représentant un individu précis avec un certain souci de res-
semblance. Naturellement, cette forme est nouvelle et en rupture avec les
normes et les pratiques de l’iconographie sacrée. Ces quelques termes-
clés se retrouvent dans un large éventail de sources.
16
La plus ancienne chronique des Slaves orientaux, compilée à Kiev entre 1110 et
1117.
17
Slovar’ russkogo jazyka XI‑XVII vv., t. 9, M., 1982, p. 36‑37.
18
Slovar’ russkogo jazyka XI‑XVII vv., t. 14, M., 1988, p. 310‑311.
19
Cf. Pamjatniki literatury Drevnej Rusi…, ii : XII vek, p. 588‑598 ; M. Heppell,
The Paterik of the Kievan-Caves Monastery (Cambridge MA : Harvard University Press,
1989, p. 192‑199. Voir aussi V. Puc’ko, « Kievskij xudožnik XI veka Alimpij Pečers-
kij, po skazaniju Polikarpa i dannym arxeologičeskix issledovanij », Wiener slavistisches
Jahrbuch, 25 (1979), p. 63‑88.
Pierre Gonneau
peintre reconnu pour son art est largement rémunéré. Alype fait excep-
tion : alors qu’il a acquis une maîtrise parfaite de l’art de l’icône (dobrě
izvyk˝ xytrosti ikonněj), il ne veut pas en tirer de profit. L’hagiographe
fait à cette occasion un jeu de mot en opposant Dieu (Bog) et la richesse
(bogatstvo). Alype manifeste aussi une piété exemplaire, ce qui lui vaut
d’être ordonné prêtre. Il s’emploie à ne jamais rester inactif et peint sans
cesse. Quand il n’a pas de commande, il achète à crédit l’or et l’argent
nécessaires à la peinture et paie sa dette avec l’œuvre qu’il vient de réali-
ser. Il a soin aussi de restaurer (obnoviti) les icônes abimées. Un miracle
particulier manifeste à la fois son talent artistique et son pouvoir d’inter-
cession. Un homme riche, ayant contracté la lèpre, se rend au monastère
des Grottes, mais les conditions de sa guérison ne sont pas réunies : il a
cru bon d’essayer divers guérisseurs et sorciers avant d’avoir recours aux
moines et il n’a pas la foi nécessaire. Voilà pourquoi, lorsque les frères
lui lavent le visage avec l’eau du puits de saint Théodose, premier abbé
des Grottes, le malade ne guérit pas, mais son état empire. Le pécheur se
confesse alors à Alype. Celui-ci commence par une catéchèse : il « ins-
truit longuement » le pécheur sur le salut de son âme, puis entreprend,
littéralement, de restaurer le visage lépreux avec les couleurs qu’il utilise
pour les icônes. C’est ainsi qu’il « lui rendit l’apparence et la beauté qui
étaient les siennes auparavant » (i sego na pervoe podobie i blagoobrazie
pretvori) 20. Ensuite, en lavant à l’eau le visage, il le débarrasse de la lèpre
qui affecte sa peau, mais aussi son âme. Le récit se poursuit sur deux épi-
sodes similaires au cours desquels des icônes commandées à Alype sont
peintes ou achevées par une intervention divine. Dans le premier cas, il
est question de sept icônes de grande taille, cinq destinées à la rangée de
la Déésis, deux à celle des icônes « locales » 21. Installées dans diverses
églises, elles réchappent miraculeusement des incendies et des effondre-
ments. Dans le second cas, un ange vient achever le travail qu’Alype ne
peut terminer, parce qu’il est à l’article de la mort. Le commanditaire,
qui se lamentait de ne pouvoir obtenir le tableau au jour de la fête qui
avait motivé sa commande, est rempli d’une terreur sacrée en voyant
l’œuvre achevée qui resplendit d’un éclat particulier. Alype est, de nos
20
Pamjatniki literatury Drevnej Rusi…, ii, p. 592 ; M. Heppel, The Paterik…, p. 195.
21
Naměstnye ou městnye ikony. Icônes « locales » ou icônes « à place fixe », figu-
rant sur la rangée inférieure de l’iconostase où l’on trouve notamment, du côté droit en
regardant la porte royale, l’icône représentant le saint ou la fête à qui l’église est consa-
crée, cf. M. Roty, Dictionnaire russe-français des termes en usage dans l’Église russe, 3e éd.
(Paris : Institut d’études slaves, 1992) p. 44 ; Slovar’ russkogo jazyka XI‑XVII vv…, ix,
p. 111.
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
22
A. Ebbinghaus, Die altrussischen Marienikonen-Legenden (Berlin : O. Harras-
sowitz, 1990).
23
G. Lenhoff, « Temir Aksak’s Dream of the Virgin as Protectress of Muscovy »,
Die Welt der Slaven, 49 (2004), p. 39‑64 ; D. B. Miller « How the Mother of God sa-
ved Moscow from Timur the Lame’s Invasion in 1395 : the Development of a Legend
and the Invention of a National Identity », Forschungen zur Osteuropäischen Geschichte,
50 (1995), p. 247‑265.
24
A. Frolow, « Le Znamenie de Novgorod : évolution de la légende », Revue des
études slaves, 24 (1948), p. 67‑81 ; idem, « Le Znamenie de Novgorod : les origines de
la légende », Revue des études slaves, 25 (1949), p. 45‑72 ; V. Vodoff, « Le culte du Zna-
menie à Novgorod : tradition et réalité historique », dans idem, Christianisme, pouvoir
et société chez les Slaves orientaux (xe‑xviie siècles) (Paris : Institut d’études slaves, Centre
d’études slaves, 2003), p. 143‑158 ; G. Lenhoff, « Novgorod’s Znamenie Legend in Mos-
cow’s Stepennaia kniga », dans Moskovskaja Rus’ : specifika razvitija, Knigi po rusistike,
13 (Budapest : Russica Pannonicana, 2001), p. 175‑182.
25
Au xixe siècle, on trouve des icônes « récapitulatives », réunissant sur une seule
image la plupart des types connus, cf. Sainte Russie…, p. 669‑670.
Pierre Gonneau
26
« Philosophe » est employé ici dans un sens laudatif, qui fait de Théophane une
sorte de théologien.
27
Troickaja letopis’…, p. 445, 450, 459, 466. Sur les problèmes soulevés par la lec-
ture de la notice de 1405, voir P. Gonneau, À l’aube de la Russie moscovite : Serge de Ra-
donège et André Roublev. Légendes et images (xive‑xvie s.) (Paris : Institut d’études slaves,
2007), p. 33‑34, 252.
28
Cf. L. M. Evseeva, Afonskaja kniga obrazcov XV v : o metode raboty i modeljax
srednevekovogo xudožnika (Moscou : Indrik, 1998), p. 11‑32.
29
Cf. G. V. Markelov, Svjatye Drevnej Rusi materialy po ikonografii : prorisi, perevo-
dy, ikonopisnye podlinniki, Grafika russkoj ikony, 2 vol. (St-Pétersbourg : Bulanin, 1998).
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
30
Pamjatniki literatury Drevnej Rusi…, iv, p. 444‑446. Voir aussi P. Gonneau,
À l’aube de la Russie moscovite…, p. 258‑261.
31
Cf. Vkladnaja kniga Troice-Sergieva monastyrja, éd. par E. N. Klitina, T. N. Ma-
nušina, T. V. Nikolaeva (Moscou : Nauka, 1987).
32
Cf. Votčinnye xozjastvennye knigi XVI v., éd. par A. G. Man’kov, 3 vol. (Moscou,
Léningrad : Institut istorii SSSR, 1978‑1987).
33
Cf. L. Steindorff, Das Speisungsbuch von Volokolamsk : Kormovaja kniga Iosi-
fo-Volokolamskogo monastyrja. Eine Quelle zur Sozialgeschichte russischer Kloster im 16.
Pierre Gonneau
trouve aussi des renseignements sur les icônes, comme dans ce Sinodik
du monastère de la Dormition-Saint-Joseph de Volokolamsk, datant de
la fin du xvie siècle. On y apprend qu’entre 1503 et 1504 une anonyme
« a donné des icônes peintes par Andreï Roublev, dont le prix est de 20
roubles ». En 1561, l’archimandrite du monastère de Simonovo, près
de Moscou, offre trois icônes « Et la troisième est une icône de tous
les saints et un diptyque de voyage (skladni putnye), avec un parement
d’argent, peints par Rublev » 34.
Les archives des grands-princes de Moscou et des tsars se sont consti-
tuées plus tard que les fonds monastiques et ont subi davantage de
pertes, du fait de diverses catastrophes. On possède toutefois un assorti-
ment assez complet de testaments et de traités à partir du xive siècle. Les
testaments (duxovnye gramoty) comprennent avant tout des dispositions
politiques, en particulier sur le partage des territoires entre les héritiers
mâles et l’épouse du testateur. Mais on y trouve aussi des legs plus per-
sonnels d’icônes, de pièces d’orfèvrerie et de livres. On peut suivre ainsi
la transmission de père en fils d’une icône revêtue d’or, attribuée à un
certain Paramša (ikona […] Paramšina děla), depuis Ivan II (testament
rédigé vers 1358) jusqu’à Vassili I (mars 1423). Il est ensuite question
(entre 1461 et 1504) d’une croix fabriquée par le même Paramša, ce qui
semble indiquer qu’il s’agit d’un orfèvre plutôt que d’un peintre 35.
En ce qui concerne les artistes, nos connaissances sont plus restreintes
encore, puisque, dans l’esprit d’humilité monastique, ils ont tendance à
rester anonymes. On peut distinguer trois cas. Le premier, extrêmement
rare, est celui où un peintre fameux, d’origine russe ou étrangère, est
mentionné dans les sources narratives (chroniques ou textes hagiogra-
phiques). Ces informations sont malgré tout ponctuelles et ne suffisent
pas à reconstituer la vie et l’œuvre du peintre 36. Le deuxième, à peine
Jahrhundert, Bausteine zur slavischen Philologie und Kulturgeschichte, Neue Folge, Rei-
he B ; Editionen 12 (Cologne : Bohlau Verlag, 1998).
34
N. A. Kazakova, « Svedenija ob ikonax Andreja Rubleva naxodivšixsja v Volo-
kolamskom monastyre v XVI v. », Trudy Otdela Drevne-Russkoj Literatury, 15 (1958),
p. 310‑311 (p. 311).
35
Duxovnye i dogovornye gramoty velikix i udel’nyx knjazej XIV‑XV vv., éd. par
L. V. Čerepnin (Moscou, Léningrad : Izdatel’stvo Akademii nauk SSSR, 1950), p. 18, 36,
56, 59, 61, 197, 362. The Testaments of the Grand Princes of Moscow, éd., trad. et comm.
par R. C. Howes (Ithaca NY : Cornell University Press, 1967), p. 98, 199, 216, 222, 232,
239, 259, 296.
36
Pour Roublev, cf. Andrej Rublev i ego èpoxa : sbornik statej, dir. par M. V. Alpatov
(Moscou : Iskusstvo, 1971), ainsi que les études-antagonistes de B. N. Dudočkin (Andrej
Rublev : materialy dlja izučenija biografii i tvorčestva [Moscou : RIO gos NIIR, 2000]) et
V. A. Plugin (Master Svjatoj Troicy : trudy i dni Andreja Rubleva [Moscou : Mosgorarhiv,
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
plus fréquent, est celui où des sources documentaires, y compris les ins-
criptions sur les œuvres elles-mêmes, nous révèlent les traces de peintres
ou d’artisans-artistes dont certains sont ceux que citent les sources nar-
ratives, mais dont d’autres sont à peu près inconnus. Enfin, dans le reste
des cas, les documents se contentent de dire qu’un commanditaire a fait
peindre, fabriquer, copier un objet, ou bien a ordonné de décorer une
église, sans que l’on sache qui a exécuté le travail. Il en est souvent de
même dans le monde du livre où beaucoup d’œuvres sont totalement
anonymes. Dans d’autres cas, l’auteur ou le copiste mentionne seule-
ment son prénom, éventuellement son état. Dans un domaine aussi sen-
sible du point de vue doctrinal que la question des images, l’autorité des
textes était primordiale. Ils ont donc des statuts différents.
2001]). Pour Dionisij, cf. Dionisij i iskusstvo Moskvy XV‑XVI stoletij : katalog vystavki, éd.
par V. K. Laurina (Léningrad : Iskusstvo 1981). En français : P. Gonneau, À l’aube de la
Russie moscovite…, p. 33‑38 ; Sainte Russie…, p. 361‑369, 390‑395.
37
Sur les Judaïsants, cf. T. M. Seebohm, Ratio und Charisma : Ansätze und Aus-
bildung eines philosophischen und wissenschaftlichen Weltverständnisses im Moskauer
Rußland, Mainzer Philosophische Forschungen, 17 (Bonn : Bouvier Verlag H. Grund-
mann, 1977) ; C. De Michelis, La Valdesia di Novgorod : ‘Giudaizzanti’ e prima riforma
(sec. XV) (Torino : Claudiana, 1993) ; M. Taube, « The Fifteenth-Century Ruthenian
Translations from Hebrew and the Heresy of the Judaizers : is There a Connection ? »,
dans Speculum Slaviae Orientalis : Muscovy, Ruthenia and Lithuania in the Late
Middle Ages, éd. par V. V. Ivanov, J. Verkholantsev (Moscou : Novoe izdatel’stvo 2005),
p. 185‑208.
38
Cf. A. I. Alekseev, Sočinenija Iosifa Volockogo v kontektse polemiki 1480‑1510-x gg.
(St-Pétersbourg : Rossijskaja nacional’naja biblioteka, 2010).
Pierre Gonneau
Joseph de Volokolamsk
La position de l’abbé Joseph à propos des icônes s’exprime de la façon la
plus développée dans son Épître au peintre et sermons sur la vénération
des icônes 39. La rédaction de cet ensemble de textes serait antérieure au
synode de 1490 qui prononça la première condamnation des Judaïsants,
mais il a été probablement remanié au début du xvie siècle, juste avant le
second synode qui entreprit d’éradiquer l’hérésie, en 1504.
Joseph écrit dans un contexte où les saints russes et les images ont
fait l’objet d’attaques répétées et où le dogme même de la Trinité est
parfois remis en question. Il s’efforce donc de donner une catéchèse ac-
cessible et intransigeante sur le bon usage des icônes et sur la doctrine
trinitaire. Son but premier est de rappeler les « nombreuses et indicibles
différences » qui existent entre les « saintes icônes » des chrétiens et les
« immondes idoles » des païens. Puis, pour combattre le courant hos-
tile aux images, qu’il accuse de pencher vers le judaïsme, Joseph défend
la liberté de représenter des images, liberté qu’il reconnaît à n’importe
quel fidèle, peintre professionnel ou simple amateur. Enfin, il insiste sur
l’égalité parfaite des trois hypostases de la Trinité qui doit se refléter dans
l’iconographie.
Quand nous peignons les images des saints sur des icônes, ce n’est pas
l’objet que nous vénérons, mais c’est notre esprit et notre pensée qui
s’envole, pour ainsi dire, de cette représentation matérielle pour at-
teindre le désir et l’amour de Dieu à l’aide desquels la Grâce divine opère
des miracles et des guérisons indicibles. […] Il faut savoir que chaque
chrétien peut peindre sur les très vénérables icônes divines, ou sur les
murs, ou sur les vases consacrés la Sainte Trinité, une, indivisible, et non
confondue et s’incliner avec crainte et tremblement, foi et amour de-
vant cette ressemblance divine et immaculée, la baiser avec un zèle sans
limite et un ardent amour. […] Ils étaient assis tous trois au même en-
droit, égaux en gloire, égaux en honneur, sans qu’aucun ne soit supérieur
ou inférieur et ils reçurent d’Abraham le même service et la même véné-
ration. Or, si Dieu était venu en compagnie de deux anges, comment les
anges auraient-ils osé partager le trône de Dieu ? […] Ajoutons encore à
ce propos que, comme l’Écriture a dit que la Sainte Trinité est apparue
alors à Abraham sous une forme humaine, les saints et divins Pères nous
ont transmis de la peindre sur les saintes icônes sous une forme royale et
angélique ; ils nous ont transmis ceci, parce qu’ils voulaient conférer à
ces représentations divines le plus grand honneur possible. Le fait qu’ils
39
Cf. N. A. Kazakova, Ja. S. Lur’e, Antifeodal’nye eretičeskie dviženija…, p. 321.
