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La société sud-africaine d'aujourd'hui

Le premier gouvernement démocratique d'Afrique du Sud a apporté des améliorations


importantes à l'éducation, aux soins de santé, aux conditions de logement et autres services sociaux
dont bénéficie la majorité de la population noire défavorisée. Malgré ces progrès, beaucoup de
chemin reste à parcourir : la pauvreté reste endémique et les écarts de revenus démesurés
(coefficient de Gini en 2008 : 0,578). Bien que les disparités se soient quelque peu atténuées, la
répartition des revenus reste l'une des plus inégales du monde.
A côté de signes de richesse évidents, des millions de Sud-Africains vivent en dessous du
seuil de pauvreté. En raison de la libéralisation économique et des compressions budgétaires, il est
difficile d'améliorer les conditions de vie des pauvres, noirs comme blancs, et de leur donner de
meilleures perspectives d'avenir. La frustration des habitants défavorisés ont engendré une
recrudescence de la criminalité liée aux taux élevés de pauvreté et de chômage (ainsi qu'à la facilité
avec laquelle on peux se procurer des armes sur le marché noir).
Depuis la fin de l'apartheid et l'arrivée du nouveau régime, de nouvelles mesures de
reconstruction et de développement ont été adoptées. Pourtant, on retrouve sans cesse des écarts de
revenus entre Blancs et personnes d'autres couleurs qui se creusent ainsi qu'une instabilité, une
flexibilité de l'emploi continue et donc un taux de chômage élevé constant. On dit que les pauvres
sont pris dans « l'engrenage de la pauvreté » formant un cercle vicieux.
A travers de nombreux exemples, nous constaterons l'ampleur de cette misère et comment a-t-
elle évolué depuis la fin de l'apartheid.

1) La discrimination des Blancs

Durant la période d'apartheid, les Blancs gagnaient en moyenne 15 fois plus que les Noirs,
contre 9 fois plus en 1996. C'est cette même année que la Constitution fut rédigée. C'est un des
textes qui protège le mieux au monde les droits de chacun : les Noirs ont alors les mêmes libertés
que les Blancs. Ces derniers sont donc licenciés progressivement du fait de l'abandon de la
protection de l'emploi dont ils bénéficiaient sous l'ancien gouvernement.

A une trentaine de kilomètres de Pretoria se trouve le bidonville Sonkinhoekie (« Coin


Ensoleillé » en afrikaner). Il n'y a rien de poétique dans cet ensemble de cabanes de bois vieilles et
sales; pourtant, une centaine de personnes y vivent : tous des Blancs. Un des habitants raconte qu'il
a perdu son travail de maçon il y a 4 ans car il était trop vieux selons ses employeurs. En quelques
mois, l'ouvrier a tout perdu et s'est retrouvé à la rue. Comme ses camarades, il ne rejette pas la faute
sur la crise économique mais sur l'Affirmative Action : il assure qu'il a été « chassé de son travail
pour mettre un Noir à sa place ». Selon lui, les Blancs et les Noirs n'ont en commun que d'être la
cible des criminels.
A Sonkinhoekie

