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c Christophe Bertault - MPSI

Courbes paramétrées
Dans tout ce chapitre, I, J . . . sont des intervalles de R. On appellera adhérence de I et on notera I l’intervalle I augmenté
de ses bornes, qui éventuellement ne lui appartiennent pas. Par exemple, [0, 1[ = [0, 1] et ]0, ∞[ = [0, ∞].

Quand on écrira « Soit f = (x, y) : I −→ R2 une application », cela signifiera que f est une fonction définie sur I à valeurs
dans R2 donnée avec ses coordonnées, de sorte que pour tout t ∈ I : f (t) = x(t), y(t) .

1 Préliminaires sur les fonctions de R dans R2


   Explication Comment représenter graphiquement une fonction de R dans R2 ? On représente les fonctions de R
dans R comme des courbes au moyen d’un axe R en abscisse et d’un axe R ordonnée. On représente les fonctions de R2 dans R
comme des surfaces au moyen d’un plan R2 en abscisse et d’un axe R en ordonnée. De la même manière, on peut représenter les
fonctions de R dans R2 comme des courbes au moyen d’un axe R en abscisse et d’un plan R2 en ordonnée.

y z y
Fonction de R
dans R Fonction de R
z = sin x
dans R2

x
x
y t
cos(4x) 
y= 2 x = cos t
x +x+1 Fonction de R2 y = sin t
x dans R
  y

Pourtant, ce n’est pas ainsi que nous allons aborder graphiquement les fonctions de R dans R . 2 f π 
3 f
La fonction f : t 7−→ (cos t, sin t) représentée ci-dessus comme une courbe de l’espace, en l’oc-
b

b
4
currence une spirale, est aussi la fonction que nous avons utilisée pour paramétrer le cercle
trigonométrique. Pour tout point M = (x, y) ∈ R2 : b
x
2 2 f (0)
M appartient au cercle trigonométrique ⇐⇒ x +y =1
⇐⇒ ∃ t ∈ R/ M = f (t).
b
π 
La même fonction qu’on a représentée ci-dessus comme une spirale est ici représentée par un cercle f
2
que l’on envisage comme la trajectoire d’un point. C’est ce point de vue précisément que nous allons
adopter dans tout ce chapitre.

Définition (Limite d’une fonction de R dans R2 ) Soient f : I −→ R2 une fonction, a ∈ I et ℓ ∈ R2 . Les assertions
suivantes sont équivalentes :

(i) lim f (t) − ℓ = 0 (ii) lim x(t) = ℓx et lim y(t) = ℓy .
t→a t→a t→a

On dit dans ce cas que f admet ℓ pour limite en a.


On peut montrer que, si elle existe, la limite de f en a est unique. On la note alors lim f ou lim f (t). On utilise
a t→a
aussi souvent la notation suivante : f (t) −→ ℓ ou f −→ ℓ.
t→a a

   Explication f (t)
y(t) b

La limite « lim f (t) = ℓ » est un nouveau type de limites : limite d’une fonction à valeurs dans
t→a ℓ
R2 . La fonction t 7−→ f (t)−ℓ en revanche est définie sur I et à valeurs dans R, donc la limite ℓy b

« lim f (t) − ℓ = 0 » est une limite au sens le plus banal du terme, et signifie simplement que
t→a
la distance entre les points f (t) et ℓ tend vers 0 lorsque t tend vers a. ℓx x(t)


$ $ $ Attention ! Cette définition ne prévoit pas le cas des limites ±∞ — quel sens aurait la quantité f (t) − ℓ pour
ℓ = ±∞ ? Ce n’est pas très choquant car de toute façon, où donc serait situé l’infini dans le plan R2 ?

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Démonstration
q 2 q 2 2
(i) =⇒ (ii) Pour tout t ∈ I : 0 6 |x(t) − ℓx | = x(t) − ℓx 6 x(t) − ℓx + y(t) − ℓy = f (t) − ℓ .

Or lim f (t) − ℓ = 0 par hypothèse, donc lim |x(t) − ℓx | = 0 d’après le théorème des gendarmes, i.e.
t→a t→a
lim x(t) = ℓx . On procède de même pour lim y(t).
t→a t→a
 2 2
(ii) =⇒ (i) Par hypothèse lim x(t) − ℓx = 0, donc lim x(t) − ℓx = 0. De même, lim y(t) − ℓy = 0. Du
a a a
coup, par somme et composition avec la fonction racine carrée, lim f (t) − ℓ = 0 comme voulu. 
t→a

 
sin t sin t sin t − sin 0
Exemple lim , et = (1, 1) car lim = lim = sin′ (0) = cos 0 = 1 et lim et = 1.
t→0 t t→0 t t→0 t−0 t→0

Définition (Fonction continue/dérivable de R dans R2 ) Soit f = (x, y) : I −→ R2 une fonction.


• Soit a ∈ I. On dit que f est continue en a si lim f (t) = f (a), ce qui revient à dire que lim x(t) = x(a) et
t→a t→a
lim y(t) = y(a), ou encore que x et y sont continues en a.
t→a

f (t) − f (a) x(t) − x(a)


• Soit a ∈ I. On dit que f est dérivable en a si lim existe, ce qui revient à dire que lim et
t→a t−a t→a t−a
y(t) − y(a)
lim existent et sont finies, ou encore que x et y sont dérivables en a. On appelle alors nombre dérivé de
t→a t−a
f (t) − f (a) 
f en a, noté f ′ (a), le vecteur f ′ (a) = lim = x′ (a), y ′ (a) .
t→a t−a
• On dit que f est continue
 sur I (resp. dérivable sur I) si f l’est en tout point de I. Dans le cas des fonctions
′ I −→ R2
dérivables, la fonction f : est appelée la dérivée de f sur I.
t 7−→ f ′ (t)

L’ensemble des fonctions de I dans R2 continues (resp. dérivables) sur I est noté C(I, R2 ) (resp. D(I, R2 )).

2  2 
Exemple La fonction t 7−→ et , sin t est définie et dérivable sur R de dérivée t 7−→ 2tet , cos t .
2 2
En effet Les fonctions t 7−→ et et t 7−→ sin t sont dérivables sur R de dérivées t 7−→ 2tet et t 7−→ cos t.

