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Présenté à
Par
Guillaume LAGACÉ
Sous la direction de
Département d’Histoire
Université Laval
6 décembre 2007
2
Introduction
2
Rex Sean O’Fahey, «Islamic hegemonies in the Sudan», Louis Brenner, dir, Muslim identity and
social change in Sub-Saharan Africa, Bloomington, Indiana University Press, 1993, p. 33.
4
3
Kepel, op. cit., 2003, p. 281.
4
John L. Esposito et John O. Voll, Makers of contemporary Islam, New York, Oxford University
Press, 2001, p. 122.
5
5
Nicole Grandin, «Traditions religieuses et politiques au Soudan contemporain», Marc Lavergne, dir,
Le Soudan contemporain : de l'invasion turco-égyptienne à la rébellion africaine (1821-1989), Paris,
Karthala, 1989, p. 227.
6
Kepel, op. cit., 2003, p. 280.
7
Didar Fawzy, «Le Parti communiste soudanais», Marc Lavergne, dir, Le Soudan contemporain : de
l'invasion turco-égyptienne à la rébellion africaine (1821-1989), Paris, Karthala, 1989, p. 320.
8
Gabriel R. Warburg, Islam, sectarianism, and politics in Sudan since the Mahdiyya, Madison,
University of Wisconsin Press, 2003, p. 178.
9
Esposito et Voll, op. cit., p. 123.
6
10
Gérard Prunier, «Les Frères musulmans au Soudan : un islam tacticien», Marc Lavergne, dir, Le
Soudan contemporain : de l'invasion turco-égyptienne à la rébellion africaine (1821-1989), Paris,
Karthala, 1989, p. 362.
11
Marc-Antoine Pérouse de Montclos, «Le Soudan : Une guerre de religions en trompe-l’œil», Centre
d'étude d'Afrique noire, dir, L'Afrique politique 2002 : Islams d'Afrique : entre le local et le global,
Paris, Karthala, 2003, p. 36.
12
Prunier, op. cit., 1989, p. 362.
13
Gérard Prunier, «Le mouvement des Ansars au Soudan», Ousmane Kane et Jean-Louis Triaud,
dir, Islam et islamismes au sud du Sahara. Paris, Karthala, 1998a, p. 50.
14
Gabriel Warburg, «The muslim Brotherhood in Sudan: From reforms to radicalism», Islam in Africa
research project, août 2006, article tiré du site:
http://www.e-prism.org/images/Muslim_BROTHERS.PRISM.pdf, p. 2.
15
Ibid.
16
Prunier, op. cit., 1998a, p. 50.
7
que les élections universitaires sont en quelque sorte une «rampe de lancement»
pour exercer une action politique plus large.
envers l’Assemblé constituante et ses représentants est totale25. La période qui suit
est marquée par la marginalisation des Frères musulmans. Le mouvement traverse
sa période la plus ardue alors que son organisation est dissoute et que son ennemi
juré, le PCS, reprend les devants de la scène politique grâce à une alliance avec
Nimeyri.
25
Muddathir Abd Al-Rahim, «Le Soudan indépendant : gouvernements militaires et coups d’État civils
(1956-1985)», Marc Lavergne, dir, Le Soudan contemporain : de l'invasion turco-égyptienne à la
rébellion africaine (1821-1989), Paris, Karthala, 1989, p. 277.
26
Prunier, op. cit., 1989, p. 363.
27
Ibid.
28
Warburg, op. cit., 2003, p. 183.
29
Grandin, op. cit., 1989, p. 269.
30
Prunier, op. cit., 1998a, p. 50.
9
fera pas obstacle en incarcérant Sadiq al-Mahdi pendant cinq ans. Craignant une
sévère répression de la part du nouveau régime, une grande partie du mouvement
Ansar trouve refuge sur l’île d’Aba, notamment l’imam al-Hadi, principal rival de
Sadiq al-Mahdi31. Afin d’exclure de façon permanente de la vie politique les partis
traditionnels, Nimeyri décide de travailler en coopération avec des civils qui sont en
faveur d’un «socialisme soudanais» conforme à l’esprit de la «révolution d’octobre
1964»32. En 1970, alors que les partis confrériques et les Frères musulmans sont
désormais des personae non gratae dans la sphère politique au Soudan, les
membres les plus influents de ces partis en exil sur l’île d’Aba, en Égypte ou ailleurs
se regroupent à Londres pour former le Front National (FN) visant à renverser le
régime militaire de Nimeyri. Ce «parti» d’opposition a pour secrétaire général
Uthman Khalid, représentant des Frères musulmans33.