La misère a atteind la communauté blanche d'Afrique du Sud depuis la fin de l'apartheid : près
de 400 000 des 4,2 millions de Blancs du pays seraient pauvres. Mais les Noirs restent massivement
les plus touchés. La population vivant avec moins d'un dollar par jour est passée de 1,9 million en
1996 à 4,2 millions en 2005 (soit le nombre de Blancs du pays). Mais l'Affirmative Action est
considérée comme majoritairement responsable de la misère des Blancs
Une autre habitante du bidonville signale qu'aucun Noir est admis ici : « Tous les malheurs qui
arrivent dans le pays sont la faute des Noirs, annonce-t-elle d'un ton sec. Tous les Blancs sont
chassés, Nous sommes victimes d'une ségrégation sauvage. ». Ces remarques sans aucun doute
extrêmement racistes ont été transmises à Seepe Sipho, président du South African Institute For
Race Relation (SAIRR) qui analyse que les relations raciales n'ont jamais été aussi mauvaises (en
2009) depuis la fin de l'apartheid.
Nelson Mandela a souhaité rendre possible le rêve d'une « nation arc-en-ciel », mais dans la
réalité, rien ne changeait : les Blancs restaient riches et les Noirs restaient pauvres selon S. Sipho.
Puis, le président Thabo Mbeki a annoncé que la réconciliation ne pouvait avoir lieu qu'en
améliorant la condition des Noirs. Mais il a mis en place une politique en leur faveur, abaissant
alors celle des Blancs et entraînant un renversement de situation. L'actuel président Jacob Zuma a le
mérite d'avoir un regard très ouvert : on peut espèrer que la condition des Noirs sera alors la même
que celle des Blancs.

Madam et Eve est une bande-dessinée quotidienne d'Afrique du Sud réalisée


par Stephen Francis et Rico Schacherl. On peut voir écrit : «Look, Everyone,
it's the Rainbow Nation!» («Regardez, tous, c'est la Nation-Arc-en-ciel!»)
Cependant, depuis le début du XXIe siècle, près d'un million de Blancs aurait émigré à
l'étranger. En effet, ceux-ci ont de plus en plus de mal à trouver sa place et s'intégrer dans la socité
sud-africaine : la solution la plus simple est quitter le pays. Ces émigrés en moyenne d'entre 25 et
35 ans vont pour la plupart se refaire en Australie ou en Grande-Bretagne.
Sous le gouvernement de Mandela, les Blancs étaient sur un pied d'égalité avec les Noirs.
Lorsque Mbeki est arrivé avec sa politique d'Affirmative Action, ils étaient délaissés. Aujourd'hui,
les Blancs ne cherchent plus à se mélanger avec les « populations historiquement défavorisées »
(favorisées grâce à l'ère Mbeki). Ils ne cherchent pas à cotoyer les Noirs, les Indiens et les
personnes de couleur car ils disent souhaiter préserver leur culture.
La plupart des Blancs ayant ce point de vue vivent dans des quartiers où seuls d'autres Blancs
vivent. Ces districts sont constamment surveillés par des gardes et délimités par de hauts murs avec
des fils barbelés, marquant encore le désir de séparation des Blancs avec les Noirs.

Des barbelés en haut d'un mur sépare un bidonville d'un quartier de


classe moyenne à Soweto

Selon les Blancs, des progrès ont été réalisés depuis la fin de l'apartheid, mais ceux-ci ont
abaissé leur condtion parmi la société sud-africaine. Discrimination, pauvreté, violence : tous ces
facteurs les ont exclu de la société, les obligeant à se retirer dans des lieux qui leur sont réservés ou
à l'étranger, où ils ne seront pas malmenés et traités de racistes alors qu'ils ne le sont pas (selon
eux). Il reste donc beaucoup de chemin à parcourir pour que tous les différents groupes sociaux
aient les mêmes droits et les mêmes devoirs : les mêmes conditions de vie.

2) La discrimination des Noirs

En revanche, les Noirs sont doublement touchés : par la pauvreté, encore plus forte parmi
eux que parmi les Blancs, et par la discrimination envers eux. De plus, cette discrimination possède
plusieurs niveaux : les Blancs envers les personnes d'autre couleur ainsi que les personnes de
couleur envers les Blancs et les discriminations entre riches et pauvres. Ces différentes
discriminations entraînent chacune de nombreux actes de violence et autres conflits.
1- Un problème économique

