Professional Documents
Culture Documents
I. INTRODUCTION
Commencez par relire attentivement les pages 120 à 128 du syllabus. Ce module commence par
quelques illustrations et commentaires de clauses, panneaux ou avertissements divers. Notez que
certaines remarques sont valables pour plusieurs clauses, même si elles n’apparaissent qu’une seule
fois. Exercez-vous à identifier les autres panneaux ou clauses pour lesquels la remarque vous semble
également valable. Pour vous aider à faire des liens au sein de la matière, des références à d’autres
pages du syllabus sont parfois indiquées entre parenthèses. Vous êtes également invités à lire deux
décisions de jurisprudence qui illustrent la manière dont ces clauses peuvent être appréciées par le
juge. Enfin, il sera temps d'évaluer vos connaissances en la matière, en répondant seul à des
questions théoriques et pratiques.
Bon travail !
Plus explicite que les panneaux précédents quant à l’objectif d’exonération de responsabilité.
Un tel panneau peut poursuivre plusieurs objectifs : éviter que les visiteurs ne soient victimes du
chien de garde, dissuader les intrus, mais aussi permettre d’invoquer une faute de la victime si jamais
elle est entrée au mépris de l’avertissement. Sur la base de l’article 1385 du Code civil, le gardien du
chien sera responsable en cas de dommages causés à un tiers (cf. syllabus p. 213 et s.). Il ne s’agit en
effet pas d’un régime de responsabilité à base de faute prouvée. Il ne pourra donc pas s’exonérer en
prouvant qu’il avait pris toutes les précautions pour éviter les accidents, en apposant ce panneau.
Cependant, il pourra invoquer la faute de la victime comme cause étrangère exonératoire.
Comme dans l’exemple précédent, un tel avertissement ne suffit pas à lui seul. D’autres précautions
sont à prendre, sous peine de négligence. Ici, il ne suffit pas que la compagnie d’électricité mette un
tel panneau sur une cabine à haute tension pour s’exonérer de toute responsabilité, encore faut-il, par
exemple, que la cabine soit verrouillée de telle sorte qu’elle ne soit pas accessible au public.
La validité d’un tel panneau est plus que
discutable. Le propriétaire qui l’a apposé ne
pourrait l’invoquer comme clause d’exonération
susceptible de justifier n’importer quel
comportement dommageable à l’égard des
intrus. En tout état de cause, le propriétaire doit
se comporter en homme normalement prudent et
diligent. Il ne peut parsemer sa propriété de
« pièges à voleurs » ni tirer à vue sur le premier
intrus qui franchit sa clôture (cf. syllabus p. 145
et s.), la différence entre légitime défense et
auto-défense).
Ces signes sont fréquemment apposés sur des produits dangereux. L’objectif premier est la sécurité
et la protection des personnes. L’apposition de tels signes devrait permettre au producteur
d’invoquer plus facilement la faute de la victime comme cause exclusive de son propre dommage et
ainsi de ne pas voir sa responsabilité engagée. Par exemple, si une personne projette du déodorant en
bombe sur un briquet par jeu, pour obtenir un jet de flamme spectaculaire, et se blesse, le fait pour le
producteur d’avoir apposé le signe F ou F+ lui permettra d’invoquer que seul le comportement de la
victime est fautif. Par contre, si le dommage est dû à un défaut du produit, les sigles ci-dessus ne
pourront exonérer le producteur de sa responsabilité (cf. syllabus p. 221 et s.).
Les deux décisions suivantes illustrent les réactions de la jurisprudence par rapport à l’apposition de
panneaux d’avertissement. Par exemple, dans son arrêt du 21 novembre 2003, la Cour de cassation
estime qu’un panneau de signalisation indiquant la présence d’ornières sur une route ne permet pas
d’écarter le vice de la chaussée. Il peut simplement indiquer qu’il y a faute de la victime. Il n’y a
donc pas d’exonération de responsabilité possible dans ce cas.
