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Les langues africaines et l’égyptien *

ADIS aussi chimériques que la faut donc prendre le contre-pied de


pierre philosophale pouvaient ces thèses occidentales et démontrer
paraître à bon droit les recher- l‘unité du peuple africain, unité qui
ches pour retrouver la langue qu’on implique, croit-on, une unité lin-
supposait a priori être la mère de guistique. De l’unité linguistique,
toutes les langues de la terre. C’est on passe à l’unité culturelle. La
à l’hébreu que cette qualité était le civilisation égyptienne est alors pré-
plus souvent reconnue (1). Les )) sentée comme la seule clé qui per-
disciples de Cheikh Anta Diop ont mette de comprendre les civilisa-
une ambition plus modeste, dont on tions négro-africaines - pardon -
ne peut contester la légitimité de Zu civilisation négro-africaine.
principe : faire remonter l’ensemble (( Tout le reste est tristement banal
des langues négro-africaines et sans l’intervention courageuse, mais
l’égyptien à un ancêtre commun. appropriée, de l’égyptologue (4). ))

(( L’unité de l’égyptien et des A partir de ces principes fonda-


langues africaines [est] un fait qu’on teurs, on a commencé à trouver
ne peut pas détruire par des argu- partout des descendants des pha-
ments dignes de ce nom [...I D, raons à travers l’Afrique (5). Pour
Cheikh Anta Diop nous en avait en arriver là, on manipule en tous
déjà prévenus (2). On pourrait ajou- sens toponymes et ethnonymes. On
ter: donc, tous les arguments
((
manipule aussi les images : Dika
prouvant l’unité de l’égyptien et des Akwa n’hésite pas à rapprocher son
langues négro-africaines sont bons n. propre portrait de celui d’un pha-
Tel, du moins, semble être le credo raon tel que son masque funéraire
de ses héritiers spirituels. l’a fmé (6). Cette méthode fait
(( Dès lors, quel doit être le quand même un peu brouillon et
comportement d’un Africain cons- Th. Obenga ne juge pas Dika Akwa
cient? I1 doit se dégager de tout
préjugé ethnique et acquérir une * A propos du demier livre d’obenga
nouvelle forme de fierté : la vanité Théophile, 1993, Origine commune de l’é&p-
d’être Valaf, Toucouleur, Bambara, tien ancien, du copte et des langues nigro-
etc. doit faire place à la fierté d‘être afrìcaines modemes. Introduction à Ia linguis-
time historiaue africaine, Paris. L’Harmattan,
Africain, tant il est vrai que ces 1693, 402p.
cloisons ethniques n’existent que (1) M. Honnorat, Démonstration de la
par notre ignorance (3).D Nous parenié (IRF langues ináo-européennes et sémiti-
voilà au fait. L’entreprise de Cheikh ques, Paris, Paul Geuthner, 1933, p. 16.
(2) Cheikh Anta Diop, Nations nègres et
Anta Diop est avant tout une entre- nrlture, Présence africaine, Paris, 1979, p. 418
prise de réhabilitation idéologique. (lm éd. 1954).
La science occidentale a falsifié
(( )) (3) Ibid., p. 504.
l’histoire en coupant 1’Egypte de ses (4) Th. Obenga, op. cit., 1993, p. 204.
(5) P. Dika Akwa nya Bonambela, Les
racines nègres et elle a découpé descendants des pharaons à tra“ l’Afrique,
l’Afrique en ethnies, dont on a [s.l.], Éd. Osiris-Africa, 1985, 440 p.
majoré l’hétérogénéité à souhait. I1 (6) Ibid., p. 193.

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... __
-. -. , .
, ,. .. ., ....

.., ... -. . ~ . ... .. ..

digne de figurer dans sa bibliogra- pêle-mêle les noms de Benveniste,


phie. Bloomfield, Chomsky, Harris,
Tout cela fait penser au bon Hjelmslev, Hockett, Jakobson, Mar-
vieux temps où le Père Prat (spé- tinet, Meillet, Sapir, Saussure,
cialiste du mbosi, quelle coïnci- Troubetzkoy, Vendryes ...
dence !) tronçonnait les mots ban- Dans les Etudes générales sur les
tous pour prouver qu’ils étaient du langues africaines, aucune mention
latin crypté ; c’est la fameuse théo- de la somme que constitue la série
rie des langues nitales - ana-
<( ))
publiée aux éditions du CNRS sous
gramme de latines où l’on fai-
<( )),
la direction de J. Perrot : Les lan-
sait venir gaillardement le fang IDU gues dans le monde ana& et modeme,
le mbété nya mère du latin
(( ))
dont un très gros volume est con-
(ye)ni(trix), et le swahili mama de sacré aux langues de l’Afrique sub-
ma(tn) (7). Voici les règles qui pré- saharienne (1981) et un autre aux
sidaient à cette géniale étymologie : langues chamito-sémitiques (1988).
((Les langues bantoues ne prennent Toutes les références sur le
que les consonnes à la langue latine tchadique datent d’avant 1950,
et leur adjoignent les voyelles réimpressions et rééditions mises à
qu’elles veulent. [...I A quoi se part ; cela n’est pas sérieux, quand
réduit, en définitive, l’extraction on sait que les études sur cette
d‘un mot d’une langue latine? A famille ont fait un bond prodigieux
prendre une ou plusieurs consonnes à partir de la publication en 1966,
dans un mot latin et à en fabriquer par P. Newman, de la première ver-
un mot avec des voyelles sion de Comparative Chadic :
<(