Exemple Les fonctions −


→u : θ 7−→ −

u θ et −

v : θ 7−→ −→
v θ sont dérivables sur R et : − →u′ = −
→v et − →
v ′ = −−→u . La variable
d −

u d−

v

− →

des fonctions u et v étant par convention notée θ, on peut aussi écrire les choses ainsi : −

= v et = −− →u.
dθ dθ
En effet Pour tout θ ∈ R : − →
u θ = cos θ −

ı +sin θ −
→ = (cos θ, sin θ) et −

v θ = − sin θ −

ı +cos θ −
→ = (− sin θ, cos θ).
Les fonctions coordonnées de −→u et −

v sont bien dérivables sur R et ensuite il suffit de dériver.

Théorème (La dérivabilité implique la continuité) Soient f : I −→ R2 une fonction et a ∈ I. Si f est dérivable en a
(resp. sur I), alors f est continue en a (resp. sur I).

Définition (Dérivées successives d’une fonction de R dans R2 ) Soit f : I −→ R2 une fonction. On définit les dérivées
successives de f , si elles existent, au moyen d’une récurrence. On commence par poser f (0) = f . Ensuite, pour tout ′
k ∈ N, si on a réussi à définir f (k) sur I au cours des étapes précédentes et si f (k) est dérivable sur I, on pose f (k+1) = f (k) .

Pour tout k ∈ N, la fonction f (k) ainsi (éventuellement) définie est appelée la dérivée kème de f et l’on dit alors que f est k
fois dérivable sur I. On note généralement f , f ′ , f ′′ et f ′′′ plutôt que f (0) , f (1) , f (2) et f (3) respectivement.
dk f
Lorsque, par convention, on a fixé une notation pour la variable de f , disons , on note parfois la fonction f (k) .
dk

Exemple La fonction f : t 7−→ (e2t , sin t) est deux fois dérivable sur R de dérivée première la fonction f ′ : t 7−→ (2e2t , cos t)
et de dérivée seconde f ′′ : t 7−→ (4e2t , − sin t).

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Définition (Fonction de classe C k de R dans R ou R2 ) Soit f : I −→ R (resp. R2 ) une fonction.


• Pour tout k ∈ N, on dit que f est de classe C k sur I si f est k fois dérivable sur I et si f (k) est continue sur I.
L’ensemble des fonctions de I dans R (resp. R2 ) de classe C k sur I est noté C k (I, R) (resp. C k (I, R2 )).

• On dit que f est de classe C ∞ sur I si f est dérivable autant de fois qu’on le veut sur I.
L’ensemble des fonctions de I dans R (resp. R2 ) de classe C ∞ sur I est noté C ∞ (I, R) (resp. C ∞ (I, R2 )).

   Explication Ne confondez surtout pas « de classe C k » avec « k fois dérivable ».

Dérivabilité Continuité
Classe C ∞ ··· Classe C 2 deux fois Classe C 1 Dérivabilité
= Classe C 0

Théorème (Composée d’une fonction de R dans R suivie


′ d’une fonction
 de R dans R2 ) Soient ϕ ∈ C 1 (I, J) et
1 2 1 2 ′ ′
f ∈ C (J, R ). Alors f ◦ ϕ ∈ C (I, R ) et : f ◦ϕ =ϕ × f ◦ϕ .

A valeurs A valeurs A valeurs


dans R2 dans R dans R2

Démonstration Avec la notation f = (x, y), f ◦ ϕ = (x ◦ ϕ, y ◦ ϕ). La dérivabilité de f sur J signifie par
définition que x et y sont dérivables sur J. Du coup, ′ par composition, x ◦ ϕ et y ◦ ϕ sont dérivables sur I, donc
f ◦ ϕ l’est sur I. Nous pouvons donc calculer f ◦ ϕ :
′ ′   
f ◦ ϕ = x ◦ ϕ, y ◦ ϕ = (x ◦ ϕ)′ , (y ◦ ϕ)′ = ϕ′ × x′ ◦ ϕ, ϕ′ × y ′ ◦ ϕ = ϕ′ × x′ ◦ ϕ, y ′ ◦ ϕ = ϕ′ × f ′ ◦ ϕ.
′
Les fonctions ϕ′ × x′ ◦ ϕ et ϕ′ × y ′ ◦ ϕ étant continues sur I, f ◦ ϕ l’est donc aussi, et enfin f ◦ ϕ ∈ C 1 (I, R2 ). 

Exemple Soit θ ∈ C 1 (I, R). Notons − →u θ la fonction −



u ◦ θ : t 7−→ −
→ u θ(t) et −

v θ la fonction −

v ◦ θ : t 7−→ −→
v θ(t) . Ces fonctions

− →
− 1
composées u θ et v θ sont alors de classe C sur I et : →
− ′ ′ →
− ′ ′
u θ = θ × u ◦ θ = θ × v θ et →
− −

v θ = θ ×−
′ ′ →
v ′ ◦ θ = −θ′ × −→u θ.
La variable de la fonction θ étant par convention notée t, on peut aussi écrire les choses ainsi :
d−
→uθ dθ − d−→vθ dθ −
= ×→vθ et =− ×→ u θ.
dt dt dt dt

d−
→uθ d−

uθ dθ d− →uθ
   Explication Et le physicien dans tout ça ? On le voit facilement écrire ceci : =− →
v θ et = × .
dθ dt dt dθ
De telles relations, à la limite de la rigueur, ne sont pas un problème quand on sait ce qu’elles signifient, mais les apprentis
scientifiques que vous êtes ne voient généralement pas bien à quoi elles correspondent en maths. Le point important, c’est que le
physicien confond allègrement fonction et expression, f et f (x).