En mai 2001, une analyse budgétaire rapporte que 65% de la population sud-africaine environ
vivait en dessous du seuil de pauvreté. Globalement, les personnes vivant avec moins de 1 dollar
par jour ont doublé depuis 1994 et le changement de régime politique. Donc, les Noirs sont toujours
proportionnellement plus pauvres que les Blancs.
Ainsi, les Blancs ont tendance à généraliser les Noirs par des « pauvres sans compétence
particulière » qui sont favorisés dans le travail (selon l'ouvrier de Sonkinhoekie) alors que eux ont
des compétences. Par exemple, la plupart des habitants de Johannesburg pensent de cette manière.
Ils vivent dans la plus grande ville commerciale d'Afrique du Sud : ils passent toujours devant des
parcs, des centres commericaux, des buildings et des hôtels de luxe et vivent dans des maisons
spacieuses. Ne rencontrant que très peu de Noirs, il prennent conscience de la misère de ces derniers
seulement lorsqu'ils sortent de la ville et traversent de nombreux bidonvilles. Leur conception de la
condition des Noirs ne se délimitent qu'à leur perception.
Les Noirs ont bien sûr eux aussi tendance à généraliser les Blancs, en moyenne moins pauvres
qu'eux, par des personnes vivant dans des quartiers huppés et méprisant les Noirs, voire étant
racistes ou même regrettant les lois ségrégationnistes de l'apartheid. Si l'on reprend l'exemple des
bidonvilles, on s'aperçoit que les Blancs pauvres ne laissent pas entrer les Noirs à l'intérieur des
leurs. Ceux-ci sont alors comme les Blancs : ils ne voient que des Noirs dans les bidonvilles et
majoritairement des Blancs dans les quartiers luxueux des grandes villes, laissant place à la
généralisation.

Des bidonvilles à perte de vue (Soweto)

Beaucoup de Noirs sud-africains pauvres pensent alors que seuls eux sont pauvres et que seuls
les Blancs ont un accès libre à la belle et luxueuse vie. De plus, ces derniers les méprisent, donc
pourquoi se montrer en harmonie avec eux ? Ce cercle vicieux engendre donc la discrimination.
Pour montrer son mécontentement et traiter différemment les Blancs, les Noirs ont alors souvent
recours à la violence. Par ailleurs, l'Afrique du Sud possède un des taux de criminalité les plus
élevés au monde : par exemple le Ministère de la Police d'Afrique du Sud a estimé à 18 148 le
nombre de meurtres entre mars 2008 et mars 2009, soit près de 50 meurtres par jour. Mais ce
nombre élevé de meurtres ne provient pas que de la discrimination raciale.
En effet, la violence envers les étrangers a considérablement augmenté depuis le début du siècle.
La xénophobie meurtrière s'étend sur toute l'Afrique du Sud en faisant de nombreux ravages. Les
discriminations ne sont plus seulement envers les personnes aux différentes couleurs de peaux mais
aussi aux étrangers. La raison de cette recrudescence de meutres xénophobes est principalement liée
au fait que les immigrants prennent l'emploi des locaux et soient impliqués dans la criminalité déjà
élevée du pays.

En mai 2008, une grande vague de violence provoquant de nombreux meurtres qui débutent
dans la banlieue de Johannesburg avant de s'étendre sur toute l'Afrique du Sud. Par exemple, à Du
Noon, un township près du Cap, les habitants assez pauvres avaient décider de parler de la
xénophobie pour tenter d'enrayer la progression de la violence. La discussion plutôt animée se serait
envenimée avant de tourner court. Quelques heures après, des groupes d'hommes se sont dirigés
vers les maisons et les commerces des étrangers avant de les piller et les détruire par le feu et à
l'aide de machettes et d'armes à feu. Le soir de la réunion, on comptait un bilan de quarante-deux
morts.

