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Après la mort de Ben Laden,

l'avènement d'un « djihad sans leader » ?
Marc Becker
aintenant que Ben Laden qu'une source d'inspiration, d'autres

Pour le chercheur
à l'Institut français des
relations internationales
(Ifri), l'idéologie djihadiste
s'est suffisamment
répandue pour
qu'al-Qaida survive.
M
n'est plus, que peut-il
advenir d'al-Qaida ?
La mort ou l'arrestation
d'un leader n'est pas un
événement anodin
pour une organisation terroriste. Le Sentier
lumineux, le PKK, TIRA-véritable et Aum
Shinrikyo n'ont jamais réussi à se remettre
de la neutralisation de leur chef. Toutefois,
al-Qaida n'est pas une organisation terro-
riste comme les autres, et le décès de Ben
Laden n'entraînera pas sa fin immédiate.
Ce qui différencie al-Qaida des autres
<, groupes est sa vocation globale et son
degré de décentralisation. Depuis
le début de l'opération « Enduring
Freedom » en 2001, l'organisation
terroriste, soumise à une forte
pression, a été contrainte d'évoluer.
Des « filiales » ont eté créées en Irak,
au Maghreb et dans la péninsule
arabique, sans qu'U soit d'ailleurs
possible de connaître précisé-
ment la nature et la solidité des
liens unissant ces « filiales » à
« al-Qaida central ». Certains
analystes affirment qu'Oussa-
ma Ben Laden n'était guère plus
soutiennent qu'il conservait un rôle opéra-
tionnel. Il apparaît en tout cas qu'il n'était
pas en mesure de contrôler ce qui se passait
sur les différents « fronts » d'al-Qaida. Les
divergences de vues qui opposaient « al-
Qaida central » à Abou Moussab al-Zar-
qaoui en Irak sont à cet égard bien connues.
ussama Ben Laden devrait être rem-
placé par Ayman al-Zawahiri, même
si la transition n'est pas aussi simple qu'il y
paraît, l'allégeance (boy'a) personnelle au '
chef étant un élément structurant d'al-
Qaida et les mécanismes de succession
restant sujets à caution. Médecin d'origine
égyptienne, torture dans les prisons de
Moubarak suite à l'assassinat du président
Sadate et vétéran du djihad contre
les Soviétiques, al-Zawahiri est un vieux
compagnon de route du fondateur
d'al-Qaida. Principal idéologue de cette
organisation, c'est lui qui, en 2008, rédigea
un long document contredisant les argu-
ments avancés par un djihadiste repenti,
Sayyed Imam al-Sharif dit « Dr Fadl » .
Même si al-Zawahiri venait à son tour
à être tue, les opérations d'al-Qaida se
poursuivraient. Cela fait maintenant trois

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ans qu'est paru le livre Leaderiess/Stad Son
auteur, Marc Sageman, exphque que
l'idéologie djihadiste s'est suffisamment
répandue - notamment par l'intermédiaire
d'Internet-pourqu'ai Qaidapuissesum
vre sans commandement L'organisation
évoluerait ainsi vers un fonctionnement
acéphale, des cellules autonomes commet
tant sporadiquement des attentats
Cette vision correspond d'ailleurs a celle
Ben Laden a-t-il été " lâché " par les Pakistanais ?
Si oui, quelle a été la contrepartie du côté américain ?
d'un autre chef d'aï Qaida, Abou Moussab
al Souri, arrete au Pakistan en 2005
Le stade ultime de cette decentralisation
serait l'émergence de « loups solitaires »
agissant indépendamment de tout reseau
L a presence d'un sanctuaire est
la meilleure garantie de survie pour
une organisation terroriste Au cours des
dernieres annees, le Pakistan apparaissait
comme le « nouveau sanctuaire » d'al-
Qaida L'opération menée contre Oussama
Ben Laden montre que les Etats Unis sont
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capables d'agir a proximite de la capitale
Islamabad, et pas uniquement dans
les Zones tribales jouxtant la frontière avec
l'Afghanistan Ben Laden a-t il eté
« lâche » par les Pakistanais 7 Si oui, quelle
a été la contrepartie du cote americain ?
II est trop tôt pour repondre a ces questions
et cette operation conservera probable-
ment sa part d'ombre Quoi qu'il en soit,
de la réaction des responsables politiques et
militaires pakistanais dépendra, au moins
partiellement, la capacite de rebond
d'al-Qaida et de ses allies locaux Reste
aussi a sa\ oir quelle sera l'attitude des
Etats Unis Barack Obama pourrait être
tente de profiter de la mort de Ben Laden
pour sortir, la tete haute, de la zone « Af-
Pak » alors que les resultats de la guerre en
Afghanistan sont jusqu'à present mitigés
Un depart précipite de cette région pourrait
néanmoins s'avérer contre productif
Quitte a partir, autant faire en sorte de
ne pas avoir a v revenir avant longtemps
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Pakistan : les raisons d'espérer des chrétiens