quelconques. ))
Phonology and Lexicon 1) uournal
Th. Obenga n’en est plus à ce of African Languages, 5,
stade de manipulation grossière. I1 pp. 218-2511. L’étude tchadique la
revendique une méthode scientifi- plus récente citée par Th. Obenga
que et se réclame de comparatistes (Essai sur la langue uldeme, 1987)
de renom, comme A. Meillet et est classée sous la rubrique des lan-
E. Benveniste. gues nilo-sahariennes ! Aucune allu-
sion, donc, aux travaux comparatifs
de l’.Newman, de K. Shimizu et
H. Jungraithmayr.
La bibliographie
Pour le Benue-Congo, auquel
Si, par curiosité, le lecteur com- appartient le bantou, on s’attendrait
à être mieux servi, puisque c’est à
par la biblio~ap? ce groupe qu’appartient la langue
de son ouvrage, il a l’impression maternelle de l’auteur (le mbosi).
d’entrer dans un bric-à-brac d’où il Déception : de la mCme eau ;
paraît bien difficile d‘extraire les aucune mention de la bibliographie
matériaux nécessaires à l’établisse- bantoue d’Y. Bastin (8) ; pour le
ment de l’encyclopédie de la lin-
((
swahili, Th. Obenga cite la
guistique générale africaine 1)
qu’annonce la quatrième page de
c m e r m e . Aucune bibliographie (7) J. pnt, L~~languesnitales. ~ ’ vien-
~ ù
raisonnablement 1 jour sur les Ian- nent les langues préfixales dites langues ban-
gues africaines o~ sur une panic toues ? - Elles viennent de la langue latine,
d’entre elles n’est citée. Bagnèresde-Bigorre, Ed. pyrénéennes, 1941.
(8) Y. Bastin, n Bibliographie bantoue
Dans la partie Géné- (( sélective, Tervuren B, Archives d’anthropolo-
ralités. Méthodologie on trouve )), gie’ 24, 1975, 56p.

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réédition des Swahili Exercises de tupuri, dont on a prouvé depuis
E. Steere, mais pas la Grammaire longtemps qu’il appartient au
comparée des dialectes swahili de groupe U Adamawa D, est maintenu
Ch. Sacleux (1909), ni la classique par T. Obenga dans le tchadique.
Swahili Grammar d’E.0. Ashton, ni
l’esquisse moderne de E. Polomé :
Swahili Language Handbook (1967), Les exclus du at négro-
toutes références bien connues à égyptien BB
l’époque où l’auteur menait son
étude ;etc. Plus scandaleux encore, On aurait tort de croire que
le travail monumental de M. Guth- Th. Obenga embrasse dans son
rie Comparative Bantu :an introduc- œcuménisme l’ensemble des langues
tion to the comparative linguistics of non européennes parlées sur le sol
the Bantu languages (4 vol., africain. I1 exclut nommément du
1967-1970) n’est même pas cité, ni négro-égyptien 1) le
(( sémitique
((

les reconstructions d‘A. Meeussen. africain n, le berbère et le khoisan.


Pour le voltaïque, aucune men- ((Aucune langue sémitique parlée
tion des travaux comparatif.. de aujourd’hui en Afrique n’est née en
G. Manessy, qui datent de 1975..., Afrique même. [...I En revanche, cha-
etc. cun sait que l’égyptien [...I n’est pas
un parler introduit d’ailleurs en Afri-
que D (p. 361). (< Sur le plan strict de
Le tableau du négrodgyptien la linguistique, il doit être clairement
(DD. 396-397) affirm4 à la suite d‘analyses correc-
tement conduites, que les parlers ber-
On ne peut reprocher à bères ne sont ni sémitiques ni néPo-
Th. Obenga de ne pas être spécia- égstiens. C‘est ainsi que le berbère
liste de toutes les familles ou sous- constitue une famille linguistique à
familles qu’il brasse dans son part, se suffisant à elle-même ))