Un bidonville près du Cap

Avec quelque 25 000 personnes sans-abri, la crise est aussi humanitaire : la destruction de
bâtiments augmente le nombre de commerces, donc d'emplois et donc de sans-abris. La plupart des
étrangers en question sont Zimbabwéens, qui fuient la crise économique et politique de leur pays.
Le gouvernement du Zimbabwe offre donc la mise en place de moyens à dispositions des citoyens
afin d'être rapatriés, tout comme celui du Mozambique. Les violences sont alors atténuées et le
nombre de sans-abris reste stable. Pourtant, les violences recommencent périodiquement du fait de
l'arrivée de nouveaux immigrants ayant quitté leur pays d'origine à cause d'un événement néfaste.
Ces gouvernements ont dit au moment de cette vague de violence être choqués par le manque de
vigueur du gouvernement sud-africain. Celui-ci a depuis finalement reconnu la réponse des
autorités insuffisante face à ces actes.

La population noire d'Afrique du Sud a bien sûr évolué et monté dans l'échelle sociale. Si
beaucoup d'entre eux ont perdu leur emploi, cela veut aussi dire que d'autres en ont obtenu depuis le
changement de régime. En effet, une classe moyenne noire émerge petit à petit dans la société sud-
africaine. Cette classe est alors baptisée « black bourgeoisie ». On parle aussi de « blackoisie », de
« buppies » (des black yuppies) ou encore de « Black Diamonds » (les Diamants Noirs). Quasiment
inexistante sous l'ancien régime, la black bourgeoisie se développe rapidement. Entre 1998 et 2004,
la progression de la classe est spectaculaire : le nombre de familles noires vivant avec un salaire
mensuel supérieur à 2300 dollars a augmenté de 368% !

Le centre-commercial Sandton accueille toute la


bourgeoisie (noire comme blanche) de Johannesburg

Parmi cette classe moyenne noire, les valeurs changent. Simphile, un cadre de 33 ans dans un
centre de formation à l'audiovisuel nous explique : « Gagner plus d'argent. Tout ce que je fais doit
me rapporter plus. Je joue au golf, je trouve ça ennuyeux, on marche pendant des heures, mais je
dois le faire : c'est comme ça qu'on rencontre des gens, qu'on fait du business. » D'ailleurs, il
n'hésite pas à énoncer, à transmettre ses valeurs à son fils de 8 ans : « Être fier d'être un Zoulou, et
plus tard, gagner le plus d'argent possible. » Puis, après il rappelle qu'il ne fait pas partie d'une
génération matérialiste, mais qu'il participe seulement au développement du pays. Enfin, il
s'exprime sur son désir d'égalité avec les Blancs : « Par notre réussite, nous montrons que nous, les
Noirs, nous pouvons faire aussi bien que les Blancs, que nous n'avons pas besoin d'eux pour faire
prospérer l'Afrique du Sud. » Il affirme son désir d'être traité comme une personne blanche qui a
exactement les mêmes capacités qu'une personne noire, et pas plus.
La femme de Simphile, Sibongile, a bénéficié de l'Affirmative Action de l'ère Mbeki lorsqu'elle
a postulé pour un nouvel emploi. En période d'apartheid, elle aurait été dans la catégorie la plus
défavorisée : celle des femmes noires. A l'aide de la politique de Mbeki, elle a pu trouver plus
facilement du travail; mais contrairement aux Blancs, elle ne se dit pas être avantagée vis-à-vis de
ces derniers : « Je ne me sens pas avantagée, c'est normal. Je mérite ce que j'ai. C'est vrai que des
portes s'ouvrent pour nous, mais encore faut-il les pousser. », déclare-t-elle.
En revanche, Jabu, un cadre de 50 ans, porte un regard plus critique : «L'Affirmative Action
n'est pas une politique efficace. On ne fait que remplacer des employés par d'autres sur des critères
de race ou de sexe. Il n'y a pas de création d'emploi. » Sur ce point, il partage les mêmes opinions
que les Blancs à propos de leur condition parmi la société sud-africaine. En revanche, il s'oppose à
l'arrivée de la black bourgeoisie dont il dénonce différents traits : « Les enfants s'amusent avec des
téléphones portables dernier cri, les parents roulent dans des voitures de prestige, c'est une
génération de m'as-tu-vu»
La Sun Tower (en blanc) et le Michelangelo Hotel (la tour la plus haute) dans le quartier
de Sandton à Johannesburg

