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quelconques. ))
Phonology and Lexicon 1) uournal
Th. Obenga n’en est plus à ce of African Languages, 5,
stade de manipulation grossière. I1 pp. 218-2511. L’étude tchadique la
revendique une méthode scientifi- plus récente citée par Th. Obenga
que et se réclame de comparatistes (Essai sur la langue uldeme, 1987)
de renom, comme A. Meillet et est classée sous la rubrique des lan-
E. Benveniste. gues nilo-sahariennes ! Aucune allu-
sion, donc, aux travaux comparatifs
de l’.Newman, de K. Shimizu et
H. Jungraithmayr.
La bibliographie
Pour le Benue-Congo, auquel
Si, par curiosité, le lecteur com- appartient le bantou, on s’attendrait
à être mieux servi, puisque c’est à
par la biblio~ap? ce groupe qu’appartient la langue
de son ouvrage, il a l’impression maternelle de l’auteur (le mbosi).
d’entrer dans un bric-à-brac d’où il Déception : de la mCme eau ;
paraît bien difficile d‘extraire les aucune mention de la bibliographie
matériaux nécessaires à l’établisse- bantoue d’Y. Bastin (8) ; pour le
ment de l’encyclopédie de la lin-
((
swahili, Th. Obenga cite la
guistique générale africaine 1)
qu’annonce la quatrième page de
c m e r m e . Aucune bibliographie (7) J. pnt, L~~languesnitales. ~ ’ vien-
~ ù
raisonnablement 1 jour sur les Ian- nent les langues préfixales dites langues ban-
gues africaines o~ sur une panic toues ? - Elles viennent de la langue latine,
d’entre elles n’est citée. Bagnèresde-Bigorre, Ed. pyrénéennes, 1941.
(8) Y. Bastin, n Bibliographie bantoue
Dans la partie Géné- (( sélective, Tervuren B, Archives d’anthropolo-
ralités. Méthodologie on trouve )), gie’ 24, 1975, 56p.
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réédition des Swahili Exercises de tupuri, dont on a prouvé depuis
E. Steere, mais pas la Grammaire longtemps qu’il appartient au
comparée des dialectes swahili de groupe U Adamawa D, est maintenu
Ch. Sacleux (1909), ni la classique par T. Obenga dans le tchadique.
Swahili Grammar d’E.0. Ashton, ni
l’esquisse moderne de E. Polomé :
Swahili Language Handbook (1967), Les exclus du at négro-
toutes références bien connues à égyptien BB
l’époque où l’auteur menait son
étude ;etc. Plus scandaleux encore, On aurait tort de croire que
le travail monumental de M. Guth- Th. Obenga embrasse dans son
rie Comparative Bantu :an introduc- œcuménisme l’ensemble des langues
tion to the comparative linguistics of non européennes parlées sur le sol
the Bantu languages (4 vol., africain. I1 exclut nommément du
1967-1970) n’est même pas cité, ni négro-égyptien 1) le
(( sémitique
((
ouvrage ; on peut lui reprocher, par (p. 368). Les linguistes s’accordent
contre, de ne pas s’en remettre aux tous à reconnaître l’unité de la
spécialistes reconnus pour les famille berbère ; nouvelle porte
domaines qui lui échappent. Ainsi, ouverte que l’auteur enfonce. La
pour la famille tchadique, il distin- conclusion à laquelle il arrive aus-
gue une branche occidentale, une sitôt après ne laisse pourtant pas de
branche kotoko, une branche bata- surprendre Dès lors, le chamito-
(( ((
che centrale (parfois dite biu-(( que 1) sans se rendre compte, appa-
mandara D);quant aux langues qui remment, que ce dernier inclut le
font réellement partie de la branche tchadique ; il ignore entiOrement
orientale, aucune d’entre elles n’est tous les travaux en cours visant à
mentionnée dans le tableau [en fait, la reconstruction de I’Afroasiatique).