d−
→uθ d−→
uθ dθ d−→uθ
Physicien =−→
vθ = ×
dθ dt dt dθ
Mathématicien d−→
u d−
→uθ dθ d−→
u
=−→
v = × ◦θ
(version fonction) dθ dt dt dθ
Mathématicien d−
→u d−

uθ dθ d−
→u
(θ) = −
→ 
vθ (t) = (t) × θ(t)
(version expression) dθ dt dt dθ

• Pour le mathématicien, − →u θ peut désigner deux choses : soit la fonction − →


u ◦ θ (fonction de la variable t), soit


l’expression u (θ) pour un certain θ ∈ R, dans laquelle apparaît la fonction →

u (fonction de la variable θ). Comme


fonction, u θ ne peut être qu’une fonction de t : →
− →
− →

u θ (t) = u θ(t) = u θ(t)

et ne peut être dérivé que par rapport à t.
d−

u d−
→uθ
Ce qu’on peut dériver par rapport à θ, c’est la fonction − →
u elle-même, de dérivée . En toute rigueur, la notation
dθ dθ
n’a aucun sens.
d−
→uθ d−→

• Et pourtant le physicien l’emploie, cette notation : parfois , parfois — comme si une même fonction d’une seule
dθ dt
d−
→uθ
variable pouvait être dérivée par rapport à deux ! En fait, quand le physicien écrit , c’est la fonction − →uθ = −→u ◦ θ,

→ dt
duθ
fonction de t, qu’il dérive. Et quand il écrit , c’est la fonction − →u , fonction de θ, qu’il dérive, mais il la note −
→uθ

comme s’il s’agissait d’une expression. Bref : le physicien joue sur deux tableaux. Il a raison de le faire d’ailleurs, car
ses notations sont bien commodes. Elles paraissent seulement frauduleuses quand on ne sait pas les lire.

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Théorème (Multiplication d’une fonction de R dans
′ R ′ par une fonction de R dans R) Soient λ ∈ C 1 (I, R) et
1 2 1 2 ′
f ∈ C (I, R ). Alors λf ∈ C (I, R ) et : λf = λ f + λf .

Exemple u θ + rθ′ −
u θ(t) . Alors f ∈ C 1 (I, R2 ) et : f ′ = r ′ −
Soient r, θ ∈ C 1 (I, R). Notons f la fonction t 7−→ r(t) −
→ → →
v θ.
df dr − →

duθ dr − dθ →

duθ dr − dθ −
Le physicien écrira plutôt : = →uθ +r = →
uθ +r × = →uθ +r →v θ.
dt dt dt dt dt dθ dt dt

2 Courbes paramétrées

2.1 Définition

Définition (Courbe paramétrée) On appelle courbe paramétrée (plane) toute fonction f : I −→ R2 où I est un intervalle
de R. L’ensemble des valeurs de f est appelé le support de f .

   Explication
• La fonction f associe à toute valeur dans I du paramètre t un point f (t) du plan. En faisant varier ce f (t)
b

paramètre, nous obtenons le tracé d’une certaine « courbe », précisément le support de f . Intuitivement,
c’est le support de f qu’on a envie d’appeler « courbe » car c’est lui qu’on dessine effectivement, mais
remarquez pourtant que c’est la fonction f qui porte le nom de « courbe paramétrée ».
−−−−→
• Certains auteurs notent M (t) le point de paramètre t et considèrent f (t) comme le vecteur OM (t). En réalité,
comme nous avons identifié points et vecteurs via le choix d’un repère O, − →
ı ,−
→ 
 , ces distinctions sont superflues et nous
n’utiliserons que la notation f (t). Selon le contexte, nous penserons f (t) tantôt comme un point, tantôt comme un vecteur.

 
1 − t2 2t
Exemple Les fonctions t 7−→ (cos t, sin t) sur ]−π, π[ et t 7−→ , sur R sont deux courbes paramétrées distinctes
1 + t2 1 + t2
mais de même support — à savoir le cercle de centre O et de rayon 1 privé du point de coordonnées (−1, 0). La première est la
représentation paramétrique trigonométrique de ce cercle et la seconde sa représentation paramétrique rationnelle.

Exemple Soit ϕ : I −→ R une fonction.


n o
Le graphe de ϕ, c’est-à-dire l’ensemble t, ϕ(t) , est égal au support de la courbe paramétrée ϕ(t)
 t∈I
b
f (t)
2
I −→ R
f:  Bref : les graphes de fonctions de R dans R auxquels nous sommes
t 7−→ f (t) = t, ϕ(t) .
habitués peuvent être vus comme des supports de courbes paramétrées. Exemple important !
t

2.2 Tangentes

Définition (Demi-tangente et tangente en un point d’une courbe paramétrée) Soient f : I −→ R2 une courbe
paramétrée et a ∈ I. On suppose que f (t) 6= f (a) pour t 6= a proche de a.
−−−−−→
f (a)f (t)
• Si lim −−−−−→ = − →
u existe, on appelle demi-tangente à gauche de f en a la demi-droite passant par f (a)
t→a− f (a)f (t)

dirigée par −

u.
−−−−−→
f (a)f (t)
• Si lim −−−−−→ = − →
v existe, on appelle demi-tangente à droite de f en a la demi-droite passant par f (a)
t→a+ f (a)f (t)

dirigée par −

v.
• Si f possède une demi-tangente à gauche et une demi-tangente à droite, et si, avec les notations précédentes,


u = ±−

v , on appelle tangente de f en a la droite passant par f (a) dirigée par −

u (ou −

v ).

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   Explication Par hypothèse f (t) 6= f (a) pour t 6= a proche de a, donc la droite f (a)f (t) est bien définie, dirigée par
−−−−−→

− f (a)f (t) f (t) − f (a)
le vecteur unitaire d t = −−−−−→ = . Que se passe-t-il quand nous faisons tendre t vers a à gauche ? Dans
f (a)f (t) f (t) − f (a)

les cas sympathiques, la droite f (a)f (t) vient se coller contre la courbe f et lui devient « tangente » à la limite. A la limite,


son vecteur directeur est −

u = lim d . De ce raisonnement simple résulte notre définition.
t
t→a−

Passage −

u
b
f (a) à la limite f (a)
f (t) −
→ b b

dt t → a−



v f (a) f (a)
b b b



u f (a)

→ −

u =−

v u


v
Cas où −→
u = −− →
v : Cas où −→
u =− →v : Deux demi-tangentes
existence d’une tangente existence d’une tangente mais pas de tangente

Définition (Point régulier, point singulier/stationnaire, courbe régulière) Soient f ∈ C 1 (I, R2 ).