En effet, Jabu n'a pas totalement tort, car plus de la moitié de ces Black Diamonds est
actuellement surrendettée et n'a pas planifié leur retraite selon une étude publiée par l'institut de
recherche d'Unilever. La directrice financière d'une université privée renforce la théorie d'une
génération de m'as-tu-vu dont parle Jabu : « Le paraître dans notre société est très important.
Quand nous rencontrons des Blancs, l'apparence est un signe d'appartenance sociale. Il faut leur
ressembler pour être accepté. »
Malgré les quelques deux millions de Sud-Africains qui appartiennent à cette black bourgeoisie,
son émergence cache de grandes disparités. A peine 3% des capitaux listés à la bourse de
Johannesburg sont détenus par des Noirs qui n'occupent par ailleurs que 10% des postes de
direction, contre 81,5% de Blancs.

L'endettement d'une grande partie de la black bourgeoisie a bien sûr entraîné de nombreuses
complications. Progressivement, d'anciens Black Diamonds arrivent dans des quartiers pauvres.
Comme l'ascension sociale ne se fait que très lentement, très rapidement, les quartiers pauvres
deviennent bondés, laissant beaucoup de personnes dans les bidonvilles qui s'agrandissent.
L'arrivée de ces anciens riches provoque l'excitation du quartier où ils emménagent. Les
discriminations commencent puisque ils ont encore leurs habitudes ne connaissant pas la vie plus
rude du quartier où ils se trouvent. Les pauvres ont alors tendances à les insulter de « frères de
Blancs », ce qui sous-entend frères de racistes. L'insulte est très forte et la criminalité entre en
scène. On constate que beaucoup de Black Diamonds se sont fait agressé (rackets, vols, etc.)
seulement après être arrivés dans le quartier pauvre. Les quartiers riches étant plus surveillés à l'aide
de caméras de surveillance d'entreprises ou de particuliers, les vols sont moins aisés. Mais l'arrivée
de riches dans un quartier pauvre est alors d'une facilité époustouflante : ils sont une cible attrayante
du fait des produits avec lesquels ils circulent et si quelqu'un d'autre voit la scène, il ne bougera pas
puisqu'il les méprise. Cette discrimination est selon les riches provoquée par une jalousie des plus
pauvres.
2- Un problème territorial

Les différents sortes de discrimination sont encore actives à tous les niveaux qu'il y avait déjà
au temps de l'apartheid, que ce soit des Blancs envers les Noirs et vice-versa ou des pauvres envers
les riches comme le contraire. En revanche, certaines personnes de ces groupes sociaux ont vu leur
situation changer. Mais certains n'ont été touchés ni par la misère ni par la discrimination d'ordre
raciale ou économique. Pourtant, ils ont aussi eu des différents raciaux. De nombreux autres cas
peuvent aussi participer à la séparation sociale qui persiste depuis la fin de l'apartheid.

La source principale de ces conflits est la possession de terres. En Afrique du Sud, entre les
fermiers blancs qui possèdent des titres de propriété et les familles noires qui vivent là depuis des
générations, l'affrontement est de plus en plus violent. A la fin de l'apartheid, 80% des terres
appartenaient à des Blancs. Pourtant, les Noirs y étaient installés depuis plusieurs générations avant
eux : il est donc évident qu'ils revendiquent ces terres. Or, la plupart du temps, les fermiers blancs
refusent que ces derniers cultivent leurs terres, ce qui est compréhensible, désormais, elles lui
appartiennent même si elles ne lui reviennent pas de droit. Le gouvernement post-apartheid a donc
décider que d'ici 2015, 30% des terres soient redistribuées à des Noirs, soit par la restitution de
terres confisquées en vertu des lois raciales, soit par leur rachat à des Blancs désireux de les vendre.