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
soient assis sur un trône montre leur royauté, leur seigneurie et leur pou-
voir. Le fait qu’ils aient des couronnes de forme arrondie autour de la
tête, à la façon des saints, s’explique parce que le cercle représente Dieu
qui est cause de tout, étant donné que le cercle n’a ni début ni fin, tout
comme Dieu n’a ni début ni fin. Le fait qu’ils aient des ailes montre
leur nature qui les porte en-haut, qui est automotrice, ascensionnelle,
légère, étrangère aux choses terrestres. Les sceptres qu’ils ont à la main
montrent leur nature agissante, autonome et puissante. Ceci manifeste
donc leur ressemblance divine, royale et angélique 40.
Si grands étaient leur vertu et leur zèle à jeûner et à pratiquer la vie mo-
nastique, qu’ils furent jugés dignes de la Grâce divine, et ils firent tant de
progrès dans l’amour de Dieu qu’ils ne s’adonnaient jamais aux diver-
tissements terrestres, mais élevaient sans cesse leur esprit et leur pensée
vers le monde immatériel et divin, tournaient toujours leur œil sensible
vers les images peintes depuis des siècles 41 du Seigneur Christ, de Sa
Mère Immaculée et de tous les saints. Si bien que lors de la fête de la
radieuse Résurrection du Christ, ils s’asseyaient sur un siège, face aux
icônes divines très vénérables, et les contemplaient sans les quitter des
yeux, ce qui les remplissait de la joie et de la splendeur divines. Et ils ne
le faisaient pas que ce jour-là, mais tous les jours où ils ne s’adonnaient
pas à la peinture 42.
40
Citations de l’édition N. A. Kazakova, Ja. S. Lur’e, Antifeodal’nye eretičeskie
dviženija na Rusi…, p. 333‑336, 338, 361, 372.
41
Traduction de : ot veščnyx vekov ; une variante donne ot veščnyx vapov : « à l’aide
de couleurs matérielles ».
42
Cité dans : P. Gonneau, À l’aube de la Russie moscovite…, p. 257.
Pierre Gonneau
43
Théodose était le fils du célèbre peintre d’icône Dionisij : Iosif Volockij, Posla-
nija Iosifa Volockogo, éd. par A. A. Zimin, Ja. S. Lur’e (Moscou, Léningrad : AN SSSR,
1959), p. 270.
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
44
Le Stoglav, ou les Cent Chapitres : recueil des décisions de l’assemblée ecclésiastique
de Moscou, 1551, trad., introd. et comm. par E. Duchesne, Bibliothèque de l’Institut
français de Pétrograd, 5 (Paris : E. Champion, 1920, p. 27‑28). E. Emčenko, Stoglav :
issledovanie i tekst (Moscou : Indrik, 2000) p. 254‑255. La traduction française d’E.
Duchesne a été revue et modifiée par nos soins.
Pierre Gonneau
son diocèse, avec un soin et une attention particuliers à ce que les bons
peintres d’icônes et leurs élèves reproduisent les anciens modèles, à ce
qu’ils s’abstiennent de toute fantaisie personnelle et ne figurent pas la
Divinité selon leurs conjectures » [čtoby gorazdyja ikonniky i ix˝ uče-
niky pisali z drevnix obrazcov˝, a ot samosmyšlenia by i svoimi dogadkami
Božestva ne opisyvali] 45.
Plusieurs extraits des trois Discours sur les images de Damascène (I, 20 ;
II, 9/III, 9 ; II, 21 ; III, 135) rappellent également la citation du Stoglav 47.
Il est clair dans le contexte russe que le peintre qui sait conjuguer la
maîtrise de son art avec une vertu exemplaire se trouve en position d’être
45
Stoglav, éd. par E. Duchesne…, p. 133‑136. Stoglav, éd. par E. Emčenko…,
p. 320‑322.
46
Stoglav, éd. par E. Duchesne…, p. 136. Stoglav, éd. par E. Emčenko…, p. 322.
47
Je remercie ma collègue Vassa Kontouma pour l’identification de ces passages.
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
Ceux qui jusqu’à présent ont peint des icônes sans avoir appris, à leur
fantaisie et à leur guise, sans suivre les modèles [ne učasja, samovol’stvom
i samolovkoju i ne po obrazu], et les ont cédées à vil prix à des gens du
commun, des incultes, dans les villages, il leur sera enjoint d’étudier au-
48
Stoglav, éd. par E. Duchesne…, p. 136. Stoglav, éd. par E. Emčenko…, p. 322.
49
Pamjatniki prava perioda ukreplenija russkogo centralizovannogo gosudarstva
XV‑XVII vv., Pamjatniki russkogo prava, 4 (Moscou : Gos. Izdatel’stvo juridičeskoj lite-
ratury, 1956), p. 233 (art.1), p. 234 (art.7).
Pierre Gonneau
près de bons maîtres. Celui à qui Dieu donnera de peindre selon l’image
et la ressemblance, qu’il peigne, et celui à qui Dieu ne l’accordera pas,
qu’il s’abstienne définitivement de cette activité, afin que le Nom de
Dieu ne soit pas offensé par pareille peinture. Si d’aucuns ne cessent pas
cette activité, qu’ils subissent le châtiment et le jugement du courroux
du tsar. Et s’ils disent : « C’est de cela que nous vivons et nous nourris-
sons », il ne faut pas tenir compte de leur objection, car c’est par igno-
rance qu’ils parlent ainsi et ils ne sont pas conscients de leur péché. Il
n’est pas donné à tout homme d’être peintre d’icône [ne vsěm čelověkom
ikonopiscem byti], nombreux et divers sont les métiers [rukodějstvia] que
Dieu a donné aux hommes pour qu’ils s’en nourrissent et en vivent, en
dehors de la peinture d’icônes, et il ne faut pas exposer l’image de Dieu
à la honte et aux outrages 50.
On voit errer par le pays des moines, des nonnes, des prêtres, des laïcs,
des femmes, des vieillards infirmes : ils portent de saintes icônes. Ils font
des collectes […] et demandent l’aumône dans les foires et dans les rues.
Ils vont par les villages, par les fermes, avec des icônes. Que l’assemblée
délibère à ce sujet. Comment décider pour l’avenir ? Y a-t-il une loi an-
térieure ? N’est-ce pas outrager les saintes icônes ? [ne porugatel’no li to
svjatym˝ obrazom ?]. Les étrangers s’en étonnent 52.
50
Stoglav, éd. par E. Duchesne…, p. 135. Stoglav, éd. par E. Emčenko…, p. 321‑322.
51
Stoglav, éd. par E. Duchesne…, p. 259. Stoglav, éd. par E. Emčenko…, p. 412.
52
Stoglav, éd. par E. Duchesne…, p. 34. Stoglav, éd. par E. Emčenko…, p. 258.
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
Les archiprêtres, les prêtres doyens, les prêtres désignés à cet effet, tous
les prêtres dans chaque ville, dans toutes les saintes églises, inspecteront
les saintes icônes, les vases sacrés, tout ce qui sert aux saints offices […].
Si certaines icônes ont souffert des injures du temps, ils les feront réparer
par des peintres ; celles qui ne sont pas suffisamment enduites d’huile
devront être huilées 54.
53
Stoglav, éd. par E. Duchesne…, p. 209. Stoglav, éd. par E. Emčenko…, p. 376.
54
Stoglav, éd. par E. Duchesne…, p. 82‑83. Stoglav, éd. par E. Emčenko…, p. 287.
Pierre Gonneau
55
Stoglav, éd. par E. Duchesne…, p. 107. Stoglav, éd. par E. Emčenko…, p. 304.
56
Stoglav, éd. par E. Duchesne…, p. 111‑112. Stoglav, éd. par E. Emčenko…,
p. 306‑307.
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
57
D’après l’index de Russkaja srednevekovaja knižnaja miniatjura : napravlenija,
problemy i metody izučenija (Moscou : ROSSPEN, 2004).
Pierre Gonneau
Ce feuillet fut très demandé par les autres peintres d’icônes de Moscou,
si bien que beaucoup d’entre eux le copiaient pour leur propre usage là
où ils pouvaient le trouver, l’empruntant l’un après l’autre, pleins d’ému-
lation. Après tous les autres, je voulus moi aussi, en tant que peintre, le
copier de quatre façons : j’ai placé cette église dans mon livre à quatre
endroits : 1) au début du livre, dans l’Évangile de Matthieu, là où se trou-
vait la colonne de Justinien 58 et l’image de l’évangéliste Matthieu ; 2) la
même église se trouve à l’incipit de l’Évangile de Marc, 3) également,
avant l’incipit de l’évangéliste Luc, 4) et là où débute la Bonne Nouvelle
de Jean ; quatre églises et quatre évangélistes ont été peints 59.
58
La colonne de Justinien était une statue équestre de l’empereur byzantin, attesté
également par le pèlerinage d’Etienne de Novgorod, qui se rendit à Constantinople en
1348‑1349 (cf. Pamjatniki literatury Drevne Rusi…, iv, p. 28).
59
Pamjatniki literatury Drevne, Rusi…, iv, p. 446 ; P. Gonneau, À l’aube de la Rus-
sie moscovite…, p. 260.
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
60
Cf. Sainte Russie…, p. 539.
61
Cf. V. D. Černyj, Russkaja srednevekovaja knižnaja miniatjura…, p. 362, 381.
62
Bibliothèque Nationale de Russie à Moscou=RGB (ex-Bibliothèque Lénine),
fds. 304, n°162, cf. Rukopisnaja kniga, 2 vol. (Moscou, 1974‑1983), i (1974), p. 256‑285 ;
V. D. Černyj, Russkaja srednevekovaja knižnaja miniatjura…, p. 311, 314.
63
Bibliothèque Nationale de Russie à St-Pétersbourg=RNB (sigle actuel, aupara-
vant GPB Saltykov-Ščedrin), fds. OLDP, Q. 795.
Pierre Gonneau
64
Cf. V. D. Černyj, Russkaja srednevekovaja knižnaja miniatjura…, p. 358.
65
RGB, fds 37, n°15, cf. V. D. Černyj, Russkaja srednevekovaja knižnaja miniatju-
ra…, p. 333‑335.
66
RGB, fds 178, n°8663 ; cf. P. Gonneau, À l’aube de la Russie moscovite…,
p. 293‑324.
67
Cf. Russkaja letopisnaja istorija, dans Licevoj letopisnyj svod XVI veka, 41 vol., éd.
par V. V. Morozov, E. V. Uxanova, L. P. Mustafina [et al.] (Moscou : Akteon, 2009‑2010),
xi (2010), p. 2‑112.
68
GIM, fds Vaxrameev, n°71, reproduit en fac-similé Povest’ o Zosime i Savvatii,
éd. par M. M. Černilovskaja, G. V. Popov, B. P. Žuravskij, 2 vol. (Moscou : Kniga, 1986).
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
tés du grand nord russe, comme la solitude absolue de l’hiver sur une île
au milieu de la Mer Blanche prise par les glaces 69.
Du point de vue à la fois quantitatif et qualitatif le sommet de l’art
de l’enluminure est atteint par la monumentale compilation connue
sous le nom de Chronique enluminée (Licevoj letopisnyj svod) conçue à
la cour d’Ivan le Terrible entre 1568 et 1576. Il s’agit d’une somme his-
torique de 10 000 feuillets manuscrits, riches de 17 000 miniatures. Les
originaux, restés un siècle environ en feuilles volantes, ont été reliés au
xviie siècle en dix énormes tomes qui se trouvent répartis de nos jours
entre la Bibliothèque Nationale de Russie à St-Pétersbourg (RNB), la Bi-
bliothèque de l’Académie des sciences à St-Pétersbourg (BAN) et la Bi-
bliothèque du Musée national d’histoire de Moscou (GIM) 70. Tout ré-
cemment, une édition complète en fac-similé vient de paraître, mettant
ce corpus à la disposition des chercheurs. L’ensemble s’ouvre sur trois
chronographes qui reprennent l’histoire du monde d’après la Bible, puis
survolent l’Antiquité grecque et romaine, ainsi que l’histoire byzantine.
On y trouve aussi la version russe (empruntée à la tradition serbe) du
Roman d’Alexandre. Les sept autres tomes (comprenant 6 010 feuillets
et 11 357 enluminures) narrent l’histoire russe, depuis 1114 jusqu’en
1567. Ce projet naquit dans des circonstances politiques très particu-
lières, puisqu’il fut lancé à l’époque où Ivan le Terrible avait instauré un
régime de terreur (dit de l’opričnina) et quitté Moscou pour une nou-
velle capitale, Aleksandrova Sloboda (à 80 km environ au Nord). En ten-
tant de réaliser une histoire universelle illustrée, il essayait de surpasser
tous les « grands narratifs » précédents, qui avaient été conduits sous la
supervision de l’Église. Certes, il n’est pas question ici de « laïcisation »
de l’histoire, une notion totalement anachronique, mais le tsar essaie
de tirer davantage le récit historique vers une apologie de l’autocratie et
une critique de la subversion. Les passages qui ont le plus attiré l’atten-
tion sont d’ailleurs ceux des deux derniers volumes qui manifestent la
volonté de corriger le récit de certains épisodes politiquement sensibles
du règne d’Ivan le Terrible : 1533‑1542, 1546‑1547 et 1553. Les correc-
tions insistent sur la trahison des boyards aux heures critiques et la juste
colère du souverain. Il est aussi intéressant de relever une rectification
iconographique lourde de sens entre le « tome Synodal » et le « Livre
69
Cf. P. Gonneau, « Solovki au péril de la mer : havre de sainteté et enjeu de pou-
voir entre Novgorod et Moscou (xve‑xviie s.) », Cristianesimo nella Storia : ricerche sto-
riche, esegetiche, teologiche, 23 (2002), p. 681‑704 (p. 698‑702).
70
Cf. l’édition fac-similé Licevoj letopisnyj svod XVI veka… Voir aussi V. D. Černyj,
Russkaja srednevekovaja knižnaja miniatjura…, passim ; Sainte Russie…, p. 456‑458.
Pierre Gonneau
71
RGB, fds 304, n°100.
72
Cf. V. D. Černyj, Russkaja srednevekovaja knižnaja miniatjura…, ill. 9 et p. 40‑42,
149‑151, 224‑226, 267‑272.
73
Cf. l’édition fac-similé Radzivilovskaja letopis’, comm. par M. V. Kukuškina,
2 vol. (St-Pétersbourg, Moscou : Iskusstvo ; Glagol, 1994) ; V. D. Černyj, Russkaja sred-
nevekovaja knižnaja miniatjura… ; Sainte Russie…, p. 67‑68.
74
GIM, fds Barsov, n°1697, cf. V. D. Černyj, Russkaja srednevekovaja knižnaja mi-
niatjura…, p. 358.
L’IMAGE EN RUSSIE AU SIÈCLE D’IVAN LE TERRIBLE
Conclusions
Les conclusions de ce rapide parcours ne sauraient être que partielles et
provisoires. On constate que les Russes du siècle d’Ivan le Terrible pos-
sèdent une grammaire élaborée des images qu’ils peuvent utiliser dans
des ouvrages monumentaux comme dans une sphère plus personnelle.
Les codes sont strictement définis et proscrivent expressément la « fan-
taisie ». Plus encore que l’art d’écrire et de lire, l’art de représenter et en
particulier de peindre est réservé à une petite minorité dont le travail
est extrêmement valorisé. L’insistance sur la parfaite préparation spiri-
tuelle des peintres, déjà sensible chez Joseph de Volokolamsk, et encore
accentuée dans le Stoglav, montre que la confection d’une image sainte,
comme la copie d’un livre, s’apparente à l’accomplissement d’un office
religieux, ou encore aux exercices de méditation et de prière. Toute pen-
sée ou action mauvaise compromet irrémédiablement l’élan vers le divin
et fait que l’offrande n’est pas reçue. Cette exigence s’accompagne d’une
forte méfiance vis-à-vis des initiatives spontanées en matière d’images.
L’art est le domaine réservé d’ouvriers habiles, aux mœurs pures, il ne
doit rien avoir en lui de « naïf ». S’il existe bien, depuis les débuts de la
75
V. D. Černyj, Russkaja srednevekovaja knižnaja miniatjura…, p. 110, 124, 188,
214, 247, 324‑326, 350‑354.