• Soit a ∈ I. On dit que f (a) est un point régulier de f si f ′ (a) 6= 0 . On dit sinon que f (a) est singulier ou stationnaire.
• On dit que f est régulière si tous ses points sont réguliers.

Théorème (Existence d’une tangente en un point régulier) Soient f ∈ C 1 (I, R2 ) et a ∈ I. Si f (a) est un point
régulier, alors f possède une tangente en a dirigée par le vecteur f ′ (a).



v (t) = f ′ (t)
   Explication
Résultat important en cinématique ! Si f représente la position instantanée d’un mobile sur un plan, M (t)
b

alors par définition f ′ est la vitesse instantanée de ce mobile. Ce théorème énonce que (dans le cas −−−−→
des points réguliers) la vitesse f ′ (t) à l’instant t est tangente à la trajectoire en f (t). OM (t) = f (t)


Démonstration Comme f (a) est un point régulier, f ′ (a) 6= 0. On peut montrer par ailleurs qu’alors
f (t) 6= f (a) pour tout t 6= a proche de a.
f (t) − f (a) f (t) − f (a)
Comme f est dérivable en a : lim = f ′ (a), donc en particulier lim = f ′ (a) . Par
t→a t−a t→a |t − a|
−−−−−→ −−−−−→
f (a)f (t) f ′ (a) f (a)f (t) f ′ (a)
division : lim −−−−−→ = ′ et lim −−−−−→ = − ′ , donc f possède une tangente en a
t→a+ f (a)f (t) f (a) t→a− f (a)f (t) f (a)
f ′ (a) ′
f ′ (a) — ou bien sûr f (a).
dirigée par exemple par 


I −→ R2 
Exemple Soit ϕ ∈ C 1 (I, R). Nous pouvons associer à ϕ la courbe paramétrée f : de classe C 1 sur I.
t 7−→ t, ϕ(t)
 − →
Pour tout t ∈ I : f ′ (t) = 1, ϕ′ (t) 6= 0 , donc f est régulière. La tangente de f en t est donc dirigée par le vecteur −
→ı +ϕ′ (t) −
→.

Résultat bien connu : le nombre dérivé ϕ (t) est le coefficient directeur de la tangente de ϕ en t. Exemple important !




Exemple

Notons f la courbe paramétrée θ 7−→ (cos θ, sin θ), définie et de classe C ∞ sur R. Pour tout f (θ)

− b

θ ∈ R : f ′ (θ) = −→
v θ 6= 0 , donc f est régulière. Sur la figure ci-contre, on voit bien,
comme le veut le théorème, que f ′ (θ) est un vecteur directeur de la tangente de f en θ. θ

Nous travaillerons dans ce chapitre essentiellement avec des courbes paramétrées de classe C 1 régulières, mais le théorème
suivant nous permettra tout de même de déterminer certaines tangentes en des points singuliers.

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Théorème Soient f = (x, y) ∈ C(I, R2 ) et a ∈ I. On suppose que x(t) 6= x(a) pour t 6= a proche de a.
y(t) − y(a)
(i) Si lim = m ∈ R, alors f possède une tangente en a de coefficient directeur m.
t→a x(t) − x(a)
y(t) − y(a)
(ii) Si lim = ±∞, alors f possède une tangente verticale en a.
t→a x(t) − x(a)

Démonstration Montrons seulement (i). Nous allons prouver que f possède une demi-tangente à droite en a
de coefficient directeur m. La preuve est analogue à gauche, donc nous aurons bien montré le résultat.
σ x(t) − x(a)
Par hypothèse, la fonction t 7−→ est définie sur ]a, a + α[ pour un certain α > 0. Ses seules valeurs
x(t) − x(a)
possibles sont par ailleurs −1 et 1, mais σ peut-elle à la fois valoir −1 et 1 ? En fait non car elle est continue sur
]a, a + α[, donc s’annulerait d’après le théorème des valeurs intermédiaires si elle valait parfois −1 et parfois 1.
Conclusion : σ vaut toujours 1 ou toujours −1 sur ]a, a + α[. Du coup :

−−−−−→ −ı + y(t) − y(a) −


→ →
x(t) − x(a) −
→
ı + y(t) − y(a) −
→ −

f (a)f (t)  x(t) − x(a) x(t) − x(a) ı +m − →

−−−−−→ = q = × s −→ ± √ ,
f (a)f (t) 2 2 x(t) − x(a)  2 t→a + 1 + m2
x(t) − x(a) + y(t) − y(a) y(t) − y(a)
1+
x(t) − x(a)
donc en effet f possède une demi-tangente à droite en a dirigée par →
−ı + m −

 , i.e. de coefficient directeur m. 

Exemple La courbe paramétrée f : t 7−→ sin2 t, tan2 t possède une tangente en 0 de coefficient directeur 1.
i π πh f′ 
En effet La courbe f est de classe C 1 sur − , de dérivée t 7−→ 2 sin t cos t , 2 tan t(1 + tan2 t) . En

− 2 2
particulier f ′ (0) = 0 , donc f (0) est un point singulier.
2 2
tan t − tan 0 1
Or : = −→ 1, donc f possède une tangente en 0 dirigée de coefficient directeur 1.
sin2 t − sin2 0 cos2 t t→0

2.3 Branches infinies

Définition (Branches infinies, branches paraboliques et asymptotes) Soient


f : I −→ R2 une courbe paramétrée
et a ∈ I. On dit que f possède une branche infinie au voisinage de a si lim f (t) = ∞.

t→a

• Premier cas : Seule l’une des deux limites lim x et lim y est infinie — l’autre est finie.
a a

1) Si lim x = m ∈ R et lim y = ±∞, la droite d’équation x = m est appelée l’asymptote de f en a.


a a

2) Si lim x = ±∞ et lim y = m ∈ R, la droite d’équation y = m est appelée l’asymptote de f en a.


a a

• Deuxième cas : Les deux limites lim x et lim y sont infinies.


a a
y(t)
1) Si lim = 0, on dit que f possède une branche parabolique dans la direction (Ox).
t→a x(t)

y(t)
2) Si lim = ±∞, on dit que f possède une branche parabolique dans la direction (Oy).
t→a x(t)
y(t)
3) Si lim =m:
t→a x(t)
 
3a) et si lim y(t) − mx(t) = ±∞, on dit que f possède une branche parabolique dans la direction y = mx ;
t→a
 
3b) et si lim y(t) − mx(t) = p ∈ R, la droite d’équation y = mx + p est appelée l’asymptote de f en a.
t→a

$ $ $ Attention ! Ne confondez pas « branche infinie » et « branche parabolique » : toute branche parabolique est une
branche infinie, mais le contraire est faux ! « Branche infinie », comme le nom l’indique, veut juste dire « qui va à l’infini ».

