de l'eau au moulin des socialistes, car il était ITALIE
évident que le succès du P.S.O.E. ne provo- querait aucun malaise et qu'il était donc plus utile et plus tranquille de voter pour Felipe Gonzalez, qui promettait la même démocratie et la même justice que le P.C. Certes, ces élections ne sont qu'une étape Le procès dans une longue guerre, et, en Espagne comme ailleurs, on ne peut réduire tous les problèmes à cette simple alternative : dictature ou démo- des Brigades rouges cratie. Dans un pays qui est la dixième puis- sance industrielle du monde, qui souffre de la C'est dans un pays hanté par la violence que sont crise économique comme tous les pays occi- dentaux, les vrais termes de l'alternative sont jugés, depuis mercredi dernier, ceux qui avaient décidé de déjà le capitalisme ou le socialisme. Et, pour avoir une crédibilité, il ne suffit pas de pla- réveiller la classe ouvrière par la « lutte armée » carder de belles affiches, émouvantes même « Oui sème la démocratie récolte la justice» il faut dire ce 'que peut et doit être une justice sociale dans un pays développé où, pour sortir de la crise, il faut sortir du système capitaliste existant. Demain, le camp gouvernemental, qui n'a ni grandes idées ni grande cohésion, devra se mesurer avec les problèmes de l'inflation, du chômage, de l'arbitraire, et c'est à partir de ce moment, dans un climat d'instabilité poli- tique qui ne peut être masqué par la fausse victoire de Suarez, que les socialistes, les communistes et tous les autres devront montrer ce qu'ils ont vraiment à proposer. Le défi autonomiste Comme si cela ne suffisait pas, ils seront de plus obligés d'apporter une réponse rapide aux revendications autonomistes qui, en Cata- logne et au pays Basque, ont pris le caractère d'un véritable défi au régime existant. Ce n'est pas un hasard si, à peine les urnes closes, tous les regards se sont tournés vers Barcelone. Les partis de Madrid, communiste aussi bien que socialiste, demandent aux Catalans d'être patients et de remettre leurs cahiers de doléan- ces au nouveau parlement, enfin librement élu. ad, Mais, vues de Barcelone, les choses ne se pré- c sentent pas de la même manière. Si le scrutin du 15 juin n'avait pas été É manipulé en raison d'une loi électorale qui c prime trop, l'information gouvernementale, la patience aurait été effectivement recommandée. Mais lorsqu'on regarde la composition de la L'arrestation de Renato Curcio Chambre des Députés, et du Sénat surtout, Budget du mouvement : un milliard de lires peuplé, le jour même du scrutin, par quarante et un féaux du roi, on voit mal comment on y trouvera une majorité pour accorder de véri- • Lorsque les cinq terroristes pénètrent, en- tout le pays, suscitant même chez les intellec- tables statuts d'autonomie si une forte pression chaînés, dans la salle de marbre de la cour tuels — Leonardo Sciascia et Eugenio Montale de la rue ne s'exerce pas sur ces tenants de la d'assises de Milan, mercredi 15 juin à 11 — un débat sur le thème du courage : fallait-il tradition centraliste. heures, l'assistance retient son souffle. Au-de- ou non comprendre la peur des jurés ? Parce Aucun des trois partis arrivés en tête en hors, des chiens policiers patrouillent depuis que, le 15 juin, en dépit de l'annonce de repré- Catalogne — socialiste, communiste , et celui l'aube le long des couloirs ; mille soldats et sailles, les magistrats, les avocats et les jurés de Jordi Pujol — n'envisage une sécession. policiers montent la garde autour du palais de ont accepté de « faire leur métier ». Parce que, Mais, avant d'aller négocier à Madrid, avant justice ; les usines sont occupées par les tra- enfin, la mobilisation de la population mila- de s'asseoir aux Cortés, les élus de Cata- vailleurs, à l'appel des partis démocratiques naise contre le terrorisme semble avoir impres- logne voudraient former, à Barcelone, une et des syndicats. Les voici donc dans leur box, sionné les militants du « parti armé » qui « met représentation à part, quelque chose qui soit les fameux brigatisti rossi, encerclés par vingt- en danger la démocratie », selon l'expression à mi-chemin entre un gouvernement autonome cinq carabiniers. Voici Renato Curcio, trente- des journaux de jeudi matin. et un groupe parlementaire particulièrement six ans, leader et idéologue des Brigades uni. Et ils voudraient, avant de partir pour rouges, et voici quatre de ses disciples. A leur L' « université négative » Madrid, que le mandat que les électeurs leur actif • sept assassinats revendiqués (dont celui Les Brigades rouges apparaissent pour la ont déjà donné soit confirmé par une grande du procureur général de Gênes), une centaine première fois le 17 septembre 1970, via Mo- manifestation populaire à Barcelone. Si ce d'attentats, deux douzaines d'enlèvements, au- retto, entre Brescia et Milan : ce jour-là, deux projet est maintenu, lundi prochain, un million tant de hold-up, et des montagnes d'intimida- bombes font sauter le garage du directeur de Catalans — d'après les prévisions faites ici, tion. Le procès va pouvoir enfin commencer. du personnel de Sit-Siemens. C'est le début à Madrid — marcheront sur les Ramblas et Pourquoi « enfin »? D'abord, parce que, d'une longue série d'attentats contre les « pe- devant le palais du gouvernement, là où siégeait dans la guerre que se livrent désormais l'Etat tits chefs » en usine. Il faut frapper « les en- naguère le parlement de Catalogne. La grande italien et les terroristes, c'est l'Etat, cette fois, nemis, les saboteurs, les destructeurs de l'unité fête électorale antifranquiste qui n'a pu avoir qui a marqué un point (le précédent procès, de la classe ouvrière d'avant-garde ». La tech- lieu à Madrid dans la nuit du 15 juin se tiendra le 3 mai dernier, avait été ajourné à cause de nique? On prélève le « petit chef » sur son ainsi, peut-être, six jours plus tard, dans la la démission des jurés populaires, épouvantés lieu de travail. On le transporte dans une deuxième plus grande ville d'Espagne. Au-delà par les menaces de mort et par l'assassinat, le « prison du peuple », on le soumet à de longs des questions spécifiques d'autonomie, elle 28 avril, du président de l'ordre des avocats interrogatoires, et on le libère seulement lors- marquera, espérons-le, la fin des années de de Turin, qui devait désigner les avocats d'of- qu'il a répondu de « façon satisfaisante ». tristesse et de peur dans toute l'Espagne. fice pour la défense de Curcio). Ensuite, parce Deux exemples : le syndicaliste « jaune » Bruno K. S. .KAROL qu'un climat de tension s'était développé dans