Sibahle Gumede, porte-parole des villageois, s'oppose aux fermiers


blancs dans le village eSibhonsweni, dans le Kwazulu natal (côte
Nord-Est d'Afrique du Sud)

Malheureusement, bon nombre de ces fermiers blancs ne souhaitent pas perdre leurs terres. Prenons
l'exemple de Ken Eva, un propriétaire blanc qui accusait les habitants de la commune d'occuper des
terres qui ne leur appartenaient pas. En effet, actuellement, ces terres ont pour propriétaires les
Blancs, mais les Noirs de la commune où sont situées ces terres ont des droits sur celles-ci
puisqu'ils y vivent. Après une première menace, il y eût une vague de protestations de la part des
villageois. Ken Eva souhaitait qu'ils paient des droits élevés pour continuer à cultiver sur ces terres,
que leurs familles utilisaient depuis des générations et dans lesquelles certains de leurs ancêtres
étaient enterrés. Quelques années avant, Ken Eva avait détruit une trentaine de maisons qui «
empiétaient sur l'exploitation », alors que beaucoup d'entre elles d'avant l'apartheid.
« Si vous ne payez pas, je me verrai obligé de détruire ces récoltes », a lancé Eva à la foule. Les
villageois ont vu dans cet ultimatum une tentative de les chasser de chez eux. En regagnant sa
voiture, des hommes en colère l'ont encerclé. Le propriétaire tira un coup de fusil en l'air : quelques
minutes plus tard, il mourrait sous une avalanche de coups. Le révérend du village, qui observait la
scène, explique qu'il « s'est exprimé d'une manière provocatrice. Ils n'auraient pas dû le tuer, mais
je ne suis pas surpris qu'ils l'aient fait. »

Mais les résultats du gouvernement face à ces restitutions de terres n'avancent pas assez vite.
Sur les 30% à atteindre d'ici 2015, en dix ans, seulement 4% ont été restitués à des Noirs. Ce rythme
très lent à subi une accélération à partir de 2005 : le gouvernement commenca à faire pression sur la
réforme agraire, débutée en 1994, en éxécutant la première expropriation d'un fermier blanc en
novembre 2005. Cet éleveur de bétail a reçu un avis qui lui laisse trois semaines pour partir. Seul le
prix d'achat des terres est négociable. Les résultats peu probants rendent le gouvernement perplexe
face à la méthode d'expropriation. Le plus souvent, les Noirs qui récupèrent les terres ont moins
d'expérience que les Blancs qui les cultivaient avant et ont du mal à les mettre en valeur. De plus,
l'expropriation massive inquiète le gouvernement : au Zimbabwe, 4 500 agriculteurs blancs ont été
expropriés le plus souvent sans compensation et parfois dans la violence. En quelques années,
l'économie de ce pays s'est effondrée avec son autosuffisance et ses exportations agricoles
(provocant ainsi l'immigration de milliers de Zimbabwéens en Afrique du Sud).

Beaucoup de Sud-Africains noirs qui ont récupéré leurs terres n'ont pas
assez de savoir et d'expérience pour les cultiver convenablement

En changeant de ton, le gouvernement sud-africain incite les fermiers blancs à faire des
concessions et leur donne la chance de vendre leurs terres à des prix qui leurs conviennent.
Soucieux de ne pas effrayer les investisseurs et le monde des affaires, il montre qu'il ne veut pas une
révolution mais une redistribution juste et équitable des richesses du pays.

3) Le tourisme

Mais de nombreux domaines se sont améliorés depuis la fin de l'apartheid. Le changement le


plus flagrant est celui du tourisme. Plusieurs musées ont ouvert dans l'Afrique du Sud entière pour
montrer la réalité de l'apartheid à tous : aux touristes, comme aux enfants sud-africains qui ne l'ont
pas connu.
Par exemple, un musée pour que les enfants nés libres découvrent le régime raciste subi par
leurs parents a ouvert en novembre 2001 entre Johannesburg et Soweto : Hector Pieterson Memorial
and Apartheid Museum. On peut y voir de véritables « pass » qui assignaient un lieu de résidence à
l'individu selon sa race. Puis tout le musée présente l'histoire de l'apartheid en Afrique du Sud, en
partant de la seconde guerre mondiale, jusqu'aux premières élections libres de 1994. Mais le
directeur du musée nous rappelle que « le crime contre l'humanité qui a ainsi été racheté ne peut pas
être compris dans un musée, aussi réussit soit-il. » Le musée a en effet attiré en deux à peine plus de
70 000 visiteurs, chiffre qui est en constante augmentation.