   Explication Quelle différence géométriquement entre une asymptote et une branche parabolique ? Dans les deux cas,
la courbe se dirige dans une direction donnée, celle de la droite concernée, mais. . . a
t→

. . . tandis que dans le cas


. . . dans le cas d’une asymptote, d’une branche parabolique,
t→a
la courbe s’écrase contre la courbe s’éloigne de la droite
la droite. . . 6 tout en maintenant le cap
dans sa direction.
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2.4 Plan d’étude


   En pratique Pour étudier une courbe paramétrée en vue d’effectuer un tracé de son support, on procède par
étapes. Donnons-nous f = (x, y) ∈ C 1 (I, R2 ).

• Si c’est possible, on commence par réduire le domaine de définition I de f autant que possible en s’appuyant sur une
périodicité ou des symétries. Rappelons que pour tracer le graphe d’une fonction paire de R dans R, on peut se contenter
d’une étude sur R+ à condition d’effectuer à la fin une symétrie du graphe obtenu par rapport à l’axe (Oy). Ce raisonnement
courant comporte deux moments qu’il faut bien distinguer :
– la réduction du domaine d’étude à R+ ;
– la transformation géométrique qui permet de récupérer toute la courbe à partir de sa restriction à R+ .
Avec les courbes paramétrées, c’est la même chose. N’apprenez surtout pas par cœur les résultats ci-dessous : comprenez-les
et sachez les retrouver vite sur un dessin. La liste suivante n’est pas exhaustive.

Cas 1) Cas 2) Cas 3) Cas 4)

f (t + T ) f (−t) f (t) f (t)


b
= f (t) b
= f (t) b b

b O (Ox) b

f (−t) f (−t)

1) Cas où I est T -périodique et où x et y sont T -périodiques pour un certain T > 0 : Alors pour tout
t ∈ I, le point f (t + T ) coïncide avec le point f (t).
Etude sur un intervalle de longueur T + Rien

2) Cas où I est symétrique par rapport à 0 et où x et y sont paires : Alors pour tout t ∈ I, le point f (−t)
coïncide avec le point f (t).
Etude sur I ∩ R+ + Rien

3) Cas où I est symétrique par rapport à 0 et où x et y sont impaires : Alors pour tout t ∈ I, le point
f (−t) est le symétrique du point f (t) par rapport à O.
Etude sur I ∩ R+ + Symétrie par rapport à O

4) Cas où I est symétrique par rapport à 0 et où x est paire et y impaire : Alors pour tout t ∈ I, le
point f (−t) est le symétrique du point f (t) par rapport à (Ox).
Etude sur I ∩ R+ + Symétrie par rapport à (Ox)

Cas 5) Cas 6) f (−t) Cas 7) Cas 8)


b
y

f (−t) f (t) f (t) f (t)


=

b b b
f (t) b b
x

(Ox) b
x

f (α − t)
=

(Oy) f (−t)
y

5) Cas où I est symétrique par rapport à 0 et où x est impaire et y paire : Alors pour tout t ∈ I, le
point f (−t) est le symétrique du point f (t) par rapport à (Oy).
Etude sur I ∩ R+ + Symétrie par rapport à (Oy)

6) Cas où I est symétrique par rapport à 0 et où x(−t) = y(t) et y(−t) = x(t) : Alors pour tout t ∈ I, le
point f (−t) est le symétrique du point f (t) par rapport à la droite d’équation y = x.
Etude sur I ∩ R+ + Symétrie par rapport à y = x

7) Cas où I est symétrique par rapport à 0 et où x(−t) = −y(t) et y(−t) = −x(t) : Alors pour tout t ∈ I,
le point f (−t) est le symétrique du point f (t) par rapport à la droite d’équation y = −x.
Etude sur I ∩ R+ + Symétrie par rapport à y = −x
α
8) Cas où I est symétrique par rapport à pour un certain α ∈ R et où x(α−t) = x(t) et y(α−t) = −y(t) :
2
Alors pour tout t ∈ I, le point f (α − t) est le symétrique du point f (t) par
h αrapport
h à (Ox). Oril’application t 7−→ α − t
α αi
est géométriquement la symétrie de R par rapport à . Lorsque t décrit , ∞ , α − t décrit −∞, .
2 2 2
hα h α
Etude sur I ∩ , ∞ + Symétrie par rapport à (Ox) t 2 α−t
2 b

Figure importante
à bien comprendre !
7
c Christophe Bertault - MPSI

• On étudie ensuite les variations de x et y simultanément ainsi que leurs limites. Il est pratique de présenter tout cela
sous la forme d’un unique tableau de variations. Les tangentes horizontales et verticales (pour y ′ (t) = 0 et x′ (t) = 0
respectivement), ainsi que les asymptotes horizontales et verticales, s’y lisent aisément.

t 0 1 2 ∞

x (t) 2 + −
2
x(t) 0 b

−1 −∞
0 1 b

y(t) −1 Vous devez savoir passer très vite


d’un tableau comme celui-ci
−2 à une courbe comme celle-là. b


y (t) −1 − +

• On étudie enfin les branches infinies.


• On peut éventuellement déterminer les points multiples de f , s’il y en a, i.e. les points en lesquels la courbe passe plusieurs
fois. Pour ce faire, on résout l’équation f (t) = f (t′ ) d’inconnues t, t′ ∈ I avec t 6= t′ . C’est souvent fastidieux.
• Pour le tracé définitif, on commence toujours par positionner les points importants, leurs tangentes, les asymptotes et
les directions des branches paraboliques. Ne vous embêtez pas à calculer toutes sortes de points de la courbe dans le but
d’obtenir un tracé précis : de toute façon, vous n’aurez jamais assez de points pour obtenir un tracé exact. Eventuellement,
si cela semble pertinent, déterminer les coordonnées des points d’intersection de la courbe avec les axes (Ox) et (Oy). Il
est parfois judicieux de dessiner des tangentes obliques en certains points remarquables.

