Le financement externe et les marchés ont pour fonction de
transformer les risques et de mieux permettre leur gestion
Commentaire du schéma intitulé « gestion et transformation des
risques»:
- En l’absence de financement par les marchés, l’entrepreneur assume
seul le risque lié à ses projets d’investissement, de développement… : il s’agit d’un risque de faillite personnelle (si l’entreprise est une société de personnes) et/ou d’insolvabilité de son entreprise si sa responsabilité est limitée à son apport (société de capitaux). Le risque est alors très élevé, car il est concentré entre les mains d’un seul agent économique (l’entrepreneur). Ce qui, par ailleurs, empêche le développement de l’entreprise (insuffisances de ressources).
- Si l’entreprise est une société par actions, le risque est partagé
entre les divers actionnaires ; les actionnaires peuvent « céder leurs risques » en re-vendant leurs actions sur le marché financier si elles sont cotées (« à la Bourse »), puisque les actions sont négociables sur le marché secondaire.
- Si l’entreprise émet par ailleurs des obligations (titres de
créance), le risque est à nouveau fractionné : entre actionnaires et désormais entre créanciers. La nature du risque (et les objectifs) des créanciers et des actionnaires sont d’ailleurs différents (en raison de droits de propriété différents, de possibilité de gains et de pertes différents…)
- Si l’entreprise se finance également par crédit bancaire (la banque
devient créancier de l’entreprise, comme les détenteurs d’obligations), il y a à nouveau partage du risque et changement de la nature de celui- ci : Le risque d’insolvabilité existe toujours, mais il est désormais pris en charge pour partie par la banque qui a prêté à l’entrepreneur : on parle d’un risque de (défaillance de la) contrepartie. Pour majeure partie, la banque s’est financée à court terme (auprès des déposants, en émettant des certificats de dépôt sur le marché monétaire, ou grâce à des emprunts entre banques, interbancaires) alors qu’elle octroie souvent davantage de crédits à plus long terme : elle doit alors gérer un risque de transformation des échéances (lié au fait que l’échéance moyenne du passif et de l’actif du bilan bancaire sont différentes). Quelle forme peut prendre ce risque : soit un risque de taux d’intérêt, soit un risque de liquidité : Le risque de taux d’intérêt provient notamment du fait que si les taux d’intérêt à court terme augmentent sur le marché monétaire, le coût des ressources de la banque augmentera aussi (car elle lève des fonds, se finance, sur ce marché). En revanche, si les crédits qu’elle a octroyés à plus long terme sont à taux d’intérêt fixe, les revenus qu’elle retirera de ces crédits n’augmenteront pas. Le coût de ses ressources (passif du bilan) augmentera, mais les revenus qu’elle tire de son activité de crédit (emplois, actif du bilan) n’augmenteront pas. Ce risque de taux d’intérêt est géré sur les marchés, grâce à divers produits financiers (obligations, contrats à terme…) – risque non étudié dans ce cours, ce serait l’objet d’un cours de gestion « actif-passif » Le risque d’illiquidité provient du fait que les créances, les crédits octroyés par la banque ne sont pas « mobilisables à court terme » (c’est-à-dire que la banque ne peut en obtenir le remboursement immédiat ou à très court terme) ; en revanche, une grosse partie des dettes de la banque est potentiellement remboursable à très courte terme (c’est le cas si l’ensemble des déposants venait retirer ses dépôts simultanément, ou si les créanciers interbancaires venaient à ne plus renouveler à la banque leurs prêts à court terme). Le risque d’illiquidité est donc le risque que la banque ne puisse « faire face à ses échéances de court terme » (c’est-à-dire ses dettes à court terme) : soit pour des raisons conjoncturelles, soit en raison du risque de contrepartie, c’est-à-dire parce qu’une partie des crédits qu’elle a octroyés est non recouvrable. De fait, les déposants subissent in fine ce risque d’illiquidité (cf : ruée aux guichets de la Northern Rock Bank en G.B en 2007, et plus récemment, les problèmes rencontrés par les banques islandaises) : quand des déposants prêtent à une banque (qui pourra octroyer des crédits) le risque est mutualisé entre eux, mais en contrepartie, ils courent potentiellement le risque que la banque ne puisse les rembourser (risque d’illiquidité). D’où la nécessité d’une réglementation adéquate (système d’assurance des dépôts, garantie d’Etat , cf. déclaration récente de plusieurs chefs d’Etat ou gouvernement) Enfin, les banques peuvent depuis quelques années se couvrir contre le risque de contrepartie, en « cédant le risque de défaillance du client » (c’est-à-dire de la contrepartie) : - en sortant les créances risquées de son bilan (technique de titrisation « cash ») - en gardant le crédit octroyé dans son bilan. Pour ce faire, elle va intervenir sur le marché des « dérivés de crédit » (assimilables à une technique d’assurance, mais reposant sur des instruments financiers cotés et négociables sur un marché).
Ces marchés de la titrisation et des dérivés de crédit étaient en
pleine expansion jusqu’à l’éclatement de la crise des « sub- primes ».
- - Par ailleurs, le marché financier peut également permettre le
transfert de ressources "dans l'espace" mais aussi "dans le temps" :
→ Un individu A veut mettre en « réserve » des ressources pour sa
retraite. Il acquiert des obl° émises par une E (sur le marché primaire), remboursables dans 20 ans : il y a transfert de ressources vers l'E, et dans le temps pour lui et l'Entreprise. Il peut s’il le désire revendre ses obligations (sur le marché secondaire) à un autre souscripteur potentiel et récupérer du « cash » (en acceptant néanmoins un risque de perte en capital On le voit, le marché du crédit, comme les divers marchés de capitaux ou les marchés « dérivés » permettent de fractionner les risques entre plusieurs agents, d’en changer la nature, et contribuent en théorie à mieux les gérer…même si l’histoire récente montre qu’il ne suffit pas de fractionner les risques ou de les diluer pour les rendre inexistants !