On peut voir écrit : «The honour the youth who gave their lives in the
struggle for freedom and democracy»

Ces visiteurs viennent de plus en plus loin pour admirer le musée. Ceci n'est pas surprenant
puisque beaucoup de touristes européens ont l'envie grandissante de venir observer les hauts lieux
de l'apartheid. En 1976, les émeutes de Soweto ont été un choc pour le monde entier. Aujourd'hui,
les touristes viennent du monde entier pour admirer ce township toujours aussi délabré. Ils arrivent
dans des cars ou des mini-bus, et dès leur descente, ils sont abordés par un ou plusieurs « guides ».
Ces derniers sont en réalité des habitants de la cité qui débutent leur présentation du bidonville de
cette manière là, par exemple : « Bienvenue, mesdames et messieurs. Approchez. Venez voir
comment nous survivons dans le ghetto ! » Puis la visite commence. Les touristes peuvent même
entrer dans les maisons des habitants qui les laissent ouvertes. Le guide affirme que les habitants
sont convaincus qu'il fallait ouvrir les maisons du quartier, laisser entrer les touristes pour leur
montre comment ils vivent. Et avec l'argent qu'ils gagnent, ils peuvent aider toute la communauté,
comme par exemple en envoyant les enfants à l'école plus facilement.
Un township de Soweto

En revanche, la situation à Soweto n'a pas changé. Plus de 50% de ses habitants sont touchés
par le chômage et la ville n'est toujours qu'un immense dortoir, même si quelques quartiers sont plus
riches que d'autres. Mais le tourisme pourrait bien transformé la cité : y réduire les disparités encore
nombreuses et apporter plus d'aides publiques qui permettrait à la communauté d'être plus
performante (il faut savoir que Soweto abrite 43% de la population de Johannesburg, mais ne
contribue qu'à 4% dans son économie). Il se pourrait donc bien que les disparités s'atténue jusqu'à
disparaître totalement dans les townships et les bidonvilles de toute l'Afrique du Sud.

4) Une nation arc-en-ciel

Bien que le terme de «nation arc-en-ciel» employé par Desmond Tutu soit poétique, il révèle
une toute autre face. En effet, l'Afrique du Sud possède une très grande variété de couleur sur la
peau de ses habitants. Mais, cet aspect poétique de l'arc-en-ciel montre dans ce pays des clivages
très importants entre ces différentes couleurs. Ces derniers sont principalement dû au passé trop
lourd qui pèse sur la nation, qui subit encore une stigmatisation de l'époque de l'apartheid et des lois
raciales ségrégationnistes.
Bien sûr, de l'espoir retentit dans l'Afrique du Sud toute entière. Un désir profond de
réconciliation se fait apercevoir au sein de la société sud-africaine. D'ailleurs, l'une des
manifestations de ce désir semble regrouper de plus en plus de Sud-Africains : la musique.
Effectivement, tout au long de l'année se déroulent des festivals de musique, en particulier de
chorale. Dans beaucoup de villes on retrouve plusieurs chorales qui chantent pour le changement et
la paix. Puis tous ces choeurs se regroupent devant des spectateurs qui chantent avec eux. L'unité de
la société et le désir d'amitié entre les personnes de différentes couleurs et de différents milieux
sollicités durant ces festivals montrent la solidarité qui règne dans le coeur des Sud-Africains : on
peut sentir leur souhait de reconstruction sociale.

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