2.5 Exemples
(
x(t) = t3 − 3t

Exemple On souhaite étudier la courbe paramétrée f = (x, y) définie pour tout t ∈ R par : 12 de
, y(t) = t3 − 9t +
t
classe C ∞ . Comme x et y sont impaires, nous pouvons nous contenter de les étudier sur R∗+ , mais nous aurons à effectuer à la
fin une symétrie de la courbe obtenue sur R∗+ par rapport à O.
12 t 0 1 2 ∞
• Pour tout t ∈ R∗+ : x′ (t) = 3t2 − 3 et y ′ (t) = 3t2 − 9 − 2 , puis :
t x′ (t) − +
t>0
x′ (t) = 0 ⇐⇒ 3t2 − 3 = 0 ⇐⇒ t=1 0 ∞
12
et : ′
y (t) = 0 ⇐⇒ 3t2 − 9 − 2 = 0 2
t x(t) −2
⇐⇒ (t2 )2 − 3t2 − 4 = 0
∞ ∞
⇐⇒ t2 = 4 ou t2 = −1 (discriminant 25)
y(t) 4
⇐⇒ t2 = 4 ⇐⇒ t=2 car t > 0.
−4
Le fait que x′ et y ′ ne s’annulent jamais simultanément montre que f est
y ′ (t) − +
régulière sur tout R∗ . On étudie ensuite le signe de x′ et de y ′ et on regroupe
tout cela dans un tableau de variations.
• Vient ensuite l’étude des branches infinies. Il y en a deux d’après le tableau de variations : une au voisinage de 0 et une
au voisinage de ∞. Au voisinage de 0, c’est clair, on a une asymptote verticale d’équation x = 0. Au voisinage de ∞, tout
y
d’abord lim x = lim y = ∞, donc on forme le rapport :
∞ ∞ x
12 9 12
y(t) t3 − 9t + 1− 2 + 4
= t = t t −→ 1. A-t-on ici une asymptote ? une branche parabolique ? rien du tout ?
x(t) t3 − 3t 3 t→∞
1− 2
t

Comme lim y(t) − x(t) = −∞, f possède une branche parabolique de direction y = x au voisinage de ∞.
t→∞
x

x
=

=
y

Symétrie
par rapport à O b

8
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• On remarque sur la courbe que f possède deux points multiples. Calculons précisément les paramètres de ces points. Pour
tous t, t′ ∈ R∗ , t 6= t′ :
( 3 
 t − 3t = t′3 − 3t′  (t3 − t′3 ) = 3(t − t′ )
′ x(t) = x(t′ )
f (t) = f (t ) ⇐⇒ ⇐⇒ 12 12 ⇐⇒ 12(t − t′ )
y(t) = y(t′ ) t3 − 9t + = t′3 − 9t′ + ′  (t3 − t′3 ) = 9(t − t′ ) +
t t tt′
( 2 ′ ′2  
t6=t′
t + tt + t = 3 L2 ←L2 −L1 t2 + tt′ + t′2 = 3 L1 ←L1 +L2 (t + t′ )2 = 1
⇐⇒ 12 ⇐⇒ ⇐⇒
t2 + tt′ + t′2 = 9 + ′ tt′ = −2 tt′ = −2
tt
 
t + t′ = 1 t + t′ = −1
⇐⇒ ′ ou Tiens, des systèmes somme-produit !
tt = −2 tt′ = −2.
⇐⇒ t et t′ sont les deux racines (éventuellement égales) du polynôme X 2 − X − 2 ou X 2 + X − 2
   
t=2 t = −1 t=1 t = −2
⇐⇒ ou ou ou
t′ = −1 t′ = 2 t′ = −2 t′ = 1.
| {z } | {z }
Première équation : Seconde équation :
un point multiple un autre point multiple
f (−1) = f (2) = (2, −4) f (−2) = f (1) = (−2, 4)


x(t) = 3 cos(3t)
Exemple On souhaite étudier la courbe paramétrée f = (x, y) définie pour tout t ∈ R par :
y(t) = 2 sin(2t).
• Il s’agit là d’une courbe paramétrée de classe C ∞ sur R et pour tout t ∈ R :

x(t + π) = 3 cos(3t + 3π) = 3 cos(3t + π) = −3 cos(3t) = −x(t) et y(t + π) = 2 sin(2t + 2π) = 2 sin(2t) = y(t),

donc f (t + π) est le symétrique de f (t) par rapport à (Oy). Nous pouvons nous contenter d’étudier x et y sur un intervalle
de longueur π. Il conviendra seulement d’effectuer, à la fin, une symétrie par rapport à (Oy). Mais quel intervalle
de longueur π pouvons-nous choisir ?
Remarquons ici que x est paire et y impaire. Pour tenir compte
h π πdei cette remarque, nous allons devoir choisir un intervalle
de longueur π symétrique par rapport à 0, bref : − , . Les parité/imparité décrites à l’instant nous autorisent
h πi 2 2
à n’étudier f que sur 0, si nous effectuons en fin de parcours une symétrie par rapport à l’axe (Ox).
2 h πi
Conclusion : nous allons étudier x et y seulement sur 0, . Pour obtenir le support de f dans son intégralité, nous
2
effectuerons au moment du tracé une symétrie par rapport à (Ox) puis une autre par rapport à (Oy).
h πi
• Les figures suivantes représentent les variations de t 7−→ cos(3t) et t 7−→ sin(2t) sur 0, , dont le tableau des variations de
′ ′
2
x et y découle. On remarque au passage que f est régulière sur cet intervalle car x et y ne s’annulent jamais simultanément.