Parfois, le fait de ne pas apposer un panneau d’avertissement est constitutif d’une faute susceptible
d’engager la responsabilité. Ainsi, dans un arrêt du 26 janvier 1984, la Cour d’appel de Mons a
estimé qu’il était fautif pour la commune de ne pas avoir apposé sur la chaussée un panneau
temporaire indiquant la présence d’une substance glissante sur la chaussée.
I. La décision attaquée
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 22 mars 2002 par le tribunal de
première instance de Charleroi, statuant en degré d'appel.
Griefs :
Une chose est affectée d'un vice au sens de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil lorsqu'elle
présente une caractéristique anormale la rendant en certaines circonstances susceptible de causer un
préjudice.
Le fait que la victime connaissait ou devait connaître le défaut dont une chose est affectée
n'intervient pas dans l'appréciation de l'existence d'un vice. Cette circonstance n'intervient que dans
l'appréciation d'une éventuelle faute dans le chef de la victime mais la charge de la preuve de cette
faute revient alors au gardien qui l'invoque comme cause étrangère libératoire.
En l'espèce, en considérant que la chaussée ne présentait pas de vice au sens de l'article 1384, alinéa
1er, du Code civil dès lors que " peu avant l'endroit litigieux, un panneau de signalisation indiquait la
présence d'ornières afin d'inciter les usagers à redoubler de prudence " et que " Madame E. D. S.
avait dès lors été avertie d'une manière adéquate et suffisante de l'état dégradé de la chaussée ", le
jugement déduit du fait que la victime connaissait ou devait connaître l'état dégradé de la chaussée
que celle-ci n'est pas affectée d'un vice. Il viole ainsi l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil.
IV. La décision de la Cour
Attendu que la chose est affectée d'un vice lorsqu'elle présente une caractéristique anormale qui la
rend, en certaines circonstances, susceptible de causer un dommage ;
Attendu que le jugement considère que la chaussée ne présentait pas de vice au sens de l'article 1384,
alinéa 1er, du Code civil au motif que " peu avant l'endroit litigieux, un panneau de signalisation
indiquait la présence d'ornières afin d'inciter les usagers à redoubler de prudence " et que " Madame
Dos Santos avait dès lors été avertie d'une manière adéquate et suffisante de l'état dégradé de la
chaussée " ;
Attendu qu'en déduisant l'absence de vice de la chaussée de la circonstance que la victime
connaissait ou devait connaître l'état dégradé de la chaussée, l'arrêt viole l'article 1384, alinéa 1er, du
Code civil ;
Que le moyen est fondé ;
Antécédents:
Attendu que les faits de la cause. firent l'objet d'une information répressive classée sans suite;
-l'accident litigieux est survenu à Hyon le samedi 11 mars 1978, vers 18 heures 15;
-l'automobiliste D. Marc, au volant de sa voiture de marque Opel GT 1900, y circulait rue des
Canadiens à faible allure;
-le véhicule dérapa sur une couche de granulés d'engrais tapissant la chaussée et s'écrasa sur la
façade de l'immeuble de Madame J. Paula;
-D. venait de virer pour aborder la rue des Canadiens lorsque se produisit le dérapage;
-l'état glissant de la route était dû à l'écoulement d'engrais transporté par des camions en provenance
de la S.A. Engrais S.;
-la situation dangereuse existait depuis une huitaine de jours environ et se reproduisit de manière
intermittente;
-la veille des faits, le 10 mars 1978, le service des pompiers de la ville de Mons avait procédé au
nettoyage de la chaussée et de la voirie proche des Ets. S.;
-après l'accident, et sur réquisition de la gendarmerie, des membres de la protection civile
effectuèrent une opération identique; cette prestation dura de 19 heures à 22 heures 45;
-les dégâts occasionnés à l'immeuble de Madame J. étaient couverts par la S.A. Caisse Patronale
laquelle, subrogée dans les droits de son assuré, intenta aux actuels intimés une action en
remboursement de ses décaissements (154.001 F);
-par requête déposée le 27 mai 1980, L. Fabienne intervint volontairement à la cause par
l'intermédiaire de son père, administrateur de ses biens;
-la demanderesse et l'intervenante sollicitaient condamnation solidaire ou chacun pour le tout des
intimés à réparer leurs préjudices respectifs.