76
V. D. Černyj, Russkaja srednevekovaja knižnaja miniatjura…, p. 440‑441.
77
Institut d’Histoire de l’Académie des sciences de Russie à Saint-Pétersbourg
(connu sous le sigle SPbIIRAN), anciennement Section de Leningrad de l’Institut d’his-
toire de l’Académie des sciences de l’URSS (connue sous le sigle LOII), fds. N. P. Lixačev
n°71 et Bibliothèque de l’Académie des sciences à St-Pétersbourg, 34.3.5. Cf. V. D. Čer-
nyj, Russkaja srednevekovaja knižnaja miniatjura…, p. 97‑98.
Pierre Gonneau
78
Velikie Minei Čet’i : sobrannye mitropolitom Makariem, aprel’ 8‑21 (Moscou : s.n.,
1912), 17 avril, col. 549.
79
Cf. H. Belting, Spiegel der Welt : die Erfindung des Gemäldes in den Niederlanden
(Munich : C. H. Beck, 2010).
Grażyna Jurkowlaniec
1
I would like to thank Aleksandra Sulikowska for her comments and sug-
gestions to the first draft of this essay, which stems from the research project Agency
of Things. New Perspectives on European Art of the Fouteenth-Sixteenth Centuries,
supported by the National Science Centre, Poland (no 2013/09/B/HS2/01444).
The attitude of the Orthodox Ruthenian vis-à-vis Muscovy has been recently scruti-
nized by T. Hodana, Między królem a carem: Moskwa w oczach prawosławnych Rusinów
– obywateli Rzeczypospolitej, Studia Ruthenica Cracoviensia, 4 (Cracow: „Scriptum”,
2008), especially pp. 41‑45.
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 387-421
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111938
Grażyna Jurkowlaniec
were often accused by the Catholic authors of seeking support from the
“Muscovite churches”. However, the role of Moscow in the Orthodox
writings actually remained quite marginal until the seventeenth century.
In 1588, when the idea arose to establish a patriarchate in Kiev, its subor-
dination to Rome or preferably to Constantinople, but certainly not to
Moscow, was considered (the idea, however, never materialized and, in
1589, it was the Metropolia of Moscow that was elevated to the rank of
patriarchate).
The reign of Sigismund III Vasa (1587‑1632) marks, in the history
of the Polish-Lithuanian Commonwealth, the end of the era of toler-
ance and inaugurates the period of re-catholicization. As a response, the
Protestants and the Orthodox made efforts to form coalitions against
the Catholics, however, these alliances did not last and were fractured by
a number of disagreements. 2 The event that further complicated the reli-
gious and national fabric of the Polish-Lithuanian Commonwealth was
the proclamation of the Union of Brest (1595, signed in 1596), accord-
ing to which the Orthodox could retain their own rite, while breaking
relations with the Patriarch of Constantinople and placing themselves
under the Patriarch of Rome, i.e. the Pope. This divided the Orthodox
between those who accepted the Union and thus became Catholics un-
der the Byzantine rite (or Greek Catholics), called “Uniates”, and those
who rejected it: the “Disunited”. Among the latter, there were those who
looked to Constantinople for authority, 3 while others sought support in
Muscovy where they were met, however, with suspicion (i.e. they were
kept away from the holy icons). 4
The situation was to change again once a more tolerant king, Ladis-
laus IV Vasa (1632‑1648), acceded to the throne. The Orthodox living
in the Polish-Lithuanian Commonwealth ceased to look toward Mos-
cow with hope, whereas the role of Kiev noticeably increased thanks to
the efforts of Metropolitan Peter Mohyla (1574‑1647). 5 However, in
1686 the Kievian metropolitan was subordinated to the Patriarchate
2
T. Kempa, Wobec kontrreformacji: protestanci i prawosławni w obronie swobód
wyznaniowych w Rzeczypospolitej w końcu XVI i w pierwszej połowie XVII wieku (Toruń:
A. Marszałek, 2007).
3
D. A. Frick, Meletij Smotryc’kyj (Cambridge, MA: Harvard Ukrainian Research
Institute, 1995), especially pp. 89‑146.
4
T. Hodana, Między królem a carem…, pp. 111‑122.
5
L. V. Charipova, Latin Books and the Eastern Orthodox Clerical Elite in Kiev
1632‑1780 (Manchester: Manchester University Press, 2006), especially pp. 39‑65;
T. Hodana, Między królem a carem…, p. 172.
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
6
P. Skarga, O iedności Kościoła Bożego pod iednym Pasterzem y o Greckim od tey
Jedności odstąpieniu (Vilnius: J. K. Radziwiłł, 1577), p. 348; on polemics among the
Catholics, Orthodox and Uniates see: J. Stradomski, Spory o “wiarę grecką” w dawnej
Rzeczypospolitej (Cracow: “Scriptum”, 2003).
7
B. Dąb-Kalinowska, Między Bizancjum a Zachodem: ikony rosyjskie XVII‑XIX
wieku (Warsaw: Państwowe Wydawn Naukowe, 1990), especially pp. 9‑52; O. Tarasov,
Icon and Devotion: Sacred Spaces in Imperial Russia (London: Reaktion Books, 2002),
especially pp. 207‑300; A. Sulikowska, The Icon Debate. Religious Images in Russia in the
15th and 16th Centuries (Frankfurt am Main: Peter Lang, 2016).
8
K. Sakowicz, ΕΠΑΝΟΡΘΩΣΙΣ abo Perspectiwa y obiasnienie Błędów, Herezyey,
y Zabobonow, w Grekoruskiey Cerkwi Disynitskiey (Cracow: W. Piątkowski, 1642), p. 3.
Grażyna Jurkowlaniec
not of the Church. 9 Likewise, the proper “true tradition” was defined in
various ways and the preferred sources for renewal were disputed. Of-
ten the recommended models were related to Rome, Constantinople or
Moscow, but also Kiev.
9
P. Mohyla, Λίθος abo Kamien z procy prawdy Cerkwie świętej prawosławnej rusk-
iej… (Kiev: Kievo-Pečerska lavra, 1644), p. 20. He added that it was the Uniates of the
monastery of Supraśl who replaced ancient, silver images with “Italian paintings” ex-
ecuted on canvas or even on paper. The controversy between Sakowicz and Mohyla has
been analyzed by M. Janocha: “Unia brzeska a malarstwo ikonowe w XVIII wieku: di-
alog wyznań czy dialog kultur”, in Sztuka i dialog wyznań w XVI i XVII wieku: materiały
Sesji Stowarzyszenia Historyków Sztuki, Wrocław, listopad 1999 (Warsaw: Stowarzyszenie
Historyków Sztuki, 2000), especially pp. 400‑403.
10
T. M. Trajdos, “Kult wizerunków maryjnych na ziemiach ruskich Korony i
Litwy drugiej połowy XIV i pierwszej połowy XV w. w społecznościach katolickiej i
prawosławnej”, Studia Claromontana, 5 (1984), pp. 127‑147.
11
A. Baniulytė, “The Cult of the Virgin Mary and its Images in Lithuania from the
Middle Ages until the Seventeenth Century”, in Paveikslas ir knyga: LDK dailės tyrimai
ir šaltiniai, Acta Academiae Artium Vilnensis, 25 (Vilnius: Vilniaus Dailės Akademijos
Leidykla, 2002), pp. 157‑193 (especially pp. 168‑169).
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
12
A. W. Kojałowicz, Miscellanea rerum ad Statum Ecclesiasticum in Magno Litu-
aniae Ducatu pertinentium (Vilnius: Typis Academicis, 1650), p. 35; W. Gumppen-
berg, Atlas Marianus sive de imaginibus Deiparae per orbem christianum miravulosis,
lib. IV (Ingolstadt: G. Hänlin, 1659), p. 283; P. H. Pruszcz, Morze łaski bożej które
Pan Bóg w Koronie Polskiej po różnych miejscach przy obrazach Chrystusa Pana i Mat-
ki Jego Przenaświętszej… co dzień obficie wylewa (Cracow: S. Lenczewski Bertutowicz,
1662), p. 53; Wacław z Sulgostowa [E. Nowakowski], O cudownych obrazach w Polsce
Przenajświętszej Matki Bożej wiadomości historyczne, bibliograficzne i ikonograficzne
(Cracow: s.n., 1902), p. 539; this and other copies of the Virgin of Loreto have been
mentioned by M. Kałamajska-Saeed, “Stan zachowania cudownych obrazów Matki
Boskiej z terenu dawnego Wielkiego Księstwa Litewskiego”, in Zabytki sztuki polskiej na
dawnych kresach wschodnich: materiały konferencji “Dzień dzisiejszy dawnej sztuki polskiej
na Wschodzie”, Warszawa, 12 grudnia 1994 r. (Warsaw: Instytut Studiów Politycznych
PAN, 1997), p. 60 (no. 18, 24, 33); see also R. Stankevičienė, “The Image The Blessed Vir-
gin Mary with the Child of the Šiluva Basilica: the Problems of the Origin, Iconographic
Context and Dating”, in Šiluva Lietuvos Kultūroje [Šiluva in Lithuanian Culture], Meno
istorija ir kritika [Art history & Criticism], 5 (Kaunas: Vytauto Didžiojo Universiteto
Leidykla, 2009), p. 26.
13
A. Fridrich, Historye cudownych obrazów Najświętszej Maryi Panny w Polsce,
3 vols (Cracow: Wydawnictwo Towarzystwa Jezusowego, 1903‑1911), iii (1908),
p. 232; Wacław z Sulgostowa, O cudownych obrazach…, p. 411.
14
A. W. Kojałowicz, Miscellanea…, p. 35; A. Fridrich, Historye cudownych
obrazów…, iv, p. 76.
15
G. Wolf, Salus Populi Romani: die Geschichte römischer Kultbilder im Mittelalter
(Wiesbaden: VCH Verlag, 1990), pp. 37‑59.
16
G. Wolf, Salus Populi Romani…, pp. 37, 96.
Grażyna Jurkowlaniec
plaining why the image of Mary in Santa Maria Maggiore was called
“Our Lady of the Snow”. An important shift in its cult was due to Pope
Pius V (1566‑1572). Soon after 1570, he put an end to the procession of
the 15 August, but also initiated (or at least contributed to initiating)
new customs related to the image of Our Lady of the Snow. After the
victory of the fleet of the Holy League in the battle at Lepanto in 1571,
Pius V ordered a thanksgiving procession during which the image was
carried, the rosary was recited, and the specific day of the battle was sub-
sequently celebrated as the Feast of the Virgin of the Rosary (name oc-
casionally attributed to the image of Mary of Santa Maria Maggiore). It
was also Pius V who granted Francesco Borgia, the General of the Jesuits
(1565‑1571), the privilege to execute official copies of this image. They
were taken by the Jesuits missionaries to Japan, China, Mexico, Brazil
and Ethiopia, but were also, because they were considered a weapon
against heretics, sent to Spain, Austria, Germany, Bohemia 17 as well as to
the Polish-Lithuanian Commonwealth.
In the Kingdom of Poland, the earliest representations of Our Lady
of the Snow already appeared in the late sixteenth century. 18 Images be-
lieved to have been transferred directly from Rome played a special role
(among them the one of Piotrków Trybunalski, which was thought to
17
P. M. D’Elia, “La prima diffusione nel mondo dell’immagine Maria Salus Populi
Romani”, Fede e Arte, 10 (1954), pp. 1‑11; M. Martini, Faville d’arte e di fede: storia della
Madonna di S. Luca in Roma e in Cina alla fine del secolo XVI, Äthiopistische Forschun-
gen, 10 (Rome: Casamari, 1967); S. Chojnacki, Major Themes in Ethiopian Painting: In-
digenous Developments, the Influence of Foreign Models and their Adaptation from the 13th
to the 19th Century (Wiesbaden: F. Steiner, 1983), pp. 217‑250; G. A. Bailey, Art on the
Jesuit Missions in Asia and Latin America 1542‑1773 (Toronto, Buffalo, London: Uni-
versity of Toronto Press, 1999); K. Noreen, “The Icon of Santa Maria Maggiore, Rome:
an Image and Its Afterlife”, Renaissance Studies, 19 (2005), pp. 660‑672; eadem, “Rep-
licating the Icon of Santa Maria Maggiore: the Mater Ter Admirabilis and the Jesuits
of Ingolstadt”, Visual Resources: an International Journal of Documentation, 24 (2008),
pp. 19‑37; J. Royt, Obraz a kult v Čechách 17. a 18 století, 2nd ed. (Prague: Karolinum,
2011), pp. 226, 312‑315.
18
A number of examples have been mentioned by M. Kornecki: “Matka Boska
Polska: adaptacja i rozpowszechnienie typu ikonograficznego obrazu Matki Boskiej
Śnieżnej od XVI do XVIII wieku”, in Między Wschodem a Zachodem, ed. by T. Chrza
nowski (Lublin: Lubelskie Towarzystwo Naukowe, 1992), iii: Kultura artystyczna,
pp. 365‑398; G. Jurkowlaniec, “Kopie wizerunku Matki Boskiej Śnieżnej w epoce
nowożytnej”, in Barok polski wobec Europy: sztuka przekładu. Materiały międzynarodowej
konferencji naukowej w Warszawie 15‑17 września 2003 roku, ed. by A. Nowicka-Jeżowa,
M. Prejs (Warsaw: Anta, 2005), pp. 222‑240; L. Grzebień, A. P. Bieś, Obrazy Matki
Boskiej Śnieżnej (Salus Populi Romani) w Polsce na przełomie XVI I XVII wieku. Legendy
i fakty (Cracow: WAM, 2016).
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
Grażyna Jurkowlaniec
Certainly, the Jesuits and the Popes were not the only ones to con-
tribute to the cult of Our Lady of the Snow and other images considered
to have originated from Rome. They were also distributed by noble fami-
lies, bishops, as well as by various religious orders, such as the Carmelites,
the Franciscans and, above all, the Dominicans. 28 Thus, the circulation
of the copies of the Virgin of the Snow should be closely examined, bear-
ing in mind on the one hand the rivalry between the religious orders,
symptomatic of the Counter-Reformation era (particularly between the
new orders, such as the Jesuits, and the old ones, such as the Domini-
cans 29) and, on the other, the competition between the convents of a
single religious order. Such is the case for the two aforementioned im-
ages related to Clement VIII, and housed in the Dominican churches in
Cracow and Lutsk.
The Cracow image (fig. 1) was first recorded in 1606 by Domini-
can chronicler and hagiographer Abraham Bzowski as patterned after
the one of Santa Maria Maggiore, a copy that was considered especially
venerable as it had been brought from Rome along with a papal bless-
ing. 30 In the local sources of the mid-seventeenth century the image was
described as having been painted in Rome, consecrated and provided
with indulgences by Clement VIII, brought to Cracow by Bernard Ma-
ciejowski in 1597 – who, at the time, was legate to Rome and bishop of
Lutsk (since 1587 and subsequently in 1600 became bishop of Cracow,
then cardinal in 1604 and archbishop of Gniezno in 1606) – and do-
nated by him to the Dominican cloister. 31 The legend has it that Macie-
28
M. Kornecki, “Matka Boska Polska…”, pp. 376‑383.
29
On the rivalry between the Dominicans and the Jesuits see: P. Stolarski, “Do-
minican-Jesuit Rivalry and the Politics of Catholic Renewal in Poland 1564‑1648”, The
Journal of Ecclesiastical History, 62 (2011), pp. 255‑272; idem, Friars on the Frontier:
Catholic Renewal and the Dominican Order in Southeastern Poland 1594‑1648, Catholic
Christendom, 1300‑1700 (Farnham: Ashgate, 2010), especially p. 144. Another early
example of a copy of the image of Santa Maria Maggiore is the image originally venerated
in the Dominican church in Latyczów (nowadays in Lublin, the chapel of the Sisters
Servants of Mary Immaculate), believed to have been brought from Rome c. 1594‑1594
(recently: P. Stolarski, Friars…, p. 83; cf. L. Grzebień, A. P. Bieś, Obrazy Matki Boskiej
Śnieżnej…, pp. 105‑106).
30
A. Bzowski, Propago D. Hyacinthii Thavmatvrgi Poloni seu de rebus preclare gestis
in Prouincia Polonia Ordinis Praedicatorum: Commentarius (Venice: Societas Minima,
1606), p. 92.
31
Stołecznego miasta Krakowa kościoły i klejnoty (Cracow: F. Cezary, 1647); P. H.