ouvrage ; on peut lui reprocher, par (p. 368). Les linguistes s’accordent
contre, de ne pas s’en remettre aux tous à reconnaître l’unité de la
spécialistes reconnus pour les famille berbère ; nouvelle porte
domaines qui lui échappent. Ainsi, ouverte que l’auteur enfonce. La
pour la famille tchadique, il distin- conclusion à laquelle il arrive aus-
gue une branche occidentale, une sitôt après ne laisse pourtant pas de
branche kotoko, une branche bata- surprendre Dès lors, le chamito-
(( ((

margi [est-ce la même chose que le sémitique ne devrait plus encombrer


))

groupe Mandara cité p. 208 ? Mais la linguistique générale africaine D


on y trouve un mélange de bata-
(( (ibid.). L’idée que l’égyptien, le
margi et d’oriental n], une bran-
)) (( sémitique, le berbère et le couchi-
che orientale. Dans les trois derniè- tique puissent avoir un ancêtre
res branches énumérées ci-dessus, il commun le révulse (Th. Obenga
cite des langues que tout le monde établit une équivalence entre
s’accorde à classer dans une bran- ((chamito-sémitique et afroasiati-
)) ((

che centrale (parfois dite biu-(( que 1) sans se rendre compte, appa-
mandara D);quant aux langues qui remment, que ce dernier inclut le
font réellement partie de la branche tchadique ; il ignore entiOrement
orientale, aucune d’entre elles n’est tous les travaux en cours visant à
mentionnée dans le tableau [en fait, la reconstruction de I’Afroasiatique).
quelques vraies langues du tchadi- Chacun a le droit d’émettre ses
que oriental sont citées p. 3511. Le hypothèses et de contester celles des

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i...,-. ............................ ....................... .
. .............. .-

autres; c’est la règle dans le méthode suivie par l’auteur. Pre-


domaine scientifique. Le vivier des nons la liste où sont donnés les rap-
langues négro-africaines est suffi- prochements lexicaux entre l’égyp-
samment vaste pour que, y allant à tien ancien, le copte et le négro- ((

la pêche, chacun puisse en rappor- africain L’auteur veut donner


)).

ter ce qui va dans le sens qu’il l’impression qu’il est encore besoin
désire ; mais justement, cette procé- de prouver la parenté du copte avec
dure n’est pas une procédure l’égyptien ; tous les spécialistes
scientifique. savent depuis longtemps que le
copte est la dernière manifestati,on
L’intemrétation des données historique d‘une langue appartenant
à l’égyptien; il prend place après
U Décider sans preuves, dans le
l’ancien égyptien, le moyen égyp-
domaine de la recherche scientifique, tien, le néo-égyptien et le démcpti-
est une grave escroquerie intellec- que. I1 s’en différencie par l’usage
tuelle )) nous dit Th. Obenga de l’alphabet grec, complété par
(p. 372); le tout est de s’entendre quelques signes, ainsi que par
sur ce qui constitue des preuves. Ce l’emprunt massif de mots grecs ; il
qui est certain, c’est que la volonté a fait son apparition dans les pre-
acharnée de vouloir justifier une miers siècles de notre ère. Pages
thèse est généralement le chemin le 323-324, Th. Obenga cite l’égyptien
moins assuré pour y parvenir. fdw quatre qu’il rapproche de 42
(( ))

D’emblée, Th. Obenga a m i s la termes négro-africains apparen-


(( ))

barre très bas : ( ( L a coiilcidence de tés. I1 conclut triomphalement :


trois langues non contigugs sufit [.. I ((C’est exactement le même lexème,
iì garantir le caractère commun, depuis le vieil égyptien jusqu’aux
<(népo-égyptien D, d’un mot. C’est-ìì- langues négro-africaines modernes :
dire si je compare I’é’gyptien et le aucun hiatus sur plus ,de
mbochc je dois nécessairement appor- 5 000 ans. Au lieu de ces
))

ter le témoignage au moins d’une 42 termes, il aurait pu tout aussi


autre langue, aussi bien éloìpK%, dans bien en citer 150, nombre approxi-
l’espace de I’émtien (Vallée du Nil) matif des langues tchadiques con-
que du mbochi (cuvette congolaise) ))
temporaines. En effet, ce qu’il a
(p. 259). Une aussi bonne méthodo- omis de dire, c’est que ses quarante-
logie est référée sans vergogne à deux attestations valent pour une
A. Meillet. Si la troisième langue seule, toutes étant tirées exclusive-
retenue est le wolof, par exemple ment de la famille tchadique. Pour
(Sénégal), on n’a comparé l’égyp- que sa démonstration ait quelque
tien, en fait, qu’à du Niger-Congo ; valeur probante, il aurait fallu que
il sui33 donc qu’un fait linguistique fdw égyptien ait des correspondants
attesté dans deux langues indivi- non seulement en proto-tchadique,
duelles d’une seule branche du mais aussi en proto-nilo-saharien, en
((négro-africain soit déclaré relaté
)) proto-couchitique et en proto-niger-
à l’égyptien pour que l’on ait la congo. Ce qui n’est pas le cas.
preuve que le fait en question Page 203, Th. Obenga examine
relève bien du négro-égyptien
(( )) les mots négro-africains qu’il estime
commun. apparentés à l’égyptien sem (“3)
Quelques exemples pris au ((prêtre ; après avoir cité quelques
))