Parallèlement à ces événements, l’incarcération d’al-Turabi n’empêche pas
celui-ci d’être pro-actif en rédigeant un livret sur «la position de la femme dans
l’islam». Bien que cette prise de position lui vaille des protestations dans les milieux
plus traditionnels, elle lui permet de recruter bon nombre d’étudiantes qui se
détournent à ce moment-là des partis laïcs de gauche qui sont les seuls à tenir
compte des aspirations des femmes dans la société34. De plus, malgré la dissolution
du FCI après le coup d’État de 1969, le prosélytisme des Frères musulmans dans le
milieu universitaire continue de porter ses fruits. Même si l’influence du milieu
estudiantin est disputée par des mouvements attachés au régime «socialiste» de
Nimeyri, les élections universitaires de 1969 consacrent la «mainmise islamique»
sur la Khartoum University Student Union (KUSU)35.
Les Frères musulmans doublent leurs efforts pour rester sur la scène
politique alors que les appuis de Nimeyri fondent rapidement. En effet, le nouveau
président procède rapidement à des réformes administratives et à des
nationalisations radicales d’une façon désorganisée semant le mécontentement
chez ses alliés. Les critiques du Parti communiste soudanais envers le régime ne
font qu’alimenter la méfiance et l’hostilité de Nimeyri face aux communistes. Cette
méfiance est avérée en juillet 1971 lorsque les communistes s’emparent du pouvoir
suite à un coup d’État mené par le major Hashim al- cAta. Trois jours plus tard,
Nimeyri met un terme au régime communiste36. La réponse du président Nimeyri à
cette trahison est rapide et il s’assure de «décapiter» le PCS en faisant exécuter
quatorze communistes importants au sein du parti et en procédant à une purge
massive de ses membres.
Le démantèlement du PCS après cette tentative de renversement presque
réussie marque un tournant pour les Frères musulmans qui ont le champ libre pour
exercer leur influence sur le monde des élites du savoir. Un rapprochement entre
Nimeyri et al-Turabi a lieu peu après ce coup d’état et fragilise le pouvoir en place.
al-Turabi demande la reprise des activités des Frères musulmans qui est en quelque
sorte autorisée avec la permission de créer en 1972 une nouvelle organisation
31
Prunier, op. cit., 1998a, p. 52.
32
Al-Rahim, op. cit., 1989, p.278.
33
Warburg, op. cit., 2006, p. 2.
34
Kepel, op. cit., 2003, p. 282.
35
Prunier, op. cit., 1989, p. 363.
36
Ibid.
10
le Front national, mais à certaines conditions. Entre autres, les partis de l’Umma et
du PUD réclament l’élection de leurs responsables à tous les échelons du
gouvernement et en contrepartie, ils acceptent de joindre la formule du parti
unique de l’Union socialiste soudanaise (SSU)43.
Il est important de mentionner qu’en montrant un si grand intérêt sur le plan
politique, les Frères musulmans ne tardent pas à éveiller la méfiance du président
devant ces partisans trop intéressés. Cependant, devant son manque d’appui
politique et son hésitation à s’adjoindre les partis traditionnels qu’il considère comme
sectaire, il décide de ne pas s’aliéner le FNI, mais plutôt de les contenir d’une
certaine façon.
43
Hayder Ibrahim Ali, «Le Front national islamique», Politique africaine, 66 (juin 1997), p. 17.
44
Kepel, op. cit., 2003, p. 285.
45
Kepel, op. cit., 2003, p. 282.
12
46
Prunier, op. cit., 1989, p. 365.
47
Ibid.
48
Le Waqf est un «bien de mainmorte qui, en milieu musulman, a été déclaré inaliénable par son
propriétaire et dont les revenus sont affectés à un usage précis, déterminé par le donateur de
manière que sa fondation soit agréable à Dieu» (Janine Sourdel et Dominique Sourdel, Dictionnaire
historique de l'islam, Paris, Presses universitaires de France, 2004, p. 849.)
49
Kepel, op. cit., 2003, p. 283.
50
Ibid.
51
Kepel, op. cit., 2003, p. 284.
52
Warburg, op. cit., 2006, p. 4.
53
Prunier, op. cit., 1989, p. 366.
13
du mouvement qui visent avant tout le prêche auprès de la population et non une
conquête des plus hautes fonctions de l’État par une élite54.