Pruszcz, Morze łaski bożej…, pp. 30‑31; A. Fridrich, Historye cudownych obrazów…,
ii, pp. 120‑122; see also L. Grzebień, A. P. Bieś, Obrazy Matki Boskiej Śnieżnej…,
pp. 100‑104.
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
jowski initially wanted to take the image to Lutsk, but once in Cracow
Mary, having a similar appearance to the one represented in the image,
appeared to him. She was giving rosaries to St Dominic and St Augus-
tine, and was accompanied by Cracow academicians and canons: the
vision was therefore interpreted as a sign that Mary had chosen the Cra-
cow cloister as the place for the veneration of her image.
In the seventeenth century, Cracow boasted a number of images of
Our Lady of the Snow, among them an early, presumably late-sixteenth-
century, copy of the Roman prototype found in the Maciejowski chapel
in the cathedral (fig. 2). 32 It was also in the seventeenth century that the
Roman genesis of the Dominican image intermingled even more closely
with local history. Just like its prototype in Santa Maria Maggiore in
Rome, the panel housed in the Dominican church was carried during
processions to commemorate a victory over the Turks every first Sunday
of October. However, in Cracow this was not referred to as the battle
at Lepanto of the 7 October 1571, but as the local triumph, namely the
battle of Khotyn (Polish Chocim, Ukrainian Хотин) of the 2 September
– the 9 October 1621. 33 Subsequently, the same image was associated
with yet another triumph over the Turks: the battle of Vienna in 1683.
To commemorate this victory, the Rosary Chapel was erected on the axis
of the south nave of the Dominican church, and in 1688 the image was
displayed on its altar (where it remains still today).
Meanwhile, at least since the mid-seventeenth century, the Domini-
can friars in Lutsk insisted that it was their image of the Virgin of the
Snow that had been donated by Clement VIII to Bernard Maciejowski
and placed in their church. 34 Later, they even claimed that the image of
Lutsk had been painted by St Luke himself and preserved in the Apos-
tolic Palace in Rome before being donated by the Pope to the bishop
of Lutsk. Such was, at least, the official version of the image’s history
presented to the Chapter of St Peter’s in Rome by Franciszek Antoni
Kobielski, Bishop of Lutsk between 1739‑1755, alongside his plea for
32
M. Kornecki, “Matka Boska Polska…”, pp. 373‑376; G. Jurkowlaniec, “Kopie
wizerunku…”, pp. 230‑234.
33
Wacław z Sulgostowa posits that the first procession with the image was cel-
ebrated during a plague in 1600, and only the second one, in 1621, was related to the
triumph over Turks (O cudownych obrazach…, p. 285).
34
P. H. Pruszcz, Morze łaski bożej…, p. 48; cf. A. Fridrich, Historye cudownych
obrazów…, iv, pp. 326‑328; L. Grzebień, A. P. Bieś, Obrazy Matki Boskiej Śnieżnej…,
pp. 104‑105.
Grażyna Jurkowlaniec
35
Rome, Biblioteca Apostolica Vaticana, Archivio del Capitolo di San Pietro (=
BAV ACSP), Madonne coronate, VIII (1747‑1754), p. 64.
36
M. Bacci, Il pennello dell’Evangelista: storie delle immagini sacre attribuite
a San Luca (Pisa: GISEM, 1998), pp. 373‑380; G. Jurkowlaniec, Epoka nowożytna
wobec średniowiecza: Pamiątki przeszłości, cudowne wizerunki, dzieła sztuki (Wrocław:
Wydawnictwo Uniwersytetu Wrocławskiego, 2009), pp. 399‑407.
37
A. Fridrich, Historye cudownych obrazów…, ii, pp. 172‑176; Wacław z Sulgos-
towa, O cudownych obrazach…, p. 75‑76; M. Kornecki, “Matka Boska Polska…”, p. 383.
38
BAV ACSP, Madonne coronate, XXIX, p. 9 (cf. n. 35) (earlier accounts e.g.
A. W. Kojałowicz, Miscellanea…, pp. 28‑30).
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
39
P. Chomik, Kult ikon Matki Bożej w Wielkim Księstwie Litewskim w XVI‑XVIII
wieku (Białystok: Wydział Historyczno-Socjologiczny Uniwersytetu w Białymstoku,
2003), p. 180.
40
e.g. images which were said to have been brought “from the East, among pre-
cious relics” (BAV ACSP, Madonne Coronate, XXVII, fols 22‑23 and 128).
41
Ignacy Stebelski in his Dwa wielkie światła na horyzoncie połockim z cienów za-
konnych powstające czyli żywoty śś. panien i matek Ewfrozyny i Parascewii first published
in Vilnius in 1781 (then in Lviv 1866, vol. 1, pp. 70‑75), while he has no doubts that the
image of Polotsk was painted by St Luke, he presents its subsequent fates as highly prob-
lematic (cf. Wacław z Sulgostowa, O cudownych obrazach…, pp. 537‑538). Discussions of
contemporary scholars have recently been summarized by P. Chomik, Kult ikon Matki
Bożej…, pp. 121‑122.
Grażyna Jurkowlaniec
tain) was founded in 1383. Since the fifteenth century, pilgrims flocked
to Bright Mountain where they visited the miraculous image of Mary. 42
Its iconographical type follows the Byzantine model of the Hodegetria,
but the panel itself was presumably painted in Italy in the twelfth centu-
ry and then painted over twice: first, in Italy, in the fourteenth century,
and again, north of the Alps, in the fifteenth century, probably in the last
years of the Ladislaus Jagiełło’s reign (1386‑1434). 43
The oldest legend of the image of Częstochowa can be found in a
manuscript beginning with the words Translatio tabulae. 44 It claims the
image had been painted by St Luke on the table used by the Holy Family
in Nazareth, and afterwards was brought by Constantine the Great from
Jerusalem to Constantinople and given to one of the emperor’s soldiers,
namely, the Ruthenian Prince Lev, who sent the panel to Ruthenia. Still
according to legend, the King of Poland Casimir the Great invaded Ru-
thenia, and the image was hidden in the castle at Bełz. Casimir failed to
take over the castle, and the siege continued under his successor, Louis
of Hungary. Once the castle eventually capitulated, Louis bestowed Ru-
thenia to Duke Ladislaus of Opole, who supposedly rediscovered the
image. The castle of Bełz was attacked again; namely, by Tartars and
Lithuanians. When an arrow flew through the window and struck the
picture, a great darkness enveloped the assailants who fled in terror. Fi-
nally, Ladislaus of Opole decided to take the picture back to his own
lands, to the Bright Mountain of Częstochowa where he founded the
monastery of the Order of Saint Paul the first Hermit.
The manuscript of the Translatio tabulae dates back to 1474, and
is based on the version presumably written before 1430, since it does
not mention the blasphemous attack on the image recorded that very
year in the Annals of Jan Długosz (begun in 1455, his last entry is in
1480). The chronicler mentions some Polish noblemen, accompanied
by raiders from Bohemia, Moravia, and Silesia who, in 1430, after hav-
ing robbed the monastery, excised the gold and silver ornaments from
the image then broke the panel in order to frame contemporary “Bohe-
42
R. Maniura, Pilgrimage to Images in the Fifteenth Century. The Origins of the Cult
of Our Lady of Częstochowa (Woodbridge: Boydell and Brewer, 2004), pp. 95‑98 and
121‑126.
43
The literature on the subject has been recently analyzed by: M. P. Kruk, Ikony-
obrazy w świątyniach rzymsko-katolickich dawnej Rzeczypospolitej (Cracow: Collegium
Columbinum, 2011), pp. 40‑41, 152‑153, cat. no. 6.
44
Najstarsze historie o częstochowskim obrazie Panny Maryi. XV i XVI wiek, ed. by
H. Kowalewicz, transl. by H. Kowalewicz, M. Kowalewiczowa, introd. by H. Kowale-
wicz, Z. Rozanow (Warsaw: Instytut Wydawniczy Pax, 1983), pp. 67‑74.
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
mian iconoclasts” i.e. the Hussites. 45 In the Life of Jan Radlica, Bishop
of Cracow, Długosz also mentions the foundation of the monastery by
Ladislaus of Opole and his donation of the image of Mary, accidentally
discovered in Russia. 46 In the Book of the Benefices of the Bishopric of Cra-
cow (1470‑1480) this same author indicates that the image “is regarded
as one of those images that had been painted by the hand of St Luke
himself ”. 47
The account in the Translatio tabulae is historically unreliable in
many respects, but – more importantly, for our argument – it associates
the image of Częstochowa with several rulers, both ancient and recent,
among them a Byzantine Emperor and a Ruthenian Prince. In subse-
quent variants of the legend, for instance the Historia declaratoria of
1514, Constantine was replaced by Charles the Great. 48 However, this
does not mean that the implication of Byzantine Emperors in the his-
tory of Our Lady of Częstochowa became irrelevant. In 1517, Mikołaj
Lanckoroński purported that the image was transferred from Jerusalem
to Constantinople by Constantine’s mother, St Helen, along with the
Holy Cross and other relics. Subsequently, the author thoroughly de-
scribes the defense of the Holy Land by Charlemagne, to whom the im-
age was given by Emperor Nikephoros as a token of gratitude. Charles,
in turn, presented it to prince Lev in acknowledgment of his faithful ser-
vice. 49 This narrative was often repeated throughout the Early Modern
period i.e. by Piotr Hiacynt Pruszcz in his popular collection of stories
concerning venerable images in Poland, Morze łaski bożej (Sea of the di-
vine grace, first ed. 1662, second ed. 1740). 50
Catholic authors in Poland unanimously emphasized the following
places where the image had been preserved: Jerusalem, Constantinople,
Bełz and finally Częstochowa. The importance of Byzantine Emperors
in the story of the image was thus commonly acknowledged. Likewise,
45
J. Dlugossii, Annales seu Cronicae incliti Regni Poloniae, Lib. XI, 1413‑1430,
ed. by J. Wyrozumski e.a. (Warsaw: Państwowe Wydawnictwo Naukowe, 2000),
pp. 284‑285.
46
J. Dlugossii, Catalogus Episcoporum Cracoviensium, ed. by I. Polkowski, Ż. Pauli,
J. Dlugossii, Opera omnia, ed. by A Przeździecki, 15 vols (Cracow: “Czas”, 1863‑1887), i
(1887), p. 419.
47
J. Dlugossii, Liber beneficiorum dioecesis Cracoviensis, ed. by A Przeździecki,
vol. 3, in J. Dlugossii, Opera omnia, vol. 9 (Cracow: Ex Typographia Kirchmajeriana,
1864), p. 123.
48
Najstarsze historie o częstochowskim obrazie…, p. 96.
49
Najstarsze historie o częstochowskim obrazie…, p. 130.
50
P. H. Pruszcz, Morze łaski bożej…, p. 17.
Grażyna Jurkowlaniec
the Ruthenian prince Lev appears in all accounts, but his role occasion-
ally proves ambiguous. The authors of the Translatio tabulae and the
Historia declaratoria as well as of its German version, beginning with the
words Hie folget dy Historie, focus on Lev’s merits, as he venerated the
image and decorated it with gems, gold and silver; they also state that the
image went on to be worshipped by all of Lev’s subjects. 51 Lanckoroński,
on the other hand, while admitting that Lev embellished the panel, ac-
cused him of hiding the image it his castle of Bełz and only allowing Ru-
thenian priests access to it, for which he was justly punished, as he bore
no heirs. 52 This was reiterated in the legend by Piotr Rydzyński (1523)
and its Polish translation by Mikołaj of Wilkowiecko, as well as in a
number of accounts written in the seventeenth century, e.g. in the Diva
Claromontana by Andrzej Gołdonowski. 53 Thus, the Ruthenian episode
in the legend of Our Lady of Częstochowa could have become an anti-
Orthodox motif. Nonetheless, it was sometimes omitted, for instance in
Pruszcz’s Morze łaski bożej. Moreover, one cannot forget that it was in
Ruthenia that the image revealed its miraculous power for the first time,
nor ignore how Byzantine and Ruthenian legends made it famous. The
motif of the Tartar arrow that pierced the image during the siege of the
castle of Bełz recalls the story of the icon of the Sign, which is said to
have saved Novgorod in 1169‑1170 in a similar way. 54
Since the sixteenth century, the Virgin of Częstochowa was more
and more frequently presented as the palladium of the Kingdom of Po-
land. An important event was the thanksgiving for the victory over the
Muscovite army in the Battle of Orsza (1514) celebrated in the Bright
Mountain monastery, as testified by a note in the Liber miraculorum
copied c. 1580 after an earlier, original manuscript. 55 Subsequently, in
1568, Grzegorz of Sambor was the first to explicitly call Our Lady of
Częstochowa the patroness of Poland and Poles. 56 Częstochowa fig-
51
Najstarsze historie o częstochowskim obrazie…, pp. 67‑68, 96, 104‑105.
52
Najstarsze historie o częstochowskim obrazie…, p. 131.
53
Najstarsze historie o częstochowskim obrazie…, pp. 171, 211; A. Gołdonowski,
Diva Claromontana seu imaginis eius origo, translatio, miracula (Cracow: A. Petricovius,
1642), p. 36.
54
R. Maniura, Pilgrimage…, pp. 49, 54‑55.
55
Quoted by: J. Golonka, Ołtarz Jasnogórskiej Bogurodzicy: treści ideowe oraz ar-
tystyczne kaplicy i retabulum (Częstochowa: Wydawnictwo Zakonu Paulinów, 1996),
p. 284.
56
J. Budzyński, “O szesnastowiecznym poemacie łacińskim Grzegorza z Sambora
‘Censtochova’ (1568)”, Studia Claromontana, 2 (1982), pp. 49‑67 (especially pp. 65‑66).
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
ured among the most important shrines in the Kingdom, and became
the principal one by the mid-seventeenth century. In the title of the
book by Andrzej Malski (1642) the image was already explicitly called
Regni Poloniae Palladium Marianum, 57 however, it was only after the
so-called miraculous defense of the Bright Mountain monastery against
the Swedish troops during the “Deluge” of 1655 that the idea of the im-
age of Częstochowa as a palladium of Poland was consolidated. Malski’s
treatise was simply handwritten, whereas Augustyn Kordecki’s Nova gi-
gantomachia contra […] imaginem Deiparae Virginis […] in monte […]
Częstochoviensi […], per Suecos et alios haereticos excitata was printed in
1655 and decisively contributed to the image’s popularity and faith in its
protective power. In the mid-seventeenth century the fame of the Virgin
of Częstochowa was also universally acknowledged, as evidenced by the
fact that it was included (along with Our Lady in Borek, Greater Po-
land) in the first edition of Wilhelm Gumppenberg’s Atlas Marianus of
1657. 58
However, this does not mean that the image of Częstochowa did not
receive criticism. So far, only the opinions expressed by Catholic Pol-
ish writers have been quoted. Protestants, particularly Calvinists, who
rejected both the intercession of Mary and the cult of images, were also
skeptical as to the historical accuracy of the accounts provided by Catho-
lics, namely the very idea of Luke as a painter. It was also challenged
by Polish writers, among them Grzegorz of Żarnowiec who already in
1582 insisted that Luke painted only metaphorically, i.e. with words. 59
A number of authors, among others Marcin Krowicki, directly criti-
cized the image of Częstochowa for provoking superstitious practices:
pilgrimages, ex-votos or vows made by the faithful. 60 Erazm Gliczner,
in 1598, considered the representation of Mary a far cry from “a saintly
face” because it followed the beholder with its eyes and St Luke could
never have painted such eyes. 61 In addition, in 1611, Krzysztof Kraiński
57
A. Malski, “Regni Poloniae Palladium Marianum”, transl. and comment. by
M. Kowalewiczowa, introd. by J. Mozga, Studia Claromontana, 15 (1995), pp. 5‑70.
58
W. Gumppenberg, Atlas Marianus sive de imaginibus Deiparae per orbem chris-
tianum miraculosis, lib. II (Ingolstadt: Hänlin, 1657), pp. 186‑199.
59
Grzegorz z Żarnowca, Postylle Krześcijańskiey Cześć Trzecia, w ktorey na cały
rok są wypisane kazania o świętych, o kthorych nauczyć sye wszelki będzye mogl (Cracow:
M. Wierzbięta, 1582), pp. 606‑612.
60
M. Krowicki, Obrona nauki prawdziwey y wiary starodawney krześcijańskiej…
(Pińczów: Daniel z Łęczycy, 1560), fol. 113.