Au fond:
Attendu que le jugement entrepris ne retint aucune faute dans le chef des parties intimées,
défenderesses originaires, et débouta les actuelles appelantes de leurs actions;
1. Responsabilité de D. Marc:
Attendu qu'il est reproché à l'intimé de n'avoir pas proportionné sa vitesse à la situation des lieux
alors que habitant la localité « il devait avoir connaissance de l'état anormal prolongé du revêtement
de la chaussée »;
Attendu qu'il résulte du dossier (cfr. notamment les déclarations des époux C.-D.) que, à la sortie
d'un virage, D. perdit le contrôle de sa voiture qui dérapa sur la couche de granulés d'engrais
recouvrant la voirie;
Attendu que l'expert commis par le parquet de Mons estima que l'adhérence des pneus était
pratiquement nulle en raison de l'épaisseur de la couche d'engrais, avec pour conséquence
l'inefficacité totale de tout freinage ou de toute autre manœuvre d'évitement;
Attendu qu'il s'ensuit que la vitesse pratiquée par D. et le grief formulé par les appelants
(connaissance des lieux) sont sans relation causale avec son dérapage et l'accident, la situation
anormale imprévisible de la chaussée ayant surpris son attente légitime d'un état au sol exempt de
danger;
Attendu qu'aucune faute ne peut être reprochée à cet intimé.
Attendu qu'en son exploit introductif d'instance l’appelante Caisse Patronale invoque sommairement
les « décrets révolutionnaires» pour rechercher la responsabilité de l'autorité communale mais reste
en défaut de s'expliquer;
Attendu que si l'obligation des communes de veiller à la sécurité du passage sur les voies publiques
qui traversent leur territoire a pour fondement légal notamment les articles 50 du décret du 14
décembre 1789, 2 du décret du 22 décembre 1789 et 3.10 du titre XI du décret des 16-24 août 1790,
ces dispositions ne s'appliquent qu'à des situations permanentes ou périodiques, périodicité
dépendant de conditions climatiques saisonnières et prévisibles (cfr. Cass. 27.11.1980, Pas., 1981, l,
p.361);
Attendu que tel ne fut pas le cas dans le présent litige;
Attendu que de l'examen des conclusions des parties, il apparaît que la responsabilité de la ville de
Mons est implicitement recherchée sur pied des articles 1382 et suivants du Code civil;
Attendu que les règles de la responsabilité aquilienne sont applicables aux autorités publiques, les
pouvoirs que la loi attribue à l'administration soumettant celle-ci au devoir général de prudence qui
s'impose à tous (cfr. Cass. 7.3.1963, R.C.J.B., 1963, p.93 et note J. Dabin, Cass. 30.3.1978, Pas.,
1978, l, p.820; Cass. 23.2.1979, Pas.,1979, l, p.76 et 27.11.1980 cité; R.O. Dalcq, Chronique de
jurisprudences, R.C.J.B., 1981, p. 87; J.-L. Fagnart,« La responsabilité civile », J. T.,1976, p. 569; P.