Ce retour sur la scène politique du pays est marqué par un contrôle étatique
des Frères musulmans. Le leader de l’organisation a fait preuve d’un grand
pragmatisme pour se hisser au pouvoir à partir de la «Réconciliation nationale».
Toutefois, la preuve ultime réside dans les mesures adoptées en 1983 qui donnent
l’occasion à al-Turabi et à ses proches d’être à deux doigts de réaliser la mise en
œuvre de leur objectif principal : la mise en œuvre d’une islamisation de l’état
soudanais.
54
Kepel, op. cit., 2003, p. 283.
55
Hayder Ibrahim Ali, op. cit.,1997, p. 17.
56
Warburg, op. cit., 2003, p. 156.
57
Esposito et Voll, op. cit., 2001, p. 132.
58
Kepel, op. cit., 2003, p. 286.
59
Ibid.
60
Rex Sean O’Fahey, «Islam and ethnicity in the Sudan», Journal of Religion in Africa, 26 (Aug.,
1996), p. 263.
14
1985, le coup final envers le pouvoir est porté par la mise en place d’un comité de
grève insurrectionnel qui fait pression sur l’état-major qui s’inquiète de voir les rues
envahies par un mouvement d’émeutes populaires.
L’année 1985 marque la fin d’une étape pour les Frères musulmans qui
deviennent rapidement impopulaires auprès de la population. Cependant,
l’incarcération de la majorité des membres et de son leader juste avant la chute du
régime ainsi que les critiques visant l’instrumentalisation des lois islamiques par le
président à des fins personnelles, redonne une certaine «virginité politique» à
l’organisation islamiste des Frères musulmans qui aura tôt fait de retomber sur ses
pieds après cette première tentative manquée d’islamiser la société soudanaise.
16
Conclusion
Turabi et ses collègues ne cessent de multiplier les attaques et les critiques envers
le système démocratique qui ne peut pas «répondre aux aspirations religieuses du
peuple70» et qui est incapable de résoudre les problèmes du pays. Les nouvelles
stratégies d’al-Turabi visent toujours à accéder au pouvoir à n’importe quel prix pour
mettre en œuvre son projet d’islamisation de la société soudanaise. Cette
«jurisprudence de la nécessité71» explique comment les islamistes en viennent à
s’associer au coup d’État d’Omar al-Bachir en juin 1989. À la suite de ce coup
d’État, un régime d’une violence inconnue se met en place. De terribles répressions
ont lieu sur des civils et des militaires qui n’ont pas adopté la vision islamiste du
pouvoir en place. La brutalité «révolutionnaire» du régime permet au FNI d’asseoir
sa domination en infiltrant toutes les fonctions de l’État tout en essayant de miner le
pouvoir des partis politiques liés aux confréries72. L’attitude très pragmatique du
charismatique leader des Frères musulmans fait en sorte que les moyens utilisés
pour se hisser au pouvoir importent peu. Pour cet homme, seuls les résultats
comptent. Bref, les années 1964 à 1985 représentent la première phase de la partie
politique que jouent les Frères musulmans. La deuxième phase commence à partir
de 1985 et se concrétise en 1989. C’est après le coup d’État d’Omar al-Bachir qu’a
lieu la consécration du travail acharné d’Hassan al-Turabi et des Frères musulmans.
Sa vision et son pragmatisme politique lui permettent de conquérir l’État
conjointement avec le général Omar al-Bachir et de s’y maintenir pendant une
décennie.
70
Ali, op. cit., 1997, p. 18.
71
Peut se traduire par un pragmatisme de la mouvance islamiste soudanaise qui pousse ses
membres à occuper toute position de pouvoir accessible par tous les moyens possibles. (Kepel, op.
cit., 2003, p. 283.)
72
Ibid., p. 288.
18
Bibliographie
Ouvrages généraux
WARBURG, Gabriel. Islam, sectarianism, and politics in Sudan since the Mahdiyya.
Madison, University of Wisconsin Press, 2003.
Articles et collectifs
O’FAHEY, Rex Sean. «Islamic hegemonies in the Sudan», Louis BRENNER, dir.
Muslim identity and social change in Sub-Saharan Africa. Bloomington, Indiana
University Press, 1993. p. 21-35.
WARBURG, Gabriel. «Islam and State in Numayri’s Sudan», Africa: Journal of the
International African Institute, Vol. 55, No. 4, (1985), p. 400-413.
Site Internet