61
E. Gliczner, Appellatia, którą się popiera i znów wywodzi obrona dołożna Konfed-
eracyi Królestwa Polskiego (Królewiec [Königsberg]: G. Osterberger, 1598), fol. Kv.
Grażyna Jurkowlaniec
62
K. Kraiński, Postylla Kościoła powszechnego apostolskiego (Łaszczów: S. Ster-
nacki, 1611), fol. 715; quoted by K. Kolbuszewski, Postyllografia polska XVI i XVII wieku
(Cracow: Polska Akademia Umiejętnoości, 1921), p. 200 and J. Tazbir, “Różnowiercy
polscy wobec kultu maryjnego”, Studia Claromontana, 5 (1984), pp. 227‑228.
63
e.g. M. Haškoň in his Annotationes of 1666 or J. J. Středovsky in his Rubinus
Moraviae of 1712, both scrutinized by W. W. Zając: “Morawski spór o pochodzenie
obrazu Częstochowskiego”, Studia Claromontana, 16 (1996), pp. 31‑72; see also: P. Ze-
nek, “The Picture of the Czestochowa Virgin Mary in Uhersky Brod – Symbol of One
Epoch”, Studia Comeniana et historia, 32 (2002), pp. 140‑162.
64
W. W. Zając, “Morawski spór o pochodzenie…”, pp. 59‑65; J. Royt, Obraz a kult
v Čechách…, pp. 291, 328.
65
W. W. Zając, “Morawski spór o pochodzenie…”, pp. 60‑61; J. Royt, Obraz a kult
v Čechách…, p. 246.
66
BAV, ACSP, Madonne Coronate, VI, pp. 106‑134.
67
B. Dąb-Kalinowska, “Ikona Matki Boskiej Smoleńskiej w kościele Domini-
kanów w Gdańsku: problem kultu i funkcji”, in eadem, Ikony i obrazy (Warsaw: DiG,
2000), pp. 139‑155.
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
68
Die Aufzeichnungen des Dominikaners Martin Gruneweg (1562-c. 1618) ‑ über
seine Familie in Danzig, seine Handelsreisen in Osteuropa und sein Klosterleben in Polen,
ed. by A. Bues, 4 vols (Wiesbaden: Harrassowitz, 2008), p. 1018.
69
Sz. Okolski, Russia florida (Lviv: Collegium Societatis Jesu, 1646), pp. 71‑76
(quoted among others by: P. H. Pruszcz, Morze łaski bożej…, p. 53; A. Fridrich, His-
torye cudownych obrazów…, ii, p. 236; Wacław z Sulgostowa, O cudownych obrazach…,
pp. 391‑393; B. Dąb-Kalinowska, “Ikona Matki Boskiej Smoleńskiej…”, p. 145).
70
On this occasion further accounts were written in the mid-eighteenth century,
quoted by B. Dąb-Kalinowska, “Ikona Matki Boskiej Smoleńskiej…”.
71
BAV ACSP, Madonne coronate, V, fols 80‑105.
72
BAV ACSP, Madonne coronate, V, fols 153‑155; A. Fridrich, Historye cudownych
obrazów…, iv, pp. 130‑138; M. P. Kruk, Ikony-obrazy…, pp. 50‑51.
73
A. W. Kojałowicz, Miscellanea…, pp. 26‑28.
74
G. Mickūnaitė, “Maniera Graeca in Europe’s Catholic East: Byzantine Paintings
in the Parish Church of Trakai, Lithuania”, in East Meets West in the Early Modern Eu-
rope, eds by G. Jurkowlaniec, J. Łabno, Ikonotheka, 22 (Warsaw: Wydawnictwa Uniwer-
sytetu Warszawskiego, 2009), p. 52.
Grażyna Jurkowlaniec
75
G. Mickūnaitė, “The Merging of Orthodox and Catholic Artistic Tradi-
tions in the Painting of the Grand Duchy of Lithuania (Two Case Studies)”, in Li-
tauen und Ruthenien: Studien zu einer transkulturellen Kommunikationsregion (15.-18.
Jahrhundert)=Lithuania and Ruthenia: Studies of a Transcultural Communication Zone
(15th-18th Centuries), ed. by S. Rohdewald, D. Frick, and S. Wiederkehr, Forschungen zur
osteuropäischen Geschichte, 71 (Wiesbaden: Harrassowitz, 2007), pp. 355‑358.
76
G. Žalėnas, “Rekonstrukcja obrazu Matki Boskiej trockiej w świetle najnow-
szych badań”, Przegląd Wschodni, 7 (2001), pp. 775‑784 (especially p. 778).
77
A. W. Kojałowicz, Miscellanea…, p. 26‑27 (quoting: Sz. Mankiewicz, Kościół far-
ski trocki cudami Przenaświetszey Bogarodzice Panny Maryey (Vilnius: OO. Bazylianie u
Św. Trójcy, 1645)).
78
Vytautas was baptized, contrarily to what the author seems to suggest, in the
Greek rite.
79
English translation after: D. Baronas, “Byzantium and Lithuania: North and
South Look at Each Other”, in Byzantina et Slavica Cracoviensia (Cracow: Jagiellonian
University Press, 1991-), v: Byzantium, New Peoples, New Powers: The Byzantino-Slav
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
image, the so called Virgin of Old Trakai – also a fifteenth century im-
age repainted in the seventeenth century (but not to be confused with
the Virgin of Trakai) –, is nearly identical. It is described as “an ancient
image of a Byzantine school, brought as a gift by the Eastern Emperor
Manuel Palaiologos to Grand Duke Vytautas after he had baptized along
with the whole Lithuanian nation”. Vytautas reportedly donated the im-
age of Old Trakai to the Benedictine monastery in that town, where it
was preserved until 1832, and subsequently found its way to the Cathe-
dral of Vilnius (where it is today). 80 This account – written in Polish
in the mid-nineteenth century, purely fictional in terms of the image’s
origins as well as inaccurate in terms of its history – was apparently pat-
terned after the one involving the Virgin of Trakai, celebrated as the Pa-
troness of Lithuania.
Like Our Lady of Częstochowa, the Virgin of Trakai was not only
regarded as donated by Byzantine Emperors, but was also involved in
contemporary issues. An eminent Polish poet of the seventeenth cen-
tury, and also a Jesuit, Maciej Kazimierz Sarbiewski, mentioned in one
of his Latin odes composed in honor of this image (first published in
1624), the victories of Vytautas over the Ruthenian people and con-
nected them to the recent triumphs of Ladislaus (who, in 1632, became
King of Poland Ladislaus IV Vasa). 81 Undoubtedly, Sarbiewski bore in
mind the war with Muscovy 1609‑1618, which was to bring about the
coronation of Ladislaus as the tsar. One must remember, however, that
since the fourteenth century there were recurrent wars between Lithua-
nia, subsequently the Polish-Lithuanian Commonwealth, and Muscovy,
and in the seventeenth century images of Mary were becoming increas-
ingly instrumental in these conflicts. Already in 1611, Queen Constance
is said to have come to Our Lady of Trakai along with Piotr Skarga to
beg the Virgin to assist Sigismund III who at the time was beleaguering
Smolensk. 82
The fate of the city of Smolensk can be considered a synecdoche for
the wars between Poland-Lithuania and Muscovy. An object of constant
struggles since the fourteenth century, Smolensk was first incorporated
into Lithuania, but then recaptured by Vasili III in 1514. It was then tak-
Contact Zone from the Ninth to the Fifteenth Century (2007), pp. 303‑317 (here: note
71).
80
A. Baniulytė, “The Cult of the Virgin Mary…”, p. 173.
81
M. K. Sarbievii, Poemata omnia, ed. by F. T. Friedemenn (Leipzig: G. Wigand,
[1840]), p. 203.
82
A. Fridrich, Historye cudownych obrazów…, iv, p. 132.
Grażyna Jurkowlaniec
Between Moscow the third Rome and Kiev the new Jerusalem:
gifts, captives, war booty and war refugees
The idea of Moscow as the third Rome proved particularly important
during the reign of Ivan IV, the first Muscovite ruler who was crowned as
Tsar of All Russia, in 1547. Also in the mid-sixteenth century, as a conse-
quence of modernization and westernization observed in icon-painting,
the Stoglav synod in Moscow (“Hundred chapters synod”, 1551) ordered
that icons should be painted according to ancient Greek and Russian
models. 84 Certainly, this did not eradicate western influences, however
the hostility directed toward them by the Muscovite clergy, and toward
the Latin Church in general, began to grow. The reluctance felt by the
Muscovites toward the Catholics was not overlooked by the Jesuits. Pi-
otr Skarga stated that “Catholic” was considered an invective in Moscow
and that the Orthodox were prone to reconsecrate their churches after
an adherent to the Latin Church had entered it. 85 Antonio Possevino of-
fered another explanation for the Orthodox’ attitude, as he posited that
it was because of the Greeks, who envenomed the Muscovites’ behavior
toward the Catholics to such a degree that they discouraged the faithful
83
Recently: M. Poe, “Moscow, the Third Rome: the Origins and Transformations
of a ‘Pivotal Moment’”, Jahrbücher für Geschichte Osteuropas, 49 (2001), pp. 412‑429.
84
Стоглав: Собор бывший в Москве при великом государе царе и великом князе
Иване Васильевиче (в лето 7059), 3rd edn (Kazan: Tip. Gubernskago pravlenia, 1911),
chapter 41; French translation: Le Stoglav ou les cent chapitres, ed. by B. Duchesne (Paris:
E. Champion, 1920); see also: Л. Успенский [L. Uspenskij], “Московские соборы XVI
века и их роль в церковном искусстве”, in Философия русского религиозного искусства
XVI‑XX вв. Антология, ed. by N. K. Gavrjushin (Moscow: Progress 1993), pp. 318‑349
(especially pp. 319‑321); Sulikowska, The Icon Debate…, p. 47.
85
P. Skarga, O iedności…, p. 230.
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
to venerate images, even those consistent with Orthodox rules, that were
also worshipped by Catholics. 86
Yet Muscovite icons were appreciated in many respects in the Latin
West. Even if their iconography was not always correctly identified, they
were gathered in private collections 87 and – more importantly for our
argument – displayed on altars in Roman Catholic churches. The lat-
ter phenomenon proved quite common in the Polish-Lithuanian Com-
monwealth. 88 Certain images were believed to have been brought from
Muscovy as early as the Middle Ages, in peaceful circumstances. Among
them was an image in the Uniate church of the Holy Trinity of Vilnius,
described by Wojciech Kojałowicz as donated by Grand Duke of Mus-
covy (Ivan III) to his daughter Helena in 1494, when she was to marry
Alexander, Grand Duke of Lithuania at the time and future King of Po-
land. After her death (1513), the queen was buried in the “Ruthenian
Cathedral Church” where the icon was also displayed (i.e. in the church
of the Theotokos in Vilnius). Subsequently it was moved to the Holy
Trinity church “of the Ruthenian rite”. Kojałowicz regards this image
as painted “Graeco more”, but he also reports an opinion propagated
among “Russos” (i.e. the Ruthenians of the Polish-Lithuanian Com-
monwealth) by the Muscovites. The latter claimed that the icon had
been painted by St Luke and in 1569, when they established an eternal
peace with the Lithuanians, a condition was that the image would be
restituted to the Muscovites in exchange for 50 noble captives. 89
Throughout the wars waged by Stephan Báthory against Muscovy
in the 1570s-1580s, and particularly those waged by Sigismund III and
Ladislaus IV in the early seventeenth century, a number of icons were
brought to the Polish-Lithuanian Commonwealth, usually as booty. 90
86
A. Possevino, Moscovia et alia opera de statu huius seculi adversus Catholicae Ec-
clesiae hostes, nunc primo in unum volumen collecta, atque ab ipsomet auctore emendata
et aucta, [Cologne] 1587, p. 2.
87
W. Leitsch, Das Leben am Hof König Sigismunds III. von Polen, 4 vols (Vienna:
Verlag der österreichischen Akademie der Wissenschaften; Cracow: Polska Akademia
Umiejętności, 2009), p. 2372; M. P. Kruk, Ikony-obrazy…, no. 14; cf. Quellen und Stu-
dien zur Kunstpolitik der Wittelsbacher vom 16. bis zum 18. Jahrhundert, ed. by H. Gla-
ser, Mitteilungen des Hauses der Bayerischen Geschichte, 1 (München: Hirmer, 1980),
pp. 168 and 201.
88
Recently: M. P. Kruk, Ikony-obrazy…, passim
89
A. W. Kojałowicz, Miscellanea…, p. 25 (cf. Wacław z Sulgostowa, O cudownych
obrazach…, pp. 753‑754).
90
W. F. Wilczewski, “Rzeczy ‘ruskie-moskiewskie’ w kościołach rzymskokatolick-
ich diecezji wileńskiej w świetle akt wizytacyjnych i inwentarzy z XVII wieku”, Series
Byzantina, 5 (2007), pp. 106‑121; M. P. Kruk, Ikony-obrazy…, especially pp. 62‑88.
Grażyna Jurkowlaniec
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
bears in mind that the iconographic type of the Man of Sorrows stand-
ing in the sarcophagus and embraced by the Virgin was popular not only
in Lesser Poland, 94 but also – from the sixteenth century onward – in
Orthodox painting, where it was regarded as a Marian icon known until
today as Do not cry over me, Mother – type (Не рыдай мене, Мати). 95
Hence, presumably the kinship between the western and eastern types
of the Man of Sorrows contributed to the cult of the Sulisławice im-
age in Muscovy and its reinterpretation as an icon. Eventually, when the
image was displayed on the altarpiece of the Sulisławice church, it was
still venerated as a “Ruthenian” image, and its true pedigree apparently
remained forgotten.
Given the constant conflicts between Poland-Lithuania and Mus-
covy – illustrated, as mentioned above, by the fate of the city of Smo-
lensk –, an image that should draw special attention is the Virgin of
Smolensk. Representing the variant of Hodegetria, it was believed to
have been painted by St Luke, and brought from Byzantium to Russia
by Anna, Constantine IX’s daughter, when she married Vsevolod I of
Kiev (1046). The icon (as well and Constantine’s family name Monoma-
chos) was inherited by Vsevolod’s son, Kievan Prince Vladimir II Mon-
omakh, who displayed it in the church of the Dormition in Smolensk
in 1101. The icon proved miraculous during a Tartar siege of Smolensk
in 1237. Subsequently, it was transferred to Moscow in 1396 or 1398
and, after a request addressed to the Grand Duke of Muscovy, Vasili II
by the citizens and the Bishop of Smolensk, Mikhail, the icon was re-
turned to them in 1456. 96 As previously mentioned, the turning point
in the cult of the Virgin of Smolensk was the recapturing of the city by
the Muscovites in 1514. To commemorate this triumph, Novodevichy
Convent (Bogoroditse-Smolensky Monastery) was erected in Moscow
in 1525, with a church dedicated to the icon of the Virgin of Smolensk.
Thus, if the victory of the Polish-Lithuanian army over the Muscovites
94
G. Jurkowlaniec, Chrystus Umęczony: ikonografia w Polsce od XIII do XVI wieku
(Warsaw: DiG, 2001), p. 158.
95
G. Jurkowlaniec, “West and East Perspectives on the ‘Greek Manner’ in the
Early Modern Period”, in East Meets West in the Early Modern Europe…, p. 90, figs 8‑9.
96
“Московский летописный свод конца XV века”, ed. by М. Н. Тихомирова
[M. N. Tikhomirova], in Полное собрание русских летописей, 43 vols (Moscow:
Iazyki russkoi kultury, 1846-) xxv (1949), pp. 273‑274. On the legends concerning
the Virgin of Smolensk in Muscovy recently: Л. А. Щенникова [L. A. Ščennikova],
“Царьградская святыня ‘Богоматерь Одигитрия’ и ее почитание в Московской
Руси”, in Древнерусское искусство: византия и Древняя Русь. К 100-летию А. Н.
Грабара (Saint Petersburg: D. Bulanin, 1999), pp. 329‑347.
Grażyna Jurkowlaniec
in the Battle of Orsza proved crucial in shaping the cult of the Virgin of
Częstochowa as a palladium of the Polish-Lithuanian Commonwealth,
the triumph of the Muscovites in Smolensk, that same year, was funda-
mental for the Virgin of Smolensk as an element of imperial propaganda
in Muscovite Russia.