quelques vraies langues du tchadi- Chacun a le droit d’émettre ses
que oriental sont citées p. 3511. Le hypothèses et de contester celles des
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. .............. .-
ter ce qui va dans le sens qu’il l’impression qu’il est encore besoin
désire ; mais justement, cette procé- de prouver la parenté du copte avec
dure n’est pas une procédure l’égyptien ; tous les spécialistes
scientifique. savent depuis longtemps que le
copte est la dernière manifestati,on
L’intemrétation des données historique d‘une langue appartenant
à l’égyptien; il prend place après
U Décider sans preuves, dans le
l’ancien égyptien, le moyen égyp-
domaine de la recherche scientifique, tien, le néo-égyptien et le démcpti-
est une grave escroquerie intellec- que. I1 s’en différencie par l’usage
tuelle )) nous dit Th. Obenga de l’alphabet grec, complété par
(p. 372); le tout est de s’entendre quelques signes, ainsi que par
sur ce qui constitue des preuves. Ce l’emprunt massif de mots grecs ; il
qui est certain, c’est que la volonté a fait son apparition dans les pre-
acharnée de vouloir justifier une miers siècles de notre ère. Pages
thèse est généralement le chemin le 323-324, Th. Obenga cite l’égyptien
moins assuré pour y parvenir. fdw quatre qu’il rapproche de 42
(( ))
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sama ((ciel N,sénoufo sama bon (( )), mots négro-africains d’origines
(( ))
(sm3, sema), vêtu d’une peau de léo- Congo; on est alors bien loin de
pard lors de ses fonctions rituelles, l’égyptien (11).
sacerdotales, devait rendre le dieu
habillé beau et fort, conserver ainsi
sa santé; les présents ne man- Conclusion
quaient pas : étoffes, huiles, par-
fiuns, onguents, etc. Ainsi habillé, ((Pour sortir la linguistique
honoré, purifié, le dieu devait gar- générale africaine des redites et
der l’ordre cosmique, l’ordre impasses actuelles de même que de
cdeste. 1) Tout cela est bien beau, et son statut mineur séculaire - celui
correspond sûrement à quelque des descriptions-standard sans fin et
chose dans la religion égyptienne, sans projet linguistique précis, puis-
mais il y a un hic. Le kanuri et la que la comparaison est constam-
hawsa sama sont des emprunts avé- ment évitée, écartée ou ignorée -,
rés à l’arabe sama ciel [remar-
(( ))
il faut .necessairement prendre en
quons que la source utilisée par compte Ia langue égyptienne, pha-
Obenga (J. Lukas) indique expressé- raonique ou copte [.. I (p. 374). La
))
épargner la mort n, il existe bien en égyptien )).A coup sûr, cela est en
cette langue, comme en cent autres, bonne voie.
une formule de salutation (Irkoy ma Le problème d’une plus grande
proximité de l’égyptien avec les Ian-
bani samba mané)(9) qui signifie
((Que Dieu t’envoie la santé ! D, gues négro-africaines qu’avec le ber-
bère et le sémitique reste entier.
mais le verbe qui y est employé Même si cette hypothèse peut paraî-
(samba) signifie seulement tre tout à fait raisonnable et plus
((envoyer n, et pas envoyer la
((
que digne d‘intérêt, la méthodolo-
santé n. Quant au bambara sama
((offrir un cadeau d’après
))
Th. Obenga, il a pour premier sens (9) A. Prost, L a langue sonay et ses dia-
((envoyer un cadeau à lectes, Dakar, IFAN, 1956, p. 510.
quelqu’un (10) ; broutille, me
)) (10) Ch. Bailleul, Petit dictionnaire
direz-vous, à l’aune des ères bambara-fanpis, fraqzis-bambara, 1s.l.J Ave-
pharaoniques ! bury Publishing Company, 1981, p. 177.
(11) P. de Wolf, The Noun Class System
Pages 291-292, Th. Obenga rap- of Proto-Benue-Congo, La Haye, Paris, Mou-
proche l’égyptien mur eau), de (( ton, 1971, p. 58.
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gie mise en œuvre ici, malgré guistes comparatistes s’attellent réel-
l’excellente présentation matérielle lement au sujet, dont chacun devine
de l’ouvrage, ne nous semble pas bien les multiples implications
appropriée 1 l’objectif recherché, ni historiques.
recommandable à qui que ce soit.
aitons que de véritables lin- Henry Tourneux
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