π π π
t 0
π b
4 3 2
t= y = sin x
3 x′ (t) − + 9
x=π = sin(2t)
3 0
3π π x=π 3
y = cos x x= x= x(t) −√
2 2 π 2
= cos(3t) b
π π t= −3
t= t= 3
2 4 2

y(t) 3
h πi 0 0

• En quels points la courbe coupe-t-elle l’axe (Oy) ? Pour tout t ∈ 0, : y (t) + − −4
2
π π π nπ π o
x(t) = 0 ⇐⇒ cos(3t) = 0 ⇐⇒ 3t ≡ mod π ⇐⇒ t≡ mod ⇐⇒ t∈ , .
2 6 3 6 2

Les points d’intersection cherchés sont donc les points de coordonnées (0, 3) et (0, 0).

b b b b
b b b b b b b
Symétrie Symétrie
par rapport à (Ox) par rapport à (Oy)
b b b b b b b

b b b b b
b b b

9
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3 Courbes paramétrées
définies par une équation polaire

3.1 Définition et tangentes


Au lieu de définir une courbe paramétrée f : I −→ R2 au moyen de ses coordonnées cartésiennes (x, y), on peut vouloir se
servir de coordonnées polaires (r, θ). Nous étudierons ici des courbes paramétrées f définies par la donnée d’une fonction r telle
que pour tout θ ∈ I : f (θ) = r(θ) − →u θ . On dit d’une telle courbe paramétrée qu’elle est définie par une équation polaire.

   Explication Pour mieux comprendre comment l’on peut tracer les courbes paramétrées définies par une équation
polaire, analysons brièvement un premier exemple informel.

2π 4π Pour tout θ ∈ I, le point f (θ) se trace


θ 0
3
π
3
2π  à par- π
tir de ses coordonnées polaires r(θ), θ . Faites 3
3 3 attention lorsque r(θ) < 0 ! Nous avons repré-
r(θ) 2 0 0 2 senté ci-contre en gras la portion de la courbe b

1 associée à des valeurs négatives de r.



2

Les zéros de la fonction r sont des valeurs importantes du paramètre θ, signe que la courbe passe
par O. N’oubliez jamais les zéros de r !

Théorème (Tangente d’une courbe paramétrée définie par une équation polaire) Soient f ∈ C 1 (I, R2 ) définie
par une équation polaire r et θ0 ∈ I.
(i) Si f (θ0 ) 6= O, alors f (θ0 ) est un point régulier de f et la tangente en θ0 est dirigée par f ′ (θ0 ).
Si de plus r ′ (θ0 ) = 0, alors la tangente en θ0 est dirigée par −→
v θ0 .
(ii) Si f (θ0 ) = O (et si f (θ) 6= O pour θ 6= θ0 proche de θ0 ), alors f possède une tangente en θ0 dirigée par −

u θ0 .

π 5π
   Explication Dans l’exemple informel ci-dessus, on voit bien que, par construction, la courbe passe en O en et
3 3
avec une tangente dirigée conformément à ces mesures d’angle. Cet exemple illustre le cas « f (θ0 ) = O » du théorème.

Démonstration


(i) Si f (θ0 ) 6= O, alors r(θ0 ) 6= 0, et donc f ′ (θ0 ) = r ′ (θ0 ) −

u θ0 + r(θ0 ) −

v θ0 6= 0 comme voulu. Ainsi le point
f (θ0 ) est régulier. Si de plus r ′ (θ0 ) = 0, il est alors clair que la tangente en θ0 est dirigée par −

v θ0 .
(ii) Supposons f (θ0 ) = O et f (θ) 6= O pour θ 6= θ0 proche de θ0 . Nous allons prouver que f possède une demi-
tangente à droite en θ0 dirigée par −→
u θ0 . La preuve est analogue à gauche, donc nous aurons bien montré le
résultat.
σ r(θ)
Par hypothèse, la fonction θ 7−→ est définie sur ]θ0 , θ0 + α[ pour un certain α > 0. Ses seules valeurs
r(θ)
possibles sont par ailleurs −1 et 1, mais σ peut-elle à la fois valoir −1 et 1 ? En fait non car elle est continue
sur ]θ0 , θ0 + α[, donc s’annulerait d’après le théorème des valeurs intermédiaires si elle valait parfois −1 et
parfois 1. Conclusion : σ vaut toujours 1 ou toujours −1 sur ]θ0 , θ0 + α[.
−−−−−−→
f (θ0 )f (θ) f (θ) r(θ) −
Du coup : −−−−−−→ = = →
u −→ ±− →u θ0 , donc en effet f possède une demi-tangente
f (θ0 )f (θ) f (θ) r(θ) θ t→θ+
0

à droite en θ dirigée par −


0

u .
θ0 

3.2 Plan d’étude


   En pratique Les courbes paramétrées définies par une équation polaire gagnent à être étudiées sous forme polaire
directement — mais on pourrait les étudier en les ramenant à leur forme cartésienne. On décrit ci-dessous la méthode à suivre.
Donnons-nous f ∈ C 1 (I, R2 ) une courbe paramétrée définie par une équation polaire r.

10
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• Si c’est possible, on commence par réduire le domaine de définition de f .

Cas 1) Cas 2) f (θ + 2T ) Cas 3) Cas 4) Cas 5)


b

b f (θ + T )
f (θ + T ) f (θ) f (−θ) f (θ) f (π − θ) f (θ)
b
= f (θ) b
f (θ) b b b b b

O b

f (θ − T ) (Ox) b

b
f (−θ) (Oy) (Oy)
f (θ − 2T )

1) Cas où I est T -périodique et où f est T -périodique pour un certain T > 0 : Alors pour tout θ ∈ I,
le point f (θ + T ) coïncide avec le point f (θ).

Etude sur un intervalle de longueur T + Rien

2) Cas où I est T -périodique et où r est T -périodique pour un certain T > 0 : Alors pour tout θ ∈ I,
f (θ + T ) = r(θ + T ) −

u θ+T = r(θ) −

u θ+T , donc f (θ + T ) est l’image de f (θ) par la rotation de centre O et d’angle de
mesure T .
Etude sur un intervalle de longueur T + Rotation de centre O et d’angle de mesure kT , k décrivant Z

A priori, c’est bien une infinité de rotations qu’il convient d’effectuer. Cela dit, dans les situations courantes, pT est
un multiple de 2π pour un certain p ∈ N∗ , donc f (θ + pT ) = r(θ) −

u θ+pT = r(θ + pT ) −
→u θ = f (θ) pour tout θ ∈ R. Tous
les pT , on retombe sur un point qu’on a déjà dessiné. A partir du tracé initial sur un intervalle de longueur T , il reste
ainsi à effectuer p − 1 rotations de centre O et d’angle de mesure T pour obtenir le tracé complet sur R.
3) Cas où I est symétrique par rapport à 0 et où r est paire : Alors f (−θ) = r(−θ) − →u = r(θ) −→u −θ −θ
pour tout θ ∈ I, de sorte que f (−θ) est le symétrique de f (θ) par rapport à (Ox).