However, the Muscovites lost Smolensk once again in 1611 and un-
til 1655 (after they eventually took over the city) the icon was allegedly
preserved in Moscow. Meanwhile, the Muscovites failed to recapture the
city in 1632, which was zealously recorded by Polish writers, who focused
on the fate of another image of Mary venerated in Smolensk, namely in
the Dominican church. In 1662, Piotr Hiacynt Pruszcz described this
panel, ‘called Maioris’ i.e. representing the type of Santa Maria Maggiore,
as painted by St Luke, brought to Constantinople during Constantine
the Great’s rule, then to Ruthenian lands by his daughter on the occasion
of her marriage to Ruthenian prince Lubart who accepted the Christian
faith (admittedly under the Greek rite). After Anna’s and Lubart’s death,
the image was owned by their son and grandson. The latter moved the
panel from Korsun’ to Smolensk and dedicated his victories over the
Tartars to the Virgin of Smolensk. Pruszcz then suddenly moves forward
in time to more recent events and says that this very image of Mary was
displayed by the Muscovites on the city walls when Sigismund III King
of Poland assailed Smolensk (i.e. in 1611). The author reports a supersti-
tious belief held by the Muscovites that if the image turned its face to
them, they would certainly win the battle. However, the Virgin turned
its face to the Polish army instead. Seeing this, the Muscovites stripped
the treacherous icon of its jewels and angrily pulled it down from the city
walls. The image was recovered with veneration by Jakub Potocki and
eventually displayed in the Dominican church in Smolensk. 97
There are two interesting motifs in Pruszcz’s account. First, the
author claims that this image of Mary played a special role for Greek
monarchs and Ruthenian princes, but eventually it turned against the
Muscovites during their siege of Smolensk and was thus legitimately ap-
propriated by the Poles. Subsequent Polish writers repeated more or less
the same story, occasionally connecting its ending not to the deeds of
Sigismund III, but to his son, Ladislaus IV. 98 Secondly, Pruszcz states
97
P. H. Pruszcz, Morze łaski bożej…, p. 48 (see also: P. Chomik, Kult ikon Matki
Bożej…, p. 177; M. P. Kruk, Ikony-obrazy…, pp. 106, 166).
98
J. A. Kulesza, Wiara prawosławna Pismem świętym, soborami, autorami świętymi
mianowicie greckiemi … objaśnina (Vilnius: Drukarnia Akademicka Societatis Jesu,
1704), § 59, no. 2186‑2187; subsequently: K. Chodykiewicz, Monarchini nieba y zie-
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
that the panel represents the type of Santa Maria Maggiore, but it found
its way to Smolensk not from Rome, but from Korsun’. It seems plausi-
ble that he confused two Korsun’s: a fortress founded in 1032 by the Ki-
evan Prince Yaroslav the Wise and known because of the battle with the
Cossaks in 1648 (now Korsun-Shevchenkivskyi in the central Ukraine),
and an ancient Greek colony in Crimea, then known as Chersonesos
Taurica, but in Old East Slavica referred to as Korsun’ as well (Корсунь;
nowadays at the outskirts of Sewastopol). It was the latter ‘Korsun’ that
was reportedly seized from the Byzantines by Vladimir I of Kiev and the
place where he was believed to have been baptized in 988. Therefore, at
least since the Late Middle Ages, ‘Korsunian’ or ‘Chersonian’ images (as
well as relics or other objects) were venerated because of their relation
to the origins of Christianity in Rus’. Additionally, many sources pro-
vide evidence that the reputed Chersonian pedigree was synonymous
with the Greek or Byzantine genealogy of these icons and thus testified
to their Orthodoxy and conformity to old (i.e. right) models. 99
“Chersonian antiquities” were an authority in the late sixteenth and
the seventeenth centuries both in the Muscovite and in the “Kievian
Rus”. Moreover, it was acknowledged not only by Orthodox believers,
but also by Greek Catholics (ostensibly emphasizing the difference in
their rite) and occasionally even by Roman Catholics. For instance,
Greek and Roman Catholics shared with Orthodox believers the cult
of the image housed in the Uniate Cathedral in Chełm, 100 whereas they
had separate versions of the history of this image. 101 Jakub Susza (sub-
sequent Uniate bishop of Chełm) wrote the history of this image (first
edited in 1646), where he described it as a panel painted by St Luke,
Grażyna Jurkowlaniec
102
J. Susza, Phoenix redivivus albo obraz starożytny chełmskiej Panny y Matki
Przenayświętszey sławą cudownych swoich dzieł ożyły, chapter II, § 2 (Zamość: Drukarnia
Akademii Zamoyjskiej, 1646) (subsequent editions: 1653 and 1684); on Susza’s account
see among others: W. Deluga, “Ikona Matki Boskiej Chełmskiej…”; L. Milajewa, “Re-
divivus phoenix oczyma Jakuba Suszy”, in Do piękna nadprzyrodzonego, 2 vols (Chełm:
Muzeum Chełmskie w Chełmie, 2003), i: Sesja naukowa na temat rozwoju sztuki sakral-
nej od X do XX wieku na terenie dawnych diecezji chełmskich Kościoła rzymskokatolickiego,
prawosławnego, greckokatolickiego, pp. 110‑115.
103
Wacław z Sulgostowa, O cudownych obrazach…, p. 86.
104
BAV, ACSP, Madonne Coronate, x, fol. 120; “Historia de Sacra Icone Beatis-
simae Virginis MARIAE Chełmae in ecclesia Cathedrali Ruthenorum asservata”. Ibid.,
fols 131‑138.
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
105
G. Jurkowlaniec, “West and East Perspectives…”, pp. 71‑91.
106
Visitationes episcopatus Culmensis Andrea Olszowski Culmensi et Pomesaniae
episcopo a. 1667‑72 factae, ed. by B. Czapla (Toruń: Bruszczyński, 1902‑1906), p. 175.
Grażyna Jurkowlaniec
107
e.g. in Żyrowice as evidenced by an account of Wespazjan Kochowski quoted by
P. Chomik, Kult ikon Matki Bożej…, p. 154 (see also p. 157).
108
Sz. Mankiewicz, Kościół farski trocki…, fol. C2 quoted by: M. Kałamajska-Saeed,
“Obraz czy ikona: o losach pewnego wizerunku Matki Boskiej Sokalskiej”, in Sarmatia
semper viva: zbiór studiów ofiarowany przez przyjaciół prof. drowi Tadeuszowi Chrzanow-
skiemu (Warsaw: Stowarzyszenie Historyków Sztuki, 1993), pp. 155‑156.
109
e.g. J. Tazbir, “Różnowiercy polscy…”, pp. 242‑243.
110
Dlugossii, Annales…, Lib. XI, p. 284.
111
A. Malski, “Regni Poloniae Palladium Marianum…”, p. 55.
112
e.g. BAV, ACSP, Madonne Coronate, XXIX, fol. 21.
113
G. Barna, “Gnadenorte der ‘tränenden Marienbilder’ in Ungarn: Mittel der Ide-
ologie der katholischen Restauration und der kirchlichen Union”, in Churches and Con-
fessions in East Central Europe in Early Modern Times, ed. by H. Łaszkiewicz (Lublin:
Instytut Europy Środkowo-Wschodniej, 1999), pp. 37‑42.
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
114
Cf. R. Degiel, Protestanci i prawosławni, Patronat wyznaniowy Radziwiłłów
birżańskich nad Cerkwią prawosławną w księstwie słuckim w XVII w. (Warsaw: Neriton,
2000).
115
Cf. L. Tatarenko, “Violence et luttes religieuses dans la Confédération polono-
lithuanienne (fin XVIe-milieu du XVIIe siècle): l’exemple de la confrontation entre uni-
ates et orthodoxes”, Revue historique, 310 (2008), pp. 857‑890.
Grażyna Jurkowlaniec
Fig. 1. Our Lady of the Snow (Our Lady of the Rosary), Cracow, Dominican
church, Chapel of the Rosary, Photo by author
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
Fig. 2. Our Lady of the Snow, Cracow, Cathedral, Maciejowski chapel, Photo
by author
Grażyna Jurkowlaniec
Fig. 3. Our Lady of Częstochowa, Monastery of St Paul the First Hermit,
Chapel of the Miraculous Image, Photo: archive, Institute of Art History, Uni-
versity of Warsaw
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
Fig. 4. Our Lady of the Dominican church in Lviv, nowadays in Gdańsk, Do-
minican church, Photo by author
Grażyna Jurkowlaniec
Fig. 5. Our Lady of Trakai, Church of the Visitation of the Blessed Virgin
Mary, Vilnius, Bažnytio paveldo muziejus, Photo by Dana Buinickaitė
BETWEEN THE FIRST AND THE THIRD ROME
Fig. 6. Icon of the Virgin in the altarpiece of c. 1700, Szamotuły, collegiate
church, Photo by author
Alexei Lidov
A new view of the icon has been developing in recent years, which differs
significantly from our customary approach. 1 What do we know about
the icon and what mental image arises when we hear the word ‘icon’? For
most people, an icon is most likely a flat representation of a religious sub-
ject matter, depicted according to convention and usually on a wooden
board. A few better-informed individuals know that icons are found not
only on boards but also on walls, or on fabric. In any case, an icon is a flat,
schematic representation which differs essentially from realist painting.
This long established stereotype of icons is deeply unsatisfactory, at
least in relation to Byzantium and medieval Russia, considering that
within these contexts the icon was always understood as a spatial image,
or an image-mediator. 2 And because the ideal icon is not a flat represen-
tation, but a spatial whole, by no means does it differ exclusively from a
religious picture constructed as a matter of principle according to differ-
ent rules, but also from the later icon we are accustomed to, as a kind of
conventionally depicted representation of some religious subject. There
is an internal incompatibility between the flat picture, which still exists
in our consciousness as the basic means of describing the world (I call
this ‘the paradigmatic flat picture’), and the spatial image which is con-
structed completely differently.
1
This article is based on a public lecture delivered in 2010 in Kiev. For the Russian
version, which differs considerably from the present text, see: A. Lidov, “Ikona i ikon-
icheskoe soznanie: obraz prostranstva i obrazy v prostranstve” [The Icon and the Iconic
Conciousness. Image of Space and Images in Space], in A. Lidov, Ikona: Mir svyatykh
obrazov v Vizantii i Drevnei Rusi [The Icons: The World of the Holy Images in Byzantium
and Medieval Russia] (Moscow: Theoria, 2013), pp. 9‑38.
2
The theoretical basis of such an approach may be found in A. Lidov, Ierotopiia.
Prostranstvennye ikony i obrazy-paradigmy v vizantiiskoi kul’ture [Hierotopy: Spatial
Icons and Image-Paradigms in Byzantine Culture] (Moscow: Theoria, 2009) (see this
and other materials at web-site: www.hierotopy.ru).
L’icône dans la pensée et dans l’art, volume coordonné par Kristina Mitalaitė et Anca
Vasiliu, Studies in Byzantine History and Civilization, 10 (Turnhout, 2017), pp. 423-447
© BREPOLSHPUBLISHERS 10.1484/M.SBHC-EB .5.111939
Alexei Lidov
3
For a new description, see: Istoriia russkogo iskustva [A History of Russian Art],
22 vols (Moscow: Severnyi Palomnik, 2007), i: Isskustvo Kievskoi Rusi IX-pervaia chet-
vert’ XII veka [The Art of Kievan Rus From the Ninth to the First Quarter of the Twelfth
Century], pp. 200‑203.
4
T. Matthews, “The Transformation Symbolism in Byzantine Architecture and
the Meaning of the Pantocrator in the Dome”, in Church and People in Byzantium:
Twentieth Spring Symposium of Byzantine Studies, Manchester, 1986, ed. by R. Morris
(Birmingham: University of Birmingham, 1990), pp. 191‑214.
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
5
Il Tesoro di San Marco (Milano: Olivetti, 1986), pp. 167‑173 and n. 16.
Alexei Lidov
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
While he delineated and painted all these things no one ever saw him
looking at models as some of our painters do who, being filled with
doubt, constantly bend over them casting their eyes hither and thither,
and instead of painting with colors they gaze at the models as often as
they need to. He, however, seemed to be painting with his hands, while
his feet moved without rest, his tongue conversed with visitors, his mind
dwelled on something lofty and wise, and his rational eyes contemplated
that beauty which is rational. 7
6
For the English edition of such a book, see: An Iconographer’s Patternbook:
Stroganov’s Tradition, ed. by F. C. Kelly (Torrance: Oakwood Publications, 1997). On
the phenomenon of Pattern-books see: R. Cormack, “Painter’s Guides, Model-Books,
Pattern-Books and Craftsmen: or Memory and the Artist?”, in L’artista a Bisanzio e
nel mondo cristiano-orientale, ed. by M. Bacci (Pisa: Scuola Normale Superiore, 2007),
pp. 11‑30.
7
The English translation of this Letter to Cyril of Tver: C. Mango, The Art of the
Byzantine Empire, 312‑1453: Sources and Documents (Toronto, Buffalo, London: Uni-
versity of Toronto Press, 2000), p. 257.
Alexei Lidov
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
Along the same axis, two images of the Mother of God emerge, in-
scribed “ΜΡ ΘΥ ΧΩΡΑ ΤΟΥ ΑΧΩΡΙΤΟΥ (Meter Theou, Chora
tou achoretou)”, which may be translated from the Greek as “Mother of
God, the dwelling place of the Uncontainable” or, more accurately in
my opinion, as “the space of that which is beyond space” (fig. 5). 8 Both
images, displayed as mosaic icons opposite the entrance to the narthex
and to the right of the sanctuary, created pairs with the images of Christ,
also named “Chora”. Through this inscription related to the images of
the Virgin and Child, the miracle of the Incarnation is depicted and
conveyed – an earthly woman contains in her womb the God who has
neither boundaries nor image, and who is greater than any space. Until
recently, researchers paid no attention to what appeared to be a rather
clear “message”, a “declaration” of sorts embodied in the inscriptions of
the main image of Christ and the Mother of God, both unambiguously
deemed chora. Following the positivist tradition, researchers interpreted
the name of the monastery accordingly: the monastery is located in the
suburbs, and since chora usually refers to a village, suburb, or outskirts
in modern Greek, the name of the monastery has been explained as “of
the suburbs”. 9
In this regard it is notable that the concept of chora is itself one of the
most profound and important in Ancient Greek philosophy, and one
which, for centuries, western philosophy simply didn’t understand: phi-
losophers only began addressing this question in the twentieth century.
Martin Heidegger, the great philosopher of the last century, noted that
in failing to understand what chora is, we fail to understand the whole
of Greek philosophy. 10 More recently, philosophers such as Jacques Der-
rida and Julia Kristeva have written rather speculatively on the theme of
chora, attempting to explain what is, in some sense, inexplicable – that
which cannot be transposed into the language of rational philosophy
8
R. Ousterhout, “The Virgin of the Chora: the Image and its Contexts”, in The
Sacred Image: East and West, ed. by R. Ousterhout, L. Brubaker (Urbana, Chicago:
University of Illinois Press, 1995), pp. 91‑109; N. Isar, “The Vision and its ‘Exceedingly
Blessed Beholder’: of Desire and Participation in the Icon”, RES: Anthropology and Aes-
thetics, 38 (2000), pp. 56‑73.
9
Robert Ousterhout recently interpreted these topographic connotations in a
theological way: R. Ousterhout, The Art of Kariye Camii (London: Scala Publications,
2002), pp. 104‑106.
10
N. El-Bizri, “‘Qui-êtes vous Khôra?’: Receiving Plato’s Timaeus”, Existentia
Meletai-Sophias, 11 (2001), pp. 473‑490; N. El-Bizri, “ON KAI KHORA: Situating
Heidegger between the Sophist and the Timaeus”, Studia Phaenomenologica, 4 (2004),
pp. 73‑98.
Alexei Lidov
11
J. Derrida, Khôra (Paris: Galilée, 1993).
12
On the concept of “chora” in Plato see the important discussion in T. Borodai,
Rozhdenie filosofskogo poniatie: Bog i materiia v dialogakh Platona [The Birth of the
Philosophical Concept: God and Matter in Plato’s Dialogues] (Moscow: Savin, 2008),
pp. 116‑132.
13
See: http://classics.mit.edu/Plato/timaeus.html.