hasard dans l’ouvrage vont nous langues bantoues et le bambara, il


permettre de comprendre la passe 1 kanuri same ciel hawsa (( )),

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sama ((ciel N,sénoufo sama bon (( )), mots négro-africains d’origines
(( ))

songhai sama être beau et sainua


(( )) diverses; par exemple de lingala
((conserver la santé, épargner la may, kuba maasli, kikongo maza...
mort ; bambara sama offrir un
)) (( En fait, le ma- par quoi commen-
cadeau, faire présent D. Remarquons cent ces trois derniers mots est un
dès l’abord la vastitude du champ préfme de classe bien connu de tous
sémantique concerné ! Par quel tour les bantouistes ; P. de Wolf donne
de passe-passe peut-on faire tenir *-izi comme reconstruction possible
ensemble tout cela ? Le prêtre sem
(( pour eau (( en proto-Benue-
))

(sm3, sema), vêtu d’une peau de léo- Congo; on est alors bien loin de
pard lors de ses fonctions rituelles, l’égyptien (11).
sacerdotales, devait rendre le dieu
habillé beau et fort, conserver ainsi
sa santé; les présents ne man- Conclusion
quaient pas : étoffes, huiles, par-
fiuns, onguents, etc. Ainsi habillé, ((Pour sortir la linguistique
honoré, purifié, le dieu devait gar- générale africaine des redites et
der l’ordre cosmique, l’ordre impasses actuelles de même que de
cdeste. 1) Tout cela est bien beau, et son statut mineur séculaire - celui
correspond sûrement à quelque des descriptions-standard sans fin et
chose dans la religion égyptienne, sans projet linguistique précis, puis-
mais il y a un hic. Le kanuri et la que la comparaison est constam-
hawsa sama sont des emprunts avé- ment évitée, écartée ou ignorée -,
rés à l’arabe sama ciel [remar-
(( ))
il faut .necessairement prendre en
quons que la source utilisée par compte Ia langue égyptienne, pha-
Obenga (J. Lukas) indique expressé- raonique ou copte [.. I (p. 374). La
))

ment l’emprunt, et que le mot ligne de conduite du linguiste est


kanuri véritable est sami]; le maintenant fmée : foin des descrip-
sénoufo et le songhai same viennent tions de langues ;que chacun essaie
aussi de l’arabe samha ((beau, de rechercher les relations qui ne
bon n. Chassez le sémitique, il peuvent manquer d‘exister entre les
revient au galop ! Pour ce qui est langues négro-africaines
(( et ))

du songhai ((conserver la santé, l’égyptien, afin de bâtir le négro- ((

épargner la mort n, il existe bien en égyptien )).A coup sûr, cela est en
cette langue, comme en cent autres, bonne voie.
une formule de salutation (Irkoy ma Le problème d’une plus grande
proximité de l’égyptien avec les Ian-
bani samba mané)(9) qui signifie
((Que Dieu t’envoie la santé ! D, gues négro-africaines qu’avec le ber-
bère et le sémitique reste entier.
mais le verbe qui y est employé Même si cette hypothèse peut paraî-
(samba) signifie seulement tre tout à fait raisonnable et plus
((envoyer n, et pas envoyer la
((
que digne d‘intérêt, la méthodolo-
santé n. Quant au bambara sama
((offrir un cadeau d’après
))

Th. Obenga, il a pour premier sens (9) A. Prost, L a langue sonay et ses dia-
((envoyer un cadeau à lectes, Dakar, IFAN, 1956, p. 510.
quelqu’un (10) ; broutille, me
)) (10) Ch. Bailleul, Petit dictionnaire
direz-vous, à l’aune des ères bambara-fanpis, fraqzis-bambara, 1s.l.J Ave-
pharaoniques ! bury Publishing Company, 1981, p. 177.
(11) P. de Wolf, The Noun Class System
Pages 291-292, Th. Obenga rap- of Proto-Benue-Congo, La Haye, Paris, Mou-
proche l’égyptien mur eau), de (( ton, 1971, p. 58.

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gie mise en œuvre ici, malgré guistes comparatistes s’attellent réel-
l’excellente présentation matérielle lement au sujet, dont chacun devine
de l’ouvrage, ne nous semble pas bien les multiples implications
appropriée 1 l’objectif recherché, ni historiques.
recommandable à qui que ce soit.
aitons que de véritables lin- Henry Tourneux

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