Joseph Coutts
et Marc Fromager
ujourd'hui déchiré par

A
la corruption, l'intolérance
L'évêque de Faisalabad et la violence, le Pakistan
et le directeur ne multiplie pas les raisons
de croire en son avenir.
de l'Aide à l'Église en Pour la minorité chrétienne
détresse s'interrogent (1,5 % de la population), le tableau
est encore plus sombre. Y a-t-il
sur les conséquences encore place pour l'espérance ?
au Pakistan de la mort Dix ans après le ll septembre 2001,
Ben Laden redevient un cauchemar
de Ben Laden, pour les chrétiens du Pakistan : sa mort
notamment pour risque de provoquer un nouveau cycle
de violences en représailles contre eux.
la liberté religieuse Le gouvernement assumera-t-il
concrètement son rôle de protection ?
C'est la question posée aujourd'hui.
À vrai dire, les chrétiens
n'avaient pas besoin de
cette menace supplémen-
taire, étant déjà victimes
au quotidien de faits divers
tragiques, souvent liés à la
terrible loi antiblasphème,
véritable épée de Damoclès.
Les sections 295 B et C
du Code pénal pakistanais
prévoient là prison
à vie pour les offenses
faites au Coran
et la peine de mort
pour celles faites envers
Mahomet. Les minorités

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sont principalement concernées maîs
il y a également dè nombreuses victimes
musulmanes, a commencer par Salman
Taseer, le gouverneur du Pendjab,
assassine en janvier pour avoir émis
des reserves sur la pertinence de cette
loi Sa memoire mente d'être honorée,
comme artisan de paix et de justice
/"^ itoyens de seconde classe, au plus bas
vj de l'échelle sociale, les chrétiens
demeurent néanmoins particulièrement
vulnérables a cette menace L'actualité
résonne de leurs noms, que ce soit
Asia Bibi, mere de famille chrétienne
CC Ben Laden redevient un cauchemar pour les chrétiens
du Pakistan : sa mort risque de provoquer
un nouveau cycle de violences en représailles contre eux
injustement accusée de blasphème,
ou Shahbaz Bhatti, ministre catholique
des Minorités religieuses, tue le 2 mars
en raison de son opposition a cette loi
Maîs les violences antichretiennes
dépassent largement ces quèlques figures
emblématiques Chaque jour voit appa-
raître un nouveau cas et les autorites
semblent totalement impuissantes a
juguler cette violence que les groupes
extrémistes répandent, bénéficiant
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visiblement d'une forme d'impunité,
les réactions officielles étant souvent
bien faibles et tardives « Le silence
signifie une nouvelle effusion de sang »,
a-t-il été dit devant l'absence de
réaction des autorites après le meurtre
de Shahbaz Bhatti II est même question
de supprimer le ministere fedéral
pour les Minorités religieuses, poste
qu'occupait Bhatti, pour le décentraliser,
ce qui lui enlèverait toute efficacité
Ces dernieres annees ont été régulière-
ment ponctuées par des tragédies, telles
celle de Gojra le 28 août 2009, veritable
pogrom antichretien ou onze personnes
furent brûlées vives, dont deux enfants,
et cent maisons détruites II faudrait citer
également Shaziah Shaheen, jeune
domestique chrétienne de 12 ans, morte
en janvier 2010 apres avoir été violée,
battue, torturée (os casses, traces
de fer a repasser dans le dos, ongles
arraches ) Les médecins légistes ont
conclu a une mort par malnutrition
Devant de tels denis de justice, M» John
Joseph, alors éveque de Faisalabad, avait
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ete jusqu a se suicider devant la Cour
de Justice le 6 mai 1998 pour dénoncer
l'iniquité de cette loi Oui, les ténèbres
semblent I emporter, comme le Vendredi
Saint ou tout semble perdu, maîs
pour l'Eglise au Pakistan la résurrection,
même si elle se fait attendre, viendra
Tout d'abord le christianisme
ne recule pas au Pakistan Le nombre
de fidèles a augmente de maniere
significative ces dernières décennies,
en partie grace a des conversions
E nsuite, la societé civile se réveille
On peut citer le travail exemplaire
de la Commission des droits de I homme
du Pakistan, et d'un reseau plus récent,
« Citoyens pour la démocratie »,
qui comprend des groupes musulmans
et la Commission justice et paix
des eveques pakistanais
Enfin, il faut reconnaître que la majeure
partie de la population réfute cette
violence, malgre son silence contraint
et forcé A Gojra par exemple,
de nombreuses familles musulmanes
ont généreusement offert un refuge
aux chrétiens qui fuyaient leurs maisons
incendiées tandis que la foule les attaquait
Au delà du risque immédiat de repre
saules, la mort de Ben Laden pourrait
également démythifier cette violence
C'est du moins ce que nous espérons
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Ne négligeons pas la carte arménienne