Charlier, « La responsabilité des pouvoirs publics en droit belge », J.T.,1980, p. 145);
Attendu que le premier juge a écarté toute faute de conduite de l'administration communale au motif
qu'il n'est pas objectivement établi que le jour des faits elle avait été avertie de l'existence d'une
situation dangereuse dans la zone de l'accident et que l'état de la rue des Canadiens était imprévisible
pour tous;
Attendu que le dossier révèle que la période de l'année où se situe l'accident correspond aux travaux
d'épandage des engrais sur les champs, que les autorités de police en sont avisées et que, en l'espèce,
les voies d'accès à la société S., distributrice d'engrais, ont été nettoyées par le corps des pompiers
dépendant des pouvoirs communaux;
Attendu que ces éléments démontrent que l'intimée était au courant d'une situation de danger
persistant depuis un certain laps de temps et appelée à durer encore, à laquelle elle obvia, le 10 mars
1978, veille de l'accident, par des mesures appropriées;
Attendu que s'il n'est pas prouvé que, le jour des faits, son attention fut particulièrement attirée sur la
présence d'une couche de produit rendant la circulation aléatoire et dangereuse – dont l'importance
est attestée par la longueur de la prestation du nettoyage exécuté par les services de la protection
civile – il n'en reste pas moins qu'elle avait connaissance de l'état de glissance de la voirie et de son
caractère quasi constant;
Attendu qu'aucune circonstance objective ne suspendit son obligation de surveiller la voirie, ni
d'en assumer l'entretien, ni d'assurer la sécurité de passage sur son territoire: son devoir de
surveillance et de sécurité est permanent et n'est susceptible ni de suspension ni d'interruption, sauf
cas de force majeure;
Attendu qu'en s'abstenant de veiller à cette sécurité par des mesures appropriées, fût-ce par le
placement de panneaux de signalisation temporaire, l'autorité communale a failli à son devoir
général de prudence ou de précaution, abstention qui est en relation nécessaire de cause à effet avec
l'évènement dommageable et ses conséquences;
Attendu que les appelantes sont en droit de lui réclamer la réparation de leurs dommages respectifs;
Attendu que le montant de la réclamation de la compagnie d'assurances, subrogée aux droits de son
assurée, soit 137.697 F + 16.304 F (T.V.A.), ne fait l'objet d'aucune contestation;
Attendu que la somme de 26.044 F postulée par D., en son appel incident, est justifiée;
Attendu que compte tenu des éléments médicaux versés aux débats, il y a lieu d'allouer à titre
provisionnel à L. Fabienne la somme de 50.000 F, d'ordonner une mesure d'expertise médicale, de
surseoir à statuer sur le surplus de sa demande et d'en réserver les dépens;
1. QUESTION DE THEORIE :
- Quelle est la différence entre dol et faute lourde ? (Répondre en ¾ de page)
- Peut-on s’exonérer de son dol ou de sa faute lourde ? (Répondre en une page)
2. CASUS :
Inès Timable est âgée de dix ans. Non loin de chez elle, dans un parc communal arboré, une plaine
de jeux est aménagée. Lorsque le temps le permet, ses parents l’accompagnent et la surveillent
lorsqu’elle joue sur les jeux mis à la disposition des enfants. Outre des balançoires, toboggans et
autres bacs à sable, un trampoline est également installé. De forme rectangulaire, celui-ci est entouré
de filets de protection sur trois de ses côtés, pour éviter que les enfants ne chutent. Le côté laissé
libre autorise l’accès ; généralement, ses parents se placent à cet endroit pour la rattraper au cas où
elle perdrait le contrôle lors d’un saut. Par une chaude après-midi d’été, alors que ses parents
viennent de s’assoupir dans le parc, elle décide de se rendre à la plaine de jeux, pour perfectionner
ses pirouettes sur le trampoline. Après quelques sauts, elle prend de l’assurance. L’envergure de ses
sauts augmente de plus en plus et bientôt, elle ne peut plus contrôler la trajectoire. Elle se déporte
alors vers la partie du trampoline non protégée par un filet et chute lourdement sur le sol. Elle a la
jambe cassée et souffre de nombreuses contusions.
En son nom, ses parents décident de se retourner contre la commune gestionnaire de la plaine de
jeux et vous demandent conseil.