Etude sur I ∩ R+ + Symétrie par rapport à (Ox)

4) Cas où I est symétrique par rapport à 0 et où r est impaire : Alors f (−θ) = r(−θ) −

u −θ = −r(θ) −

u −θ
pour tout θ ∈ I, de sorte que f (−θ) est le symétrique de f (θ) par rapport à (Oy).

Etude sur I ∩ R+ + Symétrie par rapport à (Oy)


π
5) Cas où I est symétrique par rapport et où r(π−θ) = r(θ) : Alors f (π−θ) = r(π−θ) − →u π−θ = r(θ) −

u π−θ
2
pour tout θ ∈ I, de sorte que f (π − θ) est le symétrique de f (θ) par hrapport
i à (Oy). Or l’application
i θ −
7 → π − θ est
π π πi
géométriquement la symétrie de R par rapport à . Lorsque θ décrit , ∞ , π − θ décrit −∞, .
2 2 2
hπ h
Etude sur I ∩ , ∞ + Symétrie par rapport à (Oy)
2

• On étudie ensuite les variations de r. On n’oublie pas de déterminer tous les zéros de r ! On s’intéresse
également aux tangentes remarquables.
• L’étude des branches infinies n’est pas au programme pour les équations polaires.
• On détermine éventuellement les points d’intersection de la courbe avec les axes (Ox) et (Oy).
• Enfin on effectue le tracé du support de f , en commençant par placer les points importants et leurs tangentes.

3.3 Exemples
Exemple (Lemniscate de Bernoulli) On note A et B les points de coordonnées respectives (1, 0) et (−1, 0) et L l’ensemble
des points M pour lesquels M A × M B = 1.
• Pour tout point M 6= O de coordonnées cartésiennes (x, y) et de coordonnées polaires (r, θ) avec r > 0 :
h i h i
M ∈L ⇐⇒ M A2 × M B 2 = 1 ⇐⇒ (x − 1)2 + y 2 × (x + 1)2 + y 2 = 1
h i h i
⇐⇒ (x2 + y 2 + 1) − 2x × (x2 + y 2 + 1) + 2x = 1 ⇐⇒ (x2 + y 2 + 1)2 − (2x)2 = 1
⇐⇒ (x2 + y 2 )2 + 2(x2 + y 2 ) − 4x2 = 0 ⇐⇒ r 4 + 2r 2 − 4r 2 cos2 θ = 0
r6=0  r>0 p
⇐⇒ r 2 = 2 2 cos2 θ − 1 ⇐⇒ r = 2 cos(2θ).
π
Bref, L est la courbe du plan d’équation polaire r 2 = 2 cos(2θ) — le point O est obtenu par exemple pour θ = .
4

11
c Christophe Bertault - MPSI

• L’ensemble de définition
h π πDir de r est un peu compliqué, mais en tout cas r est π-périodique. On peut donc se contenter de
l’étudier sur Dr ∩ − , par exemple à condition d’effectuer ensuite une rotation de centre O et d’angle de mesure π,
2 2 h πi
i.e. une symétrie par rapport à O. Comme de plus r est paire, on peut même se contenter de travailler sur Dr ∩ 0, ,
h πi h πi 2
à condition d’opérer à la fin une symétrie par rapport à l’axe (Ox). On vérifie alors que Dr ∩ 0, = 0, — dans la
2 4
racine carrée, le cosinus doit être positif.
h πh √
2 sin(2θ) π
• Pour tout θ ∈ 0, : r ′ (θ) = − p — attention, r n’est pas dérivable en . Ainsi r ′ est strictement positive
4 cos(2θ) 4
i πh h πh h πi
sur 0, et ne s’annule qu’en 0, donc r est strictement décroissante sur 0, , et même 0, par continuité.
4 4 4
π −

– La courbe passe par le point O en . En ce point, la tangente est donc dirigée par u π4 .
4
– Comme r(0) 6= 0 mais r ′ (0) = 0, la tangente à f en 0 est dirigée par −
→v0=− →.

Après les
symétries. . .
b b b b b


Exemple On souhaite étudier la courbe paramétrée f d’équation polaire r définie pour tout θ ∈ R par : r(θ) = cos . Il
3
s’agit là d’une courbe paramétrée de classe C ∞ sur R.
 

• Pour tout θ ∈ R : r θ + = −r(θ), donc nous pouvons nous contenter de travailler sur un intervalle de longueur
2
3π π 3π
à condition d’effectuer trois rotations d’angle au moment du tracé. Mais quel intervalle de longueur choisir ?
2 2   2
3π 3π 3π
La parité de r nous pousse à choisir l’intervalle − , et nous permet de réduire cet intervalle à 0, si nous
4 4 4
effectuons à la fin une symétrie par rapport à l’axe (Ox).
   
3π 2 2θ 3π
• Pour tout θ ∈ 0, : r ′ (θ) = − sin . Ainsi r ′ est strictement négative sur 0, et ne s’annule qu’en 0, donc
4  3  3 4

r est strictement décroissante sur 0, .
4

– La courbe passe par le point O en . En ce point, la tangente est donc dirigée par −

u 3π .
4 4
′ →

– Comme r(0) 6= 0 mais r (0) = 0, la tangente à f en 0 est dirigée par v 0 =  . −

• En faisant un rapide dessin, on s’aperçoit — ce n’est pas une démonstration — que la courbe coupe l’axe  Déterminons
 (Oy).
π 1
les coordonnées du point d’intersection. C’est facile, c’est le point de paramètre , de coordonnées ,0 .
2 2

b
Symétrie b
Trois rotations b

par rapport à (Ox) de centre O


b b b b b b b b b

et d’angle
π
b
de mesure b

2
b

12

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