Charles Aznavour,
Leven Sayan et
Charles Villeneuve l y a en France quèlques intellectuels liberticide puisque toute personne

Alors que le Sénat

examine aujourd'hui
le texte sur la question
du génocide,
trois défenseurs
I qui nous invitent à ne pas négliger la
carte turque dans notre réflexion sur
les révolutions du monde arabe, au
détriment de l'examen aujourd'hui
au Sénat d'un texte relatif à la sanc -
lion de la négation du génocide arménien
de 1915. Eux qui connaissent le sens
de l'Histoire préfèrent la carte turque
à l'éthique des droits de l'homme. C'est là
qui évoque publiquement le génocide
arménien est « possible de poursuites
judiciaires pour atteinte à la dignité turque ».
Rappelons-nous la récente condamnation
d'Orhan Pamuk, Prix Nobel de littérature,
par un tribunal turc pour avoir osé
dire la vérité sur la tragédie de 1915.
f~* e négationnisme n'est pas nouveau.
de la cause arménienne
le signe d'une mauvaise appréciation du vv Kémaliste ou islamiste, le régime turc
s'expriment. message des révolutions arabes, symboles le brandit comme étendard de sa puissance.
de justice, de dignité et de défense des Et il faudrait que la République française,
droits de l'homme contre l'humiliation bras armé de la justice des droits de l'hom-
des puissants et l'autorita- me, ferme les yeux sur cette hydre du mal
risme des États. au motif qu'il pourrait servir ses intérêts !
La Turquie n'est Les exemples tunisien, égyptien et libyen
, certes plus un État démontrent que la realpolitik finit toujours
-, autoritaire comme par mettre un genou à terre devant
r la Corée du Nord la puissance de la dignité humaine.
ou l'Iran. Mais, Sauf qu'en Turquie, la realpolitik a la
c'est un État dent dure. Rien n'a changé en dix ans dans
négationnis- la politique arménienne du gouvernement
te, dont la islamiste de l'ARP. En 2011, à deux reprises
diplomatie à Strasbourg, le tandem Gûl-Erdogan
repose sur a déclaré qu'il « n'y avait jamais eu
la négation de génocide ». Si une infime partie
du crime des de la société turque a osé ouvrir la boîte
crimes. C'est noire de « 1915 », le régime et la majorité
aussi un État des opinions s'en tiennent à la version

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officielle teintée d'ouvertures sournoises
à l'égard de l'Arménie, puisque cet hiver
encore, Ankara a lance la destruction du
monument de l'amitié turco arménienne,
érige a Kars, en face d'Erevan
Certes, la Turquie est plus forte
aujourd'hui qu'il y a vingt ans Pour quelles
raisons alors cette puissance émergente,
membre du G20, reconnaîtrait désormais
ce génocide, de surcroît lorsque ses nou
veaux partenaires - Russie, Iran, Chine
ne l'invitent pas a examiner son passé *>
La Turquie n'a pas tourne le dos a l'Europe,
elle s'est juste détournée des valeurs uni
verselles pour trouver refuge dans le camp
des contestataiies des normes internatio-
nales Le concept des droits de r homme
comme celui du génocide sont fondes
sur des criteres universels inspires par la
civilisation européenne contre la barbarie
Le deckn de l'Occident auquel nous
assistons se traduit pai une contestation
de ces normes Un vote négatif aujourd'hui
au Senat conforterait le camp de la
contestation des normes internationales
dont nous nous prévalons en France,
à commencer par le chef de l'Etat en guerre
en Libye pour les droits de l'homme
A ceux qui pensent qu'il est difficile
de se prononcer en faveur de cette
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proposition de loi au motif qu'il n'existe pas
de document officiel portant sur la réalité
de ce génocide, rapport oris-leur deux actes
officiels le 24 mai 1915, la France,
la Grande Bretagne et la Russie ont écrit a
la Turquie qu'elle devra « rendre des comp-
tes ald fm du conflit pour les cranes commis
contre les Arméniens » Le 10 août 1920,
le traite de Sevres mentionne le principe
de « crime contre l'humanité commis
par l'Etat ottoman contre les Arméniens »
Une expression qui servira de réference a
la Convention de 1948 pour la prevention et
la repression des crimes contre I humanite
L 5 heure est donc venue d'inviter
le Senat a voter en faveur de ce texte
au nom de la defense d'une conscience
universelle sans politiser l'affaire
Car la question arménienne a la noblesse
de réunir droite et gauche sur le terrain
des droits de l'homme Imaginons pour
umr quelle serait la réaction en France
si demain le president iranien, Mahmoud
Ahmadinejad négociait I arret de son
programme d'enrichissement nucleaire
contre entre autres une dejudiciarisation
de la négation de la Shoah 9 Y aurait il
un intellectuel en France prêt a écrire
« Ne négligeons pas la carte iranienne » ?