14
N. Isar, “Chorography (Chôra, Chorós): a Performative Paradigm of Creation of
Sacred Space in Byzantium”, in Hierotopy…, pp. 59‑90; N. Isar, “Chora, Tracing of Pres-
ence”, Review of European Studies, 41/1 (2009), pp. 42‑43.
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
Alexei Lidov
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
the fact that Justinian, as the creator of the design, and likewise his master
architects Anthemios of Tralles and Isidoros of Miletus, the leading opti-
cal engineers of their day, consciously wanted to create a church which
would not propose any flat images, but instead where the basic medium
of expression was light, displayed in the most complicated dramaturgy.
Thus, the most complicated system of natural light was here envi-
sioned, one which aroused even the imagination of contemporary opti-
cal engineers. A living, changing and unbelievably rich environment of
light was created within the church through a system of mirror reflec-
tions. Anthemios of Tralles and Isidoros of Miletus developed a system
of reflections for the first cupola of Hagia Sophia, which was notably
flatter than the cupola we see today. They used the mosaic window sills
in the drum as reflectors, which reflected light into the cupola and, more
importantly, also lit up the cupola at night. When there was no sunlight
they reflected the light of the stars and the moon in such a way as to cre-
ate the effect of a continuously illuminated cupola in nocturnal Hagia
Sophia. In other words, a cloud of light hung continuously in the cupola,
visibly representing the famous biblical symbol, the so-called Kabod in
Hebrew or Doxa in Greek (literally meaning “Glory”), when God re-
veals himself to the people in the form of a luminous cloud – an original
proto-icon which did not break the Second Commandment.
There was also a complicated system of artificial light which is now
being reconfigured with the help of various archaeological and writ-
ten sources. 16 Here, a refined environment of light, of total reflection
by means of marble inlays, gold mosaics, silver vessels, was intended. If
we summarize the results of the most recent research, then in this huge
church, a masterpiece not only of medieval but also of late antique archi-
tecture, a spatial icon was, as it were, inscribed by light. Moreover this
was a fundamentally performative icon – that is, it existed in continuous
fluidity, dynamic, never consolidating. 17 In addition, this ideal iconic
image was not flat but fundamentally spatial.
16
L. Theis, “Lampen, Leuchten, Licht”, in Byzanz-das Licht aus dem Osten: Kult
und Alltag im byzantinischen Reich vom 4. bis zum 15. Jahrhundert. Katalog der Aus-
stellung im Erzbischöflichen Diözesanmuseum Paderborn, ed. by C. Stiegemann (Mainz:
P. Van Zabern, 2001), pp. 53‑64; M. L. Fobelli, “Luce e luci nella Megale Ekklesia”, in
M. L. Fobelli, Un tempio per Giustiniano: Santa Sofia di Costantinopoli e la descrizione di
Paolo Silenzario, I Libri di Viella (Roma: Viella, 2005), pp. 193‑207; N. Schibille, Hagia
Sophia and the Byzantine Aesthetic Experience (London: Ashgate, 2014).
17
A. Lidov, “The Whirling Church: Iconic as Performative in Byzantine Spa-
tial Icons”, in Spatial Icons: Performativity in Byzantium and Medieval Russia, ed. by
A. Lidov (Moscow: Indrik, 2011), pp. 27‑51.
Alexei Lidov
And this presents the next challenge for the modern mind. When we
analyse a phenomenon, it has to be flat and static. These conditions are
essential in order to conduct various academic investigations. But what
should an ideal icon look like in the Byzantine imagination? In essence
it must not be flat but spatial, and dynamic. This medium, this iconic
image, was continually changing and fundamentally performative.
Spatial icons
There is another group of phenomena which I would like to discuss:
iconic images in space or spatial icons in their original Byzantine un-
derstanding. By this I mean the liturgical activities or liturgical “per-
formances” which took place within the space of Constantinople and
other medieval towns. It is precisely these events which transformed real
town space, the urban environment, into a sort of living, functioning
icon. They were meant to create an icon-mediator in urban space, which
united the earthly and heavenly spheres; to transform the urban envi-
ronment, together with all its residents, into participants in this gran-
diose spatial image. The regular activity conducted with the Hodegetria
of Constantinople, which I have already researched in some depth, is a
clear example of this. 18 It is by no means a unique example, but it is cer-
tainly one of the most eloquent.
Thus, from the twelfth to the fifteenth century, every Tuesday in Con-
stantinople a so-called regular miracle took place (fig. 6). On the square
before the Hodegon monastery church, not far from Hagia Sophia,
hung a very heavy icon of the Hodegetria Mother of God – which, ac-
cording to tradition, was painted by Luke the Evangelist and considered
to be a palladium, that is, a protecting image of both the town of Con-
stantinople and the entire empire. The many travellers and pilgrims who
came to witness this miracle testify that the icon was extremely heavy,
requiring six or eight men to carry it. They would carry it to the market
square and place it on the shoulder of one of the icon’s servants. And at
that moment a miracle took place, because the icon became weightless:
not only could one person support it without evident strain, but also
move it with unbelievable speed, because it appeared to fly around the
18
A. Lidov, “Spatial Icons: the Miraculous Performance with the Hodegetria of
Constantinople”, in Hierotopy… See also the chapter in A. Lidov, “Ierotopiia… (Hiero-
topy)…”.
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
square and, moreover, to spin on its own axis. In this fashion, a sort of
ideal sacred space was created, an iconic image of the town, protected by
its miracle working icon.
Theodore Synkellos’ sermon on the miraculous rescue of Constan-
tinople in 626, was used, in my opinion, as a basis for the script of the
above-described performance, and this ancient miraculous rescue of the
town was then reproduced on the streets of Constantinople in the form
of a spatial icon. On the one hand, this had nothing in common with
theatre, because it presupposed participants and not onlookers: all those
present took part in this action. On the other hand, this was all entirely
sacred. And after the appearance of the Mother of God in her town had
been affirmed by the miracle, and an iconic image had been created on
the square in front of the Hodegon monastery, a mass procession began,
which advanced through the entire town to the Blachernae monastery
where the main relic of the Mother of God, her robe, was kept. During
this Tuesday procession, icons and relics carried in smaller processions
flowed into the ceremonial march, and, according to one Latin pilgrim’s
report, the main icon and town’s palladium headed the procession like a
Lady amidst her servants.
The relatively small spatial icon created on the square in front of the
Hodegon monastery was disseminated throughout all urban space by
means of this colossal procession. The entirety of Constantinople was
transformed into a giant icon, and this was all understood as the highest
blessing and protection granted over the town by its main protectress.
On reflection, we can see that this performance was – in symbolic, spir-
itual and religio-political terms – far more important than all the ec-
clesiastical ornamentation in the town’s churches, since the real and the
ideal were united at precisely this moment: the town became an icon of
the New Jerusalem and an image of the Heavenly Kingdom.
The capital’s spatial icon was “copied” in other Byzantine towns. It is
well known that in the twelfth century St Evfrosinia of Polotsk repro-
duced a similar performance on Tuesdays in her native town, with an
icon of the Mother of God of Ephesos which she had been given as a
copy of the Hodegetria in that very same Constantinople. 19 The practice
of replicating the Tuesday miracle existed in various parts of the wider
19
I. A. Shalina, “Bogomater Efesskaia-Polotskaia-Korsunskaia-Toropetskaia: is-
torichestkie imena i arkheti” [The Mother of God of Ephesos, Polotsk, Korsun, Toro-
pets: Historical Names and Archetypes], in Chudotvornaia ikona v Vizantii i Drevnei
Rusi [The Miracle-Working Icon in Byzantium and Medieval Russia], ed. by A. Lidov
(Moscow: Martis, 1996), pp. 200‑251.
Alexei Lidov
20
A. Lidov, “The Flying Hodegetria: the Miraculous Icon as Bearer of Sacred
Space”, in The Miraculous Image in the Late Middle Ages and Renaissance, ed. by E. Thu-
no, G. Wolf, Analecta Romana Instituti Danici, Supplementum, 33 (Rome: L’Erma di
Bretschneider, 2004), pp. 273‑304.
21
M. Flier, “The Iconology of Royal Ritual in Sixteenth-Century Moscovy”, in
Byzantine Studies: Essays on the Slavic World and the Eleventh Century, ed. by Vryonis
(New Rochelle: A. D. Caratzas, 1992), p. 66.
22
For recent research on this monument see: A. L. Batalov, L. S. Uspenskaia, The
Cathedral of the Intercession on the Moat (The Church of St Basil the Blessed) (Moscow:
Severnyi Palomnik, 2002).
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
idea was to create a grandiose spatial icon on Moscow’s Red Square, part
of which was also the very architecture of the Square, in the first place
the Church of St Basil the Blessed or of the Protecting Veil on the Moat.
At the moment of the procession, in fact, Moscow and the Jerusalem of
the Gospels merged into a single iconic image, in which the different
chronological layers of the biblical Jerusalem and late medieval Moscow
were united. It is precisely this performance which most clearly demon-
strates the status of Moscow as the second Jerusalem. From the point of
view of the Orthodox tradition, this conception was far more important
than the later and symbolically less significant idea of Moscow as a Third
Rome. During “the procession on a donkey” the space of the Red Square
attained its genuine meaning, becoming an image of Jerusalem, a monu-
mental icon of Jerusalem which included an entire circle of sacred mean-
ings and associations. The “procession on a donkey” was created in the
sixteenth century, when the Byzantine Empire no longer existed. The na-
ture of the performance prompts us to note the fairly strong influence of
the West, with its interest in pictorial narrative. The creators of the rite
took as their starting point the existing iconography of the “Entry into
Jerusalem”, well known from icons, frescos and miniatures, and played
with it, creating the spatial action of the “procession on a donkey”. It
should be pointed out that the principle was originally different in Byz-
antium: spatial images and ritual actions gave rise to discrete forms in
iconography. It is, today, hard for us to evaluate what role similar spatial
icons played in the life of medieval Moscow, because practically every
few days there were processions of varying size and scale. Their meaning
naturally articulated itself not simply around the organization of march-
es, but also the creation of spatial images, the defining and actualization
of sacred space and the restoration of iconic status to daily life.
One may also consider the famous example of the enormous, monu-
mental spatial icon of the New Jerusalem complex near Moscow, 23 which
was conceived and implemented by Patriarch Nikon and Tsar Aleksei
Mikhailovich as part of their joint plan to transform all of Rus into a
huge spatial icon (fig. 8). 24 The design was truly grandiose, a design not
only of politicians but also of artists of sorts, since the people who cre-
ated these spatial icons can be compared, in my opinion, with the great
23
See G. M. Zelenskaia, Novyi Ierusalim: Obrazy Dol’nego i Gornogo [The New
Jerusalem. Images of Earth and Heaven] (Мoscow: Severnyi Palomnik, 2008).
24
On the historical and symbolic context of this phenomenon, see: New Jeru-
salems: Hierotopy and Iconography of Sacred Spaces, ed. by A. Lidov (Moscow: Indrik,
2009).
Alexei Lidov
film directors who bring together the talent of the most diverse experts
in order to pull together an overarching conception. 25 It all began when
Patriarch Nikon saw (in a revelatory vision, probably) an image of the
Holy Land in this Moscow region along the banks of the Istra river. The
territory is enormous: about ten kilometres from the north to the south
and five kilometres from the west to the east.
Both the Mount of Tabor, on which the Transfiguration took place,
and the Mount of Olives, where the Ascension and other events of the
Gospel occurred, were perceived in this Moscow region. Naturally, the
river Istra, was imagined as the Jordan. The New Jerusalem’s Holy Land
was covered with a whole series of large and small constructions, the
main meaning of which lay not so much in the architecture, as it did in
establishing the symbolic significance and iconic meaning of each place.
The main complex may be considered an exception; it is the most strik-
ing, yet perhaps the least symbolically interesting, construction, since
Nikon built the main catholicon of the monastery as an exact replica of
the Church of the Holy Sepulchre in Jerusalem, in accordance with the
documents (descriptions, drawings, wooden models) he could access in
the mid-seventeenth century. Moreover, he even attempted to improve
this replica and make it as detailed, accurate and beautiful as possible. 26
In this, the western element of the project and a characteristic trait of the
era – the seventeenth century “baroque” – find their expression.
Alongside the catholicon of the Resurrection monastery, however,
there were also constructions such as Patriarch Nikon’s hermitage, where
he created a place of solitude, also, in some sense, the place of his per-
manent residence while he was based in the New Jerusalem monastery
(fig. 9). The Patriarch built himself a type of house-icon. The very im-
age of this hermitage must be perceived as an architectural icon. It is a
four-tiered column, on top of which a small church was constructed and
next to it, on the roof, the summer cell of the Patriarch. In other words,
the patriarch drew a parallel between his life and the ancient stylites,
dwelling at physically unattainable spiritual heights. The roof, which is
an ambulatory gallery, was tiled with old gravestones specially collected
from the surrounding area, which simultaneously acted as a momento
25
A. Lidov, The Creator of Sacred Space as a Phenomenon of Byzantine Culture, in
L’artista a Bisanzio e nel mondo cristiano-orientale, ed. by M. Bacci (Pisa: Scuola Normale
Superiore, 2007), pp. 135‑176.
26
I. Buseva-Davydova, “On the Conception of Patriarch Nikon’s ‘New Jerusalem
Monastery’”, in Jerusalem in Russian Culture, ed. by A. Batalov, A. Lidov (New York-
Athens: A. Karatsas, 2005), pp. 209‑220.
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
mori and created an image of heaven. The hermitage bordered the riv-
er Jordan, that is the Istra river. Since the idea of an island was close to
Nikon’s heart, he dug a special canal around this hermitage with water
diverted from the Jordan, and created a sort of artificial island for him-
self. In other words, he not only retreated from the world to the top of
a high pillar, but also cut himself off from the very monastery itself. He
created an even more sacred land within the Holy Land, and simultane-
ously a spatial icon in which he constantly lived and prayed during fasts,
abiding there both physically and spiritually.
Alexei Lidov
27
C. Antonova, M. Kemp, “‘Reverse Perspective’: Historical Fallacies and Alterna-
tive View”, in The Visual Mind 2, ed. by M. Emmer (Cambridge Mass.: Massachusetts
Institute of Technology, 2005), pp. 399‑432.
28
For example, the idea of Holy Rus’ arises as a continuation of iconic conscious-
ness and its tendency to spread everywhere, including throughout the Russian land. And
how does one define the borders of this land without iconicity?
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
image of some sort of other world. 29 If we consider the later Russian tradi-
tion, then we can see attempts toward this approach by Mikhail Bulgakov,
for example, and of course in films by Andrei Tarkovsky for whom, in our
opinion, an iconic way of seeing the world is crucial. Moreover, even in
those films of his which are not directly connected with icons – in ‘Mir-
ror’, for example – the principle of iconicity remains key to understanding
the figurative language. Even upon considering what appears to be an or-
dinary scene, such as that of the spilt milk, the director discovers multiple
ways for conjuring the sense that there is another reality beyond what we
see, and the film continuously reminds us of this other reality, returning to
it again and again. The image is not important in and of itself, not as an ar-
tefact, a declaration or illustration of something, but precisely as a media-
tor which connects the earthly and the heavenly. In Tarkovsky’s films this
quality convey a special holiness to the world, which may be interpreted
as a product of the Byzantine iconic tradition unconsciously present in
Russian culture, and in many ways determining our perception of reality.
We were never taught iconicity, and iconicity in its entirety is not a
specifically Russian or Byzantine phenomenon. Iconicity also exists in
the Japanese and Hindu traditions, as well as in many others. An excel-
lent example of iconicity in contemporary architecture can be found in
the new Jewish museum in Berlin designed by Daniel Libeskind. It is a
contemporary sacred space, where the architecture proceeds not from ca-
pacity and not from the intended function of the accommodation, but
from an image of space. But where does an image of space arise from,
where do spatial icons originate, where should we seek the sources of ico-
nicity? The sources of iconicity are in our consciousness and imagination,
and in these lie the essence of the act of creation. We first create the image
of space, and afterward, it is embodied in endless realia: from architec-
tural forms to the organization of scents, rituals and the media of light.
29
See K. Blank, “Hierotopy in Dostoevsky and Tolstoy”, in Ierotopiia: sravnitel’nye
issledovaniia sakralnykh prostranstv (Hierotopy: Comparative Studies of Sacred Space),
ed. by A. Lidov (Мoscow: Indrik, 2009), pp. 323‑340.
Alexei Lidov
30
M. N. Sokolov, “Ab arte restaurata: Sakral’nost’ esteticheskogo v ’ierotopii‘ no-
vogo vremeni” [On the Sacralization of Aethetic Values in Modern Hierotopy], in Iero-
topiia: Sravnitel’nye issledovaniia… [Hierotopy. Comparative studies…], pp. 177‑206.
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
Alexei Lidov
Fig. 3. The Mother of God Orans in the apse of St Sophia in Kiev, Mosaic,
Mid-eleventh century, Photo by author
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
Fig. 4. Mosaic icon with Christ inscribed “ΙΣ ΧΣ ‘Η ΧΩΡΑ ΤΩΝ ΖΩΝΤΩΝ”
(Jesus Christ, the space of the living’), Chora monastery (Kariye Camii) in Con-
stantinople, Early fourteenth century, Photo by author
Fig. 5. Mosaic icon with the Mother of God, inscribed “ΜΡ ΘΥ ‘Η ΧΩΡΑ
ΤΟΥ ΑΧΩΡΙΤΟΥ” (Mother of God, the dwelling place of the Uncontain-
able), Chora monastery (Kariye Camii) in Constantinople, Early fourteenth
century, Photo by author
Alexei Lidov
ICON AS CHORA: SPATIAL ASPECTS OF ICONICITY IN BYZANTIUM AND RUSSIA
Fig. 8. Spatial icon of the Holy Land, A view to the New Jerusalem complex
near Moscow, Seventeenth century, Photo by author
Résumés des articles et présentation des auteurs
This paper argues that the question of the artist’s status as the origin
of the work of art was a crucial subject for discussion during and after the
eighth- and ninth century period of iconomachy in Byzantium. Icono-
clasts attacked the artist as a deceiver and a profiteer. So vehement were
these attacks, that iconophiles not only had to respond to these charges,
but, in so doing, they developed a quite varied and nuanced understand-
ing of the artist’s relation to the work of art. This paper focuses upon
three themes: Tradition, Inspiration, and Invention. The iconophile pol-
icies defined by the participants in the Seventh Oecumenical Council
that met at Nicaea (Iznik) in 787 incorporated some discussion of the
artist’s role. While these theologians recognized the handiwork of the
artist, they also proposed that the ultimate responsibility for the religious
work of art lay in the hands of the Church, whose traditional patronage
and use of works of art validated the continuing presence of icons within
the Church. In the 850s and the 860s we find a different argument being
presented by the Patriarch Photios of Constantinople. In a number of
his writings he draws attention to our need to understand the inspira-
tion that moves the artist to make things. In so doing, he offers a more
individualized account of such making, while retaining the position that
the ultimate responsibility for the work lies beyond the artist. Remark-
ably, and in sharp contrast to these two arguments, the Emperor Leo VI,
writing in the 890s, was able to argue strongly for the artist’s invention.
As such he argued that work of art had its origins in the artist’s desires.
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
Libri Carolini. But, by means of figures, the learned can learn in a new
and deeper fashion what he has studied by means of words.
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
Diego Maria Ianiro : “Res insensata, vero ambigua aut certe inuti-
lis”: l’immagine artificiale nei Libri Carolini
I filosofi della corte di Carlo Magno hanno delineato, nei primi otto
capitoli dell’Opus contro il Niceno Secondo, una serrata disamina dial-
ettica dell’imago al fine di delimitarne propriamente lo statuto ontologi-
co. Ne emerge un curioso tipo di res la cui ousia corrisponde precisamente
al suo essere ab altero expressa: nell’immagine le categorie di sostanza e
relazione si confondono fino a risultare equivalenti. Questo traguardo
speculativo, portato a conclusione nell’ottavo capitolo del primo libro,
lascia emergere non solo l’ambiguità ontologica radicale dell’immagine
rispetto alle altre res della natura, nei confronti delle quali essa è priva di
sensus, ma anche e soprattutto la materiale impossibilità di utilizzare le
immagini come strumento di apprendimento sostitutivo della scrittu-
ra. La principale caratteristica negativa delle imagines non è allora la
presunta insidia di una superstitio di cuipossono essere intrinsecamente
portatrici, deriva alla quale conduce invece l’autoreferenzialità sacri-
lega degli idola, ma il loro essere del tutto inutiles se finalizzate al culto.
Tracce di questa dottrina emergono chiaramente dalle opere di Rabano,
Agobardo e Claudio.
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
Grażyna Jurkowlaniec : Between the First and the Third Rome: the
Cult of Marian Images in the Polish-Lithuanian Commonwealth
The article focuses on various aspects of the cult of the images of Mary
in the multi-ethnic and multi-confessional society of the Polish-Lithua-
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
In the following paper I argue that the ideal icon was considered not
as a flat picture but as a spatial vision mediating between earthly and
heavenly realms. The image was to be produced not within the pictorial
plane but in the space between the representation and the beholder. In
my view, it is based on Plato’s concept of ‘Chora’, which was developed
by the Neo-Platonicians and by Byzantine theologians. As the Platonic
‘Chora’, the icon may be interpreted as a space unifying into a single
whole the materiality of a particular object with the spiritual nature of
the heavenly prototype. It was the potential source of a miracle-working
power which theoretically could be revealed in any consecrated icon.
The manifestations of this theological premise of “Icon as Chora” may
be found in many artefacts of Byzantine culture.
In iconography the most eloquent example is found in the network
of the main images in the Chora monastery (Kahrie Djami) in Constan-
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
sont simplement tracés par des lignes en relief qui représentent les yeux,
les sourcils, le nez, la bouche et le menton. Au dixième siècle, on trouve
des sceaux et monnaies qui se démarquent de cette portraiture stéréoty-
pée et qui semblent essayer de décrire les caractéristiques individuelles
des empereurs, particulièrement Léon VI, Romanos I, Constantin VII.
Sur les monnaies et sceaux de la fin du dixième et onzième siècles, on
trouve un type de portrait différent des huitième et neuvième siècles mais
non moins stéréotypé. La partie inférieure du visage est arrondie plutôt
que triangulaire. La barbe, plus fournie mais pas longue, suit les contours
arrondis du menton et est marquée par des stries légèrement ondulées.
À chaque fois que l’empereur apparaît sur une pièce ou un sceau avec le
Christ, les artistes ont soigneusement marqué la différence entre les traits
du dirigeant terrestre et ceux du dirigeant céleste afin qu’on ne puisse pas
les confondre. Ainsi, sur les monnaies des neuvième et dixième siècles,
lorsque le contour du visage de l’empereur est triangulaire, suggérant une
barbe pointue, la barbe du Christ est plus arrondie. Sur les monnaies du
onzième siècle sur lesquelles la barbe de l’empereur est devenue arrondie,
celle du Christ est pointue.
Sur les sceaux, les portraits des principaux saints, en contraste avec
ceux des empereurs, se distinguent les uns des autres par les traits de
leurs visages. Même parmi les saints du même groupe, tels les soldats, les
portraits ne sont pas génériques. Cette galerie de portraits n’atteint pas
son apogée avant l’onzième siècle, mais on en trouve plusieurs de ce type
dans l’art byzantin avant l’iconoclasme et ils sont devenus courants sur
les sceaux du neuvième siècle.
Le développement du système de portraiture des saints peut être lié
à la défense des icônes durant la dispute iconoclaste. Les défenseurs des
images ont dû insister sur le fait que l’adoration de l’orthodoxe n’était pas
dirigée vers l’image matérielle elle-même mais vers le prototype illustré.
Le prototype devait donc être identifié correctement dans l’image qui
était censée être une copie fidèle de la ressemblance du saint lui-même
ou de son vivant ou de façon posthume depuis une vision. Ainsi donc,
l’empereur et aussi saint, à savoir Constantin I, se vit attribuer un type de
portrait particulier.
La conclusion discute la raison pour laquelle les portraits impériaux à
Byzance se sont différenciés des portraits sacrés en devenant stéréotypés
et abstraits et non pas précis et individualisés.
Premièrement, bien que les encomia byzantines suggèrent une com-
paraison entre l’empereur et le dirigeant suprême, explicites à différents
degrés, les sceaux et monnaies prouvent que l’image impériale ne ressem-
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
ble jamais à celle du Christ : ni dans les effigies stéréotypées ni dans les
quelques portraits individualisés. Par ailleurs, il est possible que la stan
dardisation du portrait impérial ait été encouragée par la comparaison
conventionnelle entre l’image de l’empereur et celle de David. Le type de
portrait stéréotypé de l’empereur qui prévaut sur les monnaies et sceaux
des huitième et neuvième siècles était également utilisé pour représenter
David dans certains manuscrits du neuvième siècle. De la même façon,
le deuxième stéréotype d’effigies impériales, dominant au onzième siècle,
ressemble nettement au portrait de David de coutume à cette période.
Ainsi, lorsque l’effigie conventionnelle de l’empereur change au cours du
dixième siècle, le portrait de David change également.
En second point, l’usage répété de la même formule pour créer
l’image de l’empereur a son parallèle dans la littérature byzantine dans
laquelle les passages panégyriques décrivant l’apparence des différents
empereurs étaient également stéréotypés. Dans ces portraits verbaux,
les mêmes termes et concepts apparaissent constamment, montrant la
nature constante des vertus impériales. Les empereurs étaient parfaits et
donc inaltérables.
Enfin, il nous faut considérer l’idée que les byzantins souhaitaient
maintenir une différence entre les effigies de leurs empereurs et les icônes
de leurs saints du Nouveau Testament. Une image abstraite, séparant le
sujet du portrait, ne permet pas l’adoration du sujet et ne possède pas les
caractéristiques qui définissent une icône sainte. Les portraits impériaux,
avec leurs formules répétées et leur manque de définition, sont des de-
scriptions idéalisées de la charge impériale elle-même et ne font aucune
référence visuelle aux titulaires spécifiques.
Il était donc indiqué que les empereurs n’étaient pas des saints, en
tout cas pas des saints auxquels on pouvait accéder par des icônes. Un
type de portrait particulier fut attribué à l’empereur qui fut reconnu
comme saint, Constantin, devenant ainsi l’exception qui confirme la rè-
gle.
Quant au puzzle que constituent les quelques monnaies du dix-
ième siècle qui portent des portraits impériaux individualisés, ce n’est
probablement pas une coïncidence que c’est précisément dans la période
macédonienne que des efforts concentrés et exceptionnels sont appli-
qués pour faire reconnaître comme saints des empereurs et leurs familles.
Ces efforts afin de promouvoir les empereurs et des membres de leurs
familles à la sainteté ont certainement créé un climat fertile pour dépein
dre les traits détaillés des dirigeants.
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
The following paper deals with the issue of image theory in the early
Middle Ages, placing a specific emphasis on Eriugena’s opera, and with
the metaphysical paradigm related to this theory itself. The concept of
“image” is analyzed in its multiple meanings and values, since it is used
in the medieval tradition not just as an iconic device based on physical
resemblance but also as a complex allegorical mechanism. Maintaining
this theoretical distinction, the paper inspects the differences between
the theory of image and of knowledge through the senses in various au-
thors of the Carolingian period.
The common philosophical opinion among Frankish thinkers is that
knowledge built upon physical perception is of a lower level and will
never lead to an understanding of theological truths. In texts such as
the one by Candidus of Fulda even the eyes of the resurrected Christ’s
RÉSUMÉS DES ARTICLES ET PRÉSENTATION DES AUTEURS
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INDEX
INDEX
Index des noms propres
Aldobrandini, Ippolito (cf. Clé- Constantine VII (empereur)
ment VIII) 390, 394-395 179-180, 185, 190,
Alexandre (empereur byzantin) 198fig.5, 210fig.27,28,
186-187, 214fig.36 211fig.30, 31
Alexandre le Grand 338 Constantine IX Monomaque
Alexis Comnène Ier 182 (empereur) 180-181, 186,
Alimpij (Alype) 363-364 190-191, 409
Amphiloque (métropolitain de Constantine XI (empereur) 338
Cyzique) 162 Cyprien métropolite de Kiev
Andreï Roublev 28, 358,366, 345
368, 371-372, 381 Cyrille Belozersky 339
Andronic II Paléologue 428 Cyrille de Tvère 380, 427n7
Ann (fille de Constantine IX) Daniel Romanovitch (Daniel de
409 Galicie) 412
Anthème de Tralles 433 Démétrios (saint) 182-183,
Barskij, Vassili Grigorovitch 358 203fig.14,15, 204fig.16
Basile Ier (empereur) 178- Dionysius (peintre) 381
179, 184, 190-191, 195, Épiphane (abbé de Patmos) 182
196fig.1, 2, 207fig.21, 22 Étienne (fils de Romain Ier) 179,
Basile II 180, 199fig.6,7 197fig.4
Báthory, Étienne 407 Evstrati moine 346
Borgia, Francesco 392-393 Euphemianos (archevêque d’Eu-
Boris Godounov 361, 380 chaïta) 183, 204fig.17
Boris et Gleb (princes) 345, 385 Euphrosyne de Polotsk 397
Casimir le Grand (Casimir III Fedor I (tsar de Russie) 361,
de Pologne) 398 381-382
Célestin III (pape) 332 Fedor II Borisovič Godunov
Charlemagne 26, 257-258, (tsar de Russie) 371-372
261n13, 262, 268, 270n47, Hélène (sainte, mère de
272n57, 279n78, 307, 315- Constantin) 188, 399
316, 399 Irène (impératrice) 262, 317-318
Constantine (fils de Basile Ier) Isaac Ier (empereur) 180
195, 196fig.1,2 Isaac II Ange (empereur) 191
Constantine I (empereur) 187- Isidore de Milet 433
188, 194, 305, 398-399, 410 Ivan II (grand-prince de Moscou
Constantine V (empereur) et de Vladimir) 368
158n12, 178, 206fig.19,20, Ivan III (grand-prince de Moscou
305 et de Vladimir) 346, 407
INDEX
INDEX
Index des auteurs modernes
Ampère, Jean-Jacques 257n1 Lanckoroński, Mikołaj 399-400
Balzac, Honorée de 440 Lattke, Michael Stephan 129
Barthes, Roland 28, 30-32, 307 Le Goff, Jacques 257n1
Benjamin, Walter 93 Lugaresi, Leonardo 227n35,
Bielski, Marcin 382 228n38
Boyce, Mary 120-121 Malski, Andrzej 401, 414
Bulgakov, Mihail 441 Marenbon, John 257-258
Bzowski, Abraham 394 Marion, Jean-Luc 264n23
Chazelle, Celia 319 Markelov, Gleb 366
D’Onofrio, Giulio 264n22 Merleau-Ponty, Maurice 231
Dârle, Cornel 273n61 Mickūnaitė, Giedrė 403
Derrida, Jacques 95n8, 98, 110, Mitalaitė, Kristina 262, 270n48,
429 273n61, 276n74, 279n78,
Dickens, Charles 440 281n84
Didi-Hubermann, Georges 230 Moreschini, Claudio 278n78
Drogi, Pierre 273n61 Okolski, Szymon 403
Duchesne-Guillemin, Jacques Pânzaru, Ioan 281
121 Paparella, Francesco 273n61
Dufrenne, Suzy 161 Patschovsky, Alexander 333
Dümmler, Ernst 277n74 Poirier, Paul-Hubert 132
Eliav, Yaron 219 Pruszcz, Piotr Hiacynt 399-400,
Fredouille, Jean-Claude 228n37 410
Freeman, Ann 258n4, 270n47, Rainini, Marco 329, 333
274, 276n74, 323 Reeves, Marjorie 332
Gołdonowski, Andrzej 400 Rydzyński, Piotr 400
Grierson, Philip 185 Sakowicz, Kasjan 389
Gliczner, Erazm 401 Sarbiewski, Maciej Kazimierz
Gumppenberg, Wilhelm 401 405
Halleux, André de 147 Skarga, Piotr 389, 405-406
Heidegger, Martin 31n23, 95n8, Susza, Jakub 411
154n4, 429 Tondelli, Leone 332
Hirsch-Reich, Beatrice 332 Van de Vyver, André 278n78
Kazhdan, Alexander 192 Vasiliu, Anca 238n83, 243n106,
Kojałowicz, Wojciech 407 244
Kordecki, Augustyn 401 Wallach, Luitpold 261n13,
Kraiński, Krzysztof 401 266n30
Kristeva, Julia 429 Žalėnas, Gintautas 404
Krowicki, Marcin 401 Yiannias, John 157